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1 Le mardi 2 décembre 2003
2 [Audience publique]
3 [L'accusé est introduit dans le prétoire]
4 --- L'audience est ouverte à 9 heures 06.
5 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Oui, Monsieur Milosevic.
6 LE TÉMOIN: Témoin C-057 [Reprise]
7 [Le témoin répond par l'interprète]
8 Contre-interrogatoire par M. Milosevic : [Suite]
9 M. LE JUGE MAY : [aucune interprétation]
10 M. MILOSEVIC : [aucune interprétation]
11 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Nous ne recevons pas d'interprétation. Je
12 vous prierais de reprendre à partir du début, Monsieur Milosevic.
13 M. MILOSEVIC : [interprétation]
14 Q. Monsieur 057, dans le paragraphe 8, de votre déclaration, vous indiquez
15 que votre commandant -- et je ne vais pas dire son nom parce que nous
16 évitons de vous identifier vous-même -- votre commandant, donc pendant le
17 séjour de cette unité qui était la votre, dans la localité où vous étiez
18 censé -- que vous étiez censé quitter pour vous diriger vers Erdut, vous
19 aurez dit que quelque 3 000 membres des unités du MUP de Croatie étaient
20 là-bas et qu'il fallait vous attendre à des conflits de grande envergure,
21 n'est-ce pas ?
22 R. Oui.
23 Q. Vous affirmez que l'information n'a toutefois pas été exacte et qu'on
24 vous a dit cela rien que pour vous faire peur. C'est bien l'appréciation
25 que vous formulez aujourd'hui ?
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1 R. C'est ce que j'estime, c'est ce que j'ai d'ailleurs dit dans ma
2 déclaration parce que 3 000 c'est énorme, c'est plus qu'une Brigade
3 d'infanterie et je ne pense pas qu'il ait pu y avoir autant d'effectifs du
4 MUP.
5 Q. Donc vous pensez qu'il ne pouvait pas y avoir autant d'effectifs, mais,
6 en votre qualité de soldat professionnel, dites-moi, je vous prie, si la
7 vie d'un soldat est préservée dans la guerre par les avertissements
8 afférents aux effectifs de l'ennemi et à la nécessité d'être prudent. Peut-
9 être s'agissait-il d'une prudence accentuée ou d'information qui avait été
10 mise à la disposition de votre commandant ?
11 R. C'est très possible, mais j'affirme de nous aussi que ce nombre ne
12 pouvait pas être aussi important. Peut-être l'effet souhaité avait-il été
13 celui que vous venez de mentionner, à savoir qu'il fallait être prudent
14 pour rester en vie, mais je sais que les gens ont eu assez peur.
15 Q. Dites-moi, alors, combien étaient-ils au juste d'après ce que vous
16 sauriez nous en dire, puisque vous indiquez qu'ils n'étaient tout de même
17 pas 3 000.
18 R. Je crois qu'ils étaient plusieurs centaines; à mon avis, ils devraient
19 être environ 300.
20 Q. Bien, étant donné que tout à l'heure vous nous avez expliqué qu'il
21 était fort possible qu'une information de cette nature vous a été donnée
22 pour que vous soyez plus prudent, pour que vous fassiez attention et que
23 vous restez en vie. L'information en question, en tout état de cause, ne
24 vous avait pas été communiquée à mauvais escient -- dans des intentions
25 mauvaises, mais dans l'intérêt de sauver des vies humaines.
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1 R. Je ne peux pas dire s'il y a eu mauvaise intention ou pas. Ce que je
2 sais c'est que les faits avaient été plutôt désastreux sur les effectifs de
3 réserve. Je l'ai dit à mes subordonnés à la réunion de la compagnie et,
4 comme vous l'avez indiqué, Monsieur, vous-même, il s'agissait d'être
5 prudent. Je l'aurais dit, mais, attendez, ce n'est pas possible. Il ne faut
6 pas avoir peur. C'est sûrement des informations qui sont venues d'un
7 commandant supérieur et je crois que vous comprendrez que les gens ont
8 effectivement eu peur.
9 Q. Mais je comprends, en tout état de cause, que l'information n'avait pas
10 été donnée avec des intentions mauvaises pour des effets de propagande,
11 mais aux fins de renforcer la prudence parmi le personnel -- les effectifs.
12 R. Je vous ai dit tout à l'heure que je ne savais pas, mais il ne devait
13 pas y avoir une intention mauvaise derrière tout cela, mais le commentaire
14 que j'ai formulé c'était l'effet que cela avait fait ou l'impact que cela
15 avait eu sur les effectifs, les gens ont eu peur.
16 Q. Donc vous ne pensez pas qu'il y ait eu mauvaise intention, bien. Au
17 paragraphe 10, vous parlez de l'arrivée d'un groupe de volontaires parmi
18 lesquels vous avez reconnu, quelqu'un que vous connaissiez -- je ne dirais
19 pas son nom parce que vous êtes un témoin protégé ici -- n'est-ce pas ?
20 R. Oui, il en est ainsi, c'est le paragraphe 10.
21 Q. Vous dites qu'autant que vous le sachiez, c'était là un responsable du
22 Parti radical serbe ?
23 R. Oui, ce n'est pas une chose que j'avais à ma connaissance, j'en étais
24 certain.
25 Q. Bien, vous indiquez qu'il se déplaçait vers Prigrevice où il y avait un
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1 centre d'un mouvement quelconque qui serait le leur, et partant d'où ils
2 étaient transférés clandestinement vers la Croatie, n'est-ce pas ?
3 R. C'est exact. Je ne connaissais pas tous les détails afférents à ce
4 centre. Par la suite, la presse -- il a coulé beaucoup d'encre dans la
5 presse pour ce qui est de ce centre, mais je ne savais à l'époque que
6 quelque chose de superficielle, quelques phrases ou bribes d'information,
7 ce qu'on m'a dit.
8 Q. Moi je voudrais seulement que vous me confirmiez ou pas que vous
9 infirmiez les informations dont je dispose moi-même. Et d'après les
10 informations dont je dispose, ce Parti radical serbe avait fourni des
11 volontaires pour les besoins de la JNA, par la suite, pour les besoins de
12 la Défense territoriale, qui se sont joints en tant que volontaires à la
13 JNA ou à la TO. Où étaient-ce là des gens qui avaient créé des formations à
14 eux ? D'après les informations dont je dispose, c'est qu'ils avaient fourni
15 des volontaires pour les besoins de la JNA et pour les besoins de la
16 Défense territoriale.
17 R. Mes informations sont celles que j'ai indiquées ici, au paragraphe 10,
18 à savoir qu'ils allaient de l'autre côté. Alors, ils disaient qu'ils
19 allaient de l'autre côté avant nous pour nous aider pour préparer notre
20 arrivée. Ils y sont allés. C'est un fait d'abord à Prigrevice et ensuite à
21 Borovo Selo, puis ils ont rejoint la-bas les rangs de la TO. Ce sont des
22 faits.
23 Q. Oui, ce sont des faits. Cela s'est passé au début même des conflits en
24 Slavonie orientale, Monsieur C 057.
25 R. Oui, j'indique moi-même la date, il s'agit du mois de juillet à peu
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1 près.
2 Q. Donc ils sont allés rejoindre les rangs de la Défense territoriale,
3 mais ils n'avaient rien à voir avec la JNA ou avec des autorités en
4 Serbie ?
5 R. Je crois que cela est apparent dans ce paragraphe 10, à en juger par
6 certaine réaction, ils n'avaient rien à voir avec nous. J'ai même eu des
7 désagréments moi-même en raison de leur passage.
8 Q. Bien, Monsieur 057, dans ce paragraphe 11 qui suit, et au paragraphe 12
9 également, vous indiquez que le 25 juillet 1991, dans les heures tardives
10 de la soirée, il y a eu un grave pilonnage de Erdut à partir des montagnes
11 des biens du domaine de ^Marinovci, et du bâtiment de l'approvisionnement
12 en eau potable ?
13 R. C'est exact.
14 Q. Partant de ce que vous dites ici, c'est que ces cibles ont été visées
15 sans raison -- aucune. Je vous pose la question en effet parce que vous
16 avez affirmez que la radio et télévision, à l'occasion de l'attaque en
17 question, a publié que cela s'était fait en raison de tirs au mortier
18 fréquents à partir de ces positions-là. J'ai cru comprendre en outre que
19 vous avez précisé qu'il n'y a pas eu de tirs au mortier de cette nature-là.
20 Alors qu'en est-il ?
21 R. Il n'y a pas eu de tirs au mortier.
22 Q. Quand est-ce que votre unité s'est placée en position de combat en vue
23 de l'attaque dont nous parlons ?
24 R. Soyez un peu plus clair, je vous prie, pour ce qui est de votre
25 question.
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1 Q. A quelle date êtes-vous arrivé aux positions de combat -- au poste de
2 combat ?
3 R. Le 1e juillet, nous étions dans le secteur au sens vaste du terme.
4 Q. Mais vous avez, disons, tiré sur les montagnes de Dalj qui entourent
5 Dalj. Quand est-ce que cela s'est passé ?
6 R. Fin juillet.
7 Q. Et ce que vous savez nous en dire, c'est qu'à partir du moment où vous
8 êtes arrivé vous-même, et le moment où il y a eu l'attaque, il n'y a pas eu
9 de tirs du côté de la partie adverse ?
10 R. Oui, c'est ce que j'en sais.
11 Q. Mais admettriez-vous la possibilité qu'il y en ait eu avant, avant que
12 vous n'arriviez vous-même ?
13 R. Des tirs sur qui ?
14 Q. Sur des positions tenues par la JNA.
15 R. Mais c'est mon unité qui a pris des positions au début juillet.
16 Q. Mais, avant que votre n'arrive là, est-ce qu'il y a eu des tirs au
17 mortier sur quiconque ?
18 R. Je n'en sais rien.
19 Q. Mais vous ne savez pas non plus ce qui s'est passé avant. Vous ne
20 pouvez pas nous dire si avant cela, il y a eu des tirs au mortier ou pas.
21 Vrai ou faux ?
22 R. Je ne sais vraiment rien au sujet des tirs au mortier, ni avant, ni
23 après. Je n'en sais rien vraiment.
24 Q. Bon. Si vous ne savez pas, vous ne pouvez pas exclure le fait qu'il y
25 ait eu auparavant au pas. Je ne vois pas pourquoi quelqu'un aurait inventé
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1 des tirs, alors qu'il n'y en aurait pas eu.
2 Parce que des tirs au mortier, ce n'est pas quelque chose qui puissent se
3 faire à l'insu de tout un chacun.
4 R. En effet, c'est quelque chose de tout à fait public.
5 Q. C'est ce qu'on avait affirmé. On avait affirmé dans le public, qu'il y
6 ait eu des tirs au mortier. Je ne pense pas que l'on ait pu affirmer…
7 R. Moi, j'affirme qu'il y en n'a pas eus.
8 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Vous avez entendu ce que le témoin a dit,
9 et polémiquer à ce sujet est une perte de temps.
10 L'ACCUSÉ : [interprétation] Fort bien.
11 M. MILOSEVIC : [interprétation]
12 Q. Au paragraphe 13, vous dites que le 27 juillet 1991, vous avez reçu un
13 ordre par écrit de la part de votre commandement. Et on y dit qu'une fois
14 sortis sur vos cible ou l'objectif de la marche, il s'agissait de séparer
15 les parties belligérantes suivant un axe déterminé.
16 R. Je crois que nous en avons déjà discuté de l'ordre en question à
17 l'audience précédente.
18 Q. Oui. Nous avons parcouru l'ordre en question, et il ne fait pas l'ombre
19 d'un doute que cet ordre-là n'avait comporté que cet objectif-là, n'est-ce
20 pas ?
21 R. Bien sûr.
22 Q. Donc séparer les partis au conflit.
23 R. C'est ce que j'ai déclaré. C'était la partie officielle sur laquelle
24 nous nous étions penchés.
25 Q. Attendez. Je ne vous pose pas cette question pour que nous répétions ce
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1 que nous avons déjà constaté la fois passée, mais je voudrais savoir au
2 sujet des deux parties au conflit. Il y avait le rassemblement de la Garde
3 nationale d'un côté, et les membres de la Défense territoriale serbe de
4 l'autre côté, n'est-ce pas ?
5 R. Pour être concret, il y avait le MUP de Croatie d'un côté. Je ne me
6 souviens pas si le rassemblement de la Garde nationale était créé, ou s'il
7 a été créé par la suite. Nous, nous nous servions du terme membres du MUP
8 de Croatie.
9 Q. Et de l'autre côté, il y avait la Défense territoriale locale ?
10 R. Oui, la population serbe locale.
11 Q. La population locale donc ?
12 R. Oui.
13 Q. Et vous avez eu pour mission de séparer les parties au conflit ?
14 R. Oui. L'ordre avait été clair. Il s'agissait de s'interposer entre les
15 parties au conflit.
16 Q. Donc cela avait été l'objectif clairement déterminé de votre unité ?
17 R. Les ordres sont tout à fait clairs. Vous avez raison. L'ordre donné est
18 tout à fait clair à ce sujet.
19 (expurgée) a alors arrêté la colonne dans laquelle vous
20 vous déplaciez avant de traverser le pont sur le Danube, et vous a donné
21 des instructions, en vous disant qu'il fallait que vous vous ménagiez et le
22 personnel, et qu'il fallait accomplir cette tâche de séparation des parties
23 au conflit.
24 R. Je vous demanderais de ne pas mentionner les noms. Vous venez de
25 mentionner un nom. Or j'ai un statut de témoin protégé.
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1 Q. Mais ce colonel n'a pas fait partie de votre unité à vous. C'est la
2 raison pour laquelle j'ai estimé qu'il était extérieur.
3 R. Non. C'était un supérieur à moi, mais il était commandant de la
4 brigade, donc il était le supérieur plus haut.
5 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Arrêtons-nous là, et passons à huis clos.
6 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel.
7 [Audience à huis clos partiel]
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5 [Audience publique]
6 M. MILOSEVIC : [interprétation]
7 Q. Donc, cette partie, nous pouvons sans doute en parler en audience
8 publique. Vous avez indiqué que ces tirs de mitrailleuses dont nous avions
9 parlé ne venaient pas des positions de Croatie mais des positions tenues
10 par la JNA. C'est bien ainsi que ça s'est passé ?
11 R. J'ai donné cette déclaration après l'incident en question, vers 1992,
12 1993 et à chaque fois que j'en ai parlé, j'étais certain que les tirs
13 venaient des positions du MUP dans la forêt. Je n'aurais certainement parlé
14 autrement de cet incident. Dans le contexte, il était arrivé un homme que
15 je n'ai pas beaucoup fréquenté mais il m'a laissé entendre qu'il voulait
16 s'entretenir avec moi parce que ça le travaillait et c'est comme ça que je
17 l'ai appris. Il me l'a relaté au bout d'au moins un an.
18 Cet homme existe encore, Dieu merci. Il est en vie, donc, s'il y a des
19 éléments contestés, il peut apporter des déclarations complémentaires. Je
20 ne sais pas quel serait son intérêt de nous relater une histoire montée
21 toute pièce. Donc, je crois bien qu'il ne m'a pas menti.
22 Et c'est ce que j'ai indiqué comme commentaire dans ce passage dans le
23 paragraphe 15.
24 Q. Monsieur C-057, vous avez dit vous-même que cette histoire aurait été
25 dépourvue de sens, lors qu'ici relate que les tirs avaient été ouverts à
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1 partir des positions de la JNA.
2 R. Oui, Monsieur. C'est ce qui est dit.
3 Q. Mais vous a-t-il apporté une explication quelconque ? Il ne se peut
4 tout de même pas que cela avait été le cas à partir des positions de la
5 JNA. Vous avez été officier à l'époque. Vous devriez le savoir.
6 R. Vous savez vous-même, Monsieur, ce qui peut être possible ou réaliste.
7 Nous en avons parlé à l'audience passée. Il y avait des ordres mais il y
8 avait la réalité qui allait à côté. Si ce détail est important pour vous ou
9 pour la Chambre, je puis vous communiquer ces coordonnés, les coordonnés de
10 cet homme. Je ne pense qu'il ait menti. Le connaissant, je ne pense pas
11 qu'il ait menti.
12 Q. Mais que vous a-t-il dit ? Pourquoi a-t-on ouvert le feu ?
13 Est-ce qu'ils avaient pensé que c'était l'ennemi là-bas ou ils vous ont
14 délibérément tiré dessus ?
15 R. C'est pour ça que le détail est intéressant. Il a dit qu'on nous avait
16 tiré délibérément dessus. Et ce n'était pas des tirs fortuits. Il y a, dans
17 toutes les armées, un tir ami qui arrive par accident. Cela peut arriver
18 partout.
19 Mais absolument, il est vrai de dire qu'il était venu me voir. Nous ne nous
20 sommes pas fréquentés, ni avant, ni après. Il est arrivé, il a annoncé,
21 alors vous savez chez nous, c'est d'offrir le café. Il est venu avec son
22 épouse. On a pris quelques vers et il a indiqué qu'il était venu avec une
23 raison, pour me raconter cela. Et moi, le connaissant et sachant comment un
24 bon nombre de choses s'étaient déroulées, j'ai estimé que tout avait pu
25 être possible.
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1 Q. Vous dites que vous avez fouillé une maison appartenant à des Croates à
2 Erdut. Le propriétaire était un fonctionnaire du HDZ, n'est-ce pas, d'après
3 ce que vous avez dit ? Ceci figure au paragraphe 16.
4 R. Oui. On appelait ça le secrétaire, secrétaire du HDZ.
5 Q. Et vous dites avoir fait cela sur ordre de votre commandant, n'est-ce
6 pas ?
7 R. Oui.
8 Q. Cet ordre, vous l'a-t-il donné verbalement ? Vous a-t-il ordonné de
9 détruire cette maison par écrit ou simplement oralement ?
10 R. Non. Je crois me souvenir que cette une estafette qui est venue à
11 bicyclette pour m'apporter cet ordre, parce qu'à ce moment-là, nous étions,
12 lui et moi, à deux extrémités opposées du hameau. Donc, c'est un cycliste,
13 une estafette qui m'a apporté cet ordre.
14 Q. Mais je ne comprends pas si peut-être il y a eu une certaine erreur
15 dans votre déclaration écrite, une erreur qui s'y serait glissée. Je ne
16 connais pas les événements, donc, je dois lire cette déclaration. Et je
17 suis au paragraphe 16 où vous dites que : "Immédiatement après, l'ordre est
18 arrivé du commandement selon lequel il était interdit de détruire ne
19 serait-ce qu'une maison." C'est bien cela ?
20 R. Oui. Là, il y a eu --
21 Q. Donc, si j'ai bien compris, cette maison a été détruite. La
22 constatation a sûrement été faite par le commandement et dès lors, l'ordre
23 a été donné de ne détruire aucune maison. C'est bien cela ?
24 R. Oui. C'est ce qui est écrit dans la déclaration écrite. Donc l'ordre
25 n'est arrivé du niveau immédiatement supérieur au mien pour que ce genre de
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1 choses ne se produise plus jamais.
2 Q. Vous êtes donc intervenu après la destruction de la première maison ?
3 Est-ce que vous avez discuté avec votre hiérarchie ? Parce que comment se
4 fait-il que vous ayez d'abord détruit cette maison et qu'ensuite des ordres
5 aient été donnés de ne détruire aucune maison ?
6 R. Non. Non. Après la destruction de cette maison, je n'ai détruit aucune
7 autre maison. Car un ordre a immédiatement été donné interdiction formelle
8 de détruire ne serait-ce qu'une seule maison.
9 Q. Paragraphe suivant, paragraphe 17, vous dites que ce jour-là, vous avez
10 procédé à la fouille d'un bâtiment du MUP de Croatie à Erdut qui faisait
11 partie de l'entreprise Vinekol [phon], et vous dites à ce paragraphe y
12 avoir trouvé d'énormes quantités de matériels militaires et de papiers
13 appartenant à des personnes, papiers d'identité. Est-ce que cela confirme
14 ce que votre supérieur vous avait dit à votre arrivée, à savoir qu'il y
15 avait un grand nombre de hauts fonctionnaires croates à Erdut et de membres
16 du MUP ?
17 R. Oui, cela confirme la supposition que j'ai déjà rapportée, à savoir
18 qu'il y a en avait une centaine ou plusieurs centaines même, parce que
19 c'était à peu près la capacité du bâtiment.
20 Q. Est-ce que vous avez trouvé toutes ces armes, vous, personnellement ?
21 R. Ce n'est pas moi qui ai trouvé les armes, bien que nous ayons été à la
22 recherche d'armes mais ce ne sont pas des armes qui ont été trouvés.
23 J'étais accompagné d'un collègue et nous souhaitions trouver des
24 Kalachnikovs ou des armes de fabrication roumaine ou hongroise. Mais en
25 fait, nous n'avons trouvé que des pièces, des pièces détachées. Je pourrais
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1 vous dire lesquelles d'ailleurs si cela vous intéresse. Des parties de
2 mitrailleuses Thompson, de fabrication américaine, et des dispositifs de
3 nettoyage destinés à des canons mitrailleuses de fabrication slovène
4 provenant de l'usine Gorenje. Nous avons remarqué cela parce qu'il était
5 curieux que les Slovènes, à nos yeux, il apparaisse bizarre que les
6 Slovènes aient commencé à fabriquer des mitraillettes et des mitrailleuses.
7 Q. J'aimerais vous -- oui, je pense que je me souviens de quelque chose de
8 ce genre, à savoir que Gorenje a fabriqué des mitraillettes et des
9 mitrailleuses.
10 Au paragraphe 28, vous dites que 10 % de la population a resté dans le
11 village qui, par ailleurs, était pratiquement déserté.
12 R. Exact.
13 Q. Ces habitants qui sont restés étaient surtout des personnes âgées ?
14 R. Oui, des personnes âgées.
15 Q. Et tous les habitants croates autre que ces personnes âgées avaient
16 quitté le village, par conséquent ?
17 R. La plupart d'entre eux. Il y avait bien un couple dont je parle quelque
18 part dans ma déclaration. C'était des gens un peu plus jeune, enfin,
19 relativement.
20 Q. Et eux, ils sont restés ?
21 R. Ils sont restés ou plus tard ont été portés disparus. Je ne me souviens
22 plus très bien.
23 Q. Mais lorsque vous êtes arrivé, vous avez découvert que 10 % de la
24 population a resté dans le village et que la plupart des habitants
25 d'appartenance ethnique croate quittaient le village. Ça c'était avant
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1 votre arrivée, n'est-ce pas ?
2 R. Oui. Les habitants avaient quitté le village avant notre arrivée dans
3 le village.
4 Q. Je suppose que c'était par peur des combats ?
5 R. C'était par peur des pilonnages, des bombardements, qui bien sûr
6 avaient produit des conséquences négatives. Ces gens avaient sans doute eu
7 peur et c'est sans doute la raison pour laquelle ils étaient partis. Sinon
8 ils seraient restés. Moi, je parle de la situation du village lorsque j'y
9 suis arrivé.
10 Q. Mais en tout cas personne ne les a expulsés hors de ce village. Ces
11 gens avaient peur des combats et il n'en est resté qu'une dizaine dans le
12 village ?
13 R. Non, bien sûr, nous n'avons chassé personne. Nous parlons de la
14 situation lors de notre arrivée, situation que nous avons trouvée à notre
15 arrivée.
16 Q. Mais est-ce par hasard vous sauriez me dire quelle était la population
17 croate et la population serbe de ce village auparavant ? Car je suppose
18 qu'une partie de la population serbe avait fui le village également en
19 raison des pilonnages ?
20 R. Je ne saurais pas très bien vous répondre de façon certaine mais je
21 crois pouvoir avancer un pourcentage de 70 % d'une part, 30 % d'autre part
22 ou peut-être 75% à 25 %. Mais ne me prenez pas au mot, je vous prie, parce
23 que c'est une estimation tout à fait approximative que je vous donne avec
24 les plus grandes réserves.
25 Q. Je la prendrai avec les plus grandes réserves mais je vous parle
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1 maintenant en tant que soldats, si quelqu'un a peur des pilonnages, puisque
2 c'est ce que vous venez de dire, je suppose que dans le village les Serbes
3 et les Croates ont eu tout autant les uns que les autres peur des
4 pilonnages, et qu'ils sont partis des deux côtés. Pourquoi est-ce que les
5 uns auraient eu peur et pas les autres ?
6 R. Je vous ai fait part de mon sentiment, à savoir que les habitants qui
7 sont restés étaient très peu nombreux et principalement des personnes
8 âgées, des vieillards.
9 Q. Donc les gens qui sont restés sont restés parce que c'était des
10 personnes âgées qui ne pouvaient pas partir. Ils n'en avaient pas la
11 capacité ?
12 R. Ils sont restés pour garder la maison.
13 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je dois maintenant poser une question au
14 témoin, Monsieur May, donc ce dernier peut penser qu'elle risque de
15 permettre de divulguer, de dévoiler son identité. Mais je m'explique, en
16 fait, ce n'est qu'une seule question.
17 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Nous passons à huis clos partiel.
18 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel.
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11 [Audience publique]
12 M. MILOSEVIC : [interprétation]
13 Q. Donc, dans le village dont nous parlons, vous dites que les Serbes, qui
14 habitaient ce village, étaient armés de M-48 et de fusils mitrailleur M-53,
15 et que ces deux armes étaient des armes qui n'étaient plus utilisées par la
16 JNA. Il s'agissait bien donc d'armes de la Défense territoriale, n'est-ce
17 pas ?
18 R. Oui, c'était des armes de la Défense territoriale, mais je crois utile
19 d'ajouter maintenant que le secrétariat chargé de la Défense nationale, à
20 la fin des années 80, a émis un ordre selon lequel tous les dépôts d'armes
21 de la Défense territoriale devaient être placés sous le commandement de la
22 JNA. Je m'en souviens très bien c'était à la fin des années 80. Donc la
23 chose s'est passée de deux façons différentes, soit la JNA a pris ses armes
24 pour les transférer dans ses propres dépôts, soit il les a maintenues dans
25 les dépôts de la Défense territoriale, mais les a gardées sous son
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1 contrôle. Mais je suis sûr que l'on peut retrouver cet ordre écrit.
2 Q. Mais ceci avait à voir avec -- ceci était valable dans toute la
3 Yougoslavie surtout le territoire de la Yougoslavie.
4 R. Oui. Plus tard j'ai lu une interview de Martin Spegelj, cet ancien
5 général de la JNA, qui mentionne également cet ordre. Il dit qu'une erreur
6 a été commise par la suite, qu'un certain nombre de fusils ont tout
7 simplement été oubliés là où ils se trouvaient et que, notamment, dans les
8 premiers temps de la création du Corps de la Garde nationale, ces armes
9 auraient été les bienvenues. Je suis au courant de l'existence de cet ordre
10 parce qu'en temps de paix, puisque je suis officier, j'ai escorté des
11 groupes d'hommes chargés de transférer ces armes d'un endroit à un autre.
12 Il y avait aussi des explosifs, et cetera.
13 Q. Mais puisque vous dites que ceci était en rapport avec la défense du
14 village majoritairement peuplé de Serbes, pouvez-vous nous dire plus
15 précisément contre qui ces habitants se défendaient ?
16 R. Ils ne voulaient que les forces du MUP pénètrent dans le village.
17 Q. Ils avaient donc peur des forces du MUP.
18 R. Oui, mais ils n'étaient pas -- il n'y a pas eu de combat majeur,
19 certaines escarmouches s'étaient produites auparavant et tout ce que je
20 sais moi c'est qu'ils ont interdit aux ambulances de traverser le village
21 pour aller ensuite vers Osijek. Donc les blessés devaient être transportés
22 par les -- en longeant les rives de la Drava et du Danube.
23 Q. Je dois me dépêcher car mon temps est compté. Dites-moi, je vous prie,
24 à Dalj -- vous en parlez au paragraphe 24, de votre déclaration écrite --
25 vous avez trouvé une unité de volontaires, n'est-ce pas ?
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1 R. Oui, deux unités.
2 Q. Deux ?
3 R. Je crois qu'il y en avait deux, une à l'entrée du village. Il
4 transportait de la viande dans un camion frigorifique ou quelque chose de
5 ce genre. Bon, ça n'a pas d'importance.
6 Q. Vous dites que ces hommes ont été aimables à votre égard et qu'ils
7 étaient sous le commandement de la Défense territoriale de Borovo Selo,
8 n'est-ce pas ?
9 R. Oui, c'est exact. J'ai passé dix à 15 minutes à cet endroit avec eux.
10 Ils étaient là alors qu'il n'y avait pas d'électricité et, comme il y avait
11 beaucoup de volontaires à Borovo Selo, ils voulaient mettre la viande à
12 l'abri parce que les congélateurs et les camions frigorifiques risquaient
13 de ne plus fonctionner.
14 Q. Ils étaient donc venus chercher la viande.
15 R. Oui.
16 Q. Donc ces volontaires n'étaient pas dans les rangs de la JNA à l'époque.
17 Ils étaient sous le commandement d'une unité de la JNA, mais dans les rangs
18 de la JNA, n'est-ce pas ?
19 R. En effet, ils faisaient partie des défenseurs de Borovo Selo, donc une
20 partie des hommes qui défendaient Borovo Selo.
21 Q. Mais ils faisaient partie de la Défense territoriale de Borovo Selo ?
22 R. Oui, la Défense territoriale de Borovo Selo c'était des volontaires.
23 Q. Dites-moi, vos réservistes à vous -- et il y en avait certainement --
24 je suppose que, dans votre unité, donc vous aviez quelques réservistes sous
25 vos ordres. Est-ce qu'ils ont pillé les maisons désertées ou d'autres
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1 bâtiments des villages que vous traversiez ?
2 R. Excusez-moi, je n'ai pas bien entendu. Vous pouvez répéter ?
3 Q. Est-ce que vous les avez autorisés à piller ces maisons ?
4 R. Personne ne les a pas autorisés à faire cela. Absolument personne. Il
5 ne s'agit pas que de moi. Les autres officiers ne le permettaient pas non
6 plus. Tout le monde a essayé d'interdire ces pillages qui ont eu lieu
7 néanmoins.
8 Q. Est-il vrai que c'est pour mettre un terme à ce type d'agissement que la
9 police militaire a été amenée sur place ?
10 R. Oui.
11 Q. Lorsque je parle de vos réservistes au sein de votre unité, je vous
12 demande si un homme sous vos ordres aurait volé quoique ce soit.
13 R. Et bien, je pense que pas mal de gens ont participé au pillage, mais
14 pas sous mes ordres.
15 Q. Est-ce que vous étiez en mesure de les mettre aux arrêts et de les
16 sanctionner ?
17 R. Non, non, j'ai menacé tous mes hommes de Cour martiale au cas où ils
18 agiraient ainsi, et je dis que l'unité entière serait fouillée. J'ai dit
19 que, si je trouvais quoique ce soit chez un seul de ces hommes, je rendrais
20 compte au commandement supérieur. L'unité de la police militaire est
21 arrivée. Elle était composée de réservistes, donc lorsqu'il devait fouiller
22 les hommes pour trouver des objets volés, ils le faisaient savoir à
23 l'avance. Par exemple, ils disaient demain à 5 heures du matin qu'il y
24 aurait une fouille et si bien que ceux, qui avaient volé quelque chose,
25 pouvaient amplement avoir le temps de cacher l'objet de leur vol.
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1 Q. Je ne comprends pas cela. C'était bien des vols dans des bâtiments
2 abandonnés, n'est-ce pas, désertés -- cherchés des objets de valeur -- des
3 menaces pour des maisons désertées ? Donc ils ne prenaient rien à des êtres
4 humains. Ils ramassaient ce qu'il y avait dans des maisons vides ?
5 (expurgée)
6 (expurgée)
7 (expurgée)
8 (expurgée)
9 Mais, plus tard, après ce genre d'actions, j'allais avec les membres de
10 l'Unité de la Police militaire pour assurer la sécurité de ces bâtiments et
11 eux aussi pénétraient dans la maison parce qu'ils y cherchaient des membres
12 du MUP. Et puis ensuite venaient les réservistes qui s'emparaient des
13 objets dont ils pouvaient avoir besoin et qui se trouvait là.
14 Moi, en utilisant l'autorité qui était la mienne, je me suis battu contre
15 ce genre de choses. J'ai essayé de recourir aux mécanismes en place, à
16 cette fin, à savoir que seul la police avait le droit de pénétrer dans une
17 maison et de dire : "Bonjour, nous sommes là pour rechercher telle et telle
18 chose. Fouillez la maison et vous pouvez mettre de côté vos objets de
19 valeur." Donc les réservistes, qui annonçaient leurs fouilles, disaient
20 ensuite qu'ils n'avaient rien trouver.
21 Q. Fort bien. Je suppose que maintenant nous avons tiré cela au clair.
22 Vous avez donc averti vos hommes des dispositions des conventions de Genève
23 et, de la façon dont les civils devaient être traités, et y compris,
24 d'ailleurs éventuellement, les prisonniers de guerre. Je suppose que
25 c'était votre tâche, n'est-ce pas ?
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1 R. Selon les ordres qui étaient les miens, je devais répercuter ces ordres
2 et donc c'était une chronologie logique, ce que vous venez de dire.
3 Q. Lorsque vous avez pénétré dans Aljmas -- paragraphes 30 et 31, de votre
4 déclaration écrite -- vous avez trouvé un village totalement déserté,
5 n'est-ce pas ?
6 R. Oui. On le voit dans ma déclaration écrite. Mais quel est le
7 paragraphe ? Vous pouvez me le rappeler ?
8 Q. Les 30 et 31.
9 R. Oui.
10 Q. Pouvez-vous nous dire pour quelle raison ce village était entièrement
11 vide ?
12 R. Et bien, c'était un village croate. La population l'avait abandonné
13 après les bombardements de la fin du mois de juillet, les gens étaient
14 partis pour Osijek.
15 Q. Et un peu plus loin, vous parlez d'un certain capitaine Kole, au
16 paragraphe 32. Alors, qui était cet homme ? Est-ce que c'était un
17 commandant d'Unité de volontaires ou d'une unité paramilitaire ? Parce
18 qu'il s'agit de quelqu'un qui a le grade de commandant, d'après ce que vous
19 dites. Je n'irai pas dans les détails pour ne pas vous identifier. Mais, en
20 tout cas, il a dit que ces hommes devaient être arrêtés s'ils
21 réapparaissaient, n'est-ce pas ?
22 R. Oui, il avait constitué un groupe, mais c'était un groupe créé par lui,
23 en dehors de l'hiérarchie.
24 Q. Donc un groupe créé en dehors de la hiérarchie et un homme qui se
25 proclame, lui-même, capitaine. Ce n'était donc pas une unité régulière et
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1 il n'était pas vraiment capitaine du point de vue militaire ?
2 R. Oui. Il y avait quatre ou cinq habitants de Dalj et puis quelques
3 hommes en uniforme, mais qui n'avaient jamais porté l'uniforme avant et qui
4 ne porteront plus jamais plus tard. Ils avaient aussi des bérets de couleur
5 vive.
6 Q. De quelle couleur ?
7 R. D'un rouge très vif ou d'un rose très vif, comme on veut enfin. J'ai
8 demandé à mes subordonnés de patrouiller dans le village et ils m'ont dit
9 que ces hommes venaient d'arriver.
10 Q. Et vous en avez informé votre commandant, n'est-ce pas, qui a dit que,
11 si ces hommes refaisaient leur apparition, il fallait les arrêter ?
12 R. Oui. J'en ai informé mes subordonnés car il y avait un véhicule qui
13 était en cause également. Et donc j'ai dit que, puisqu'il y avait des
14 bouteilles de gaz dans ce véhicule, un danger existait. Mais cet homme
15 était terriblement arrogant et je lui ai dit : "Mais de quel genre de
16 capitaine êtes-vous pour ne pas tenir compte d'un danger pareil ?" Et il a
17 dit qu'il venait de la Défense territoriale de Dalj et que, si j'avais des
18 protestations à formuler, je n'avais que m'adresser au QG de la Défense
19 territoriale et j'ai dit : "Et bien, moi, j'en informerai mon commandant."
20 Et c'est ce que j'ai fait, mais celui-ci a dit qu'il était déjà au courant
21 et il a dit : "Que si ces hommes refaisaient leur apparition, il convenait
22 de les arrêter." Donc voilà ce que je viens de rapporter.
23 Q. Merci. Je souhaitais tirer cela au clair. Je vous remercie.
24 R. Il n'a jamais refait son apparition. En tout cas, je n'ai pas eu besoin
25 de le menacer d'arrestation, mais j'ai dit que j'en informerai son
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1 supérieur et c'est ce que j'ai fait. Donc voilà toute l'histoire de cette
2 arrestation.
3 Q. Fort bien. Et lorsque vous avez pénétré dans Sarvas, vous dites qu'un
4 avion a été descendu, mais par qui ?
5 R. Par les forces croates.
6 Q. Vous avez pénétré dans Sarvas, vous y avez trouvé des membres de la
7 Défense territoriale locale qui étaient déjà dans le village ainsi que des
8 membres d'une unité du génie qui déminaient le village, n'est-ce pas ?
9 R. Oui, je l'ai déjà dit.
10 Q. Donc les forces du MUP avaient miné tout le village, n'est-ce pas ?
11 R. Oui. Je recherche le passage, un instant, simplement. A ce moment-là,
12 moi ou plutôt un véhicule qui se trouvait derrière moi est sorti de la
13 route goudronnée. Il y avait là un engin piégé. Fort heureusement personne
14 n'a été blessé et le véhicule lui-même n'a pas été endommagé. Mais c'est
15 pour ça qu'on a dû déminer.
16 Q. Qui a pris Sarvas ?
17 R. Nous.
18 Q. A la mi-octobre, comme vous le dites, vous-même, au paragraphe 37,
19 votre unité, avec d'autres unités de la JNA, a lancé une attaque contre
20 Borovo Naselje, une attaque qui n'a pas réussi ?
21 R. Borovo Naselje.
22 Q. Et à ce moment-là, un de vos réservistes est mort.
23 (expurgée)
24 Q. Est-ce que l'attaque a échoué parce que les forces ennemies étaient
25 plus fortes ?
Page 29867
1 R. Non, l'ennemi n'était pas plus fort. Moi, je pense que l'attaque
2 n'avait pas été préparée, ni planifiée de manière adéquate. Je n'y ai pas
3 participé, mais, à ma connaissance, c'est une attaque qui était mal conçue
4 et les unités n'ont pas été déployées de manière appropriée. C'est pourquoi
5 nous avons échoué.
6 Q. Bien. Au paragraphe 38 -- non, excusez-moi, je vous ai déjà posé cette
7 question. Nous avons déjà passé en revue cette question. Essayons d'aller à
8 l'essentiel.
9 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Il vous reste cinq minutes, Monsieur
10 Milosevic.
11 L'ACCUSÉ : [interprétation] Bien, Monsieur May. J'essaie de --
12 M. MILOSEVIC : [interprétation]
13 Q. Dans votre déclaration, vous faites référence à la mort du général
14 Bratic, qui a été remplacé par Andrija Bijorcevic. Est-ce bien exact ?
15 R. Oui.
16 Q. C'est le chef de corps qui avait été tué, n'est-ce pas ?
17 R. Oui.
18 Q. Pourriez-vous me dire quelle est la nature des pertes en Slavonie
19 orientale pour la JNA au cours de toutes ces échauffourées, de tous ces
20 affrontements ? Est-ce ces pertes ont été importantes ?
21 R. Ça dépendait des unités qui étaient concernées. Je l'ai déjà dit la
22 dernière fois. Du 2 au 18, j'ai compté en tout 27 victimes, des personnes
23 blessées et des personnes mortes. Cela représente des pertes de 30 % au
24 sein de mon unité. Il s'agit de pertes --
25 Q. Il s'agit de pertes très élevées dans n'importe quelle circonstance ?
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1 R. La perte d'un seul homme est excessive, mais là, on peut parler
2 effectivement de pertes très lourdes et j'ai tout fait.
3 Q. Au paragraphe 50, vous dites que vous avez enregistré des pertes très
4 importantes à cause d'un tir de mortier très nourri venant de lance-
5 roquettes portables ?
6 R. Pouvez-vous me donner le paragraphe, s'il vous plaît ?
7 Q. Le paragraphe 50.
8 R. Mais ne perdons pas de temps. Il y avait des tirs très nourris qui
9 venaient des tirs anti-blindés -- des tirs très nourris.
10 Q. Monsieur 57, vous étiez confronté à un ennemi très fort qui avait des -
11 - vous parlez de tirs, de tireurs embusqués, de tirs, de roquettes, de
12 lance-roquettes portables, et cetera.
13 R. Je vais répéter encore une fois que ce n'est pas qu'ils étaient si
14 forts que cela. Ils étaient bien organisés et les tirs étaient très bien
15 ciblés, c'est cela qui s'est passé. Bon, je reconnais, oui, les tirs
16 étaient nourris effectivement. Mais il suffit de deux mortiers bien
17 déployés -- bien engagés pour causer des pertes importantes dans la partie
18 adverse. Je parle du pont provisoire.
19 Q. Et ensuite vous parlez des Serbes de l'endroit qui revenait, ceux qui
20 étaient partis de Luzac précédemment ?
21 R. Oui. Je ne sais pas de quel paragraphe il s'agit exactement, mais je me
22 souviens du fait effectivement.
23 Q. Au paragraphe 58, vous nous dites que, dès qu'ils sont revenus au
24 village, ils ont ouvert une prison pour les membres du MUP qui avaient été
25 faits prisonniers, n'est-ce pas ?
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1 R. Oui. Effectivement, il y avait là aussi des membres du MUP, mais je
2 crois que leurs voisins croates, qui n'étaient pas membres du MUP, eux
3 aussi ont été faits prisonniers.
4 Q. Avez-vous parlé de s'associer à qui que ce soit ? Avez-vous pris des
5 mesures ?
6 R. Non, moi je tenais un certain nombre de positions et mon commandement
7 supérieur se trouvait dans le village. Moi je ne suis pas resté au village.
8 Le QG se trouvait à peine à trois maisons de cette prison.
9 Q. Veuillez, s'il vous plaît, vous reporter, au paragraphe 60. Vous
10 affirmez qu'un commandant est arrivé, n'est-ce pas ?
11 R. Oui.
12 Q. Je ne vais pas donner son nom parce que vous nous avez demandé de ne
13 pas le faire, il y a quelque temps. Vous lui avez demandé ce qui se
14 passait, quelles étaient les cibles ? Et vous avez dit qu'ils pouvaient
15 tirer où ils le souhaitaient puisqu'il y avait énormément de cibles. Est-ce
16 que c'est ce que vous avez dit ?
17 R. Non. Il a dit : "Quelle est la cible la plus importante ?" Et étant
18 donné que tout était ciblé, on pouvait prendre tout pour cible. Je lui ai
19 dit qu'il pouvait prendre pour cible ce qu'il voulait.
20 Q. Je comprends bien, mais, en fait, ce que vous dites c'est qu'il y avait
21 beaucoup de cibles. Il y avait donc beaucoup de cibles du côté de l'ennemi,
22 n'est-ce pas ?
23 R. Soyons précis ici. Il s'agit d'usine. La position qui se trouvait en
24 face de moi c'était des usines, mais les gens qui s'y trouvaient ouvraient
25 le feu sur nous.
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1 Q. C'étaient des soldats à ces endroits ?
2 R. Quand il y a des tirs qui viennent d'un endroit on peut dire que c'est
3 une cible militaire.
4 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Vous en êtes arrivé à votre dernière
5 question. Vous avez déjà dépassé le temps qui vous est imparti.
6 L'ACCUSÉ : [interprétation] Fort bien, Monsieur May. C'est vrai, j'ai
7 dépassé le temps qui m'était imparti.
8 M. MILOSEVIC : [interprétation]
9 Q. Mais veuillez me dire encore une chose, Monsieur 57 : quand je dis
10 "vous", je ne parle pas de vous personnellement, je parle des membres de la
11 JNA. Vous étiez donc en train de cibler, d'ouvrir le feu sur des cibles
12 militaires exclusivement, n'est-ce pas ?
13 R. Tout ce qui nous apparaissait être une cible militaire, tout ce que
14 notre évaluation nous permettait d'identifier comme une cible militaire. Ce
15 n'est pas forcément des cibles militaires, mais, oui, je dis répondre de
16 manière positive à votre question.
17 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Maître Tapuskovic.
18 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Merci.
19 Questions de l'Amicus Curiae, M. Tapuskovic :
20 Q. [interprétation] Monsieur le Témoin 57, j'ai un certain nombre de
21 points de détails que je voudrais aborder avec vous.
22 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur May, est-ce que je peux quitter le
23 prétoire pour quelques instants.
24 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Oui, allez-y.
25
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1 [L'accusé est excusé du prétoire]
2 [L'accusé est introduit dans le prétoire]
3 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Maître Tapuskovic.
4 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Merci encore.
5 Q. Monsieur le Témoin, je vous serais reconnaissant de bien vouloir donner
6 à la Chambre des explications supplémentaires au sujet des deux ordres, en
7 date du 1er juillet et du 27 juillet 1991, ainsi que sur les trois
8 paragraphes de votre déclaration qui ont trait à cela, intercalaires 4 et
9 5. Je ne pense pas qu'il sera nécessaire; cependant, pour vous de consulter
10 encore ces documents. Si, cependant, il s'avère nécessaire, je vais
11 demander à ce que l'on vous les présente.
12 Mme Uertz-Retzlaff, au début de votre interrogatoire principal, a insisté
13 pour que vous expliquiez les termes utilisés dans l'ordre du 1er juillet, à
14 savoir, "ennemi intérieur." Ou --
15 R. Oui. Allez-y, continuez.
16 Q. J'ai une question à vous poser à ce sujet : Le 1e juillet, lorsque cet
17 ordre a été donné, est-ce qu'il y avait un conflit entre la Défense
18 territoriale de Slovénie et la JNA, qui avait été précédée par la prise des
19 frontières nationales avec l'Autriche et l'Italie ?
20 R. A l'époque, il y avait une guerre avec la Slovénie.
21 Q. Elle a donc duré une dizaine de jours. Si elle a commencé le 25 ou le
22 26 juin, si bien que le 1e juillet, elle n'était plus en cours.
23 R. Si ça a duré dix jours, la guerre était encore en train de se dérouler
24 à ce moment-là.
25 Q. Elle a commencé quatre ou cinq jours avant. Mais contentez-vous, s'il
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1 vous plaît, de répondre à mes questions. Vous, en tant que soldat, cette --
2 la prise de ces frontières a-t-elle été une infraction ou une violation de
3 la souveraineté territoriale de notre pays ? Est-ce que c'est là la raison
4 de l'intervention de la JNA ?
5 R. L'opération a été montée pour reprendre la frontière.
6 Q. Mais vous souvenez-vous que quelques jours avant le 1e juillet, le 27
7 juin, la Slovénie ainsi que la Croatie, c'est-à-dire les parlements de ces
8 entités, ont proclamé leur indépendance en violation de la constitution
9 fédérale ?
10 R. Je crois que ça s'est passé même avant cela, en mai. Mais je répondrai
11 oui à votre question.
12 Q. Dans ce contexte, cet "ennemi intérieur" sur lequel l'Accusation a
13 insisté, et ennemi intérieur au sens militaire et à tous les sens, toutes
14 les acceptions possibles dans la langue serbo-croate, cela désignait ceux
15 qui violaient l'intégrité territoriale du pays ainsi que sa structure
16 constitutionnelle ?
17 R. Oui.
18 Q. Et le serment que vous avez fait tenait à protéger la sécurité et
19 l'ordre constitutionnel du pays de tout ennemis intérieurs et extérieurs,
20 comme dans le cas précis.
21 R. Oui.
22 Q. Si donc on part de cet ordre du 1e juillet 1991, à l'intercalaire
23 numéro 4, on voit que c'est un ordre qui avait pour objectif d'empêcher les
24 conflits interethniques.
25 R. Oui. Je l'ai dit d'ailleurs. Cela n'est pas contesté.
Page 29873
1 Q. Mais c'est justement qu'à ce moment-là se déroulait, ou avait déjà
2 commencé un conflit interethnique intense en Slovénie et en Croatie.
3 R. Oui.
4 Q. Cet ordre était fort bien rédigé, rédigé d'une manière tout à fait
5 plaisante. Mais en fait, l'ordre verbal était bien différent. Est-ce que
6 c'est ce que vous nous affirmez ?
7 R. Oui.
8 Q. Est-ce que cela veut dire que même si dans l'ordre on peut lire qu'il
9 convient d'empêcher les conflits interethniques, l'ordre réel était de
10 provoquer un tel conflit, si j'ai bien compris la teneur de votre
11 déposition, parce que vous avez dit que l'ordre donné verbalement était de
12 nature différente.
13 R. Cet ordre n'était pas formulé ou pensé de la manière que vous semblez
14 présenter. Cet ordre était conçu pour présenter tous les Croates comme des
15 Oustachi et des ennemis.
16 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Maître Tapuskovic, veuillez, s'il vous
17 plaît, faire une pause après chaque réponse du témoin. Et surtout ne pas
18 garder votre micro pendant qu'il parle.
19 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Je vous entends bien. Ce n'est pas la
20 première fois que vous me mettez en garde à ce sujet.
21 Q. Veuillez, s'il vous plaît, vous reporter au deuxième ordre que l'on
22 trouve à l'intercalaire numéro 5 maintenant. Point 6.3, vous en avez parlé
23 également. Il est écrit qu'au cours des opérations, il faut respecter à la
24 lettre les dispositions des conventions de Genève.
25 Vous nous dites qu'il existait un ordre écrit. Mais est-ce qu'il existait
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1 un ordre verbal qui a été donné le 27 juillet pour ne pas respecter les
2 conventions de Genève ou les lois aux coutumes de la guerre ? Est-ce que
3 c'est un ordre qui a été donné ?
4 R. Bien entendu, que personne n'a donné l'ordre de ne pas respecter les
5 conventions de Genève.
6 Q. Merci. Maintenant j'aimerais que vous vous reportiez à trois
7 paragraphes seulement. D'abord paragraphe 95. Vous l'avez trouvé ?
8 R. Oui.
9 Q. Il est dit ici : " Qu'en réponse à la question de l'enquêteur Dzuro qui
10 m'a demandé si j'avais connaissance d'un acte d'accusation établi en Serbie
11 dans la période de 1991 à ce jour pour crimes de guerre à l'encontre des
12 civils commis en Slavonie orientale en 1991, 1992. Je réponds que je n'ai
13 jamais entendu parler de quoi que ce soit de ce type, dans aucun cas." Est-
14 ce bien exact ?
15 R. Oui.
16 Q. Maintenant je vous demande de vous reporter au paragraphe 85. Vous
17 l'avez trouvé ?
18 R. Oui.
19 Q. Il est dit ici et je reprends une fois de plus vos propos. Je cite :
20 "J'ai inclus tout ce qui est susmentionné dans mon rapport écrit détaillé.
21 J'ai conclu par l'observation selon laquelle les événements devaient
22 trouver une solution positive dès que possible parce que c'était une honte
23 pour la JNA." Est-ce bien exact ?
24 R. Oui.
25 Q. Ensuite vous dites, je cite : "J'ai fait mon rapport en une copie que
Page 29875
1 j'ai transmis. Je n'ai pas gardé de copie pour moi-même, si bien que je
2 n'ai pas le texte de ce rapport actuellement ? Est-ce exact ?
3 R. Oui.
4 Q. Ensuite vous ajoutez : "Mais je dispose toujours du carnet." Est-ce
5 bien exact ?
6 R. Oui.
7 Q. Maintenant j'aimerais que l'on examine le paragraphe 58, paragraphe
8 dans lequel, au milieu duquel il est écrit -- au moment où vous parlez des
9 événements au cours desquels des personnes -- un prisonnier croate a eu les
10 oreilles coupées. C'est bien exact ?
11 R. Oui.
12 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Je souhaiterais que l'on passe à huis clos
13 partiel pour une minute seulement.
14 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel.
15 [Audience à huis clos partiel]
16 (expurgée)
17 (expurgée)
18 (expurgée)
19 (expurgée)
20 (expurgée)
21 (expurgée)
22 (expurgée)
23 (expurgée)
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4 [Audience publique]
5 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]
6 Q. Maintenant, Monsieur le Témoin, dans la dernière phrase vous dite, je
7 cite : "Je n'ai informé personne de cela." Est-ce bien exact ?
8 R. Vous n'avez pas lu dans son intégralité.
9 Q. Mais soyez assuré que je vais vous poser une autre question sur le
10 deuxième membre de la phrase. Mais pour l'instant, je vous pose une
11 question au sujet de la première partie de la phrase. Vous n'avez informé
12 personne ?
13 R. Non, effectivement.
14 Q. Vous connaissiez le nom, le prénom de la personne qui était coupable de
15 cet agissement. Pourtant vous n'avez informé personne de la chose.
16 R. C'est exact. Mais mes supérieurs se trouvaient à quelques pas
17 seulement. Ils se trouvaient au même endroit, là où tout cela a eu lieu. Je
18 décris simplement un acte qui a été commis.
19 Q. Bien. Ensuite au paragraphe 95, vous dites qu'à votre connaissance,
20 personne n'a été mis en accusation pour de tels crimes. Comment est-ce
21 qu'on aurait pu mettre ces personnes en accusation si personne n'avait
22 signalé leurs crimes ?
23 R. C'est une question très logique. Personne ne pouvait se voir demander
24 des comptes dans ce cas-là.
25 Q. Pouvez-vous répondre ?
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1 R. Pardon --
2 Q. Pouvez-vous expliquer aux Juges pourquoi vous n'avez pas signalé la
3 perpétration d'un acte aussi horrible que celui que vous avez décrit pour
4 que la personne soit traduite en justice ?
5 R. Et bien c'est parce que cette personne se trouvait tout à côté du
6 commandement ou de mon commandant supérieur.
7 Q. Mais au paragraphe 85 que j'ai cité, vous dites que vous avez fait un
8 rapport détaillé sur la honte qui touchait la JNA. Comment pouvez-vous
9 expliquer aux Juges qu'un acte aussi atroce que celui que vous avez décrit
10 n'ait pas été inclus dans ce rapport ?
11 R. J'ai fait un rapport suite à des ordres très précis au sujet de
12 certains événements. Et les événements ou l'événement que vous mentionnez,
13 celui qui figure au paragraphe 58, n'a rien à voir.
14 Q. Pouvez-vous, s'il vous plaît, reprendre la 2e partie de la phrase, je
15 cite : "Je n'ai informé personne à ce sujet parce que j'avais reçu
16 précédemment des instructions pour ne pas m'opposer à leurs agissements."
17 Pouvez-vous me le dire à huis clos partiel ?
18 R. J'avais reçu des instructions.
19 Q. Mais de qui ? Nom, prénom ?
20 R. Nom et prénom de qui ?
21 Q. Vous dites que vous avez reçu des instructions pour ne rien faire ou ne
22 pas vous opposez à de tels agissements, comme par exemple lorsque quelqu'un
23 coupait l'oreille de quelqu'un d'autre ?
24 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Huis clos partiel, s'il vous plaît,
25 Monsieur le Président.
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1 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Huis clos partiel.
2 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel.
3 [Audience à huis clos partiel]
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4 [Audience publique]
5 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Il me reste dix minutes, Monsieur le
6 Président.
7 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Bien, nous allons vous entendre.
8 Nouvel interrogatoire par Mme Uertz-Retzlaff :
9 Q. [interprétation] Monsieur le Témoin, intercalaire numéro 5, l'ordre de
10 marche du 27 juillet 1991, au sujet de cet homme,
11 M. Milosevic et Me Tapuskovic ont fait référence au paragraphe 6.3, où il
12 est stipulé qu'il convient de respecter les dispositions des conventions de
13 Genève.
14 Est-ce qu'avant d'aller aux combats, vos supérieurs ont insisté encore sur
15 ce fait lors des briefings avec les hommes ?
16 R. Non, on n'a rien souligné du tout à mon intention. J'ai reçu cela par
17 écrit et on ne m'a rien donné verbalement.
18 Q. Dans le courant de votre témoignage, et c'est ce qui figure dans votre
19 déclaration au préalable, vous avez en effet dit qu'il y a eu des
20 violations des conventions de Genève. Et le commandement de la JNA,
21 j'entends par là vos supérieurs, également avaient-ils eu connaissance des
22 crimes perpétrés ?
23 R. Très certainement.
24 Q. Ont-ils entrepris quoi que ce soit pour que leurs hommes s'en tiennent
25 aux conventions de Genève ?
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1 R. Très peu, voir rien du tout.
2 Q. Lorsqu'il a été question de l'article de presse qui figure à
3 l'intercalaire 7, vous avez indiqué que la population serbe avait eu peur.
4 Les Serbes locaux en s'entretenant avec vous, vous ont-ils laissé savoir
5 que le MUP de Croatie les avait malmené ?
6 R. Ils m'ont laissé savoir qu'ils n'ont pas eu de problèmes en principe
7 avec les représentants du MUP, mais qu'ils les redoutaient beaucoup. Et ces
8 gens avaient évidemment très peur, vu les expériences négatives durant la
9 NDH, l'état croate indépendant de la Deuxième guerre mondiale, et ils
10 avaient redouté ce que cela donnerait à présent. Mais ils n'ont pas été
11 malmenés durant la période concernée, du moins pas dans le secteur où je me
12 trouvais moi-même.
13 Q. Pour ce qui est de l'organigramme fourni au sujet de l'attaque de
14 Luzac, M. Milosevic vous a indiqué que l'unité à Arkan avait été placée
15 sous le commandement de votre bataillon. Or pour qu'Arkan et ses hommes
16 puissent prendre part à une attaque commandée par la JNA, la décision
17 afférente devait-elle être prise au niveau du bataillon ou est-ce que cela
18 a été décidé au commandement conjoint situé si au niveau du corps ?
19 R. La décision, cette décision, a dû être prise au niveau du corps d'armée
20 pour ce qui est des opérations conjointes.
21 Q. M. Milosevic a mentionné le fait qu'Arkan et ses hommes à lui s'étaient
22 intégrés d'une certaine façon au bataillon. Alors en termes militaires,
23 comment qualifieriez-vous les relations entre Arkan et ses hommes et votre
24 bataillon ? Et quelles avaient été les relations entre Arkan et le corps
25 d'armée de Novi Sad ?
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1 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur May.
2 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Oui.
3 L'ACCUSÉ : [interprétation] J'ai une objection à formuler concernant la
4 question posée par Mme Uertz-Retzlaff. Je n'ai pas posé de questions. J'ai
5 commenté un diagramme établi par le témoin et il apparaît dans ce diagramme
6 que l'unité en question avait été constituée par des membres de la TO
7 locale et de la garde des volontaires serbes appartenant à Zeljko
8 Raznjatovic, Arkan. C'était une unité de l'ordre de grandeur d'une
9 compagnie qui était constitué de membres de la Défense territoriale et des
10 volontaires. Donc il ne s'est pas intégré à l'unité, mais l'unité toute
11 entière était -- faisait partie d'une entité plus grande.
12 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Bien. Bien. Ne perdons pas notre temps.
13 Le témoin est en mesure de répondre à la question qui lui a été posée et il
14 peut -- et la question a été posée de façon appropriée. Or est-ce énoncé
15 comme suit : En termes militaires, comment décririez-vous les rapports
16 existant entre Arkan et le bataillon ?
17 LE TÉMOIN : [interprétation] Arkan avait été intégré à un groupe tactique
18 d'attaque. Il faisait partie intégrante de ce groupe tactique chargé de
19 l'attaque.
20 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation]
21 Q. M. Milosevic en parlant d'Erdut et des tirs aux mortiers qui venaient
22 du côté croate a posé une question, et vous avez répondu qu'il n'y avait
23 pas eu de tirs aux mortiers du côté croate. Alors la question que je
24 voudrais vous poser c'est de savoir si des tirs de cette nature avaient été
25 ouverts avant que vous n'arriviez vous-même là-bas avec votre unité ? Je
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1 vous demande donc si votre unité avait été la première des unités de la JNA
2 à être arrivée dans cette région en date du 1er juillet ?
3 R. Oui, c'était la première unité de la JNA qui s'était basée dans ce
4 secteur-là.
5 Q. M. Milosevic a pour sa part parlé de tolérance interethnique au sein de
6 votre unité à l'époque, et il a présenté une allégation disant que la JNA à
7 l'époque que vous étiez dans ses rangs, était une armée tout à fait
8 yougoslave où il n'était pas question de discriminer quelques groupes
9 ethniques que ce soit. Et dans votre réponse vous n'avez pas été d'accord.
10 Alors la JNA à l'époque de votre participation à ces événements avait-elle
11 protégé la population croate à quelque moment que ce soit ?
12 R. Je répète, et il est question une fois de plus de cela aujourd'hui, je
13 dis la vérité. Les ordres verbaux que j'ai reçus ou laissaient entendre que
14 la population croate et que même le bétail avait une -- des tendances de
15 Oustachi ou une façon de se comporter Oustachi. Et je n'étais pas le seul
16 officier qui avait reçu cet ordre-là. Nous étions au moins cinq. C'était la
17 position générale qui avait été prise. Et l'on disait que tous étaient des
18 Oustachi mordus, et qu'il fallait que nous fassions attention à cela, et
19 que nous prenions bien soin de nous-mêmes. Je ne sais pas quel était les
20 mesures ou le degré de la gradation de cette appartenance aux Oustachi mais
21 c'était les faits qui nous avaient été relatés.
22 Q. Pendant que vous étiez en Croatie, la JNA s'était-elle mise du côté de
23 l'une quelconque des parties en conflit ? Et j'entends par là, les Serbes
24 ou les Croates.
25 R. Nous étions plus proches du côté serbe, pour ce qui est de la théorie
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1 et de la pratique parce que cette partie serbe avait été favorable à la
2 sauvegarde de la Yougoslavie. Donc la partie serbe avait été notre allié.
3 Que voulez-vous que je vous dise de plus.
4 Q. Messieurs les Juges, c'était là les questions que je voulais poser au
5 témoin.
6 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Je vous remercie.
7 Monsieur le Témoin C-057, votre témoignage vient de prendre fin. Nous vous
8 remercions d'être venu témoigner devant ce Tribunal international et nous
9 vous disons que vous pouvez vous retirer. Mais nous vous demanderions de
10 patienter toutefois que les volets soient descendus.
11 Nous allons faire une pause à présent. Une pause de vingt minutes.
12 [Le témoin se retire]
13 --- L'audience est suspendue à 10 heures 39.
14 --- L'audience est reprise à 11 heures 05.
15 [Le témoin est entré dans le prétoire]
16 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Je demanderais au témoin de nous donner
17 lecture de la déclaration solennelle.
18 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la
19 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.
20 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Veuillez vous rasseoir.
21 LE TÉMOIN : SULEJMAN TIHIC [Assermenté]
22 [Le Témoin répond par l'interprète]
23 Interrogatoire principal par M. Groome :
24 Q. [interprétation] Monsieur, je voudrais que vous nous décliniez votre
25 identité.
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1 R. Je m'appelle Sulejman Tihic.
2 Q. Quel est votre profession actuelle ?
3 R. Je suis membre de la présidence de la Bosnie-Herzégovine.
4 M. GROOME : [interprétation] Je voudrais vous demander -- ou plutôt je
5 demanderais à la Chambre d'attribuer une cote aux pièces à conviction. Et
6 nous avons là un classeur comportant 13 pièces à conviction.
7 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agira de la cote 608.
8 M. GROOME : [interprétation] Pour le besoin du compte rendu d'audience, je
9 tiens à constater que les intercalaires 1 et 2 de ce classeur sont les
10 déclarations préalables de témoin, alors que les autres intercalaires, ce
11 sont des documents qui ont accompagné les déclarations originales.
12 L'intercalaire 10 est une copie du témoignage préalable de M. Tihic devant
13 ce Tribunal et les intercalaires 12 et 13 sont des pièces à conviction, qui
14 ont été versées au dossier à l'occasion des procès antérieurs.
15 Je voudrais que l'on montre à présent au témoin l'intercalaire 1. Et ceci
16 je demanderais d'abord que l'on lui montre la copie -- la version en
17 anglais de cette déclaration préalable.
18 Q. Monsieur Tihic, je sais que vous ne parlez pas l'anglais, mais je vous
19 demanderais de feuilleter les pages de ce document, et de nous dire si vous
20 reconnaissez le paraphe -- votre paraphe qui figure au bas de chacune de
21 ces pages.
22 R. Oui, je le reconnais.
23 Q. Avez-vous eu l'occasion de vérifier la traduction de la version de
24 cette déclaration dans votre langue ?
25 R. Oui.
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1 Q. Je vous demande maintenant de vous pencher sur ce qui figure à
2 l'intercalaire 2, et de nous indiquer si au bas de chacune de ces pages
3 l'on retrouve votre paraphe.
4 R. Oui.
5 Q. Ce paraphe y figure.
6 Q. Avez-vous eu l'occasion de vous pencher sur la traduction de cette
7 déclaration dans une langue que vous comprenez ?
8 R. Oui.
9 Q. Les autres documents, à savoir, les intercalaires 3 à 10, ce qui y
10 figurent dans ce classeur, avez-vous pu vous pencher dessus et sont cela
11 les documents qui sont cités dans vos déclarations préalables originales ?
12 R. En effet.
13 Q. Après avoir examiné ces déclarations préalables, ainsi que les avenants
14 qui les accompagnent, dites-nous s'il y a des inexactitudes dans ces
15 déclarations sur lesquelles vous estimiez devoir attirer l'attention de la
16 Chambre pour ce qui est de rectificatif éventuel à y apporter.
17 R. Non, il n'y a pas de rectificatif particulier quoiqu'il puisse y avoir
18 des imprécisions -- ou de toutes petites erreurs qui n'ont pas beaucoup
19 d'importance pour ce qui est, par exemple, d'orthographe de certains noms
20 de familles, mais ce ne sont pas là des choses dont l'importance serait
21 cruciale.
22 Q. Après avoir examiné ces déclarations préalables, en votre qualité de
23 témoin qui vient de faire une déclaration solennelle devant ce Tribunal,
24 seriez-vous à même de confirmer la véracité -- l'exactitude de ces deux
25 déclarations préalables, y compris les réserves formulées pour ce qui est
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1 de petites inconsistances qui n'ont pas une importance déterminante sur
2 votre témoignage ?
3 R. Oui, c'est ce que je puis affirmer.
4 Q. Et je voudrais que vous nous disiez pour les besoins du compte rendu
5 d'audience si les inconsistances ou les petites divergences qui pourraient
6 y avoir ce sont des choses de nature orthographique, pour ce qui est de
7 l'orthographe de certaines personnes ?
8 R. Oui, par exemple, pour quelqu'un s'appelant Pavlovic, et Pisarevic,
9 mais partant du sens, mais de la signification de la totalité de la
10 déclaration, on voit bien qu'il s'agit du dénommé Pavlovic parce qu'il n'a
11 pas été jusque-là question d'un Pisarevic quelconque, puisque je n'ai pas
12 eu de voisin s'appelant Pisarevic.
13 M. GROOME : [interprétation] Messieurs les Juges, pour ce qui est de ces
14 pièces à conviction -- ou plutôt de ces intercalaires 10
15 -- 1 à 10, de la pièce 608, je voudrais qu'ils soient versés au dossier en
16 vertu de l'Article 89 (F).
17 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Oui.
18 M. GROOME : [interprétation] Je voudrais maintenant donner lecture d'un
19 bref résumé de ce qui figure dans ce classeur et ce qui figure dans une
20 décision précédente de la Chambre.
21 Le témoin a été président du SDA de Bosanski Samac et il a été question de
22 son arrestation et de sa détention dans le bâtiment de la police de
23 Bosanska Samac, ainsi qu'interrogation qu'il a -- interrogatoire qu'il a
24 subi là-bas. Il décrit le traitement des autres détenus et de lui même dans
25 ce bâtiment de Bosanski Samac.
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1 Le 26 ou 27 avril 1992, le témoin ici présent nous relate le -- qu'il avait
2 été emmené à la caserne de la JNA à Brcko. Puis il nous donne son
3 témoignage au sujet de sa détention là-bas. Il parle de la présence des
4 Bérets rouges et des hommes à Arkan. Il dit qu'à l'époque, il avait
5 clairement compris que les forces paramilitaires avaient coopéré avec la
6 JNA. Il a précisé même que certains soldats de la JNA avaient comme toute
7 peur de ces formations paramilitaires.
8 Le témoin dit plus loin qu'il a accordé une interview à la télévision de
9 Novi Sad en Serbie. Puis il témoigne de la façon dont les conflits ont
10 éclaté à Brcko et il parle de son transfert en date du 1er ou 2 mai 1992
11 vers les casernes de la JNA à Bijeljina. Puis il témoigne des
12 interrogatoires et des passages à tabac dont il a fait l'objet par les
13 soldats de la JNA qui se trouvaient là-bas.
14 Par la suite, le témoin a été transféré en hélicoptère jusqu'à Batajnica en
15 Serbie, où il a été détenu également. Il a été gardé là-bas par des jeunes
16 recrus de la JNA. Il témoigne du traitement qu'il a fait l'objet là-bas
17 puis il a été transféré par la suite vers une prison à Sremska Mitrovica
18 toujours en Serbie. Il témoigne au sujet du commandant de ce camp, et un
19 soldat de la JNA il parle des traitements et des passages à tabac là-bas.
20 Je me propose à présent de vous poser quelques questions qui se trouvaient
21 être pertinentes pour l'affaire qui nous intéresse.
22 Q. Monsieur Tihic, la Chambre a disposé déjà d'une description détaillée
23 des événements de Bosanski Samac. Je vous demanderais que vous nous
24 indiquiez les noms des unités et formations paramilitaires, ou effectifs
25 spéciaux, que vous connaissiez à l'époque et qui étaient venus de Serbie et
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1 qui avaient pris part à la prise du pouvoir à Bosanski Samac.
2 R. Il s'agissait d'une unité spéciale qui s'appelait les Bérets rouges ou
3 les unités à Arkan. Il y avait aussi une unité des Loups gris.
4 Q. Avez-vous appris quand l'unité, que vous venez de décrire comme étant
5 celle des Bérets rouges, est arrivée pour la première fois à Bosanski
6 Samac ?
7 R. Avant l'attaque sur Bosanski Samac, à un dizaine ou quinzaine de jours
8 avant, il est venu me voir avec un client parce que j'avais travaillé comme
9 avocat et il m'a dit qu'à ^Batusa, un hélicoptère de la JNA avait emmené
10 des Bérets rouges, et là-bas, dans ce village, il n'y avait tout à coup
11 plus d'ordre parce qu'ils ont tabassé une patrouille serbe qui avait monté
12 la garde devant un village voisin croate. Ils étaient pris en train de
13 boire dans une cafétéria avec une patrouille croate.
14 Ils ont estimé que cela ne devait pas se faire et ils ont relaté qu'ils
15 avaient coupé les cheveux longs de personnes qui avaient des cheveux longs
16 dans le village, qu'ils s'étaient attaqués à des filles des femmes et que
17 sais-je encore.
18 Q. Pouvez-vous, dans la mesure du possible et dans la mesure où vous en
19 souvenez, nous dire quelle avait été à peu près la date d'arrivée de ces
20 hommes-là à la municipalité de Bosanski Samac en hélicoptère ?
21 R. Et bien, si Samac a été attaqué le 17, ils étaient venus à 15 ou 10,
22 avant donc cela se situe au début avril 1992. Ces personnes-là et des
23 personnes de cet acabit faisaient leur apparition en ville, avaient eu des
24 vêtements civils. Nous avons remarqué qu'il n'y avait des gens qui
25 parlaient le dialecte ékavien, qui ne parlaient pas le dialecte qui est
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1 utilisé d'habitude en Bosnie.
2 Q. Bien, au début du mois d'avril, lorsque les Bérets rouges sont arrivés
3 en Bosanski Samac, est-ce qu'à ce moment-là ou avant le moment en question,
4 il y a eu des problèmes -- des incidents avec des violences survenues à
5 Bosanski Samac ?
6 R. Les Bérets rouges sont arrivés dans un village à une dizaine de
7 kilomètres de Bosanski Samac, qui s'appelle Batkusa. Et l'ambiance qui
8 prévalait à Bosanski Samac, puisque c'était une localité frontalière et
9 elle constituait pratiquement le seul passage de la Bosnie par la rivière
10 Sava, donc je dirais que la situation était tendue, mais la vie se
11 déroulait de façon normale.Ce n'est pas qu'il y a eu de personnes tuées ou
12 de blessées. Il y a eu des conflits sur le plan des échanges verbaux. Mais
13 il y a eu aussi des cas où on avait placé des explosifs, mais qui n'ont pas
14 sauté, donc il n'y a pas eu de conséquences graves.
15 Q. Je vous prierais maintenant de prêter attention à l'écran de télévision
16 qui se trouve devant vous et je voudrais que l'on place la pièce à
17 conviction 349, intercalaire 4. Je préciserai qu'il y a une inexactitude
18 dans le résumé du témoignage qui parle de l'intercalaire 5. Or il s'agit de
19 l'intercalaire 4, de cette pièce 349. Pouvez-vous nous dire si vous
20 reconnaissez les emblèmes ?
21 R. Oui. Ce sont les Tigres à Arkan. C'est leur emblème à eux.
22 Q. Je voudrais à présent que l'on montre maintenant l'intercalaire 16 de
23 cette pièce 16 sur l'écran.
24 J'aimerais attirer votre attention non pas sur l'emblème entier, mais sur
25 la croix, avec quatre lettres "S", en caractère cyrillique, au coin gauche,
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1 en haut. Avez-vous, à quelque moment que ce soit, vu ce type d'emblème à
2 Bosanski Samac ?
3 R. Oui. J'ai vu ce type d'emblème. C'est connu notoirement. Ce sont des
4 lettres "S", en cyrillique, qui sont tournées de façons différentes par
5 rapport aux emblèmes que l'on avait connus jusque-là. Ce sont les quatre
6 lettres "S". Ce ne sont pas des lettres "S" qui se tournent le dos où la
7 courbure se rejoignant. Mais ce sont des lettres "S" qui se regardent, qui
8 sont face à face. Et un homme qui nous expliqué que l'entente, qui avait
9 manqué aux Serbes à l'époque, a fait en sorte que les lettres "S" avaient
10 été retournées de cette façon-là parce que les Serbes avaient tourné le dos
11 les uns aux autres. Or, ici, les "S", les Serbes, se font face l'un à
12 l'autre. Donc ils feront régner l'entente entre eux. C'est ce qu'ils
13 disaient du moins.
14 Q. Mais, le président Tihic, est-ce que le symbole plus typique, celui du
15 "S" cyrillique, on ne le retrouve pas mieux dans la partie supérieure de
16 l'insigne des hommes d'Arkan, en haut à gauche, sur votre écran ?
17 R. Oui. Il ne s'agit pas d'un insigne typique. C'est pour ça que je l'ai
18 mentionné.
19 Q. Est-ce que je pourrais vous demander de décrire à la Chambre les liens
20 entre ces unités, les unités des Bérets rouges, les hommes d'Arkan, les
21 autres unités de Serbie ? Pouvez-vous nous dire quelles étaient leurs
22 relations avec les militaires de Bosanski Samac ?
23 R. Ces unités spéciales -- les "spéciaux", comme on les appelait --
24 c'étaient les maîtres de cette guerre. C'étaient eux qui décidaient de la
25 vie ou de la mort. Les unités serbes locales de l'endroit, ainsi que les
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1 unités de la JNA même, faisaient preuve de beaucoup plus de tolérance
2 envers nous. Ils étaient prêts à accepter de nous laisser partir, mais les
3 autres s'y opposaient. Tout le monde avait peur d'eux. Je connais quelques
4 policiers serbes qui se sont faits tabassés simplement parce qu'ils
5 s'étaient montrés tolérants envers nous. Même les Serbes de la région
6 avaient peur d'eux. Les soldats avaient peur d'eux et, pendant que j'étais
7 à Bosanski Samac, ils ont tabassé les gens. C'étaient les seuls à faire
8 cela.
9 Il arrivait qu'un extrémiste parmi des Serbes leur prête main forte et
10 qu'ils voient leurs rangs se gonfler, mais la majorité des Serbes de
11 l'endroit était gênée, à cause de la position dans laquelle nous étions
12 placé. En tout cas, pendant la période que j'ai passé à Bosanski Samac,
13 pendant ces dix jours, ils nous maltraitaient à tel point que le commandant
14 de Bosanski Samac a appelé la JNA, et leur a demandé de tous nous faire
15 partir, sinon, nous allions succomber aux passages à tabac.
16 Et l'une de ces unités de la JNA avait peur que les unités spéciales qui
17 étaient parties en mission quelque part reviennent. Dans ce cas, on ne
18 pourrait pas nous faire partir, et ils avaient peur de les affronter, en
19 tout cas, à Bosanski Samac.
20 Q. Monsieur Tihic, dans votre déclaration et dans votre déposition
21 précédente, vous avez décrit en détails les sévices auxquels vous avez été
22 soumis pendant votre incarcération notamment. Je voudrais savoir si vous
23 avez appris les noms de ceux qui se sont rendus coupable de ces agissements
24 à votre encontre personnellement.
25 R. On connaissait leurs surnoms. On ignorait leurs noms. Je sais qu'à
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1 Bosanski Samac, il y avait Lucky, Musa, Lugar, Beli, Zvezdan. C'étaient
2 ceux qui faisaient preuve de plus de cruauté lorsqu'ils nous frappaient.
3 Ils se livraient à des spoliations, à des pillages.
4 Q. Mais est-ce que vous êtes -- vous avez finalement appris le nom de
5 famille de ce dénommé Zvezdan ?
6 R. Oui, j'ai appris son nom. Quand je suis sorti de ce camp de
7 concentration en Serbie, j'étais à Rijeka. J'ai reçu la visite d'un membre
8 de ma famille qui était libre. Il m'a dit : j'ai entendu dire que tu avais
9 été tabassé par Zvezdan. En fait, il s'appelle Jovanovic^ de son nom de
10 famille. Et apparemment cette personne, ce membre de ma famille connaissait
11 ce Zvezdan à Bosanski Samac.
12 Q. Est-ce que votre parent de Bosanski Samac connaissait ce Zvezdan sous
13 le nom de Zvezdan Jovanovic ? C'est ce que vous nous dites, n'est-ce pas ?
14 Pouvez-vous nous dire dans quelle circonstance il l'a appris ? Comment se
15 faisait-il qu'il le connaisse ?
16 R. A l'époque, ils se fréquentaient à Bosanski Samac. Mon parent a dit que
17 Zvezdan lui amenait des cartes grises vierges, dans lesquels il
18 dactylographiait le nom et les coordonnées correspondantes parce qu'il y
19 avait beaucoup de véhicules volés, et Zvezdan souhaitait modifier le nom du
20 propriétaire du véhicule. Il leur arrivait de boire au café, et Zvezdan lui
21 disait : "Moi, j'ai -- ça m'est arrivé plusieurs fois de passer à tabac un
22 tel qui est membre de ta famille."
23 Q. Ces véhicules volés, est-ce qu'ils étaient pris à la population
24 musulmane et croate pendant le printemps 1992 à Bosanski Samac ?
25 R. Oui. Tous ces véhicules ont été volés aux Musulmans et Croates pendant
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1 cette période. Et on remplaçait les noms et prénoms des propriétaires sur
2 ces nouvelles cartes grises. Et Zvezdan disait à mon parent quel nom il
3 fallait dactylographier sur les nouvelles cartes grises.
4 Q. Je vais vous demander de regarder une vidéo, pièce 390/1. Je vais vous
5 demander d'écouter les noms des personnes qui se présentent à l'accusé
6 Milosevic. Et ensuite je vais vous demander quelque chose au sujet de leur
7 nom.
8 [Diffusion de cassette vidéo]
9 M. GROOME : [interprétation]
10 Q. Est-ce que c'est le même nom de-- que le nom de la personne qui vous a
11 passé à tabac pendant que vous étiez à Bosanski Samac ?
12 R. Oui, c'est ce nom-là.
13 Q. Aujourd'hui, dix ans plus tard, avez-vous la certitude de
14 pouvoir reconnaître cette personne sur cette vidéo, de reconnaître son
15 visage ?
16 R. J'ai beaucoup de mal à le distinguer parce que cette image n'est pas de
17 très bonne qualité. Il semble qu'il porte des lunettes ici, mais, d'après
18 sa taille, on pourrait dire que c'est la même personne, mais il m'est
19 difficile d'affirmer avec certitude que c'est effectivement le même homme.
20 En tout cas, le nom correspond, mais, à part de ça, je ne sais pas.
21 Q. Dans votre déclaration au préalable -- dans votre déposition, vous avez
22 parlé d'un certain Djordjevic, alias Crni. Pouvez-vous nous dire ce que
23 vous connaissez de lui, d'où il vient avant ces agissements à Bosanski
24 Samac ?
25 R. Avant d'après ce que je sais, il appartenait à la police fédérale à
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1 Belgrade. Pendant un certain temps, d'après ce que j'ai entendu dire, il
2 avait été à la retraite, mais, quand la guerre a éclaté, il a rejoint les
3 rangs de l'armée et les commandants de cette unité à Bosanski Samac. Crni
4 était le commandant. Je sais qu'il s'est même marié à Bosanski Samac et il
5 s'est emparé des biens de son épouse. Il était commandant de cette unité.
6 Q. Dans votre déposition -- dans votre déclaration, vous entrez dans les
7 détails dans ce qui s'est passé à Brcko et à Bijeljina. Maintenant, je
8 voudrais parler de la période pendant laquelle vous avez été emmené par la
9 force en Serbie à partir de la Bosnie ? Pouvez-vous, s'il vous plaît, dire,
10 à l'attention de la Chambre, dans quelle circonstance vous avez emmené de
11 Bosnie en Serbie, et quand ?
12 R. Depuis la caserne militaire de la JNA à Brcko, nous avons été transféré
13 à Bijeljina à la caserne Spanac. Je crois que c'était le 1er ou le 2 mai
14 1992 et, deux -- ou trois jours après notre arrivée, ils sont venus, ils
15 ont appelé un certain nombre de gens, ils nous ont placé un bandeau sur les
16 yeux et ils nous ont donné l'ordre de quitter le bâtiment où nous nous
17 trouvions. Nous avons marché en direction d'un hélicoptère. On nous a fait
18 monter à bord de cet hélicoptère et, dans cet hélicoptère, il y avait déjà
19 trois hommes de Samac, Izetbegovic -- Izet Izetbegovic, le Dr Kedacic,
20 ainsi qu'un troisième homme -- dont l'interprète n'a pas entendu le nom --
21 et au milieu de l'hélicoptère, il y avait un cercueil avec le corps d'un
22 combattant qui avait été tué. Il y avait un des hommes d'Arkan, ainsi qu'un
23 commandant en vêtements civils. On était attaché les uns aux autres. En
24 fait, on était menotté les uns aux autres. L'hélicoptère a pris son envol,
25 je sais qu'on est parti vers --
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1 Q. Je m'excuse de vous interrompre, mais les interprètes n'ont pas été en
2 mesure de saisir le troisième nom, celui que vous avez cité après celui
3 d'Izetbegovic. Pouvez-vous mentionner le nom de la troisième personne qui a
4 été emmenée avec vous ?
5 R. La personne qui -- ou les personnes qui se trouvaient à l'intérieur de
6 l'hélicoptère étaient Izet Izetbegovic, le Dr Miroslav Kedacic et Anto
7 Dragicevic. Ils étaient déjà dans l'hélicoptère. Et s'est vers moi de Grga
8 Zubak étaient Anto Rukic, Anto Simovic, Dragan Lukac, Sajo Mujkanovic, qui
9 sont venus avec moi. En tout, je crois qu'on était six.
10 Q. Quelles relations existaient entre Izet Izetbegovic et Alija
11 Izetbegovic, s'il y en avait une ?
12 R. Izet Izetbegovic et Alija Izetbegovic étaient les fils de deux frères.
13 Q. Je vous ai interrompu pendant que vous expliquiez la manière dont vous
14 étiez ligoté ou entravé dans vos mouvements dans cet hélicoptère. Pouvez-
15 vous, s'il vous plaît, répéter cela à l'intention de la Chambre ?
16 R. Au milieu de l'hélicoptère, il y avait le cadavre d'un soldat dans un
17 cercueil -- à droite et à gauche du cercueil. Nous étions là, nous, les
18 neuf que nous étions menottés les uns aux autres. Derrière nous, il y avait
19 un des hommes d'Arkan et, de l'autre côté, il y avait le commandant en
20 civil. En chemin les hommes d'Arkan ont voulu nous jeter de l'hélicoptère,
21 mais ce commandant -- je sais que c'est un commandant parce que, plus tard,
22 il nous a interrogé à Batajnica -- ce commandant s'y est opposé. Nous avons
23 survolé plusieurs rivières, deux rivières même avant d'atterrir sur un
24 aérodrome. Je crois que c'était à Batajnica, c'était à Batajnica.
25 Q. Est-ce que vous étiez menottés ?
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1 R. Oui, on était tous menottés, menottés les uns aux autres. Il aurait
2 suffit de pousser l'un d'entre nous par la porte de l'hélicoptère et on
3 serait tous tombés de cet hélicoptère. Moi j'avais une partie de la menotte
4 à ma main et l'autre partie des menottes étaient entouré la main d'un autre
5 homme.
6 Q. Vous nous dites qu'il y avait un des hommes d'Arkan dans cet
7 hélicoptère, comment avez-vous pu définit qu'il s'agissait d'un homme
8 d'Arkan ?
9 R. Je le savais à cause de son insigne et puis de son couvre-chef noir, de
10 son béret noir tricoté.
11 Q. Est-ce que lui il était entravé d'une manière quelconque ? Est-ce qu'il
12 était menotté dans l'hélicoptère ?
13 R. Lui il était chargé de nous garder. Il était responsable de notre
14 sécurité si l'on peut présenter les choses de cette manière.
15 Q. Et cet hélicoptère avez-vous pu déterminer à quelle unité, à quelle
16 organisation il appartenait ?
17 R. Bien, voyez-vous quand on est monté à bord de l'hélicoptère, on avait
18 les yeux bandés, mais sous le bandeau, j'ai quand même pu voir qu'il
19 s'agissait d'un hélicoptère de la JNA, mais on n'a pas pu se rendre compte
20 de l'unité à laquelle appartenait cet hélicoptère parce qu'on devait garder
21 la tête baissée. Et ça aussi à l'intérieur de l'hélicoptère, on nous a
22 interdit de regarder à droite, à gauche ou en haut. Donc on a dû maintenir
23 notre tête baissée pendant tout le vol. Je ne sais pas à quelle unité
24 appartenait cet hélicoptère, mais c'était une hélicoptère de la JNA.
25 Q. Dans votre déclaration -- dans votre déposition, vous entrez en
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1 détails, dans le détail de ce qui vous est arrivé à Batajnica, ainsi qu'à
2 la prison de Sremska Mitrovica, vous parlez notamment des efforts qui ont
3 été entrepris pour vous faire participer aux tournages d'un film de
4 propagande ou à l'enregistrement d'un film de propagande.
5 Dernière question à ce sujet : est-ce que vous avez parlé à un soldat de la
6 JNA du nom de Aco Ilic ?
7 R. Oui, c'était un soldat bien, un homme, bien, il était de Loznica. Il me
8 l'a dit lui-même. Il avait beaucoup d'amis parmi les Bosniaques. Il nous a
9 aidé à Batajnica dans la mesure du possible. Il nous amenait des biscuits.
10 Une fois, il nous a même donné de la bière et, quand c'était lui qui était
11 de garde, personne ne pouvait nous toucher -- nous passer à tabac. Et je
12 sais qu'en un moment donné, vers la fin, mais avant de partir, il est venu
13 nous faire ses adieux. Il a dit qu'il se rendait sur la ligne de front en
14 Bosnie-Herzégovine. C'était vers la fin de notre séjour à Batajnica.
15 Q. Est-ce qu'il a dit s'il recevait une solde supplémentaire
16 -- d'une rémunération supplémentaire, du fait qu'il se rendait sur le front
17 volontairement ?
18 R. Bien, voyez-vous, en dehors d'Aco Ilic, il y avait d'autres gardes qui
19 se sont portés volontaires pour se rendre en Bosnie. Et ils ont dit qu'ils
20 recevraient la même solde que celle qu'ils auraient reçues en Serbie, à la
21 différence prêt qu'ils recevraient une prime supplémentaire pour aller en
22 Bosnie, si bien qu'ils seraient payés comme des soldats professionnels.
23 Leur solde serait donc plus élevée que d'ordinaire.
24 Q. Pendant votre période d'incarcération, la JNA officiellement s'est
25 retirée de Bosnie vers le 19 ou le 20 mai. Etes-vous en mesure de nous dire
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1 si cette conversation, que vous avez eue avec M. Ilic ou avec un des autres
2 hommes, s'est déroulée avant ou après le retrait officiel de la JNA du
3 territoire de Bosnie ?
4 R. Je crois que c'était après, deux ou trois jours avant notre transfert à
5 Sremska Mitrovica, qui a eu lieu le 27 mai. Je le sais aussi parce qu'à
6 l'époque, la Bosnie-Herzégovine a été admise au sein des Nations Unies,
7 ceci après la reconnaissance du pays. Et, plus tard, il a été déclaré --
8 proclamé que la JNA allait se retirer de Bosnie. Nous sommes devenus
9 membres des Nations Unies le 22 mai, me semble-t-il.
10 Q. Quand avez-vous été libéré de l'endroit où vous étiez emprisonné en
11 Serbie ?
12 R. Le 14 août. Ce jours-là, il y a eu un échange de grande envergure à
13 Nemetin, dans le cadre d'un accord conclu entre le premier ministre Panic,
14 le premier ministre de Yougoslavie, et Gregoric. Nous avons fait partie de
15 cet échange. Nous avons été échangés avec des prisonniers croates, qui pour
16 l'essentiel venaient de Vukovar.
17 Q. Merci, Monsieur Tihic, je n'ai plus de questions à vous poser.
18 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Monsieur Milosevic, le moment est venu
19 pour vous de contre-interroger le témoin. Nous nous sommes interrogés sur
20 le temps à vous accorder vu l'interrogatoire principal de l'Accusation, et
21 nous en sommes arrivés à la période, où la durée d'une heure trois quart.
22 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je vais essayer de m'y tenir. Je vais me tenir
23 à cette durée qui m'est accordée, mais je ne suis pas sûr que ce sera
24 possible.
25 Contre-interrogatoire par M. Milosevic :
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1 Q. [interprétation] Monsieur Tihic, dans votre déclaration, tout au début,
2 vous expliquez qu'en plus d'autres déclarations, vous avez fait une
3 déclaration tout de suite après votre échange en 1992. Est-ce bien exact ?
4 R. Oui. L'un des documents que j'ai établi ici, c'étaient des diagrammes -
5 - des diagrammes des cellules où j'ai été enfermé.
6 Q. Non. Je pense à ce qui est écrit au deuxième paragraphe. Je cite :
7 "J'ai amené un document que j'ai établi après ma libération du camp de
8 Serbie, et je vous en remets un exemplaire. J'avais l'impression que
9 j'étais en train d'oublier des choses. Donc j'ai consigné sur le papier des
10 noms et les événements, afin d'en garder le souvenir. Ce document a trait à
11 des événements qui ont eu lieu avant -- à partir de la période commençant -
12 - avant les élections 1990, jusqu'au moment où je suis sorti du camp en
13 1992."
14 Voilà à quoi je fais référence dans ma question.
15 R. Oui.
16 Q. Vous nous dites que vous aviez l'impression d'oublier un certain nombre
17 d'éléments, si bien vous avez ressenti le besoin de consigner sur le papier
18 des noms, des événements. J'imagine que ceci concerne la période allant de
19 1990 à 1992, n'est-ce pas ?
20 R. Oui.
21 Q. Est-ce que vous avez toujours ce document aujourd'hui ? Est-ce que vous
22 l'avez avec vous ? Est-ce que je pourrais peut-être le consulter ? Etant
23 donné que vous affirmez l'avoir communiqué. Or moi, je ne l'ai pas reçu en
24 ce qui me concerne.
25 R. Oui. J'ai toujours ce document, et je l'ai transmis ou communiqué dans
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1 le cadre du procès du groupe de Samac. L'idée pour moi, c'était de
2 consigner sur le papier le genre de détail qu'on a vite tendance à oublier
3 : les noms, la chronologie des événements, et cetera. Et j'ai essayé de
4 décrire la chronologie des événements de tout ce qui s'était passé dans le
5 camp, de tout ce que j'avais subi.
6 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur May, j'aimerais bien avoir ce document
7 lorsque cela sera possible.
8 M. LE JUGE MAY : [interprétation] J'aimerais -- nous allons nous renseigner
9 à ce sujet, Monsieur Groome.
10 M. GROOME : [interprétation] Je suis en train de chercher ce document, et
11 nous informerons les Juges de la Chambre dès que nous l'aurons identifier.
12 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Bien.
13 M. MILOSEVIC : [interprétation]
14 Q. Au moment des événements qui nous occupent, vous occupiez des fonctions
15 importantes au sein du parti du SDA dans votre municipalité, n'est-ce pas ?
16 R. Je me suis porté volontaire pour être président du parti du SDA, et
17 président du comité municipal.
18 Q. Mais votre poste -- le président du parti est sans doute, le membre de
19 plus éminent du parti et de la municipalité ?
20 R. Oui.
21 Q. Et vous étiez membre du SDA depuis sa mise en place ?
22 R. Oui.
23 Q. D'après les informations dont je dispose, il apparaît que vous avez été
24 député dans l'assemblée de la Republika Srpska, de 1996 à l'an 2002.
25 R. C'est exact.
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1 Q. Et, en 2001, le haut représentant de la communauté internationale vous
2 a nommé membre de la commission parlementaire chargée des questions
3 constitutionnelles, n'est-ce pas ?
4 R. Oui.
5 Q. Et ensuite, vous avez été élu président du SDA ?
6 R. Oui.
7 Q. D'après les informations dont je dispose, lorsque vous avez été élu,
8 vous avez prononcé une allocution à l'intention du public, à l'intention
9 des membres du parti présent, à l'intention des députés présents. Vous avez
10 dit que votre parti allait travailler à l'application des dispositions des
11 accords de Dayton.
12 R. J'ai dit que j'allais travailler à la mise en place de l'annexe 4 des
13 accords de Dayton; des accords qui comptent un total de dix annexes.
14 Q. Mais qu'est-ce que cette annexe 4 a de bien particulier ?
15 R. C'est une annexe dans laquelle il est prévu de renforcer les
16 institutions de la Bosnie-Herzégovine en tant qu'état, pour que ces
17 institutions deviennent plus efficaces. Il s'agit également de créer un
18 espace économique unifié.
19 Q. Je vois bien ce que vous voulez dire, mais est-ce que vous entendez par
20 là, une modification du statut de la Republika Srpska ?
21 R. Entre autres. Je crois que l'entité, qui s'appelle actuellement
22 Republika Srpska, ne peut pas porter le nom d'une seule nationalité parce
23 que la Bosnie-Herzégovine est un état où il y a plusieurs nationalités qui
24 sont représentées.
25 Q. Le nom de la Republika Srpska, c'est un nom qui dépend de la volonté
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1 des habitants de la Republika Srpska. Ce sont à eux de décider.
2 R. Il faut que la décision soit prise conformément à la constitution. Et
3 tous les habitants de Bosnie-Herzégovine doivent être interrogés. Il faut
4 qu'on leur demande leur avis. Il faut qu'il y ait un consensus.
5 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Nous nous engageons là dans un débat qui
6 a trait aux questions d'actualité, qui n'a rien à voir avec l'acte
7 d'accusation et avec ce procès. Donc je vous prie de passer à une question
8 plus pertinente pour notre procès.
9 L'ACCUSÉ : [interprétation] Fort bien. Dans ce que vous appelez "procès",
10 il y a sans doute un point commun avec ce que vient de dire
11 M. Tihic, la nécessité pour les populations de trouver un consensus.
12 M. MILOSEVIC : [interprétation]
13 Q. Dans les dizaines d'années qui ont suivi la guerre, la
14 Bosnie-Herzégovine est un état où les décisions politiques ont été prises
15 sur la base d'accord entre les Croates, les Serbes et les Musulmans, et
16 même les décisions s'agissant de nomination de certaines personnes ont été
17 prises dans un souci de représentation équitable et égalitaire de chaque
18 nationalité.
19 R. Oui, tout à fait. La Bosnie-Herzégovine doit être l'état des trois
20 peuples. C'est le type de Bosnie que me je suis toujours attaché à
21 réaliser.
22 Q. Est-ce qu'il est indéniable que les problèmes ont commencé une fois que
23 l'on a pris une décision en ignorant les intérêts des peuples, la décision
24 des Serbes et lorsque on a décidé de quitter la Yougoslavie ?
25 R. Non, ce n'est pas à ce moment-là que les problèmes ont commencé. Les
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1 problèmes ont commencé, à mon avis, parce que la JNA s'est impliquée dans
2 les affaires de la Bosnie-Herzégovine. En d'autres termes, on a monté une
3 agression à l'encontre de la Bosnie-Herzégovine. Les Serbes, les Croates,
4 et les Musulmans en Bosnie ne se seraient jamais fait la guerre s'il n'y
5 avait pas eu d'interférence, d'ingérence extérieure, s'il n'avait pas eu
6 l'implication d'unité spéciale venant de toute part. Nous qui étions tous
7 voisins, nous n'aurions jamais pris les armes les uns contre les autres.
8 Q. Bien, Monsieur Tihic. Si les Croates de Croatie et les Serbes de Serbie
9 sont à l'origine de tout cela, comment se fait-il qu'il n'y a pas de
10 conflit avant l'effondrement de ce fameux plan de Cutileiro qui
11 initialement avait été signé par Izetbegovic, qui, ensuite, a décidé de
12 retirer cette signature quand les Serbes et les Croates eux ont accepté le
13 plan à condition que la Bosnie soit cantonnisée, soit divisée en canton ?
14 Est-ce bien exact, Monsieur Tihic ?
15 R. Non.
16 Q. Bien. Il s'agit de questions qui ont trait au fait. Inutile de
17 m'appesantir la-dessus. Reprenons les événements que vous évoquiez dans
18 votre déclaration et dans votre déposition.
19 Est-il exact qu'en 1990, parmi les partis nouvellement mis en place - le
20 SDS, le SDA, le HDZ - sur le territoire de votre municipalité, est-il exact
21 qu'il en est parvenu à une sorte d'accord politique ? En d'autres termes,
22 vous avez coopéré pour faire tomber les communistes ?
23 R. Il s'agissait d'une municipalité d'une -- majorité municipale qui a élu
24 le gouvernement.
25 Q. Est-il indéniable au sein de la municipalité une fois que vous avez eu
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1 gagné les élections, je parle des trois partis, est-il exact que la
2 répartition des postes a été reposée sur l'accord conclu entre les partis.
3 Je fais référence ici au paragraphe 4 de votre déclaration.
4 R. Il y a eu des changements que dans -- qu'au niveau des postes publics
5 parce qu'il n'y a eu au niveau des entreprises privées aucun changement.
6 Les problèmes étaient autres.
7 Q. Combien de temps avez-vous été membre de la Ligue des communistes de
8 Yougoslavie ? Vous en avez été membre, n'est-ce pas ?
9 R. Oui.
10 Q. Combien de temps ?
11 R. Depuis le lycée.
12 Q. Donc au moment où vous êtes devenu majeur, vous êtes devenu membre.
13 Vous êtes devenu membre dès que c'était possible ?
14 R. Oui.
15 Q. Vous nous dites que vous êtes devenu membre de la Ligue des communistes
16 révolutionnaires à partir de la quatrième année de lycée en seconde à peu
17 près, mais au paragraphe 4, vous nous dites que vous n'étiez pas membre de
18 la Ligue des communistes par conviction, mais parce que c'était pour vous
19 une manière de servir vos ambitions professionnelles.
20 R. Bien, en particulier, tous les gens cultivés, tous les gens instruits
21 devenaient membres de la Ligue des communistes, et les idées prônées par la
22 Ligue des communistes étaient des idées progressistes, acceptables. On
23 parlait de justice d'égalité entre les peuples, les gens, et cetera. Donc
24 pourquoi est-ce que je n'aurais pas appartenu à cette ligue à l'époque ?
25 Q. Ce n'est pas la question que je vous pose. Je ne vous demande pas cela,
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1 mais il y a quelques instants vous nous avez dit que vous étiez devenu
2 membre de la Ligue des communistes alors que vous êtes encore au lycée, et
3 là vous nous dites vous étiez membre de la Ligue des communistes parce
4 qu'il était impossible d'exercer en tant qu'avocat ou juge si on n'était
5 pas membre de cette ligue.
6 R. C'est exact, parce que surtout dans les provinces -- dans les provinces
7 il était très difficile d'être procureur ou juge sans cela. On ne pouvait
8 même pas ternir un commerce si on n'était pas membre de la Ligue des
9 communistes.
10 Q. Moi, je n'ai jamais entendu parler de rien tel. Je ne savais pas que
11 l'on ne pouvait rien faire si on n'était pas membre de la Ligue des
12 communistes, parce qu'à ce moment-là tout le monde aurait été membre de la
13 Ligue des communistes, en particulier tous les avocats. En ma connaissance,
14 tous les avocats n'étaient pas membres de la Ligue des communistes. Peut-
15 être c'était le cas à Bosanski Samac. Je ne sais pas. En tout cas, vous
16 seriez une exception, Monsieur Tihic.
17 R. On pouvait être juge de la Cour du Tribunal constitutionnel sans être
18 membre de la Ligue des communistes --
19 Q. Vous nous dites que vous ne pouviez pas exercer en tant qu'avocat sans
20 cela.
21 R. Non, je n'ai pas dit cela. Ça c'est peut-être un exagéré, un peu
22 imprécis.
23 Q. Mais justement la raison pour laquelle je vous pose des questions,
24 parce que tout cela est bien inexact, n'est-ce pas ?
25 R. Pour l'essentiel, les avocats n'étaient pas membres de la Ligue des
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1 communistes.
2 Q. Donc vous avez écrit quelque chose qui ne correspond à la réalité. Mais
3 peu importe. Avançons.
4 Est-il exact que durant l'année 1991 vous avez également fait partie du
5 conseil Suprême chargé de la sécurité au sein du SDA, n'est-ce pas ? Vous
6 en faites état au deuxième paragraphe de votre déclaration écrite.
7 R. J'étais membre du comité exécutif du SDA.
8 Q. Je vous demandais si vous aviez été membre du comité national chargé de
9 la Sécurité au sein du SDA.
10 R. Non. D'ailleurs à ma connaissance, cette instance n'existait pas en
11 tant qu'organisme permanent du parti.
12 Q. Vous êtes resté membre du comité national du SDA pendant tout le temps
13 où a existé l'ex-Yougoslavie ?
14 R. Vous parliez peut-être du comité principal du SDA. Peut-être y a-t-il
15 eu un problème d'interprétation.
16 Q. Est-il exact qu'avec Izet Izetbegovic qui est le neveu, non pas le
17 neveu mais le cousin d'Alija Izetbegovic, n'est-ce pas ? Au nom des
18 Musulmans de Bosanski Samac, vous avez, avec lui, participé à une réunion
19 sur le mont Igman qui s'est tenue à la fin de l'année 1991 ?
20 R. Oui.
21 Q. Que s'est-il passé lors de cette réunion ? Est-ce qu'à ce moment-là que
22 le conseil national chargé de la Sécurité pour le SDA était créé ?
23 R. Non. Nous étions en 1991. Nous avons discuté de question d'actualité
24 politique. Et à la fin de la réunion, un certain nombre de participants ont
25 manifesté leur inquiétude par rapport au fait que les Serbes obtenaient des
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1 armes de la JNA. Il a été dit également que des Croates obtenaient des
2 armes en provenance de Croatie et nous les Musulmans n'avions pas d'armes.
3 Donc nous sommes, on peut le dire, restés désarmés car la JNA, lorsqu'elle
4 est partie, a emporté les armes avec elle, et l'autre partie elle obtenait
5 des armes d'ailleurs.
6 Q. Donc cela s'est passé à la fin de 1991. Est-ce qu'il a été également
7 question des préparatifs nécessaires pour créer les cellules de Crise
8 municipales et régionales à ce moment-là ?
9 R. Je ne sais pas si c'est à ce moment-là que l'on a commencé à en parler,
10 mais effectivement les cellules de Crise ont été créées par la suite peu
11 après.
12 Q. Est-il indiscutable que la direction du SDA dont vous faisiez partie,
13 déjà à ce moment-là, donc fin 1991, se déclarait très clairement favorable
14 à l'indépendance, à la souveraineté de la Bosnie-Herzégovine ?
15 R. Non, ce n'est pas le cas. Nous souhaitions que la Yougoslavie continue
16 à exister en tant qu'état, où les différents peuples étaient sur pied
17 d'égalité. D'ailleurs le président Izetbegovic s'était prononcé dans ce
18 sens. Mais malheureusement cela n'a pas été possible car nous savions ce
19 que cela devait vouloir dire en Bosnie-Herzégovine.
20 Q. Est-il exact que les Serbes se sont prononcés en faveur du maintien de
21 l'intégrité de la Yougoslavie ? Ça au moins est-ce que c'est indiscutable ?
22 R. Non, non, c'est discutable, voyez-vous, parce que tous les autres
23 peuples voulaient que la Yougoslavie soient un état où tous les peuples
24 étaient égaux. Mais les Serbes, ou en tout cas la politique, les
25 représentants politiques qui représentaient les Serbes à ce moment-là,
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1 souhaitaient une Yougoslavie où les Serbes seraient pour le moins un peu
2 plus égaux que les autres.
3 Q. Monsieur Tihic, mais n'êtes-vous pas au courant du fait qu'en Serbie,
4 ou plutôt en république fédérale de la Yougoslavie, créée en avril 1992, au
5 moment où vous vous êtes séparé, avait bénéficié de la reconnaissance
6 internationale, est-ce qu'au moins vous savez qu'au sein de la république
7 fédérale de la Yougoslavie, les peuples étaient égaux, tous égaux, et que
8 cela a duré pendant des décennies où il n'y a eu aucune discrimination sur
9 base ethnique dans ce pays. En fait, 70 000 Musulmans se sont enfuis vers
10 la Serbie pour y trouver refuge pendant le conflit ?
11 R. Je ne suis pas au courant de cela. Et en tout cas, je ne suis pas au
12 courant du fait que cette égalité ait existé. Je veux dire, les Musulmans
13 étaient sortis des trains et tués dans cette "Yougoslavie équitable" dont
14 vous parlez. Donc il y a un certain nombre l'autre jour qui ont encore
15 perpétré des crimes et des Musulmans ont été donc forcés de descendre d'un
16 train et tués. C'est ce que vous appelez égalité ?
17 Q. Monsieur Tihic, les gens, dont vous parlez, qui ont été forcés de
18 descendre du train en Bosnie-Herzégovine et pas en Serbie, ça vous le savez
19 très bien. Et vous savez quelle a été la réaction des autorités du pouvoir
20 à cet égard. Et vous savez très bien, je le répète, que cela s'est passé
21 sur le territoire de la Bosnie-Herzégovine et pas sur le territoire de la
22 Serbie. Donc je ne vois pas de quoi vous êtes en train de parler ?
23 R. Et bien, je suppose que nous pourrions parler --
24 Q. Ce n'est pas de cela que je parle en tout cas.
25 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Non, nous n'allons pas débattre de ce
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1 point. C'est une perte de temps complexe ce genre de discussion. Et nous
2 entendrons des témoins que vous citerez à la barre le cas échéant. Si vous
3 avez des questions à poser au témoin, faites-le mais sans polémiquer avec
4 lui. Sinon, nous passerons à autre chose.
5 M. MILOSEVIC : [interprétation]
6 Q. Monsieur Tihic, je vais vous poser des questions et répondez le plus
7 brièvement possible. Savez-vous qu'à Bosanski Brod, le 13 janvier 1991, les
8 représentants du HDS du nord de la Bosnie se sont réunis et une commission
9 a été mise en place chargée de discuter avec Martin Spegelj et Josi
10 Bojlkovic [phon], c'est-à-dire, avec les ministres de la Défense et de
11 l'Intérieur au niveau de Bosanski Brod afin de mettre en place ce qu'il a
12 été convenu d'appeler la Posavina de Bosnie, c'est-à-dire le corridor de la
13 Posavina ?
14 R. Je ne suis pas au courant de cela.
15 Q. Est-ce que vous êtes au courant du fait que les dirigeants du SDA de
16 Sarajevo, le 11 juillet 1991, ont envoyé des représentants municipaux du
17 SDA -- aux représentants municipaux du SDA, un document intitulé Consigne
18 pour la présentation de candidatures au centre d'instruction du MUP de la
19 république de Croatie ? Ce document était signé par Hasan Cengic,
20 secrétaire de son état ?
21 R. Je ne suis pas au courant.
22 Q. Vous n'avez pas reçu ce document ?
23 R. Non.
24 Q. Vous souvenez-vous que le président du SDA de Bosanski Samac, de
25 l'époque le 9 août 1991, je souligne -- 1991 -- s'est présenté au QG du SDA
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1 et a envoyé un document relatif à la mobilisation, aux manœuvres
2 militaires, à l'instruction militaire en insistant sur le fait que
3 l'affiliation au parti devait être prise en compte au niveau des
4 secrétariats municipaux de la Défense nationale. Ceci figure dans un
5 document, un procès verbal de réunion où l'on voit cela mentionné au point
6 A. Au point B, insistance pour que -- de la part de la présidence de
7 Bosnie-Herzégovine en date du 7 août, pour que les recrus de l'armée de
8 Bosnie-Herzégovine ne fassent leur service militaire que sur le territoire
9 de la Bosnie-Herzégovine ou de la Macédoine. Et au point C, il est stipulé
10 que les documents peuvent être adressés uniquement -- peuvent être envoyés
11 uniquement par les autorités municipales et pas par les instances
12 militaires. Vous souvenez-vous de ce document, et cela est-il exact ?
13 R. Je ne me souviens pas que ce soit le SDA qui a envoyé ce document. Je
14 pense que c'était une décision de la présidence peut-être qui encourageait
15 les jeunes à ne pas faire leur service militaire. Je pense que c'est la
16 présidence de Bosnie-Herzégovine qui a pris cette décision.
17 Q. Vous souvenez vous qu'en août de cette même année, les voies de trafic
18 d'armes ont été coupées. Je parle des armes qui entraient en Bosnie
19 illégalement en provenance de la Croatie à destination du SDA ?
20 R. Où est-ce que cela s'est passé ?
21 Q. Dans votre région.
22 R. Je ne me souviens pas.
23 Q. Fort bien. Vous souvenez-vous qu'en octobre 1991, les premiers réfugiés
24 serbes aient commencé à arriver de Croatie et que ce soit une commission
25 spéciale de Bosanski Samac qui a été chargée de s'en occuper ?
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1 R. Ça je m'en souviens. Je m'en souviens très bien. Ils arrivaient de
2 Slunj et d'autres localités.
3 Q. Est-il exact que le 27 novembre 1991, du côté croate il y a eu arrêt de
4 la circulation sur le pont qui relie Bosanski Samac au territoire situé de
5 l'autre côté de la Sava, donc la circulation ait été coupée ?
6 R. Il est possible que la circulation ait été coupée sur ce pont.
7 Q. Et bien, vous souvenez-vous qu'à ce moment-là, la cellule de Crise de
8 Slavonski Brod a fait savoir au président de l'assemblée municipale de
9 Bosanski Samac que la raison pour laquelle la circulation avait été coupée
10 était la concentration des unités de la JNA et des bandes de Chetniks ? Je
11 reprends les mots utilisés dans ce document : Du côté bosniaque comme si le
12 pont était miné. C'est cela ?
13 R. Je ne sais pas. Je ne suis pas sûr.
14 Q. Vous n'êtes pas sûr de quoi ?
15 R. Je ne suis pas sûr que ce document soit arrivé. Je sais qu'il y a eu
16 coupure de la circulation et qu'il y a eu des pourparlers au sujet de la
17 concentration des troupes, que c'était cela la raison, le motif invoqué
18 parce qu'ils avaient peur que ces troupes passent de l'autre côté en
19 Croatie. Mais l'existence d'un document, ça je n'en suis pas sûr.
20 Q. Fort bien. Mais vers la fin du mois de novembre 1991, est-ce qu'une
21 série d'actes de sabotage et de diversions a eu lieu avec plasticages de
22 lignes de télécommunications à Lugovi, et également cet acte d'Alija
23 Fitozovic, un camarade à vous et de votre parti, qui a détruit des
24 matériels à l'usine Vitezit, un plasticage qui a beaucoup fait coulé
25 d'encre et qu'il existait également un schéma qui prévoyait touts ces
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1 actes ?
2 R. Je sais que les lignes de télécommunications ont été plastiquées. Mais
3 pour Vitezit, je ne sais pas.
4 Q. Vous n'êtes pas au courant du fait que Fitozovic avait des explosifs ?
5 C'était pourtant un de vos collègues ?
6 R. Je sais que des explosifs ont été trouvés dans une maison.
7 Q. Est-ce que vous savez qu'en 1991, il y a une division qui a utilisé le
8 même genre d'explosifs ?
9 R. Je ne suis pas au courant de cet acte de sabotage, mais je sais qu'une
10 explosion a eu lieu dans l'usine, seulement je ne savais pas que c'était en
11 rapport avec ce que vous dites. Les auteurs de l'acte n'ont jamais été
12 découverts et nous avons pensé que c'était un acte de la JNA. Des
13 accusations ont été jetées de part et d'autres. Il était question de
14 sabotage très souvent dans ces accusations mais je ne suis pas sûr que la
15 chose ait été confirmée. J'ai entendu le nom d'un certain Lugovi prononcé ?
16 Oui, Lugovi. Il y a eu des actes de sabotage à plusieurs reprises dans le
17 même genre. Je crois que, je ne sais pas si Lugovi a été mentionné deux
18 fois, mais une fois c'est possible.
19 Q. Le 24 décembre, je parlais de cela à l'instant parce que ce n'était pas
20 le 23, c'était le 24 décembre, votre collègue au parti, Alija Fitozovic,
21 était également responsable du parti, n'est-ce pas ?
22 R. Il était membre du conseil principal, donc du conseil exécutif du
23 parti.
24 Q. La cellule de Crise de Slavonski Brod a reçu une pièce d'identité qui
25 permettait qu'il visite un certain nombre de points de contrôle, n'est-ce
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1 pas ? De postes de contrôle ?
2 R. Je ne suis pas au courant du fait qu'il ait reçu un tel document.
3 Q. Est-il vrai que le 26 décembre, les pilons de télécommunications situés
4 entre Tuzla et Djakovo ont été minés ainsi qu'un commerce à Bosanski
5 Samac ?
6 R. Je ne suis pas au courant de l'explosion des lignes de
7 télécommunications et Janja Zubak n'est pas Serbe. C'est une Croate. Son
8 mari, Grga Zubak a été emprisonné à ce moment-là.
9 Q. Est-ce que c'est son kiosque qu'on a fait sauter ?
10 R. Son kiosque qui était situé tout près du bâtiment du MUP de la police.
11 Q. Est-il exact qu'en janvier 1992, une nouvelle livraison d'explosifs a
12 eu lieu qu'un certificat a été découvert dans l'appartement de Fitozovic
13 qui avait un rapport direct avec cette livraison d'explosifs ?
14 R. Je ne suis pas au courant.
15 Q. Vous n'êtes pas au courant de quoi ?
16 R. Je ne sais pas.
17 Q. Je vous remercie. Mais savez-vous qu'en janvier 1992, une grande
18 quantité d'armes a été reçue en provenance de Croatie ? Est-ce que vous
19 êtes au courant de cela ?
20 R. En janvier 1992 ?
21 Q. Oui, en janvier 1992.
22 R. Non.
23 Q. Une grande quantité d'armes provenant de Croatie.
24 R. Je ne suis pas au courant. Je sais qu'en avril, juste avant l'attaque
25 sur Samac, quelque chose est arrivée de Croatie, mais, en janvier, je ne
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1 suis pas au courant.
2 Q. Je vois, avant l'attaque sur Samac, des armes sont arrivées de
3 Croatie ?
4 R. Oui, 50 fusils automatiques qui provenaient du QG de la Défense
5 territoriale. Ces armes étaient, pour la plupart, confisquées au moment de
6 l'attaque sur Samac.
7 Q. Elles ont été confisquées ?
8 R. Oui, parce que c'étaient des armes de la Défense territoriale.
9 Q. Et vous parlez maintenant du mois d'avril, mais moi je continue à
10 parler du mois de janvier. Le 27 janvier, c'est-à-dire, le jour de la fête
11 de St-Sava, la chapelle du cimetière orthodoxe de Bosanski Samac a explosé.
12 Vous souvenez-vous de cela ?
13 R. Je sais qu'elle a explosé cette chapelle, mais je ne sais pas si
14 c'était le 27 janvier.
15 Q. Et bien, c'était le jour de St-Sava qui a été choisi de façon tout à
16 fait délibérée parce que c'est une fête serbe importante.
17 R. Je ne sais pas si c'était exactement le jour de cette fête que
18 l'explosion a eu lieu, mais je sais que des dommages importants ont eu
19 lieu, sinon, une destruction totale.
20 Q. Des explosifs ont été placés dans cette chapelle.
21 R. Oui.
22 Q. Savez-vous que, le 5 février 1992, le pont sur la Sava a également été
23 plastiqué et en partie endommagée.
24 R. Et bien, en partie endommagée, oui, mais je ne sais pas si c'était le 5
25 février. Enfin, c'est probable.
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1 Q. Savez-vous que, le 8 février, en provenance de Donji Hasici, une
2 attaque au mortier a été lancée contre le village voisin de Skaric ?
3 C'était ce jour-là que vos collègues Izetbegovic et Fitozovic ont apporté
4 des munitions et des grenades, ainsi des mines anti-chars en provenance de
5 Slavonski Brod. Vous souvenez-vous de cela ?
6 R. Je ne sais rien de ce pilonnage ou de cette attaque au mortier en
7 provenance de Hasici sur Skaric. Mais voyez-vous toutes ces explosions ont
8 eu lieu dans des situations qui répondent à une réalité bien différente de
9 celle qui a été relatée à l'époque, à savoir que l'on imputait ces
10 agissements à la JNA et à la partie serbe en vu de créer un état de
11 confusion.
12 Q. Mais êtes-vous au courant de ce que je viens de vous dire dans la
13 deuxième partie de ma question, à savoir que des munitions ont été
14 apportées par Fitozovic et Izetbegovic, des munitions, des grenades, des
15 mines anti-chars, et cetera, au moment de ce pilonnage ?
16 R. Je ne suis pas au courant de la date. Je ne sais pas si cela a eu lieu
17 ce jour-là, mais je sais qu'une caisse de munitions, deux grenades à main
18 et une mine anti-char est arrivée de Croatie, si je ne m'abuse. On m'en a
19 informé mais je n'ai pas vu cela de mes yeux.
20 Q. Avez-vous appris que des quantités d'armes dont je viens de parler qui
21 n'étaient pas très importantes, une caisse de munitions, dites-vous ?
22 R. Oui.
23 Q. Fort bien. Savez-vous que quelqu'un, qui était surnommé Rajec, et qui
24 était propriétaire d'un café a été impliqué dans cet acte ?
25 R. Oui.
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1 Q. Savez-vous que, le 2 mars, il a reçu une livraison d'une grande
2 quantité de munitions qui était destinée à Bosanski Samac ?
3 R. Je pense que vous parlez de la même chose que moi, de cette même
4 livraison. C'est Atic qui a apporté cette caisse.
5 Q. Non, la première chose -- le premier acte a eu lieu le 8 février, et le
6 deuxième, le 2 mars. La deuxième fois, il était question de 10 000 pièces
7 de munitions et pas simplement d'une caisse.
8 R. Je suis au courant d'une livraison uniquement. Maintenant, est-ce que
9 c'était Atic ou Fitozovic qui était impliqué, je ne sais pas.
10 Q. J'ai ici un reçu qui stipule une quantité égale à 1 342 pièces. Et
11 cette quantité a été découverte le 2 mars.
12 R. Je sais qu'il y a eu simplement une livraison. Maintenant, est-ce
13 qu'elle était le fait d'Izetbegovic ou de Fitozovic, je ne sais pas.
14 Q. Est-ce que vous savez que, dans la nuit du 12 au 13 mars, une livraison
15 a été réalisée à bord de deux camions dont la sécurité était assuré par un
16 certain Namic Sulic [phon], commandant de la police de Samac ?
17 R. Je ne suis pas au courant.
18 Q. Est-ce que vous savez que, lors d'une rencontre tenue le 19 mars, dans
19 le village à laquelle ont participé un certain Stjepan Bozanovic, dénommé
20 Braco, envoyé spécial du HDZ de Croatie; un certain Mato Nujic, Filip Evic,
21 Izet Izetbegovic, Vinko Dragicevic, Alija Fitozovic, et un certain Marko
22 Bozanovic. Il y a un Stjepan et un Marko Bozanovic, vous êtes au courant de
23 cette réunion ?
24 R. Je me souviens de cette réunion et, notamment, de la dernière partie de
25 cette réunion, qui a finalement échoué parce que Marko Bozanovic et moi
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1 n'étions pas d'accord pour que soit mis en place une cellule de Crise où ne
2 serait représentée que les Croates et les Musulmans. Je voulais que, dans
3 la cellule de Crise, soit représentée également les Serbes. C'est la raison
4 pour laquelle cette réunion a échoué.
5 Q. Mais, à ce moment-là, une cellule de Crise n'a-t-elle pas tout de même
6 été créée avec mise en place d'une nouvelle direction, Bozanovic étant
7 commandant et Fitozovic son adjoint ?
8 R. Non. Ce jour-là, nous n'avons pas été d'accord. J'ai rejeté la
9 proposition de création d'une cellule de Crise si elle ne devait pas
10 compter des représentants serbes en son sein.
11 Q. Donc une proposition a été présentée, vous ne l'avez pas acceptée. Vous
12 étiez contre, et donc la chose ne s'est pas faite.
13 R. J'étais explicitement et fermement contre, ainsi que Marko Bozanovic,
14 qui était d'accord avec moi.
15 Q. Fort bien. Mais comment se fait-il que le noyau de cette future cellule
16 de Crise et de la Brigade du HVO se soit créé à ce moment-là parce que,
17 selon mes informations, c'est à cette réunion que le début de la création
18 de la brigade a eu lieu.
19 R. Je ne suis pas au courant de la création de la brigade. Moi j'étais
20 enfermé dans un camp à ce moment-là.
21 Q. Fort bien. Mais vous souvenez-vous que, le 25 mars 1992, sur la voie
22 ferrée de Samac, on a trouvé des explosifs. La voie ferrée avait été
23 plastiquée ?
24 R. Je ne m'en souviens pas.
25 Q. Vous souvenez-vous qu'à ce moment-là, le 25 mars, ce Fuad Jasenica^,
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1 militant du SDA de Samac, a apporté en provenance de Croatie une livraison
2 importante de fusils automatiques avec des munitions et deux lance-
3 roquettes ?
4 R. Ce que j'ai dit, j'en ai déjà parlé. C'était cette fameuse caisse de
5 munitions du mois d'avril avec 50 fusils automatiques qui ont été
6 découverts en provenance de Croatie.
7 Q. Mais il y a deux livraisons. D'abord, celle dont vous avez parlé et
8 puis une autre au début du mois de mars et une autre encore le 25 mars. Le
9 document découvert sur Atic, sur la date du 2 mars. Il a lui-même organisé
10 ce passage de frontières pour cette livraison, le 25 mars. Et nous parlons
11 donc de deux livraisons différentes alors que vous ne semblez ne parler que
12 d'une.
13 R. Je suis au courant de la caisse de munitions de Jasenica. Ces armes
14 venaient du QG de la Défense territoriale et lui avait été remise. Et je
15 suis au courant qu'Atic, Fitozovic et qui que ce soit, qui étaient avec
16 eux, a apporté ces armes de Slavonski Brod.
17 Q. Fort bien. Mais, Monsieur Tihic, vous êtes devenu président de la
18 cellule de Crise de Slavonski Brod en mars, n'est-ce pas ?
19 R. J'étais membre de la cellule de Crise pour le Parti de l'action
20 démocratique et tous les partis existants dans la municipalité étaient
21 représentés au sein de la cellule de Crise.
22 Q. Donc vous étiez président de la cellule de Crise au côté d'Izetbegovic,
23 Fitozovic, Nalic et Hadzialagic, n'est-ce pas ?
24 R. Oui, je pense que c'est à peu près ça.
25 Q. Est-il exact qu'à ce moment-là, un QG militaire a été créé également au
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1 niveau municipal dirigé par Alija Fitozovic, Alija Izetbegovic, Rifat Atic,
2 Fakija Baptic [phon], et cetera. Ceci est-il exact ?
3 R. Au sein de la cellule de Crise, il y avait un département chargé de
4 s'occuper de toute question liée à la sécurité et à l'organisation de la
5 défense parce qu'à Bosanski Samac, du côté des Musulmans, nous ne
6 représentions que 7 % de la population et nous n'étions présents qu'à
7 l'intérieur de la ville. Donc nous étions très inquiets, très préoccupés
8 parce que nous nous rendions compte que les Serbes étaient bien armés,
9 grâce à la JNA, et que les Croates étaient, eux aussi, bien armés, grâce
10 aux armes venant de Croatie. Et nous nous trouvions entre les deux, très
11 préoccupés, très inquiets. Et nous avons essayé de faire quelque chose pour
12 nous organiser, nous aussi, et assurer, d'une certaine façon, nous aussi,
13 notre sécurité. Mais cela ne pouvait pas se comparer à ce dont
14 bénéficiaient les Serbes et les Croates, qui étaient beaucoup plus nombreux
15 au sein de cette municipalité et qui étaient notamment présents dans les
16 villages. Donc les uns avaient le soutien de l'armée populaire, les autres
17 de la Croatie, et nous étions entre les deux pratiquement sans armes.
18 Q. Fort bien, Monsieur Tihic. Vous dites que les Serbes bénéficiaient du
19 soutien de la JNA et que les Croates bénéficiaient du soutien de l'état
20 croate, mais en -- où il -- y a-t-il boycott de la JNA et refus de répondre
21 aux convocations au service militaire de la part des Musulmans, par rapport
22 aux convocations reçues de la Défense territoriale ? Et est-ce que cette
23 réaction était tout à fait massive ?
24 R. Oui, c'est exact, et ceci suite à un appel qui a été lancé par le
25 président Alija Izetbegovic, qui invitait les jeunes à ne pas répondre aux
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1 convocations parce qu'en entre autre chose, la crainte existait que les
2 jeunes soient envoyés sur les lignes de front en Croatie.
3 Q. Mais n'est-il pas clair que vous êtes, vous-même -- vous vous êtes,
4 vous-même, exclu de la JNA ? Et puis, ensuite, vous avez dit que c'était la
5 JNA qui vous avait chassé parce que vous avez refusé de répondre aux
6 convocations ? Alors, si vous étiez resté dans les rangs de la JNA, vous
7 n'auriez pas pu engager la moindre action contre vous-même. Ceci n'est-il
8 pas évident ?
9 R. Il y avait sans doute des Serbes dans les rangs de la JNA.
10 Q. Mais il y avait toutes les nationalités qui étaient représentées au
11 commandement.
12 R. Vous savez bien que les soldats étaient majoritairement Serbes, et
13 qu'ils étaient commandés par des Serbes.
14 Q. Vous savez que la composition du commandement, c'est-à-dire, de l'état
15 major de la JNA était proportionnelle, et correspondait à la composition de
16 la population.
17 R. Je ne pense pas que la proportionnalité était respectée.
18 Q. Nous n'allons pas discuter de cela. Il y a des documents qui le
19 prouvent. Mais est-il vrai que l'une des tâches élémentaires de la cellule
20 de Crise du SDA a consisté à armer vos formations, dans les municipalités
21 musulmanes où ces cellules des Crise ont été créées ? Oui ou non ?
22 R. Ce que je puis dire c'est au sujet de Bosanski Samac, qu'il n'y a pas
23 eu de formations sérieuses que nous étions à même d'armer. Nous n'avions
24 pas de quoi le faire. Nous étions une population qui constituait 8 % par
25 rapport à la totalité de la structure de la population dans cette
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1 municipalité.
2 Q. Bien. Mais nous avons constaté tout à l'heure que, sur certains points,
3 nous étions d'accord au sujet des activités déployées en corrélation avec
4 l'armement, quoique vous indiquiez vous-même que vous ayez 7 % seulement de
5 la population.
6 R. En effet.
7 Q. Bien. Avez-vous connaissance des opérations agressives à l'égard des
8 officiers de la JNA, des casernes, des installations militaires, à
9 l'époque ? Et ceci sur le territoire qui était le vôtre, sur le territoire
10 au sujet duquel vous aviez connaissance de ce qui se passait indépendamment
11 du fait que cela n'est pas strictement fait partie de la municipalité qui
12 était la vôtre ?
13 R. Et bien, s'agissant de Bosanski Samac et des régions aux alentours, il
14 n'y a pas eu d'officiers et de casernes où des activités de cette nature
15 aient été déployées.
16 Q. Mais, attendez, vous mentionnez une 4e Unité -- une 4e Compagnie de la
17 JNA. Vous affirmez que cela faisait partie du 17e Groupe tactique qui était
18 commandé par un certain Nikolic.
19 R. Oui.
20 Q. Dites-moi, partant de quoi, avez-vous affirmé que ce 4e Détachement
21 faisait partie de la JNA ? N'était-ce pas là de la Défense
22 territoriale peut-être?
23 R. Ce n'était certainement pas de la Défense territoriale. M. Nikolic
24 venait nous informer que cela faisait partie de la JNA, et qu'il y avait
25 des éléments ou des segments de cette nature dans d'autres municipalités.
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1 Nous avons été contre. Nous avons indiqué qu'en vertu de la constitution,
2 de telles unités ne pouvaient faire partie que de la Défense territoriale.
3 Il n'a pas voulu l'accepter. Il a constitué ce détachement.
4 Q. Mais c'est précisément de cela qu'il s'agit. Ne s'était-il pas agi
5 d'une unité de la TO où il y avait des Serbes, des Croates et des Musulmans
6 dans ce 4e Détachement.
7 R. C'était une Unité de la JNA. Cela ne faisait pas partie du QG de la TO,
8 mais de la JNA.
9 Q. Bien. Mais vous savez --
10 M. LE JUGE MAY : [interprétation] L'heure est venue de faire la pause. Nous
11 allons procéder à une pause de 20 minutes à présent.
12 Monsieur le Président Tihic, je vous préviens de ce que nous faisons à
13 l'attention de tous les témoins. Donc il ne s'agit pas pour vous de parler
14 de votre témoignage à quiconque, en attendant la fin de celui-ci. Et je
15 vous prie de revenir ici dans 20 minutes.
16 --- L'audience est suspendue à 12 heures 22.
17 --- L'audience est reprise à 12 heures 45.
18 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Nous allons continuer jusqu'à 2 heures,
19 ce qui nous fournira le temps d'entendre jusqu'au bout le témoignage de ce
20 témoin.
21 Continuez, Monsieur Milosevic, je vous prie.
22 M. MILOSEVIC : [interprétation]
23 Q. Tirons au clair ce qui concerne le 4e Détachement, vous-même, Monsieur
24 Tihic, dans le septième paragraphe, de votre déclaration, vous parlez de
25 deux de vos concitoyens et vous dites à ce sujet, je cite : "Ils ont
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1 organisé ce 4e Détachement de la JNA à Bosanski Samac et ceci en recrutant
2 des civils qui avaient des armes. 80 % des membres avaient été des Serbes,
3 mais il y avait eu des Musulmans et des Croates." C'est ce que vous avez
4 déclaré ?
5 R. Cela a été organisé par l'armée populaire yougoslave, par la caserne de
6 Brcko et, sur le plan juridique formel, ils avaient été placés sous leur
7 attribution à eux, c'est eux qui leur ont donné les armes.
8 Q. Oui, je comprends, mais je vous cite à vous. Vous avez dit, au sujet
9 des concitoyens à vous, qu'ils avaient constitué ce 4e Détachement de
10 Bosanski Samac, en recrutant des civils qui avaient possédé des armes et
11 qu'à 80 % c'était des Serbes, et le reste était des Musulmans et des
12 Croates et vous avez dit qu'il n'y avait que 7 % de la population à être
13 constitué par des Musulmans ?
14 R. Sur la composition de la population de Bosanski Samac, il a été
15 constitué ce détachement et c'était ainsi que ça s'est fait.
16 Q. Et vous dites au paragraphe 10 : "Que Nikolic n'avait pas les
17 attributions légales pour ce qui était de créer un détachement parce que
18 cela seulement les autorités de la république pouvaient le faire." Alors,
19 selon vous, qui est-ce qui a créé ce 4e Détachement, Nikolic ou des
20 concitoyens à vous ? Parce que vous dites : "Ils ont."
21 R. C'est Nikolic qui a créé ce 4e Détachement.
22 Q. Donc ce que vous déclarez ici n'est pas exact, à savoir que "eux"
23 organisés ce détachement ?
24 R. Vous avez arraché cela du contexte. La totalité de mes propos doivent
25 forcément indiquer que c'était la JNA, que c'était le lieutenant-colonel
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1 Nikolic qui avait organisé cette unité-là, ces effectifs-là.
2 Q. Regardez ce paragraphe 7. Au milieu du paragraphe, vous mentionnez tout
3 un tas de noms qui de eux qui avaient été ceci ou cela et puis vous dites :
4 "Ils ont organisé le 4e Détachement de la JNA à Bosanski Samac, et ceci en
5 recrutant des civils qui avaient des armes. 80 % des membres étaient des
6 Serbes, mais ils y avaient eu des Musulmans et des Croates." Par
7 conséquent, c'est ce qui est dit ici à la lettre, je ne fais que lire à la
8 lettre ce que vous avez déclaré vous-même.
9 R. Moi je vous reprends la totalité de mes propos à savoir que cela avait
10 organisé par la JNA, par le lieutenant-colonel Nikolic et que eux n'ont
11 fait que faire partie de ce détachement, mais les armes sont venus de la
12 JNA. Ça c'est la vérité.
13 Q. Mais vous dites qu'ils ont recruté des civils qui avaient des armes.
14 R. Ils ont distribué eux des armes aux civils. On sait où cela s'est fait;
15 à l'usine textile de la localité c'est là qu'ils ont reçu des armes.
16 Q. Bien. L'un ne va pas avec l'autres, mais, enfin, dites-moi, au
17 paragraphe 9, vous déclarez que le lieutenant-colonel Nikolic -- ou le
18 colonel Nikolic -- je ne sais plus exactement quel avait été son grade,
19 s'il était donc colonel ou lieutenant-colonel, mais peu importe. A l'époque
20 dans la Bosnie-Herzégovine, il y avait toujours de la JNA et ils venaient
21 donc à Bosanski Samac pour des réunions pour parler de la sécurité et pour
22 l'organisation de la défense de la ville avec l'armée. Et la plupart ne
23 voulaient pas que la JNA fasse partie des activités déployées par la TO.
24 Est-ce exact ?
25 R. Ce qui est exact c'est que le lieutenant-colonel Nikolic venait. Il
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1 avait assisté aux sessions de ce conseil chargé de la Sécurité, aux
2 sessions de la communauté locale et il n'avait pas voulu coopérer avec la
3 Défense territoriale. Ça c'est exact. Ce qu'il voulait c'est que la JNA se
4 charge en totalité de toutes les questions de la sécurité au niveau de la
5 municipalité. Or nous ne le voulions pas.
6 Q. Mais vous dites, vous-même, au paragraphe 9, je vous cite une fois de
7 plus : "Il venait aux réunions où il y était discuté de la sécurité et il
8 disait aux gens d'organiser la défense de la ville avec l'armée, mais la
9 plupart ne voulait pas que la JNA se joigne aux activités de la Défense
10 territoriale." C'est le contraire de ce que vous venez de dire.
11 R. Le lieutenant-colonel Nikolic et la JNA toute entière ignoraient la
12 présence de la Défense territoriale. C'est la raison pour laquelle il avait
13 désarmé cette Défense territoriale.
14 M. GROOME : [interprétation] Monsieur le Président, si je puis interrompre
15 pour quelques instants. Nous avons ici la déclaration de ce témoin en
16 version anglaise et B/C/S. Ce sont là des notes personnelles -- ou des
17 mémoires de ce témoin, qui ont été confiés pour la première fois au bureau
18 du Procureur et qui ont été communiqués d'ailleurs à l'accusé en mars 1993
19 [sic]. J'ai des copies une fois de plus et je tiens à dire que le nom du
20 témoin ne se retrouve pas dans ce document, mais on voit son nom dans les
21 notes de bas de page. Mais c'est ça déclaration à lui.
22 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Et bien, qu'on confie cela à l'accusé et
23 j'aimerais que nous obtenions aussi des copies pour la Chambre ?
24 M. GROOME : [interprétation] Je voudrais que ceci soit versé au dossier,
25 Monsieur le Président.
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1 L'INTERPRÈTE : Le document en question a été confié -- communiqué à
2 l'accusé en mars 2003, et non pas 1993.
3 L'ACCUSÉ : [interprétation] Il s'agit là d'un document plutôt épais. Et je
4 suppose que M. Groome a fait une erreur fortuite en disant que cela m'a été
5 communiqué en 1993. Je suppose qu'il voulait dire 2003.
6 M. GROOME : [interprétation] Oui. Cela a été communiqué le 21 mars 2003.
7 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je ne sais vraiment pas comment me débrouiller
8 dans cette mer -- ou cet océan de documents, notamment, lorsqu'on me les
9 communique au dernier moment, comme cela est le cas à présent, je n'ai pas
10 le temps de le consulter à présent.
11 M. MILOSEVIC : [interprétation]
12 Q. Mais, bon, Monsieur Tihic, vous dites que la plupart ne voulaient pas
13 que la JNA fasse partie des activités de la TO. Quand vous dites "la
14 plupart" ou "la majorité", vous parlez des Musulmans du territoire de la
15 municipalité de Bosanski Samac, n'est-ce pas ?
16 R. J'ai déjà dit que nous avions souhaité que la JNA et la TO coopèrent
17 dans le cadre du maintien de l'ordre et du respect de la loi. Nous ne
18 voulions pas que la JNA seule soit garante de la sécurité. Les Croates et
19 les Bosniens s'étaient opposés à la chose. C'est à peu près ainsi que ça
20 s'est passé.
21 Q. Bien. Mais vous dites qu'il avait été question d'organiser la défense
22 de la ville avec l'armée, mais la plupart ne volait pas que l'armée se
23 joigne aux activités de la Défense territoriale, là vous êtes tout à fait
24 non ambigus pour ce qui est de vos propos. Vous parliez là donc des
25 Musulmans et des Croates.
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1 R. Je parle là des Musulmans, des Croates et des autres qui s'étaient
2 opposés au fait que la JNA soit seule à se porter garante. Nous ne lui
3 faisions pas confiance.
4 Q. Mais pourquoi la JNA voulait-elle se porter garante si le lieutenant-
5 colonel Nikolic était venu pour organiser ensemble la défense de la ville ?
6 C'est ce que vous avez dit ?
7 R. Il n'a pas demandé lui.
8 Q. C'est ce que vous dites ?
9 R. Je ne sais pas comment cela a été formulé. Je vous dis ce qu'il en est.
10 Q. Je vous dis ce qui est écrit ici : Il venait pour discuter avec les
11 gens de la ville au sujet de la défense de celle-ci, C'est ce qui figure
12 dans votre déclaration. Mais quand vous dites que Nikolic avait demandé --
13 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Le témoin allait continuer. Vouliez-vous
14 dire, Monsieur, quelque chose -- Monsieur Tihic, ou pas ? Si ce n'est pas
15 le cas --
16 LE TÉMOIN : [interprétation] Signe de la main.
17 M. MILOSEVIC : [interprétation]
18 Q. Mais pour ce qui est de la défense de la ville, contre qui la ville
19 était-elle censée se défendre avec ses alentours ?
20 R. Il y avait des appréhensions variées. Les Serbes qui se trouvaient en
21 ville redoutaient eux de voir de l'autre côté de la Croatie, de l'autre
22 côté de la Sava de Croatie venir des forces du HOS, forces armées croates.
23 Nous redoutions -- nous --nous Musulmans qui étions majoritaires en ville
24 même -- nous redoutions que la JNA, de voir la JNA, la Défense territoriale
25 serbe s'emparer de la ville et commencer à faire ce qui s'est passé à
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1 Bijeljina et le long de la Drina, donc ce type de crimes qui ont été commis
2 là-bas.
3 Q. Mais, attendez, moi je vous pose une question, au sujet du fait de voir
4 Nikolic qui vous a demandé de faire quelque chose pour la défense de la
5 ville. Il ne sous-entendait pas que les Serbes allaient attaquer la ville.
6 Il demandait que tous ensembles vous organisiez la défense de la ville.
7 Donc contre qui ?
8 R. Le lieutenant-colonel Nikolic dans le public voulait se placer au-
9 dessus de tout le monde et adopter une attitude plus ou moins égale vis-à-
10 vis des forces croates et des forces serbes et il disait que la JNA était
11 censé nous protéger des uns et des autres. C'est du moins ce qu'il disait.
12 Q. Bien. Mais serait-il exact d'affirmer ce que vous dites, au paragraphe
13 17, à savoir que les membres de ce 4e Détachement ne faisaient que de
14 patrouiller que la nuit et notamment dans les parages de la Sava et de la
15 rivière Bosna ?
16 R. C'est ce que j'ai dit tout à l'heure, ils redoutaient l'arrivée
17 d'effectifs de Croatie ou de voir une attaque lancée en provenance d'un
18 village croate.
19 Q. Donc l'attaque dont vous parliez venait, devait venir, était censé
20 venir de l'autre côté de la Sava, donc en provenance de Croatie ?
21 R. Il y avait des appréhensions, disant qui les risquait de venir de là.
22 Q. Mais, s'agissant de la Défense territoriale organisée par les Musulmans
23 -- et je réfère notamment au paragraphe 13, de votre déclaration au
24 préalable -- vous dites que cela n'avait pas été constituée de soldats
25 professionnels, mais que cela était destinée à une autre défense en cas
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1 d'attaques extérieures. Et le problème, c'est que la JNA, un an auparavant,
2 avait confisqué toutes les armes, n'est-ce pas ?
3 R. Oui. C'est à peu près ainsi que ça s'est passé. Nous avions des gardes
4 villageoises ou municipales qui ne pouvaient protéger personne mais elles
5 pouvaient avertir la population, en disant qu'une attaque avait cours.
6 Q. Bien. Vous êtes en train de dire que les Musulmans de Bosanski Samac
7 n'avaient pas été armés.
8 R. Ils étaient armés, mais de façon insuffisante, je dirais partielle par
9 rapport aux autres qui, eux, avaient toutes sortes d'armes.
10 Q. Bien, Monsieur Tihic, au paragraphe 14, vous dites que, pendant un mois
11 avant le 17 avril 1992, où vous dites qu'il y a eu des conflits à Bosanski
12 Samac, vous, au SDA, aviez organisé des gardes et des patrouilles, n'est-ce
13 pas ?
14 R. Oui.
15 Q. Je suppose donc que ces patrouilles n'étaient pas armées puisque vous
16 dites que vous n'aviez pas d'armes, vous-même.
17 R. A cette à l'époque-là, il y avait déjà eu un partage du MUP. Les
18 policiers serbes étaient dans les villages Serbes. Les policiers croates
19 étaient dans les villages croates. Et donc, il n'y avait plus de sécurité.
20 Notre garde qui était aux abords de la ville et qui se servait des
21 véhicules avait des armes dans les véhicules mais ils ne le montraient pas.
22 Q. Donc ils avaient des armes ?
23 R. Oui.
24 Q. Bien. Mais, s'agissant de la conclusion au terme de laquelle il y
25 aurait une éventuelle attaque des Serbes à redouter, au vendredi soir,
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1 donc, pour le week-end, vous avez vu des familles serbes entières quitter
2 la ville, en disant aux voisins que la ville allait être attaquée. C'est ce
3 que vous avez déclaré ?
4 R. Oui.
5 Q. Donc partant du fait que vous avez vu des Serbes redouter des attaques
6 venant de l'autre côté de la Sava, en provenance de Croatie, donc vous
7 tirez une conclusion au terme de laquelle ce sont les Serbes qui
8 s'apprêtaient à attaquer Bosanski Samac ?
9 R. Oui, parce que, les jeudi et vendredi, les Serbes s'en allaient et ils
10 disaient que la JNA disait que les Serbes allaient attaquer et non pas les
11 Croates.
12 Q. Mais, attendez, au SDA, vous aviez décidé d'organiser des gardes et des
13 patrouilles pour vous défendre des Serbes qui avaient, eux, quitté la ville
14 avec leurs familles parce qu'ils redoutaient des attaques de Serbes sur la
15 ville ?
16 R. Nous ne redoutions pas les Serbes locaux. Nous avions redouté les
17 unités spéciales de Serbie et de la JNA. Nous n'aurions jamais fait la
18 guerre avec les Serbes locaux, soyez-en convaincu.
19 Q. Mais, attendez, dans votre déclaration, vous avez parlé des Serbes
20 locaux.
21 R. J'ai dit qu'ils quittaient la ville, mais je n'ai pas dit qu'ils
22 allaient nous attaquer.
23 Q. Mais, pour ce qui est de ceux qui avaient constitué ce 4e Détachement,
24 vous en avez parlé dans ce sens-là également. Vous n'en avez pas parlé
25 seulement en disant qu'ils avaient quitté la ville.
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1 R. J'ai parlé de ce 4e Détachement et je sais que les gens avaient été
2 déçus, en voyant où cela menait parce que les membres des unités spéciales
3 venues de Serbie les internaient, les plaçaient en détention, eux aussi.
4 Q. Bien. J'espère qu'on y viendra quand même tout à l'heure, mais, dans un
5 advenant à votre déclaration au préalable, il y a des extraits de
6 l'interview, aux paragraphes 62 et 63, vous affirmez que cette interview,
7 que vous avez accordée sous la contrainte, et on vous avait dit de dire que
8 personne ne vous avait battu et que la police vous traitait bien. C'est
9 bien ce que vous avez déclaré ?
10 R. A Bosanski Samac, vous parlez de la télévision de Novi Sad, je crois
11 que c'est à ces interviews-là que vous vous référez.
12 Q. Veuillez m'indiquer, il vous a été dit de dire que l'on ne vous avait
13 pas été battu, n'est-ce pas ?
14 R. Oui.
15 Q. Et vous n'avez pas parlé de ces sujets-là.
16 R. Il a été procédé à une pause dans les interrogatoires et il y avait ce
17 journaliste. Todorovic m'a dit que si l'on me demandait si j'étais battu,
18 de dire que je n'avais pas été battu. C'est ainsi que j'ai répondu.
19 Q. Bon. Mettons de côté les pressions exercées sur vous pour dire que vous
20 n'avez pas été battu. Mais, au sujet de l'armement des Musulmans à Bosanski
21 Samac, ce que vous avez déclaré, avait-il été exact ou pas ? Je vais être
22 plus précis. Est-il exact de dire qu'Alija Fitozovic, au nom du comité
23 local du SDA, avait eu des communications avec Slavonski Brod, à partir de
24 quoi, il s'était procuré des armes. Cela se trouve en page ERN 0089624.
25 Est-il exact de dire ce que vous avez dit ?
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1 R. Je sais qu'Alija Fitozovic avait eu des contacts avec cette cellule de
2 Crise. De là, à savoir s'il avait une communication permanente avec eux,
3 ça, je ne le sais pas.
4 Q. Donc c'est là qu'il se procurait des armes ?
5 R. Oui, et des munitions comme je l'ai dit dans mes propos précédents.
6 Q. Mais, en page 624, lignes 22, 23, est-il exact de dire qu'il avait été
7 assisté par Rifat Atic et Izet Izetbegovic ?
8 R. Oui.
9 Q. Cela est exact également.
10 R. C'est exact.
11 Q. Vous avez déclaré que cette question des armements au sein du SDA avait
12 grêvé constamment vos réunions aux échelons les plus bas et aux échelons
13 les plus élevés ?
14 R. Oui. Les gens se sentaient menacés. Ils avaient peur. Tout le monde
15 avait des armes alors qu'eux n'en avaient pas. Ils disaient : Président,
16 qu'allons-nous faire ? On vous nous tuer. On vous nous égorger. Alors, on a
17 ni armes, ni argent et on ne sait pas ce qui nous convient de faire.
18 Q. Mais, Monsieur Tihic, serait-il exact de dire qu'en votre qualité de
19 président, vous aviez chargé Izet Izetbegovic, en sa qualité de vice-
20 président, ainsi qu'Alija Fitozovic, qui était président de la commission
21 chargée de la Sécurité, de veiller à l'armement et que ces deux-là avaient
22 réalisé tous les contacts à cet effet et qu'ils avaient procédés aux
23 activités de coordination au sein du parti ?
24 R. Oui. Je les avais chargé de veiller à la sécurité.
25 Q. Mais serait-il exact de dire que, pour ce qui est de l'armement, Izet
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1 Izetbegovic avait contacté une personne que vous connaissiez sous le nom de
2 Senaid [phon] et, en fait, il s'agissait de Senaid Memic [phon] ? C'est à
3 la page 0089265.
4 R. C'est exact.
5 Q. Serait-il exact de dire que les premières quantités d'armes livrées au
6 SDA de Bosanski Samac avaient contenues 30 fusils automatiques et cinq
7 pistolets ? C'est ce qui figure à la page 625.
8 R. C'est ce qu'Izet Izetbegovic a reçu de Memic.
9 Q. Ces armes sont venues de Croatie.
10 R. Oui, cela est venu par le billet de Senaid Memic que vous avez
11 mentionné tout à l'heure.
12 Q. Bien. Aussitôt après, il y a eu une deuxième livraison où il y avait 50
13 fusils automatiques et deux lance-grenades ?
14 R. C'était juste avant l'attaque sur Samac. Ceci a été installé dans les
15 locaux de la Défense territoriale.
16 Q. Moi, je ne fais qu'énumérer. Ce sont là les armes que vous aviez, donc,
17 procurées et vous avez indiqué tout à l'heure que vous n'aviez pas d'armes.
18 Or, il a été livré ces armes-là, début janvier, février, donc quatre mois
19 avant les événements d'avril à Bosanski Samac. C'est vrai ou faux ?
20 R. Ça se situe au niveau du mois de mars, avril. Peut-être au niveau de
21 février.
22 Q. Bien. Nous vous avons entendu dire que s'agissant d'une attaque ou
23 d'une prétendu attaque des Serbes sur la ville, vous en avez attendu un
24 mois avant, vers la mi-mars.
25 R. Il avait été question d'une attaque, mais nous ne savions pas quand
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1 est-ce qu'elle allait avoir lieu.
2 Q. Mais, bien, avant cela, et vous ne contestez pas que vous vous étiez
3 procurés des armes dès le début de l'année et qu'avec le SDA vous vous
4 prépariez soit pour la défense, soit pour une attaque. Vous vous prépariez
5 pourquoi ?
6 R. Nous nous préparions pour la défense. Nous n'étions que 8 % là-bas et
7 nous voulions préserver ce qui était à nous autant que faire se pourrait.
8 Q. Mais ce Fitozovic et l'autre, avaient-ils assuré également des
9 munitions, des grenades, des grosses quantités d'explosifs ? Qu'est-ce que
10 vous avez affirmé à l'occasion de l'interview ?
11 R. Vous ne faites que répéter une même chose. Vous mentionnez les bombes
12 cinq fois. Vous mentionnez les mêmes munitions cinq fois.
13 Q. Mais il s'agissait d'une quantité de 100 kilos d'explosifs qui était
14 destinée à des opérations diversifiées sur le territoire de la
15 municipalité ?
16 R. Il se peut qu'il y ait eu 100 kilos. Je n'en sais rien. Je n'ai jamais
17 vu cela, moi-même et je crois que toute cette quantité avait été saisie,
18 par la suite Fitozovic.
19 Q. Mais on retrouvé une certaine quantité, comme on le dit sur cette page
20 623, dans les lignes 10 à 21, on dit que cela a été retrouvé dans la maison
21 d'Alija Fitozovic et dans les locaux de la communauté islamique, à savoir,
22 dans les locaux du siège du SDA.
23 R. Je crois que cela a pu être retrouvé dans la maison d'Alija Fitozovic,
24 pas dans les locaux du SDA.
25 Q. Mais moi, je vous donne lecture de ce qui figure dans cette page, qui
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1 se termine par le 623, où vous y dites. On vous demande de donner lecture
2 des chiffres -- des numéros plus lentement pour les interprètes.
3 L'ACCUSÉ : [interprétation] 00829 --
4 L'INTERPRÈTE : L'interprète n'a pas saisi une fois de plus.
5 M. MILOSEVIC : [interprétation]
6 Q. Vous avez ici un bulletin de réception qui parle d'armes et de
7 munitions. Cent kilos d'explosifs. Une partie des explosifs a été retrouvée
8 dans son appartement, et l'autre dans les locaux de la communauté
9 islamique, à savoir, le siège du SDA. Est-ce bien ainsi que ça s'est passé,
10 Monsieur Tihic ?
11 R. Je ne pense pas que cela ait pu être retrouvé dans les locaux du SDA.
12 Peut-être chez lui, mais pas dans les locaux du SDA.
13 Q. Moi, je ne fais que donner lecture de ce qui est dit ici.
14 R. Mais fort bien.
15 Q. Serait-il exact de dire qu'en la même occasion, lorsque l'on a retrouvé
16 des explosifs chez Fitozovic, il a été retrouvé un organigramme des lignes
17 de haute tension à faire sauter, ou d'autres qui ont déjà été plastiquées ?
18 Le savez-vous ?
19 R. Non. Je ne sais pas. Il avait travaillé dans l'entreprise de
20 distribution de l'électricité. Il se peut qu'il ait disposé de certains
21 schémas ou de certains plans de cette nature.
22 Q. Bien. Je voudrais maintenant vous rappeler que vers la fin de cet
23 entretien avec les journalistes, on vous avait demandé s'il y avait
24 possibilité de voir les Serbes et les Musulmans continuer à vivre
25 normalement. Et on vous a demandé si vous aviez des conseils à donner aux
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1 populations, à l'une et à l'autre de ces populations. Je suppose que vous
2 vous en souvenez. Et je tiens à vous rappeler ce que vous avez répondu.
3 Vous dites ---
4 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Voyons d'abord si le témoin se souvient
5 de ce dont vous êtes en train de parler.
6 Vous en souvenez-vous, Monsieur Tihic ?
7 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Je m'en souviens de cela.
8 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Allez-y.
9 L'ACCUSÉ : [interprétation] Fort bien, Monsieur May.
10 M. MILOSEVIC : [interprétation]
11 Q. Voilà ce que vous avez répondu : "Je me félicite de la question que vous
12 m'avez posée. Si vous m'aviez demandé cela avant tous ces événements, je
13 crois avoir pu vous donner la même réponse. Mais je crois que ceux qui se
14 trouvent à la tête des activités politiques devraient voir quelles sont les
15 conséquences de toutes ces souffrances et l'on aboutirait plus aisément à
16 des accords sur toute question. Suite à ces réflexions en Bosnie, nous
17 déduisons qu'il nous faut vivre ensemble. Nous allons peut-être avoir trois
18 républiques, voire trois cantons, ou appelons-le comme on le voudra, mais
19 il faudra bien coopérer. Nous résidons sur un territoire bosniaque, un
20 territoire yougoslave. Et les frontières qui seront tracées entre les
21 cantons ou entre les états, probablement au bout de cinq ans ou dix ans,
22 disparaîtront. Et pourquoi nous tuerions-nous mutuellement pour ces
23 frontières ? Nous estimons que cette frontière, cette Bosnie indépendante
24 ou reconnue internationalement, ne mérite pas autant de victimes. Tous les
25 partis qui représentent la population musulmane devraient en tenir compte.
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1 Il vaut mieux reconnaître une population qui constitue le tiers de la
2 Bosnie-Herzégovine, il vaut mieux la reconnaître plutôt que de
3 l'emprisonner. Nous ne pensons pas qu'ils doivent être placés en détention,
4 même s'ils ne constituent qu'un cinquième. S'ils veulent constituer une
5 république serbe de Bosnie-Herzégovine, qu'ils le fassent. Nous voudrions
6 que cela soit concerté. Nous ne pouvons contraindre personne à ceci ou à
7 cela."
8 R. Oui. C'est ce que j'ai déclaré. Mais on sait fort bien dans quelles
9 circonstances cette déclaration a été faite.
10 Q. Mais personne ne vous avait suggéré la nécessité d'apporter des
11 explications aussi vastes. Et on ne vous a certainement pas suggéré qu'il
12 était inutile de s'entretuer pour une Bosnie-Herzégovine unifiée.
13 R. C'est certain que pour ce qui est de la Bosnie-Herzégovine et de la
14 Communauté européenne, il s'agit d'une politique d'extinction ou
15 d'effacement de ces frontières et de coexistence en dépit des différences.
16 Q. Mais vous avez décidé de créer, de mettre en place cette frontière,
17 n'est-ce pas, Monsieur Tihic ?
18 R. Non, ce n'est pas exact. Nous avons eu bon nombre de discussions pour
19 ce qui est de la Yougoslavie et de la création d'une communauté de peuples
20 égaux en droit. Malheureusement, les Serbes et les Croates, et notamment
21 les hommes politiques qui avaient représenté le peuple serbe, n'avaient pas
22 voulu le faire. Ils ont voulu que les Serbes dominent, et ce qui a conduit
23 à la désintégration de la Yougoslavie.
24 Q. Mais la Yougoslavie avait été la meilleure des solutions possible pour
25 tous les peuples de la Yougoslavie ?
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1 R. Oui. C'était la meilleure solution possible, mais les Bosniens n'ont
2 pas pu préserver cette Yougoslavie à eux seuls.
3 Q. Bien. Monsieur Tihic, c'est là une position que vous avez formulée,
4 qu'on ne vous a pas imposée.
5 R. Ecoutez, les déclarations que l'on fait au sein d'un poste de police où
6 on vous a battu auparavant, où on vous a fait tout cela, et où Crni vient
7 vous voir, et vous dire que : "Vous descendrez par la suite le voir lui en
8 affirmant que vous avez donné les coordonnées à ceux qui avaient tiré à
9 partir de la Slavonie." Et bien, consciemment ou inconsciemment, vous
10 faites des déclarations qui abondent dans le sens ce que pense -- ce que
11 lui qui vous l'a demandé. Et vous seriez peut-être plus à même de juger du
12 degré de liberté dont on dispose quand on fait ce type de déclaration.
13 Q. Au paragraphe 17, vous dites qu'avant -- une vingtaine de jours avant
14 l'attaque, les membres de ce 4e Détachement, un Serbe et plusieurs
15 Musulmans avaient tiré en l'air, et vous dites que deux personnes avaient
16 été blessées à ce moment-là. C'est ce que vous avez dit ?
17 R. Oui. Ils ont ouvert le feu en direction de ce restaurant. Et c'est à ce
18 moment-là que la police est arrivée. Ils avaient pensé qu'on leur tirait
19 dessus et ils ont riposté. Et c'est là qu'il y a eu ces personnes blessées.
20 Q. Bien. Mais ces deux personnes blessées dont vous parlez, c'étaient des
21 Musulmans, Nijaz Ramusovic et un certain Mersad, étaient précisément des
22 membres de ce 4e Détachement ?
23 R. Oui.
24 Q. Et on leur avait tiré dessus sans raison aucune.
25 R. On leur a tiré dessus avec une raison. Ils avaient tiré les premiers.
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1 La police a riposté et il est vrai que ces deux-là ont été blessés.
2 Q. Mais attendez. D'après ce que j'ai comme information, c'étaient des
3 membres du 4e Détachement. C'étaient des Musulmans.
4 R. Ils étaient membres du 4e Détachement. Et les autres, c'étaient des
5 policiers.
6 Q. Bien. Mais vous savez, j'imagine, que Ramusovic et
7 Mersad --
8 R. Mersad.
9 Q. Bien. Mais j'ignore exactement son prénom. Vous pouvez me rectifier.
10 D'après les renseignements dont je dispose, ils n'ont pas ouvert le feu.
11 Ils ont fait l'objet d'une embuscade, parce que précisément ils faisaient
12 partie de ce 4e Détachement.
13 R. Ce n'est pas exact, voyez-vous.
14 Q. Je vois.
15 R. Ce sont eux qui ont tiré. Et c'est une fois qu'ils ont eux tiré que la
16 police a ouvert le feu sur eux.
17 Q. Et savez-vous que ceux qui leur ont tiré dessus étaient Adis
18 Izetbegovic et Saja Srna, des membres de la police de réserve ?
19 R. Oui.
20 Q. Donc ces deux réservistes de la police ont tiré sur ces deux Musulmans.
21 Des deux côtés, il s'agissait de Musulmans.
22 R. Oui.
23 Q. Et ces deux policiers étaient des policiers qui étaient en service.
24 Mais cet Adis Izetbegovic, est-il également un parent d'Alija Izetbegovic ?
25 R. C'est le fils de Izet Izetbegovic, donc c'est un lointain parent
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1 d'Alija Izetbegovic.
2 Q. En plus de ces Musulmans, vous connaissez sans doute Fadil Topcagic,
3 Kadir Korolic, Fehir Kapetanovic, Alija Palesovic [phon], Sali Sadinovic,
4 Ibro Ibrolic [phon], Aslo Bajaktarevic [phon], Dzemal Jasenica [phon] --
5 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Non. Il est inacceptable que vous
6 procédiez de la sorte et que débitiez ainsi une liste de noms. Où voulez-
7 vous en venir, quelle est votre question ? Dans quel contexte le témoin
8 devrait-il connaître ces noms ?
9 M. MILOSEVIC : [interprétation]
10 Q. Et bien, le lien c'est que les Musulmans qui ont tiré sur les deux
11 Musulmans qui appartenaient au 4e Détachement qui étaient chargés de la
12 sécurité de la municipalité, ils avaient été qualifiés de traîtres, de
13 Chetniks, de vojvodas. Est-ce bien exact, Monsieur Tihic ?
14 R. Les noms que vous avez donnés, ce sont les noms de membres du 4e
15 Détachement de la JNA.
16 Q. Et ceux qui ont tiré sur ces personnes, est-ce qu'on les a qualifiés de
17 traîtres, de vojvodas chetnik ?
18 R. Pas les deux qui ont tiré sans doute, mais ceux qui étaient membres du
19 4e Détachement, ils étaient qualifiés de la sorte effectivement. On disait
20 que c'était des collaborateurs de la JNA, que c'était des vojvodas chetnik,
21 mais toutes, bien entendu, dépendaient du poste occupé par chacune de ces
22 personnes.
23 Q. Je n'ai même pas lu toute la liste parce que M. May m'a interrompu,
24 mais j'imagine que vous connaissez tout ce monde, tous ces gens-là de noms
25 et qu'il s'agissait tous des membres du 4e Détachement, de gens qui étaient
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1 présentés comme des traîtres parce qu'ils collaboraient avec la JNA, n'est-
2 ce pas ?
3 R. Je connais la plupart d'entre eux et c'est ainsi que les considérait
4 l'opinion publique.
5 Q. Vous souvenez-vous que le 12 avril 1992, Alija Izetbegovic a ordonné
6 une attaque tout azimut contre une caserne de la JNA en Bosnie-
7 Herzégovine ?
8 R. Je ne m'en souviens pas.
9 Q. Est-il exact que le 13 avril, Mato Nujic, un membre de l'assemblée
10 municipale, le président de l'assemblée municipale a donné un ordre pour
11 que l'état major de la Défense territoriale de la municipalité établisse
12 une unité ?
13 R. Oui, c'était dans le cadre de la loi.
14 Q. Vous souvenez-vous que le 16 avril, Marko Bozanovic, commandant de
15 l'état major de la Défense territoriale, a informé l'état major de Sarajevo
16 que le 15 avril à Bosanski Samac, un état major municipal avait été mis en
17 place qui comptait quelques 1 800 appelés militaires. Il s'agissait
18 exclusivement de Croates et de Musulmans ?
19 R. Je ne pense pas qu'il s'agissait exclusivement de Croates et de
20 Musulmans. Je crois qu'il y avait également des Serbes, quant à savoir si
21 c'est exactement le chiffre qui figure dans sa lettre, je ne sais pas.
22 J'imagine qu'il fournissait des informations au sujet de la mise en place
23 de cet état major. Le nombre de soldats impliqué, la composition ethnique,
24 tout cela, je ne sais pas. Mais quoiqu'il en soit, parmi eux il y avait des
25 Serbes. Il y en avait moins que les autres mais il -- leur proportion
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1 correspondait à leur proportion dans la population de la municipalité.
2 Q. Est-il exact que le 16 et le 17 avril, des formations croates armées
3 ont essayé de franchir la Sava au moyen du pont, pour lancer une attaque
4 contre Bosanski Samac avec les unités croates ?
5 R. Ce n'est pas vrai.
6 Q. Trois personnes ont trouvé la mort au cours de ces offensives.
7 Veuillez, s'il vous plaît, essayer de vous souvenir de ce 16 et de ce 17
8 avril.
9 R. Non. Ces jours-la, des unités spéciales venant de Serbie ont procédé
10 une attaque. La JNA et les forces de la Défense territoriale serbes eux
11 aussi ils ont attaqué Samac.
12 Q. Et d'où viennent ces -- d'où sortez-vous ces unités spéciales de
13 Serbie ?
14 R. Ils sont -- ils ont atterri dans -- depuis Batkusa dans des
15 hélicoptères de la JNA.
16 Q. Est-ce qu'il s'agit de cette unité de la JNA ?
17 R. Je l'ignore. C'était les Bérets rouges. C'est la JNA qui les a fait
18 venir, qui les a emmenés sur place.
19 Q. Mais d'après ce que vous savez, c'est la JNA qui les a emmenés à cet
20 endroit.
21 R. Oui. Un client est venu me voir à mon cabinet et c'est lui qui m'a dit
22 cela. Il m'a dit que la JNA avait amené les Bérets rouges sur place.
23 Q. Vous ignorez toutes des personnes qui ont été tuées dans l'attaque
24 menée par les forces croates -- les formations armées croates qui ont voulu
25 traverser la rivière.
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1 R. Ce ne sont pas les formations armées en provenance de Croatie qui ont
2 essayé de traverser la rivière. Samac a été attaquée par les membres de ces
3 unités spéciales, et ils ont tué une personne serbe par erreur. Il n'y a
4 qu'une seule personne qui a trouvé la mort. Peut-être trois. Je ne suis pas
5 sûr.
6 Q. Mais vous savez que ces personnes ont été tuées par erreur et pas
7 pendant l'attaque. Est-il exact que le 20 avril ou plutôt le 18 avril une
8 nouvelle attaque a été lancée --
9 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Il n'en sait rien. Vous continuez à
10 présenter votre point de vue, et vous insistez lourdement là-dessus. Or ce
11 que nous souhaitions entendre ce n'est pas votre opinion mais ce que le
12 témoin a à nous raconter sur la chose. C'est ça qui compte et non pas votre
13 point de vue. Donc vaut mieux -- il vaut mieux que vous posiez vos
14 questions, et que vous acceptiez la réponse qui vous est donnée sans vous
15 lancez dans des débats sans fin et tendancieux. Veuillez poursuivre. Le
16 temps presse et l'heure tourne.
17 L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais, Monsieur May --
18 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Cessez de polémiquer. Cessez d'ergoter.
19 Continuez.
20 L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais c'est exactement ce que je fais, mais vous
21 ne semblez pas vous rendre compte que je parle des questions au sujet de
22 dates différentes. D'abord j'ai posé une question au sujet du 16 et du 17.
23 La 17 n'est pas vrai. Ensuite, j'ai posé une question au sujet du 18.
24 R. Le 18, j'étais au camp. J'ignorais ce qui se passait ailleurs.
25 Q. Avez-vous connaissance d'une attaque sur une colonne de femmes et
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1 d'enfants venant de Trnje vers Prud ?
2 R. Quand ?
3 Q. Le 19 avril.
4 R. À ce moment-là j'étais au camp.
5 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Il vous a dit, il vous a répondu qu'il
6 était au camp. Il faut écouter ce qu'il vous dit. Veuillez poursuivre.
7 L'ACCUSÉ : [interprétation] Bien, Monsieur May. Je vais suivre l'ordre
8 chronologique de ces dates.
9 Q. Monsieur Tihic, savez-vous quoique que ce soit au sujet de la chose
10 suivante : 108, la 108e, la 124e et la 139e Brigade des ZNG sont venues de
11 Croatie en traversant la rivière ?
12 R. Je ne sais pas, mais je le savais si ça s'était passé.
13 Q. Vous ne pouviez pas répondre à ma première question parce que vous
14 étiez au camp. Mais ça que je viens vous demander, vous devriez le savoir.
15 R. Je l'aurais su si un tel nombre d'hommes et de brigade avaient traversé
16 la rivière pour venir à Samac.
17 Q. Avez-vous appris quoique ce soit au sujet après votre détention au
18 camp ?
19 R. Non.
20 Q. Vous ignorez tout de la présence de ces brigades dans la région ?
21 R. Je sais qu'ils étaient d'Orasje, Derventa, Brod.
22 Q. Tout cela c'est sur le territoire de la Bosnie-Herzégovine. Est-ce
23 qu'il s'agit toutes de forces armées de la République de Croatie ?
24 R. Les unités que vous avez citées, étaient des unités du HVO, des unités
25 des Croates en Bosnie-Herzégovine.
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1 Q. Et vous ignorez tout d'unité de la République de Croatie qui était
2 présente sur le territoire de la Bosnie-Herzégovine ?
3 R. Non, pas pendant cette période.
4 Q. Fort bien. Maintenant revenons en à ce 4e Détachement. Ces Musulmans
5 dont j'ai énumérés le nom et vous avez considéré qu'on les considérait
6 comme des traîtres, et cetera. Est-ce que c'était des gens qui sont membres
7 de la JNA ou de la Défense territoriale ?
8 R. De la JNA, parce que le 4e Détachement c'était officiellement,
9 légalement, et dans la réalité une unité qui appartenait à la JNA.
10 Q. Bien, en dépit de cet ordre qui interdisait -- les interdisait de
11 rejoindre la JNA, c'était des membres de la JNA et non pas de la Défense
12 territoriale. Très bien, Monsieur Tihic.
13 Au paragraphe 16, vous dites que le 16 avril, il y a eu une réunion
14 conjointe réunissant tous les présidents des partis, et l'objectif c'était
15 de décider qui allait décider défendre telle partie de la ville en cas
16 d'attaque par les forces armées croates venant de l'autre côté de la Sava -
17 - de l'autre rive de la Sava.
18 R. Non, pas en cas d'attaque par les forces croates. On a simplement
19 discuté d'éventuelles attaques. De manière générale, des attaques qui
20 auraient pu venir aussi bien du côté serbe que de la JNA ou du côté croate,
21 et le 4e Détachement craignait une attaque venant du côté croate, bien que
22 nous leur avons dit, vous n'avez qu'à patrouiller la rive ou -- les rives
23 de la Sava. Nous, quant à nous, craignons une attaque en provenance des
24 villages serbes, si bien que nous avons décidé de patrouiller de l'autre
25 côté.
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1 Q. Vous dites que la veille de l'attaque de Samac, les présidents de tous
2 les partis se sont réunis pour décider, Bosanovic, Fitozovic et Simo Zaric
3 se sont réunis pour décider qui protègerait telle partie de la ville. Les
4 Musulmans et les Croates ne pensaient pas que le HSO allait attaquer, mais
5 les Serbes ont pensé ça pouvait se produire.
6 R. Oui, c'est exact. On était tout là, et c'est effectivement de cela que
7 nous avons discuté.
8 Q. Et il y quelques instants vous avez dit que déjà à la mi-mars vous
9 saviez que les Serbes allaient attaquer Bosanski Samac. Là on voit que vous
10 avez une réunion, mais vous n'êtes sûr de rien, vous êtes en train de
11 négocier, de vous lancer dans des supputations sur l'origine potentielle ou
12 éventuelle d'une attaque et sur la manière de défendre la ville.
13 R. Voyez-vous, Monsieur Milosevic, on pensait que plusieurs possibilités
14 étaient envisageables. Mais en même temps on se disait, on pensait que ça
15 n'allait pas se passer, ça n'allait pas arriver et que les Serbes, les
16 Musulmans et les Croates tous autant que nous étions, nous sommes réunis
17 pour discuter si ces unités spéciales, si la JNA n'était pas venue, chez
18 nous jamais on n'aurait commencé ces combats.
19 Q. Mais est-ce qu'il n'y a pas encore quelques instants vous- n'avez vous
20 pas dit que le lieutenant-colonel Nikolic, et j'utilise là les -- vos
21 propres mots. Est-ce que vous n'avez pas dit qu'il avait essayé de se
22 mettre au-dessus de tout cela, prendre de la hauteur et de traiter les
23 Croates, les Serbes et les Musulmans de manière égale ?
24 R. C'est ce qu'il a dit, mais, en réalité, il donnait des armes uniquement
25 aux Serbes.
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1 Q. Très bien. Est-il exact que, même avant le 17 avril, il y avait
2 constamment des provocations armées de la part des membres de la 108e et de
3 la 129e Brigades des forces armées croates ?
4 R. Je n'en sais rien. En tout cas, cela n'a pas eu lieu à Samac.
5 Q. Est-il exact que Mato Nujic, le président de l'assemblée municipale, et
6 Mato Matarevic [phon] vous ont parlé personnellement d'un plan conjoint
7 envisagé en cas d'attaques par la ZNG, les HOS, les forces armées croates
8 et le HVO, attaques dirigées contre Bosanski Samac ?
9 R. Non. On ne m'en a pas parlé. D'ailleurs, je n'aurais pas donné mon
10 accord.
11 Q. Vous citez, dans un autre paragraphe, le paragraphe 22, de votre
12 déclaration, vous dites qu'Arkan a attaqué le poste de police de Bosanski
13 Samac.
14 R. Et bien, voyez-vous toutes ces unités spéciales, on leur donnait une
15 dénomination unique. On ne faisait pas la différence entre les Loups gris,
16 les hommes d'Arkan ou les autres unités. Mais il est exact que les spéciaux
17 -- les membres des unités spéciales ont attaqué le poste de police.
18 Q. Bien. Mais là vous parlez d'Arkan. Or d'après les informations que je
19 dispose, qui ont été réunies par mes collaborateurs. Arkan n'est jamais
20 venu à Bosanski Samac.
21 R. Je parlais ici des hommes de ces unités.
22 Q. Mais de quelles unités parlez-vous ? Il disposait uniquement d'un petit
23 groupe de volontaires. Il n'avait pas d'unités.
24 R. C'est de cette manière qu'ils se présentaient, qu'ils se comportaient,
25 les hommes d'Arkan. Vous dire combien d'hommes comptait cette unité, je
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1 n'en sais rien.
2 Q. Bien. Mais, pendant tous ces événements, est-ce qu'il vous est arrivé
3 de voir Arkan, que ce soit à Samac ?
4 R. Non.
5 Q. Si j'ai bien compris, vous avez vu -- vous saviez qu'il y avait des
6 volontaires qui se trouvaient à Samac. Mais je ne vois ce qui vous permet
7 de faire le lien entre eux et les Arkan ou les Bérets rouges. Veuillez,
8 s'il vous plaît, nous expliquer de ce qu'il en est.
9 R. Et bien, voyez-vous, pour ce qui est des Bérets rouges, j'ai déjà
10 expliqué comment ils étaient arrivés à Samac. Ils sont arrivés dans des
11 hélicoptères de la JNA et ils avaient les insignes correspondants. Je
12 connaissais les hommes d'Arkan parce qu'ils étaient au camp. Ils nous ont
13 forcés à entonner des chants. Ils nous ont passés à tabac, et cetera.
14 Q. A Samac ?
15 R. Oui, à Samac. Ils nous ont forcé à entonner des chants au sujet des
16 Tigres d'Arkan. J'ignore combien ils étaient. On ne pouvait pas leur
17 parler, avoir une conversation normale avec eux. On ne pouvait pas les
18 regarder dans les yeux. Il fallait toujours nous tenir la tête baissée. On
19 ne cessait de nous passer à tabac. On était obligé de chanter des chansons
20 au sujet des Tigres d'Arkan, mais pour vous dire s'ils étaient cinq ou 50,
21 je n'en sais rien.
22 Q. Mais c'est justement la raison pour laquelle je vous pose cette
23 question parce que, d'après les informations qui ont été réunies par mes
24 collaborateurs, Arkan n'est jamais allé à Bosanski Samac. Mais poursuivons
25 l'examen de votre déposition.
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1 Peu après ces événements, vous avez été arrêté, en avril. Vous avez été
2 détenu au poste de police de Samac après les événements du 18 avril.
3 R. Au QG de la Défense territoriale.
4 Q. Il s'agissait donc du QG de la Défense territoriale ?
5 R. C'était dans la même rue. Le poste de police donnait sur le QG de la
6 TO. Ils se trouvaient en face et moi j'étais emprisonné là dans ces deux
7 endroits, à différents endroits.
8 Q. Au paragraphe 29, il est dit que vous avez fait appel par la radio aux
9 combattants musulmans pour qu'ils cessent les combats. Et, ensuite, vous
10 dites qu'un soldat vous a dit que vous étiez libre et que vous pouviez
11 rentrer chez vous.
12 R. Et bien, vous savez très bien ce qui s'est passé à ce moment-là.
13 Q. Moi, je vous demande simplement une question au sujet de ce qui figure
14 au paragraphe 29.
15 R. Il est exact que j'ai fait une déclaration. J'ai été interrogé par les
16 membres des unités spéciales, venant de Serbie, qui parlaient en dialecte
17 ékavien et ce sont eux qui m'ont obligé à faire cette déclaration à la
18 radio pour appeler à tous les Musulmans, alors qu'ils n'avaient jamais tiré
19 sur personne. Ils avaient simplement tiré en l'air pour semer la peur dans
20 la ville. Et moi, j'ai dû -- j'ai été obligé de dire ce qu'il m'a dit de
21 dire. J'ignore quel était son nom, Bailji [phon], ou quelque chose de ce
22 style. Il était de Serbie. Il m'a interrogé et il m'a dit -- il m'a ordonné
23 de dire cela à la radio.
24 Q. Vous parlez de volontaires, Monsieur Tihic, avez-vous une idée du
25 nombre de volontaires qu'il y avait qui venaient de Serbie, de Raska, du
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1 Sandzak ? Avez-vous une idée du nombre de milliers de volontaires dans les
2 forces armées de Bosnie-Herzégovine ?
3 R. Je ne pense pas qu'il y en avait beaucoup qui venait du Sandzak. Il y
4 avait des gens qui avaient quitté le Sandzak pour aller en Bosnie-
5 Herzégovine et qui étaient restés un certain temps. Mais, si vous pensez
6 des gens qui seraient venus directement du Sandzak pour se joindre, pour
7 participer à la défense de la Bosnie-Herzégovine, c'est peu probable. C'est
8 impossible parce qu'une partie de la Bosnie-Herzégovine était occupée, donc
9 il n'était pas possible de traverser.
10 Q. Donc vous dites qu'il n'y avait pas de volontaires venant du Sandzak
11 dans l'armée de Bosnie-Herzégovine ?
12 R. Il n'y avait pas des gens qui étaient présentés de la sorte, qui
13 étaient enregistrés de la sorte ou qui composaient des unités spéciales.
14 Q. Je ne parle pas d'unités spéciales qui auraient été composées
15 uniquement d'eux. Je voudrais simplement savoir s'il y en avait parmi vous.
16 R. Ils leur auraient été difficiles de venir en Bosnie-Herzégovine d'abord
17 et, s'il y en avait, je ne pense pas qu'ils étaient nombreux.
18 Q. Mais même le commandant de votre état major principal était Sefer
19 Halilovic.
20 R. D'abord, il était de la JNA. Il est venu en Bosnie par Gjakove.
21 Q. Est-ce que vous savez d'où il vient ? Est-ce qu'il est de Serbie, de
22 Prijepolje ? Est-ce qu'il a vécu en Bosnie ?
23 R. Il est possible qu'il ait été du Sandzak.
24 Q. Est-ce qu'il a fait son service militaire à Gjakove ?
25 R. Oui, à ma connaissance, c'est le cas.
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1 Q. Donc il n'a même pas fait son service militaire en Bosnie ?
2 R. Je l'ignore.
3 Q. Passons à autre chose. Vous n'avez pas répondu au deuxième volet de ma
4 question. Après avoir faite cette déclaration à la radio, après avoir lancé
5 cet appel à la radio, un soldat vous a dit que vous pouviez rentrez chez
6 vous.
7 R. C'est exact.
8 Q. Cependant, quand vous avez entendu les tirs à l'extérieur du bâtiment,
9 vous avez refusé de sortir dehors parce que vous avez craint d'être touché
10 et ils auraient pu dire, à ce moment-là, que vous aviez été abattu alors
11 que vous essayiez de vous enfuir.
12 R. Oui, parce que, quand on m'a emmené au poste de police, Todorovic a
13 chuchoté quelque chose à l'oreille d'un policier et j'ai pensé que c'était
14 quelque chose du style : "Il faut le liquider." Si bien que, quand ils
15 m'ont dit de partir, ils se tenaient derrière moi armés d'armes
16 automatiques et j'ai pensé que c'était l'occasion idéale pour eux de me
17 tuer.
18 Q. Moi je me contente simplement de reprendre vos propos. Vous dites, je
19 cite : "En fait, sur le principe que c'était volontairement que vous aviez
20 demandé à retourner au poste de police."
21 R. Effectivement, parce que je ne voulais pas me faire tuer.
22 Q. Mais vous dites que vous l'avez fait volontairement. Mais, s'il
23 s'agissait là des personnes que vous nous présentez, n'est-il pas exact que
24 ces gens auraient été capables, s'ils le voulaient de vous tuer au poste de
25 police ou n'importe où ailleurs s'ils avaient vraiment voulu faire ?
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1 R. Effectivement, ils auraient aussi pu me tuer au poste de police.
2 Q. Est-ce que, Monsieur Tihic, cela ne prouve pas qu'ils ne voulaient pas
3 vous tuer ?
4 R. Non, cela ne le prouve pas car, voyez-vous, je venais juste d'arriver
5 au poste de police et, immédiatement, ils m'ont emmené à la radio, à Radio
6 Samac. J'ignorais ce qui se passait, à ce moment-là, au poste de Police.
7 J'ignorais qu'il y avait déjà 50 personnes qui étaient détenues à cet
8 endroit que l'on torturait et que l'on passait à tabac. Moi, je pensais que
9 le poste de police était un endroit sûr. C'est pourquoi j'ai exprimé le
10 désir d'y rester.
11 Q. Bien. Vous nous avez expliqué la chose. Vous avez passé dix jours au
12 poste de police de Samac, n'est-ce pas ?
13 R. Oui, c'est exact.
14 Q. Veuillez parler distinctement, je n'avais pas entendu. Ensuite, vous
15 nous dites que dans cette interview que vous avez donnée au journaliste de
16 Borba, vous dites que vous aviez été passé à tabac par des gens qui
17 n'étaient pas des Serbes de l'endroit, mais des membres des unités
18 paramilitaires.
19 R. C'est ce qu'ils ont écrit. En fait, c'étaient des unités -- membres
20 d'unités spéciales de Serbie.
21 Q. Mais est-ce que c'étaient des unités paramilitaires ou pas, Monsieur
22 Tihic ?
23 R. Il n'était pas possible que ce fût des unités paramilitaires, vu les
24 armes dont ils disposaient, vu les uniformes qu'ils portaient. Moi, à mon
25 avis, il s'agissait d'unités spéciales.
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1 Q. Ça c'est votre opinion. Est-ce qu'il faisait partie de la Défense
2 territoriale ?
3 R. Non. Il s'agissait de leur propre chef. Ils n'écoutaient personne. Ils
4 avaient -- leur commandement se trouvait ailleurs.
5 Q. Mais s'ils refusaient d'écouter qui que ce soit, à ce moment-là, et ils
6 ne pouvaient faire partie des forces régulières --
7 R. Oui, mais ils bénéficiaient de l'appui, du soutien des forces
8 régulières pour ce qui est de l'armement et de tout le reste.
9 Q. Bien, Monsieur Tihic, cependant, vous affirmez, dans votre déclaration,
10 qu'à Batajnica et à Sremska Mitrovica, vous avez été passé à tabac,
11 maltraité par des membres de la JNA, ce qui je dois dire me paraît tout à
12 fait improbable; cependant, dans l'interview, que vous accordez au
13 magazine, au journaliste Borba --
14 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Il faut donner la possibilité au témoin
15 de répondre si c'est la thèse que vous avancez, Monsieur Milosevic.
16 Monsieur le Témoin, l'accusé nous dit qu'il est peu probable, selon lui,
17 que vous ayez été passé à tabac par des membres de la JNA à Batajnica et
18 Sremska Mitrovica. Veuillez, s'il vous plaît, répondre à cette question :
19 est-ce que vous avez été maltraité, passé à tabac par des membres de cette
20 organisation ?
21 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. J'ai été passé à tabac par des membres de
22 la JNA. Monsieur Milosevic, moi aussi, j'ai trouvé que c'était complètement
23 incroyable que des enfants, des soldats me passent à tabac juste simplement
24 parce que je m'appelais Sulejman -- des soldats de l'armée régulière, mais,
25 croyez-moi, je n'étais pas le seul à cet endroit. Il y en avait pas mal
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1 d'autres. Il y avait également là des réservistes et des soldats de l'armée
2 régulière.
3 M. MILOSEVIC : [interprétation]
4 Q. Monsieur Tihic, dans votre interview à Borba, vous dites : "Qu'au lieu
5 de vous garder simplement quelques heures en prison, ils vous ont gardé une
6 dizaine de jours. Et vous dites, je cite : "Inutile de vous dire ce qui
7 m'est arrivé ici ils m'ont passé à tabac, et cetera." Je cite un interview
8 que vous avez donné au quotidien Borba, un quotidien de Belgrade, vous
9 dites : "Ils m'ont menacé, m'ont passé à tabac, mais je dois dire que ce
10 n'était pas des Serbes de l'endroit -- des Serbes de la région, mais des
11 membres d'unités paramilitaires serbes qui occupaient la région. Les Serbes
12 de Bosanski Samac et de Brcko, eux, m'ont aidé, m'ont parfois donné des
13 vivres, essayaient de me consoler, en disant que tout se terminerait bien."
14 Voilà et ensuite le point important : "Mais c'est seulement quand ils m'ont
15 remis à la JNA que j'ai su avec certitude que j'étais sauvé."
16 Est-ce que c'est bien ce que vous avez dit ?
17 R. Oui, c'est ce que j'ai dit.
18 Q. Donc c'est seulement au moment où on vous a remis à la JNA que vous
19 avez été sûr que votre vie était sauvée, que vous étiez sain et sauf ?
20 R. Oui, à l'époque, c'est ce que je pensais parce que là-bas n'importe qui
21 aurait pu vous tuer sans raison, mais, si on se trouvait entre les mains de
22 la JNA, au moins ils prenaient notre nom, et cetera.
23 Q. Mais vous dites que vous étiez sauf désormais ?
24 R. Je vous donne simplement une idée de l'atmosphère qui régnait.
25 Q. Mais ça reflétait votre position -- votre point de vue réaliste. C'est
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1 seulement au moment où on vous a remis aux membres de la JNA que vous vous
2 êtes rendu compte que ça y est vous n'aviez pu à craindre pour votre vie ?
3 Bien, maintenant, pour ce qui est de la prison et des conditions de
4 détention à Sremska Mitrovica, vous dites que : "Cette prison et d'autres
5 prisons sont qualifiées de camp de concentration, mais il n'y a même pas le
6 C, enfin, même pas utiliser le C de camp. Ce n'est pas comme si on habitait
7 à la maison, mais on ne peut attendre grand-chose de plus. D'àprès tout mes
8 amis et moi-même, nous ne sommes pas des prisonniers; nous sommes des
9 otages. Nous ne sommes pas traités au mieux, mais personne ne pouvait être
10 content d'être derrière les barreaux." Est-ce bien ce que vous avez dit,
11 Monsieur Tihic ?
12 R. Je ne sais pas si c'est exactement ce que j'ai dit, mais je sais qu'a
13 Mitrovica, on a été passé à tabac après le petit déjeuner, après le
14 déjeuner, après le dîner, systématiquement. Jamais je n'ai été passé à
15 tabac autant dans ma vie qu'à Mitrovica. Et nos vies étaient en danger,
16 mais peut-être aie-je été plus en danger ailleurs, mais jamais je n'ai été
17 frappé, tabassé comme je l'ai été à Mitrovica. Voyez-vous, en trois ou
18 quatre mois, la JNA avait tellement changé. La JNA de Brcko, qui
19 interdisait que l'on nous passe à tabac, était devenu la JNA de Mitrovica,
20 où là on nous passait à tabac. On nous forçait à entonner des champs de
21 Chetniks, et tout cela. La situation était déplorable.
22 Q. Vous étiez prisonnier, vous étiez sous le contrôle de la JNA à Sremska
23 Mitrovica, n'est-ce pas ?
24 R. Oui, c'était un camp -- un camp de concentration au sein de la prison -
25 - au sein de l'ancienne prison.
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1 Q. C'était comme vous le dites : une institution qui était contrôlée par
2 la JNA, mais vous nous dites ici qu'on ne peut même pas qualifier ça de
3 camp ?
4 R. Ce n'est pas vrai. Lisez ma déclaration. Quand le directeur du camp m'a
5 fait sortir, m'a dit que Sky News allait m'interviewé, ainsi qu'un
6 journaliste de Borba, il m'a dit qu'il fallait que je dise que personne ne
7 nous passait à tabac, que les locaux étaient propres, qu'on pouvait se
8 promener, qu'on avait suffisamment à manger. Bien sûr, si on voulait être
9 échangé, il fallait dire cela, donc moi j'ai été obligé de dire cela. Je
10 devais le dire, bien entendu.
11 Q. A un moment donné, dans votre déclaration, vous confirmez ce que vous
12 dites dans votre interview et, dans d'autres parties de votre déclaration,
13 vous dites que, lorsque vous avez interviewé, c'était sous la contrainte et
14 vous dites avoir été passé à tabac à Sremska Mitrovica ?
15 R. Moi, ainsi que tout le monde.
16 Q. Vous dites que vous avez donné cette interview le 12 ou le 13 août
17 1993, vous avez été interviewé par la BBC ?
18 R. Je crois que c'était Sky News.
19 Q. Mais le 13 août, cette interview est parue dans le quotidien Borba de
20 Belgrade, n'est-ce pas ?
21 R. C'était deux ou trois jours avant mon échange.
22 Q. Dans le même paragraphe, vous dites que le lieutenant de la JNA le
23 nouveau directeur vous a dit de dire que personne ne vous avait passé à
24 tabac, que vous aviez à manger, que vous aviez des soins médicaux, et que
25 vous pourriez vous promener et que vous pouviez dire que les hommes d'Arkan
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1 vous avaient passé à tabac à Bosanski Samac et que vous disiez à la Croix
2 rouge que vous ne souhaitez pas retourner en Bosnie, mais que vous vouliez
3 retourner en Serbie ?
4 R. Oui. Je lui ai demandé : "Est-ce que je peux dire que j'ai été passé à
5 tabac en Bosnie ?" Et il m'a dit : "Mais comme tu veux, mais je ne te le
6 conseille pas ta fille habite, ta sœur habite à Rijeka. Ils peuvent aller à
7 Rijeka aussi."
8 Q. Mais, j'ai cette interview ici sous les yeux, Monsieur Tihic. Vous
9 dites qu'il vous a dit tout cela au sujet de l'alimentation, des
10 promenades, des soins médicaux. Montrez-moi -- montrez-moi le passage dans
11 cette interview, où vous parlez de l'alimentation, des promenades, des
12 soins médicaux. Montrez-moi où, dans cette interview, vous dites : vouloir
13 rester en Serbie. Montrez-moi tout cela. Tout ce qu'il vous dit, qu'il vous
14 a obligé à dire, on ne le voit nulle part dans cette interview. Vous n'avez
15 rien dit de tout cela. Vous nous dites qu'il vous a ordonné de dire tout
16 cela et que, sous la contrainte, vous avez dit ce qu'il vous avait ordonné
17 de dire.
18 Dans cette interview, il n'y a rien de tel.
19 R. Il a fallu que je le dise, mais qu'il l'ait publié, qu'il l'ait -- ça
20 été télévisé, mais c'est ce qu'ils nous ont dit de dire et c'est ce qu'on a
21 dit.
22 Q. Mais, Monsieur Tihic, on ne trouve rien dans le texte de l'interview de
23 ce que vous dites qui, en fait, est dans le texte. On voit, en fait, le
24 contraire de ce que vous dites ici, le contraire de ce que le lieutenant
25 vous a enjoint de dire. Est-ce que vous ne dites pas, dans l'interview, que
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1 vous aviez envie de rentrer chez-vous auprès de votre famille et que vous
2 faisiez appel aux autorités de Bosnie-Herzégovine pour quelles ne vous
3 oublient pas ?
4 R. C'est ce qu'ils m'ont dit de dire également. Je devais écrire une
5 lettre au président Izetbegovic pour lui demander la remise en liberté de
6 certains soldats, de façon à ce que nous puissions être libérés de la
7 prison de Mitrovica, ainsi que de Morina en Monténégro.
8 Q. Mais on vous a demandé de dire que vous souhaitiez rester en Serbie ?
9 R. Oui, c'est ce qu'on nous a dit de dire.
10 Q. Où bien que vous devriez demander de retourner auprès de votre famille,
11 selon ce que dit le texte de l'interview. Qu'est-ce qu'on vous a demandé de
12 dire ? Vous ne pouvez pas avoir reçu la jonction de dire les deux ?
13 R. On m'a demandé de dire que je souhaitais rester en Serbie et que je ne
14 souhaitais pas aller en Bosnie-Herzégovine.
15 Q. Mais vous n'avez pas déclaré cela dans le texte. Et on vous a dit de
16 dire que vous aviez assez à manger, qu'on vous faisait sortir pour des
17 promenades, que vous aviez des soins médicaux et que vous ne demandiez pas
18 à retourner en Bosnie-Herzégovine ? C'est bien ce que vous avez déclaré ?
19 R. C'est ce que j'ai déclaré et j'ai également parlé des conditions
20 d'hygiène, des promenades, et cetera.
21 Q. Pouvez-vous nous montrer cela dans le texte de l'interview ? Où est-ce
22 que c'est écrit ?
23 R. Je ne sais pas si c'est écrit dans les termes appropriés. Mais c'est ce
24 qu'on m'a dit de dire que -- parce qu'ils avaient peur de ce qu'on pouvait
25 dire. Ils ne voulaient pas qu'on parle des passages à tabac. Et c'était
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1 tout à fait normal, et nous n'avions pas envie d'en parler non plus parce
2 qu'une fois que les journalistes étaient partis, on restait avec eux.
3 Q. Fort bien. Je vois que ce que vous dites est exactement contraire à
4 cela. Ceci figure en page -- 00516378 et 00516379, numéro ERN. Donc merci,
5 Monsieur Tihic. Je n'ai pas d'autres questions.
6 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les
7 Juges, merci beaucoup. Mais il me semble que nous avons un problème. Il est
8 vrai que le document, auquel il a été fait référence, il y a un instant,
9 par M. Groome, a été communiqué au mois de mars, sans que le nom du témoin
10 soit indiqué. Et nous avons découvert uniquement aujourd'hui le nom de
11 celui, qui a fourni ce document, dans le cadre des notes personnelles de
12 cette personne. Donc, dans la pratique, M. Milosevic n'a pas pu, jusqu'au
13 jour d'aujourd'hui, examiner ce document et voir s'il y avait, dans ce
14 document, quelque chose qui valait la peine d'être contesté. Je considère
15 de mon devoir de souligner ce fait, et je crois que M. Milosevic devrait
16 avoir la possibilité de revenir sur ce document demain.
17 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Vous savez, le temps joue contre nous.
18 Ce document a été communiqué. Donc ce que nous pouvons faire, c'est
19 accorder un certain temps à M. Milosevic pour examiner le document et, s'il
20 contient des questions fondamentales qui exigent un contre-interrogatoire
21 complémentaire, nous pouvons demander au témoin de revenir dans ce
22 prétoire. Mais je pense qu'il serait préférable de terminer l'audition de
23 ce témoin aujourd'hui, plutôt que de perdre davantage de temps.
24 M. GROOME : [interprétation] Monsieur le Président, une proposition, si
25 vous me l'autorisez. Le témoin prévoit de partir demain après-midi, alors
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1 je pourrais demander que l'on ordonne à M. Milosevic de lire ce document
2 dans la soirée, et de dire à la Chambre demain matin, dès le début de
3 l'audience, si le document contient une question importante dont il
4 pourrait peut-être, à ce moment-là, traiter avec M. Tihic, puisque ce
5 dernier sera encore dans le pays.
6 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Oui.
7 Questions de l'Amicus Curiae, M. Tapuskovic :
8 Q. [interprétation] Monsieur Tihic, tout d'abord, j'aimerais vous demander
9 d'expliquer aux Juges un certain nombre de choses sur la base de votre
10 déclaration écrite de février 1995. Je ne sais pas si -- je ne pense pas
11 que M. Milosevic en ait parlé.
12 D'abord, le paragraphe 4, de votre déclaration écrite, vous l'avez sous les
13 yeux ? Intercalaire 2.
14 Vous dites là, donc au paragraphe 4, je cite : "Avant les élections de
15 1990, le SDS, le SDA et le HDZ étaient en bonnes relations les uns avec les
16 autres. Nous souhaitions leur retirer le pouvoir." C'est bien cela ?
17 R. Oui. Nous souhaitions prendre le pouvoir.
18 Q. Comme vous l'avez dit, il y a un instant, et cela figure dans votre
19 première déclaration écrite. Vous étiez membre de la Ligue des communistes
20 -- vous avez été membre de la Ligue des communistes jusqu'en 1989 et, un an
21 à peine après cette date, vous oeuvriez à la chute des communistes.
22 R. Et bien, tous ces nouveaux partis ont principalement compté dans leurs
23 rangs d'anciens de la Ligue des communistes.
24 Q. Fort bien. Vous dites également que vous vous souteniez les uns les
25 autres, mais, s'agissant de l'avenir de la Yougoslavie, il existait des
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1 divergences dans les positions du SDS d'une part, et du HDZ, et du SDA de
2 l'autre, à savoir, donc des Croates et des Musulmans.
3 R. Oui.
4 Q. Et vous dites, à ce moment-là, je cite : "Le SDS et le HDZ croyaient en
5 une confédération favorable à l'indépendance des républiques, alors que le
6 SDS souhaitait une fédération forte et une Yougoslavie intégrée." Vous avez
7 dit, il y a un instant, que la meilleure solution pour les Musulmans
8 consistait à ce que la Yougoslavie demeure intégrée, pour que tout le monde
9 puisse s'y sentir bien. Comment expliquez-vous, dans ces conditions, que,
10 dès l'année 1990, votre parti soutenait l'indépendance des républiques ?
11 R. Nous souhaitions, soit une espèce de fédération, soit une confédération
12 relativement forte. En 1990, nous étions loin encore de quelque discussion
13 que ce soit au sujet d'une déclaration d'indépendance. Nous parlions d'une
14 espèce de fédération plus ou moins compacte.
15 Q. Mais je dois -- je me dois de vous poser la question que je vais vous
16 poser pour que vous apportiez vos explications à l'intention des Juges.
17 Dans votre déclaration écrite, quand vous l'avez faite, est-ce que vous
18 avez adapté ce que vous disiez, comme vous venez de l'indiquez, il y a
19 quelques instants, c'est-à-dire, qu'apparemment, vous auriez dit l'inverse
20 de ce que vous dites aujourd'hui, en d'autres termes. Est-ce qu'à l'époque,
21 la Yougoslavie intégrée était la meilleure solution, mais que vous deviez
22 adapter votre position parce que vous faisiez cette déclaration devant les
23 enquêteurs du Tribunal ?
24 R. Non. Encore aujourd'hui, lorsque l'on fait une déclaration, on vous
25 demande d'être concis. Donc on m'a demandé de ne pas rentrer dans les
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1 détails, et il est difficile de faire connaître ses positions intégrales
2 dans ce genre de circonstances. Il y a des questions politiques importantes
3 qui sont discutées ici. Elles ne pouvaient être discutées que très
4 brièvement. Si on me donne la possibilité de m'expliquer, tant qu'à ce que
5 je pensais de la possibilité d'une indépendance des républiques, et de la
6 nature de la fédération à créer, et cetera, et cetera, j'aurais pu le
7 faire. Mais, à l'époque, je pensais et je le pense encore aujourd'hui que
8 la Yougoslavie devait représenter une union de peuples sur un pied
9 d'égalité.
10 Q. Regardez maintenant le paragraphe 2, de votre déclaration plus
11 conséquente -- paragraphe 22, excusez-moi, de la déclaration que vous avez
12 faite en 1994. Vous dites, quelque part au milieu du paragraphe, mais
13 d'abord avant de vous citer, je fais valoir qu'il y a un instant, que la
14 JNA ne s'était pas -- que, si la JNA n'était pas intervenue, rien de ce qui
15 s'est passé -- ne se serait passé.
16 R. En effet.
17 Q. Et vous dites au milieu du paragraphe : "Safet Hadzialijagic, membre du
18 SDA, est venu me voir et m'a dit que la JNA devrait être proposée pour
19 constituer une zone tampon entre les hommes d'Arkan et la population de la
20 ville. Mais j'étais opposé à cela." Est-ce exact ?
21 R. Safet Hadzialijagic m'a appelé au téléphone et m'a présenté ceci comme
22 une idée à lui.
23 Q. Mais vous, vous y êtes opposé.
24 R. Et bien, à ce moment-là, Samac avait déjà été attaqué et je lui ai dit
25 que je devais y réfléchir.
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1 Q. Mais, un plus loin, vous dites qu'Ibrahim Salkic est arrivé, qu'il a
2 dit que Nikolic l'avait appelé, lui avait dit que la JNA était prête à
3 offrir des garanties si les armes étaient récupérées.
4 R. Et bien, s'il fallait choisir entre la JNA et les hommes d'Arkan, la
5 JNA semblait une meilleure solution, puisque l'attaque avait déjà eu lieu
6 et que des gens s'étaient faits tuer.
7 Q. Maintenant, regardez le paragraphe 54, vous dites à cet endroit, je
8 cite : "Pendant la soirée du 27 avril, à environ 10 heures du soir, deux
9 camions sont venus emmener une cinquantaine d'entre nous, apparemment pour
10 aller vers Brcko. Il n'y avait pas d'hommes d'Arkan dans les rues." Et un
11 peu plus loin, vous dites, je cite : "Deux prisonniers avaient peur que les
12 hommes d'Arkan fassent leur apparition tout d'un coup, et empêche la JNA de
13 la emmener à Brcko." Est-ce que cela signifie que la JNA était
14 effectivement en train de protéger ces prisonniers, en les défendant contre
15 quelque chose qui risquait d'arriver, si la JNA n'avait pas été là. Est-ce
16 que c'est bien cela que cela veut dire ?
17 R. Et bien, ce qui s'est passé, c'est que les membres des forces spéciales
18 nous avaient tellement frappés, nous avions pratiquement atteint la limite
19 de nos forces. Et quand la JNA est arrivée, nous respirions à peine et donc
20 elle nous a effectivement sauvés car, autrement, nous aurions été tués.
21 Q. Et puis au paragraphe 56, vous dites, je cite : "Le médecin de l'armée
22 est venu me faire une piqûre, et m'a mis quelque chose sur le visage pour
23 que je reprenne conscience. Pendant notre incarcération à Brcko, nous avons
24 bénéficié de soins médicaux. Et la JNA, pour l'essentiel, nous a protégés."
25 R. Ceci est exact.
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1 Q. Encore un autre sujet. Vous parlez de Sremska Mitrovica, en tant que
2 camp de concentration. Vous étiez juriste et juge à l'époque. Vous savez
3 parfaitement bien que la prison de Sremska Mitrovica est une prison, en
4 bonne et due forme, destinée à enfermer des délinquants, des criminels, et
5 qu'à tout moment, elle peut héberger plusieurs milliers de personnes qui
6 ont été condamnées pour avoir commis des crimes.
7 R. Elle a été créée pendant -- sous l'empire austro-hongrois, et une
8 partie de cette prison était un camp de concentration. La première partie
9 qui a été encerclée d'une -- entourée d'une clôture et qui est tout à fait
10 distincte de la prison. C'est la raison pour laquelle j'ai dit cela.
11 Q. Et vous dites que la Croix rouge est venue vous rendre visite le 22
12 juin seulement. Mais avant cette date, est-ce que quelqu'un vous avait
13 frappé ?
14 R. Oui, régulièrement. Tous les jours.
15 Q. Fort bien. Encore deux sujets, peut-être un peu moins importants.
16 Paragraphe 103, vous parlez de ce convoi de 1 500 prisonniers, et vous
17 dites que le convoi a été arrêté dans des villages serbes et que les
18 villageois ont été autorisés à vous frapper. C'est bien cela ?
19 R. Oui, c'est ce que j'ai dit.
20 Q. Et vous dites que le convoi était accompagné d'un groupe de
21 journalistes assez important. Vous dites que la Croix rouge était présente
22 également, et même la FORPRONU. Vous dites que les hommes de la FORPRONU
23 vous disaient de baisser la tête pour ne pas être atteints par les tirs des
24 tireurs embusqués. Alors est-ce que tout cela est possible ? Est-ce qu'en
25 présence de la FORPRONU, de la Croix rouge, et d'un grand nombre de
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1 journalistes, des habitants des villages pouvaient pénétrer dans les
2 véhicules pour vous frapper ?
3 R. Et bien, je vous dirais d'abord que les journalistes sont arrivés à
4 Nemetin, le lieu où devait avoir lieu l'échange. Mais avant cela, nous
5 avons parcouru plus d'une centaine de kilomètres à Vojvodine, et là il n'y
6 avait pas de journalistes. Mais même à Nemetin, où se trouvaient les
7 journalistes et les membres de la Croix rouge, il est vrai qu'on nous a
8 frappés. Un commandant s'est approché un certain moment de ce Monténégrin
9 qui se trouvait à bord de l'autobus et lui a dit, "Mais qu'est-ce que vous
10 êtes en train de faire ? Est-ce que vous êtes complètement fou ? Nous ne
11 les avons pas frappés pendant plusieurs jours pour être sûrs qu'ils ne
12 soient pas couverts de bleu."
13 Q. Bon encore une seule question. Si vous n'étiez pas un juriste, je ne
14 vous poserais pas cette question, mais puisque vous l'êtes, je dois vous la
15 poser. Vous avez dit au paragraphe 106, je cite : "Un mois entier après
16 tout ce qui s'est passé, lorsque je suis revenu à la maison j'avais
17 toujours peur de dormir. Je suis allé voir un médecin parce que j'avais
18 trois côtes cassées et des dents à l'avant de la mâchoire qui étaient
19 brisées."
20 Alors dites-moi, je vous prie, puisque vous êtes juriste de profession,
21 est-ce que vous avez subi un examen radiologique de vos côtes cassées, et
22 est-ce que vous avez pris une photo des quatre dents de devant qui vous
23 manquaient ? Est-ce que vous avez remis ces photos aux membres du bureau du
24 Procureur ?
25 R. Oui, lorsque je suis allé voir le médecin, des radiographies ont été
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1 faites.
2 Q. Non, je vous demandais si vous disposiez d'un document médical, d'un
3 certificat médical prouvant que vos côtes étaient bien cassées et qu'il
4 vous manquait quatre dents.
5 R. Je pense que j'ai remis ces documents lorsque j'ai témoigné dans
6 l'affaire de Samac. Il y avait des radiographies ou en tout cas des
7 conclusions médicales.
8 Q. Mais un document au sujet des quatre dents qui vous manquait ?
9 R. Elles étaient cassées et elles ont été réparées par le dentiste.
10 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Merci.
11 Nouvel interrogatoire par M. Groome :
12 Q. [interprétation] Monsieur Tihic, M. Milosevic a exprimé des doutes au
13 sujet de la déclaration que vous avez faite devant les journalistes de la
14 télévision de Novi Sad. J'aimerais vous demander avant d'avoir bénéficié de
15 soins médicaux et avant d'avoir fait votre déclaration à la télévision de
16 Novi Sad, et je vous demande de répondre si possible par oui ou par non,
17 car cela permettra de gagner du temps.
18 Donc avant la déclaration que vous avez faite aux journalistes de la
19 télévision de Novi Sad, ceci pour que les Juges comprennent mieux votre
20 état d'esprit à l'époque, est-ce que vous portiez un revolver, un
21 pistolet ? Est-ce que vous aviez un revolver ou un pistolet qui vous avez
22 été mis dans la bouche ? Je parle du paragraphe 44 de votre déclaration
23 écrite.
24 R. Juste avant que je fasse ma déclaration, personne ne m'avait placé un
25 revolver dans la bouche, mais Djordjevic m'avait montré un revolver, et
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1 m'avait dit, "Fait bien attention à ce que tu diras." Et Stevan Todorovic
2 également avait formulé des menaces à mon encontre en me disant que je
3 devais faire attention à ce que je dirais pour ne pas être frappé. Tout
4 ceci s'est passé devant le journaliste qui a tout entendu. Alors quelle
5 espèce de journaliste était-ce ?
6 Q. Je ne parle du moment qui a immédiatement précédé votre déclaration. Je
7 parle des traitements -- du traitement auquel vous avez été soumis pendant
8 tout le temps vous avez fait cette déclaration. Est-ce qu'on voyait des
9 signes -- des passages à tabac que vous aviez subis.
10 R. Oui, il y avait eu des passages à tabac, des mauvais traitements, des
11 menaces avaient été proférés. On m'avait menacé de me tirer une balle avec
12 un revolver qui m'avait été mis sur la tempe, et ensuite dans la bouche. Et
13 bien entendu, j'avais peur. Car c'était toujours les mêmes gens qui
14 m'entouraient. C'était une atmosphère générale, et lorsque j'étais censé
15 faire une déclaration, j'ai eu peur. On m'a menacé.
16 Q. Mais avant ce moment-là, est-ce que vous aviez des séquelles, des
17 mauvais traitements subis par vous précédemment au niveau des reins en
18 particulier, comme vous le dites au paragraphe 54 de votre déclaration
19 écrite.
20 R. Oui, j'avais subi des mauvais traitements. J'étais blessé. J'urinais du
21 sang. Et l'ancien commandant du poste de police de Samac, s'il venait ici -
22 - l'ancien commandant de la police de Samac, quand les forces spéciales
23 n'étaient pas présentes, amenait un médecin pour qu'il vienne me voir,
24 m'apportait également quelque chose à boire parce que nous nous
25 connaissions depuis longtemps. Nous habitions dans la même ville.
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1 Q. Dans votre description des traitements que vous avez subis de la part
2 des membres de la JNA, il y apparaît que plusieurs membres de la JNA vous
3 ont traité de façon différente, en différent lieu, et à différent moment.
4 J'aimerais que vous vous concentriez sur ce que les membres de la JNA vous
5 ont fait subir pendant votre séjour en Serbie, c'est-à-dire entre le mois
6 de mai et le mois d'août.
7 Pendant cette période, avez-vous été témoin de passage à tabac imposé à des
8 prisonniers par des membres de la JNA qui utilisaient des coups de poing
9 américain ?
10 R. Oui, j'en ai vu qui utilisait des coups de poing américain pour frapper
11 les prisonniers, un groupe de prisonniers notamment venu de Bosanski Samac.
12 Un prisonnier était assis sur le sol menotté et ils le frappaient sur la
13 tête et le dos. Il y a même un qui est mort. Il ne pouvait plus supporter.
14 Il a commencé à uriner, et il ne savait plus ce qu'il disait.
15 Q. Mais est-ce que certains des hommes ont été contraints à accomplir
16 l'acte sexuel les uns avec les autres par des membres de la JNA ?
17 R. Oui, il y a eu des situations de ce genre. Ils ont forcé un américain à
18 avoir des relations sexuelles avec un soldat de Croatie, un certain
19 Zdravko.
20 Q. Monsieur, pendant les deux mois et demi qui ont précédé votre
21 incarcération en Serbie sous la garde des hommes de la JNA, est-ce que vous
22 avez, à quelque moment que ce soit, été accusé d'un crime quelconque ?
23 R. Jamais. Je n'ai jamais été officiellement accusé de quelque crime, car
24 je n'ai jamais été officiellement interrogé. Je n'ai signé aucune
25 déposition. Un jour il y a ce commandant de Batajnica qui m'a emmené pour
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1 un interrogatoire, mais rien n'a été enregistré ou écrit suite à cela.
2 M. GROOME : [interprétation] Je n'ai plus de questions.
3 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Monsieur Tihic, ceci met un terme à votre
4 déposition, en tout cas s'agissant de l'audience d'aujourd'hui. Je vous
5 demanderais d'avoir l'amabilité de rester à la disposition du Tribunal,
6 néanmoins pour le début de l'audience de demain si cela s'avère nécessaire.
7 Mais si tel ne devait pas être le cas, je vous remercie d'être venu devant
8 le Tribunal pour déposer, et dans ce cas, vous êtes arrivé au terme de
9 votre déposition. Comme je viens de le dire normalement, vous êtes donc
10 libre de vous retirer, mais éventuellement il faudrait que vous vous
11 mettiez à la disposition de la Chambre pour le début de l'audience de
12 demain matin.
13 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.
14 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Maintenant, une question administrative
15 en application de l'Article 89(F), nous versons au dossier, nous admettons
16 en tant que pièce à conviction la déclaration de M. Dean Manning.
17 [Le témoin se retire]
18 M. GROOME : [interprétation] Monsieur le Président, puis-je vous parler
19 d'une question de procédure.
20 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Oui.
21 M. GROOME : [interprétation] Monsieur le Président, s'agissant de la
22 déposition du général Clark, qui est annoncé très bientôt. En vertu d'une
23 ordonnance de la Chambre, les Amicus Curiae et l'accusé par le biais du
24 bureau du Procureur ou directement font fait savoir au gouvernement
25 américain s'ils souhaitent poser des questions supplémentaires ou aborder
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1 d'autres questions que celles qui ont été abordées au cours de
2 l'interrogatoire principal.
3 Et j'ai reçu des questions du gouvernement américain ce matin, qui
4 demandent donc quel sera le nombre approximatif de ces questions et qui
5 demande, bien sûr, à en être prévenu à l'avance.
6 M. KAY : [interprétation] Nous sommes au courant, bien entendu. Mais dans
7 le cadre du travail accompli par nous jusqu'à présent, nous n'avons pas
8 encore pu en arriver à ce point.
9 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Fort bien. Mais en tout cas, vous êtes
10 prévenu et nous vous demandons de vous concentrer sur cette question.
11 Suspension. Retour dans le prétoire demain à 9 heures.
12 --- L'audience est levée à 14 heures 08 et reprendra le mercredi 3 décembre
13 2003, à 9 heures.
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