Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 Le mercredi 1er septembre 2004

2 [Déclaration liminaire de la Défense]

3 [Audience publique]

4 [L'accusé est introduit dans le prétoire]

5 --- L'audience est ouverte à 9 heures 05.

6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, nous entamons la

7 partie finale de vos propos liminaires.

8 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Robinson, je vous demande de tenir

9 compte du fait que nous commençons à présent avec du retard.

10 Dans le courant de cette agression de l'OTAN, il n'a pas été utilisé

11 directement des produits toxiques de guerre, mais il y a eu des

12 conséquences; pour ce qui est des produits chimiques utilisés par voie de

13 conséquence et il a été ciblé des postes de transformation au pyralène. Il

14 a été bombardé des raffineries de pétrole, des usines de produits chimiques

15 à Pancevo, Novi Sad, Lucani et Baric. A l'encontre de la Serbie, il a été

16 mené une guerre chimique aussi.

17 Les dirigeants du monde ne voient pas d'un bon œil la réalisation de la

18 souveraineté de la Serbie au Kosovo et Metohija, quoi que cela a été

19 garanti par l'accord et cela est prévu par la Résolution 1244, qui n'est

20 pas respectée du tout. Leur intérêt, c'est de se servir du Kosovo et

21 Metohija pour la réalisation de leurs objectifs politiques et stratégiques,

22 et d'exploiter les avantages militaires ainsi que les richesses naturelles

23 du Kosovo. Il convient de tenir compte du fait que le Kosovo dispose des

24 mines les plus grandes de lignite au monde. Il y a des réserves de plus de

25 14 milliards de tonnes. Pour ce qui est des réserves au total de plomb et

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1 de zinc, le Kosovo compte 48 % des réserves et la valeur de ces réserves

2 est également énorme. Au Kosovo et Metohija, il y a des réserves de cobalt

3 et de nickel qui constituent une valeur très grande. Les centrales

4 électriques du Kosovo sont très importantes pour ce qui est de boucler le

5 bilan énergique de la République de Serbie.

6 Tout ceci démontre qu'il s'agit là de motifs de pilleurs qui

7 prétextent se battre pour la justice et pour les droits des Albanais du

8 Kosovo. En dépit du fait que la source de cette crise au Kosovo et Metohija

9 qui dure depuis les temps d'expulsion des populations serbes et autres

10 depuis l'occupation ottomane, il y a toujours eu aspiration à la création

11 d'une Grande Albanie. Cette aspiration n'est d'ailleurs pas dissimulée du

12 tout par eux et pour la réalisation de cet objectif, ils ne choisissent pas

13 leurs moyens.

14 En dépit de ce fait, le soi-disant bureau du Procureur ici a

15 l'insolence de placer dans les chefs d'accusation à mon intention ou à

16 l'intention des Serbes et de la Serbie à charge le fait que -- ou

17 l'accusation au terme de laquelle en plein milieu de la République de

18 Serbie et au centre de cet Etat médiéval de Serbie, nous ayons voulu créer

19 une Grande Serbie. Comment une Grande Serbie ou une Petite Serbie peut être

20 faite en Serbie même. Eux, non plus, ne savent vous l'expliquer, ni vous le

21 prouver, chose qui est démontrée au mieux par la première des parties de

22 cette opération, que vous appelez "procès", et tout comme le reste, de par

23 sa nature et la teneur de ce qu'il a été convenu d'appeler ici "acte

24 d'accusation", qui se traduit en farce de bon marché. Cela est de bon

25 marché pour ce qui est du goût, mais pas pour ce qui est des quantités

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1 d'argent prélevé par l'Arabie Saoudite, George Soros et autres financiers

2 impartiaux.

3 Je tiens à ajouter également qu'en 1998, lorsque Holbrooke est venu

4 chez nous à Belgrade, nous avions avancé les renseignements dont nous

5 disposions, disant qu'en Albanie du nord, l'on aidait l'Uceka et que cela

6 était assuré par Osama bin Laden, pour ce qui est de l'entraînement de la

7 formation de leurs combattants. Mais ils ont quand même opté pour la

8 coopération, donc en faveur de la coopération avec l'Uceka, et par voie de

9 conséquence avec bin Laden, quoiqu'il se soit attaqué aux ambassades

10 américaines de Tanzanie et du Kenya et quoiqu'il ait déclaré pratiquement

11 la guerre à ce pays-là.

12 Je suis convaincu que tôt ou tard cela se fera jour cette

13 corrélation-là et qu'il viendra à un moment où Clinton, Albright et autres

14 devront répondre; si ce n'est pas pour ce qui s'est passé avec les Serbes,

15 du moins pour ce qui s'est passé à leurs propres citoyens.

16 Je me propose de vous donner lecture d'une citation et je vais par la

17 suite passer à d'autres sujets. Les frappes aériennes et les frappes, la

18 terreur, les actes de sabotage, les attentats, les meurtres d'hommes

19 d'Etat, les attaques à l'égard de tous les points de la défense, c'est ce

20 qui constitue la guerre à une échelle sans précédent. Je crois que cela

21 vous rappellera les frappes de l'OTAN contre l'Yougoslavie en 1999,

22 agression que cette partie d'en face devrait condamner, mais il n'y prête

23 pas attention. Cette citation n'est pas de Clinton et n'est pas de Clark

24 non plus, mais cela illustre leur comportement, la citation est d'Hitler.

25 C'est un livre de 1940, publié à New York, et l'auteur est Herman

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1 Rauschning, et il parle de ses conversations confidentielles avec Hitler.

2 Dans ce livre, il dit : "Aucun droit international, aucun contrat ne

3 m'empêcheront de profiter de l'opportunité qui s'est offerte à moi." Il

4 parle plus loin de son intention d'occuper la France et qu'il se présentera

5 comme le libérateur de celle-ci et que l'homme de la rue se fera montrer

6 que cela apporte un ordre social juste et équitable et une paix durable.

7 Pour ce qui est de la guerre en Slovénie et en Croatie, je me propose, pour

8 commencer, de vous donner quelques introductions brèves. Dans le livre de

9 Warren Zimmerman, le dernier des ambassadeurs des USA en RSFY, page 173, il

10 a été donné le commentaire suivant, concernant la position de la JNA et la

11 soi-disant lutte héroïque en Slovénie et Croatie contre une armée qui est

12 toujours commune et tout à fait légale. Je cite : "La JNA se trouvait dans

13 son propre pays. Ces troupes se trouvaient légitimement déployées dans

14 toutes les républiques yougoslaves. Après la proclamation de l'indépendance

15 de la Slovénie et de la Croatie, les troupes ont été considérées comme

16 étant des troupes d'occupation même au moment où elles ne quittaient même

17 pas leurs garnisons. La tactique slovène -- je vais ralentir. La tactique

18 des Slovènes et des Croates ne peut pas se vanter d'un héroïsme, se fondait

19 sur la nécessité d'éviter des conflits ouverts, et les tentatives de

20 bloquer les soldats dans les casernes pour les faire souffrir de famine.

21 Cette situation inattendue de la JNA, qui jusqu'à hier, était le protecteur

22 du pays, et s'est trouvé tout à coup occupant, force d'occupation, a influé

23 de façon très importante sur l'esprit des soldats qui se sont trouvés entre

24 deux feux."

25 Zimmerman parle dans son livre et conclut dans son livre, qu'il est

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1 erroné de parler d'une attaque de la JNA contre la Slovénie et par la suite

2 contre la Croatie. L'un des protagonistes les plus actifs, pour ce qui est

3 de cette attitude anti-serbe, M. Warren Zimmerman, qui s'est trouvé sur les

4 lieux, avance un fait notoire, à savoir qu'il est erroné de parler d'une

5 attaque de la JNA contre la Slovénie et la Croatie. Or, vous, vous vous

6 êtes fait confier la mission d'affirmer qu'il y a eu là-bas une agression

7 de perpétrer par la JNA à l'encontre de son propre pays.

8 Au sein de l'Yougoslavie, les tendances séparatistes croates n'ont

9 pas disparu complètement avec l'échec et la disparition de la NDH de cette

10 République croate indépendante de la Deuxième guerre mondiale. Ces

11 tendances se manifestent de façon ouverte, début 1970 avec ce qu'il a été

12 convenu d'appeler le "masspock" [phon], le mouvement de masse et ceci de la

13 part d'une partie de la direction de la république au moment où ils ont

14 manifesté des exigences d'indépendance avec des menaces très présentes à

15 l'encontre des Serbes de là-bas. Après la guerre en Yougoslavie, les

16 Croates se voient octroyer des positions d'importance de direction, et à

17 certains autres endroits, il a été mis en place une thèse d'une soi- disant

18 hégémonie, d'un hégémonisme serbe; pour ce qui est maintenant de

19 l'apparence que prenait cette dominance serbe -- cette hégémonie serbe.

20 Jusqu'à la Deuxième guerre mondiale, il est un fait qu'après la

21 Deuxième guerre mondiale, après la mort de Tito, qui était le leader

22 incontesté de l'Yougoslavie, et qui est décédé en 1980, il convient de dire

23 que Tito était Croate. Pendant l'existence de cette Yougoslavie socialiste

24 de 1945 à 1992, pendant 47 ans au poste de premier ministre, il y avait

25 durant 30 ans des Croates. Les 17 autres années, c'étaient d'autres

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1 ressortissants. Pendant tout ce temps, il n'y a qu'un Serbe au poste de

2 premier ministre, c'était Petar Stambolic.

3 Si l'on tient compte de ce fait, comment pourrait-on affirmer qu'il y

4 a eu près d'une dominance de Serbes pour ce qui est du sommet politique de

5 l'Etat ? Pour ce qui est du sommet de l'armée, un témoin à vous est venu

6 nous parler de la constitution de la composition ethnique de cette

7 direction au sommet de l'armée. Il y avait un Yougoslave, le ministre de la

8 Défense, Veljko Kadijevic, originaire de Croatie, issu d'un couple mixte

9 entre un Serbe et une Croate; il y avait deux Serbes, un de Serbie et un de

10 Bosnie; huit Croates de Slovénie; deux Macédoniens et un Musulman.

11 Il convient d'ajouter à tout ceci que le plus proche des

12 collaborateurs de Tito, et l'un des créateurs de l'ordre constitutionnel de

13 l'Yougoslavie, dans toutes ces phases d'évolution, avait été un Slovène,

14 Edward Kardelja. Tout ceci démontre que cette histoire de domination serbe

15 en Yougoslavie, d'hégémonie serbe, n'est qu'un pur mensonge, et les Croates

16 et les Slovènes partant de là, se trouvaient absolument dépourvus de

17 raisons de se plaindre d'illégalité en droit ou de représentation

18 insuffisante. Cette histoire d'hégémonie et de domination serbe avait été

19 un moyen de propagande, qui était tout à fait erroné et qui était censé

20 justifier ses aspirations sécessionnistes.

21 Dans l'Yougoslavie d'après-guerre, le génocide des Oustachi à

22 l'encontre des Serbes a été un sujet dont on n'a parlé pas beaucoup parlé.

23 Le reste des Serbes, qui avait vécu sur le territoire de l'ex-Etat croate

24 indépendant, notamment, ceux de la Krajina, que le poète serbe, Matija

25 Beckovic, a désigné comme "le reste d'un peuple égorgé, qui ont accepté

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1 tacitement de ne pas parler de leurs morts et de ne pas les enterrer de

2 façon digne de ce nom. Les fosses, où on a jeté bon nombre de victimes,

3 Jadovnov [phon], Pribilovci, Golubnjaca ont été bétonnés tout simplement et

4 abandonnés à l'oubli. On a avancé ici une thèse au terme de laquelle les

5 Serbes ont à nouveau enterré leurs morts bien plus tard, alors que ces

6 morts n'ont jamais été enterrés de façon digne de ce nom.

7 Si l'on tient compte de ce passé, que pouvaient ressentir les Serbes

8 en Croatie une fois que le parlement de la Croatie, dominé par le HDZ à

9 Zagreb, en février 1990, et, notamment, le président de ce parti, M.

10 Tudjman, a dit que l'Etat croate indépendant n'a pas seulement été un Etat

11 quisling et un crime historique, mais cela a été le résultat des

12 aspirations historiques des Croates. Quoi de plus naturel que de voir les

13 Serbes réagir et élever leurs voix, d'autant plus que le peuple croate

14 auquel celui-ci s'était référé, n'a pas constitué la majorité de ce peuple

15 croate, mais il s'agissait, notamment, d'extrémistes aidés par l'étranger,

16 et ces derniers se sont lancés, une fois de plus, dans la réalisation de

17 leur soi-disant aspiration historique.

18 Tout ceci, ce sont des renseignements dont vous disposez, bien

19 entendu, et que vous omettez. Ce bureau du Procureur illégal au paragraphe

20 94 n'a pas hésité de parler du HDZ, sans qualification aucune, quoiqu'il

21 s'agissait à ce moment-là, d'un parti qui avait fait revive la pratique et

22 les symboles du temps des Oustachi. Au chef 95, de ce qui est convenu

23 d'appeler acte d'accusation, le Parti démocratique serbe est qualifié de

24 nationaliste. Il s'agit d'une manipulation que cette façon de présenter les

25 choses a permis, parce qu'eux savent tout sur les activités chauvinistes du

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1 HDZ, mais ils ne permettent pas qu'on en parle. D'autre part, il a fallu

2 passer sous silence la totalité de ce qu'a fait le HDZ et il a fallu

3 présenter en terme négatif, le SDS.

4 Maintenant, qu'on a commencé à en parler et ils ont justifié le fait

5 d'en parler par cette manipulation-là, cela révèle que les activités du

6 peuple serbe ont en réalité été des activités défensives.

7 Warren Zimmerman, dans son livre, "Source d'une catastrophe", parle

8 du fait qu'en Croatie de Tudjman : "Il y a eu grandes violations des droits

9 des Serbes. Ils ont été évincés de leurs postes de travail. On leur a

10 demandé de signer des actes d'allégeance et pour que l'ironie vienne au

11 comble, on a voulu laisser entendre que c'était moi qui avais demandé des

12 actes d'allégeance. Ils n'ont pas pu retrouver une seule personne pour

13 témoigner du fait d'avoir signé une déclaration d'allégeance à mon égard.

14 Ce sont là des absurdités. Il a été question d'attaques à l'encontre des

15 foyers et des biens des Serbes. Le fait que l'on ait qualifié les Serbes

16 des noms les plus dégoûtants, les plus abjects, cela n'a pas été interrompu

17 par lui-même. Il parle du rôle de Tudjman, du rôle important dans la mort

18 de l'Yougoslavie et les violences perpétrées en Bosnie-Herzégovine et en

19 Croatie. Il explique que la Croatie s'était transformée en république non

20 démocratique où la situation était explosive. Une voie anti-serbe prise par

21 les autorités croates s'est traduite par la création d'un groupe de Nerval.

22 Nerval est une localité au Canada où l'immigration oustachi avait été

23 concentrée auprès des franciscains. Ces groupes oustachi avaient été jugés

24 plus extrémistes, encore que les organisations oustachi dans la NDAH

25 d'Hitler. De tout ceci la presse croate en parle ouvertement à présent,

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1 mais je n'ai pas le temps à présent de vous montrer tout ceci. En

2 substance, toutefois, il convient de dire qu'à l'époque, en 1987 déjà, il a

3 été question de préparatifs à un futur Etat indépendant croate qui se

4 résumerait en quatre points repris dans les informations croates. D'abord,

5 il fallait que la Croatie soit à tout prix un Etat indépendant.

6 Deuxièmement, il fallait faire en sorte que la Croatie soit un Etat de plus

7 homogène et de plus ethniquement pur. En d'autres termes, la communauté

8 serbe en Croatie devrait se muer en minorité ethnique afin que les Serbes

9 cessent d'être un facteur perturbateur. Il fallait s'associer aux

10 communistes et aux partisans pour vaincre les Serbes vis-à-vis de la

11 Bosnie-Herzégovine. Quatrièmement, à l'égard de la Bosnie-Herzégovine, il

12 convient de conduire une politique qui viserait à l'annexion de

13 l'Herzégovine occidentale, à savoir, des régions durement habitées par une

14 population croate. Martin Spegelj, le ministre de la Défense à l'époque des

15 événements concernés, dans son journal du 28 octobre 2001, devant 30

16 personnes déclare que, si la maison d'un Serbe brûle, il ne saura plus où

17 retourner. C'est ce qu'il a déclaré, et nous confirme Gojko Susak. Spegelj

18 affirme, dans le journal Novi List, le 29 octobre 2001, il dit : "Tudjman

19 et Susak ont substantiellement mis en place un concept d'Etat ethniquement

20 pur à l'image de cet Etat indépendant croate de la Deuxième guerre

21 mondiale." Le 8 décembre 1993, le New York Times dit qu'il y a 10 000

22 maisons qu'on a fait sauter à la dynamite. Je ne vais pas tout citer pour

23 ne pas perdre mon temps.

24 Outre ces pressions, ces mauvais traitements et ces dégradations

25 humaines, sur le plan individuel et collectif, le peuple croate s'est vu

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1 exposé à une dégradation sur le plan juridique. On sait qu'il y a cette

2 constitution de changer à Noël, qui a privé les Serbes des droits qui

3 avaient été les leurs jusque-là. Lord Owen a dit, dans "l'Odyssée des

4 Balkans", que les Serbes, dans la Slavonie Baranja [phon], entre le royaume

5 des Habsbourg et le royaume des Ottomans, il a été créée une région appelée

6 la Krajina, qui était gérée par Vienne et non pas par l'Empire ottoman.

7 Pendant la Deuxième guerre mondiale, la population a été exposée à un

8 génocide de la part des Oustachi croate. Un très faible nombre de

9 commentateurs en 1995 a compris ou reconnu que le gouvernement croate, en

10 s'attaquant à la Krajina, n'a pas libéré ce pays, étant donné que les

11 Serbes ont habité ces régions-là depuis plus de trois siècles. C'est ce qui

12 nous dit Lord Owen.

13 Dès la moitié des années 90, s'engage toute une série d'attaques et

14 d'assassinats. Vu les réactions serbes, parce qu'il y a eu des barrages

15 installés et dressés par les Serbes aux approches de leurs agglomérations,

16 on a appelé ces actions "révolution des troncs d'arbres". Les autorités

17 croates ont interprété ces réactions des Serbes, qui avaient peur de se

18 retrouver sans aucun moyen de défense collective, face à cette terreur

19 oustachi et face à cette idéologie oustachi -- ils ont considéré que

20 c'était une attaque -- c'était une agression à l'encontre de l'Etat croate.

21 Comment peut-on expliquer que le fait de placer des troncs d'arbres aux

22 approches de leurs maisons constituait une attaque? Spegelj, que j'ai déjà

23 cité, a dit la chose suivante : "Knin, nous allons résoudre cette question

24 de telle manière que nous allons les massacrer. Nous allons les massacrer."

25 C'est pourquoi nous avons reçu la reconnaissance internationale. De

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1 nombreuses preuves de cela ne sont pas que des lettres mortes ou des

2 paroles en l'air. Nous parlons ici de victimes, de personnes qui ont perdu

3 leur vie. Dans son livre sur l'invasion de la Krajina serbe, l'auteur dit

4 la chose suivante. En 1990, Tudjman a dit : "Je suis heureux, je me réjouis

5 du fait que mon épouse n'est ni Serbe, ni Juive."

6 J'omettrai un certain nombre de ces citations. Je n'en donnerai que

7 quelques-unes. "La sécession par la violence de l'Yougoslavie en 1991, qui

8 a été opérée par la Croatie, a entraîné l'expulsion de plus de 300 000

9 Serbes. Les Serbes ont été expulsés, éliminés de 183 villages."

10 Vous avez fait une erreur; oui, 183 villages.

11 Tomislav Mercep poursuit : "Le ministre et un membre du parlement est

12 à la tête d'un escadron de la mort." Mercep a tué 2 500 Serbes dans la

13 Slavonie occidentale en 1991 et 1992.

14 Vous avez aussi Miro Badijamovic qui a fait partie de cet escadron de

15 la mort. J'ai cela sur des bandes, mais je n'ai pas le temps de présenter

16 cela.

17 Gregory Ellis poursuit, en disant : "Si la Croatie continue à

18 apporter son soutien aux fascistes, cela peut avoir lieu lorsque cela

19 correspond aux intérêts géopolitiques américains." Susan Woodward, de

20 l'institution Brookings, en 1995, dans son livre, intitulé, "La tragédie

21 des Balkans", dit : "Le gouvernement croate n'a guère cherché à protéger

22 ses citoyens face à des actions terroristes anti-serbes en Dalmatie et à

23 l'intérieur du pays en été 1989 lorsque les Croates ont attaqué des maisons

24 et des foyers serbes, étant harcelés et arrêtés des leaders serbes. Les

25 Serbes ont été licenciés, vu leur nationalité -- à cause de leur

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1 appartenance nationale, et la discrimination ne s'est pas limitée à ceci.

2 Elle a connu une escalade pendant les années qui devaient suivre."

3 C'était en 1989. Les activités criminelles qui sont attribuées aux Serbes

4 n'étaient que leur acte de défense ?

5 Chris Hedges, dans New York Times, le 16 juin 1996, dit :

6 "500 000 à 600 000 Serbes ont été expulsés de Croatie ou d'Herzégovine."

7 Je n'ai pas le temps de poursuivre. Ici, il est question de la situation à

8 Zadar. Ils parlent des dizaines de milliers de personnes qui ont été

9 expulsées de leur logement. Ils parlent de Feral, un journal croate, d'une

10 nouvelle preuve des crimes qui ont été commis à Vukovar, des corps qui

11 flottaient dans le Danube, sur le Danube et de Gospic, de la zone côtière

12 croate," et cetera.

13 Un autre magazine croate, qui parle de crimes à Osijek en 1991, 1992, des

14 assassinats de civils serbes, et ils expliquent comment on les a

15 interpellés, comment on les a assassinés.

16 S'agissant de Gospic, trois officiers de l'armée croate sont venus déposer

17 ici sur les crimes. On ne leur a offert aucune protection et le témoin,

18 Milan Levar, qui devait déposer au sujet des massacres qui ont été commis à

19 Gospic, il a même été liquidé. Lorsqu'il s'agit d'Erdemovic, qui a admis

20 avoir tué des gens et que nous avons arrêté, qui est venu ici sur sa propre

21 demande parce qu'il a demandé d'être livré, il n'était pas notre

22 ressortissant. Il a été livré sur sa propre demande. Vous lui avez fourni

23 des mesures de protection, même s'il a reconnu avoir tué des dizaines de

24 personnes, ce qu'il a reconnu à un de nos organes de sécurité. Lui, vous

25 l'avez relâché au bout de quatre ans. Vous lui avez permis de vivre

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1 impunément, et vous n'avez pas offert des mesures de protection au premier

2 groupe de témoins que j'ai cité. Lui, vous lui avez permis de retourner

3 chez lui. Enfin, je n'ai pas la possibilité de tout aborder. Il faudra que

4 j'omette un certain nombre de choses.

5 Page 182 de son livre, David Owen évoque le point suivant : "Les Serbes,

6 qui sont restés dans les rangs de la JNA, n'avaient absolument pas de

7 liberté dans les garnisons. Nombreux sont ceux qui se sont trouvés

8 encercler par l'armée croate. C'est une des raisons des réactions fortes de

9 la JNA dans certaines localités, telle que Vukovar." Lorsqu'il dit, "telle

10 que Vukovar", c'est le seul endroit où la réaction de l'armée a été forte

11 et il explique pourquoi.

12 L'explication, je pense, est aussi ce qu'écrit ces jours-ci la presse

13 croate, à savoir quel est le nombre de cadavres serbes qui flottaient dans

14 les eaux du Danube bien avant ces événements de Vukovar.

15 Vukovar a constitué la seule exception, le seul point où la JNA a

16 considéré les attaques et les encerclements de leurs membres et de la

17 population civile comme une raison de réagir fortement. Il ne fait aucun

18 doute que ce sont les autorités croates qui ont provoqué et déclenché la

19 guerre en Croatie afin d'opérer une sécession illégale et par la force.

20 Comme on le verra dans les années qui vont suivre, aussi pour constituer un

21 Etat ethniquement pur, un Etat croate ethniquement pur.

22 Les Serbes, sans aucun doute, on le voit de toute évidence étaient

23 obligés de se défendre; c'était une cas de légitime défense de leur survie.

24 Personne ne conteste le fait qu'il ait été des crimes isolés qui se soient

25 produits, qui sont la conséquence du chaos qui s'est instauré. Cette soi-

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1 disant accusation essaie de le présenter comme constituant une entreprise

2 criminelle commune en dépit des faits sur le plan historique, sur le plan

3 juridique, sur le plan militaire qui contredit cela. Cette soi-disant

4 accusation se fonde pour ce faire sur des dépositions telle la déposition

5 de Milan Babic, qui était entré en conflit avec ses propres autorités à

6 cause de ses positions extrémistes et à cause des témoins comparables.

7 On sait que c'est notamment grâce aux efforts de Cyrus Vance, en

8 particulier, grâce aux efforts déployés par la République de Serbie et

9 grâce à mes efforts propres que l'on a pu adopter le plan Vance-Owen, qu'on

10 a pu constituer des zones de sécurité, des zones que l'armée de Croatie n'a

11 jamais respectées car l'on connaît le nombre d'attaques : Miljevacka,

12 Klatno [phon], Peruca, la poche de Medak, Zemunik, la Slavonie occidentale,

13 l'Eclair, Tempête, et ainsi de suite. On sait qu'il y a eu des centaines de

14 Serbes qui ont été tués lors de chacune de ces attaques. On sait tout ce

15 qui s'est passé. Les armes se sont trouvées enfermées sous une double

16 serrure. Les Serbes ont remis la clé, mais ils ont repris les armes pour

17 pouvoir défendre leur survie et pour pouvoir empêcher le massacre.

18 Compte tenu de tout cela, Lord Owen dit dans son livre :

19 "Rapidement l'armée croate s'est armée. Elle a eu l'artillerie lourde, les

20 avions. Le gros de ces fournitures est arrivé des pays occidentaux et

21 provenaient de l'Allemagne de l'Est. On comprendra facilement suite à cela

22 pour quelle raison ils n'acceptent pas la démilitarisation et la

23 démobilisation. Le gouvernement croate a constitué un facteur

24 déstabilisateur. Le facteur serbe était un facteur de consolidation."

25 Il dit que le nettoyage ethnique le plus important dans cette crise, celui

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1 qui est passé sous silence par cette institution est celui de la Krajina.

2 Il s'agit des centaines de milliers de personnes, des milliers de personnes

3 tuées. Lorsque ce sont les Serbes qui en sont victimes, là il ne s'agit pas

4 d'un crime.

5 Seulement quelques mots au sujet de la Bosnie-Herzégovine. On sait que la

6 paix a duré tant que l'ex-Yougoslavie s'est maintenue. Cette paix a régné,

7 car il n'y avait pas de tutelle, pas de force d'occupation extérieure.

8 C'est là que l'esprit yougoslave a été le plus fort.

9 Le 31 juillet 1990, dans l'Article 1 de la constitution, il est

10 inscrit que la Bosnie-Herzégovine et l'état des Musulmans, des Serbes et

11 des Croates placés sur un pied d'égalité ainsi que d'autres peuples qui y

12 vivent, que la République socialiste de Bosnie-Herzégovine fait partie

13 intégrante de l'Yougoslavie. C'est ce qui figure aussi dans la version

14 amendée de la constitution.

15 Cependant, même pendant ce temps de paix, la population de la

16 république, vous pouvez le voir sur le site Internet de l'Organisation

17 Jeunes musulmans, organisation qui a été fondée en 1939, vous pouvez voir

18 le texte du serment qui date de la deuxième moitié de l'année 1947, où il

19 est dit qu'il convient de livrer un combat sans réserve au prix de sa

20 propre vie, si ceci est nécessaire pour défendre les intérêts de l'islam.

21 Comment dans une communauté pluriethnique telle la Bosnie ou

22 l'Yougoslavie, peut-on combattre sans réserve pour l'Islam ? La majorité de

23 la population de la Bosnie-Herzégovine, même au moment où ce serment a été

24 formulé et constitué de non Musulmans. Ce qui est arrivé, c'est que les

25 partisans de ces jeunes Musulmans se trouvent en possession de moyens leur

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1 permettant de mener une guerre sainte.

2 Le premier parti nationaliste ou national politique qui a été constitué,

3 c'était le parti d'Alija Izetbegovic. Ce qui est typique, c'est que sponsor

4 -- qu'Izet Adil Zulfikarpasic, le sponsor de cette organisation, prononce à

5 Novi Pazar en Serbie, d'après ce qu'il dit dans son livre. Je le cite :

6 "Lorsqu'on y est arrivé, il y a eu un rassemblement très important.

7 Il y a eu un comportement correct de la part des autorités et de la police.

8 Il y a eu des véhicules officiels qui surveillaient la situation pour qu'il

9 n'y ait pas d'incidents. Les policiers se sont retirés des rues. Lorsque

10 nous sommes arrivés, il n'y avait que des gardes du SDA partout."

11 Ce qui est arrivé lors de ce rassemblement, c'est quelque chose qui

12 m'a surpris. C'est d'une manière profasciste qu'on a mené ce rassemblement.

13 Il y a eu des centaines de drapeaux hissés au stade.

14 Il poursuit dans son livre : "A chaque fois qu'on se déplaçait, on

15 voyait un grand nombre d'imams, qui étaient des personnes chargées de notre

16 accueil et le parti a vu l'adhésion des fonctionnaires religieux. J'ai

17 demandé, à un moment donné, qu'on écarte ces drapeaux, mais on a vu des

18 personnes arborant des dzelabija et des caftans, qui sont arrivées. Or,

19 c'est quelque chose que personne ne portait comme vêtements."

20 Zulfikarpasic a quitté les rangs de ce parti car il ne voulait pas

21 participer à ce genre de choses.

22 Ce que l'on sait, c'est qu'Izetbegovic, dès le printemps 1943, était

23 à la tête de la jeunesse musulmane de Sarajevo. Il a accueilli Amin al

24 Huseini, le grand mufti de Jérusalem, l'ami d'Hitler, qui prônait la Guerre

25 sainte contre les Juifs. Tout ceci dans le contexte de la NDH de Pavlic où,

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1 sur une initiative d'Himmler et avec la médiation de ce même Huseini, l'on

2 a procédé à la création de la Division SS Wafe musulmane. Les divisions

3 Handzar et Kama n'étaient pas les seules, ainsi que la Division Skenderbeg,

4 dans les rangs de laquelle se sont trouvé les Albanais.

5 En 1990, Izetbegovic imprime de nouveau sa déclaration islamique. Je cite :

6 "La création d'une communauté islamique, allant du Maroc à l'Indonésie. En

7 annonçant un redressement, nous annonçons une période de grande turbulence.

8 Le peuple qui sommeille ne peut se réveiller qu'à force de coups. Nous

9 devons tout d'abord être des prophètes et ensuite des soldats. Le mouvement

10 islamique doit et peut prendre le pouvoir dès que, d'un point de vue moral

11 et du point de vue de ses nombres, il est suffisamment puissant pour

12 pouvoir renverser un état non- islamique, mais lorsqu'il est capable aussi

13 de créer un nouveau pouvoir islamique. L'exemple du Pakistan doit être

14 suivi pour ce qui est des bons et des mauvais points. L'aspiration au

15 rassemblement de tous les Musulmans et de toutes les communautés musulmanes

16 du monde, cette aspiration se traduit par un combat pour la création d'une

17 grande communauté musulmane de par le monde."

18 On imaginera facilement la position des Croates et des Serbes, qui

19 constituent la majorité en Bosnie-Herzégovine. Dans quelle position se

20 sont-ils trouvés face à ces promesses de création d'un Pakistan européen ?

21 Quel a pu être leur état d'esprit, leur réaction ?

22 Mais quant à la fidélité d'Alija Izetbegovic à la cause islamiste, nul ne

23 peut être meilleur témoin de cela que les Islamistes, les intégristes.

24 D'après Reuters de Dubai, le 11 avril 1993, Alija Izetbegovic a reçu

25 solennellement un prix islamique à Riyad. Je cite : "En récompense de son

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1 engagement sur le plan de la guerre sainte, le Djihad contre les non-

2 fidèles, les non-croyants."

3 Par cette récompense, on confirme qu'Alija Izetbegovic se maintient sur

4 cette voie qu'il a embrassée dans sa jeunesse et qui comprend une lutte

5 sans réserve de son serment de 1947, sur la voie islamique. Mais ils

6 n'étaient pas les seuls qui connaissaient cette nature-là du régime

7 musulman. Vous avez le sénat des Etats-Unis et le comité républicain; le 16

8 janvier 1987, il y a un document du sénat.

9 Je parcours très rapidement cela. Trois questions sont évoquées. Tout

10 d'abord, au sujet de Clinton. Je saute. La phrase principale : "La CIA et

11 les Départements d'Etat et de la Défense ignoraient la situation jusqu'à ce

12 que la décision ne soit prise."

13 Le deuxième point : "Il est question du réseau militant islamique,

14 ensemble avec des armes, la Garde révolutionnaire, et cetera, qui sont

15 entrés en Bosnie-Herzégovine en grand nombre. Des milliers de

16 Moudjahiddines, des combattants saints de par le monde musulman, qui

17 s'engagent dans le même effort, qui proviennent de différents pays

18 musulman, y compris le Pakistan, l'Arabie Saoudite, le Soudan, la Turquie,

19 et cetera, et qui sont membres de différentes organisations radicales

20 musulmanes, par exemple, le rôle d'une organisation humanitaire qui

21 provient du Soudan, et cetera."

22 Le troisième point : "Le caractère radical du régime de Sarajevo.

23 Cette orientation islamique s'illustre par le profil de ses responsables, y

24 compris le président Izetbegovic lui-même. Les Unités islamiques,

25 progressistes et fiables affirment qu'il y a eu des atrocités graves

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1 commises à l'encontre des civils à Sarajevo, or que ceci n'a été que mis en

2 place à des fins de propagande par le gouvernement Izetbegovic, afin

3 d'éliminer ses ennemis à la fois non-musulmans et musulmans."

4 Il est dit ici qu'ils mettent en scène, qu'ils fabriquent de toutes

5 pièces, ces attaques qui se seraient produites contre eux-mêmes.

6 Là, je saute. Je saute.

7 Page 2, les conclusions du sous-comité. Je poursuis : "Le feu vert

8 donné par l'administration iranienne a mis en danger les vies américaines

9 et les intérêts stratégiques américains."

10 Il est question de la présence du Divak, des agents en sommeil; d'AID,

11 qu'il s'agit de cette agence d'Izetbegovic dont des employés sont venus

12 déposer ici, amenés par vous pour déposer contre moi, disant que les

13 services iraniens ont développé ces relations : "Afin de planifier, de

14 manière conjointe, des activités terroristes."

15 Il est dit par la suite : "Q00ue Clinton a donné son feu vert. Ceci a

16 augmenté l'influence iranienne." Il donne des explications. Je vous

17 donnerai des exemples pour que vous puissiez le voir vous-mêmes, "la

18 révolution islamique en Europe".

19 Il parle d'organisations humanitaires factices. "On pense qu'il s'agit

20 d'organisations qui sont en relation avec des organisations islamiques

21 orchestrées par, et cetera, et Osama bin Laden, qui était derrière les

22 attaques de New York."

23 Il poursuit : "En Bosnie, ceci a été d'une grande aide. On a permis aux

24 Iraniens de renforcer leur relation avec le gouvernement bosnien, un

25 employé haut placé de la CIA a déclaré au congrès ceci dans un témoignage

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1 confidentiel. Il s'agit de quelque chose de regrettable parce que,

2 lorsqu'il y aura des actions terroristes ou des explosions contre les

3 Américains, comme il y en aura, ceci constituera une partie de cela parce

4 que les Iraniens ont eu la possibilité d'établir des contacts."

5 Ils ont mené ces attaques contre les Kenyans, et cetera. Il y a eu des

6 crimes qui ont été commis dans les Balkans, et cetera. Je n'ai pas le temps

7 de poursuivre.

8 En Bosnie, dans cette fédération, je tiens à dire que, le 31 mars

9 1991, que c'est le jour de la Ligue patriotique de cette formation

10 militaire qui a été créée par le SDA. Ils se sont organisés un an avant que

11 le conflit n'ait éclaté.

12 En 1992, lorsque les conflits ont éclaté, la moitié des Serbes

13 ont été tués, sur le nombre total des Serbes qui ont péri. Ce sont les

14 données qui le montrent. Cela montre que les Serbes n'étaient pas prêts à

15 la guerre, or, ceci, ils étaient préparés à la guerre, un an avant que ceci

16 ne commence.

17 Owen dit, dans son livre, l'image des Bosniens sans arme s'est maintenue

18 même lorsque Alija Izetbegovic a admis lui-même à la télé que par des

19 canaux secrets ils se sont approvisionnés. Il est question des millions de

20 balles, des milliers d'armes, des dizaines de milliers de grenade à mains,

21 des dizaines de milliers d'uniformes, et cetera. Or, d'après la déclaration

22 de Sefer Halilovic, qui était le chef d'état-major -- du Grand état-major

23 de l'ABiH, le 25 septembre 1990, dans le journal Dani, il dit : "Lorsque la

24 guerre a commencé, la Ligue patriotique avait 103 cellules municipales et

25 98 000 combattants -- donc 103 -- alors qu'en Bosnie-Herzégovine, il y

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1 avait en tout 109 municipalités. Tout le monde voit clairement ces

2 préparatifs. Vous êtes les seuls à ne pas les connaître, à ne pas être au

3 courant.

4 Si on examine l'ensemble de la situation politique, il y avait trois

5 objectifs. Premièrement, il fallait préserver le maintien de la fédération.

6 Si, ceci n'était pas possible, il fallait réaliser son droit à l'auto-

7 détermination à l'image des autres peuples de l'Yougoslavie et voir si cet

8 objectif, lui aussi, s'avérait impossible, il fallait poursuivre des

9 négociations pour garantir une position sur un pied d'égalité des Serbes en

10 Bosnie.

11 C'était cela les objectifs de la partie serbe, ses aspirations étaient tout

12 à fait conformes au droit international et pour des raisons pragmatiques,

13 il s'agissait d'aspirations légitimes, mais, malheureusement, nous n'avons

14 plus le temps de parler de cela.

15 Quant au fait que le peuple de Bosnie était tout à fait en droit de vouloir

16 être sur un pied d'égalité parce qu'il y vit depuis plus de 1 000 an. Il

17 était tout à fait justifié dans ses exigences.

18 Je dois accélérer.

19 Le suivi chronologique de tous ces événements, et nous aurons l'occasion

20 d'effectuer ce suivi par le biais des témoins, ce suivi démontre d'abord :

21 Que les actes des Serbes ont été des réactions aux actes de la parie

22 musulmane, qui supprimait les droits fondamentaux des Serbes et ceux dans

23 le cadre de violations importantes. Il s'agissait de la part des Serbes de

24 compenser ce que les deux autres parties, les Musulmans et les Croates,

25 avaient déjà fait en leur enlevant ces droits. On peut constater que la

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1 partie adversaire a évolué peu à peu, et finalement les Serbes ont été

2 absolument coincés et leurs revendications minimums ont été rejetées.

3 Enfin, l'accord de Dayton a sanctionné l'existence de droits minimaux pour

4 les Serbes, mais malheureusement un peu trop tard, car cette énorme

5 effusion de sang avait déjà eu lieu.

6 La dernière chance de préserver la paix en Bosnie-Herzégovine avant la

7 guerre a été incarnée par le plan Cutileiro. Tout le monde a signé ce plan,

8 et lorsque Zimmerman lui a parlé de ce plan, pour le convaincre d'agir

9 autrement, Izetbegovic a retiré sa signature de ce plan. Je crois que nous

10 disposerons ici d'un grand nombre de documents qui prouveront ce qui s'est

11 passé à ce moment-là, nous les verrons plus tard.

12 Ce que je viens de dire montre clairement que la partie serbe n'est pas

13 celle qui a souhaité la guerre. Elle a fait tout ce qu'elle a pu pour

14 l'empêcher. Il y a malheureusement eu éclatement de la guerre.

15 Après intervention internationale et ce n'est pas un hasard si la JNA avait

16 commencé à se retirer de Bosnie-Herzégovine conformément à un accord signé

17 au préalable lorsque ceci s'est produit. Ceci est écrit noir sur blanc dans

18 le rapport du secrétaire général des Nations Unies, Boutros-Ghali, datant

19 du 30 mai 1992, et qu'il adressait au conseil de Sécurité. Dans ce rapport,

20 il est également déclaré que l'armée de la Republika Srpska, créée le 15

21 mai, n'était pas sous le contrôle de Belgrade. Il y est également écrit

22 qu'une partie importante du territoire de la Bosnie-Herzégovine est occupée

23 par les forces officielles de la République de Croatie; cependant, le

24 président du conseil de Sécurité de l'époque, un Autrichien, a occulté tout

25 cela ou en tout cas a supprimé une partie du rapport de Boutros-Ghali, tant

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1 que des sanctions n'avaient pas été votées à l'encontre de l'Yougoslavie.

2 C'est, en fait, la seule Croatie qui aurait dû être soumise à des sanctions

3 sur la base de ce rapport et non la République fédérale de l'Yougoslavie, à

4 ce moment-là.

5 Voilà les faits, voilà la réalité que je suis parvenu à présenter dans le

6 court laps de temps qui m'est imparti. Ceci n'est que le sommet de

7 l'iceberg. Maintenant, qu'avez-vous à proposer pour aller à l'encontre de

8 ces éléments matériels incontestables et de cette réalité historique ?

9 Dans le faux acte d'accusation dressé à mon encontre, vous avez de façon

10 mécanique et de façon tout à fait antinaturelle amassé un certain nombre

11 d'événements et de crimes, d'événements qui sans aucun doute sont des

12 crimes et vous avez mis à tout cela le titre entreprise criminelle commune

13 sans disposer du moindre élément de preuve pour ce faire. Vous parlez

14 constamment d'une espèce de plan et d'une intention planifiée de la part

15 des Serbes. Mais ce qu'il est convenu d'appeler l'Accusation ici, s'appuie

16 pour se faire sur une seule idée, un seul concept, celui d'une soi-disant

17 entreprise criminelle commune, ce qui en soit prouve que le prétendu bureau

18 du Procureur est incapable d'établir la culpabilité dont il parle. Il y a

19 absence d'éléments de preuve, absence d'intention délictueuse, et c'est la

20 seule chose qui peut expliquer cette espèce de construction de toute pièce,

21 construction nébuleuse centrée sur ce concept de l'entreprise criminelle

22 commune. En d'autres termes, lorsqu'il existe une preuve en bonne et due

23 forme du fait que quelqu'un avait une intention de commettre un acte

24 répréhensible, aucun bureau du Procureur illégal n'a besoin de concevoir ce

25 concept d'entreprise criminelle commune. Or, ce concept est utilisé pour

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1 décrire les faits et les intentions dont nous parlons ici.

2 Lorsqu'un Procureur ne disposent pas de preuves et ne peuvent pas établir

3 la culpabilité de quelqu'un, il recourt à ce genre de méthode pour essayer

4 de contourner l'obligation qui porte le nom de fardeau de la preuve et qui

5 est au centre même de tout système judiciaire pénal.

6 Ce concept a été créé pour s'efforcer de prouver la culpabilité de

7 personnes innocentes en l'absence de la moindre preuve. Bien sûr, il s'agit

8 d'une seule chose ici, à savoir, une véritable mutilation de la justice et

9 de rien d'autre. Tout ce qui est dit ici n'est que mots sans aucun poids.

10 Vous expliquez les charges que l'on trouve dans l'acte d'accusation.

11 Vous présentez de présumées accusations. Vous parlez de crimes que nous

12 n'avons jamais commis. Vous expliquez tout cela en vous appuyant sur une

13 prétendue intention que nous n'avons jamais eue. Voilà quelle est la teneur

14 de votre conception.

15 Je ne souhaite pas entrer dans le détail de la question de la Bosnie

16 et de la Croatie sur lesquelles la Serbie n'avait aucune compétence, mais

17 nous avons apporté notre aide aux Serbes. Bien sûr, nous avons fait cela.

18 Nous aurions été la lie de la terre si nous n'avions pas aidé ceux dont les

19 vies étaient en péril. Notre plus grand souhait consistait à rétablir la

20 paix. Pendant ces dix années dont nous parlons, il n'y a eu aucune

21 discrimination de la part des Serbes sur base ethnique contre qui que ce

22 soit.

23 Parlons du Kosovo. Il n'y a pas la moindre preuve qu'un quelconque

24 crime ait été commis au Kosovo. Je ne parle même pas de crime qui aurait

25 été ordonné par les généraux au commandement à l'époque, mais d'un crime

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1 quelconque de façon générale. Vous avez mis en accusation quatre généraux.

2 Pas un seul de ces quatre généraux n'a émis un seul ordre allant dans le

3 sens de la commission d'un crime. Pas un seul d'entre eux n'avait la

4 moindre connaissance préalable d'un quelconque crime qui aurait pu être

5 commis par d'autres éventuellement. Vous avez mis en accusation la

6 direction politique et la direction militaire de la Serbie et de

7 l'Yougoslavie. Vous avez par ailleurs toutes les preuves nécessaires qui

8 prouvent que, quoi que soit qu'il s'est passé au Kosovo et Metohija, cela

9 n'a été qu'un bombardement de jour et de nuit. Les autorités légales ont

10 traduit en justice ceux qui ont commis ces crimes.

11 Même un témoin à vous, qui a comparu ici, le général Vasiljevic,

12 s'est inquiété des détails. Il a abordé le problème d'une réunion que

13 j'aurais eue avec des personnalités, réunion au cours de laquelle j'ai dit

14 en présence de Lazarevic, de Pavkovic, de Djordjevic et de Lukic, que les

15 responsables de ces actes devaient être arrêtés. Il m'a cité comme ayant

16 dit que personne ne devait s'en sortir impunément, y compris le général

17 Ojdanic qui, malgré sa totale innocence, dort en prison aujourd'hui. Ces

18 quatre généraux que vous avez mis en accusation, Lazarevic, Pavkovic,

19 Djordjevic et Lukic, tout le monde, ils ont tous la même position, y

20 compris le commandement suprême de l'armée. Tout le monde dans cette

21 filière verticale de l'autorité militaire est certain d'avoir agi en

22 prévention, c'est-à-dire, pour empêcher la création de formations

23 paramilitaires.

24 Il existe des rapports écrits. J'en ai demandé le versement au

25 dossier, ou plutôt j'en demanderai le versement au dossier lorsque

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1 comparaîtront les témoins. Une centaine de rapports venant de tribunaux

2 militaires, de bureaux de procureurs militaires qui ont trait aux personnes

3 responsables d'un certain nombre de crimes. Les premiers rapports ont été

4 écrits dès la fin mars 1999, ensuite on avance dans le temps.

5 Qu'est-ce qu'un gouvernement, qu'est-ce qu'un exécutif aurait pu

6 faire d'autre, qu'est-ce que le système judiciaire d'un pays où la chaîne

7 de commandement militaire de ce pays aurait pu faire d'autre que d'insister

8 catégoriquement pour que tous les auteurs de crimes soient mis en

9 accusation ? Qu'est-ce qu'ils auraient pu faire d'autre que de veiller à ce

10 que les rapports les concernant soient publiés ? C'est ce que nous avons

11 fait dans les conditions les plus difficiles, à savoir, sous les bombes au

12 quotidien. Certains procès ont été achevés, les auteurs de crimes condamnés

13 même avant la fin des bombardements.

14 Au cours des deux années que dure la présentation des éléments de

15 preuve ici de votre part, vous n'avez pas réussi à présenter la moindre

16 preuve démontrant le contraire. Depuis deux ans, vous n'avez pas présenté

17 une seule preuve, pas présenté un seul témoin capable de montrer qu'il

18 existait un lien entre un crime réellement commis et un criminel qui aurait

19 fait partie des troupes de l'armée. Vous n'avez pas réussi non plus à

20 démontrer le moindre lien avec les généraux que vous avez mis en accusation

21 ou avec les dirigeants politiques de la Serbie ou avec moi en personne.

22 Bien au contraire, vous avez présenté des preuves qui démontrent que nous

23 avons fait tout ce que nous avons pu pour empêcher les crimes. Si des

24 crimes ont été commis, ceci, bien sûr, est également possible en temps de

25 paix et encore davantage en temps de guerre, notamment lorsqu'il s'agit

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1 d'un conflit interethnique. Les auteurs de ces crimes doivent être

2 poursuivis et comparaître devant les tribunaux. En Serbie, dans la région

3 de Sabac, au tribunal régional de Sabac en 1993, le premier de ces procès a

4 eu lieu. Vous disposez de renseignements à ce sujet.

5 Par ailleurs, vous disposez également de preuves qui montrent que

6 nous avons été les plus acharnés à préserver la paix, et nous sommes ceux à

7 qui le crédit du rétablissement de la paix est dû. Nous avons sauvé des

8 millions de réfugiés sur la base des principes de non discrimination, parce

9 que des dizaines de milliers de réfugiés musulmans ont trouvé refuge en

10 Serbie. Nous avons libéré les pilotes français et les autres otages. Vous

11 constaterez tout ce que nous avons fait pour réaliser cela dans les

12 documents qui sont mis à votre disposition. Tout ce que nous avons pu faire

13 a été fait. Nous avons exercé toutes les pressions possibles dans les cas

14 où nous n'avions pas d'autres possibilités. Nous avons remporté également

15 certains succès.

16 Je vous demande de regarder ces interviews, ces interrogatoires,

17 parce que cela vous suffira à comprendre le non-sens des charges retenues à

18 notre encontre.

19 Par ailleurs, vous constaterez que les éléments de preuve démontrent

20 le rôle important joué par la direction politique croate dans le nettoyage

21 ethnique et l'existence d'un plan destiné à être mis en œuvre avant et

22 après 1990. Vous avez des sténogrammes à cet égard. Nous avons reçu

23 certains d'entre eux de vos mains, et nous avons pu les lire. Vous verrez

24 quelles sont les justifications créées de toute pièce pour expliquer les

25 crimes commis au cours des opérations Eclair et Tempête. Vous disposez

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1 également d'éléments au sujet de l'administration Clinton qui contrôle tous

2 ces événements, et vous verrez toutes les autres preuves. Vous disposez de

3 preuves écrites qui montrent les décisions prises. Elles figurent dans ces

4 sténogrammes, notamment, le conseil de Sécurité national qui prend un

5 certain nombre de décisions. Vous verrez tout cela.

6 Vous avez également des preuves relatives aux crimes commis contre

7 les Serbes sur la base de décisions prises par les dirigeants musulmans.

8 Kljuc a témoigné ici. C'est un ancien membre de la présidence de Bosnie-

9 Herzégovine. Sur la base du compte rendu d'audience, vous verrez que je lui

10 demande s'il sait quels étaient les camps dans lesquels des gens étaient

11 détenus. Ils ont été détenus illégalement pendant des années. Vous pourrez

12 analyser l'ensemble de son témoignage à ce sujet. Vous avez tout ce dont

13 vous avez besoin pour comprendre ce qui s'est passé au sein de la direction

14 croate et musulmane, mais pas au sein de la direction de la Republika

15 Srpska, de la Republika Srpska de Krajina et de la Serbie.

16 Vous avez des éléments de preuve qui viennent de témoins protégés par

17 vous, membres importants de la direction politique, tels que Milan Martic.

18 Vous verrez exactement ce qu'il m'a dit, à savoir qu'en Krajina, y compris

19 à Knin, les Croates qui y restaient ont été traités sur un pied d'égalité

20 en tant que citoyens égaux, et qu'il n'y a pas eu la moindre discrimination

21 exercée à leur encontre.

22 Je pense que ce que je m'apprête à dire, mérite que lui soit

23 consacrer un certains temps. Je dois être bref, et je ne ferai qu'effleurer

24 le sujet. Il s'agit des témoins qui ont conclu un accord sur le plaidoyer

25 avec ce qu'il est convenu d'appeler ici, l'Accusation. Je dirais que c'est

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1 un très bon exemple de la façon dont on fabrique des faux témoins.

2 Je pense que ceci est tout à fait sans précédent. Lorsque l'un de ces

3 témoins répond à une question que je lui pose au sujet du fait de savoir

4 s'il peut signer un document sur lequel il serait écrit que 7 000 Musulmans

5 ont été abattus à Srebrenica, il explique que ses conseils de la Défense

6 ont envoyé une lettre dans laquelle il s'engage à ne pas contester les

7 chiffres. Vous pouvez écrire 7 000, et vous pouvez écrire n'importe quel

8 autre chiffre à votre convenance.

9 Avant le début du volet Bosnie de ce procès, j'ai soumis des

10 renseignements à mes collaborateurs qui jettent des doutes très graves sur

11 les éléments de preuve que vous présentez au sujet de Srebrenica. Entre

12 temps, nous avons entendu le général Morillon, qui a témoigné ici en disant

13 que Srebrenica était un piège pour Mladic, qui a confirmé cela dans son

14 avis. Il connaissait très bien Mladic. Il savait que Mladic n'aurait jamais

15 pu émettre l'ordre dont il est question ici. Ceci est tout à fait conforme

16 à ce que je crois moi-même. Je ne crois pas que Mladic aurait pu émettre un

17 tel ordre. Son sens de l'honneur ne lui aurait jamais permis de commettre

18 un acte aussi peu honorable. Il y aura de nouveaux témoins qui vont venir

19 témoigner à ce sujet.

20 Ce que je souhaite dire, c'est que je pense que c'est dans

21 l'intérêt, à la fois des Serbes et des Musulmans, que la vérité soit faite

22 au sujet de Srebrenica plutôt que cette perpétuation d'un mythe totalement

23 contraire à la vérité. Vous avez fabriqué de faux témoins. Paddy Ashdown a

24 parlé de la direction de la Républika Srpska. Il a exercé des pressions sur

25 cette direction, qui vont tout à fait dans le sens de ce que vous faites

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1 vous-mêmes. Ceci ne suffira pas à couvrir ce double crime qui est une

2 insulte pour les morts et pour les vivants.

3 Chacun doit s'intéresser à ce qu'éclate la vérité au sujet de

4 Srebrenica de façon à ce que les auteurs de ces crimes soient punis et que

5 les innocents soient remis en liberté et blanchis de toutes les charges ou

6 de tous les doutes qui pèsent, impliquant qu'ils auraient pu commettre

7 quelque chose de contraire à l'honneur.

8 Vous n'avez pas utilisé les informations fournies par Erdomovic. Est-

9 ce que lui n'a pas utilisé ce qu'il a pu utiliser pour établir la vérité ?

10 J'espère que c'est son souhait. Je ne peux qu'espérer que certains témoins

11 que je vais essayer de faire citer à la barre par le biais de mes

12 collaborateurs, puisque je ne peux pas le faire, personnellement, bien

13 entendu, j'espère qu'ils permettront de faire la lumière sur ce qui s'est

14 passé à Srebrenica.

15 Revenons à ce témoin ou plutôt à ces témoins qui ont signé des

16 accords de plaidoyers. Vous en avez fait ensuite des témoins protégés.Il y

17 a par exemple, Miroslav Deronjic et sa mère qui ne pouvait pas lui parler

18 après qu'il se soit exprimé lui-même en disant qu'un village entier avait

19 été massacré, après que sa sécurité a été garantie. Garantie de sécurité

20 personnelle, c'est ce dont il parle; ensuite, massacre d'un village entier.

21 Vous lui avez pardonné cet acte simplement parce qu'il est venu ici

22 raconter des mensonges au sujet de Karadzic. Vous disposez de l'ordre de

23 Karadzic adressé aux soldats de Srebrenica qui montre qu'un ordre est donné

24 de s'occuper des civils et de respecter les conventions de Genève. Ceci a

25 été envoyé par écrit aux unités militaires. Après cela, un homme tel que

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1 Deronjic vient ici témoigner pour dire que Karadzic aurait chuchoté à son

2 oreille qu'il fallait que tous ces civils soient tués. Ceci n'a aucun sens.

3 Ce n'est même pas la peine d'en discuter. Aucun homme normal ne pourrait le

4 comprendre et surtout pas quelqu'un qui signe un document stipulant que

5 7 000 personnes ont été abattues tout en disant ensuite qu'il a été obligé,

6 qu'il est tenu de ne pas contester les chiffres.

7 Il n'est pas la peine de dire quoi que ce soit du fait qu'ici vous

8 avez fait feu de tout bois. Vous avez utilisé mon allocution. Vous l'avez

9 utilisée à la base même de votre acte d'accusation. Lors de la séance

10 d'ouverture en 2002, vous avez cité mon allocution à Gazimestan, où

11 j'aurais prétendument mis de l'huile sur le feu du nationalisme. Je suis

12 fier de ce discours, parce que rien dans ce discours ne peut être retenu

13 comme négatif. Bien au contraire. Vous n'êtes pas les seuls à participer à

14 cette action. Des responsables politiques nombreux du côté occidental se

15 sont joints à vous. Il n'y a pratiquement pas un seul journal qui n'est pas

16 écrit quelque chose sur ce sujet. Ce mensonge a été repris dans un nombre

17 incalculable de titres dans la presse. Des passages ont été enregistrés.

18 C'est seulement dix ans plus tard que tout ceci revient à la surface. Je

19 n'ai pas le temps de vous parler en détail de cela, mais je prendrai ceci

20 comme un exemple des manipulations, des mensonges qui sont le quotidien de

21 cette institution.

22 Robin Cook lui-même, dix ans après les faits, dit qu'il y avait là un

23 message d'espoir plutôt qu'un message contraire à l'espoir. Il dit qu'il

24 n'y a aucune menace compte tenu des difficultés politiques vécues par

25 l'Yougoslavie à l'époque. Impossible de parler d'objectifs personnels qui

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1 auraient été les miens ou d'haine déguisée en nationalisme qui aurait été à

2 la base de cette allocution pour accroître mon pouvoir.

3 Je dispose ici d'un certain nombre de citations qui remontent à 1990,

4 à 2000, à 2001.

5 Regardez par exemple cette citation d'un journal américain où il est

6 question du fait que plus d'un million de Serbes se sont regroupés pour

7 célébrer l'anniversaire de la bataille de Kosovo, et que dans son

8 allocution, il a menacé ouvertement d'utiliser la force contre les six

9 républiques de la Fédération.

10 Vous avez des citations tirées de Time magazine et d'Economist

11 également. Toutes sortes de mensonges dans ces citations. Je citerai

12 l'Independent, par exemple. Premier juillet 2001, et l'Independent du 29

13 juin 1989. C'est le même journal, qui écrit ce qui suit, je cite : "Le

14 président n'a pas fait la moindre référence agressive à l'encontre des

15 contre-révolutionnaires albanais."

16 Les contre-révolutionnaires sont un terme qui est utilisé par la

17 direction du parti depuis 1981.

18 Il a été question de tolérance mutuelle pour construire une société

19 démocratique et mettre fin à la discorde qui a déjà conduit à la défaite

20 des Serbes ici même contre les Turcs il y a six siècles." L'Independent

21 cite mes propos de la façon suivante, je cite : "Il n'y a pas de lieu plus

22 opportun que ce champ du Kosovo pour dire que l'accord et l'harmonie en

23 Serbie sont des éléments vitaux pour la prospérité des Serbes et de tous

24 les autres habitants de Serbie, indépendamment de leur nationalité ou de

25 leur religion, a-t-il dit : 'La tolérance mutuelle et la coopération sont

Page 32293

1 des exigences sine qua non pour l'Yougoslavie'."

2 Vous voyez toutes ces citations, y compris de mes propos qui parlent

3 de la nécessité d'une égalité entre les peuples yougoslaves comme condition

4 préalable pour l'existence de l'Yougoslavie et pour lui permettre de

5 surmonter la crise à laquelle elle est confrontée.

6 Par conséquent, lorsque ces faux témoins ont reçu l'ordre de mentir, ils

7 n'ont même pas lu leurs propres journaux de l'époque, qu'ils mentionnent

8 dans leurs dépositions. Mais je n'ai pas le temps de parler longuement de

9 ce sujet.

10 Vous verrez dans toutes ces citations, il y a également le programme

11 Lexis Nexis de la BBC qui est cité. Vous verrez les allocutions prononcées

12 par moi en B/C/S lorsque vous pourrez les retrouver, des traductions des

13 émissions. En particulier, je cite : "En Serbie, aujourd'hui, plus que

14 davantage, des représentants d'autres groupes ethniques résident également.

15 Ce n'est pas un inconvénient pour la Serbie. Je suis véritablement

16 convaincu que c'est un avantage des citoyens, aux religions différentes qui

17 diffèrent par leur race, ont toujours lorsqu'ils vivaient ensemble au même

18 endroit, étaient à la source de grande réussite. Par conséquent, tous les

19 peuples de Serbie, qui vivent par leur travail honnêtement dans le respect

20 des autres personnes et des autres nations, ont leur place dans cette

21 république qui est la leur."

22 Je ne vais pas abuser du temps qui m'est imparti en citant davantage mes

23 propos. Je souhaitais simplement illustrer jusqu'où va l'abus, notamment

24 l'abus de procédures juridiques, puisque nous voyons que des intellectuels,

25 des écrivains, des critiques littéraires, des publicistes, des

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1 scientifiques, considèrent comme tout à fait immoral de sortir quelques

2 phrases de leur contexte. Mais ici, on ne se contente pas de sortir

3 quelques phrases de leur contexte, mais on prend des parties d'allocutions

4 entières pour créer cette construction de toute pièce.Nous aurons le temps

5 d'y revenir plus tard. En tout état de cause, il me semble que ceci n'est

6 pas difficile à établir et à démontrer.

7 Je ne vais pas vous imposer d'autres citations. Simplement quelques

8 mensonges. J'examinerai de plus près cette politique d'égalité nationale,

9 l'égalité qui était considérée comme le seul principe sur lequel il était

10 possible d'avancer et qui a été poursuivi pendant plus de dix ans. Nous

11 avons le procès-verbal d'une conférence du parti tenu en 1998. C'est un

12 document qui montre que tous les participants à cette réunion, y compris

13 les représentants du parti au pouvoir, discutent du Kosovo. Mais la

14 discussion n'était pas destinée aux journaux. C'était une discussion entre

15 dirigeants politiques et, notamment, avec les ministres, membres du

16 gouvernement, députés du parti au pouvoir.

17 J'aimerais vous lire un bref extrait de ce procès-verbal, à savoir la

18 conclusion tirée par moi. Je dis que, s'agissant du Kosovo, je parle des

19 remarques liminaires. Je dis quelle est la majorité. Je dis que notre

20 priorité consiste à résoudre le problème du Kosovo par des moyens

21 politiques, et vous voyez, nous discutons de cette question en 1998 déjà.

22 Le 10 juin 1998, notre politique étant orientée vers la solution du

23 problème du Kosovo par des moyens politiques. Nous essayons d'aller dans le

24 sens d'un règlement politique conforme à nos convictions et à notre

25 programme dans lequel figure le principe de l'égalité entre les peuples.

Page 32295

1 Nous ne voulons pas nuire de quelque façon que soit aux Albanais, et

2 surtout pas aux Albanais du Kosovo. Nous ne voulons pas de quelque façon

3 que ce soit qu'ils se sentent citoyens de deuxième classe.

4 Je parle ensuite de ce que défend la majorité des Albanais, en

5 disant, je cite : "Il n'est pas vrai qu'ils sont tous favorables à cela.

6 Peut-être la majorité dépend-t-elle des pressions exercées sur elle, des

7 explications qui lui sont données, de la façon dont lui sont expliquées les

8 perspectives d'avenir et tout le reste. Nous devons discuter de tout cela.

9 Nous devons voir tout cela de plus près. Nous avons une résolution

10 politique qui repose sur les principes de l'égalité nationale. Nous devons

11 veiller à ce qu'il n'y ait aucune manipulation, et à ce que ces personnes,

12 plongées dans le malheur, ne puissent être manipulées comme le sont tous

13 les pauvres du monde de la part des puissants dont l'objectif consiste à

14 déstabiliser le sud-est de l'Europe et qui ont toujours besoin d'un alibi

15 pour maintenir leur puissance, leur force militaire, en ce lieu."

16 A la fin de la réunion, je dis au sujet du concept de dialogue, je

17 cite : "Le dialogue a commencé, mais il appartient à la commission de

18 l'Etat et aux représentants des Partis politiques albanais de les

19 poursuivre." Je mentionne quels sont ses représentants, notamment, ceux de

20 la commission de l'Etat. Je donne leurs noms à chacun, et je dis, ensuite,

21 je cite : "Le dialogue n'est pas réservé à ces seuls représentants. Il ne

22 s'agit pas uniquement d'un dialogue entre les Serbes et les Albanais, mais

23 d'un dialogue entre les Serbes, les Albanais, les Romes et autres. Il faut

24 que ce dialogue s'établisse au niveau de chaque communauté locale au sens

25 officiel et officieux parce que les gens ont besoin d'être mobilisés pour

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1 vivre." Pendant dix ans, mon engagement en faveur d'une politique d'égalité

2 nationale a été démontrée amplement, et c'est elle qui a empêché que la

3 moitié de l'ex-Yougoslavie ne soit plongée dans un quelconque conflit ou

4 dans une quelconque guerre pendant tous ces dix années.

5 Je parle de tout cela, et je dis qu'ici les événements sont présentés

6 totalement à l'envers. C'est la raison pour laquelle je dis que l'acte

7 d'accusation soumis ici, est une manipulation sans scrupule. Un tissu de

8 mensonges qui démolit le droit et qui déforme la séquence des événements

9 dans l'histoire.

10 Les actes commis individuellement par des généraux, des responsables,

11 par moi-même, par ceux qui exerçaient des responsabilités de commandement

12 avaient pour but la condamnation des personnes qui auraient commis de

13 quelconques actes répréhensibles. Mais ici, ce que l'on veut, c'est

14 condamner une personne innocente parce qu'elle occupait une certaine

15 position et vous vous efforcez de faire venir ici des généraux à cette fin.

16 Ces actes individuels, je n'en discute pas, car je manque de temps. Mais

17 ils ont été contestés par certains de vos propres témoins, et encore plus

18 dans des mémoires et documents écrits. Nous verrons quels seront les

19 témoins qui auront le dernier mot après l'audition des témoins qui

20 viendront parler ici.

21 Je voudrais maintenant mettre le doigt sur un paradoxe dans lequel

22 vous vous êtes plongé vous-même en vous soumettant à la politique sans

23 merci de l'administration Clinton. La réalité se trouve dans la réalité du

24 programme politique mis en œuvre. Les trois actes d'accusation émis à mon

25 encontre, après que 19 pays de l'OTAN se soient livrés à une agression

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1 contre la Serbie et le Monténégro utilisant des armes interdites et de la

2 haute technologie, ceci montre le cynisme de l'acte d'accusation dans son

3 volet Croatie, qui parle de nettoyage ethnique contre les Croates et d'un

4 plan à cet effet qui aurait été conçu avant le 1er août 1991 et aurait duré

5 jusqu'en 1992. Je dois dire que seul, quelqu'un, faisant montre de la plus

6 grande arrogance, peut écrire de tels mots, noir sur blanc. Chacun sait que

7 dans cette période, des crimes massifs ont été commis contre les Serbes et

8 c'est de cette période que date l'exode le plus important hors de Croatie

9 dont ont été victimes les Serbes, où

10 150 000 Serbes ont dû fuir dans cette période précisément.

11 L'acte d'accusation dans son volet, Kosovo a, ensuite, été émis et

12 on y trouve mention de l'expulsion d'un nombre important de citoyens

13 albanais hors du Kosovo. Vous verrez ce que dit le livre de Clark à ce

14 sujet. Vous y trouverez également d'autres éléments très intéressants. Vous

15 ne trouverez pas un seul village d'où un habitant aurait été expulsé, alors

16 que le Kosovo était sous le contrôle des organes de sécurité serbes. C'est

17 une réalité, c'est un fait, je n'en dirai pas davantage.

18 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, vous devez

19 mettre un terme à votre déclaration dans trois minutes.

20 L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, je vais faire de mon mieux. Si ce n'est

21 pas trois minutes, cela sera quatre, mais pas beaucoup plus long. Je vais

22 devoir sauter pas mal de choses.

23 Vous ne vérifiez même pas les déclarations officielles des Etats-Unis

24 et de l'OTAN qui disent ouvertement aujourd'hui que ces petits jeux leur

25 étaient nécessaires dans la région du Kosovo pour que l'OTAN puisse étendre

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1 ses activités hors de ses frontières. L'acte d'accusation dans son volet

2 Bosnie-Herzégovine parle de génocide. Je vous en prie, le génocide contre

3 les Croates et les Musulmans en Bosnie-Herzégovine, c'est déjà une idée

4 extrêmement insolente lorsqu'on sait que Belgrade, précisément, était le

5 centre politique pendant toute cette période très dure. Le seul centre de

6 l'Yougoslavie, au cours de la crise yougoslave à partir duquel la politique

7 de paix de l'Yougoslavie a été menée en permanence politique d'égalité

8 nationale, grâce à laquelle il n'y a eu aucune discrimination, pas un crime

9 commis et grâce à laquelle dans cette décennie toute entière, une structure

10 intacte sur le plan ethnique et national a été préservée en Serbie.

11 Je sais bien que nous n'allons pas revenir à l'incendie du Reichstag, mais

12 je voudrais parler des conséquences tragiques que celui-ci a eu lieu. Je ne

13 vais pas inclure une note personnelle dans tout cela mais j'aimerais parler

14 de la tragique conséquence que cela a eu lieu sur l'ordre juridique

15 international. Je m'appuie sur ces éléments du passé et sur des auteurs

16 très honorables qui ont parlé de la vérité devenue histoire depuis, pour

17 que les mêmes erreurs ne se répètent pas et que les générations à venir

18 sachent ce qui s'est passé. Dans la vérité de l'histoire dans cette région,

19 votre justice ad hoc sera remplacée par une autre ou en tout cas utilisée

20 comme illustration des événements monstrueux qui peuvent se produire dans

21 le passage d'un siècle à un autre.

22 Mesdames et Messieurs, vous n'imaginez pas quel est le privilège que vous

23 m'avez accordé de vous parler avec la vérité et la justice de mon côté. Ce

24 sont mes alliés et je suis sûr que vous n'imaginez pas à quel point ceci me

25 fait plaisir.

Page 32299

1 Je vous remercie, Monsieur Robinson. Malheureusement, je n'ai pas eu

2 la possibilité de dire tout ce que je voulais dire, mais je crois que la

3 possibilité m'en sera peut-être donnée plus tard par d'autres voies.

4 Je vous remercie.

5 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci, Monsieur Milosevic. Vous

6 pouvez entendre vos témoins, bien entendu.

7 Nous suspendons 20 minutes, après quoi nous reprendrons pour des

8 questions de procédure, comme indiqué dans l'ordonnance de la Chambre du 25

9 août. D'abord le Procureur, puis l'accusé, puis les amis de la Chambre, et

10 les rapports médicaux seront examinés avec audition du conseil de la

11 Défense.

12

13 J'enjoins les parties à confiner leurs soumissions à ces questions,

14 même si la Chambre entendra d'autres questions si elles s'avèrent

15 appropriés.

16 La séance est levée.

17 --- L'audience est suspendue à 10 heures 37.

18 --- L'audience est reprise à 11 heures 00.

19 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Comme nous l'avons précisé avant la

20 pause, nous avons quelques arguments qui vont être débattus et qui sont

21 consignés dans l'ordonnance du 25. Nous allons commencer par Mme le

22 Procureur. Madame le Procureur, vous avez la parole.

23 Mme DEL PONTE : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les

24 Juges, argument détaillé concernant la commission d'Office d'un conseil de

25 la Défense déjà présenté dans d'autres dossiers. Les arguments ont été

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1 couverts entièrement par M. Nice en la matière. Je souhaite néanmoins faire

2 quelques remarques à titre d'introduction.

3 Ceci n'est par ailleurs la première fois qu'une Chambre de première

4 instance de ce Tribunal a dû envisager la question de l'imposition d'un

5 conseil de la Défense. Les Chambres de première instance dans les affaires

6 Seselj et Blagojevic ont décidé que, dans certaines circonstances, il est

7 approprié d'imposer un conseil de la Défense. La question s'est posée

8 devant le Tribunal du Rwanda, dans l'affaire Barayagiza et dans les deux

9 affaires des accusés Norman et Gbao, devant la Cour spéciale du Sierra

10 Léone. Devant ces tribunaux internationaux, le conseil de la Défense a été

11 imposé pour différentes raisons, y compris le fait que l'accusé entrave la

12 justice et le fait que le Tribunal tente de protéger l'intégrité de la

13 procédure.

14 Les juridictions nationales ont également reconnu qu'il y avait un

15 besoin réel, dans certaines circonstances, d'imposer un conseil. Dans le

16 cas d'un Israélien qui était accusé et qui prétendait être un prisonnier

17 politique. Également, au Royaume-Uni où, dans des cas d'agression sexuelle,

18 l'accusé ne pouvait pas se défendre entièrement lui-même. Également, la

19 Cour suprême des Etats-Unis, dans le cas de Martinez, je cite : "Même au

20 moment du procès, c'est dans l'intérêt du gouvernement d'assurer

21 l'intégrité et l'efficacité du procès qui est parfois plus important que

22 les intérêts de l'accusé lui-même lorsqu'il présente sa propre défense."

23 L'imposition d'un conseil de la Défense est quelque chose que

24 connaissent bien les personnes qui travaillent dans les tribunaux en

25 Serbie, au Monténégro et en l'ex-RSFY et RFY.

Page 32301

1 Il est du devoir du Procureur, ainsi que des Chambres, devant ce

2 Tribunal, de s'assurer que ce type de difficulté peut être géré dans les

3 affaires susmentionnées. Mais comme il s'agit certainement d'un sujet de

4 préoccupation pour d'autres tribunaux internationaux, y compris la CPI, la

5 Cour pénale internationale, nous avons tous le devoir de faire évoluer la

6 jurisprudence internationale et de mettre en lumière la manière dont de

7 telles difficultés peuvent être traitées. Les parties, y compris l'accusé,

8 ont droit à un procès équitable et rapide. La responsabilité en la matière

9 en incombe à la Chambre de première instance.

10 Nous disons que l'accusé doit permettre à ses collaborateurs d'utiliser ses

11 conseils juridiques qui agissent en coulisse pour l'aider à présenter ses

12 arguments dans la salle d'audience.Si l'accusé ne permet pas à ses

13 collaborateurs d'être présents dans le prétoire, l'accusé n'aura pas le

14 droit de nommer un conseil de son propre choix. S'il n'a pas fourni le

15 droit, il n'en n'a pas fait usage.

16 Ce procès, depuis le début, a demandé à ce que l'on commette d'office

17 un conseil de la Défense. Depuis le début de ce procès, c'est quelque chose

18 que j'ai évoqué à chaque fois et, au cours de l'année précédente, la

19 manière dont ce procès a évolué a rendu ceci encore plus important.

20 Comme je l'ai évoqué précédemment, la position d'office d'un conseil

21 de la Défense est quelque chose qui relève véritablement du "common law".

22 Autrement dit, par le passé, c'était quelque chose qui relevait du droit

23 romano-germanique car, en général, l'accusé manque de distance et

24 d'objectivité. La commission d'Office d'un conseil professionnel permet à

25 la fois de protéger les droits de l'accusé et de protéger, en même temps,

Page 32302

1 les intérêts de la justice.

2 Ce Tribunal s'inspire à la fois des traditions civilistes et des

3 traditions romano-germanique. Lorsque confronté à de telles difficultés

4 auquel est présenté la Chambre de première instance aujourd'hui, la Chambre

5 a le privilège et le devoir de se tourner vers les deux traditions pour

6 essayer de trouver une solution. Lorsque la solution a été trouvée, le

7 Tribunal doit pouvoir faire respecter ceci quelque soit les arguments

8 présentés, même arguments présentés en public et, très souvent, ayant des

9 sources sûres. C'est nous, maintenant, qui connaissons la donnée du

10 problème.

11 C'est nous ici qui avons à traiter ce problème. Nous avons, ici

12 aujourd'hui, le devoir de résoudre cette question dans les intérêts de la

13 justice.

14 Je reconnais qu'au début de ce procès, nous avions peu d'expérience

15 en la matière. La Chambre agissait avec générosité envers l'accusé faisant

16 preuve des meilleures intentions du monde pour obtenir les meilleurs

17 effets, mais, au jour d'aujourd'hui, il nous fait une approche plus dure

18 due au comportement de l'accusé lui-même. Il nous faut le garde-fou d'un

19 conseil imposé d'office.

20 Je vous remercie beaucoup pour votre attention.

21 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci, Madame le Procureur.

22 Monsieur Nice, vous avez la parole.

23 M. NICE : [interprétation] Nous avons longuement débattu de cette question,

24 et cela, il y a dans les archives des tribunaux en Angleterre un nombre

25 important de cas de ce type. Je souhaite faire une déclaration d'ordre

Page 32303

1 générale aujourd'hui et, ensuite, de résumer notre position, eu égard à la

2 position d'office d'un conseil. J'aimerais parler de questions médicales,

3 et ensuite, avec votre permission d'autres points également.

4 Le point général que je souhaite aborder est le suivant : lorsqu'une

5 personne raisonnable et rationnelle se trouve être confrontée à quelqu'un

6 qui est déraisonnable et irrationnelle, on cède parfois à la tentation de

7 faire -- et on cède à la tentation de croire que la partie en face va

8 réagir, de façon raisonnable, et réagir avec le sens commun, et on ne peut

9 pas progresser si une des deux parties ne fait pas un pas vers l'autre, et

10 la personne raisonnable pense toujours ou pense en la matière que l'autre

11 partie ne réagira pas. Je pense que l'accusé comprendra que, dans ce

12 processus, eu égard aux questions qui sont traitées ici et, également, eu

13 égard aux questions qui sont traitées par ce Tribunal.

14 Pour ce qui est le dernier point évoqué par Mme le Procureur, les Juges de

15 cette Chambre, qui sont raisonnables et rationnelles, ont eu à traiter un

16 degré de persévérance et, à plusieurs reprises, il a lui-même été à

17 l'origine de ses requêtes et de son insistance car il demandait à la

18 Chambre de première instance d'avoir davantage de temps, et la Chambre de

19 première instance pensait toujours que les choses allaient évoluer au

20 mieux. Je vais vous demander de garder ceci à l'esprit.

21 Nous allons, maintenant, aborder la question qui pose véritablement

22 problème aujourd'hui. Etant donné l'historique de ce procès, il y a eu de

23 nombreuses interruptions -- parfois sous le contrôle, parfois en dehors du

24 contrôle de l'accusé -- et, en particulier, concernant son état de santé.

25 Je me tourne, par conséquent, vers quelques questions complémentaires et

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1 concernant la position d'office d'un conseil de la Défense.

2 Dans les juridictions nationales et dans la plupart des cas pénaux,

3 ceux qui sont accusés répondent aux demandes raisonnables du système

4 juridique dans lequel ils se trouvent. Ils le font, en général, parce

5 qu'ils respectent la loi ou les Juges ? Ce sont des contrevenants graves.

6 Ce sont des criminels d'un genre ou d'un autre. Il est peu probable qu'il

7 respecte la loi. C'est la raison pour laquelle ils sont à cet endroit-là.

8 Il est fort peu probable qu'ils respectent, en réalité, les Juges

9 également, mais ils se conforment à la loi car ils savent -- ils

10 reconnaissent qu'une fois qu'ils sont confrontés à ce système, cela sert

11 leurs intérêts; autrement dit, l'acquittement, ou une réduction de peine,

12 et ceci ne pourra prévaloir que s'ils se comportent correctement.

13 Dans de très petits nombres de cas, dans les juridictions nationales

14 et dans quelques très rares cas, comme dans des juridictions de ce type, la

15 non-conformité est le comportement d'un accusé c'est parce que l'accusé

16 lui-même n'est pas en mesure de voir quels sont ses intérêts s'ils se

17 conforment au système. Ils estiment qu'ils serrent son meilleur intérêt en

18 se tournant vers un autre endroit. C'est l'argument que nous avons présenté

19 à de multiples reprises dans nos écritures. Les intérêts de cet accusé sont

20 -- on peut le contredire ou être d'accord. Il s'adresse à un public

21 différent, et il relate des événements différents, et sa compréhension des

22 événements historiques est différente. Pour un Tribunal qui doit gérer ce

23 type de problème, la conformité ne peut être réalisée que dans la mesure ou

24 l'accusé est en mesure de reconnaître qu'il sert ses meilleurs intérêts

25 s'il se conforme au système en question.

Page 32305

1 Dans cette affaire, en particulier, sans tourner autour du pot, à moins que

2 l'accusé reconnaisse lui-même qu'il va perdre son assise et s'il continue à

3 se défendre de cette façon, il est important pour lui, qu'il réponde aux

4 exigences de ce Tribunal qui doit rendre la justice, et qui n'est pas

5 destiné à servir les intérêts de cet accusé.

6 Si tel n'est pas le cas, nous allons nous retrouver dans la situation qui

7 était celle de l'année dernière. Pour les personnes qui n'ont pas lu les

8 dépôts des écritures que nous avons présentés, nos arguments sont les

9 suivants : nous avons la possibilité d'imposer un conseil de la Défense,

10 qui pourrait présenter les moyens de la défense sans entrer en contact ou

11 avoir de discussion ou d'échange avec l'accusé. Ce conseil de la Défense

12 doit être imposé au jour d'aujourd'hui et reprendre les moyens de la

13 Défense maintenant ou à un stade ultérieur. Pour tous les éléments qui ont

14 été présentés, nous estimons qu'il est important de procéder à cette

15 imposition. L'Accusation pourra, ensuite, prendre une décision raisonnable

16 eu égard à ses antécédents médicaux et d'autres questions de préparer et de

17 présenter sa Défense par l'intermédiaire d'avocats.

18 S'il refuse de le faire, le conseil commis d'Office jouera son rôle à

19 sa place. S'il refuse, le conseil commis d'Office va gérer son dossier.

20 Comme nous l'avons proposé déjà, dans un calendrier présenté dans notre

21 premier dépôt d'écriture, il y a plusieurs étapes au cours desquelles

22 l'accusé est demandé à contribuer, de façon constructive, à la préparation

23 de son procès, comme, par exemple, la reconnaissance des témoins. Il peut

24 être présent dans le prétoire et peut participer également aux questions et

25 aux réponses autrement gérées par le conseil de la Défense.

Page 32306

1 En résumé, voici notre proposition. Nous pensons que le candidat le

2 plus approprié devrait être un ou deux des Amicus Curiae car ils

3 connaissent très bien cette affaire. Nous estimons que ceci les

4 rapprocherait de beaucoup de l'accusé, ce qui peut constituer une situation

5 assez risquée. C'est la raison pour laquelle, d'après leurs propres

6 écritures, ils souhaitent préciser qu'ils ont le détachement nécessaire,

7 qu'ils n'ont jamais reçu ni instruction, ni consigne de l'accusé. En

8 conséquence, ils n'ont aucun lien de dépendance avec l'accusé, en tant que

9 client professionnel, ce qui les mettrait dans une situation extrêmement

10 gênante, où ils seraient obligés de se retirer. Ils sont toujours à la

11 disposition de la Défense pour aider à la présentation des moyens de la

12 Défense. Par conséquent, cette suggestion est quelque peu dangereuse et ne

13 devrait pas être confirmée.

14 Dans les arguments que nous avons présentés, comme l'a déjà souligné

15 Mme le Procureur, nous faisons référence à d'autres cas relevant de

16 juridiction du "common law", d'agression sexuelle, par exemple. Dans notre

17 premier dépôt d'écriture, ceci a été rédigé assez rapidement, je dois dire,

18 mais les documents à l'appui me faisaient défaut. Ce que m'a rappelé, par

19 la suite, M. Ruxton. Nous avons essayé de rédiger un certain nombre de

20 principes fondamentaux : comment un conseil de la Défense, dans un cas

21 comme celui-ci, devrait travailler.

22 Après avoir répondu dans les délais, nous avons eu un peu plus de

23 temps. Nous avons revu tout le système de loi en Ecosse, en Angleterre et

24 au pays de Galle [comme interprété], où la pratique est de plus en plus

25 développée -- en Nouvelle Zélande également -- sur l'imposition d'un

Page 32307

1 conseil de la Défense. Il est intéressant de constater que, dans ces pays

2 du "common law", de nouveaux statuts ont été établis et qu'ils sont

3 extrêmement proches des modèles que nous avons nous-mêmes présentés comme

4 étant ceux qui pourraient fonctionner au mieux dans ce Tribunal.

5 Je crois qu'il serait peut-être utile de repartir un petit peu en

6 arrière pour parler des criminels coupables d'agression sexuelle dans les

7 pays du "common law". Pour cette raison, je pense qu'un des éléments ou

8 facteurs à l'origine du changement de la loi en Angleterre, il s'agissait

9 d'un contrevenant coupable d'agression sexuelle contre-interrogé par une

10 victime. On a jugé qu'il serait innocent. Il ne s'agissait pas d'établir

11 son innocence, mais il voulait simplement faire en sorte que la victime

12 soit davantage punie. Il voulait servir ses intérêts par l'intermédiaire de

13 ce tribunal.

14 C'est la raison pour laquelle on a procédé au changement du système

15 juridique. Evidemment, d'après les faits cités, il s'agissait d'une affaire

16 bien différente de celle qui nous concerne parce qu'évidemment, les

17 agressions sexuelles sont des choses bien différentes. Néanmoins, il y a un

18 point commun, à savoir, il est extrêmement important de s'assurer que les

19 accusés ne puissent pas par l'intermédiaire des débats devant la cour,

20 servir leurs propres intérêts qui sont peu pertinents à la matière.

21 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Ceci se produit-il souvent, Monsieur

22 Nice ?

23 M. NICE : [interprétation] Non, je pense.

24 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Parce qu'en général, les

25 contrevenants sexuels seraient représentés par un conseil qui procéderait

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1 au contre-interrogatoire eux-mêmes.

2 M. NICE : [interprétation] Non, absolument pas. Dans ce cas précis, si je

3 me souviens bien, il s'agissait d'une affaire de quelqu'un qui avait commis

4 des agressions sexuelles, qui s'est présenté lui-même et qui a fait subir à

5 la victime un contre-interrogatoire extrêmement douloureux. C'est la raison

6 pour laquelle il y a eu un changement au niveau de la loi parce qu'on a

7 réalisé qu'il y avait un vide juridique, et on ne pouvait pas traiter cette

8 question.

9 C'est en lisant les documents dans les archives écossaises que nous

10 avons pu établir un parallèle avec les arguments présentés ici.

11 J'aimerais revenir en arrière et parler d'un point qui a été abordé

12 par Mme le Procureur. Nous proposons, par l'intermédiaire des écritures,

13 que ce problème se produit que très rarement dans le système du "common

14 law". Dans ce domaine, il est vrai que le "common law" a fait défaut. Nous

15 devons nous tourner vers le droit

16 romano-germanique. Cela étant dit, les Juges peuvent-ils garder à l'esprit

17 l'objet ici sous-jacent que nous recherchons en matière de droit romano-

18 germanique. Il s'agit de réaliser les objectifs de la Chambre, autrement

19 dit, de rendre justice. Il est également important de faire intervenir la

20 distance et l'objectivité lorsque les moyens de la Défense sont présentés.

21 Bien évidemment ici, si nous avons raison dans la manière dont nous

22 définissons la défense de l'accusé qui est destinée à un autre auditoire,

23 il se peut que certains points lui échapperont et qu'il n'abordera pas si

24 son approche est différente. Bien évidemment, il n'est pas possible qu'une

25 victime soit condamnée s'il elle doit être acquitté. Pour parler un langage

Page 32309

1 familier, il ne s'agit pas non plus de condamner à une trop lourde peine

2 quelqu'un.

3 Par conséquent, l'imposition d'un conseil de la Défense, conformément

4 au droit civiliste, serait en la matière quelque chose qui permettrait de

5 réaliser les deux objectifs poursuivis par l'Accusation, et qui découle de

6 son expérience et de sa connaissance en matière de droit civiliste.

7 Pour finir, le procès de cet accusé et les difficultés que nous

8 rencontrons, ne doivent pas faire l'objet d'un traitement spécial à cause

9 de la gravité des crimes dont est accusé l'accusé. Ils ne doivent pas non

10 plus être trop laxiste envers l'accusé, car cet accusé occupait un jour, à

11 un moment donné, une position importante. Nous allons peut-être pouvoir en

12 parler à huis clos plus tard, où de points qui doivent être abordés. Je

13 crois, par conséquent, qu'il s'agit de prendre une décision immédiate sur

14 la question si nous ne voulons pas perdre le contrôle ici dans ce procès.

15 Je répète encore une fois, nous avons présenté, c'est une proposition

16 détaillée. Ceci fonctionnera correctement. Il est fort probable que le

17 comportement à l'avenir de l'accusé servira non seulement ses propres

18 intérêts, mais l'intérêt de la justice.

19 Avant d'aborder la question médicale et un autre point qui est lié à ce que

20 je viens de dire et avant d'appeler le premier témoin, je souhaite parler

21 de l'étiquette devant ce Tribunal. C'est quelque chose que j'ai abordé à

22 plusieurs reprises dans nos écritures.

23 Le Tribunal, pour un certain nombre de raisons et les meilleures raisons, a

24 toléré ce qui, dans tout autre tribunal, serait considéré comme totalement

25 inacceptable, à savoir qu'il soit répété au quotidien qu'il s'agit d'un

Page 32310

1 tribunal illégal, que les Juges, ainsi que les Procureurs, agissent de

2 façon illégale.

3 Si l'accusé serait en droit d'appeler ses propres témoins sans pour autant

4 corriger son comportement devant cette Chambre, nous n'aurions qu'à nous

5 retrancher sur cette position où l'accusé serait en train de s'adresser de

6 façon irrespectueuse devant ce Tribunal, en citant ce Tribunal comme étant

7 un Tribunal illégal; néanmoins, s'attendant à ce que les témoins fassent la

8 déclaration solennelle et demandant aux témoins de traiter les Juges de

9 cette Chambre avec le respect nécessaire.

10 Il est difficile d'envisager une situation aussi peu satisfaisante. Il est

11 difficile de savoir comment ces témoins comprendraient véritablement ce que

12 l'on attend d'eux. Est-il possible d'avoir un accusé dire à ses témoins :

13 "Dites à ce Tribunal ou à cette Chambre illégale ce que vous savez." Des

14 personnes qui ont eu des responsabilités importantes par le passé ou

15 actuellement, peut-on s'attendre à ce que ces personnes viennent devant ce

16 Tribunal s'ils savent qu'ils vont être traiter de la sorte.

17 Par conséquent, l'étiquette n'est pas une question mondaine d'après nous;

18 c'est quelque chose qui doit être traité avec le plus grand sérieux.

19 Le point suivant que je souhaite aborder, est la question médicale. Nous

20 avons abordé déjà la question médicale, mais je crois que vous souhaitez

21 peut-être que nous passions à huis clos partiel pour ce faire.

22 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Avant de poursuivre, Monsieur Nice,

23 pourriez-vous nous en dire plus sur la faisabilité de ces procédures, à

24 savoir, d'un conseil commis d'office qui pourrait commencer d'emblée son

25 interrogatoire sans qu'il y ait de report d'audience ?

Page 32311

1 M. NICE : [interprétation] Oui. Je m'y suis penché dans les écritures. Je

2 vous remercie de m'avoir reposé la question pour que je puisse présenter

3 encore une fois notre position.

4 S'il y a commission d'Office d'un conseil, l'on pourrait demander que lui

5 ou elle, qu'il s'agisse d'un Amicus Curiae qui agit déjà ou qu'il s'agisse

6 d'un nouveau conseil qui serait commis d'office, on pourrait avancer, qu'il

7 n'est pas en mesure de présenter les moyens de la défense s'il n'y a pas de

8 préparation auparavant entre lui et l'accusé, si l'accusé refuse de

9 coopérer avec lui.

10 Je vais répondre en vous présentant deux volets de ma réponse.

11 Tout d'abord, dans des circonstances de l'espèce, on ne s'attendrait pas à

12 ce qu'il y ait de la part de ce conseil commis d'office, on ne s'attendrait

13 pas de sa part qu'il mène l'examen, l'interrogatoire entier, qu'il se

14 penche dans sa totalité dans l'investigation des moyens de la Défense. Tout

15 d'abord, dans la position dans laquelle nous nous trouvons, la situation

16 n'est pas due exclusivement à ce qu'en a fait l'accusé; (B) parce qu'il y a

17 une quantité extrêmement volumineuse de documents qui est tout à fait

18 accessible à tout conseil même s'il n'intervient que maintenant.

19 Ma proposition serait la suivante. Je réponds à la deuxième partie de ce

20 que vous m'avez avancé. Si l'accusé refusait catégoriquement de coopérer de

21 toute manière et si la Chambre décidait de commettre un conseil de la

22 Défense, nous avons déjà une liste dressée qui comporte des noms de 70

23 témoins que l'accusé souhaite citer à comparaître. Même s'il y a des

24 modifications du programme et de l'ordre du jour, je pense que sur la

25 dernière liste, nous en avons 12. Il y en aura, bien entendu, plus qui

Page 32312

1 viendront s'ajouter. Le juriste, qui l'aide est tout à fait capable de

2 procéder à des arrangements logistiques, enfin, il connaît les dispositions

3 qui doivent être prises pour présenter les témoins. D'après les résumés en

4 application de 65 ter, nous savons dans quel ordre les témoins sons censés

5 comparaître. Il serait toujours possible d'obtenir des notes sur ce que le

6 témoin doit présenter dans déposition.

7 Pour la Chambre, sans aucun doute, il sera possible de savoir si le conseil

8 a eu des éléments au préalable. Il sera possible d'obtenir par écrit les

9 questions, les questions qui seront posées par la suite. Comme je l'ai déjà

10 proposé dans mes écritures, à la fin de l'interrogatoire du témoin, la

11 Chambre pourrait inviter l'accusé à présenter, à préciser les sujets qui

12 n'avaient pas été couverts et qui devraient être couverts pour que la

13 Chambre s'assure que l'ensemble des éléments de preuve qu'il souhaitait

14 couvrir ont bien été présentés.

15 Pour ces premiers témoins, les témoins qui figurent sur la liste que nous

16 avons actuellement, si nous travaillons en raison de trois jours par

17 semaine, on continuerait probablement jusqu'à Noël. Pendant cette période,

18 on pourrait identifier et on pourrait faire connaître au conseil qui serait

19 commis d'office tous les éléments qui sont nécessaires de l'espèce. D'après

20 ce que nous avons pu voir ici, grâce aux documents qui sont à notre

21 disposition, les éléments sont tout à fait accessibles. Il s'agit d'une

22 tâche qui est certes grande mais qui n'est pas infaisable. Telle serait

23 notre proposition.

24 Enfin, je vous remercie de m'avoir donné l'occasion d'en parler encore une

25 fois. La Chambre devrait asseoir et exercer son autorité. L'accusé a fait

Page 32313

1 preuve souvent d'une volonté de ne pas suivre les instructions de la

2 Chambre. Si nous souhaitons en terminer avec la présentation dans des

3 délais raisonnables, à savoir, en octobre de l'année prochaine, je pense

4 que nous pouvons procéder de cette manière-là avec les témoins. L'accusé

5 pourra combler les lacunes, pourra aborder les points qui n'auront pas été

6 couverts par nous.

7 M. LE JUGE KWON : [interprétation] J'ai une autre question à vous poser. Si

8 l'on commettait un conseil, d'une manière ou d'une autre, pendant une

9 période transitoire avant que le conseil ne puisse pleinement exercer son

10 rôle, est-ce qu'il y a un risque pour que l'accusé ne soit pas pleinement

11 représenté pendant cette période-là ?

12 M. NICE : [interprétation] Il y a plusieurs risques ou plusieurs dangers.

13 Le danger principal serait qu'il serait encore en train de préparer des

14 témoins lui-même. Là nous rentrons dans quelque chose qui devrait

15 probablement faire objet de débat à huis clos partiel, mais très

16 brièvement. Le risque est qu'on se retrouve dans une situation où des

17 problèmes de santé réapparaissent et que tout simplement ceci nous retarde

18 des semaines ou des mois.

19 Il y a d'autres risques aussi pour ce qui est de ce type de préparation de

20 la présentation des témoins. J'ai parlé de l'étiquette, mais le risque

21 principal, ce n'est pas, à proprement parler, un risque, c'est une

22 certitude. C'est le calendrier. Comment allons-nous progresser, à quel

23 rythme ?

24 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie.

25 [La Chambre de première instance se concerte]

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1 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Nice, les Juges de la

2 Chambre ont tenu à se consulter au sujet de votre requête de passer à huis

3 clos partiel pour aborder un certain nombre de questions. Pour quelle

4 raison l'avez-vous demandé ?

5 M. NICE : [interprétation] Si nous l'avons demandé, c'est parce qu'il

6 s'agit de rapports médicaux. Ce sont eux que nous voulons aborder. Si vous

7 souhaitez que je le fasse en audience publique, je suis prêt à le faire.

8 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je demanderais l'avis des autres

9 parties en présence, mais, comme je l'ai déjà dit à l'accusé, lorsque nous

10 l'avons entendu en juillet, la jurisprudence du Tribunal en la matière fait

11 qu'il s'agit de points confidentiels, à moins que l'intérêt public ou les

12 exigences du procès ne commandent autrement. L'état de santé de l'accusé

13 est intrinsèquement lié au rythme de ce procès et la rapidité du procès.

14 Je souhaite entendre à présent les Amici.

15 Monsieur Kay.

16 M. KAY : [interprétation] Est-ce que vous souhaitez plutôt que j'aborde

17 uniquement la question de la confidentialité plutôt que d'entrer dans la

18 totalité de l'argument ?

19 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui.

20 M. KAY : [interprétation] Cela dépend beaucoup de la question qui est de

21 savoir si c'est de ce que l'accusé présenterait en la matière. Parfois

22 l'accusé n'est pas gêné par le fait que ceci est abordé publiquement et, en

23 particulier, si lui-même a une position très claire.

24 Mais il faudrait éviter d'en parler publiquement lorsqu'il s'agit de

25 questions très personnelles. Par là, j'entends, en particulier, les examens

Page 32315

1 médicaux. Je pense que nous avons tous à quoi je suis en train de me

2 référer. Mais il y a des questions générales qui concernent l'état de

3 santé, et ces questions générales, elles devraient pouvoir être soulevées

4 sans qu'elles soient traitées, de manière confidentielle. Si l'on ne se

5 réfère pas très précisément à des détails médicaux, et je pense que la

6 Chambre m'entend, je pense que nous pouvons le faire en audience publique.

7 Mais il faudrait que l'on aborde, de manière générale, qu'on ne

8 rentre dans rien qui pourrait gêner l'accusé ou qui pourrait être trop

9 révélateur des questions personnelles.

10 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vous remercie.

11 Monsieur Milosevic, est-ce que vous souhaitez dire quelque chose à ce

12 sujet ?

13 L'ACCUSÉ : [interprétation] Au sujet du fait que des questions médicales me

14 touchant, personnellement, soient abordées en audience publique. C'est cela

15 que vous demandez ?

16 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui. Oui.

17 L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais la fois précédente, vous m'avez déjà posé

18 la question, et je vous ai dis que j'estimais que les questions médicales

19 doivent être abordées à huis clos partiel. Il s'agit des affaires qui me

20 sont personnelles et qui ne concernent pas le public. Il me semble qu'il

21 s'agit là d'une règle élémentaire, de base.

22 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vous remercie.

23 Là, je recourrai à l'avis de mes collègues de la Chambre.

24 [La Chambre de première instance se concerte]

25 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Nice, oui. A ce sujet ?

Page 32316

1 M. NICE : [interprétation] Bien entendu, nous serions favorables à ce que

2 ces éléments soient présentés en audience publique dans la mesure où il est

3 nécessaire que nous présentions nos arguments au sujet de la commission

4 d'un conseil. Nous ne souhaitons pas rentrer dans le détail. Tout

5 simplement, ce que nous avons besoin d'entendre, ce sont les conclusions

6 auxquelles sont arrivés les médecins.

7 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vous remercie.

8 La Chambre estime que M. Kay a trouvé la juste mesure pour la règle

9 concernant la présentation de ces arguments.

10 Nous allons entendre en audience publique les questions générales et,

11 si cela devient trop délicat, il convient d'attirer l'intention de la

12 Chambre sur cela, et nous allons passer à huis clos partiel.

13 M. NICE : [interprétation] Je vous remercie.

14 Avant de passer à la question de la santé, pour revenir à la question

15 qui a été posée précédemment par M. le Juge, au sujet de la commission de

16 conseil de la Défense dans les cas de procès menés pour violence sexuelle,

17 je remercie Mme Graham d'avoir retrouvé la référence qui vous sera d'aide.

18 Il s'agit d'un document de la commission juridique de South Wales. Il

19 s'agit des pages 20 et 21, où il se penche sur l'expérience britannique de

20 l'époque et, au paragraphe 2.26 du rapport de la commission, il est

21 présenté un rapport du ministère de l'Intérieur du Royaume-Uni sur le même

22 sujet, suite à deux affaires de violence sexuelle dans lesquelles les

23 accusés ont contre-interrogé les personnes afin de les humilier et afin

24 d'intimider leurs victimes. On voit les détails de la situation dans le

25 paragraphe que je viens de citer.

Page 32317

1 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur Nice.

2 M. NICE : [interprétation] Pour ce qui est de la santé, je me contenterai

3 de rappeler à la Chambre un fait. Il s'agit d'un petit passage dans le

4 résumé du quatrième des derniers rapports.

5 La Chambre se rappellera que pendant les débats qui ont porté sur le

6 temps qui est nécessaire à l'accusé pour préparer sa défense, que l'accusé

7 n'a jamais été satisfait avec les délais accordés, qui pourtant semblaient

8 tout à fait raisonnables, et qu'il a exigé d'avoir un délai allant jusqu'au

9 mois de septembre. En effet, ce qui s'est passé, c'est que ses problèmes de

10 santé nous ont fait reporter nos débats jusqu'au mois de septembre.

11 Les derniers rapports qui nous intéressent, commencent par le rapport

12 qui porte la date du 24 juillet 2004. C'est le rapport du Dr Tavernier, et

13 page 3 de ce rapport, suite à un examen détaillé auquel il a été possédé --

14 auquel il n'est pas inutile que je revienne [comme interprété]. Il revient

15 à une affirmation qui a été faite précédemment, à savoir que l'accusé ne

16 suivait pas le traitement médical qui lui avait été prescrit, et ce, pour

17 servir au mieux ses intérêts afin de lui permettre d'être en forme pour le

18 procès. A la fin de ce paragraphe, il est dit : "Toutes ces observations

19 laissent entendre que l'accusé ne prend pas les médicaments en suivant un

20 traitement rigoureux tel qu'il a été prescrit."

21 Plus loin, sur la même page, le docteur fait état de son opinion

22 qu'il base sur l'état clinique du patient, à savoir que le fait qu'il ne

23 suit pas de manière rigoureuse le traitement, que c'est pour cette raison-

24 là que l'accusé n'est pas en forme, et c'est l'opinion du Dr Tavernier.

25 L'accusé n'est pas en mesure de se représenter pour ces raisons-là. Par la

Page 32318

1 suite, il dit qu'il partage l'opinion de son collègue, le Dr van Dijkman, à

2 savoir qu'il y aura une augmentation de la pression sanguine, une très

3 importante hypertension à la reprise des travaux et que ceci aura un impact

4 très grave sur le procès.

5 Dans le rapport suivant, chronologiquement parlant du Dr Dijkman, le

6 rapport du 18 août, page 2 suite à un examen détaillé, il est dit, et je

7 cite : "Nous sommes en droit d'arriver à la conclusion qu'on pourrait

8 formuler des doutes sérieux sur le fait que le patient suit le traitement

9 qui lui a été prescrit. D'un point de vue clinique, nous estimons que la

10 tachycardie, qui est récurrente est étonnante, elle ne devrait pas avoir

11 lieu s'il prenait le médicament qui lui a été prescrit."

12 Par la suite, et je pense que c'est la première fois que cela ressort

13 clairement dans les rapports, il est dit quelque chose d'autre, à savoir,

14 le médecin affirme "qui plus est", et il nomme un autre médicament : "Un

15 autre médicament benzodiazépine a été repéré dans son sang, ce qui est

16 étonnant compte tenu du fait que le patient a refusé de prendre les

17 benzodiazépines de la part des employés des Nations Unies." Par la suite,

18 il est dit que l'accusé a probablement obtenu -- qu'il se soit procuré des

19 médicaments par d'autres moyens.

20 Dr Dijkman termine ce paragraphe, en disant qu'à son avis, le patient

21 n'est pas en forme pour se défendre : "Que, si on poursuivait les travaux

22 comme on l'avait fait auparavant, qu'il y aurait des interruptions sans

23 cesse et que ceci causerait des délais considérables au procès."

24 Le Dr Tavernier commente dans son rapport du 27 août, le rapport du

25 Dr Dijkman, la page 2 que j'ai évoquée, paragraphe 1, sous conclusion 2, et

Page 32319

1 il dit qu'il y a des doutes graves quant au fait que le patient suit le

2 traitement qui lui a été prescrit. A la fin du paragraphe, lorsqu'il parle

3 de ce médicament qui n'a pas été prescrit et qui a été constaté, il dit :

4 "Puisque ce médicament ne figure pas sur la liste des médicaments prescrits

5 dans son dossier médical, cela signifie que M. Milosevic se le procure par

6 d'autres moyens et cela montre que M. Milosevic est réticent à suivre le

7 traitement qui lui a été proposé." Le docteur évoque par la suite des

8 complications possibles, donc nous n'allons pas rentrer dans les détails de

9 cela.

10 J'évoque, maintenant, le dernier rapport du Dr Dijkman du 26 août et,

11 en particulier, la réponse à une ordonnance rendue par la Chambre de

12 première instance et où il en parle en détails, il s'agit là d'un rapport

13 un peu plus long, des raisons pour lesquelles il est en mesure de dire ce

14 qu'il dit et il dit que l'accusé a refusé de suivre le traitement qui lui a

15 été prescrit. Là je ne vais pas rentrer dans le détail et il dit pour

16 quelle raison ceci est clair. Il est clair qu'il prend d'autres

17 médicaments.

18 Page 3 -- à la fin d'un grand paragraphe, page 3, où il est question

19 de l'autre médicament, qui a été pris sans avoir été prescrit et sans que

20 le patient soit surveillé par les employés de l'Unité de détention, il dit,

21 au deux tiers du paragraphe : "Il y a eu des examens faits par un collègue

22 et ce qui prouvent l'inverse puisque M. Milosevic nous fournit des

23 informations qui ne sont pas correctes sur ces médicaments, ce qui m'incite

24 à ne pas faire confiance à ces déclarations au fait qu'il prend

25 correctement les médicaments anti-hypertension."

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1 A la fin de ce paragraphe, il est dit : "Que ces médicaments ne sont

2 pas censés causer une hypertension, au contraire, ils devraient avoir

3 l'effet inverse." C'est la raison pour laquelle le médecin dit l'avoir

4 proposé de par le passé à l'accusé et il termine en disant qu'il ne

5 comprend pas pourquoi l'accusé les a refusés.

6 Ce médicament a été pris sans que l'accusé soit surveillé et, normalement,

7 pris correctement, ce traitement aurait dû améliorer son état. Mais,

8 apparemment, le traitement n'a pas été correctement suivi. L'opinion

9 générale et partagée à l'unanimité par tous les experts est que l'accusé

10 n'est pas en mesure de mener lui-même sa propre défense, qu'il ne prend pas

11 les médicaments de la manière dont il lui ont été prescrits et qu'il ne les

12 prend pas en étant surveillé. Les médecins disent qu'on comprend pourquoi

13 il y a eu des mois de temps d'audience qui ont été gaspillés, compte tenu

14 de cette conduite. L'accusé s'est procuré d'autres médicaments et,

15 évidemment, qui ne peuvent pas l'aider.

16 Cela devient tout à fait clair que l'accusé semble chercher à servir

17 ses propres intérêts et ceci à notre avis montre que la Chambre pour deux

18 raisons devrait commettre un conseil de la Défense.

19 Premièrement, compte tenu de l'état de santé qui se détériorera au point

20 que les témoins ne pourront plus être préparés, compte tenu de la charge de

21 travail que cela représente et aussi parce que la Chambre peut voir que

22 l'accusé manipule le Tribunal.

23 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Nice, j'aurais besoin de votre

24 aide. Pour ce qui est du fait que l'accusé ne semble pas suivre le

25 traitement prescrit, il semblerait que les deux médecins se sont fondés

Page 32321

1 dans leur conclusion -- leur conclusion qui n'est pas en forme -- en mesure

2 de se défendre. Ils se sont fondés sur le fait qu'il ne suit pas le

3 traitement prescrit, la thérapie telle qu'elle a été prévue. Supposons qu'à

4 partir de maintenant que s'il suivait, effectivement, le traitement, qu'il

5 serait en mesure de se représenter. Or, ce n'est pas ce que je pense. Le

6 fait qu'il ne suit pas le traitement, ceci peut nous permettre de savoir

7 pourquoi il est malade mais je ne pense pas que ceci peut être une raison

8 suffisante de commettre un conseil de la Défense.

9 Est-ce que je peux entendre vos commentaires là-dessus ?

10 M. NICE : [interprétation] Oui, plusieurs points.

11 Nous estimons que cet argument en soi est suffisant, à savoir, il s'agit

12 d'une attitude obstructionniste le fait de ne pas suivre le traitement.

13 J'utilise là les propos qui ont été utilisés, me semble-t-il, dans

14 l'affaire Seselj et ceci en association avec d'autres aspects de sa

15 conduite, nous montre que si l'on se fonde sur l'approche civiliste, la

16 commission d'un conseil serait justifiée. Nous avons ici une personne qui,

17 de plusieurs manières, se comporte, de façon inadéquate, qui pour des

18 raisons qui lui sont personnelles et qui sortent des intérêts de la justice

19 qui sont les nôtres, que vous devez protéger, vous devez vous assurer que

20 sa défense sera présentée, de manière appropriée. Vous devez vous assurer

21 qu'il y aura une administration correcte de la justice, que celle-ci ne

22 sera pas obstruée.

23 Votre proposition que, non seulement il ne suit pas le traitement

24 n'est pas un argument suffisant pour commettre un conseil de la Défense, me

25 semble-t-il, votre propos n'est pas tout à fait approprié parce qu'ici on

Page 32322

1 en arrive au point d'évoquer la question de la commission du conseil, de

2 l'imposition du conseil pour toute une série d'autres raisons.

3 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Quelles sont les autres raisons ?

4 Vous avez dit que ce n'était qu'un élément parmi toute une série de

5 raisons.

6 M. NICE : [interprétation] Oui. L'accusé l'a démontré. Nous l'avons

7 constaté à l'écoute de l'allocution qu'il vient de faire tout récemment. Ce

8 qui l'intéresse, c'est d'utiliser du temps. Nous, nous dirions de perdre du

9 temps, un temps précieux pour discuter de questions qui sont au cœur de

10 l'affaire et également de questions qui n'ont rien à voir avec l'affaire.

11 Il continuera à agir de cette façon parce que ses objectifs sont différents

12 des objectifs poursuivis par le Tribunal, à savoir, dans une certaine

13 mesure, d'identifier des témoins, mais, très certainement, de chercher à

14 remplacer les témoins également. Nous avons vu au cours du

15 contre-interrogatoire combien il était difficile pour le Tribunal de le

16 ramener à une discussion pertinente. A de très nombreuses reprises, on lui

17 a accordé quelquefois deux heures supplémentaires dont il a complètement

18 gaspillées, une heure trois-quarts. C'est ce que nous disons, avec le

19 respect que nous devons à chacun, pour avoir débattu de questions sans la

20 moindre pertinence. Ce genre de solution ne fonctionne pas. Le Juge May a

21 soulevé ce problème de la pertinence et du caractère opérationnel de ce

22 genre de méthode.

23 Le même accusé, aujourd'hui représenté par un conseil, qu'il lui soit

24 imposé ou qu'il l'ait choisi de lui-même, se verra défini de la façon la

25 plus précise qui soit, les questions qui font l'objet du débat, et toute

Page 32323

1 question non pertinente pourrait être supprimée. C'est une deuxième raison

2 tout à fait justifiée d'imposer un conseil à l'accusé.

3 Troisième élément que j'ai déjà abordé, à vrai dire, c'est le protocole, la

4 bienséance. En effet, le moment est venu où la Chambre doit pouvoir être

5 sûre que la Défense s'adressera à elle, d'une façon convenable. Avec le

6 respect que nous devons à chacun, nous disons que le temps est venu de ne

7 plus tolérer la manière tout à fait inacceptable dont un certain nombre

8 d'arguments sont présentés à la Chambre.

9 Je reviendrai, cependant, si vous me le permettez, compte tenu de la

10 question posée il y a quelques instants par le Juge Kwon, à ce que j'ai cru

11 comprendre comme étant une pensée sous-jacente, et j'espère que M. le Juge

12 ne me reprochera pas d'avoir cédé à cette tentation. Car, Monsieur le Juge,

13 vous vous souviendrez du premier élément que j'ai développé, qui était un

14 élément général au sujet de la réaction qu'une personne raisonnable peut

15 avoir à un argument déraisonnable ou qu'une personne rationnelle peut avoir

16 à un argument irrationnel lorsque, par exemple, on peut être tenté de tirer

17 profit de l'attitude de l'autre contre toute expérience concrète. Je vous

18 proposerai l'idée que la question peut avoir pour réponse que l'accusé ne

19 s'intéresse pas à ce que l'affaire s'achève, et qu'il n'y a aucune raison

20 pour qu'il accepte les solutions susceptibles d'amener l'affaire jusqu'à

21 son terme.

22 Pour répondre à la question que vous avez posée, Monsieur le

23 Président, Monsieur le Juge Robinson, il y a au moins trois raisons

24 distinctes qui expliquent ce non respect du traitement médical, comme étant

25 une partie intégrale des raisons justifiant l'imposition d'un conseil.

Page 32324

1 L'état de santé, en tant que tel, d'ailleurs de l'accusé justifie également

2 l'imposition d'un conseil.

3 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci.

4 M. NICE : [interprétation] Monsieur le Président, je sais que le temps est

5 très précieux, mais je vais, maintenant, aborder un sujet tout à fait

6 capital. Dans la présentation de mes thèses, j'ai déjà défini un point et

7 je ne désirerais pas y revenir en détail, mais j'ai déjà démontré que

8 l'accusé manifestait un véritable défi par rapport au Tribunal. Il a

9 produit une liste de 1 300 témoins et a exigé de pouvoir donner le nom de

10 chacun d'entre eux, à l'exception de la toute petite minorité d'entre eux

11 qui exigeront des mesures de protection spéciales de la Chambre et de

12 l'Accusation. Il nous a dit, lors de la dernière audience, qu'il donnerait

13 à chacun le nombre de noms qu'il jugeait nécessaire de citer. Nous avons

14 appelé l'attention de la Chambre sur les quelques fois où il a refusé

15 d'obtempérer à une ordonnance. Les noms étaient censés être destinés à la

16 Chambre, mais c'était la situation d'il y a deux jours, je pense. Nous

17 n'avons toujours pas obtenu une grande majorité de ces noms. 900 noms à peu

18 près nous manquent encore.

19 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] 900.

20 M. NICE : [interprétation] Oui, à peu près 900.

21 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Bien.

22 M. NICE : [interprétation] Sans la moindre explication, sans la

23 moindre excuse. Il avait reçu l'ordre de fournir tous ces éléments de

24 preuve. Il est possible que parfois des pièces à conviction posent des

25 problèmes pratiques. C'est déjà arrivé il y a quelques mois. La première

Page 32325

1 fois où nous pouvons affirmer que nous avons reçu des éléments de preuve en

2 B/C/S, la totalité des éléments de preuve qui étaient prévus, c'est il y a

3 à peine quelques jours. On peut dire que le passé c'est le passé. Je ne

4 vais pas insister auprès de la Chambre pour qu'elle revienne sur cette

5 décision. En effet, il est toujours difficile d'examiner l'attitude d'un

6 accusé pour déterminer dans quelle mesure il refuse d'obéir à une

7 ordonnance ou déterminer que c'est un acte de défi par rapport au Tribunal

8 ou que c'est simplement un problème concret qui s'est posé. En tout cas, je

9 pense qu'un Tribunal doit être en mesure de rendre la justice, y compris

10 dans des situations aussi difficiles que celle de ce procès avec cet

11 accusé.

12 Monsieur le Président, je n'en dirai pas plus. Je me contenterai

13 simplement de revenir sur un certain nombre de points qui sont déjà à

14 l'ordre du jour, je crois. Le fait de savoir, par exemple, si l'accusé doit

15 déposer en personne, qui a un rapport avec la déclaration solennelle.

16 J'aimerais également appeler votre attention sur des citations qui ont été

17 attribuées à un dirigeant occidental dans l'allocution de l'accusé. C'est

18 en tout cas l'impression que donnait l'allocution, alors que la citation

19 était totalement déformée. Je vous fournirai le chapitre et l'extrait exact

20 qui mérite d'être corrigé. A moins que je ne me trompe, à moins que mes

21 informations soient erronées, je pense qu'il faut que cette erreur soit

22 corrigée. Il peut y avoir d'autres exemples de citations exactes que nous

23 avons entendues au cours de la dernière journée, mais une erreur ne doit

24 pas être admise.

25 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Si vous appelez l'attention de la

Page 32326

1 Chambre sur ce point, il serait bon de demander à l'accusé d'entreprendre

2 les actions nécessaires pour rétablir cette citation.

3 Monsieur Milosevic, avez-vous quelque chose à dire à ce sujet ?

4 L'ACCUSÉ : [interprétation] D'abord, il n'est pas nécessaire que qui que ce

5 soit corrige une quelconque citation. Si j'ai fait une erreur dans la

6 citation, il suffit d'attirer mon attention sur ce point, et je corrigerai

7 moi-même. Je suis convaincu que je n'ai fait aucune erreur dans les

8 citations que j'ai faites. Si tel est le cas, je n'aurai aucune difficulté

9 à rétablir, aucun problème. S'agissant du sujet qui fait l'objet des débats

10 en ce moment, M. Nice a évoqué les motivations qui me poussent à m'exprimer

11 ici. Elles ne sont en aucun cas mystérieuses. J'ai déjà souligné cela à

12 plusieurs reprises. Je m'exprimerai ici chaque fois que vous m'en donnez la

13 possibilité, parce que j'utilise toutes les occasions à ma disposition pour

14 dire la vérité. Voilà quel est mon motif personnel.

15 Je suppose que la vérité devrait également être le motif, l'objectif,

16 la fin poursuivie dans n'importe quelle procédure, dans n'importe quel

17 débat, dans n'importe quelle discussion universitaire, y compris. Par

18 conséquent, je ne vois pas pour quelle raison le motif qui m'inspire, à

19 savoir, dire la vérité, pourrait être en contradiction avec un quelconque

20 motif honorable qu'aurait la partie adversaire si tel est le cas. S'il

21 s'avère que la partie adversaire souhaite arriver à la vérité, souhaite

22 découvrir la vérité dans toute sa profondeur, cela n'est que dans l'intérêt

23 de la justice.

24 M. Nice évoque les règles. Votre règlement ne stipule nulle part que

25 je n'ai pas le droit d'être défendu. Tous les règlements internationaux,

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1 tous les traités, tous les pactes relatifs au droit de l'homme me donnent

2 le droit de me défendre moi-même. En tout état de cause, le défunt Juge May

3 lui-même, lorsque nous avons discuté de ce point la dernière fois, a

4 souligné entre autre chose -- je m'en souviens très bien -- que mon droit à

5 me défendre moi-même ne doit pas être remis en cause.

6 Nous sommes ici actuellement dans une situation tout à fait

7 absurde. Je ne parle pas uniquement des explications que nous venons

8 d'entendre de la bouche de M. Nice, mais du fait aussi que j'ai eu la

9 possibilité d'interroger des témoins de la partie adversaire. Des témoins

10 hostiles qui, dans leur désir d'entendre des témoins aussi opposés à moi

11 que possible, ont cité ces témoins à la barre. J'ai été tout à fait en état

12 d'interroger -- de contre-interroger ces témoins, ces témoins de la partie

13 adverse. Tout d'un coup, aujourd'hui, il semblerait que je ne sois plus en

14 état d'interroger mes témoins à moi. Ceci est tout à fait absurde.

15 Regardez, voyez à tel point est absurde ce qu'a dit M. Nice --

16 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Veuillez poursuivre.

17 Nous suspendrons dans un quart d'heure.

18 L'ACCUSÉ : [interprétation] Très bien. M. Nice parle d'un

19 danger. Je ne vois pas quel peut être la logique de son propos. S'agirait-

20 il d'un danger d'un mauvais traitement ou d'abus exercé sur des victimes si

21 j'interroge les témoins. Je n'ai jamais maltraité ou abusé d'un quelconque

22 témoin de l'Accusation. Je n'ai abusé d'aucun témoin de la partie

23 adversaire. Je n'ai maltraité aucun témoin de la partie adversaire. Comment

24 pourrait-on penser qu'il existe un quelconque danger que je maltraite des

25 témoins cités à la barre par moi ? Bon sens. Est-ce qu'il y a la moindre

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1 logique dans une telle idée, qu'elle vienne de quelqu'un, y compris en très

2 bas âge ? C'est absurde. Il est absurde de penser que je pourrais en

3 quelque situation que ce soit maltraiter mes propres témoins.

4 M. Nice a dit -- j'ai même pris note de ce qu'il a dit -- il a parlé d'un

5 risque que je prépare mes témoins à leur audition dans le prétoire. Je

6 comprends que s'il y avait un risque de détruire complètement la magnifique

7 construction de la partie adversaire, cela puisse être considéré comme

8 risque, c'est précisément ce que je souhaite faire. D'ailleurs, il est de

9 mon droit de le faire. Comment est-ce que quiconque qui soutient la loi et

10 la justice pourrait m'empêcher de préparer mes témoins ?

11 En ce qui concerne les témoins, et compte tenu du temps qui m'est

12 imparti pour travailler, à savoir, trois jours par semaine, j'entends bien

13 consacrer au moins un jour sur ces trois jours à des rencontres en tête-à-

14 tête avec mes témoins. Vous savez fort bien que la partie d'en face a

15 préparé ses témoins pendant des semaines entières, si ce n'est plusieurs

16 semaines, à l'aide de tout l'appareil à sa disposition, y compris dans le

17 cas de témoins qui ne devaient pas comparaître en personne. En revanche, je

18 devrai sans doute préparer deux auditions de témoins chaque jour. Par

19 conséquent, l'utilisation rationnelle du temps est quelque chose de tout à

20 fait relatif, en tout cas, à savoir si le temps est utilisé de la façon la

21 plus rationnelle possible. C'est tout à fait difficile à déterminer. C'est

22 une question qui se pose à chacun. J'utiliserai mon temps beaucoup

23 rationnellement que la partie adverse qui a consacré un temps beaucoup plus

24 important à la préparation de ses témoins. C'est quelque chose de tout à

25 fait évident.

Page 32329

1 Par conséquent, je pense que l'idée évoquée par M. Nice, a pour but

2 de m'enlever la moindre possibilité de dire la vérité. C'est cela le but

3 poursuivi. M. Nice dit que j'ai créé mes propres problèmes de santé. Je

4 souffre d'hypertension depuis plus de dix ans.

5 Deuxième chose que je dirai, il doit être clair à chacun que j'ai

6 déjà reçu des centaines de milliers de pages de documents, de documents

7 très différents qui font partis des éléments fournis par la partie

8 adversaire, et que je n'ai pas le temps suffisant pour parcourir. Bien

9 entendu, il me faut des efforts supplémentaires dès lors que le nombre de

10 documents augmente. Cela créait de la fatigue. Bien entendu, cela a des

11 effets sur mon hypertension qui peut résulter de la fatigue. Ce qui est le

12 cas de toute forme de travail en dehors du sommeil. Je m'enlève pas mal

13 d'heures de sommeil pour lire, examiner des arguments et préparer ce que je

14 vais dire. Ce que M. Nice vient de dire n'est simplement pas vrai. C'est le

15 contraire qui est vrai. La dynamique et la réduction du temps imparti,

16 c'est quelque chose dont chacun peut être responsable.

17 Une autre affirmation qui vient d'être faite, c'est que je ne me

18 comporte pas de façon responsable dans la prise de mes médicaments. Je ne

19 vais pas parler des méthodes de calcul et de mesure, de l'effet que les

20 médicaments ont sur moi, mais vous ne connaissez sans doute même pas les

21 pratiques en vigueur dans votre quartier pénitentiaire. J'ai ingéré mes

22 médicaments toujours en présence des gardiens. On me les donne au fur et à

23 mesure. Je prends les comprimés en présence d'un gardien, et le gardien

24 inscrit dans un cahier l'heure exacte à laquelle j'ai ingéré ces

25 médicaments. Par conséquent, l'hypothèse qui vient d'être évoquée restera

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1 au stade de l'hypothèse. Quand quelqu'un souhaite quelque chose, il peut le

2 dire, prendre ses désirs pour des réalités, mais l'affirmation en question

3 est absolument infondée.

4 Il est vrai qu'il y a un an à peu près, j'ai discuté avec les

5 médecins de certains médicaments qui avaient des effets secondaires

6 provoquant de la fatigue, des nausées et qui m'empêchaient de travailler.

7 Les médicaments dont je suis en train de parler, j'ai cessé de les prendre

8 parce qu'ils n'avaient pas un effet favorable sur moi. Je les ai écartés.

9 Je l'ai dit au médecin. Je lui ai dit : "Je ne peux pas prendre ces

10 médicaments parce qu'ils m'empêchent de fonctionner normalement." J'ai

11 parlé avec mon médecin personnel par téléphone. Un autre traitement a été

12 mis au point en accord avec plusieurs médecins. Les médecins d'ici ont

13 accepté ce nouveau traitement qui avait été proposé par le médecin qui me

14 soignait depuis plus de dix ans. Je vous ai parlé de la façon dont je

15 prends mes médicaments, de la procédure qui est appliquée dans le cadre de

16 la gestion de mon traitement.

17 Je crois, ce dont on parle ici, c'est quelque chose de tout à fait

18 différent. Nous parlons de fatigue, parce que lorsque je prends

19 régulièrement mes médicaments, cela a été le cas depuis un mois notamment,

20 qu'en même temps, je peux me reposer, ce qui est le cas depuis un mois. Ma

21 tension artérielle se normalise. J'ai donné la priorité au repos pendant un

22 certain temps afin que ma tension artérielle se stabilise et afin d'être

23 physiquement capable de fonctionner. Je l'ai fait aux dépens des tâches qui

24 étaient les miennes à l'époque. Je suppose que tout dans la vie a des

25 limites, et qu'il faut un minimum de repos et que j'en ai besoin,

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1 également. C'est un élément tout à fait capital qui a contribué au

2 rétablissement de ma tension artérielle.

3 Si nous restons dans un rythme de travail régulier et normal, qui

4 peut être maintenu dans la durée, il n'y a aucun problème pour moi à

5 pouvoir faire ce que j'ai besoin de faire. Mais il serait très injuste

6 qu'alors que je suis dans les mêmes conditions physiques qui sont les

7 miennes depuis plus de deux ans que je contre-interroge les témoins de

8 l'Accusation, on considère que je ne peux pas continuer à travailler dans

9 ces mêmes conditions pour interroger mes témoins et me défendre moi-même.

10 Apparemment, ceci est la preuve d'une volonté obsédante d'empêcher la

11 vérité d'éclater et c'est quelque chose qui doit apparaître de façon tout à

12 fait claire aux yeux de tous ceux qui regardent les présents débats.

13 Il n'y a aucune raison car, rappelez-vous, le défunt Juge May,

14 Président antérieur de la Chambre, qui à l'époque a insisté sur le droit

15 qui est le mien, de me défendre moi-même et qui a dit qu'il ne fallait pas

16 que ce droit soit violé. Par conséquent, je ne peux vraiment pas admettre

17 que l'on ne m'accorde pas ce droit, que l'on ne m'accorde pas la

18 possibilité de dire la vérité et je trouverais inacceptable d'être empêché

19 de faire venir à la barre mes témoins, des témoins cités par moi et

20 d'entendre leurs dépositions fondées sur les motifs pour lesquels ils ont

21 été cités à la barre.

22 Pour autant que je sache, ces 900 témoins dont M. Nice vient de

23 parler, la liste en question lui a été donnée, il y a plus d'un mois et

24 elle comporte 1 100 noms. C'est la première fois que j'entends parler de ce

25 problème des 900 témoins. Pour autant que la chose soit vérifiée, je

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1 l'admettrais mais pour autant que je le sache et j'essaie de me souvenir,

2 cette liste a été fournie par moi à l'Accusation, il y a plus d'un mois.

3 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, nous allons

4 maintenant faire une pause de 20 minutes.

5 L'ACCUSÉ : [interprétation] J'aimerais simplement tirer un point au clair

6 avant la pause. Chacun a le droit de tomber malade, notamment lorsqu'on

7 souffre de problèmes cardiovasculaires chroniques. C'est la première fois

8 que j'entends parler de quelqu'un qui, parce qu'éventuellement il est tombé

9 malade, pourrait se voir refusé le droit de se défendre lui-même, un droit

10 qui est garanti par toutes les conventions sur les droits de l'homme. La

11 seule solution acceptable c'est que, lorsque cette personne est malade, on

12 supprime une journée d'audience, ou deux jours d'audience, ou quelquefois

13 davantage, si c'est nécessaire, mais je n'ai jamais entendu parler du fait

14 que quelqu'un, parce qu'il est malade et parce que la partie d'en face le

15 demande, se voit refuser le droit de se défendre lui-même. Ceci n'a rien à

16 voir avec le bon sens, la logique ou la morale ou le droit, c'est

17 simplement hors de question.

18 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Très bien. Nous suspendons pendant

19 20 minutes.

20 --- L'audience est suspendue à 12 heures 19.

21 --- L'audience est reprise à 12 heures 45.

22 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, c'est à vous.

23 L'ACCUSÉ : [interprétation] Encore quelques mots. Je considère également

24 tout à fait inacceptable les explications fournies par M. Nice au sujet de

25 la reconnaissance du Tribunal. Je considère que le Tribunal est illégal.

Page 32333

1 Ceci est absolument incontestable de ma part. J'ai expliqué pour quelles

2 raisons j'adoptais cette position, pour quelles raisons juridiques et

3 politiques. J'ai même cité l'ouvrage de l'ancien président de la Cour

4 internationale de justice, qui estime également que l'on peut discuter des

5 décisions de ce Tribunal par rapport à la charte des Nations Unies. Je suis

6 en droit d'exprimer les raisons politiques et juridiques pour lesquelles

7 j'adopte la position qui est la mienne au sujet de la légalité ou non du

8 Tribunal, notamment, lorsque la légalité de cette institution fait l'objet

9 des débats ici par rapport à d'autres institutions. Il n'est pas logique

10 que l'on dise ce qui vient d'être dit ici, et je crois que, s'agissant d'un

11 témoin qu a été mentionné, s'agissant des qualificatifs de faux témoins et

12 de criminels, de meurtriers, je ne crois pas qu'en utilisant ces adjectifs

13 j'insulte qui que ce soit parmi les témoins et en tout cas, je ne les

14 insulte jamais au cours des interrogatoires que je mène. Je présente des

15 arguments politiques et juridiques qui, à mon avis, sont tout à fait

16 valables, au sujet de la légalité de ce Tribunal, et c'est mon droit. Je

17 n'ai pas l'intention d'être privé de ce droit simplement parce que M. Nice

18 ou quelqu'un d'autre n'apprécie pas ce que je dis.

19 Par conséquent, je demande à être autorisé à entendre les témoins

20 régulièrement, à les interroger, à exercer les droits qui sont les miens

21 par rapport à cela, droits identiques à ceux qui étaient les droits de la

22 partie adverse lorsqu'elle interrogeait ses propres témoins. Je ne demande

23 rien de plus, rien de moins. En fait, j'obtiens moins parce que mes

24 conditions de préparation ne sont pas aussi favorables. Mais cela, c'est

25 mon problème.

Page 32334

1 En tout état de cause, je demande à être autorisé à faire venir des témoins

2 ici. Ils viendront ici sur mon invitation et non sur l'invitation de

3 quelqu'un qu'ils ne connaissent absolument pas.

4 Je dois dire que je ne crois pas qu'il existe un seul avocat qui ne

5 s'en tienne pas au code pénal et qui ne s'en tienne pas aux principes

6 moraux fondamentaux en déclarant qu'il est permis d'imposer à un accusé, un

7 avocat, alors que celui-ci le refuse. Je ne crois pas qu'une personne de

8 cette sorte existe, mais il est probable aussi que tout est possible.

9 J'exige l'autorisation de pouvoir interroger mes témoins, et M. Nice,

10 qui manifestement souhaite lui-même interroger mes témoins directement ou

11 par le truchement d'un intermédiaire, a le droit au contre-interrogatoire

12 une fois que mes témoins sont dans le prétoire. Je ne m'y suis ingéré en

13 rien dans le choix de ses témoins.

14 M. LE JUGE KWON : [interprétation] J'aimerais redire une chose, Monsieur

15 Milosevic, si vous me le permettez. Je me souviens que ceci a déjà été dit.

16 Monsieur Milosevic, vous êtes en train de dire que vous ne pouvez pas

17 nommer un conseil, car vous ne reconnaissez pas ce Tribunal. A mon avis, la

18 reconnaissance du Tribunal et le fait d'être aidé par un conseil sont deux

19 questions différentes. En fait, dans vos actes, la différence s'est déjà

20 manifestée. Vous avez, en signant un document, nommé trois assistants

21 juridiques de Belgrade pour vous aider, et durant la présentation des

22 éléments de preuve de l'Accusation, ces collaborateurs vous ont apporté

23 leur aide, en recueillant des renseignements et des éléments de preuve et

24 en préparant les questions que vous vous apprêtiez à poser aux témoins. Sur

25 le fond, je pense que ces collaborateurs ont joué de facto le rôle de

Page 32335

1 conseil de la Défense même s'ils n'étaient pas physiquement présents dans

2 le prétoire.

3 C'est en pensant à cela et compte tenu du fait que la présentation des

4 éléments de preuve de la Défense exige des efforts physiques encore plus

5 importants que ceux qui ont été nécessaires pour la présentation des

6 éléments de preuve de l'Accusation, que les Juges de la Chambre de première

7 instance sont en train de débattre de la question de vous imposer ou de

8 vous affecter un conseil susceptible de vous aider.

9 Nous discutons de cette question avec un objectif en tête, celui d'alléger

10 la tâche qui est la vôtre et pas du tout dans le but de vous réduire au

11 silence. Si véritablement vous vous montrez désireux de respecter vos

12 affirmations, de présenter vos éléments de preuve avec pour seul but la

13 recherche de la vérité. Je pense qu'il est tout à fait rationnel et dans

14 l'intérêt de chacun que vous choisissiez d'être assisté d'un conseil.

15 Je vous demande de bien réfléchir à toutes les questions. Par ailleurs, je

16 vous rappelle que nous disposons d'un document rédigé par un médecin qui

17 affirme que vous n'êtes pas en état physique de vous défendre vous-même. Il

18 faudrait bien que nous agissions suite à la rédaction de ce document, mais,

19 pour l'instant, nous proposons de laisser les choses en l'état et nous vous

20 laissons la possibilité d'éviter que vous soit imposé un conseil en

21 invitant, par exemple, vos collaborateurs d'être présents à vos côtés dans

22 le prétoire pour vous aider. Si vous le souhaitez, les solutions possibles

23 peuvent être souples et vous pourriez peut-être compléter l'interrogatoire

24 principal ou le contre-interrogatoire des témoins grâce aux questions que

25 poserait un conseil que vous accepteriez de nommer.

Page 32336

1 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Kwon, c'est là qu'est toute la

2 différence. C'est là qu'est toute la question. Je ne souhaite pas être dans

3 une situation où je contre-interrogerais mes propres témoins. Je souhaite

4 pouvoir mener le contre-interrogatoire de mes témoins, et ceci est un droit

5 qui est établi par votre règlement, le droit pour moi de me défendre moi-

6 même. C'est là qu'est toute la différence.

7 Par conséquent, je demande l'autorisation de citer mes témoins à la barre

8 et de les interroger moi-même. C'est un droit tout à fait fondamental qui

9 me revient.

10 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, dans les propos

11 tenus par vous avant la pause, vous nous avez cité le Juge May qui était

12 favorable à votre droit de vous défendre vous-même. Moi aussi, j'ai soutenu

13 ce droit, comme l'a fait le Juge Kwon, mais il existe désormais une

14 décision de la Chambre de première instance sur cette question, dans

15 laquelle il est dit clairement que la Chambre de première instance soutient

16 ce droit, mais avec quelques nuances. Je vous demande de réfléchir à ces

17 références que vous avez faites il y a quelques instants devant la Chambre

18 de première instance.

19 Si vous en avez terminé, je donne la parole à Me Kay.

20 M. KAY : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. A notre avis, la

21 question débattue actuellement s'appuie entièrement sur une autre question

22 qui est celle de l'état de santé de l'accusé. Nous disons, et ce, de façon

23 insistante, aux Juges de la Chambre de première instance, que,

24 contrairement à certains des propos de l'Accusation aujourd'hui ici,

25 l'Accusation, dans ses écritures du

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1 26 juillet 2004 au paragraphe 29, admet que le comportement de l'accusé est

2 tel qu'il ne peut être qualifié d'obstruction. Apparemment, ce n'est pas ce

3 que pense le Procureur qui s'est exprimé ici aujourd'hui.

4 Nous connaissons tous l'opinion de l'accusé quant à la légitimité du

5 Tribunal. D'ailleurs, les débats se déroulent dans ce prétoire depuis trois

6 ans, alors que chacun a bien cette idée en tête. A notre avis, la Chambre

7 de première instance a respecté les arguments de l'accusé sur ce point tout

8 en rendant des décisions qui s'opposaient à cet avis. La Chambre de

9 première instance n'a, en aucun cas, tenté de réduire l'accusé au silence

10 sur ce point. En réalité, la Chambre de première instance a respecté

11 l'opinion de l'accusé tout en faisant son travail dans la conduite de la

12 présente affaire. Mes propos n'ont aucunement pour intention d'être

13 insultants à l'égard des Juges de cette Chambre. C'est une liberté

14 d'expression dont dispose la Chambre de première instance. L'accusé, pour

15 sa part, n'est pas un conseil. Il a choisi de se défendre lui-même en

16 déployant des efforts importants pour que chacun puisse savoir pourquoi il

17 a fait ce choix et de façon à ce que cela soit compris dans le contexte

18 général. Finalement, le pouvoir de décision, nous le reconnaissons tous,

19 appartient aux Juges de la Chambre. A notre avis, l'accusé n'a fait preuve

20 d'aucun manque de respect sur ce point.

21 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître Kay, je pense qu'il y a tout de

22 même des limites à la reconnaissance qui peut être faite de l'opinion de

23 l'accusé. Je pense que M. Milosevic a parlé de la Chambre comme étant

24 coupable d'une entreprise criminelle commune il y a quelque temps. Ceci est

25 offensant. La seule raison pour laquelle je ne suis pas intervenu lorsqu'il

Page 32338

1 a parlé dans ce sens, c'est qu'il était en train de prononcer un propos

2 liminaire qu'à mon avis, il doit pouvoir présenter sans interruption. C'est

3 la seule raison, je peux vous en assurer pour laquelle je n'ai pas

4 interrompu, alors qu'à mon avis, il était en train de proférer des insultes

5 pures et simples à l'égard de la Chambre.

6 M. KAY : [interprétation] C'était un propos liminaire. Lorsqu'il en viendra

7 aux auditions de témoins, il sera aisé de constater à la lecture des

8 comptes rendus d'audience, que telle n'est pas sa façon de penser par

9 rapport aux éléments de preuve.

10 Simplement, il est le sujet d'un certain nombre de critiques. Nous aussi,

11 nous l'avons été à certains moments. Il est permis de penser qu'en certains

12 instants, les deux parties peuvent faire preuve d'un enthousiasme exagéré

13 qui s'appuie sur la légitimité des dispositions et des positions qui sont

14 les leurs.

15 A notre avis, il n'y a aucun manque de respect voulu de la part de

16 l'accusé. Il n'a fait preuve d'aucune obstruction au cours des débats. Il a

17 manifesté le plus grand respect à la Cour, hormis à quelques occasions que

18 vous venez d'indiquer, Monsieur le Juge. Mais son avis personnel va dans le

19 sens que je viens d'indiquer.

20 Pour commencer, il a commencé par souligner l'erreur que constituerait le

21 fait de lui retirer son droit de se défendre lui-même. A notre avis, c'est

22 une question tout à fait capitale dont nous devons absolument discuter.

23 L'argument de l'Accusation sur ce point peut sans doute être écarté.

24 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je pense que j'aurais dû être plus

25 clair à votre égard, Maître Kay, en vous disant qu'à mon avis, ce genre de

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1 question doit absolument être discutée par la Chambre lorsqu'elle survient.

2 Je comprends très bien que vous disiez que cela n'a qu'un rapport assez

3 lointain avec l'affectation d'un conseil de la Défense. Il est possible que

4 ce soit une question tout à fait distincte. D'ailleurs, la même chose peut

5 être dite d'autres références citées par M. Nice au sujet de l'attitude de

6 l'accusé.

7 Cependant, il faut que les choses soient dites et qu'elles ne passent pas

8 inaperçues. Maintenant, la décision à adopter par la suite est une autre

9 question.

10 M. KAY : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Juge, pour vos

11 commentaires sur ce sujet. Nous sommes très conscients de cela. Nous

12 connaissons bien la position de la Chambre de première instance.

13 S'agissant des questions relatives à la communication des noms de témoins

14 dont la Chambre a été saisie, si je ne m'abuse, je crois qu'il y a quelques

15 malentendus au sujet des documents déposés par les collaborateurs qui

16 travaillent avec l'accusé. Une liste des témoins ex parte, donc

17 confidentielle a été déposée. Nous avons essayé d'apporter l'aide maximum à

18 ce processus de façon à ce que les éléments de preuve de la Défense

19 puissent commencer à être présentés dans les meilleures conditions. Je

20 crois qu'il y a eu malentendu par quelqu'un quant à la nécessité de fournir

21 ces noms. Une fois que la faute a été reconnue, le juriste du Tribunal, Me

22 Anoya, a déposé le 25 août, je crois, un document sur lequel figure le

23 nombre et les noms des témoins fournis par les collaborateurs de l'accusé.

24 L'Accusation a été mise au courant. A notre avis, ceci n'a rien à voir avec

25 le fond de la thèse des uns ou des autres. L'Accusation sait bien à quel

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1 point ce genre de chose peut s'avérer difficile par moment.

2 Revenons à la question réelle, à savoir, la santé de l'accusé. Les Amici

3 Curiae ont déposé le 13 août nos écritures sur ce point. Nous avons

4 également présenté nos arguments quant au droit de l'accusé de se défendre

5 lui-même; cependant, des renseignements un peu différents viennent d'être

6 fournis à la Chambre de première instance. Par conséquent, la situation est

7 un peu modifiée au vu des derniers rapports médicaux.

8 A bien des égards, cette question, je pense, devrait être traitée en deux

9 étapes. D'abord, la Chambre de première instance accepte-t-elle, sur la

10 base des éléments qui lui ont été fournis, que l'accusé n'est pas en état

11 physique de se défendre lui-même entièrement. Il faut qu'à cela s'ajoute

12 une deuxième étape après avoir entendu les arguments des parties, quant à

13 la meilleure solution à adopter à partir de là. Les Amici Curiae se sont

14 déjà efforcés de remplir leur rôle qui exige d'eux qu'ils soulignent tout

15 ce qui peut être dans l'intérêt de l'accusé ou tous les points de droit qui

16 peuvent être discutés, les objections à des éléments de preuve, toute

17 question de procédure pertinente. A l'heure qu'il est, nous pensons que

18 nous avons fait tout ce que nous pouvions pour présenter tous les arguments

19 qui peuvent être du côté de l'accusé. Quelles que soient les écritures

20 déposées par l'accusé lui-même, nous avons présenté oralement des arguments

21 que les Juges ont désormais entendus à plusieurs reprises.

22 A bien des égards, je parle maintenant de la deuxième étape qui

23 s'impose. Il faut qu'il y ait une deuxième étape dans ce processus de

24 réflexion au sujet du droit de l'accusé à se défendre lui-même. Il est très

25 peu utile que je sois debout ici à vous dire, voilà où s'arrête le

Page 32341

1 problème. Il reste à la Chambre de s'occuper de la deuxième étape; que

2 faire à partir de là ?

3 A notre avis, rien dans le règlement n'empêche l'accusé de continuer à

4 préparer sa défense. C'est seulement si une défaillance est avérée dans le

5 prétoire qu'une solution autre devra éventuellement être envisagée, à moins

6 que l'accusé ne décide de préserver son énergie et sa santé en déléguant la

7 tâche de se défendre à quelqu'un que lui-même. En tout état de cause, il

8 doit être possible pour lui d'avoir recours au service de ses

9 collaborateurs si ceux-ci acceptent de le représenter ou d'avoir recours à

10 un autre conseil nommé par lui-même, M. Milosevic, ou par ses

11 collaborateurs si la question se pose.

12 Le financement du Tribunal est soumis à des règles dont certaines sont

13 fondamentales, à savoir, l'absence d'obstruction au financement d'un

14 conseil nommé par un accusé ou par ses collaborateurs, conseil chargé de le

15 représenter dans le prétoire si telle est la solution adoptée complètement

16 ou en partie. L'expression imposée à un conseil n'est peut-être pas la

17 mieux choisie, mais en tout cas, il s'agit de l'affectation à un conseil de

18 la défense à

19 M. Milosevic pour la présentation de ses éléments de preuve à décharge.

20 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous aurez remarqué, Maître Kay, que

21 nous n'avons pas utilisé le mot imposé. Nous avons parlé d'affecter un

22 conseil dans nos ordonnances.

23 M. KAY : [interprétation] Oui. Les Amis de la Chambre ont remarqué cela

24 tout du long. Ceci était une indication montrant que le Tribunal n'avait en

25 aucune façon l'intention de supprimer le droit de l'accusé à être

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1 représenté. Nous avons entendu la question de M. le Juge Kwon un peu plus

2 tôt ce matin, qui montrait qu'il pouvait y avoir un rôle double joué par

3 l'équipe de collaborateurs de

4 M. Milosevic ou par un conseil en l'espèce. C'est la raison pour laquelle

5 nous défendons cette position. Nous pensons qu'elle devrait être adoptée

6 par M. Milosevic ainsi que par les Juges de la Chambre de première

7 instance. D'ailleurs, tous les avocats qui travaillent dans des affaires

8 importantes où les points en litige sont importants, je pense que le mot

9 litige s'applique ici. Tous les chefs d'équipe de conseil de la Défense

10 dans ce genre de procès, nous l'avons d'ailleurs constaté au moment où

11 l'Accusation préparait ses éléments, et ce, en présence de l'intervention

12 limitée, dirais-je, de la part des Amici Curiae. En tout cas, il y a

13 toujours en principe délégation de tâches s'agissant de l'audition des

14 témoins, s'agissant de mettre au point les stratégies qui s'appliqueront,

15 s'agissant de la présentation des éléments de preuve.

16 Nous demandons instamment que tout cela reste bien entre les mains de

17 M. Milosevic en dépit des rapports médicaux qui viennent d'être fournis.

18 Nous pensons qu'il devrait avoir les mains libres pour prendre sa décision

19 propre et décider de ce qui est dans son intérêt. Il est possible que plus

20 tard son droit à se défendre lui-même soit un peu restreint en raison de

21 l'attitude qu'il a pu avoir durant le procès jusqu'à l'heure d'aujourd'hui.

22 Il est possible qu'il ait franchi une haie de trop en la matière et qu'il

23 ait abusé de ses forces dans le cadre du travail qu'il a accompli, et que

24 quelqu'un doive être nommé au sein de son équipe de collaborateurs ou

25 quelqu'un d'autre dont il donnerait le nom, que quelqu'un se voit contraint

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1 de présenter ces éléments de preuve en son nom.

2 C'est à lui que revient le droit de déterminer dans quelle mesure il

3 souhaite déléguer son travail après qu'il aura décidé de la quantité de

4 travail qu'il veut accomplir lui-même et de ce qu'il convient de faire pour

5 qu'il soit assuré de pouvoir remplir son rôle avec la plus grande

6 efficacité jusqu'au bout.

7 Si la Chambre de première instance modifie sa position quant à une

8 impossibilité complète pour M. Milosevic de se défendre lui-même, nous

9 l'incitons vivement à mettre en œuvre la première étape que j'évoquais tout

10 à l'heure. C'est la première priorité. Il importe de choisir quelqu'un au

11 sein de l'équipe de collaborateurs de

12 M. Milosevic qui pourra partager avec lui le fardeau qui pèse sur lui. Si

13 les deux autres collaborateurs ou trois d'ailleurs aujourd'hui, puisqu'il y

14 en a trois qui auront préparé l'étape actuelle du procès, sont incapables

15 d'accepter cette tâche pour une raison ou pour une autre, quelqu'un d'autre

16 pourrait être nommé pour jouer le rôle de complément de conseil de la

17 Défense lorsque

18 M. Milosevic ne pourra pas remplir cette fonction ou lorsqu'il souhaitera

19 que le fardeau pesant sur ses épaules soit un peu allégé.

20 Dans le cadre du règlement de ce Tribunal, ce genre d'aide peut être

21 financé. Il n'y a aucune raison pour empêcher que ces moyens financiers

22 soient mis à disposition à cette fin. D'ailleurs, tout semble indiqué que

23 le Greffe de ce Tribunal serait très favorable à une telle solution.

24 En tout cas, nous demandons instamment à ce que la première étape soit

25 respectée, à savoir que le choix soit donné à

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1 M. Milosevic, qu'il soit le seul à prendre sa décision et que ce soit

2 seulement après que la décision de M. Milosevic soit connue, que la Chambre

3 de première instance se prononce sur la suite.

4 A moins que je ne puisse aborder immédiatement d'autres questions que les

5 Amici aimeraient évoquer, j'en ai fini pour le moment.

6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci beaucoup, Maître Kay.

7 Monsieur Nice.

8 M. NICE : [interprétation] J'aimerais répondre rapidement. L'accusé parle

9 de ce que nous avons dit d'un risque lié à la préparation des témoins. Le

10 risque dont je parlais était un risque pour sa santé. Il existe un autre

11 risque également, c'est le risque qu'une partie au procès n'ait pas la

12 distance suffisante par rapport au procès pour préparer l'audition de ses

13 témoins de façon neutre et sans passion. En l'espèce, certains témoins

14 pourraient préférer la pratique en vigueur dans d'autres systèmes

15 judiciaires où l'audition des témoins n'est pas préparée par la personne

16 qui est au cœur des débats, mais doit être préparée par un juriste

17 indépendant n'ayant aucun lien avec le procès.

18 Maintenant, si nous parlons de sa fatigue. Sur ce point, l'accusé n'a pas

19 dit que sa capacité physique ne lui permettait pas de préparer ou

20 d'entendre les témoins au rythme requis par nos horaires de travail dans le

21 prétoire, à savoir, dans le cadre d'une semaine de trois jours au minimum.

22 C'est un minimum, bien sûr, pour la Chambre. Il n'a pas contesté les

23 conclusions des médecins selon lesquelles il n'était pas apte physiquement

24 à préparer et à présenter dans leur totalité les éléments de preuve de la

25 Défense.

Page 32345

1 Je ferai observer sur la base d'une note que nous avons reçue de l'accusé.

2 D'ailleurs, qu'il y évoque son peu de désir de voir un autre avocat agir en

3 son nom, et que l'un de ses conseillers dans une interview, publiée par un

4 journal, je crois savoir qu'il s'agit d'un journal allemand que nous

5 pourrons fournir. M. Ognjanovic décrit son propre rôle comme étant très peu

6 différent du rôle d'un conseil de la Défense. L'étape suivante, c'est une

7 étape absolument indispensable, en tout cas, qui correspond au minimum

8 nécessaire.

9 Il a été dit que, dans nos propos, nous avons parlé du comportement

10 de l'accusé comme étant un comportement d'obstruction. C'est vrai. Nous

11 avons également parlé des bonnes manières. Nous avons, à plusieurs

12 reprises, parlé de perte de temps et des auditions de témoins encore plus

13 importantes, d'ailleurs, faites après le dépôt de nos écritures en ce sens

14 que nous sommes confortés dans l'idée que le comportement de l'accusé fait

15 preuve d'obstruction, compte tenu de ce qui a été dit sur le non respect de

16 son traitement médical.

17 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous vous parlez du deuxième rapport

18 du Dr Dijkman ?

19 M. NICE : [interprétation] Oui. Ce document a été déposé en juillet. Cela

20 ne fait que renforcer notre position quant au fait que les observations de

21 l'accusé n'avaient aucunement le but d'être insultantes.

22 Nous n'acceptons pas cela. En dehors des questions évoquées par le

23 Juge Bonomy, il n'est pas besoin de revenir sur les propos tenus contre le

24 Juge et contre le Procureur. L'Accusation se fera fort de dévoiler les

25 véritables intentions de l'accusé, qui, à notre avis, ont pour but de

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1 s'adresser uniquement et directement à un public qui est l'extérieur au

2 prétoire.

3 Sur le sujet de la production des déclarations, excusez-moi, des listes de

4 noms de témoins et de pièces à conviction, la Chambre a déjà entendu ce

5 qu'il en est. Le 18 juin, une ordonnance a été rendue -- excusez-moi,

6 c'était le 17 juin oralement, et le 18 juin, par écrit. L'Accusation a

7 demandé un certain nombre de choses le

8 29 juin, par rapport à cela, par rapport à ce non respect de la décision du

9 5 juillet. C'est seulement au moment de l'audience que l'accusé a dit qu'il

10 ne donnerait que ce qu'il souhaitait donner.

11 Le 16 juillet, les Amis de la Chambre ont demandé 14 jours pour permettre à

12 l'accusé de remplir ses obligations. Cela nous amène à la fin du mois

13 juillet. L'ordonnance de la Chambre est arrivée le

14 28 juillet. Quels que soient les éventuels malentendus, j'admets que Mme

15 Anoya a parlé de malentendus lorsqu'elle a parlé à Mme Dicklich. En dépit

16 de cela, les noms ne nous ont été fournis qu'il y a trois jours. C'est de

17 cela que nous parlions tout à l'heure.

18 Le financement, c'est quelque chose de tout à fait différent; c'est une

19 autre question. Je pense que nous pouvons dire sans risque de nous tromper,

20 que si la Chambre décide de la marche à suivre à l'avenir dans la présente

21 affaire, tout cela sera conditionné par le fait que l'accusé sera assisté

22 d'un conseil par la nomination de ce conseil et par la décision que

23 l'accusé prendra. La question du financement n'est qu'une question

24 secondaire par rapport à tout cela.

25 Le Greffe devra se prononcer sur cette question, donner son avis sur le

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1 problème financier, mais ce n'est pas une question qui devrait nous

2 intéresser aujourd'hui.

3 La différence qu'il y a entre imposer un conseil et affecter un conseil,

4 nous l'admettons depuis le début. Nous l'avons toujours repris dans nos

5 propos, dans nos arguments. Mon collègue, Me Kay, l'a également fait. Nous

6 avons dit au début de notre propos ce matin, que nous admettons tout à fait

7 que les débats soient contrôlés par l'accusé, ceci en rapport avec

8 l'attitude de M. Seselj lorsqu'un conseil lui a été affecté, car il y en

9 avait un au début. Tout cela est possible. Il est possible que quelque

10 chose se passe mal. C'est la raison pour laquelle nous redemandons à la

11 Chambre d'imposer un conseil à l'accusé et ensuite de lui permettre de

12 prendre une décision sensée. Un conseil imposé peut être un avantage plutôt

13 qu'un inconvénient pour le reste de l'affaire. L'accusé pourrait demander

14 d'ailleurs à l'avenir aux Juges de lui affecter un conseil, et la présence

15 de ce dernier garantirait deux choses.D'abord, l'avancé du procès en

16 première instance qui ne pourrait pas être paralysé. Deuxièmement,

17 l'accusé, parlant par le biais de son conseil, respecterait les bonnes

18 manières dans le prétoire, garderait le silence lorsque c'est nécessaire et

19 ne pourrait plus agir pour faire obstruction au déroulement du procès,

20 puisque sa défense serait entre les mains d'un conseil indépendant et

21 objectif.

22 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci.

23 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Juge.

24 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, Monsieur Milosevic.

25 L'ACCUSÉ : [interprétation] Tout cela est inconvenant. J'utiliserais

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1 d'ailleurs un autre mot plus négatif, mais ce n'est pas nécessaire. Je m'en

2 tiens au mot "d'inconvenant" -- extrêmement inconvenant. La proposition

3 faite par M. Nice, c'est que vous me menaciez au cas où je ne tomberais pas

4 malade, parce que si je tombe malade, vous n'agirez pas différemment, je

5 suppose, de n'importe quel Tribunal sur cette planète. Vous ne direz pas

6 tel ou tel jour, nous ne travaillons pas. Mais la menace demeure qu'une

7 autre personne, à tout moment, puisse assumer les droits de ma défense à ma

8 place. Ceci n'a aucun sens. Je vous en prie que tout soit clair.

9 M. Nice dit que je n'ai pas contesté le fait que j'étais malade. Bien

10 sûr, je ne le conteste pas, mais j'ai été malade pendant la présentation

11 des éléments de preuve de l'Accusation également. Il y a eu 300 jours

12 d'audience, 300 jours de travail. Je ne sais combien de témoins ont été

13 entendus. Je vous en prie. Si quiconque nous regarde de l'extérieur, tout

14 cela est transparent et limpide. A l'époque, la question de ma capacité n'a

15 pas été évoquée du point de vue de l'exercice de mes droits, du point de

16 vue de l'exercice que vous m'avez accordés et qui, dès lors,

17 m'appartiennent au terme des conventions internationales.

18 Aujourd'hui, alors que c'est mon tour qui arrive, tout d'un coup, la

19 question de ma capacité à me défendre est évoquée. Vous ne pouvez ôter le

20 droit à quelqu'un de se défendre lui même s'il tombe malade. Si cette

21 personne tombe malade, le travail s'interrompe. C'est tout.

22 Qu'une autre chose soit tout à fait claire. Le droit de me défendre

23 moi-même est un droit de principe. Je n'accepterai aucun décret de votre

24 part qui me forcerait à renoncer à ce droit entièrement. J'insiste pour que

25 vous me donniez la possibilité d'interroger mes témoins. Je suis tout à

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1 fait catégorique sur ce point.

2 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui. Nous avons entendu vos

3 arguments.

4 [La Chambre de première instance se concerte]

5 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Nous prenons une pause de dix

6 minutes pour considérer ce point.

7 --- La pause est prise à 13 heures 26.

8 --- La pause est terminée à 13 heures 45.

9 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] La Chambre de première instance n'a

10 pas pu parvenir à une décision dans le temps qui nous était imparti et dans

11 le temps que nous avions fixé pour la levée de l'audience. Si la Chambre de

12 première instance devait décider d'affecter un conseil, la Chambre souhaite

13 que les parties se préparent pour demain matin leurs arguments portant sur

14 la question d'une telle nomination, à savoir que les modalités d'une telle

15 affectation d'un conseil soit bien claire.

16 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, oui.

17 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je vous prie de tenir compte de la chose

18 suivante. Pendant trois ans, les mêmes médecins ont considéré que j'étais

19 apte d'un point de vue médical, apte à agir. D'ailleurs, vous avez pu vous

20 en rendre compte, vous-même. Vous avez pu le constater, voire même M. Nice,

21 en annexe de sa requête demandant que l'on ne raccourcisse les délais, et

22 dans toute la mesure du possible, lui aussi, il a considéré que j'étais

23 apte.

24 Pendant trois ans, les mêmes médecins considèrent que je suis capable. Or,

25 ce qui se passe, c'est qu'il arrive de Belgique, du pays qui accueille le

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1 siège de l'OTAN, un médecin qui dit que je ne le suis pas, c'est un médecin

2 indépendant, nous dit-on. Permettez-moi d'émettre quelques doutes quant à

3 ces conclusions médicales.

4 Je vous prie de faire droit à ma requête, que des experts l'évaluent, mais

5 je demanderai que ce soit un expert venu de Russie, de Serbie, de Grèce.

6 Vous êtes libre de rajouter deux noms, par exemple, que vous aurez choisi

7 vous-même, et, par la suite, vous saurez de quoi il retourne. On est en

8 train de mystifier les choses qui sont faites toutes simples.

9 Je perçois ceci comme une manipulation. On cherche à me priver de mon droit

10 de prendre la parole ici et de faire entendre la vérité. C'est cela la

11 substance de la chose qui nous intéresse.

12 M. Nice dit à l'appui de son affirmation qu'il convient de

13 m'assigner, au fait de m'imposer un avocat. Il dit que je n'ai pas

14 suffisamment de distance parce que je suis partie intéressée.

15 Par exemple, ce que je pense c'est que l'autre partie a trop de distance,

16 eu égard à la vérité. Or, je ne peux pas m'ingérer dans sa manière d'agir

17 comme est-ce qu'elle fera son travail ou non. Elle ne peut pas le faire non

18 plus s'agissant de moi. Elle ne peut pas me priver de mes droits, cela

19 aussi c'est une question de principe.

20 Encore une fois, mon droit à me défendre moi-même, je n'accepte ni comme le

21 réduise, ni qu'on me le prive de ce droit. Je vous prie de garder cela à

22 l'esprit. Quant au reste, vous êtes libre de l'évaluer. Je reçois ici des

23 médicaments que vos employés me transmettent -- me donnent. Compte à savoir

24 que ce qui s'y passe, je ne peux pas le dire, mais je peux amener toutes

25 les personnes qui sont présentes à un étage à l'unité de détention. Ils

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1 peuvent vous citer le cas où il y a eu un échange de nourriture. La

2 personne qui réside à côté de moi aurait reçu les aliments qui me sont dus.

3 Je ne sais pas s'il y a une différence entre ces différends d'aliments,

4 mais, apparemment, il y a eu tout un remue-ménage à cause de cela.

5 Je suis prêt à vous amener tous les résidents d'un étage au quartier

6 pénitentiaire pour qu'ils vous l'attestent. Vous savez, pendant trois ans,

7 on affirme une chose; soudainement, on affirme une autre chose. Il se peut

8 qu'il y ait des doutes qui se présentent -- peut-être sont-ils infondés,

9 mais peut-être sont-ils fondés.

10 Je vous en prie.

11 [La Chambre de première instance se concerte]

12 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Nice, concernant l'argument

13 émanant de l'accusé à savoir qu'il ait le droit de faire venir un expert

14 concernant la question de sa santé, avez-vous quelque chose à ajouter ?

15 M. NICE : [interprétation] En premier lieu, je suis en train de rechercher

16 pour savoir si cet argument présenté tardivement a fait l'objet d'une

17 ordonnance rendue précédemment par vous-même, n'a pas été respecté par lui.

18 Je remercie, Mme Graham, encore une fois, d'avoir eu ceci à l'esprit car

19 ceci m'a échappé.

20 Je vous demande quelques instants, s'il vous plaît, Monsieur le Président.

21 [Le conseil de l'Accusation se concerte]

22 M. NICE : [interprétation] Monsieur le Président, ce qui me préoccupe est

23 de savoir si, oui ou non, une ordonnance porte sur ces questions, en

24 particulier, où il est traité de ces questions concernant l'accusé ou ces

25 questions n'ont pas été traitées, autrement dit, que l'accusé attendait le

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1 dernier moment pour voir d'où le vent venait. Quand bien même il n'y a pas

2 d'ordonnance qui a été rendue à cet égard, à savoir, portant sur sa non-

3 conformité, la manière dont il soulève cette question au moment où il a lu

4 tous ces rapports et au moment où il présente cet argument n'a rien

5 d'anodin.

6 Je recherche cette ordonnance. Peut-être que les Amici pourraient

7 m'aider à rechercher cette ordonnance. Je l'ai vu récemment.

8 En ce qui concerne le fonds de la question qu'il vient de soulever,

9 non, c'est beaucoup trop tard. La question de sa santé et la question de

10 son éventuelle ou manipulation certaine de son régime médicamenteux est

11 quelque chose qui lui a été présenté et par ses collaborateurs qui sont

12 quelque peu différents d'avocats qui le représentent, comme il a dit depuis

13 des mois. Ils savent pertinemment que l'accusé est un homme très

14 intelligent, qui sait très bien comment utilisé sa présence devant la

15 Chambre, et il sait pertinemment que c'est un point qui va être soulevé

16 devant la Chambre et qu'il faut du temps pour préparer cette question.

17 Cette allégation portant sur un médecin venant d'un pays de -- où se

18 trouve le siège de l'OTAN, Bruxelles, est quelque chose qui est tout à fait

19 absurde et la Chambre doit se satisfaire des éléments qui ont été

20 présentés.

21 La Chambre doit également faire très attention de vérifier les examens

22 médicaux contre un deuxième avis. L'ordonnance que j'avais à l'esprit est

23 une ordonnance qui est datée du 6 août où l'accusé et l'Amici Curiae

24 avaient l'obligation de déposer des arguments dans un délai de deux

25 semaines sur le rôle de la nomination d'un conseil. C'est une ordonnance

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1 publique. Le rôle du conseil --

2 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous n'avez que quatre minutes.

3 M. NICE : [interprétation] Assurant une représentation équitable de la

4 cause de la Défense où les instructions du conseil de la Défense. Le rôle

5 des Amici curiae qu'il devait jouer dans ce cas. Monsieur le Président,

6 cette ordonnance même si elle ne précise pas d'éléments contraires

7 concernant la question médicale permet à toute personne intelligente de

8 comprendre qu'il est nécessaire de se préparer à cette éventualité et qu'il

9 est important de s'y préparer.

10 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Kay.

11 M. MAY : [interprétation] Il n'y a aucune ordonnance demandant à l'accusé à

12 présenter un rapport médical subsidiaire. Ceci a été présenté par l'accusé

13 à un stade -- à un moment tardif. Il s'agit d'une question importante que

14 la Chambre de première instance voudra bien examiner et donner à l'accusé

15 peut-être sept jours pour lui donner le temps de répondre à cette question.

16 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Nous allons lever l'audience et

17 reprendre demain matin. Monsieur Milosevic, pourquoi soulevez-vous cette

18 question si tardivement, je vous prie ?

19 L'ACCUSÉ : [interprétation] La raison est qu'il me semble, Monsieur

20 Robinson, qu'il s'agit là d'une manipulation. Nous sommes en présence d'une

21 manipulation car si, pendant trois années d'affilées

22 --

23 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vous arrête là. S'il vous plaît,

24 les rapports médicaux vous ont été transmis, donc vous aviez énormément le

25 temps nécessaire d'examiner la chose. Or, vous ne l'abordez qu'au dernier

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1 moment. Il est important que vous nous expliquiez les raisons de cette

2 réaction tardive si vous voulez qu'on prenne en considération votre

3 requête.

4 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Robinson, c'est parce que, jusqu'à

5 présent -- jusqu'à aujourd'hui, jusqu'à ce que j'entende toutes ces

6 explications que j'estime être tout à fait tendancieuses et illogiques, il

7 ne m'est absolument pas venu à l'esprit cela. Je ne suis probablement pas

8 aussi intelligent que semble estimer M. Nice. Cela ne m'a pas effleuré que

9 cette possibilité puisse se présenter, que vous m'imposiez un avocat. Ceci

10 ne m'est absolument -- ne m'est jamais venu à l'esprit. La situation était

11 claire et précise d'après moi, à savoir que c'était un droit que j'avais

12 qui ne pouvait m'être, donc je ne pouvais pas être privé. Or, maintenant,

13 j'entends tous ces exemples, à savoir, les interrogatoires menés par des

14 personnes accusées de délits sexuelles, ce qui n'a rien à voir avec ce dont

15 nous sommes en train de parler. Quand je vois ce que l'autre partie est en

16 train de fabriquer, à savoir, monter des arguments dont l'objectif est de

17 me priver de ce droit, naturellement, je commence à me demander s'il n'y a

18 pas là une manipulation. Il me semble que ma réaction est tout à fait

19 logique et normale. Cela ne m'est pas venu à l'esprit que cette situation

20 puisse se présenter, que vous m'imposiez un avocat. Ceci est hors de

21 question. Je ne l'accepterai pas.

22 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Kay, d'après votre

23 argument, vous souhaitez que l'accusé ait une semaine pour répondre, de

24 façon à fournir les éléments médicaux.

25 M. KAY : [interprétation] Je crois qu'il n'a reçu aucun conseil de ses

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1 collaborateurs sur ce sujet, d'après les éléments d'information que j'ai.

2 Je crois que cela ne lui a jamais effleuré l'esprit, le fait qu'on puisse

3 lui enlever son droit à l'autodéfense. Il est fort possible que l'on n'ait

4 pas consacré l'attention nécessaire à ce sujet par les personnes, en tout

5 cas, qui l'ont conseillé.

6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vous remercie. Nous allons lever

7 l'audience et aborder ces questions demain matin à 9 heures.

8 --- L'audience est levée à 14 heures 00 et reprendra le jeudi 2 septembre

9 2004, à 9 heures 00.

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