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1 (Mercredi 11 décembre 2002.)
2 (Audience publique.)
3 (L'audience est ouverte à 9 heures 03.)
4 (Le témoin, Mme Jeri Laber, est déjà dans le prétoire.)
5 (Contre-interrogatoire du témoin, Mme Jeri Laber, par l'accusé, M.
6 Milosevic.)
7 M. le Président (interprétation): Oui, Monsieur Milosevic, à vous.
8 M. Milosevic (interprétation): Dans le rapport présenté en septembre 1991
9 –je me réfère à la page 5, premier paragraphe-, il est dit: "Tous les
10 Croates ont expliqué la résurrection du nationalisme croate dans le
11 courant de l'année passée en disant que c'est une réaction à 45 ans de
12 répression communiste et d'hégémonie serbe." (Fin de citation.) Donc
13 l'hégémonie serbe a duré 45 ans; c'est ce qui figure dans le rapport.
14 Et dans le rapport du 9 janvier -page 1, paragraphe 3, au début de la
15 phrase-, vous parlez du règne de Tito et vous vous servez de termes "règne
16 dictatorial". Et dans la phrase suivante, vous parlez d'aspects
17 extrêmement répressifs de ce régime titoïsque.
18 Est-ce que cela signifie qu'à votre avis, en RSFY, Josip Broz Tito, le
19 décédé Président -je ne pense pas, pour ma part, qu'il s'agissait là d'un
20 régime de dictateur, de dictature-, eh bien, Josip Broz Tito avait exercé
21 pratiquement un pouvoir absolu?
22 Mme Laber (interprétation): Oui, c'était l'impression que j'avais, à
23 savoir qu'il avait exercé un pouvoir absolu, chose typique pour bon nombre
24 d'autres leaders communistes dans ces régions-là, à l'époque.
25 Question: Et vous savez de quelle nationalité était le décédé Président
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1 Tito?
2 Réponse: Je devrais savoir. Je crois bien le savoir, mais je n'en suis pas
3 sûre. Je pense qu'il devait être Croate, mais je n'en suis pas sûre.
4 Question: Par conséquent, il était Croate. Et comment peut-on parler
5 d'hégémonie serbe dans le pays alors que le pouvoir absolu était exercé
6 sur les autorités civiles et sur les autorités militaires par un Croate?
7 Réponse: Jusqu'à la période postérieure à la mort de Tito, moi-même et
8 beaucoup de gens dans le monde n'avions pas coutume de penser à la
9 Yougoslavie en fonction de nationalités ethniques; on pensait à la
10 Yougoslavie comme un pays peuplé de yougoslaves. Pour nous, Tito, c'était
11 un yougoslave. Pour moi, mes collègues, je les voyais comme des
12 Yougoslaves; eux aussi se percevaient comme des Yougoslaves. C'est
13 seulement au moment où il y a eu ce début d'ébranlement et de
14 démantèlement de la Fédération que ces questions très particulières ont
15 pris une telle importance; malheureusement, d'ailleurs.
16 Question: Nous n'accordions pas non plus une grande importance au fait de
17 savoir qui était de quel groupe ethnique. Mais savez-vous que, tout au
18 long de l'existence de la Fédération yougoslave, à savoir au fil de 47
19 ans, le poste de Président du gouvernement, de Premier ministre donc du
20 gouvernement fédéral pendant le demi-siècle écoulé, il n'y a eu qu'un seul
21 Serbe, et ce entre 1963 et 1967; il s'agissait de Petar Stambolic? Tous
22 les autres n'étaient pas des Serbes.
23 Réponse: Permettez-moi, Monsieur Milosevic, de revenir à votre question
24 liminaire. A ce moment-là, vous avez fait une citation de mon rapport et
25 vous avez dit quel était le sentiment des Croates eu égard à l'hégémonie
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1 serbe. Nous ne disions pas que c'était là un fait; nous essayions
2 simplement d'expliquer les comportements dont nous avons entendu parler,
3 ce que les gens disaient lorsqu'ils parlaient les uns des autres en tant
4 que groupe ethnique. Nous n'avions pas d'intention ni d'implications que
5 nous avions insérées dans ce rapport pour dire que c'était ce que nous
6 pensions -nous disions simplement que les Croates parlaient de longues
7 années d'hégémonie serbe; c'est comme ça qu'ils voyaient les choses-, pas
8 pour dire que c'était un fait.
9 M. Milosevic (interprétation): Mais c'est ce que vous avez placé dans
10 votre rapport, comme si cela avait été une raison. Et savez-vous que,
11 pendant les 40 et quelques années écoulées…
12 M. le Président (interprétation): Monsieur Milosevic, je pense que vous
13 vous trompez et là, c'est peut-être un dialogue de sourds. Mais ce que le
14 témoin dit, c'est que ce qui est indiqué dans le rapport, c'est le
15 résultat de ce qu'on leur a dit, comprenez-le. Non pas que ce soit là la
16 vérité ni quoi que ce soit d'autre; c'est simplement ce qui leur a été
17 raconté. Comprenez-vous cela?
18 M. Milosevic (interprétation): Oui, je comprends parfaitement. Seulement,
19 il s'agit ici de la création d'une image faussée. Et c'est partant de
20 cette image faussée, par la suite, qu'on affirme que les gens ont affirmé,
21 ont dit…
22 Savez-vous, Madame, qu'après la mort de Tito, donc au cours des dix
23 dernières années, donc entre 1982 et 1992, au poste de Président du
24 gouvernement fédéral, donc de Premier ministre, il n'y avait rien que des
25 Croates? Il y avait Milka Planinc, puis Branko Mikulic, un autre Croate de
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1 Bosnie et, en fin de compte, Ante Markovic?
2 Mme Laber (interprétation): Je n'ai pas le rapport sous les yeux, mais je
3 pense que nous avons dit quelle était la perception des Croates, d'après
4 leurs dires; mais aussi nous avons essayé d'expliquer ce que les Serbes
5 pensaient. Nous avons essayé, dans cette partie du rapport, d'expliquer
6 une situation très difficile pour des gens en dehors de la Fédération, en
7 dehors de l'Europe ou de ce pays, des gens aux Etats-Unis qui essayaient
8 de comprendre ce qui se passait. Et nous avons essayé d'avoir un langage
9 simple pour essayer d'expliquer la situation.
10 M. le Président (interprétation): Il faut soumettre au témoin une copie de
11 ce rapport. Il s'agit de l'intercalaire n°2, page 5.
12 Mme Laber (interprétation): Nous parlons ici du rapport de 1991?
13 M. le Président (interprétation): Oui.
14 M. Milosevic (interprétation): Puis-je continuer, Monsieur May?
15 M. le Président (interprétation): Attendez que le témoin ait retrouvé le
16 paragraphe pertinent. Il s'agit du rapport de septembre 1991. Normalement,
17 ça devrait être l'intercalaire 2, page 5, paragraphe 2.
18 Mme Laber (interprétation): Je l'ai trouvé.
19 M. le Président (interprétation): Poursuivez.
20 M. Milosevic (interprétation): Bien. Savez-vous que la Constitution de la
21 Yougoslavie prévoyait, entre autres, la chose suivante: s'agissant de la
22 composition des cadres de commandement et des positions de commandement et
23 hauts grades de la JNA, on avait appliqué le principe de la représentation
24 la plus équilibrée qui soit des différents groupes ethniques des
25 Républiques et des provinces autonomes. Et le principe avait été respecté,
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1 pour ce qui est de la composition de l'armée de cette Yougoslavie.
2 Et savez-vous qu'au moment où la crise en Yougoslavie…
3 M. le Président (interprétation): Laissez le temps au témoin de répondre!
4 Vous faites valoir ces points et jamais le témoin n'a le temps d'essayer
5 de répondre.
6 Est-ce que vous êtes au courant de cela, Madame Laber?
7 Mme Laber (interprétation): Je pense que la citation est correcte
8 s'agissant de la description de la Constitution. Je ne sais pas ce qu'il
9 en est de la composition effective de l'armée; ça c'est une autre
10 histoire.
11 M. Milosevic (interprétation): Mais savez-vous qu'au moment où la crise a
12 éclaté, le ministre de la Défense était un général, Veljko Kadijevic, qui
13 lui est originaire de Croatie?
14 Réponse: Je vous crois sur parole. Je ne connais pas cet homme
15 personnellement.
16 Question: Et savez-vous que le commandant de l'aviation de guerre et de la
17 défense antiaérienne était également -et là, je parle de l'élément le plus
18 sophistiqué de l'armée: au début de la guerre, c'était Antun Tus- un
19 Croate qui est passé dans l'armée de Tudjman. Mais à sa place est venu un
20 autre Croate du nom de Jurjevic. Savez-vous quelque chose au sujet de ces
21 faits-là?
22 Réponse: Je vous l'ai déjà dit: je n'avais pas coutume de penser à la
23 Yougoslavie en fonction de l'appartenance ethnique.
24 Question: Et savez-vous qu'en Yougoslavie, il y avait une obligation de
25 faire leur service militaire pour tous les hommes en âge de faire leur
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1 service, et la représentation était proportionnelle à la population. Donc
2 il s'agissait d'hommes, de personnes de sexe masculin et il fallait qu'ils
3 soient en âge de faire leur service. Mais on avait fait en sorte que
4 soient proportionnellement représentés tous les groupes ethniques. Le
5 saviez-vous ou pas?
6 Mme Laber (interprétation): Je ne suis pas experte pour ce qui est des
7 structures militaires ou de la structure de la République à l'époque.
8 M. Milosevic (interprétation): Et savez-vous que cette représentation
9 proportionnelle au sein de l'armée a été perturbée lorsque, seulement
10 lorsque les autorités nouvellement élues en Croatie et en Slovénie ont
11 convié, par sécession violente, les Croates et les Slovènes à ne pas aller
12 faire leur service, alors que les officiers des groupes ethniques croates
13 et slovènes ont été conviés à quitter la JNA et à rejoindre les rangs de
14 ces armées illicites dans ces Républiques. C'est par la suite la même
15 chose qui a été, le même système qui a été appliqué par Alija Izetbegovic,
16 le leader musulman en Bosnie-Herzégovine?
17 M. le Président (interprétation): Si vous n'êtes pas en mesure de répondre
18 à cette question, je pense que c'est une façon tendancieuse d'examiner
19 l'histoire. Qu'est-ce que ceci a à voir avec la déposition du présent
20 témoin, Monsieur Milosevic?
21 M. Milosevic (interprétation): Eh bien, étant donné que le rapport dit
22 quelque chose au sujet du régime de dictature, puis qu'il parle de
23 l'hégémonie serbe, pouvons-nous en conclure que la référence faite à
24 l'hégémonie serbe, quelle qu'elle soit, compte tenu des faits que j'ai
25 avancés, peut servir de motif pour la manifestation d'un nationalisme
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1 croate et des intentions sécessionniste? Ne s'agissait-il pas là de la
2 recherche de prétextes essentiellement, parce que les faits sont en train
3 de dire tout à fait le contraire de ce que dit ce rapport?
4 M. le Président (interprétation): Il est impossible pour ce témoin de
5 répondre. Elle est ici uniquement pour dire que c'est là ce que beaucoup
6 de Croates ont donné comme explication aux auteurs de ce rapport. Quant à
7 savoir si c'est exact ou pas, je suppose que ce sont des questions qu'il
8 faudra ou peut-être pas trancher. Pour ce qui est de l'histoire, c'est une
9 question sur laquelle il ne faut pas trancher. Mais…
10 Un instant, s'il vous plaît. Tout ce que ce témoin peut dire, c'est ce qui
11 se trouve dans ce rapport, effectivement ce qui leur a été rapporté. Quant
12 à savoir si ces dires sont exacts ou pas, le témoin ne saurait se
13 prononcer. Inutile de poser des questions à ce propos. Ici, c'est ce qui
14 est présenté comme étant l'avis de nombreux Croates.
15 M. Milosevic (interprétation): C'est précisément de cela que je parle,
16 Monsieur May, à savoir que moyennant une sélection d'informations placées
17 dans le rapport, on crée une image et cette image se trouve être faussée.
18 C'est de cela qu'il s'agit.
19 Mais revenons-en à un autre aspect de ce rapport du 9 janvier. Vous citez
20 que la partie croate s'était employée en faveur d'une sécession. Dans le
21 même rapport vous dites que la partie serbe en Croatie était sous
22 l'emprise de la Serbie et de moi-même -je cite-: "La Serbie et moi-même
23 aurions convié les gens, propagé la cause pour préserver une Yougoslavie
24 unique"; je me réfère à la page 2 paragraphe 4.
25 Et ma question est la suivante: est-ce que cette propagation des
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1 invitations à la préservation de la Yougoslavie, n'était-ce pas là la
2 sauvegarde d'une situation qui était conforme au droit international et
3 conforme à la Constitution de la Yougoslavie de l'époque? Est-ce que vous
4 en étiez consciente ou pas?
5 Mme Laber (interprétation): Vous parlez de la page 2, paragraphe 4? C'est
6 bien ce que vous avez dit?
7 Question: Oui, c'est ce que vous dites dans votre rapport du 9 janvier.
8 Je vous dis ce que j'ai cité, à savoir que "la partie croate avait été
9 favorable à une sécession et que les autorités de Serbie et moi-même
10 étions favorables à la sauvegarde de la Yougoslavie". Bien sûr que j'étais
11 favorable à la sauvegarde de la Yougoslavie; la chose n'est pas contestée
12 du tout. Mais ma question avait été celle de savoir si vous êtes
13 consciente du fait qu'il s'agissait là de la préservation d'une situation
14 juridiquement fondée sur le droit international et sur la Constitution
15 yougoslave de l'époque?
16 Réponse: Vu sous votre angle, c'est ce que vous prôniez; ça ne fait pas
17 l'ombre d'un doute. Vous vouliez préserver, maintenir la Yougoslavie. Je
18 vous l'ai dit hier, je ne suis pas disposée à parler d'une détermination
19 des nations à vous dire si c'était une sécession légitime ou pas de la
20 part de la Croatie; ceci dépasse mes compétences. Je ne peux en parler.
21 Question: Oui, mais savez-vous -et là, je vous citerai l'article 237 de la
22 Constitution de la RSFY qui disait ce qui suit, je cite- que
23 "l'inaliénable droit… Il est le droit inaliénable et le devoir des peuples
24 et des minorités nationales de Yougoslavie, des travailleurs, des citoyens
25 que de protéger, de défendre l'indépendance, la souveraineté, l'intégrité
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1 territoriale et les frontières prévues déterminées par la Constitution de
2 Yougoslavie ainsi que l'ordre social qui y est prévu".
3 C'est ce qui figure à la Constitution et c'était là le devoir de tous les
4 citoyens que de protéger l'intégrité territoriale de ce pays-là. Est-ce
5 que vous avez connaissance de la chose ou pas?
6 Mme Laber (interprétation): Monsieur Milosevic, ceci dépasse mes
7 compétences; je ne saurais en discuter aujourd'hui.
8 M. Milosevic (interprétation): Bon. Mais vous parlez des droits, vous
9 traitez des droits de l'homme à un niveau des plus éminents. C'est la
10 raison pour laquelle nous parlons de droit, justement.
11 Savez-vous que le code pénal de Yougoslavie qualifie de délit le plus
12 grave celui de…
13 M. le Président (interprétation): Je dois vous interrompre parce que c'est
14 vraiment une perte de temps pure et simple. Si vous n'avez pas d'autres
15 questions pertinentes à poser, nous allons mettre un terme à cet
16 interrogatoire. Examinez l'Acte d'accusation: chef n°1. C'est là-dessus
17 que porte ce procès ici. Nous ne devons pas nous livrer à des discussions
18 érudites sur la Constitution. Allez-y!
19 M. Milosevic (interprétation): Monsieur, j'étais en train de citer un
20 rapport où il est question des efforts que nous avions déployés pour
21 sauvegarder la Yougoslavie et les efforts des Croates pour faire
22 sécession. Donc si l'on tient compte des faits que je viens de citer,
23 pouvons-nous en déduire que ces efforts en faveur de la préservation de la
24 Yougoslavie ne traduisaient pas seulement nos souhaits et notre volonté,
25 mais également une obligation constitutionnelle, alors que les efforts
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1 déployés en faveur d'une sécession constituaient un délit pénal.
2 M. le Président (interprétation): Le témoin n'est pas là pour répondre à
3 cette question. C'est une question qu'il nous faudra peut-être trancher
4 nous, en temps utile, mais il ne revient pas sua témoin d'en parler.
5 Passez à autre chose, s'il vous plaît. Il y a dans ce rapport ou dans les
6 rapports des éléments qui susciteront peut-être des questions valables,
7 mais votre temps s'épuise.
8 M. Milosevic (interprétation): Mais, Monsieur May, je ne m'en tiens qu'aux
9 rapports que le témoin a présentés et je les compare à la situation
10 réelle. Je pense donc que les questions que je pose sont tout à fait
11 légitimes. Mais nous allons revenir aux rapports.
12 M. le Président (interprétation): Oui, posez des questions qui ont trait
13 aux rapports, sans aucun doute, mais ne commencez pas à vous lancer dans
14 des débats constitutionnels qui sont hors de portée du témoin.
15 Est-ce que l'accusation va appeler à la barre un expert en matière
16 constitutionnelle, qui va nous parler de cela? Un instant, Monsieur
17 Milosevic.
18 M. Nice (interprétation): Nous allons avoir un expert en Constitution et
19 aussi en histoire. Rappelez-vous, dès le début, Me Tapuskovic l'avait dit:
20 on attendait de lui un rapport; il avait qu'il faudrait qu'un historien
21 vienne parler des questions historiques. Est-ce que nous aurons le temps
22 d'entendre tous ces témoins? Ça, c'est peut-être une autre paire de
23 manches, mais nous avons effectivement l'intention de citer de tels
24 témoins.
25 M. Milosevic (interprétation): Nous sommes en train de parler ici des
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1 Droits de l'homme et ceci serait faire à des droits, des droits d'ordre
2 vital pour l'homme. Dans votre rapport du mois de janvier -page 2,
3 paragraphe 4, dernière phrase-, vous dites que "la JNA, à savoir l'armée
4 populaire yougoslave, avait une orientation pan-yougoslave très puissante.
5 Ne vous semble-t-il pas normal que l'armée populaire yougoslave, qui avait
6 le devoir constitutionnel de protéger l'Etat yougoslave, ait eu une
7 orientation yougoslave? Quel est l'orientation que vous voudriez qu'elle
8 ait pu avoir à l'époque?
9 Mme Laber (interprétation): Monsieur Milosevic, vous n'avez de cesse de
10 citer des éléments qui sont en fait de la section intitulée "Contexte -
11 Introduction". Ce ne sont pas des déclarations qui sauraient être
12 contestés; ce sont des explications destinées aux lecteurs qui ne
13 connaissent pas nécessairement la situation. Là, ce n'est pas le corps
14 même du rapport. Nous pouvons maintenant ergoter sur telle ou telle
15 tournure de phrase, mais ce qui compte, c'est le corps du rapport; et là,
16 on parle de violations graves de Droits de l'homme. Et c'est complexe.
17 M. Milosevic (interprétation): Oui, mais ici se pose une question: si
18 telle était l'orientation -comme vous dites- pan-yougoslave de l'armée
19 populaire yougoslave, comme vous l'indiquez vous-même, alors elle ne peut
20 pas être pro-serbe cette armée. Comprenez-vous que ces deux choses-là
21 s'excluent mutuellement?
22 Mme Laber (interprétation): Je pense que vous essayez de m'attirer dans le
23 type de polémique que je voudrais éviter aujourd'hui.
24 M. Tapuskovic (interprétation): Messieurs les Juges, je voudrais dire
25 qu'il s'agit d'un document qui est versé au dossier comme élément de
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1 preuve. Peut-être cela n'est-il pas pertinent, mais il se peut que la
2 Chambre fonde des positions qui seront les siennes sur ce qui figure dans
3 ce rapport. Si ceci est présenté comme un élément de preuve, il me semble
4 que cela devrait également faire l'objet du contre-interrogatoire, parce
5 que cela pourrait éventuellement servir de fondement au jugement qui sera
6 prononcé par les Juges.
7 M. le Président (interprétation): Tout à fait, Maître, mais, vous savez,
8 un contre-interrogatoire doit être pertinent. Et pour ce qui est de la
9 base ce de ce rapport, ce qui compte ici, ce sont les exactions, les abus
10 dont ce rapport parle; c'est là-dessus que la Chambre doit trancher, devra
11 trancher. Mais le témoin dit à juste titre que l'accusé essaie de
12 l'entraîner dans une querelle constitutionnelle qui est en dehors de sa
13 compétence et qui est une perte de temps. Je pense que l'accusé doit
14 déterminer la façon dont il utilise son temps; s'il le gaspille, tant pis.
15 Cela veut dire que ce temps s'écoule. C'est à lui de décider, mais je ne
16 vais sûrement pas demander au témoin de s'engager dans ce type de
17 polémique.
18 Poursuivez, Monsieur Milosevic.
19 M. Milosevic (interprétation): Monsieur May, je me réfère exclusivement
20 aux documents qui sont versés au dossier, moyennant comparution de ce
21 témoin. Je ne cite pas de documents autres, je ne me réfère pas à des
22 documents autres, si ce n'est ce qui figure dans les rapports du témoin
23 ici présent.
24 Ma question suivante est celle-ci: peut-on conclure qu'en vertu du droit
25 international et du droit interne, l'aspiration légale des autorités
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1 serbes et de la population serbe en Croatie en Croatie se trouvait être
2 conforme aux options légales prises par la JNA en faveur de la sauvegarde
3 de la Yougoslavie et de ses obligations qui étaient celles de protéger, de
4 défendre l'intégrité territoriale du pays? Est-ce que c'est là une chose
5 que l'on peut déduire partant de ces faits incontestables?
6 Mme Laber (interprétation): Je n'ai pas l'intention de répondre à cette
7 question et, refusant d'y répondre, cela ne veut pas dire que je marque
8 mon accord ou mon désaccord avec vous. Je pense que ceci est hors de
9 propos, que ce n'est pas ma place ici, ni mon propos, d'en discuter avec
10 vous.
11 M. le Président (interprétation): Nous allons délibérer pour savoir s'il
12 faut mettre un terme à ce contre-interrogatoire, parce que ceci est une
13 perte du temps consacré au Tribunal et à cette Chambre.
14 (Les Juges se concertent sur le siège.).
15 Fort bien. Poursuivez, Monsieur Milosevic.
16 M. Milosevic (interprétation): Dans vos rapports, avez-vous tiré une
17 conclusion qui serait celle qui dirait que les autorités serbes, les
18 autorités de la JNA, d'une part, et les autorités croates qui avaient été
19 favorables à une sécession inconstitutionnelle, avaient-ils donc, ces
20 Serbes, été traités par ces autorités comme étant des ennemis? Est-ce là
21 une question à débat ou pas?
22 M. le Président (interprétation): Ne répondez pas ou dites simplement: je
23 ne saurais répondre.
24 Mme Laber (interprétation): Il m'est impossible de dire ce qui se trouvait
25 à l'esprit ou dans l'esprit des autorités croates.
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1 M. Milosevic (interprétation): Bon. Mais dans une partie de votre rapport
2 de ce 9 janvier 1991, vous avez décrit les activités de la police de
3 Croatie, qui avaient visé à confisquer les armes à la police régulière, à
4 la Défense territoriale, notamment en Croatie, là où la population serbe
5 était majoritaire: est-ce que c'était là quelque chose qui avait pour
6 visée d'éliminer l'un des segments de la défense, à savoir les forces
7 armées de Yougoslavie prévue par la Constitution, là où la population
8 était favorable à la sauvegarde de l'intégrité territoriale du pays, chose
9 qui était également conforme à la Constitution?
10 Mme Laber (interprétation): Comme le dit le rapport, l'intention
11 manifestée des autorités croates, c'était d'entamer une opération
12 généralisée consistant à enlever les armes de tous les postes de police
13 dans tout le pays. J'ai l'impression qu'en premier lieu, du moins au
14 départ, ils se sont concentrés sur les régions où il y avait une
15 population serbe. Je pense que c'était un acte de provocation.
16 Et d'après notre expérience, là où nous avons pu trouver des preuves, la
17 police essayait de maintenir l'ordre public. Les policiers nous ont dit
18 avoir reçu des instructions consistant à ne pas créer de violence.
19 A l'époque, à ce moment-là, il y avait beaucoup de tensions: les deux
20 côtés avaient des soupçons. La police croate avait peur que les Serbes ne
21 leur prennent les armes; ces postes de police étaient sur la défensive. Il
22 y avait un manque de confiance. Il y avait une certaine propagande venant
23 de la Serbie qui attisait ces idées de guerre, de persécution et qui
24 instillait ses idées dans l'esprit de gens fort simples, qui avaient vécu
25 pendant des décennies en profonde harmonie avec leurs voisins et, pour
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1 qui, il importait peu de savoir si leurs voisins étaient Croates, Serbes
2 ou Musulmans.
3 Je pense que cette ambiance, ce climat était créé non pas par les
4 personnes, mais par le gouvernement, par les deux gouvernements concernés.
5 C'est ce qui a entraîné l'effusion de sang.
6 Question: Eh bien, c'est une explication plutôt douteuse.
7 Si je vous cite ce qui figure à l'intercalaire 1 page 6 de votre rapport
8 -et tout est en anglais, vous pouvez facilement suivre; je me réfère au
9 premier paragraphe complet de cette page 6-, vous dites "qu'ils étaient
10 venus ramasser les armes et qu'il y avait des manifestants serbes". Puis
11 vous dites que "les Serbes qui avaient connu des souffrances terribles
12 entre les mains des fascistes croates, pendant la Deuxième Guerre
13 mondiale, croyaient apparemment que la saisie des armes les placeraient à
14 la merci du gouvernement croate."
15 "Une peur aggravée par le fait que la saisie des armes au départ a été
16 effectuée par des unités de police spéciale uniquement constituées de
17 Croates, unités qui avaient été assemblées et formées à la hâte
18 apparemment. Ils se trouvaient surtout dans des villages ou des villes à
19 majorité serbe. La minorité serbe a donc vu cette saisie comme étant un
20 désarmement ciblé et non pas comme une mesure neutre prise par un
21 gouvernement, sur une base générale et non ethnique, destinée à diminuer
22 le nombre d'armes, etc."
23 Mme Laber (interprétation): Mais c'est précisément ce que je viens de
24 dire, me semble-t-il, en répondant à votre question précédente. Je ne vois
25 pas de discordance entre ce que vous venez de lire maintenant et ma
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1 réponse. Je pense que les deux gouvernements ont pris position, ont pris
2 des mesures qui forcément allaient attiser les troubles, allaient
3 provoquer la peur de la population.
4 Question: Oui, mais maintenant cette pratique dont vous parlez et les
5 appréhensions afférentes à cette pratique-là, si vous les mettez en
6 corrélation avec les constatations que nous avons faites hier et
7 s'agissant de ce qui venait des sommets des autorités croates, à savoir
8 qu'on avait affirmé de leur part que cet Etat croate indépendant avait été
9 l'expression des aspirations historiques les plus éminentes du peuple
10 croate, si vous mettez en corrélation le retour de l'immigration croate et
11 si vous mettez en corrélation le rétablissement des symboles de l'Etat, de
12 cet Etat oustachi de l'époque, ne vous semble-t-il pas que la peur de la
13 population croate s'était justifiée à un moment où on les privait de leur
14 égalité en droit au niveau de la Constitution? Et on voulait les priver en
15 même temps des armes, armes qui avaient été prévues par cette Constitution
16 fédérale comme éléments de la défense et qui faisaient d'eux l'un des
17 segments de la défense populaire généralisée de la RSFY? C'est là chose
18 contestable pour vous ou pas?
19 Réponse: Je ne conteste pas ce que vous dites, mais permettez-moi
20 d'indiquer qu'à ce moment-là, au moment même où nous essayions de voir ce
21 qu'il en était dans les villages serbes où il y avait saisie des armes par
22 les policiers croates juste auparavant, il y avait eu parmi la population
23 ou la minorité serbe de Croatie, un référendum officieux. Ils disaient
24 qu'ils ne voulaient pas faire partie d'un Etat croate séparé. Et dans la
25 zone de Knin, ils avaient déjà pris les armes: ils s'emparaient d'un
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1 territoire qu'ils avaient occupé.
2 Par conséquent, si l'on voit ce moment de l'histoire, il est justifié ou
3 il y a de bonnes raisons pour que chaque côté soit méfiant par rapport à
4 l'autre. C'est ce que nous essayions d'expliquer lorsque nous parlions du
5 statut ou de la situation des Serbes et de celle des Croates.
6 Question: Vous vous efforcez d'établir une symétrie entre ceux qui avaient
7 perpétré des crimes et les victimes, mais, s'il vous plaît, je voudrais
8 attirer votre intention sur la page 8 du même intercalaire.
9 Tout au bas de page, vous dites: "Cependant nous pensons qu'une force
10 excessive a été utilisée par la police croate, notamment dans le village
11 de Dvor na Uni. On a des raisons de croire que leur intention était
12 d'intimider la population serbe, mais aussi de les forcer à appliquer les
13 ordres donnés en vue du rassemblement des armes. Et même si cette mesure a
14 été présentée comme faisant partie d'un programme général de sécurité
15 publique, tout du moins au début de la programmation de ce programme,
16 l'essentiel des ordres donnés par le gouvernement semblait s'appliquer aux
17 seuls villages serbes." (Fin de citation.)
18 Réponse: Mais quelle est votre question? Je ne comprends pas. Là, vous
19 reprenez mes termes et je suis d'accord avec ce que j'ai dit. Vous pouvez
20 les sortir de leur contexte. Je pense effectivement qu'à l'époque, il y
21 avait une espèce de symétrie.
22 Question: Je n'ai rien sorti du contexte. Je ne peux pas vous lire
23 l'intégralité de ce rapport, mais c'est à peu près dans ce sens qu'il est
24 établi. Je vous en prie, lorsque nous lisons que "dans les territoires où
25 la population serbe était majoritaire, le fait de prendre les armes à la
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1 police de réserve", je suppose que vous savez que les autorités croates
2 ont justifié ceci par un grand pourcentage de Serbes au sein de la police.
3 Alors, je vous demande s'il y a quelque chose d'anormal à voir que, dans
4 les territoires où les Serbes constituent la majorité de la population -je
5 dirais même une énorme majorité de la population-, est-il anormal que la
6 police soit constituée d'une majorité de Serbes également? Y a-t-il
7 quelque chose d'anormal ou d'illogique dans cela?
8 Réponse: Pas nécessairement. En tout cas, je n'ai pas de raison de
9 discuter cela.
10 Mais je crois que nous sommes en train de discuter d'une situation qui
11 était sur le point de devenir une guerre ouverte. Au moment où je me
12 trouvais là-bas, j'ai constaté la présence d'une grande peur et d'une
13 grande détresse, des deux côtés. Je parle de l'attitude manifestée par la
14 population serbe comme par la population croate, à l'époque. Et je n'ai vu
15 aucun effort déployé, ni par votre gouvernement ni par celui de Tudjman,
16 pour alléger ces inquiétudes. Il apparaissait que les deux parties étaient
17 en train de générer quelque chose qui allait déboucher sur une guerre
18 ouverte.
19 Question: Ecoutez, tenons-nous-en aux faits.
20 Réponse: Je vous en prie.
21 Question: Puisque vous vous occupez de Droits de l'homme, de situations
22 sociales, etc., je vous demande si le fait d'être un policier constitue un
23 privilège particulier sur le plan social?
24 Réponse: Non.
25 Question: Peut-être considérez-vous que la République de Serbie ou un
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1 représentant du Gouvernement de la République de Serbie est responsable du
2 fait que, dans les territoires de Croatie qui étaient majoritairement
3 peuplés par les Serbes, la majorité des policiers étaient également
4 d'origine serbe? Est-ce que vous contestez ce fait, un fait qui a existé
5 pendant de très nombreuses années?
6 Réponse: Je n'ai pas enquêté sur la structure des forces policières
7 pendant toutes ces années. Je n'ai aucune raison de contester ce que vous
8 dites, mais je ne sais pas si c'est exact ou pas.
9 Question: Mais dans votre rapport du 9 janvier 1991, là où vous dites
10 précisément que vous êtes l'auteur du rapport, vous parlez du fait que les
11 policiers ont accompli leurs actions la nuit ou dans les premières heures
12 de la matinée, qu'ils étaient exclusivement Croates, qu'ils ne portaient
13 pas un uniforme adéquat, qu'ils étaient, comme vous le dites vous-même,
14 très bien entraînés et armés jusqu'aux dents. Ne considérez-vous pas que
15 ceci suffit à provoquer la peur de la population serbe?
16 Réponse: Je pense que c'était une très bonne raison pour que les Serbes
17 aient peur et que ceci était dû au fait que Belgrade leur disait qu'ils
18 étaient attaqués.
19 Question: Mais dans votre rapport, page 8, le rapport du 9 janvier, je
20 lis: "Cependant, le Gouvernement croate semble avoir utilisé une force
21 exagérée pour intimider les villages serbes en exécutant les ordres de les
22 rassembler." (Fin de citation.)
23 Alors, comment est-il possible que, dans votre déclaration du 4 au 7 mars,
24 en page 3, vous affirmiez que "la peur des Serbes était en fait due à la
25 propagande diffusée par la radio serbe"? Répondez à cette question, je
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1 vous prie: comment est-ce possible?
2 Réponse: Les choses qui existaient à l'époque existaient effectivement.
3 Nous disons également dans ce rapport que nous avons interviewé des
4 policiers croates et que, même si leurs méthodes semblaient exagérées par
5 rapport à la mission qui était la leur, ils nous ont dit qu'ils étaient de
6 simples policiers -et ils n'avaient aucune raison de mentir sur ce point-,
7 qu'ils avaient des ordres stricts leur intimant de ne provoquer la
8 violence d'aucune manière. Peut-être s'attendaient-ils à ce que la
9 violence éclate et est-ce pour cela qu'ils étaient lourdement armés? Mais
10 la situation était une situation d'escalade et la peur et la tension
11 existaient des deux côtés.
12 Question: Savez-vous que le 17 juin 1991, le Parti des droits croates a
13 publié ce qu'il est convenu d'appeler la déclaration de Lipjan, qui
14 appelait à une nouvelle indépendance de l'Etat croate aux frontières Est
15 notamment, c'est-à-dire sur la ligne où l'on trouve Subotica et les
16 localités qui l'entourent, ainsi que la baie de Kotor? Autrement dit,
17 leurs prétentions consistaient à se saisir de tout le territoire de
18 Bosnie-Herzégovine, d'une grande partie de la Serbie et d'une partie du
19 Monténégro également? Est-ce que vous êtes au courant de cela?
20 Réponse: Je ne sais rien de cela.
21 Question: Intercalaire 3; regardez ce que vous avez écrit, page 5.
22 Vous dites: "Grubisno Polje et d'autres villages de Slavonie
23 occidentale…". Je dois donner lecture de ce passage pour l'opinion
24 publique, car toute l'opinion publique connaît les terribles atrocités qui
25 ont été commises contre la population serbe là-bas. Voilà ce que vous
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1 écrivez; vous dites donc, entre autres, que l'agence de presse "Tanjug" a
2 accusé les Croates… Mais je vais vous lire exactement ce qui est écrit.
3 (En anglais): Je cite: "A accusé les Croates d'avoir commis des crimes de
4 guerre contre les Serbes de la région près de la ville de Grubisno Polje,
5 en Croatie. Ces allégations ont fait l'objet d'enquêtes de la part des
6 membres de la Communauté européenne dans le cadre d'une mission de
7 surveillance qui a découvert que les forces serbes, et pas les forces
8 croates, étaient coupables d'exécutions sommaires et de destruction de
9 biens civils dans ce secteur."
10 Le rapport conclut: "Nous avons découvert des preuves de crimes qui
11 étaient commis par les forces serbes pendant deux ou trois mois pendant
12 lesquels ils ont contrôlé cette zone particulière de Slavonie occidentale.
13 "Notre équipe n'a trouvé aucune preuve d'assassinats commis par la suite,
14 ni de destruction systématique de biens serbes par la garde nationale
15 croate ou les Croates de ce secteur". (Fin de citation.)
16 Je vous ai présenté un fait de notoriété publique à savoir que 193
17 villages serbes ont été détruits en Slavonie occidentale et il a été
18 répandu que mes chiffres étaient inexacts. Or les forces croates ont
19 détruit uniquement 163 villages serbes selon ce qui a été dit ici, ce qui
20 m'a été répliqué.
21 Alors, avez-vous quelque chose à ajouter au sujet de ces faits, au sujet
22 de ces chiffres relatifs aux crimes commis en Slavonie occidentale et dont
23 vous parlez dans un rapport du genre de celui que vous avez rédigé au
24 sujet des prétendus crimes commis par les Serbes à cet endroit?
25 Réponse: Vous citez un passage d'un rapport de l'Union Européenne qui a
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1 été établi par des membres de la Communauté européenne, alors que, pour
2 notre part, nous établissons nos rapports après envoi d'une délégation sur
3 place. Je ne peux pas comme cela, sans aucune vérification répondre à ce
4 que vous me dites au sujet des chiffres que vous venez de citer. Je suis
5 sûre qu'il y a des gens qui sont en possession de ces chiffres et je
6 devrais m'adresser aux membres de mon organisation pour voir s'ils
7 connaissent davantage de détails.
8 Question: Bien, très bien. Je vous ai cité les dispositions relatives à la
9 composition des forces armées de Yougoslavie.
10 Savez-vous qu'après l'opération au cours de laquelle des armes ont été
11 saisies à la Défense territoriale de Krajina, la grande opération suivante
12 de la part des autorités croates sur le plan militaire a consisté à siéger
13 et attaquer les casernes de la JNA, de l'armée populaire yougoslave, qui
14 se trouvaient sur ce territoire depuis plus de 50 ans, je veux dire en
15 Croatie? Savez-vous cela?
16 Réponse: Oui, je le sais. Je ne qualifierai peut-être pas cela de la même
17 façon que vous, mais je sais que la JNA était stationnée là-bas et je
18 crois que le Gouvernement croate a cherché à manifester sa compassion vis-
19 à-vis de la de minorité serbe.
20 Question: S'agissant de la population serbe qui a pris les armes au cours
21 du conflit en Croatie, vous parlez de ces personnes en tant que rebelles
22 et vous dites, en page 6 paragraphe 2 de votre déclaration aux enquêteurs
23 de ce Tribunal, qu'il s'agit de forces paramilitaires, d'unités
24 paramilitaires. Alors, au vu du fait que ces forces, comme vous le dites
25 vous-même dans votre rapport du 9 janvier 1991, s'efforçaient de préserver
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1 l'unité de la Yougoslavie, considérez-vous qu'il s'agissait de forces
2 légales ou illégales?
3 Réponse: Les forces paramilitaires, à mon avis, sont des forces illégales:
4 leurs actes sont tout à fait clairement illégaux. Ce sont des forces qui
5 commettent des crimes terribles, qui n'ont rien à voir avec le
6 comportement militaire, y compris des exécutions sommaires, du pillage de
7 propriétés privées, et ce y compris en franchissant la frontière de la
8 Serbie; ce qui implique que ces forces bénéficiaient de la coopération,
9 sinon en tout cas de la compréhension, au moins des gardes frontaliers
10 serbes pour le moins. Ce sont des forces paramilitaires et, selon les
11 documents qui existent, ces forces ont commis des exactions tout à fait
12 importantes contre la population civile.
13 Question: Avez-vous la moindre information quant au fait que ce sont dans
14 les opérations dues à l'armée croate que les exactions les plus graves ont
15 été commises, au cours desquelles des milliers de personnes ont été tuées
16 et des centaines de milliers de personnes expulsées de Croatie? Avez-vous
17 lu le rapport de David Bainder de 1993, où il est dit que des dizaines de
18 villages ont été dynamités en Krajina, plus de 10.000 maisons serbes
19 dynamitées et que la Croatie est devenue le pays le plus pur sur le plan
20 ethnique en Europe?
21 Si vous n'avez pas examiné les chiffres et les faits sur le terrain, je
22 vous y incite et je vous invite à lire le "New York Times" et cet article
23 de David Bainder.
24 Mme Laber (interprétation): Je ne conteste pas le fait que des exactions
25 graves ont été commises par tous les participants du conflit. Nous avons
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1 essayé d'être équilibrés par rapport à tout cela.
2 Vous appelez mon attention sur ce qu'ont fait les Croates et je ne
3 conteste pas ce fait. Je dis simplement que des crimes ont été commis par
4 le Gouvernement serbe, par la JNA en tout cas, qui était contrôlée par le
5 Gouvernement serbe à l'époque, et que la grande majorité des crimes commis
6 semblaient être dus à une intervention extérieure plus qu'a l'intervention
7 du Gouvernement croate, même si les actes commis des deux côtés
8 constituent des crimes.
9 M. Milosevic (interprétation): Vous n'avez pas une seule donnée qui vous
10 permette de confirmer que quelque chose a été fait de l'extérieur. Il est
11 question de Serbes qui se révoltent en Croatie et je vous ai cité les
12 dispositions de la Constitution yougoslave; je vous ai montré qu'il y
13 avait obligation de préserver l'intégrité territoriale et je vous indique
14 qu'on trouve également la disposition suivante -je cite-: "Tout citoyen
15 qui, par les armes ou d'une autre manière, intervient contre ceux qui
16 attaquent les membres des forces armées de la RSFY…" (Fin de citation.)
17 Est-ce que, si vous examinez les choses sur le plan juridique -puisque
18 vous vous occupez de Droits de l'homme sur le plan juridique également,
19 n'est-ce pas?-, est-ce que cela veut dire que les gens qui défendaient
20 l'intégrité territoriale de la Yougoslavie -or c'est l'une des tâches
21 principales de tout citoyen aux termes de la Constitution de la RSFY-,
22 est-ce que donc toute personne agissant de la sorte ne faisait pas partie
23 des forces armées yougoslave légales?
24 M. le Président (interprétation): Monsieur Milosevic, je vais vous
25 interrompre. Cette question ne doit pas être posée au témoin. Peut-être
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1 est-ce une question sur laquelle nous aurons à nous prononcer en temps
2 utile.
3 Votre temps est pratiquement écoulé, mais nous vous accordons encore cinq
4 minutes.
5 M. Milosevic (interprétation): Monsieur May, je me suis efforcé au maximum
6 de réduire mon contre-interrogatoire. Je peux vous dire très sincèrement
7 que j'ai renoncé à pas mal de questions, car, compte tenu du grand nombre
8 de rapports, il faudrait plusieurs journées pour faire la clarté de tout
9 ce qui est dit dans des rapports de ce genre, rapports qui soutenaient en
10 fait une campagne anti-serbe à l'époque.
11 Mais j'ai encore quelques points à discuter avec le témoin. Je suppose que
12 vous m'accorderez le droit de poser ces questions.
13 Madame, dans votre rapport de septembre 1991, vous écrivez -je cite-: "En
14 mai 1991, la garde populaire a été créée pour servir d'armée de la
15 République".
16 Et dans la note de bas de page n°25, nous lisons ce qui suit: "La garde
17 populaire ne fait pas partie des forces policières, et ce faisant, elle
18 n'est pas sous le contrôle du ministère de l'Intérieur. La garde populaire
19 créée il y a trois mois à peu près sert plutôt d'armée croate et répond
20 devant le Gouvernement croate. Mais pendant le déroulement des combats
21 avec les insurgés serbes -comme vous les appelez-, la garde populaire ou
22 garde nationale, et la police croate ont travaillé main dans la main".
23 (Fin de citation.)
24 Nous avons déjà, vous l'avez d'ailleurs cité, le texte de Tudjman qui
25 appelle toute la population croate à se soulever pour défendre
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1 l'indépendance. Donc si nous tenons compte des dispositions de la
2 Constitution yougoslave et des éléments que vous avez cités pour votre
3 part, pouvez-vous me dire, je vous prie, où se trouvent ces forces
4 illégales et paramilitaires dont vous parlez? S'agit-il des forces qui
5 défendent la Yougoslavie et ses dispositions constitutionnelles, ou des
6 forces qui incitent à la sécession violente?
7 Mme Laber (interprétation): Selon ces documents, les exactions commises
8 par ces forces paramilitaires illégales -je veux parler des forces qui
9 venaient de Serbie- étaient particulièrement odieuses; je veux parler de
10 ce qui est évoqué dans nos rapports.
11 J'ajouterai que je n'accepte absolument pas votre sous-entendu selon
12 lequel nous avons instigué un sentiment anti-serbe: ce n'était en aucun
13 cas l'intention que nous poursuivions.
14 Nous nous sommes toujours efforcés d'être aussi équilibrés que possible,
15 lorsque c'était possible, et nous ne sommes pas responsables du fait que
16 la grande majorité des crimes aient été commis par des soldats sous votre
17 commandement.
18 M. Milosevic (interprétation): Je dois renoncer à certaines questions,
19 mais poursuivons.
20 Dans ce même rapport, vous déclarez que, bien que la présidence ait été
21 l'organe suprême du pouvoir yougoslave, j'étais la personne qui décidait
22 que faire partie de cette présidence n'avait guère d'importance. C'est ce
23 que vous avez affirmé.
24 Or, ici, devant cette institution, des témoins sont venus déposer -cela ne
25 peut être contesté- et ont parlé donc de cette rencontre du 12 au 14 mars
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1 1991, rencontre de la présidence qui s'est déroulée pendant deux jours. Au
2 cours de cette réunion de la présidence, celle-ci, en tant qu'organe
3 suprême du pouvoir et en sa qualité de commandement suprême des armées, a
4 rejeté la proposition de l'état-major, du grand état-major qui proposait
5 d'augmenter le niveau de préparation au combat de la JNA en raison de la
6 dégradation de la situation politique et de la sécurité dans le pays.
7 Pouvez-vous répondre à ma question, je vous prie: n'est-ce pas un fait en
8 contradiction complète avec ce que vous prétendez puisque vous dites que
9 c'est moi qui prenais toutes les décisions? Que pensez-vous donc de cette
10 décision de s'opposer à la proposition du grand état-major, donc du
11 commandement suprême du pays, en s'opposant à des ordres venant sans doute
12 de moi, alors que le fait demeure que cette proposition d'élever le niveau
13 de préparation au combat de l'armée a été rejetée, la demande étant faite
14 en raison d'une dégradation de la situation? Lors de cette même rencontre
15 de la présidence yougoslave, vous dites donc que c'est moi qui commandais
16 exclusivement et seul l'armée?
17 M. le Président (interprétation): Pouvez-vous répondre à cette question?
18 Mme Laber (interprétation): Je n'étais pas présente à cette réunion. La
19 seule chose que je peux dire, c'est que l'impression générale de personnes
20 informées de la situation à l'intérieur et à l'extérieur de la
21 Yougoslavie, à ce moment-là, était que des ordres venaient de Belgrade et
22 que ces ordres venaient de vous et pas de la présidence.
23 Indépendamment de ce qui s'est passé lors de cette réunion, j'aimerais
24 vous demander ce qui s'est passé dans la pratique?
25 M. Milosevic (interprétation): Mais alors, répondez à ma question: si
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1 j'avais le contrôle de la JNA, comment est-il possible que je n'aie pas pu
2 influer sur cette décision d'augmentation de son état de préparation au
3 combat? Comment cela serait-ce possible?
4 Réponse: Est-ce que vous écoutiez les décisions? Est-ce que vous obéissiez
5 aux décisions prises? Je n'en sais rien!
6 M. Milosevic (interprétation): Très bien. Avançons!
7 Dans votre déclaration du 4 au 7 mars, vous parlez du déplacement de la
8 population non serbe de Baranja. Nous avons ici entendu un témoin qui a
9 dit que "personne n'avait jamais chassé un habitant de Baranja pour
10 partir, qu'on les appelait même à revenir". C'était un témoin de Tudjman
11 et pas un témoin à moi.
12 Vous parlez donc du déplacement de la population non serbe et vous dites
13 que, dans la région, des Serbes, qui avaient fui la Slavonie occidentale
14 en novembre, se sont installés. Je vous cite. Vous dites: "20.000 Serbes
15 avaient fui la Slavonie occidentale et je trouve cela tout à fait
16 regrettable. Même une seule personne qui s'enfuit pour des raisons
17 d'appartenance ethnique constitue un événement regrettable."
18 Mais ma question est la suivante: est-il possible que, dans votre
19 déclaration et dans votre lettre, vous vous disiez préoccupée uniquement
20 par la population non serbe en raison de l'installation dans cette région
21 de personnes venant d'ailleurs, alors que les personnes qui étaient
22 parties ne l'avaient pas fait pour d'autres raisons que parce qu'elles
23 avaient peur pour leur sort personnel? Et elles étaient au nombre de
24 20.000?
25 Vous ne vous intéressez aucunement aux raisons qui les ont fait fuir. Vous
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1 dites simplement qu'à Baranja vont s'installer, selon vos propres
2 dires,...
3 M. Nice (interprétation): Cette question est absolument ingérable! On peut
4 se demander d'ailleurs s'il s'agit d'une question. Et la première phrase
5 risque d'induire le témoin en erreur: on peut se demander si elle est
6 exacte.
7 M. le Président (interprétation): Monsieur Milosevic, c'est votre dernière
8 question. Aimeriez-vous la reformuler de façon à ce que le témoin puisse
9 la comprendre? C'est votre dernière question; votre temps est épuisé.
10 M. Milosevic (interprétation): Donc vous ne m'autorisez à poser qu'une
11 seule question encore?
12 M. le Président (interprétation): Oui.
13 M. Milosevic (interprétation): Mais, dans ce cas, je dois aborder un sujet
14 en page 8, Madame, de votre déclaration du Procureur, paragraphes 3 et 4.
15 Vous déclarez que j'ai refusé de remettre à cette institution trois
16 officiers de la JNA accusés d'avoir tué 200 personnes à Vukovar et que je
17 n'ai donc pas respecté mes obligations internationales. Parlez-vous ici
18 des obligations créées par le statut de cette institution adoptée par le
19 Conseil de sécurité des Nations Unies en 1993?
20 Mme Laber (interprétation): Est-ce que vous parlez de ce Tribunal?
21 Question: Oui.
22 Réponse: Non, le Tribunal n'existait pas au moment où nous vous avons
23 envoyé la lettre.
24 Question: Mais considérez-vous que le fait de dire que les Etats membres
25 du Conseil de sécurité des Nations Unies sont tenus de remplir les
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1 décisions de l'Assemblée Générale, seulement si celles-ci sont conformes
2 aux dispositions de la Charte des Nations Unies? Est-ce vrai ou pas?
3 Réponse: Je crois que vous m'engagez dans une question de droit
4 international, encore une fois.
5 M. Milosevic (interprétation): Estimez-vous que l'institution où nous nous
6 trouvons, celle devant laquelle vous témoignez en ce moment est conforme
7 aux dispositions de la Charte des Nations Unis?
8 M. le Président (interprétation): Ceci n'a vraiment rien à voir avec des
9 sujets auxquels le témoin pourrait répondre.
10 Maître Tapuskovic, vous avez la parole.
11 (Question de l'amicus curiae, M. Tapuskovic, au témoin Mme Jeri Laber.)
12 M. Tapuskovic (interprétation): Merci, Monsieur le Président.
13 M. Milosevic (interprétation): Je regrette, Monsieur May, que vous ne
14 m'accordiez pas encore quelques minutes, car j'avais encore des questions
15 très importantes.
16 M. Tapuskovic (interprétation): Monsieur le Président, dans tout ce que
17 l'accusation a proposé à titre d'éléments de preuve liés à la déposition
18 de ce témoin, j'aimerais demander au témoin quelques explications
19 complémentaires au sujet de ce que l'on peut lire dans l'intercalaire 4 de
20 la pièce 359. Il s'agit de ce document manuscrit et écrit de la main de
21 Mme Jeri Laber.
22 Madame Jeri Laber, j'aimerais vous poser une question. J'ai lu ce document
23 et moi, tout comme ma collègue, nous nous sommes rendu compte que, de la
24 page 8 à la page 34, donc 27 pages… Ou plutôt, pour mieux formuler ma
25 question, je dirai que l'on trouve immédiatement après la page 8 page 34.
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1 Comment pouvez-vous expliquer l'absence de toutes ces pages dans ce
2 document? Avez-vous remis l'intégralité du document au Procureur, toutes
3 les pages de ce document? Et comment expliquez-vous que toutes ces pages
4 manquent?
5 Mme Laber (interprétation): C'est très facile à expliquer. Il y a eu deux
6 rencontres et, entre les deux, nous avons fait autre chose; ces deux
7 rencontres ne se sont pas déroulées l'une après l'autre.
8 En page 2, il est question de la rencontre avec M. Pujic, M. Petrovic et
9 le général Vojvodic. Et au début de la page 34, vous verrez qu'il est
10 question du ministère des Affaires étrangères; donc c'est le début d'une
11 nouvelle série de notes prises par moi.
12 J'ai l'intégralité de mes notes à la maison, mais je n'ai pris avec moi
13 ici que celles qui portaient sur des rencontres officielles; car chaque
14 fois que je parlais avec quelqu'un, je prenais des notes à la main dans ce
15 carnet.
16 Est-ce que c'est clair pour vous?
17 Question: Mais dans ces pages, on trouve peut-être quelque chose qui
18 pourrait être utile à M. Slobodan Milosevic. Pourquoi est-ce que vous
19 n'avez pas remis l'intégralité du document au Procureur, de façon à ce
20 qu'il soit remis également aux Juges?
21 Réponse: C'est parce que mes notes qui faisaient sans doute plusieurs
22 centaines de pages, qui était le fruit de rencontres avec des gens de la
23 région, avec des gens de la mission, avec des journalistes, il y avait
24 beaucoup d'éléments de nature confidentielle et qui n'avaient sans doute
25 aucun rapport avec ces réunions-ci en particulier. On m'a demandé de
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1 fournir mes notes, notes complètes, ce que j'ai fait ici, mais ce sont les
2 notes des réunions officielles que j'ai eues à Belgrade, lors de ma
3 visite.
4 La première réunion est concernée par les pages 2 à 8; il n'y a rien qui
5 manque. Et la deuxième réunion, elle commence à la page 34; et vous avez
6 une numérotation tout à fait constante jusqu'à la page 36. Donc moi, je ne
7 vois pas la moindre disparité.
8 M. Tapuskovic (interprétation): Merci.
9 Messieurs les Juges, je n'ai plus de questions à poser sur ce sujet.
10 Mais pour poser des questions supplémentaires à ce témoin, je vais
11 demander qu'on vous remette un document, Madame, un document que j'ai reçu
12 comme étant élément à décharge, en application de l'Article 68.
13 Le premier document porte la cote 013998 et il y a aussi une autre partie
14 de ce document qui porte la cote 013999; ça, c'est le numéro ERN. C'est un
15 document.
16 Il y en a un autre qui porte la cote ERN 00113625.
17 Le troisième document, lui, porte la cote ERN 00289306. Je n'aurais qu'un
18 seul point à évoquer en rapport à ce document.
19 M. le Président (interprétation): Mais quels sont ces documents, s'il vous
20 plaît? Pourriez-vous nous expliquer quelle est leur nature?
21 M. Tapuskovic (interprétation): Ce sont les documents, Monsieur le
22 Président, que nous avons reçus en vertu des dispositions de l'Article 68,
23 des éléments à décharge qui sont très importants.
24 M. le Président (interprétation): Oui, mais pourriez-vous nous dire quel
25 est leur en-tête, ce qu'ils représentent, quelle est leur nature?
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1 M. Tapuskovic (interprétation): Ceci est en rapport avec des enquêtes
2 menées par Mme Laber pour ce qui est des viols de Musulmanes, de Serbes et
3 de Croates. C'est donc un document ou une question des plus importantes,
4 questions qui se trouvent dans l'Acte d'accusation. Et ceci nous donne une
5 idée de la méthode utilisée par l'organisation de Mme Laber; c'est un fait
6 très important et je pense que madame peut déposer à ce propos.
7 M. Nice (interprétation): Si l'ami de la Chambre veut produire le document
8 dans le cadre de la déposition d'un témoin, il faut donner des copies.
9 Nous n'avons pas tous ces documents dans notre chariot: impossible de le
10 trouver.
11 M. le Président (interprétation): Oui. Avez-vous un exemplaire de ce
12 document?
13 M. Tapuskovic (interprétation): Oui.
14 M. le Président (interprétation): Examinons ce document et ensuite nous
15 pourrons le remettre au témoin.
16 (Intervention de l'huissier.)
17 (Les Juges se concertent sur le siège.)
18 M. Tapuskovic (interprétation): Ce sont surtout les deux derniers
19 documents qui m'intéressent.
20 Le premier document contient une déclaration faite par Mme Laber.
21 M. Kwon (interprétation): Maître Tapuskovic, pourquoi ne pas faire
22 suffisamment de photocopies à l'avance, à l'avenir, dans ce genre de
23 situation?
24 M. Tapuskovic (interprétation): Je le ferai mais, vous savez, c'est une
25 pièce qui m'a été remise il y a deux jours. Croyez-moi, il a fallu que je
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1 les fasse traduire; ça n'a pas été facile du tout. Mais vous constaterez
2 que ceci est d'une pertinence extrême, surtout en ce qui concerne les deux
3 derniers documents.
4 M. le Président (interprétation): Oui, vous pouvez soumettre ce sujet au
5 témoin. On pourra peut-être poser le document sur le rétroprojecteur de
6 façon à ce que tout le monde puisse en prendre connaissance.
7 M. Nice (interprétation): Merci beaucoup, Monsieur le Président. Je ne
8 vais pas vous importuner davantage. Je pourrai aborder les questions
9 lorsque le document se trouvera sur le rétroprojecteur.
10 M. le Président (interprétation): Madame Laber, veuillez examiner ce
11 document qui va être posé sur le rétroprojecteur et qui va apparaître à
12 votre écran. Si vous voulez y jeter un coup d'œil de plus près, bien sûr,
13 vous pourrez le prendre.
14 Mais quelle sera votre question à propos de ce document, Maître
15 Tapuskovic?
16 Mme Laber (interprétation): Je ne suis pas en mesure de voir.
17 M. Tapuskovic (interprétation): Madame Laber peut-elle confirmer le fait
18 qu'elle a travaillé sur le terrain et qu'elle a mené des enquêtes en
19 rapport avec des viols?
20 Mme Laber (interprétation): Je ne vois pas très bien. Est-ce qu'il est
21 possible d'agrandir l'image que j'ai à l'écran?
22 M. le Président (interprétation): Il est peut-être plus simple que vous
23 examiniez le document sur le rétroprojecteur qui se trouve à votre gauche.
24 Mme Laber (interprétation): Merci.
25 Excusez-moi. Pourriez-vous pouvez vous répéter votre question, Maître?
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1 M. Tapuskovic (interprétation): Voici quelle était ma question: vous
2 l'avez déjà dit, vous avez participé à des enquêtes portant sur le crime
3 du viol sur le territoire de l'ex-Yougoslavie?
4 Réponse: C'est exact.
5 Question: Une des raisons qui ont poussé votre organisation à exiger des
6 sanctions s'est basée sur le rapport que vous avez fait en matière de
7 viols?
8 Réponse: C'est exact.
9 Question: Etant donné que vous avez mené des enquêtes sur des cas de viol,
10 viol notamment de femmes serbes, est-ce que vous avez exigé que des
11 sanctions soient, du coup, imposées aussi à la Croatie?
12 Réponse: Je ne pense pas qu'on ait du tout parlé de sanctions dans ce
13 contexte.
14 Question: Merci. Madame Laber, je vais vous demander d'examiner deux
15 autres documents que vous avez rédigés et qui se trouvent dans le même
16 document. Vous sautez deux pages et vous allez trouver deux documents que
17 vous avez établis ou dont vous êtes l'auteur.
18 Réponse: Un instant, s'il vous plaît. Une première chose: je ne reconnais
19 aucun de ces documents. En quoi consiste le premier? Je vois le titre:
20 "Les contre-vérités de la Bosnie" ou "bosniennes".
21 Question: Ce document, c'est un rapport que vous avez dressé après avoir
22 reçu le témoignage des victimes.
23 Réponse: On parle du document du début?
24 Question: Non, non.
25 Réponse: C'est une citation inexacte. Je ne sais pas d'où elle vient.
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1 Question: Je vous demande ceci: veuillez sauter deux pages, ou du moins…
2 Et puis, à ce moment-là, vous allez trouver le document que vous, vous
3 avez rédigé.
4 Réponse: C'est exact. Oui, ceci vient d'un article que j'ai écrit dans la
5 "New York Review of Books". C'était intitulé: "La Bosnie, des questions en
6 matière de viol".
7 Question: C'est un document que vous avez rédigé à partir d'un entretien
8 avec une femme serbe qui était une victime de viol, n'est-ce pas?
9 Réponse: J'ai écrit un article dans lequel se trouvaient des interviews
10 avec plusieurs femmes dont, je pense, trois femmes serbes qui avaient été
11 victimes. Mais il y avait aussi des interviews avec des femmes croates et
12 musulmanes de Bosnie.
13 Question: Je ne sais pas si vous êtes en mesure de le voir clairement.
14 Après avoir interviewé un témoin, on vous donne le nom de la victime, de
15 la personne, son âge. Bien sûr, je ne vais pas mentionner le nom de cette
16 personne, ce n'est pas nécessaire. Et cette femme vous a dit qu'elle était
17 prête à dire ce qu'elle disait devant des caméras de télévision, qu'elle
18 avait été violée par sept Croates, qu'elle avait perdu connaissance et que
19 sa cousine de 9 ans, elle aussi, avait été violée. Est-ce que vous avez
20 parlé à cette femme?
21 Réponse: Oui.
22 Question: Si vous, vous avez parlé à cette femme, vous avez toutes les
23 données qui sont ici consignées et ceci pourrait être utilisé dans le
24 cadre de procès intentés ici, puisque vous avez utilisé la même méthode
25 d'interview que celle utilisée par les enquêteurs du Tribunal?
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1 Réponse: Oui. Et c'est quoi, votre question?
2 M. Tapuskovic (interprétation): Ce que vous avez recueilli des victimes,
3 c'est quelque chose que vous avez entendu vous-même, personnellement?
4 J'estime que ce type de témoignage peut-être des plus utiles puisque c'est
5 vous qui avez entendu ceci de la bouche même des victimes?
6 Mme Laber (interprétation): Oui.
7 M. le Président (interprétation): Oui, le témoin est d'accord avec ce que
8 vous dites. Vous avez d'autres questions, Maître?
9 M. Tapuskovic (interprétation): Voici ce que j'aimerais savoir: dans tous
10 les autres cas qui ont servi de base à votre rapport, est-ce que vous avez
11 des documents similaires à celui-ci dont vous vous êtes servi comme base
12 de rapport?
13 Mme Laber (interprétation): Maintenant, vous parlez du rapport portant sur
14 le viol ou des rapports en général? Question: En général, les rapports que
15 vous établissiez, votre poste, la fonction qu'avait votre organisation
16 comme elle est représentée ici dans ces rapports.
17 Réponse: Ce n'est pas inhabituel, sauf que, dans beaucoup de cas, nous
18 n'avons pas le nom de la personne concernée. Ici, vous avez des victimes
19 serbes qui ont été portées à notre connaissance par une commission
20 officielle du Gouvernement serbe, commission s'occupant des crimes de
21 guerre; ils nous ont présenté des témoins qui étaient prêts à parler
22 ouvertement, publiquement, qui étaient prêts à donner leur nom et qui
23 n'avaient pas de réticence à la perspective de voir ces noms utilisés.
24 Bien sûr, dans d'autres cas, nous avons des documents exactement
25 similaires à celui-ci, mais ce n'est pas toujours le cas. Quelquefois,
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1 nous n'avons pas le nom véritable de la personne qui ne veut pas livrer
2 son identité; quelquefois, nous avons ce nom, mais nous ne l'utilisons pas
3 dans un rapport officiel parce que nous nous engageons à ne pas publier ce
4 nom.
5 Question: Merci. Madame Laber, revenons, si vous le voulez bien, au
6 premier document.
7 Réponse: Oui.
8 Question: C'est un article de journal et vous faites une déclaration dans
9 cet article. Je voudrais vous demander si vous avez fait cette
10 déclaration. A gauche, vous verrez, ou plutôt à droite pour vous, il y a
11 une rubrique parlant de mensonges ou contre-vérités ou fausses
12 accusations. Et, de l'autre côté, on voit les contre-vérités bosniennes à
13 propos du viol. Tout ceci est rejeté. Le viol est devenu une partie
14 intégrale d'une propagande vicieuse en décembre 1992. On accuse les Serbes
15 d'avoir violé 50.000 femmes musulmanes de Bosnie dans les camps où elles
16 étaient détenues. N'est-ce pas ce que dit l'article?
17 Et puis, pour décembre, "Newsweek" dit "qu'en Bosnie, il y a eu
18 pratiquement autant de victimes de viol". Et puis, il y a un projet de
19 rapport du Conseil de l'Europe qui se fonde sur des sources émanant de
20 l'Allemagne et qui parle de "20.000 femmes musulmanes violées".
21 Et puis, on dit ceci: le "New York Times" et d'autres publications
22 profèrent des accusations selon lesquelles "les soldats serbes ont reçu
23 l'ordre de violer". Vous souvenez-vous de cela?
24 Réponse: Je me souviens de tout ce climat qui régnait à l'époque,
25 effectivement.
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1 Question: Nous arrivons aux faits qui sont mentionnés. Au nom de la Croix-
2 Rouge internationale, M. Phillip Miserez dit qu'il n'y a aucune preuve de
3 l'existence de tels camps, présente ou passée. Et puis, il y a votre
4 déclaration à vous. Amnesty International dit qu'il n'y a pas de preuve –
5 c'est répété- et lorsqu'un journaliste de la NBC, Peter Jennings, demande
6 s'il y a des membres de l'armée serbe qui ont reçu l'ordre de se livrer à
7 des viols, Jeri Laber, à la tête de Helsinki Watch, a répondu: "Il n'y a
8 pas la moindre à l'appui de ces allégations."
9 Est-ce bien ce que vous avez dit?
10 Et, dans le cadre de votre travail, du travail effectué par votre
11 organisation, avez-vous effectivement établi qu'il n'y a pas la moindre
12 trace de preuve à l'appui de ceci?
13 Réponse: Dans notre travail, nous avons déterminé qu'il y a eu des viols
14 généralisés par les deux parties au conflit, qu'il y a eu des victimes
15 serbes, des victimes croates, des victimes bosniennes, autant de victimes.
16 Et j'ai interviewé des femmes de chacune des trois nationalités.
17 A l'époque, notre organisation s'inquiétait de l'augmentation
18 spectaculaire des chiffres qui dépassaient peut-être les faits. On a parlé
19 de 50.000 viols; diverses organisations ont présenté ces chiffres. Et je
20 crois que lorsque j'ai parlé à M. Jennings à la télévision, j'ai essayé de
21 dire clairement qu'il y avait effectivement beaucoup de viols, mais qu'il
22 était erroné d'exagérer ces chiffres parce que ceci risquait, en fait,
23 d'enlever toute crédibilité à ce rapport.
24 Question: Mais ce n'est pas la question que je vous ai posée, Madame
25 Laber, excusez-moi.
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1 Voici ce que je vous demande: je vous pose une question à propos de cette
2 déclaration qui est d'une importance centrale pour ce procès et pour ces
3 Juges. Vous avez fait une déclaration pour savoir si les membres de
4 l'armée serbe ont reçu l'ordre de se livrer à des viols et vous répondez,
5 au moment où Jennings vous pose la question, vous dites "qu'il n'y a pas
6 de preuve à l'appui ou pour corroborer le fait qu'on aurait donné de tels
7 ordres de violer à l'armée".
8 C'est bien ce que vous avez dit, n'est-ce pas?
9 Réponse: Cette déclaration est sans doute véridique. Je n'avais pas de
10 preuve que les ordres auraient été donnés; cependant j'avais des preuves
11 qu'il y avait eu effectivement des viols commis.
12 Question: Et ça c'est au autre chose.
13 Cependant ceci va être ma dernière question. Vous savez qu'après cela, la
14 commission des Nations Unies chargée des crimes de guerre a refusé
15 d'accepter ces statistiques et les fonctionnaires du Conseil de l'Europe
16 ont condamné de façon véhémente de telles accusations, les rejetant.
17 Rappelez-vous que ce soit aussi bien les représentants du Conseil de
18 l'Europe que ceux des Nations Unies, eh bien, ils ont condamné ces
19 chiffres qui ne correspondaient pas à la vérité.
20 C'est bien cela, n'est-ce pas? Ils ont condamné fermement ceci?
21 Réponse: Je trouvais, moi-même, que ces chiffres étaient exagérés, mais
22 j'aurais voulu que vous apportiez comme élément de preuve l'article, que
23 moi-même j'ai écrit et auquel il est fait référence dans ce document. Dans
24 cet article, effectivement, j'ai décrit des camps, des lieux de détention
25 de ces femmes, des lieux où elles ont été violées. J'ai dit qu'il était
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1 difficile de croire que ce type d'activités auraient pu être effectuées
2 par des soldats serbes sans la complicité tacite des officiers qui étaient
3 leurs responsables, et sans doute des personnes qui les commandaient. Bien
4 sûr, je ne pourrais pas vous montrer un ordre écrit qui dirait précisément
5 qu'ils ont reçu l'ordre de le faire.
6 M. Tapuskovic (interprétation): Oui, mais vous avez dit quelque chose de
7 tout à fait différent. Vous avez dit que vous n'aviez aucune preuve de ce
8 genre. Je n'ai plus de question.
9 M. le Président (interprétation): Je vous remercie.
10 (Interrogatoire principal supplémentaire du témoin, Mme Jeri Laber, par M.
11 Nice.)
12 M. Nice (interprétation): J'ai quelques questions à poser.
13 M. le Président (interprétation): Voulez-vous d'abord poser des questions
14 à propos de ces documents, sinon on pourra y revenir?
15 M. Nice (interprétation): J'ai une question qui découle de cela, mais pas
16 à propos des documents mêmes.
17 M. le Président (interprétation): On peut donc remettre les documents.
18 L'huissier va le faire.
19 M. Nice (interprétation): Vous avez sur vous les articles auxquels vous
20 faites référence, notamment pour les questions de viol?
21 Mme Laber (interprétation): C'est dans la Chambre de mon hôtel, je n'ai
22 pas cet article sur moi ici.
23 M. Nice (interprétation): En temps utile, on pourra peut-être demander le
24 versement de cette pièce en temps utile. Et je pense qu'on pourra
25 attribuer une cote. C'est une question qui s'impose puisqu'elle découle
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1 des questions posées par l'amicus.
2 M. le Président (interprétation): Oui, nous allons donner une cote
3 d'identification et puis une cote définitive.
4 M. Nice (interprétation): Je pourrais peut-être l'obtenir à la fin de
5 l'audience d'aujourd'hui, sinon ce sera disponible mercredi.
6 Mme Anoya (interprétation): Ce sera la pièce de l'accusation 316160.
7 M. Nice (interprétation): Nous allons commencer les questions par la fin.
8 Nous allons commencer par les questions abordées aujourd'hui pour passer
9 ensuite aux questions d'hier.
10 A votre connaissance, l'accusé a-t-il pris la moindre mesure pour traduire
11 en justice ceux qui étaient nommés comme étant responsables du massacre de
12 Vukovar?
13 Mme Laber (interprétation): Je n'ai pas connaissance qu'il l'aurait fait.
14 Question: S'agissant de la question de la différence entre ses
15 responsabilités à lui, les responsabilités fédérales, il y a un passage
16 d'une lettre du chef de cabinet, M. Goran Milinovic. Mis à part cette
17 lettre du chef de cabinet Goran Milinovic, est-ce qu'il y a des éléments
18 selon lesquels l'accusé était la personne dotée d'autorité à laquelle vous
19 pouviez vous adresser, à laquelle vous vous êtes adressée effectivement?
20 Réponse: Non.
21 Question: Il a été suggéré dans un long passage par l'accusé -sans qu'une
22 question concrète soit posée-, il a dit que vous n'aviez aucune
23 information suggérant qu'il y avait quelque chose qui venait de
24 l'extérieur. Et je pense que l'implication, là où c'était implicite, c'est
25 que vous n'aviez aucune information laissant entendre qu'il y avait
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1 effectivement une influence de la Serbie ou plutôt de l'accusé sur les
2 événements en Croatie. Est-ce que vous acceptez cette idée ou pas?
3 Réponse: Veuillez répéter votre question?
4 Question: Si j'ai bien compris, il a été laissé entendre que vous n'aviez
5 pas d'information suggérant qu'il y avait une influence de Belgrade sur
6 les événements qui se sont produits en Croatie. Acceptez-vous cela?
7 Réponse: Non.
8 Question: Et puis, vous avez cet article de journal qui portait pour titre
9 "Pourquoi conserver la Yougoslavie en tant que pays unique". Et là, vous
10 dites qu'en fait, il y a un titre incorrect qui a été donné à votre
11 article. Est-ce que vous pourriez résumer la façon dans un de ces passages
12 de votre article a été repris et mal interprété par ce titre?
13 Réponse: Cet article a été rédigé au moment où la Yougoslavie était encore
14 une fédération. Au cours de notre mission, nous avons compris que la
15 faiblesse de la présidence fédérale était grande et qu'en fait, c'était le
16 gouvernement serbe qui avait les rênes du pouvoir et en essayant
17 d'influencer ce qui se passait. Ce qui nous préoccupait particulièrement,
18 c'est la situation qui régnait au Kosovo et nous avons exhorté le
19 Gouvernement américain en nous adressant à lui dans le cadre de cet
20 article pour que des sanctions économiques soient imposées à la
21 présidence, et dans la mesure du possible à la République de la Serbie
22 plutôt que de punir la totalité du pays. Car nous estimions qu'il y avait
23 certaines Républiques qui respectaient les Droits de l'homme et nous
24 disions que la Croatie pouvait effectivement être coupable et qu'il
25 fallait superviser de très près la situation.
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1 Nous avons essayé de cibler les Etats-Unis, ce faisant, et je pense que
2 ceci a été mal compris. On a cru que l'on voulait dire pourquoi conserver
3 ce pays en tant que pays unique.
4 Question: Je pense qu'il y a une question de détail qui sera réglée en
5 examinant les pages 20 et 21 de l'atlas. On voit la mention D3; c'est tout
6 à fait au centre de la page. Inutile d'importuner le témoin sur ceci. On
7 voit D3 en bas, on voit Bosanski Novi en lettres assez grandes, et puis,
8 en dessus de cela, directement, on voit Dvor; et puis, un peu plus haut en
9 suivant cette même route jusqu'à la vallée de la rivière, on voit Bosanska
10 Kostajnica. Ces éléments de géographie aideront peut-être les Juges et il
11 faudrait maintenant examiner l'intercalaire 2, page 20.
12 Je pense que le passage concret sur lequel se basaient ces critiques
13 commence à la page 20 où l'on parle du fait que l'on a tiré sur les
14 véhicules médicaux, sur le personnel médical, qu'on a refusé de soigner
15 les blessés et de leur donner des soins de santé. Vous voyez où c'est?
16 Réponse: Oui.
17 Question: Et puis, le passage qui a fait l'objet de griefs de la part de
18 l'accusé se trouve vers le milieu de la page 20. Il dit qu'il n'était pas
19 possible de donner le nom des villages entre deux localités, dont j'ai
20 donné le nom et que j'ai indiqué sur la carte. Et puis, il s'est aussi
21 plaint du fait qu'on faisait référence à des tenues de camouflage jaunes,
22 sans aborder ceci dans le détail. Je vous demande si cette allégation, qui
23 est détaillée sur plus de deux pages, est-ce que pour vous c'est une
24 allégation assez détaillée ou pas?
25 Réponse: Oui.
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1 Question: Les Juges pourront prendre connaissance de ce ceci à l'aide de
2 la carte, ils pourront voir s'il y a un certain fondé aux griefs soulevés
3 par l'accusé.
4 Mais revenons maintenant à ce rapport. Il faut se souvenir de ce qui est à
5 l'intercalaire 2, à savoir ce rapport général.
6 Et maintenant passons à l'intercalaire 3, où on nous dit que sa réponse a
7 été demandée et n'a jamais été fournie par lui personnellement. Est-ce que
8 nous voyons là que cette allégation particulière ne se répercute dans
9 aucun événement?
10 Peut-être la Chambre acceptera cette formulation de ma part: les
11 allégations se trouvant à l'intercalaire 3, telles que je les ai lues, ne
12 comprennent pas ce qui concernait le personnel médical, ce qui a été
13 repris dans le document précédent. Je pense que je me suis trompé, je ne
14 pense pas que ceci se trouve à l'intercalaire 3.
15 Réponse: D'accord.
16 Question: Enfin, s'agissant des réunions que vous avez eues lorsque vous
17 avez essayé de remettre le contenu de l'intercalaire 3 à l'accusé et lors
18 des réunions avec d'autres personnes: vous avez rencontré Kostunica
19 notamment, deux hommes dont Kostunica, au ministère. Est-ce que ces
20 personnes ont accepté qu'ils étaient responsables des questions dont vous
21 parliez?
22 Réponse: C'était l'impression que nous avions eue à l'époque: lorsque nous
23 avons demandé à voir un interlocuteur valable au ministère, ce sont les
24 deux personnes qui nous ont été suggérées. Je ne pense pas que ces
25 personnes se soient présentées comme étant des hommes politiques de
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1 l'opposition, pour autant qu'ils l'aient été de l'opposition; ils ont
2 parlé en fait au nom du Gouvernement.
3 Question: Si l'on voit maintenant les notes se trouvant à l'intercalaire:
4 M. Tapuskovic en a parlé, il a parlé de la question en attirant
5 l'attention sur la page 34 de vos notes?
6 Réponse: Oui.
7 Question: On voit que le début de cette réunion commence par "Ministère
8 des Affaires étrangères. Il semble vouloir rejeter la responsabilité sur
9 l'armée"?
10 Réponse: Oui.
11 Question: Vous souvenez-vous de l'homme qui a essayé de rejeter la
12 responsabilité sur l'armée?
13 Réponse: Vous parlez de l'un ou l'autre de ces deux hommes?
14 Question: Oui. Si vous ne savez pas, peu importe.
15 Réponse: Il faudrait que je fasse des suppositions, je ne m'en souviens
16 pas exactement. C'est seulement à la fin de l'interview que j'ai obtenu
17 leurs noms et je constate maintenant ici -mon écriture est très mauvaise-,
18 je vois qu'ici, j'ai indiqué qu'effectivement ces hommes se sont
19 présentés, l'un comme étant le Président du Parti démocratique, et l'autre
20 le vice-président. Donc ils se sont présentés.
21 Question: Merci beaucoup. Et en dépit de cela, ils ont fait des remarques
22 qui revenaient à rejeter la responsabilité des événements sur une autre
23 institution, un autre organisme?
24 Réponse: Oui.
25 Question: Merci beaucoup.
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1 Réponse: En général, cette conversation avec ces deux messieurs a été
2 moins radicale que ce n'était le cas dans d'autres interviews; c'était le
3 cas en général avec le ministère des Affaires étrangères.
4 M. Nice (interprétation): Merci, j'ai terminé.
5 M. Milosevic (interprétation): J'ai une objection à faire qui n'est pas
6 dirigée contre le témoin, mais contre le lien inacceptable que vient
7 d'établir M. Nice dans la question qu'il a posée au témoin au sujet des
8 crimes de guerre et de la lettre de mon chef de cabinet. Donc c'est une
9 objection. Puis-je la formuler?
10 M. le Président (interprétation): Très rapidement, Monsieur Milosevic.
11 M. Milosevic (interprétation): Cela ne prendra pas plus d'une minute.
12 Monsieur Nice a établi un lien entre la constatation que la Yougoslavie
13 avait refusé de remettre trois officiers à ce Tribunal et le point 2 de la
14 lettre de mon chef de cabinet où on lit: "Le Président de la République de
15 Serbie a demandé aux organes compétents de la République de Serbie
16 d'enquêter au sujet des exactions évoquées dans votre lettre et, au cas où
17 un quelconque citoyen de la République de Serbie aurait participé à ces
18 crimes, il sera traduit en justice". (Fin de citation.)
19 Donc, dans la question de M. Nice, il est implicite que cette personne
20 serait jugée en Yougoslavie en fonction du Code pénal yougoslave, en tant
21 que citoyen yougoslave, et au cas où il aurait commis un crime; ce qui n'a
22 rien à voir avec notre situation devant ce Tribunal illégal. Et bien sûr,
23 je n'ai accepté l'extradition de personne. Ce sont, en effet, deux
24 situations complètement différentes et il est de mon devoir, en vertu de
25 la Constitution et de mes obligations internationales, de déclarer la
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1 nature illégale de ce Tribunal qui n'a pas été créé par…
2 M. le Président (interprétation): Monsieur Milosevic, il ne sert à rien de
3 nous parler de vos allégations selon lesquelles ce Tribunal est illégal.
4 Nous avons déjà rendu notre décision sur ce point, il y a des siècles.
5 Madame Laber, ceci met un terme à votre déposition. Merci d'être venue
6 devant le Tribunal international. Vous pouvez maintenant vous retirer.
7 M. Nice (interprétation): Monsieur le Président, encore un point. Bien
8 sûr, c'est la première phrase du premier paragraphe numéroté de la lettre
9 que j'avais à l'esprit lorsque j'ai posé la question, et pas le deuxième.
10 Le témoin suivant sera entendu par Mme Uertz-Retzlaff après la pause.
11 J'aimerais indiquer ce qui suit. J'ai hésité au maximum à interrompre le
12 contre-interrogatoire de ce témoin.
13 Nous allons en temps utile examiner les problèmes de calendrier.
14 L'accusation s'intéresse toujours bien entendu à la course du temps et la
15 durée de nos questions supplémentaires est souvent limitée par celles du
16 contre-interrogatoire de l'accusé.
17 J'inviterai la Chambre, en temps utile, à se pencher avec le plus grand
18 soin sur la façon dont l'accusé utilise le temps de son contre-
19 interrogatoire pour en faire un exemple de mauvaise utilisation du temps.
20 M. le Président (interprétation): L'accusé a le droit de contre-
21 interroger, il doit être défendu; c'est lui qui mène sa propre défense.
22 Mais, par ailleurs, bien sûr, nous pensons au temps et nous pensons que
23 c'est une question tout à fait pertinente. Il faut contrôler le temps,
24 c'est ce que fera la Chambre de première instance, mais nous nous prenons
25 note de ce que vous venez de dire au sujet du temps. Nous en reparlerons
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1 la semaine prochaine, je suppose.
2 M. Nice (interprétation): (Hors micro.) Je demande un huis clos partiel.
3 M. le Président (interprétation): Très bien.
4 Ah! Excusez-moi, Madame Laber. Vous devriez déjà être partie depuis
5 longtemps. Nous avons des questions administratives à traiter.
6 Huis clos partiel, je vous prie.
7 (Le témoin, Mme Jeri Laber, est reconduit hors du prétoire.)
8 (Huis clos partiel à 10 heures 37.)
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25 (L'audience, suspendue à 10 heures 40, est reprise à 11 heures 05.)
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1 (Audience publique.)
2 (Le témoin, M. Petar Poljanic, est déjà dans le prétoire.)
3 M. le Président (interprétation): Je vais demander au témoin de donner
4 lecture de la déclaration solennelle.
5 M. Poljanic (interprétation): Je déclare solennellement que je dirai la
6 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.
7 M. le Président (interprétation): Je vous remercie, Monsieur. Veuillez
8 vous asseoir.
9 Madame Uertz-Retzlaff, vous avez la parole.
10 (Interrogatoire principal du témoin, M. Petar Poljanic, par Mme Uertz-
11 Retzlaff.)
12 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Merci, Monsieur le Président.
13 Monsieur le Témoin, veuillez nous donner votre nom, votre lieu et date de
14 naissance.
15 M. Poljanic (interprétation): Je m'appelle Petar Poljanic. Je suis né à
16 Trstenik, à Peljesac, le 23 décembre 1939, en Croatie.
17 Question: Etes-vous citoyen croate?
18 Réponse: Je suis ingénieur diplômé en agronomie.
19 Question: Pendant la guerre, est-ce que vous avez été le maire de
20 Dubrovnik?
21 Réponse: Oui.
22 Question: Au moment de votre élection à la fonction de maire, est-ce que
23 vous étiez membre d'un parti politique quelconque? A cette époque-là ou
24 pendant la pendant la guerre?
25 Réponse: Non. Aux premières élections démocratiques, j'avais été candidat
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1 sans pour autant appartenir à quelque parti que ce soit; j'étais placé sur
2 la liste du HDZ.
3 Question: Combien d'habitants y avait-il avant la guerre, de façon
4 approximative, dans la municipalité de Dubrovnik?
5 Réponse: Je ne sais pas vous dire le nombre exact, mais à peu près 73.000
6 et des poussières.
7 Question: Et combien y avait-il de personnes qui habitaient dans la ville
8 même de Dubrovnik?
9 Réponse: 38.000 sur les 73.000 que j'ai mentionnées tout à l'heure.
10 Question: Et quelle était la composition ethnique de cette population, que
11 ce soit dans la municipalité ou dans la ville de Dubrovnik?
12 Réponse: Il y a eu à peu près 88% de Croates, 5,8% de Serbes, 4 virgule
13 quelque chose de Musulmans et 1% pour les autres confondus.
14 Je crois que ça fait un total de cent pour cent.
15 Question: Le système pluripartite a été mis en place. Est-ce qu'après
16 cela, on a fondé un parti, le parti du SDS à Dubrovnik?
17 Réponse: Oui, ça a été créé, mais pas tout de suite. Les élections ont eu
18 lieu au mois de mai de l'année 1990, alors que le SDS a été créé au début
19 du printemps 1991.
20 Question: Quel a été l'objectif politique du SDS par rapport à Dubrovnik?
21 Etes-vous en mesure de le dire? Quel était le thème principal de cet
22 objectif politique?
23 Réponse: Voyez-vous, à proximité immédiate de Dubrovnik se trouve la ville
24 de Trebinje. C'est là que le parti du SDS s'était trouvé très fort.
25 Certaines personnes originaires de Dubrovnik étaient en corrélation avec
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1 ce parti-là. Toutefois, à Dubrovnik même, il y avait des membres, disons
2 des membres qui étaient malveillants à l'égard de la Croatie à l'époque,
3 mais le Président du SDS de Dubrovnik a été élu et je crois que c'était
4 une personne très normale, pas malicieuse du tout à la différence de
5 certains autres.
6 Question: Vous dites "malveillants" dans la réponse précédente: vous
7 voulez dire quoi exactement?
8 Réponse: Ecoutez, à l'époque, on avait commencé à sentir le temps qui
9 arrivait. On voyait arriver la démocratie et on sentait que la Croatie ne
10 serait plus placée dans la position qui avait été la sienne jusque-là. Et
11 il s'était avéré normal que de voir des personnes exprimer leur
12 enthousiasme pour ces raisons-là. Et d'autre part, on a pu voir des
13 réflexions de leur part -quand je dis "de leur part", de la part des
14 Serbes- disant qu'ils n'allaient pas se mettre au service des autorités
15 nouvelles. La police, quant à elle, au moment où les uniformes de la
16 police devaient comporter des insignes croates, ceux qui étaient membres
17 de ce groupe ethnique serbe –et ils étaient assez nombreux- ne voulaient
18 pas accepter ces insignes nouveaux. Et il y a eu des situations, des
19 provocations, des excès, des chansons exprimant l'espoir de ne voir rien
20 survenir au niveau de cette Croatie nouvelle. C'est à peu près dans cette
21 ambiance-là que les choses s'étaient passées.
22 Question: Est-ce qu'il y a eu de la discrimination à l'égard des Serbes à
23 Dubrovnik? Par exemple, est-ce que les Serbes ont été limogés, est-ce
24 qu'ils ont perdu leur emploi?
25 Réponse: Non. Il y a eu des licenciements au niveau de la police, et ceci
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1 parce que certains ne voulaient pas accepter les insignes que j'ai
2 mentionnés tout à l'heure. Il n'y a pas eu d'autres licenciements des
3 postes de travail; s'il y en a eu, je ne le sais pas. Et toujours est-il,
4 s'il y en a eu, peut-être en raison d'infractions au règlement régissant
5 le travail, mais ce n'était pas parce qu'on était Serbe qu'on était
6 licencié.
7 Question: Est-ce que les Serbes ont conservé des fonctions qu'ils auraient
8 eues au sein du gouvernement de la municipalité ou à l'intérieur des
9 institutions publiques avant la guerre?
10 Réponse: En gros, oui.
11 Question: Est-ce qu'en dépit de cela, les médias serbes et monténégrins
12 ont présenté la situation des Serbes à Dubrovnik comme une situation dans
13 laquelle ils se trouvaient en péril? Etes-vous au courant de cela?
14 Réponse: Oui, de façon très intense.
15 Question: Est-ce qu'on a fait rapport de destruction de foyers serbes à
16 Dubrovnik? Et si ça a été le cas, que s'est-il passé dans les faits?
17 Réponse: Oui, il y a eu des rapports de cette nature. Je me souviens d'un
18 titre… Je ne me rappelle plus le journal publié à Belgrade dont il
19 s'agissait. Je ne sais plus si c'était "Politika" ou "Politika Ekspres";
20 je ne m'en souviens vraiment plus. Mais le titre disait: "Poljanic –donc
21 moi- a détruit 400 maisons serbes à Dubrovnik". Je n'en ai détruit aucune.
22 Mais il était question d'une chose, à savoir du fait que, lorsque nous
23 sommes arrivés en 1990 au pouvoir à Dubrovnik, nous avons hérité d'un
24 fait, à savoir que dans la municipalité de Dubrovnik, il y avait quelque
25 7.000 maisons construites de façon illégale. Et parmi ces maisons
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1 illégalement construites, certaines personnes avaient fait l'objet de
2 décision de destruction de ces maisons construites sans permis de
3 construire. Et les décisions étaient entrées en vigueur sur le plan
4 juridique. Et je dirai que certaines de ces décisions ont été héritées,
5 certaines décisions ont été adoptées par nos soins. Et à l'époque donc, il
6 a été détruit 60 constructions; je dis délibérément "constructions" parce
7 qu'il y avait eu des poulaillers, des maisons d'habitation et ce n'était
8 pas pour la totalité des maisons qui ont été détruites.
9 Question: S'agissant de ces installations, est-ce qu'elles étaient la
10 propriété de Serbes uniquement ou est-ce que ce n'était pas toujours le
11 cas?
12 Réponse: Eh bien, justement, c'est de cela qu'il s'agit: ces constructions
13 n'appartenaient pas qu'aux Serbes; cela appartenait à des Croates, à des
14 Musulmans et à des Serbes. Il est tout à fait certain qu'il en a été ainsi
15 et pas autrement. Il s'agissait donc de savoir si ces constructions
16 pouvaient être légalisées ou pas. Celles qui ne pouvaient pas être
17 légalisées, et rien qu'une petite partie de ces maisons ou constructions
18 sans permis de construire, ont été détruites.
19 Question: Au cours de l'été 1991, est-ce qu'il y a eu un rassemblement qui
20 a été organisé à la frontière entre la Bosnie et la Croatie?
21 Réponse: Oui, il y a eu un rassemblement. Mais je ne pense pas que cela se
22 soit passé en été. Je crois que c'était au printemps. Je pense même qu'il
23 s'agissait du mois d'avril, cela a été organisé à Ivanica.
24 Question: Veillez à ne répondre qu'aux questions que je vous pose et y
25 répondre de façon concise, Monsieur le Témoin. Nous pourrons ainsi avancer
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1 plus vite.
2 Réponse: Cela s'est tenu donc à Ivanica.
3 Question: Et qui a organisé ce rassemblement et quelles sont les personnes
4 qui y ont assisté?
5 Réponse: Ce meeting, ce rassemblement a été organisé par les soins du SDS
6 de Trebinje. Cependant, d'autres partis ont pris part à ce rassemblement;
7 on a vu le Parti populaire du Monténégro se présenter. Il y a eu des
8 représentants du SDS originaires, me semble-t-il, de Knin. Je ne saurais
9 trop l'affirmer, mais il me semble qu'ils étaient là aussi. Et puis il y
10 avait des représentants des autres partis serbes.
11 Il me faut ouvrir une petite parenthèse à ce sujet. Dans la déclaration
12 préalable que j'ai faite et que j'ai feuilletée hier, j'ai remarqué une
13 erreur qui s'est glissée dans le texte. Voilà de quoi il s'agit: le SDS,
14 ça veut dire Parti démocratique serbe; mais, en même temps, SDS, c'est
15 aussi l'abréviation du service de sûreté d'état. Et lorsque je me suis
16 entretenu avec l'enquêteur à Dubrovnik, ces gens-là ont été rangés par
17 l'enquêteur dans les rangs du Parti. Cela n'a rien à voir l'un avec
18 l'autre et cela n'a rien à voir avec l'un avec l'autre; et je voudrais que
19 se soit rectifié.
20 Question: Monsieur le Témoin, il n'est pas nécessaire d'aborder tous les
21 détails, pas nécessaire de savoir qui était un adhérent ou membre du SDS.
22 Je voulais simplement dire ceci: lorsque vous avez examiné votre
23 déclaration préalable vous avez constaté qu'il y avait une erreur dans un
24 passage où il y a une confusion entre le service de police et le parti du
25 SDS. Donc c'est la correction que vous voulez apporter?
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1 (Signe affirmatif du témoin.)
2 Il ne faut pas aborder ce degré de détail.
3 Réponse: Je suis d'accord.
4 Question: Pour ce qui est de ce rassemblement, quel a été le message
5 principal qui a été transmis à cette occasion?
6 Réponse: Eh bien, le message -comme tous les autres messages qui étaient
7 diffusés à l'époque- disait… Et je dirai qu'au printemps 1990, les
8 préparatifs s'étaient intensifiés pour tout ce qui allait survenir par la
9 suite. Donc toutes les interventions, tous les discours prononcés à ce
10 rassemblement -et vous avez cela sur les enregistrements- ont eu cette
11 même intonation de ce même style: c'était assez agressif à l'égard de la
12 partie croate, assez agressif par rapport à la démocratie naissante en
13 Croatie et par rapport au fait que la Croatie n'allait plus être dans
14 cette position qui avait été la sienne. Donc c'était une prédominance de
15 questions afférentes à la protection des droits des Serbes, notamment dans
16 la région de Dubrovnik. Mais, moi, je ne comprends toujours pas ce qu'il y
17 avait à défendre.
18 Question: Au moment où s'est fait ce rassemblement et au cours de la
19 période qui a précédé la guerre, est-ce qu'il y avait un quelconque danger
20 s'agissant de la position occupée par les Serbes à Dubrovnik s'agissant
21 des droits de la population serbe à Dubrovnik?
22 Réponse: Je ne suis au courant d'aucun cas de ce genre.
23 Question: Est-ce que la population croate ou les autorités croates
24 constituaient une menace pour la JNA dans la région à l'époque?
25 Réponse: Non.
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1 Question: Est-ce qu'à l'époque, les autorités croates ont déployé des
2 forces de l'armée ou des forces spéciales de la police dans la région de
3 Dubrovnik en direction de la Bosnie-Herzégovine ou du Monténégro?
4 Réponse: Pour autant que je le sache, dans cette période estivale à
5 Konavle -et c'est précisément la partie septentrionale de la Croatie-, il
6 y avait quatre policiers; et à Cilipi, il a été organisé un bataillon du
7 rassemblement de la garde nationale, une compagnie. Cette compagnie a été
8 mise en place au mois d'août de cette année. Ces gens-là se trouvaient là
9 entre le mois de juin et le mois d'août, mais pas au-delà de l'année 1991.
10 Question: Vous avez mentionné quelques policiers: est-ce que ces policiers
11 ou quelqu'un d'autre de la région ont attaqué le Monténégro ou ont, en
12 fait, pilonné ou tiré sur une partie du territoire du Monténégro? Etes-
13 vous au courant de cela?
14 Réponse: Non, il est tout à fait certain que non.
15 Question: Est-ce que, par ailleurs, des troupes de la JNA ont tiré sur la
16 municipalité de Dubrovnik, ont pilonné cette municipalité à partir de la
17 Bosnie ou du Monténégro?
18 Réponse: Il y a eu des provocations, à savoir des coups de feu de tirés
19 dès le mois de septembre. Ils ont ouvert le feu le 10, 12 septembre, et
20 ce, en provenance d'une colline appelée Kobila; c'est la colline qui
21 sépare la Croatie et le Monténégro. La partie est appartient au Monténégro
22 et la moitié ouest appartient à la Croatie à Konavle. Et c'est de cette
23 colline-là que l'on avait souvent tiré en direction de la population de
24 Konavle. Une fois, j'ai été personnellement présent lorsque cela est
25 arrivé dans une localité appelée Vitalina, au niveau d'une auberge de
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1 village très typique. C'est le village le plus au sud de cette
2 municipalité de Konavle.
3 Question: Vous parlez du mois de septembre. Septembre 1991?
4 Réponse: Oui, oui 1991.
5 Question: Vous avez parlé du rassemblent, à cet égard j'aimerais savoir si
6 au cours de celui-ci et par la suite on a parlé d'une République de
7 Dubrovnik. Etes-vous au courant de cela?
8 Réponse: Je ne sais pas s'il avait été question de la chose à ce
9 rassemblement dès le mois d'avril. Je ne puis le confirmer. Il s'agirait
10 de réécouter l'enregistrement. Donc je ne peux pas vous confirmer s'il en
11 était question dès ce moment-là, mais, après l'arrivée de cette armée
12 serbo-monténégrine et après la prise de Konavle par cette armée, ce projet
13 qui était le leur de mettre en place une République de Dubrovnik avait
14 gagné en intensité. Ils avaient créé un comité pour la restauration de la
15 République de Dubrovnik. Et à la tête de ce comité, il y avait un certain
16 Aco Apolonjo qui avait été, de longues années durant, procureur public à
17 Dubrovnik.
18 Et pour au autant que je le sache, dans ce comité, il y avait huit
19 personnes. Ils ont tenu plusieurs réunions à Cavtat, mais tout cela n'a
20 rien donné du tout. Ils n'ont pas réussi j'entends par là.
21 Question: Qu'est-ce que cette République de Dubrovnik était censée
22 signifier? Que comprenait-on sous cette appellation de "République de
23 Dubrovnik"?
24 Réponse: République de Dubrovnik avait existé à l'époque. Elle a cessé
25 d'exister en 1806, 1808 et, depuis lors, elle n'existe plus. Elle
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1 s'étirait de la frontière de Neum jusqu'à Sutoline. Et cette République de
2 Dubrovnik nouvellement mise en place, d'après eux, devait prendre appui
3 sur ce qui se trouvait aux arrières de la République; et, dans ce cas
4 concret, cela était censé être la Grande Serbie.
5 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Je vais demander l'aide de l'huissier
6 pour montrer au témoin l'intercalaire 1 du classeur consacré à la
7 déposition de ce témoin.
8 (Intervention de l'huissier.)
9 M. le Président (interprétation): Nous allons donner une cote pour la
10 totalité du classeur.
11 Mme Anoya (interprétation): Ce sera la pièce de l'accusation 361.
12 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Monsieur le Témoin, vous le
13 constatez, il s'agit ici d'un tract en faveur du Mouvement pour la
14 République de Dubrovnik. On parle ici de la restauration d'une République
15 de Dubrovnik démilitarisée et démocratique. Dans l'en-tête, il est fait
16 référence à toutes les zones et de toutes les régions de l'ex-Yougoslavie.
17 Est-ce que vous étiez au courant de l'existence de ce document, de ce
18 mouvement, et savez-vous quelle est la personnalité qui se cache derrière
19 ce mouvement?
20 M. Poljanic (interprétation): Oui, j'étais au courant de ce mouvement.
21 J'avais, à l'époque, en mains ce document. Et il en a été ainsi,
22 effectivement. Et derrière ce document, il y avait ce comité pour la
23 restauration de la République de Dubrovnik. A la tête du comité, il y
24 avait ce Aco Apolonjo; certains disent qu'il est encore en vie, certains
25 disent que non, je n'en sais rien.
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1 Question: Les personnes qui faisaient partie de ce mouvement en faveur de
2 la République de Dubrovnik, est-ce que c'étaient des Serbes ou est-ce que
3 s'y trouvaient représentées toutes sortes d'appartenances ethniques? Etes-
4 vous en mesure de le dire? Est-ce qu'ils avaient un rapport avec le SDS?
5 Réponse: C'étaient essentiellement des Serbes. De là à savoir quels
6 étaient leurs liens avec le parti du SDS, je ne puis le confirmer.
7 C'étaient, en tout cas, des Serbes. Il y avait un Croate parmi eux;
8 cependant, ce Croate avait un comportement, pour le moins qu'on puisse
9 dire, étrange. Voilà, ce serait tout.
10 Question: Vous avez déjà déclaré que la République de Dubrovnik serait
11 également à l'extérieur de la République de Croatie et serait une partie
12 de la nouvelle Serbie. Etait-ce là l'idée propagée par ce mouvement?
13 Réponse: Oui. Et il n'y a que cela.
14 Question: Monsieur le Témoin, avant que la guerre n'éclate, avez-vous
15 essayé d'établir des contacts avec la JNA pour éviter cette guerre?
16 Réponse: Oui, à plusieurs reprises. Et pas moi seul; il y avait le chef du
17 gouvernement municipal, M. Sikic, à l'époque. Nous voulions, à plusieurs
18 reprises, établir des contacts et nous avons établi le contact. Je tiens à
19 préciser que, dans ce malheur, il y a eu des circonstances heureuses.
20 Le commandant du secteur militaire de Boka, de la baie de Boka, c'était un
21 homme qui, malheureusement, est décédé depuis. Il s'appelait Krsto
22 Djurovic. A l'époque, il était capitaine de vaisseau militaire et, à titre
23 posthume, il a été promu au grade d'amiral. De par ses fonctions, il avait
24 été membre de ce conseil chargé de la Défense nationale de la municipalité
25 de Dubrovnik; nous nous sommes souvent entretenus au sujet de ses
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1 problèmes. Et une fois, à Kupari, nous avons été à des conversations, à
2 des pourparlers, notre délégation et il y avait la leur. La deuxième fois,
3 cela s'est fait à Herceg Novi. Mais je crois que les choses sont allées
4 trop loin et il était trop tard pour faire quoi que ce soit.
5 Question: A quel moment avez-vous rendu visite au général Djurovic à
6 Herceg Novi?
7 Réponse: Je suis allé le 15 ou peut-être le 16 septembre. Je ne saurais
8 vous le dire pour sûr, mais c'était certainement l'une de ces deux
9 journées. Et nous nous sommes entretenus dans la maison de l'armée.
10 Question: Au moment où vous vous rendiez à Herceg Novi, en route et près
11 du centre de l'armée, est-ce que vous avez vu des soldats de la JNA ou
12 d'autres éléments militaires se rassembler?
13 Réponse: J'ai vu beaucoup de soldats. C'étaient, pour l'essentiel, des
14 réservistes; on pouvait le voir à leur âge, à leurs vêtements à l'aspect
15 soigné. C'étaient essentiellement des réservistes et ils s'étaient
16 répartis à plusieurs postes. Ces fortifications militaires avaient déjà
17 été mises en place; on sentait, dès lors, que la guerre était sur le point
18 d'éclater.
19 Question: Est-ce que vous avez discuté de la situation avec l'amiral
20 Djurovic? Est-ce que vous avez, en particulier, parlé de la présence de
21 ces soldats du côté monténégrin?
22 Réponse: Oui.
23 Question: Et que vous a-t-il dit à propos de la raison pour laquelle il y
24 avait cette présence de ces troupes?
25 Réponse: Eh bien, il se trouvait être d'une humeur particulière. Il m'a
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1 dit qu'il se trouvait là-bas uniquement pour se défendre. Nous n'étions
2 pas seuls, hélas; il y avait un homme qui ne disait rien, qui était là
3 pour écouter et probablement pour enregistrer ce que nous disions. J'ai vu
4 que M. Djurovic ne pouvait pas me dire le fond de sa pensée.
5 Question: Pour se défendre contre qui? L'a-t-il dit? En a-t-il parlé?
6 Réponse: Oui. Oui, oui. Je lui ai posé la question et il m'a dit qu'il
7 avait des informations aux termes desquelles, de notre côté à nous, il y
8 avait un grand nombre de soldats avec Dieu sait quelles intentions de
9 conquête de la Baie de Kotor, du Monténégro. Et tout cela paraissait
10 ridicule. Ils devaient le penser également, mais j'avais l'impression
11 qu'il était censé proférer ces propos.
12 Question: Vous lui avez dit que ce n'était pas exact, qu'il n'y avait pas
13 de troubles du côté croate?
14 Réponse: Je lui ai dit la chose. Et à ce moment, cet homme, qui avait
15 écouté jusque là, s'est mêlé à la conversation et a affirmé qu'à l'église
16 de Sainte-Anne à Brdati, il y avait un nid d'Oustachis qu'eux voulaient
17 détruire à tout prix. Je l'ai laissé parler et, quand il a terminé, je lui
18 ai dit: "Ecoutez, Monsieur, à l'église de Sainte-Anne à Brdati, il n'y a
19 pas de clocher". Et il s'est tu, il n'a pas démenti donc qu'il n'y avait
20 ni clocher, de quelque nature que ce soit.
21 Question: Est-ce que l'amiral Djurovic a fait des promesses quelles
22 qu'elles soient? Est-ce qu'il vous a fait des promesses?
23 Réponse: L'amiral Djurovic, de façon évidente, attendait une opportunité
24 propice pour prononcer une phrase. Et à la fin, lorsqu'il a pensé que
25 personne ne pouvait l'entendre, sauf moi, il m'a dit que tant qu'il serait
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1 commandant des unités de Boka, je pouvais être sûr qu'aucun obus n'allait
2 tomber sur Dubrovnik.
3 Question: Est-ce que l'amiral Djurovic a été remplacé?
4 Réponse: Quelques jours plus tard, il a été placé dans une sorte de
5 détention provisoire. Puis il a été relâché. Il a exercé ses fonctions
6 pendant deux ou trois jours encore et il a perdu la vie. La partie adverse
7 a affirmé que c'étaient nous qui l'avions abattu, mais il m'apparaissait
8 clairement certain qu'il n'y avait pas de soldat à nous là-bas. Et j'ai
9 compris que c'était l'une de leurs combines à eux, pour apprendre par la
10 suite avec certitude que c'étaient eux qui l'avaient abattu. J'ai appris
11 cela bien plus tard.
12 Question: Et comment l'avez-vous appris? Qu'avez-vous appris plus
13 exactement s'agissant de cet assassinat? Dites-le en quelques mots.
14 Réponse: Cela m'a été relaté par un homme qui était de leur côté à eux. Et
15 c'est lui qui l'avait transporté en hélicoptère jusqu'à la voiture. Il se
16 mourait. Il était encore vivant, mais il était sans conscience et il se
17 mourait; il m'a raconté les détails de ce cas. Voilà ce serait tout.
18 Question: Et d'après ces informations, "ils l'ont tué", dites-vous: mais
19 c'est qui "ils"?
20 Réponse: J'entends par là l'armée serbo-monténégrine.
21 Question: Qui l'a remplacé? Quel est l'homme qui a eu ses responsabilités
22 après la mort de l'amiral?
23 Réponse: Il est venu l'amiral Jokic.
24 Question: Savez-vous à quel moment l'amiral est devenu le commandant?
25 Réponse: Ecoutez, pour autant que je le sache, la date du décès de
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1 Djurovic était le 4 octobre; donc je pense que l'amiral Jokic est arrivé
2 le 4 ou le 5 octobre. Je ne saurais l'affirmer avec certitude. Mais je
3 l'ai rencontré, pour ma part, lorsqu'il était à ce poste, je l'ai
4 rencontré le 11 octobre.
5 M. Kwon (interprétation): Madame Uertz-Retzlaff, j'aimerais avoir un
6 complément de détails s'agissant de l'incident relaté par cette tierce
7 personne.
8 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Vous l'avez entendu, vous avez
9 entendu la question par M. le Juge; il voudrait en savoir plus long sur
10 les circonstances de l'assassinat de l'amiral Djurovic. Qui l'a tué?
11 M. Poljanic (interprétation): A vrai dire, je ne sais pas vous dire, je
12 suis en train de transmettre les propos d'un homme qui s'était trouvé là-
13 bas au moment où l'hélicoptère a atterri. L'hélicoptère n'est pas tombé.
14 Il faut entendre que l'hélicoptère s'était posé d'une façon assez étrange;
15 mais, selon le récit de cet homme-là, c'est ainsi que cela s'est passé.
16 Cela ne s'est pas passé au village de Popovici au niveau de Kobila, comme
17 cela a été publié, mais cela s'est passé à quelque 150 mètres des serres
18 de Vukobrat, toujours à Kobila.
19 Question: D'après ce qui vous a été dit, est-ce que l'hélicoptère a été
20 abattu?
21 Réponse: D'après les propos de cet homme-là, l'hélicoptère avait volé
22 d'une façon étrange, mais il n'a pas entendu qui que ce soit tirer en
23 direction de l'hélicoptère.
24 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Dans quelles circonstances, M.
25 Djurovic… Comment est-il mort?
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1 M. Poljanic (interprétation): Eh bien, lorsque cet homme-là avait couru
2 jusqu'à l'hélicoptère, Djurovic se trouvait à l'extérieur de l'hélicoptère
3 et se mourait.
4 M. le Président (interprétation): Essayez, Monsieur le Témoin, de vous
5 concentrer sur la question qui vous est posée. Si vous ne savez pas de
6 quelle façon il est mort, dites-le tout simplement. Cependant, si vous le
7 savez, essayez de nous le dire de façon concise comment il a trouvé la
8 mort.
9 M. Poljanic (interprétation): Je ne sais pas de quelle façon il a été tué,
10 mais je sais en tout état de cause qu'il est décédé. De là à savoir qui
11 l'avait tué, je ne sais pas. Il se peut qu'il se soit tué lui-même, qu'il
12 se soit suicidé, mais je ne le sais pas.
13 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Avant que la guerre n'éclate est-ce
14 que vous vous êtes rendu à Trebinje pour rencontrer Bozidar Vucurevic?
15 Réponse: Oui.
16 Question: A quel moment êtes-vous allé à Trebinje?
17 Réponse: Cela s'est passé vers ces jours-là, deux ou trois jours plus
18 tard. Je suis allé à Trebinje…
19 Question: Après quoi "plus tard"? Vous dites: "Deux ou trois jours plus
20 tard". Quand êtes-vous allé à Trebinje?
21 Réponse: Après l'événement que je vous ai relaté, la conversation que j'ai
22 eue avec M. Djurovic à Herceg-Novi, à ce moment, il était encore vivant
23 bien sûr; cela a dû se passer le 17, le 18 septembre. C'est là que je suis
24 parti m'entretenir avec M. Vucurevic à Trebinje. Nos informations disaient
25 qu'à Trebinje, il y avait une forte concentration, une très forte
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1 concentration de l'armée. Et à côté de la route allant de Trebinje vers la
2 frontière croate, il y avait beaucoup de soldats également. Tout était
3 prêt pour l'attaque. Je suis donc allé m'entretenir avec lui pour voir
4 tout simplement ce qu'il en était.
5 Question: Avez-vous vu ces concentrations de troupes lorsque vous êtes
6 allé à Trebinje?
7 Réponse: Je l'ai vu chemin faisant vers Trebinje et à Trebinje même.
8 Question: Quelle est la distance séparant Trebinje de Dubrovnik,
9 approximativement?
10 Réponse: Vingt-sept kilomètres en suivant la route; à vol d'oiseau, ça
11 fait beaucoup moins.
12 Question: C'est en Bosnie-Herzégovine?
13 Réponse: Oui, c'est en Bosnie-Herzégovine.
14 Question: Il y avait une garnison, une caserne?
15 Réponse: Oui, il y en avait une.
16 Question: Et quel type d'installation militaire était-ce? Est-ce que
17 c'était un cantonnement de corps d'armée ou autre chose?
18 Réponse: C'était de l'infanterie. Mais, pour être sincère, je n'y connais
19 rien en corps d'armée, brigade et le reste. Je sais qu'il y avait en tout
20 et pour tout quelque 6.000 soldats de concentrés dans la caserne à
21 l'époque qui a précédé l'attaque contre Dubrovnik. Et autour, il y en
22 avait bien plus.
23 Maintenant, de là à vous dire si c'était une brigade ou un corps d'armée,
24 je ne le sais vraiment pas.
25 Question: D'où tenez-vous cette information selon laquelle il y avait
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1 présence de 6.000 soldats? Comment avez-vous appris ce chiffre?
2 Réponse: Le commandant de la caserne à Trebinje était un certain M. Nojko
3 Marinovic, à l'époque le lieutenant-colonel de la JNA, un Croate
4 originaire des environs de Benkovac. Nous avions disposé de certaines
5 informations concernant ce qui se passait à Trebinje.
6 Question: Le lieutenant-colonel Marinovic, est-ce que, plus tard, il est
7 devenu commandant de la défense croate de Dubrovnik? Et si c'est le cas, à
8 quel moment l'est-il devenu?
9 Réponse: Oui, il est passé de notre côté à Dubrovnik et, dès qu'il est
10 passé -cela s'est passé vers le 18 ou le 19 septembre de l'année 1991-, il
11 s'est mis à la tête de la défense de Dubrovnik.
12 Question: Vous avez mentionné M. Vucurevic: quelle était sa fonction à
13 l'époque? Qui était-il?
14 Réponse: Il était président de l'assemblée municipale de Trebinje.
15 Question: Est-ce qu'il était membre du SDS?
16 Réponse: Oui.
17 Question: Avait-il un avis politique particulier s'agissant de Dubrovnik?
18 Est-ce qu'il a dit quelque chose en particulier? Vous a-t-il dit quoi que
19 ce soit?
20 Réponse: Eh bien, dans cette conversation que nous avons eue, je dois
21 admettre qu'il n'avait exprimé aucune prétention à l'égard du territoire
22 de la municipalité de Dubrovnik. Bien entendu, je lui ai parlé de la
23 situation que j'avais constatée le long de la route. J'avais vu cette
24 concentration de soldats et je lui avais dit que j'étais très étonné parce
25 que nous n'avions aucune sorte d'ambition et aucune possibilité de faire
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1 la guerre pour nous emparer de quelque territoire que ce soit. Mais, dans
2 l'éventualité d'événements sur notre municipalité, j'avais dit que nous
3 allions défendre notre territoire.
4 Il m'a dit littéralement qu'ils étaient intéressés par quelques bouts de
5 territoire un peu plus au sud. Il n'avait pas exprimé de prétention autre
6 pendant cette conversation qui a, somme toute, duré deux ou trois heures.
7 Nous nous sommes promenés ensemble dans Trebinje pour que les gens
8 présents voient bien que nous n'avions pas d'intention inamicale, du moins
9 pour ce qui me concernait.
10 Question: "Un peu plus au sud": est-ce que ceci fait référence à une
11 partie de la Croatie?
12 Réponse: Absolument, une partie de la Croatie. Oui, cela pouvait avoir
13 trait à Konavli parce que Konavli, c'est la partie tout au sud de la
14 Croatie. Quelle partie de Konavli et quelles étaient les réflexions qu'il
15 se faisait, je ne saurais vous le dire. Je n'ai fait que reprendre le bout
16 de phrase qu'il a prononcé.
17 Question: Savez-vous si M. Vucurevic était proche de Radovan Karadzic?
18 Avez-vous des informations, quelles qu'elles soient, à ce propos?
19 Réponse: Ce que je sais, c'est que lui m'a dit au cours de cette
20 conversation, assez souvent: "Radovan m'a dit ceci, Radovan m'a dit cela",
21 et ainsi de suite. Puis il me disait: "Slobo m'a dit, Slobo m'a dit cela".
22 Je m'imagine que, quand il parlait de Radovan, quand il disait Radovan, il
23 avait à l'esprit Radovan Karadzic et, quand il disait Slobo, il avait à
24 l'esprit Slobodan Milosevic.
25 Question: Au cours de cette conversation, de quoi parlait-il lorsqu'il a
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1 prononcé les noms de Radovan Karadzic et de M. Milosevic?
2 Réponse: Dans cette conversation entre lui et moi, il n'y avait rien
3 d'alarmant. J'avais le sentiment qu'au travers de cette conversation, il
4 voulait m'indiquer qu'il était en bons termes avec l'un et avec l'autre.
5 Mais je ne me souviens vraiment pas du contenu des conversations qu'il
6 avait eues avec Karadzic ou Milosevic, ou s'il en a parlé du tout.
7 Question: En dépit de la conversation qu'il a eue avec vous, est-ce que M.
8 Vucurevic a exprimé un avis politique en ce qui concerne la Yougoslavie et
9 Dubrovnik, et à d'autres occasions?
10 Réponse: A d'autres occasions, oui, et même très souvent. Il parlait
11 toujours de la protection des intérêts serbes dans ces régions, dans ces
12 régions qui ne font pas partie de la Serbie, bien entendu.
13 Dans ses réflexions à lui, dans ses agissements, dans son vocabulaire, il
14 était très malveillant et on connaît sa phrase; lorsque la guerre a
15 commencé et lorsque Dubrovnik a connu la catastrophe la plus grande dans
16 toute son histoire, il disait: "Et alors, on reconstruira Dubrovnik plus
17 beau qu'avant et plus récent qu'avant!"
18 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Est-ce qu'un blocus naval a été
19 imposé à la ville de Dubrovnik, à la région de Dubrovnik plus exactement,
20 le 30 septembre 1991? Est-ce que la région a été attaquée le lendemain, le
21 1er octobre?
22 M. Poljanic (interprétation): Oui.
23 M. Kwon (interprétation): Monsieur Poljanic, pourriez-vous nous dire
24 quelle est la raison, ou vous direz peut-être le prétexte, qui vous a été
25 avancée pour justifier les attaques ou l'attaque de la JNA à l'époque?
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1 Est-ce qu'on a donné un ultimatum, est-ce qu'on a informé qu'il allait y
2 avoir une attaque?
3 M. Poljanic (interprétation): Avant l'attaque, non.
4 M. Kwon (interprétation): Est-ce que vous avez, en fin de compte, appris
5 quelle était la raison?
6 M. Poljanic (interprétation): Il ne pouvait y avoir qu'une seule raison,
7 une fois de plus. Dubrovnik et la région de Dubrovnik ainsi que Konavli.
8 Etant donné que c'étaient des territoires presque à cent pour cent
9 croates, ils se dirigeaient vers l'occident où ils devaient se situer sur
10 l'axe vers Karlobag, là où devait se situer la frontière imaginaire que
11 l'on avait tracée, quoique cela se trouve à quelque 400 kilomètres au-
12 delà.
13 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Quelle était la nature de
14 l'ultimatum? Nous avons en fait les documents ici même. Je vais arriver à
15 ce sujet dans le cours de l'interrogatoire principal.
16 Quel était l'objectif poursuivi par cette attaque, Monsieur le Témoin?
17 Vous avez mentionné une frontière: quel était l'objectif à long terme de
18 cette attaque?
19 Réponse: Eh bien, voyez-vous, l'objectif de l'attaque en date du 1er
20 octobre, date à laquelle ça a commencé de la façon la plus terrible jusque
21 là. Après, cela a été plus terrible encore, mais l'objectif avait été de
22 nous bloquer complètement, de nous exclure du reste, de nous priver
23 d'électricité, d'eau, de quelque moyen de communication avec le reste du
24 monde que ce soit et tous les émetteurs de télévision étaient détruits. Le
25 poste de transformateur de Komoljac a été détruit, on a détruit les
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1 installations d'approvisionnement en eau potable. Nous sommes restés
2 complètement sans électricité, sans eau, sans ligne téléphonique, sans
3 communication par onde de télévision, sans communications routières et
4 communications maritimes. A ce moment-là, nous étions à coup sûr la plus
5 grande des prisons qu'il y ait pu y avoir au monde.
6 Question: J'avais fait référence à votre citation. Vous aviez dit: "Et en
7 fin de compte, vers Karlobag où leur frontière était censée se trouver."
8 (Fin de citation.)
9 Et je vous ai posé la question suivante; je vous ai demandé: à quoi vous
10 faisiez référence?
11 Réponse: Ce que j'avais à l'esprit, c'est comment voulez-vous qu'il y ait
12 une frontière à Karlobag s'ils ne prenaient pas de force tout le reste
13 jusqu'à Karlobag? Et ce n'est pas par hasard qu'ils ont attaqué à Split, à
14 Dubrovnik, à Sibenik, à Zadar et le reste.
15 Question: Est-ce que cela veut dire que Dubrovnik est la municipalité de
16 Dubrovnik se trouve sur un territoire qui allait devenir une partie de la
17 Serbie, de la Yougoslavie ou de ce cette nouvelle Yougoslavie dont vous
18 avez parlée?
19 Réponse: Eh bien, écoutez, il est certain qu'à Dubrovnik, il y avait des
20 gens qui disaient, qui criaient: "Ce sera la Serbie! Ceci est la Serbie!"
21 Et tout ce qui représentait leurs slogans, leurs chants si réputés.
22 Question: Je vais demander l'aide de l'huissier pour montrer au témoin
23 l'atlas. Il s'agit de la pièce P336 et ce qui nous intéresse, ce sont les
24 pages 36 et 37. Je vais demander à l'huissier qu'il place ces pages sur le
25 rétroprojecteur.
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1 (Intervention de l'huissier.)
2 Veuillez nous indiquer les régions qui furent attaquées et qui furent
3 prises? Nous parlons bien sûr de la municipalité de Dubrovnik.
4 (Le témoin s'exécute.)
5 Réponse: Ici, c'est le point à l'extrême sud de la Croatie, à savoir
6 Prevlaka.
7 Question: Arrêtez-vous, s'il vous plaît. Veuillez nous montrer Prevlaka?
8 Réponse: C'est exactement ici.
9 Question: Pourriez-vous nous montrer la région tout entière qui était
10 attaquée et prise le 1er octobre et les jours suivants?
11 Réponse: Eh bien, en suivant cette ligne-là, voilà la région de Konavli
12 jusqu'à Cavtat compris, jusqu'à Ljuta. Tout cela, c'est Konavli. Puis,
13 vient Zupa Dubrovacka. C'est la région de Dubrovnik, puis la ville de
14 Dubrovnik même, puis de Zaton: c'est le littoral de Dubrovnik qui s'étire
15 jusqu'à la frontière avec la Bosnie-Herzégovine, à Neum, au niveau de
16 Neum. Donc ça, c'est le littoral de Dubrovnik. Ici, on voit Peljesac:
17 cette presqu'île faisait partie de la municipalité de Dubrovnik. Puis, il
18 y a Mljet et les îles ici: Lopud, Sipan et autres.
19 Voilà, c'est ça la municipalité de Dubrovnik; cela allait jusqu'à la
20 localité de Postup sur cette île-ci.
21 Question: Les troupes ont attaqué, ont pris ce territoire de quelle
22 direction? Pourriez-vous nous l'indiquer?
23 Réponse: Oui, je peux le faire, bien sûr. La municipalité de Dubrovnik a
24 été attaquée depuis le sud, en passant par Debeli Brijeg, puis au nord
25 vers Dubravka; donc c'est vers la région de Konavli. Puis ils ont attaqué
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1 en provenance de Trebinje vers Dubrovnik, puis de Popovo Polje en passant
2 par Zavala, en arrivant jusqu'à Slano. C'est ce qui s'est passé vers le 4.
3 Puis, ils ont accédé au littoral de Dubrovnik en passant par Cetikuce et
4 en passant par les différentes collines qui s'y trouvent, mais ils
5 n'étaient pas si nombreux.
6 Ça, c'étaient les axes de l'attaque principaux. Mais le tout s'était
7 accompagné par une intervention de la marine et celle-ci a attaquée,
8 assistée par l'aviation, sans merci.
9 Question: Et quelles troupes étaient-ce? Est-ce que c'étaient les troupes
10 de la JNA, de la TO?
11 Réponse: Ils disaient que c'était la JNA, mais, là aussi, il y avait des
12 insignes variés. Pour autant que je le sache, la JNA avait des étoiles à
13 cinq branches sur leur couvre-chef; à ce moment-là, les insignes étaient
14 très variés. Il n'y avait plus que des étoiles à cinq branches, mais des
15 insignes autres. Comment les désigner? Je ne sais pas si cette armée
16 pouvait encore porter le nom de "Armée populaire yougoslave".
17 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Il a fallu combien de temps à ces
18 troupes pour s'emparer du territoire que vous venez de nous montrer sur la
19 carte se trouvant sur le rétroprojecteur?
20 M. Poljanic (interprétation): Eh bien, cette attaque intensive a commencé
21 le 1er octobre. Konavli y compris Cavtat ont été prises jusqu'au 12
22 octobre. Le 4 octobre, ils se sont emparés de Slano, puis ils sont allés
23 de Slano vers le sud; et Mravinci, Brsecine, Orasac, Zaton sont tombées
24 l'une après l'autre.
25 M. le Président (interprétation): Monsieur le Témoin, essayez de vous
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1 concentrer sur la question qui vous a été posée, question par ailleurs
2 simple. On vous a demandé combien de temps il a fallu à ces troupes pour
3 s'emparer de ce territoire. Pourriez-vous nous donner des dates concises
4 et précises?
5 M. Poljanic (interprétation): Pour Konavli, il leur a fallu entre le 1er
6 et le 12 octobre, pour prendre Konavli; pour le littoral de Dubrovnik, que
7 quelques jours de plus. Mais il faut savoir que l'attaque sur le littoral
8 de Dubrovnik a commencé le 4 et pas le 1er. Et Slano est tombée le 4.
9 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Donc il a fallu à peu près 12 jours,
10 c'est bien ça?
11 M. Poljanic (interprétation): Oui.
12 Question: Parlons maintenant des résultats de cette attaque. Les villages
13 croates situés dans cette région que vous venez de nous montrer ont-ils
14 été détruits ou gravement endommagés?
15 Réponse: Dans ce secteur, on ne trouve que des villages croates dont
16 certains ont été totalement détruits, comme c'est le cas par exemple dans
17 le secteur de Konavli, et d'autres détruits partiellement. Mais, en tout
18 cas, c'est à Konavli qu'a eu lieu la plus grande tragédie de l'histoire de
19 cette région. Zvekovica a été détruit à 100%, Gruda également, Cilipi
20 également; donc cela a été, pour Konavli, la plus grande destruction de
21 son histoire.
22 Question: J'aimerais vous soumettre des noms de villages que l'on trouve
23 au paragraphe 81 de l'Acte d'accusation relatif à la Croatie. J'aimerais
24 donc soumettre ces noms de villages et vous nous direz s'ils ont été
25 détruits; et, si oui, dans quelle mesure, mais sans détail.
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1 Qu'en est-il de Brgat?
2 Réponse: J'ai dit, il y a quelques instants, qu'après la libération de
3 Konavli, nous n'avons trouvé que des matériaux de construction, des
4 débris, mais pas un mur debout; 30 ou 40 maisons au total ont été démolies
5 dans ce village. Cilipi a également été détruit complètement.
6 Question: Je voudrais simplement, Monsieur le Témoin, vous soumettre des
7 noms de villages et vous me donnerez vos commentaires pour chacun de ces
8 villages.
9 Commençons par Bulgat; Bulgat a-t-il été détruit?
10 Réponse: Vous voulez dire Brgat, sans doute? Vous pensez à Brgat, c'est
11 bien ça?
12 Question: Oui.
13 Réponse: Brgat a été détruit.
14 Question: Cilipi, vous en avez déjà parlé. Dubravka? Dubravka, c'est un
15 village de Konavli?
16 Réponse: Oui, oui.
17 Question: Gruda?
18 Réponse: Gruda, le plus grand village de Konavli, à part Cavtat, oui. Ce
19 village a terriblement souffert. Disons que ce n'est pas 100% des maisons
20 qui ont été détruites mais 80 %.
21 Question: Mocici?
22 Réponse: Mocici, comme Cilipi.
23 Question: Osojnik?
24 Réponse: Osojnik n'est pas à Konavli. C'est un village qui se trouve plus
25 près de Mokosica, là-haut, sur les collines; ce village a été détruit à
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1 100% car, sur 103 maisons qui existaient si je ne m'abuse, 102 ont été
2 détruites; la dernière, c'était celle où était stationnée la police et ils
3 n'ont pas réussi à la détruire complètement.
4 Question: Vous parlez de soldats qui étaient stationnés dans cette maison.
5 Quels soldats, des soldats croates?
6 Réponse: Non, c'était l'armée serbo-monténégrine! L'armée serbo-
7 monténégrine, oui.
8 Question: Est-ce que cela signifie qu'ils se sont emparés de ce bâtiment
9 et qu'ils y sont restés?
10 Réponse: Oui, oui, oui.
11 Question: Merci.
12 Je crois que vous avez déjà parlé de Slano. Slano, a-t-il été détruit?
13 Réponse: Oui, j'ai parlé de Slano qui est un magnifique petit village au
14 bord de la mer, dans une petite anse où il y avait de nombreuses et très
15 jolies villas. Et Slano a été totalement, complètement détruit, y compris
16 les hôtels.
17 Question: Popovici?
18 M. Kwon (interprétation): Pourriez-vous m'aidez à trouver les localités
19 sur la carte? Où se trouve Slano?
20 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Monsieur le Témoin, je vous
21 demanderai une nouvelle fois de jeter un coup d'œil au rétroprojecteur où
22 se trouve l'Atlas, et de placer votre pointeur sur Slano.
23 M. Poljanic (interprétation): Oui. C'est ici, c'est un village qui trouve
24 sur le littoral de Dubrovnik.
25 M. le Président (interprétation): Merci.
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1 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Village suivant, Donja Ljuta?
2 D'ailleurs, je vous demanderai chaque fois que vous parlez d'un village de
3 placer le pointeur sur l'endroit où ce village est indiqué sur la carte.
4 M. Poljanic (interprétation): Oui.
5 Question: Donc Donja Ljuta?
6 Réponse: Il y a un Ljuta à Konavli et aussi la baie de Ljuta, là où se
7 trouve la sortie sur la mer d'une centrale électrique. Je ne sais pas de
8 quel Ljuta vous parlez. Je suppose que vous parlez du Ljuta de Konavli,
9 n'est-ce pas? Eh bien, si c'est le cas, ce village a été détruit
10 également.
11 Question: Oui, oui, je parlais de Konavli.
12 Village suivant, Popovici?
13 Réponse: Popovici se trouve également dans la région de Konavli. Il a été
14 détruit, mais pas autant que Cilipi, Zvekovica, Mihanici, Dubravka et les
15 autres villages totalement détruits.
16 Question: Mihanici?
17 Réponse: Mihanici, oui, c'est également dans le secteur de Konavli; et
18 c'est un village qui a été détruit.
19 Question: Drvenik?
20 Réponse: Drvenik Konavli également, détruit également .
21 Question: Plat?
22 Réponse: Plat est un village situé sur le littoral du Dubrovnik. Ou plutôt
23 non, non, pas sur le littoral de Dubrovnik, mais dans le secteur du
24 Dubrovacka Zupa. J'ai fait une erreur, excusez-moi. Et Plat a également
25 été endommagé grandement, même les hôtels de Plat ont été détruits;
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1 d'ailleurs, pas seulement détruits, mais pillés également.
2 Question: Uskoje?
3 Réponse: Vous pensez sans doute à Uskoplje à Konavli? Oui c'est un village
4 qui a également été détruit.
5 Question: Cepikuce?
6 Réponse: Détruit, oui.
7 Question: Gabrili?
8 Réponse: Gabrili est un village de Konavli qui a beaucoup souffert
9 également.
10 Question: Pridvoje?
11 Réponse: Pridvoje se trouve tout près de Gabrili, à Konavli également, et
12 c'est un village qui a été grandement endommagé. On y trouve un vieux
13 monastère.
14 Question: Molunat?
15 Réponse: Molunat se trouve à Konavli, au bord de la mer. C'est un endroit
16 qui a été endommagé, mais absolument pas autant que les villages dont nous
17 venons de parler à l'instant, même si là aussi il y a eu pas mal de
18 destructions.
19 Question: Donja Cibaza?
20 Réponse: Vous parlez sans doute de Donja Cibaca. C'est une localité de la
21 Dubrovacka Zupa qui a beaucoup souffert également.,
22 Question: Karasovici?
23 Réponse: Karasovici est un lieu qui se trouve à la frontière entre le
24 Monténégro et la Croatie, et qui fait partie du secteur de Konavli. On y
25 trouve Debeli Brijeg également, et c'est une localité qui a également
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1 beaucoup, beaucoup souffert: grandes destructions.
2 Question: Et enfin, Zvekovica, le dernier village; vous en avez déjà
3 parlé: vous avez dit qu'il avait été détruit.
4 Réponse: Zvekovica? Complètement! Complètement détruit, je ne crois pas
5 qu'il soit resté une maison debout à Zvekovica.
6 Question: Avez-vous rencontré des représentants du Bureau du Procureur
7 pour préparer votre déposition? Et avez-vous, ce jour-là, examiné de très
8 nombreux documents où l'on trouvait, entre autres, des photographies de
9 tous ces endroits?
10 Réponse: Oui.
11 Question: Avez-vous fait une déclaration dans laquelle vous confirmiez
12 l'exactitude des faits évoqués dans ces documents?
13 Réponse: Oui, j'ai regardé toutes ces photographies qui étaient très, très
14 nombreuses et j'ai fait une déclaration indiquant qu'elles étaient
15 conformes à la réalité.
16 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Monsieur le Président, Messieurs les
17 Juges, intercalaire 3 de la série de pièces à conviction. C'est là qu'on
18 trouve cette déclaration du témoin qui a été établie et signée par le
19 témoin. Et après cet intercalaire 3, entre l'intercalaire 4 et
20 l'intercalaire 32, on trouve les photographies des lieux dont les noms
21 sont cités dans la déclaration. Plutôt que de soumettre ces photographies
22 au témoin pendant sa déposition, nous avons préparé une déclaration dans
23 laquelle il est fait mention des documents qu'il a examinés lors de sa
24 rencontre avec les représentants du Bureau du Procureur, avant le début de
25 sa déposition. Et le Procureur demande le versement au dossier de cette
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1 série de documents.
2 M. le Président (interprétation): Nous admettons la déclaration du témoin
3 et les pièces à conviction dont vous venez de parler.
4 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Merci.
5 Monsieur le Témoin, lorsque vous avez examiné ces photos montrant des
6 villages ou des localités endommagées, avez-vous également vu des
7 photographies montrant des graffitis anti-croates, donc inscrits pour des
8 raisons ethniques?
9 M. Poljanic (interprétation): Oui.
10 Question: Monsieur le Président, Messieurs les Juges, vous trouverez une
11 traduction de ces graffitis dans les mêmes pièces à conviction dont je
12 viens de parler.
13 M. Tapuskovic (interprétation): Monsieur le Président?
14 M. le Président (interprétation): Oui, Monsieur Tapuskovic?
15 M. Tapuskovic (interprétation): Je considère que les Juges de cette
16 Chambre devraient tenir compte du fait qu'on ne trouve aucune indication
17 de date sur l'une quelconque de ces photographies, on ne sait pas quand
18 ces photos ont été prises. Et je considère que le Procureur devrait
19 indiquer à quel moment ces photographies ont été prises.
20 M. le Président (interprétation): Oui, Madame Uertz-Retzlaff?
21 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Lorsque vous avez examiné tous ces
22 documents qui vous ont été montrés par les représentants du Bureau du
23 Procureur, s'agissait-il de documents produits par le poste de police du
24 département de la police de Dubrovnik et de la Neretva?
25 (Le témoin fait un signe affirmatif de la tête.)
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1 Y a-t-il dans ces documents indication de l'endroit où les photographies
2 ont été prises?
3 Monsieur le Président, Messieurs les Juges, je vous renvoie au rapport où,
4 en première page, on trouve toujours la date d'élaboration du rapport en
5 question. En général, on voit la date du 6 août 1992.
6 Monsieur le Témoin, ces destructions dont vous avez vu les images dans la
7 documentation qui vous a été soumise, savez-vous à quel moment ces
8 villages ont été détruits? Je ne vous demande pas la date exacte mais une
9 période.
10 M. Poljanic (interprétation): Il est tout à fait certain que je ne saurais
11 vous donner la date exacte. Mais avec la même certitude, je peux vous dire
12 -et j'ai vu des centaines de photographies, peut-être même plus-, en tout
13 cas, je peux dire avec certitude que toutes ces photographies sans
14 exception concernent la période où la région Dubrovnik a été endommagée.
15 Et, bien entendu, ces photographies ont été prises après l'attaque de la
16 région de Dubrovnik, après la libération de la région. Quand exactement?
17 Je ne sais pas, je ne peux pas vous donner une date exacte.
18 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Monsieur le Président, Messieurs les
19 Juges, nous ne pouvons pas vous donner davantage de détails quant à la
20 date où ces photos ont été prises.
21 M. le Président (interprétation): Oui. Il est à présent 12 heures 15.
22 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Oui, Monsieur le Président.
23 M. le Président (interprétation): Très bien. Nous allons lever l'audience.
24 Et, Monsieur Poljanic, je vous demanderai, pendant cette suspension
25 d'audience et pendant toutes les autres avant la fin de votre déposition,
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1 de ne parler à personne de ce que vous direz dans votre déposition.
2 Lorsque je dis "personne", cela concerne également le Bureau du Procureur.
3 20 minutes de pause.
4 (L'audience, suspendue à 12 heures 15, est reprise à 12 heures 39.)
5 M. le Président (interprétation): Madame Uertz-Retzlaff, vous pouvez
6 poursuivre.
7 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Merci, Monsieur le Président.
8 Nous venions de parler des graffitis qu'on a vus sur ces photos. Est-ce
9 que vous avez vu des photos avec des graffitis indiquant le nom de
10 certaines personnes, ainsi que le nom d'endroits de Serbie, de Monténégro?
11 M. Poljanic (interprétation): Oui.
12 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): A titre d'exemples, Monsieur le
13 Président, vous trouverez ceci à l'intercalaire 13, à l'intercalaire 16, à
14 l'intercalaire 20 ainsi qu'à l'intercalaire 23. Ce sont là des exemples
15 que je ne vais pas mentionner ici dans le prétoire.
16 Est-ce que l'un quelconque des villages détruits dont nous venons de
17 parler disposait d'installations militaires de l'armée croate?
18 M. Poljanic (interprétation): Pour autant que je le sache, pas un seul.
19 Question: Est-ce qu'il y avait des installations de la JNA dans la région,
20 le savez-vous?
21 Réponse: La JNA avait des installations sur l'île de Mljet.
22 Question: Ça, ce n'est pas dans les villages?
23 Réponse: Non, non. Dans aucun des villages que nous avons mentionnés.
24 Question: Est-ce qu'il y a eu, en fait, des combats au moment de la prise
25 de ces villages, au moment où ces villages ont été endommagés, voire
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1 détruits?
2 Réponse: Non. Il y a eu à Konavli des jeunes gens, quelques jeunes gens
3 qui s'étaient organisés par eux-mêmes lorsque l'armée est arrivée et
4 lorsqu'elle a commencé à occuper le territoire en direction de Cavtat. Je
5 crois qu'à Pridvorje, il y a eu un conflit quelconque; je le pense, je ne
6 saurais vous l'affirmer. Je crois qu'il y avait eu des petites anicroches,
7 mais il n'y a eu ni morts ni blessés.
8 Question: Savez-vous si la JNA a subi des pertes au moment de ces attaques
9 et de ces prises de contrôle dans la région?
10 Réponse: Eh bien, je ne sais pas si quelqu'un de la JNA est tombé à
11 Konavli, exception faite de l'amiral Djurovic qui est décédé, mais j'ai
12 déjà dit qu'on ne savait pas comment.
13 Question: Et à l'exception de ces deux régions Zupa Dubrovacka et
14 Pridvorje?
15 Réponse: A Zupa Dubrovacka, il y a eu également des poches de résistance,
16 mais je ne sais pas s'il y a eu des morts du côté de la JNA. De notre
17 côté, oui, il y en a eu un bon nombre. C'étaient des gens innocents, ce
18 n'étaient pas des soldats, c'étaient des civils.
19 Question: Au moment où ces villages ont été attaqués, qu'est-il advenu de
20 la population croate et qui vivait dans ces villages?
21 Réponse: Vous parlez de Konavli ou de Zupa?
22 Question: Parlons d'abord de Konavli.
23 Réponse: Konavle a été vidée de ses habitants. Il était resté peut-être 5%
24 ou pas plus 5%, des vieillards, des femmes âgées. Enfin, des personnes
25 âgées d'une manière générale. Tous les autres sont partis, ont quitté
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1 Konavle, ont quitté leur maison. Ils sont en bonne partie venue à
2 Dubrovnik. Je me souviens qu'ils ont été installés pour l'essentiel à
3 Babinkuk, alors qu'une partie est allée vers l'Adriatique du Nord, vers
4 les îles où il y avait déjà bon nombre de réfugiés provenant de Dubrovnik.
5 Question: Vous avez dit qu'ils avaient quitté leurs foyers, mais qu'est-ce
6 que cela veut dire? Est-ce que ça veut dire que ces personnes ont pris la
7 fuite? De quelle façon ces personnes ont-elle quitté leurs maisons?
8 Réponse: Eh bien, ces personnes ont fui les obus, les mises à feu, les
9 tueries.
10 Question: Pourriez-vous nous dire, de façon approximative, combien de
11 personnes ont pris la fuite suite à ces pilonnages et ces sévices et ces
12 incendies?
13 Réponse: A Konavle, pour autant que je m'en souvienne, il y avait 8.200
14 habitants. Mais si nous avons dit tout à l'heure qu'il était resté quelque
15 5% là-bas, il est facile de faire le calcul.
16 Question: Et pour ce qui est de la région de Primorje, pourriez-vous nous
17 dire combien de personnes ont pris la fuite?
18 Réponse: Presque tous ont fui les villages qui ont été occupés. Il y a eu
19 aussi des villages dont la population est restée sur place, mais bon
20 nombre de villages ont été quittés pratiquement par tout le monde, à
21 Cepikuce, Lisac, Trnovo.
22 Question: Pourriez-vous nous donner un chiffre?
23 Réponse: Quelques milliers d'habitants ont certainement, en tout et pour
24 tout, quitté le littoral de Dubrovnik.
25 Question: Et s'agissant de la région de Dubrovacka Zupa?
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1 Réponse: Quelques milliers d'habitants également. Donc sur les quelques
2 milliers d'habitants de Zupa Dubrovacka, presque tous étaient partis; il
3 en est resté très peu sur place.
4 Réponse: Et savez-vous combien de personnes sont restées?
5 Réponse: Ecoutez, lorsqu'ils sont arrivés à Zupa Dubrovacka, pour être
6 concret, à Mlini, ils ont tué immédiatement ceux qu'ils ont trouvés. Ils
7 ont tué le directeur de l'hôtel "Astarea" à Lonzo, il a été tué à la porte
8 de l'hôtel; les autres ont fui.
9 Question: Vous parlez de "eux", mais à qui pensez-vous exactement?
10 Réponse: J'entends l'armée serbo-monténégrine.
11 Question: Est-ce qu'il y a des personnes qui ont été placées en détention?
12 Réponse: Oui. Il a été placé en détention des personnes originaires de
13 Konavle qui n'ont pas pu fuir; elles ont été rattrapées. Des gens de Zupa
14 n'ont pas réussi à fuir et ces personnes ont été placées en détention. Il
15 en va de même pour ce qui est du littoral de Dubrovnik. Pour l'essentiel,
16 ils ont été emmenés vers le camp de Morinje au Monténégro. Et la plupart
17 des gens du littoral de Dubrovnik ont été emmenés vers Bileca.
18 Mais il n'y avait pas de règle parce que certaines personnes originaires
19 du littoral de Dubrovnik ont été également emmenées vers Morinje.
20 Question: Le camp de Morinje, au Monténégro, est-ce que c'était une
21 installation de la JNA?
22 Réponse: Oui.
23 Question: Et quel genre d'installations étaient-ce?
24 Réponse: Je ne sais pas vous le dire. C'étaient des installations
25 militaires, c'étaient des bâtiments militaires typiques, de construction
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1 basse. Je ne sais pas ce que cela avait été auparavant; je ne sais même
2 pas ce que c'est actuellement.
3 Question: Pourriez-vous nous dire combien de personnes de la région y ont
4 été détenues et au cours de quelle période s'est faite cette détention?
5 Réponse: A compter du 1er octobre, où ça a commencé, jusqu'à la fin du
6 mois de décembre, me semble-t-il, moment où il y a eu des échanges. Mais
7 il y avait là-bas quelque 300 personnes originaires du littoral de
8 Dubrovnik.
9 Question: Vous avez également mentionné Bileca. Est-ce qu'à cet endroit,
10 il y a une installation de la JNA ou dans quel type d'installations ces
11 personnes ont-elles été détenues?
12 Réponse: Je ne saurai pas vous le dire.
13 Question: Savez-vous combien de personnes se sont trouvées -je parle ici
14 de personnes de la région, pas d'autres endroits -, combien de personnes
15 se sont trouvées en détention à cet endroit et pendant combien de temps, à
16 quel moment?
17 Réponse: Eh bien, il y avait moins de gens originaires du littoral de
18 Dubrovnik qu'à Morinje. Et ils sont restés un peu plus longtemps là-bas
19 que ceux qui se trouvaient à Morinje. Un peu plus longtemps.
20 Question: Vous parlez de moins de personnes: pourriez-vous nous donner une
21 estimation chiffrée du nombre de personnes de la région qui ont été
22 amenées là?
23 Réponse: Je pense -et j'admets que l'erreur est possible-, mais je pense
24 qu'ils ne devaient pas être plus de 150 à être originaires de cette
25 région-là.
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1 Question: Quelles sont les informations que vous détenez à propos de ces
2 détentions? D'où tenez-vous ces informations selon lesquelles 300
3 personnes ont été détenues à Morinje et 100, peut-être 150, détenues à
4 Bileca?
5 Réponse: Eh bien, je tiens cela des personnes qui se trouvaient là-bas!
6 Question: Est-ce que cela veut dire que vous les avez rencontrées plus
7 tard, lorsqu'elles sont rentrées?
8 Réponse: J'ai rencontré bon nombre de ces personnes; bon nombre de ces
9 personnes étaient d'ailleurs des amis à moi. Et naturellement, un grand
10 nombre d'entre eux m'ont parlé des choses terribles qui leur étaient
11 arrivées là-bas.
12 Question: Vous dites "des choses terribles", "des atrocités". Quels types
13 d'atrocités ont-elles été commises à Morinje? Dites-le-nous en quelques
14 mots.
15 Réponse: Eh bien, les gens étaient torturés de façon étonnante. Les gens
16 qui ont été là-bas viendront vous en parler; je préfère ne pas en parler
17 moi-même. C'est par trop triste.
18 Question: J'aimerais maintenant présenter l'intercalaire 33 de la pièce
19 261; excusez-moi, de la pièce 361. Il s'agit d'une proclamation adressée
20 aux citoyens, en date du 7 novembre 1991, du commandement de la ville de
21 Cavtat et de la communauté ou du comité local de Cavtat.
22 Tout d'abord, le commandement de la ville de Cavtat: quel type de
23 commandement était-ce? Etait-ce un commandement militaire et, si c'était
24 le cas, de quoi?
25 Réponse: C'était un commandement militaire uniquement.
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1 Question: De quelle armée?
2 Réponse: De l'armée serbo-monténégrine.
3 Question: Et le comité de la communauté locale de Cavtat, quel genre
4 d'instance ou d'institution était-ce?
5 Réponse: Ceux qui, jusqu'au moment où l'emplacement, la localité a été
6 occupée, ont aboutit à Morinje. Puis, il y a eu un organe de coordination
7 qui coordonnait, autant que faire se pouvait.
8 Question: Dans le premier paragraphe, assez long, on dit: "Le commandement
9 de la ville et les unités de la JNA ont terminé le nettoyage de la région,
10 ont détenu une partie des membres des formations militaires restantes et
11 ont rassemblé quelques armes, des munitions, des explosifs, avec votre
12 aide et votre coopération." (Fin de citation.)
13 Savez-vous si des gens de Cavtat ont été détenus et, si détention il y a
14 eu, savez-vous si ces personnes faisaient partie de formations militaires
15 de l'armée de la Croatie? Le savez-vous?
16 Réponse: Je ne suis au courant de personne qui serait originaire de Cavtat
17 et qui avait été incarcéré à Morinje, pour ce qui est donc d'avoir été
18 membre de quelque formation militaire que ce soit. Je sais que certains
19 avaient été militants au niveau du comité local ou au niveau de la cellule
20 de crise, mais je ne suis pas du tout au courant du fait qu'il y ait pu y
21 avoir de soldats; pas du tout.
22 Question: S'agissant des détenus que vous avez mentionnés à Morinje et à
23 Bileca, savez-vous s'il s'agissait de civils ou de soldats, ou s'il y
24 avait aussi bien des civils que des soldats?
25 Réponse: Pour l'essentiel, c'étaient des civils; très rarement, il
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1 s'agissait de soldats. Il y avait eu quelques soldats à Bileca et certains
2 de Bileca ont été transférés vers Morinje. Je ne voudrais pas dire qu'il
3 n'y avait pas, à Morinje, de soldats du tout. Je sais que, sur les 300
4 personnes qui se trouvaient à Morinje, il y avait très peu de soldats; je
5 dirais pas plus d'un cinquième, le reste ayant été des civils.
6 Question: Nous avons déjà parlé des destructions reprises dans les
7 documents. Savez-vous s'il y a eu pillage de ces endroits, de ces
8 villages? Le savez-vous?
9 Réponse: Je sais que oui.
10 Question: Comment le savez-vous? Qui en est l'auteur? Comment le savez-
11 vous?
12 Réponse: Eh bien, c'était l'armée qui se trouvait là, rien que cette
13 armée-là. Ils emportaient tout ce qui pouvait être emporté ou la plupart
14 de ce qui pouvait être emporté, donc les objets qui les intéressaient. Ils
15 emportaient de Konavli tout ce qui n'avait pas brûlé; ils emportaient de
16 Zupa ce qui n'avait pas brûlé, notamment depuis les hôtels. Et ils
17 emportaient des affaires, des objets depuis le littoral de Dubrovnik, des
18 hôtels dans cette région. Et ils ont emporté bon nombre de bateaux, de
19 vaisseaux qui se trouvaient amarrés dans la région.
20 Question: Nous allons maintenant parler de la ville même de Dubrovnik. Au
21 cours de quelle période la ville a-t-elle été pilonnée? Nous parlons
22 maintenant de l'année 1991. Quand ce pilonnage a-t-il commencé?
23 Réponse: Avant de commencer à répondre à cette question-là, je crois que
24 nous devrions convenir d'une chose: quand je parle de Dubrovnik, j'entends
25 là, la ville tout entière. Et quand on parle de la vieille ville, celle
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1 qui est protégée, le noyau urbain sous la protection de l'UNESCO, je
2 dirais la vieille ville. Donc si vous me posez la question de savoir quand
3 est-ce que l'attaque sur Dubrovnik a commencé, je répondrai le 1er
4 octobre. Si vous me demandez quand est-ce que les obus ont commencé de
5 tomber sur la vieille ville, je vous répondrai en vous donnant la date du
6 23 octobre.
7 Question: Je vais demander l'aide de l'huissier pour présenter au témoin
8 une carte: c'est le plan de la ville, en fait.
9 (Intervention de l'huissier.)
10 Il faudra insérer cette carte dans le classeur qui porte la pièce P326 et
11 ce plan sera placé sous un intercalaire supplémentaire, l'intercalaire
12 n°13.
13 Messieurs les Juges, vous avez un plan de format assez petit, alors qu'on
14 a placé un plan de grande taille sur le rétroprojecteur, mais nous vous
15 fournirons une meilleure copie à une date ultérieure. Nous ne sommes pas
16 en mesure de vous donner un exemplaire de meilleure qualité, vu le peu de
17 temps qui nous était imparti.
18 Monsieur le Témoin, veuillez-nous indiquer sur le plan, où se trouve la
19 vieille ville de Dubrovnik?
20 Réponse: Voilà, ici. La vieille ville, c'est ce noyau classé se trouvant
21 sous protection.
22 Question: Classé ou protégé de quelle façon?
23 Réponse: Il est classé patrimoine culturel mondial.
24 Question: On voit d'autres parties sur ce plan; c'est là ce qui constitue
25 la ville tout entière de Dubrovnik, n'est-ce pas?
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1 Réponse: Oui, on voit toute la ville de Dubrovnik, mais la plus jolie
2 partie de Dubrovnik se trouve ici, à droite de la vieille ville: c'est le
3 secteur de Ploce s'étirant jusqu'à l'hôtel Belvédère.
4 Et sur la carte que l'on voit ici, l'endroit n'est pas visible, mais je
5 puis vous montrer la partie qui montre l'emplacement exact.
6 Question: Ce n'est pas nécessaire pour le moment.
7 Vous avez mentionné des hôtels où avaient été placés des réfugiés de la
8 région. Pourriez-vous nous indiquer l'emplacement de ces hôtels sur le
9 plan?
10 Réponse: Je peux le faire.
11 Question: Allez y.
12 Réponse: Les réfugiés étaient installés dans tous les hôtels, plus ou
13 moins, mais il y en avait le plus à Babinkuk; ce sont les hôtels qui sont
14 en noir, ici, et à l'hôtel Libertas qui se trouve ici, là où je suis en
15 train de montrer à présent.
16 Bien sûr, il y en avait d'installés dans d'autres hôtels, mais c'était là
17 que se trouvaient la plupart d'entre eux.
18 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Nous pouvons laisser de côté le plan
19 pendant un instant, mais laissons-le sur le rétroprojecteur.
20 Vous avez déjà dit que le début du pilonnage s'est fait le 1er octobre.
21 Quelle fut la durée des pilonnages sur toute la ville?
22 M. le Président (interprétation): Je pense qu'il avait dit que c'était le
23 23 octobre.
24 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Oui, mais la vieille ville, Monsieur
25 le Président. Moi, je parlais du pilonnage de toute la région.
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1 M. le Président (interprétation): Fort bien.
2 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Quand a commencé le pilonnage de la
3 région tout entière? Et nous nous concentrons ici sur l'année 1991.
4 Pouvez-vous nous le dire?
5 M. Poljanic (interprétation): Oui, cela a duré avec des interruptions
6 pratiquement jusqu'à la libération de la région tout entière.
7 Cependant, cela a duré en réalité jusqu'en été 1995, parce qu'il serait
8 injuste de ne pas mentionner le fait que le dernier obus est tombé en août
9 1995, en tuant trois personnes innocentes.
10 Question: Je vous avais demandé de vous concentrer sur l'année 1991. Et
11 quand s'est terminé le pilonnage de Dubrovnik?
12 Réponse: Le 31 décembre. Et ils ont constamment, pas tous les jours, c'est
13 vrai, mais il y a des registres, des fichiers, et cela a été pilonné en
14 novembre, donc en octobre, novembre et surtout le 11 décembre. Puis, tous
15 les jours, on pilonnait peut-être de façon moins intense qu'en décembre,
16 mais il arrivait des obus s'agissant des secteurs à l'extérieur de la
17 vieille ville. Ces secteurs ont été pilonnés de façon intense.
18 Toujours est-il que la vieille ville chopait des obus occasionnellement
19 aussi. Et la culmination est arrivée le 6 décembre lorsque les désastres
20 ont été véritablement catastrophiques, non seulement pour Dubrovnik, mais
21 pour la région entière.
22 Question: Vous avez dit que le pilonnage de la vieille ville avait
23 commencé le 23 octobre?
24 Réponse: Oui.
25 Question: Et cela s'est poursuivi jusqu'au 6 décembre?
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1 Réponse: Vous voulez dire depuis le 23? Oui, le 23, il n'est tombé que
2 deux obus. Puis, par la suite, quelques jours après j'entends, il en est
3 tombé davantage, puis davantage, puis un peu moins, puis davantage. Et,
4 vers la mi-décembre, on a eu une culmination: plusieurs centaines nous
5 sont tombés dessus. Et si vous voulez, le total des obus qui sont tombés
6 sur la vieille ville -je dirais qu'il y a un fichier concernant chaque
7 obus tombé sur la vieille ville-, je dirais qu'il en est tombé sur la
8 vieille ville, au total 1.056.
9 Question: Vous avez déjà déclaré qu'au mois de novembre, il y a eu des
10 pilonnages intensifs les 10, 11 et 12 novembre, aussi bien de la vieille
11 ville que de la ville en tant que telle.
12 Réponse: La ville entière et la vieille ville, c'est exact. Les pilonnages
13 ont eu lieu aussi entre la mi-novembre et le 6 décembre, les pilonnages
14 n'ont pas été aussi intensifs, mais cela avait été des pilonnages quand
15 même.
16 Question: Dubrovnik, toute la ville et la vieille ville aussi, depuis
17 quelles positions était-elle pilonnée?
18 Réponse: Eh bien, depuis les positions de Zarkovica, de Grab, de
19 Strincera, de Mocici, puis la partie occidentale de la piste
20 d'atterrissage de Cilipi, depuis Brgat, pour ce qui est maintenant de ces
21 positions. Maintenant s'agissant des positions à partir desquelles on a
22 pilonné Slano et Sipan, je dirais que c'étaient des positions qui se
23 trouvaient derrière Slano, au-dessus de la route qui va de Slano vers
24 Orahovi Dol, Ravno et toute la région de Popovo Polje.
25 Question: Je vous arrête, je vous interromps ici, parce qu'en fait ce qui
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1 m'intéressait, c'étaient uniquement les positions depuis lesquelles on a
2 pilonné Dubrovnik. Le pilonnage de Slano ne m'intéressait pas, nous
3 parlons uniquement de Dubrovnik.
4 Réponse: Bon.
5 Question: Et je vais demander l'aide de l'huissier pour présenter au
6 témoin la pièce P361, intercalaire 34.
7 (Intervention de l'huissier.)
8 Monsieur le Témoin, est-ce là une photographie de Dubrovnik?
9 Réponse: Oui.
10 Question: Pourriez-vous nous montrer sur cette photographie où se trouve
11 Zarkovica?
12 Réponse: La photographie a été prise justement depuis Zarkovica; celui qui
13 a pris la photographie a pris la photographie depuis l'endroit appelé
14 Zarkovica.
15 Question: Et est-ce que depuis Zarkovica on avait une vue dégagée de la
16 veille ville?
17 Réponse: Tout à fait dégagé! Mis à part le port de Gruz que l'on ne peut
18 pas voir depuis Zarkovica.
19 Question: Sur la photographie, on indique aussi le lieu de Babinkuk. Vous
20 avez mentionné différents hôtels dont l'hôtel "Libertas" à Babinkuk. Est-
21 ce que l'emplacement est bien indiqué sur cette photographie?
22 Réponse: Babinkuk se trouve indiqué. L'hôtel "Libertas" n'est pas indiqué
23 avec exactitude idéale. C'est un peu en dessous du point rouge: c'est là
24 que se trouve exactement Libertas. Mais plus ou moins c'est cela.
25 Question: Et est-ce que la vieille ville, ainsi que la ville de Dubrovnik
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1 tout entière, a été la cible d'obus tirés par des bateaux ou des
2 vaisseaux?
3 Réponse: Oui.
4 Question: Est-ce que ce que montre cette photographie est exact,
5 s'agissant d'obus tirés à partir de bateaux?
6 Réponse: Oui.
7 Question: Je vous remercie.
8 Réponse: Je vais faire une parenthèse. Sur cette photographie, je ne vois
9 pas les emplacements à partir desquels on avait pilonné le secteur de
10 Ploce. C'est depuis les bateaux vers Ploce que les pilonnages ont été très
11 intenses. Et à gauche, au coin gauche, se trouve l'hôtel "Belveder"; des
12 jours durant, il a été pilonné depuis des bateaux. On ne voit pas l'hôtel
13 et on ne voit pas l'emplacement de ces bateaux. Donc cette photographie
14 n'est pas suffisamment bien prise pour que l'on puisse le voir.
15 Question: Je vous remercie. Est-ce qu'il y a eu pilonnage à l'aveuglette,
16 de façon indiscriminée, de la vieille ville ou est-ce que certains
17 bâtiments ont été pris pour cible de façon précise? Le savez-vous? Avez-
18 vous observé quelque chose dans ce sens?
19 Réponse: Mon impression, c'est qu'on n'avait pas ciblé les bâtiments parce
20 que la ville entière a été bombardée dans son intégralité. Le septième
21 jour, lorsque je suis monté sur les remparts, je n'ai malheureusement pas
22 pu trouver un seul toit où il n'y ait pas eu d'obus de tombé ou des éclats
23 d'obus tombés sur ce toit depuis un toit voisin. Ça, c'est la vérité. Je
24 dirais qu'il n'y avait pas d'objectif précis, mais l'objectif avait été la
25 ville entière; quand je dis la ville, j'entends la vieille ville.
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1 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Messieurs les Juges, je ne voudrais
2 pas aborder dans trop de détails les dégâts occasionnés à la vieille
3 ville, puisque nous allons avoir un témoin, M. Franjic, prévu. C'est un
4 expert tout en étant un témoin oculaire; c'est lui qui va nous parler des
5 dégâts subis. Inutile d'en parler deux fois.
6 Monsieur le Témoin, vous avez déjà déclaré que pratiquement tous les toits
7 ont été endommagés et vous faites référence au pilonnage du 6 décembre.
8 C'est bien cela?
9 Réponse: Pas seulement à compter du 6 décembre, mais il faut englober le 6
10 décembre aussi. Mais il y a eu des toits endommagés auparavant, pas au
11 point où cela s'est fait le 6 décembre.
12 Question: J'aimerais, en fait, parler avec vous des pertes pour autant
13 qu'il y en ait eu en ville. A cet effet, j'aimerais pour nous aider
14 présenter au témoin l'intercalaire 35 de la pièce 361. C'est, en fait,
15 l'annexe n°2 de l'Acte d'accusation portant sur la Croatie.
16 Monsieur le Témoin, avez-vous eu l'occasion d'examiner ces documents dans
17 le cadre de la préparation de votre témoignage en présence de
18 représentants du Procureur dont moi-même?
19 Réponse: Oui.
20 Question: Ici, vous voyez une liste de noms avec, en regard des noms, des
21 dates. Seriez-vous en mesure de nous dire si ces personnes énumérées dans
22 l'annexe ont été tuées le jour qui est indiqué, à l'endroit qui est
23 indiqué en face de leurs noms? Est-ce qu'à cet égard, la liste est exacte?
24 Réponse: Oui.
25 Question: Savez-vous si ces personnes ont été tuées et quelles
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1 informations avez-vous obtenu à cet effet?
2 Réponse: Oui. Parmi ces noms-là, il y a des noms d'amis à moi. J'ai appris
3 le même jour, le jour du décès des personnes, j'ai reçu des rapports, des
4 informations; et certaines des personnes figurant sur cette liste ont même
5 été enterrées par mes soins.
6 Question: Est-ce que cela veut dire que la liste, qui commence par le 1er
7 octobre et Mato Violic jusqu'au 6 décembre avec le nom d'Ilija Radic, est
8 exacte?
9 Réponse: Oui.
10 Question: Les personnes qui sont ici reprises dans cette liste, c'étaient
11 des civils, des soldats ou est-ce qu'il y avait aussi bien des civils que
12 des soldats? Le savez-vous?
13 Réponse: Eh bien, pour être sincère, ici, je ne peux pas vous dire s'il y
14 a eu un soldat. Peut-être, parmi les inconnus, y en a-t-il eu, mais de
15 toutes les personnes que je connaissais sur cette liste, il n'y en avait
16 pas une seule qui était soldat; peut-être l'une de celles que je ne
17 connaissais pas.
18 Question: Pourriez-vous nous indiquer les personnes dont vous savez que
19 c'étaient des civils? Contentez-vous de nous énumérer les noms en
20 parcourant la liste.
21 Réponse: Vous voulez que je vous lise les noms?
22 Question: Oui, s'il vous plaît.
23 Réponse: Par exemple, Mato Violic était un civil; je le connaissais très
24 bien, depuis Osvojnik. Puis, Milan Milisic, un écrivain; Stjepo Cikato;
25 Jozo Brajovic, les frères Liban; puis, Maskaric; puis, Bokun.
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1 Question: Les deux?
2 Réponse: Les deux, les deux. Puis, Bruno Glanc, Pavo Urban. Voilà, c'est
3 ceux que j'aurai à vous vous citer, partant de cette liste.
4 Question: Et parmi ceux qui ont été tués le 6 décembre, est-ce qu'il y a
5 des pompiers, des sapeurs-pompiers?
6 Réponse: Excusez-moi, avant de répondre à cette question, je viens de
7 noter qu'il y avait aussi quelques soldats; je viens de me rendre compte
8 qu'il y en avait quelques-uns qui étaient soldats. Allez-y.
9 Question: Vous n'avez pas répondu à la question que je vous ai posée. Je
10 vous ai posé une question à propos de sapeurs-pompiers; je vous ai demandé
11 si, parmi ceux qui ont été tués le 6 décembre, il y avait des sapeurs-
12 pompiers?
13 Réponse: Oui. Eh bien, c'est au moment où l'hôtel "Libertas", qui était
14 d'ailleurs plein de réfugiés, avait pris feu, suite à tous les obus qui
15 sont tombés dessus. Et cet hôtel "Libertas" était en flammes. Plusieurs
16 sapeurs-pompiers sont allés sauver ces gens-là; parmi eux, il y avait ce
17 jeune homme que j'ai mentionné, Bruno Glanc, et un obus est tombé dessus
18 et l'a tué sur place.
19 Question: Et les autres sapeurs-pompiers sont-ils repris sur cette liste?
20 Réponse: Je crois qu'il y avait Jablan, Paskojevic, Mihocevic… Je ne
21 connais pas tous les noms de famille. Je crois que le groupe avait compté
22 cinq personnes; parmi elles, trois étaient des sapeurs-pompiers de
23 profession et deux autres s'étaient jointes à elles pour leur venir en
24 aide. Et les cinq sont mortes.
25 Question: Vous venez de mentionner que vous veniez de voir plusieurs
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1 soldats sur cette liste. Pourriez-vous nous donner leurs noms?
2 Réponse: Je pense… Oui, je pense qu'Ivo Martinovic était soldat. Si c'est
3 celui que j'ai à l'esprit, alors si c'est bien lui, c'était un soldat; à
4 moins qu'il ne s'agisse là d'un autre Martinovic. Mais je pense que lui
5 avait été soldat. Puis ce jeune, si c'est également la même personne que
6 je crois être, à moins qu'il n'y ait un nom de famille identique; je crois
7 que c'est le même.
8 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Quel nom?
9 M. Poljanic (interprétation): Ivo Martinovic.
10 M. Kwon (interprétation): Qui est né en 1915?
11 M. Poljanic (interprétation): Oh, alors non, ce n'est pas lui, ce n'est
12 pas celui-là, je m'excuse. Non, le Martinovic en question, c'était un
13 homme jeune. Je ne sais pas si son prénom était Ivo, je sais que son nom
14 de famille était Martinovic et je sais qu'il est mort à Srdj. Mais s'il
15 est né en 1915, ce n'est certainement pas la même personne. Je m'excuse.
16 Et cela signifierait que, parmi ceux-là, il n'y avait pas un seul soldat.
17 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Vous le constaterez ici, cet élément
18 n'est pas indiqué dans la liste.
19 J'aimerais maintenant, avec l'aide de l'huissier, présenter au témoin
20 l'intercalaire 36 de la pièce 361.
21 (Intervention de l'huissier.)
22 J'aimerais que vous vous concentriez sur un seul article qui se trouve,
23 Messieurs les Juges, à la page 7 de la traduction en anglais. Il s'agit
24 d'un article qui a pour titre "Conséquences tragiques du 6 décembre.". Il
25 y a une erreur dans la traduction qui dit "6 septembre" mais, en fait, il
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1 s'agit de l'attaque du 6 décembre.
2 Et sont ici énumérés les noms que nous trouvons en annexe, noms repris en
3 date du 6 décembre. Et, de surcroît, est mentionnée ici la chose suivante:
4 "Défenseurs courageux de Dubrovnik et membres du Corps de la Garde
5 nationale, Marko Bitunjac, Nenad Covic, Mario Zelenika, Saban Islamovski
6 et Miroslav Buntic". Et ensuite viennent des noms de civils: sont énumérés
7 plusieurs noms que l'on retrouve en annexe, annexe dont nous avons parlé.
8 Question: Comment était-il possible, Monsieur le Témoin, d'opérer une
9 distinction entre ceux dont on pouvait dire que c'étaient des soldats et
10 les autres, dont on disait que c'étaient des civils? Savez-vous qui a fait
11 cette distinction?
12 Réponse: Des civils, ce sont des civils, et ceux qui portaient l'uniforme,
13 un fusil à la main, c'étaient des soldats.
14 Question: Savez-vous qui a dressé la liste de ces gens?
15 Réponse: Non, je ne sais pas, je ne sais pas.
16 Question: Fort bien. Je vous remercie.
17 Toujours dans ce journal, deux pages plus loin, Messieurs les Juges, il
18 s'agit de la page 9, on trouve un article qui dit: "La caserne des
19 sapeurs-pompiers de Dubrovnik en guerre s'expose à des périls en sauvant
20 d'autres vies humaines." (Fin de citation.)
21 Quel est l'incident au cours duquel les sapeurs-pompiers ont été tués par
22 une grenade alors qu'ils essayaient de sauver les gens se trouvant à
23 l'hôtel "Libertas"?
24 Réponse: C'est ce que j'avais en tête, c'est là qu'on cite les trois noms:
25 Mihocevic, Savinovic et Paskojevic. Il manque encore les deux qui sont
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1 allés les aider, les deux malheureux qui sont allés l'aider.
2 Question: Je vous remercie.
3 Au moment du pilonnage de Dubrovnik et, en particulier, au moment du
4 pilonnage de la vieille ville, aviez-vous une fonction, un poste de
5 commandement militaire? Et si ce n'est pas le cas, quelles étaient vos
6 fonctions à l'époque, que faisiez-vous exactement? Où étiez-vous? Je pense
7 plus précisément à la période allant de la mi-novembre 1991 au 6 décembre
8 1991?
9 Réponse: Je me trouvais à Dubrovnik, je n'occupais aucune position
10 militaire, j'étais maire à Dubrovnik. Et si vous vouliez demander où je me
11 trouvais, dans quel bâtiment, parfois c'était le siège de l'assemblée
12 municipale de Dubrovnik, parfois dans la forteresse de Saint-Ivan, parce
13 qu'on avait estimé que c'était plus sûr qu'à la municipalité.
14 A part cela, nous n'avions ni énergie électrique, ni eau, ni autre chose,
15 et nous n'avions pas d'électricité pour faire marcher les téléphones. Il
16 n'y avait pas les téléphones portables comme de nos jours. On avait
17 installé un groupe électrogène vers un emplacement qui, par la suite, a
18 été pilonné lui aussi, mais cela nous a permis d'avoir un peu d'énergie
19 électrique pour avoir des communications téléphoniques avec le reste du
20 monde; c'était la seule communication.
21 Pendant un certain temps, nous étions au bas, au contre-bas de cette
22 forteresse et, pendant un certain temps, nous avons séjourné dans un
23 atelier qui se trouvait en haut, l'atelier d'un artiste célèbre appelé
24 (l'interprète n'a pas entendu son nom.)
25 Question: Monsieur le Témoin, cette forteresse de Saint-Ivan et ce studio
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1 se trouvent-ils dans la vieille ville?
2 Réponse: Oui, dans la vieille ville.
3 Question: Selon vos observations, selon ce que vous savez, y avait-il des
4 installations militaires dans la vieille ville dans cette période allant
5 du mois d'octobre au 6 décembre 1991?
6 Réponse: Vraiment et très franchement, je n'ai connaissance de l'existence
7 d'aucune installation, d'aucune cible militaire dans la vieille ville.
8 Question: Y avait-il des positions d'artillerie dans la vieille ville ou
9 au voisinage immédiat de la vieille ville, si vous le savez? Et je me
10 limite toujours à cette période qui va du début octobre au 6 décembre
11 1991.
12 Réponse: Je n'ai connaissance de l'existence d'aucune position
13 d'artillerie dans la vieille ville. Je n'ai jamais entendu dire que le
14 moindre obus ait été tiré à partir de la vieille ville. Or j'ai passé
15 toute cette période à cet endroit-là. Et pour autant que je le sache, la
16 position la plus proche de la ville était un mortier de faible portée qui
17 se trouvait dans le parc de Gradac, donc assez près de la vieille ville.
18 Et bien que je ne sois pas un expert militaire, ce mortier se trouvait
19 sans doute à cet endroit parce qu'à partir de ce parc, il était possible
20 d'atteindre y compris Zarkovica. C'est ce que je suppose, mais je n'en
21 suis pas sûr: Zarkovica, mais je n'en suis pas sûr.
22 Je crois qu'il y avait aussi un canon antiaérien d'un calibre de 20
23 millimètres.
24 Nous avons réussi à l'obtenir, je ne sais plus pour quelle raison, mais je
25 pense que c'était parce que sa culasse était endommagée que nous sommes
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1 parvenus à la réparer par la suite.
2 Donc ce canon a été déplacé sur une petite remorque d'un endroit à un
3 autre. pour donner l'impression que nous possédions plusieurs canons de ce
4 genre. Mais je répète: c'était un 20 millimètres de calibre. Les experts
5 militaires me diront si je me trompe: peut-être que c'était 22
6 millimètres, je ne sais pas exactement, en tout cas autour de 20
7 millimètres.
8 Il a été placé près de la ville parce que la route longe les remparts,
9 donc il est possible qu'il ait circulé à cet endroit. Et je l'ai vu un
10 jour près du restaurant "Dubravka", sur sa remorque. Mais je ne me
11 souviens pas s'il est resté à cet endroit 5 minutes ou 5 heures.
12 Question: Le parc de Gradac, à quelle distance se trouve-t-il en mètres de
13 la vieille ville?
14 Réponse: A peu près à 500 mètres à vol d'oiseau, à peu près.
15 Question: Vous avez dit que ce canon de 20 ou 22 millimètres de calibre se
16 déplaçait sur la route, mais lui est-il arrivé de tirer des obus lorsqu'il
17 était au voisinage de la vieille ville? Etes-vous au courant de cela et
18 notamment dans cette période qui va de mi-novembre 1991 au 6 décembre
19 1991?
20 Réponse: Je garantis que cela n'a pas eu lieu, je le garantis.
21 Question: Le canon dont vous venez de parler ou en tout cas tout objet
22 militaire éventuel, savez-vous si, à quelque moment que ce soit, ils
23 auraient pu se trouver au voisinage des hôtels qui abritaient les réfugiés
24 à Babinkuk ou à l'hôtel "Libertas"?
25 Réponse: Je ne sais vraiment pas où ils se trouvaient, mais comme je
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1 connaissais les gens du quartier général, je ne pense pas qu'ils se
2 seraient, à quelque moment que se soit, permis d'autoriser une chose
3 pareille, notamment parce qu'ils connaissaient le danger dans lequel se
4 trouvaient ces malheureux réfugiés abrités dans les hôtels.
5 Question: Des soldats ou des unités militaires ou de la police ont-elles
6 été, à quelque moment que ce soit, stationnés au voisinage de la vieille
7 ville pendant cette période, donc toujours début octobre-6 décembre 1991?
8 Réponse: Eh bien, écoutez, pas mal de soldats qui faisaient partie de
9 l'armée croate étaient originaires de la vieille ville de Dubrovnik, et
10 s'ils recevaient un jour, deux jours ou trois jours de permission, et même
11 quelquefois huit jours –mais, enfin, ça, je le dis sans connaître la durée
12 exacte des permissions- enfin quand ils étaient en permission, il leur
13 arrivait souvent de rentrer chez eux, donc de venir dans la vieille ville.
14 Donc, dans cette période, il arrivait assez souvent que l'on voie un jeune
15 soldat en uniforme entrer dans la vieille ville. Mais des soldats
16 stationnés dans un bâtiment de la vieille ville, vraiment, je n'ai pas
17 connaissance de cela, et je pourrais jurer, pour ma part, qu'il n'y en a
18 pas eu.
19 Question: Ces soldats dont vous avez parlé, où étaient-ils stationnés? Où
20 se trouvait le front en fait?
21 Réponse: Le premier ou le dernier, selon l'angle où l'on se place, le
22 premier point du front de cette armée serbo-monténégrine se trouvait à 200
23 mètres de l'hôtel Argentina. C'était donc soit la première position tenue
24 par cette armée, soit la dernière; en tout cas, c'est là que se trouvait
25 ce que j'appellerai leur "bunker" ou ce que vous voudrez bien l'appeler
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1 vous-même.
2 Question: Avec l'aide de M. l'huissier, j'aimerais soumettre une nouvelle
3 fois au témoin la carte qui constitue la pièce 326 intercalaire 13, c'est-
4 à-dire non pas la carte mais le plan de la ville de Dubrovnik.
5 (Intervention de l'huissier.)
6 Pouvez-vous nous indiquer sur ce plan l'endroit en question? A moins qu'il
7 n'y figure pas.
8 Réponse: Non, c'est un peu difficile à voir sur le plan, car ça se trouve
9 à droite de la ville, ici. Il faudrait que l'on me déplie en tout cas ce
10 papier.
11 Question: Très bien, ce sera fait.
12 Réponse: Eh bien, ce que je vous montre ici, c'est l'emplacement de
13 l'hôtel Argentina. Et eux, ils étaient juste là, au sommet de cette
14 colline qui se trouve à 200 mètres à peu près, avec une marge de 20 ou 30
15 mètres en plus ou en moins.
16 Question: A quelle distance de la vieille ville?
17 Réponse: Je ne sais pas exactement. Disons 500, 600, ou peut-être 700
18 mètres à peu près. 700, 800 mètres, disons. Mais nous pouvons faire le
19 calcul: là, il y a 300 mètres et puis 650, 700 mètres à vol d'oiseau, je
20 dirai. 650, 700.
21 Question: Où se trouvait le QG de l'armée, à l'époque où M. Marinovic s'y
22 trouvait? Pouvez-vous nous montrer où était stationné l'état-major de M.
23 Marinovic?
24 Réponse: Un instant, je vous prie.
25 Eh bien, juste ici. Dans cette partie des faubourgs de la ville qui répond
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1 au nom de Lapad, il y a un endroit à cet endroit qui s'appelle l'hôtel
2 "Zagreb", et puis un autre ici.
3 Question: Est-ce que ces soldats ou ces unités de l'armée stationnés à cet
4 endroit dont vous avez parlé, stationnés non loin des hôtels abritant des
5 réfugiés ont été pilonnés?
6 Réponse: A Babinkuk, non. Mais tout près de l'endroit où se trouvait le
7 QG, il est certain qu'il y a eu des pilonnages.
8 Question: Vous avez parlé de Lapad: pouvez-vous nous dire dans quels
9 hôtels étaient logés les soldats?
10 Réponse: "Sumartin" et "Zagreb".
11 Question: Est-ce que c'était bien l'hôtel "Zagreb"?
12 Réponse: Oui, je crois que c'était l'hôtel "Zagreb".
13 Question: Vous avez dit que les pilonnages ont été particulièrement
14 intenses le 10, le 11 et le 12 novembre, ainsi que le 6 décembre. Ces
15 pilonnages auraient-ils été provoqués par la population ou par les hommes
16 en armes qui défendaient Dubrovnik; avez-vous des informations à ce sujet?
17 Réponse: Nous n'étions pas en mesure de provoquer. Nous étions absolument
18 impuissants par rapport aux agresseurs qui représentaient la troisième ou
19 la quatrième force armée européenne et, pour ce qui nous concerne, au
20 départ, nous étions un groupe comptant moins de cent hommes. Donc en aucun
21 cas, il ne pouvait être question de provocation.
22 Question: Vous avez parlé de l'électricité, mais pouvez-vous nous parler
23 également de l'adduction d'eau ou de l'approvisionnement en eau à partir
24 du 1er octobre et jusqu'au 6 décembre?
25 Réponse: Jusqu'à l'été, selon les données officielles, nous n'avons pas
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1 bénéficié de 153 jours d'électricité et de 132 jours d'eau. Il y avait une
2 canalisation qui datait encore de l'époque des Français, qui partait du
3 lac de réserve, et en remettant cette canalisation en usage -je ne sais
4 pas très bien de quelle façon, c'était assez compliqué- nous avons pu nous
5 procurer de petites quantités d'eau de temps en temps. Lorsque je dis "de
6 petites quantités", c'était à peine quelques litres, mais ces quelques
7 litres avaient une très grande valeur pour nous parce que la ville était
8 vraiment dans une situation catastrophique: on menaçait de la pilonner, et
9 elle était plus peuplée que jamais dans son histoire. Donc le moindre
10 filet d'eau, la moindre petite averse était bienvenue, notamment au mois
11 de novembre pour atténuer un peu ces difficultés.
12 Question: Lorsque vous parlez de quelques litres d'eau, est-ce que cela
13 signifie quelques litres par jour et par personne, ou autre chose?
14 Réponse: Il y a des moments où, personnellement, en tant que dirigeant de
15 la ville de la municipalité, j'ai disposé d'un litre d'eau par jour pour
16 tous mes besoins.
17 Question: Tout cela à partir du 1er octobre, n'est-ce pas?
18 Réponse: Oui.
19 Question: Vous ne pouviez pas vous fournir en eau à la mer?
20 Réponse: Non.
21 Question: Pourquoi?
22 Réponse: Parce qu'ils étaient à 200 ou 300 mètres de nous, ils nous
23 prenaient pour cible de leurs tireurs isolés et, si nous sortions des
24 remparts de la ville, c'était impossible pour nous. D'ailleurs,
25 quelquefois, ils nous visaient, y compris lorsque nous étions dans les
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1 remparts. Et dans cette situation, personne n'avait le courage d'aller
2 chercher de l'eau à la mer, car il était fort probable, dans ces
3 conditions, que l'on soit tué. Donc pour parler des toilettes, par
4 exemple, nous ne pouvions même pas utiliser l'eau de la mer pour les
5 toilettes.
6 Question: J'aimerais maintenant parler des négociations et des ultimatums
7 dont vous avez déjà dit quelques mots.
8 Pouvez-vous nous dire si vous avez participé à une réunion tenue le 11
9 octobre 1991 avec l'amiral Jokic et, si oui, pouvez-vous nous dire s'il
10 s'agissait de votre première rencontre avec lui?
11 Réponse: Oui.
12 Question: Qui a participé à cette réunion, de votre côté d'une part, du
13 côté de la JNA de l'autre?
14 Réponse: Du côté croate, il y avait M. Zeljko Sikic qui était, à l'époque,
15 Président du pouvoir municipal. Il y avait M. Macan, chargé des affaires
16 communales, Hrvoje Macan; puis Miso Mihocevic qui était interprète, et
17 puis, il y avait moi-même. Donnez-moi quelques instants, que je me
18 souvienne s'il y avait d'autres participants de notre côté. Je ne me
19 souviens pas.
20 Question: Et du côté de la JNA?
21 Réponse: Du côté de la JNA, il y avait l'amiral Jokic; il y avait le
22 lieutenant-colonel, si je ne m'abuse, le docteur Svicevic et Sofronije
23 Jeremic qui est devenu amiral, par la suite; à l'époque, il était
24 capitaine de vaisseau de guerre, peut-être même capitaine de frégate; en
25 tout cas, il a été promu très rapidement.
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1 Question: L'amiral Jokic vous a-t-il fait savoir quel était son poste
2 exact; dans l'armée, je veux dire?
3 Réponse: Nous avons discuté de la situation sur le terrain. Moi, c'était
4 la première fois que je le rencontrais. A un certain moment, il a dit que
5 c'était lui qui commandait les unités en mouvement vers l'ouest, vers
6 Dubrovnik, vers la ville? Je dis bien qu'il m'a dit cela le 11, date à
7 laquelle Cavtat était encore libre. Enfin, relativement libre, parce que
8 toute la région était occupée, mais Cavtat n'était pas encore occupée.
9 Question: Et Jeremic, quel était son poste?
10 Réponse: Je crois qu'il était officier du renseignement, enfin je suppose.
11 Question: Qu'est-ce qui vous fait penser cela?
12 Réponse: Un peu tout, parce qu'il était toujours présent lors des
13 pourparlers et je suppose que c'étaient bien les fonctions qu'il exerçait.
14 Question: Le docteur Svicevic?
15 Réponse: J'ai entendu dire qu'il était médecin spécialisé dans la
16 psychologie en temps de guerre et je crois que c'est lui qui a organisé
17 tout ce qu'il a fallu organiser pour créer ce climat dans lequel nous
18 étions censés les avoir attaqués, ce qui était contraire totalement à la
19 réalité. Et toutes ces histoires dans lesquelles il était question de
20 30.000 Oustachis qui les auraient attaqués et qui menaçaient Boka, alors
21 que cela n'avait rien à voir avec la vérité. En tout cas, c'était
22 quelqu'un de très brutal et de très arrogant au cours des négociations.
23 Question: Qui a parlé, ce jour-là, de 30.000 Oustachis en armes menaçant
24 Boka?
25 Réponse: Ce jour-là, non, mais dans la période antérieure, oui. C'est en
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1 parlant ainsi qu'ils ont recruté pas mal de monde, au Monténégro, pour
2 aller à Dubrovnik. Ce jour-là, non; parce que, ce jour-là, Konavli avait
3 déjà été pris.
4 Question: Lorsque vous avez rencontré l'amiral Jokic et ces deux autres
5 hommes, vous ont-ils dit pour quelle raison ils attaquaient Dubrovnik? Et
6 si oui, qu'ont-ils dit exactement?
7 Réponse: Ils n'ont cessé d'affirmer qu'il y avait là-bas 7.000
8 terroristes, mercenaires, Kurdes et je ne sais plus quoi, et qu'il fallait
9 que ces hommes se rendent.
10 Question: Mais était-ce vrai? Y avait-il des mercenaires?
11 Réponse: Mais comment? Mais non, dans notre armée, nous n'avions pas un
12 seul mercenaire. Nous avions un étranger dans nos rangs…
13 Question: Je vous en prie. Oui, oui, allez-y.
14 Réponse: Nous avions un étranger dans les rangs de notre armée; c'était un
15 Néerlandais marié à une femme de Dubrovnik et qui s'est trouvé à Dubrovnik
16 au moment de l'attaque. Et donc, il s'est présenté à l'armée croate en
17 tant que volontaire et, par chance, il est resté vivant. Je pense
18 qu'aujourd'hui encore, il réside et vit aux Pays-Bas. Je ne connais pas
19 son nom; si je le connaissais, j'aimerais…
20 Question: Très bien, très bien. Avez-vous dit cela à l'amiral Jokic? Lui
21 avez-vous dit que ce qu'il disait était faux?
22 Réponse: Oui.
23 Question: Quelle a été sa réaction?
24 Réponse: Aucune. Il n'a absolument pas réagi, il a continué comme si je
25 n'avais rien dit.
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1 Question: Avez-vous protesté contre ce qui se passait dans la ville et
2 dans la région?
3 Réponse: Oui, nous l'avons fait.
4 Question: Quelle a été la réaction?
5 Réponse: Il n'y a pas eu de réaction, ils ont continué.
6 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Vous avez parlé d'un ultimatum qui
7 vous avait été adressé.
8 Avec l'aide de M. L'huissier, j'aimerais vous soumettre la pièce à
9 conviction 361, intercalaire 39.
10 (Intervention de l'huissier.)
11 La traduction se trouve, en fait, dans un autre document.
12 M. le Président (interprétation): Nous devons suspendre l'audience
13 aujourd'hui, en fait, à 13 heures 45 exactement. Donc je pense que nous
14 allons le faire maintenant.
15 Madame Uertz-Retzlaff, je suppose que vous n'en avez plus pour très
16 longtemps avec ce témoin?
17 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Non, Monsieur le Président, une
18 vingtaine de minutes.
19 M. le Président (interprétation): Bien. Pas plus, je vous prie, car nous
20 devons achever demain l'interrogatoire principal et le contre-
21 interrogatoire du témoin suivant et traiter de quelques questions
22 administratives.
23 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Monsieur le Président, j'ai quelque
24 chose à vous dire qui concerne également le témoin et les autres personnes
25 présentes dans le prétoire. Je ne serais pas disponible le 18, donc c'est
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1 mon collègue M. Nice qui poursuivra l'interrogatoire principal et qui sera
2 présent également au moment du contre-interrogatoire.
3 M. Nice (interprétation): Les articles de presse, dont a parlé Mme Laber,
4 sont prêts. J'ai reçu un original de ses mains, en tout cas je pense que
5 c'était un original. Je n'en ai pas parlé avec elle. Et la Chambre
6 pourrait se contenter de copies.
7 M. le Président (interprétation): Oui.
8 M. Nice (interprétation): Ce sont des documents de grande taille, mais il
9 était impossible de les présenter autrement. J'aimerais donc remettre ces
10 documents. Quant au document relatif aux questions de calendrier -dont
11 j'ai déjà parlé- il est prêt également, il est en cours de dépôt auprès du
12 Greffe. Mais je fournirai ce que j'appellerai des "copies de courtoisie" à
13 toutes les personnes présentes ici, y compris l'accusé avant la suspension
14 d'audience, de façon à ce que ce document puisse être examiné avant la fin
15 de l'audition de ce témoin.
16 M. le Président (interprétation): Très bien. Une cote pour les articles de
17 presse?
18 Mme Anoya (interprétation): Pièce à conviction de l'accusation 360.
19 M. Nice (interprétation): Merci. Puisque nous parlons de questions
20 administratives, il y a une annexe B qui doit encore être agrandie. Je
21 pense que d'ici mercredi prochain je disposerai de la version agrandie, en
22 tout cas nous aurons progressé d'ici là.
23 M. le Président (interprétation): Très bien. Nous allons suspendre.
24 Monsieur Poljanic, je pense devoir vous dire que d'ici à mercredi
25 prochain, nous ne siégerons pas dans le cadre de ce procès, nous avons
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1 d'autres questions à traiter. Je vous demande donc d'être de retour dans
2 ce prétoire mercredi prochain lorsque le procès reprendra.
3 Je suspends l'audience pour le moment.
4 (L'audience est levée à 13 heures 48.)
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