Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 (Mardi 4 mars 2003.)

2 (L'audience est ouverte à 9 heures 04.)

3 (Le témoin, M. Ivan Grujic, est dans le prétoire.)

4 M. le Président (interprétation): Oui, Madame Uertz-Retzlaff, vous pouvez

5 continuer.

6 (Interrogatoire principal du témoin, M. Ivan Grujic, par Mme Uertz-

7 Retzlaff.)

8 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Merci, Monsieur le Président.

9 Monsieur Grujic, je vous ai déjà dit que j'aimerais évoquer avec vous

10 quelques questions relatives aux installations de détention. Avec l'aide

11 de M. l'Huissier, je vais vous soumettre l'intercalaire 5 de la pièce 402.

12 (Intervention de l'huissier.)

13 Voilà. Monsieur l'Huissier, la voici.

14 Je vous demande simplement d'examiner la page où les camps sont classés,

15 sont ventilés par Etat. Et est-ce que vous pourriez voir aussi les

16 emplacements, les lieux de ces camps?

17 Mais parlons d'abord des Etats. Vous avez pour la Croatie: 2.404 détenus.

18 Est-ce que cela veut dire que ce sont des installations de détention en

19 RSK, ou est-ce que ceci inclut également les camps administrés par les

20 autorités croates?

21 M. Grujic (interprétation): Cela n'a trait qu'aux camps qui sont situés

22 dans la RSK.

23 Question: Et vous donnez un chiffre de 802 détenus à propos desquels vous

24 dites: "Aucune information". Est-ce que la même explication qu'hier vaut

25 ici également, à savoir qu'il y avait tellement peu d'éléments

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1 d'information qu'il vous était impossible de vous prononcer?

2 Réponse: Oui. Les documentations étaient inaccessibles, et il s'agissait

3 de détenus qui ont été libérés au niveau local jusqu'en 1991, dans une

4 phase préalable à la mise en place de ces commissions d'Etat.

5 Question: Lorsque vous avez préparé votre déposition, est-ce que vous avez

6 examiné des camps qui sont plus précisément repris dans l'Acte

7 d'accusation portant sur la Croatie ?

8 Réponse: Oui.

9 Question: Au cours de votre déposition, vous avez également mentionné le

10 fait qu'il y a eu plusieurs détenus qui ont été transférés d'un camp à

11 l'autre. Est-ce qu'ils auraient été inscrits une seule fois ou plusieurs

12 fois?

13 Réponse: Les données que j'ai présentées sont des données afférentes à

14 leur dernier séjour au camp, donc cela concerne le camp dont ils sont

15 sortis, mais ils sont recensés tant par le CICR et il y a également leurs

16 déclarations qui font état de tous les camps par lesquels ils sont passés.

17 Question: En d'autres termes, ils n'apparaissent qu'une fois dans vos

18 archives, à savoir la dernière fois ou le dernier camp dans lequel ils se

19 sont trouvés.

20 Maintenant, parlons des camps au Monténégro. Dites-nous ce qu'il en est

21 pour le nombre de détenus, mais aussi la période de temps au cours de

22 laquelle ces camps ont existé, le type d'endroit qu'ils représentaient à

23 votre connaissance. Et vous pourrez peut-être nous parler des conditions

24 qui prévalaient dans le camp, et surtout s'il y a eu des exactions

25 commises dans ces camps.

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1 Nous allons commencer par le camp de Morinje, au Monténégro. Vous avez

2 recensé 346 détenus. Qu'êtes-vous en mesure de nous dire, outre cela?

3 Réponse: D'après les registres dont dispose le bureau, 346 détenus ont été

4 fichés en tant que détenus libérés du camp de Morinje. Ce camp de Morinje

5 a compté un maximum de détenus entre le 1er octobre 1991 et la mi-décembre

6 de cette même année 1991. D'après les dires de ces détenus-là, le camp se

7 trouvait dans l'enceinte d'un entrepôt militaire où les conditions de

8 détention étaient extrêmement mauvaises. Il n'y avait pas de préalable sur

9 le plan médical et sanitaire.

10 Question: D'où venaient les personnes détenues dans ce camp, le savez-

11 vous?

12 Réponse: Les détenus sur le territoire du Monténégro à Morinje, Kumbor et

13 autres se trouvaient être des gens originaires de Dubrovnik et des

14 environs. Donc ces gens-là étaient installés dans ces camps-là.

15 Question: Puis, vous avez le camp de Kumbor. A quel moment ce camp a-t-il

16 existé? Etait-ce un camp de transit? Que pouvez-vous nous dire à son

17 propos?

18 Réponse: Le camp de Kumbor existait en même temps, donc entre le mois

19 d'octobre et de novembre 1991. Et nous avons recensé un petit nombre de

20 détenus de là-bas, parce que c'était un camp qui ne servait que de

21 transition, d'étape pour le transfert des détenus vers d'autres secteurs

22 du Monténégro.

23 Question: Savez-vous si c'était une installation militaire?

24 Réponse: Je ne sais pas si c'étaient des installations militaires.

25 Question: Passons maintenant à la Bosnie. Et je me contenterai de parler

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1 du camp de Bileca. Qu'avez-vous à nous dire à propos de ce camp?

2 Réponse: Depuis ce camp à Bileca, il a été procédé à l'échange de 131

3 détenus. Le camp a été mis sur pied entre octobre et décembre 1991 avant

4 le début de tout conflit dans le secteur. Et à Bileca, l'on a malmené de

5 façon exceptionnelle les prisonniers de guerre; chose qui est illustrée

6 par la documentation que nous avons à notre disposition.

7 Question: S'agissant de ces camps se trouvant au Monténégro, savez-vous

8 s'il y a eu des exactions commises dans ces camps? Avez-vous des

9 indications dans ce sens?

10 Réponse: De règle, dans tous ces camps enregistrés, il y a eu de mauvais

11 traitements physiques à l'intention des détenus.

12 Question: Passons maintenant à la Serbie. En premier lieu, nous avons

13 Stajicevo. Que pouvez-vous nous dire à propos de Stajicevo?

14 Réponse: Stajicevo, c'est un camp où, pour la plupart des cas, l'on

15 amenait des détenus originaires de Vukovar. On a recensé 661 détenus à

16 Stajicevo. Ce camp avait eu un maximum de détenus entre le 18 novembre

17 1991 jusqu'au 21 décembre de cette même année. Les installations,

18 c'étaient des installations agricoles, c'étaient des locaux d'une ferme

19 agricole, donc cela n'était pas du tout adapté à la détention de personne.

20 On a recensé là qu'il y a eu des cas de meurtres de prisonniers de guerre.

21 Par exemple, Branko Koh, Ivan Kunac.

22 Question: Oui. Et savez-vous combien de personnes ont été tuées, là?

23 Réponse: Au moins une dizaine de personnes. Et je ne puis parler ici que

24 des noms que je viens de vous citer.

25 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Allez-y.

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1 M. Grujic (interprétation): Donc je peux parler de ce Branko Koh et Ivan

2 Kunac. Et si vous le souhaitez, je peux vous fournir des détails à leur

3 sujet.

4 M. le Président (interprétation): A moins qu'il y ait une raison

5 particulière à fournir ces détails, je pense qu'il y a tellement

6 d'éléments de preuve qu'il faut poursuivre, avancer.

7 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Oui.

8 A propos de Stajicevo, est-ce que c'était aussi une installation ou un

9 camp de transit?

10 M. Grujic (interprétation): Stajicevo, c'était un camp de transit. Parce

11 que les prisonniers, de là, étaient transférés vers la prison de Sremska

12 Mitrovica. Parce que c'est vers cet endroit-là que l'on faisait transiter

13 les détenus des autres prisons et des autres camps.

14 Question: Et Begejci, à quel moment cet endroit a-t-il existé? Est-ce que

15 c'était aussi un camp de transit?

16 Réponse: C'était un camp de transit aussi. La période où il y a eu le plus

17 de détenus, c'était entre le 1er octobre 1991 et la fin novembre de la

18 même année. Et c'était là une ferme qui était exploitée, gérée par la JNA.

19 On y a recensé 555 détenus.

20 Question: Nous avons les chiffres dans nos listes, le nombre étant de 555.

21 Et ces gens, où ont-ils été transférés après ce camp?

22 Réponse: Ils ont été transférés vers Sremska Mitrovica.

23 Question: Zrenjanin, une seule question: est-ce que c'était aussi un camp

24 de transit?

25 Réponse: D'après les renseignements dont nous disposons, les détenus ne

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1 restaient que peu de temps à Zrenjanin. Il s'agit plutôt d'une localité à

2 proximité de Zrenjanin, cette localité s'appelant Ecka.

3 Question: Sid, est-ce que c'était une prison militaire? Quand a-t-elle

4 existé?

5 Réponse: La prison de Sid a été mise sur pied le 20 juillet 1991 déjà, et

6 a existé jusqu'au 25 janvier 1992. Il s'agissait là d'une prison

7 militaire. Les détenus se faisaient transférer des cellules de détention

8 au sein des bâtiments de la police vers la prison qui se trouvait dans les

9 locaux d'une école, d'une auto-école. Et nous avons recensé 23 détenus,

10 pour ce qui est de cette prison-là.

11 Question: Vous avez déjà donné les chiffres pour Sremska Mitrovica, mais

12 dites-nous au cours de quelle période il y a eu des détentions?

13 Réponse: Les détenus de Sremska Mitrovica se sont trouvés là-bas entre le

14 mois de novembre 1991 et, suite à leur transfert depuis Stajicevo et

15 Begejci, où il y a eu une forte concentration de détenus. C'était, en

16 fait, une maison de correction, et c'est en 1994 que les détenus qui

17 s'étaient trouvées là ont été libérés.

18 Question: Savez-vous comment se présentaient les conditions de détention?

19 Soyez bref.

20 Réponse: Les conditions de détention étaient quelque peu meilleures qu'à

21 Stajicevo et à Begejci; mais il y avait une grande concentration de

22 détenus sur un espace très réduit. L'alimentation n'était pas régulière,

23 les conditions sanitaires étaient également mauvaises, alors que

24 l'assistance médicale se réduisait à l'assistance médicale fournie par les

25 détenus eux-mêmes, donc ceux d'entre eux qui avaient des connaissances

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1 médicales. Il y a eu des cas d'assassinat de détenus dans cette unité de

2 Sremska Mitrovica.

3 Question: Parlons maintenant de la Croatie. Commençons par Knin. Ces

4 installations de détention de Knin, quand ont-elles existé? Quelles

5 étaient les conditions qui y régnaient?

6 Réponse: A Knin, nous avons recensé 671 détenus entre le mois d'août 1991

7 jusqu'au mois de novembre de la même année. Et ces détenus ont été gardés

8 dans les installations du vieil hôpital et dans la caserne.

9 Alors, les conditions de détention, là aussi, étaient extrêmement

10 mauvaises et il y a eu plusieurs détenus qui se sont fait tuer ou qui ont

11 été malmenés.

12 Question: Dalj. Que pouvez-vous nous dire à propos de Dalj? Quand cet

13 endroit a-t-il fonctionné?

14 Réponse: Dalj avait également une unité de détention qui se trouvait dans

15 les installations d'une ferme, dans les bâtiments d'une ferme. Il y en

16 avait une autre dans le bâtiment d'un poste de police. Ce camp a eu un

17 maximum de détenus entre août et novembre 1991. On y a recensé 29 détenus

18 et, dans le camp même, on a noté qu'il y a eu meurtre de détenus; la liste

19 se trouve aux paragraphes 51, 52 et 55, en annexe 1.

20 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Vukovar. Quand ce camp a-t-il existé?

21 M. le Président (interprétation): Est-ce que je peux avoir l'aide de Mme

22 la Greffière?

23 M. Grujic (interprétation): A Vukovar, il y a eu deux sites principaux; il

24 y en a eu plusieurs, mais deux sites principaux tout de même. C'est là

25 qu'il y a eu la plus grande concentration de détenus. C'était dans les

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1 installations industrielles, dans les halls de l'entreprise "Velepromet"

2 et de l'entreprise "Komerc". Et à un moment donné, il y avait 723

3 personnes qui étaient détenues là et qui ont été transférées vers

4 Stajicevo et Begejci, sur le territoire de la Serbie. Une autre partie a

5 été transférée vers Ovcara, vers les bâtiments de la ferme agricole, pour

6 ensuite être emmenée vers le lieu d'exécution d'Ovcara.

7 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Les installations de détention, à

8 quel moment ont-elles opéré, ont-elles fonctionné?

9 M. Grujic (interprétation): Ces unités de détention ont existé… Ou plutôt,

10 leur concentration la plus importante a été entre le 18 novembre et la fin

11 du mois de novembre de cette année-là.

12 Question: Et pour ce qui est du dernier camp de détention, Borovo Selo?

13 Réponse: A Borovo Selo, nous avions un camp installé en partie dans une

14 école, ou plutôt dans la salle des sports de cette école. Et l'autre

15 segment avait été installé dans les bâtiments d'une ferme agricole

16 industrielle que l'on appelle "Lovas".

17 Question: Et ces deux camps ont été opérationnels à quelle époque?

18 Réponse: Eh bien, je crois l'avoir dit, ces camps ont existé dans la même

19 période, donc entre le mois d'octobre… Je dirai même plus: celui qui était

20 dans la salle de sport de l'école existait dès le mois d'août 1991. Alors

21 que, pour ce qui est de la ferme de Lovas, on y a ouvert un camp lorsqu'il

22 y a eu un grand nombre des détenus arrivés de Vukovar.

23 Question: Les installations de détention dans lesquelles il n'y a pas eu

24 de détenus enregistrés à titre officiel, est-ce que ce type d'unité de

25 détention se trouve enregistré sur vos listes?

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1 Réponse: Non. Dans ces documents, il n'y a pas d'installations de

2 détention à partir desquelles il n'a pas été procédé à des libérations ou

3 il n'y a pas eu recensement par le CICR. Donc c'est le plus petit des

4 nombres possibles de camps de détention, là donc où il y a eu libération

5 et échange ou enregistrement par le CICR.

6 Question: Vous avez dit que des détenus ont été tués dans ces unités de

7 détention. Pouvez-vous nous donner un total?

8 Réponse: Il m'est difficile de vous dire en ce moment quel a été ce total,

9 parce que le nombre ne cesse de croître au fur et à mesure de nos

10 enquêtes. Je sais qu'au moins une dizaine de personnes ont été tuées à

11 Sremska Mitrovica. Et nous avons déjà dit qu'un grand nombre de personnes

12 ont été tuées au camp de Borovo Selo. S'agissant des camps de Vukovar,

13 donc qui se trouvaient à proximité de Vukovar, Borovo "Komerc" et

14 "Velepromet", on y a tué un très grand nombre de personnes qui ont, par la

15 suite, été retrouvées dans les fosses communes.

16 Question: Une toute dernière question de ma part. Vous avez mentionné les

17 mauvais traitements dans les camps. Avez-vous noté des signes de mauvais

18 traitements que vous auriez constaté personnellement vous-même?

19 Réponse: Oui. Je vaquais aux échanges des prisonniers de guerre entre la

20 période allant de 1993 et au fil des années qui ont suivi. J'ai rencontré

21 un très grand nombre de personnes qui avaient des traces très visibles de

22 coups sur eux lors des échanges. Je dois dire que tous ces détenus

23 échangés ont été traités de manière médicale où l'on a constaté, à titre

24 officiel, le type de blessures subies. Il existe à ce sujet une

25 documentation médicale très volumineuse. Et je puis personnellement

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1 parler, donner des noms de ceux qui ont été malmenés physiquement, chose

2 que nous avons constatée sur le site même de ces lieux ou les échanges se

3 sont faits.

4 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Monsieur le Président, c'étaient les

5 questions que le Bureau du Procureur avait à poser.

6 (Les Juges se consultent sur le siège.)

7 M. le Président (interprétation): Monsieur Milosevic, il vous appartient

8 de procéder au contre-interrogatoire du témoin. S'il y a des questions que

9 vous voulez contester dans le courant de ce témoignage, vous avez le droit

10 de le faire. Mais je dois vous rappeler que vous devez vous en tenir au

11 témoignage et ne pas aller trop en largeur pour ce qui est du contre-

12 interrogatoire et vous aventurer dans les sujets au sujet desquels le

13 témoin ne pourrait pas vous répondre. Vous devez vous limiter à ce qu'il

14 est en mesure de vous dire.

15 Vous pourrez disposer de deux heures un quart, si vous avez besoin de ce

16 temps pour procéder au contre-interrogatoire; vous pourrez peut-être

17 procéder un peu plus rapidement. Allez-y.

18 (Contre-interrogatoire du témoin, M. Ivan Grujic, par l'accusé M.

19 Milosevic.)

20 M. Milosevic (interprétation): Je ne comprends pas, Monsieur May, pourquoi

21 tous ces avertissements. Car si je pose une question que vous estimeriez

22 non pertinente, vous avez à chaque fois l'attention de me prévenir de la

23 chose.

24 Monsieur Grujic, vous êtes policier depuis 1972, n'est-ce pas?

25 M. Grujic (interprétation): C'est cela, Monsieur Milosevic.

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1 Question: Quels étaient les postes de travail que vous avez occupés au

2 niveau de la police municipale?

3 Réponse: Dans ma déclaration écrite, il a été fourni une description

4 précise de tout ce que j'ai fait dans la police. J'y ai précisé que j'ai

5 occupé toutes sortes de tâches policières allant de chargé de secteur, ou

6 plutôt de policier, jusqu'aux fonctions d'inspecteur.

7 Question: A compter de quelle année avez-vous été membre du HDZ, je vous

8 prie?

9 Réponse: Je pense que mon affiliation politique importe peu. Mais je peux

10 vous dire que je ne suis pas membre du HDZ.

11 Question: Vous n'avez pas été membre?

12 Réponse: Jamais.

13 Question: En votre qualité de policier, avez-vous travaillé à Osijek?

14 Réponse: Oui, Monsieur Milosevic. Cela figure également dans ma déposition

15 écrite.

16 Question: Quand avez-vous travaillé à Osijek?

17 Réponse: De 1972 à 1992.

18 Question: Etant donné le fait que c'est précisément à cette période-là que

19 vous vous trouviez à Osijek, il est certain que vous connaissez Branimir

20 Glavas, M. Seks, M. Vekic et d'autres?

21 Réponse: Ecoutez, la question se pose de ce que vous entendez par

22 "connaître". S'agissant de M. Seks, je le connais depuis qu'il est devenu

23 membre du Parlement. Je connais également M. Glavas qui a été responsable

24 d'une province de Osijek et Baranja. Et pour ce qui est de M. Vekic, il a

25 été ministre de l'Intérieur au ministère où j'ai travaillé, donc je l'ai

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1 connu. Donc je ne peux pas dire que je les ai connus personnellement, mais

2 je sais que ces gens auront occupé les fonctions qui ont été les leurs.

3 Mais je n'ai pas eu de contacts autres.

4 Question: Mais étiez-vous au courant des activités qui étaient les leurs à

5 l'époque, alors que vous travailliez dans la police de Osijek?

6 Réponse: Je ne comprends pas votre question. Quelles activités?

7 Question: Activités relatives à l'expulsion organisée, à la liquidation,

8 aux mauvais traitements, aux licenciements des Serbes de toute cette

9 région-là?

10 Réponse: Je ne puis parler de ces questions-là parce que je ne sais rien

11 de concret à ce sujet.

12 Question: Si vous ne savez pas, nous allons immédiatement de l'avant.

13 Après l'arrivée du HDZ au pouvoir, pouvez-vous me dire qui avait été le

14 chef de la sûreté d'Etat à Osijek?

15 Réponse: Monsieur Branko Budic a été chef avant cela, et il est resté chef

16 après.

17 Question: Bien. Et que savez-vous me dire au sujet de l'assassinat du chef

18 de la police à Osijek, M. Josip Rajhl-Kir?

19 Réponse: S'agissant de M. Reichl-Kir, je l'ai bien connu; j'ai coopéré

20 avec lui de façon très bonne. J'ai été présent dans le bâtiment de la

21 police lorsque nous avons appris la nouvelle de son décès, à savoir la

22 nouvelle de son meurtre entre Osijek et Tenja. Une enquête a été conduite,

23 mais elle n'a pas été conduite à terme.

24 Question: Vous ne savez rien d'autre?

25 Réponse: Je sais que la personne suspectée pour ce meurtre avait été un

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1 certain M. Gudelj qui aurait ouvert le feu à cet endroit-là. Mais le

2 processus est en cours, encore, et je n'ai pas été participant direct.

3 M. Milosevic (interprétation): Donc vous savez que l'auteur de ce meurtre

4 est un Gudelj, un dénommé Gudelj qui est né à Tenja, près de Osijek, et

5 qui a fui vers l'Australie?

6 (Interruption du Président.)

7 M. le Président (interprétation): Quelle est la pertinence de cette

8 question par rapport au procès?

9 M. Milosevic (interprétation): C'est pertinent pour ce témoin-ci, parce

10 que le dénommé Reichl-Kir, chef du SUP à Osijek, a été tué parce qu'il

11 était opposé aux violations de la loi et aux crimes qui étaient commis en

12 masse, à l'époque. Et parce que, d'après les renseignements dont je

13 dispose, le témoin, avec ce Branimir Glavas et le nommé Budic, est en

14 corrélation avec… est lié au meurtre du dénommé Reichl-Kir.

15 M. le Président (interprétation): C'est une allégation très grave.

16 Effectivement, vous pouvez la soumettre au témoin de façon à ce qu'il y

17 réponde. Mais en quoi ceci nous est utile?

18 Monsieur Milosevic, écoutez, nous parlons ici d'assassinats par milliers;

19 nous parlons de détention, de personnes détenues par milliers. Dans quelle

20 mesure ceci nous aide-t-il? Même s'il est exact que cet homme a été tué,

21 quelle est cette pertinence? Quelle est la pertinence de tout ceci, même

22 si vous avez raison?

23 M. Milosevic (interprétation): Si vous estimez, Monsieur May, que cela

24 n'est pas une question pertinente pour ce témoin-ci, qu'il en soit ainsi.

25 Nous aurons...

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1 M. le Président (interprétation): Non, non. Je veux que ce soit vous qui

2 expliquiez ceci, parce que c'est qui défendez cette thèse. Quelle est la

3 pertinence? Expliquez-nous cette pertinence.

4 M. Milosevic (interprétation): J'estime que cela est pertinent parce que

5 je dispose de renseignements disant que l'auteur de ce meurtre est le

6 dénommé Gudelj, né à Tenja, et que le témoin, avec Glavas et Budic, a

7 participé à l'organisation de l'assassinat du chef de police à Osijek qui,

8 lui, s'opposait aux violences et s'opposait aux tueries en masse et aux

9 liquidations en masse des Serbes, à l'époque, sur ce même territoire.

10 Aussi...

11 M. le Président (interprétation): Ce que je veux comprendre, c'est ceci:

12 êtes-vous en train d'affirmer que ceci justifie la détention ou les

13 meurtres qui se sont produits?

14 M. Milosevic (interprétation): Mais non, Monsieur May. Mais jamais un

15 crime ne saurait justifier un autre crime; vous le savez fort bien vous-

16 même.

17 Ici, il est juste question de la crédibilité de ce témoin. Et j'estime

18 avoir le droit de poser des questions afférentes à la crédibilité de ce

19 témoin. Indépendamment...

20 M. le Président (interprétation): Oui, oui, vous pouvez poser des

21 questions à propos de la crédibilité du témoin.

22 Mais vous devez réfléchir à ceci: au lien entre ces allégations

23 d'exactions envers les Serbes, comme vous les alléguez, et les faits que

24 nous avons ici, fais présentés par l'accusation, allégués par

25 l'accusation, s'agissant de détentions en masse et d'assassinats en masse.

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1 Réfléchissez-y, car vous voudrez nous parler de tout ceci en temps utile.

2 Vous devez penser à la pertinence, au lien.

3 Mais nous n'allons pas poursuivre. Vous pouvez sans nul doute poser cette

4 question au témoin. Livre à vous de lui poser des questions. D'ailleurs,

5 c'est moi qui vais le faire.

6 Monsieur Grujic, on laisse entendre que c'est vous qui avez eu un lien, un

7 rapport avec cet assassinat-ci en particulier. Est-ce qu'il y a la moindre

8 vérité dans cette allégation?

9 M. Grujic (interprétation): Ce n'est pas exact; aucune de ces allégations

10 faites par M. Milosevic pour ce qui est de l'assassinat de M. Kir. Et il

11 n'est pas vrai non plus que j'ai eu quoi que ce soit à voir. Je n'ai rien

12 su jusqu'au moment où j'ai appris qu'il a été tué. Et je dois vous dire

13 que j'ai été très touché par la chose, car c'était là un bon ami à moi. Et

14 je pense que...

15 M. le Président (interprétation): Quels était votre poste, votre fonction

16 votre grade au poste de police?

17 M. Grujic (interprétation): A ce moment-là, au moment des faits, j'étais

18 agent opérationnel qui couvrait le territoire de la municipalité d'Osijek.

19 Et, de par l'exercice de ces fonctions, j'ai exercé une coopération des

20 plus étroites avec M. Kir.

21 M. le Président (interprétation): Oui, Monsieur Milosevic?

22 M. Milosevic (interprétation): J'espère que nous pouvons quand même aller

23 de l'avant? Très bien.

24 Monsieur Grujic, vous avez présenté ici un grand nombre de victimes de la

25 guerre civile en Croatie, en citant des chiffres, parfois mêmes des noms,

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1 parfois aussi des sites particuliers, et ainsi de suite.

2 Je voudrais que vous répondiez à la question suivante: vous êtes policier;

3 par voie de conséquence, vous connaissez le métier. Donc qui, quand, où,

4 sous quelles circonstances a-t-il tué ces particuliers pour que vous

5 puissiez, dans un témoignage contre moi, présenter tous ces

6 renseignements-là?

7 M. Grujic (interprétation): Qui, quand et où, les renseignements existent;

8 il y a des témoins à cet effet. Mais mon témoignage ici est un témoignage

9 d'expert pour indiquer où l'on a retrouvé les victimes et quel a été le

10 nombre; non pas de déterminer qui, quand et où on les a tuées.

11 M. Milosevic (interprétation): Mais ces témoins dont vous dites qu'ils

12 existent -et je vais vous saisir au mot- ont-ils confirmé que cela a quoi

13 que ce soit à voir avec la Serbie et avec moi-même?

14 M. le Président (interprétation): Il ne revient pas au témoin de répondre

15 à cette question. Le témoin peut uniquement déposer à propos des sujets

16 sur lesquels il a mené des enquêtes et les chiffres, les données qui en

17 ont résulté, ce genre de choses. Il ne peut pas répondre à des questions

18 très générales portant sur les moyens de preuve.

19 M. Milosevic (interprétation): C'est là la substance de la question,

20 Monsieur May. Si, ici, vous présentez toutes les victimes individuelles de

21 la guerre et si vous les rattachez à cet Acte d'accusation injustifié,

22 c'est tout à fait dénué de sens. Qu'est-ce que tout cela a à voir avec

23 moi?

24 M. le Président (interprétation): Bien sûr, c'est la thèse que vous, vous

25 défendez. Et nous devrons trancher cette question, précisément. Mais pour

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1 le moment, nous nous occupons d'un élément bien précis du dossier,

2 d'éléments de preuve particulièrement bien définis. Vous ne pouvez poser

3 d'autres questions à ce témoin.

4 M. Milosevic (interprétation): Bien, Monsieur May. Nous allons quand même

5 aller de l'avant.

6 Monsieur Grujic, au début de votre témoignage hier, vous avez parlé de

7 rencontres bilatérales avec des représentants d'une commission analogue

8 provenant de la République fédérale de Yougoslavie, n'est-ce pas?

9 M. Grujic (interprétation): Oui, c'est exact, Monsieur Milosevic.

10 Question: Y a-t-il beaucoup de réunions de ce type?

11 Réponse: Il y a eu un grand nombre de réunions. Il y a eu plus de 100

12 réunions de ce type qui se sont tenues au sujet de cette problématique.

13 Question: Madame Uertz-Retzlaff a insisté sur le fait que certaines de ces

14 réunions ont été des réunions où il y avait non seulement des

15 représentants de la Yougoslavie et de la Croatie, mais d'autres où il y

16 avait des représentants de la RS et de la RSK. Je n'ai pas pris bonne

17 note. Peut-être y avait-il les uns et les autres? C'est bien ce que vous

18 avez dit?

19 Réponse: Précisément cela.

20 Question: Et combien de réunions y a-t-il eu avec une telle participation?

21 Réponse: Des dizaines de réunions de ce genre. Si cela vous intéresse, je

22 peux retrouver la liste.

23 Question: Non, point n'est besoin de le faire. Je voulais juste constater

24 si cela était le cas.

25 Réponse: C'est ainsi que cela s'est fait.

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1 Question: Dites-moi, je vous prie, si vous avez compris que cette

2 invitation ou cette participation de ces représentants-là avait été une

3 question de bonne volonté aux fins de résoudre un problème humanitaire,

4 raison pour laquelle il a été institué des commissions de part et d'autre?

5 Ou alors avez-vous estimé, comme l'autre partie, la partie adverse vous

6 laisse entendre la chose, qu'il s'agissait là d'un rôle de coordination au

7 niveau de cette commission par la République fédérale de Yougoslavie?

8 Réponse: Le rôle de coordination est incontestable; je puis vous présenter

9 des détails à ce sujet.

10 Question: C'est ce que vous affirmez? Très bien. Donc vous avez estimé que

11 ce rôle avait été un rôle de coordination?

12 Réponse: Voyez-vous, Monsieur Milosevic, si j'ai organisé la libération de

13 prisonniers originaires du territoire de la RSK qui se trouvaient là, en

14 prison, avec des représentants de la République fédérale de Yougoslavie,

15 il est évident qu'il s'agit d'action coordonnée. Et si j'ai parlé de

16 découvrir des personnes portées disparues sur le territoire de la Bosnie,

17 provenant de ces régions-là, c'est là aussi un détail indicatif.

18 Question: Mais, Monsieur Grujic, si vous dites vous-même qu'à cette

19 réunion il y avait le représentant de cette même commission de la RSK ou

20 de la Republika Srpska, on suppose alors que vous vous êtes entretenu avec

21 ces représentants-là sur ces questions, et non pas avec les représentants

22 d'un pays où les prisonniers en question ne se trouvaient pas, n'est-ce

23 pas?

24 Réponse: Non. Je l'affirme une fois de plus. Il avait été négocié de la

25 libération ou de la découverte de personnes portées disparues avec M.

Page 17318

1 Pavle Todorovic, pour ce qui est de découvrir des personnes sises sur le

2 territoire de la Bosnie.

3 Question: Mais n'est-ce pas là la bonne volonté et l'assistance de M.

4 Todorovic –si mes souvenirs sont bons, lui, il était ministre de la Santé-

5 pour ce qui était de vous aider auprès des autorités de la RSK pour

6 essayer de retrouver ces personnes? Comment pouvait-il, autrement, le

7 faire?

8 Réponse: Je respecte la bonne volonté des gens, mais nous parlons ici de

9 compétence et nous parlons de situation de fait.

10 Question: Très bien. On y viendra tout de suite, à cette question de

11 compétence. Au préalable, je voudrais que vous m'apportiez un

12 éclaircissement. Est-ce que j'ai bien compris que tous les prisonniers qui

13 s'étaient trouvés sur le territoire de la République fédérale de

14 Yougoslavie étaient originaires… ou étaient des prisonniers faits du temps

15 des conflits avec la JNA; à savoir, c'étaient des prisonniers qui ont été

16 faits prisonniers en 1991 ou début 1992, où il y a eu un grand conflit des

17 effectifs ou des forces croates avec la JNA tout au large de la Croatie?

18 Réponse: Il y a eu des emprisonnements ultérieurs. Il y a eu des

19 prisonniers qui, par la suite, se sont trouvés sur le territoire de la

20 République fédérale de Yougoslavie.

21 Question: Vous voulez dire qu'on a fait des prisonniers qui n'ont pas été

22 faits prisonniers par la JNA du temps où la JNA existait sur tout le

23 territoire de la Yougoslavie, et ce sont là des personnes qui se seraient

24 retrouvées en RFY?

25 Réponse: C'est exact.

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1 Question: Avez-vous une liste à ce sujet?

2 Réponse: Oui, j'en ai une. Et je vais vous dire tout de suite…

3 (Le témoin cherche dans ses papiers.)

4 Par exemple, ce Vanin Zlatko, il a été emprisonné à l'occasion d'un

5 conflit armé dans le secteur frontalier entre la Hongrie et la

6 Yougoslavie. Il a été en prison d'instruction militaire à Belgrade, puis

7 il a été transféré vers le territoire de Krajina, plutôt à Knin, et c'est

8 là qu'il a été libéré.

9 Question: Attendez, nous ne nous sommes pas bien compris. Moi, je vous ai

10 demandé si l'un quelconque de ces prisonniers qui n'aurait pas été fait

11 prisonnier lors des conflits avec l'armée, la JNA, se serait trouvé en

12 qualité de prisonnier sur le territoire de la République fédérale de

13 Yougoslavie?

14 Réponse: Mais, pour être concret, cet homme-là n'a pas été fait prisonnier

15 par la JNA.

16 Question: La police, probablement, à la frontière?

17 Réponse: Non, non, pas à la frontière.

18 Question: Avec la Yougoslavie?

19 Réponse: Oui, avec la Yougoslavie. Et il y a d'autres exemples en grand

20 nombre dans ce sens-là. Ces gens-là ont été faits prisonniers par la

21 police et ils ont séjourné dans des prisons sur le territoire de la

22 Yougoslavie à partir de laquelle ils ont été échangés.

23 Question: S'ils ont été emprisonnés par l'armée ou la police de

24 Yougoslavie, j'imagine qu'ils devaient être faits prisonniers sur le

25 territoire de la Yougoslavie? Ou alors, ont-ils été faits prisonniers à

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1 l'époque où la JNA se trouvait sur le territoire entier de la Yougoslavie;

2 et ils ont été faits prisonniers par la JNA en tant que prisonniers de

3 guerre, n'est-ce pas?

4 Réponse: Je ne sais pas quelles avaient été les compétences des uns ou des

5 autres; et ce n'est pas là l'objet de mon témoignage.

6 Question: Ah, très bien.

7 Réponse: Mais je puis parler du séjour de ces gens-là dans des

8 installations sises sur le territoire de la Yougoslavie, à savoir la

9 Serbie et le Monténégro. Je puis vous dire le nombre de personnes qui s'y

10 trouvaient incarcérées, mais je ne peux pas parler des circonstances.

11 Question: Mais n'étaient-ce pas là des personnes qui ont été emprisonnées

12 par la JNA dans le courant des conflits?

13 Réponse: Pas seulement la JNA, mais aussi les unités paramilitaires sur le

14 territoire de la République de Croatie; par les formations militaires.

15 Donc ces emprisonnements se sont faits par ces formations. Et ils se sont

16 retrouvés dans des unités de détention sur le territoire de la

17 Yougoslavie.

18 Question: Bien. Mais on va tirer tout cela au clair sous peu.

19 Vous dites également que la Yougoslavie, à savoir sa commission, avait

20 joué un rôle de coordination à l'occasion de ces échanges. Dites-moi: ce

21 rôle de coordination, ou quelque rôle que ce soit de la part de la

22 Commission de la République fédérale de Yougoslavie, a-t-il été considéré

23 par vous comme l'expression de son esprit de coopération ou d'autre chose

24 –quand je dis "esprit de coopération", j'entends aux fins d'aider à

25 résoudre ces problèmes humanitaires- ou avez-vous pensé qu'il y avait là

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1 des responsabilités autres?

2 Réponse: En tout état de cause, j'ai indiqué que j'avais salué tout esprit

3 de coopération qui aidait à retrouver et à libérer ces personnes. J'ai

4 également indiqué que le rôle de coordination était prédominant pour ce

5 qui est de cette commission de la République fédérale de Yougoslavie par

6 rapport aux commissions existant au sein de la RS ou sur le territoire

7 occupé de la République de Croatie, à savoir ce que l'on appelait à

8 l'époque la "RSK", la Krajina serbe.

9 Question: Très bien. Monsieur Grujic, dites-moi, maintenant: est-ce que

10 votre commission à vous, la commission que vous avez présidée vous-même,

11 commission chargée des prisonniers et des personnes portées disparues,

12 n'a-t-elle pas déployé ce même type d'activités pour ce qui est de la

13 libération de personnes par le biais d'une commission croate sur le

14 territoire de Bosnie-Herzégovine pour la libération des détenus croates?

15 Réponse: Nous avons réalisé une coopération avec les commissions sur le

16 territoire de la Bosnie, tant avec la commission bosnienne qu'avec la

17 commission de l'Herceg-Bosna de l'époque. Cette coopération n'était restée

18 qu'au niveau de la coopération. Mais nous n'avons jamais affirmé que la

19 République de Croatie pouvait faire quoi que ce soit pour ce qui est des

20 prisonniers détenus sur le territoire de la Bosnie; pas, du moins, pendant

21 que j'ai accompli ces fonctions.

22 Question: Très, très bien, Monsieur Grujic.

23 Etes-vous au courant d'une lettre que vous avez signée en votre qualité de

24 président de cette commission chargée des personnes détenues et portées

25 disparues avec la commission équivalente à Sarajevo, adressée à un certain

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1 Bulajic, le 28 juin 1993?

2 Réponse: Mais je ne sais pas du tout de quoi il s'agit. J'ai procédé à un

3 échange de grand nombre de documents avec la Republika Srpska, la RSK, la

4 Yougoslavie et la commission créée au niveau de la Fédération de la

5 Bosnie-Herzégovine.

6 M. Milosevic (interprétation): Au point 1, vous dites qu'il y a, sur la

7 liste, un grand nombre de personnes pour lesquelles la République de

8 Croatie n'a pas demandé la libération -entre parenthèses: 108-. Nous avons

9 demandé la coopération de la Commission du HVO de Herceg-Bosna. Donc vous

10 avez demandé confirmation et opinion de la part de cette dernière pour

11 coordonner les activités.

12 Vous dites par la suite: "Nous allons déterminer notre position

13 définitive, s'agissant du statut de ces personnes-là, et nous vous en

14 informerons ultérieurement".

15 C'est une lettre émanant de vous, Monsieur Grujic, datée du 28 juin. Et,

16 sans aucun doute, vous demandez l'opinion et la confirmation de la

17 Commission de Herceg-Bosna aux fins de vous permettre de conduire les

18 activités en vue des échanges. Est-ce que la chose est contestée ou pas,

19 Monsieur Grujic?

20 (Interruption du Président.)

21 M. le Président (interprétation): Un instant, s'il vous plaît, Monsieur

22 Grujic.

23 Il faudrait montrer cette lettre au témoin. Comment voudriez-vous qu'il

24 s'en souvienne? Il devrait avoir l'occasion de l'examiner pour apporter un

25 commentaire. Remettez-la, s'il vous plaît, à M. l'Huissier, si vous voulez

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1 que le témoin apporte un commentaire.

2 M. Milosevic (interprétation): Ce que je voudrais savoir, c'est si vous

3 contestez le fait que ce soit écrit, Monsieur Grujic?

4 M. Grujic (interprétation): Mais je vous ai dit que je devais d'abord

5 voir…

6 M. le Président (interprétation): Qu'il la voie d'abord.

7 M. Milosevic (interprétation): Fort bien.

8 (Intervention de l'huissier.)

9 M. Grujic (interprétation): Si vous le permettez, je crois que… Et si nous

10 devons nous entretenir à ce sujet-là, il serait très bon de lire toute la

11 lettre. Parce que ce que M. Milosevic a cité et arraché, tiré du contexte

12 de la lettre…

13 M. Milosevic (interprétation): (Inaudible.)

14 M. Grujic (interprétation): Il est clair que j'ai envoyé ce courrier-là.

15 M. le Président (interprétation): Pourriez-vous nous dire quelle est la

16 teneur de cette lettre, sur quoi elle porte? Et vous pourrez parler du

17 domaine plus précis sur laquelle porte la question de M. Milosevic.

18 M. Grujic (interprétation): Donc, il s'agit de la chose suivante. Le

19 président de la commission, à l'occasion des négociations de Novska et au

20 niveau de la Republika Srpska, a remis une liste de personnes détenues sur

21 le territoire de la Bosnie.

22 Cette liste-là, lorsque nous l'avons analysée, eh bien, nous avons

23 déterminé que, sur la liste, il y avait des personnes qui ne faisaient pas

24 l'objet de l'intérêt témoigné par la République de Croatie. Et les

25 personnes qui étaient intéressées par la République de Croatie ne se

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1 trouvaient pas sur cette liste de personne détenues.

2 C'est précisément la raison pour laquelle j'ai envoyé un courrier à

3 l'intention de M. Bulajic, pour le prévenir de ces faits-là; et, dans le

4 même courrier, j'ai indiqué ce que M. Milosevic a dit, à savoir que la

5 liste serait transmise par mes soins vers la commission de Herceg-Bosna,

6 la commission donc du HVO, pour voir si eux pouvaient constater que l'une

7 quelconque des personnes demandées par leurs soins figurait sur cette

8 liste, pour que nous puissions procéder, par la suite, aux concertations

9 afférentes.

10 Donc, si les personnes qui se trouvaient sur la liste, n'intéressaient pas

11 la République de Croatie –et c'est la chose que j'affirme ici-, on ne peut

12 pas en parler. Et je crois que je puis donc dire que je les dirige vers la

13 commission de Herceg-Bosna. Et le fait que je sois la personne qui

14 coordonne ou qui conduise ces activités pour le compte de Herceg-Bosna… Je

15 n'aurais pas écrit à M. Bulajic; je ne l'aurais pas dirigé vers la

16 commission de Herceg-Bosna.

17 M. Milosevic (interprétation): Monsieur Grujic, pour autant que je m'en

18 souvienne -car le texte se trouve maintenant entre vos mains-, vous dites,

19 vous indiquez que vous pourrez intervenir seulement lorsque… vous

20 interviendrez lorsque vous aurez confirmation et opinion de la part du HVO

21 de Herceg-Bosna.

22 Donnez-nous lecture du point 1 à voix haute.

23 M. Grujic (interprétation): Monsieur Milosevic, je puis lire le courrier

24 tout entier, si nécessaire.

25 Question: Ce n'est pas nécessaire. On ne peut pas lire tous les courriers.

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1 J'en ai plusieurs ici.

2 Réponse: Vous ne pouvez pas arracher du contexte une chose et puis, dire

3 quelque chose qui ne tient pas.

4 M. Milosevic (interprétation): Mais cela n'est pas arraché. C'est tout un

5 point 1. Et vous dites: quand vous obtiendrez une confirmation et opinion,

6 lorsqu'ils vous fourniront opinion et confirmation, vous pourrez décider.

7 C'est ce qui est dit dans ce point 1 de votre lettre.

8 Je vous prie de verser ce dossier en tant qu'élément de preuve, et vous

9 aurez tout le loisir de déterminer ce qui y est dit.

10 M. le Président (interprétation): Oui. Peut-être pourrions nous le faire

11 remettre à la Greffière?

12 M. Milosevic (interprétation): Qu'y a-t-il de mal…

13 M. le Président (interprétation): Mais attendez un moment, qu'on le verse

14 au dossier.

15 Mme Anoya (interprétation): Ce sera la pièce à conviction de la défense

16 n°107.

17 M. le Président (interprétation): Oui, Monsieur Milosevic?

18 M. Milosevic (interprétation): Eh bien, Monsieur Grujic, dites-moi ce

19 qu'il peut y avoir de répréhensible pour la commission en SRY, donc la

20 commission chargée des échanges, qu'y a-t-il de répréhensible à ce que, à

21 moment donné, elle représente les intérêts de la même commission pour la

22 Republika Srpska et pour la RSK? Est-ce que cela a donc quelque chose de

23 répréhensible, qu'elle reprenne le travail de la commission de Herceg-

24 Bosna?

25 M. Grujic (interprétation): Non, ce n'est pas un problème de

Page 17326

1 représentation des intérêts de qui que ce soit. Ce qui se passe ici, c'est

2 une influence exercée sur les autres commissions.

3 Question: Eh bien, je suppose, Monsieur Grujic, que dans ces commissions,

4 tout le monde souhaite exercer la plus grande influence possible pour

5 obtenir le plus grand nombre possible d'échanges et pour parvenir à

6 réduire au maximum les souffrances et les douleurs des gens? Je suppose

7 que c'est bien ce qui se passait?

8 Réponse: Non, je ne sais pas. Je ne vois pas ce que vous voulez dire.

9 Question: Mais toutes ces commissions avaient pour but de déployer tous

10 les efforts possibles pour aider les gens et pour accomplir sa propre

11 tâche, de son propre côté?

12 Réponse: Je sais ce qui se passe pour ma commission; je sais que son but

13 était d'aider les gens. Mais je ne peux pas parler au nom des autres

14 commissions.

15 Question: Est il vrai que Josip Kardum a été remplacé à son poste de

16 président de la commission par vous-même?

17 Réponse: Oui, c'est exact.

18 M. Milosevic (interprétation): Eh bien, je vais maintenant vous interroger

19 au sujet de ce qui figure aux paragraphes 2 et 3 de la lettre provenant de

20 votre commission et adressée à la commission chargée des échanges de

21 prisonniers à Banja Luka.

22 Vous dites que, si une personne, dont vous demandez la restitution au sein

23 de votre commission, devait être libérée dans le cadre d'un échange, vous

24 envisageriez, vous considéreriez que la commission en question a accompli

25 sa tâche vis-à-vis de vous.

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1 Donc c'est une lettre adressée à la commission chargée des échanges de

2 prisonniers où nous lisons les mots qui suivent –je cite-: "Les personnes

3 détenues par la République de Croatie que nous souhaiterions voir

4 échangées" (Fin de citation.)

5 Donc c'est ce que demande la République de Croatie.

6 Et puis, à la fin de la lettre, nous lisons –je cite-: "Nous estimons que

7 les échanges de ce genre doivent se faire en sus des dispositions des

8 Conventions de Genève et des accords de Budapest. Et si la personne dont

9 nous demandons la libération est libérée dans le cadre d'une autre

10 commission, nous considérerons que vous avez accompli votre devoir vis-à-

11 vis de nous et le même principe devra s'appliquer pour les deux parties."

12 (Fin de citation.)

13 Mais ceci n'indique qu'il y a coordination entre les diverses commissions,

14 n'est-ce pas?

15 M. le Président (interprétation): Que l'on remette cette lettre au témoin.

16 M. Milosevic (interprétation): Voilà la lettre.

17 (Intervention de l'huissier.)

18 Monsieur May, si nous continuons à travailler à un rythme aussi lent, nous

19 perdrons beaucoup de temps.

20 M. Grujic (interprétation): Excusez-moi, mais il faut bien que je lise le

21 document que vous m'avez remis.

22 D'ailleurs, je viens de le lire. Et nous y voyons écrit que la commission

23 chargée des échanges de prisonniers en Croatie a envoyé une lettre à la

24 commission homonyme de Banja Luka et s'est dite satisfaite des

25 propositions d'échanges qui ont été faites. Il est également stipulé que

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1 la commission indique que les prisonniers des autres camps de Bosnie ne

2 seront pas libérés suite à l'accord de Genève, mais il est proposé qu'un

3 certain nombre de détenus, dont les suivants, soient échangés. Et puis,

4 nous voyons la liste des détenus en question et je ne vois pas ce qui peut

5 poser problème ici.

6 M. Milosevic (interprétation): Est-ce que c'est une lettre envoyée par

7 vous?

8 Réponse: Elle est signée par Josip Kardum.

9 Question: C'est bien le président de votre commission?

10 Réponse: Oui, c'est exact. Mais je ne vois pas où est le problème ici.

11 Question: Ecoutez: qu'il y ait un problème ou qu'il n'y en ait pas, ce

12 n'est pas la question. Mais je vous demande simplement si c'est une lettre

13 envoyée par vous?

14 Réponse: Oui, oui, c'est bien ma lettre.

15 M. Milosevic (interprétation): Eh bien, vous pouvez remettre la lettre au

16 Greffe, si vous le souhaitez.

17 M. le Président (interprétation): Une cote, s'il vous plaît.

18 M. Milosevic (interprétation): Il y a un instant, vous avez dit…

19 M. le Président (interprétation): Une cote, s'il vous plaît.

20 Mme Anoya (interprétation): Pièce à conviction de la défense 108.

21 M. Milosevic (interprétation): Il y a un instant, vous avez parlé d'un

22 homme qui était à Belgrade et qui, ensuite, s'est retrouvé à Knin; nous

23 reviendrons là-dessus plus tard. Mais pouvez-vous expliquer comment les

24 Serbes de Bosnie-Herzégovine se sont retrouvés dans des camps situés sur

25 le territoire de Croatie?

Page 17329

1 M. Grujic (interprétation): Pouvez-vous me poser une question plus

2 précise?

3 Question: Etes-vous au courant du fait que les Serbes de Bosnie-

4 Herzégovine se trouvaient dans des camps situés sur le territoire de la

5 République de Croatie? Comment se fait-il qu'ils se soient retrouvés dans

6 des camps situés en Croatie alors qu'ils étaient originaires de Bosnie-

7 Herzégovine, ces Serbes?

8 Réponse: Il y a plusieurs possibilités qui peuvent expliquer cela. Mais

9 dites-moi de quoi il s'agit concrètement, que je puisse répondre.

10 Question: Eh bien, savez-vous sur la liste des Serbes prisonniers proposés

11 à l'échange, dont les noms figurent dans cette lettre que vous avez

12 envoyée à partir de votre commission chargée des échanges de prisonniers

13 en date du 2 juillet 1993, qu'on trouve le nom d'un certain nombre de

14 Serbes originaires de Bosnie-Herzégovine? Savez-vous cela?

15 Réponse: Je ne sais pas où ces hommes avaient été arrêtés. Il est possible

16 qu'ils aient eu la nationalité de leur lieu de résidence, qui pouvait être

17 quelque part en Yougoslavie ou en Bosnie. Mais où est-ce qu'ils ont été

18 faits prisonniers? Cela, je ne peux pas le dire parce que je ne le sais

19 pas. Donc si on les a retrouvés dans des camps, il est possible qu'ils

20 aient été arrêtés dans le cadre du conflit armé en divers lieux. Mon

21 travail à moi consiste à établir la liste des noms de ces personnes et à

22 les proposer pour des échanges afin qu'ils retrouvent la liberté. Quant

23 aux circonstances dans lesquelles ils ont été arrêtés et placés dans les

24 camps au départ, je ne peux pas en parler parce que ce n'est pas mon

25 travail.

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1 Question: Eh bien, je ne vais pas vous donner cette liste parce que vous

2 ne contestez pas, n'est-ce pas, qu'il s'agit de Serbes de Bosnie-

3 Herzégovine qui se sont retrouvés dans des camps en Croatie?

4 Réponse: Je devrais voir plus précisément ce dont vous parlez, ce à quoi

5 vous faites référence.

6 Question: Eh bien, vous avez une liste de prisonniers qui sont proposés à

7 l'échange. Ce sont des prisonniers qui se trouvent sur le territoire de

8 Croatie. La date est celle du 2 juillet 1993, il s'agit d'une lettre

9 émanant de vous. La liste a été dressée par vous également. Vous pouvez

10 voir les noms de ces hommes qui ont été faits prisonniers.

11 (Intervention de l'huissier.)

12 Réponse: Eh bien, sur cette liste je ne vois pas le lieu où les personnes

13 en question ont été arrêtées, je ne vois pas non plus la nationalité de

14 ces hommes. La seule chose qui figure ce sont les noms et les prénoms.

15 Question: Très bien, très bien. Ecoutez, Monsieur Grujic, avançons.

16 Est-il vrai que, lors des négociations que vous avez eues au cours de ces

17 échanges avec des représentants de Bosnie-Herzégovine ou plutôt de la

18 Republika Srpska, il n'y avait pas de représentants de la République

19 fédérale yougoslave, pas plus d'ailleurs que d'une quelconque personne

20 parlant au nom de cette République fédérale yougoslave. C'est bien cela?

21 Réponse: Excusez-moi, mais que me demandez-vous? S'il y avait

22 participation?

23 Question: Oui, je vous demande s'il y avait participation de représentant

24 de la République fédérale yougoslave à ces négociations, ou si quelqu'un

25 était envoyé pour parler au nom de cette République fédérale yougoslave?

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1 Réponse: Pour autant que je me souvienne à Bocac, qui se trouve en Bosnie,

2 il y avait des représentants de la République fédérale yougoslave aux

3 négociations.

4 Question: Eh bien, je vais encore vous faire une citation. Une lettre du 2

5 juillet 1993, point 3. Et je laisse de côté les éléments qui sont non

6 pertinents par rapport à ce que je prétends. Moi, je dis qu'ils sont non

7 pertinents, vous dites qu'ils le sont. Mais, enfin, je cite ce que l'on

8 trouve plus loin dans la lettre -je cite-: " Au vu de ceci, ainsi que des

9 contacts qu'il y a eu jusqu'à présent avec des représentants de la

10 commission de Belgrade qui n'ont pas participé, n'ont pas autorisé qui que

11 ce soit à négocier en leur nom, nous prenons la liberté de mettre l'accent

12 sur ce qui suit…" (Fin de citation.)

13 Et puis, un certain nombre de choses sont mentionnées dans la lettre. Mais

14 ce qui est important, c'est que les représentants de Belgrade n'ont pas

15 participé, n'ont autorisé personne à négocier en leur nom. Alors, que

16 vous-même affirmez le contraire.

17 Et puis à la fin de la lettre, au point 5, nous lisons -je cite-: " Au vu

18 du fait également que nous ne savons pas exactement qui doit être reçu à

19 Novska ou à Livno, nous procédons à l'échange entre la République de

20 Croatie… ou plutôt la République de Croatie a recherché les personnes

21 devant faire l'objet de l'échange et nous n'avons pas d'objection à ce

22 qu'un échange se soit réalisé à Livno entre des prisonniers dont les noms

23 auront été acceptés par votre commission ainsi que par la commission de la

24 communauté croate d'Herceg-Bosna." (Fin de citation.)

25 Donc, ici, nous voyons qu'il y a d'autres questions qui sont abordées et

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1 qui montrent bien qu'il y a eu coordination entre ce que vous faisiez

2 vous-même et ce qui se faisait pour l'Herceg-Bosna. Le premier point en

3 page 1 de votre lettre, c'est là qu'on le trouve. Et le deuxième point est

4 en page 2.

5 Donc je vous remets cette lettre intégralement, pour que vous puissiez

6 voir vous-même ce qui est dit au début, à savoir -je cite-: "Au vu du fait

7 que des représentants de la commission de Belgrade n'ont pas participé et

8 n'ont autorisé personne à négocier en leur nom..." (Fin de citation.)

9 Ça c'est le premier point qui se trouve en page 1. Et puis, il y a un

10 deuxième point que j'ai évoqué, qui a à voir avec le fait que vous

11 organisiez un échange à Livno en Herceg- Bosna; donc le deuxième point

12 figure en page 2. Et tout ceci est signé par votre prédécesseur, Josip

13 Kardum.

14 Veuillez jeter un coup d'œil à cette lettre, je vous prie.

15 Il ne fait aucun doute que j'ai cité cette lettre avec la plus grande

16 exactitude.

17 (Intervention de l'huissier.)

18 Donc, Monsieur Grujic, est-il non contesté que votre commission, à savoir

19 la commission chargée des échanges de prisonniers en République de

20 Croatie, a participé aux échanges de prisonniers sur le territoire de

21 Croatie en Bosnie-Herzégovine?

22 Réponse: C'est exact, parce que nous avions un grand nombre de détenus qui

23 avaient été détenus dans des camps situés en Bosnie-Herzégovine. Donc il

24 n'y a aucune contestation sur ce point, nous cherchions à les faire

25 libérer.

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1 Question: Mais ma question ne portait pas sur ce point, elle était plus

2 précise. Est-il contesté que votre commission a négocié au nom de la

3 commission d'Herceg-Bosna, c'est-à-dire au nom de la commission de la

4 communauté croate située sur le territoire de Herceg-Bosna?

5 Réponse: Ce n'est pas une question de négocier au nom de quelqu'un, mais

6 plutôt d'aider à faire libérer les détenus qui avaient été détenus dans

7 cette partie du pays.

8 Question: Monsieur Grujic, je n'insiste pas sur ceci, puisque Mme Uertz-

9 Retzlaff elle-même n'a pas insisté sur les contacts que vous aviez avec la

10 commission de la République fédérale yougoslave. Elle estime sans doute

11 néanmoins que ces contacts étaient critiquables.

12 Donc j'essaie de voir un peu quel équilibre on peut instaurer, pour éviter

13 de donner l'impression que tout ce qui se passait en Yougoslavie était

14 répréhensible. A partir de cette lettre que vous avez sous les yeux, on

15 voit que votre commission organisait un échange à Livno, qui se trouve en

16 Herceg-Bosna, n'est-ce pas ? Donc il y avait des prisonniers d'Herceg-

17 Bosna, et par ailleurs des prisonniers de la Fédération musulmane qui

18 faisaient l'objet de cet échange?

19 Réponse: Voyez-vous, il est bien connu qu'il était impossible de procéder

20 à des échanges dans les régions situées entre la Republika Srpska et la

21 République de Croatie en raison des opérations de guerre. Vous savez bien

22 que ce corridor le long de la Sava était inutilisable à l'époque. Un

23 échange de prisonniers ne pouvait donc se faire que dans la partie

24 méridionale du pays, c'est-à-dire à l'endroit où les détenus de la

25 Republika Srpska pouvaient être transférés en toute sécurité, en même

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1 temps que les citoyens de la République de Croatie, pour ensuite être

2 rapatriés en Croatie.

3 M. Milosevic (interprétation): Monsieur Grujic, je vous en prie, ne parlez

4 pas ainsi parce que, après vous, nous entendrons une femme témoin qui nous

5 parlera de ce qui se passait entre les Musulmans et les Croates en Bosnie-

6 Herzégovine pendant le conflit armé. Elle vient après vous, immédiatement

7 après vous.

8 Donc si nous parlons de cette période dont nous sommes en train de parler

9 ici, donc du 2 au 5 juillet 1993, c'est une période où le conflit faisait

10 rage entre les Musulmans et les Croates de Bosnie-Herzégovine.

11 M. le Président (interprétation): Quelle est votre question?

12 M. Milosevic (interprétation): Est-il contesté, Monsieur Grujic -je vous

13 le demande- que des représentants de l'armée croate se trouvaient sur le

14 territoire de Bosnie-Herzégovine à ce moment-là?

15 M. Grujic (interprétation): Je pense qu'il n'y a pas de contestation sur

16 ce point.

17 M. Kwon (interprétation): Avant que vous ne poursuiviez, je vous demande

18 ce que vous souhaitez faire de ce document. Souhaitez-vous en demander le

19 versement au dossier ou devrait-il vous être restitué?

20 M. Milosevic (interprétation): Oui, oui, je demande son versement au

21 dossier pour prouver ce que j'ai dit, car cela va totalement à l'encontre

22 de ce que Mme Uertz-Retzlaff tente d'imputer à la partie yougoslave.

23 Monsieur Grujic, est-il vrai que votre commission…

24 M. le Président (interprétation): Un instant. Il faut une cote au

25 document.

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1 Mme Anoya (interprétation): Il s'agira de la pièce à conviction de la

2 défense 109.

3 M. Milosevic (interprétation): Ecoutez, veuillez répondre par oui ou non;

4 cela me suffira. Je vous demande simplement s'il est exact que votre

5 commission, en dépit des accords conclu, a très souvent caché des

6 prisonniers, et notamment des membres de la JNA qui auraient dû faire

7 l'objet d'échange? Oui ou non?

8 M. Grujic (interprétation): Ecoutez, je crois qu'il faut que vous soyez

9 plus précis. Qu'est-ce que cela veut dire, "la commission a caché des

10 prisonniers"?

11 Question: Eh bien, je parle de votre commission qui, tout simplement,

12 cachait l'existence de ces hommes, ne fournissait aucune information à

13 leur égard, dissimulait leurs noms, donc cachait ces hommes?

14 Réponse: Et bien, je vais vous répondre très brièvement, Monsieur

15 Milosevic. Tous les prisonniers qui se trouvaient sur le territoire de la

16 République de Croatie pendant que j'ai exercé mes fonctions, étaient sans

17 le moindre doute enregistrés auprès du Comité international de la Croix-

18 Rouge, le CICR. Ce qui veut dire que ces hommes pouvaient échanger des

19 messages avec leur famille, quel que soit le lieu de résidence de cette

20 famille. Les membres de la famille savaient donc où cet homme était

21 emprisonné. Par conséquent, nous obtenions des informations de la même

22 façon pour tous les prisonniers.

23 Question: Très bien. Est-il vrai que votre commission, le 22 et le 23

24 juillet 1992, a négocié à Subotica avec la République fédérale yougoslave?

25 Réponse: Je ne peux pas confirmer ce fait.

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1 Question: Il existe un rapport à ce sujet?

2 Réponse: Je ne dispose pas de ce rapport. Je ne puis parler que de la

3 période à partir de laquelle…

4 Question: Très bien. Mais savez-vous, Monsieur Grujic, qu'à ce moment-là,

5 le nom d'un grand nombre de membres de la JNA manquait sur vos listes,

6 bien que des représentants du Comité international de la Croix-Rouge ainsi

7 que des membres de la JNA précédemment remis en liberté aient affirmé que,

8 dans les camps de Croatie, il y avait un grand nombre de prisonniers qui

9 étaient effectivement des membres de la JNA?

10 Je dis cela pour corroborer ma déclaration selon laquelle le nombre de

11 prisonniers a été réduit délibérément, minimisé, et que certains faits ont

12 été cachés, ainsi que certains prisonniers, alors que la Croix-Rouge

13 internationale était au courant de leur existence?

14 Réponse: Je ne pense pas que ce soit possible. Tous les prisonniers

15 étaient enregistrés par le CICR et aujourd'hui encore, nous avons des

16 rapports du CICR qui stipulent que, sur le territoire de la République

17 croate, ces prisonniers ont été enregistrés et ne sont plus détenus. Peut-

18 être existe-t-il des cas de ce genre dans d'autres régions de l'ex-

19 Yougoslavie; ça, je n'en sais rien.

20 Question: Eh bien, j'ai entre les mains une lettre: "République fédérale

21 yougoslave, ministère de la Défense. Commission chargée de l'échange des

22 prisonniers", adressée au 1er Corps de la Krajina, dans laquelle nous

23 lisons:

24 "Veuillez trouver ci-joint la liste des membres capturés de l'armée

25 yougoslave et des civils qui nous ont été remis par la délégation du

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1 Gouvernement croate au cours des pourparlers de Subotica tenus les 22 et

2 23 juillet 1992. La partie croate affirme que la liste est complète et

3 définitive. Cependant, après analyse de cette liste, nous en sommes

4 arrivés à la conclusion qu'un grand nombre de prisonniers membres de

5 l'armée, ainsi que civils, à la recherche de qui nous sommes, ne figurent

6 pas sur cette liste -J'insiste donc: 'ne figurent pas'-. Parmi eux, il y

7 en a un bon nombre qui ont été vus par les représentants du Comité

8 international de la Croix-Rouge ou par des prisonniers déjà relâchés ou

9 par des membres de leur famille". (Fin de citation.)

10 Est-ce que ceci vous dit quelque chose, Monsieur Grujic?

11 Réponse: Est-ce que je peux voir la lettre, je vous prie?

12 Question: Oui, je vous la donnerai dans quelques instants. Mais j'aurai un

13 autre point à vous soumettre.

14 Vous avez dit que Tole Zarko –c'est ce que vous avez dit hier-, qu'un

15 certain Zarko Tole, soldat de deuxième classe, a d'abord été arrêté,

16 détenu en Serbie avant d'être transféré à Knin; c'était un membre de

17 l'armée croate?

18 Réponse: Je n'ai jamais parlé de Tole Zarko dans mon témoignage.

19 Question: Mais vous avez parlé d'un homme qui avait été arrêté là-bas,

20 puis transféré à Knin?

21 Réponse: Oui, mais ce n'était certainement pas M. Zarko Tole.

22 Question: Qui était-ce, alors?

23 Réponse: Je devrais regarder la liste pour vérifier, mais ce n'est

24 certainement pas M. Zarko Tole.

25 M. Milosevic (interprétation): Dans cette lettre, le général Radinovic

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1 affirme que cet homme a été arrêté sur le territoire de la RFY, qu'il

2 n'était participant à aucune opération armée, qu'il avait sur lui un faux

3 passeport, qu'il était arrivé en République fédérale yougoslave en

4 provenance de la République de Tchéquie, qu'il avait passé quelque temps

5 en prison en tant que détenu de droit commun et ne pouvait donc réclamer

6 le statut de prisonnier de guerre, et qu'il a été transféré sur le

7 territoire de la République serbe de Krajina parce que les autorités de

8 cette République serbe de Krajina le recherchaient en raison de crimes de

9 guerre commis à Slunj, lieu de naissance de Tole.

10 Et voici ce qui figure dans cette lettre du général Radinovic -je cite-:

11 "En rapport avec la capture de ce membre de l'armée croate, le soldat

12 Zarko Tole et des hommes qui l'accompagnaient, nous tenons à vous informer

13 qu'ils sont en prison à Knin sous l'autorité de la République serbe de

14 Krajina. Nous vous invitons à contacter les autorités responsables de Knin

15 au sujet d'un échange éventuel de Zarko Tole et des hommes qui

16 l'accompagnaient". (Fin de citation.)

17 Alors, si cela vous intéresse, vous pouvez lire toute la lettre.

18 M. Grujic (interprétation): J'aimerais d'abord voir cette lettre.

19 M. le Président (interprétation): Très bien. Que la lettre soit remise.

20 M. Milosevic (interprétation): Je vous invite d'abord à lire le passage

21 qui traite du nom des personnes portées disparues de façon générale et,

22 ensuite, le passage où il est question de cet homme en particulier.

23 (Intervention de l'huissier.)

24 M. Grujic (interprétation): Oui, oui, je peux faire un commentaire au

25 sujet de cette lettre.

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1 Donc c'est la République fédérale yougoslave et son ministère de la

2 Défense qui envoient cette lettre adressée au 1er Corps de Krajina. La

3 lettre est envoyée, en Bosnie, à la commission chargée des échanges de

4 détenus.

5 Donc la République fédérale yougoslave écrit au Corps d'armée de Krajina.

6 Et, dans la lettre, il est dit que l'on sait qu'un détenu, un certain

7 Zarko Tole -dont nous n'avons pas parlé ici; son nom n'a jamais été

8 évoqué-, donc il est dit que cet homme se trouve sur le territoire de la

9 République serbe de Krajina et il est question de contacts ultérieurs en

10 vue d'un échange.

11 Donc le ministère de la Défense, la commission chargée des échanges de

12 détenus envoient cela au 1er Corps d'armée de Krajina pour que des mesures

13 soient prises en vue d'un échange. Et il est dit que la liste des détenus

14 provenant de la commission de Croatie est jointe.

15 Eh bien, il faut dire que, lors de chaque échange, les listes de

16 prisonniers étaient négociées. Mais cela ne veut pas dire que, sur chaque

17 liste, le nom de tous les prisonniers figurait. Bien entendu, tous les

18 prisonniers enregistrés voyaient normalement leur nom figurer sur ces

19 listes. Mais ici, il est dit que le ministère de la Défense a analysé la

20 liste qui lui a été fournie et que, sur la base des informations

21 disponibles, sans autre fondement que cela, le ministère réclame des noms

22 supplémentaires. Mais nous aussi, nous analysions les listes et affirmions

23 que tel ou tel détenu devait se trouver sur telle ou telle liste; donc

24 c'était l'une des façons de retrouver les gens.

25 Mais, à la lecture de la lettre que j'ai entre les mains en ce moment,

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1 nous ne trouvons aucun fondement permettant de prétendre quoi que ce soit

2 en dehors de ce qu'ils disent ici, à savoir qu'ils ont analysé la liste.

3 Mais la relation entre la Yougoslavie et la Bosnie peut être une autre

4 base du travail; et cette lettre confirme, en tout cas, l'existence de

5 cette relation dont nous avons déjà parlé auparavant.

6 M. Milosevic (interprétation): Pouvons-nous poursuivre?

7 M. le Président (interprétation): Souhaitez-vous que cette lettre soit

8 versée au dossier, Monsieur Milosevic?

9 M. Milosevic (interprétation): Oui.

10 M. le Président (interprétation): Une cote?

11 Mme Anoya (interprétation): Pièce de la défense n°110, Monsieur le

12 Président.

13 M. le Président (interprétation): Eh bien, c'est sans doute l'heure pour

14 la pause.

15 Monsieur Grujic, je vous demanderai de revenir dans ce prétoire dans 20

16 minutes pour la fin de votre déposition.

17 Et, Madame Uertz-Retzlaff, je me rends compte qu'il serait peut-être utile

18 de discuter des témoins de Vukovar auxquels s'applique l'Article 92bis.

19 Nous devrions le faire après l'audition de ce témoin et avant l'audition

20 du témoin suivant.

21 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Oui, Monsieur le Président.

22 M. le Président (interprétation): Oui, Monsieur Kay?

23 M. Kay (interprétation): Il y a un autre point qu'il conviendrait de

24 discuter aujourd'hui, Monsieur le Président, puisque nous aurons

25 suspension pendant trois jours, à savoir les documents récemment déposés

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1 en rapport avec M. l'Ambassadeur Galbraith.

2 M. le Président (interprétation): Nous ne les avons pas encore reçus.

3 M. Kay (interprétation): Ils sont en cours de transmission. Et vous vous

4 souviendrez, Monsieur le Président, que M. Nice les a évoqués hier en

5 audience publique, et il a mentionné une date.

6 M. le Président (interprétation): Nous parlerons de cela.

7 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Monsieur le Président, encore un

8 élément. Nous avions prévu d'entendre deux témoins. Mais s'agissant de ces

9 témoins, Baca notamment qui est censée remplacer Franic, et puis l'autre

10 témoin étant Rousseau, il nous faut encore des autorisations.

11 M. le Président (interprétation): Nous pourrons parler de Rousseau. Mais

12 pour Baca, je ne suis pas encore sûr.

13 (L'audience, suspendue à 10 heures 30, est reprise à 10 heures 56.)

14 M. le Président (interprétation): Monsieur Milosevic, vous avez la parole.

15 M. Milosevic (interprétation): Monsieur Grajic, puisque nous venons de

16 constater qu'il n'est pas contesté que les forces armées croates se

17 trouvaient sur le territoire de la Bosnie-Herzégovine, sauriez-vous

18 éventuellement combien de Serbes détenus à Hodzak, donc sur le territoire

19 de la Bosnie-Herzégovine, ont été transférés dans un certain nombre de

20 camps situés un peu partout sur le territoire croate jusqu'en juillet

21 1992?

22 M. Grujic (interprétation): Je ne sais pas. Je ne peux pas répondre à

23 cette question. Je n'ai pas ce renseignement. J'ai déjà dit que je ne

24 disposais pas d'information au sujet du moment où les détenus avaient été

25 capturés et faits prisonniers, je ne peux parler que du moment où ils ont

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1 été libérés.

2 M. Milosevic (interprétation): Traitons maintenant des chiffres que vous

3 m'avez donnés. Mais, auparavant, je voudrais vous rappeler le fait qu'à la

4 session du Parlement de Croatie en janvier, le 15 janvier 1996, feu

5 Président Franjo Tudjman a présenté des renseignements disant qu'il y

6 avait 10.666 morts et 2.915 disparus. Par la suite, ces renseignements ont

7 été modifiés. Ce qui fait qu'en tout et pour tout, le nombre de morts et

8 de disparus a été réduit… Ou plutôt le chiffre des morts a augmenté, et le

9 chiffre des personnes portées disparues a diminué; et on en est arrivé à

10 un pourcentage de morts ou de disparus par rapport au nombre ou à la

11 population du groupe ethnique croate qui disait 0,35%. Je crois que vous

12 vous en souvenez, que vous disposez de ces renseignements?

13 M.Grujic (interprétation): Je ne pense pas qu'il soit justifié

14 d'additionner les pommes et les poires. Les disparus et les morts ne

15 peuvent pas faire partie de la même catégorie, et ce n'est pas une façon

16 justifiée de procéder.

17 Maintenant, pour ce qui est des chiffres, tant pour ce qui est des morts

18 et des disparus, ces chiffres évoluent par périodes, en fonction des

19 personnes disparues retrouvées, des fosses communes découvertes. Et ces

20 intervalles de temps sont très importants pour ce qui est des

21 renseignements que l'on avance.

22 Pour ce qui est des données que j'ai présentées moi-même lors de mon

23 témoignage, je les maintiens et j'assume la responsabilité de tous les

24 chiffres que j'ai avancés. Il y a chaque fois le nom, le prénom, les

25 renseignements personnels, tant des personnes portées disparues que de

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1 personnes décédées; donc il s'agit là de données dont dispose mon bureau.

2 Question: Bon. Mais en tout état de cause, Monsieur Grujic, si nous

3 mettons de côté le nombre des personnes portées disparues, et bien sûr que

4 cela ne s'additionne pas avec le nombre de personnes mortes, il apparaît

5 avec évidence que le pourcentage de 0,35% ne saurait être que moindre, que

6 plus petit.

7 Mettez-moi les choses au clair. S'agissant du nombre de morts dont vous

8 avez témoigné à savoir les 11.800 et… Aidez-moi: combien vous avez dit au

9 juste? 11.834 morts, c'est le total des personnes ou des Croates qui sont

10 morts, n'est-ce pas?

11 Réponse: Non, c'est le chiffre total des morts, des personnes décédées;

12 indépendamment de leur appartenance ethnique. A l'exclusion, bien entendu,

13 des personnes qui sont mortes après 1995.

14 Question: Bien. Mais quel est le nombre parmi ces morts qui concernent les

15 forces croates, le Rassemblement de la Garde nationale et du HVO qui sont

16 morts en Bosnie-Herzégovine?

17 Réponse: Il ne s'agit pas ici de personnes ou de membres du HVO.

18 Question: Bien.

19 Réponse: Il s'agit uniquement -et peut-être est-ce la raison pour laquelle

20 vous disposez de renseignements différents- ici, les chiffres avancés

21 concernent seulement le territoire de la République de Croatie.

22 Question: Mais est-ce que vous affirmez que sur le chiffre avancé, les 11

23 800 et quelque, il n'y a guère de membres des forces armées croates qui

24 sont morts sur le territoire de la Bosnie-Herzégovine?

25 Réponse: J'affirme qu'il en est ainsi. Une erreur éventuelle peut toujours

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1 être possible, mais je doute fort que l'on puisse en trouver une de ce

2 genre.

3 Question: Mais comment avez-vous recensé les membres de l'armée croate

4 régulière qui sont morts sur le territoire de la Bosnie-Herzégovine ainsi

5 que les morts du ZNG, du Rassemblement de la Garde nationale, en Bosnie-

6 Herzégovine; à savoir les membres des effectifs armés croates morts sur le

7 territoire de la Bosnie-Herzégovine? Où sont-ils recensés s'ils ne font

8 pas partie de ce chiffre-là?

9 Réponse: Voyez-vous, lorsque j'ai expliqué comment ces registres ont vu le

10 jour, j'ai dit que les ministères afférents, en fonction de leurs

11 fonctions -et ici, ce serait le ministère en charge des défenseurs- qui

12 disposeraient des chiffres de toutes les forces armées. Et pour ce qui est

13 de l'analyse en question, nous avons présenté des données qui concernent

14 uniquement le territoire de la République de Croatie.

15 Maintenant, pour ce qui est des renseignements de personnes mortes sur le

16 territoire de Bosnie-Herzégovine, je n'en dispose pas. Moi, j'ai avancé

17 des données qui étaient les miennes et qui concernent le territoire de la

18 République de Croatie.

19 Question: Bien. Mais si vous dites que ce pourcentage qui est inférieur à

20 0,35%…

21 Réponse: Non, je ne m'aventurerai pas à établir de pourcentage. Je n'ai

22 jamais avancé de pourcentage, et je ne voudrais pas en parler de la sorte.

23 J'estime que l'approche est erronée.

24 M. Milosevic (interprétation): De là à savoir si elle est erronée ou pas,

25 là n'est pas la question. Ce qui est la question, c'est de savoir si le

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1 pourcentage de Serbes est bien plus grand, et il l'est supérieur de

2 plusieurs fois?

3 M. le Président (interprétation): Oui, mais qu'entendez-vous, quelle est

4 la pertinence de la chose? La chose dont traite ce témoin; c'est le nombre

5 de personnes qui ont été tuées et qu'il a dans ses registres. Si vous avez

6 d'autres chiffres, cela n'a aucune pertinence. Ce qui est pertinent ici,

7 c'est ce qui concerne le témoignage de ce témoin. Même si vous avez

8 raison.

9 M. Milosevic (interprétation): Mais justement, Monsieur May, ma question

10 s'énonçait comme suit, et je vais d'abord vous apporter une petite

11 explication.

12 Monsieur Grujic, d'après le recensement de 1991 en Croatie, la Croatie

13 comptait 4.784.265 habitants.

14 M. le Président (interprétation): Cela n'a aucune pertinence.

15 Ce que je vais demander à M. Grujic, c'est la chose suivante: s'agissant

16 des chiffres que vous avez avancés, vous souvenez-vous ou avez-vous trace

17 concernant les Serbes qui ont été tués?

18 M. Grujic (interprétation): Dans ces chiffres-là, il y a les membres de la

19 minorité nationale serbe en Croatie. Et ce que je puis vous dire, c'est

20 que, s'agissant des chiffres, nous avons 6.790 personnes de nationalité

21 croate. Et on a enregistré 298 personnes du groupe ethnique serbe.

22 Question: Est-ce que vous parlez du nombre de morts, Monsieur Grujic, ici?

23 (Le témoin fait un signe affirmatif de la tête.)

24 Mais vous avez donné un chiffre de plusieurs centaines de membres du

25 groupe ethnique serbe?

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1 Réponse: Ce sont ceux qui ont été enregistrés comme personnes mortes dans

2 les registres officiels de la République de Croatie. Et, pour des raisons

3 tout à fait compréhensibles, nous n'avons pas enregistré les membres des

4 formations paramilitaires -parce que nous n'avions pas de renseignements

5 afférents- qui ont été enterrés auparavant. Nous ne pouvions pas les

6 enregistrer parce que nous n'avions pas de renseignements à ce titre-là

7 sur le territoire de la République de Croatie.

8 Question: Mais avez-vous entendu parler de "Veritas", une institution

9 traitant des crimes contre l'humanité et des crimes perpétrés à l'encontre

10 des Serbes en Croatie?

11 Réponse: Si je ne me trompe, il s'agit d'une organisation non

12 gouvernementale.

13 M. Milosevic (interprétation): Et à la place de ce que vous dites, 200 et

14 quelque… ou 300 Serbes morts, savez-vous que, dans les registres qui ont

15 été vérifiés, il figure un chiffre de 6.744?

16 M. le Président (interprétation): Mais ce chiffre concerne qui, quoi?

17 Sont-ce des paramilitaires qui ont été tués, des paramilitaires serbes qui

18 ont été tués en Croatie? C'est bien de cela qu'il s'agit?

19 M. Milosevic (interprétation): Monsieur May, j'ai l'impression qu'il y a

20 une confusion dans votre tête à ce sujet.

21 Monsieur Grujic est directeur d'une institution qui traite des personnes

22 décédées, des personnes disparues, des personnes expulsées, donc de toutes

23 les victimes de la guerre en Croatie. Moi, je parle de Serbes

24 ressortissants de la République de Croatie, et je demande à M. Grujic:

25 pourquoi n'a-t-il pas traité des Serbes citoyens de la Croatie qui ont été

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1 chassés, expulsés, qui sont disparus ou qui ont été tués?

2 M. Grujic (interprétation): Nous avons traité ces questions afférentes au

3 groupe ethnique serbe. Cela est évident à partir… ou cela peut être

4 constaté dans la liste des personnes portées disparues. Et tous ceux qui

5 ont été déclarés ont été portés au registre. Il en va de même pour ce qui

6 est des membres du groupe ethnique serbe qui ont été exhumés et

7 identifiés; et il va de même pour ce qui est des personnes mortes.

8 Vous avez mentionné un chiffre de 6.700 relatif à "Veritas". Je ne vais

9 pas commenter la chose; j'ai des rapports émanant de chez eux parlant d'un

10 chiffre inférieur. Mais, indépendamment du fait que ce chiffre soit

11 inférieur, ce que je puis dire, c'est qu'il est des points

12 d'interrogation, des choses peu fiables au niveau de leur liste.

13 Pour être concret, il y a des personnes qui sont mortes de mort naturelle,

14 Luka Andzelic, Basta Andja, par exemple. Puis on cite des personnes qui

15 sont encore vivantes, Ljubica Batula, Draga Borojevic, Djuro Borojevic;

16 puis des personnes qui sont disparues sur le territoire du Kosovo comme

17 Djuro Barac; à Pristina, Nikola Begojic à Orahovac, des personnes qui sont

18 disparues sur le territoire de la Bosnie-Herzégovine.

19 M. Milosevic (interprétation): Ecoutez, vous n'avez pas besoin d'énumérer.

20 M. le Président (interprétation): Mais laissez-le terminer!

21 M. Milosevic (interprétation): Bien.

22 M. Grujic (interprétation): Disparues sur le territoire de la Bosnie-

23 Herzégovine, Igor Babic, Srdjan Mitrovic à Pale. Par conséquent, j'estime

24 que, pour ces défauts évidents, la liste est erronée. Mais comme je traite

25 des questions appartenant au groupe ethnique serbe, je tiens à préciser

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1 que nous avons terminé une liste concernant les territoires de Serbie et

2 du Monténégro, liste afférente aux personnes portées disparues, suite à

3 une initiative émanant de la Croatie. Et je crois qu'une liste analogue a

4 été faite sur le territoire de la Bosnie.

5 Je tiens à dire, par conséquent, que nous traitons du groupe ethnique

6 serbe, et ce, de façon très sérieuse.

7 M. Milosevic (interprétation): Mais d'après la méthodologie et les

8 modalités qui sont les vôtres, si j'ai bien compris, Monsieur Grujic, vous

9 englobez les Serbes décédés dans un chiffre qui est de quelques centaines

10 à peine; alors que chez "Veritas", il est question de plusieurs milliers.

11 Est-ce que vous remarquez là une divergence assez importante entre les

12 chiffres concernés ou est-ce que vous affirmez que les chiffres que vous

13 avez avancés sont exacts?

14 M. Grujic (interprétation): J'affirme que mes chiffres sont exacts, et il

15 y a une divergence parce que, dans la liste de "Veritas", il y a des

16 personnes qui additionnent les disparus, les morts et les autres.

17 De plus, outre les défauts que j'ai déjà mentionnés, il y a une question

18 très sérieuse. Des divergences au niveau des chiffres surviennent du fait

19 suivant: les chiffres que j'ai avancés concernent la période allant de

20 1991 à 1995; et j'ai précisé que les personnes qui sont mortes dans les

21 actions "Eclair" et "Tempête" sont enregistrées sur une liste à part,

22 parce qu'on n'a pas toutes les données définitives. Nous sommes en train

23 de recueillir ces renseignements-là et nous sommes en train de parachever

24 ces listes.

25 J'ai dit que nous avions trouvé une liste… des 500 noms au niveau de

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1 Korenica, Knin, avec l'aide du TPIY. Et pour ce qui est de ce groupe

2 ethnique serbe, rien qu'au niveau de Knin, nous avons identifié plus de

3 100 personnes. Donc nous traitons de ce problème. Et quand bien même...

4 M. le Président (interprétation): Il faut que nous tirions au clair

5 quelque chose.

6 Vous avez dit qu'il y a un autre défaut au niveau de cette liste faite par

7 "Veritas". Votre liste à vous englobe les personnes qui sont mortes entre

8 1991 et 1995, sans englober les personnes décédées à l'occasion des

9 opérations "Eclair" et "Tempête"; c'est ce que vous avez dit.

10 En quoi consistent alors les défauts, les lacunes de cette liste de

11 "Veritas", en comparaison avec la vôtre?

12 M. Grujic (interprétation): J'ai dit que cela concernait la période de

13 1991 à 1995 et j'ai dit que je ne pouvais pas affirmer que les noms et

14 prénoms étaient exacts au niveau des personnes mortes à l'occasion des

15 opérations "Eclair" et "Tempête", parce que ces renseignements ne sont pas

16 encore complètement à jour.

17 M. le Président (interprétation): Non, non. Etes-vous en train de nous

18 dire… Je voudrais savoir, et je ne veux pas vous laisser entendre ce qu'il

19 faut que vous disiez, je ne veux pas vous placer des mots dans la bouche.

20 Mais est-ce que je comprends exactement ce que vous êtes en train de dire?

21 Est-ce que vous dites que "Veritas" inclut les personnes les personnes

22 tuées à l'occasion des opérations "Eclair" et "Tempête" ou pas?

23 M. Grujic (interprétation): La liste de "Veritas" inclut les personnes

24 mortes à l'occasion des opérations "Eclair" et "Tempête", y compris les

25 autres cas que j'ai déjà mentionnés.

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1 M. le Président (interprétation): Vous avez également dit que vous

2 travailliez à établir la liste de personnes de Knin et d'ailleurs qui

3 avaient été tuées au cours de ces opérations "Tempête" et "Eclair" et que

4 ceci faisait quelque 500 personnes. Est-ce exact?

5 M. Grujic (interprétation): Oui, c'est exact.

6 M. le Président (interprétation): Oui, poursuivez, Monsieur Milosevic.

7 M. Milosevic (interprétation): Fort bien.

8 Cela veut dire par conséquent que vous affirmez qu'en Croatie, il n'y a

9 que quelques centaines de Serbes qui ont été tués, dont ceux tués dans le

10 courant des opérations "Tempête" et "Eclair"?

11 M. Grujic (interprétation): Non, ce n'est pas que je dis. Ce que

12 j'affirme, c'est que, sans inclure ces opérations, donc je les exclus, je

13 parle des personnes d'appartenance ethnique serbe qui ont été recensées

14 comme ayant été tuées; et ceci est repris dans cette liste de 11.000

15 personnes que j'ai recensées, pour ce qui est de la période allant de 1991

16 à 1995. Et dans la même veine, j'ai indiqué qu'il y a aussi dans cette

17 liste, plus que probablement, des personnes… En fait, des formations

18 paramilitaires qui n'ont pas été reprises dans cette liste; à ce moment-

19 là, nous n'avions pas ce type d'informations. Et, aujourd'hui, du fait du

20 même raisonnement, nous n'avons pas non plus ces informations.

21 Question: Donc, maintenant, vous infirmez les chiffres donnés par

22 "Veritas" qui parlent de 6.744 personnes d'appartenance ethnique serbe et

23 qui ont été tuées?

24 Réponse: J'exprime des doutes à propos de ce chiffre. Parce qu'on trouve,

25 dans cette liste, non seulement les personnes tuées, mais aussi les

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1 personnes portées disparues. Or on ne peut pas confondre les deux groupes.

2 Et puis, j'ai trouvé qu'il y avait certaines défaillances –je les ai mises

3 en exergue-, à savoir que, dans cette liste, on trouve des personnes qui

4 ont été tuées sur le territoire de la Bosnie ou au Kosovo, ou des

5 personnes qui étaient en vie.

6 Question: Oui, vous avez donné lecture de quelques noms. Mais il est

7 certain que ces quelques noms ne signifient pas grand-chose, comparé au

8 plusieurs milliers dont, moi, je parle.

9 Moi, je parle de "plusieurs milliers", et vous, vous dites "plusieurs

10 centaines". C'est la raison pour laquelle je vous demande ceci: vous

11 affirmez que quelques centaines de personnes seulement ont été tuées et

12 pas plusieurs milliers?

13 Réponse: Non, ce n'est pas exact. Ce que, moi, je dis, c'est que le

14 chiffre que j'ai donné s'applique à la période allant de 1991 à 1995. Mais

15 j'affirme également qu'un certain nombre de personnes ont été tuées

16 -c'étaient surtout des Serbes- au cours des opérations "Tempête" et

17 "Eclair". Et le conseil des Nations Unies en a été informé. Le chiffre

18 faisait à peu près un millier de personnes tuées.

19 Les lieux où ces personnes ont été enterrées sont connus, ils sont

20 identifiés. Il y a eu plusieurs exhumations. Et sur ces 1.000 personnes,

21 500 ont fait l'objet d'exhumations et un certain nombre des corps exhumés

22 ont été identifiés. Je peux donc dire que quelque 1.000 personnes ont été

23 tuées au cours des opérations "Tempête" et "Eclair".

24 Il y a aussi, au cours de ces opérations, des personnes qui ont été

25 portées disparues. Des vérifications ont été effectuées par le CICR, et

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1 grâce à nos propres données, nous avons pu affiner ce chiffre qui était

2 donné de 1.200 et qui est maintenant de 800. Pour confirmer ces chiffres,

3 nous avons mené une enquête sur le territoire de la Serbie, du Monténégro

4 et de Bosnie-Herzégovine, et les informations semblent nous mener vers un

5 chiffre de quelque 800 personnes.

6 Question: Je vois. Voilà ce que vous affirmez: vous affirmez que ce

7 chiffre de plusieurs milliers de Serbes tués est inexact?

8 Réponse: J'ai dit clairement l'avis que j'avais à ce propos.

9 M. Milosevic (interprétation): Fort bien.

10 M. le Président (interprétation): Monsieur Milosevic, pourriez-vous

11 apporter un éclaircissement sur ceci: la liste de "Veritas", elle porte

12 sur quelle date? Pourriez-vous nous le dire?

13 M. Milosevic (interprétation): Je n'ai pas la dernière date, mais ceci est

14 un rapport mis à jour que j'ai reçu, un rapport avec la déposition de ce

15 témoin, dans le cadre de sa déposition. Et je peux vous donner le rapport

16 officiel; j'ai un chiffre de 6.744 noms, d'après leurs archives.

17 M. le Président (interprétation): Oui, mais j'ai besoin de connaître la

18 date ou les dates des décès.

19 Monsieur Grujic, avant de passer à autre chose, revenons aux

20 paramilitaires. Vous dites ne les avoir pas inclus. Nous parlons ici des

21 paramilitaires tués et enterrés auparavant; c'est comme ça que nous avons

22 reçu vos dires par l'interprétation. Pourriez-vous être un peu plus précis

23 à propos des paramilitaires que vous avez trouvés? Qu'avez-vous fait de

24 ces données?

25 M. Grujic (interprétation): C'est tout simplement logique: il était

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1 impossible d'avoir ces données. Par conséquent, la plupart de ces

2 personnes qui étaient membres de formations paramilitaires ont été

3 enterrées par d'autres paramilitaires.

4 M. le Président (interprétation): Je vois. Donc vous n'aviez pas

5 d'informations à leur propos?

6 M. Grujic (interprétation): Non.

7 M. le Président (interprétation): Poursuivez, Monsieur Milosevic.

8 M. Milosevic (interprétation): Et est-ce que, pour vous, l'armée de la

9 RSK, c'était une formation paramilitaire?

10 M. Grujic (interprétation): Mais bien sûr, manifestement.

11 Question: Ah, je vois. Donc, c'était une armée avec laquelle vous avez

12 négocié, avec laquelle vous avez échangé des prisonniers. Mais, pour vous,

13 c'était une formation paramilitaire?

14 Réponse: Eh bien, à ma connaissance, c'était une partie occupée du

15 territoire de la République de Croatie. Mais je ne veux pas m'aventurer

16 dans une discussion de ce type, puisque ceci n'est pas l'objet de ma

17 déposition.

18 M. Milosevic (interprétation): Vous affirmez que les Serbes ont occupé une

19 partie du territoire sur lequel ils vivaient?

20 M. le Président (interprétation): Ceci ne fait pas partie de sa

21 déposition.

22 M. Milosevic (interprétation): Mais il vient de le dire, c'est ce qu'il

23 affirme.

24 M. le Président (interprétation): N'entrons pas dans une polémique à ce

25 propos.

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1 M. Grujic (interprétation): Je ne veux pas m'aventurer dans cette

2 discussion.

3 M. Milosevic (interprétation): Fort bien. Etes-vous au courant du fait que

4 les Serbes, pendant des années, ont proposé qu'une liste homogène soit

5 composée, soit établie pour les personnes tuées ou portées disparues,

6 s'agissant des personnes se trouvant sur le territoire de la République de

7 Croatie, indépendamment de leur appartenance ethnique, religieuse ou

8 militaire, mais que les Croates ont refusé cette constitution?

9 M. Grujic (interprétation): Là, je crois qu'une fois de plus, vous

10 déformez quelque peu la situation. Ici, nous parlons des personnes portées

11 disparues, quelle que soit leur appartenance ethnique, religieuse ou

12 autre, se trouvant sur le territoire de la République de Croatie; elles

13 ont pu faire état de la chose au service.

14 Question: Vous voulez dire que les personnes portées disparues pouvaient

15 dire qu'elles étaient disparues?

16 Réponse: Non. Leur famille pouvait dire qu'effectivement, ces personnes

17 étaient portées disparues aux institutions officielles. Et je vous ai

18 donné l'appartenance ethnique de ces personnes portées disparues, qui sont

19 toutes reprises sur ces listes des personnes portées disparues.

20 De plus, j'ai dit que nous avions mis à jour ces listes et, de par les

21 médias, j'ai ici une annonce -elle vous intéressera peut-être-: nous avons

22 lancé un appel à tous les citoyens de la République de Croatie de faire

23 état des personnes de leur famille qui ont été portées disparues.

24 Question: Fort bien, Monsieur Grujic.

25 Hier, au cours de l'interrogatoire principal, vous avez dit… Ou plus

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1 exactement, vous avez fait référence à l'expulsion d'un certain nombre de

2 citoyens qui ont été chassés du lieu où ils vivaient.

3 Savez-vous combien de centaines de milliers de Serbe ont été chassés, par

4 des opérations armées des forces croates, des zones, des endroits où ils

5 vivaient, alors qu'ils étaient aussi citoyens de la République de Croatie?

6 Pourquoi ne vous êtes-vous pas occupé de ces gens-là?

7 Réponse: Je pense que la République de Croatie s'occupe de ce problème

8 avec le plus grand sérieux. Et, à ma connaissance, plus de 130.000

9 personnes relevant de cette catégorie sont déjà rentrées en République de

10 Croatie. Il y a plus de 30.000 personnes qui sont en passe de revenir en

11 République de Croatie. Et pour faire une bonne évaluation de la situation,

12 il faut dire que la République de Croatie a établi un bureau s'occupant

13 précisément de ce problème qui touche les réfugiés.

14 Question: Savez-vous que sur ces quelque 130.000 personnes qui sont

15 rentrées, 40.000 ont de nouveau dû s'enfuir, soit en Serbie, soit au

16 Monténégro, soit en Republika Srpska, et donc que le chiffre exact est

17 bien plus faible que celui que vous mentionnez? Etes-vous au courant de

18 cela? Est-ce que ceci fait partie des activités de votre bureau?

19 Réponse: Non, non. Ceci ne fait pas partie des activités de notre bureau.

20 Je vous ai dit qu'en République de Croatie, il y avait des institutions

21 séparées qui s'occupaient de la question. Mais nous n'avons pas ce

22 chiffre, nous n'avons pas appris que des gens auraient dû repartir. Je ne

23 vois pas pourquoi quiconque voudrait quitter un territoire démocratique.

24 Question: Parce que ces gens ont été tués, parce qu'on a incendié leurs

25 maisons, parce qu'ils ont été la victime de sévices; voilà pourquoi ils

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1 sont partis.

2 Réponse: Je ne sais pas qui a été tué.

3 Question: Nous allons y revenir dans un instant peut-être, mais

4 manifestement pas avec vous.

5 Savez-vous, sur ces 600.000 Serbes, d'après le recensement de 1991

6 effectué en Croatie, qui vivaient donc en Croatie; combien sur ces 600.000

7 Serbes, il y en a qui ont été chassés du territoire de la République de

8 Croatie? Avez-vous ce chiffre?

9 Réponse: Je n'ai pas de chiffre officiel. Il y a des sources diverses qui

10 parlent d'un chiffre allant de 200 à 250.000, mais je ne dispose pas de

11 ces informations. Je parle ici d'informations de données que j'aurais

12 reçues de sources officieuses.

13 Question: J'essaie d'établir ou de mieux comprendre ce que vous venez de

14 dire. Vous ne vous êtes pas du tout intéressé au problème des Serbes,

15 n'est-ce pas?

16 Réponse: Mais ce n'est pas vrai! J'ai dit qu'il y a eu une liste, le

17 recensement de ceux qui sont revenus, de ceux qui sont en train de

18 revenir. Il n'est pas possible de disposer de ces informations, mais il

19 est tout aussi clair que le CICR dispose de ces chiffres.

20 Question: Mais il n'y a pas de listes reprenant le nom des personnes

21 tuées, chassées? Des milliers de personnes ont été tuées, des centaines de

22 milliers de personnes ont été chassées de chez elles. Et là, vous n'avez

23 pas recensé ces chiffres?

24 Réponse: Je crois qu'il est absurde de discuter de ces questions de la

25 sorte.

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1 Question: Je vais vous poser une question précise: n'avez-vous pas dit

2 hier que votre bureau avait la responsabilité de toutes les exhumations

3 effectuées en Croatie?

4 Réponse: C'est exact.

5 Question: Comment se fait-il dès lors, si votre bureau a la responsabilité

6 de toutes les exhumations effectuées en République de Croatie, comment se

7 fait-il que les premières exhumations de victimes serbes en territoire de

8 Croatie ont été effectuées par la partie adverse et pas par votre bureau?

9 Alors que c'était à Gospic, au cours du printemps 2000. Comment se fait-il

10 que vous n'ayez encore procédé à l'exhumation d'aucune victime serbe dans

11 votre territoire, et que vous ne l'avez pas fait tant que la partie

12 adverse n'est pas allée à Gospic pour effectuer les premières exhumations?

13 Réponse: Cela aussi est inexact. Nous avons procédé à l'exhumation de 125

14 fosses communes en territoire de la République de Croatie, et nous avons

15 trouvé plus de 3.300 victimes, parmi lesquelles se trouvaient des

16 personnes d'appartenance ethnique serbe qui ont été identifiées.

17 J'ajouterai qu'il y avait des fosses communes contenant des personnes

18 d'appartenance serbe; je pense notamment à Plitvice.

19 Dans les caves, toute la famille Rakic a été enterrée, c'étaient des

20 Serbes. A Snjegovici aussi, dans cette fosse commune, on a trouvé 13

21 personnes d'appartenance ethnique serbe.

22 Mais ce que vous dites n'est pas juste. Vous dites que nous ne nous sommes

23 pas occupé du problème, ce n'est pas vrai. Vous dites que nous n'avons pas

24 exhumé des personnes d'appartenance ethnique serbe, et ce n'est pas exact.

25 Question: Ce que j'affirme, c'est que les premières exhumations étaient

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1 effectuées par eux en face, au cours du printemps 2000; et ce que vous,

2 vous avez exhumé, cela s'est fait un peu par hasard dans le cadre des

3 exhumations que vous effectuiez.

4 Réponse: Donc, c'est par hasard qu'il se trouvait des Serbes parmi les 135

5 fosses communes? Je vous ai parlé de la famille Rakic, des Serbes; leur

6 fosse ou leur tombe n'a pas été exhumée de façon accidentelle. Il y a eu

7 une recherche tout à fait délibérée.

8 Et c'était le cas aussi à Snjegovici. Là, on est parti à la recherche des

9 fosses, et il y a eu exhumations. Les observateurs internationaux ont été

10 informés de toutes ces exhumations, ils y ont participé. Et plus tard, on

11 a identifié les personnes.

12 Question: Mais mis à part les personnes exhumées d'une fosse septique dans

13 la partie serbe de Gospic, qu'est-ce qu'on a trouvé d'autre? Qu'est-ce

14 qu'il y a eu comme autres exhumations?

15 Ce sont là des crimes commis dans la poche de Medak, à Divo Selo, Citluk,

16 Pocitelj, en septembre 1993, à un moment où la zone se trouvait sous la

17 protection des Nations Unies. Qu'est-ce que l'on a exhumé d'autre? Là

18 aussi, il y a eu des exhumations au cimetière de Knin; mais une fois de

19 plus, c'était par l'intermédiaire de la partie adverse, et là, plus de 300

20 corps ont été exhumés.

21 Réponse: 299 pour être précis. Et ça ne s'est pas fait par

22 "l'intermédiaire de". C'était fait en application des lois normatives de

23 la République de Croatie, après instruction donnée par le juge

24 d'instruction de la République de Croatie, et en présence du ministère

25 public.

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1 Question: Est-ce que cela a été fait suite à la demande de la partie

2 adverse ou à votre initiative?

3 Réponse: Après leur demande.

4 Question: Alors, comment se fait-il que vous ne vous soyez pas souvenu de

5 la nécessité de procéder à ces exhumations avant qu'ils ne fassent la

6 demande? Puisque ça s'est fait six ans après 1995, en 2001!

7 Réponse: Nous poursuivons l'exhumation de fosses communes établies en

8 1991, donc dix ans après les faits. Mais il est aussi important de dire

9 que des exhumations peuvent être entreprises; et il est normal de le faire

10 au moment où certaines conditions sont remplies.

11 Je m'explique: lorsque vous avez des informations concernant certaines

12 victimes, avant qu'elles ne décèdent. Parce que s'il n'est pas possible de

13 procéder à une identification rapide, les capacités sont vite épuisées et

14 nous rencontrons beaucoup de problèmes pour trouver un endroit où garder

15 les dépouilles mortelles. Il nous faut avoir des informations sur des

16 personnes avant leur décès. Et nous les obtenons par voie de

17 questionnaires fournis sur le territoire de la Serbie, du Monténégro et de

18 la Bosnie; ce sont les conditions préalables. Une fois celles-ci remplies,

19 nous pouvons procéder à des exhumations. Sinon, on agit à la hâte et cela

20 peut poser de graves problèmes.

21 Question: Je comprends bien que vous essayiez d'expliquer la procédure en

22 place; vous parlez de questionnaires, de ce genre de choses. Mais prenons

23 par exemple Osijek, où vous avez travaillé. Question précise: Paulin Dvor,

24 ce n'est pas loin, n'est-ce pas, d'Osijek?

25 Réponse: Oui, c'est assez proche.

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1 M. Milosevic (interprétation): Dites-moi, comment il est possible que,

2 depuis Rizvanusa, au mont Velebit, pas loin de Gospic, plusieurs corps de

3 civils serbes ont été exhumés; ils avaient été tués en décembre 1991 à

4 Paulin Dvor, non loin d'Osijek où vous travailliez?

5 Vous savez où se trouve Osijek, où se trouve le mont Velebit. Comment se

6 fait-il que ces civils serbes, qui ont été tués à Paolin Dvor, non loin

7 d'Osijek, ont été exhumés sur le mont Velebit? Vous dites que quelqu'un

8 n'a pas rempli un questionnaire, alors que ceci se trouvait dans une zone

9 de votre responsabilité?

10 M. le Président (interprétation): Laissez le temps au témoin de répondre.

11 M. Grujic (interprétation): Première chose: il faut opérer certaines

12 distinctions. Moi, j'ai pour travail d'organiser les exhumations, d'aider

13 à les réaliser et de garder des archives.

14 Effectivement, les restes de 18 personnes ont été exhumés en juin 2000

15 dans la zone de Rizvanusa, comme vient de le dire M. Milosevic. Il est

16 aussi établi que l'identification n'est toujours pas terminée, mais qu'une

17 identification préliminaire à l'aide de l'analyse par ADN prouve que ces

18 personnes étaient très probablement des personnes se trouvant dans la

19 liste de recherche pour Paulin Dvor.

20 Après confirmation de l'identification, donc l'identité sera confirmée et

21 les institutions compétentes… Ou la Chambre d'instruction va mener une

22 instruction à propos de cette affaire. Et je l'ai appris par les médias,

23 puisque ceci ne relève pas de mes fonctions, j'ai appris que certaines

24 personnes ont déjà été mises en accusation pour ces méfaits et que ces

25 personnes se trouvent maintenant en détention. La réponse sera fournie par

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1 les tribunaux.

2 Question: Fort bien, Monsieur Grujic. Mais Paulin Dvor se trouve en

3 Slavonie orientale, n'est-ce pas?

4 Réponse: Oui.

5 Question: Et Velebit, c'est une montagne de la Dalmatie du Nord?

6 Réponse: C'est exact.

7 Question: Donc c'étaient des civils serbes tués à Paulin Dvor en 1991,

8 précisément au moment où vous, vous étiez un agent opérationnel de la DB

9 dans cette région. C'est bien cela?

10 Réponse: Je ne peux pas parler de cet événement dans ma déposition, parce

11 que je ne suis pas au courant. J'aurai peut-être des informations

12 erronées, impossible pour moi, dès lors, de vous répondre.

13 M. Milosevic (interprétation): Je viens juste de vous soumettre un fait et

14 je vous ai posé des questions à ce propos. Nous parlons de Paulin Dvor,

15 Slavonie orientale; de 18 corps originaires que vous avez mentionnés,

16 originaires de Paulin Dvor, retrouvés en Dalmatie du Nord.

17 M. le Président (interprétation): Le témoin n'est pas en mesure de vous

18 fournir de réponse. Avançons.

19 M. Milosevic (interprétation): Qui a été arrêté? Vous dites que certaines

20 personnes ont été arrêtées.

21 M. Grujic (interprétation): Les médias m'ont appris qu'au moins deux

22 personnes ont été arrêtées, placées en détention, à cause de ces faits

23 répréhensibles. Les tribunaux compétents vont engager des poursuites, et

24 la responsabilité pénale sera établie face à ces événements.

25 Question: Quand j'entends les chiffres que vous citez, lorsque je les

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1 compare aux faits réels, je me dois de dire, Monsieur Grujic, que je mets

2 en doute les vôtres. Etes-vous au courant des exhumations réalisées à

3 Maciska Sargovina, Sarvas, Golubnjaca et dans la région de Lika, lorsque

4 ceci relève de votre bureau? Combien de Serbes avez-vous déterrés à ces

5 endroits?

6 Réponse: Vous parliez de Golubnjaca? A Golubnjaca, il y avait la famille

7 Rakic. C'étaient des gens d'appartenance ethnique serbe.

8 Question: Et combien de Serbes avez-vous déterré dans ces trois endroits?

9 Réponse: Je ne pourrais pas vous dire de chiffre comme ça, à brûle-

10 pourpoint, pour ces trois endroits, mais je peux vous donner une

11 estimation pour les trois lieux qui se situent autour de 20 à 30

12 personnes.

13 Question: Fort bien. Est-il exact de dire que 400 cadavres se trouvent à

14 l'Institut médico-légal de Zagreb, pour le moment?

15 Réponse: C'est exact. En fait, plus de 500 cadavres.

16 Question: Moi, je parle des corps exhumés de victimes serbes.

17 Réponse: Les victimes exhumées ne sont pas divisées en fonction de leur

18 appartenance ethnique.

19 Question: J'ai l'impression que vous, vous faites cela: que vous faites

20 une division, une distinction.

21 Réponse: Non. Si nous avons des corps exhumés qui n'ont pas été

22 identifiés, il est impossible de les rattacher à une appartenance ethnique

23 puisque ces corps n'ont pas encore été identifiés; ils ne portent pas de

24 documents d'identité. On peut seulement faire des conjectures quant à leur

25 appartenance.

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1 Et on peut dire que sur ces 500 victimes exhumées de ces 135 fosses

2 communes, la plupart de ces personnes étaient des Croates. La majorité de

3 ces personnes étaient des Croates.

4 Ici, nous voyons le chiffre qui reste. Nous avons 350 personnes non

5 identifiées; c'est une estimation. C'étaient sans doute des personnes

6 d'appartenance ethnique serbe, mais qui ne sont pas encore identifiées. Le

7 processus n'est pas terminé. On peut dire en probabilité qu'il y a 500

8 non-Serbes, et pour ce qui est des Serbes, 350.

9 Question: Vous dites "350". Et apparemment, à l'institut médico-légal, il

10 y en a plus de 400. Donc ce chiffre est inexact aussi?

11 Réponse: Je ne vois pas comment "Veritas" pourrait avoir des chiffres plus

12 précis que les nôtres. Je vous ai dit que je parlais ici de chiffres

13 approximatifs. Si vous voulez les chiffres précis, je vais vous les

14 donner.

15 Question: Allez-y. Est-il exact de dire qu'il y a encore 1.000 lieux où se

16 trouvent des fosses communes qui n'ont pas encore été exhumées?

17 Réponse: Je ne pense pas que ces chiffres soient exacts.

18 Question: Vous dites que ce ne sont pas des chiffres exacts? Fort bien. Je

19 veux simplement que vous me répondiez par oui ou par non.

20 Est-ce que, par hasard, vous vous souvenez qu'il y a eu exhumation de

21 victimes serbes pendant la guerre et qu'il y avait, parmi ces victimes,

22 une victime de l'opération du plateau de Miljevac? Ceci remonte à juin

23 1992: 40 personnes ont été tuées et après leur arrestation, des civils

24 serbes ont été tués et jetés dans un ravin; et deux mois plus tard, ils

25 ont été exhumés et remis aux Serbes. Ceci a été fait par les autorités

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1 croates au moment où vous étiez chef de ce service, n'est-ce pas? Ils ont

2 été tués, jetés dans un ravin, exhumés plus tard et remis aux autorités

3 serbes au cours de la guerre, dans le cadre des échanges?

4 Réponse: Mais de quoi parlez-vous? Est-ce qu'on parle ici de la poche de

5 Medak ou du plateau de la poche de Miljevac?

6 M. Milosevic (interprétation): Nous parlons du plateau.

7 M. le Président (interprétation): Vous l'avez déjà dit, ceci figure dès

8 lors au compte rendu d'audience. Inutile de revenir sur un terrain déjà

9 parcouru.

10 M. Milosevic (interprétation): Vous dites ne rien savoir à ce propos?

11 M. Grujic (interprétation): Je ne connais rien à propos de cet incident.

12 M. Milosevic (interprétation): Fort bien. Maintenant, c'est donc quelque

13 chose dont vous vous êtes occupé sans rien en savoir.

14 Est-ce que, par hasard, vous savez que les Nations Unies ont exigé du

15 Gouvernement croate qu'il fournisse des explications après le massacre de

16 civils serbes dans la poche de Medak? 70 civils ont été tués et 48 portés

17 disparus.

18 M. le Président (interprétation): Etes-vous au courant de cela, Monsieur

19 Grujic?

20 M. Grujic (interprétation): Oui, oui. C'est en rapport avec la poche de

21 Medak. Je peux vous dire ce que je sais à propos de cela.

22 M. le Président (interprétation): Est-ce que vous le savez dans l'exercice

23 de votre profession, ou davantage de quelque chose que vous auriez appris

24 par les journaux?

25 M. Grujic (interprétation): Oui, effectivement.

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1 M. le Président (interprétation): Fort bien.

2 M. Grujic (interprétation): 88 personnes ont perdu la vie dans la zone de

3 la poche de Medak. Et, d'après des informations recueillies par le bureau

4 -informations établies suite à des analyses effectuées, nous avions reçu

5 ces faits, ces chiffres après négociation-, il y avait 46 personnes qui

6 étaient des soldats et 42 civils.

7 Aussitôt après cet incident, les dépouilles mortelles de 52 personnes ont

8 été emportées. 18 dépouilles ont été découvertes par les Nations Unies et,

9 en 1995, trois autres dépouilles de personnes d'appartenance ethnique

10 serbe ont été découvertes. En avril 2000, des exhumations ont été

11 entreprises à Obradovic, Varos, près de Gospic, moment où les dépouilles

12 mortelles de 11 personnes ont été exhumées.

13 Et si l'on voit la situation actuellement, dans cette même zone 15

14 personnes sont toujours portées disparues, recensées en tant que telles.

15 Cependant, dix personnes n'ont pas encore été identifiées, ce qui veut

16 dire qu'il y a encore cinq personnes que l'on recherche.

17 M. Milosevic (interprétation): Et il est toujours question de Serbes, ici,

18 dans tout ce que vous venez de citer?

19 M. Grujic (interprétation): Moi, je ne fais pas de distinction entre les

20 appartenances ethniques, mais il est fort probable qu'il s'agit de Serbes.

21 M. Milosevic (interprétation): Eh bien, dites-moi: selon les informations

22 dont vous disposez, est-il exact qu'à Citluk et à Pocitelj, les victimes

23 étaient des civils?

24 M. Grujic (interprétation): Je ne peux pas parler de cela, car il est fort

25 probable que ces personnes aient été tuées après les conflits. Et pour

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1 autant que je le sache -j'insiste là-dessus, pour autant que je le sache-

2 ces victimes sont liées à des plaintes pour actes criminels qui ont été

3 déposées en bonne et due forme et qui ont donné lieu à enquêtes pour

4 découvrir les auteurs de ces crimes et les traduire en justice. Donc c'est

5 une procédure qui est en cours devant les autorités compétentes croates.

6 M. le Président (interprétation): Un instant, je vous prie. J'aimerais un

7 éclaircissement. La poche de Medak, vous avez dit que 88 personnes y

8 avaient été tuées. Mais quelle est la date de l'opération qui a eu leur

9 décès pour conséquence?

10 M. Grujic (interprétation): C'était en 1993, mais je ne peux vous donner

11 la date exacte. En tout cas, l'année est 1993.

12 M. le Président (interprétation): Merci.

13 M. Milosevic (interprétation): Mais alors, vous vous rappelez de

14 l'avertissement lancé par Thorvald Stoltenberg en public à Franjo Tudjman,

15 à qui il a dit qu'il serait préférable de cesser les attaques sur les

16 territoires habités par les Serbes et de se retirer des villages de la

17 Lika où des civils avaient été tués. Vous rappelez-vous cet avertissement?

18 Il relevait de vos fonctions, c'était votre travail de participer à ce

19 genre de chose, ou bien est-ce que cela ne faisait pas partie de votre

20 travail?

21 M. Grujic (interprétation): Cela n'avait absolument rien à voir avec mon

22 travail, ni avec le sujet de mon témoignage.

23 M. Milosevic (interprétation): Je comprends bien que vous ne vous

24 intéressez pas à cela, pas plus que les gens qui sont assis en face de moi

25 ici. Mais vous rappelez-vous que le 12 octobre 1993, un représentant

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1 spécial de la Commission spéciale des Droits de l'homme des Nations Unies,

2 ancien ministre polonais des Affaires étrangères, je veux parler de

3 Tadeusz Mazowiecki qui n'était absolument pas partial vis-à-vis des

4 Serbes, a confirmé que les forces croates -et je le cite- "ont

5 systématiquement et délibérément détruit des maisons, tué des têtes de

6 bétail et détruit des biens appartenant à des personnes et qu'elles ont

7 tué…"

8 M. le Président (interprétation): Je vais vous interrompre. Et le motif

9 est le même que celui que j'ai déjà évoqué au début du contre-

10 interrogatoire. Il est question ici d'octobre 1993; or la période couverte

11 dans l'Acte d'accusation va de 1990 à 1991 ou jusqu'au début de 1992.

12 Alors, dites-moi quelle est la pertinence des événements survenus en

13 Croatie en 1993? Mais c'est votre affaire; vous pouvez nous dire quelle

14 est la pertinence de tout cela. Mais nous sommes, dans ce cas, à peu près

15 deux ans après la période concernée dans l'Acte d'accusation.

16 M. Milosevic (interprétation): Monsieur May, quelquefois vous parlez de

17 1991 et de 1992, et hier, vous avez parlé de 1994 et de 1995. Donc je ne

18 sais pas de quoi vous traitez exactement parce qu'hier, nous avons passé

19 une heure et demie à écouter des explications qui portaient sur la période

20 de 1994, 1995, 1996, etc. Et à l'époque...

21 M. le Président (interprétation): Je ne sais pas ce que vous voulez dire.

22 Revenons sur la déposition de ce témoin. Il est vrai, bien entendu, qu'il

23 a traité de personnes décédées jusqu'en 1995 et que vous avez été autorisé

24 à le contre-interroger à ce sujet. Mais la question qui se pose est la

25 suivante: ce rapport de Tadeusz Mazowiecki, que vous venez d'évoquer, où

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1 il serait question de forces croates qui auraient détruit des maisons,

2 etc., etc., c'était en 1993. Alors, quelle est la pertinence de tout cela,

3 deux ans après la période qui nous intéresse? Même chose pour l'opération

4 "Eclair" et l'opération "Tempête", d'ailleurs.

5 J'essaie de vous faire comprendre la chose suivante: cela n'apporte aucune

6 aide au Tribunal dans la détermination que les Juges auront à faire dans

7 la présente affaire au sujet des événements de 1991 et 1992, d'entendre

8 parler des événements survenus en 1993 et 1994 en Croatie, à moins que

9 vous nous démontriez la pertinence qu'il y a à en parler. Mais j'ai bien

10 dit que c'était à vous qu'il appartenait de choisir. S'il y a une

11 pertinence à tout cela…

12 M. Milosevic (interprétation): Eh bien, c'est là précisément que se trouve

13 la pertinence.

14 M. le Président (interprétation): Nous vous entendrons, bien entendu. Mais

15 pour le moment, moi, je ne vois aucune pertinence.

16 M. Milosevic (interprétation): Je vais vous dire où elle est, la

17 pertinence, Monsieur May. La pertinence vient du fait contenu dans ma

18 phrase précédente que vous n'avez pas citée. Vous avez mentionné les biens

19 matériels, vous avez mentionné le bétail, mais vous n'avez pas parlé de ce

20 que j'ai dit dans la dernière partie de ma phrase, lorsque j'ai dit que

21 dans le rapport de Tadeusz Mazowiecki, il était question de 67 civils

22 serbes tués. Donc c'est là que se trouve la pertinence.

23 Le témoin, à l'époque, avait un département ministériel à sa disposition

24 pour établir la précision de la réalité des choses; et il disposait

25 d'informations qui lui étaient fournies par le haut représentant des

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1 Nations Unies. Et malgré tout, les explications nécessaires n'ont pas

2 permis d'éclaircir la situation. Parce qu'en 1991 et jusqu'en 2003, ces

3 choses ont été examinées de près et n'ont pas donné lieu à éclaircissement

4 complet. Donc le témoin ne parle pas de choses qui se sont passées en 1991

5 et 1992, mais de ce qui s'est passé dans le cadre des conséquences de la

6 guerre et des mesures qui ont été prises jusqu'à aujourd'hui, en l'an

7 2003, pour réduire les conséquences de cette guerre.

8 Donc ce que je remets en cause ici, ce sont les intentions véritables du

9 Gouvernement et du bureau représentés par ce témoin, d'établir la vérité

10 au sujet des victimes de guerre et de l'importance de leur nombre, du côté

11 des Serbes, des Serbes qui étaient résidents sur le territoire de la

12 République de Croatie.

13 Par conséquent, je considère que les choses ont été inversées parce que

14 les victimes étaient serbes, qu'elles étaient sur le territoire de la

15 Croatie et donc qu'en réalité, leur nombre est beaucoup plus important que

16 le nombre des victimes croates, notamment si nous examinons le nombre des

17 habitants de la population croate. Et ce bureau représenté par ce

18 témoin...

19 M. le Président (interprétation): Nous aurons bien sûr à nous prononcer

20 sur point en temps utile.

21 Le témoin a dit ce qu'il avait à dire dans sa déposition. Il a cité le

22 chiffre de 300 Serbes découverts par son bureau. Vous avez produit un

23 autre chiffre et parlé d'un autre rapport dont nous ne connaissons pas les

24 dates.

25 Si vous souhaitez interroger le témoin sur sa partialité éventuelle, vous

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1 pouvez le faire, bien entendu. Vous pouvez lui soumettre vos allégations

2 selon lesquelles il donnerait une image de la situation qui ne correspond

3 pas à la réalité.

4 M. Milosevic (interprétation): Monsieur May, je ne prétends pas que ce que

5 je viens de dire ait un lien direct avec le témoin. Je considère que,

6 d'une façon organisée et systématique, vous souhaitez inverser la vérité,

7 c'est-à-dire présenter les choses à l'envers au sujet des événements

8 survenus en Croatie.

9 Monsieur Grujic, avez-vous participé, à moins que ce ne soit votre bureau,

10 à l'exhumation de 70 civils serbes enterrés à Zadar, parce que la partie

11 croate a procédé à cette exhumation et a remis les restes humains à la

12 partie serbe, c'est-à-dire à la République serbe de Krajina au cours de

13 l'année 1994? Ces corps ont été enterrés à Zadar, ce qui veut sur le

14 territoire contrôlé par les autorités croates. Avez-vous été chargé de

15 cette exhumation? Avez-vous participé à cette exhumation précise, ou bien

16 a-t-elle été le fait de l'armée? Votre bureau ou un représentant de votre

17 bureau a-t-il participé à cela?

18 M. Grujic (interprétation): La réalité, c'est qu'à l'époque, des restes

19 humains ont été échangés. Je ne sais pas quel a été le nombre exact de ces

20 échanges, je ne pense pas qu'ils correspondent aux chiffres évoqués par

21 vous; il était, à mon avis, inférieur. C'est-à-dire que le nombre de

22 personnes enterrées dans les cimetières de Zadar était inférieur, à mon

23 avis, à celui que vous avez cité.

24 Et à la demande d'une commission dirigée par M. Strbac à l'époque -qui est

25 dirigeant de "Veritas" aujourd'hui; à l'époque, il était le chef-adjoint

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1 de cette commission- et donc, c'est à sa demande que ces dépouilles ont

2 été échangées. Je pense que ceci a été fait de la façon la plus convenable

3 qui soit.

4 A l'époque -je me permets de l'ajouter-, donc à l'époque, les dépouilles

5 des gens tués à Skabrnja, c'est-à-dire de 60 personnes, ont été échangées.

6 C'est ainsi que les choses se sont passées.

7 Question: Je vous ai interrogé au sujet des personnes qui ont participé à

8 l'exhumation.

9 Réponse: Je n'ai personnellement pas participé à cette exhumation.

10 Question: Mais vous prétendez que vous étiez… -comment est-ce que je

11 pourrais dire?- la seule institution autorisée en Croatie à pratiquer de

12 telles exhumations?

13 Réponse: Je pense que ceci est déclaré très clairement dans l'annexe de

14 mon rapport, annexe 2C, où l'on voit en fait quelles sont les compétences

15 et attributions en matière d'exhumations dans les différentes périodes

16 évoquées. Tout cela figure dans ce document.

17 Question: Moi, je vois ici que 52 corps ont été restitués à la partie

18 serbe, sur 70 personnes tuées. Et l'institution dirigée à l'époque par

19 Savo Strbac a fourni les éléments sur lesquels je me suis appuyé pour

20 citer ces chiffres.

21 Savez-vous que, durant la guerre, il y a eu des dizaines d'exhumations

22 mineures qui ont permis de découvrir des victimes serbes, ensuite remises

23 à la partie serbe?

24 Réponse: Je pense que j'ai bien dit cela dans mes réponses, mêmes si elles

25 ont été rapides. Oui, il y en a eu, mais c'était un processus qui se

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1 déroulait dans les deux sens. Les deux parties pratiquaient de la même

2 façon.

3 Les membres tués des formations armées des deux côtés étaient remis à la

4 partie d'où ils étaient originaires, bien sûr en application des

5 Conventions de Genève. Donc, je ne vois rien de répréhensible à cela.

6 Question: C'est précisément ce que je tenais à établir: que c'était un

7 processus qui avait cours des deux côtés -c'est ce que vous venez de

8 dire-, donc des deux côtés.

9 Maintenant, dites-moi, je vous prie, combien de victimes serbes ont été

10 exhumées dans la région où vous travailliez, et précisément dans le

11 cimetière de Vukovar? Et combien de victimes serbes ont été jetées dans le

12 Danube, selon vos évaluations?

13 Réponse: Je ne souhaiterais pas faire des appréciations subjectives à ce

14 sujet, mais je peux vous en parler avec précision. Au cimetière de

15 Vukovar, il n'y avait 938 victimes qui ont été enterrées, et elles ont été

16 exhumées par nos soins. Parmi ces victimes, il y avait un certain

17 pourcentage de personnes d'appartenance ethnique serbe.

18 Question: Quel était ce pourcentage, selon vos évaluations?

19 Réponse: Je ne vous donnerai pas le pourcentage exact que je ne connais

20 pas, mais un approximatif qui tourne autour de 15%. En fait, les

21 ressortissants appartenant à des minorités ethniques constituaient un

22 total de 20%, les autres étant d'appartenance ethnique croate. Je pense

23 donc que 10% serait un pourcentage raisonnable pour les Serbes.

24 Question: Avez-vous recueilli quelque information que ce soit au sujet du

25 fait que ces cadavres ont été enterrés dans certains cas, ou jetés dans le

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1 Danube dans d'autres cas?

2 Réponse: Je ne peux parler que de la réalité. Et la réalité indique, les

3 faits indiquent que nous avons vu également certains cadavres brûlés. Mais

4 chaque fois que c'était possible les victimes ont été identifiées.

5 Question: Ecoutez, le temps passe rapidement; j'aimerais que vous disiez

6 quelques mots au sujet des camps à présent. Savez-vous, puisque vous en

7 avez parlé, qu'il existe un registre, un ouvrage où l'on trouve la liste

8 complète des crimes de guerre commis sur le territoire de l'ex-

9 Yougoslavie? Ce rapport a été publié en 2001. Et on y trouve le nombre de

10 camps où étaient enfermés des Serbes sur le territoire de Bosnie-

11 Herzégovine; il y en avait 536. Mais, enfin, cela ne vous intéresse pas!

12 Sur le territoire de Croatie, le chiffre cité est celui de 221 camps; est-

13 ce que vous connaissez ce chiffre?

14 M. Grujic (interprétation): Ce chiffre est absolument inexact. Il y avait…

15 M. Milosevic (interprétation): Ecoutez, dites s'il est exact ou pas, et

16 nous poursuivons.

17 M. le Président (interprétation): Laissez le témoin répondre.

18 Monsieur Grujic vous avez la parole.

19 M. Grujic (interprétation): En République de Croatie, il a été prouvé que

20 des prisonniers de guerre étaient maintenus en détention en 22 lieux

21 différents. Sur ce total, il y en avait quatre qui avaient le statut de

22 lieu de détention pour prisonniers de guerre, 16 qui étaient des prisons

23 ou des institutions pénitentiaires classiques et qui ont servi à héberger

24 ces prisonniers. Donc tous les détenus qui étaient sous l'autorité de la

25 République de Croatie ont été détenus dans ces prisons à l'époque; et il

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1 est tout à fait clair qu'il est impossible de tenir le compte précis et le

2 décompte précis et de définir avec précision les lieux où ces personnes

3 ont été placées en détention avant d'arriver dans les lieux de détention

4 dont je parle, c'est-à-dire impossible de tenir le décompte complet des

5 lieux de transit.

6 Question: Donc vous avez la liste des endroits à partir d'où ces personnes

7 ont été amenées lorsqu'elles sont arrivées à la prison?

8 Réponse: Non, nous n'avons pas ces éléments; ceci ne relevait pas de notre

9 travail. Il y a des endroits donc, qui ont servi de lieu de détention, qui

10 sont différents le long de la ligne de démarcation. Vous connaissez cette

11 ligne de démarcation et l'étendue du territoire libre en Croatie qui

12 faisait plusieurs kilomètres de long?

13 Question: Oui. Mais votre bureau a travaillé pendant plusieurs milliers de

14 jours, n'est-ce pas? Dites-moi, sur cette liste -puisque nous l'avons

15 établie clairement- je vous ai dit qu'il y a 221 camps qui ont servi à

16 enfermer des Serbes en Croatie, et vous avez donné une réponse négative à

17 ce sujet qui était tout à fait définitive. Donc vous dites qu'il n'y en

18 avait qu'une vingtaine, à peu près.

19 Mais dans le camp de Lora qui est… est-ce bien l'un des endroits dont vous

20 avez parlé, le camp de Lora à Split?

21 Réponse: Le camp de Lora était un endroit où étaient enfermés des

22 prisonniers de guerre qui avait ce statut.

23 Question: Mais comment pouvez-vous dire cela, alors que c'était l'un des

24 camps les pires où les détenus ont été emprisonnés? 1.005 détenus qui sont

25 passés par ce camp et au moins 35 ont été exécutés dans le camp lui-même.

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1 Selon les déclarations faites par les prisonniers, il est fort possible

2 que 70 prisonniers aient été tués dans le camp lui-même. Est-ce que vous

3 disposez d'informations à ce sujet, puisque vous, vous appelez ce camp "un

4 dortoir"?

5 Nous ne lui donnons pas le même nom, n'est-ce pas? Et je parle du nom

6 officiel que porte ce lieu.

7 Réponse: Le Tribunal du diocèse de Split est en fait en train de mener une

8 enquête au sujet de cet endroit où un certain nombre de personnes ont été

9 placées en détention après avoir fait l'objet d'accusations. Je ne connais

10 pas le nombre exact de ces personnes, d'ailleurs, je n'ai eu aucune

11 information me permettant d'imaginer que leur nombre ait pu être aussi

12 élevé que vous le dites.

13 Question: Très bien. Mais, selon les éléments dont vous disposez, combien

14 de prisonniers ont été tués dans ce camp?

15 Réponse: Eh bien, voyez-vous, je n'ai pas de chiffres à ce sujet. Parce

16 que c'est le Tribunal du diocèse de Split qui mène son enquête et qui, une

17 fois l'enquête terminée pourra confirmer, si oui ou non, des événements de

18 ce genre se sont produits à cet endroit. Mais, pour ce qui me concerne, je

19 suis en mesure de vous dire que, hormis dans deux cas, il n'y a jamais eu

20 de comportement répréhensible ou illégal à l'égard des prisonniers de

21 guerre.

22 Question: Très bien. Nous reviendrons là-dessus un peu plus tard, mais

23 puisque vous dites s'agissant de Lora, que c'était un camp ressemblant un

24 petit peu à une pension de famille, est-ce que vous connaissez le pavillon

25 26 qui a été montré récemment dans le cadre d'un film réalisé par Nenad

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1 Pukovski? C'est un film documentaire au sujet de ce camp de Lora, et Nenad

2 Pukovski est un Croate; il l'a montré à la foire de Zagreb. Il y est

3 question de prisonniers principalement d'appartenance ethnique serbe qui

4 sont passés par ce camp. Etes-vous au courant?

5 Réponse: Un tel endroit… mais cet endroit en tout cas ne figure pas au

6 nombre des lieux enregistrés comme lieux à partir desquels des échanges de

7 prisonniers ont été réalisés. Il vous faut savoir que, lorsque des

8 prisonniers étaient maintenus en détention officiellement dans un lieu,

9 l'endroit en question était enregistré.

10 M. Milosevic (interprétation): Donc ils n'étaient pas enregistrés et, en

11 raison de cela, il n'existe pas à vos yeux. Très bien, très bien avançons!

12 Savez-vous que dans le pré de Pakrac, à Marino Selo, il y a eu des camps

13 qui fonctionnaient, à partir du 11 octobre 1991.

14 Monsieur May, là, voyez-vous, nous revenons sur l'année 1991, et ils ont

15 continué à fonctionner jusqu'au 29 mars 1992. Plusieurs centaines de

16 Serbes y ont été liquidés, dans le pré de Pakrac et à Marino Selo; et la

17 plupart de ces exécutions ont été effectuées en Slavonie occidentale. Donc

18 tous ces villages étaient en dehors de la zone habitée par les Serbes, de

19 la zone donc où les Serbes ont opposé la violence armée pour résister aux

20 forces armées croates.

21 M. le Président (interprétation): Ecoutez, si nous parvenons à suivre

22 votre question, Monsieur Grujic, je vous demanderai d'y répondre. Si vous

23 n'êtes pas parvenu à la suivre, elle peut vous être répétée et divisée en

24 plusieurs questions.

25 M. Grujic (interprétation): Je ne saurais dire de façon générale si le

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1 chiffre de plusieurs centaines est exact ou pas. Mais je dirai que sur le

2 pré de Pakrac –ça, je peux en parler dans mon témoignage car je suis au

3 courant-, donc dans ce pré de Pakrac en 1995, on a trouvé, suite à une

4 exhumation, des restes humains de 19 personnes; et ces corps ont été

5 enterrés en 1992 par des membres du Bataillon argentin des Nations Unies.

6 Donc ce sont sûrement les seules victimes qui ont été découvertes à ce

7 jour dans le pré de Pakrac.

8 M. Milosevic (interprétation): Très bien. Donc vous, vous affirmez que le

9 chiffre que j'ai, dont je dispose ici, selon lequel entre octobre 1991 et

10 la fin de mars 1992, plus de 300 Serbes ont été liquidés sur le pré de

11 Pakrac, vous dites que ce chiffre est inexact?

12 M. Grujic (interprétation): Je ne dis pas que ce chiffre est inexact car

13 je n'en dispose pas. Je dis que je ne peux dire dans mon témoignage que ce

14 que je viens de dire à l'instant.

15 M. Milosevic (interprétation): Très bien.

16 Vous n'acceptez aucune question au sujet des opérations "Tempête" et

17 "Eclair", Monsieur May, n'est-ce pas?

18 M. le Président (interprétation): Un instant.

19 (Les Juges se concertent sur le siège.)

20 Non. Contentez-vous de poser à ce témoin des questions auxquelles il peut

21 répondre.

22 M. Milosevic (interprétation): Fort bien. Eh bien, dans ce cas, puisque je

23 n'ai pas le droit de vous interroger au sujet des opérations "Eclair" et

24 "Tempête", deux opérations qui constituaient en des attaques contre des

25 zones protégées par les Nations Unies qui ont, en 1995, débouché sur les

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1 plus grandes tueries de cette guerre...

2 M. le Président (interprétation): Nous avons dit: non!

3 M. Milosevic (interprétation): Oui, mais ma question est la suivante:

4 comment se fait-il que, huit ans après ces opérations, votre bureau n'ait

5 aucun renseignement à ce sujet, huit ans après ces événements et après des

6 tueries de masse, principalement de citoyens serbes? Et vous affirmez,

7 n'est-ce pas, que vous avez traité tous les habitants, quelle que soit

8 leur origine ethnique, sur un pied d'égalité. Alors, comment se fait-il

9 que vous n'ayez pas traité le problème?

10 M. le Président (interprétation): (S'adressant au témoin.) J'ai coupé le

11 micro.

12 Ce n'est pas une question pertinente.

13 M. Milosevic (interprétation): Bien.

14 Puisqu'il est interdit pour moi de vous interroger au sujet des opérations

15 "Tempête" et "Eclair", je vous demande si, suite aux pressions exercées

16 sur les Serbes, notamment dans les villes de Zagreb, Osijek, Rijeka,

17 Sisak, etc. –il y en avait beaucoup, des Serbes, dans toutes ces villes-

18 donc dans la période 1991-1992? Certains Serbes étaient partis en Bosnie-

19 Herzégovine et en Serbie, mais il en restait encore dans toutes les villes

20 que j'ai énumérées.

21 Alors, savez-vous pourquoi un grand nombre de ces personnes, dans cette

22 période, ont cherché refuge derrière la ligne, c'est-à-dire en Krajina

23 serbe?

24 M. Grujic (interprétation): Je pense que j'ai cité des chiffres de

25 réfugiés et des chiffres de personnes qui étaient en possession des

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1 papiers administratifs nécessaires en République de Croatie.

2 Question: Eh bien, si c'est toute votre réponse, nous nous contenterons de

3 cette réponse.

4 Savez-vous –et, Monsieur May, je parle de juin 1991 à août 1992, de cette

5 période-là-, savez-vous ou est-ce que votre bureau dispose des chiffres

6 relatifs au fait que 52.320 Serbes ont fui les zones de Dvor, Pakrac,

7 Novska, Orahovac et Virovitica, et que 193 villages ont été nettoyés

8 ethniquement en Slavonie occidentale? Connaissez-vous ces chiffres? 1991

9 et 1992, c'est la période concernée.

10 Réponse: Je ne peux répéter qu'une chose, à savoir qu'en 1991, il y avait,

11 en République de Croatie, 4.784.000 habitants dont 3.736.000 Croates et

12 581.000 Serbes, dont 205.000 Croates ont été expulsés et 3.104 Serbes.

13 Question: Combien de Serbes ont été expulsés de Croatie?

14 Réponse: 3.104.

15 Question: 3.104 Serbes ont fui la Croatie?

16 Réponse: C'est le chiffre officiel de 1,41%. Alors que, s'agissant des

17 Hongrois, ils constituent 49,87% et 2,26% ont fui.

18 M. Milosevic (interprétation): Monsieur May, après cette réponse

19 absolument dépourvue du moindre sens, je ne vois plus aucune raison de

20 poser des questions à ce témoin.

21 M. le Président (interprétation): Très bien.

22 Monsieur Tapuskovic, vous avez la parole.

23 M. Tapuskovic (interprétation): Merci, Monsieur le Président. J'aurai

24 quelques questions à poser à ce témoin, mais il me semble que l'heure de

25 la pause est arrivée.

Page 17380

1 M. le Président (interprétation): Oui. 20 minutes de pause d'abord.

2 (L'audience, suspendue à 12 heures, est reprise à 12 heures 40.)

3 (Le témoin est dans le prétoire.)

4 M. le Président (interprétation): Oui, Monsieur Tapuskovic.

5 (Questions de l'amicus curiae, M. Tapuskovic, au témoin, M. Ivan Grujic.)

6 M. Tapuskovic (interprétation): Merci, Monsieur le Président.

7 Monsieur Grujic, je me propose, dans le courant des questions que je vais

8 vous poser, de traiter de choses contenues dans votre rapport, et bien sûr

9 de la période allant jusqu'à la mi-juillet 1992. Peut-être n'ai-je pas

10 enregistré comme il le fallait hier ce que vous avez dit.

11 Vous avez rédigé ce rapport quand, au juste?

12 M. Grujic (interprétation): Ce rapport-ci a été rédigé l'an passé.

13 Question: Merci. Si j'ai bien compris la méthodologie utilisée par vos

14 soins, vous avez indiqué en effet la méthodologie qui a été la vôtre et

15 quelles sont les activités déployées par vous-même pour aboutir aux

16 conclusions qui sont énumérées ici.

17 Vous avez indiqué au point 4, en effet, de ce qui constitue votre rapport,

18 entre autres, que vous avez organisé et tenu des entretiens concernant des

19 personnes emprisonnées et des personnes portées disparues, avec la

20 République fédérale de Yougoslavie et la Bosnie-Herzégovine. Et vous avez

21 parlé de la prise en charge des dépouilles de personnes qui ont été

22 détenues ou qui étaient portées disparues au niveau de la République

23 fédérale de Yougoslavie et de la Bosnie-Herzégovine. C'est bien cela?

24 Réponse: Oui.

25 Question: Et vous avez dit plus loin, de façon analogue, que vous avez eu,

Page 17381

1 à l'occasion de ces entretiens, à traiter des échanges, n'est-ce pas?

2 Réponse: C'est cela.

3 Question: D'après ce que je vois dans le rapport toutefois, dans ces

4 entretiens-là, il n'a pas du tout, au niveau de la République fédérale de

5 Yougoslavie et de la Bosnie-Herzégovine également, demandé à vos

6 interlocuteurs quelque renseignement que ce soit au sujet des morts et des

7 expulsés.

8 A cette époque-là en 1992 et par la suite, étant donné que ce rapport vous

9 l'avez rédigé -comme vous le dites vous-même tout à l'heure- l'an passé,

10 donc vous n'avez pas demandé ce type de renseignements-là? Vous vous êtes

11 référé aux renseignements seuls du bureau chargé des personnes expulsées,

12 des personnes déplacées et portées disparues de la part du ministère des

13 Travaux publics de Croatie, en corrélation avec ces détenus et personnes

14 portées disparues.

15 Donc quand il s'agit de détenus, vous avez parlé de 220.380 personnes.

16 Est-ce que cela signifie que toutes les personnes qui sont citées ici

17 figurent dans les fichiers de votre bureau? Et est-ce que ces fichiers

18 existent dans les fascicules?

19 Réponse: C'est exact, ces fichiers existent dans ma déclaration. Il y a

20 des avenants qui sont composés de fichiers qui disent comment ces

21 personnes ont été enregistrées, et c'est là le chiffre officiel des

22 personnes enregistrées suivant la méthodologie appliquée.

23 Question: Bien entendu, vous n'avez qu'un seul fichier disant qu'il y

24 avait 220.380 personnes, et vous n'avez pas apporté de fichiers

25 individuels?

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1 Réponse: Nous n'avons pas joint de fichiers individuels.

2 Question: Merci. Vous avancez donc des chiffres que vous avez donnés; mais

3 à l'occasion des activités déployées dans cette étude, j'ai appris

4 également que vous n'avez pas demandé des renseignements de la part de la

5 République fédérale de Yougoslavie et de la Bosnie-Herzégovine. Mais avez-

6 vous demandé des renseignements, quels qu'ils soient, au niveau des

7 organisations internationales, pour ce qui est des personnes déplacées,

8 pour ce qui est des personnes expulsées, quelle que soit leur appartenance

9 ethnique?

10 Réponse: Il est tout à fait clair que ce bureau chargé des personnes

11 expulsées et des personnes détenues et des réfugiés a collecté ce type de

12 renseignements. Et les renseignements que j'ai présentés se résument aux

13 chiffres que j'ai avancés. Il est question des structures ethniques, et il

14 y a 205.215 personnes. Derrière chaque chiffre, il y a un nom et un

15 prénom, un carton, un fichier; et cela coïncide avec les renseignements

16 mis à la disposition du HCR.

17 Question: Merci. Je voudrais dire que nous avons déjà entendu dans le

18 courant de ce procès quelques éléments. Connaissez-vous M. Ramljak, le

19 maire de Sisak à l'époque?

20 Réponse: Non, je ne connais pas personnellement M. Ramljak.

21 Question: Vous avez entendu parler de lui?

22 Réponse: Bien sûr que j'ai entendu parler d'un certain M. Ramljak, mais il

23 faudrait que vous me disiez de quoi il s'agit.

24 Question: Nous avons entendu un haut fonctionnaire des Nations Unies, M.

25 Kirudja, qui a témoigné ici il y a quelques jours, et qui a déclaré que le

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1 15 juillet 1992, à Sisak, il a eu une réunion avec Ramljak. Et le dénommé

2 Ramljak lui a précisé qu'à ce moment-là, que de la région de Sisak il

3 était parti déjà à ce moment-là plus de 10.000 Serbes. Aviez-vous

4 connaissance de ce renseignement?

5 Réponse: Je ne suis pas au courant de ce chiffre-là. Une fois de plus, je

6 reviens à ce que j'ai dit. J'ai présenté des données concernant des

7 personnes enregistrées, toute personne enregistrée.

8 Question: Compte tenu du chiffre de 3.000 que vous avez mentionné dans

9 votre rapport, le seul rapport du 15 juillet 1992 parle pour Sisak seul,

10 plus de 10.000 personnes.

11 Réponse: Peut-être pourrions-nous ensuite apporter une explication à ce

12 sujet-là. Une certaine quantité de personnes ont quitté cette région, mais

13 sont restées dans le secteur de la Slavonie de l'Est, et elles n'ont pas

14 été enregistrées comme étant des personnes expulsées, parce qu'elles sont

15 restées sur le territoire de la République de Croatie.

16 Question: Mais les 220.000 Croates qui ont quitté leur domicile, ont-ils

17 quitté la Croatie ou sont-ils restés dans d'autres secteurs de la Croatie?

18 Donc, ont-ils quitté leur domicile pour aller dans une autre région de la

19 Croatie, ou ont-ils quitté la Croatie ?

20 Réponse: Comme je l'ai déjà dit, nous ne pouvions pas disposer de

21 renseignements, ni concernant les personnes mortes ni les personnes

22 expulsées se trouvant sur les territoires occupés de la République de

23 Croatie; parce que notre administration n'avait ni l'opportunité ni la

24 possibilité de se procurer ce type de renseignement officiel. Aussi, les

25 renseignements que j'ai communiqués, sont-ils pertinents pour nous; parce

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1 que derrière chacun de ces chiffres, il y a un nom et prénom, une

2 signature de la personne disant qu'elle a été expulsée de chez elle.

3 Question: Mais je vous comprends parfaitement bien. Vous avez dit, vous-

4 même, que certains étaient partis mais ils ont changé, dans le cadre d'un

5 même territoire, de lieu de résidence. Est-ce que ces 200.000 et quelques

6 Croates ont-ils changé de résidence toujours dans le cadre de la Croatie ?

7 Réponse: Ils n'ont pas déménagé, ils ont été chassés de leurs maisons. Ils

8 se trouvaient dans des hôtels. Ils se trouvaient dans des centres

9 d'accueil. Dans des centres d'accueil qui ont été organisés à cette fin.

10 Et il y en a eu même à l'extérieur du territoire de la République de

11 Croatie.

12 Question: Merci. Le deuxième thème dont je voudrais traiter, c'est celui

13 qui aiderait la Chambre à comprendre vos rapports. Est-ce que, au point

14 31, le nombre de personnes exhumées, est-ce que cela fait partie des

15 31.000... des 11.834 personnes tuées?

16 Réponse: Non, cela ne peut pas en faire partie parce que les personnes

17 exhumées n'ont pas de nom et de prénom, donc elles ne peuvent pas figurer

18 sur cette liste.

19 Sur la liste en question, il n'y a que les personnes identifiées sur le

20 total de personne exhumées. Le nombre de personnes exhumées excède celui

21 de celles qui ont été identifiées. Donc dans les fosses communes et les

22 fosses individuelles, on a exhumé des personnes et il y a plus de 2.700

23 personnes qui ont été identifiées; et ces 2.700 sont incluses dans le

24 chiffre des 11.000 et quelques.

25 Question: Les choses ne sont toutefois pas assez claires; je dois

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1 insister.

2 Vous avez dit que le chiffre total, le nombre total de personnes mortes

3 est de 11.834. Comment se peut-il maintenant que les personnes exhumées ne

4 soient pas englobées dans ce total?

5 Réponse: Je vous ai dit qu'il s'agissait au moins de ce chiffre-là. Et

6 quand nous avons fait un recensement, derrière ce recensement il y a

7 forcément un nom et un prénom. Ceux qui n'ont pas été identifiés, il est

8 clair qu'une fois identifiés, il vont être portés sur la liste des morts,

9 des personnes tuées. Nous avons des cadavres, oui, des dépouilles, mais

10 nous ne connaissons pas leur identité. Nous nous en tenons au fait: nom,

11 prénom, renseignement ou données personnelles pour les porter sur la

12 liste.

13 Question: Donc les personnes qui ont été exhumées sont susceptibles

14 d'augmenter le nombre des personnes tuées?

15 Réponse: Précisément. Cela est probablement ce qui va se passer. Et on va

16 probablement assister à une augmentation des personnes portées disparues

17 parce que, de plus en plus, les personnes portées disparues sont

18 retrouvées comme étant des personnes mortes.

19 Question: Mais, dans ce paragraphe-là, vous avez dit que vous les

20 considérez comme tuées, selon les registres des institutions autorisées.

21 Je voudrais savoir si ces renseignements englobent également les causes

22 des décès, la façon dont ces personnes ont été tuées et quelles sont les

23 preuves pertinentes qui figurent dans la documentation ci-jointe, et est-

24 ce que cela figure là ou pas?

25 Réponse: Là, vous avez seulement une liste de personnes qui ont été tuées.

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1 Pour ce qui est des causes de leur décès, ça ne se trouve pas ici.

2 Question: Donc nous n'avons aucun renseignement concernant la façon dont

3 les personnes ont perdu leur vie?

4 Réponse: J'imagine que quelqu'un d'autre va en parler.

5 Question: Bien. Quand vous avez parlé du statut -soit des personnes

6 mortes, soit des personnes portées disparues, soit des personnes qui sont

7 encore recherchées à plusieurs endroits- en sus des civils et des membres

8 de la protection civile, vous avez parlé de défenseurs. C'est bien le

9 terme que vous avez utilisé "défenseurs"?

10 Réponse: C'est cela.

11 Question: Si nous en déduisons de façon appropriée, ou pouvez-vous le dire

12 aux Juges de la Chambre, mais ces défenseurs sont-ils membres des forces

13 armées de la Croatie?

14 Réponse: Je l'ai précisé dans mes écritures. Quand nous parlons de

15 "défenseurs", c'est le terme officiel qui est utilisé pour les membres des

16 forces armées. Ce sont là tous les membres des forces armées.

17 Question: Bien. Donc c'étaient des personnes qui portaient des armes,

18 n'est-ce pas?

19 Réponse: C'est cela.

20 Question: S'agissant de ces défenseurs, pouvez-vous nous dire quelle avait

21 été leur composition ethnique?

22 Réponse: Difficile de le faire en ce moment.

23 Question: Mais pouvez-vous à peu près nous dire quelle avait été la

24 composition ethnique?

25 Réponse: Eh bien, dans le global, je pourrais dire que quelque 80% d'entre

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1 eux étaient des Croates; et les autres, les 20% restants, étaient des

2 autres groupes ethniques et des minorités.

3 Pourquoi le dis-je et partant de quoi puis-je faire des évaluations de ce

4 type? Eh bien, ce pourcentage des personnes mortes, à 88% ce sont des

5 Croates, pour ce qui est des exhumés identifiés, c'est 88% de Croates.

6 Pour les personnes chassées, il s'agit de 90% de Croates. C'est partant

7 donc de ces pourcentages-là que l'on peut tirer une conclusion assez

8 claire.

9 Question: Mais restons-en aux personnes qui sont tuées, qui ont perdu la

10 vie; restons-en là. Et si on parle de défenseurs, toujours...

11 Vous avez dit… Sous le 34-B), vous avez dit qu'il y a 6.790 Croates qui

12 ont été tués. Et sur ces 6.790, 80% sont des défenseurs, n'est-ce pas?

13 Est-ce que cela signifie que 80% d'entre eux sont des défenseurs?

14 Réponse: Au moins.

15 M. Tapuskovic (interprétation): Bien. Au moins. Donc sur les 11.834

16 personnes, vous avez des rubriques "inconnu"; vous ne savez pas de qui il

17 s'agit du tout, n'est-ce pas?

18 M. Grujic (interprétation): Je crois avoir déjà expliqué la chose. Dans

19 tous les chiffres que j'ai avancés, j'ai uniquement cherché à parler de

20 façon documentée, absolument documentée, pour ce qui est du statut, de

21 l'âge, de... Et là où les choses ne sont pas claires, la personne a fait

22 partie de la rubrique "statut inconnu".

23 M. le Président (interprétation): Monsieur Tapuskovic, je dois vous

24 demander d'en terminer en cinq minutes, vu les contraintes de temps qui

25 pèsent sur nous.

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1 M. Tapuskovic (interprétation): C'est précisément l'intention que j'avais.

2 Je n'ai pas besoin de plus de cinq minutes, en effet.

3 Donc les 4.183 personnes dont vous faites état peuvent toutes être des

4 Croates ou tous des Serbes, aussi bien, théoriquement parlant?

5 M. Grujic (interprétation): Théoriquement parlant, ce serait difficile,

6 parce qu'aucune méthode statistique ne saurait l'admettre.

7 Question: Bon. Merci. Autre chose encore que je voudrais vous demander

8 pour ce qui est de l'intercalaire 5, où il est question des personnes

9 échangées.

10 Réponse: De quoi s'agit-il?

11 Question: Intercalaire 5, pièce à conviction... Vous l'avez,

12 l'intercalaire 5?

13 Réponse: Non.

14 Question: Ça, c'est la liste des camps, des prisons...

15 Réponse: Oui, nous pouvons en parler.

16 Question: Vous dites qu'il a été procédé à des échanges de 7.766

17 personnes. Est-ce que cela était suivant un principe "tous pour tous"?

18 Réponse: Non. Les échanges se sont faits dans une période en continu

19 allant de 1991 à 1996, à des sites variés et dans des circonstances très

20 variées.

21 (Intervention de l'huissier.)

22 Question: Bien. Mais est-ce que… comme vous avez, si je puis dire affirmé

23 qu'il y avait 7.766 citoyens de Croatie, est-ce que vous pouvez dire

24 qu'autant de personnes sont parties de l'autre côté?

25 Réponse: Non. Le chiffre exact est de 2.479 personnes.

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1 Question: Bien. Je vois ici que lorsqu'il s'agit de la Croatie ou là où il

2 est question des camps, on parle de cinq camps où il n'y a qu'un seul

3 prisonnier et de plusieurs camps avec deux prisonniers, puis huit

4 prisonniers. Selon quels critères peut-on dire que ce sont là des camps,

5 si dans ces camps il y a une personne ou deux personnes? Donc la moitié

6 des camps tels que vous les traitez ici n'ont qu'un prisonnier?

7 Réponse: J'ai prévenu du fait que le critère que nous avons utilisé était

8 celui de savoir que c'est à partir de cette prison que la personne a été

9 enregistrée et échangée.

10 Qu'est-ce que cela signifie? Cela signifie que des prisonniers sont venus

11 de certaines prisons, sont passés par telle prison pour être libérés. Pour

12 être tout à fait véridique, là où il y a un enregistrement du CICR, c'est

13 ce camp-là. Et ceux qui n'ont pas été enregistrés et dont il a été

14 question, où il y a toute une série de témoins qui en ont parlé, le

15 nombre, là, est bien plus important.

16 Question: Mais on dit ici: "il y a tant et tant de camps en Croatie",

17 comme vous l'indiquez- et dans certains, on dit: "Il y a 8 personnes". Au

18 Monténégro, dans la moitié des camps, il y a 15 personnes; en Serbie, 8

19 personnes. Quel était le critère?

20 Réponse: Le critère, je vous l'ai dit, c'est que c'est là qu'on a

21 enregistré le prisonnier et que c'est à partir de là qu'il a été libéré.

22 Et on ne cite pas les prisonniers qui sont passés par cette prison mais

23 qui ont été libérés à partir d'une autre prison.

24 M. Tapuskovic (interprétation): Bien. Je vous remercie.

25 Je n'ai plus de questions pour ce témoin, Messieurs les Juges.

Page 17390

1 (Interrogatoire principal supplémentaire du témoin, M. Ivan Grujic, par

2 Mme Uertz-Retzlaff.)

3 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Je n'aurai qu'à tirer au clair deux

4 faits tels que présentés par le témoin et pour voir quel est le rapport

5 existant entre ces faits et ce qu'il a dit dans son rapport.

6 Au cours du contre-interrogatoire, vous avez parlé de l'expulsion des

7 Serbes. On vous a dit que des Serbes de Slavonie occidentale ont pris la

8 fuite en 1991, se sont enfuis. Je prends votre liste de personnes

9 déplacées en Croatie. Ceux qui se sont échappés pour aller en Republika

10 Srpska ou en Yougoslavie, est-ce qu'ils devraient figurer ou est-ce qu'ils

11 figurent dans ces listes?

12 M. Grujic (interprétation): Non, ces personnes-là ne figurent pas sur

13 cette liste-là?

14 Question: Avez-vous une estimation plus précise du nombre des personnes

15 qui ont fui de Slavonie occidentale, uniquement si vous avez des chiffres

16 fiables?

17 Réponse: Non.

18 Question: Autre question, elle concerne l'échange de cadavres, vous en

19 avez parlé pour ce qui est de Zadar, octobre 1993, mais aussi vous avez

20 évoqué l'échange, le mutuel échange de corps des deux côtés. Ou plutôt au

21 cours de cette année. Est-ce que ces corps sont repris dans votre liste

22 d'exhumation ou dans votre liste de personnes tuées?

23 Réponse: Tous ceux qui ont été identifiés au travers des échanges figurent

24 sur la liste des personnes mortes, des personnes tuées.

25 Question: Les corps qui ont été échangés, par exemple à Zadar -on vous a

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1 donné cet exemple au moment du contre-interrogatoire- on a eu un échange

2 de corps, sans qu'il y ait identification; à ce moment-là, ces corps ne

3 seraient pas repris?

4 Réponse: Les dépouilles mortelles qui ont été exhumées, et il s'agissait

5 de dépouilles de membres des formations ennemies qui sont tombées sur des

6 territoires contrôlés par la République de Croatie, et ces dépouilles ont

7 été ensevelies comme non-identifiées à Zadar. Mais on savait que c'était

8 des membres des forces ennemies. Et au travers des échanges, ces

9 dépouilles mortelles ont été confiées à la partie adverse, et c'est la

10 partie adverse qui s'est occupée de l'identification; et nous n'avons

11 aucune connaissance à ce sujet. Nous avons des connaissances pour ce qui

12 est des personnes que nous avions prises en charge et que nous avons

13 identifiées. Et ce sont ces personnes-là qui figurent sur la liste de

14 personnes tuées.

15 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Je vous remercie, Monsieur le Témoin.

16 Monsieur le Président, j'en ai terminé.

17 M. le Président (interprétation): Monsieur Grujic, ceci termine votre

18 déposition. Merci d'être venu en tant que témoin au Tribunal pénal

19 international. Vous pouvez désormais disposer.

20 (Le témoin fait un signe affirmatif de la tête.)

21 (Le témoin est reconduit hors du prétoire.)

22 (Questions relatives à la procédure.)

23 M. le Président (interprétation): Oui, Monsieur Milosevic?

24 M. Milosevic (interprétation): S'agissant de ce témoin, pendant la pause

25 on m'a dit… le témoin, on m'a donné des renseignements concernant le

Page 17392

1 témoin mentionné par M. Kay, à savoir M. Galbraith qui avait été l'ex-

2 ambassadeur des Etats-Unis en Croatie. On est le 4 mars...

3 (Interruption du Président.)

4 M. le Président (interprétation): Nous allons en discuter de plusieurs

5 choses. Nous allons, dans ce cadre, parler des témoins qu'on a l'intention

6 de faire citer à la barre; est-ce qu'il faudra passer à huis clos partiel?

7 M. Nice (interprétation): Pas en ce qui concerne Galbraith. Pas non plus

8 pour le témoin en application du 92bis interrogé par Mme Uertz-Retzlaff.

9 M. le Président (interprétation): Enumérons-les. Il y a M. Galbraith.

10 Puis, nous avons un autre témoin, Zana Baca, qui ne figurait pas dans la

11 liste puisque nous avons un monsieur qui était déjà prévu dans la liste;

12 on devrait peut-être l'avoir, il s'agit de Joseph Rousseau. Et puis nous

13 passerons aux témoins en application du 92bis. Mais nous allons commencer

14 par l'ambassadeur Galbraith.

15 M. Nice (interprétation): Oui, je dresse l'historique, et ceci est repris

16 dans la requête que nous avons déposée. Mais ce qui est essentiel dans

17 toute ma démarche à l'égard de ce procès, c'est que les témoins déposent

18 en audience publique. Je ne vais même pas demander que des témoins le

19 fassent autrement, à moins que je ne puisse étayer une éventuelle demande

20 de ce genre afin qu'il y ait huis clos complet.

21 S'agissant de ce témoin-ci -vous l'aurez constaté à la lecture de nos

22 écritures-, c'est tout récemment que nous avons été informés qu'il n'y

23 aurait pas d'obstacle à ce que ce témoin dépose en audience publique.

24 Mais, jusqu'à ce moment-là, nous avons pris toutes les mesures nécessaires

25 pour signifier, pour communiquer les documents le concernant, et nous

Page 17393

1 avons précisé ceci dans nos requêtes. Nous avons fourni la version en

2 anglais hier soir, la version en BCS ce matin. Les éléments qu'il va

3 aborder sont importants mais ne sont pas nombreux.

4 Il a des engagements professionnels, actuels. Il enseigne dans une ou

5 plusieurs universités, je ne sais trop lesquelles. Il se fait qu'il est

6 disponible. Je pense qu'il y a une pause, pour ce qui est de

7 l'enseignement qu'il fait à l'université, le 10 ou le 11; ce qui

8 correspond bien avec la fin de la partie du procès consacrée à la Croatie.

9 Donc il est sans doute plus commode de l'entendre maintenant, en rapport

10 avec ce volet-ci, davantage que plus tard.

11 Pour ce qui est des circonstances de sa déposition, je pense que c'est

12 essentiel que de l'entendre, il pourra nous permettre de faire l'économie

13 d'autres témoins. Et je pense que nous pourrions avoir sa déposition la

14 semaine prochaine.

15 Nous aurons trois journées où nous n'allons pas siéger, ce qui veut dire

16 que l'accusé aura le temps de se préparer à la comparution de ce témoin-

17 ci. Parce que si ce n'est pas la semaine prochaine qu'il dépose, ce sera

18 plus tard et dans un autre volet du procès.

19 M. le Président (interprétation): Bien sûr, il y aura un délai de

20 communication réduit.

21 M. Nice (interprétation): Oui, mais la portée de sa déposition est telle

22 que ce n'est pas finalement trop grave, parce que sa déposition va porter

23 sur un élément bien circonscrit. Il y a des dates éventuellement

24 disponibles fin mars. Il doit venir des Etats-Unis, et je pense que, pour

25 nous aider, il avait prévu de venir ce week-end.

Page 17394

1 M. le Président (interprétation): Nous avons reçu le résumé, et cela

2 concerne donc sa déposition?

3 M. Nice (interprétation): Au départ, il y avait des notes. Nous avions dit

4 que nous allions produire une déclaration préalable, c'est un document qui

5 n'est pas signé, qui a donc le statut de "Note d'enquête"; et il y aura

6 préparation d'un résumé qui va reprendre les points de la déposition du

7 témoin. Cela fait à peu près huit pages, y compris la page de garde. Donc

8 c'est une déposition, un résumé assez court.

9 M. le Président (interprétation): Je suppose qu'il y a une question

10 importante d'ordre général qui se pose ici, outre la question de

11 communication de temps réservé à la préparation.

12 La question générale étant celle-ci: on commence à introduire des témoins

13 à un stade ultérieur. Je sais que vous avez donné des raisons, mais

14 manifestement c'est une question qu'il faudra que la Chambre garde à

15 l'esprit, vu l'incidence qu'une telle mesure aura sur le dossier à son

16 stade actuel.

17 M. Nice (interprétation): Oui, j'ai fourni des explications générales hier

18 sur le fait que les témoins ne sont pas toujours disponibles. Mais ceci

19 bien sûr concernait un autre témoin pour lequel il y a eu dépôt

20 d'écritures hier, et j'espère pouvoir poursuivre la semaine prochaine,

21 après que nous aurons vu le témoin. Je ne pense pas qu'il y ait eu

22 d'objections formulées par les parties à ce propos, et je pense que c'est

23 lorsque nous avons affaire à ce genre de témoin, parce qu'il fournit des

24 éléments essentiels pour le dossier de l'audience et qu'il apporte un

25 regard extérieur, vu son importance, c'est quelque chose que la Chambre

Page 17395

1 doit tenir à l'esprit.

2 Et l'accusé sera content de savoir que si nous avons de tels témoins,

3 c'est parce que j'ai refusé le huis clos, la déposition à huis clos, pour

4 pratiquement tous les témoins. Et c'est pour ça que je dois maintenant

5 faire une telle requête. Et vous savez qu'il faut, lorsqu'on présente des

6 requêtes aux autorités compétentes, des mois avant que celles-ci ne

7 réagissent.

8 M. Kwon (interprétation): Vous ai-je bien compris? Ce témoin-ci ne pouvait

9 pas déposer à un autre moment?

10 M. Nice (interprétation): Oui, mais il faut tenir compte de ses

11 engagements professionnels ailleurs de par le monde, aussi aux Etats-Unis.

12 Nous avons essayé de le faire comparaître maintenant, parce que ceci cadre

13 bien avec le volet croate. Ce serait un peu incommode de le voir

14 comparaître lorsque nous aborderons le volet bosniaque du procès.

15 M. le Président (interprétation): Monsieur Kay?

16 M. Kay (interprétation): Les amis de la Chambre ont déposé des écritures

17 le 14 février 2003, dans lesquelles nous avons fait des observations, vu

18 que l'accusation avait déposé à ce moment-là une requête, le 5 février,

19 pour demander l'autorisation de modifier la liste des témoins qui existait

20 à ce moment-là.

21 Nous avons formulé plusieurs remarques. Mais, en parallèle et de façon

22 concomitante, nous avons relevé que les préparatifs auxquels doit se

23 livrer l'accusé constituent un élément essentiel de l'équité d'un procès.

24 Si vous examinez la déclaration sous forme de notes d'enquête, si vous

25 examinez le résumé concernant M. l'ambassadeur Galbraith, je constate

Page 17396

1 qu'il y a de grosses questions qui se posent dans le cadre de cette

2 déclaration. Et l'accusé voudra peut-être les aborder, ces questions

3 importantes.

4 Je vois qu'on prévoit deux heures pour l'interrogatoire principal; c'est

5 peut-être un rien optimiste vu le rôle qu'a joué le témoin dans les

6 événements qui se sont déroulés en 1991 et en 1992, vu les personnalités

7 qu'il a rencontrées.

8 Pour ce qui est de l'accusé, vu les conclusions tirées par ce témoin, les

9 observations qu'il a faites, j'anticipe que l'accusé va vouloir contre-

10 interroger ce témoin sur des questions importantes -par exemple, les

11 relations ou rapports avec Martic, avec Babic et Markovic-, ce qui

12 constitue un des piliers essentiels de sa défense. Et je note, une fois de

13 plus, que c'est un témoin important pour l'accusation.

14 Il y a, si vous voulez, au regard de cela, le fait que l'accusé va avoir

15 besoin de pas mal de temps pour poser des questions à ce témoin. A notre

16 avis, l'accusé devrait disposer d'un délai suffisant pour s'y préparer. Et

17 cette préparation, à l'évidence, ne se limite pas à des mesures que

18 l'accusé peut entreprendre, mais à des choses qui doivent être faites par

19 ses associés ou plutôt par ses conseillers, chose que ceux-ci feront en

20 son nom pour trouver, par exemple, des documents à l'appui de ces

21 questions en contre-interrogatoire. Je pense aussi à une recherche qu'il

22 faudra peut-être faire en ce qui concerne ce témoin.

23 Bien sûr, il revient à l'accusé d'en décider, et il est certain que

24 l'accusé dira clairement son avis sur la question. Mais en ce qui me

25 concerne, moi, au moment où je m'adresse à vous, je plaide en sa faveur

Page 17397

1 pour qu'il dispose de suffisamment de temps pour se préparer adéquatement

2 à la comparution de ce témoin qui pourrait comparaître à un moment

3 ultérieur du procès.

4 M. le Président (interprétation): Oui, Monsieur Milosevic?

5 M. Kwon (interprétation): Monsieur Kay, vous n'avez pas d'autres

6 commentaires à propos des remèdes ou des recours faits par l'accusation?

7 M. Kay (interprétation): Pas pour le moment. Il y a des questions qui

8 découlent de l'application de l'Article 70, mais je viens de recevoir ce

9 document aujourd'hui seulement, ce matin. Je dois un peu digérer tout cela

10 pour voir ce qu'il en est et dresser un tableau complet. Je ne voudrais

11 pas m'engager ici en me prononçant dès maintenant.

12 M. Kwon (interprétation): Merci.

13 M. le Président (interprétation): Oui, Monsieur Milosevic?

14 M. Milosevic (interprétation): Mon opinion à moi est une opinion de

15 principe et rien que cela, Monsieur May. En effet, vous n'ignorez pas que,

16 pour ce qui est des délais de communication des noms de témoin, vous

17 l'avez réduit à un minimum de dix jours.

18 Par conséquent, moi, aujourd'hui, pour la première fois -et ce n'est pas

19 contesté, j'espère-, on me communique le résumé de ce témoin en me disant

20 qu'il vient témoigner la semaine prochaine. C'est moins encore que le

21 délai minimum de dix jours que vous m'avez "radinement" (sic) accordé.

22 J'exige donc que ce délai minimum de dix jours qui m'a été imparti soit

23 respecté.

24 D'autre part -et toujours en guise de principe-, je tiens à souligner

25 autre chose, parce que cela vient s'enchaîner sur ce dont il a été

Page 17398

1 question tout à l'heure.

2 Vous m'avez dépossédé de mon droit d'interroger le témoin concernant des

3 événements sortant de la période de 1991 à juillet 1992. Ce témoin vient

4 témoigner d'événements ultérieurs. Si quelque chose est valide pour moi,

5 ça doit être valide pour la partie adverse également. Alors, si vous

6 admettez pour la partie adverse qu'il est possible d'introduire des

7 assertions ou des témoignages sortant du cadre temporel que vous avez

8 désigné vous-mêmes ou qu'eux-mêmes ont désigné par eux-mêmes, alors vous

9 devez me le permettre à moi également, au lieu de me priver de ce droit.

10 Parce qu'ici, il n'y a rien du tout –pendant la pause, je me suis penché

11 dessus- qui fait partie des limites temporelles que vous avez désignées

12 comme étant pertinentes pour le procès ici présent. Donc il s'agit ici

13 d'une attitude absolument discriminatoire à mon égard, tant pour ce qui

14 est des délais que pour ce qui est de la teneur des interrogatoires.

15 M. le Président (interprétation): La raison pour laquelle nous avons

16 empêché de poursuivre le contre-interrogatoire sur ce point, c'est parce

17 que ce dernier témoin s'était penché sur la période précédant les deux

18 opérations, au moment où il a recueilli ces données. Par conséquent, vos

19 questions se trouvaient en dehors de la portée qu'il pouvait aborder dans

20 sa déposition.

21 Nous allons limiter les moyens de preuve, c'est certain, en ce qui

22 concerne le volet croate de l'Acte d'accusation, à moins que les questions

23 posées ne paraissent significatives ou importantes.

24 Cependant, il se peut bien qu'il y aura d'autres témoins en mesure de

25 parler de la Bosnie-Herzégovine; ce n'était pas le cas de ce témoin-ci. A

Page 17399

1 ce moment-là, les questions que vous risquez de poser peuvent être

2 pertinentes.

3 Oui, soyez bref, Monsieur Nice.

4 M. Nice (interprétation): Le volet "Article 70" est déjà repris dans les

5 écritures. Nous pourrons présenter d'autres arguments à l'audience, si

6 vous le souhaitez.

7 (Les Juges se concertent sur le siège.)

8 M. le Président (interprétation): Qu'en est-il du 3? La Chambre s'inquiète

9 de la limite de la portée du contre-interrogatoire.

10 M. Nice (interprétation): Deux choses à ce propos. La première, c'est à

11 l'avenant du remède accordé pour l'autre témoin auquel on fait une

12 référence indirecte; la Chambre s'en souviendra.

13 M. le Président (interprétation): Et maintenue, confirmée par la Chambre

14 d'appel.

15 M. Nice (interprétation): Oui. Je n'en suis pas sûr, mais je pense que

16 oui. Et je pense que ceci fait partie de l'accord conditionnel fourni par

17 les autorités compétentes.

18 Troisième chose: si vous en décidez ainsi, il y aura présence des

19 conseillers juridiques au nom de cette partie, qui pourront réagir

20 immédiatement à toute requête demandant l'autorisation de dépasser les

21 limites prévues au départ. Nous ne pouvons pas en faire davantage.

22 M. le Président (interprétation): Si nous rendons cette ordonnance dans

23 les conditions que vous sollicitez...

24 M. Nice (interprétation): Oui.

25 M. le Président (interprétation): …mais avec l'autorisation de demander à

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1 dépasser les limites prévues, cela veut dire que, si l'accusé demande

2 l'autorisation de poser des questions à l'extérieur de ce qui est prévu,

3 il pourra le faire?

4 M. Nice (interprétation): Oui. Mais si les conditions sont accordées, cela

5 veut dire que le témoin est prima facie autorisé à ne rien dire. Si on

6 lève ces restrictions, je ne sais pas quelle sera la réponse de ce témoin

7 ici. Une fois présent à l'audience, son enthousiasme sera peut-être

8 contraire à ces autorités qui ont imposé ces restrictions.

9 Mais l'avantage d'avoir un représentant de l'autre organisation ici, c'est

10 que ce représentant est une personne à laquelle on peut s'adresser; et ce

11 représentant sera peut-être en mesure de modifier les conditions entourant

12 la déposition du témoin.

13 M. le Président (interprétation): Mais c'est une condition pour le moment?

14 M. Nice (interprétation): Oui. En ce moment, oui.

15 M. le Président (interprétation): Et si nous essayons de donner une

16 interprétation plus libre à l'Article 70, la Chambre d'appel nous a dit

17 qu'il fallait s'en limiter à une interprétation stricte.

18 M. Nice (interprétation): C'est ce que je pense. Je n'ai pas ici à

19 m'exprimer ni dans un sens ni dans l'autre, mais je dois m'en tenir à

20 l'interprétation qui a été donnée. Mon principe directeur a été sans cesse

21 de suivre les conditions et que, bien sûr, il faut tenir de la nécessité

22 d'avoir l'oralité des débats; et je crois que nous avons toujours respecté

23 ce principe.

24 (Les Juges se concertent sur le siège.)

25 M. le Président (interprétation): Nous allons rendre une ordonnance dans

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1 les conditions qui nous sont demandées. Nous pensons que c'est exact, ce

2 témoin est important, et il y a de bonnes raisons au fait que le témoin

3 n'ait pas été repris dans la liste des témoins, à savoir qu'il n'était pas

4 disponible. Nous estimons donc qu'il est justifié d'ajouter son nom à la

5 liste.

6 S'agissant de l'interprétation stricte qui a été donnée à l'Article 70 par

7 la Chambre d'appel, nous allons faire droit au remède sollicité pour ce

8 qui est des restrictions imposées aux questions à poser.

9 Et pour ce qui est de la présence d'un représentant du Gouvernement, nous

10 allons donc faire droit à la requête.

11 Cependant, nous n'estimons pas, vu les circonstances, puisque c'est un

12 témoin important, nous ne pensons pas qu'il soit juste de l'imposer à la

13 Chambre et à l'accusé à l'improviste, en l'espace d'une semaine seulement.

14 L'accusé devrait bénéficier d'un délai plus important pour sa préparation

15 puisque, dans le cadre de sa préparation, il faudra peut-être que ses

16 associés se livrent à un exercice de recherche. Il ne sera donc pas cité

17 la semaine prochaine, mais plus tard dans le cours du procès.

18 M. Nice (interprétation): Merci. Il sera prévu fin mars.

19 M. le Président (interprétation): Passons maintenant à autre chose.

20 Nous avons deux autres noms, dans cette liste qui a fait l'objet de la

21 requête. Abordons-les ensemble.

22 Il y a une Mme Zana Baca; j'espère que je prononce bien son nom. Elle est

23 spécialiste pour ce qui est des dégâts provoqués par la guerre. D'après la

24 requête, elle devrait parler des dégâts occasionnés à un patrimoine

25 historique; monument de la Vieille Ville de Dubrovnik, je précise. Elle

Page 17402

1 remplace un autre témoin.

2 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Exactement, Monsieur le Président,

3 Elle va aborder exactement le même sujet que l'autre témoin qui n'est plus

4 disponible. Elle va parler aussi de la question de la protection des

5 monuments du patrimoine historique qu'avait soulevée le Juge Robinson.

6 M. le Président (interprétation): Oui, je vois. Je me souviens. Et est-ce

7 qu'il y a d'autres raisons pour lesquelles elle ne devrait pas tomber sous

8 le coup de l'Article 92bis?

9 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Nous allons y penser.

10 M. le Président (interprétation): Oui, essayez de voir si c'est possible.

11 Et puisque vous avez la parole maintenant, qu'en est-il de M. Rousseau,

12 observateur de l'ECMM? Vous avez demandé que sa déclaration soit

13 considérée comme recevable. Il n'y a pas un rapport direct avec l'accusé.

14 Vous demandez que certains paragraphes soient abordés à l'audience; si je

15 ne me trompe pas, il s'agit des paragraphes 5 à 7. Vous parlez du 6, mais

16 il semble plus logique d'avoir aussi le 7. 1, 2, 4, puis 8 à 11; cela, ça

17 tombe sous le coup du 92bis. Le reste n'est pas admis.

18 Est-ce que, Monsieur Kay, vous voulez intervenir sur l'un ou l'autre de

19 ces deux témoins?

20 M. Kay (interprétation): Non. Pas d'observation, Monsieur le Président.

21 M. le Président (interprétation): Monsieur Milosevic, avez-vous quelque

22 chose à dire à propos de ces deux témoins?

23 M. Milosevic (interprétation): Non, ça n'a aucune importance. Mais je vous

24 prierai de me dire au moins, à la place de quel témoin? J'ai cru

25 comprendre que Mme Uertz-Retzlaff a expliqué que ce témoin-ci allait

Page 17403

1 témoigner à la place d'un autre témoin qui figure sur la liste. Que je

2 sache au moins de qui il s'agit pour biffer de cette liste le nom de ce

3 témoin-là.

4 M. le Président (interprétation): Oui, il est juste que vous le sachiez.

5 D'après les documents que nous avons sous les yeux, elle va remplacer

6 Zvonimir Franic.

7 M. Milosevic (interprétation): Celui-ci ne viendra donc pas témoigner?

8 M. le Président (interprétation): C'est exact. Fort bien, nous considérons

9 ces déclarations comme recevables, comme vous l'avez demandé et puis nous

10 examinerons la déclaration de Mme Baca, en application du 92bis, au moment

11 où cette déclaration sera prête, et nous allons admettre le fait qu'elle

12 remplace M. Franic.

13 Peut-être qu'il est préférable de terminer l'audience de ce matin en

14 abordant les questions relatives au 92bis? Trop peu de temps pour entendre

15 un nouveau témoin.

16 Ce sont les témoins qui vont parler de Vukovar; c'est ce que nous avions

17 prévu n'est-ce pas, nous l'avions indiqué? Moi, j'en avais sept (sic); à

18 commencer par le témoin C-006, C-171, 1126, 1149, 1164 et 1165.

19 Commençons par le témoin C006. J'ai une note m'indiquant qu'apparemment ce

20 témoin était un témoin Dokmanovic. Je vous demande pourquoi on n'a pas

21 communiqué le compte rendu de l'audience Dokmanovic?

22 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Je ne pense pas qu'il ait comparu

23 dans le procès Dokmanovic. Il n'a pas été cité à comparaître. D'après mes

24 informations, il n'a pas cité dans le procès Dokmanovic. Et je vois

25 pourquoi d'ailleurs. Mais il n'a pas été cité à comparaître.

Page 17404

1 M. le Président (interprétation): Pourriez-vous vérifier cela une nouvelle

2 fois?

3 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Oui. Monsieur le Président, c'est

4 tout à fait possible que j'aie commis une erreur dans mes notes à ce

5 sujet.

6 En fait, M. McKeon, que vous connaissez, a vérifié ce point et il m'a fait

7 savoir que cette personne n'avait pas été appelée à la barre dans

8 l'affaire Dokmanovic.

9 M. le Président (interprétation): Très bien. Très bien. Très bien. Il

10 traite des événements survenus à Ovcara, lorsque les détenus étaient dans

11 le hangar. Si j'ai bien compris, il en a fait sortir certains, donc c'est

12 un des témoins.

13 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Le témoin était présent à

14 "Velepromet". Il était présent dans la caserne où il a été emmené d'abord,

15 et il fait pas mal d'observations au sujet de Sljivancanin, Vujovic, et

16 Vujanic qui étaient responsables. Et à Ovcara, il a vu...

17 M. le Président (interprétation): Puisque l'une des questions qui a été

18 évoquée par l'accusé, c'est la question de la JNA, en rapport avec

19 l'incident de Vukovar, il se peut que ce témoin devrait être cité à la

20 barre pour le contre-interrogatoire.

21 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Oui, et nous donnerons notre accord

22 car ce témoin semble très important.

23 M. le Président (interprétation): Fort bien.

24 Monsieur Kay?

25 M. Kay (interprétation): Oui, nous parlons de ce témoin dans nos tableaux

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1 qui font partie des écritures que nous avons déposées à l'intention des

2 Juges de la Chambre. Car la façon dont ce témoin décrit les choses dans le

3 résumé de sa déposition ne nous semble pas totalement conforme à la

4 réalité. Donc nous faisons une observation au paragraphe 19, en disant que

5 ce témoignage ne doit pas nécessairement être considéré comme un

6 témoignage s'ajoutant à d'autres.

7 M. le Président (interprétation): Mais il y a d'autres considérations

8 également?

9 M. Kay (interprétation): Je dis cela pour que la Chambre soit au courant

10 que le témoin traitera également d'autres questions.

11 M. le Président (interprétation): Oui, mais nous parlons maintenant de la

12 présence nécessaire ou pas au contre-interrogatoire.

13 Monsieur Milosevic, est-ce que vous avez quelque chose à dire au sujet de

14 ce témoin?

15 M. Milosevic (interprétation): Je ne sais pas de quel témoin nous parlons,

16 de toute façon. Son nom ne figure pas dans mes documents.

17 M. le Président (interprétation): Si, vous l'avez. Il s'agit du témoin C-

18 006; c'est un témoin de Vukovar, comme tous les autres.

19 M. Milosevic (interprétation): Ceci ne signifie rien pour moi. Je n'ai pas

20 de déclaration du témoin, je ne connais pas son nom, le contenu de son

21 témoignage. Je ne savais pas que l'on discuterait de cette question

22 aujourd'hui.

23 M. le Président (interprétation): J'ai dit, la semaine dernière, que nous

24 allions en discuter, et j'ai lu la liste des témoins à plusieurs reprises.

25 Nous admettrons donc ce témoin qui devra subir un contre-interrogatoire.

Page 17406

1 S'agissant de la numérotation, je crois que le témoin suivant devrait être

2 le témoin 1071. Si je ne me trompe, il s'agit de l'épouse d'un homme qui a

3 été arrêté par la JNA. Le lieu de l'arrestation était le stade de

4 football. Et il est présumé tué. En fait, une grande partie de la

5 déposition de ce témoin porte sur la recherche effectuée par cette femme,

6 une recherche très minutieuse pour tenter de retrouver son mari, mais sans

7 succès.

8 Vous aimeriez que ce que témoin soit accepté mais ne subisse pas de

9 contre-interrogatoire, n'est-ce pas?

10 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): En effet.

11 M. Kwon (interprétation): S'agit-il d'un témoin protégé?

12 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Non, Monsieur le Juge.

13 M. Kwon (interprétation): Donc elle s'appelle Zorica Brajdic, n'est-ce

14 pas?

15 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Oui, Monsieur le Juge, c'est un

16 témoin qui parlera des faits relatifs aux crimes commis dans la ferme de

17 Lovas.

18 M. le Président (interprétation): Fort bien.

19 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Assassinée dans le pré. Vous savez,

20 au niveau du champ de mines.

21 M. le Président (interprétation): Ce n'est pas ce qui figure dans les

22 notes que j'ai consignées par écrit. Selon mes notes, à moins qu'il y ait

23 une erreur au sujet du champ dont nous parlons, du pré; un homme, dont

24 elle est la veuve, a été arrêté au stade de foot et ensuite abattu.

25 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Oui, il a été assassiné dans un pré,

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1 dans un champ. Il a été emmené hors de Vukovar, c'est exact, mais le crime

2 en tant que tel a été commis à Lovas. Donc c'est un témoin dans le cadre

3 du crime de Lovas.

4 M. le Président (interprétation): Le pré de Lovas donc, et pas le champ de

5 mines.

6 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Non, non, c'était dans le pré,

7 effectivement.

8 M. le Président (interprétation): Mais il a été abattu. Oui, très bien,

9 bon.

10 Monsieur Kay, vous avez la parole.

11 M. Kay (interprétation): Les observations que nous avons à faire à ce

12 sujet, c'est que c'est un témoignage qui est cumulatif par rapport aux

13 dépositions relatives à Vukovar. Mais elle traite d'un point qui n'est pas

14 mentionné dans les autres dépositions à savoir Rupe, près d'Olajnica et du

15 transfert subi par elle et sa fille jusqu'à Brsadin. Donc ce sont des

16 éléments nouveaux que l'on trouve dans cette déclaration et qui

17 deviendront, par le biais de ce témoin, des éléments de preuve. Bien que

18 stricto sensu, ces éléments ne fassent pas partie d'une allégation retenue

19 dans l'Acte d'accusation. Il s'agit de l'intercalaire 5 de la déclaration

20 de...

21 (Les Juges se concertent sur le siège.)

22 M. le Président (interprétation): Nous réservons notre décision au sujet

23 de ce témoin.

24 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Permettez-moi de vous apporter des

25 explications au sujet de ce témoin, qui s'appliqueront également au témoin

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1 C-1126.

2 Voilà ce que nous tenons à dire: les propos de ces témoins permettent de

3 corroborer le système de nettoyage ethnique qui existait dans ces régions,

4 dont d'autres témoins ont également parlé. Donc il s'agit de témoins dont

5 les dires s'ajoutent à ceux d'autres témoins dans ce cas-là.

6 Mais, par ailleurs, l'admission au dossier des déclarations préalables de

7 ces témoins, en application de l'Article 92bis, permet de disposer

8 d'éléments qui ne sont pas forcément cumulatifs par rapport à d'autres

9 témoins. Voilà ce que je voulais ajouter.

10 M. le Président (interprétation): Le témoin suivant est donc le témoin

11 1126.

12 Madame Uertz-Retzlaff, pouvons-nous parler de l'aspect particulier de

13 cette déposition?

14 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Je viens de parler de ce témoin,

15 Monsieur le Président.

16 Ce témoin parlera d'un autre village -c'est une femme- mais elle permettra

17 d'attester de l'existence d'un système de nettoyage ethnique. Donc, les

18 remarques faites au sujet du témoin 1071 s'appliqueront également dans ce

19 cas. Voilà ce que je voudrais ajouter au sujet de ce témoin qui, elle,

20 parlera d'un village dont il n'a pas encore été question. C'est tout à

21 fait clair.

22 M. le Président (interprétation): Monsieur Kay?

23 M. Kay (interprétation): La difficulté que présente ce témoin vient, bien

24 sûr, du fait que c'est un témoin dont il était prévu qu'elle témoigne viva

25 voce. Or il s'agit de la source tout à fait manifeste d'une déposition

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1 cumulative. (expurgé) a été identifié par l'accusation, et il est

2 difficile de traiter de l'aspect cumulatif de ce témoignage en raison de

3 cette difficulté, bien que, au titre du Règlement, il est permis

4 d'entendre des témoins qui ont témoigné ou qui témoigneront plus tard

5 avoir été la source de témoignages cumulatifs.

6 L'accusation a déjà présenté une requête, en déclarant que les éléments

7 nouveaux de cette déposition sont tout de même cumulatifs par rapport à

8 l'existence générale du nettoyage ethnique. Parce que, dans nos écritures,

9 il est dit que ce témoin parlera d'Opatovac et de l'entrée de la JNA dans

10 Opatovac. Mais bien sûr ce point est un élément nouveau. C'est pourquoi je

11 m'exprime comme je viens de le faire.

12 (Les Juges se concertent sur le siège.)

13 M. le Président (interprétation): Nous accepterons ce témoin. Nous

14 acceptons ce témoin, mais il subira un contre-interrogatoire. Essayons

15 d'en finir avec le cas d'un témoin supplémentaire, si c'est possible.

16 Témoins 1164 et 1165. Le témoin 1164 parle du pilonnage de Vukovar; c'est

17 quelqu'un qui a été arrêté au mois de septembre et emmené au camp de

18 Begejci.

19 Le témoin 1165, c'est un médecin légiste qui témoignera de la situation

20 des corps découverts à Ovcara car ceci, si je ne m'abuse, cela ne fait pas

21 l'objet de contestation. N'est-ce pas, il n'est pas fait mention de la

22 JNA?

23 Pourriez-vous m'aider sur ce point, Madame Uertz-Retzlaff? Y a-t-il autre

24 chose que nous devrions prendre en compte?

25 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Oui. S'agissant du légiste, il a

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1 effectivement fait des observations se rapportant à certaines parties des

2 corps. Et le témoin, le Dr Strinovic, qui devrait témoigner la semaine

3 prochaine, parlera de ce sujet. C'est une déposition qui est tout à fait

4 corroborative; je ne pense pas que cela pose problème. Le Dr Strinovic est

5 effectivement le médecin croate qui a procédé à l'examen des corps.

6 M. le Président (interprétation): Merci. Qu'en est-il de l'autre témoin?

7 Je crois ne pas avoir fait d'erreur dans ce que j'ai dit à son sujet.

8 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Oui, Monsieur le Président. L'autre

9 déposition dont il a été question est celle de M. Grujic qui parle du camp

10 dans lequel le témoin a été détenu. Donc, dans les deux cas, nous

11 demandons que les témoins soient entendus en l'absence d'un contre-

12 interrogatoire.

13 (Les Juges se concertent sur le siège.)

14 M. le Président (interprétation): Monsieur Kay?

15 M. Kay (interprétation): J'aimerais que nous parlions de l'intercalaire 3

16 qui a un rapport avec le témoin (expurgé).

17 1164 d'abord. C'est une déposition cumulative par rapport à Vukovar, mais

18 toutefois il y est fait référence à la JNA et aux "Aigles Blancs"; et ce

19 témoin est un témoin oculaire du pilonnage de Vukovar en juillet 1991.

20 M. le Président (interprétation): Nous réserverons notre décision à son

21 sujet.

22 M. Kay (interprétation): Oui.

23 M. le Président (interprétation): Mais l'autre témoin, le légiste?

24 M. Kay (interprétation): Nous avons déjà dit que le fait d'être médecin

25 légiste le place dans une autre catégorie, mais qu'il n'a rien de

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1 particulier à ajouter.

2 M. le Président (interprétation): Merci beaucoup.

3 Monsieur Milosevic, nous réservons notre opinion au sujet du premier

4 témoin, donc nous ne vous interrogeons pas à son sujet. Nous vous

5 demandons si vous avez quelque chose à dire au sujet du médecin légiste?

6 Pourquoi, à votre avis, ne devrions nous pas admettre sa déposition?

7 M. Milosevic (interprétation): J'insiste tout simplement sur le droit qui

8 est le mien de contre-interroger tous les témoins. Je ne sais pas de

9 quelque sorte d'admission ou de rejet vous êtes en train de parler.

10 M. le Président (interprétation): Eh bien, dans ce cas, nous ne voyons

11 aucune raison pour qu'il y ait un contre-interrogatoire. Il n'y a pas

12 contestation quant au fait que des gens ont été tués. Il y aura d'autres

13 dépositions sur le même sujet, donc nous admettons ce témoin en

14 application de l'Article 92bis. Il entre dans la catégorie des témoins

15 acceptés sans contre-interrogatoire.

16 Le témoin 1165; peut-être l'accusation pourrait-elle nous dire quelles

17 sont les annexes qui ont trait à ce témoin, les pièces supplémentaires qui

18 pourraient être versées au dossier?

19 Nous attendons. Apparemment, la Greffière a beaucoup de travail.

20 Avez-vous la déclaration préalable, Madame Uertz-Retzlaff, du témoin C-

21 1164?

22 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Nous ne l'avons pas, Monsieur le

23 Président, la déclaration 92bis.

24 M. le Président (interprétation): Bien entendu, nous sommes en avance sur

25 vous. Donc nous ne pouvons pas admettre ce témoin. Nous indiquons

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1 simplement que nous souhaiterions l'admettre.

2 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Oui. Nous n'avons pas entamé le

3 processus avant d'obtenir confirmation de votre part.

4 M. Nice (interprétation): Le témoin qui devrait être entendu aujourd'hui

5 et dont l'audition n'a même pas commencé, étant donné qu'il y aura entre

6 aujourd'hui et son audition une pause de quatre à cinq jours, je pense que

7 ce témoin retournera à son domicile. Il est possible qu'il soit difficile

8 pour cette femme de revenir la semaine prochaine, donc nous aurons à vous

9 informer à ce sujet dès que nous aurons des informations.

10 M. le Président (interprétation): Oui, oui. Pour peu que vous ayez un

11 délai, une date pour l'audition de ce témoin, vous le ferez savoir à

12 l'accusé, de façon à ce qu'il puisse se préparer.

13 M. Nice (interprétation): Oui, bien sûr.

14 M. le Président (interprétation): Suspension jusqu'à la semaine prochaine.

15 (L'audience est suspendue à 13 heures 51.)

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