Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 Le mardi 8 mars 2005

2 [Audience publique]

3 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

4 [L'accusé est introduit dans le prétoire]

5 --- L'audience est ouverte à 9 heures 04.

6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vais évoquer deux questions

7 d'intendance avant de commencer. Tout d'abord, jeudi matin, la Chambre de

8 première instance siégera dans une autre affaire à 9 heures. Nous devrions

9 en terminer avant 10 heures 30, si bien que les parties sont priées de se

10 tenir prêtes à siéger dans cette affaire à 10 heures 50, c'est-à-dire, le

11 début de la deuxième session de travail.

12 En deuxième lieu, nous n'allons pas avoir d'interprétation en allemand pour

13 demain. Cela n'a pas été prévu, mais d'après ce que je crois savoir et ce

14 que j'espère nous en terminerons de l'audition du témoin aujourd'hui avec

15 la coopération de M. Milosevic et de M. Nice.

16 Monsieur Milosevic.

17 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci, Monsieur Robinson.

18 LE TÉMOIN: DIETMAR HARTWIG [Reprise]

19 [Le témoin répond par l'interprète]

20 Interrogatoire principal par M. Milosevic : [Suite]

21 Q. [interprétation] Monsieur Hartwig, nous nous étions arrêtés aux

22 expériences qui sont les vôtres dans le temps de Pristina. Quelle a été

23 l'attitude des Albanais ordinaires vis-à-vis de la situation politique ?

24 R. Il faut faire la différence entre ceux qui ont déterminé l'opinion

25 publique et, d'autre part, ceux qui ne s'intéressaient qu'à une chose,

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1 c'est-à-dire survivre. L'Albanais moyen était très peu intéressé par la

2 politique. Ce qu'il intéressait, c'était de trouver le moyen de survivre et

3 ceci sans être gêné par des influences extérieures, pouvoir mener une vie

4 normale. Cela était la position de l'Albanais moyen.

5 Il y avait également aussi l'un ou l'autre personne qui reprenait les

6 slogans ou qui suivait les slogans et les promesses des hommes politiques

7 albanais, qui promettaient une vie meilleure dans des conditions

8 différentes.

9 R. Selon vos connaissances, les Albanais se sont-ils vus priver de

10 certains droits ?

11 R. En ce qui me concerne, je n'ai entendu que des reproches de nature

12 générale, oui, les Serbes ont fait ceci, les Serbes ont fait cela. En ce

13 qui me concerne personnellement, lors de mes discussions, je n'ai entendu

14 aucuns reproches dirigés contre une personne en particulier ou contre des

15 services particuliers ou des administrations particulières dirigées par les

16 Serbes.

17 Q. Monsieur Hartwig, avez-vous été en position de poser la question à

18 quelqu'un ? A demander si on avait privé quelqu'un de quelque chose, et si

19 oui, de quoi ?

20 R. Il y a deux cas sur lesquels je me suis renseigné en particulier. Il y

21 a premièrement eu les reproches selon lesquels, à l'université, les

22 Albanais n'avaient pas le droit d'utiliser leur propre langue. J'en ai

23 parlé avec le recteur de l'université, et le recteur m'a déclaré qu'au

24 cours du premier semestre, dans le cadre du programme et dans le cadre des

25 dispositions administratives, on parlait serbe, mais qu'en dehors de cela,

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1 il était toujours possible, suivant l'appartenance ethnique du professeur,

2 de parler albanais.

3 Le deuxième cas était le suivant : nous avons été invités dans la maison

4 d'un couple, qui étaient deux médecins et on nous avait dit que l'homme

5 avait perdu son travail parce qu'il était Albanais, qu'il en allait de même

6 pour sa femme, ainsi que pour leur fille et pour leur fils. Au cours d'une

7 conversation, j'ai appris que le père n'avait pas perdu son emploi à cause

8 de son appartenance ethnique mais parce qu'il avait atteint la limite

9 d'âge, qu'il était en âge de partir à la retraite. Tant qu'à la mère,

10 pendant cette période, elle avait abandonné son poste à l'université pour

11 être à côté de son mari, quant au fils, il a eu des problèmes à l'hôpital

12 parce qu'il avait refusé de soigner un malade serbe et on l'a mis à pied,

13 et quant à la fille, elle n'avait pas de travail parce qu'elle était encore

14 en formation de spécialisation médicale.

15 C'est une Albanaise qui m'a raconté cela, c'est la fille qui m'a raconté

16 tout cela, et tout cela m'a paru tout à fait crédible.

17 Q. Dites-moi quelque chose maintenant au sujet de l'attitude de la

18 population albanaise et de certaines catégories de cette population

19 albanaise vis-à-vis votre mission. Je vais être

20 concret : y a-t-il eu des cas où on aurait arrêté les véhicules de votre

21 mission et cela aurait, en l'occurrence, était fait par des membres de

22 l'UCK ?

23 R. Au Kosovo, les seuls qui nous ont interceptés ou arrêtés, ou en tout

24 cas, moi, personnellement, ce sont des membres de l'UCK qui se trouvaient

25 dans les zones contrôlées par l'UCK, et qui avaient érigé des points de

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1 contrôle, à cet endroit ils procédaient à des contrôles. Mon passeport

2 diplomatique ne me servait à rien, c'était plutôt une question de rapport

3 personnel qui résoudrait la situation, mais il n'y a jamais eu

4 d'affrontements directs à ces occasions. Cependant on nous arrêtait, on

5 nous interceptait et une fois je me souviens que l'on a tiré sur notre

6 voiture, mais ce n'était pas un problème parce que nous disposions de

7 véhicules blindés.

8 Q. Quand vous dites que des gens vous ont tiré dessus, pouvez-vous nous

9 dire exactement qui est-ce qui vous a tiré dessus ?

10 R. Je ne sais pas qui a tiré, mais c'était soit dans une zone contrôlée

11 par l'UCK ou alors dans d'autres cas, mais pas dans mon cas personnel. Cela

12 est arrivé également dans la région de Stimlje.

13 Q. D'après vous, l'UCK est une organisation terroriste ou pas ?

14 R. Je ne peux la comparer qu'avec une organisation qui a fait parlé de soi

15 dans mon pays, il y quelques années, la Faction de l'armée rouge la FAR,

16 qui voulait instaurer une nouvelle république et qui a été désignée comme

17 une organisation terroriste.

18 Q. Comment qualifieriez-vous les objectifs et les méthodes utilisés par

19 l'UCK ?

20 R. Quand vous avez un groupe qui essaie d'obtenir des modifications de la

21 vie politique de manière pacifique, à ce moment-là, on peut parler

22 d'organisations démocratiques. Or, les moyens qui étaient utilisés

23 n'étaient pas des moyens démocratiques. A mon avis, il était clair qu'on

24 sortait complètement de la légalité et les actions qui étaient entreprises

25 par ces moyens, sortaient également du cadre légal.

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1 Q. Vous avez eu l'occasion de rencontrer, comme vous nous l'avez déjà dit,

2 bon nombre de ces membres de l'UCK. Quelle serait la qualification que vous

3 adopteriez à l'égard de la direction de l'UCK ?

4 R. Malheureusement, je n'ai pas rencontré les plus importants dirigeants

5 de l'UCK. Je n'ai rencontré que ce que l'on peut appeler le "middle

6 management", les dirigeants de moindre envergure. C'étaient des gens très

7 simples, des chefs militaires très simples qui voulaient simplement une

8 chose. Ils voulaient que les Albanais du Kosovo soient les seuls en mesure

9 de décider de ce qui se passait au Kosovo.

10 Q. Quelle était l'attitude de ces dirigeants de l'UCK, vis-à-vis des

11 Serbes et des autres populations non-albanaises.

12 R. Personnellement, je crois d'ailleurs que je l'ai déjà dit, j'ai dit que

13 dans la constitution du Kosovo, la constitution non officielle du Kosovo,

14 il y avait un paragraphe qui disait : pas avec les Serbes, pas sous les

15 Serbes. C'était de cette manière qu'on envisageait l'avenir. On avait rien

16 dit en revanche au sujet des autres communautés ethniques. Mais plus tard

17 simplement, j'ai lu des choses à ce sujet dans les journaux. Il s'agit

18 d'information de deuxième main que je ne pense utile de vous communiquez.

19 Q. Quelles sont les connaissances qui sont les vôtres, datant de cette

20 période que vous avez passée au Kosovo et Metohija, qui est-ce qui a été à

21 l'origine des problèmes auxquels vous avez fait face pendant que vous étiez

22 là-bas.

23 R. Je crois que l'origine des troubles --

24 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Ne répondez pas à cette question.

25 C'est une question qui est beaucoup trop générale. On vous invite

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1 simplement à exprimer une simple opinion.

2 M. MILOSEVIC : [interprétation]

3 Q. Monsieur Hartwig, d'après ce que vous en savez, d'après ce que vous

4 avez pu voir et apprendre vous-même, qui est-ce qui a été à l'origine des

5 problèmes au Kosovo et Metohija ?

6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] C'est du pareil au même. Veuillez

7 passer à une autre question, Monsieur Milosevic. Essayons de conclure

8 maintenant.

9 M. MILOSEVIC : [interprétation]

10 Q. Monsieur Hartwig, y a-t-il eu des attaques de l'UCK sur des postes de

11 police ?

12 R. Non seulement contre des postes de police, mais aussi contre des

13 patrouilles de la police et je crois qu'au bout du compte, la stratégie de

14 ces attaques était de s'attaquer au pouvoir exécutif parce qu'on pouvait

15 compter sur des mesures et des actions qui donneraient une image négative

16 du pouvoir.

17 Q. Est-ce que vous pourriez étoffer votre propos davantage, je vous prie.

18 R. Quand vous avez une attaque contre un civil, à ce moment-là dans un

19 pays où tout le monde a une arme, à ce moment-là il peut y avoir un échange

20 de tirs, c'est-à-dire, un échange de tirs, une fusillade entre

21 particuliers. Lorsque le pouvoir exécutif intervient à ce moment-là, il ne

22 s'agit plus d'une action entre deux individus mais on peut parler d'actions

23 collectives avec l'intervention d'une unité, par exemple de la police ou

24 des forces de sécurité qui s'attaquent non pas à un individu, à une

25 personne mais à un groupe de personnes.

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1 Q. Je dois reconnaître que ceci ne me semble pas être suffisamment clair.

2 Est-ce que les forces de l'ordre ont réagi vis-à-vis des attaques lancées

3 par l'UCK ?

4 R. D'après ce que je sais, la plupart des actions entreprises par les

5 forces de sécurité étaient des réactions suite à des incidents ou à des

6 événements qui avaient été provoqués par l'autre côté, par la partie

7 adverse.

8 Q. L'UCK se dissimulait-elle derrière les civils ?

9 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Non, non, vous ne pouvez pas poser

10 une telle question qui manifestement est une question à caractère

11 directeur.

12 L'ACCUSÉ : [interprétation] Fort bien.

13 M. MILOSEVIC : [interprétation]

14 Q. Monsieur Hartwig, vous êtes-vous entretenu avec des dirigeants de la

15 police, de notre police au Kosovo, pour ce qui est des risques encourus par

16 les civils suite à des provocations de la part l'UCK ?

17 R. Oui, tout à fait. J'en ai déjà parlé quand j'ai parlé du général Jukic.

18 J'ai également parlé avec le chef de la police de Malisevo. Je me suis

19 entretenu longuement avec lui de cette question avec lui au sujet des

20 risques qui étaient courus, du fait des escarmouches ou des attaques contre

21 l'exécutif et des risques encourus, à ce moment-là, par la population

22 civile.

23 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, vous avez

24 demandé à M. Hartwig si les forces de l'ordre avaient réagi aux attaques

25 des forces de l'UCK. Il a répondu que la plupart des actions entreprises

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1 étaient des réactions suite à des événements qui trouvaient leur origine de

2 l'autre côté.

3 Vous trouveriez plus d'arguments à l'appui de votre thèse si vous

4 pouviez demander à M. Hartwig d'identifier des incidents particuliers au

5 cours desquels les forces officielles, les forces de sécurité, ont réagi à

6 certains incidents, parce qu'à ce moment-là, on peut parler d'une stratégie

7 de défense ou d'autodéfense. Mais pour l'instant, on reste dans les

8 généralités. L'acte d'accusation qui vous concerne comprend de très

9 nombreuses allégations relatives à l'emploi de la force et des actions de

10 violence de la part des forces de sécurité. Il serait donc dans votre

11 intérêt de pourvoir présenter des éléments de preuve démontrant que ces

12 actes de violence, ces crimes reprochés, en fait, constituaient des

13 réactions tout à fait proportionnées à des actions entreprises par l'UCK.

14 M. MILOSEVIC : [interprétation]

15 Q. Monsieur Hartwig, vous venez d'entendre M. Robinson qui a fort bien

16 expliqué la chose. Je vous demanderais donc de nous confirmer ou infirmer

17 le fait que le comportement des forces de l'ordre constituait des réactions

18 aux attaques de l'UCK.

19 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Non, Monsieur Milosevic. Il y a un

20 acte d'accusation qui vous concerne dans lequel figurent des allégations

21 bien particulières. On parle de tels incidents qui ont eu lieu dans un

22 village, dans une municipalité, incident au cours duquel un certain nombre

23 de personnes ont été, soit rouées de coups, soit tuées, et cetera. Cela ne

24 sert à rien de faire des remarques de nature générale, ce n'est pas ce qui

25 nous intéresse ici.

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1 Quand vous préparez vos témoins, lors de vos séances de récolement,

2 en vous préparant, vous auriez dû essayer de vous renseigner pour savoir

3 s'il était en mesure de vous fournir ce type d'information. Il était quand

4 même sur place, dans le cadre de ses activités au sein de la MCCE. Il est

5 possible qu'il ait pu voir des rapports qui confirmeraient le fait que les

6 forces de sécurité agissaient en toute responsabilité, réagissaient à des

7 attaques menées par l'UCK.

8 M. MILOSEVIC : [interprétation]

9 Q. Monsieur Hartwig, pouvez-vous nous donner des exemples d'incidents où

10 les forces de l'ordre ont réagi à des attaques de l'UCK ?

11 R. Tout ceci s'est passé il y a bientôt six ans. Je sais bien que j'ai

12 pris des notes et je dispose encore de ces notes, des notes dans lesquelles

13 j'ai parlé d'attaques de l'UCK, où j'ai décrit ces attaques. Suite à ces

14 attaques, il y a eu des personnes qui ont été tuées ou blessées en

15 réaction. Mais je ne peux pas vous dire dans quel endroit cela s'est passé,

16 de quels incidents particuliers il s'agissait. Mais, en tout cas, il

17 s'agissait d'attaques menées aussi bien contre la police que contre

18 l'armée, en partie.

19 Un exemple peut-être, si vous me le permettez : à Kotlina, Ivaya, et

20 Gajra, il a été dit, à la radio, qu'il y avait eu une action arbitraire

21 menée par les forces de sécurité à cet endroit. Lors d'une discussion que

22 j'ai eue, j'ai entendu dire que, depuis une hauteur, depuis Kotlina je

23 crois, mais je ne peux pas me prononcer avec certitude sur l'exactitude de

24 ce nom, mais on avait expliqué qu'on avait tiré à partir des collines sur

25 des ponts, et que cette action contre ces trois villages pouvait être

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1 considérée comme une réaction.

2 Q. Monsieur Hartwig, je comprends parfaitement bien le fait qu'il se soit

3 écoulé assez longtemps depuis. Mais compte tenu de la chronologie des

4 événements du temps où vous étiez chef de cette mission d'observation au

5 Kosovo, pour ce qui est de la mission européenne, je vais vous citer

6 certains événements, et on verra si vous en avez souvenance ou pas. Nous

7 allons commencer par janvier 1999, par exemple, je vais sauter certains

8 éléments.

9 On dit, le 5 janvier, une patrouille du MUP est tombée dans une

10 embuscade à Suva Reka. Quatre policiers ont été grièvement blessés. Vous

11 souvenez-vous de cet événement-là ?

12 R. Je crois qu'il s'agit d'une des premières embuscades de grande

13 envergure. Si je ne me trompe, c'était à côté de Suva Reka, dans les

14 environs.

15 Q. Merci, Monsieur Hartwig. Est-ce que vous vous souvenez du 8 janvier ?

16 Je vais sauter, une fois de plus, quelques journées. Ce jour-là, trois

17 officiers du MUP ont été tués dans une embuscade, et trois civils ont été

18 blessés au moment où quelques huit soldats - et je parle du 8 janvier

19 seulement - ont été enlevés par --

20 M. NICE : [interprétation] Si l'accusé donne lecture d'un document dont

21 dispose la Chambre par ailleurs, j'imagine que la Chambre souhaiterait

22 savoir de quel document il s'agit. Si l'accusé est en train de donner

23 lecture de l'extrait d'un des documents présentés par le truchement de ce

24 témoin, il faudrait nous indiquer où cela se trouve. Il me semble que

25 l'accusé est en train de nous donner plus de détails que dans les documents

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1 qui ont été présentés afin d'être produits ou utilisés avec ce témoin.

2 J'aimerais bien savoir, parce que je ne sais pas pour l'instant, quel

3 document l'accusé est en train de lire.

4 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, de quel document

5 êtes-vous actuellement en train de donner lecture ? Est-ce que vous êtes en

6 train de citer un document ?

7 L'ACCUSÉ : [interprétation] Non. Je donne lecture de mes notes et j'ai là

8 une chronologie des événements, toujours s'agissant de la période où M.

9 Hartwig était à la tête de cette mission d'observation. Je suppose qu'il se

10 souvient de la journée du 8 janvier où l'on a tué trois policiers et huit

11 soldats de l'armée de la Yougoslavie, et où on a enlevé, dans la même

12 journée, quelques --

13 M. NICE : [interprétation] Permettez-moi d'interrompre une fois de plus. A

14 ce moment-là, il dirige le témoin. Si vous prenez l'intercalaire 2 des

15 documents qu'on veut verser par le truchement du témoin, vous verrez un

16 bref résumé de ces sujets. S'il voulait en parler, il pourrait s'y prendre

17 en disant, Là je lis le document qui porte la date du 14 juin 1999, me

18 semble-t-il, ou là, on a en fait la date du 6 janvier 1999. C'est

19 l'intercalaire 2 ?

20 M. LE JUGE KWON : [interprétation] L'intercalaire 3.

21 M. NICE : [interprétation] Excusez-moi, je n'ai pas la version avec les

22 intercalaires, c'est dans mon bureau en haut. C'est bien l'intercalaire 3.

23 Si vous preniez le dernier paragraphe de cette page, on fait

24 référence à trois policiers tués dans une embuscade tendue par l'UCK. On

25 peut faire remonter cela au mois de janvier. Si l'accusé veut obtenir des

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1 détails de ce témoin, il peut le faire comme suit, sans donner lui-même

2 lecture du document qu'il a, et il peut demander au témoin de donner

3 davantage de détails. Mais il ne veut pas se contenter de donner lecture de

4 sa version personnelle. Ce n'est pas satisfaisant pour les Juges.

5 L'ACCUSÉ : [interprétation] Très bien. Je vais alors m'en tenir aux

6 pièces à conviction, et cela suffira largement pour ce qui est d'expliquer

7 la situation.

8 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, appuyez-vous sur ces

9 pièces.

10 M. MILOSEVIC : [interprétation] Fort bien, Monsieur Robinson.

11 Q. M. Nice a parlé de l'intercalaire 3. Je ne vais pas m'attarder au

12 fond de la page, là où il a donné un descriptif lui-même, mais je vous

13 demanderais, Monsieur Hartwig, de nous dire au préalable ce que signifie

14 WASS ?

15 R. C'est une abréviation qui signifie évaluation hebdomadaire, à savoir un

16 rapport que j'envoyais toutes les semaines au siège principal de ma mission

17 et qui se composait des rapports quotidiens que je recevais des équipes,

18 ainsi que des entretiens, des observations et des informations

19 supplémentaires que j'avais reçus.

20 Q. Monsieur Hartwig, cet aperçu hebdomadaire, comme vous le qualifiez,

21 porte la date du 21 janvier 1999. Je me réfère à l'intercalaire 3.

22 Maintenant, j'attirerais votre attention sur la page 2, parce qu'on y donne

23 un bon nombre d'événements et on y voit les relations, la corrélation avec

24 la Mission d'observation de l'Union européenne.

25 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Cela doit être à l'intercalaire 4,

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1 Monsieur Milosevic, si vous parlez du 21.

2 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je regrette, chez moi c'est dans l'intercalaire

3 3, mais il se peut que je me sois trompé dans la répartition des pages par

4 intercalaire.

5 M. MILOSEVIC : [interprétation]

6 Q. Oui, revenons. On dit, "Weekly Assessment" donc WASS, 16 au 13 janvier.

7 A l'intercalaire 3, on dit : "Explosion de grenades à main devant un café

8 et l'assassinat de l'exploitant serbe de l'entreprise d'électricité,

9 l'assassinat de trois policiers dans une embuscade tendue par l'UCK, ainsi

10 que la capture de huit soldats de la VJ par l'UCK."

11 C'est ce qui figure dans votre rapport hebdomadaire. Est-ce que cela vous a

12 rafraîchi la mémoire au sujet desdits événements, puisque cela est repris

13 dans votre rapport hebdomadaire ?

14 R. Je me souviens maintenant de l'assassinat du directeur serbe de la

15 centrale électrique d'Obilisc, oui effectivement. Pour ce qui est d'un

16 assassinat, quelles en furent les conditions, apparemment, cela se serait

17 passé au cours d'une embuscade. Là, je ne connais pas les détails. Ce que

18 je sais, c'est que ces huit soldats, si je me souviens bien, avaient

19 utilisé un tronçon de route qui se trouvait être contrôlé par l'UCK. L'UCK

20 les a fait prisonniers et cela avait provoqué un certain émoi dans la

21 communauté internationale. Mais pour ce qui est de la capture, des

22 conditions particulières qui l'ont entraînée, comment on a attaqué des

23 patrouilles ou comment certains policiers ont perdu la vie, là, je ne sais

24 pas exactement quels sont les détails précis.

25 Q. Fort bien. Mais je suppose que cette explosion d'une grenade devant la

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1 cafétéria de Pristina et l'assassinat de ce directeur de la centrale

2 électrique d'Obilisc, ainsi que le meurtre de trois policiers dans une

3 embuscade et l'enlèvement de trois soldats, ce sont des événements qui ont

4 sans doute été recensés et vérifiés par vos observateurs. En a-t-il été

5 ainsi ou pas, suivant ce que nous dit ce rapport hebdomadaire ?

6 R. Ce qui est certain, c'est qu'ici on ne propage pas des rumeurs. Je me

7 souviens de cette attaque à la grenade à main à Pristina. D'après ce dont

8 je me souviens, cela a été le premier attentat dans une ville. A l'époque,

9 je l'avais dit comme ceci, Maintenant, on apportait la guerre dans la

10 ville, après que quelque chose de similaire se soit produit à Pec. Mais

11 c'était plus important ce qui se passait à Pristina, parce

12 qu'effectivement, c'était la capitale du Kosovo.

13 Q. Merci, Monsieur Hartwig.

14 R. [aucune interprétation]

15 Q. Merci, disais-je. Parcourons maintenant ces quelques intercalaires qui

16 nous restent. Penchons-nous maintenant sur l'intercalaire 5. Il s'agit du

17 28 janvier 1999. Au deuxième paragraphe, au petit (a), on dit : "Après des

18 attaques dirigées par l'UCK sur des voitures de police, au cours desquelles

19 huit policiers ont été blessés, le MUP a encerclé une maison à Mitrovica,

20 où il y avait environ 12 combattants de l'UCK qui se cachaient. Le MUP leur

21 a donné l'ordre de se rendre deux fois, mais il n'y a eu de réponse que par

22 des armes légères. Lorsque l'UCK a essayé de s'échapper, deux combattants

23 ont été tués et les autres ont réussi à prendre la fuite."

24 C'est l'événement en tant que tel. Vient maintenant la phrase très

25 caractéristique, et j'aimerais vous demander un commentaire.

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1 "Dans l'opinion publique, les deux combattants de l'UCK qui avaient été

2 tués ont été présentés comme étant les victimes des brutalités, de la

3 violence du MUP, ce qui a entraîné des manifestations très claires de la

4 solidarité albanaise."

5 Monsieur Hartwig, vous êtes un officier allemand qui dispose d'une grande

6 expérience. S'agissant de l'événement qui vient d'être décrit, et je

7 résume, il a été attaqué des véhicules, pas un véhicule, des véhicules de

8 la police; huit policiers ont été blessés. La police encercle la maison,

9 donc rien que la maison où il y a les auteurs de ces méfaits, et les convie

10 à se rendre, donc la police a l'intention de les arrêter, comme toute autre

11 police. Ils ripostent en ouvrant le feu et ils essaient d'opérer une

12 percée. Deux d'entre eux sont tués à l'occasion de cette tentative, et on

13 présente la chose comme étant des victimes de violence serbe à l'égard

14 d'Albanais innocents.

15 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, passez-vous des

16 commentaires et posez la question.

17 M. MILOSEVIC : [interprétation] Très bien.

18 Q. Monsieur Hartwig, je vais vous poser des questions encore au sujet

19 d'événements variés. S'agissant de cet événement et des événements

20 analogues, d'après les renseignements que vous avez recueillis de

21 comportements des forces de l'ordre, a-t-il été de règle agressif ou

22 réservé ? Est-ce que les forces de l'ordre se sont comportées conformément

23 aux normes que vous considérez, en votre qualité de professionnel, comme

24 étant normales et appropriées ?

25 R. Malheureusement, je n'ai pas le document sous les yeux donc je dois

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1 suivre ce que vous dites. Mais, ici, au cours de cet incident, il y avait

2 présence de l'OSCE, mais aussi d'une de nos équipes d'observateurs. Dans

3 nos rapports, on ne trouve aucune mention du fait que les forces de l'ordre

4 se seraient, d'une façon ou d'autre, comportées de façon agressive ou

5 excessive.

6 C'était une action policière normale. Il faut la voir comme cela,

7 vraiment parce que, normalement, si vous avez des auteurs de méfaits qui

8 cherchent refuge dans une maison, cette maison, elle est encerclée, et on

9 intime à ces personnes de livrer leurs armes et de se rendre.

10 Effectivement, il est apparu dans un rapport de nos équipes qu'il n'a pas

11 été question de mauvais comportement des policiers.

12 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je pense qu'il faudrait remettre au

13 témoin les documents.

14 M. MILOSEVIC : [interprétation]

15 Q. Monsieur Hartwig, je m'excuse, je pensais que vous aviez les documents

16 sur vous, et qu'on avait mis à disposition un complet pour vous. Je viens

17 d'évoquer des paragraphes de l'intercalaire 5.

18 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, intercalaire 5.

19 M. MILOSEVIC : [interprétation]

20 Q. Je vous ai donné lecture d'une partie de ce deuxième paragraphe

21 figurant en première page au petit 1.

22 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Cela se situe vers le milieu du premier

23 paragraphe.

24 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Il a déjà apporté un commentaire,

25 Monsieur Milosevic, même s'il n'avait pas le document sous les yeux.

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1 Avancez.

2 M. MILOSEVIC : [interprétation]

3 Q. Monsieur Hartwig, ce que je vais vous poser comme question n'a pas

4 seulement trait à cet incident-ci, mais à la totalité de ce que vous avez

5 vécu au temps où vous avez été chef des observateurs au Kosovo et Metohija.

6 Les forces de l'ordre de règles se comportaient-elles de façon agressive ou

7 de façon réservée ?

8 R. Je le répète, je ne peux pas vous dire que j'aurais reçu des rapports

9 selon lesquels il y aurait, de la part des policiers, un comportement

10 agressif.

11 Q. Très bien. Merci. Une question plus précise encore. D'après ce que vous

12 en savez du temps où vous avez été là-bas, les forces de l'ordre, les

13 forces de l'état, ont-elles, à quelque moment que ce soit, attaquer en

14 premier les membres de l'UCK ?

15 R. Je me base sur ce que j'ai reçu dans le cadre de mes fonctions, donc ce

16 que j'ai appris par mes équipes sur le terrain. Je me base aussi sur ce que

17 j'ai vu, j'ai vécu, ce que j'ai reçu comme informations. D'après tout cela,

18 en règle générale, il s'agissait de réactions des forces de sécurité, des

19 forces de l'ordre.

20 Q. Merci, Monsieur Hartwig.

21 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Milosevic, le témoin pourrait-

22 il réagir au paragraphe qu'on trouve en bas de cette page ? Quelle était la

23 base sur laquelle il s'appuyait pour faire de telles observations, et

24 quelle est la raison pour laquelle il inclut ce paragraphe dans son

25 rapport ?

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1 L'ACCUSÉ : [interprétation] Vous voulez que nous donnions lecture de ce

2 paragraphe, Monsieur Kwon. Vous parlez de celui qui commence : " C'est le

3 scénario classique et habituel normal… ?

4 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

5 L'ACCUSÉ : [interprétation] "Tentative d'assassinats et assassinats par

6 l'UCK de policiers, de membres du MUP qui, MUP qui à son tour essaie de

7 découvrir l'identité des auteurs et de les arrêter. La police, le MUP ou

8 comment peut-elle partir à la recherche de ces hommes? Comment peut-elle

9 découvrir leur identité ? Après les opérations, les armes sont dissimulées,

10 les combattants se transforment en citoyens ordinaires ne présentant aucun

11 lien visible avec l'UCK, puisque les forces serbes n'ont pas pour

12 spécialité, et se trouvent dans l'impossibilité vu les conditions de

13 procéder à des opérations chirurgicales ou de précisions chirurgicales, on

14 semble répondre par le poing; de la façon forte. On peut s'attendre,

15 puisque l'UCK applique ces cas de tactique de guérilla, à ce que le

16 comportement de la police et de l'armée face à l'UCK ne change pas."

17 M. MILOSEVIC : [interprétation]

18 Q. Monsieur Hartwig, M. Kwon a exprimé le souhait de vous voir commenter

19 ce paragraphe également dans le rapport hebdomadaire que nous avons sous

20 les yeux.

21 R. Dans ce paragraphe, j'ai décrit un des piliers d'un combat de

22 partisans. Ceci n'est pas propre à l'UCK ou aux forces de l'ordre serbe.

23 C'est une vérité, c'est une recette qu'on peut appliquer partout. C'est ce

24 qu'on a pu constater dans toute guerre de résistance ou de partisans. On

25 attaque, on disparaît, on se perd dans la population civile dans l'espoir

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1 que les barrières morales de la population attaquée soient si élevées que

2 rien ne se passera. Ce n'est qu'un vœu pieux dans le fond, c'est une

3 incantation. La plupart du temps, quand on voit ce genre de guerre, en

4 principe, effectivement, il y a des règles qui sont posées, mais en

5 pratique, il n'est pas facile d'appliquer de telles règles.

6 M. LE JUGE KWON : [interprétation] C'est là une observation générale que

7 vous avez faite à l'époque.

8 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, je le répète, ceci ne se rapporte pas à

9 cette situation-ci; c'est une observation générale.

10 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie.

11 M. MILOSEVIC : [interprétation]

12 Q. Monsieur Hartwig, partant des contacts que vous avez eus avec les

13 représentants de la police, avez-vous eu l'occasion d'apprendre quelque

14 chose au sujet des efforts déployés par cette police aux fins d'éviter à

15 tout prix des victimes chez les civils ?

16 R. Je n'ai pas suivi, excusez-moi, je n'ai pas entendu tout simplement.

17 Est-ce que vous auriez l'amabilité de répéter la question ? Je n'ai

18 simplement pas entendu la question.

19 Q. Certainement, Monsieur Hartwig. Dans les contacts que vous avez eus

20 avec les dirigeants de la police, vous a-t-on informé des efforts déployés

21 par la police aux fins d'éviter toute victime parmi les civils ?

22 R. Je n'en ai pas entendu parler. Vu la situation du moment, je n'aurais

23 pas posé de questions, parce que dans ce genre d'affrontement. La tactique

24 ne permet pas d'apporter confirmation des événements soit qu'on ignore les

25 attaques et qu'on les accepte sans faire de commentaires.

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1 Q. Veuillez m'indiquer ce qui suit. Dans les ripostes à ces attaques nos

2 forces se sont-elles servies d'une force disproportionnée ?

3 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] J'estime que vous n'avez pas le

4 droit de poser ce genre de questions. Posez-lui une autre question plus

5 précise. Demandez-lui quelles sont les forces ou quelle est la force qui a

6 été utilisée et c'est à nous que reviendra d'estimer dans quel rapport

7 cette force s'est exercée.

8 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Robinson, je ne perds pas de vu le

9 fait que M. Hartwig, au tout début, nous a précisé qu'il avait passé plus

10 de 30 ans dans l'armée allemande et qu'il a vaqué à ce type de

11 problématiques. Il a été aux fonctions de chef de cette mission

12 d'observation. Je suppose, par voix de conséquence, qu'il a dû faire face à

13 un fait qui est celui de déterminer si la force utilisée était

14 proportionnée ou disproportionnée. Nous parlons de ce qui aurait été

15 pratique courante des mois qu'il a passés là-bas. J'ai posé la question de

16 façon non suggestive. Est-ce qu'en ripostant aux attaques on a, oui ou non,

17 eu recours à une force disproportionnée ?

18 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Hartwig, vous étiez sur les

19 lieux. Pourriez-vous nous dire ce que les forces armées ont utilisé comme

20 force comme effectifs en réponse aux attaques de l'UCK ?

21 LE TÉMOIN : [interprétation] En général, voici comment ceci se passait.

22 Après une attaque, il y a eu une action de perquisition, de recherche et en

23 général, on a continué à tirer depuis les lieux concernés et au moment où

24 il y avait fouilles et perquisitions des maisons, les gens ont été arrêtés,

25 ont été emmenés, pour certains d'entre eux pour être interrogés.

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1 Il est arrivé que s'il y avait des tirs plus nourris qui venaient de

2 certains lieux, les policiers ont riposté en utilisant leurs mitrailleuses.

3 Quand je me suis trouvé sur les lieux, il n'y a pas eu utilisation

4 d'armes lourdes au cours des dix derniers jours avant l'évacuation. Là

5 effectivement, est-ce que c'était de Podpuzuve [phon], du nord, j'ai

6 entendu de temps en temps des tirs d'artilleries et jusqu'alors il n'y

7 avait pas eu utilisation d'armes lourdes. On utilisait jusqu'alors, des

8 armes légères des armes d'infanterie. Les attaques de l'UCK, elles, étaient

9 aussi menées avec des armes d'artillerie et des obus anti-blindés.

10 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, je vous permettrais de parler

11 de la question de la proportionnalité car des témoins à charge l'ont fait.

12 LE TÉMOIN : [interprétation] Le général Lukic m'a dit, au cours d'un

13 entretien, ceci : Si on pouvait, et si on était autorisé à le faire comme

14 on le pouvait, à ce moment-là, on aurait pu se débarrasser de l'UCK. Mais

15 quand on dit se débarrasser, en terminer de l'UCK, il ne pensait pas à une

16 élimination générale. Il disait, ou voulait dire qu'on aurait pu exercer

17 suffisamment de pression sur l'UCK avec les forces de l'ordre que l'UCK

18 aurait été dans l'incapacité de continuer, était forcée à négocier. Mais,

19 s'il y avait eu effectivement cette liberté d'action, il y aurait eu plus

20 d'occasions mais effectivement c'est une déclaration que j'ai entendue.

21 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, Monsieur Milosevic.

22 M. MILOSEVIC : [interprétation]

23 Q. Quand on vous a dit cela, avez-vous eu l'impression, ou vous a-t-on dit

24 que leurs activités étaient réduites à un strict minimum de légitime

25 défense ?

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1 R. Il n'a pas été dit que les activités auraient diminué, mais cela a été

2 dit de façon tout à fait claire que ce n'étaient pas des actions des forces

3 de sécurité qui auraient été arbitraires ou tout à fait faites au hasard.

4 Il a été constaté de façon très claire que les forces de l'ordre avaient

5 pour mission de veiller à ce que toutes les personnes du Kosovo, tous les

6 habitants, quelle que soit leur origine ethnique, devaient être protégés.

7 Q. Puisque nous sommes encore à cet intercalaire 5, Monsieur Hartwig,

8 j'aimerais attirer votre attention sur le point 2, qui dans ce rapport

9 également confirme les notes que nous avons vues dans l'intercalaire 1.

10 Au paragraphe 2 disais-je, dans le texte qui constitue votre rapport du 28

11 janvier, il est dit : "Le recteur de l'université albanaise de Pristina a

12 déclaré 'Pas sous les Serbes, et pas avec les Serbes.' La nouvelle

13 constitution albanaise ne reconnaît pas des Serbes comme étant une minorité

14 nationale. Les Albanais, qui s'intéressant aux droits de l'homme, sont

15 incapables d'imaginer la co-existence avec les Serbes, quelque forme que ce

16 soit."

17 Puis on dit : "Si on associe ceci à la demande formulée par les Albanais

18 pour qu'il y ait intervention de l'OTAN, intervention militaire,

19 apparemment on ne souhaite plus trouver de solution politique avec les

20 Serbes. Ce n'est plus quelque chose qui est privilégié.

21 "Les Albanais ont simplement besoin de continuer cette tactique du

22 coup de main, attendant la réaction prévisible des Serbes. Tôt ou tard, la

23 communauté internationale va réagir d'une façon ou d'une autre."

24 Monsieur Hartwig, ici il ne s'agit pas de droit quelconque des

25 Albanais. Ici il s'agit, comme vous le dites, de ce qu'a dit le recteur de

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1 l'université albanaise, à savoir qu'il voulait qu'il n'y ait plus de Serbes

2 au Kosovo. Est-ce que le message a été, oui ou non, suffisamment clair pour

3 vous ? Que cela signifiait-il ?

4 M. NICE : [interprétation] Je ne sais pas si l'accusé est en train

5 d'essayer d'embrouiller le témoin, mais il semble oublier le deuxième

6 paragraphe où on parle de porte-parole du président Rugovo, peut-être le

7 témoin devrait-il avoir à l'esprit la totalité du passage avant qu'il ne

8 réponde à la question générale qui vient de lui être posée.

9 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] C'est quelque chose que vous pourrez

10 aborder pendant votre contre-interrogatoire.

11 M. NICE : [interprétation] Oui, mais je pense que malheureusement, c'est

12 dommage pour le témoin car on est en train de lui citer quelque chose qui

13 est complètement hors contexte.

14 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Robinson, ce qu'a dit le porte-parole

15 de Rugova n'a pas le même poids, n'est pas aussi fort que ce que le recteur

16 de l'université a dit au témoin parce que le recteur de l'université lui

17 dit la chose suivante : il lui dit enfin quelque chose qui est complètement

18 contraire à ce que dit M. Nice, à savoir le désire de voir un Kosovo pure

19 ethniquement.

20 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Posez, je vous prie, une question

21 précise.

22 M. MILOSEVIC : [interprétation]

23 Q. Monsieur Hartwig, comment avez-vous interprété les propos que vous a

24 tenus le recteur de l'université ici, il dit je cite : "Pas sous les Serbes

25 et pas avec les Serbes." C'est ce qui est dit ici.

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1 R. C'est-à-dire pour moi vivre non pas avec quelqu'un ni sous le même

2 toit, c'est l'un ou l'autre, pas les deux en même temps, mutuellement

3 exclusif.

4 Q. Monsieur Hartwig, avez-vous entendu parler de ces histoires qui

5 couraient au sujet des villages détruits, c'est du moins ce que l'on

6 racontait; est-ce que vos observateur sont allés sur place pour voir si ce

7 que l'on racontait était bien conforme à la réalité ?

8 R. J'ai donné un exemple. J'y reviens celui de Kotlina, Gajra et Ivaja

9 aussi. On avait affirmé qu'il y avait eu des destructions dans ces

10 localités. Au bout de trois jours, on a pu voir qu'il avait un village qui

11 avait été détruit et en ce qui concerne les deux autres villages, certes

12 ils avaient été pillés, certes ils avaient été dévastés. Personnellement,

13 je n'ai pas vu de villages complètement détruits. J'ai vu ici ou là des

14 maisons qui avaient été détruites, mais je n'ai pas vu de villages

15 complètement rasés.

16 Q. Avez-vous reçu des rapports au sujet d'un grand nombre de réfugiés

17 albanais, et avez-vous enquêté sur ces informations ? Est-ce que votre

18 mission était en mesure de contrôler ce type d'informations ?

19 R. Dans le cadre des événements concernant ces trois villages que j'ai

20 mentionnés, Kotlina, et cetera, j'ai entendu à la radio qu'il y avait

21 environ 4 000 réfugiés qui se trouvaient au point de contrôle Djeneral

22 Jankovic. Il se trouve qu'une de mes équipes se trouvait dans les environs,

23 et ils m'ont informé qu'il y avait là 300 à 400 personnes tout au plus, des

24 gens qui se tenaient à cet endroit.

25 Q. Avez-vous appris pourquoi ces personnes avaient quitté leurs villages ?

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1 Est-ce qu'on vous en a informé ?

2 R. Je crois que cela a été dû au fait que les habitants savaient

3 pertinemment sans doute qui, dans le village, appartenait à l'UCK et qui

4 possédait des armes. Pour ce qui est de ces trois villages, ce que l'on

5 m'avait dit c'était qu'à cause des tirs qui venaient de ce village, sur une

6 position tenue par les Serbes, sur la route principale reliant Pristina à

7 Skopje, à cause de cela, les forces de sécurité avaient entrepris une

8 opération de fouilles, de perquisitions, et les gens sont peut-être partis

9 à cause de cela. Dans les rapports, il était dit que les forces de sécurité

10 les avaient à Kacanik, avaient emmené les enfants dans une école, et

11 avaient emmené les hommes pour qu'ils soient interrogés afin de voir s'il y

12 avait des liens entre les habitants du village et les membres de l'UCK.

13 Q. Monsieur Hartwig, disposiez-vous d'informations quelles qu'elles soient

14 selon lesquelles les autorités avaient chassé les Albanais de leurs

15 villages ?

16 R. Personnellement, je n'ai rien vu de tel dans les rapports. Je n'ai pas

17 eu connaissance de ce fait non plus.

18 Q. Merci, Monsieur Hartwig. Avez-vous reçu des plaintes au sujet du

19 comportement de la police qui aurait été incorrect envers la population ?

20 Est-ce que vous avez eu vent de ce type de protestations ?

21 R. Je n'ai pas entendu de griefs ou de protestations au sujet du

22 comportement inacceptable de tel ou tel polices. Il arrivait que l'on

23 utilise le terme de la police lorsqu'on parlait de l'emprisonnement

24 d'Albanais qui avaient été impliqués peut-être dans des attaques ou dans

25 d'autres événements, des gens qui étaient recherchés et qui devaient être

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1 arrêtés pour être placés en détention. En tout cas, ceci était général et

2 n'avait pas trait à des incidents en particulier. On ne se plaignait pas

3 d'incidents en particulier, en disant que "Les policiers dans tels ou tels

4 cas" se seraient comportés de manière contraire à la loi.

5 Q. Monsieur Hartwig, est-ce que l'UCK se comportait de manière agressive

6 envers les Albanais aussi ?

7 R. En partie, oui. D'après certains rapports, je sais qu'il y a des

8 Albanais qui ont été tués parce que soit ils travaillaient pour

9 l'administration serbe ou parce qu'ils travaillaient pour la police serbe,

10 ou il s'agissait encore d'Albanais dont on soupçonnait d'être des

11 collaborateurs, parce que là c'était quelque chose d'assez risqué d'avoir

12 ce type d'activités.

13 Q. En dehors de ceux qui travaillaient pour l'administration et pour la

14 police en dehors des collaborateurs, est-ce que vous pouvez nous donner des

15 exemples de cas ou, par exemple, un médecin aurait été tué ou un personnage

16 public ou quelqu'un travaillant pour une organisation humanitaire,

17 quelqu'un qui n'aurait pas soutenu l'UCK et qui aurait été tué ?

18 R. Il n'y avait pas d'alternative pour les Albanais. Ils devaient soit

19 soutenir l'UCK, et cela de manière active, ou il fallait qu'ils deviennent

20 membre carrément de l'UCK. A plusieurs reprises, on m'a expliqué qu'on

21 faisait pression sur les gens, sur les Albanais afin de les convaincre

22 qu'il était utile de devenir membre de l'UCK. L'histoire du médecin qui

23 fêtait son anniversaire, je ne sais plus où, près de Pec, et au cours de

24 cette fête, des hommes en uniforme de l'UCK sont pénétrés par la force dans

25 sa maison, ils ont tiré dans les genoux ou dans les jambes des invités afin

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1 de contraindre le fils, qui était médecin de devenir membre de l'UCK. Je

2 pense que c'est l'exemple le plus frappant de ce type d'incident.

3 Q. Vous utilisez un euphémisme, vous parlez de pression lorsqu'en fait il

4 s'agissait de personnes sur qui on tirait.

5 Monsieur Hartwig, que savez-vous de l'enlèvement de Serbes et d'Albanais.

6 Je ne suis pas en train de parler uniquement de l'enlèvement de Serbes,

7 mais aussi de l'enlèvement d'Albanais.

8 R. A un moment donné, une fois que l'on m'a expliqué qu'il y avait

9 plus de 140 Serbes qui, théoriquement, avaient été enlevés, après en avoir

10 entendu parler, je me suis entretenu avec le président de l'association des

11 Serbes enlevés. Je lui ai parlé à Orahovac. L'un des objectifs de notre

12 mission, c'était également de travailler à la coopération, à la

13 réconciliation. Je lui ai demandé s'il avait une liste de tous les Serbes

14 qui avaient été enlevés. Je lui ai demandé s'il pouvait, au moins, me

15 donner le nom des Serbes d'Orahovac qui étaient disparus. C'était très

16 intéressant, parce qu'à ce moment-là, il m'a dit qu'il pouvait me procurer

17 la liste, mais uniquement après en avoir parlé avec son voisin albanais.

18 Mon objectif, à cet égard, c'était d'essayer, dans cette zone limitée

19 d'Orahovac, à cette échelle, de m'informer au sujet de l'état des Serbes

20 qui avaient été enlevés. L'idée aussi, c'était de découvrir où se

21 trouvaient les citoyens albanais emprisonnés, découvrir où ils se

22 trouvaient, afin de pouvoir calmer les anxiétés des membres de leurs

23 familles qui étaient dans l'incertitude quant à leur sort.

24 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, je souhaite que

25 vous terminiez votre interrogatoire principal d'ici la pause, c'est ce que

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1 j'attends de vous, afin que le temps qui nous restera ensuite soit consacré

2 au contre-interrogatoire, puis à vos questions supplémentaires.

3 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je vais faire de mon mieux, bien entendu,

4 Monsieur Robinson, mais nous avons ici un témoin très important, et il y a

5 des questions importantes que je ne saurais éluder.

6 M. MILOSEVIC : [interprétation]

7 Q. Est-ce que, oui ou non, les membres de l'UCK portaient des uniformes ?

8 R. Pour l'UCK, je ne sais pas si tous les membres de l'UCK portaient un

9 uniforme. Il était habituel, enfin pour la grande majorité des membres de

10 l'UCK, ils étaient vêtus de tenues de camouflage. Puis, il y en avait un

11 petit pourcentage -- je parle d'uniformes de camouflage couleur vert olive,

12 kaki. Puis, il en avait d'autres qui portaient des uniformes complètement

13 noirs.

14 Q. Est-ce qu'il y avait des membres de l'UCK -- je ne parle pas des

15 exceptions, mais je voudrais savoir s'il y en avait un nombre significatif

16 qui étaient habillés en civil ?

17 R. Cela, je ne sais pas, parce qu'on ne pouvait pas voir, quand on

18 rencontrait un civil, s'il était membre de l'UCK ou pas. Je sais simplement

19 que, lors de la remise en liberté des huit prisonniers, des huit soldats

20 yougoslaves qui avaient été emprisonnés, je sais que la délégation de

21 l'UCK, qui avait participé aux négociations, portait des uniformes de

22 camouflage.

23 Q. Monsieur Hartwig, vous n'avez pas répondu. Que saviez-vous des Albanais

24 enlevés ? Je ne parle pas des Serbes, je parle des Albanais qui ont été

25 enlevés par l'UCK.

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1 R. Quant à l'endroit où se trouvaient les Albanais enlevés par l'UCK, cela

2 je n'ai que peu d'informations à ce sujet. Pour certains d'entre eux, un

3 petit nombre, ils ont été tués. Quant à ce qu'il est advenu des autres,

4 cela n'a pas été rendu public, parce qu'il a fallu beaucoup de temps pour

5 que l'on arrive à trouver la relation qui existait entre un enlèvement et

6 un corps que l'on retrouvait quelque part à un moment donné. Il n'était pas

7 toujours évident et rapide d'établir ce lien.

8 Q. Est-ce que vous aviez une idée quelconque du nombre d'Albanais tués ou

9 enlevés par l'UCK ? Est-ce que vous pouviez nous donner un chiffre ?

10 R. Moi-même, je n'ai pas d'information à ce sujet. Il me semble,

11 cependant, me souvenir simplement, qu'à un moment donné, peut-être à la mi-

12 1999, peut-être un peu plus tard, il y a eu une équipe de la télévision

13 italienne, ce n'est pas quelque chose que j'ai vu par moi-même, des

14 informations directes, c'est quelque chose que j'ai entendu dire, enfin,

15 apparemment cette équipe de la télévision italienne a dit que, sur tous les

16 Albanais qui avaient été tués, il y en avait un sur deux qui avait été tué

17 par d'autres Albanais.

18 Q. Monsieur le Témoin, j'aimerais vous demander de vous reporter à la

19 dernière page du document figurant à l'intercalaire numéro 4. La question

20 que je vais vous poser est la suivante : je voudrais si la mission

21 d'observation de l'OSCE a essayé de contrôler votre propre mission ? Avant

22 de répondre, veuillez examiner le point suivant : "Le 13 janvier, l'équipe

23 de Mitrovica a été chassée par le chef des opérations de l'OSCE, le

24 général" - je pense que c'est Drewienkiewicz, DZ, en tout cas - "de

25 l'endroit où huit soldats de la VJ avaient été remis en liberté. Le 14

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1 janvier, le HRO a eu un entretien avec le général DZ qui a exprimé, de

2 manière tout à fait clair, qu'il estimait que la KDOM des Nations Unies

3 était superflue." Donc, superflue, inutile. "Si elle ne pouvait pas être

4 incorporée à l'OSCE, au moins, elle devait travailler pour l'OSCE. Il a été

5 dit très clairement que la mission d'observation des Nations Unies, en

6 dehors de son nom qui devait bientôt disparaître, allait remplir sa mission

7 conformément au mandat qui lui a avait été confié par l'Union européenne et

8 n'accepter aucune restriction à sa liberté de déplacement dans sa zone de

9 responsabilité. L'impression finale que l'on a eue, c'est que le chef des

10 opérations de l'OSCE souhaitait voir disparaître la KDOM des Nations Unies

11 aussi rapidement que possible."

12 Veuillez m'expliquer comment il se fait que la mission de Walker a

13 essayé de placer votre propre mission sous son contrôle, et pour quel

14 motif, ou plutôt quelle est l'explication qui vous a été donnée ?

15 R. On ne m'a donné aucune explication à ce sujet, mais j'imagine et

16 je pars du principe qu'il s'agissait de quelque chose que souhaitait le

17 général DZ. C'est comme cela qu'on le désignait à l'époque, général DZ.

18 Parce que, dans la vie militaire, quelqu'un est responsable d'une zone

19 particulière, et tous ceux qui se trouvent dans cette zone doivent être

20 placés ou relevés du commandement de celui qui commande cette zone et qui

21 en est responsable.

22 En tant que Mission d'observation de l'Union européenne, nous ne

23 relevions pas de l'OSCE, et cela a créé un certain malaise, le malaise de

24 voir d'autres observateurs dans cette zone en train de vaquer à leurs

25 occupations. Je pense que c'est essentiellement le motif que je peux vous

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1 présenter. Après cette discussion avec le général, il n'y a plus eu de

2 problèmes.

3 Q. Examinons l'intercalaire numéro 6 qui est très parlant. Parce

4 qu'ici encore -- vous nous dites -- enfin, vous donnez une explication, et

5 vous nous expliquez, dans l'avant-dernier paragraphe : exemple typique pour

6 expliquer la situation en partie. "Des ouvriers albanais du Kosovo

7 réparaient, reconstruisaient l'école endommagée de Lodje. Seuls les

8 ouvriers munis d'un passe pouvaient franchir le point de contrôle. Il

9 arrivait que des personnes qui n'étaient pas munies de papiers d'identité

10 retardent le franchissement du point de contrôle et la procédure qui s'y

11 appliquait. Afin d'aider les Albanais du Kosovo à se voir recevoir leur

12 carte d'identité plus vite, le maire de Pec leur a demandé de venir dans

13 son bureau et de fournir simplement les noms ainsi que quelques

14 informations supplémentaires. Or, le représentant des ouvriers a refusé,

15 parce qu'il était manifeste que cela leur plaisait de continuer à accuser

16 les autorités locales de manœuvres d'harcèlement au lieu d'agir de manière

17 intelligente et normale."

18 Qu'est-ce que ceci nous montre, Monsieur Hartwig ? Que nous montre ce

19 passage ?

20 R. Ceci nous montre qu'il y avait des Albanais, du moins des

21 fonctionnaires, qui ont essayé de calmer un petit peu la tension, la

22 situation. Ils ont essayé d'apporter leur contribution là où c'était

23 possible. D'autre part, il y avait des gens qui n'étaient pas du tout

24 intéressés par cela, qui ne voyaient aucun intérêt à ce que la situation se

25 calme, se détende.

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1 Q. Je n'ai pas tout à fait bien compris. Vous nous dites qu'il y avait des

2 Albanais -- or, le maire de Pec, c'était un Serbe. C'est celui-là qui

3 voulait ces informations pour leur fournir ces papiers, mais ils l'ont

4 refusé, comme d'ailleurs vous l'avez indiqué dans votre rapport.

5 R. Je ne parlais pas uniquement des Albanais, je parlais aussi des Serbes

6 quand j'ai répondu. Cela s'appliquait aussi aux Serbes. J'ai dit que, du

7 côté des Albanais, il y en avait certains qui essayaient de calmer la

8 situation, calmer le jeu. On a, ici, la situation où le maire de Pec, qui

9 d'ailleurs a été très apprécié, enfin, avait une bonne réputation auprès

10 des Albanais, donc il a voulu aider, contribuer à accélérer le processus de

11 reconstruction de l'école. De l'autre côté, vous aviez le représentant de

12 ces ouvriers qui, lui, n'a pas voulu faciliter la situation, mais qui

13 souhaitait que les choses restent en l'état. Il souhaitait maintenir le

14 statu quo.

15 Q. Il ne nous reste plus beaucoup de temps, donc je vais immédiatement

16 passer à l'intercalaire numéro 12. J'espère que j'arriverai à exploiter ce

17 document et en terminer avec l'examen de ce document d'ici la pause.

18 Veuillez, je vous prie, examiner cette évaluation hebdomadaire en date du

19 11 mars 1999.

20 Après le premier paragraphe, vous dites la chose suivante : "C'est

21 seulement entre le 1er mars et aujourd'hui que nous avons noté les incidents

22 suivants dirigés contre la police, le MUP, et la VJ."

23 Cela signifie que nous sommes en train de parler du 11 mars, donc on parle

24 de cette période, cette période du 1er au 11 mars.

25 "Un officier de police a été tué, et quatre policiers ont été blessés dans

Page 37080

1 une attaque contre une patrouille de la police à côté de Kacanik le 1er

2 mars.

3 "Deux Serbes ont été enlevés dans la zone d'Orahovac à la fin

4 février, et ils ont été libérés par l'UCK, un Serbe a été grièvement

5 blessé, un autre a été tué --"

6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Votre question, je vous prie,

7 Monsieur Milosevic.

8 L'ACCUSÉ : [interprétation] Ma question, je la poserai une fois que j'aurai

9 donné lecture de tous les points qui figurent dans ce rapport, qui couvre

10 une période de 11 jours au cours du mois de mars, c'est-à-dire le dernier

11 mois de présence de la mission dirigée par

12 M. Hartwig.

13 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] On va être ici jusqu'à demain matin

14 si vous donnez lecture de la totalité de ce rapport. Le témoin a le dossier

15 sous les yeux. Il peut tout à fait le lire lui-même.

16 M. MILOSEVIC : [interprétation]

17 Q. Monsieur Hartwig, ici, nous avons un document de plusieurs pages dans

18 lesquelles sont répertoriés tous ces événements. A chaque fois, on parle de

19 personnes tuées, de personnes assassinées, et cetera, et cetera. Est-ce que

20 ceci a trait uniquement aux attaques menées par l'UCK contre la police et

21 l'armée pendant cette seule période, avec, bien entendu, peut-être quelques

22 exceptions que je vais lire : "Un Albanais, par exemple, a été enlevé dans

23 le village de Perane par dix Albanais qui étaient en uniforme de camouflage

24 et qui avaient des fusils automatiques. Il y avait un Albanais qui était

25 inspecteur du MUP à Prizren.

Page 37081

1 "Une femme à Pec a été menacée par un homme cagoulé et inconnu qui a

2 dit être membre de l'UCK. Je cite : 'Comment peux-tu dormir sur tes deux

3 oreilles alors que nos frères à Drenica meurent tous les jours ?' Après

4 qu'on lui a posé des questions semblables au sujet de son mari, cette femme

5 a été violée à deux reprises."

6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic. Monsieur

7 Milosevic, nous avons compris que, dans ce document, on répertorie les

8 attaques menées par l'UCK. Venez-en à votre question. Il s'agit, on peut le

9 lire, globalement, d'attaques menées par l'UCK, à une ou deux exceptions.

10 Quelle est la question que vous souhaitiez poser au témoin ?

11 L'ACCUSÉ : [interprétation] Ces exceptions concernent des attaques dirigées

12 contre les Albanais. Je vous ai dit qu'il y avait l'UCK qui attaquait

13 l'armée et la police, avec des exceptions, comme celles que j'ai citées au

14 cours desquelles les Albanais étaient pris pour cible.

15 M. MILOSEVIC : [interprétation]

16 Q. Est-ce qu'ici on parle, pour l'essentiel, d'attaques menées par l'UCK ?

17 R. D'après ce qui m'a été transmis à l'époque, il s'agissait manifestement

18 d'attaques menées par l'UCK.

19 Q. Pourriez-vous nous citer un seul exemple où cela aurait été la police

20 ou l'armée qui aurait attaqué quelqu'un au Kosovo au cours de cette

21 période ?

22 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Nous parlons de quelle période,

23 Monsieur Milosevic ? Je vois, du 1er au 11 mars, d'accord.

24 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Robinson, ces rapports concernent la

25 période qui commence en janvier, mais cette dernière pièce concerne la

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1 période qui va du 1er au 11 mars. Cependant, vous avez le rapport de M.

2 Hartwig concernant sa mission en janvier, des notes qu'il a consignées sur

3 une période de plusieurs mois, et son témoignage concerne la période qui

4 commence en novembre 1998, à toutes fins utiles.

5 La question que je pose concerne la totalité de cette période, de toutes

6 les expériences qu'il a glanées au cours de cette expérience. Ne l'oubliez

7 pas, je demanderais qu'il y ait versement de tous ces documents au dossier.

8 M. MILOSEVIC : [interprétation]

9 Q. Avant de terminer mon contre-interrogatoire, je vais me contenter de

10 lire la dernière phrase de cette dernière pièce que vous présentez, elle

11 concerne la période du 1er au 11 mars : "Ces exemples ne sont pas un grief

12 mais plutôt la preuve de la façon dont les choses sont examinées sont vues,

13 évaluées et vendues à l'opinion publique."

14 De façon générale, Monsieur Hartwig, est-ce qu'on peut dire que dans

15 votre déposition vous dites qu'il y a de fortes divergences entre les

16 constatations que font vos observateurs sur le terrain, vos équipes et

17 vous-même et les rapports produits par les gouvernements de l'Union

18 européenne, par les gouvernements occidentaux ainsi que par les médias

19 occidentaux ?

20 R. Je ne sais pas exactement ce qu'a publié l'Union européenne, ce que je

21 sais c'est que cette contradiction entre la réalité et l'image qu'on en

22 donne, c'est une contradiction très manifeste, très frappante. Je pense que

23 cela a été une constatation faite par tous les observateurs, et pas

24 seulement par eux.

25 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur

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1 Milosevic, d'avoir terminé votre interrogatoire principal.

2 Nous allons maintenant faire une pause de 20 minutes, après quoi

3 pourra commencer le contre-interrogatoire.

4 M. KAY : [interprétation] Est-ce que les intercalaires 3, 4, 5 et 6 et 12

5 pourront être versés au dossier ?

6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui.

7 --- L'audience est suspendue à 10 heures 35.

8 --- L'audience est reprise à 10 heures 57.

9 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Maître Kay, vous aviez demandé le

10 versement de certains intercalaires, nous avons examiné la question et nous

11 allons les verser tous.

12 M. KAY : [interprétation] Je suis d'accord.

13 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Ce sont les rapports préparés par le

14 témoin.

15 M. KAY : [interprétation] Je ne suis pas en désaccord.

16 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Nice.

17 M. NICE : [interprétation] Sur ce point, je relèverais simplement qu'il n'a

18 pas parlé de trois d'entre eux.

19 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui.

20 M. NICE : [interprétation] Je n'ai pas nécessairement posé des questions à

21 propos de ce rapport. J'en ai parlé précédemment, dans des écritures plus

22 exactement. Nous nous inquiétons du fait que certains documents étaient

23 versés au dossier alors que les témoins concernés n'en parlaient pas. Je ne

24 serai pas long.

25 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Ici, il s'agit d'une exception

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1 puisque ce sont des documents préparés par le témoin lui-même. Fort bien.

2 Contre-interrogatoire par M. Nice :

3 Q. [interprétation] Monsieur Hartwig, est-ce que c'est vous qui avez eu

4 l'idée de venir déposer, est-ce que vous avez proposé de le faire à

5 l'accusé ou est-ce que c'est lui qui vous a demandé de déposer ?

6 R. On m'a demandé de le faire.

7 Q. Comment avez-vous été retenu ? Qu'est-ce que vous avez fait comme

8 publication comme discours qui fait que l'accusé vous a retenu comme

9 témoin ?

10 R. Je ne sais pas comment cela s'est passé dans le détail. Je sais

11 cependant, que début 1999, il y avait un rapport préparé à propos de l'UCK

12 et qu'il était arrivé à Belgrade, ce rapport. Je pars du principe que c'est

13 ainsi que le lien a été établi.

14 Q. Est-ce qu'il s'agit d'un des documents qu'on retrouve dans la liasse

15 des documents ?

16 R. Non. C'était un rapport unique portant sur l'expansion de l'UCK,

17 rapport unique que j'avais rédigé.

18 Q. Quand ?

19 R. Nous n'avons pas préparé de rapport secret, la transmission s'est faite

20 de façon tout à fait publique.

21 Q. Ce rapport, quand a-t-il été préparé ?

22 R. Je ne sais plus exactement, je suppose que je l'ai préparé fin janvier,

23 en février.

24 Q. Où ce document a-t-il été rendu public ?

25 R. Je ne sais pas s'il a été véritablement publié, je sais uniquement que

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1 mon ambassadeur à Belgrade m'a contacté, ce rapport existe, il est connu.

2 Q. En effet vous avez publié quelque chose en dehors du mandat qui était

3 le vôtre et vraisemblablement sans l'autorisation de l'ambassadeur.

4 R. Il n'était pas nécessaire d'avoir l'autorisation pour publier quelque

5 chose, mais je n'ai pas publié ce rapport.

6 Q. Comment se fait-il que ce rapport, parce que votre travail c'est d'être

7 un observateur au nom de l'Union européenne et vous publiez quelque chose

8 dans un cadre tout à fait distinct concernant l'UCK et ceci arrive dans le

9 domaine public.

10 R. Je le répète : je n'ai rien publié. Ces rapports, que nous faisions,

11 étaient souvent adressés à plusieurs destinataires. Je ne sais pas combien

12 exactement. On m'a, une fois dit, qu'il y en avait 180, mais je ne sais pas

13 par quelles filières ces rapports arrivaient. Il n'y avait aucuns secrets

14 dans ces rapports. Ce n'était sûrement pas l'intention de garder le secret

15 sur ces rapports; sinon, on aurait veillé à utiliser une filière aussi ici.

16 Q. Par l'intermédiaire des Juges, je vous ai demandé, la semaine dernière,

17 d'aller vérifier le contenu de votre ordinateur. Est-ce que vous l'avez

18 fait ?

19 R. Oui, j'ai vérifié mon portable, mais aussi l'ordinateur que j'ai à mon

20 lieu de travail, et je n'ai trouvé nulle part ce document. J'ajoute

21 aussitôt que je sais pertinemment qu'on peut effacer des dossiers d'un

22 ordinateur, et je ne ferais jamais ce genre de chose.

23 A l'époque, j'ai écrit ce rapport, et tous les points concernaient la

24 situation de l'époque.

25 Q. Est-ce que vous avez trouvé la lettre de M. Lukic, que je vous avais

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1 demandée par le truchement des Juges ?

2 R. Oui. J'ai envoyé une lettre en allemand, et une en anglais. Je l'ai

3 trouvée.

4 Q. Vous en avez un exemplaire ici ?

5 R. Non, je ne l'ai pas ici. Cet exemplaire est à l'hôtel.

6 Q. Vous ne vous êtes pas dit que ce serait peut-être utile d'apporter ce

7 document ici comme élément de preuve ?

8 R. Il y a eu méprise parce que je vous avais compris comme disant que --

9 Q. Peu importe. Continuons. Les intercalaires qui se trouvent dans votre

10 liasse de documents, est-ce que ce sont des documents qui ont été imprimés

11 récemment et saisis, venant de votre ordinateur, dans le cadre de la

12 déposition que vous alliez faire ?

13 R. J'ai chez moi un classeur dans lequel j'ai réuni des rapports qui me

14 semblaient importants dont celui qui se trouve à l'intercalaire 1.

15 Q. J'enchaîne. Vous ne répondez pas tout à fait à ma question. Ces

16 intercalaires, est-ce que vous les avez imprimés à la fin précise de les

17 utiliser ici dans votre déposition ?

18 R. Les rapports hebdomadaires, et le rapport qui se trouve ici, et les

19 autres rapports viennent de mon ordinateur, effectivement.

20 Q. Ce sont des projets de textes. Mais vous n'allez jamais nous dire ce

21 qui a été précisément envoyé par vous-même à Sarajevo, n'est-ce pas, parce

22 que ce ne sont que des moutures ?

23 R. Tout ce que je peux dire est oui; je ne sais pas dans quelle mesure

24 j'ai peut-être transformé telle ou telle chose dans certains rapports.

25 Q. Fort bien. Avant de venir déposer, est-ce que vous vous êtes efforcé

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1 d'obtenir, des destinataires de ces rapports, les rapports que vous leur

2 avez envoyés à l'époque ? Est-ce que vous vous êtes efforcés de le faire ?

3 R. Non. Je vous rappelle que je suis revenu vers le milieu de la semaine

4 dernière d'une mission d'un an en Afghanistan.

5 Q. Prenons le tout dernier rapport qui a été mentionné, qui se trouve à

6 l'intercalaire 12. Prenons la toute dernière phrase de ce rapport. L'accusé

7 s'est intéressé à celle-ci. Vous dites : "Ces exemples ne sont pas un

8 grief, mais la manifestation de la façon dont les choses sont étudiées,

9 évaluées --" là, il faut changer l'orthographe et, en majuscules, "vendues

10 au public."

11 Aidez-moi, s'il vous plaît. Cette phrase, est-ce qu'elle a jamais figuré en

12 tant qu'élément compris dans un rapport que vous auriez envoyé à vos

13 supérieurs ?

14 R. C'est un projet de texte de rapport hebdomadaire en date du 11 mars. Je

15 ne sais pas si je l'ai envoyé tel quel.

16 Q. Vous voyez, il y a plusieurs choses qu'on pourrait dire à propos de ces

17 projets : est-ce que vous les avez tapés et saisis vous-même, ou est-ce que

18 vous les avez dictés ?

19 R. Non, je saisis ce genre de chose moi-même.

20 Q. Parce qu'il y a une chose qui est très particulière pour ce qui est du

21 style, excusez-moi de le dire, c'est que, quand vous citez quelque chose,

22 au lieu de les mettre entre guillemets, vous dites "quote" et "unquote" en

23 anglais; ouvrez les guillemets, fermez les guillemets. C'est votre style.

24 Ce n'est pas parce que vous auriez dicté ce texte à quelqu'un qui les

25 aurait tapé et qui aurait tapé aussi les mots "entre guillemets".

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1 R. Non. En fait, c'est une procédure que j'ai apprise de par mon travail

2 international, et lorsque j'ai écrit ceci dans un rapport, je mets ECOM,

3 signifiant fin du commentaire. C'est simplement une habitude que j'ai prise

4 dans le cadre de mon travail international.

5 Q. Vous avez été 30 ans dans l'armée. Dans quelle armée, avez-vous dit ?

6 L'armée de la RFA ?

7 R. Oui, dans la Bundes, vers de la République fédérale d'Allemagne.

8 Q. Quand est-ce que vous êtes devenu officier ?

9 R. En 1962.

10 Q. Quand avez-vous quitté l'armée ?

11 R. En 1993.

12 Q. A ce moment-là, vous étiez devenu unterleutnant ?

13 R. Non, j'étais lieutenant-colonel, effectivement.

14 Q. Manifestement, le compte rendu d'audience n'était pas exact. Vous avez

15 maintenant rectifié. Dans le compte rendu d'audience, vous aviez dit que

16 vous aviez eu des fonctions de commandement. Quelles furent vos fonctions

17 de commandement, ou est-ce qu'en gros vous avez surtout fait des fonctions

18 qui n'étaient pas des fonctions de commandement ?

19 R. J'étais chef de compagnie. J'étais commandant de régiment. J'ai aussi

20 exercé d'autres fonctions dans lesquelles je donnais des ordres, où j'avais

21 des compétences et des attributions de commandement.

22 Q. Voyons les missions que vous avez effectuées. Est-ce que vous avez, en

23 fait, le mandat de votre mission au Kosovo ici ?

24 R. Non.

25 Q. Quels étaient les objectifs poursuivis par cette mission ?

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1 R. Cette mission avait pour but d'assurer l'observation constante de

2 l'évolution culturelle, politique, et autres, et dans le cadre de nos

3 possibilités, de voir dans quelle mesure il était possible d'améliorer la

4 collaboration entre les parties en présence.

5 Q. C'est là un éventail très vaste d'activités que vous citez. Examinons

6 ceci dans le détail. Votre mission est une mission qu'on décrit

7 généralement comme une KDOM, russe ou américaine, par exemple.

8 R. A l'époque où je suis arrivé à Pristina, il y avait plusieurs missions

9 diplomatiques d'observation dont, notamment, celle de l'Union européenne

10 qui s'appelait EU KDOM.

11 Q. Je vois. Mais ces missions, vous l'avez d'ailleurs révélé, c'étaient

12 des missions d'observation, n'est-ce pas ?

13 R. Effectivement.

14 Q. Vous avez dit que votre rôle était de voir quelle était l'évolution

15 culturelle, politique, économique, mais vous deviez surtout faire rapport,

16 n'est-ce pas, faire état de la situation ?

17 R. C'est comme cela que je l'ai dit; l'évolution dans tous ces secteurs.

18 Q. Vous n'étiez pas un négociateur, n'est-ce pas, ni quoi que ce soit de

19 la sorte ?

20 R. J'ai, une fois, essayé de mener des négociations en ce qui concerne ces

21 Serbes qui avaient été enlevés, et j'ai essayé de savoir si je pouvais

22 savoir ce qu'il en était des coordonnées de certains Albanais, mais cela

23 n'a pas donné grand-chose, parce qu'à ce moment-là, presque aussitôt après,

24 il y a eu l'évacuation.

25 Q. Au fond, vous étiez là pour faire de l'observation. Maintenant, parlons

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1 de chiffres. L'accusé n'a eu de cesse de dire que vous étiez le chef des

2 observateurs. Vous aviez combien de personnes sous vos ordres dans cette

3 mission ?

4 R. Je ne sais plus exactement, mais au début, disons 38, 40, je dirais.

5 Q. A la fin de la mission ?

6 R. On n'était pas beaucoup moins à la fin. Parce qu'il y a des mandats qui

7 ont été révoqués par certains pays, je dirais qu'on était entre 20 et 30.

8 Q. Prenons l'intercalaire 2, dernière page. Il s'agit ici de cette

9 communication que vous avez faite à une date imprécise, peut-être vers la

10 fin du mois de mars. Dernière page, vous le dites sans ambages : "Notre

11 tâche actuelle est de dresser le tableau le plus clair possible. Nous

12 n'avons pas l'intention d'être des rivaux de l'OSCE." Un peu plus loin,

13 vous dites : "L'avenir du groupe d'attachés de l'Union européenne…" C'est

14 vous ?

15 R. Oui.

16 Q. "Et rose, semble rose, et moins on a, mieux c'est." Vous parlez de

17 quelque chose comme 18 personnes faisant partie du personnel. Est-ce que

18 cela donne un chiffre exact ? Est-ce qu'il y avait moins de 20 personnes

19 dans le cadre de votre mission pour couvrir toute l'étendue du Kosovo ?

20 R. Cela, c'était au moment de l'évacuation. Effectivement, c'étaient les

21 bons chiffres à cette époque-là.

22 Q. Très bien. Même si vous avez parlé de 40 personnes, à mures réflexions,

23 est-ce qu'en vérité, vous n'avez pas toujours été une petite mission ne

24 comptant jamais plus de 20 personnes ?

25 R. Non, ce n'est pas exact. A l'époque où je suis arrivé au Kosovo, nous

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1 étions plus nombreux. Mais au fil du temps, certains pays ont retiré leurs

2 ressortissants qui étaient des observateurs.

3 Q. Par contraste, la KVM comptait quelque chose comme 2 000 personnes,

4 n'est-ce pas ?

5 R. Oui.

6 Q. Voyons maintenant comment vous consignez les choses. Aujourd'hui, vous

7 n'avez apporté aucune des notes originales que vous avez rédigées.

8 R. C'est vrai.

9 Q. Vous n'avez rien apporté pour ce qui est des rapports que vous auriez

10 véritablement transmis. Vous n'avez que des projets de texte saisis dans

11 votre ordinateur personnel.

12 R. Oui.

13 Q. Vous n'avez rien apporté pour ce qui est des rapports qui seraient

14 arrivés des cinq équipes qui étaient disséminées sur le terrain, donc à

15 partir de cette vingtaine de personnes que vous aviez comme personnel ?

16 R. Non.

17 Q. Je vais peut-être être mesure de vous montrer, en temps utile, un de

18 ces rapports. Je vais voir si je peux l'obtenir. Je vais faire de mon

19 mieux. Non, je ne l'ai pas encore.

20 Vous vous êtes plaint de la façon dont ces 2 000 observateurs qui

21 travaillaient pour la KVM travaillaient. Pourquoi, à votre avis, ces 2 000

22 personnes, ou la plupart, ou un seul d'entre eux, se seraient-ils comportés

23 de façon non professionnelle, de la façon dont ils rapportaient les

24 événements ?

25 R. Ce n'est pas ce que j'ai affirmé, et je ne pense pas qu'ils auraient

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1 exprimé quelque chose qui n'aurait pas été professionnel dans leurs

2 rapports.

3 Q. Vous semblez dire que l'impression que donnaient la plupart des autres

4 personnes étaient fausse, alors que l'image que vous donniez était exacte.

5 Est-ce que, parmi les gens dont vous dites qu'ils n'ont pas bien représenté

6 la situation au Kosovo, est-ce que vos incluez les membres de la KVM ?

7 R. Cela, je ne sais pas. Tout ce que je sais, c'est que mes rapports se

8 basaient sur les informations que nous avons reçues, les informations qui

9 étaient disponibles, et que nos rapports, pendant tout un temps, ont été

10 aussi transmis à l'OSCE.

11 Q. Prenons la dernière page de l'intercalaire 4. Les tensions entre

12 l'OSCE, qui compte un personnel important, entre le général DZ et vous-

13 même, se révèlent ici à cette page. Prenez le bas de la page. Nous y

14 trouvons la justification qui n'a pas été mentionnée par l'accusé

15 d'ailleurs. Bas de page, nous trouvons une des raisons expliquant pourquoi

16 l'OSCE s'inquiétait du fait que vous ne répondiez pas de l'OSCE. Voici ce

17 que l'OSCE dit : "EU KDOM devrait toujours faire rapport à l'OSCE

18 lorsqu'elle souhaite faire quelque chose, parce que le chef des opérations

19 de l'OSCE ne veut pas être responsable de la mort de membres de la KDOM."

20 En fait, l'OSCE voulait veiller à votre sécurité.

21 R. C'est ce que dit le général DZ, qu'il a utilisé uniquement comme

22 argument, parce que l'OSCE, si nous nous étions vraiment trouvés en crise,

23 elle n'aurait pas pu nous aider de toute façon.

24 Q. Voyons certains exemples du rapport fait par l'OSCE --

25 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic.

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1 L'ACCUSÉ : [interprétation] Cette question est inappropriée. M. Nice dit

2 que, s'ils ne savaient pas où elles étaient, l'OSCE n'aurait pas vraiment

3 pu veiller à leur sécurité.

4 M. NICE : [aucune interprétation]

5 L'ACCUSÉ : [interprétation] La mission de l'OSCE n'était pas armée, et

6 c'était notre police qui assurait leur sécurité à eux.

7 M. NICE : [interprétation] Monsieur le Président --

8 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, vous pourrez en

9 parler plus tard.

10 M. NICE : [interprétation]

11 Q. Examinons certaines des choses dont vous avez parlé. Je crois que je

12 pourrai les aborder dans l'ordre, je l'espère du moins. Mais auparavant,

13 dites-moi ceci : pour avoir les avis que vous avez, et vous avez été tout à

14 fait magnanime, est-ce que vous avez pris la peine de voir ou d'essayer de

15 voir les rapports de l'OSCE dans ce qui était appelé le livre bleu ?

16 R. Non, non.

17 Q. Pourquoi ? Vous êtes un officier de haut rang. Vous avez fait part de

18 votre expérience. Vous avez, à vos côtés, une mission de vérification forte

19 de 2 000 hommes qui vérifie et consigne, de façon très rigoureuse, ce qui

20 se passe. Est-ce qu'il n'était pas séant de voir ce que d'autres disaient,

21 de voir comment ils faisaient rapport de la situation ?

22 R. Non. Moi-même, enfin, les opérations de l'OSCE et moi-même, nous nous

23 sommes souvent rencontrés. Nous avons parlé des choses qui se passaient. En

24 principe, il n'y avait même pas la nécessité de se concerter.

25 Q. Avant d'abandonner l'intercalaire 4, je relève le commentaire que fait

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1 le général DZ à propos de votre opération. C'est qu'apparemment, vous ne

2 sortiez jamais de vos véhicules. Vous avez répondu que, vous n'aviez jamais

3 vu un seul membre de la UK DOM, de la UK DOM britannique --

4 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Cela se trouve où ?

5 M. NICE : [interprétation] Bas de la dernière page à l'intercalaire 4.

6 "Nous n'avions jamais vu un membre de la KDOM de l'Union européenne quitter

7 ses véhicules," et l'autre répond, qu'effectivement, il n'avait jamais vu

8 un seul membre de la KDOM de l'Union européenne sur le terrain.

9 Q. En fait, vous étiez un tout petit groupe.

10 R. Nous étions petits, mais par rapport à l'OSCE, nous avions, pour

11 avantage marquant, que nous avions passé beaucoup de temps au Kosovo et que

12 nous avions des rapports beaucoup mieux établis, beaucoup plus de longue

13 durée, avec les deux parties en présence. Alors, le succès ou l'échec de

14 notre mission n'était pas tributaire du nombre, mais plutôt de la façon

15 dont la mission s'était développée et avait grandi.

16 Q. La pièce 371 [comme interprété], c'est ce livre bleu. Vous avez relaté

17 des événements qui s'étaient produits à Ivaja.

18 M. NICE : [interprétation] Je vais demander à M. l'Huissier de placer sur

19 le rétroprojecteur deux pages de ce rapport, en date du 8 et du 9 mars

20 1999. La première page porte un numéro ERN, c'est le numéro 0352539. Je

21 vous remercie, Monsieur l'Huissier.

22 Q. Il s'agit ici d'un rapport que connaît bien la Chambre. Utilisant la

23 méthode systématique, je ne vais pas m'y attarder, mais prenez le coin

24 supérieur gauche. Il s'agit du 8 mars. On dit : "A 9 heures 05 du matin,

25 l'UCK a fait rapport du fait que la VJ/MUP avait attaqué le village de

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1 Straza et avait pilonné le village d'Ivaja. A 14 heures, il a été fait

2 rapport du fait que Straza était en feu."

3 Nous allons maintenant prendre la page suivante. Le 9 mars, on parle aussi,

4 même méthode de rapport, méthode systématique. Voici ce qui est fourni par

5 l'OSCE : "Opération de la VJ et du MUP, visant à nettoyer l'UCK de la

6 région du Djeneral Jankovic. Des patrouilles de la KVM sont vues, dans un

7 premier temps, interdites l'accès au village touché. Les forces du MUP et

8 de la régie ont ensuite utilisé la systématique toujours utilisée, qui est

9 d'entourer le village local, de forcer à la fuite les habitants par des

10 tirs directs et indirects. Arrivé le milieu de l'après midi, les maisons

11 étaient en feu Gajre, Ivaja, Straza, et Alil Mahala. Les Unités du MUP

12 semblaient déterminées à détruire ces villages."

13 Avez-vous la moindre raison de douter de l'exactitude de ce rapport de la

14 KVM ? Le numéro étant 03525246.

15 R. Uniquement pour ce qui est de ces villages, ces villages que j'ai

16 mentionnés et où j'ai été.

17 Q. Vous parlez d'une pause déjeunée que de l'aspect que cela avait, est-ce

18 que vous savez que la mosquée que ces deux villages avaient été détruits ?

19 R. Je me suis trouvé dans ces villages et je vous ai décrit la situation.

20 Je vous ai dit que c'était un peu comme si cela ressemblait presque à une

21 situation de la pause midi, la pause déjeunée. Mais j'ai ajouté que, dans

22 ces villages, je n'avais découvert qu'un incendie.

23 Q. Quand est-ce que vous allez dans ces villages ?

24 R. Le jour où il a été fait rapport, le lendemain, en tout cas, le 9, je

25 m'en souviens je me souviens d'un rapport envoyé par un de mes équipes qui

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1 est allé dans ces trois villages. Ils ont dit que les villages n'avaient

2 pas été détruits.

3 Q. Mais qui a fait ces déclarations ?

4 R. [aucune interprétation]

5 Q. [aucune interprétation]

6 R. Mais une de mes équipes.

7 Q. Vous l'avez sur vous ce rapport de votre équipe, est-ce que vous avez

8 essayé de l'obtenir ce rapport de la MCCE.

9 R. Non.

10 Q. Est-ce que vous avez suivi la présentation des éléments de preuve dans

11 ce procès. Notamment vous avez deux personnes de la famille Loku, qui sont

12 venues témoigner ici.

13 R. Bien sûr, je n'étais pas ici, mais je peux vous dire ce que j'ai déjà

14 dit. Je fais référence au rapport que j'ai reçu et ce que j'ai vu moi-même.

15 Q. Parce que ces deux témoins ont parlé de la destruction des mosquées de

16 l'incendie volontaire de maisons, les deux chars se trouvant dans les

17 barrages. La seule raison que vous pouvez avancer pour dire, est-ce --

18 serait -- suffirait pour mettre en doute de ce que dit la KVM ?

19 R. Non. Je ne veux pas le faire et je ne veux pas ici me livrer à des

20 conjectures. Mais je ne sais pas, je ne sais pas pourquoi c'est écrit de la

21 sorte. Je n'ai pas de renseignements en ce qui concerne, notamment, Straza,

22 le deuxième village que vous avez mentionné. Je ne peux que répéter ce que

23 j'ai déjà dit.

24 Q. Prenons un autre exemple de votre déposition.

25 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Cela se trouvait dans quel

Page 37097

1 intercalaire ?

2 M. NICE : [interprétation] Ivaja est mentionné -- je ne l'ai pas sous la

3 main, mais nous allons le retrouver. Mme Mueller l'a peut-être, mais on va

4 vérifier.

5 Q. Est-ce que nous pouvons maintenant consulter l'intercalaire dont vous

6 avez discuté avec l'accusé ce matin ?

7 L'ACCUSÉ : [aucune interprétation]

8 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui.

9 L'ACCUSÉ : [aucune interprétation]

10 L'INTERPRÈTE : Hors micro.

11 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Il n'y a pas d'interprétation.

12 L'INTERPRÈTE : Il n'y a pas de micros allumés.

13 M. MILOSEVIC : [aucune interprétation]

14 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je dis que j'aimerais vous aider pour ce qui

15 est de cette question posée par le Juge Bonomy. Cela se situe à

16 l'intercalaire 12. On y trouve des évaluations hebdomadaires concernant la

17 période du premier 11 mars. C'est dans ce cadre que se présentent les

18 événements présentés et mentionnés par M. Nice. A la page 2 déjà, vous

19 voyez la description de ces événements à Kotlina, Ivaja et Gajre. Les 8 et

20 9 mars, et le témoin a déjà parlé de ces incidents. Il vous a relaté ce

21 qu'il avait vu, cela a une référence seulement mais à plusieurs reprises le

22 témoin a fait part de son expérience personnelle parce qu'il est allé dans

23 ces villages, il les a vu.

24 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur

25 Milosevic.

Page 37098

1 M. NICE : [interprétation]

2 Q. Prenons l'intercalaire 3, un des documents que vous avez examiné ce

3 matin. Pour ce qui va du 6 au 13 janvier 1999. On vois une -- référence

4 l'accusé en vous posant des questions a essayé de grossir cet événement,

5 mais on lis au premier paragraphe, le fait : "Que trois policiers ont été

6 tués dans une embuscade tendue par l'UCK."

7 M. Dicklich va peut-être veiller à ce que soit placé la même pièce, ou une

8 pièce analogue. La pièce 352473. Cela va vous donnez une idée de la méthode

9 utilisée par l'OSCE parce qu'ici c'est par rapport quotidien sous forme de

10 tableau.

11 Vous voyez ici dans le coin inférieur gauche, une indication : "Numéro 2 :

12 le centre original fait rapport du fait que vers 10 heures 44, l'UCK a

13 attendu une embuscade à un convoi du MUP à quatre kilomètres au nord-est de

14 Suva Reka." D'après le rapport : "Il y a trois policiers tués au combat ou

15 en action, trois qui ont été blessés au combat, et trois civils albanais

16 blessés."

17 Maintenant nous avons un deuxième point qui nous donne un récit

18 circonstanciel des constatations faites par la KVM. "Numéro 2, le centre

19 régional 1, fait rapport du fait qu'avant 10 heures 40, une patrouille du

20 MUP se composant 1 Lada Niva et de 2 Pinzgauers a été pris en embuscade à

21 quatre kilomètres au nord-est de Suva Reka," et on donne les cotes. "La

22 patrouille a essuyée des feux à partir de tranchés bien camouflés qui

23 semblent être avoir été occupés depuis plusieurs jours des blessés." On

24 donne de nouveau trois morts, trois blessés et trois civils albanais

25 blessés qui se sont trouvés là par hasard. "L'UCK a quitté la zone aussitôt

Page 37099

1 après l'embuscade après l'examen des tranchés on a retrouvé des douilles et

2 des obus de RPG ont été utilisés. Apparemment, les policiers sont morts,

3 alors qu'ils étaient à l'intérieur des Pinzgauers."

4 En voyez-vous des doutes quant à l'exactitude de ces rapports, alors que

5 l'on voit simplement dans votre rapport le fait que trois policiers ont été

6 tués dans une embuscade tendue par l'UCK ?

7 R. Il est clair, Monsieur, qu'il s'agit d'un rapport hebdomadaire qui

8 reprend tous les événements particuliers parce que pour ce qui était du

9 détail des événements nous avions des rapports quotidiens dans lequel nous

10 détaillons les événements, ce qui n'était pas la cas dans le rapport

11 hebdomadaire.

12 Q. Oui, mais vous ne vous souvenez pas, vous n'avez pas de rapports

13 détaillés qui viendraient à l'appui de votre rapport hebdomadaire. Est-ce

14 que vous avez des doutes au sujet de ce rapport ?

15 R. Non, je n'ai pas de doute au sujet de ce rapport, mais je ne sais plus

16 maintenant exactement jusqu'à quel moment nous avons envoyé nos rapports à

17 l'OSCE, et rapports dont ils se sont servis pour leurs propres rapports,

18 mais bon peu importe. En tout cas, nous avons également envoyé des rapports

19 très détaillés très circonstanciés à Sarajevo et ces rapports ont sans

20 doute ensuite été communiqués à Brussels et ce que j'ai ici dans ce résumé

21 pour cette période, ne fait pas mention de tous ces détails parce que mon

22 objectif quand j'établis ce rapport c'était de donner une idée de ce qui

23 c'était passé pendant la semaine.

24 Q. Etes-vous en train de me dire que vos rapports qui n'existent plus ou

25 qui ne sont plus ici ? Est-ce que vous nous dites qu'ils correspondent à ce

Page 37100

1 qui figure dans ceux de la KVM ou est-ce que vous acceptez que les rapports

2 de vos collaborateurs étaient beaucoup moins détaillés que ceux que

3 pouvaient préparer la KVM ?

4 R. En dehors de ce que j'ai vu ou de ce que j'ai lu, je ne sais pas

5 exactement quels étaient les rapports de l'OSCE ou de la KVM ce qu'ils ont

6 signalés parce que ces rapports, je ne les ai pas toujours eus.

7 Q. Mais est-ce que vous diriez vous aviez le même niveau de détails dans

8 vos rapports ? Est-ce que vos rapports étaient meilleurs, de moins bonne

9 qualités, ou de qualités équivalentes ?

10 R. Différents, et si vous me le permettez, je vais répéter. Le rapport

11 quotidien comprend des détails, ce qui n'est pas le cas du rapport

12 hebdomadaire qui reprend les événements et les situent dans un contexte

13 bien particulier, ce qui permet de se faire une idée globale de ce qui

14 s'est passé pendant la semaine. Cela doit forcément être différent; sinon,

15 cela consiste simplement répéter -- simplement ce qui figure dans les

16 rapports au quotidien.

17 Q. Vous avez en mesure de donner votre opinion sur toutes sortes de points

18 relatifs à ces événements; cependant, vous n'êtes arrivé sur place qu'au

19 cours de l'automne 1998, vous n'aviez eu auparavant aucune expérience du

20 Kosovo ?

21 R. Non. Je n'avais aucune expérience de la région du Kosovo.

22 Q. Avez-vous relu le rapport d'octobre 1999, de l'organisation de Helsinki

23 Watch le rapport de mars 1990, le rapport de décembre 1996, ou le rapport

24 de mars 1993, tous rapports qui ont été versés au dossier afin de vous

25 faire une idée des violations du droit l'homme au Kosovo.

Page 37101

1 R. Je n'ai pas lu ces rapports. J'ai lu un rapport absolument excellent,

2 un rapport britannique au sujet de la situation au Kosovo, je ne me

3 souviens pas du titre de ce rapport, et j'ai eu la chance de rencontrer

4 quelqu'un qui était au Kosovo depuis février 1998, et qui avait suivi

5 partiellement du moins l'évolution de la situation sur place et les

6 événements.

7 Q. Avant de passer à un autre sujet, pour bien comprendre votre point de

8 vue et votre situation, je voudrais savoir si vous avez quelques raisons

9 que ce soit de remettre en doute diverse relatifs aux violations des droits

10 de l'homme et l'exactitude de ces rapports, des rapports préparés en 1990

11 et dans les années 1990. Est-ce que vous avez une raison de pencher -- de

12 douter ce qui figurait dans ces rapports ?

13 R. Je ne peux émettre des doutes que sur ce que je sais. Je ne connais pas

14 les rapports dont vous parlez.

15 Q. En 1988, il y a deux rapports qui ont été publiés par "Human Rights

16 Watch." Est-ce que vous avez lu le premier ?

17 R. Je ne l'ai pas lu.

18 Q. Regardons ce qui a été écrit au sujet d'un événement dont vous nous

19 avez parlé qui figure dans le rapport de décembre 1998. Vous souvenez-vous,

20 vous avez parlé aux Juges, vous nous avez parlé d'un charnier ? Vous nous

21 dites que vous êtes allé sur place et quelqu'un vous a expliqué que ce

22 n'était pas le résultat d'un massacre, mais qu'en fait, tout cela c'étaient

23 les conséquences d'un vent d'état d'un affrontement tribal. Vous vous en

24 souvenez ?

25 R. Oui.

Page 37102

1 Q. Examinons une pièce qui a déjà été versée au dossier et qui porte la

2 cote 198.

3 M. NICE : [interprétation] Je vais demander à l'Huissier de bien vouloir

4 placer le document sur le rétroprojecteur.

5 D'abord, la partie inférieure de la page numéro 1. Document qui s'intitule

6 Une semaine de terreur à Drenica. Le bas de la page 1, je vous prie. Non,

7 pouvez-vous me rendre le document ? Je vais essayer de trouver moi-même la

8 page afin de ne pas perdre de temps. Je vous prie de m'excuser. Je n'avais

9 pas vérifié parce que le document que je suis en train de présenter à un

10 format un peu différent que celui que j'ai en main.

11 Q. Monsieur Hartwig, il s'agit d'un incident. Vous verrez qu'en bas de la

12 page 1, il est indiqué : "L'incident le plus grave qui soit signalé dans ce

13 rapport a eu lieu à fin de septembre 1998 dans la propriété de la famille

14 Delijay à Gornji Obrinje, village qui avait été le théâtre de combat

15 intense entre les forces gouvernementales et l'UCK, combat qui avait," -

16 page suivante - "qui avait fait 14 morts au moins parmi les policiers. Des

17 forces spéciales de la police ont riposté en tuant 21 membres de la famille

18 Delijaj, tous des civils, et ceci au cours de l'après-midi du samedi 26

19 septembre. Quatorze personnes ont été tuées dans un bois avoisinant où

20 elles étaient cachées pour se protéger des pilonnages du gouvernement, six

21 entre ces personnes étaient des femmes âgées de 22 à 62 ans. Cinq des

22 victimes étaient des enfants âgés de 18 mois à neuf ans. Sur les trois

23 hommes tués dans la forêt, deux avaient plus de 60 ans.

24 "L'organisation 'Human Rights Watch' s'est rendue sur les lieux le 29

25 septembre au moment où on a sorti les cadavres de la forêt afin de les

Page 37103

1 enterrer. Les 14 victimes étaient toutes vêtues en civil, la plupart

2 semblait avoir reçu un coup de revolver ou une balle dans la tête à bout

3 portant, et de nombreux corps avaient été mutilés."

4 Paragraphe suivant : "De plus, d'autres personnes -- en plus de ces 14

5 personnes, sept autres membres de la famille Delijaj ont été tués par les

6 forces gouvernementales dans le propriété de la famille et aux environs."

7 Est-ce que cela vous semblait être le même incident dont on vous avait

8 expliqué que ce n'étaient pas les forces de sécurité qui étaient

9 responsables mais qu'il s'agissait d'un affrontement de caractère féodale ?

10 R. Je ne conteste nullement ce qui figure ici. Je dis simplement ce qu'on

11 m'a rapporté à moi, on m'a dit plus d'une fois que les meurtres étaient

12 parfois dus à des affrontements, à des vents d'état, à des affrontements

13 dans le caractère tribal. Je ne remets pas en compte tout ce qu'on me dit

14 et je ne crois tout non plus par argent comptant.

15 Q. [aucune interprétation]

16 R. Je pense que cela doit donner -- cela doit inciter à essayer de

17 renseigner à trouver des renseignements supplémentaires. Je crois que c'est

18 toujours la chose à faire dans ces cas-là essayer de voir où est la vérité.

19 Q. Essayez de vous concentrer sur mes questions. Est-ce que vous avez des

20 doutes, est-ce que vous pensez qu'il y a le moindre doute au fait que l'on

21 a une description de l'incident dont vous nous avez parlé vous-même ?

22 R. Je ne sais pas. Je ne sais pas. Je n'ai aucune raison de remettre en

23 doute ou de confirmer ce rapport.

24 Q. Est-ce qu'il y a une des raisons, Monsieur Hartwig, qu'on vous a permis

25 de faire largement part de vos opinions sans apporter de preuve ? Vous êtes

Page 37104

1 simplement arriver, vous avez dit qu'il s'agit d'un vent d'état. Est-ce

2 qu'il y a des raisons que vous pouvez nous donner et qui peuvent expliquer

3 que quelqu'un ait pu vous dire, il s'agissait de rivalité entre des clans

4 et qui va contrairement à l'encontre de ce qui figure dans ce rapport

5 produit par quelqu'un d'assez connu M. Frederick Abrahams ?

6 R. Si c'est ce qui est écrit, je n'ai aucune raison de remettre en doute

7 ce qui figure dans ce document si cela a été confirmé par des témoins, et

8 cetera.

9 M. NICE : [interprétation] Est-ce qu'on pourrait me rendre le livre ? Il y

10 a une autre page qui m'intéresse, et il vaut mieux que je la cherche moi-

11 même. Voilà. C'est la page 18 en haut de la page. Les numéros de pages

12 figurent en haut.

13 Q. Bon. Je vais essayer de vous demander de réfléchir au point suivant,

14 Monsieur, ce rapport, ici on va examiner la page 18, ce rapport nous dit la

15 chose suivante, je cite : "Après avoir pris le contrôle de Likovac, les

16 forces gouvernementales sont parties pour Obrinje. D'après Sejnije Delijaj,

17 qui se trouvait à Gornje Obrinje avec sa famille au début de l'offensive

18 les forces gouvernementales ont commencé à pilonner la priorité Delijaj à

19 partir de Likovac vers 8 heures du matin, le vendredi, 26 septembre, au

20 moyen de différentes armes d'artillerie et de divers mortiers. La plupart

21 des habitants de la propriété ont pris la fuite dans la forêt pour s'y

22 abriter."

23 Passons à la page suivante, page 19, au deux tiers de la page. Un peu plus

24 bas, s'il vous plaît, Monsieur l'Huissier. Merci. "D'après le centre de

25 presse Pristina, un centre de presse entretenant des liens étroits avec le

Page 37105

1 gouvernement serbe, au moins sept policiers ont trouvé la mort dans la zone

2 d'Obrinje le 25 septembre 1998, la veille du massacre de la famille Delijaj

3 et les exécutions sommaires qui se sont déroulées aux environs ou à

4 proximité à Golubovac."

5 Passons à la page suivante, je vous prie, page 20. En bas de la page. Plus

6 bas. Non, non, dans l'autre sens, s'il vous plaît, Monsieur l'Huissier.

7 Merci. Merci. Je cite : "Le 26 septembre, les chercheurs de 'Human Rights

8 Watch' ont observé un hélicoptère de la Croix Rouge de l'armée yougoslave

9 qui survolait le village de Plocica en direction de Gornje Obrinje, village

10 qu'on voyait en flamme à distance, on a vu cette hélicoptère retourner

11 environ 20 minutes plus tard."

12 Ensuite, 21, page 21, au milieu de la page, un peu plus haut, je vous prie

13 : "Le village de Gornji Obrinje a été, en grande partie, détruit pendant

14 l'offensive yougoslave. Il y avait encore de la fumée qui se dégageait des

15 ruines lorsque les chercheurs de 'Human Rights Watch' sont arrivés vers 11

16 heures du matin, le 29 septembre…" On parle ensuite de tirs sporadiques.

17 Monsieur le Témoin, dans ce vous nous dites, vous n'avez aucun

18 élément que vous pouvez apporter pour infirmer un rapport tel que celui

19 dont nous venons de lire, un rapport qui a des sources dignes de ce nom, un

20 rapport confirmé ?

21 R. Oui, c'est vrai que je n'ai pas été témoin oculaire des faits. Je

22 n'étais pas là, et d'autre part, je répète ce que j'ai déjà dit, je me suis

23 appuyé sur les rapports et les informations qui nous étaient communiqués.

24 Q. Monsieur Hartwig, reconnaissez-vous que la KVM, forte de ses 2 000

25 observateurs, était une organisation qui fonctionnait de manière

Page 37106

1 disciplinée et qui avait des règles bien précises dans la manière dont on

2 contactait les représentants de la presse ou que l'on préparait des

3 déclarations publiques ? Est-ce qu'elle était bien organisée, avec un

4 porte-parole qui s'exprimait, alors que tous les autres membres de la KVM

5 étaient censés garder le silence ? Est-ce que vous le reconnaissez ?

6 R. Vraiment, je ne suis pas dans une position très facile pour vous

7 répondre. Je n'accuse personne, parce que je n'ai aucune raison, aucun

8 motif d'accuser qui que ce soit. De plus, je ne connais pas les rapports

9 qu'ils produisaient au quotidien. Je n'ai pas non plus de motifs m'incitant

10 à mettre en doute leurs rapports. Cependant, je me souviens que, très peu

11 de temps après que l'on ait trouvé les corps à Racak, une déclaration très

12 claire a été communiquée aux médias au sujet de l'identité des auteurs de

13 ces crimes.

14 Q. Ma question était précise; elle avait trait au système employé, aux

15 règles. Est-ce que vous reconnaissez que la KVM avait des règles très

16 précises quant aux contacts qu'elle entretenait avec la presse, oui ou

17 non ?

18 R. Je ne saurais le confirmer parce que, je n'ai pas assisté à leurs

19 conférences de presse.

20 Q. Vous, en revanche, au bout de deux mois et demi ou trois mois sur

21 place, avec votre mission qui comptait 20 à 40 personnes, vous vous sentez

22 tout à fait justifié et libre de parler de tous les aspects de l'histoire

23 et de la vie du Kosovo ?

24 R. Non. Dans mon rapport, je n'ai pas parlé de tous les aspects de la vie

25 au Kosovo --

Page 37107

1 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je pense que le témoin a bien

2 répondu à votre question.

3 M. NICE : [interprétation]

4 Q. Examinons ce que dit Klaus Naumann, qui est un officier de très haut

5 rang de l'armée allemande. Avez-vous quelque raison que ce soit de mettre

6 en doute sa crédibilité en tant que soldat ?

7 R. Je ne remets rien en question, parce que je ne vois pas où vous voulez

8 en venir, je ne sais pas ce qu'il a dit, à quoi vous pensez en particulier,

9 et je ne sais pas de quelles informations il pouvait disposer en dehors de

10 celles dont nous disposions.

11 Q. Mais je vous donne l'occasion avant de vous dire la façon dont il a

12 présenté les événements ici dans ce prétoire. Je vous donne la possibilité,

13 et vous avez le droit de le dire, même si cela vous gêne. Je voudrais

14 savoir si vous avez quelque raison que ce soit vous incitant à douter de

15 Klaus Naumann et de ses propos. N'hésitez pas.

16 R. Comment dire ? Je donne au général Naumann le droit que j'accorde à

17 tout le monde, c'est-à-dire, le droit d'avoir son propre opinion et

18 d'arriver à ses propres conclusions.

19 Q. Nous avons ici un des tous premiers officiers de l'armée allemande qui

20 disposait des sources d'information les plus complètes, sources des

21 services de renseignement notamment. On peut tout à fait le supposer.

22 R. Oui, je pars tout à fait de ce principe, effectivement.

23 Q. Un peu plus bas, s'il vous plaît, Monsieur l'Huissier, sur le

24 rétroprojecteur. Oui, voilà.

25 Voici la manière dont le général Naumann a présenté son opinion sur ce qui

Page 37108

1 s'est passé entre les accords d'octobre et le moment où les pilonnages ont

2 commencé. Il dit la chose suivante : "Cela n'a pas duré pendant très

3 longtemps. A partir de novembre, nous avons eu des informations relatives à

4 des violations, et de manière répétée.

5 "Je dois dire, en toute justesse, à partir des informations que j'ai

6 eues sur le terrain venant de la KDOM, et plus tard, des organisations de

7 vérification du Kosovo, que beaucoup de ces incidents étaient déclenchés

8 par l'UCK qui essayait d'exploiter le vide créé par le retrait des forces

9 de sécurité serbes, et qui ensuite s'est insinuée dans la région pour

10 essayer d'en prendre le contrôle. Je crois également qu'ils se sont livrés

11 à des manœuvres de provocation et qu'ils ont eu souvent recours à la

12 violence ce faisant."

13 Il a eu accès à certains de vos rapports, mais à beaucoup d'autres rapports

14 également. Est-ce que son résumé de la situation vous semble conforme à la

15 réalité ?

16 R. Si j'ai bien compris ce qu'il dit ici, il reconnaît qu'il y a eu des

17 violations.

18 Q. Mais, pourquoi dites-vous "j'admets" ? Il dit simplement qu'il y a eu

19 des violations. Il ne défend personne, il ne prend partie pour personne. Il

20 dit simplement qu'il y a eu des violations.

21 R. Oui. Je vais continuer en allemand.

22 Quand il constate ceci, il a sans doute ses raisons. Je redis ce que j'ai

23 déjà dit précédemment, cela dépend peut-être du point de vue que l'on

24 adopte. Cependant, il y a une très grande différence, me semble-t-il. Une

25 différence qui explique une perspective différente vu la distance ou la

Page 37109

1 proximité que l'on a des événements.

2 Je ne dis nullement que le général Naumann se trompe ou qu'il n'a pas

3 bien compris ou évalué la situation. Je pense simplement que c'est dû à la

4 distance ou à la proximité, que dans ces cas-là, cela entraîne une

5 évaluation de la situation qui peut différer quelque peu, suivant que l'on

6 se trouve près ou loin des événements.

7 Q. Dans ce passage, on fait poser la responsabilité sur l'UCK. Je

8 continue la lecture, je cite :

9 "Le problème c'est que, dans de nombreux cas, comme j'ai pu le voir

10 plus tard, en particulier au cours des mois de novembre et de décembre, le

11 problème, c'est que la partie serbe a réagi encore une fois de manière

12 disproportionnée. Si je puis le dire, c'était l'ancienne façon de réagir à

13 un incident au cours duquel un individu avait essayé de tuer ou avait tué

14 un officier de police et où l'on voyait l'intervention des forces de

15 sécurité au moyen d'armements lourds contre des villages avec un emploi de

16 la force disproportionnée contre les civils."

17 Je vous rappelle donc qu'il s'agit d'un résumé fait par le général

18 Naumann après avoir examiné beaucoup de rapports, beaucoup d'incidents

19 créés par l'UCK, qui profite du vide laissé sur le terrain par les accords

20 d'octobre, et l'utilisation disproportionnée, dans une certaine mesure, de

21 la force par la VJ. C'est un témoin de l'Accusation. Vous n'avez aucune

22 raison de le remettre en question, n'est-ce pas ? Il ne s'est pas trompé,

23 n'est-ce pas ?

24 R. Je peux simplement ajouter, à ce qui a été dit par le général Naumann,

25 la chose suivante, à savoir, ce qui s'est passé plus tard, à la fin 1998,

Page 37110

1 où on a vu le ministère des Affaires étrangères allemand, ensuite suivi par

2 le ministre allemand des Affaires étrangères, puisque l'Allemagne avait

3 assumé la présidence de l'Union européenne, suivi ensuite du ministre des

4 Affaires étrangères chinois. Enfin, toute cette kyrielle de ministres a

5 rappelé à l'ordre l'UCK, leur demandant de respecter les règles, ce qui

6 correspond à ce qui vient d'être dit.

7 Q. En d'autres termes, le général Naumann ne s'est pas trompé.

8 R. [aucune interprétation]

9 Q. Il dit les choses telles qu'elles sont ?

10 R. Oui, effectivement, il va dans le bon sens.

11 Q. Encore deux ou trois points que je souhaiterais aborder avec vous.

12 D'abord, la lettre à Sreten Lukic. Etant donné que vous n'avez pas votre

13 version de cette lettre avec vous, j'ai une version, une deuxième version.

14 J'ai expliqué comment je me l'étais procurée. Sreten Lukic a été

15 interviewé, et pendant cet entretien, il a donné lecture de la lettre que

16 vous lui aviez envoyée. Nous avons ici une transcription de la version

17 interprétée de la lettre. Plutôt que d'écouter l'enregistrement des propos

18 de Lukic et d'écouter la traduction qu'en fait l'interprète, je pense que

19 le mieux est de consulter la transcription en anglais. Cela aurait été plus

20 facile, bien entendu, si vous aviez amené l'original. Est-ce que vous vous

21 souvenez que vous avez relu l'original à l'hôtel ?

22 R. En premier lieu, quand je lui ai écrit, je lui ai demandé s'il était

23 bien ce général que j'avais rencontré à plusieurs reprises au Kosovo. J'ai

24 souligné que, même si ces informations --

25 Q. Je voudrais savoir si, depuis votre séjour à La Haye, la semaine

Page 37111

1 dernière, vous avez relu l'exemplaire de la lettre que vous avez et que

2 vous avez envoyée au général Lukic ?

3 R. Oui.

4 Q. Je vais donner lecture de la transcription de la traduction de cette

5 lettre. Je vais vous demander, en premier lieu, si vous reconnaissez cette

6 lettre, la lettre qui est à l'hôtel actuellement et, ensuite, je vous

7 demanderai vos observations sur certains points.

8 Le document figure sur le rétroprojecteur, et nous pouvons

9 maintenant en donner lecture. Je cite : "Mon Général, le 18 mars 1999, j'ai

10 dû quitter le Kosovo suite à des ordres qui m'avaient été donnés dans ce

11 sens. A ce moment-là, j'avais toujours foi dans les mesures politiques." Je

12 reviendrai bientôt sur ce point; j'aurais des questions à vous poser. "Ce

13 qui s'est passé après mon évacuation, c'est quelque chose que je n'aurais

14 jamais voulu voir se produire et que j'espère pouvoir oublier, autant que

15 faire se peut. Je vous écris en tant que personne privée et non plus en

16 tant que membre de la mission d'observation. Avec l'ouverture et le début

17 de la campagne de frappes aériennes de l'OTAN, j'ai mis fin à mon contrat

18 de service." Je m'interromps.

19 Est-ce que cela vous semble être la traduction de la lettre que vous

20 avez envoyée au général Lukic ?

21 R. Ce n'est pas tout à fait mon style, si je regarde le début :

22 "Cher Monsieur, Général," et cetera. Ce n'est pas la manière dont je rédige

23 mes lettres. Mais bon, à part cela, si je regarde le contenu, la teneur de

24 cette lettre, cela correspond sans doute à ce que je lui ai envoyé.

25 Q. On fait référence ici à un éventuel retour. Mais vous n'êtes pas

Page 37112

1 retourné au Kosovo, n'est-ce pas ?

2 R. [aucune interprétation]

3 Q. Vous n'êtes pas retourné au Kosovo ?

4 R. Non.

5 Q. Il y a peut-être eu une erreur de traduction. On vous décrit

6 comme membre et non pas comme chef de la mission d'observation. Nous

7 n'avons trouvé aucun document produit par quelqu'un qui vous aurait connu à

8 l'époque. Est-ce que vous étiez chef de cette mission, ou est-ce que vous

9 étiez le responsable du bureau, comme vous l'avez dit vous-même dans votre

10 déposition ?

11 R. J'étais à la tête du bureau régional. Je n'avais pas de contrat

12 en tant que tel. C'est une décision qui avait été prise par le chef de

13 mission, décision administrative.

14 Q. Vous avez été nommé membre et vous êtes devenu chef du bureau au

15 fil du temps, n'est-ce pas ?

16 R. Quand je suis allé au Kosovo, on m'avait dit que je deviendrais

17 le chef du bureau régional.

18 Q. Je poursuis la lecture de cette lettre : "Je vous prie de

19 m'excuser d'écrire cette lettre en allemand parce que mon serbe n'est pas

20 excellent. Je n'ai pas eu la possibilité de vous dire au revoir et de vous

21 remercier de la patience et de l'aide que vous m'avez apportée, patience

22 avec laquelle vous m'avez expliqué votre vision de la situation et les

23 problèmes que vous rencontriez. C'est quelque chose qui m'a beaucoup

24 influencé et qui m'a encouragé à comprendre votre position ainsi que la

25 situation yougoslave."

Page 37113

1 Vous reconnaissez donc, ici, que vous avez été fortement influencé

2 par la description des événements que vous a faite Sreten Lukic ?

3 R. Quand je suis arrivé au Kosovo, je partais du principe que tous

4 les crimes commis, tout ce qui allait mal, c'était le fait des Serbes.

5 C'est l'idée que j'avais au départ quand je suis arrivé, en deux mots.

6 Cette idée n'était plus aussi forte qu'au départ à ce moment-là, mais

7 j'avais toujours quand même à l'esprit cette idée que c'étaient les Serbes

8 qui étaient responsables des souffrances des gens dans la région.

9 Il n'a pas infirmé complètement mon opinion ni mon attitude en

10 général. Ce n'est pas lui qui a fait cela complètement. Mais c'est grâce à

11 lui que j'ai commencé à envisager la situation d'une manière un peu

12 différente.

13 Q. D'après la traduction, vous avez dit que vous avez été "influencé

14 dans une large mesure." C'est de cette façon-là que vous vous êtes exprimé.

15 On a un conflit avec deux parties en présence et des opinions qui

16 s'expriment publiquement. Vous avez passé moins de six mois sur le terrain.

17 Est-ce que c'est quelque chose de correct d'être fortement influencé par le

18 chef de la police d'une des parties dans un conflit tel que celui-ci ?

19 R. Il faut toujours voir à quel moment j'ai rédigé cette lettre.

20 C'est à ce moment-là que j'ai commencé à revenir, peut-être, sur l'avis que

21 j'avais au départ. C'est peut-être de nature à induire en erreur si vous

22 prenez ceci comme point de départ, à savoir que j'ai été fortement

23 influencé, et que ceci m'aurait poussé à prendre des mauvaises décisions ou

24 à devenir très partial.

25 Q. Mais poursuivons la lecture. "La tâche que vous aviez reçue

Page 37114

1 jusqu'au moment de votre évacuation, en fin de compte, n'a pas pu être

2 accomplie, parce que vous ne pouviez pas, vous n'étiez pas à même

3 d'utiliser vos propres ressources de la façon qui vous semblait nécessaire

4 et qui se serait parfaitement prêtée à la situation."

5 Qu'espérait-il faire qu'il n'aurait pas eu l'autorisation de faire ?

6 R. C'est ce que j'ai déjà dit. J'ai perçu qu'il y avait une volonté

7 de ne pas prendre de mesures. On répugnait cette idée parce qu'on ne

8 voulait pas, ici, envenimer le conflit, vu qu'il y avait eu cet accord

9 Holbrooke-Milosevic.

10 Q. J'espère que les Juges me pardonneront si je ne poursuis pas la

11 lecture de la lettre, mais je voudrais revenir à un point, à quelque chose

12 qui était, en fait, déclenché par le Juge Kwon.

13 Vous souvenez-vous que le Juge Kwon vous a posé une question, et vous

14 avez répondu qu'il y avait des règles de droit commun qui régissaient le

15 comportement dans un combat ? Vous vous souvenez de cela ?

16 R. Oui.

17 Q. Une première chose, quelle serait cette règle de droit commun à

18 laquelle vous pensiez ?

19 R. L'UCK s'est toujours considérée comme étant une armée. Qu'est-ce

20 que cela veut dire ? Cela veut dire que l'UCK respectait le droit de la

21 guerre. L'UCK s'est toujours considérée comme étant une armée, et par

22 conséquent, a revendiqué le droit d'utiliser le droit de la guerre, le

23 droit des conflits armés.

24 Q. Vous avez parlé de ces règles générales et communes par rapport à

25 l'intercalaire 5 --

Page 37115

1 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Robinson.

2 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, Monsieur Milosevic.

3 L'ACCUSÉ : [interprétation] Simplement, une petite correction. C'est

4 par rapport avec la traduction. On parle de l'UCK qui se considérait comme

5 étant une armée. Elle se considérait, elle-même, comme étant une armée."

6 C'est ce qui est dit dans le compte rendu alors qu'en serbe, j'ai entendu

7 dire que l'UCK était considérée comme étant une armée, était donc traitée -

8 - il y a une différence entre se considérer soi-même comme étant quelque

9 chose ou le fait d'être traité comme tel. J'espère que vous aurez compris

10 la différence.

11 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, merci.

12 M. NICE : [interprétation]

13 Q. Intercalaire 5, le rapport concernant le 28 janvier 1999. Une question

14 vous a été posée à propos du dernier paragraphe de cette page. Il y a un

15 exemple à passer sur le rétroprojecteur; sinon, je vais vous donner

16 lecture. Vous dites ceci : "L'évolution classique, ce sont des tentatives

17 d'assassinats et d'assassinats de l'UCK contre la police et la façon de

18 voir comment on essaie de découvrir les identités des auteurs et de les

19 arrêter. Vous dites qu'après les opérations, les armes sont dissimulées et

20 les combattants se transforment en citoyens ordinaires qui n'ont aucun lien

21 visible avec l'UCK. Puisque ce n'est pas la spécialité des forces serbes et

22 qu'il leur est impossible, dans ces conditions, de procéder à des

23 opérations d'intervention militaire chirurgicale, ils y vont aux coups de

24 poings ou au marteau. Cela semble être la seule réponse possible. On peut

25 s'attendre tant que l'UCK appliquera sa tactique de guérilla que la

Page 37116

1 procédure utilisée par la police et l'armée contre l'UCK ne changera pas."

2 On parle du marteau qu'on utilise. Est-ce que c'est cela qu'on

3 utilisait contre les civils ?

4 R. Quand je dis "hammering", aux coups de marteau, cela ne veut pas dire

5 qu'on va raser une région, peut-être que l'expression est assez

6 malheureuse, mais ce que je veux dire par là, c'est qu'il y a une

7 intervention massive de forces.

8 Q. Mais si on a recours massif à la force en réaction à des incidents de

9 faible envergure, inévitablement, cela va avoir pour conséquence la mort de

10 civils. Vous savez ce que dit le Général Naumann à propos de la VJ ?

11 Une première chose, dans ce rapport, est-ce que vous approuviez le

12 fait qu'on a essayé d'assommer des régions pour essayer de se débarrasser

13 de l'UCK ?

14 R. Non, je n'ai jamais approuvé ni soutenu quoi que se soit. J'avais pour

15 instruction et pour idée personnelle de fournir des informations et de

16 laisser le soin aux lecteurs, aux destinataires de ces rapports de tirer

17 les conclusions qu'ils voulaient.

18 Q. Revenons à l'intercalaire 2, s'il vous plaît, les pages ne sont pas

19 numérotées, mais à partir de la première, ce sera la quatrième si on fait

20 le décompte et en haut de la page, on dit ceci, "Vu l'état du matériel ou

21 de l'équipement." Vous avez trouvé cette page, Monsieur le Témoin ?

22 R. Oui.

23 Q. Prenons le dernier paragraphe de cette page qui commence de la façon

24 suivante : "KLA, en anglais, l'UCK représente l'armée de libération du

25 Kosovo." Un peu plus loin, vous dites ceci - ce sont des notes que vous

Page 37117

1 avez préparées en vu de cette communication que vous avez présentée - vous

2 dites : "Les actions contre des guérilleros, ce sont les opérations

3 militaires les plus difficiles. Par conséquent, il semble que quelque chose

4 qui ressemble à une action couvrant toute une zone semble la seule

5 possibilité." Vous dites que tout ceci répond à une certaine méthode. Vous

6 parlez de la communauté internationale où on montre certaines images et

7 vous dites enfin ceci : "La libération par l'UCK et la fouille éventuelle

8 où les actions de représailles des forces de sécurité serbe finissent par

9 être un cercle vicieux pour les villageois, soit ils seront tués pour

10 autant l'UCK, soit ils se seront tués par les forces de sécurité serbe."

11 De nouveau, vous parlez "d'une action couvrant une région." Est-ce

12 que, ce faisant, vous ne reconnaissiez pas -- est-ce que vous ne vous

13 faisiez pas l'écho de ripostes importantes et peut-être disproportionnées

14 lorsqu'il y avait intervention de l'UCK ?

15 R. Je le répète, je ne reconnais pas ce genre de choses. J'examine la

16 question sous l'angle militaire et je dis que c'est le type d'action le

17 plus difficile, je vous rappelle que ce texte est un projet. Mais vous

18 venez de lire certaines lignes et je peux vous dire que cela n'a pas changé

19 dans la version définitive.

20 Je ne reconnais rien. Pour moi, aucun conflit armé n'est bon. Mais

21 ici, dans de telles circonstances, parfois, il faut prendre certaines

22 décisions.

23 Q. Puisque l'intercalaire 7 a été versé, nous allons l'examiner avant de

24 revenir à votre lettre envoyée à Sreten Lukic car nous essayons de voir

25 quelle est votre attitude qui est à la base de ce rapport. Le 4 février

Page 37118

1 1999, dernière page de l'intercalaire 7, en haut de la page, vous parlez de

2 la mort de 25 Albanais, à Rugova. Je n'aurai peut-être pas le temps d'en

3 parler, mais vous dites ceci: "Les civils seront toujours impliqués,

4 touchés par les balles tant que la tactique de la guérilla s'applique et

5 que les "combattants" de la paix se cachent derrière des citoyens

6 ordinaires..." Dans la lettre, à laquelle nous revenons, que vous avez

7 envoyé à

8 Monsieur Lukic, lorsque vous lui avez dit ceci, je cite : "Parce que vous

9 ne pouviez pas et vous n'étiez pas à même d'utiliser vos propres

10 ressources, alors que vous le pensiez nécessaire et que ceci se serait

11 prêté à la situation." Est-ce qu'en disant cela, vous n'acceptiez pas le

12 genre de représailles étendues ayant des conséquences énormes pour les

13 civils, c'était quelque chose inévitable ?

14 R. Vous parlez à propos de mon attitude, de mon comportement et en rapport

15 avec ce que vous avez dit, je vous dis carrément le contraire, ce n'est pas

16 mon attitude. Je ne suis en pas en faveur de la violence et à fortiori, pas

17 pour la violence illégale. C'est simplement comme cela; les dernières

18 guerres l'ont montré, l'ont prouvé. Les civils, de plus en plus, sont ceux

19 qui doivent supporter le fardeau de la guerre, fardeau qui était,

20 auparavant, supporté par les militaires.

21 Q. Poursuivons la lecture de la lettre : "Jamais je ne vous ai envié dans

22 la tâche qui était la vôtre dans cette situation parce que partout, dans le

23 monde, la politique peut imposer ce genre de missions, mais uniquement à

24 l'armée et à la police. Je ne sais pas

25 --"

Page 37119

1 On s'arrête un instant, si vous voulez bien. Vous vous sentiez tout à

2 fait libre d'apporter des commentaires sur tout et n'importe quoi, mais

3 est-ce que vous étiez conscient des efforts qui essayaient de rendre plus

4 international le problème du Kosovo en 1997, en 1998, ce que ne voulait pas

5 l'accusé ?

6 R. Je sais qu'on a tenté de le faire, mais sans résultats.

7 Q. Savez-vous de ce qu'il est advenu à Stanisic, lorsqu'il a refusé de

8 suivre l'accusé ?

9 L'INTERPRÈTE : Pas de réponse.

10 M. NICE : [interprétation]

11 Q. Fort bien.

12 "Je ne sais pas ce qui s'est passé après mon évacuation." C'est bien vrai ?

13 Vous ne savez pas ce qui s'est passé, après votre départ, le 18 mars 1999,

14 n'est-ce pas ?

15 R. Non, parce que je n'ai plus reçu aucun rapport régulier. Tout le monde

16 a été évacué, toutes mes équipes et si j'ai appris des choses, c'est plutôt

17 par des contacts privés.

18 Q. Fort bien. Il y a peut-être une erreur de traduction, mais en fait,

19 vous n'êtes pas reparti au Kosovo après le 18 mars ? C'est ce qui est dit

20 au début.

21 R. Non.

22 Q. Puis, vous dites qu'au cours de votre séjour, vous avez envoyé à vos

23 supérieurs une description de la situation qui concordait avec la réalité.

24 "Malheureusement, ces efforts et ceux d'autres observateurs n'ont pas donné

25 de résultats. A mon retour, en Allemagne, j'ai essayé d'en informer les

Page 37120

1 médias, le monde politique pour dire ce qui c'était véritablement passé. De

2 plus, j'ai attiré l'attention sur le problème qui découle du fait que cette

3 armée de rebelles avait un soutien financier et politique pour lutter

4 contre les autorités exécutives légitimes.

5 "Ici, en tant que particulier, je n'ai pas rencontré de succès parce

6 que les seules choses que les gens croyaient, c'était ce en quoi ils

7 voulaient croire pour des raisons politiques.

8 "Maintenant, les choses sont vues un peu différemment,

9 mais vous verrez, cela va rester pareil.

10 "Je vous souhaite bonne chance."

11 M. NICE : [interprétation] Je demande ceci, Messieurs les

12 Juges : je voudrais que ce document devienne une pièce à conviction pour le

13 moment. Le témoin a reconnu qu'apparemment, c'est ce qu'il a écrit, mais

14 avant son départ de La Haye, je voudrais qu'il fournisse l'exemplaire qu'il

15 a laissé à l'hôtel, au collaborateur de l'accusé et on pourra remplacer son

16 exemplaire à lui par ce qui est ici uniquement, une pièce de substitution,

17 dirais-je.

18 L'INTERPRÈTE : Le témoin demande à intervenir.

19 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous vouliez parler de quoi ? De la

20 question du versement ?

21 M. NICE : [interprétation] Oui, oui. Je demande le versement de ce

22 document, pour le moment; mais ce document sera remplacé plus tard.

23 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui.

24 M. NICE : [interprétation] Merci beaucoup.

25 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, M. le Juge Kwon relève que nous

Page 37121

1 n'avons reçu pas l'exemplaire.

2 M. NICE : [interprétation] Tiens, tiens. Je suis vraiment navré. Le

3 Greffier n'a pas fourni les exemplaires. Ces exemplaires sont disponibles,

4 désolé que vous ne les ayez pas obtenus.

5 Q. J'ai réussi à lever les restrictions qui pesaient sur deux de vos

6 rapports. Nous allons pouvoir les examiner très rapidement.

7 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Nice, n'est-il pas

8 préférable de faire la pause, maintenant ?

9 M. NICE : [interprétation] Cela ne prendra pas beaucoup de temps,

10 effectivement. A moins que l'accusé n'ait beaucoup de questions

11 supplémentaires, il serait peut-être prudent qu'il prépare son prochain

12 témoin.

13 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, vous avez

14 entendu. Vous devriez avoir votre prochain témoin prêt à comparaître.

15 Maintenant, nous allons faire la pause, une pause de 20 minutes.

16 --- L'audience est suspendue à 12 heures 16.

17 --- L'audience est reprise à 12 heures 40.

18 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Poursuivez, Monsieur Nice.

19 M. NICE : [interprétation] Je vais peut-être présenter encore trois

20 documents, le premier étant un rapport portant la date du 26 février.

21 Monsieur l'Huissier.

22 Q. Vous êtes en train de voir un rapport en date du 26 février émanant de

23 Belgrade adressé à Pristina, le sujet étant l'évaluation hebdomadaire de

24 Belgrade pour le 26 février. Si nous voyons le bas de la page, Monsieur

25 l'Huissier, placez la première page sur le rétroprojecteur, il est adressé

Page 37122

1 de Belgrade au siège de la MCCE avec des exemplaires, on voit différents

2 postes, dont Pristina, bureau régional, le bureau où vous étiez; c'est bien

3 cela ?

4 R. Oui.

5 Q. Par contre, ce document c'est la synthèse qui vient de Belgrade et qui

6 reprend ce qui arrive de différents bureaux comme le vôtre; c'est exact ?

7 R. Je n'ai pas encore lu ce rapport. Je ne sais pas si c'est là la

8 synthèse de mes rapports à moi ou si c'est plutôt le rapport établi

9 indépendamment des miens par le bureau de Belgrade. Ce bureau à Belgrade

10 avait une habitude, celle de tenir compte de nos apports mais aussi de ce

11 qui venait de Monténégro pour en faire la synthèse.

12 Q. Fort bien. Prenons la deuxième page, en effet, le rapport concerne le

13 Kosovo : "Même si le Kosovo," est-il dit, "est resté assez calme," c'est

14 comme cela que commence le paragraphe, "pendant la période de la conférence

15 de Rambouillet, il y a des signes inquiétant montrant qu'un conflit risque

16 d'éclater sous peu. L'UCK a déclaré qu'elle ne va pas abandonner ses armes,

17 et d'après certaines estimations l'UCK compte 30 ou 40 000 hommes. Il y a

18 une meilleure organisation, une meilleure formation surtout pour ce qui est

19 des forces de guérilla légèrement armées."

20 Dans ce rapport, apparemment on a mis en compte vos contributions à vous,

21 vos apports ?

22 R. Je ne pense pas. Je pense me souvenir que précisément pendant les

23 négociations de Rambouillet le Kosovo n'était pas particulièrement calme --

24 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Il n'y a pas d'interprétation.

25 L'INTERPRÈTE : Oui.

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1 M. NICE : [interprétation] L'interprète pourrait-il répéter ce qu'a dit le

2 témoin sinon nous allons simplement demander au témoin de répéter ce qu'il

3 a déjà dit.

4 M. NICE : [interprétation]

5 Q. Poursuivez, Monsieur Hartwig.

6 R. On dit ici que la situation est assez calme. Je trouve que cela a une

7 impression des plus subjectives.

8 Q. Poursuivez la lecture.

9 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je pense que le témoin a dit au début

10 qu'à son avis ce n'étaient pas ici des éléments qui tenaient de ce rapport.

11 Je ne pense pas que ceci ait été repris au compte rendu d'audience.

12 M. NICE : [interprétation] Merci, Monsieur le Juge. Nous estimons que c'est

13 une partie de sa réponse parce que cela correspond à ce qu'il a déjà dit

14 auparavant.

15 Q. Je poursuis la lecture : "Il n'en demeure pas moins que l'UCK reste une

16 force de guérilla mais peu armée. Sans aide, elle ne fait pas le poids

17 devant le MUP et la VJ qui peut déployer beaucoup d'artillerie et de

18 blindés. Il y a déjà des rapports selon lesquels l'UCK refuse l'accès sur

19 des routes secondaires et dans certaines zones au MUP. Ceci n'est pas

20 encore arrivé au niveau du début de l'été 1998 lorsque tout le Kosovo

21 central était décrit comme une zone libérée. Néanmoins, le MUP insiste pour

22 dire qu'elle a le droit de patrouiller les routes principales afin de

23 garder ouvertes les voix de communication entre les villes où se trouve

24 l'essentiel de la population serbe."

25 C'est assez complet.

Page 37124

1 R. Je ne sais pas si ceci s'appuie sur mes rapports, mais en tout cas,

2 s'agissant du chef du bureau de Belgrade j'ai souvent téléphoné avec lui.

3 Nous nous sommes rendus visite, et c'était au fond là notre avis. D'autant

4 que les routes principales et des voix de communication entre les villes

5 les plus grandes du Kosovo étaient concernées --

6 Q. Voyons la phrase suivante, c'est celle-là qui m'intéresse : "La réponse

7 des Serbes aux activités de l'UCK sera inévitablement disproportionnée. Les

8 Serbes ne savent comment s'y prendre autrement. Lorsqu'on a une armée

9 surtout constituée de conscrits qui n'ont pas eus de formation requise pour

10 lutter contre une contre rébellion, il n'y a sans doute d'autres moyens."

11 Il y a eu d'autres références à cette étendue, de la réaction au fait qu'on

12 y allait à coups de marteau. Vous écrivez ici à Lukic. Ce commentaire ici

13 parle de l'inévitabilité d'une réponse disproportionnée, c'est à votre

14 avis ?

15 R. Non, non, ce n'est pas mon avis. C'est l'avis de l'auteur de ce rapport

16 aussi. Ce sont simplement des faits reconnus sur le plan militaire.

17 Q. Apparemment la phrase précédente était de votre cru. Voyons la phrase

18 suivante. "La situation actuelle risque de connaître une escalade avec des

19 conséquences militaires et humanitaires manifestes. Il est possible que

20 l'UCK ait plus de confiance dans ses prouesses armées que ne le pensent les

21 observateurs internationaux ou il se pourrait que l'UCK ne pense pas que

22 les Serbes ont le courage de mener une guerre d'usure. Ici, alors on parle

23 de renforcement des forces serbes qui pourraient compter 4 500 Serbes --"

24 D'où est-ce que cela vient, de vous ?

25 R. Non, non. C'est un collègue britannique qui l'a rédigé, ce rapport à

Page 37125

1 Belgrade. C'est lui qui dirigeait le bureau de Belgrade.

2 Q. Comment s'appelle-t-il ?

3 R. Jocelyn [phon]. C'est son patronyme, son prénom --

4 Q. Peu importe, en tout cas, c'est un rapport préparé par votre bureau en

5 février 1999; c'est bien cela ?

6 R. Ce n'est pas un rapport qui a été préparé par mon bureau. Il a été

7 préparé par le bureau de Belgrade.

8 Q. Oui, c'est ce que je voulais dire.

9 M. NICE : [interprétation] Je demande le versement de ce document.

10 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui.

11 M. NICE : [interprétation] Merci.

12 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Ce sera la pièce 833.

13 M. NICE : [interprétation] Nous pouvons nous --

14 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Est-ce qu'on avait une cote pour la

15 pièce précédente ? La lettre adressée à Sreten Lukic. Une cote, s'il vous

16 plaît.

17 Mme LA GREFFIÈRE : [interpretation] 834 pour ce qui est de l'extrait de

18 l'interrogatoire en tant que suspect.

19 M. NICE : [interprétation]

20 Q. Examinons un sujet tout à fait différent. Tout d'abord, nous allons

21 nous intéresser à un rapport du 23 octobre 1998. Nous remontons dans le

22 temps. Nous gardons à l'esprit ce que vous avez dit la semaine dernière,

23 s'agissant de la liberté de presse.

24 Est-ce que le témoin a un exemplaire ? Non, manifestement. Il faut remettre

25 en premier lieu un exemplaire au témoin.

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1 Il s'agit d'un rapport qui porte la date du 22 octobre, moment où vous

2 étiez déjà en formation, n'est-ce pas ? Nous voyons qu'il parle de Belgrade

3 et envoyé à Pristina. Je suppose que c'est un rapport que vous avez vu dès

4 lors.

5 R. Non, non, je ne l'ai pas encore vu.

6 Q. C'est un rapport qui venait de Belgrade et qui avait été envoyé au

7 bureau dont vous dites avoir été le chef, donc je suppose que vous devez en

8 avoir pris connaissance à l'époque ?

9 R. Non, pas à l'époque, je ne l'ai pas vu à l'époque, parce que je suis

10 arrivé quatre semaines plus tard.

11 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, Monsieur Milosevic.

12 L'ACCUSÉ : [interprétation] Ce rapport est daté du 22 octobre, le témoin a

13 dit lui-même qu'il est arrivé en novembre. Un mois avant l'arrivé du

14 témoin.

15 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] De toute façon, le témoin a déjà

16 répondu.

17 M. NICE : [interprétation] Voyons --

18 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci.

19 M. NICE : [interprétation]

20 Q. Voyons tout d'abord, je vais revenir à la question de savoir si vous

21 auriez dû prendre connaissance de ce document puisque vous étiez chef de

22 bureau.

23 "La loi sur la nouvelle loi sur l'information est entrée en vigueur

24 aujourd'hui et a été publiée au journal officiel Gazette et le décret du

25 gouvernement, en matière de mesures spéciales vu les menaces de l'OTAN, a

Page 37127

1 été aboli. Cependant le gouvernement n'a pas encore informé les quotidiens

2 qui ont été interdits quant à savoir quand ils pourront recommencer à

3 travailler. Cependant les rédacteurs en chef ne pourront pas maintenir,

4 même s'ils ouvrent de nouveau leur bureau, leurs activités en matière de

5 liberté de la presse en vertu de la nouvelle loi. On commence à se demander

6 si les journaux pourront être publiés dans de telles conditions à un moment

7 où le gouvernement voudra mettre à l'épreuve l'efficacité de cette nouvelle

8 loi. Par conséquent, sa situation reste très fluctuante et reste incertaine

9 pour le moment.

10 "Ailleurs comme il était prévu et prévisible, on a réagi de façon hostile à

11 la nouvelle loi. Les rédacteurs en chef des quotidiens et hebdomadaires

12 indépendants de Belgrade se sont rencontrés hier et ont qualifié la

13 nouvelle loi serbe relative à l'information comme étant une loi qui

14 limitait la liberté des médias." Je crois que cela suffira en guise de

15 citation. Il y a eu des protestations à Belgrade.

16 Est-ce que, lorsque vous avez pris vos fonctions, comme vous l'avez dit

17 quelques semaines plus tard, est-ce que vous saviez qu'on essayait de

18 supprimer la liberté de la presse, comme on le dit ici ?

19 R. Si je me souviens bien, je n'ai pas parlé de la liberté de la presse.

20 J'ai déclaré plutôt que la presse avait été très partiale ne présentant

21 qu'une version des faits. Je savais pertinemment qu'entre les éditeurs et

22 les maisons d'éditions, il y avait eu des problèmes. En Yougoslavie, à

23 l'époque où j'étais au Kosovo, je n'ai appris qu'une fois quelque chose

24 dans ce sens. Lorsque celui qui publiait, Koha Ditore, a dit ceci : "Si je

25 rapporte quelque chose de faux, ceci peut avoir de telles répercussions

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1 financières que je ne pourrais plus faire sortir mon journal."

2 Q. Fort bien. Voyons ce qu'il en était au Kosovo même. Si j'ai le temps,

3 j'essayerai de trouver ce que vous avez dit, s'agissant de liberté de la

4 presse, au cours de l'interrogatoire principal. Voyons maintenant quelques

5 pages du livre "As Seen, As Told," c'est la pièce 106, page 309. On va la

6 placer sur le rétroprojecteur, mais je vous demande déjà ceci, est-ce que

7 vous avez saisi l'occasion qui vous a été donnée de lire ces volumes,

8 notamment, de l'OSCE, notamment sur "As Seen, As Told ?"

9 R. Non, Je ne l'ai pas fait.

10 Q. Est-ce que vous savez qu'il y en fait deux volumes, l'un s'intéressant

11 tout particulièrement aux souffrances des Serbes ?

12 R. Non.

13 Q. Voyons ce qu'on dit de la situation des Albanais, page 309, coin

14 supérieur gauche. "L'interdiction de publication des journaux albanais, du

15 Kosovo." Est-ce que c'est exact, d'après vous. "Une nouvelle répression des

16 droits des Albanais, s'est produite sous la forme de la fermeture des

17 grands journaux albanais du Kosovo, ce qui a commencé le 13 mars." Au

18 moment où vous étiez encore au Kosovo. "Le ministre de l'Information a

19 déclenché ce processus et le tribunal des délits et contraventions a

20 décidé la fermeture.

21 "Shqiptare a été condamné pour avoir violé cette loi, pour avoir "fomenté

22 la haine ethnique et raciale, après avoir publié une image de l'UCK et un

23 article consacré à l'UCK."

24 Trois phrases plus loin, on dit ceci : "Un troisième quotidien ou plutôt

25 l'hebdomadaire Rilindja, a fait l'objet de poursuites également pour ne

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1 s'être pas inscrit auprès du ministère de l'Information. Même si la

2 confiscation, qui a été prévue, le 17 mars, de l'équipement ne s'est pas

3 passée, le journal a cessé ses publications."

4 Page 314, également, cela se situe aussitôt après votre départ, mais je

5 vous pose quand même une question là-dessus. "Le 24 mars, le journal de

6 fort tirage Koha Ditore, a été accusé de fomenter la haine ethnique et

7 raciale comme semblaient le faire les autres magazines et quotidiens

8 albanais du Kosovo et a suivi une forte sanction financière. Un réfugié, un

9 avocat et des activistes des droits de l'homme, ont été accusés d'attaquer

10 le bureau et de tuer un garde."

11 Voilà une image de la presse. Vous en doutez ?

12 R. Je n'ai pas de motif d'en douter. Je sais que peu de temps avant mon

13 départ pour Sarajevo, j'avais appris qu'un ou deux quotidiens albanais du

14 Kosovo avaient été frappés de sanctions, avaient été menacés de fermeture.

15 Je ne sais pas ce qui s'est véritablement passé. Le 14 ou le 15 mars, je

16 suis parti en voiture par Sarajevo vers Belgrade, j'ai participé à une

17 conférence et dans la soirée du 17, je suis revenu alors qu'une partie de

18 ma mission avait déjà été évacuée.

19 Q. Votre ami, le contact que vous aviez en la personne de Sreten Lukic.

20 Est-ce qu'il a justifié d'une quelconque façon ce qui se passait avec la

21 presse ? Qu'a-t-il si c'est le cas ?

22 R. Je dirais tout d'abord que le général Lukic n'est pas mon ami. C'était

23 un de mes contacts, un de mes interlocuteurs. A l'époque où nous avons

24 discuté, je n'ai pas parlé des problèmes que rencontrait la presse, mais

25 des problèmes qui se posaient à lui, dans le cadre du maintien de la

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1 sécurité.

2 Q. Vous disiez que vous parliez moins des médias que d'autre chose. Est-ce

3 que vous avez quand même parlé avec lui, du contrôle des médias ?

4 R. Non.

5 Q. Est-ce que vous avez estimé approprié, vu les sympathies que vous

6 manifestiez, si me permettez de le dire, sympathies pour la cause serbe,

7 est-ce que vous avez estimé qu'il vous appartenait, venant d'une démocratie

8 occidentale, est-ce que vous avez estimé qu'il était prudent pour vous de

9 restreindre la liberté de la presse ?

10 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Nice, laissez-lui répondre

11 la présomption que vous faites.

12 M. NICE : [interprétation] Certainement. Je --

13 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] -- puisque vous êtes en train de lui

14 dire qu'il manifestait une certaine sympathie pour les Serbes.

15 Vous avez entendu ce que le Procureur vous a dit. Il vous dit que

16 c'était votre sentiment. Est-ce que vous pourriez répondre puisque c'est la

17 base de la question suivante.

18 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, c'est une

19 question à laquelle je m'attendais, que je craignais. Je n'ai pas de

20 sympathies particulières pour les Serbes ou qui que soit d'autres. Vu mon

21 histoire, vu mon passé, je pense qu'il est de mon devoir, de trouver une

22 voie dont je suis convaincu et qui pour moi, s'inscrit dans un cadre

23 juridiquement acceptable, qui obéisse au droit.

24 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous pouvez poser votre

25 question, Monsieur Nice.

Page 37131

1 M. NICE :

2 Q. Est-ce que vous n'avez pas estimé raisonnable de parler avec

3 Lukic, de la prudence qu'il convient d'adopter avec la presse et notamment,

4 en ce qui concerne d'éventuelles restrictions à sa liberté ?

5 R. Quand je me suis entretenu avec le général Lukic, j'ai parlé des

6 questions d'actualité avec lui et on ne se parlait pas plusieurs fois par

7 semaine. Si j'avais su quelque chose dans ce sens, si j'avais voulu évoquer

8 cette question, j'aurais indéniablement pu le faire mais les quotidiens

9 dont je savais qu'ils étaient publiés par les Albanais au Kosovo, ces

10 journaux, ces quotidiens, on pouvait tout à fait se les procurer. Je

11 n'avais uniquement aucune raison de penser qu'on exerçait des pressions sur

12 ces maisons d'éditions.

13 Q. Encore quelques dernières questions au sujet des pièces à

14 conviction. Le premier document, c'est une espèce d'entretien que vous avez

15 avec une personne invisible. Est-ce que vous avez consulté vos fichiers

16 dans votre ordinateur ? Est-ce que vous avez trouvé ce document ?

17 R. Non, je ne l'ai pas trouvé.

18 Q. Ce document que nous avons, dont nous disposons de photocopies,

19 d'où vient-il ?

20 R. J'ai déjà précédemment que j'ai une espèce de classeur dans

21 lequel je classe des documents ou des photocopies de documents que je

22 conserve. Ce rapport après l'avoir lu, je peux dire que, ce rapport, il

23 n'était nullement destiné à être publié parce qu'en fait, ici, je me suis

24 exprimé de façon très claire sur des points mais je ne vois pas très bien à

25 qui j'aurais pu faire part de ce point de vue. Comme je l'ai déjà dit, il

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1 s'agissait de mes opinions.

2 Q. Si effectivement, vous êtes en train de vous adresser à un

3 interlocuteur fictif, pourquoi en anglais, pourquoi pas en allemand, une

4 langue que vous pouvez mieux vous exprimer ?

5 R. Je l'ai déjà dit. J'ai déjà dit qu'il m'arrive de rédiger en anglais,

6 parfois pour pratiquer mon anglais et parfois parce que tous ces éléments

7 me sont plus familiers en anglais. Tout le vocabulaire m'est plus familier

8 en anglais. Puis, il m'est arrivé parfois -- vous l'avez vu même ici,

9 alors, parfois, je me suis mis à parler en anglais alors que j'aurais pu

10 tout à fait m'exprimer en allemand.

11 Q. Je pense que votre réponse au sujet de la dernière phrase et du dernier

12 paragraphe de ce rapport, enfin quel que soit le nom que l'on lui donne,

13 quand vous dites : "Vous, le lien que vous faites entre l'évolution

14 politique de la Bosnie-Herzégovine et du Kosovo est exact et tient," cela

15 ne va pas dans le sens de ce que vous nous dites. On a vraiment

16 l'impression que c'est une réponse que vous faites à quelqu'un.

17 Essayez de vous souvenir, M. Hartwig, est-ce que ce document, vous l'avez

18 réponse à quelqu'un suite à une discussion, et si c'est le cas, qui ?

19 R. Depuis mercredi dernier, j'ai beaucoup réfléchi à la question. J'ai

20 beaucoup réfléchi à la question de l'origine de la rédaction de ce rapport.

21 Je sais qu'à un moment donné, j'ai essayé de coucher sur le papier tous ces

22 éléments qui m'étaient à l'esprit, qui étaient extrêmement compliqués. Je

23 ne sais pas. Je ne peux pas vous dire pourquoi j'ai présenté les choses

24 comme je les ai faites dans ce document. Mais pour moi, c'était un document

25 privé qui n'était nullement destiné à être publié. Voilà.

Page 37133

1 Q. Intercalaire --

2 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Auparavant, Monsieur Nice, permettez-

3 moi de demander à M. Hartwig la chose suivante : est-ce que maintenant,

4 vous pouvez nous expliquer pourquoi vous avez des projets de rapports, mais

5 vous ne disposez jamais des versions définitives des rapports ? Pourquoi,

6 est-ce que vous pouvez nous le dire maintenant ?

7 LE TÉMOIN : [interprétation] A l'époque, je préparais les premières

8 versions de mes rapports sur mon laptop. Ensuite, j'imprimais cette

9 première version, et ensuite, je passais à l'ordinateur du bureau avec

10 lequel on pouvait communiquer avec le bureau central. A ce moment-là, je

11 dactylographiais à nouveau les rapports parce qu'il n'y avait qu'un seul

12 ordinateur avec lequel on pouvait envoyer des rapports vers l'extérieur.

13 M. NICE : [interprétation]

14 Q. Si on ne veut pas perdre du temps, passons tout de suite et très vite à

15 l'intercalaire numéro 2, avant-dernière page. Vous parlez du passage des

16 réfugiés au niveau du poste-frontière Djeneral Jankovic, au cours de la

17 première semaine du mois de mars.

18 Deux questions. En premier lieu, s'agissant du point de la question connexe

19 des personnes déplacées au sein du Kosovo, des Albanais déplacés, nous

20 avons des éléments de preuve venant du HCR des Nations Unies. Nous

21 expliquons qu'à la fin mars, le 23 mars, il y avait quelque 349 000

22 Albanais du Kosovo qui avaient déjà été déplacés, soit à l'intérieur de

23 leur province, soit ailleurs. Est-ce que vous avez des raisons de mettre en

24 doute les chiffres du HCR des Nations Unies ?

25 R. Je n'ai aucune raison de mettre en doute cela quelle que soit la date

Page 37134

1 parce qu'à ce moment je n'étais pas au Kosovo, je n'étais plus au Kosovo à

2 ce moment-là quelle que soit la date en question.

3 Q. Avez-vous des raisons de penser qu'effectivement, il y avait un

4 déplacement massif des Albanais du Kosovo, si bien que le 23 mars déjà,

5 quelque 350 000 Albanais du Kosovo avaient déjà été déplacés à cette date ?

6 R. Je ne peux rien dire à ce sujet parce que je me suis limité, et je le

7 dis expressément, je me suis limité à la période qui fini le 19 mars. Ce

8 qui s'est passé ensuite, je n'en sais rien, et cela sort de mon champ de

9 connaissance.

10 Q. A la même page, intercalaire numéro 2, vous parlez de la différence

11 entre 3 000 personnes et 300 ou 400 personnes au poste-frontière Djeneral

12 Jankovic. Ici, une remarque de nature générale : les gens qui ont quitté le

13 Kosovo au cours de la première semaine de mars, ces gens partaient parce

14 qu'on les forçait de partir, que leur nombre ait été 300, 400 ou 3 000,

15 n'est-ce pas ? C'est bien exact ? Ces gens étaient chassés de chez eux.

16 R. Cela, je ne peux pas le confirmer parce que je ne le sais pas. Je ne

17 peux pas vous dire que ces personnes aient été contraintes de quitter le

18 Kosovo.

19 Q. Vous ne vous êtes pas entretenu avec ces gens ?

20 R. Non, je l'ai déjà dit à plusieurs reprises. J'ai entendu à la radio, il

21 y a eu une communication radio. J'avais entendu dire qu'il y avait 3 000 ou

22 4 000 personnes à ce point à la frontière, à ce point de franchissement de

23 la frontière. J'ai envoyé une équipe sur place qui, d'ailleurs, se trouvait

24 par hasard dans la zone. Cette équipe m'a fait savoir qu'il y avait là

25 quelque 300 personnes qui étaient là, qu'on ne contraignait nullement à

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1 traverser la frontière manu militari qui se trouvait simplement là.

2 Q. Monsieur Hartwig, vous avez répondu aux questions de l'accusé en disant

3 que l'armée, la police, ne faisaient rien de mal. Or ici, nous avons des

4 gens qui quittent leurs foyers, qui quittent leurs maisons. Pour reprendre

5 ce que vous avez dit vous-même, nous avons des gens qui partent, qui

6 quittent leurs pays, mais vous n'êtes pas en mesure de nous expliquer

7 pourquoi ces gens s'en vont ?

8 R. J'ai déjà dit, je le répète, que je m'appuie sur ce que nous avons vu

9 et sur ce que nous avons entendu dire, sur ce que nous avons pu constater.

10 Si des gens ont été chassés, c'est quelque chose de vraiment terrible,

11 regrettable, quelque chose que je peux tout à fait comprendre. Je peux

12 ressentir ce que cela signifie, que je ne peux pas défendre. Mais en

13 l'occurrence, je n'ai pas connaissance qu'il s'agit là de personnes qui

14 étaient déportées, qui étaient expulsées, mais il s'agissait de personnes

15 qui voulaient traverser la frontière. Il est possible qu'il s'agisse de

16 réfugiés. Au bout du compte, pour eux, c'est la même chose. La situation

17 est tout aussi terrible que pour des personnes expulsées. Je ne sais pas

18 quelle était la nature exacte de la situation.

19 Q. Une question que je souhaite vous poser, une minute seulement. On vous

20 a montré beaucoup de rapports. On vous a rapporté des propos de certains

21 témoins, des rapports du HCR des Nations Unies, de l'OSCE au sujet des

22 exactions de l'UCK d'une part, des exactions des Serbes, d'autre part. Est-

23 ce que vous n'acceptez pas le fait qu'il y ait des gens qui étaient

24 expulsés par la VJ et/ou par le MUP pendant la période que vous avez passée

25 dans la région ? Oui ou non.

Page 37136

1 R. Je ne le sais pas. Je ne l'ai pas vu, je ne l'ai pas constaté. Je n'ai

2 pas rien lu de tel dans les rapports.

3 Q. Bien. Passons à l'intercalaire numéro 3, dernier paragraphe. Je reviens

4 ici à ce que je vous avais dit précédemment, à votre tendance à éprouver

5 une certaine sympathie pour la cause serbe. En bas de l'intercalaire numéro

6 3, un rapport que vous avez vous-même rédigé ou un projet de rapport.

7 Plaçons-le sur le rétroprojecteur. Je cite : "Les manifestations de civils

8 armés, si elles se poursuivent, pourraient être considérées comme donnant

9 une nouvelle dimension au conflit. Leur engagement va dans le sens de la

10 politique serbe, renforce le MUP et la police, n'est ni en contradiction

11 avec l'accord Milosevic/Holbrooke. Il ne viole pas, non plus, d'autres

12 obligations politiques. Pour l'instant, on n'estime pas que le conflit va

13 se répandre dans d'autres villes du Kosovo."

14 Il s'agit de votre rapport ?

15 R. Oui.

16 Q. Vous parlez de manifestations de civils armés --

17 R. Oui.

18 Q. -- qui soutiennent la politique serbe ? Oui ou non. Est-ce que vous

19 étiez en train d'apporter votre soutien, d'approuver des manifestations

20 armées auxquelles participaient les Serbes ?

21 R. Je n'approuve rien du tout. J'explique simplement que du côté serbe, on

22 constatait de plus en plus qu'il y avait beaucoup de méfiance, une méfiance

23 croissante contre ce qui, selon eux, n'était pas normal, n'était pas

24 acceptable. J'ai simplement présenté les faits. Je ne reconnais rien, je

25 n'approuve rien. Je ne cautionne rien, je décris ce qui se passe dans un

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1 contexte, dans le contexte tel qu'il se présentait. J'expliquais que ces

2 manifestations de civils armés, il faut voir cela dans le contexte de la

3 situation du début janvier avec des attaques, le meurtre du dirigeant de

4 Milosevic et des attaques contre des policiers, et cetera. Dans ce

5 contexte, on a pris ce genre de mesures du côté civil pour renforcer la

6 position des Serbes au Kosovo. Voilà tout ce que je dis ici.

7 Q. Je vous interromps parce que je n'ai pas beaucoup de temps. Ce que je

8 dis ici, c'est que, dans cette phrase que vous avez choisi d'écrire en

9 anglais, il y a deux membres de phrases. Vous dites que leur engagement à

10 l'appui de la politique serbe n'est pas en contradiction avec l'accord

11 Milosevic-Holbrooke et ne viole pas d'autres obligations politiques. Cette

12 phrase manifeste votre soutien aux manifestations armées des Serbes. On ne

13 peut trouver aucune autre explication à votre phrase, vu la manière dont

14 vous formulez vos propos.

15 R. J'ai une autre explication. J'ai examiné et décrit cette situation de

16 conflit et j'ai essayé d'expliquer que les actions entreprises par ces

17 civils n'étaient pas contraires à l'accord conclu entre Milosevic et

18 Holbrooke. Je n'ai rien voulu dire de plus. Je n'ai rien cautionné moi-

19 même. A deux ou trois reprises, j'ai été confronté à des armes, on m'a

20 menacé avec des armes. Je ne cautionne rien du tout. Je décris simplement

21 la situation telle qu'elle se présente, de la manière la plus concrète

22 possible.

23 Q. Dernier point, avec deux ou trois questions. Ensuite, j'aurai une toute

24 dernière question.

25 Intercalaire numéro 4, je vous prie. Nous avons examiné le document qui

Page 37138

1 figure à l'intercalaire numéro 4, mais nous n'avons pas parlé ce matin de

2 Racak. Parlons de Racak maintenant. Au milieu de la page, je cite : "Le

3 fait que jusqu'à 50 Albanais du Kosovo aient été tués et certains mutilés a

4 suscité l'attention du monde entier et a augmenté les tensions politiques.

5 Cet incident démontre également l'incapacité des autorités à réagir à de

6 tels incidents, et les dissensions des personnes concernées."

7 Je reprends votre texte : "Il y a, bien entendu, des raisons justifiées de

8 soupçonner le MUP d'être responsable, de soupçonner que les auteurs de ces

9 actions sont des membres du MUP ou des supporteurs du MUP."

10 Nous n'avons pas le temps de tout lire. D'après ce que vous dites, d'après

11 le rapport que vous faites, c'est le MUP qui était soupçonné d'être

12 responsable de ce qui avait été fait à cet endroit.

13 R. J'ai déjà dit que, bien entendu, il y avait un soupçon, et le soupçon

14 c'était que les forces de sécurité étaient à l'origine de ces meurtres.

15 Q. Si nous regardons la phrase suivante --

16 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Nice, je vais poser moi-

17 même une question à M. Hartwig.

18 Pourquoi dites-vous, dans votre document, qu'il y a des raisons justifiées

19 de soupçonner que les auteurs se trouvent dans les rangs du MUP, parmi ses

20 partisans ? Pourquoi dites-vous ici qu'il y a des raisons de les

21 soupçonner, des raisons justifiées ?

22 LE TÉMOIN : [interprétation] D'abord, ce sont les prises de position qui

23 ont été adoptées en général. C'était le point de vue général. On partait du

24 principe que ces exactions étaient le fait des forces de sécurité. J'ai

25 essayé de décrire l'opinion générale. Je reprenais ici, dans mon rapport,

Page 37139

1 ce que j'avais entendu, ce qui se disait couramment.

2 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous êtes simplement en train de

3 reprendre ici, dans votre rapport, l'opinion publique.

4 LE TÉMOIN : [interprétation] Pas l'opinion publique au sens de l'opinion de

5 la population générale, mais plutôt l'opinion de mes interlocuteurs au

6 sujet de ces incidents.

7 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Nice.

8 M. NICE : [interprétation]

9 Q. Enfin, on peut difficilement imaginer un événement plus important que

10 le massacre de Racak, si effectivement il y a eu massacre. On peut

11 difficilement imaginer un événement plus important.

12 R. Oui, je pense que c'est confirmé dans ma lettre au général Lukic. On

13 voit très clairement que cela m'a éminemment intéressé.

14 Q. Vous n'avez jamais rien trouvé qui fasse peser la responsabilité de ces

15 événements sur d'autres personnes que le MUP ?

16 R. Je n'ai rien trouvé qui indique que c'était le MUP qui était

17 responsable. J'ai simplement écouté ce que m'ont dit ceux qui étaient sur

18 place, les observateurs, ce qu'ils ont constaté. J'ai lu ce qui a été

19 produit par les chefs de la mission de l'OSCE et j'ai également lu ce qu'on

20 a écrit au sujet de cet événement dans les journaux.

21 Q. Une autre question sur le même point, paragraphe suivant. Le juge, Mme

22 Danica Marinkovic. Je cite : "L'enquête menée sur ces événements par le

23 juge yougoslave le 17 janvier est devenue problématique puisqu'elle a

24 refusé d'entrer sur place sous l'escorte de l'OSCE."

25 Ensuite, en bas de la page, je cite : "Mme Danica Marinkovic est considérée

Page 37140

1 comme une fonctionnaire dynamique, mais un petit peu maladroite du point de

2 vue diplomatique." Ensuite, en bas de la page : "Mme Marinkovic a,

3 volontairement ou sur ordre, contribué à augmenter les tensions, vu son

4 comportement."

5 Ici, on voit que vous avez eu des informations selon lesquelles le juge,

6 Danica Marinkovic, non seulement contribuait à aggraver les tensions, mais

7 qu'elle le faisait sur ordre, en obligeant à des ordres. Est-ce que vous

8 pouvez nous dire les éléments d'information qui vous ont permis de dire

9 qu'elle faisait obstruction sur ordres ?

10 R. Je n'ai pas dit qu'elle se comportait ainsi sur ordres. C'était

11 simplement une question qui m'est venue à l'esprit et que j'ai couchée sur

12 le papier ici. J'ai simplement dit qu'on aurait pu imaginer que des

13 instructions dans ce sens auraient pu lui être données, mais je ne me

14 réfère pas ici à des informations en particulier. C'est une question que je

15 pose, c'est tout, sans y répondre.

16 Q. Je m'excuse, il faut que j'insiste. Vous nous dites que le juge

17 intervient, qu'elle se comporte de manière maladroite, et dans un rapport

18 qui va être diffusé largement dans l'ex-Yougoslavie par le biais de votre

19 organisation, vous êtes en train d'évoquer la possibilité qu'elle agit sur

20 ordres. Est-ce que c'est vraiment ce que vous êtes en train de nous dire ?

21 Est-ce que c'est simplement une possibilité que vous avez évoquée ?

22 R. Non, ce n'est pas ce que j'ai dit. D'abord, ce rapport n'a pas été

23 diffusé dans toute l'ex-Yougoslavie. En deuxième lieu, j'aurais pu, moi

24 aussi, mettre un point d'interrogation à cet endroit. C'est simplement les

25 deux possibilités qui se sont présentées à mon esprit à ce moment-là.

Page 37141

1 Q. Monsieur Hartwig, je pense que vous aviez des vous aviez des éléments à

2 votre disposition avant de vous prononcer ainsi au sujet du Juge. Vous ne

3 voulez pas, vous ne vous en souvenez pas, mais je dis que vous aviez des

4 éléments.

5 R. On racontait quelque chose, on parlait, je crois, d'une fosse commune

6 ou plutôt d'un charnier, sur lequel Mme Marinkovic souhaitait se rendre

7 pour procéder à une enquête, demander à ce qu'on procède à des autopsies.

8 Nous avions conclu un accord avec l'UCK, et ceci devait se produire sans

9 escorte, sans qu'elle vienne accompagnée d'une escorte importante. Mais

10 elle est arrivée avec une escorte importante de l'armée ou de la police, si

11 bien que l'enquête n'a pas pu être réalisée à cause de cela. Elle a dû

12 rebrousser chemin. C'est la raison pour laquelle j'ai expliqué qu'elle

13 avait fait preuve de maladresse.

14 Q. Deux questions ensuite sur ce point, puis ma toute dernière question

15 après cela.

16 M. NICE : [interprétation] Page suivante, Monsieur le Témoin, et Monsieur

17 l'Huissier aussi. Troisième ligne en haut de la page. Page suivante. Merci.

18 Merci. Troisième ligne tout en haut de la page. Ici.

19 Q. J'ai raison de poser cette question. Vous nous dites que, par

20 délicatesse, vous indiquez un mot "f…off". Nous savons tous exactement de

21 quels mots il s'agit, inutile de le prononcer.

22 Vous souvenez-vous qu'un membre de votre équipe ait jamais utilisé de

23 tels termes en vous faisant rapport, des termes aussi inappropriés ?

24 R. Ce n'est pas un terme que j'ai moi-même employé. J'ai repris ce qui

25 avait été dit --

Page 37142

1 Q. Non. Ma question est la suivante : ici, vous faites preuve de

2 délicatesse. Je vous demande si vous vous souvenez qu'on vous ait fait

3 rapport en utilisant ce type de langage ? Répondez par oui ou par non, s'il

4 vous plaît.

5 R. S'il s'agit d'une citation, si je reprends des propos, indéniablement,

6 oui.

7 Q. Si à un moment quelconque, je suis en mesure de fournir un document qui

8 émane de l'équipe mobile de Pristina, c'est ainsi qu'elle s'appelait, et

9 qui envoie un rapport au bureau régional de Pristina, est-ce qu'il

10 s'agirait, à ce moment-là, de quelqu'un vous faisant rapport à vous, s'il y

11 avait un tel rapport ?

12 R. Oui.

13 Q. Vous souvenez-vous que quelqu'un vous ait fait un rapport, quelqu'un

14 appartenant à cette unité mobile, au sujet des événements de Racak ou au

15 sujet de quel autre événement, en utilisant ce type de vocabulaire un petit

16 peu déplacé ?

17 R. Il n'y avait aucune raison de s'exprimer de manière aussi grossière. Ce

18 que j'ai cité, ici, c'est un propos qui a été tenu par des Albanais. J'ai

19 repris ce terme pour montrer quel était le sentiment qui régnait vis-à-vis

20 de ces événements et vis-à-vis de la communauté internationale.

21 Q. Enfin, avez-vous eu le temps de réfléchir au sujet du document figurant

22 dans le dernier intercalaire, avec la phrase au sujet du public, et quelque

23 chose de difficile à vendre à l'opinion publique. Est-ce que vous êtes sûr

24 que ce document n'a jamais été envoyé à qui que ce soit ? Intercalaire 12.

25 R. Vous me l'avez déjà demandé. Je ne sais pas. Je l'ai ici tel qu'il l'a

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1 été. Je ne sais pas s'il a été envoyé tel quel.

2 M. NICE : [interprétation] Merci.

3 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci, Monsieur Nice.

4 Avant de laisser la parole à M. Milosevic pour ses questions

5 supplémentaires, je voudrais, avec le témoin, que nous revenions au tout

6 début du contre-interrogatoire, lorsque le Procureur a attiré votre

7 attention, Monsieur le Témoin, sur la déposition du général Naumann, qui a

8 parlé d'un emploi disproportionné de la force par les forces serbes. Le

9 Procureur, à ce moment-là, a dit, je cite : "Le général Naumann a eu

10 raison, il a bien décrit les faits." Vous avez répondu à cela, qu'il allait

11 "dans la bonne direction." Il me semble que vous vous exprimiez en anglais

12 quand vous avez fait cette réponse. Mais est-ce que vous pouvez dire

13 exactement ce que vous entendiez par là, quand vous avez dit "dans la bonne

14 direction" ?

15 LE TÉMOIN : [interprétation] Je crois -- enfin, ce n'est pas ce que je

16 crois. Cela va dans le sens suivant, c'est-à-dire que tout emploi de la

17 force publique, tout emploi de la force de l'Etat, implique, en même temps,

18 l'obligation d'aller à l'encontre d'une certaine évolution regrettable. Par

19 ceci, j'implique qu'il convient de faire preuve de proportionnalité. Quand

20 j'ai dit qu'il "allait dans la bonne direction," c'est quand il parlait de

21 l'emploi de la force étatique qui doit être exercée de manière appropriée.

22 Je n'étais pas en train de m'exprimer au sujet du commentaire qu'il avait

23 fait, de son évaluation de la situation.

24 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, nous allons nous

25 arrêter à 13 heures 43, et j'aimerais que, d'ici là, vous en ayez terminé

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1 de vos questions supplémentaires.

2 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je vais devoir vous décevoir, cela ne me sera

3 pas possible que de terminer en un quart d'heure. M. Nice a soulevé bon

4 nombre de questions. Il a introduit un jeu de documents tout à fait nouveau

5 que je me propose d'utiliser également.

6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Mais commencez toujours, Monsieur

7 Milosevic.

8 Nouvel interrogatoire par M. Milosevic :

9 Q. [interprétation] Monsieur Hartwig, je voudrais vous poser des questions

10 au sujet de votre crédibilité, que M. Nice s'est efforcé de remettre en

11 question au tout début de son contre-interrogatoire. M. Nice a, en effet,

12 d'abord demandé comment se faisait-il que vous en soyez venu à témoigner,

13 comment nous avons su que vous étiez là et vous avons demandé si vous

14 vouliez bien témoigner. Monsieur Hartwig, est-ce que votre mission de chef

15 de cette Mission d'observation de l'Union européenne au Kosovo, était-ce là

16 un poste clandestin ou un poste tout à fait officiel ?

17 R. Notre mission était tout à fait publique, officielle.

18 Q. Par conséquent, était-il, de façon tout à fait claire, non pas

19 seulement pour moi, mais pour tout un chacun dans l'opinion publique en

20 Serbie et en Yougoslavie, qu'on devait forcément savoir qui était le chef

21 de la mission --

22 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Maintenant, que j'ai entendu la

23 réponse -- [hors micro].

24 L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui. Vous voulez dire que j'ai reçu déjà une

25 réponse pour dire que cette mission était tout à fait publique. Comment y

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1 a-t-il eu cette mystification --

2 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Ne vous embarrassez pas de

3 commentaires, Monsieur Milosevic.

4 L'ACCUSÉ : [interprétation] Bien.

5 M. MILOSEVIC : [interprétation]

6 Q. Maintenant, pour ce qui est de vos qualifications, veuillez me répondre

7 par un oui ou par un non pour ce qui est de savoir si ce qui suit est

8 exact. Vous avez fait une formation militaire jusqu'en 1962. Oui ou non ?

9 R. Oui.

10 Q. Avez-vous, par la suite, été commandant d'un peloton dans l'armée

11 allemande, en 1964 ?

12 R. Oui.

13 Q. Est-ce que, par la suite, de 1966 à 1993, vous avez occupé différentes

14 fonctions sur le terrain et au niveau de QG variés, vous avez été

15 commandant d'une certaine unité, puis membre du QG, officier dans un QG, et

16 membre de QG de tailles supérieures, au niveau de bataillons, au niveau de

17 compagnies, et ainsi de suite ? Vrai ou faux ?

18 R. Vrai.

19 Q. Avez-vous eu des nominations au sein de l'OTAN ?

20 R. Oui.

21 Q. Est-ce que, d'octobre 1995 à mars 1996, vous êtes intervenu en

22 corrélation avec la conférence internationale sur l'ex-Yougoslavie ?

23 R. Oui.

24 Q. Est-ce que, de mai 1996 à janvier 1998, vous avez fait partie d'une

25 administration intérimaire des Nations Unies chargée du Srem occidental, de

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1 la Baranja, et de la Slavonie occidentale ?

2 R. [aucune interprétation]

3 Q. Est-ce qu'à compter de juillet 1998 jusqu'à octobre 1998, vous avez

4 fait partie de cette Mission d'observation de l'Union européenne ?

5 R. Oui.

6 M. NICE : [interprétation] Apparemment, le témoin lit un curriculum vitae

7 qui ne nous a pas été fourni. Normalement, je devrais faire objection. Mais

8 si nous avions reçu à l'avance un curriculum vitae, nous aurions été bien

9 mieux à même de traiter de ce témoin. Pour d'autres témoins, c'est vrai

10 aussi. Je m'oppose à ce que ces questions directrices soient posées par

11 l'accusé à ce stade de la procédure.

12 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je ne vois pas trop bien, Monsieur

13 Milosevic, à quelle partie du contre-interrogatoire ceci renvoie. De toute

14 façon -- attendez que je termine. Ce sont là des questions que vous auriez

15 dû soulever au début de votre interrogatoire principal.

16 L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais je n'ai pas eu l'idée, Monsieur Robinson,

17 de voir M. Nice contester les compétences de ce témoin. Je parle, ici, de

18 faits qui ne font que confirmer les compétences qui sont celles du témoin.

19 Il lui a même demandé la question de savoir s'il avait été chef de la

20 mission ou pas, ce qui a été même, je dirais, indécent.

21 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Certes, mais vous n'êtes pas

22 autorisé à poser des questions directrices au moment des questions

23 supplémentaires.

24 L'ACCUSÉ : [interprétation] Ce ne sont pas des questions suggestives, ce

25 sont des questions de faits qui concernent --

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1 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Non, non. Monsieur Milosevic, là, il

2 y a une différence. Si vous aviez présenté ceci au début de votre

3 interrogatoire principal, vous auriez pu les poser de façon directrice,

4 parce qu'à ce moment-là, la question ne se posait pas, il n'y avait pas de

5 contestations; maintenant, que la contestation a été formulée, au moment

6 des questions supplémentaires, vous ne pouvez pas utiliser des questions à

7 caractère directeur.

8 L'ACCUSÉ : [interprétation] Fort bien. Je ne vais pas poser de questions

9 suggestives.

10 M. MILOSEVIC : [interprétation]

11 Q. Monsieur Hartwig, M. Nice a dit que vous avez été, et j'ai pris bonne

12 note, vous avez été au Kosovo pendant moins de trois mois. Dites-nous

13 combien de temps vous avez passé au Kosovo.

14 R. A partir du 20 novembre 1998 jusqu'au 19 mars 1999.

15 Q. Point n'est nécessaire de faire le calcul pour voir combien cela fait.

16 Merci de cette réponse.

17 Maintenant, je vous prie de nous dire ce qui suit. M. Nice a demandé à ce

18 que vous citiez le dernier paragraphe de l'intercalaire 3, et il a pris

19 cela comme une confirmation de votre partialité parce qu'ils ont dit : "Les

20 manifestations de civils armés, si elles se poursuivent, pourraient être

21 considérées comme donnant une nouvelle dimension à ce conflit. Leur

22 engagement soutient la politique serbe, renforce le MUP et la police, et ce

23 n'est pas non plus en contradiction avec l'accord Milosevic-Holbrooke, pas

24 plus qu'il ne viole d'autres engagements politiques."

25 La question est la suivante : ce que vous dites-là, a-t-il un lien

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1 quelconque avec ce qui figure au tout début du rapport à la même page, et

2 je vous demande de consulter une fois de plus cet intercalaire 3. Vous

3 parlez là de ce qui a caractérisé la semaine écoulée. Nous parlons du

4 rapport hebdomadaire. Vous indiquez que cela influe sur la situation

5 politique d'une manière générale, et vous dites : "Ces événements ont été

6 l'explosion d'une grenade à main devant un café de Pristina, l'assassinat

7 du directeur serbe de la centrale électrique d'Obilic, l'assassinat de

8 trois policiers qui sont tombés dans une embuscade tendue par l'UCK, et la

9 capture de huit soldats de la VJ par l'UCK."

10 Ensuite, dans le paragraphe suivant, il est dit : "Ceci a eu pour

11 effet que les Serbes ont demandé publiquement à être mieux protégés."

12 Est-ce que c'est cela, ces événements tragiques dans les quelques

13 journées que vous avez citées au paragraphe 1, ont-ils constitué la raison

14 des réactions de la part des civils serbes qui ont protesté pour réclamer

15 une protection ?

16 R. C'est certain. Cela a été un des éléments qui ont déclenché ces

17 troubles, ces inquiétudes aussi, parmi les Serbes, qui se sont armés, en

18 partie.

19 Q. Merci, Monsieur Hartwig. A l'intercalaire d'après, qui parle de

20 Mme Marinkovic, le juge d'instruction, M. Nice vous a demandé de quels

21 ordres vous parliez. Or, je dois donner lecture, en raison de cette

22 affirmation, du paragraphe où vous en parlez, pour qu'on sache exactement

23 de quoi vous parlez : "Pour ce qui est des victimes de Racak qui étaient de

24 la mosquée, et de la nécessité de les enterrer dans le respect des règles

25 religieuses, et les autopsies sans la présence de l'OSCE ou de l'EU KDOM --

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1 " Excusez-moi. Je m'excuse, les interprètes, je n'ai pas dit international,

2 interne -- "et l'équipe de médecine légale interne, sans la présence de

3 l'OSCE et de l'EU KDOM, les Albanais du Kosovo ou les représentants des

4 médias ont réitéré, de plus façon plus forte encore, leurs réserves et ont

5 nourri les soupçons faisant croire à une manipulation. Jusqu'à présent, Mme

6 Marinkovic, de son plein gré ou en réponse à des ordres, était la personne

7 qui a considérablement contribué à la recrudescence de la tension."

8 Est-il question ici d'actes ou d'activités déployés par Mme

9 Marinkovic en sa qualité de juge d'instruction pour procéder à une enquête

10 en corrélation avec les personnes qui ont perdu la vie à Racak, ou s'agit-

11 il de quelque chose qu'elle faisait en application de la réglementation en

12 vigueur ?

13 R. Je l'ai déjà dit, non. C'était une histoire de moindre

14 importance, mais la police nous a quand même suivis. Ici, ce que je voulais

15 dire, c'est que cela s'était passé ailleurs aussi, à savoir que le travail

16 d'un Juge d'instruction ou d'une Juge d'instruction, c'est quelque chose

17 qui n'est pas toujours partout considéré comme étant nécessaire, mais qui

18 peut contribuer à créer des tensions.

19 Q. Vous n'avez pas remis en question les agissements de

20 Mme Marinkovic en sa qualité de Juge d'instruction, n'est-ce pas ?

21 R. Non, non. Je n'ai pas douté de sa fonction, de sa mission, pas

22 plus que je ne l'ai critiquée.

23 Q. Merci, Monsieur Hartwig. Tout à l'heure, vous nous avez indiqué

24 que vous avez entendu parler de Racak et que vous en avez appris ce qu'a

25 dit la Mission de vérification. Je suppose que vous aviez à l'esprit ce

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1 qu'a dit M. William Walker, n'est-ce pas, puisque c'est lui qui a parlé au

2 nom de cette Mission de vérification ?

3 R. Oui, le directeur de l'OSCE, oui, oui.

4 Q. Par la suite, avez-vous eu vent, Monsieur Hartwig, du fait que ce

5 que M. Walker avait déclaré à l'époque s'était avéré faux ?

6 M. NICE : [interprétation] J'ai le sentiment que ceci risque d'être

7 une question directrice. Je ne sais pas trop si le témoin est à même d'y

8 répondre.

9 J'ai 30 secondes que je voudrais utiliser avant la levée de

10 l'audience aujourd'hui.

11 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Nice, je ne comprends

12 pas. Pourquoi est-ce que vous dites -- il a demandé au témoin s'il a

13 appris, par la suite, que ce que M. Walker avait dit n'était pas vrai.

14 M. NICE : [interprétation][hors micro] Cela semble sous-entendre que

15 ce qui a été dit n'était pas vrai. Manifestement, c'est directeur, pour

16 moi.

17 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je pense que le témoin peut

18 répondre. Mais après cela, il faudra suspendre parce qu'il y a une autre

19 affaire ici dans ce prétoire.

20 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est seulement plus tard que j'ai

21 entendu des commentaires à la radio et que j'ai lue des choses dans les

22 journaux. Il reste un gros point d'interrogation qui plane sur Racak, à

23 partir de la fin de l'année 1998, et je l'ai déjà dit auparavant. De plus

24 en plus, et cela m'inquiétait, les Serbes, tout d'un coup, ont suscité la

25 sympathie dans le monde. On a demandé, à ce moment-là, à l'UCK de s'en

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1 tenir aux dispositions légales. Puis, il y a eu cet événement horrible de

2 Racak. Il fallait presque s'y attendre, enfin, il fallait presque

3 s'attendre à ce que quelque chose comme Racak se passe, parce que cela

4 allait, effectivement, renverser la tendance. Je ne sais pas ce qui s'est

5 passé. Mais, pour moi, je dois resituer Racak dans le temps. A ce moment-

6 là, s'ouvrait une petite fenêtre d'opportunité. C'était à ce moment-là,

7 pendant très peu de temps, les Yougoslaves ont provoqué un écho de

8 sympathie. C'est cela que je voulais dire à propos de Racak.

9 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui. Rapidement, Monsieur Nice.

10 M. NICE : [interprétation] En ce qui concerne le témoin suivant, M.

11 Lituchy, après avoir examiné les pièces proposées par l'accusé, nous ferons

12 valoir, demain, que ces éléments sont irrecevables. Je le dis maintenant

13 pour avertir l'accusé, pour lui faire savoir qu'il doit peut-être devoir

14 justifier en quoi ces pièces sont utiles. Je ne sais pas si les Juges

15 auront déjà examiné ces pièces. Il serait peut-être prudent que l'accusé

16 prévoit déjà la venue du témoin d'après, au cas où il serait décidé que

17 cette déposition, la déposition du témoin suivant est irrecevable.

18 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Fort bien. M. Milosevic et la

19 Chambre sont avertis.

20 Demain, nous n'aurons pas de traducteur. Vous pourrez vous en sortir sans

21 votre interprète, Monsieur Hartwig ?

22 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vais peut-être, là, marcher sur des œufs.

23 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] L'audience est levée.

24 --- L'audience est levée à 13 heures 45 et reprendra le mercredi 9 mars

25 2005, à 9 heures 00.