Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 Le jeudi 22 janvier 2004

2 [Audience publique]

3 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

4 [L'accusé est introduit dans le prétoire]

5 --- L'audience est ouverte à 9 heures 08.

6 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Oui, Monsieur Nice.

7 M. NICE : [interprétation] Monsieur le Président, nous suivions le résumé,

8 pas la déclaration au préalable. Arrive un passage dont nous aimerions

9 parler à huis clos partiel. Rassurez-vous, cela ne sera pas long.

10 LE TÉMOIN: HRVOJE SARINIC [Reprise]

11 [Le témoin répond par l'interprète]

12 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel.

13 [Audience à huis clos partiel]

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11 [Audience publique]

12 M. NICE : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges,

13 examinons maintenant, si vous le voulez bien, l'intercalaire 4 de cette

14 pièce portant la cote 641. C'est la deuxième déclaration préalable du

15 témoin admise en application du 89(F), qui parle de conversations

16 interceptées dans la mesure où le témoin peut en parler. Ce sont des

17 documents qui ont été produits eu égard à la question de l'existence de

18 l'état de Croatie. A l'intercalaire 5, vous avez un tableau où vous avez

19 les commentaires du témoin, commentaires faits par rapport à plusieurs

20 conversations interceptées. Normalement, ces documents devraient recevoir à

21 ce stade-ci de la procédure uniquement une cote provisoire à des fins

22 d'identification.

23 Vous vous souviendrez que pour ce qui est du contre-renseignement et des

24 interceptions de conversations faites par celui-ci, nous attendons toujours

25 la possibilité d'avoir un témoin. Nous sommes tributaires d'autres

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1 personnes. Nous attirons votre attention sur un commentaire fait par le

2 témoin à propos de l'interception, du transcript, de la transcription de

3 cette conversation numéro 4, où il dit ceci : Il dit reconnaître les voix.

4 Il dit que c'est le type d'enregistrement sonore qu'il a reçu, à l'époque,

5 de Tudjman.

6 Examinez maintenant la transcription numéro 9. Le témoin dit reconnaître

7 cette conversation interceptée comme étant une de celles fournie par

8 Tudjman, un ou deux jours après qu'elle ait eu lieu.

9 Et puis intercalaire 11, il dit la même chose. C'est là un document que lui

10 a remis, à l'époque, M. Tudjman. Intercalaire 14, à la fin de cette

11 rubrique, il dit : C'est ce genre de conversations interceptées que je

12 recevais à l'époque de Tudjman ou du service de renseignements directement,

13 puisqu'on donne mon nom. Je demande à la Chambre d'envisager s'agissant de

14 ces quatre conversations, pas simplement un versement à titre provisoire,

15 mais à titre définitif, puisque le témoin peut corroborer à l'audience

16 l'exactitude de ces transcriptions.

17 Je ne veux pas retarder les débats. Vous verrez peut-être la situation à la

18 fin du contre-interrogatoire, pour vous prononcer.

19 Nous demandons la production de tous ces éléments, bien sûr, sous réserve

20 de la décision rendue par les Juges. En effet, à l'intercalaire 20, vous

21 allez trouver les documents. C'est la deuxième déclaration en application

22 du 89(F). Elle concerne les documents relatifs à l'existence de l'état de

23 Croatie en tant qu'état séparé. Vous pourrez aller voir que ces documents

24 vont de l'intercalaire 20 à l'intercalaire 35. Le seul autre document qui

25 se trouve ici dans ce classeur, se trouve à l'intercalaire 36. C'est un

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1 document, à certains égards, officiel, puisqu'il parle de la façon dont les

2 conversations interceptées nous sont parvenues, assorties de

3 transcriptions, qu'il fallait réviser, revoir ces documents, les corrigés

4 quelquefois. C'est la déclaration de la personne qui s'est chargée de cette

5 opération.

6 Il serait peut-être préférable de parler du statut officiel à donner à

7 toutes ces pièces à la fin de la déposition du témoin. Je n'ai pas d'autres

8 questions à poser à ce témoin.

9 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Il sera nécessaire de parcourir une fois

10 de plus ces documents, pour veiller à ce que tous les bons documents ont

11 été ajoutés. Je suppose qu'à un moment donné, surtout pour ce qui est de

12 ce procès, voir quels sont les documents qui seront déclarés recevables, et

13 ceux qui ne le seront pas.

14 M. NICE : [interprétation] Je vous remercie.

15 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Oui, Monsieur Milosevic. Vous avez une

16 heure pour le contre-interrogatoire avant la pause. Vous aurez davantage de

17 temps après. Veuillez à vous assurer que le témoin comprend bien la nature

18 de vos questions.

19 L'ACCUSÉ : [interprétation] J'espère que le témoin comprendra mon exposé et

20 sa teneur, Monsieur May. Dites-moi, combien de temps aurais-je en tout et

21 pour tout pour ce témoin ? Parce que, comme vous pouvez constater,

22 l'interrogatoire principal, hier, a duré toute la session, et une demi-

23 heure à présent. Par conséquent, étant donné que cela est versé en vertu de

24 votre règle 89(F), toute une série de documents par écrit, il faudrait que

25 je puisse disposer de plus de temps que ce que vous avez mentionné hier.

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1 Vous avez mentionné hier deux heures et quart ce qui correspond

2 pratiquement à ce que l'Accusation a utilisé.

3 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Oui. C'est la décision, et c'est le temps

4 qui vous est mis à disposition.

5 L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui. Moi, je vous demande plus de temps que

6 cela.

7 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Si vous ne gaspillez pas votre temps, et

8 si vous l'utilisez de façon utile, nous pouvons prendre en considération

9 l'attribution d'un supplément de temps. Pour le moment, c'est le temps qui

10 vous est imparti, et vous devez vous y conformer.

11 L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, à tout moment, vous pouvez éteindre mon

12 micro. Ce ne serait pas la première fois, Monsieur May.

13 Contre-interrogatoire par M. Milosevic :

14 Q. [interprétation] Monsieur Sarinic, vous avez été le collaborateur le

15 plus proche de Tudjman. Vous avez été son conseiller, premier ministre,

16 chef de ses services, service de renseignements j'entends, et ainsi de

17 suite. Vous avez été partie prenante à la prise de bon nombre de décisions,

18 n'est-ce pas ?

19 R. J'ai occupé des fonctions variées, des fonctions que vous avez citées.

20 Pour ce qui est de la prise de décisions, mon intervention se limitait à un

21 certain nombre d'intervenants. Ce qui fait que je n'ai pas été la personne

22 qui avait pris part à la prise de toutes les décisions, ou qui se trouvait

23 être présent lors de la prise de celles-ci. Mais pour ce qui est des

24 moments où j'étais présent, je serais d'accord avec ce que vous venez de

25 dire.

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1 Q. Bon nombre de ces décisions ont influé sur l'évolution des événements

2 de la région et sur les activités de la direction croate, n'est-ce pas ?

3 R. Est-ce que vous entendez par là les décisions qui ont été prises par le

4 président Tudjman ?

5 Q. Je parle des décisions de la direction de la République de Croatie,

6 auxquelles vous avez pris part en votre qualité de personne qui a assumé

7 toutes ces fonctions éminentes.

8 R. J'ai été l'une des personnes qui s'entretenaient avec le président.

9 J'ai été présent à l'occasion de réunions importantes où des décisions,

10 effectivement étaient prises.

11 Q. Bien. Serait-il exact de dire que dans votre direction, depuis le début

12 même, on n'avait pas envisagé la possibilité de rester la Croatie en

13 Yougoslavie, ou plutôt la sauvegarde de la Yougoslavie. Est-ce vrai ?

14 R. Non, il n'en est pas ainsi. Vous savez pertinemment bien que la

15 direction croate, lorsqu'elle avait vu ce qui se passait, lorsqu'elle avait

16 vu que l'on avait fait obstruction à la réalisation ou la mise en œuvre de

17 l'application de la constitution de 1974, et que la Yougoslavie était en

18 train de désintégrer en terme pratique. Le président Tudjman au nom de la

19 Croatie, avait proposé une sorte de confédération souple. Ce qui de votre

20 part, et non seulement de votre part s'est vu rejeter.

21 Q. Monsieur Sarinic, vous savez pertinemment bien qu'avant les élections,

22 même à l'occasion de la session où l'assemblée constitutive du HDZ, l'un

23 des objectifs affichés avait été la République de Croatie indépendante.

24 R. Je vous parle de faits. Je vous parle de ce qui avait été proposé,

25 s'agissant de bon nombre de campagnes électorales, vous le savez fort bien,

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1 on dit toute sorte de choses. Parlons de faits.

2 Q. J'entends bien parler de faits, Monsieur Sarinic. Je vous pose des

3 questions afférentes aux faits. Là, c'est un fait. Ce que je vous ai

4 demandé tout à l'heure, ne me dites pas que vous avez dit n'importe quoi à

5 l'occasion de la campagne électorale, que vous avez dit ce que vous n'aviez

6 pas à l'esprit, ce que vous n'aviez pas l'intention de faire.

7 R. Je viens de vous répondre que la Croatie avait proposé un aménagement

8 confédéral pour la Yougoslavie, chose qui n'a pas été acceptée. C'est un

9 fait.

10 Q. Avec l'explication en sus, il s'agirait là d'une phase provisoire

11 allant ou constituant une transition vers l'indépendance du pays, cela, je

12 m'en souviens bien.

13 R. C'est une interprétation que vous faites. Moi, je m'arrête à ce que

14 j'ai dit. A savoir qu'à ces moments critiques, aux fins d'éviter les

15 atrocités de la guerre et les atrocités du démantèlement de la Yougoslavie,

16 cela avait été l'une des propositions formulées par le président Tudjman.

17 Quant à savoir ce qui interviendrait ultérieurement, cela aurait été

18 affaire à voir. Je répète une fois de plus, que la confédération avait été

19 proposée.

20 Q. Il n'est pas contesté le fait que cela avait constitué un épisode dans

21 ces événements. Le processus tout entier qui s'est déroulé au sein de la

22 direction de la Croatie, avait nettement et clairement indiqué

23 l'orientation de la Croatie vers l'indépendance et sa séparation de la

24 Yougoslavie, n'est-ce pas ?

25 R. Si on en parle, les premiers à avoir démantelé ou renversé ce qui avait

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1 été la Yougoslavie en modifiant unilatéralement la constitution, cela avait

2 été la direction serbe, vous à sa tête.

3 Q. Je ne sais pas comment nous avons renversé ou bouleversé ce qui avait

4 été en vigueur en Yougoslavie.

5 Dites-moi, comment ces événements, et dans quelle mesure ces événements,

6 sont-ils survenus en guise de résultante de la coopération de votre

7 direction avec les éléments de la politique européenne ? J'entends par là

8 notamment, l'Allemagne qui se tenait derrière le démantèlement de la

9 Yougoslavie et qui encourageait celui-ci.

10 R. Tout comme vous, nous avons eu des contacts avec la communauté

11 internationale. Cette communauté internationale, voyant ce qui se passait,

12 était elle-même venue vous voir vous, nous voir en Croatie, ainsi de suite.

13 Toutefois, la communauté internationale n'a pas dès le début même, apporté

14 son soutien à la désintégration de la Yougoslavie, qui aurait été une boîte

15 de Pandore qui ferait rejaillir bon nombre d'autres problèmes. Je tiens à

16 vous rappeler que l'homme, l'homme politique qui est considéré comme étant

17 un grand ami de la Croatie M. Genscher, l'homme qui avait été ministre des

18 affaires étrangères de l'Allemagne, avait été contre ce fait. Il a été

19 proclamé, vous-même, vous l'avez proclamé comme étant un ami de la Croatie,

20 qu'il avait été celui qui était favorable au démantèlement de la

21 Yougoslavie et à l'octroi de l'indépendance à la Croatie.

22 Q. Nous allons nous référer à un petit épisode, une petite excursion,

23 toujours à ce sujet-là. Le 2 juillet 1991, bien avant la reconnaissance de

24 la Croatie, et cetera, les événements qui sont survenus à ce moment-là, et

25 je citerais le journal Libération de Paris. J'ai eu ici une chronologie

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1 officielle, le journal Libération de Paris dit, qu'il y avait un complot

2 international qui voulait la séparation de la Croatie. On disait qu'il y

3 avait l'Autriche et l'Allemagne derrière. On dit que Bonn et Vienne

4 expliquaient qu'il y avait renforcement des zones d'influence germaniques

5 et en Europe centrale, où en guise d'axe, il y aurait l'Allemagne et

6 l'Autriche et la Slovénie. Il s'agirait notamment, d'une nostalgie pour ce

7 qui est de l'existence de cet empire Austro-hongrois de l'époque. Vous en

8 souvenez-vous ?

9 R. Non, je ne m'en souviens pas. Peut-être avant la Première guerre

10 mondiale.

11 R. Non, je ne m'en souviens pas. C'est une analyse faite par un

12 journaliste qui devait probablement être subjectif. Je ne puis considérer

13 cela comme étant un fait, parce que des articles de cette nature et des

14 réflexions de cette nature, pourraient être retrouvés dans d'autres

15 journaux également. Ce, non seulement dans ce sens que vous venez

16 d'indiquer, mais dans un sens tout à fait opposé également.

17 Q. Vous devez certainement vous souvenir, Monsieur Sarinic, du fait

18 qu'ici, lors du témoignage du président de la Slovénie, de M. Kucan, il a

19 été confirmé la teneur de la conversation avec Mesic et qui était filmée

20 par la télévision, où Mesic expliquait qu'avec Genscher et le Pape, il

21 avait convenu la désintégration de la Yougoslavie, que c'était eux qui

22 avaient aidé le plus à ce faire. Cela avait diffusé en public. Cela s'est

23 passé en 1995, à un moment où ils expliquaient les uns et les autres,

24 quelle avait été la contribution de tout un chacun à la cessation de

25 l'existence de cette Yougoslavie de l'époque. Ce n'est pas des conjectures

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1 présentées par un journaliste, c'est une réalité.

2 R. Je dois vous dire que, s'agissant des déclarations du président Mesic,

3 je ne suis pas au courant, c'est d'un. De deux, il est vrai de dire que le

4 Vatican et l'Allemagne avaient été les premiers à reconnaître la Croatie.

5 Suite à cela, toute la Communauté européenne qui se constituait de 12 pays

6 à l'époque, a également reconnu ce pays quelque moins d'un mois après.

7 C'est un fait, Je crois qu'ils ont été probablement les premiers à

8 reconnaître que la Yougoslavie telle qu'elle avait été existé, ne pouvait

9 plus subsister et au final, tout le problème de la création d'une Grande

10 Serbie, avait avancé à tel point, que l'on ne pouvait plus penser que la

11 Yougoslavie était à même de subsister.

12 Comme je l'ai dit tout à l'heure, le président Tudjman, en dépit de cela,

13 pour éviter la guerre et pour éviter qu'il y ait des victimes, a proposé un

14 aménagement confédéral de la Yougoslavie.

15 Q. Bien. Monsieur Sarinic, vous venez de citer vous-même tout à l'heure,

16 les informations que vous avez transmises où je vous aurais dit qu'on nous

17 avait étiqueté de vouloir une Grande Serbie qui n'avait en fait jamais

18 constitué notre politique. Vous avez cela dans vos propres notes. D'où

19 venez-vous tirer cette idée que c'était là l'intention que de créer une

20 Grande Serbie.

21 R. La création d'une Grande Serbie, là, vous m'étonnez. Je m'étonne de

22 vous voir nier la chose. C'est une chose notoirement connue. D'autre part,

23 vous savez qu'il s'agissait là d'un processus historique qui date du

24 Nachertaniye de 1840.

25 Q. On a déjà entendu parler de cela.

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1 R. Il y a la déclaration de l'académie des sciences et des arts de Serbie

2 la Sanu [phon]. Si des gens de cette envergure en Serbie, des

3 intellectuels, parlent et planifient une telle chose, je m'étonne de vous

4 voir être surpris par la chose.

5 Q. Vous n'avez certainement pas lu le Nachertaniye et cette déclaration

6 non plus de la Sanu de l'académie des sciences et des arts, du mémorandum.

7 R. Il y a peu, j'ai lu un livre publié par Milisav Sekulic qui est

8 intitulé "Knin est tombé à Belgrade." Dans sa première partie, il est

9 question de ces rapports, à savoir, notamment de ce qui se passait. Il est

10 question du problème de la Grande Serbie, je ne sais si vous avez vous-même

11 lu le livre.

12 Q. Je n'ai lu tous les livres des différents généraux mais peu importe.

13 Pour être plus efficace, je me propose de suivre une lignée de questions

14 tout à fait concrètes. Vous souvenez-vous de la 40e session du conseil

15 suprême de l'état de Croatie tenue en date du 21 novembre 1991 ? Il y avait

16 le président Tudjman, il y avait vous, il y avait Mesic, Manolic,

17 Rjbarievic [phon], Susak et les autres.

18 R. Etant donné que vous disposez de ce document, il se peut que cela soit

19 exact. Il est probable que ce document soit exact. Il y a eu bon nombre de

20 -- je ne peux me remémorer toutes les réunions. Pouvez-vous me dire quelle

21 est la teneur ?

22 Q. Je vais vous dire, vous avez communiqué ces documents pour ce qui est

23 des réunions avec Tudjman. Quand je dis "vous", vous, j'entends vous, Mesic

24 et les autres, n'est-ce pas ?

25 R. Ce n'est pas moi qui les ai communiqués.

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1 Q. Cela a été probablement remis par Mesic si ce n'est pas par vous ?

2 R. Je n'en sais rien. C'est à lui qu'il faudrait poser la question.

3 Q. Vous souvenez-vous que vous vous étiez entretenu au sujet de la

4 terminologie à utiliser pour ce qui est de la réalisation finale du projet

5 du démantèlement de la Yougoslavie et comment il était entendu de désigner

6 la JNA et la direction serbe comme étant les coupables en premier lieu ?

7 R. Il se peut que cela ait été rédigé ou formulé ainsi, mais à l'époque,

8 il y avait une situation où cela pouvait être conclu. Une chose de cette

9 nature pouvait être conclue. Il y a eu invasion, si je peux m'exprimer

10 ainsi, en Slovénie. Et par voie de conséquences, on ne pouvait pas où la

11 situation qui avait prévalu au niveau de la présidence de Yougoslavie était

12 telle qu'il n'était pas compliqué de conclure ou difficile de conclure que

13 ce que vous êtes en train de dire allait se passer. Il n'était pas

14 difficile de tirer comme conclusion qui se trouvait derrière.

15 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Je vais vous interrompre pour un moment.

16 Il faut être équitable à l'intention du témoin et de l'accusé pour ce qui

17 est des documents qui pourraient avoir de la pertinence. Il pourrait être

18 simple pour le Procureur puisque nous parlons de ces documents et pour que

19 le témoin puisse suivre de quoi il s'agit, j'aimerais que le Procureur

20 fournisse au témoin les documents qui sont mentionnés afin qu'il puisse

21 suivre ce qui est présenté.

22 M. NICE : [interprétation] Monsieur le Président, nous allons faire ce que

23 nous pouvons faire, ce qui est dans notre pouvoir.

24 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Bien. Et pendant que ceci se fait, il

25 faut donner l'occasion au témoin d'apporter ses réponses.

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1 Continuez, Monsieur Milosevic.

2 M. MILOSEVIC : [interprétation]

3 Q. Bien. Monsieur Sarinic, vous souvenez-vous du fait que Mesic avait

4 proposé qu'il démissionne et que l'on s'adresse ensuite aux Nations Unies

5 pour publier la cessation de l'existence de la Yougoslavie, de sa

6 présidence, de son parlement et de ses autres institutions ? Vous en

7 souvenez-vous ?

8 R. Je ne me souviens pas de cela pour ce qui est de ce document, mais cela

9 avait été, à ce moment-là, la politique de la Croatie. Une fois toutes les

10 possibilités exploitées, le parlement, le Sabor, de Croatie a publié que la

11 Croatie se dirigeait vers son indépendance. Cela avait été une démarche qui

12 avait son importance ou sa signification tant théorique que formelle.

13 Q. Monsieur Sarinic, je parle de vos activités afférentes à la

14 désintégration de la Yougoslavie. Est-il exact de dire qu'il y a eu un

15 débat entre Mesic et Tudjman pour ce qui est de la terminologie à

16 utiliser ? Pour ce qui est de savoir s'il suffisait de dire que la

17 Yougoslavie n'existait plus ou qu'elle était devenue une espèce d'instance

18 illégal. Pour ce qui est de Mesic, il disait que cela continuait d'exister

19 mais pas telle qu'elle avait existé. On l'avait identifié à ce que

20 concevait la direction serbe Putschist ?

21 R. Je ne me souviens pas de cette terminologie. Moi, j'ai parlé d'une

22 ambiance générale qui avait prévalue, mais si vous voulez me prendre par

23 les mots ou par des phrases brèves, je ne peux pas vous affirmer que je

24 m'en souviens. Il faudrait que je puisse consulter le document et que je

25 vous dise, à ce moment-là, si je suis d'accord avec vos dires ou pas.

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1 Q. Bien, Monsieur Sarinic. Il s'agit du PV de la 40e réunion du conseil

2 suprême de l'état de Croatie. Je vous lis ce qui est dit. Cela s'est tenu

3 le 21 novembre --

4 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Vous ne pouvez pas vous référer à des

5 choses sans que les autres aient l'opportunité de se pencher dessus.

6 Qu'avez-vous dit ? De quelle date s'agit-il ? Le 21 novembre, avez-vous

7 dit, 1995 ? Avons-nous ce document ?

8 M. NICE : [interprétation] 1991. Nous ne l'avons pas retrouvé encore mais

9 nous essayons de le retrouver. Si l'accusé pouvait nous donner un peu plus

10 de détails, cela nous serait fort utile.

11 M. LE JUGE MAY : [interprétation] De quelle page s'agit-il ?

12 L'ACCUSÉ : [interprétation] L'intitulé du document porte un 01510131. Et

13 moi, je cite la page qui se termine par 046. Alors pour que M. Nice ne

14 perde pas trop de temps, je précise que tous ces documents m'ont été

15 confiés par leurs soins. Ce n'est pas moi qui me les suis procuré. C'est la

16 direction croate qui vous les a transmis et vous avez été dans l'obligation

17 de me les divulguer. Et Mesic dit, dans cette page qui se termine par 46.

18 "Et bien, avec ma démission la présidence cesse d'exister," --

19 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Juste un moment pour que l'on accède de

20 façon équitable à la chose. Il faudrait que le document soit retrouvé pour

21 le Procureur.

22 M. NICE : [interprétation] Nous nous efforçons de le faire, mais nous avons

23 tant de documents que nous ne pouvons pas tout apporter dans le prétoire.

24 Peut-être Mme Dicklich pourrait-elle contacter l'accusé pour savoir quels

25 sont les documents qu'il a l'intention de citer afin que nous puissions en

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1 disposer dès avant le deuxième segment de l'audience.

2 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Nous n'allons pas continuer de cette

3 façon. L'accusé peut poser des questions mais si le témoin n'est pas en

4 mesure de répondre sans pour autant lire le document, il ne répondra pas.

5 C'est ainsi que nous allons continuer dans la procédure à suivre.

6 Monsieur Milosevic, je vous demande de permettre à tout à chacun de suivre

7 ce que vous êtes en train de nous présenter. Entre-temps, nous allons

8 essayer de retrouver les documents.

9 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur May, je crois que tout à chacun a

10 clairement compris que dans la montagne de documents que je reçois, il

11 m'est beaucoup plus difficile à moi de retrouver certains documents et de

12 les citer que pour ce qui est de la partie d'en face qui dispose de tout un

13 appareil. Alors s'il ne suffit pas si je dis quel est le document et le

14 numéro de la page pour que je puisse le citer. Je ne sais vraiment pas ce

15 que vous me demandez de plus. Est-ce que vous êtes en train de dire que je

16 n'ai pas le droit de me référer aux documents qu'on m'a donnés ?

17 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Vous avez reçu cette documentation. On se

18 comporte de façon équitable à votre égard pour ce qui est de ces questions.

19 Nous comprenons qu'il y a des problèmes et des difficultés présentes de

20 votre côté aussi.

21 Mais l'on ne peut pas s'attendre de la part d'un témoin qui ne disposant

22 pas du document soit considéré comme étant à même de répondre sans se

23 rafraîchir la mémoire au sujet de quelque chose qui s'est passé il y a plus

24 de 10 ans.

25 Nous vous fournissons l'opportunité de poser des questions. Posez-les. Nous

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1 allons voir comment les choses vont se faire mais nous vous demandons de le

2 faire de façon assez résumée, pas trop rapide, afin que le témoin puisse

3 essayer de répondre. Entre-temps, nous nous efforçons de retrouver le

4 document en question.

5 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je crois que cela est dans l'obligation de la

6 partie qui a cité le témoin parce que ce sont des documents qui sont

7 présentés au sujet de son témoignage. Ce n'est pas mon obligation à moi.

8 M. MILOSEVIC : [interprétation]

9 Q. Alors Mesic dit : "Toutes les institutions fédérales cessent d'exister,

10 le parlement, le gouvernement, et ainsi de suite. J'avais l'intention

11 d'informer les Nations Unies de la perte de la légitimité de la Yougoslavie

12 avec mon départ. Et je voulais dire que l'armée devenait la plus grande des

13 organisations paramilitaires sans son commandement Suprême. J'ai

14 l'intention de demander la suppression du siège de la Yougoslavie aux

15 Nations Unies et de se reconnaître une réalité nouvelle." Vous en souvenez-

16 vous ?

17 R. Que je m'en souvienne ou pas, la situation était telle qu'il est très

18 possible qu'il y eut de déclarations de cette nature. N'oubliez pas que

19 dans cette présidence où il y avait rotation, la fonction du président de

20 la présidence avait été rendue -- son exercice avait rendu impossible pour

21 vous-même et par vos hommes, M. Jovic et autres, qui n'ont pas permis que

22 Mesic vienne occuper le poste de président. Cela avait été absolument

23 illégal. Une fois qu'il a pris ses fonctions dans cette présidence, on ne

24 pouvait plus rien faire. Il y avait eu minorité systématique. Mesic a

25 quitté la présidence. En Croatie il a été décidé que la Croatie quitte la

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1 Yougoslavie et la Slovénie a fait la même chose en même date.

2 Q. Puis on dit, et vous n'ignorez pas le fait que des membres de la

3 présidence qui n'avaient pas voté pour que Mesic devienne président de la

4 présidence, ils l'ont fait parce que Mesic, avant sa candidature, avait

5 déclaré vouloir être le dernier des présidents de la présidence de

6 Yougoslavie. Vous devez forcément vous en souvenir ? Cela a été publié par

7 les journaux.

8 R. Bon, mais vous vous accrochez à des paroles. Mesic a dû le dire parce

9 que la Yougoslavie était en train de se désintégrer. Tout le monde avait

10 compris la chose. Il s'est exprimé de façon figurée, mais je ne pense pas

11 que cela ait de l'importance. Ce qui importe c'est la situation qui a

12 prévalu en Yougoslavie, et non pas ce que quelqu'un avait pu dire même si

13 c'est M. Mesic, même s'il avait pu donc dire ce qu'il avait été le dernier

14 président de la Yougoslavie.

15 Q. Ce que le futur président de la présidence a annoncé dans sa

16 candidature a peu d'importance. Bien. Fort bien.

17 En page 049, Stipe Mesic dit, "La Yougoslavie n'existe plus." Et Tudjman

18 dit, "Non, cela n'existe pas." Mesic dit, "Nous allons arranger les

19 choses." Puis il parle de la façon dont il allait se comporter à l'égard de

20 la Yougoslavie.

21 R. Messieurs les Juges, je m'adresse à vous. Vous avez eu comme témoin, le

22 président de Croatie, M. Mesic. Ce type de question devait être posée à

23 lui-même. Moi, à mon avis, je ne suis pas l'avocat du président Mesic. Je

24 suis venu ici en tant que témoin. Je suis surpris de voir constamment citer

25 Mesic et ses déclarations à lui, et il ne m'appartient pas à moi.

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1 Q. Mais vous étiez présent, Monsieur Sarinic. Je vous parle de l'attitude

2 de la direction croate à cette même réunion-là, à la même réunion Josip

3 Manolic --

4 R. Mais est-ce que vous avez posé la question à Mesic quand il est venu

5 témoigner ?

6 Q. Sur ce sténogramme, non, parce que je ne l'avais pas. Quand Mesic est

7 venu témoigner, on ne m'a pas communiqué ces notes sténographiques. Vous

8 avez été participant à la réunion vous-même ?

9 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Ne perdons pas davantage notre temps là-

10 dessus. Passez à autre chose, je vous prie.

11 M. MILOSEVIC : [interprétation]

12 Q. A cette même réunion, M. Josip Manolic, avait-il été le premier

13 ministre à l'époque ?

14 R. C'était en 1991 ?

15 Q. Oui.

16 R. Oui, il avait été premier ministre à l'époque.

17 Q. Certes en page se terminant par 052 dans le courant de la même réunion,

18 il dit : "Hier soir j'ai eu un entretien avec le vice-président du

19 gouvernement de Kosovo de notre gouvernement. Ils sont allés en visite à

20 Tirana."

21 R. Je ne peux pas comprendre qu'il ait pu dire "notre gouvernement."

22 Q. C'est ce qui est écrit dans la transcription.

23 R. Il s'agit forcément d'une erreur de frappe. Comment peut-on parler de

24 notre gouvernement à nous au Kosovo ?

25 Q. Justement j'allais vous poser la question, étant donné que vous aviez

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1 eu une coopération, et il est question, et on dit : "Je pense qu'on est

2 tombé d'accord là-dessus. Ils sont allés visiter Tirana, et sur le segment

3 Kosovo, ils sont tombés d'accord sur la nécessité de l'aider. Et aux

4 parties au Kosovo, il y a une radicalisation pour ce qui est justement de

5 radicaliser ses positions relatives à la protection de Kosovo."

6 R. Je vais vous répondre à cette question d'une façon qui visera à vous

7 rappeler une réunion entre vous-même et moi. Cela est passé en 1998. Je

8 saute délibérément sept ans. Je vous ai dit à ce moment-là, que nous

9 n'allions pas nous immiscer dans vos relations avec le Kosovo, et vous

10 m'avez répondu que c'était un problème interne, et vous m'avez remercié de

11 la chose.

12 Q. C'était effectivement notre problème interne. Mais deuxièmement, vous

13 avez dit hier que je vous avais dit moi-même que notre idée avait été de

14 créer un parlement à deux Chambres, où dans une Chambre il y aurait

15 représentation sur pied d'égalité de tous les groupes ethniques vivant au

16 Kosovo, tant les Serbes que les Monténégrins, les Albanais, les Turcs, les

17 Romes, les Musulmans, à savoir, les Goranci, à savoir, tous les groupes

18 ethniques vivant au Kosovo seraient placés sur pied d'égalité dans l'une de

19 ces Chambres. Cela avait été la formule que nous avions envisagé pour

20 aménager de façon démocratique les relations et aménager le fonctionnement

21 des organes au Kosovo. Je pense que vous en souvenez, nous en avons parlé.

22 Vous l'avez mentionné hier cela. Vous avez parlé du parlement.

23 R. Oui, mais pas dans le sens vous vous le citez. Permettez-moi, puisque

24 vous venez d'avancer cela, je tiens à préciser de quoi il s'agit. Pour ce

25 qui est des Turcs, et cetera, vous n'en avez pas parlé à l'époque. A

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1 l'époque vous parliez d'un parlement constitué de deux Chambres où il y

2 aurait les Albanais et les Serbes. A cela je vous ai répliqué en disant que

3 c'était moins que les droits qu'ils avaient en vertu de la constitution de

4 1974. Et vous m'avez répondu en disant, "Certes, mais ceci a été une erreur

5 et nous n'allons pas nous permettre de commettre cette erreur, quel qu'en

6 soit le prix." Je me permets de vous rafraîchir la mémoire. Vous le savez

7 mieux que moi. Il y avait 200 000 Serbes et 2 millions d'Albanais. En

8 d'autres termes, ce parlement à deux Chambres, où il n'y pas de mise en

9 minorité, aurait été favorable aux Serbes qui étaient dix fois moins

10 nombreux que les autres.

11 Q. Ces chiffres ne sont pas exacts. Un deuxième point, nous en avons parlé

12 tout à fait, mais ce que vous dites au sujet de ma position, de mon

13 opinion, à savoir que l'année 1974 et sa constitution a été une erreur,

14 oui, c'était mon opinion. Pour ce qui est du parlement à deux Chambres,

15 nous avons des documents, des documents qui ont été proposés à l'époque. On

16 sait très bien quelle était la structure de ce parlement. C'est un homme,

17 une voix; le principe de l'élection au sein de ce parlement. Il n'y a aucun

18 doute là-dessus, s'il y a davantage d'Albanais, il serait plus nombreux au

19 sein du parlement. Puis il y avait aussi dans la Chambre haute, le conseil

20 des communautés nationales, les Turcs, les Romes, les Egyptiens. Tous

21 seraient représentés. Tous seraient représentés sur un pied d'égalité.

22 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Vous prenez la parole pendant trop

23 longtemps. Le témoin souhaite t-il apporter quelques éléments

24 supplémentaires à ce que l'accusé vient de dire ?

25 LE TÉMOIN : [interprétation] Je n'en doute si vous dites qu'il y a des

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1 documents écrits qui témoignent de cela. Je n'en doute pas, mais à l'époque

2 où nous nous sommes rencontrés, où nous en avons parlé, vous n'êtes pas

3 rentré dans l'explication que vous venez de donner.

4 M. MILOSEVIC : [interprétation]

5 Q. Très bien. Monsieur Sarinic, revenons aux activités qui ont été les

6 vôtres à l'époque. Je suis en page 54. Manolic, autrement dit, le chef du

7 gouvernement dit : "Je pense qu'il est possible qu'on lance une attaque sur

8 l'ensemble de ce secteur de la Slavonie occidentale, et qu'on nettoie cela

9 et que l'on se fortifie là à l'est."

10 Donc vous parlez du nettoyage lors de cette réunion ?

11 R. Lorsque vous citez cela, moi, je ne sais pas quels ont été les termes

12 prononcés.

13 Q. Je vous en donne lecture. Vous pouvez vérifier.

14 R. Fort bien. Mais vous évoquez ici le nettoyage dans le sens du génocide,

15 mais ceci est tout à fait inacceptable, car vous savez que pendant ces

16 moments dramatiques, la Croatie n'a pas eu recours à cela. Elle n'a pas

17 cherché à faire partir les Serbes. Vous devez savoir que les plans

18 d'évacuation des Serbes, que ce soit en Slavonie occidentale, que ce soit

19 dans le secteur sud, qu'ils ont été élaborés au début de l'année 1993. En

20 d'autres termes, deux ans et demi avant qu'il n'y ait eu la Tempête.

21 Q. Quels plans ?

22 R. Les plans sur l'évacuation de la population. C'est la partie serbe qui

23 a élaboré ces plans.

24 Q. A quel moment la partie serbe, a-t-elle fait des plans et pour quelles

25 raisons ?

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1 R. Au début de l'année 1993.

2 Q. 1993 ?

3 R. 1993.

4 Q. Monsieur Sarinic, attendez un instant. Je vous parle de cet entretien

5 de 1991, votre entretien. Votre chef de gouvernement dit qu'il faut

6 nettoyer, qu'il faut lancer des attaques sur la Slavonie occidentale, qu'il

7 faut nettoyer, c'est l'année 1991, à la mi-1991. C'est là que vous en

8 discutez au sein de votre conseil suprême croate. C'est cela qui

9 m'intéresse.

10 R. Vous parlez de l'opération militaire Eclair.

11 Q. Non, on y viendra. Je parle de votre réunion à la mi-1991.

12 R. Si c'est bien le terme de "nettoyage" qui a été employé, je ne pense

13 pas que cela a été dans ce sens-là.

14 Q. Lorsque vous aurez retrouvé ce document, ou plutôt lorsqu'on vous aura

15 retrouvé ce document, vous pourrez vérifier cela. On pourra y revenir.

16 Vous ne m'avez pas répondu lorsque je vous ai cité cette déclaration au

17 sujet du Kosovo. Il y a eu des négociations avec notre gouvernement,

18 représentation du Kosovo, radicalisation. Quel autre gouvernement pouvait

19 être notre gouvernement, ce dont Malonic parle ?

20 R. Je ne peux pas vous répondre. Ce que je sais, c'est que nous n'avions

21 aucune relation que ce soit politique ou stratégique au Kosovo. Tout

22 simplement, je ne comprends pas la phrase que vous avez citée. Nos

23 activités, à l'époque, tout simplement, étaient inexistantes, pratiquement.

24 Q. Au Kosovo ?

25 R. Au Kosovo, oui. Nous n'avions pas un gouvernement fantoche qui aurait

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1 été installé par la Croatie au Kosovo. Ceci est impossible, et je suis très

2 ferme là-dessus.

3 Q. Très bien, Monsieur Sarinic. Revenons-en à la Croatie. Les Serbes, en

4 tant que peuple constitutif que vous avez rayé de la constitution, de

5 quelle manière aurait-il pu être des citoyens sur un pied d'égalité en

6 Croatie ?

7 R. Monsieur Milosevic, ce que vous venez de dire, vous l'avez réitéré à de

8 nombreuses reprises. Je dois préciser. Vous dites que nous avons rayé les

9 Serbes de la constitution croate. Je vais essayer vraiment de rafraîchir

10 mes souvenirs en mieux. Je vous dirai la chose suivante, sur quoi repose la

11 constitution croate, quels sont ses fondements.

12 Alors, je vous cite :

13 "La Croatie est l'état du peuple croate ainsi que l'état de tous les autres

14 peuples et minorités qui sont les citoyens de la République de Croatie."

15 Par la suite, suit l'énumération : "les Serbes; les Slovènes; les

16 Musulmans; les Hongrois; les Tchèques; les Slovaques, ainsi que les Juifs."

17 Il se peut que j'aie omis quelqu'un, que j'ai oublié quelqu'un. "Qui seront

18 parfaitement égaux aux ressortissants du peuple croate, dans l'exercice de

19 leurs aspirations ou souhaits nationaux, et ceux encore conformité avec les

20 normes les plus exigeantes des Nations Unies et du monde libre."

21 On ne les a absolument pas rayés. Je connais aussi la formulation dans

22 votre constitution. Il s'agit d'une formulation légèrement différente, mais

23 la substance reste la même.

24 Q. La substance n'est pas absolument pas la même. On ne se lancera pas

25 dans un débat constitutionnel, car du moins, il s'agit là des textes qui

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1 sont tout à fait disponibles. Ce sont des documents publics. Et puis un

2 deuxième point, dans cette constitution, il était défini que la République

3 de Croatie était l'état du peuple croate, du peuple serbe, et d'autres

4 peuples. C'était cela l'ancienne constitution. Après, vous avez rayé les

5 Serbes. Vous avez dit que cet état appartenait aux Croates, et que tous les

6 autres citoyens étaient sur un pied d'égalité.

7 R. Non, de tous les autres peuples et minorités. C'était cela la

8 formulation.

9 Q. A la différence de cela, à l'Article 1 de la constitution serbe, il est

10 dit : "La Serbie est l'état de tous ses citoyens." C'est cela dont dispose,

11 que stipule l'Article 1 de notre constitution.

12 R. Il n'y a pas de différence, là. Je viens de vous préciser les choses.

13 La substance est la même.

14 Q. Je ne suis pas d'accord. Cette réunion, Slavko Degoricija, n'aurait-il

15 pas dit à cette même réunion, qu'il y a suffisamment de forces pour lancer

16 des opérations de nettoyage ? Vous en souvenez-vous ? C'est en page 072 de

17 votre texte original.

18 R. Je m'adresse aux Juges, s'il vous plaît, avant de répondre à ce genre

19 de questions, j'aimerais pouvoir consulter ce document, car je ne peux pas

20 répondre sans voir le texte. Il est inutile de se lancer dans ce genre de

21 débat.

22 L'ACCUSÉ : [interprétation] Fort bien.

23 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Un instant.

24 M. NICE : [interprétation] Il s'agit du même document. On l'a retrouvé. On

25 est en train de l'imprimer. Il s'agit d'un document qui est plutôt

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1 volumineux. Nous faisons tout ce que nous pouvons pour l'obtenir le plus

2 vite possible.

3 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Oui. Pour ce qui est du témoin, si vous

4 pouvez nous aider en répondant, nous vous en serons reconnaissant. Bien

5 entendu, si vous n'êtes pas en mesure de répondre, dites-le. Dites qu'il

6 s'est passé trop de temps depuis. Si, compte tenu des circonstances, vous

7 ne vous sentez pas en mesure de répondre correctement à une question,

8 dites-le. Si vous avez besoin de documents, nous allons essayer de les

9 retrouver.

10 Monsieur Milosevic, oui, je vous en prie.

11 M. MILOSEVIC : [interprétation]

12 Q. Qu'en dit M. Tudjman lors d'une session intitulée le 25 novembre 1993,

13 page 01865 [imperceptible]. Les derniers chiffres sont 60366536.

14 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, j'ai ce procès

15 verbal en B/C/S. Nous pouvons le communiquer au témoin.

16 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Oui, je vous en prie. Merci.

17 M. MILOSEVIC : [interprétation]

18 Q. Je vais citer juste une portion de ce qu'il dit : "Non seulement la

19 Serbie --" donc, page 136.

20 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Oui. Essayons de retrouver le numéro.

21 M. MILOSEVIC : [interprétation]

22 Q. Oui. Je suis en train de parler de ce qui figure ici en date du 25

23 novembre 1993. C'est le procès verbal. Je donne lecture de la page dont les

24 trois derniers chiffres sont 136. "Non seulement les Serbes de Knin à la

25 Baranja manipulent avec cela. Il y a un certain nombre de raisons pour que

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1 la Croatie se prépare pour un règlement de compte militaire. Non seulement

2 pour un règlement de compte militaire, mais aussi pour un nettoyage

3 ethnique total, comme l'opération Maslenica et comme l'opération Gospic

4 l'ont prouvé. Ils manipulent cela, à la fois devant leur propre population

5 et devant le monde entier. Il est difficile alors de rejeter leurs

6 arguments, de les réfuter, si lorsqu'il s'agit de la Maslenica, nous avons

7 nettoyé toute la région jusqu'aux derniers petits chatons. Non seulement

8 parce que nous avons reçu une instruction à le faire, mais parce que ceci

9 n'a pas été uniquement une opération militaire. Ceci s'est transformé en

10 autre chose. Et la même chose s'est reproduite avec Gospic. Ceci a confirmé

11 à la fois notre niveau de préparation militaire mais aussi nous a été

12 préjudiciable."

13 Donc, lui-même dit que toute la région a été nettoyée jusqu'aux derniers

14 petits chatons. Vous vous en rappelez, Monsieur Sarinic, n'est-ce pas ?

15 R. Non. Je ne me souviens pas de ces propos mais lorsque vous dites

16 jusqu'aux derniers chatons, ceci ne semble pas être, du tout, tiré d'un

17 discours du président. Ce n'est pas un mot croate que vous citez là.

18 Q. Mais je me contente d'en donner la lecture.

19 R. Fort bien. Mais pour ce qui est de cela, s'il s'agit là d'un document

20 authentique, d'une transcription authentique, alors, c'est bien comme cela

21 que cela s'est passé. Mais, s'il vous plaît, n'inversons pas les thèses.

22 C'était la révolution des troncs d'arbres, 30 % de la Croatie s'est trouvée

23 occupée, des événements atroces, des incidents atroces se sont reproduits.

24 Rappelons-nous Skabrnja et cetera. Ainsi donc, replacé dans ce contexte, il

25 faut analyser cela replacé dans son contexte. Qui a occupé 30 % de la

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1 Croatie. Vous étiez parfaitement au courant de cela.

2 Q. Monsieur Sarinic, dans la région que vous qualifiez de 30 % la Croatie,

3 les Serbes ont vécu pendant des siècles. Ces secteurs ont été placés sous

4 la protection des Nations Unies tant qu'on n'aura pas trouvé une solution

5 politique. Donc, vous le savez parfaitement vous-même.

6 R. Donc vous acceptez que cette révolution des troncs d'arbres a été un

7 acte légitime et vous me disiez, à l'époque, que ceci n'a jamais été le

8 fait des Serbes, que c'était fous et cetera.

9 Q. Monsieur Sarinic, il n'en est pas ainsi. Vous venez de dire que dès

10 cette réunion à Karadjordjevo, d'après vos souvenirs et d'après ce que vous

11 avez dit ici, et bien que Tudjman a fait mention de cette révolution des

12 troncs d'arbres en disant que c'était la Serbie qui a fourni son appui à

13 cela, qui a orchestré cela et moi, je n'étais pas d'accord avec cette

14 proposition. Vous savez lorsque cela s'est produit, moi, j'étais en train

15 de passer mes vacances à Dubrovnik et en Serbie. Personne ne savait que

16 c'était en train de se dérouler en Croatie. Et c'était vous-même qui avez

17 orchestré cela et pas la Serbie. Et c'était une révolte serbe --

18 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Vous êtes censé poser des questions et

19 non faire des discours. Alors, quelle est votre question pour le témoin ?

20 M. MILOSEVIC : [interprétation]

21 Q. Monsieur Sarinic, était-il évident que ce qui s'était produit à Knin

22 était une réaction suite à des représailles mises sur pied par votre

23 gouvernement contre les Serbes ?

24 R. Non, ceci n'est nullement vrai. Cette révolution des troncs d'arbres

25 avait pour objectif d'occuper une partie de la Croatie, 30 % de la Croatie.

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1 Dans son ensemble, la communauté internationale était hostile à cela. Et

2 Monsieur Milosevic, lors de nos 14 entretiens, vous m'avez toujours dit de

3 même, que vous n'étiez pas favorable à cela, que jamais Knin ne pouvait

4 devenir une ville serbe et cetera.

5 Q. Mais vous inversez les choses pas mal, Monsieur Sarinic. Ce que je vous

6 ai dit, c'était que la Serbie n'avait pas de prétention territoriale.

7 Quant à la relation entre Knin et Zagreb, et bien, pendant toute cette

8 période du temps, Monsieur Sarinic, si vous vous souvenez bien, dans les

9 entretiens avec Tudjman et aussi bien lorsque vous veniez me voir en me

10 transmettant les messages de Tudjman, on a bien insisté sur le fait qu'il

11 fallait trouver une solution politique dans des négociations directes entre

12 Knin et Zagreb. N'était-ce pas, comment dirais-je, le dénominateur commun

13 de toutes ces activités entreprises pour calmer la situation, tout ce qu'on

14 a entrepris ?

15 R. Et bien, vous savez que nous avons insisté là-dessus. Mais entre Zagreb

16 et Knin, ceci n'était pas possible. C'était possible entre Zagreb et

17 Belgrade. Non.

18 Q. Au contraire ?

19 R. Mais n'oublions pas le problème de l'ouverture des autoroutes, c'est

20 dans votre bureau à Belgrade que nous nous sommes d'accord surtout pour

21 qu'on ouvre les autoroutes et vous avez fait pression sur des gens à

22 l'époque. J'ai respecté votre initiative là-dessus.

23 Q. Bien entendu.

24 R. Mais vous étiez pleinement impliqué là-dedans. Ceci ne fait aucun

25 doute. Les dirigeants de Knin ne pouvaient rien faire, ne pouvaient pas

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1 bouger avant d'avoir reçu le feu vert de votre part.

2 Q. Tout d'abord, Monsieur Sarinic, ceci n'est pas vrai. Et lorsque vous

3 dites que j'étais totalement impliqué là-dedans, oui, dans la recherche

4 d'une solution politique pour qu'on normalise les relations, normalise les

5 relations entre la Serbie et la Croatie, qu'il y ait des négociations entre

6 Knin et Zagreb. Oui, bien sûr. Je me suis engagé pour que cela se fasse. Et

7 là, je vous donnerai lecture de quelque chose. Ce n'est pas le document qui

8 provient de la partie adverse, c'est un document qui est dans le domaine

9 public, le 16 juillet 1993, et je donne lecture de la chronologie, "Les

10 gouvernements de la République de Croatie et de la --

11 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Pour que le témoin puisse vous répondre,

12 précisez nous de quel document il s'agit. D'où citez-vous ?

13 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur May, il s'agit d'un livre qui contient

14 la chronologie, la chronologie puisée dans les journaux, dans la presse de

15 cette période-là. Et M. Sarinic se rappellera cela. "Les gouvernements de

16 la République de Croatie et de la Krajina serbe ont signé un accord à Erdut

17 aux termes de cet accord. La Croatie s'engage de --"

18 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Je ne sais pas de quoi vous parlez. Quel

19 est ce livre ? Quel est ce livre dont vous êtes en train de donner

20 lecture ? Quel est ce document que vous présentez ?

21 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur May, ce que je suis en train de lire a

22 été publié dans toute la presse ces jours-là et je parle des événements qui

23 se sont déroulés. Je tiens à confirmer mon affirmation, à savoir que nous

24 avons déployé tous nos efforts afin que des négociations pacifiques

25 apportent une solution politique.

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1 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Ce sont vos journaux, n'est-ce pas ? De

2 quelle s'agit-il ? Quelle est la date qui vous intéresse ?

3 L'ACCUSÉ : [interprétation] Le 16 juillet 1993. Je parle d'un événement où

4 le gouvernement --

5 M. MILOSEVIC : [interprétation]

6 Q. Rappelez-vous, vous souvenez-vous de cela, Monsieur Sarinic, le 16

7 juillet 1993, entre Knin et Zagreb, comme il est dit, entre les

8 gouvernements de la République de Croatie et de la Krajina serbe. Un accord

9 a été signé à Erdut. La Croatie s'engage de retirer ses troupes des

10 territoires occupés de la Krajina, Ravni Kotor et Maslenica, le Miljevac

11 plateau, le central, et cetera en échange de la réouverture du pont sur

12 Maslenica. Vous rappelez vous c'est un accord d'Erdut. C'est de notoriété

13 publique. C'était le 16 juillet 1993 mais dès le lendemain --

14 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Vous ne pouvez pas donner lecture de

15 passages aussi longs sans donner la possibilité au témoin de répondre. Le

16 témoin est venu ici pour déposer. Il ne vous appartient pas à vous de

17 déposer.

18 Monsieur le Témoin, savez-vous de quoi parle l'accusé ?

19 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Je souhaite dire deux choses car à un

20 moment l'accusé a dit qu'il a entrepris tout ce qui lui a été possible afin

21 de normaliser les relations entre la Croatie et la Serbie car la paix dans

22 cette région dépend précisément des relations entre la Croatie et la

23 Serbie. Ceci étant dit, je dois dire que l'accusé a personnellement refusé

24 toute possibilité de normalisation et de reconnaissance réciproque de la

25 Croatie et de la Serbie.

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1 Depuis 1991 jusqu'à la fin, à chaque fois, nous avons insisté là-dessus.

2 Quant à l'accusé, il a toujours trouvé des raisons pour que ceci n'ait pas

3 lieu car ceci, dans son opinion, et cetera, et cetera, serait mal

4 accueilli.

5 Puis nous avons proposé une autre articulation de cela, à savoir, que ceci

6 fasse partie d'une reconnaissance réciproque et mutuelle de tous les pays

7 issus de l'ex-Yougoslavie. Ceci non plus, n'a été accepté.

8 M. MILOSEVIC : [interprétation]

9 Q. Mais je vous pose une question concrète au sujet cet accord que je

10 viens de citer. Nous avons cherché à encourager une entente entre Zagreb et

11 Knin. Le 16 juillet 1993, à Erdut, vous êtes parvenu à passer cet accord.

12 Vous en rappelez-vous ?

13 R. Oui, je m'en souviens. Je ne me souviens pas également de la suite.

14 Q. Puisque vous vous souvenez de la suite, le lendemain, le 17 juillet, ce

15 qui s'est passé c'est que Tudjman et moi-même, nous nous sommes rencontrés.

16 Il y a un rapport. Il est dit : "Le président de la République de Serbie,

17 Slobodan Milosevic et le président de la République de Croatie, Franjo

18 Tudjman, après l'entretien qui s'est tenu sous l'égide de Stoltenberg et

19 David Owen ont donné cette déclaration conjointe."

20 Je ne vous donnerai pas lecture de l'ensemble du texte de cette déclaration

21 conjointe. C'était le lendemain de la signature de cet accord entre votre

22 gouvernement et le représentant de la Krajina à Erdut. Au point 3 de cette

23 déclaration conjointe entre Tudjman et moi, vous étiez un proche de

24 Tudjman. Vous vous en souvenez, vous étiez là avec Tudjman. D'ailleurs,

25 cela a été publié dans les journaux. Il est dit : "En exprimant sa

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1 satisfaction suite à la solution de la question de Maslenica et de Peruca,

2 les présidents se félicitent de l'accord qui a été passé sur la cessation

3 des hostilités, et reconnaissent que chaque individu ou groupe qui

4 violeront cet accord, doivent en être tenus responsables. Les présidents

5 insistent sur l'importance de cet accord comme étant un exemple de la

6 possibilité de résoudre les conflits de manière pacifique, et considèrent

7 qu'il s'agit d'un jalon vers la résolution des problèmes, de tous les

8 problèmes entre la Croatie et la République de Serbie dans leur ensemble."

9 C'est au lendemain de vote accord passé à Erdut, sur le retrait de votre

10 armée des territoires qui étaient placés sous la protection de l'ONU,

11 c'était dans la région de la Krajina--

12 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Nous devons arrêter ces discours. Donnez

13 au témoin la possibilité de répondre. Ne monopolisez pas le temps de la

14 parole.

15 LE TÉMOIN : [interprétation] Cet accord que vous avez signé avec le

16 président Tudjman, le 17 juillet 1993, je vous cite : il me semble que

17 c'est bien la date, "C'était un geste diplomatique, c'est un document

18 diplomatique purement et simplement. Son objectif était d'étayer l'accord

19 très concret que nous venions de signer." Cependant, je dois ajouter que

20 cet accord n'a pas été respecté. En aval, dans la suite, les choses

21 n'avaient pas de signification. Car tout simplement on nous a trompés de

22 manière systématique dans ces entretiens. J'y ai même bénéficié de votre

23 soutien, de votre appui. Monsieur Milosevic, vous me disiez que les

24 [imperceptible] là-bas étaient des fous. Car à Lillehamer, j'étais avec

25 Hadzic. A Dobanovci aussi, partout dans le monde. Je me suis rendu chez

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1 vous. A chaque fois, chacun de nos accords a été déjoué.

2 M. MILOSEVIC : [interprétation]

3 Q. Nous en viendrons quant à savoir comment on a trahi chacun de ces

4 accords. A chaque fois que vous vous êtes lancé dans des attaques armées,

5 effectivement, ils ont gelé leur relation avec vous. Ils ne vous ont jamais

6 attaqué en premier.

7 Je vous en prie, s'agissant de cette tentative de normaliser les relations.

8 Vous vous rappelez très bien le mois de janvier 1994, palais des nations à

9 Genève, Vladislav Jovanovic, ministre de l'Etranger de la Yougoslavie et

10 Mate Granic, votre ministre des Affaires étrangères, ils ont fait une

11 déclaration commune sur une normalisation graduelle des relations entre la

12 Croatie et la Yougoslavie. On a prévu l'ouverture des missions

13 diplomatiques, des gouvernements à Belgrade, des deux gouvernements de

14 Belgrade et à Zagreb pour faciliter les relations entre les deux états--

15 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Je ne vous autoriserai pas à poursuivre

16 ainsi. Au sujet des relations qui ont été gelées, cela été le début de la

17 question de l'accusé. Souhaitez-vous répondre à cela ? Au sujet des

18 attaques armées, est-ce que vous avez quelque chose à dire au sujet de

19 cela, au sujet de la question telle qu'elle a été posée jusqu'à

20 maintenant ?

21 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, tout ce que vient de

22 dire l'accusé doit être replacé dans le contexte de la situation. On ne

23 peut pas extraire du contexte un ou deux exemples qui démontreront que

24 nous étions des méchants, et eux les bons. N'oublions pas que c'était une

25 agression sur la Croatie, que l'ensemble des événements se déroule sur le

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1 territoire croate, que jamais un seul mètre carré du territoire de la

2 Serbie n'a fait partie de ces opérations militaires, mais en revanche a été

3 appliquée dans les décisions politiques et stratégiques, qui elles, ont eu

4 pour conséquence des situations atroces et affreuses qui se sont déroulées

5 sur les autres territoires. C'est cette réponse que je peux vous apporter

6 pour le moment.

7 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Oui. En fait le moment est venu de

8 suspendre l'audience. Avant de le faire, essayons de voir combien de temps

9 reste à l'accusé. Vous avez utilisé une heure et 15 minutes.

10 [La Chambre de première instance se concerte]

11 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Monsieur Milosevic, en l'espèce, nous

12 sommes prêts à vous accorder 20 minutes de plus. Une heure un quart, plus

13 20 minutes supplémentaires.

14 M. NICE : [interprétation] Monsieur le Président, nous avons retrouvé l'une

15 des transcriptions en B/C/S. Nous essayons d'y apporter des mentions, de

16 faire correspondre cela à la pagination. Si le témoin souhaite faire cela

17 pendant la pause de 20 minutes, ceci est possible.

18 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Oui.

19 --- L'audience est suspendue à 10 heures 33.

20 --- L'audience est reprise à 10 heures 56.

21 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Oui, Monsieur Milosevic, poursuivez.

22 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur May, au fin du dossier de l'audience,

23 je dois préciser que le temps que vous m'avez réservé ne suffit pas du

24 tout, en effet, vu l'importance du témoin, vu le nombre de documents dont

25 on demande le versement de son truchement, il me faudrait au moins deux

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1 jours de contre-interrogatoire, et en tout, j'ai deux heures 50 minutes.

2 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Oui.

3 L'ACCUSÉ : [interprétation] Fort bien.

4 M. MILOSEVIC : [interprétation]

5 Q. On s'interroge à quoi sert un contre-interrogatoire dans ces

6 circonstances.

7 Monsieur Sarinic, vous souvenez-vous dans cette déclaration conjointe que

8 M. Tudjman et moi, nous avons fait à Genève le 17 juillet 1993, au point 1

9 de la déclaration, il est dit que les conjectures quant à la division de la

10 Bosnie-Herzégovine entre la Serbie et la Croatie sont tout à fait dénués de

11 mouvement. Deuxièmement, la seule paix durable ne peut se faire que dans

12 l'intérêt des trois peuples constitutifs et un accord est nécessaire entre

13 les trois républiques sur le système de la confédération.

14 C'était là notre position, et ceci correspondait au plan Owen-Stoltenberg

15 qui éventuellement prévoyait une représentation de l'Herceg-Bosna, d'une

16 fédération musulmane et de la Republika Srpska. Vous en souvenez-vous ?

17 R. Oui, je m'en souviens. Je me souviens aussi de ce qui s'est passé par

18 la suite.

19 Q. Fort bien, Monsieur Sarinic. Je vous demande uniquement si vous vous

20 souvenez de cela. Je suis ravi de voir que c'est bien le cas.

21 Maintenant rapidement, parlons des réunions auxquelles vous avez assisté

22 avec moi et des tentatives que vous avez déployées pour déformer beaucoup

23 de choses qui se sont dites à ces réunions. Je serais plus précis --

24 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Ne formulez pas de telles allégations, et

25 si vous les formulez, donner l'occasion à ce témoin de répondre.

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1 Ici l'accusé allègue que vous avez déformé les éléments de preuve

2 s'agissant de ce qui s'est passé à ces réunions. Qu'est-ce qui est vrai

3 dans tout cela, Monsieur le Témoin ?

4 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous parle de ce dont je me souviens, de

5 ce que je sais, et je vous ai dit ce dont je me souviens s'agissant des

6 réunions que j'ai eues avec M. Milosevic. Bien entendu, il y a eu en tout

7 14 rencontres. Il y a eu pratiquement 40 heures de réunions en tête à tête.

8 Dans mon livre, j'ai également dit que 90 % de ceci se base sur des notes

9 que j'ai prises en avion lorsque je rentrais à Zagreb, et que 10 % se

10 fondent sur mes souvenirs. Mais ces 10 % se base sur le souvenir que j'ai

11 d'événements qui s'étaient produits deux heures auparavant. Je rejette

12 catégoriquement la thèse avancée par l'accusé, à savoir que j'aurais

13 déformé les choses.

14 M. MILOSEVIC : [interprétation]

15 Q. Fort bien. Mais je dirais qu'on peut mettre en doute vos conclusions,

16 en effet, lorsque vous parlez de la première réunion à Karadjordjevo, vous

17 me citez. Je suppose que c'est exact parce qu'effectivement, j'ai prôné les

18 meilleures relations possibles entre la Croatie et la Serbie. Vous le dites

19 vous-même, ces rapports, ces relations entre les Serbes et les Croates, la

20 Serbie et la Croatie, étaient la situation clé. Vous me citez, j'aurais dit

21 : "Voilà, nous sommes en mesure de résoudre tous les problèmes." N'est-ce

22 pas ?

23 R. Oui.

24 Q. Et vous expliquez que c'était une phrase très significative pour vous

25 parce qu'elle était sans doute en rapport avec la Bosnie. Mais dites-moi,

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1 qu'est-ce qui vous permet de conclure que lorsque nous disons qu'il est

2 possible de résoudre un autre problème parce que je prenais une solution

3 pacifique à tous nos problèmes, comment pouvez-vous dire que ceci était en

4 rapport avec la Bosnie alors qu'on n'a pas mentionné la Bosnie ? Et vous

5 l'avez dit vous-même, Tudjman parle de la révolution des troncs d'arbres.

6 C'est en fait les résultats des représailles que vous avez engagées contre

7 les Serbes, et ceci ne venait pas de Serbie. J'ai dit qu'il était

8 impossible de résoudre tous les problèmes se posant entre la Serbie et la

9 Croatie. Comment en êtes-vous arrivé à conclure que ceci était en rapport

10 avec la Bosnie ?

11 R. C'est là le produit de mes réflexions. Ce sont mes conclusions que je

12 tire de ce que j'ai entendu là-bas et de ce qui s'est passé par la suite.

13 Cependant, au cours des dix premières minutes à peu près, Tudjman a adopté

14 une position très ferme. Il vous a même attaqué à propos de cette

15 révolution des troncs d'arbres. Il a dit que vous étiez à la source de tout

16 cela. Vous avez nié cela. Vous avez dit que c'était un problème qui se

17 posait entre nous et Knin, puis vous avez ajouté, "Mais il est possible de

18 trouver une solution à ce problème."

19 On peut tirer des conclusions logiques. Si vous étiez exclus de ce

20 processus et si vous dites qu'il est possible de trouver une solution,

21 manifestement vous pensez à quelques choses d'autres.

22 Q. Monsieur Sarinic, je ne pense pas que votre logique soit très solide.

23 La Bosnie n'a jamais été mentionnée. Jamais vous n'avez entendu prononcer

24 le terme de Bosnie.

25 R. Plus tard, j'ai entendu prononcer le nom de la Bosnie au moment de

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1 parler au président. Il ne m'a jamais menti.

2 Q. Est-ce qu'il vous a dit qu'on s'était mis d'accord pour diviser la

3 Bosnie ?

4 R. Non. Non, mais il m'a dit que vous aviez parlé de la Bosnie.

5 Q. Fort bien. Nous avons parlé de l'intégrisme islamiste, et je lui ai

6 donné des informations que j'avais reçues de façon complète. Je ne sais

7 même plus qui avait rédigé cela; je m'en souviens plus. Mais je lui ai

8 donné cette information qui s'est avérée, n'est-ce pas exact ?

9 R. Oui, mais cela s'est passé à Tikves, pas à Karadjordjevo.

10 Q. Fort bien.

11 R. Vous lui avez donné et j'en ai conclu que vous vouliez en fait le

12 piéger sur la question -- disons lancer un hameçon pour ce qui est de la

13 question de la Bosnie-Herzégovine.

14 Q. Fort bien, Monsieur Sarinic. Après cette réunion de Karadjordjevo, qui

15 portait sur nos rapports, plusieurs jours plus tard, le 5 avril, il y a eu

16 une réunion à Split à laquelle ont assisté tous les présidents des

17 républiques. Nous étions six et nous avons dit à cette réunion que Tudjman

18 et moi, nous avions discuté de nos rapports réciproques à Karadjordjevo. Ce

19 n'était un secret pour personne, pas pour les présidents des républiques,

20 n'est-ce pas ? R. Votre réunion n'était pas un secret mais le sujet de

21 cette réunion l'a été.

22 Q. Mais vous étiez présent à cette réunion-là et nous avons dit que nous

23 avions discuté de nos rapports mutuels et de la façon dont on pouvait les

24 améliorer, n'est-ce pas, ce que nous avons dit ?

25 R. Là c'est de recourir à un langage diplomatique. Ce qui se dissimule

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1 derrière ces mots diplomatiques c'est une autre paire de manches.

2 Q. Fort bien, Monsieur Sarinic. J'ai pris des notes hier au moment où vous

3 interveniez. Vous m'avez mentionné Arkan et là, j'ai lancé une boutade.

4 Première chose, ce que vous dites est tout à fait inexacte. Deuxième chose,

5 --

6 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Attendez. Laissez le temps au témoin de

7 réagir. L'accusé nie qu'une telle chose n'ait jamais été dite. Etes-vous en

8 mesure de répondre, Monsieur le Témoin.

9 LE TÉMOIN : [interprétation] Je le répète. C'est vraiment la vérité, la

10 vérité absolue que j'ai dite, à savoir qu'en riant, l'accusé a dit : "Bien,

11 il faut que quelqu'un s'occupe du boulot pour moi." J'entends encore les

12 mots résonnés dans mes oreilles. Mais ceci a été dit en guise de boutade.

13 Mais cela était dit quand même. Et vous connaissez la maxime : Il n'y a pas

14 de fumée sans feu. C'est bien ma conclusion.

15 M. MILOSEVIC : [interprétation]

16 Q. Oui, mais vous avez dit hier que, sans appui une telle armée se

17 composant de 5 000 hommes ne serait fonctionnée. Vous l'avez dit hier,

18 n'est-ce pas ?

19 R. Oui.

20 Q. Et savez-vous que la Garde des volontaires serbes d'Arkan Zeljko

21 Raznjatovic n'a jamais dépassé la taille d'une compagnie. Alors où sont ces

22 5 000 hommes ? D'où tenez-vous ces chiffres exorbitants que vous avez

23 livrés ici ?

24 R. Je les tiens de nos services. Ce sont ces services qui nous ont fourni

25 ces chiffres. J'ajoute que, manifestement, si vous n'étiez pas partie

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1 prenante à ce processus, vous ne connaîtriez pas ce chiffre. Vous ne

2 sauriez pas si ce sont des effectifs de la taille d'une compagnie ou pas.

3 Donc, vous étiez tout à fait au courant.

4 Q. Moi, je vous parle des données disponibles parce que la Garde des

5 volontaires serbes étaient effectivement allée là-bas en tant que force

6 composée de volontaires et s'est toujours trouvée sous le commandement de

7 l'armée de la Republika Srpska quand c'était en Bosnie ou sous le

8 commandement de l'armée de la Krajina serbe lorsqu'elle se trouvait en

9 Krajina.

10 R. Ce n'est pas exact. Vous avez un document confisqué. Cela est une

11 chose. Il y a aussi des rapports, des conversations interceptées disant

12 qu'ils se trouvaient en RSK, ces hommes, et qu'ils se sont comportés comme

13 s'ils étaient supérieurs à tout contrôle effectué par l'armée de la RSK. On

14 leur a donné des armes qu'ils n'ont jamais restituées et qu'on les haïssait

15 dans l'armée de la RSK.

16 Q. Fort bien, Monsieur Sarinic. Moi, j'ai rencontré Arkan une seule fois

17 dans ma vie. C'était au moment où il était parlementaire à l'assemblée. Je

18 l'ai rencontré comme j'ai rencontré tous les députés de l'assemblée lorsque

19 j'y allais. Vous n'avez aucune conversation, aucun document qui pourrait

20 établir un lien quelconque entre moi-même et les activités de l'armée ou de

21 la Garde des volontaires serbes. Auriez-vous un tel document ?

22 R. Non. Non, mais vous avez pour réputation de laisser très peu de traces

23 dans votre sillage.

24 Q. Oui, vous auriez pu rencontrer ou trouver une conversation interceptée.

25 Or, vous n'avez même pas ce genre de documents. Même vous, vous n'êtes pas

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1 en mesure de produire un seul document de ce genre.

2 Monsieur Sarinic, il n'y a pas de doute, vous êtes venu me voir au nom de

3 votre président, le président Tudjman. Vous êtes venu me remettre ses

4 messages et vous lui avez remis les miens ?

5 R. Exact.

6 Q. Et c'était toujours en vue de normaliser les relations, en vu d'essayer

7 d'entreprendre quelque chose en commun pour ramener la paix, n'est-ce pas ?

8 R. Oui, c'était comme cela au niveau des détails.

9 Q. Fort bien. Tudjman et moi-même, nous nous rencontrions à Genève. Nous

10 sommes allés à Genève sur l'invitation de Owen et Stoltenberg et nous avons

11 assisté aux réunions des trois délégations à Genève par la Bosnie-

12 Herzégovine ?

13 R. Oui.

14 Q. Et nous avons fait l'impossible pour être constructif, pour essayer de

15 parvenir à un accord de paix, n'est-ce pas ?

16 R. Sans doute. Mais je n'ai pas assisté à toutes ces réunions.

17 Q. Fort bien.

18 R. Messieurs les Juges, m'autorisez-vous à répondre ?

19 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Oui.

20 LE TÉMOIN : [interprétation] Je m'explique. Voici ce qui s'est passé. Il y

21 a une heure, j'ai dit que dans certaines actions, vous avez pris des

22 mesures positives. Mais n'oublions pas une chose, vu ce que vous saviez, et

23 avec votre concours, une situation s'est créée et dans le cadre de cette

24 situation épouvantable, vous avez joué le rôle de négociateur, d'artisan de

25 paix. Mais où était le problème ?

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1 M. MILOSEVIC : [interprétation]

2 Q. Le problème c'était que c'est vos activités qui ont abouti à ce conflit

3 et non pas les activités de la Serbie. La Serbie n'a pas attaqué la

4 Croatie. Vous avez attaqué les Serbes de Croatie.

5 R. Non, nous n'avons pas attaqué les Serbes en Croatie. Les Serbes en

6 Croatie se sont soulevés comme un cheval de Troie suite à la politique que

7 vous aviez.

8 Q. Mais vous savez que pendant plusieurs siècles, c'était les Serbes qui

9 avaient été placés dans une situation où ils devaient être un cheval de

10 Troie en Croatie.

11 R. Il n'y a pas que les Serbes. Il y avait les Croates et d'autres

12 également. Nous avons dû accueillir des réfugiés aussi bien de la Republika

13 Srpska que de la RSK, 600 000 en tout. Il y a eu 600 000 réfugiés en

14 Croatie, à peu près, parce que la totalité de la Republika Srpska avait été

15 nettoyée des Croates en RSK. Voilà les faits. C'était vrai aussi en RSK.

16 Vous ne pouvez pas dire que ce sont seulement les Serbes qui y vivaient.

17 Q. Monsieur Sarinic, il y avait pratiquement 1 million de réfugiés en

18 Serbie qui venaient de la Bosnie-Herzégovine et de la Croatie à l'époque.

19 R. Ils étaient organisés par les forces de la RSK. Je vous ai déjà dit que

20 j'ai vu des documents où Mrksic parle à Babic, et Mrksic dit à la radio

21 Belgrade qu'il y avait un plan d'évacuation de la population. Ce sont deux

22 choses tout à fait différentes.

23 Q. Fort bien, Monsieur Sarinic. Revenons à cette prémisse fondamentale, à

24 savoir qu'on a lancé des tentatives dans ce sens et que vous étiez le

25 relais de Tudjman pour me voir et que moi, par votre truchement, j'ai

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1 relayé des messages à Tudjman. On s'est rencontré à Genève pour essayer de

2 normaliser la situation. Vous avez sans doute en mémoire votre assemblée du

3 13 mai en 1993 à Zagreb. Vous avez assisté à la réunion en même temps que

4 Tudjman et Tudjman a dit, là, je le cite : "Il est intéressant de voir

5 qu'en plus des contrats avec Belgrade dans lesquels furent proposé une

6 normalisation de la situation, parce qu'il disait qu'il fallait proposer

7 des lignes de communication en Dalmatie pour normaliser la situation et

8 nous n'avons pas été dupé par cette proposition."

9 C'est ce que Tudjman a dit. Il a ajouté ceci : "Hrvoje a parlé de ceci et

10 des mesures ont été prises par rapport aux dirigeants de Bosnie parce qu'il

11 n'y avait pas de pleine et entière collaboration entre Belgrade et la

12 Bosnie, entre Belgrade et Knin et c'est pour cela qu'il voulait que notre

13 homme vienne demain."

14 Par conséquent, Monsieur Sarinic, nous, donc Belgrade, nous l'avons fait de

15 notre mieux pour normaliser la situation. Ici, on a parlé de

16 l'approvisionnement d'électricité et on a envisagé aussi une solution

17 politique.

18 R. Je vais vous dire ceci et je suis surpris que vous me posiez la

19 question. Voilà comment se présentait la situation, en réalité, sur le

20 terrain. Tous les accords, en fait, ont été abandonnés, déjoués. On nous a

21 laissé tombé pour tous ces accords et tous nos efforts sont tombés à l'eau.

22 Il y avait notamment cet effort des patrouilles conjointes --

23 Q. C'est de cela que vous parlez ?

24 R. Oui. On vous l'a laissé les coups des franches, et vous avez dit :

25 "Laissez la FORPRONU circulé." Et puis vous avez insisté

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1 pour que certains des Serbes se trouvent dans ces jeeps qui faisaient

2 partie des patrouilles. J'ai marqué mon accord uniquement pour que des

3 premières mesures soient prises, mais cela a échoué également. Il y a eu

4 l'opération Eclair formellement entre guillemets vous étiez apparemment un

5 artisan de la paix, mais c'était entre guillemets. Lorsqu'on voit la

6 situation sur le terrain, c'est vous qui l'avez créé tout d'abord, tout

7 accord auquel on était parvenu que j'avais signé, tout accord a toujours

8 échoué.

9 Q. Ce n'est pas tout à fait comme cela que s'est passé. Je n'ai pas le

10 temps ici d'étudier ceci dans les détails. Vous savez qu'on m'a donné un

11 temps limité.

12 Quoiqu'il en soit à cet égard, vous avez sans cesse eu des pourparlers. En

13 même temps vous avez envoyé vos effectifs en Bosnie pour y mener des

14 actions, n'est-ce pas, Monsieur Sarinic ?

15 R. Non, ce n'est pas vrai.

16 Q. Vous dites que ce n'est pas vrai, c'est une réponse. Vous vous souvenez

17 sans doute de la réunion du 12 juin 1995. Bobetko, Gojko Susak, Tudjman y

18 étaient. Vous vous souvenez qu'à cette réunion, vous et quand je dis vous,

19 je dis tous ceux qui étaient présents, avaient forcé Bobetko à prendre sa

20 retraite, pour des raisons de santé apparemment. Parce qu'il n'était pas en

21 mesure de rester chef du Grand état major de l'armée de Croatie. Il a

22 refusé cette proposition de retraite.

23 R. Cette réunion s'est tenue dans le bureau du président Tudjman. Je m'en

24 souviens, effectivement.

25 Q. Vous vous souvenez sans doute que Bobetko a menacé d'en parler à

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1 l'opinion publique pour défendre son honneur militaire, son honneur

2 d'homme. Tudjman a dit que c'était là, menacer les autorités croates. Vous

3 vous souvenez de cela, de ce qu'a dit Tudjman ?

4 R. Oui.

5 Q. Bobetko poursuit il dit : "Gojko est en vie. J'ai passé des centaines

6 de nuits en Bosnie-Herzégovine. J'ai lutté comme un lion. Le président le

7 sait, rien n'était trop dur pour moi."

8 Est-ce que ceci ne montre pas que vos troupes combattaient sur le

9 territoire de la Bosnie-Herzégovine, d'après ces dires ?

10 R. Une première chose. Le général Bobetko a lui aussi écrit un livre, dans

11 lequel on trouve un chapitre qui parle précisément de ce que vous avez

12 évoqué il y a un instant. Cependant, la Croatie n'a jamais été en guerre

13 avec la Bosnie-Herzégovine. Je vais vous donner des faits à l'appui.

14 Tout d'abord, la constitution de la République de Croatie prévoit que tous

15 les citoyens se trouvant dans des territoires ou dans des pays qui sont

16 d'origine croate, doivent être protégés. C'est une première chose. Jamais

17 la Bosnie-Herzégovine n'a déclaré la guerre à la Croatie. Il n'y a pas un

18 seul document, qu'aurait envoyé soit le président, soit le parlement, soit

19 le gouvernement, disant que l'armée croate devrait aller en Bosnie-

20 Herzégovine.

21 Q. Oui, mais elle s'y est trouvée.

22 R. Un instant, laissez-moi terminer. Après, nous avons eu

23 600 000 réfugiés. C'étaient surtout des Musulmans, je le précise. Nous nous

24 sommes occupés d'eux. Nous nous sommes occupés de leurs blessés aussi. Nous

25 nous leur avons fourni de l'aide et du matériel. N'est-il pas paradoxe de

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1 doter quelqu'un en armes, si on est en guerre avec ce quelqu'un. Voilà les

2 faits que je connais.

3 Pour ce qui est du reste, je laisse le soin à M. Bobetko de se souvenir de

4 tout cela.

5 Q. Fort bien. Il a dit : "Nous avons travaillé ensemble." J'étais présent,

6 lorsque l'armée a mené des actes de sabotage. Il parle aussi de Ante Roso.

7 Lorsqu'on lui demande combien il y avait d'unités spéciales, il parlait de

8 Ante Roso, qu'il y avait 460 hommes qui étaient partis, alors qu'il en

9 avait à peu près 720.

10 R. Je sais qu'il y a eu une déclaration de Split signée par Izetbegovic et

11 Tudjman. Il y avait effectivement cette fameuse zone de 60 kilomètres de

12 part et d'autre de la frontière, c'était mentionné. C'est là que nos forces

13 se trouvaient, en vue des conditions posées par cette déclaration et des

14 demandes du côté de la Bosnie.

15 Q. Vous dites en fait, vous n'avez pas fait la guerre en Bosnie, c'est

16 cela que vous dites ?

17 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Monsieur Nice.

18 M. NICE : [interprétation] Je voudrais aider le témoin. Nous avons les

19 archives. Ces archives tombent sur le coup de certaines restrictions, les

20 restrictions habituelles. Elles doivent être abordées à huis clos partiel.

21 Il se fait qu'ici, j'ai un document qui risque de vous aider.

22 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Un instant, s'il vous plaît.

23 M. MILOSEVIC : [interprétation]

24 Q. Bien. Monsieur Sarinic, dites-nous, est-ce qu'en cette occasion-là,

25 Bobetko à l'occasion de cette pénible réunion, lorsque vous avez voulu le

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1 chasser pour qu'il parte en retraite, a signé un ordre par écrit pour

2 l'opération Eclair le 5 décembre 1994 ?

3 R. Je ne le sais pas.

4 Q. Vous ne vous en souvenez pas ?

5 R. Non, je ne m'en souviens pas.

6 Q. Fort bien. Étant donné que ceci existe au procès-verbal, à la page

7 0134946, je crois que la chose peut-être aisément constatée. Je crois que

8 le compte rendu, tout comme les précédents, devraient être versés au

9 dossier. Cela s'est passé cinq mois avant l'ordre en question, avant que

10 n'ayez nettoyé complètement la Slavonie occidentale.

11 R. Nous ne l'avons pas nettoyé. Cela a été l'opération Eclair. Ce n'a pas

12 été le nettoyage de la Slavonie occidentale, c'est l'interprétation que

13 vous en faites.

14 Q. Bien.

15 R. Je vous ai dit quel est le plan d'évacuation de la population serbe,

16 qui avait été mis en place par les bons soins de la direction des Serbes

17 dans ces territoires-là.

18 Q. --

19 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Juste un moment. Si le témoin souhaite

20 ajouter quoique ce soit, concernant le document qui vient de lui être

21 remis, il doit avoir l'opportunité de le faire si tant est qu'il le

22 souhaite.

23 Avez-vous à ajouter quoique ce soit à ce sujet, Monsieur le Témoin ?

24 LE TÉMOIN : [interprétation] Voyez-vous, il m'est très difficile de le

25 faire. C'est un document qui comporte 30, 40 pages, que sais-je. Je peux le

Page 31342

1 parcourir en lisant à la diagonale. J'ai indiqué à M. Milosevic moi-même

2 déjà, que je me souvenais de la réunion en question. J'étais présent

3 lorsqu'il était question de Bobetko. Pour ce qui est des détails, je

4 n'arrive pas à m'en souvenir. Je sais qu'il y avait eu le problème de sa

5 mise à la retraite. Pour ce qui est des actions, des opérations je ne sais

6 trop rien vous dire.

7 Q. Bien.

8 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Juste avant que vous ne continuez, il

9 demeurera ouvert, un volet ouvert pour le bureau du Procureur pour ce qui

10 est de tirer au clair toute question que le Procureur souhaitera éclaircir,

11 au lieu de demander au témoin de faire cette tâche.

12 Vous pouvez allez, Monsieur Milosevic.

13 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur May, je vois que ce n'est que de ma

14 part que vous attendez à ce que j'accomplisse une grande partie de la

15 tâche.

16 M. MILOSEVIC : [interprétation]

17 Q. Lorsque Bobetko a sorti ce document, ou plutôt l'ordre émis en date du

18 5 décembre 1994, pour ce qui est de l'opération Eclair, Tudjman dit ceci.

19 Je cite le sténogramme :

20 "Attends. Puisque tu viens de mentionner la chose, nous sommes en train de

21 persuader le monde que nous avons été provoqués par des extrémistes qui ont

22 coupé l'autoroute, ou qui nous ont tué des hommes à nous, que nous étions

23 en train de rétablir l'ordre." Toi, à ce moment-là, tu dis : "Quel

24 rétablissement de l'ordre nous avons élaboré, préparé, planifié, la chose.

25 Tu me portes préjudice sur le plan politique en le faisant."

Page 31343

1 Vous en souvenez-vous ?

2 R. Je ne me souviens pas des termes exacts. Je dirais qu'il m'est

3 difficile de parler de Janko Bobetko qui est décédé, et le mettre dans sa

4 bouche quelque chose --

5 Q. Qui est écrit au sténogramme.

6 R. Qui constituerait une interprétation de ma part. Je sais que c'était un

7 homme très sensible, et qu'il a très mal pris sa mise à la retraite. En ce

8 sens-là, je crois que ses propos allaient peut-être au-delà de ce qu'il

9 voulait dire ou de sa réflexion propre.

10 Q. Bien, Monsieur Sarinic. N'est-il pas clair qu'il n'y avait aucune

11 spontanéité dans cette opération Eclair ? Il n'y a eu aucun incident, mais

12 il y a eu un scénario, une mise en scène de la direction de la République

13 de Croatie qui était censée justifier non pas le déblocage de l'autoroute,

14 mais le nettoyage ethnique de la Slovanie occidentale et l'expulsion de

15 milliers et de milliers de Serbes ?

16 R. De quoi parlez-vous, Monsieur Milosevic ? Vous dites qu'il n'y a pas eu

17 de prétextes, de raisons. Nous avons négocié pendant trois mois pour ce qui

18 est de permettre le passage. Vous avez été sur cette ligne-la. Il a été

19 impossible de rétablir cela. On a parlé de Yanaf [phon], de ce pipeline,

20 cet oléoduc. Cela n'a pas été non plus, été possible. Vous nous avez dit :

21 "Jouez sur la carte de Mikelic, c'est la l'homme fort et les autres sont

22 des fous."

23 Q. Mikelic a été désigné au nom de la Krajina pour négocier avec vous, et

24 vous avez été désigné par la Croatie pour négocier avec lui. Vous vous êtes

25 entretenu au sujet de la normalisation. Je m'étais moi-même employé en

Page 31344

1 faveur de pourparlers des uns et des autres. J'avais parlé de

2 normalisation. Il était question d'autoroutes, d'oléoducs, de réparations

3 diverses, d'installations qui devaient être réalisées. En a-t-il été

4 ainsi ?

5 R. Oui, il en a été ainsi.

6 Q. Bien. J'ai cru naïvement qu'il s'agissait d'incident. Or, à la lecture

7 de ces notes sténographiées qui m'ont été confiées par la partie adverse,

8 je dois le dire ici même, on voit de façon irréfutable qu'il s'agissait non

9 pas d'incident, mais d'intention préméditée de la part de la Croatie.

10 R. Ceci est une interprétation tendancieuse. Je peux vous illustrer la

11 chose en parlant d'un fait. Vous allez vous en souvenir. Il y a eu un

12 incident un soir dans un restaurant qui se trouvait sur l'autoroute. Il y

13 avait eu une rixe entre un Croate et un Serbe là-bas, et ainsi de suite. Je

14 crois qu'il a été tué sept Croates là-bas. Vous vous êtes entretenu. Je

15 crois avoir reçu des rapports de la part de nos services. Vous vous êtes

16 entretenu avec Boro Mikelic. Vous lui demandez s'il s'était entretenu avec

17 Sarinic.

18 Il m'a dit :"Oui." Ils ont eu un comportement très civilisé. Les nôtres, ce

19 sont des gens à mettre aux arrêts. Que voulez-vous dire au niveau de

20 l'incident ?

21 Q. Je vais vous l'indiquer. Ce qui est exact au niveau de ce que vous

22 venez de dire, c'est le fait que j'ai cru moi-même, qu'il s'agissait d'un

23 incident. Je me suis efforcé personnellement de faire en sorte que la

24 situation soit normalisée. Voilà le rapport, l'entretien auquel vous vous

25 référiez tout à l'heure. Rapport pour ce qui est de la conversation entre

Page 31345

1 Milosevic et Mikelic 0299543, où il me dit ce qui se passe. Je lui dis moi-

2 même, qu'il faudrait qu'il propose une formule qui permettrait de relâcher

3 tout un chacun, parce qu'on avait arrêté des Croates, le dire et le faire,

4 que ceux qui avaient ouvert le feu devaient être arrêtés. Il est précisé

5 qu'il n'y avait pas d'autres moyens que les deux parties en présence en

6 face d'eux-mêmes, puis il y a trois petits points. Alors je lui dis : "Ce

7 n'est pas la faute de tous les Croates s'il y en a un qui a tué un Serbe.

8 Tous les Serbes ne sont pas fautifs, si cet imbécile est sorti pour ouvrir

9 le feu sur l'autoroute. Vous savez que chez nous, on avait fusillé des gens

10 pour la vendetta. Si on va tirer sur l'autoroute sur des gens au hasard,

11 parce que ton frère a été tué, ce n'est pas la faute des autres si son

12 frère est un crétin qu'on n'a jamais vu."

13 R. Lisez ce que Bora Mikelic a dit.

14 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Attendez. Parlez un à la fois.

15 M. MILOSEVIC : [interprétation]

16 Q. "Sans problème, je vais le lire également. Il faut tout arrêter,

17 arrêter cela. Relâchez les leurs que vous avez mis en détention et ceux qui

18 ont ouvert le feu. Eux, qu'ils arrêtent les leurs, qui ont fait cette

19 bêtise, et on fera en sorte que la situation soit normalisée." On suggère

20 qu'eux arrêtent les leurs, que vous arrêtiez les vôtres, qu'ils vous

21 remettent ceux qu'ils ont arrêtés, et que vous leur remettiez ceux que vous

22 avez arrêtés, pour que les uns et les autres soient jugés. Par conséquent,

23 je m'efforce.

24 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Un à la fois, je vous en prie.

25 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous prie de donner lecture de la réponse

Page 31346

1 de Bora Mikelic, s'agissant du même document.

2 M. MILOSEVIC : [interprétation] Je vais essayer de le faire, Monsieur

3 Sarinic. S'agissant de cette conversation au sujet de laquelle j'attire

4 l'attention des Juges de la Chambre, à savoir, de May, Robinson et Kwon, je

5 tiens à dire que j'ai reçu au moins trois versions de cette conversation.

6 Ce qui ne fait qu'abonder dans le sens des doutes que j'ai pour ce qui est

7 de la correction des transcriptions. Je n'ai rien à ajouter au sujet de ce

8 Bora Mikelic a dit. Il y a une autre transcription à ce sujet --

9 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Attendez un peu. Un instant, il faut

10 faire preuve d'équité. Monsieur Nice, est-ce que vous pourriez vérifier,

11 n'est-il pas bizarre, qu'il y ait trois moutures séparées. C'est du moins

12 ce que l'accusé affirme maintenant. Manifestement, ce n'est pas

13 satisfaisant. Inutile d'arrêter les débats sur ce point pour le moment.

14 Il y a autre chose. Il y a un autre point que veut évoquer le témoin. Vous

15 aurez le loisir d'en parler. Vous pourrez peut-être poser la question pour

16 que le témoin ait la possibilité de s'expliquer sur ce point.

17 M. MILOSEVIC : [interprétation]

18 Q. Cette transcription que je viens de citer tout à l'heure porte un ERN

19 [imperceptible].

20 Et l'autre qui se rapporte à la même conversation porte un ERN autre, je

21 n'arrive pas à le retrouver. Et il se passe la même chose, Mikelic, me dit

22 : "Président, hier soir, qu'est-il arrivé vers 21 heures ? Ils ont tué

23 trois des leurs, six blessés. Il y a des blessés légèrement blessés.

24 L'autoroute, jusqu'à une heure ou quatre heures du matin, il y a eu des

25 permanences." Je ne sais pas comment on a organisé des permanences. Au

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1 niveau des ponts, il y a eu des feux qu'on avait allumés. Je ne sais pas

2 s'ils vont garder certains des nôtres qui avaient quitté Belgrade en

3 véhicule, sans savoir ce qui se passait au niveau de l'autoroute. Parce que

4 l'autoroute était ouvert jusque là. Les gens voyageaient. Il dit : "A ce

5 moment-là, je ne sais pas, je me déplacerai. Je vous donnerai signe de ma

6 part."

7 Je lui demande : "Mais est-ce que tu peux parler à Sarinic ?"

8 Mikelic : "J'ai parlé à Sarinic. J'ai été le premier à l'informer hier

9 soir. Au matin, je me suis entretenu avec leur ministre de l'Intérieur. Je

10 vais reparler avec Sarinic dans les dix minutes qui viennent. Pour ce qui

11 les concerne, ils ont arrêté l'homme en question. Ils ont dit qu'ils

12 allaient le juger, mais ils n'ont pas procédé à d'autres revendications.

13 Ils se sont comportés de façon civilisée. Chez les nôtres, voyez ce qui se

14 passe."

15 Il se passe ce que je vous ai relaté. Et je lui dis : "Perisic m'a dit

16 qu'ils avaient pris des mesures là-bas, afin que tous les citoyens et ils

17 disent que là c'est découpé, il y a des petits points partout --

18 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Il est impossible de poursuivre de la

19 sorte. Comment voulez-vous qu'on se souvienne de cela. Comment voulez-vous

20 que qui que ce soit dise quelque chose. Je crois que c'est injuste pour

21 tout le monde. Cependant, nous allons voir si le témoin a quelque chose à

22 ajouter à ce qui vient d'être dit, et lui donner la possibilité de le

23 faire.

24 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous remercie, Messieurs les Juges. En

25 effet, je me souviens de cette transcription. J'ai voulu que M. Milosevic

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1 en donne lecture jusqu'au bout, parce qu'il y a deux éléments que je

2 voudrais relever. D'abord, M. Milosevic a dit que nous avons lancé cette

3 opération Eclair, qu'il n'y a pas eu de raison à cela et de motif. J'ai

4 voulu ajouter comme motif, la chose suivante. Bora Mikelic le dit. Ils se

5 sont comportés de façon civilisée et les nôtres là-bas, comme je vous l'ai

6 indiqué tout à l'heure. C'est d'un. De deux, on parle du général Perisic.

7 Pour autant que je sache, M. Perisic, à l'époque, se trouvait être à la

8 tête du Grand état major de l'armée, en Serbie. Que venait-il faire là, si

9 l'armée de la Serbie n'avait pas été impliquée ?

10 M. MILOSEVIC : [interprétation]

11 Q. Il ne faisait que transmettre les informations qu'il recevait. Il était

12 à Belgrade. Il recevait par ses filières à lui des informations et il

13 transmettait ces informations vers moi concernant ce qui s'était passé,

14 parce que nous tous avons été très irrités par les incidents survenus au

15 niveau de l'autoroute.

16 Mais nous allons revenir sur ce que vous avez dit quant au défaut de plan

17 prémédité. Mais les choses sont tout à fait claires, limpides. Vous avez

18 une réunion le 30 avril.

19 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur May, Messieurs les Juges, je tiens à

20 mentionner à votre intention que, conformément à une revendication de votre

21 part, j'ai dit à l'employé de la partie d'en face que j'allais me servir de

22 ces notes sténographiques, et ils ont eu le temps de les retrouver. Je vais

23 vous donner lecture d'une partie de l'intervention à l'occasion de cette

24 réunion qui a précédé l'opération, et claire est le nettoyage de la

25 Slavonie occidentale.

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1 Vous avez la date du 30 avril 1995.

2 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Juste un moment. Voyons si nous avons un

3 exemplaire à l'intention du témoin. Je crois qu'il devrait en disposer.

4 L'ACCUSÉ : [interprétation] Alors, je vais sauter la partie que j'avais eue

5 l'intention de citer. Je vais me restreindre à quelques segments

6 importants.

7 M. MILOSEVIC : [interprétation]

8 Q. J'ai annoncé la lecture de ces notes sténographiques. Je l'ai obtenu

9 pour ce qui est de la comparution de ce témoin et cela a été apporté par

10 lui ou par Mesic, peu importe.

11 On dit, Tudjman dit, page 01325696 : "Avec les soldats, il a été convenu

12 avec les militaires, il a été convenu que cela commence demain matin à 5

13 heures et que cela se termine dans un délai de plusieurs heures. Plus tard

14 dans le courant de la même journée, nous avons conclu que ce serait une

15 bonne chose si la FORPRONU pouvait ouvrir l'autoroute aujourd'hui. Donc,

16 que l'autoroute soit ouverte aujourd'hui. Et que l'on n'informe en rien les

17 unités de l'UNCRO quelques heures à l'avant. On a créé une situation où un

18 incident et si l'autoroute venait à être ouvert, organiser le passage de

19 deux ou trois voitures de notre part pour que celles-ci soient exposées à

20 des tirs. Donc, une situation d'incident avant, quelques heures avant. A

21 vous d'en convenir, peut-être avec le MUP."

22 Cervenko : "Pour ce qui est de la partie est, les choses sont convenues,

23 sont arrêtées."

24 Le président : "On a convenu pour ce qui est de l'autoroute. Si celle-ci ne

25 venait pas à être ouverte au niveau de l'est, il faut que formellement nous

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1 ayons… Et le tout doit s'accompagner d'activités de propagande. Ceci

2 importe." Puis, plus loin, on dit --

3 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Un instant. Il faut d'abord donner

4 l'occasion au témoin de réagir à cette partie-là de votre intervention.

5 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je ne fais que citer le PV sténographié,

6 Monsieur May.

7 LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai une observation à formuler concernant ce

8 que vient de dire l'accusé en disant qu'il s'agissait d'une attaque qui

9 avait pour visée un nettoyage ethnique. Je rejette la chose absolument. Il

10 n'y a eu aucun nettoyage ethnique. Il s'agissait d'une évacuation organisée

11 par les autorités serbes. Et pour confirmer qu'il en a été ainsi, j'ai

12 fourni à l'intention de cette Chambre, une cassette ainsi que des extraits

13 de la presse. Dans les médias électroniques, nous avons constamment lancé

14 des appels à l'intention des Serbes pour qu'ils restent chez eux, dans

15 leurs maisons. Mais les choses se sont passées comme elles se sont passées.

16 Cela est d'un.

17 De deux, en personne, donc moi en personne, le 1er mai, j'ai été chargé

18 d'informer le général Crabbe, qui était canadien et qui était représentant

19 de la FORPRONU là-bas, pour lui dire que l'armée croate avait procédé à un

20 nettoyage de la Slavonie occidentale pour la récupérer, pour la faire

21 revenir dans le giron de la Croatie. Je ne comprends pas quel est le pays

22 qui a été occupé sur 30 % de ces territoires accepterait la chose et qui ne

23 ferait rien du tout une fois épuisé toutes les modalités pacifiques telles

24 que négociations et autres, qui ne ferait pas recours à sa puissance

25 militaire pour libérer ses territoires. Au nom du ciel, je crois que c'est

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1 un droit tout à fait légitime. S'il y avait eu coopération et le fait ou

2 s'ils avaient -- et pour ce qui est de leur armement systématique, il y a

3 des centaines de preuves à l'appui.

4 M. MILOSEVIC : [interprétation]

5 Q. Attendez, Monsieur Sarinic. Moi, je vous ai posé une question au sujet

6 de cette réunion. Point n'est nécessaire d'aller au-delà. Je vous cite à la

7 page 02. Vous dites vous-même : "Après les instructions que vous m'avez

8 données, Monsieur le Président, j'ai essayé d'entrer en contact avec

9 Akashi. Akashi se trouve à Sarajevo. Il n'est pas certain qu'il pourra

10 venir ce soir. Probablement, pourra-t-il le faire demain. Je suis entré en

11 contact avec le général Crabbe. Je lui ai dit que nous étions d'accord pour

12 ce qui était de l'ouverture de l'autoroute. Il s'est félicité de la chose.

13 Il m'a dit qu'il m'appellerait ici entre midi et 13 heures pour me dire

14 qu'il a réussi à établir le contact avec Mikelic."

15 C'est ce à quoi vous vous référez à l'instant ?

16 R. Non, pas tout à fait. C'est la deuxième conversation que j'ai eue avec

17 ce général. Mais l'autre conversation s'est tenue dans la nuit, à 5 heures

18 du matin. Je lui ai qu'il fallait qu'ils mettent ses soldats à l'abri parce

19 qu'il y aurait une opération militaire. Mais une fois de plus, je parle de

20 légitimité de cette opération vu que, afin de compte, tout à chacun a le

21 droit de libérer une partie occupée de son propre pays.

22 Q. Monsieur Sarinic, laissez-moi retrouver le passage et là, je dois en

23 sauter un bon nombre. A la page 711, le président dit : "Ecoute, on verra

24 au matin. Si cela s'est passé aisément dans le cadre d'un délai de

25 plusieurs heures, il va falloir qu'on recoure au MUP mais on aura la

Page 31352

1 situation suivante. Etant donné que les forces de l'ordre se sont heurtés à

2 de la résistance, ces forces de MUP ont été renforcés par des effectifs de

3 l'armée. Et ensuite, vous entrerez en scène ensemble. Vous préparez, vous

4 mettez en scène d'abord un incident. Puis, vous dites que les forces de

5 l'ordre se sont heurtées à la résistance et c'est ensuite que l'armée est

6 intervenue, n'est-ce pas ? Ainsi que cela s'est passé, Monsieur Sarinic ?

7 R. Ecoutez, vous formalisez les choses. Cela n'a rien à voir que de savoir

8 s'il s'agissait de forces de l'ordre ou de l'armée. La Slavonie occidentale

9 était occupée. C'est une partie intégrante de la République de Croatie. Et

10 la République de Croatie avait le droit de se servir de la force pour

11 libérer ses territoires, c'est tout.

12 Q. Monsieur Sarinic, il y avait un accord avec la FORPRONU et vous aviez

13 convenu avec Mikelic pour ce qui était de l'ouverture de l'autoroute. Et

14 ici, vous convenez de la création d'un incident pour permettre à l'armée

15 d'intervenir et pour qu'il se passe ce qui s'est passé à l'occasion de

16 l'opération Eclair. Voilà, à la page 714, le président dit : "A six heures

17 du matin --

18 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Non, attendez. Voyons d'abord si le

19 témoin veut répondre.

20 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, je veux répondre, Messieurs les Juges. Ce

21 sont des contrevérités flagrantes qui sont présentées par l'accusé. En

22 effet, l'incident n'avait pas à être provoqué. Je suis allé personnellement

23 en automobile avec mes gardes du corps personnels deux jours avant cela

24 pour essayer de passer par l'autoroute. On ne m'a pas laissé passer. Il y

25 avait des soldats de cette soit disant RSK. Ils ne m'ont pas laissé passer.

Page 31353

1 Ils ont proféré des mots injurieux. Je ne veux pas les répéter ici. C'est

2 une contrevérité que d'affirmer que l'autoroute avait été ouverte.

3 Certaines personnes sont passées mais à leurs propres risques et périls.

4 Mais l'autoroute, je l'affirme, n'avait pas été ouverte. Il n'avait pas été

5 nécessaire de créer quelque incident que ce soit. Les incidents existaient

6 tous les jours, étaient présents à tout heure. Maintenant de là, à savoir,

7 s'il s'agissait du MUP ou plutôt des forces de l'ordre de la police ou de

8 l'armée, je crois que la chose n'a aucune pertinence.

9 M. MILOSEVIC : [interprétation]

10 Q. Vous êtes en train de verser les thèses. J'étais en train d'affirmer

11 que vous avez mis en scène un incident pour avoir un prétexte, un alibi

12 pour l'entreprise de cette opération ou le lancement de cette opération.

13 Vous dites aussi : "A 6 heures du matin, une fois que cela se passera

14 ainsi, les forces serbes ont de nouveau créé un incident et j'ai dit aux

15 ministres que deux ou trois voitures des nôtres devaient y aller, que l'on

16 ouvre le feu sur elles."

17 Et Susak dit : "On fera tout le nécessaire."

18 Le président continuant : "Donc un nouveau incident puis les forces de

19 l'ordre se dirige là-bas pour établir l'ordre sur l'autoroute -- au niveau

20 de l'autoroute."

21 Susak dit : "Monsieur le Président, dans la pire des options nous irions

22 là-bas avec deux voitures, avec deux fourgonnettes, on tira des rafales

23 dessus, et on filmera la chose pour la télévision, s'il n'y a pas une

24 option autre."

25 R. Etant donné que cela figure dans la transcription, je ne puis nier la

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1 véracité de cela. Mais je répète que je suis surpris de voir qu'il eut

2 fallu quelques incidents que ce soit parce qu'il est tout à fait légitime

3 de libérer une partie occupée des territoires.

4 Q. Ecoutez, je vous en prie. Jarnjak, c'était le ministre de l'Intérieur ?

5 R. Oui.

6 Q. Il dit, "Monsieur le Président, pour ce qui est de la mise en place ou

7 la mise en scène de cet incident, Gojko, ministre de la Défense devait y

8 aller pour convenir la chose avec l'administration de la police et du Cis,

9 cela sera fait, ce sera si convaincant que jamais personne ne pourra dire

10 …"

11 Le président : "Donc sur l'autoroute. Si l'autoroute ne venait pas à être

12 ouverte, alors à l'entrée de celle-ci."

13 R. Si l'autoroute n'était pas ouverte, mais elle n'était pas ouverte.

14 Q. Alors à l'entrée de celle-ci, Sarinic, voilà ce que vous dites :

15 "Président, ne soyons pas surpris. Je crois que les autres insisteront, et

16 je crois que l'UNCRO insistera pour que l'autoroute soit ouverte entre 6

17 heures du matin à 6 heures du soir. Et nous demandons que ce soit ouvert en

18 permanence. Mais si cela n'est pas fait, comment faire en sorte que

19 l'incident soit créé de l'extérieur."

20 Vous dites vous-même qu'il convient de mettre en scène un incident. Le

21 président dit à l'entrée alors. Susak dit : "Président, nous faisons savoir

22 à tout à chacun que nous sommes favorable à l'ouverture totale de

23 l'autoroute, les personnes ne pourront nous accuser du contraire."

24 Et vous convenez par la suite encore de détails afférents à cet incident.

25 R. Nous parlons d'un incident, mais une fois de plus, je ne voudrais

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1 m'attarder davantage là-dessus, je répète qu'il y avait légitimité pour ce

2 qui est de la libération et la défense des territoires ou des régions

3 occupées. Indépendamment des incidents, nous avons informé en tant utile

4 L'UNCRO et le général Crabbe, le général canadien, du fait que les

5 effectifs croates allaient lancer une opération de libération de la

6 Slavonie occidentale.

7 Q. Voilà ce que dit encore Jarnjak. Je ne peux pas tout citer, je n'ai pas

8 le temps. Il dit : "Je pense qu'il y a deux choses. Si cela reste ouvert" -

9 il parle de l'autoroute - "s'il le laisse ouvert, on crée un incident, et

10 s'il ne le laisse pas il y a raison de lancer l'intervention."

11 Le président : "Mais il faut l'incident. Alors autre chose, j'ai dit à

12 Galbraith [comme interprété], j'ai dit que nous n'étions pas satisfait de

13 la reconnaissance de la Bosnie-Herzégovine, et j'ai dit que cela

14 encourageait les Serbes locaux peu importe." Ceci n'a aucune importance

15 pour ce qui nous intéresse ici. Il dit que cela encourageait les Serbes

16 locaux pour ce qui étaient des incidents. Et il dit : "Qu'ils étaient

17 mécontents et qu'ils demandaient à l'Amérique de respecter les accords

18 obtenus dans le cadre des Nations Unies."

19 Alors Jarnjak dit : "Je voudrais plusieurs bonnes cartes pour bien montrer

20 les cites des incidents. Il demandait des cartes géographiques. On

21 enchaîne. On dit que 40 minutes plus tard il y aura une petite information

22 à communiquer." Vous préparez donc un communiqué concernant l'incident que

23 vous étiez censé mettre en scène.

24 R. Je ne sais pas ce que l'accusé vous souhaite démontrer par ceci.

25 J'indique ce qui importe pour ce qui est de l'incident. Cela n'a aucune

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1 espèce d'importance parce que nous avons été victimes d'au moins 500

2 incidents sur notre propre territoire et je pense qu'il s'agissait d'une

3 tactique militaire à ce niveau-là. Mais l'important c'est ce que l'accusé a

4 négligé de dire. Il n'y a pas eu de génocide, il y a eu un souhaite tout à

5 fait légitime qui était celui de libérer, de contrôler le territoire qui

6 sans aucun doute appartenait à la République de Croatie.

7 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur May, s'il vous plaît, ce procès-verbal

8 sténographié, ces notes sténographiées, il s'agit de la transcription de

9 cet entretien que, malheureusement à cause du temps qui m'est imparti, je

10 ne peux pas citer autant qu'il me serait nécessaire, mais il ressort

11 clairement de ce document qu'on a planifié de mettre -- alors c'est un

12 incident qui allait être un prétexte pour lancer l'opération Eclair. Il

13 s'agit du PV d'une réunion qui s'est tenue le 30 avril 1995 par le conseil

14 suprême de Sécurité national de Croatie dans le palais présidentiel. Je

15 vous prie d'accepter le versement au dossier de ce document.

16 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Oui, nous allons admettre cela comme

17 pièce à conviction.

18 M. NICE : [interprétation] Monsieur le Président, je pense que nous avons

19 une version en anglais qui devrait être versée sous pli scellé, compte tenu

20 de l'ordre de la Chambre pour cette catégorie de document, mais nous

21 pouvons le faire par la suite.

22 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Il nous faudra être aussi bref que

23 possible. Nous n'avons pas beaucoup de temps. Il nous faut plutôt tenir

24 compte de ce que l'accusé dit que de rentrer dans des documents volumineux.

25 Alors le témoin l'a-t-il ? Monsieur Milosevic, avez-vous rendu ce document

Page 31357

1 ?

2 L'ACCUSÉ : [interprétation] J'ai reçu ce document de la partie adversaire

3 depuis le début. Vous avez ce document à votre déposition.

4 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Peut-on entendre le numéro, s'il vous

5 plaît ?

6 L'ACCUSÉ : [interprétation] 0132965. C'est un PV du 30 avril 1995. Il

7 s'agit de la mise en scène d'un incident afin de pouvoir procéder à

8 l'opération Eclair dont les conséquences sont généralement connues.

9 Plusieurs centaines de Serbes ont été tués et plusieurs dizaines de

10 milliers Serbes ont été chassés, expulsés de ce territoire.

11 LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai une remarque à faire et une objection, et

12 je la répète encore une fois, je vous prie, également, de consigner cela au

13 compte-rendu d'audience. J'insiste il s'agissait d'une opération légitime

14 menée par les forces croates afin de libérer cette partie des territoires

15 occupés de Croatie. Par conséquent, lorsque vous parlez des centaines de

16 personnes qui ont perdu la vie, pour ce qui est de la partie croate qui

17 elle, en fait, s'est défendue, il y a eu également des victimes dans ces

18 rangs, ces victimes qui ont été consenties pour libérer des territoires qui

19 sans aucun doute appartiennent à la République de Croatie, et qui avaient

20 été occupés par les Serbes qui y vivent, qui étaient le cheval de Troie de

21 la politique menée par la Serbie dans la lutte pour réaliser la Grande

22 Serbie là-bas.

23 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Avant de procéder, il nous faudra verser

24 ce document.

25 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agira de la pièce de la Défense

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1 237, sous pli scellé.

2 M. MILOSEVIC : [interprétation]

3 Q. Monsieur Sarinic, comment pouvez-vous dire ce genre de chose puisque je

4 vous ai cité votre propre ministre de la Défense qui dit, je répète une

5 seule phrase : Monsieur le Président, dans le pire des cas, nous allons y

6 aller avec deux voitures, deux camionnettes, on les laisse en crible de

7 balles, la télé enregistre. Après vous avez des explications disant que le

8 gouvernement ne doit pas être impliqué. On ne fera pas venir de témoin.

9 C'est vous qui informerez après l'incident. Vous en informerez

10 postérieurement le gouvernement, puisqu'il n'y a que les trois ministres

11 qui sont au courant. Ni vos citoyens ni votre gouvernement. Là de quoi

12 s'agit-il ? Il ne s'agit pas d'une opération militaire parce que quelqu'un

13 a ouvert le feu quelque part, il s'agit d'une opération militaire visant à

14 s'emparer de l'autoroute qui, conformément à l'accord entre vous et

15 Mikelic, devait être utilisé normalement, devait être ouvert.

16 N'est-ce pas, cela, Monsieur Sarinic ?

17 R. Ceci est très contestable car cet accord entre Mikelic et moi-même et

18 bien tous ces accords n'ont jamais porté de fruits. Il y a eu des papiers

19 de signer et après ce sont les armes qui ont parlé. Cette autoroute n'a

20 jamais été ouverte. Voire même dans votre bureau, cette autoroute a fait

21 l'objet de négociations qui ont duré des heures. Qui plus est, Monsieur

22 Milosevic, je m'étonne vraiment que vous y insistiez là-dessus à ce point.

23 Vous avez dit que vos mains étaient propres et que vous ne vous êtes jamais

24 impliqué dans ce genre d'affaire. C'était un problème entre Zagreb et Knin.

25 Q. Bien entendu c'était un problème entre Knin et Zagreb.

Page 31359

1 R. Maintenant vous jouez le conseil l'avocat de Knin.

2 Q. Je suis l'avocat de la vérité. Ils sont victimes de cette trahison, de

3 cette déception qui a eu pour résultat plusieurs centaines de morts, et

4 plusieurs dizaines de milliers de personnes expulsées. Donc bien entendu

5 que je joue le rôle de l'avocat de la défense de leur droit, et il s'agit

6 là d'une déception qui saute aux yeux, qui est tellement flagrante que

7 personne ne peut se laisser tromper par cela.

8 R. Il ne s'agit pas d'une déception. Il s'agit d'une tactique militaire.

9 Q. Une tactique militaire afin de --

10 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Non, vous devez donner la possibilité au

11 témoin de répondre. S'il tient à ajouter quoique ce soit, il peut le faire.

12 Mais je propose que l'on passe à autre chose sinon.

13 LE TÉMOIN : [interprétation] Non merci, Monsieur le Président. Il vaut

14 mieux peut-être abordé un autre sujet, parce que sinon, on risque de se

15 répéter.

16 M. MILOSEVIC : [interprétation]

17 Q. Bien entendu que si, puisque ces choses-là sont tellement claires.

18 Sinon, Monsieur Sarinic, pour ce qui est de votre déclaration d'hier eu

19 égard à Mikelic, mon collaborateur m'a communiqué sa lettre. La date est

20 celle d'hier. Il est dit ici démenti des déclarations faites par Sarinic

21 qui ne sont pas vraies et qui ont été diffusées par la télévision. "J'ai

22 suivi la déposition de Hrvoje Sarinic." Il dit qui vous étiez, et cetera.

23 Je saute cela. "Puisque M. Sarinic a déclaré devant l'opinion des

24 appréciations tout à fait mensongères à mon sens, je vous prie, de faire

25 savoir ceci." Puis au point 1, "ma seule réunion avec Hrvoje Sarinic dans

Page 31360

1 l'ex-cabinet du président de la Serbie, Slobodan Milosevic, s'est tenue fin

2 février 1995. A cette occasion ce jour-là --"

3 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Oui, occupons-nous de cela. Qui, d'après

4 vous, a rencontré M. Milosevic en février 1995 ?

5 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est à moi que vous adressez cette question,

6 Monsieur le Président ?

7 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Non, c'est à lui que je m'adresse.

8 L'ACCUSÉ : [interprétation] J'ai compris que M. Sarinic a mentionné Boro

9 Mikelic.

10 M. MILOSEVIC : [interprétation]

11 Q. Borislav Mikelic, en d'autres termes c'était son interlocuteur au nom

12 de la République serbe de Krajina dans ces négociations pour ce qui est de

13 l'ouverture de l'autoroute, l'approvisionnement en pétrole, la

14 normalisation des relations, et cetera, et cetera. C'est cela --

15 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Très bien. Je souhaite que le témoin

16 ajoute, s'il le souhaite, quelques éléments que ce soit aujourd'hui à cela.

17 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne sais pas quelle est la teneur de cette

18 lettre. L'accusé s'est contenté de commencer à donner la lecture de cela où

19 il est dit que c'était des mensonges ce que j'ai dit. Je ne sais pas de

20 quels mensonges, plus particulièrement, il parle ici.

21 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Allez-y.

22 M. MILOSEVIC : [interprétation] Il dit que, "Ma secrétaire l'a appelé pour

23 lui demander s'il pouvait se rendre à une réunion au cabinet du président

24 Milosevic, disant qu'il serait au bureau du gouvernement de la Republika

25 Srpska Krajina à Belgrade, adresse telle et telle à Terazia [phon]. Je

Page 31361

1 n'arrive pas à lire parce que je ne connais pas cette écriture. C'est à 5

2 minutes à pied de mon bureau, et c'est là que se trouvait le bureau du

3 gouvernement de la RSK. J'ai dit que j'allais venir. Vingt minutes plus

4 tard j'étais au bureau de M. Milosevic. J'y ai trouvé M. Sarinic. Nous

5 avons échangé les salutations et par la suite j'ai demandé à Sarinic,

6 comment se fait-il que vous êtes là, puisque toutes mes réunions

7 précédentes avec Sarinic avaient été organisées par l'intermédiaire de

8 l'état major de la FORPRONU à Zagreb. Ensuite Milosevic m'a dit que cette

9 réunion a été organisée après leur accord commun, et que vous et moi nous

10 souhaitons examiner avec lui la situation telle qu'elle se présente

11 actuellement après que l'assemblée de la RSK ait pris la décision de geler

12 l'accord économique avec la République de Croatie une fois que fin janvier

13 1995. Le mandat de la FORPRONU a été terminé suite à la décision des

14 autorités croates. Il n' y a eu aucuns différends entre le président

15 Milosevic et moi-même à cette occasion, et encore moins y a-t-il eu de

16 relation de supérieur à son vassal, puisque toutes nos relations étaient

17 des relations empreintes de respect mutuel.

18 Puisqu'il y a eu une question qui vous a été posée et vous avez répondu que

19 c'était une relation entre un chef et son subalterne.

20 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Un instant, s'il vous plaît. Laissez au

21 témoin la possibilité de répondre, l'occasion de répondre.

22 Souhaitez-vous répondre, Monsieur le Témoin ?

23 LE TÉMOIN : [interprétation] Encore une fois, Monsieur le Président, ce que

24 j'ai déjà dit lorsque M. Boro Mikelic est entré dans ce bureau, il a été

25 étonné de me trouver sur place, à ce qu'il vient de confirmer lui même dans

Page 31362

1 cette lettre. Il m'a demandé ce que j'étais venu faire là-bas. L'accusé lui

2 a dit, "Mais peu importe. Assieds-toi et écoute." Et c'est ce que je

3 répète.

4 M. MILOSEVIC : [interprétation]

5 Q. Il apporte un démenti à cela. Il dit de quoi il s'est agi, qu'il fallait

6 régler ce problème du gèle des relations eu égard à votre refus de

7 renouveler le mandat de la FORPRONU, mais je ne voudrais pas répéter cela

8 encore une fois.

9 Et au point 2, il est dit : "L'entretien avec M. Sarinic en la présence du

10 président Milosevic a duré environ 30 minutes. Et le sujet n'en a pas été

11 le fonctionnement de cette autoroute, comme l'a dit M. Sarinic, en revanche

12 il m'a demandé de trouver un moyen de normaliser les quatre kilomètres du

13 chemin de fer à travers la Slavonie occidentale près de Novska, et que les

14 experts croates, à l'aide du bataillon polonais, allaient procéder à des

15 réparations.

16 R. Messieurs les Juges, je dois démentir cela de manière catégorique.

17 J'espère qu'une fois M. Milosevic confirmera ce que je souhaite dire,

18 puisqu'il a été présent pendant cet entretien. Le sujet principal de cet

19 entretien c'était les jeeps pour ouvrir l'autoroute à la circulation. Qui

20 allaient être à bord ce ces jeeps ? Tout d'abord on a envisagé deux

21 personnes de Croatie, deux de la RSK. Puis ceux de la RSK n'ont pas accepté

22 ensuite la solution qu'on a cherché, et là j'ai cédé c'était que ce soit

23 tous choisis par la FORPRONU. Ils ont dit, "Mais non, il faut ajouter une

24 personne de plus sinon, je n'allais pas pouvoir faire prendre cela au

25 mien." C'est Mikelic qui l'a dit. Accepter qu'il y ait là un homme chargé

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1 de la sécurité de la RSK. Là j'ai cédé. C'était notre entretien. Ce n'était

2 pas Novska, ce n'était pas le chemin de fer.

3 Q. Fort bien. Entre autres, écoutez, il démentit tout ce que vous avez dit

4 à son sujet, tout comme moi je vous démentis dans votre représentation

5 déformée des entretiens où vous n'étiez qu'un envoyé chargé de transmettre

6 des messages officiels.

7 Il dit, "Je peux affirmer en toute responsabilité que nulle part jamais

8 n'ai-je eu d'entretien avec Hrvoje Sarinic qui aurait porté sur mon

9 commentaire des relations entre Ratko Mladic et Slobodan Milosevic, et

10 encore moins [imperceptible] avec Hrvoje Sarinic en personne."

11 R. Mais vous vous souvenez tout aussi bien qu'à un instant, vous vous êtes

12 absenté de votre bureau. Vous nous avez laissé en tête-à-tête Boro Mikelic

13 et moi-même dans une pièce qui jouxtait votre bureau de secrétariat, et

14 c'est à ce moment-là que nous avons abordé toutes sortes de sujets. Là,

15 j'ai demandé Boro Mikelic, quelles étaient les relations avec Mladic ? Est-

16 ce que Mladic était plutôt proche de Karadzic ou s'il était toujours fidèle

17 à Milosevic ? Il m'a répondu, c'est à 200 % un homme de Milosevic. "Il y a

18 deux jours, je l'ai emmené en voiture ici à Milosevic."

19 Q. Mais il le dément. Il dit la chose suivante, qu'il a vu pour la

20 dernière fois Mladic début septembre 1994. Donc, il dément ce que vous

21 venez de dire.

22 R. Je le répète encore une fois.

23 Q. Et encore plus que lui et Mladic se trouve à bord d'un même véhicule.

24 Que Mikelic joue le rôle de chauffeur pour Mladic pour l'amener chez moi ?

25 R. Ecoutez. Cela ne me semble pas normal que mon chauffeur de Dobranovci à

Page 31364

1 Lipovac était le président de la République Srpska Krajina, Hadzija [phon],

2 cela s'est bien passé. Ce genre de cas de figure peut se présenter. Je

3 maintiens de ce que je viens de dire.

4 Q. Et il ajoute qu'il considère que vous êtes l'auteur de l'opération

5 militaire Eclair et non seulement de celle-ci mais aussi de l'opération

6 Tempête où 250 000 personnes ont été chassées de leurs foyers. Et où on a

7 liquidé, je n'arrive pas à lire cette écriture manuscrite.

8 L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais je souhaite verser ce document au dossier.

9 R. Mais vous voyez très bien d'après ce qui suit dans ce document quelle

10 est la fiabilité de ce que dit M. Mikelic. D'après mes fonctions, il

11 ressort clairement que je n'aurais pas pu être l'auteur de ceci. Donc,

12 l'ensemble de cette écriture, et bien, --

13 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Un instant. C'est une lettre de l'un de

14 vos amis qui a été rédigée hier au sujet de ce que ce témoin avait déclaré.

15 Et ceci démente ce que le témoin a dit.

16 L'ACCUSÉ : [interprétation] C'est une lettre de l'ex-président du

17 gouvernement de la RSK.

18 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Qui date d'hier ?

19 L'ACCUSÉ : [interprétation] D'hier et qui a été le négociateur principal au

20 nom de la RSK.

21 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Oui. Mais il peut venir déposer. Si vous

22 le souhaitez, vous pouvez le citer comme témoin pour qu'il vienne

23 s'adresser à la Chambre. Vous ne pouvez pas poursuivre de cette manière.

24 L'ACCUSÉ : [interprétation] Donc, je ne peux pas verser ce document au

25 dossier.

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1 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Vous pouvez citer cette personne à la

2 barre pour qu'elle vienne déposer en tant voulu.

3 L'ACCUSÉ : [interprétation] Fort bien, Monsieur May. Alors je vais essayer

4 d'utiliser mon temps. Je vais sauter [imperceptible].

5 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Il vous reste 25 minutes. Dans cinq

6 minutes, nous allons faire une suspension d'audience.

7 L'ACCUSÉ : [interprétation] Il me reste 25 minutes, si je vous ai bien

8 compris ?

9 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Oui.

10 L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais je n'arriverai pas à poser toutes mes

11 questions à ce témoin en 25 minutes, Monsieur May.

12 M. MILOSEVIC : [interprétation]

13 Q. Vous venez d'inverser les thèses complètement. Je vais essayer

14 d'utiliser mon temps de la manière la plus rationnelle.

15 Dites-moi, vous ai-je dit à vous aussi que d'après les données que j'avais

16 reçu, les Musulmans avaient bombardé Markale, à Sarajevo ?

17 R. Oui. C'est ce que vous m'avez dit. Vous m'avez dit : "Est-ce qu'on peut

18 leur faire confiance. Ils se sont tirés dessus eux-mêmes. Mais pour eux

19 cela ne compte pas, c'est rien de 25 morts. Cela n'a aucun point, mais cela

20 leur fait remporter des points aux yeux de la communauté internationale."

21 Mais par la suite, j'ai vu que vous disiez exactement l'opposer lorsque

22 vous avez reproché cela à Karadzic. Vous avez mis cela sur le dos de

23 Karadzic.

24 Q. Mais ceci n'est absolument pas exact. Au point 49, vous le dites dans

25 votre déclaration, j'ai dit que ce sont les Musulmans qui ont bombardé

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1 Markale. C'est ce que j'affirme. Markale 1 et Markale 2, et les témoins que

2 je citerai ici me permettront de le prouver.

3 Cependant, c'est le point 49 de votre déclaration. Dites-moi, les Français

4 n'ont-ils pas procédé à des analyses approfondies, leurs experts ont

5 reconstruit le pilonnage, la trajectoire de l'obus et le lieu de l'impact ?

6 R. Oui. C'est possible. C'est l'ex-colonel De Boer, aujourd'hui général,

7 qui me l'a dit, car c'était une équipe placée sous ses ordres qui a procédé

8 à ces analyses.

9 Q. Est-il exact qu'ils sont arrivés à la conclusion que cet endroit a été

10 placé sous le contrôle des Musulmans ?

11 R. C'est ce qui m'a été dit.

12 Q. Ce sont les Français qui vous l'ont dit ?

13 R. Oui.

14 Q. Et ce colonel, plus tard général français, De Boer, vous a-t-il dit que

15 ce sont les Musulmans qui, en effet, l'ont fait ?

16 R. Il faut savoir que c'était un homme qui était chargé des analyses, un

17 analyste. Il m'a dit, d'après ce que nous savons, il est évident que cet

18 obus est arrivé d'un territoire sous le contrôle des Musulmans.

19 Q. Très bien. Laissons cela. Dubrovnik. Ici, il y a eu, je ne sais pas

20 combien de témoins, 10, 15, et tout cela pour Dubrovnik. Vous, vous aviez

21 entre vos mains toutes les informations pertinentes. Ne vous ai-je pas dit

22 sans cesse que personne de Belgrade n'avait rien à voir avec le pilonnage

23 de Dubrovnik et que c'était du délire ?

24 R. Oui. Vous me l'avez dit.

25 Q. Mais franchement, dites-moi Monsieur Sarinic, croyez-vous cela ? Le

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1 croyiez-vous à l'époque et le croyez-vous toujours aujourd'hui ? Est-ce que

2 c'est exact ?

3 R. Je l'ai dit déjà. Je ne crois pas que vous l'ayez organisé. Cependant,

4 il est certain que vous étiez au courant mais je ne crois pas que vous

5 l'ayez organisé vous-même.

6 Q. Très bien, Monsieur Sarinic. C'est à moitié blanc, à moitié noir. Mais

7 d'après vos convictions, avez-vous pu établir que même Veljko Kadijevic,

8 qui était ministre de la Défense à l'époque, n'a pas donné ce genre

9 d'ordre, que ceci n'a pas été fait et qu'il a été au courant de cela ?

10 R. Je l'ai dit. Je dois le dire de manière tout à fait franche, Veljko

11 Kadijevic, qui était issu d'un mariage mixte, soit son père, soit sa mère

12 est Croate et qui était admirateur de la côte adriatique et de la mer

13 Adriatique, et bien, j'aurais été étonné d'apprendre qu'il ait donné ce

14 genre d'ordre. Mais j'ai également dit que j'étais certain que c'est Hadzic

15 qui a orchestré cela, qui lui est originaire d'Herzégovine orientale, cette

16 région derrière la côte et que c'était lui l'homme qui était à la tête de

17 cette action et qu'il l'a initié. Ce que j'ai ici également, vous savez, ce

18 sont aussi des documents confisqués, des documents que nous avons pu

19 examiner. Il s'agit-là d'un ordre venant de l'amiral Mile Kandic de l'année

20 1991 où il dit : "Au sujet de l'activités de ces forces sur des

21 installations vitales à Zadar, Sibenik, Ploce, et cetera, et pour ce qui

22 est d'isoler Dubrovnik du reste du territoire de la République de Croatie."

23 Cela était en 1991, Mile Kandic --

24 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Un instant, s'il vous plaît. Le moment

25 est venu de suspendre. Les amis auront-ils beaucoup de questions à poser ?

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1 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, si possible, entre

2 15 et 20 minutes.

3 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Nous envisagerons cela. Nous y

4 réfléchirons.

5 La séance est suspendue pour 15 minutes.

6 --- L'audience est suspendue à 12 heures 16.

7 --- L'audience est reprise à 12 heures 40.

8 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Nous allons accorder les temps qui sont

9 répartis comme suit. Vous allez avoir une demi-heure pour ce qui est de

10 l'accusé, 15 minutes pour M. Tapuskovic. Le Procureur, si besoin est, 20

11 minutes.

12 Vous pouvez continuer, je vous prie.

13 M. MILOSEVIC : [interprétation]

14 Q. Monsieur Sarinic, terminons-en avec l'histoire de Dubrovnik. Est-il

15 exact de dire que Bobetko avait voulu s'emparer de la région de Trebinje,

16 que cela avait commencé ainsi. Enfin, tous les malheureux événements

17 afférents à Dubrovnik et aux opérations de Dubrovnik ont commencé ainsi ?

18 R. Il en a été question. La direction croate avait été absolument contre

19 cela, parce que cela nous acheminerait vers un conflit international. La

20 direction, à savoir, le président Tudjman ne voulait accepter cela en

21 aucune façon.

22 Q. Je veux bien croire à ce que vous venez de dire, mais vous n'avez pas

23 répondu à ma question. Bobetko a lancé une opération en arrière-plan de

24 Dubrovnik, et il a été arrêté par Tudjman par la suite.

25 R. Les choses se sont passées autrement. Depuis les arrières de Dubrovnik,

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1 depuis le terrain à l'intérieur du pays, on avait tiré en direction de

2 Dubrovnik. C'est sur ce Dubrovnik que vous avez dit vous-même, que vous

3 avez passé les plus beaux moments de votre vie.

4 R. Oui, ma famille et moi-même. C'est vrai.

5 Q. Exact.

6 R. C'est à partir de là qu'on avait tiré sur Dubrovnik. Il était tout à

7 fait légitime d'entreprendre une action pour que ces nids à partir desquels

8 on avait ouvert le feu sur Dubrovnik, je n'ai pas de termes pour exprimer

9 quel type de personne pouvait être les gens qui avaient tiré sur une ville

10 de cette nature, pour les neutraliser, c'est vrai.

11 Q. Ce n'est pas d'abord l'offensive à Bobetko qui a été à l'initiative.

12 Son initiative a été la conséquence de ce que vous venez de dire. C'est ce

13 que vous affirmez, n'est-ce pas ?

14 R. Oui.

15 Q. Bien. On peut continuer. Je me réfère au point 9 de votre déclaration

16 préalable, où vous dites que la communauté internationale m'avait appuyé et

17 que les Croates et les Slovènes avaient été considérés comme étant des

18 sécessionnistes.

19 R. Oui. Au départ, c'est ainsi que les choses se sont faites. Au début

20 même, comme je lai dit, jusqu'au moment où la communauté internationale n'a

21 pas compris le type d'homme que vous étiez.

22 Q. Oui, jusqu'à ce qu'elle ait compris le type que j'étais. Et est-ce que

23 cela s'est passé avant que Clinton ne vienne bombarder la Yougoslavie ?

24 Maintenant, il s'agit de camoufler leurs crimes à eux ?

25 R. Je ne veux pas m'aventurer dans ce type de considération. C'est une

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1 question à poser au président Clinton, et pas à moi-même.

2 Q. J'espère bien avoir l'occasion de lui poser cette question-là. Je tiens

3 à vous rappeler, toutefois, --

4 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Non, non. Allez de l'avant.

5 L'ACCUSÉ : [interprétation] Bien.

6 M. MILOSEVIC : [interprétation]

7 Q. Je tiens à vous rappeler le PV sténographié du 18 août 1995,

8 brièvement. Vous avez été présent. C'était Galbraith qui prend la parole,

9 ambassadeur américain à Zagreb à l'époque. Il dit : "Nous comprenons, nous

10 avons de grandes sympathies d'exprimées depuis l'entrée en fonction du

11 président Clinton, pour ce qui est de l'importance de résoudre la question

12 de l'indépendance de la Croatie. Vous avez pu constater cela dans notre

13 politique, et des modalités de son évolution après le gouvernement Bush

14 qui, pour être sincère, avait hésité à reconnaître la Croatie. Il n'avait

15 pas été d'accord avec ses frontières actuelles. C'est grâce à nous que les

16 Nations Unies vous avait reconnu début 1993. Vous avez pu voir ce que j'ai

17 fait partant des instructions du président Clinton, et j'ai affirmé cela de

18 façon tout à fait publique." Galbraith critique le gouvernement de Bush,

19 magnifie les mérites de Clinton pour ce qui est de ce que vous avez fait à

20 l'époque, n'est-ce pas, Monsieur Sarinic ?

21 R. Pour autant que je le sache, Peter Galbraith a témoigné ici. J'espère

22 que vous lui avez posé cette question, et j'espère qu'il vous a répondu.

23 Moi, je n'ai rien à vous répondre s'agissant de cette question. C'est une

24 question qu'il fallait lui poser à lui.

25 Q. Tudjman dit, à ce moment-là, qu'il avait, le jour d'avant, indiqué,

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1 étant donné que l'on avait accepté que la partie serbe en Bosnie avait le

2 droit de s'appuyer sur la Serbie, il ne fallait pas faire de différence. Et

3 l'on ne dissimule, en aucune façon, une idée aux termes de laquelle la

4 Croatie devrait être censée revenir dans le giron de la Yougoslavie.

5 On lui répond que : "Bien sûr que non".

6 Et Granic dit : "Qu'il n'y a pas de divergences importantes…".

7 Puis Holbrooke dit : "Mate" - en disant à Granic - "ce gouvernement n'a

8 jamais eu d'idées folles pour ce qui est de reconstruire la Yougoslavie".

9 Le président dit : "M. Eagleburger n'a pas été le seul à s'efforcer à " --

10 Interrompu par Susak : "C'est le gouvernement, l'administration

11 précédente".

12 Holbrooke : "C'est justement ce que je voulais dire. Je suis content que

13 vous ayez parlé d'Eagleburger. L'administration précédente avait bercé

14 cette idée folle. L'intervention de Baker à Belgrade, Skolcruk [phon] et

15 tout cela, c'est du passé."

16 Ils vous expliquent donc, eux, que le gouvernement à Bush avait eu l'idée

17 de sauvegarder la Yougoslavie, que cette idée était complètement démente,

18 et que c'était du passé, et qu'eux vous apportaient leur soutien à vous. En

19 est-il été ainsi, Monsieur Sarinic ?

20 R. Cela n'a pas été dit si clairement que cela. C'est vous qui tirez ce

21 type de conclusion à partir de ce qui s'est dit. Je me souviens qu'en 1990,

22 fin 1990, nous étions revenus à Belgrade juste au moment où James Baker se

23 trouvait là-bas et il était plutôt étrange de voir le comportement de ce

24 monsieur parce qu'il donnait des leçons à gauche et à droite. Il disait

25 qu'ils allaient nous aider si nous étions raisonnables. Ils allaient nous

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1 aider financièrement si ce n'était pas le cas, il ne fallait pas que nous

2 comptions sur eux. Il s'est comporté comme si nous étions des petits

3 enfants à l'école. Mais avec l'arrivée de Clinton au pouvoir, il y a eu un

4 rééquilibrage des choses. Tout comme il s'est rééquilibré la situation par

5 rapport à la France lorsque, après Mitterrand, c'est Chirac qui est venu au

6 pouvoir.

7 Q. Bien. Très bien, Monsieur Sarinic. Ici, Holbrooke dit : "Vous avez eu

8 des justificatifs pour ce qui est de l'action militaire entreprise en

9 Slavonie occidentale, et j'ai toujours défendue celle-ci. Vous vous

10 souviendrez que nous nous sommes rencontrés à Londres juste après cela et

11 ensuite, nous sommes allés à l'ambassade américaine et nous avons rencontré

12 Gore. Les échanges ont été dramatiques. Certains ont dit que Gore avait

13 exigé que vous vous retiriez de la Slavonie occidentale. Or, nous avons

14 dit, absolument pas. Il fallait que vous restiez là-bas. Vous avez fermé la

15 porte arrière, c'est votre pays à vous. Et ensuite, nous avons parlé de vos

16 activités dans le champ de Livanjsko Polje.

17 Et il dit : "Nous avons publiquement dit que nous étions préoccupés. Mais à

18 titre privé et intimement, vous saviez ce que nous voulions."

19 Donc ils vous ont donné le feu vert pour vos opérations militaires. En a-t-

20 il été ainsi, Monsieur Sarinic ou pas ?

21 R. Ils ont d'abord constaté que les négociations ne menaient à rien. Ces

22 négociations ont été stériles, et tout simplement ils ont changé de

23 tactiques. Ils ne nous ont jamais ouvertement dit, pas même en sous-

24 entendu, que nous pouvions lancer des opérations. Ils ont interrompu les

25 opérations une fois que celles-ci étaient lancées en direction de Banja

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1 Luka. Cela est vrai.

2 Pour ce qui est du reste, pour ce qui est de la Slavonie occidentale, cela

3 s'est trouvé au niveau de la compréhension qu'il avait eue pour l'action

4 déployée. Et je crois que Holbrooke, à ce moment-là, s'était avéré être un

5 homme politique pragmatique et normal.

6 Q. Savez-vous comment ils ont interrompu votre opération en direction de

7 Prijedor et de Banja Luka ? Je lui ai dit à Holbrooke, que s'agissant de la

8 Serbie et de moi-même, nous allions interrompre toute participation aux

9 négociations ultérieures s'ils ne faisaient pas mettre un terme à tout

10 cela. Il m'a dit : "Je vais prendre l'avion et je vais chez Tudjman. Je lui

11 dirai que cette opération devait être interrompue". Et c'est ainsi que cela

12 s'est interrompu.

13 R. Vous vous êtes transformé en témoin maintenant et je n'ai pas, moi, de

14 commentaires à faire à ce sujet.

15 Q. Bien, Monsieur Sarinic. Vous dites que Vance et Owen venaient

16 constamment à Belgrade et vous les avez critiqués pour ce faire. Je me

17 réfère au paragraphe 35 de votre déclaration au préalable. Mais que pensez-

18 vous qui soit advenu ? Quelques années durant, les représentants de la

19 communauté internationale accordent un plein soutien aux activités

20 déployées par la Serbie et par moi-même aux fins d'aboutir à la paix, faire

21 cesser la guerre et ainsi de suite. Après l'agression de l'OTAN en 1999, on

22 explique que ce que nous avions fait auparavant n'avait pas été des efforts

23 visant à l'aboutir à la paix mais plutôt des activités qui étaient en

24 corrélation avec la guerre. C'est bien ainsi que l'on l'entend, Monsieur

25 Sarinic ?

Page 31374

1 R. Au fur et à mesure que la situation a évolué sur le terrain, c'est

2 ainsi qu'a évolué l'approche de la communauté internationale à l'égard des

3 problèmes en question. Je sais et nous savons, notamment, que Lord Owen

4 avait été très favorable à votre politique et que vous aviez eu des

5 relations personnelles excellentes avec lui. Ce n'est pas une critique de

6 ma part, c'est une constatation que je fais. Une constatation d'une

7 situation de faits. Vous avez vous-même dit que c'était un ami de famille à

8 vous et ainsi de suite.

9 Toutefois, nous savons que certaines choses qu'il avait dites et j'ai été

10 horrifié personnellement lorsqu'il a dit : "N'espérez pas qu'à une table de

11 négociation, vous allez obtenir ce que vous n'avez pas pu défendre sur le

12 terrain". Cela a, en réalité, été un encouragement de sa part en faveur de

13 l'agression.

14 Q. J'entends pour la première fois dire que Lord Owen avait encouragé

15 l'agression. Je crois, pour autant que je m'en souvienne, que tous ses

16 efforts visaient à la paix mais ses activités ont été obstruées par les

17 hommes de Washington qui n'ont pas voulu le soutenir ce qui fait que la

18 guerre a duré deux ans de plus. Est-ce bien exact, Monsieur Sarinic ou

19 pas ?

20 R. Je ne pourrais pas être d'accord avec ce que vous venez de dire mais

21 pour ce qui est de la phrase que je viens de prononcer, vous ne l'avez

22 délibérément pas commentée. Le fait qu'il ait dit qu'il ne pensait pas qu'à

23 une table vert de négociation vous allez obtenir ce que vous n'avez pas

24 obtenu sur le terrain. Il l'a dit à une réunion à Dobranovci où nous avons

25 longuement conféré.

Page 31375

1 Q. Monsieur Sarinic, je ne me souviens vraiment pas que Lord Owen ait dit

2 une chose pareille mais il vous appartient à vous d'affirmer ce que bon

3 vous semble concernant ces propos. Cela diverge par rapport aux efforts

4 qu'il a déployés en faveur de la paix. Mais enfin, tirons au clair autre

5 chose. Est-il vrai de dire que Tudjman, publiquement, disait que la Bosnie

6 était un absurde historique ?

7 R. Il n'a pas dit que cela. J'ai fait une distinction importante entre

8 Tudjman historien, et Tudjman homme politique et homme d'état. Il l'a dit.

9 Cela, il l'a dit en public. Il ne l'a pas dissimulé. Il a même dit que la

10 Bosnie était le résultat des conquêtes Ottoman au 15e siècle et ainsi de

11 suite. Il était très favorable à la Banovina de 1939 et aux accords entre

12 Cvetkovic et Macek. Mais lorsqu'on en est venu à la réalisation de cela,

13 c'est alors qu'il est devenu un homme tout à fait autre. Il a compris que

14 le partage de la Bosnie était absolument une chose condamnable aux yeux de

15 la communauté internationale. C'est alors que nous avons été les premiers à

16 reconnaître la Bosnie-Herzégovine et le premier des ambassadeurs a été le

17 nôtre. Nous avons aidé la tenue du référendum relatif à l'indépendance.

18 Nous avons signé la déclaration de Split et ainsi de suite, et ainsi de

19 suite. Ce sont des actes concrets. Or vous, Monsieur Milosevic, ne vouliez

20 pas signer la reconnaissance de la Bosnie en dépit des insistances de la

21 part de nous tous et de moi-même. Vous m'avez dit : "Pourquoi ne

22 reconnaissez-vous pas la Bosnie ?" Alors vous m'avez dit : "Quelle Bosnie ?

23 La Bosnie à qui ? Comme si elle n'avait jamais existée.

24 Q. Mais ne pensez-vous pas qu'il eu fallu d'abord trouver une solution

25 pacifique. C'est après Dayton, une fois qu'une situation nouvelle et au

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1 constitutionnel et au niveau du système mis en place a été créé, que nous

2 avons reconnu cet état. Mais ce n'est qu'une fois que l'essentiel ou

3 l'objectif principal a été réalisé, à savoir que les trois groupes

4 ethniques soient sur pied d'égalité en cette Bosnie-Herzégovine. Cela avait

5 été la thèse que nous avons défendue depuis le début même.

6 R. Mais vous savez que ce qui s'est passé en Bosnie avant Dayton. Il y a

7 eu la Republika Srpska avec 49 % des territoires et il y a eu nettoyage

8 ethnique. Il y a eu ce qui avait été votre stratégie, à savoir que cette

9 Republika Srpska, tôt au tard, redevienne partie intégrante de la Serbie.

10 Q. Je vous en prie. En même temps qu'il a été créé une Republika Srpska,

11 il a été créé une Herceg-Bosna. Mais ce n'est qu'ultérieurement que,

12 Tudjman, sous des pressions extérieures, a accepté de créer une fédération.

13 Est-ce exact ou pas ? Tudjman avait pour idée et avait soutenu la création

14 de la Republika Srpska, la création de l'Herceg-Bosna et la République de

15 Bosnie-Herzégovine comme la désignait les Musulmans. Mais sous pression

16 ultérieure, il a accepté un accord bilatéral qui avait été organisé par les

17 Américains.

18 R. Et bien, pas vraiment. J'ai mes notes que j'ai rédigées à l'occasion

19 d'une réunion à Genève où il y a eu, à la réunion, le président Tudjman,

20 Alija Izetbegovic, Haris Silajdzic, et ma petite personne. Et à un moment

21 donné, Alija Izetbegovic a dit : "Avez-vous envisagé d'annexer la Herceg-

22 Bosna à la République de Croatie ? Nous n'aurions rien contre ce fait-là.

23 Cela permettrait à l'état musulman, quoique petit, d'être autonome et avoir

24 des frontières extérieures garanties par la communauté internationale. Et

25 elle s'appuierait, bien entendu, économiquement sur la Croatie."

Page 31377

1 Alija Izetbegovic proposait l'Herzegovine à la Croatie. Tudjman n'a pas

2 accepté. Il n'a pas accepté parce qu'il savait que la modification des

3 frontières -- il n'a pas accepté pour deux raisons. Il savait d'un, que

4 cette modification des frontières créerait au niveau de la communauté

5 internationale une grande indignation. Et d'autre part, il y avait les

6 Croates de la Bosnie centrale qui auraient définitivement étaient

7 abandonnés. Cela aurait créé un tollé.

8 Q. Mais pensez-vous que les Musulmans ont procédé à un nettoyage ethnique,

9 eux-mêmes, et ont perpétré un grand nombre de crimes à l'encontre de

10 Croates en Bosnie centrale ?

11 R. Il y a certainement eu des faits de cette nature. Mais je ne peux pas

12 généraliser. Je pense qu'il devait s'agir de certains groupes qui avaient

13 fait ce genre de choses. Mais je ne pense pas que cela ait pu être la

14 politique officielle de la direction bosnienne et d'Alija Izetbegovic.

15 Q. Mais vous souvenez-vous du fait qu'à la réunion de Genève, en votre

16 présence même, je me souviens bien, il n'y avait que vous et Tudjman, et il

17 y avait Owen et Stoltenberg. Et je sais que Tudjman disait que jamais il

18 n'avait entendu parler de bestialités analogues à celles qui avaient été

19 perpétrées par les forces musulmanes à l'encontre de Croates en Bosnie

20 centrale. Vous souvenez-vous de la déclaration de Tudjman à l'époque ? Il

21 est vrai qu'il ne l'a pas fait en publique mais il l'a fait à une réunion

22 où il y avait Owen et Stoltenberg et que vous étiez présent vous-même.

23 R. Je ne me souviens pas de ces termes-là mais ce que je sais, c'est que

24 le président Tudjman avait été très critique à l'égard de comportements de

25 cette nature. Cela c'est d'un. De deux, il s'agissait de temps tristes,

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1 néfastes où il s'est passé beaucoup de choses en Bosnie et il est probable

2 que le mieux serait de dire que personne n'est innocent.

3 Q. Je suis bien aise d'entendre au moins une partie le dire. Savez-vous

4 qu'un grand nombre de personnes, une bonne partie de la population et

5 l'armée comprise des Croates de Bosnie, s'étaient retirés en traversant les

6 territoires et des positions serbes à l'occasion d'une offensive

7 musulmane ?

8 R. Quand je vous ai dit que personne n'était innocent, j'avais à l'esprit

9 ce genre de chose également parce que là-bas, tout le monde faisait la

10 guerre à tout le monde, chacun faisait la guerre à chacun. Et au fur et à

11 mesure de l'écoulement du temps, les alliances se construisaient et se

12 défaisaient. Nous savons que les Croates avaient, à un moment donné,

13 collaboré avec les Serbes. Au final, il y a eu cette réunion à Graz entre

14 Karadzic et Boban, qui n'est pas un secret. Ils se sont entretenus mais ils

15 n'ont conclu de rien. En somme, ce genre de chose dont vous parlez, il y en

16 a eu en effet.

17 Q. Au sujet du paragraphe 65 de votre déclaration au préalable, est-il

18 exact de dire que la Croatie a, pendant six mois à l'armée de Bosnie-

19 Herzégovine, délivré ou livré par hélicoptères des armes dans le secret ?

20 R. Je ne sais pas vous dire si cela a duré six mois mais le fait est

21 qu'elle en a livré et qu'elle les a aidés, c'est certain. Mais cela s'est

22 passé au niveau de la poche de Bihac. C'est là qu'il y a eu une situation

23 spécifique. Nous avons dû, pour des raisons humaines et pour des raisons

24 tactiques voir même stratégiques, défendre Bihac de l'agression serbe,

25 parce que dans le cas contraire, si Bihac était tombée, il serait arrivé

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1 une autre Srebrenica. Et d'autre part, il y aurait eu jonction de la RSK et

2 de la RS et cela aurait généré une guerre généralisée. Cela aurait été un

3 bout de Croatie emporté vers un autre état. La Croatie, bien entendu, ne

4 pouvait, ne savait tolérer ce type de possibilité.

5 Q. Mais Monsieur Sarinic, cette poche de Bihac avait été placée sous le

6 contrôle des Musulmans mais des Musulmans qui avaient été favorables à la

7 paix excepté le 5e Corps d'Atif Dudagovic. Cela avait été placé sous le

8 contrôle des Musulmans qui étaient commandés par Fikret Abdic que vous avez

9 appuyé vous-même, et nous-mêmes nous l'avions appuyé. Vous l'avez aidé

10 aussi bien que nous. Je viens de vous dire hier que nous lui avons envoyé

11 12 000 couvertures. Il était dans une situation extrêmement difficile.

12 C'était un homme qui était favorable à la paix, qui ne voulait pas faire la

13 guerre, qui ne voulait pas faire la guerre ni aux uns, ni aux autres. Il

14 voulait tout simplement organiser la vie économique afin que ces hommes-là,

15 que cette population-là ait de quoi manger. En a-t-il été ainsi ou pas ?

16 R. Oui, là je suis d'accord avec vous. Il avait du mal à survivre et il

17 devait faire des alliances avec les uns et avec les autres. Toutefois, vous

18 nous proposiez à nous de créer une confédération avec cette SAO de la

19 Bosnie occidentale. Toutefois, nous ne l'avons pas accepté parce que cela

20 aurait crée précédent, et on aurait pu faire ou demander la même chose pour

21 la RSK. Là, le rapport des forces était tel, Fikret Abdic ne pouvait pas,

22 pas plus que l'armée bosnienne, se défendre de Karadzic et de se défendre

23 de l'armée de la Republika Srpska et de la Republika Srpska Krajina qui, en

24 fin du compte, les aidaient.

25 Q. Mais attendez, je vous en prie, ne me dites que l'armée de la RS ou

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1 l'armée de la RSK s'était attaquée à Abdic. Ce n'était pas une SAO, une

2 région autonome serbe, c'était la Bosnie occidentale dont le président

3 était Fikret Abdic. La population là-bas était majoritairement musulmane,

4 la grande majorité de la population était musulmane.

5 R. Voilà comment cela s'est passé. L'armée serbe avait attaqué l'armée

6 bosnienne là-bas. Et eux nous avaient suppliés de les aider. C'est la

7 raison pour laquelle nous les avons d'abord aidés en matériels, en

8 équipement et ainsi de suite. Quand nous avons vu que cela allait

9 s'effondrer, il s'agissait d'un intervalle de quelques jours. Si nous

10 n'étions pas intervenus, Bihac serait tombée moyennant murmure.

11 Q. Serait-il exact de dire qu'Abdic avait eu l'idée de s'emparer de Sanski

12 Most, d'aller vers Banja Luka ?

13 R. Ils avaient demandé la chose. Je me souviens de vos commentaires à ce

14 sujet. Vous aviez dit : "Mais quoi Sanski Most, ils ne sont même capable de

15 s'emparer eux-mêmes et tout seul d'un village, ne serait-ce que d'un

16 village." Vous en souvenez.

17 Q. Izetbegovic vous avait demandé de vous attaquer à des territoires

18 serbes ?

19 R. Ils avaient estimé que Sanski Most sur le plan historique appartenait

20 aux territoires ou faisait partie des territoires musulmans.

21 Q. Fort bien, Monsieur Sarinic. Revenons maintenant à la Croatie. Est-il

22 exact de dire que pendant la guerre en Croatie, Spegelj avait souhaité

23 s'attaquer aux casernes de la JNA en Croatie ? Vous en parlez au paragraphe

24 16 de votre déclaration préalable.

25 R. C'est une chose notoirement connue et, bien entendu, pour ce qui est du

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1 comportement de la JNA, il n'est point étrange de voir qu'il y ait eu des

2 idées de cette nature qui visaient à lancer des attaques sur les casernes.

3 Vous savez que nous avons négocié avec ces casernes et, personnellement,

4 j'ai négocié avec Raseta, Invrasin Trifunovic [phon], avait remis les

5 armes, déposé ses armes. Mais le reste à été emporté en 1991 de la Slovénie

6 pour armer les Serbes de la RSK et de la RS. Ensuite, tout simplement, ils

7 ont retiré les bâtiments de guerre au niveau de la marine et tout le reste.

8 En sus, les armes de la Défense territoriale nous ont été saisies, qui

9 normalement auraient dû être placées sous le contrôle des républiques. Cela

10 n'a pas été fait, par exemple, en Slovénie, ce qui fait que, logiquement et

11 légitimement, Spegelj a eu l'idée d'attaquer les casernes et d'essayer de

12 confisquer, de saisir, ces armes dans les casernes. Tudjman, cependant, ne

13 le voulait pas, étant donné que la Croatie n'était pas armée à ce moment-

14 là. Cela aurait pu se terminer de façon tragique.

15 Q. Bien, écoutez et répondez de façon plus brève. Je crois, si je consulte

16 bien la montre qui se trouve en haut, je dois avoir un peu moins de 20

17 minutes.

18 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Bien moins que cela.

19 L'ACCUSÉ : [interprétation] Combien me reste t-il ?

20 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Quatre minutes.

21 L'ACCUSÉ : [interprétation] Quatre minutes ?

22 M. LE JUGE MAY : [aucune interprétation]

23 L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais vous m'avez dit que j'avais une demi-

24 heure, mais on n'a pas commencé à midi moins vingt-cinq quand même ?

25 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Nous avons commencé à cette heure-là, et

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1 vous avez eu le temps qui vous était imparti. Vous n'avez plus que quatre

2 minutes.

3 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je n'ai plus le temps que de nous référer ou

4 de soulever quelques questions seulement.

5 M. MILOSEVIC : [interprétation]

6 Q. Avez-vous effectué une visite au camp de Dretelj ?

7 R. Jamais. J'ai entendu parler de ce camp, mais bien longtemps par la

8 suite. Cependant, je m'étais davantage intéressé, avant mon arrivée ici, de

9 l'existence de ce camp. Je sais que Mate Granic y avait été allé -- y était

10 allé. Mais à l'époque où il était question de ces camps, Izetbegovic

11 s'était rencontré avec Tudjman et ils avaient envoyé Maté Granic à Dretelj.

12 Ils avaient envoyé Haris Silajdzic à Konjic. Et --

13 Q. Soyez plus bref.

14 R. En bref, je n'ai jamais été à Dretelj.

15 Q. A la page 03-08, il s'agit d'un document où, au dernier paragraphe, je

16 n'arrive pas à savoir de quoi il s'agit parce que je n'ai eu que la

17 deuxième page. On dit : "Qu'en compagnie du premier ministre Prlic

18 Jadranko, le camp de Dretelj a été visité par Matic Granic et Sarinic

19 Hrvoje, officiels de la République de Croatie. La direction du camp a

20 encouragé la libération des détenus en faisant en sorte qu'ils partent en

21 masse vers des pays tiers, ce qui a constitué une expulsion forcée de la

22 population bosnienne et la création d'un état ethniquement pur.

23 R. Cela n'est pas exact. Je n'y ai pas été, pour ce qui me concerne.

24 Q. Bien. Monsieur Sarinic, vous avez parlé des élections en RSK hier. Vous

25 dites que Babic y a gagné, puis on a supprimé la validité, puis c'est

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1 Martic qui a gagné. D'abord, vous souvenez-vous, je tiens d'abord à dire,

2 que cela n'est pas vrai ? Or, dans le premier tour, c'est Babic qui avait

3 eu plus de voix. Mais il n'avait pas gagné, il n'a pas emporté le premier

4 tour. En vertu de la loi, il y avait eu un deuxième tour, et au deuxième

5 tour, c'est Martic qui l'a emporté. Il a été élu de façon tout à fait

6 légale.

7 R. Je me souviens je que vous ai taquiné un peu à l'époque, parce que vous

8 m'aviez dit que Martic allait gagner de toute façon. Alors, comme au

9 premier tour c'était Babic qui l'avait emporté, je vous ai dit : "Mais

10 alors, Monsieur le Président, j'ai l'impression que votre protéger ne va

11 pas gagner". Vous m'avez répondu qu'il y avait eu des irrégularités. Et

12 tout à coup, c'est Martic qui a gagné.

13 Q. Il a gagné légalement au deuxième tour. Il est toutefois vrai que,

14 s'agissant de mon opinion, mes opinions concernant Babic et Martic, j'ai

15 estimé que Babic était un homme malhonnête et que Martic était un homme

16 honnête.

17 R. Son honnêteté, il l'a prouvée en bombardant Zagreb.

18 Q. Cela, c'est une autre chose. Nous avons condamné le bombardement, mais

19 il a dû le faire pour vous lancer des avertissements en raison des attaques

20 que vous lanciez. Nous n'avons toutefois pas justifié la chose et nous

21 avons toujours estimé qu'il était inadmissible que de tirer sur Zagreb.

22 Dites-moi, je vous prie, d'où pompez-vous ou tirez-vous l'idée que,

23 s'agissant de Croates disparus, rien n'a été entrepris alors que vous savez

24 pertinemment bien qu'il s'est créé en Yougoslavie et en Croatie également

25 une commission conjointe chargée de la recherche de personnes disparues, et

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1 que cette commission s'était réunie réciproquement et alternativement à

2 Belgrade et à Zagreb à plusieurs reprises, et qu'il a été organisé, de

3 façon institutionnelle, des cadres visant à aider les familles des

4 personnes disparues de part et d'autre ? Comment pouvez-vous alors dire que

5 rien n'a été entrepris alors que l'on a fait tout ce qu'on a fait et que

6 cette commission était présidée par des responsables de haut niveau de la

7 Serbie et de la Croatie ?

8 R. Monsieur Milosevic, vous savez je suis un homme très pratique. Je parle

9 de ce qui s'est ensuivi, ce qui a été le résultat de cela. J'ai subi des

10 pressions de l'ensemble des proches de ces personnes portées disparues. Je

11 vous ai prié, je vous ai supplié de faire en sorte que quelque chose soit

12 fait. Vous me l'avez promis, mais, pendant des mois qui ont suivi, aucun

13 nom n'a été communiqué. Or, cela aurait été possible, car sur les 1 800 et

14 quelques personnes, si mes souvenirs sont bons, personnes portées

15 disparues, cinq au moins auraient pu être repérées. Pour qu'on puisse

16 communiquer cela à l'opinion. Mais cela n'a pas eu lieu. Quant à savoir ce

17 qui est arrivé par la suite, cela est une autre paire de manches.

18 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Votre temps a expiré.

19 L'ACCUSÉ : [interprétation] Une question de plus.

20 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Nous n'avons plus de temps. Il nous faut

21 en terminer en un quart d'heure. Maître Tapuskovic, s'il vous plaît.

22 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Messieurs les Juges, je citerai tout

23 simplement les termes qui ont été employés par M. le Témoin Sarinic à

24 plusieurs endroits et qu'il a entendus directement. Je me contenterai de

25 vous présenter seulement des choses qui figurent dans les documents. M.

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1 Sarinic aura besoin aussi de sa déclaration du 24, 25, 26 février et aussi

2 du 14 et 15 mai de l'an 2003. J'ai ici un exemplaire de ces déclarations et

3 je m'apprête à remettre cela sur-le-champ pour que l'on ne perde pas de

4 temps. Peut-on donner cela à M. Sarinic en serbe ou plutôt en B/C/S.

5 Questions de l'Amicus Curiae, M Tapuskovic :

6 Q. [interprétation] Vous avez parlé de l'armée populaire yougoslave et

7 d'un entretien pendant l'interrogatoire principal, paragraphes 15 et 16

8 ainsi que 17 et 18. Au paragraphe 18, il est

9 dit : "Kadijevic a déclaré que la JNA n'aurait pas tiré une seule balle",

10 d'après ce qui figure ici. En est-il ainsi ?

11 R. Oui, Kadijevic a déclaré cela. Oui, c'est tout à fait certain.

12 Q. Je vous prie de vous reporter à la page 6, page 6 de votre déclaration

13 préalable. Vous dites ici la chose suivante. Vous dites que c'est Kadijevic

14 qui a pris la parole, et je vous réfère à la troisième phrase : "La JNA est

15 favorable à ce qu'on garantisse la paix qui a fait l'objet d'un accord et

16 que, par la suite, on négocie l'avenir politique". Etes-vous d'accord pour

17 dire que il en a été question ?

18 R. Oui, il en a été question, j'en conviens, mais comment dire vous savez,

19 verba volant. C'était verbalement la position de Kadijevic, mais quant à

20 savoir ce qui se passait dans les faits, cela est autre chose.

21 Q. Et puis vous dites : "Kadijevic a déclaré la JNA ne tirera pas une

22 seule balle si on ne l'attaque pas." L'a-t-il bien dit ?

23 R. Oui.

24 Q. Très bien. Et puis plus loin dans le texte, vous dites : "Nous pensons

25 que, si la JNA se repliait, il y aurait un bain de sang encore plus grave"

Page 31386

1 alors que votre position est différente. Kadijevic pense qu'il faut

2 préserver la Yougoslavie. Etait-ce ainsi ?

3 R. C'était un homme gagné à la cause de Tito, sans aucun doute. Mais vous

4 savez que tant que la JNA ne s'était pas transformé en une armée purement

5 serbe ou de la Serbie, et bien, qu'elle a protégé les arrières serbes et

6 qu'elle a été, sans aucune contestation possible, anti-Croate.

7 Q. Page 10, vous parlez de Spegelj et vous dites que : "Dès le début de

8 l'année, il avait proposé à Tudjman d'attaquer les casernes. Tudjman lui

9 aurait répondu qu'il ne faudrait pas faire cela, que ceci serait un

10 suicide."

11 R. Oui, tout à fait. Je viens de le dire lorsque j'ai répondu à des

12 questions de l'accusé à cet effet.

13 Q. Est-il vrai qu'il y a eu siège des casernes vers le mois d'août ou le

14 mois de septembre 1991 ?

15 R. Non, pas dans le cas de toutes les casernes. Mais on a essayé, je sais

16 que nos hommes ont essayé de négocier avec les responsables de chacune de

17 ces casernes et qu'à certains endroits ceci a pu se résoudre d'une manière,

18 disons, civilisée. Prenez le cas de Rijeka. Mais, bien entendu, ils ont

19 emporté avec eux l'ensemble de l'armement et de l'équipement. Mais là, au

20 moins, il n'y a pas eu de coups de feu de tirer. Trifunovic à Varazdin, il

21 a même laissé les armes et, par la suite, il a été jugé à cause de cela à

22 Belgrade.

23 Q. Je vous remercie. Page 20, vous venez d'évoquer Bihac il y a un instant

24 et vous avez évoqué la position de Milosevic pour ce qui est d'Abdic. Mais

25 vous avez dit que vous ne vous souvenez pas de quelque chose alors que,

Page 31387

1 lorsque vous avez donné la déclaration que vous avez à présent sous vos

2 yeux, vous avez dit la chose suivante, et ce de manière explicite, Bihac :

3 "Pendant six mois, les Croates, de manière clandestine et de nuit, ont

4 fourni à l'armée des vivres, des armements, des équipements par des

5 hélicoptères." Etait-ce vrai ?

6 R. Oui, je ne me souvenais pas très bien que c'était pendant six mois,

7 mais c'est effectivement vrai.

8 Q. Et plus loin : "Les Bosniens ne pouvaient pas libérer Bihac. Les Etats-

9 Unis d'Amérique ont aidé les Croates, mais ils nous ont arrêté avant qu'on

10 atteigne Banja Luka." Est-ce vrai ?

11 R. Oui.

12 Q. Cependant, peu avant cela, il y a eu un entretien à Split et vous en

13 dites la chose suivante : "Par la suite, il y a eu la réunion de Split. A

14 ce moment-là, les Croates ont voulu renforcer leurs frontières face aux

15 Serbes et Izetbegovic a marqué son accord." Est-ce que cela veut dire

16 qu'Izetbegovic était d'accord avec votre revendication de renforcer ou de

17 sécuriser la frontière ?

18 R. Oui, c'est ainsi qu'on pourrait interpréter ce texte, mais la situation

19 était, néanmoins, un petit peu différente. Lorsque Izetbegovic, lorsque les

20 Bosniens ont demandé à la Croatie de les aider sur le plan militaire, les

21 Croates ont dit : "Oui, certes. Mais demandez-le, s'il vous plaît." Et eux,

22 ils n'ont pas voulu formuler une demande officielle. A cela, les dirigeants

23 croates ont réagi en disant : "Nous, on ne peut pas le faire. On ne peut

24 pas le faire de notre propre chef parce que ce sera interprété comme une

25 agression sur l'état voisin."

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1 Q. Donc, ceci n'a pas eu lieu.

2 R. Non, on a signé la déclaration de Split.

3 Q. Bon. Ils se sont mis d'accord sur le fait que l'armée croate, je dis

4 bien l'armée croate, pouvait agir dans une zone frontalière. Il s'agissait

5 de 60 kilomètres à peu près de la frontière en profondeur dans le

6 territoire. Et les Croates ont fait ce que la communauté internationale

7 aurait dû faire. Est-ce que cela signifie que vous avez agi avec l'armée

8 croate en profondeur sur une soixantaine de kilomètres en profondeur du

9 territoire d'un autre état ?

10 R. Jamais on a signé un accord sur les 60 kilomètres que vous évoquez.

11 Q. Estimez-vous que c'était légitime que l'on agisse ainsi, que l'on

12 agisse par l'intermédiaire du territoire d'un état qui n'était pas le

13 vôtre ? Est-ce que c'était quelque chose qui précédait l'opération

14 Tempête ?

15 R. Si ceci n'avait pas eu lieu, Bihac serait tombée et ainsi que

16 Srebrenica et cetera. Cela est une chose, puis, si l'état avec lequel vous

17 entretenez de bonnes relations vous demandait de l'aider, on ne peut pas

18 interpréter cela, par la suite, comme étant une agression. Il s'agit

19 d'aider, et ce, sur demande de la première partie.

20 Q. Srebrenica, vous le saviez ?

21 R. On a su même avant le 12 juillet que Srebrenica allait avoir lieu.

22 Q. Que Srebrenica allait avoir lieu ?

23 R. Srebrenica serait tombée si Bihac avait connu ce sort avant.

24 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Nous avons ici la pièce 11, qui a été

25 versé au dossier par l'intermédiaire de Peter Galbraith. J'ai l'intention

Page 31389

1 de présenter à M. Sarinic la portion du compte rendu pertinente.

2 Q. Vous n'étiez pas présent lors de la réunion sur les îles Brioni

3 lorsqu'on a proposé de lancer une action ?

4 R. Quelle action ?

5 Q. L'opération Tempête.

6 R. Je n'y étais pas.

7 Q. Vous n'y étiez pas et je ne veux pas poser à vous les questions que

8 j'ai posées à M. Galbraith et à Agotic. En page 3, que dit le président

9 Tudjman ? C'est l'avant-dernier paragraphe, vous l'avez sous les yeux.

10 Ainsi donc, comme vous l'avez vu, c'est un ultimatum. "Dès ce matin,

11 Stoltenberg est venu voir Sarinic et lui a dit que ceci pourrait être

12 amélioré et que cela pourrait s'améliorer comme le demande le président,

13 que les Serbes de Knin et nous-même tenions une réunion à Genève. C'est

14 bien cela ?

15 R. Est-ce qu'il l'a dit ainsi ? Vous savez, comme je n'y étais pas

16 présent, je ne peux pas vraiment vous le confirmer. Je ne peux pas non plus

17 le réfuter. Je ne sais pas ce que le président a dit.

18 Q. Stoltenberg, est-il venu vous voir ?

19 R. Stoltenberg, il est venu me voir cent fois.

20 Q. Est-il exact ce qu'on lit au paragraphe suivant : "J'ai dit à Sarinic

21 que, de principe, il pouvait répéter que nous étions favorables aux

22 négociations. Mais qu'il ne serait pas à la tête de la délégation si de

23 telles négociations, ou une telle réunion, devait avoir lieu" --

24 R. Où est-ce qu'on voit cela ?

25 Q. Dernière phrase.

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1 R. "Nous sommes favorables aux négociations s'ils acceptent mes conditions

2 présentées dans ma réponse à Akashi. Mais il ne sera pas à la tête de la

3 délégation si une telle réunion devait avoir lieu."

4 Q. Il y aura des négociations mais qu'il n'aura pas d'accord et

5 qu'indépendamment des négociations, il y aura une attaque, n'est-ce pas ?

6 R. Cela, je ne m'en souviens pas.

7 Q. Je vous remercie.

8 R. Je vous remercie.

9 Q. Nous avons versé au dossier une pièce aujourd'hui, à savoir un document

10 à l'intercalaire 39, qui figure à l'intercalaire 39. Je souhaite demander à

11 M. Sarinic plusieurs choses au sujet seulement de ce procès verbal. Pendant

12 l'interrogatoire principal, vous avez dit que Slobodan Milosevic a toujours

13 considéré que Knin était une ville croate.

14 R. C'était ainsi, mais j'ai dit également que je ne lui faisais pas

15 confiance sur ce point. C'était simplement un jeu tactique de la part de

16 Milosevic, car c'était lui le maître de ces territoires. Il y avait 30 % de

17 la Croatie entre ses mains et 72 % la Bosnie-Herzégovine. A l'époque, il

18 s'est bien servi de ses deux atouts lors des négociations. N'oubliez pas

19 non plus un point, à savoir la Serbie a fait l'objet de sanctions et il lui

20 fallait bien avancer des arguments forts pour que ces sanctions soient

21 levées. Donc, c'était pour cela que M. Slobodan Milosevic faisait ce genre

22 de déclarations, à savoir de voir les sanctions levées.

23 Q. Page 15, s'il vous plaît, examinez cette page-là.

24 R. Oui.

25 Q. Dernier paragraphe, pendant l'interrogatoire principal, vous avez dit

Page 31391

1 que pour ce qui est de la partie orientale de la Croatie, sa position était

2 différente. Voyons ce que vous avez dit dans un dialogue avec un monsieur

3 dont le nom figure ici. Vous avez dit la chose suivante : "Il n'a jamais

4 nié que le secteur est faisait partie de la Croatie, même lorsqu'il a

5 proposé la tenue d'un référendum. Je lui ai demandé, j'ai exercé une

6 pression sur lui. Je lui ai demandé quel serait l'objet de ce référendum.

7 Il m'a répondu en disant que le référendum concernera le statut de ce

8 secteur est à l'intérieur de la Croatie.

9 R. C'est exact. Nous étions hostiles à ce référendum. Cette région faisait

10 partie intégrante de la Croatie, à notre sens. Ce référendum qui tenait à

11 cœur M. Milosevic, nous ne pouvions pas l'accepter. Il a déclaré ces

12 choses-là. Il a bien dit ces propos-là, et je le maintiens. Ce référendum,

13 ceci aurait été quelque chose d'inacceptable en tant qu'idée.

14 Q. Très bien. Page 23, version anglaise page 18, donc page 18 de la

15 version anglaise de ce document. Pendant l'interrogatoire principal, vous

16 avez dit que M. Milosevic disait à ses collaborateurs qu'il pouvait

17 ordonner telle ou telle chose. Voyons ce que vous avez dit ici. "Tudjman

18 dit : "C'était une réunion où vous étiez présent.

19 R. Quelle page ?

20 Q. Page 23, vers la fin.

21 R. Oui.

22 Q. "Le président dit : "Lui, il ne peut pas le faire encore, et encore." A

23 quoi Richard Holbrooke poursuit : "C'est précisément cela."

24 R. Il ne peut pas faire précisément cela.

25 Q. D'ordonner quoi que ce soit.

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1 R. Je ne suis guère porté à le croire, car à Dayton, l'accusé, il ne s'est

2 pas privé de téléphoner à ses hommes sur le terrain en Bosnie, en Croatie,

3 pour qu'ils signent l'accord d'Erdut. J'ai signé au nom de la Croatie. Eux,

4 ils ne l'auraient jamais signé s'il n'y avait pas eu d'appel téléphonique

5 de sa part. Par conséquent, son poids était considérable.

6 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Maître Tapuskovic, s'il vous plaît,

7 l'heure tourne. Pourriez-vous terminer cela ?

8 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Oui, bien entendu. Je vais terminer. J'ai

9 un document du 31 août, du 31 août 1995. Monsieur le Président, Messieurs

10 les Juges, c'est un document que j'ai déjà présenté, certes, à huis clos.

11 Je vous demanderais de passer à huis clos puisque je l'ai présenté au

12 général Clark.

13 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Faisons-le.

14 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Nous sommes en audience à huis clos

15 partiel.

16 [Audience à huis clos partiel]

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15 [Audience publique]

16 Nouvel interrogatoire par M. Nice :

17 Q. [interprétation] Monsieur Sarinic, des questions vous ont été posées à

18 propos des documents, mais tous ces documents n'ont pas nécessairement été

19 produits ou étudiés par vous. Nous n'allons pas vouloir ajouter d'autres

20 documents à ce qu'a déjà la Cour. Y a-t-il des documents plus particuliers

21 qui ont fait l'objet de questions sur lesquels vous voulez revenir ? Si

22 c'est le cas, nous verrons à ce qu'ils vous soient présentés.

23 R. Monsieur Nice, tant de documents ont été mentionnés au cours du contre-

24 interrogatoire, qu'il m'est impossible de vous en préciser un plutôt que

25 l'autre. Poursuivez vos questions.

Page 31395

1 Q. M. Prelec a fait relever qu'il y avait une erreur dans le compte rendu

2 d'audience de la page 73, la dernière page avant la dernière pause. Lorsque

3 vous parlez des responsables du pilonnage de Dubrovnik, vous avez dit

4 quelque chose à propos de l'accusé, puis, vous avez dit qui, à votre avis,

5 était le responsable. Dans le compte rendu d'audience, on trouve le nom de

6 Hadzic, avec un H. C'est ce nom-là que vous vouliez citer ?

7 R. Non, non. Adzic, sans le H, avec un A.

8 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, je pense qu'il y avait eu une

9 erreur d'interprétation.

10 M. NICE : [interprétation] Je pense que oui.

11 Q. Vous avez réagi s'agissant de la réaction qu'a eu Mikelic envers

12 l'accusé, dans cette relation de maître à esclave. Est-ce quelque chose que

13 vous avez constaté à l'époque, ou est-ce que vous en souvenez tout

14 simplement ? Si vous vous en souvenez, pourquoi ?

15 R. Je l'ai constaté à l'époque. Je l'ai d'ailleurs dans mon livre qui

16 porte la date de 1998. Ces choses-là se sont passées, je pense, en 1995 et

17 je l'ai vu moi-même, mais je ne voulais trop insister. Je ne voulais pas

18 partir de ce rapport interpersonnel. Je voulais simplement voir le rapport

19 de force et la façon dont il évoluait. Le fait que la force en fait, elle

20 se trouvait être l'apanage de M. Milosevic lui-même.

21 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Monsieur Milosevic va intervenir.

22 L'ACCUSÉ : [interprétation] Ce n'était pas une erreur d'interprétation.

23 J'ai utilisé le micro. Je n'ai pas entendu le nom de Adzic, si c'était

24 Adzic c'était le chef de l'état major général. Si j'avais entendu ce nom,

25 j'aurais réagi. Parce que j'ai présenté l'ordre émanant de l'état major

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1 général montrant que Dubrovnik ne devrait pas être bombardé que ce soit par

2 air, par terre, ou par mer. Il était impossible qu'Adzic soit responsable

3 de cela.

4 M. LE JUGE MAY : [interprétation] [aucune interprétation]

5 M. NICE : [interprétation]

6 Q. A la lumière de l'observation que vient de faire l'accusé, avez-vous

7 quoique ce soit à ajouter à la réponse fournie précédemment à propos de M.

8 Adzic ? Commençant par un A.

9 R. J'étais avec le général Adzic en 1991 à Brioni. Nous avons eu une

10 réunion. Je crois en avoir parlé dans le cadre de ma déposition. Surtout au

11 moment du déclin du pouvoir de Kadijevic, c'est lui en particulier qui a

12 pris du pouvoir dans l'armée de la JNA, et à toutes fins utiles a mené la

13 bataille. Tout le monde me disait qu'il était de l'Herzégovine orientale,

14 tout près de Dubrovnik, que c'est lui qui était à l'origine de l'ordre

15 ordonnant le bombardement de Dubrovnik, et que c'était lui qui l'avait

16 exécuté, cet ordre.

17 Q. Brève question. A propos de ce que l'accusé selon vous aurait dit à

18 propos de Arkan. Est-ce que c'est quelque chose que vous avez consigné à

19 l'époque sous forme de note, ou est-ce que c'est quelque chose dont vous

20 vous êtes souvenu et que vous avez plus tard couché sur papier ?

21 R. Non, voici comment cela s'est passé. Je pense vous l'avoir dit. Pendant

22 que je parlais à l'accusé, je ne pouvais pas vraiment tenir mon journal.

23 C'était impossible, je me suis contenté de prendre quelques notes à la

24 hâte. Une fois dans l'avion, quand j'avais des souvenirs encore précis,

25 j'ai pris des notes. Je sais que sur un bout de papier j'ai écrit

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1 simplement un mot "Arkan," C'était peut-être deux heures plus tard que j'ai

2 couché ces notes dans mon journal.

3 Q. Avez-vous des doutes aujourd'hui, sur ce qui a été dit et sur la façon

4 dont vous avez relaté cela aux Juges de la présente Chambre ?

5 R. Non, pas du tout.

6 Q. Quelques questions vous ont été posées par l'accusé à propos de la

7 réunion de Karadjordjevo. La question est de savoir si on a discuté de la

8 division de la Bosnie. Grâce aux documents que vous avez pu recevoir, que

9 pensiez-vous de ce qui a été discuté ? Si vous avez un avis sur la

10 question, donnez-le aux Juges.

11 R. Vous voyez d'abord, je vous ai dit ce que j'ai entendu pendant les dix

12 minutes au cours desquelles je me suis trouvé avec les deux présidents. Le

13 reste, c'est uniquement le fruit de ma réflexion, parce que j'ai constitué

14 si vous voulez un puzzle, une espèce de mosaïque à partir des éléments que

15 j'apprenais, dont j'entendais parler. Et à partir de ces indices, vous,

16 vous êtes un homme de droit vous savez pertinemment, que l'on peut avoir

17 des indices constituant un faisceau pour devenir une preuve.

18 Pour ce qui est de la Bosnie, de la division de la Bosnie, nombreuses

19 furent les conjectures lancées. Personne mis à part les deux présidents, et

20 vous en avez un ici présent, l'autre est dans l'au delà, personne à part

21 ces deux hommes, ne saurait savoir ce qui s'est dit. Je vous ai parlé de ce

22 bout de papier qui se trouvait à Tikves et pas Karadjordjevo. Ceci a trait

23 à la Bosnie.

24 De surcroît --

25 Q. Ce que vous avez vu, ce que vous avez entendu à l'époque, et plus tard,

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1 est-ce que cela cadrait bien avec cette idée de la division, ou pas ?

2 R. La division de la Bosnie, désolé, je n'ai peut-être pas été clair dans

3 ma réponse, mais je ne vois pas d'autres moyens de dire. Je vous ai dit

4 comment chacun s'était comporté par la suite. Vous aviez la Republika

5 Srpska qui avait subi un nettoyage ethnique, et qui était préparé pour

6 l'annexion à la Serbie. C'était à peu près la moitié de la Bosnie. Par

7 ailleurs, la Croatie a reconnu la Bosnie-Herzégovine, et a dépêché des

8 ambassadeurs. Je vous ai donné tous les autres détails.

9 Par conséquent, en tant que pragmatique, je ne peux vous émettre des

10 hypothèses, je vous parle des faits que je connais. On a discuté de la

11 Bosnie, et la réflexion évoluait selon ces grandes lignes, il n'y a qu'une

12 partie qui les a mis à exécution, l'autre pas.

13 Q. Autre remarque, elle concerne Mesic qui dit que la JNA devient

14 pratiquement la plus grande organisation paramilitaire du monde. Pourriez-

15 vous en quelques mots nous expliquer pourquoi ceci vous semble marqué au

16 coin du bon sens ?

17 R. Vous voyez, lorsque vous avez une organisation sans commandement, tout

18 le monde peut la commander. Puisqu'en vertu de la constitution yougoslave,

19 le président était le commandant en chef, le commandant suprême de la JNA.

20 Comme il n'existait plus ce commandant suprême, la question était de savoir

21 qui commandait la JNA. Si vous avez plusieurs maîtres, on peut qualifier

22 ces armées d'organisation paramilitaire.

23 M. NICE : [interprétation] Les Juges voulaient savoir pourquoi il y avait

24 eu trois versions différentes d'une même transcription. La voici.

25 Auparavant, j'ai appelé votre attention sur un document. Je ne sais plus

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1 quel est l'intercalaire, mais ce document révélait que toutes les

2 conversations interceptées avaient été assorties de traduction qui n'était

3 pas tout à fait exacte. Il y a eu une nouvelle retranscription, cela

4 faisait deux transcriptions. De plus, il est arrivé au fournisseur de ces

5 documents de nous donner des extraits de ces transcriptions. Par leur

6 nature même d'extrait, il fallait les fournir, les signifier en application

7 de l'Article 68, où on aurait considéré significatif le fait qu'on aurait

8 abrégé le document. Voilà.

9 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Fort bien. Je tiens tout d'abord à

10 remercier le témoin d'être venu déposer en tant que témoin, sa déposition

11 est maintenant terminée. Merci de votre aide, Monsieur Sarinic, vous pouvez

12 désormais vous retirer.

13 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous remercie, Messieurs les Juges.

14 [Le témoin se retire]

15 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Nous sommes dans les dernières minutes,

16 les derniers jours. Il ne reste plus que quelques semaines.

17 M. NICE : [interprétation] Il y a très peu de temps qui reste à notre

18 disposition. Je crois que nous avons pu placer la liste des témoins sur une

19 seule page.

20 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Merci. Qu'en est-il pour ce qui de

21 lundi ?

22 M. NICE : [interprétation] La situation n'est pas sûre. Il règne une

23 certaine incertitude. Si vous voyez la liste actuelle, j'avais espéré

24 commencer aujourd'hui la déposition de M. Manning, mais nous n'avons pas pu

25 le faire. Comme il est de la maison, autant le rayer de la liste pour le

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1 moment. Il pourra intervenir pour combler un fossé éventuel. Nous allons

2 pour le moment le radier de la liste.

3 Nous avons le témoin B-235. Il ne sera entendu lundi que si la Chambre le

4 décide. Si ce n'est pas le cas, à ce moment-là, je ferai venir le témoin

5 18084, lundi. Si vous rendez votre décision à propos du témoin B-235

6 demain, manifestement, l'accusé saura, si nous commençons par lui ou par le

7 témoin B-1804.

8 Les prévisions actuelles sont celles-ci, nous avons M. Theunens et le

9 général Vegh qui devrait suivre, pas nécessairement dans l'ordre que je

10 viens de donner, même si cela serait l'ordre logique, d'abord Theunens et

11 puis Vegh. Mais pour ce dernier, il faudrait d'abord que vous fassiez droit

12 à une requête aux fins de déposition par vidéo conférence, puis, il

13 faudrait organiser celle-ci et les choses ne sont pas trop sûres non plus.

14 Cependant, je pense que nous pourrons utiliser toute la semaine et s'il y a

15 un vide, il sera comblé par M. Manning.

16 Donc, nous aurons les 3 et 4, le témoin B-248 et même s'il y a encore une

17 requête en souffrance à propos de ce dernier, il faudra peut-être le

18 déplacer même si vous autorisez sa déposition.

19 Mme Pack me rappelle qu'il y aussi la question du statut des documents

20 concernant le témoin Sarinic.

21 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Fort bien. Nous allons suspendre

22 l'audience, elle reprendra lundi. L'audience est levée.

23 --- L'audience est levée à 13 heures 48 et reprendra le lundi 26 janvier

24 2004, à 9 heures 00.

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