Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 Le mardi 22 mars 2005

2 [Audience publique]

3 [L'accusé est introduit dans le prétoire]

4 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

5 --- L'audience est ouverte à 9 heures 03.

6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Nice, poursuivez votre

7 contre-interrogatoire; vous êtes toujours, Général, sous le coup de la

8 déclaration que vous avez faite.

9 LE TÉMOIN: RADOMIR GOJOVIC [Reprise]

10 [Le témoin répond par l'interprète]

11 M. NICE : [interprétation] La semaine dernière, nous avions terminé par

12 l'examen d'un article qui avait paru dans Danas, le 20 juin 2001. Le témoin

13 était au courant de la teneur de l'article, la partie essentielle étant une

14 lettre ouverte de l'Association des avocats de Belgrade. Je vais demander

15 le versement de cette pièce.

16 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, Maître Higgins.

17 Mme HIGGINS : [interprétation] Très rapidement. L'article paru dans le

18 journal Danas est apparu clairement la dernière fois, dans ce qu'a dit le

19 témoin, son rôle était très clair dans l'affaire Trifunovic, dans ce

20 procès. Il y a des commentaires de journalistes qui, en général, ne sont

21 pas admis comme preuve par ce Tribunal et, à mon avis, il n'y a pas de

22 valeur probante ajoutée qui viendrait de cet article mis à part de ce qu'a

23 déjà dit le témoin dans sa déposition.

24 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci.

25 M. NICE : [interprétation] Dans cet article, il y a une analyse succincte

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1 de l'avis exprimé par des collègues de la profession de ce collègue, et ce

2 serait une façon utile pour vous d'avoir l'avis de ses collègues.

3 Pour ce qui est de la deuxième partie de cet article, nous l'avons à peine

4 effleurée faute de temps la semaine dernière, j'aborderai cette teneur par

5 le truchement d'autres documents. C'est surtout la première partie de

6 l'article qui m'intéressait, pour laquelle j'ai demandé le versement de ce

7 document.

8 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Dans une certaine mesure, c'est

9 difficile d'en parler en présence du témoin, mais ce n'est pas ce dont je

10 me souviens, je ne pense pas que le témoin ait accepté l'idée que c'était

11 l'avis généralement affiché par le personnel.

12 Je pense que, par le passé vu les pressions en matière de temps, la

13 connaissance détaillée qu'avait un témoin du document qui lui était soumis

14 n'a pas été suffisamment soulignée, s'il y avait eu moins de hâte cela

15 n'aurait peut-être pas été le cas.

16 Moi, je suis prêt à corriger, si c'est faux.

17 Mme HIGGINS : [interprétation] Permettez-moi d'ajouter rapidement ceci à ce

18 que vous avez dit : dans le compte rendu la dernière fois, vous avez tout à

19 fait raison, Monsieur le Juge, ce témoin n'a pas accepté l'allégation qui

20 avait été formulée. Il a dit que ces allégations étaient dénuées de

21 fondement et il ne les a pas acceptées.

22 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, ce n'est pas ce que veut dire M.

23 Nice. Il veut dire que c'est ce que disaient généralement ces gens en guise

24 d'allégations. Si le témoin reconnaît cela, il y a un certain point dans ce

25 qui est avancé par M. Nice, et c'est tout. On ne veut pas aller plus loin,

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1 ce serait mon avis. On pourrait verser ce document pour ce fait. Mais, à

2 mon avis, le témoin n'a pas dit cela, il n'est pas allé aussi loin dans sa

3 déclaration.

4 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Nice.

5 M. NICE : [interprétation] Est-ce que je peux lui reposer la question ce

6 matin ?

7 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Pourquoi pas ?

8 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, reposez-lui la question.

9 Contre-interrogatoire par M. Nice : [Suite]

10 Q. [interprétation] Général Gojovic, vous vous souvenez de cet article de

11 Danas que nous avons examiné un peu pressé par le temps la semaine

12 dernière. Vous n'avez pas voulu regarder ce document, disant que ce n'était

13 pas nécessaire. Vous vous en souvenez ?

14 R. Oui, oui.

15 Q. N'acceptez-vous pas le fait que les avis formulés dans cet article

16 étaient effectivement les avis des avocats qui ont écrit cette lettre

17 ouverte ?

18 R. En plus de leurs positions, il y a des commentaires présentés par les

19 journalistes.

20 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nos portables marchent, mais nous avons

21 quelques difficultés pour ce qui est de l'utilisation du logiciel LiveNote,

22 est-ce que des techniciens pourraient venir à notre rescousse ?

23 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] De toute façon, nous sommes en

24 mesure de suivre. Poursuivez, Monsieur Nice.

25 M. NICE : [interprétation]

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1 Q. Vous dites qu'il y avait aussi des avis de journalistes. Il y a des

2 commentaires formulés par vos collègues et vous acceptez le fait que

3 c'était leur avis et que c'était l'avis qu'ils exprimaient, n'est-ce pas ?

4 R. Pour ce qui est de leur point de vue ou pas, je n'en sais rien. Ils

5 l'ont dit, et ils ont dit que, dans l'affaire, ils sont intervenus en tant

6 que conseil de la Défense dans la Chambre où j'étais le président, et le

7 jugement a été confirmé par toutes les instances. Tout commentaire

8 ultérieur concernant leurs positions n'a rien à voir. Vous avez obtenu le

9 jugement, et de ce point de vue-là --

10 Q. Je vous interromps car nous n'avons pas beaucoup de temps.

11 M. NICE : [interprétation] Voilà. Je pense que cette réponse suffit aux

12 fins du versement que je demande.

13 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je me souviens que le témoin a dit qu'il

14 était au courant qu'il connaissait cela.

15 M. NICE : [interprétation] Oui, il a dit qu'il ne voulait pas lire

16 l'article parce qu'il en avait connaissance.

17 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui. La pièce est versée.

18 M. NICE : [interprétation] Merci.

19 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Ce sera la pièce 839.

20 M. NICE : [interprétation]

21 Q. Après vous vouliez exercer votre profession d'avocat, ce qui ne vous a

22 pas été permis. Nonobstant ce fait, lorsque le général Pavkovic, par

23 exemple, a été interrogé par le bureau du Procureur, vous avez cherché à le

24 représenter.

25 R. Non, ce n'est pas exact. Je suis devenu avocat, et il y a eu un

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1 renouvellement de la procédure pour ce qui est de ma réinscription vu que

2 j'ai été biffé de la liste, et leur décision a été annulée par la Cour

3 suprême, on a donné l'ordre de se conformer à la loi et la procédure est de

4 nouveau encourue. Pour ce qui est de M. Pavkovic, j'ai été son conseiller

5 juridique et non pas son avocat.

6 Q. Vous avez essayé de défendre ici une des personnes accusées des crimes

7 de Vukovar, mais ce droit d'audience -- ce droit de comparution vous a été

8 refusé ici, n'est-ce pas ?

9 R. Non, pas pour le représenter, il a demandé à ce que je me charge de

10 l'instruction dans son équipe d'avocat, mais pas en tant que conseil de la

11 Défense. L'accusé s'est adressé au Tribunal pour m'autoriser à intervenir

12 comme juge d'instruction ou plutôt comme enquêteur, étant donné que j'ai

13 toujours été chargé d'enquêter sur des procédures et que je suis

14 connaisseur des faits. Il ne faut pas placer les choses à l'envers pour

15 dire ce qui n'est pas vrai.

16 Q. Je n'ai pas le temps de parler beaucoup de Sarajevo, si j'en ai le

17 temps j'y reviendrai plus tard, veuillez confirmer uniquement ceci : la

18 police militaire dans la caserne de Sarajevo, où vous étiez cantonné, elle

19 était parfaitement équipée, n'est-ce pas, en armes ?

20 R. Armements de police, oui.

21 Q. Vous aviez la capacité d'utiliser des fusils à lunette, n'est-ce pas,

22 venant de cette caserne.

23 R. Il n'y a pas de fusils à lunette. La police ne dispose de fusils à

24 lunette.

25 Q. Est-ce que vous pouviez utiliser des produits chimiques, qu'on aurait

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1 pu utiliser ?

2 R. Non.

3 Q. Mladic était régulièrement en contact avec la caserne, n'est-ce pas ?

4 R. Deux fois, au téléphone, c'est moi qui l'avais demandé. C'est moi qui

5 avais demandé un entretien.

6 Q. Ce qui est certain, c'est que vous lui avez parlé au moins, une fois,

7 mais le commandant --

8 R. Quand je suis sorti de la caserne, j'ai demandé à être reçu pour

9 l'informer de la situation des dossiers qui restaient et qui devaient être

10 gardés au niveau de leur zone d'intervention.

11 Q. Mais Tomcic, est-ce que c'était lui qui était responsable de l'unité de

12 police militaire ?

13 R. Oui, c'est lui qui était commandant de cette unité de la police

14 militaire. C'est quelque 120 hommes en tout et pour tout.

15 Q. Si j'ai le temps, je reviendrai à cette question. La semaine dernière

16 dans le cadre de votre déposition surtout en ce qui concerne les

17 intercalaires 17 et 18, vous vouliez dire dans votre déclaration que

18 c'était un système qui fonctionnait parfaitement sur le plan judiciaire et

19 militaire, n'est-ce pas ? C'est en synthèse, ce que vous vouliez dire ?

20 R. Oui.

21 Q. C'est ce que vous dites pour que nous comprenions bien et replacions

22 ceci dans le contexte de ce procès, c'est que ce système qui était en

23 vigueur est incompatible avec l'existence d'un plan qui consisterait à

24 faire un nettoyage ethnique des Albanais du Kosovo, quelle que soit la date

25 de confection de ce plan ?

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1 R. Bien sûr que non. D'abord, dans la constitution fédérale, l'Article 17,

2 penchez-vous dessus, dit que les ressortissants de la République fédérale

3 de Yougoslavie ne peuvent être chassés du territoire de cet Etat. Ils

4 peuvent se déplacer en toute liberté. Ils peuvent revenir en toute liberté.

5 C'est un droit constitutionnel.

6 Q. Ce serait un crime de chasser un citoyen du Kosovo, n'est-ce pas ?

7 R. Cela, c'est en vertu du droit international de guerre. Or, ici, c'est

8 un conflit interne et il n'y a pas d'expulsion. Les citoyens ont quitté le

9 territoire pour des raisons de sécurité personnelle. Lorsque l'agression de

10 l'OTAN a commencé, les gens commençaient à se déplacer vers des lieux plus

11 sûrs.

12 Q. Nous allons revenir là-dessus, mais je crois que vous n'avez pas bien

13 compris ma question. En fait, en représentant avec soin la cause de

14 l'accusé, je l'ai répété pour vous expliquer la raison de ma question

15 suivante. S'il y avait un système judiciaire et militaire efficace,

16 l'existence d'un tel système n'est pas compatible avec l'existence d'un

17 plan qui viserait à procéder au nettoyage ethnique des Albanais du Kosovo,

18 parce qu'on ne peut pas demander à des gens de commettre ce crime

19 d'expulsion d'un pays tout en ayant en place un système qui punirait ces

20 gens s'ils commettaient cette infraction ?

21 R. Les tribunaux existent pour cela.

22 Q. D'accord. Le point de vue historique, n'est-il pas celui-ci, vous le

23 savez. Les autorités de Serbie-et-Monténégro avaient reçu des

24 avertissements dès l'année 1998, il avait été dit qu'il y avait, peut-être,

25 des crimes qui ont été commis sur le territoire de Serbie-et-Monténégro et,

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1 en particulier, au Kosovo, n'est-ce pas ?

2 R. Je ne sais pas qui les a prévenus de tout cela.

3 Q. Est-ce que vous savez notamment que des lettres ont été envoyées par

4 l'ancien Procureur de ce tribunal, Mme Louise Arbour, à l'accusé en mars

5 1998 ?

6 R. Partant de quoi a-t-elle envoyé de telles lettres ? Etait-elle sur les

7 lieux ou est-ce qu'elle recevait des rapports du domaine du renseignement

8 de la part de certaines forces armées ?

9 Q. Est-ce que c'est important ? Est-ce que cela compte de savoir si elle a

10 reçu des renseignements si cet avertissement qu'elle a donné était un bon

11 avertissement, Général ?

12 R. Pour tout avertissement, il faut qu'il y ait une argumentation

13 appropriée en provenance des lieux concernés.

14 Q. Je suppose que vous ne connaissez pas l'existence de cette lettre ?

15 R. Elle a pris la parole en public. Pour ce qui est de ses courriers, je

16 n'ai pas eu l'occasion d'en prendre connaissance. Elle n'a pas adressé de

17 courrier aux instances judiciaires.

18 Q. Fort bien. Est-ce que vous connaissez les préoccupations formulées par

19 le général Perisic dans sa lettre du 23 juillet 1998 ? Dans cette lettre,

20 il parle notamment de la tendance qu'a l'armée d'agir en dehors du système

21 institutionnel ? Est-ce que vous connaissez l'existence de cette lettre-

22 là ?

23 R. L'armée n'est jamais intervenue à l'extérieur du système, mais à

24 l'extérieur des institutions. Si cela est dit, alors cela est sujet à

25 controverse. Je ne pense pas que Perisic ait pu déclarer que l'armée était

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1 arrivée à intervenir hors du système. Jamais, l'armée n'est intervenue hors

2 du système.

3 Q. Je vais continuer à vous poser des questions auxquelles vous pouvez

4 répondre par oui ou par non; à vous de décider comment vous y répondrez.

5 Est-ce que vous connaissez l'existence d'une lettre émanant de Louise

6 Arbour, ancien Procureur, envoyée le 15 octobre 1998 à l'accusé dans

7 laquelle elle parlait de son intention de reprendre ses enquêtes sur le

8 Kosovo et son intention d'effectuer une visite au Kosovo ?

9 R. Je n'en ai pas connaissance. Tout ce que je sais, c'est que les médias

10 ont titré quelque chose à ce sujet. Je ne sais même pas qu'elle a été la

11 teneur de ce texte. Excusez-moi, pourquoi ne s'est-elle pas adressée au

12 procureur ? Qu'a-t-elle à s'adresser au président ? Elle est procureur,

13 elle doit s'adresser à son homologue, un procureur.

14 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Nous avons reçu votre réponse,

15 Monsieur. Poursuivez, Monsieur Nice.

16 M. NICE : [interprétation] Est-ce que vous connaissez la lettre envoyée par

17 Tony Blair, premier ministre britannique, le 24 septembre 1998, lettre

18 envoyée à l'accusé dans laquelle il formule des préoccupations quant à

19 l'évolution ou à la montée en puissance d'une crise humanitaire ? Est-ce

20 que vous êtes au courant de cette lettre ?

21 R. Je n'en ai pas connaissance. Je n'étais pas membre du gouvernement pour

22 que des premiers ministres s'adressent à moi. Moi, j'étais président de la

23 cour militaire du tribunal militaire à Belgrade.

24 M. NICE : [interprétation] Ce sont des pièces, je peux vous donner les

25 côtes. Je ne veux pas perdre de temps, cependant, Messieurs les Juges.

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1 Q. Monsieur le Témoin, est-ce que vous connaissez le fait qu'après Racak,

2 il y a eu plusieurs publications qui ont affirmé qu'il y avait eu à Racak,

3 un massacre ? Notamment, l'OSCE a pratiquement aussitôt dressé rapport

4 disant que la VJ et la police avaient attaqué Racak ?

5 R. J'ai suivi cela par les médias, mais l'armée ne s'est pas attaquée à

6 Racak. Par conséquent, ce rapport se trouve être inexact, du moins pour ce

7 qui est de cette partie-là.

8 Q. J'ai un simple rappel, vous sources de connaissance selon lesquelles

9 l'armée n'avait pas attaqué Racak, c'est un seul informateur, n'est-ce pas

10 ? Jamais, vous n'avez mené d'enquête sur ce fait ?

11 R. Non. Nous n'avons pas mené d'enquête parce que cela ne relève pas de

12 nos compétences. L'armée n'a pas pris part à cela, donc le tribunal

13 militaire n'avait rien à voir. C'est le tribunal de district de Pristina

14 qui est intervenu. Cela relevait du domaine de ses compétences à lui.

15 Q. Le prochain témoin va nous en parler. Vous étiez dans l'armée, vous

16 voulez que l'armée ait un bon système judiciaire. Ceci m'amène à poser la

17 question suivante : si, et c'était le cas, il y avait des allégations

18 formulées dans la communauté internationale parlant d'une implication de

19 l'armée dans Racak, est-ce que votre système judiciaire n'avait pas un

20 devoir d'enquête ?

21 R. Les allégations doivent être confirmées par des éléments de preuve.

22 Affirmer quelque chose au niveau de l'opinion publique mondiale ne signifie

23 rien. Il y a des hommes armés qui l'ont escorté, c'est des terroristes et

24 ils avaient une mission qui n'était pas armée. D'où venaient les

25 renseignements ? On a pu voir cela sur l'enregistrement vidéo.

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1 Q. Nous allons voir la position en droit pour ce qui est des obligations

2 couvrant le système judiciaire militaire plus tard. Mais je voulais avoir

3 une réponse claire de votre part maintenant. Pour vous, peu importerait de

4 savoir combien de journaux, d'émissions télévisées qui auraient parlé d'une

5 implication de l'armée, cela ne vous pousserait pas à mener une enquête à

6 partir de ces éléments là ?

7 R. C'est une question qui doit être décidée par le procureur. Je n'étais

8 pas procureur. Comme il n'a pas réagi, il a dû analyser la chose, il a dû

9 constater qu'il n'y avait pas d'éléments suffisants. Il a dû vérifier les

10 faits par le biais du commandement militaire et a trouvé qu'il n'y avait

11 rien, et probablement --

12 Q. Général, attendez, attendez --

13 R. Attendez. Je n'ai pas dit qu'il avait vérifié.

14 Q. Je croyais vous veniez juste de le dire.

15 R. Non, excusez-moi. J'ai dit que je n'étais pas procureur à l'époque et

16 que le procureur avait probablement vérifié, parce que si moi j'avais été

17 procureur j'aurais vérifié, mais je n'étais pas procureur au moment donné.

18 Q. Quelque part dans les archives de la VJ, il devrait y avoir, ou encore,

19 dans les archives du système judiciaire militaire que vous auriez pu

20 consulter dans le cadre de vos fonctions, il devrait y avoir un rapport

21 relatif à ces événements-là où on parle, où le juge d'instruction chargé à

22 l'ordre de l'affaire aurait dressé un rapport montrant que la VJ n'était

23 pas impliquée. Est-ce que vous auriez vu un tel rapport ?

24 R. Je n'ai pas vu de rapport de cette nature, et je ne pense pas que dans

25 le système judiciaire militaire il existe un rapport de cette nature.

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1 Q. Le 3 février 1999, général Drewienkiewicz, écrit à l'accusé en espèce,

2 s'agissant d'allégations surtout de pillage à grande échelle, et les

3 allégations sont portées contre la VJ et le MUP. Est-ce que vous êtes au

4 courant de l'existence cette lettre-là ?

5 R. Je n'ai pas connaissance de la lettre, mais les organes judicaires ont

6 poursuivi en justice tout pillage de biens s'agissant des membres de

7 l'armée de Yougoslavie en 1999. Maintenant, vous êtes en train de parler

8 d'une date qui ne coïncide pas avec celle dont nous avons parlée.

9 Q. Le 26 mars 1999, Louise Arbour écrit une nouvelle lettre disant qu'elle

10 a l'intention de mener des enquêtes sur toutes les infractions graves au

11 droit humanitaire international. Est-ce que vous connaissiez l'envoie de

12 cette lettre ?

13 R. Elle a, à plusieurs reprises, averti de ce type d'événements.

14 Q. Est-ce que nous pourrions voir un brève extrait déjà versé au dossier.

15 C'est la pièce 15. Merci. La date n'est pas très précise mais ayez

16 l'obligeance de regarder cet extrait avec nous.

17 [Diffusion de cassette vidéo]

18 M. NICE : [interprétation] Je ne reçois pas la bande-son. Or il y a une

19 bande-son. Sans le son, c'est assez inutile puisque ce qui m'intéresse

20 c'est la bande-son. Je vous remercie. Nous allons supprimer cette pièce.

21 Q. Je vais vous faire une suggestion. Il y a eu des émissions de la BBC,

22 de la CNN qui allégeaient qu'il y avait un nettoyage ethnique en cours avec

23 implication de la VJ. La pièce 15 est un de ces exemples. J'espère que nous

24 pourrons le voir une fois que nous aurons la bande-son. Est-ce que ceci a

25 été porté à la connaissance du système judiciaire militaire ?

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1 R. On voit ici l'image, mais lorsqu'il s'agit de nettoyage ethnique, cette

2 formule ne saurait être appliquée au Kosovo-Metohija où il s'agissait de

3 ressortissants de la République fédérale de Yougoslavie. En vertu de la

4 constitution, ils ne pourraient être expulsés du pays. Par conséquent, ici,

5 il s'agit de gens qui s'efforçaient de se sauver de l'intervention de

6 l'OTAN et des interventions de l'OTAN allier du conflit d'entre l'OTAN et

7 l'armée en Yougoslavie.

8 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Etes-vous en train de dire, Général,

9 que s'il était allégé que les militaires étaient responsables de

10 l'évacuation de gens de leur foyer, il n'y aurait pas d'enquête tant que

11 ces gens, pour des raisons techniques, sur le plan technique, resteraient

12 en Serbie ?

13 LE TÉMOIN : [interprétation] Voyez-vous, quand quelqu'un dit "riposte" ou

14 "réponse", il faut montrer l'argumentation afférente. On ne peut pas

15 partant de fiction théorique tirer des conclusions pour dire qu'une image

16 est réaliste, alors que cela n'est pas le cas. On demande maintenant, on

17 parle d'une hypothèse pour ce qui est de savoir comment va réagir le

18 procureur militaire ou le procureur de l'Etat. Il s'agit d'établir les

19 faits et non pas de prendre les rapports de médias ou de journalistes qui

20 vont et viennent. Il faut étudier la situation telle qu'elle se présente.

21 Les instances de justice traitent des réalités, de conséquences réelles, et

22 non pas de fiction, pas de suggestion, pas de supposition ou de thèse. Le

23 procureur a dû analyser cela --

24 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Il ne sert à rien, il n'est pas utile

25 de faire exprès de ne pas comprendre la question. Vous avez parfaitement

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1 bien compris ma question et vous avez fourni une réponse qui a sans aucun

2 rapport avec ma question. Mais je ne vais pas y consacrer plus de temps.

3 Continuez, Monsieur Nice.

4 LE TÉMOIN : [interprétation] Mais il est entendu que le procureur doit

5 réagir au cas où il y a agissement contraire à la justice ou délit au

6 pénal, mais il n'y a pas eu d'éléments de preuve à cet effet. Nous nous

7 comprenons parfaitement bien, Monsieur.

8 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Vous le savez, je vous ai posé une

9 question hypothétique.

10 M. NICE : [interprétation] Je crois que nous avons maintenant la bande-son

11 de la pièce 15.

12 M. KAY : [interprétation] Il n'y devrait pas y avoir de bande-son. Je me

13 souviens avoir soulevé une objection à l'époque. Il s'agit des cassettes

14 vidéo produites par l'enquêteur Spargo, et cela devait être sans bande son

15 parce qu'en fait cela faisait plus de trois heures et demie.

16 M. NICE : [interprétation] Pour une raison différente, maintenant ce qui

17 compte c'est la bande-son parce qu'on fait des allégations contre la VJ. Je

18 ne veux pas prendre trop de temps.

19 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Cela fait combien de temps cette

20 bande-son.

21 M. NICE : [interprétation] Est-ce que je peux la diffuser avec la bande-son

22 et je vais voir s'il est possible d'avoir le versement avec la bande-son.

23 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Cela fait combien de temps ?

24 M. NICE : [interprétation] Pas beaucoup. Une minute, à peu près.

25 [Diffusion de cassette vidéo]

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1 L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

2 "Village après village, heure après heure, sous le symbole de leur

3 nationalisme, les autorités serbes envoient en exile la population

4 albanaise du Kosovo. Les réfugiés maintenant se sont dépouillés de touts

5 documents donnant leur identité. Ils n'ont plus que le désespoir comme

6 identité commune. Ce n'est pas gratuitement que ces gens partent. Il y a

7 une certaine logique. Lorsqu'on essaie de vérifier d'où viennent ces

8 réfugiés, on voit que le réfugié est en train d'être ethniquement nettoyé,

9 village après village, heure après heure.

10 "Les autorités ici font de leur mieux pour vérifier d'où viennent les

11 réfugiés. La liste révèle qu'il y a expulsion d'une efficacité

12 industrielle.

13 "Vous pourriez me montrer sur la carte d'où ils viennent ?

14 "A commencer par l'extérieur du Kosovo, les Serbes implacablement vont vers

15 l'intérieur du pays, en pressant vers la capital de Pristina. Et comme si -

16 -"

17 [Fin de la diffusion de cassette vidéo]

18 M. NICE : [interprétation]

19 Q. Je crois que nous n'aurons pas plus de détails par la suite. On fait

20 référence au fait que les autorités expulsent les gens vers un autre pays.

21 Les autorités pourraient être soit de la police soit de l'armée. Si vous

22 aviez vu ou entendu cette allégation très grave, vous, en tant que chef du

23 ministère militaire de la poursuite, est-ce que vous pensiez qu'il est

24 utile de poursuivre ?

25 R. Je n'étais pas procureur militaire au sommet. J'avais -- il y avait un

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1 collègue qui occupait ce poste, mais il est évident --

2 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] La question se formulait comme

3 hypothèse. Si vous aviez vu ceci, est-ce que vous auriez diligenté une

4 enquête ?

5 LE TÉMOIN : [interprétation] J'aurais diligenté une enquête pour déterminer

6 si ce que ce reporteur a dit est exact ou pas, mais il est évident que cela

7 était impossible. Impossible sur le plan juridique et sur le plan des

8 réalités. Si maintenant vous voulez vous pencher sur un plan hypothétique

9 sur la réalité de ces choses, on peut en parler, mais personne ne serait

10 expulsé qui que ce soit, vu la constitution.

11 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci. Monsieur Milosevic.

12 L'ACCUSÉ : [interprétation] Juste une petite clarification, je vous prie.

13 L'interprète a dit : "Est-ce que vous, en votre qualité de procureur

14 militaire au sommet de l'échelle, vous auriez…" et il a compris la chose

15 ainsi, il a dit : "Je n'étais pas moi-même procureur militaire." Je ne peux

16 pas retrouver cela au compte rendu d'audience, mais, en langue serbe, dans

17 mes écouteurs, on a dit : "Est-ce que vous, en votre qualité de procureur

18 militaire au sommet…"

19 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est ainsi qu'a été formulé la question

20 que j'ai entendue.

21 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Mais, lorsque je lui ai posé la

22 question, je n'ai pas mentionné cette référence. Il a répondu.

23 M. NICE : [interprétation]

24 Q. Vu votre dernière réponse, d'abord une question liminaire :

25 Il y a bien sûr les accusations poursuivies ici, mais il y a aussi "Human

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1 Rights Watch", l'OSCE. Toutes ces allégations ont été assez claires. Elles

2 disaient que des milliers de personnes avaient été tuées et que des

3 dizaines de milliers de personnes avaient été chassées du Kosovo, et que

4 ceci s'inscrivait dans un plan de nettoyage ethnique avec participation du

5 MUP et de la VJ. Vous êtes au courant de cette allégation, n'est-ce pas ?

6 Vous savez qu'elles ont été formulées ces allégations ?

7 R. La question, vous l'avez posée de façon si suggestive

8 que -- enfin, on voulait entendre que j'avais connaissance d'un nettoyage

9 ethnique, et je vous dis qu'il n'y a pas eu de nettoyage ethnique.

10 Q. Non, Général. Je vais continuer à vous interrompre. Essayez d'écouter

11 la question. Vous êtes Général. Cela veut dire qu'on doit avoir un doctorat

12 ou qu'on devait avoir un doctorat en ex-Yougoslavie pour devenir général.

13 En tout cas, c'est le niveau de connaissance universitaire qu'on est censé

14 avoir. Vous devez être en mesure de comprendre ma question. Répondez par

15 oui ou par non.

16 Est-ce que vous savez que de telles allégations avaient été

17 formulées ?

18 R. Tout d'abord, j'ai un doctorat en science juridique pour ce qui est du

19 droit pénal, et j'ai une agrégation --

20 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui.

21 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui ?

22 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Général, écoutez, s'il vous plaît,

23 la question. La question est celle-ci : est-ce que vous êtes au courant,

24 est-ce que vous savez que des allégations ont été formulées parlant d'un

25 nettoyage ethnique opéré par le MUP et la VJ ? On vous demande simplement

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1 si vous êtes au courant du fait que de telles allégations ont été

2 formulées.

3 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Des allégations de cette nature ont été

4 faites par divers --

5 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vous remercie. Monsieur Nice.

6 M. NICE : [interprétation]

7 Q. Beaucoup de ces allégations ont été formulées alors que vous étiez en

8 poste, n'est-ce pas ? On en a parlé à la radio et à la télévision. "Human

9 Rights Watch" en a parlé beaucoup de ces allégations. Elles ont été faites

10 alors que vous étiez en fonction.

11 R. Quand j'étais "en fonction", dans quel sens ? Dans quel sens vous

12 voulez dire que j'étais "en fonction" ?

13 Q. Je ne peux que reprendre les termes mêmes de l'accusé. Celui-ci,

14 j'essaie de trouver vite l'endroit où il le disait. Il disait que vous

15 étiez responsable des services juridiques ou judiciaires militaires,

16 lorsque vous êtes devenu président. Est-ce que vous n'étiez pas l'homme

17 responsable de ces services à un moment donné ?

18 Oui, j'ai retrouvé le passage : "J'ai été nommé chef du service

19 juridique de l'état-major général de l'armée de Yougoslavie." Je pense que

20 cela a été repris plusieurs fois par l'accusé dans les questions qu'il vous

21 a posées. Est-ce que vous n'étiez pas chef du service juridique du grand

22 état-major de l'armée de Yougoslavie ?

23 R. Oui. Oui, je l'ai été. C'est bien exact. Cela est bien exact.

24 Q. Bon nombre de ces allégations, parlant de nettoyage ethnique, elles ont

25 été formulées alors que vous étiez en fonction. Vous imaginez ma prochaine

Page 37623

1 question. Je vous la pose d'ailleurs : où vais-je trouver l'enquête que

2 vous avez menée, que vous avez diligenté sur ces questions ou allégations

3 de nettoyage ethnique ?

4 R. S'agissant du nettoyage ethnique, il n'y a pas eu d'éléments de preuve,

5 et à cet effet il n'y a eu aucune procédure pénale de diligenter à

6 l'encontre de qui que ce soit. Tous les éléments se trouvent dans les actes

7 judiciaires des tribunaux et des ministères publics. Ce sont là des organes

8 chargés de diligenter des enquêtes et de juger les gens. L'administration

9 juridique n'a fait que mettre sur pied le système judiciaire, le système

10 militaire en matière de justice. Il faut d'abord qu'il y ait existence de

11 nettoyage ethnique en tant qu'acte. En matière juridique, il faut que ce

12 soit prouvé. Etant donné qu'il n'y a eu aucun élément de preuve, il n'y a

13 pas eu de procédure au pénal. Je vous ai dit pour quelles raisons il ne

14 pouvait pas y avoir de nettoyage ethnique. Cette population ne constitue

15 que 10 % ou 15 % de la population au total. Qui allait venir habiter,

16 peupler ces régions, si tel avait été l'intention que d'expulser des gens

17 de chez eux.

18 Q. La réponse simple de ma question est celle-ci : il y avait beaucoup de

19 sources, beaucoup d'allégations très répandues de nettoyage ethnique et

20 vous n'avez pas fait la moindre chose pour essayer de mener une enquête

21 suite à ces allégations.

22 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Nice, le témoin a déclaré

23 qu'il revenait au procureur d'engager des poursuites, pas le service

24 juridique.

25 M. NICE : [interprétation] En fait, je vais voir si le procureur --

Page 37624

1 Q. Ni vous ni d'autres responsables ni le procureur n'ont décidé de

2 diligenter des enquêtes. Je remercie le président de la Chambre de m'avoir

3 aidé à reformuler ma question.

4 Personne que ce soit vous que ce soit un quelconque procureur n'a décidé

5 d'engager ou de mener une enquête suite à ces allégations de nettoyage

6 ethnique, n'est-ce pas ?

7 R. Le procureur s'est chargé de la question. Je me suis entretenu avec le

8 procureur militaire en chef. Il a étudié la question. Il a constaté qu'il

9 n'y avait aucun élément justifiant une procédure en la matière.

10 Q. En avez-vous discuté avec lui et où se trouve le rapport écrit faisant

11 état d'une décision si importante ?

12 R. Il s'agissait d'une conversation orale lorsqu'on a parlé de ces

13 questions, étant donné qu'il y a eu des commentaires dans les médias

14 internationaux. Nous avons parlé de la question. Il a dit qu'il n'y avait

15 pas d'éléments suffisants pour que cela puisse se faire. Il a dit que

16 juridiquement cela ne se pouvait pas en notre pays. Il a dit que

17 juridiquement la chose était impossible chez nous.

18 Q. Aujourd'hui, et la dernière fois vous avez fait référence qu'il était

19 impossible de mener des enquêtes sur ce genre de sujet. Qu'est-ce que vous

20 vouliez dire exactement ?

21 R. Quand je dis impossible, je parle du droit constitutionnel. D'un droit

22 qui garantit à tous les citoyens de la République fédérale de Yougoslavie.

23 Personne ne serait expulsé qui que ce soit. On ne peut qualifier cela --

24 Q. Désolé. Je n'ai pas été suffisamment clair. Je vais simplifier ma

25 question. La dernière fois, aujourd'hui, vous avez dit qu'il était

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1 impossible de mener des enquêtes sur certains sujets au Kosovo. Pourquoi

2 est-ce que c'était impossible ?

3 R. J'ai dit que cela était impossible, parce qu'il y avait la sécurité des

4 instances qui devaient le faire. Vous perdez de vue une chose, à savoir que

5 19 pays de l'alliance militaire la plus forte se sont attaqués à ce petit

6 territoire. Savez-vous combien d'avions survolaient sur ce petit

7 territoire ? Si vous prenez cette donnée-là, et ces attaques de l'OTAN,

8 vous n'avez qu'à prendre les horaires des interventions. Il y a eu 800

9 avions qui ont bombardé au quotidien, entre 800 et 1 200 avions ont

10 bombardé tous les jours. Prenez le total de --

11 Q. Arrêtons-nous. Le devoir d'enquête qui incombe un tel ou tel organe

12 suite à la commission au présumé d'infraction n'a rien à voir avec -- ou

13 cela ne se termine pas avec la fin d'un conflit. Ce devoir d'enquête se

14 perpétue, se maintient.

15 R. C'est exact, mais nous n'avions plus de juridiction au Kosovo. Vous

16 perdez une fois de plus cet élément de vue.

17 Q. Est-ce que vous êtes en train de dire que vos autorités se seraient

18 trouvées dans l'impossibilité de mener des enquêtes au Kosovo si elles

19 avaient vraiment voulu le faire ?

20 R. S'agissant de tout acte qualifié de délit au pénal, il faut qu'il y ait

21 une procédure à mettre en œuvre. On ne parle pas d'hypothèse. Si quelqu'un

22 émet des hypothèses, il faut automatiquement, dites-vous, diligenter une

23 enquête. Là, où il y a des réalités, des enfreintes au droit, oui, les

24 enquêtes doivent être diligentées.

25 Q. Je pense vous avoir demandé s'il était impossible pour les autorités de

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1 mener des enquêtes au Kosovo s'ils voulaient vraiment le faire ? Ayez

2 l'obligeance de répondre à ma question. Est-ce que c'était quelque chose de

3 possible ou d'impossible ? Est-ce qu'il était possible ou non d'aller au

4 Kosovo pour mener des enquêtes ?

5 R. La possibilité est tout à fait relative. Vous voulez qu'on vous réponde

6 en termes absolus, mais les termes absolus de ce côté-là ne sauraient

7 exister. C'est donc relatif. Je vous ai dit quels étaient les obstacles

8 réels qui s'interposaient aux enquêtes à diligenter s'agissant, bien sûr,

9 d'infractions au pénal. Vous voudriez maintenant, de force, me faire

10 entendre qu'il s'agissait d'un délit au pénal de nettoyage ethnique, alors

11 que cela n'a pas existé. C'est là que nous divergeons. Nous ne pouvons pas

12 avoir des vues identiques, ni des réponses qui vous conviendraient

13 s'agissant de la thèse erronée avancée par l'acte d'accusation. Vous

14 représentez un acte d'accusation qui est dépourvu d'argumentation

15 appropriée. Il y a un mouvement de la population, là, la chose n'est pas

16 contestée. Ils se sont préparés. Ils ont préparé d'avance des camps. Pour

17 ce qui est de la Croix Rouge, on s'attendait à des réfugiés. Chaque fois

18 qu'il a un conflit, il y a des réfugiés. Dans tous les conflits armés, il y

19 des réfugiés --

20 Q. Je vais vous interrompre. Répondez par oui ou par non. Acceptez-vous

21 ceci, si vous aviez voulu aller au Kosovo, vous ou d'autres autorités, pour

22 interroger des témoins, pour interroger des victimes, pour voir si

23 effectivement il y avait du nettoyage ethnique, est-ce que cela aurait été

24 quelque chose de possible ?

25 R. De quelle période êtes-vous en train de parler ? De quelle période

Page 37627

1 êtes-vous en train de parler ?

2 Q. De 2000, 2001, 2002, 2003. La période consécutive --

3 R. Nous n'avons pas eu la possibilité d'y aller.

4 Q. Nous allons, je l'espère, entendre de Slavisa Dobricanin des questions

5 similaires. Est-ce que lui aurait pu mener une enquête en 2001, en 2002, en

6 2003 au Kosovo ?

7 R. Dobricanin est un expert en médecine légale. C'est un expert, ce n'est

8 pas un juriste, ce n'est pas un juge, il est expert. Il est convié par les

9 organes chargés de diligenter des enquêtes en qualité d'expert, mais aucun

10 organe de l'Etat n'a eu l'autorisation de se rendre là-bas.

11 Q. Oui ou non ?

12 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Nice, lorsque le témoin a

13 dit ceci, "Nous n'avons pas été autorisés à aller" en réponse à la question

14 que vous posiez et qui "concernait la période considérée" vous avez dit

15 "2001, 2002, 2003."

16 M. NICE : [interprétation] Oui.

17 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je pense qu'il faut une question de

18 suivi parce que cela c'est pertinent s'agissant du devoir de poursuite des

19 enquêtes une fois le conflit terminé. Si le témoin a une explication, il

20 nous faut l'entendre.

21 M. NICE : [interprétation] Tout à fait.

22 Q. Pourriez-vous expliquer pourquoi d'après vos dires, il était impossible

23 d'aller au Kosovo ? Dobricanin n'est pas le témoin suivant, je m'excuse, il

24 viendra plus tard, alors que lui dira qu'il aurait pu aller mener une

25 enquête au cours de ces années-là au Kosovo.

Page 37628

1 R. Je vous ai expliqué, mais j'ai l'impression que de façon évidente vous

2 ne voulez pas entendre, que vous ne voulez pas comprendre. Dobricanin est

3 un expert en médecine légale, un médecin légiste, il est chargé des

4 autopsies de corps que l'on a retrouvés. Il est sollicité en ses qualités

5 d'expert par la MINUK qui est chargée de ces procédures, mais nos instances

6 d'instruction n'ont pas accès au territoire du Kosovo-Metohija. Cela se

7 trouve être ainsi en vertu de l'accord signé là-bas entre nos autorités et

8 l'ONU. Il est sollicité en sa qualité d'expert, il n'est pas sollicité en

9 qualité d'enquêteur, il est expert, il constate des blessures sur les

10 cadavres ou il identifie des cadavres. Ce sont deux choses tout à fait

11 distinctes. Je crois que tout le monde devrait le comprendre, aussi bien le

12 Procureur que les autres parties qui interviennent dans ce procès.

13 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Dans le monde entier, chaque jour des

14 forces de police mènent des enquêtes dans d'autres pays, alors que ce ne

15 sont pas des territoires qui relèvent de leur compétence territoriale parce

16 que des pays demandent leur aide, demandent leur coopération pour ce qui

17 est d'une enquête. Pourquoi qu'en Serbie la même chose ne serait pas

18 possible après le conflit ? Pourquoi est-ce qu'il ne peut pas y avoir de

19 coopération pour ce qui est d'enquêtes à mener suite à des allégations ?

20 LE TÉMOIN : [interprétation] Je suis tout à fait d'accord avec vous, la

21 coopération a été réclamée par notre partie. Les représentants de la MINUK

22 ne l'ont pas acceptée. C'est là le problème, ils n'ont pas accepté, soit

23 ils se taisent et ils ne répondent pas, soit ils refusent et ils rejètent

24 de telles demandes. Des procureurs se sont adressés à plusieurs reprises et

25 ils n'ont reçu aucune réponse.

Page 37629

1 M. NICE : [interprétation]

2 Q. Si nous voulons suivre ce que vous avez dit en réponse à la question de

3 M. Bonomy, je vais vous demander les moindres détails, mais est-ce que vous

4 avez des preuves de demandes faites par le gouvernement de Serbie-et-

5 Monténégro pour aller au Kosovo pour mener des enquêtes sur les allégations

6 formulées de nettoyage ethnique ?

7 R. Je crois avoir parlé de ce qu'ont fait les instances judiciaires, je ne

8 parle pas des instances du gouvernement de la Yougoslavie ou de la Serbie.

9 Les instances chargées de diligenter les enquêtes au niveau militaire et

10 civil se sont adressées à l'administration du Kosovo-Metohija n'ont pas

11 reçu d'informations en retour ou en réponse pour ce qui est de la

12 possibilité de diligenter des enquêtes parce que c'était la MINUK qui se

13 chargeait de ces enquêtes, ils avaient leurs instances à eux, et ils n'ont

14 pas accepté l'intervention de qui que ce soit. Demandez un rapport de la

15 MINUK et vous verrez.

16 Q. Je vous arrête. Non, non, je répète la question, parce qu'il y avait

17 dans cette question un détail que vous avez complètement ignoré : est-ce

18 que votre organe, votre institution ou d'autres autorités ont demandé à

19 aller au Kosovo pour mener des enquêtes suite à des allégations de

20 nettoyage ethnique.

21 R. Il y a eu des demandes. Ils ont demandé à avoir accès à certains

22 témoins et ils ne l'on pas obtenu, mais les demandes ont été faites.

23 Q. Je vais faire une dernière tentative. Je ne sais pas si vous avez

24 véritablement répondu à ma question. Est-ce qu'il y a eu des demandes, ne

25 serait-ce qu'une, visant à mener une enquête suite à des allégations de

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1 nettoyage ethnique, parce que si cela est le cas, je vais vouloir tout

2 savoir, où sont ces documents ? Je répète ma question, est-ce qu'il n'y

3 aurait pas eu des requêtes, ne serait qu'une requête, permettant de mener

4 une enquête suite à des allégations de nettoyage ethnique ?

5 R. Vous passez à la question de nettoyage ethnique. Je vous ai déjà

6 répondu entièrement à cette question, à l'aspect nettoyage ethnique.

7 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Général et Monsieur Nice, le général

8 auparavant a parlé d'un accord technique militaire qui interdisait la venue

9 de qui que ce soit. Je pense que c'est ce qu'il a dit.

10 Je voudrais savoir ce que signifiait cet accord. Il avait été conclu entre

11 quelles entités ?

12 LE TÉMOIN : [interprétation] Cet accord militaire et technique est un

13 accord signé entre les représentants de l'armée de Yougoslavie et les

14 représentants des forces de l'OTAN. Cela a été signé à Kumanovo et, partant

15 de cet accord, toutes les forces armées se sont retirées du Kosovo-Metohija

16 avec les instances du pouvoir. Le pouvoir a été repris ou réattribué aux

17 Nations Unies à titre temporaire. Le pouvoir a été donné à cette instance-

18 là et cela sous-entend l'autorité judiciaire. Aucune instance de notre Etat

19 ne saurait y faire son apparition, seules les organisations humanitaires

20 avaient l'autorisation d'y rendre. C'est la réponse que j'ai à apporter

21 maintenant.

22 Pour ce qui est du nettoyage ethnique, j'ai déjà apporté ma réponse --

23 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci, je vous remercie.

24 M. NICE : [interprétation]

25 Q. Je poursuis, et comme je l'avais prévu dès le début --

Page 37631

1 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Dommage, que vous poursuivez parce que

2 je pense qu'on aurait pu finalement avoir une réponse à votre question.

3 M. NICE : [Hors micro]

4 L'INTERPRÈTE : Hors micro, précisent les interprètes.

5 M. NICE : [interprétation]

6 Q. Je vais faire une toute dernière tentative. Je vais reposer cette

7 question très simple. Une première chose, Général, je vais essayer de

8 reprendre le libellé exact de ma question que je cherche à l'instant même.

9 Est-ce qu'il y aurait eu une demande, ne serait-ce qu'une, visant à

10 demander l'autorisation de mener une enquête suite à ces allégations de

11 nettoyage ethnique auprès des autorités de la MINUK ?

12 R. Je ne sais pas s'il y a eu des demandes de formulées à cet effet. Je

13 n'en ai pas connaissance.

14 M. NICE : [interprétation] Monsieur le Président, je ne sais pas si j'ai

15 bien posé la question, mais ce que vient de répondre le témoin, c'est qu'il

16 n'était pas au courant de l'existence de ce genre de requêtes.

17 Q. Vous voyez, Général --

18 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Il a répondu de façon juridique. Il

19 a dit qu'il y avait un accord, un accord avec la MINUK. Nous n'en

20 connaissons pas les termes. La MINUK était compétente et je ne sais pas si

21 cet accord a empêché la Serbie de mener des enquêtes. En tout cas, c'est ce

22 que le témoin dit.

23 M. NICE : [interprétation] Ecoutez, je vais étoffer ce propos en posant une

24 nouvelle question.

25 Q. Pour que tout soit clair, je vous demande ceci. Vous venez d'entendre

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1 la question posée par le Juge Bonomy s'agissant de forces de police qui,

2 quelquefois, opèrent sur le territoire d'autres Etats à cause de la demande

3 faite par ces Etats.

4 R. Bien entendu. Mais je ne sais pas si, dans un pays, un pays étranger

5 serait admis à diligenter sur quand est-ce que la police se serait admise ?

6 Cela ne se passe que par la coopération internationale et par l'INTERPOL,

7 mais ce sont les pouvoirs du pays qui sont chargés de l'enquête ou de

8 l'instruction. Je n'ai pas connaissance de la possibilité d'organes

9 d'instruction d'un autre pays envoyé dans un autre pays pour diligenter des

10 enquêtes. Peut-être, qu'il y en a eu, mais je ne suis pas au courant.

11 Q. Vous connaissez parfaitement le fonctionnement des demandes d'aide

12 parce que, pendant longtemps, vous avez siégé au comité qui représentait la

13 VJ dans la coopération qui devait avoir lieu avec le TPY. Dans ce cadre

14 vous avez reçu beaucoup de demandes d'aide et d'assistance. Vous les avez

15 traitées, vous savez comment fonctionne ce système, n'est-ce pas ?

16 R. Pour ce qui est de l'assistance, oui, certes. Mais, diligenter une

17 enquête nous-mêmes en notre qualité de représentant d'un Etat dans un autre

18 Etat, cela n'a pas encore eu lieu chez nous. Je n'ai pas connaissance d'une

19 telle pratique. Pour ce qui est de l'assistance, oui, cela existe. Cela

20 existe dans la procédure pénale du pays. On peut, par exemple, fournir une

21 aide dans le cadre d'accords entre deux Etats et cela se situe, en général,

22 au niveau d'un principe de réciprocité en place.

23 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Est-ce que dans cet accord militaire

24 technique dont vous avez parlé et qui s'est signé à la fin du conflit, est-

25 ce qu'il y aurait eu dans cet accord quoi que ce soit qui aurait empêché

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1 les autorités de Serbie de faire une demande à la MINUK afin d'être

2 autorisées à mener une enquête suite à cette allégation de nettoyage

3 ethnique ?

4 R. De telles dispositions explicites n'existent pas. Je sais que les

5 accords sont assez volumineux et il y a plusieurs avenants, mais il y a eu

6 des demandes d'entraide et d'aide. Il y a eu plusieurs demandes à cet effet

7 pour ce qui de certains délits au pénal et il n'y a pas eu de réponses.

8 Mais, pour ce qui est des procureurs militaires puissent diligenter des

9 enquêtes là-bas, en vertu de l'accord signé, il n'était pas possible de le

10 faire, parce que tous les effectifs de l'armée et de la police devaient se

11 retirer dans leur totalité. On avait prévu la possibilité d'un retour de 1

12 000 hommes au maximum, mais à ce jour, cette possibilité ne s'est pas vue

13 réaliser.

14 M. KAY : [interprétation] L'accord militaire technique se trouve au

15 paragraphe 108 de l'acte d'accusation concernant le Kosovo.

16 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vous remercie.

17 M. NICE : [interprétation]

18 Q. Vous avez terminé --

19 M. NICE : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président.

20 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] En vertu de cet accord, Général, qui

21 avait compétence, qui avait pouvoir de mener des enquêtes ?

22 LE TÉMOIN : [interprétation] Sur le territoire du Kosovo, dans ce

23 territoire, les nouvelles instances de la MINUK qui ont été mises sur pied,

24 mais les instances du pouvoir de la Serbie et de la Yougoslavie n'avaient

25 plus accès au Kosovo. On pouvait diligenter des enquêtes chez nous. C'est

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1 là que se trouvaient tous les éléments de preuve éventuels. Les événements

2 se sont produits là-bas. Les témoins étaient là-bas. Pour pouvoir enquêter

3 et savoir s'il y a eu un délit au pénal, il faut qu'on puisse se déplacer

4 vers le site des événements parce que, si l'on émet des suppositions en

5 étant ailleurs, l'image ne peut être que déformée et incomplète.

6 M. NICE : [interprétation]

7 Q. Vous avez produit des documents. Je ne sais pas si nous allons avoir le

8 temps de parler davantage de la procédure adoptée pour la production de ces

9 documents, mais dans tous ces documents, au fond, il y a des tentatives

10 visant à montrer que des enquêtes ont été menées. Je pense ici aux

11 intercalaires 17 et 18, n'est-ce pas ?

12 R. Oui.

13 Q. Vous avez été nommé par Ojdanic. Ojdanic, c'est un bon ami à vous,

14 après tout ?

15 R. Je n'ai pas été nommé à cette fonction par Ojdanic. Ojdanic, de par la

16 loi, avait pour mission de donner une proposition au président de la

17 république. Ojdanic, lui, a reçu une suggestion de la part du tribunal

18 militaire et du procureur militaire en chef. Ce sont eux qui ont donné

19 cette proposition.

20 Q. Est-ce que c'est un ami à vous ?

21 R. Qui, Ojdanic ?

22 Q. Oui, Ojdanic ?

23 R. Le général Ojdanic n'a pas été un ami. C'est un officier supérieur que

24 je respectais et pour qui j'ai beaucoup de considération.

25 Q. Etant donné la longueur des plaintes déposées et la longueur des

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1 enquêtes diligentées au Kosovo, il serait tout à fait impossible de gérer

2 le conflit sans qu'il y ait une forme donnée de système militaire

3 judiciaire, n'est-ce pas ?

4 R. Excusez-moi, je n'ai pas compris la question. Comment est-ce qu'un

5 système judiciaire militaire peut réglementer quoi que ce soit. Je ne

6 comprends pas très bien le système militaire judiciaire.

7 Q. Voyons les choses sous un autre angle : les yeux du public dans le

8 monde entier s'étaient déjà fixés sur des crimes possibles et la nécessité

9 d'enquêter sur ces crimes. Dans ces conditions, lorsque le conflit a

10 démarré, il aurait été tout à fait impossible pour l'armée yougoslave de ne

11 pas disposer d'une forme ou d'une autre d'un système judiciaire militaire

12 afin de donner le sentiment que le pays respectait les normes

13 internationales ?

14 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Robinson.

15 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, Monsieur Milosevic.

16 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je pense que cette question est réellement

17 inacceptable, notamment, après un long témoignage qui a permis de présenter

18 un grand nombre de documents portant sur le travail des tribunaux, sur la

19 situation des accusés et sur les personnes concernées par le bombardement.

20 Je ne comprends vraiment pas qu'il soit possible d'autoriser une telle

21 question --

22 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci.

23 L'ACCUSÉ : [interprétation] -- où l'on voit que l'on cherche à obtenir d'un

24 représentant la loi du droit, tel ou tel élément.

25 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci, Monsieur Milosevic. Laissez

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1 le témoin répondre à la question.

2 LE TÉMOIN : [interprétation] Manifestement le Procureur ne souhaite pas

3 entendre, et ce, délibérément, certaines des choses qui se sont dites ici.

4 Ce n'est pas qu'il n'en a pas la capacité. J'ai dit qu'il y avait

5 obligation juridique, obligation légale. Avec la proclamation de l'état de

6 guerre, la norme de droit comparé dicte aux organes judiciaires ce qu'ils

7 ont à faire pendant une guerre. Il n'y a aucun dilemme à cet égard. Dès que

8 le gouvernement décide de proclamer l'état de guerre, de façon tout à fait

9 automatique en raison de l'existence des organes judiciaires légaux, un

10 certain nombre de dispositions sont prises pour leur transformation dû à

11 l'état de guerre, et le jour où la guerre cesse, le système judiciaire

12 militaire cesse d'exister également. Personne ne peut agir d'une façon ou

13 d'une autre à son gré, simplement parce que l'opinion du monde le voudrait.

14 Tout cela dépend de règlements légaux. Je pense que nous sommes des hommes

15 de loi, et que nous avons nos lois dans un pays où elles sont en vigueur,

16 et ceci n'a rien à voir avec un quelconque contexte politique.

17 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci. Monsieur Nice.

18 M. NICE : [interprétation]

19 Q. Je vous dirais pour ma part que le système que vous présidiez dans la

20 mesure où vous y exerciez une quelconque influence, ne faisait que mettre

21 des pansements sur des plaies s'agissant de s'occuper des crimes les plus

22 graves. Est-ce que vous comprenez ce que je veux dire ?

23 R. Ceci n'est pas vrai. Le système militaire judiciaire ne saurait se

24 sentir offenser par vos propos qui sont offensants. Maintenant, examinons

25 la gravité des crimes.

Page 37637

1 Q. Voyons page 43 de la version B/C/S de l'intercalaire 17.

2 R. Je n'ai pas cet intercalaire. Vous ne me l'avez pas remis. J'aimerais

3 qu'on me le remette.

4 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Quel est le numéro de page dans la

5 version anglaise ?

6 M. NICE : [interprétation] Anglais --

7 LE TÉMOIN : [interprétation] Je demande qu'on me le restitue l'exemplaire

8 que j'ai donné à photocopier, car celui qu'on me remet à ce moment n'est

9 pas lisible.

10 M. NICE : [interprétation] Page 56 de la version anglaise.

11 LE TÉMOIN : [interprétation] Intercalaire 17. Moi, j'ai l'intercalaire 18

12 ici.

13 M. NICE : [interprétation] Intercalaire 17.

14 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Intercalaire 17, page 56.

15 M. NICE : [interprétation] Page 43 dans la version du témoin --

16 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Page 43, dans la version du témoin.

17 M. NICE : [interprétation]

18 Q. Nous sommes en train de chercher l'exemplaire qui vous convient,

19 Monsieur le Témoin. Est-ce que vous avez trouvé le passage maintenant ?

20 R. Oui.

21 Q. Très bien. Ici, il est question de Slobodan Stosic, et d'un, deux,

22 trois, quatre, cinq, six autres personnes. Avant d'en arriver à la question

23 que je voulais vous poser, je vous dirais ce qui suit : il importe de

24 rappeler aux Juges que ceci fait partie d'un document plus important qui

25 s'occupe pratiquement exclusivement de crime de droit commun, n'est-ce

Page 37638

1 pas ? Si l'on compare la gravité des crimes évoqués, on voit qu'il s'agit

2 principalement de vos vols ou de cambriolages ou pillages, n'est-ce pas ?

3 Je passe rapidement sur les différentes pages, et je m'arrête à cette

4 allégation qui concerne Slobodan Stosic.

5 Répondant aux questions qui vous étaient posées à ce sujet, avez-vous bien

6 dit, je cite, page 67 : "Ceci a été découvert à la mi-avril et un rapport a

7 été envoyé au procureur qui a lancé une procédure."

8 Je vous demanderais, Général Gojovic, de remonter dans vos souvenirs et de

9 nous dire qui est à l'origine de la demande d'enquête évoquée ici ?

10 R. Le procureur est la seule personne habilitée à diligenter à une

11 enquête.

12 Q. Peut-être bien, mais je vous demanderais maintenant de remonter dans

13 vos souvenirs, et de nous dire qui a effectivement diligenté cette

14 procédure ? Vous en souvenez-vous ?

15 R. Quelqu'un a dû informer le procureur. Quelqu'un a bien dû le faire.

16 Est-ce que c'était au commandant d'unité militaire ou quelqu'un d'autre,

17 cela n'est pas dit dans ce document. Mais le procureur a agi, le procureur

18 a reçu une information en rapport avec ceci. Maintenant, qui l'a informé,

19 ce n'est peut-être pas le plus important. Le plus important c'est que le

20 procureur a été informé.

21 Q. Voyez-vous, Général Gojovic, dans les documents qui nous ont été mis à

22 notre disposition, parce que nous avons essayé d'obtenir des autorités tous

23 les documents relatifs aux poursuites judiciaires, mais dans les documents

24 obtenus par nous, rien n'ait dit de l'identité de la personne qui est à

25 l'origine de la plainte. Cela étant, nous connaissons le nom de cette

Page 37639

1 personne à partir des éléments de preuve de la présente affaire. Voyez-

2 vous, il s'agit d'Aleksandar Vasiljevic, qui a dit ce qui suit : il a dit

3 qu'il savait - qu'il s'agissait de connaissance de première main pour lui -

4 que des volontaires répondant au nom de Dugi et Oto, ces deux noms sont

5 cités, et peut-être que Dugi et le nom de l'homme dont il est question au

6 bas de cette page, mais en tout état de cause, le général Vasiljevic

7 poursuit en disant qu'il a eu connaissance du fait que ces volontaires ont

8 liquidé six ou sept civils albanais et qu'ils ont jeté les corps dans un

9 puits dans le village de Gornja Klina. Ensuite ils ont recouvert le puits

10 de terre. Il poursuit en expliquant qu'il a découvert l'existence de cela

11 et qu'il a ordonné qu'une patrouille de police militaire soit envoyée sur

12 les lieux pour enquêter sur place.

13 Vous savez qui est Aleksandar Vasiljevic, n'est-ce pas ?

14 R. Oui.

15 Q. Remontez dans vos souvenirs, vous souvenez-vous de cette enquête très

16 précise sur un crime très grave qui a été effectivement commis parce qu'un

17 homme d'expérience, Aleksandar Vasiljevic, a demandé que ce crime soit

18 commis ?

19 R. Je vous en prie, je ne connais pas cette partie de la déclaration de

20 Vasiljevic, mais les tribunaux agissent sur ordre du procureur

21 exclusivement, et vous dites qu'il a ordonné quelque chose aux instances de

22 la police militaire. Les instances de la police militaire sont des

23 instances chargées de trouver les indices et de charger la police militaire

24 et la sécurité militaire ou le chef du département de la sécurité militaire

25 d'agir, et Vasiljevic était le numéro deux à cet égard. Il était le chef

Page 37640

1 adjoint. Ce n'est pas lui qui a fait cela. La seule chose qui pouvait faire

2 pour laquelle il avait compétence c'était découvrir qui étaient les auteurs

3 de ces crimes présumés. Lorsque nous apprenons ce genre de chose, il doit

4 être informé et faire circuler l'information vers le bas, et pas vers

5 Belgrade. Il a eu l'information d'en bas, et dans le cadre de sa compétence

6 et de son autorité, il a exactement fait ce qu'il devait faire.

7 Q. C'est ce que vous dit votre mémoire ou est-ce que c'est une réponse

8 hypothétique de votre part ?

9 R. Ce n'est pas ma mémoire qui me le dit. Ce sont les dispositions de la

10 loi qui le stipulent très clairement. On ne peut pas agir en dehors de la

11 loi.

12 Q. Vasiljevic a été relevé de ses fonctions pas très longtemps après cela.

13 Vous souvenez-vous de cela ?

14 R. Oui, il l'a été après moi. J'ai pris ma retraite le premier. J'étais

15 arrivé au bout de mes années de service et j'ai pris ma retraite avant lui.

16 Q. Pour rappeler aux Juges la situation de cette enquête particulière,

17 Stosic, qui était lieutenant-colonel, a fait l'objet d'une disjonction

18 d'instance, car seul les responsables de moindre importance ont été

19 traduits devant les tribunaux. Stosic est tout à fait libre en ce moment,

20 n'est-ce pas ?

21 R. Je suppose que cela est le cas.

22 Q. Voyons maintenant la seule question réellement intéressante. C'est un

23 autre document de l'intercalaire 17, mais nous n'avons pas le temps de

24 rentrer dans le détail. Nous allons nous rendre directement à

25 l'intercalaire 18. Je rappelle simplement aux Juges ce qui s'est passé en

Page 37641

1 page 4 de la version anglaise -- non, c'est la page 2 de la version en

2 B/C/S. Nous avons cet intercalaire 18, et nous voyons que seul le menu

3 fretin a comparu devant les tribunaux. Apparemment, ces hommes agissaient

4 selon ce que vous nous avez dit, sous la compétence de l'autorité du

5 responsable, c'est-à-dire, de l'officier supérieur.

6 Général Gojovic, est-il vrai que lorsqu'il y avait présomptions de crimes

7 graves, une enquête n'était -- si une enquête était lancée pour une raison

8 ou pour une autre, la seule possibilité consistait à enquêter pour vous, et

9 le reste de votre temps vous le consacriez à des délits sans grandes

10 importances tels que vol d'un sèche cheveux, vol d'une cassette, vol d'une

11 voiture automobile ?

12 R. Ici on voit toute une série de procédures judicaires qui sont intentées

13 à des individus pour d'autres délits que des délits mineurs, même s'il y a

14 également des délits mineurs dans ces actions en justice pour pillage, vol,

15 et cetera. Mais toutes les affaires sont recensées, toutes les affaires

16 dans lesquelles les auteurs présumés ont été identifiés et des procédures

17 judiciaires intentées à leur encontre. Mais lorsque les auteurs ne sont pas

18 identifiés, que les crimes sont connus, on voit le nombre d'affaires

19 rentrant dans cette catégorie, 600 - 601, si je ne m'abuse - donc, pour 601

20 victimes il y a lancements de poursuites judiciaires et enquêtes qui durent

21 jusqu'à cinq ou six ans dans des conditions normales, et qui dans ces

22 conditions précises durent uniquement deux mois.

23 Vos comparaisons ne tiennent pas la route. Ici nous parlons d'auteurs

24 présumés qui ont été identités.

25 Q. Je ne puis rentrer dans le détail, compte tenu du temps qui m'est

Page 37642

1 imparti. Je ne saurais traiter que de quelques-uns des délits qui sont

2 cités dans ce document, mais je tiens à rappeler aux Juges de la Chambre la

3 nature de cet intercalaire 18, avant d'en arriver à ma question suivante.

4 J'aimerais maintenant que nous passions à la page 6 en anglais, à la page 4

5 en B/C/S de ces documents.

6 Nous voyons ici une liste de crimes graves, même très graves.

7 Regardez les premières rubriques, 1 et 2. Nous les avons déjà examinées la

8 dernière fois. Nous voyons que dans le village de Susica, Petrovic et

9 Stamenkovic -- ou plutôt, excusez-moi, Petrovic a donné l'ordre à

10 Stamenkovic et à Jovic de liquider une femme et un homme âgés parce qu'ils

11 n'avaient pas quitté le village. Pourriez-vous me montrer le moindre

12 document indiquant dans quelle condition et selon quelle modalité une

13 enquête a été diligentée au sujet de ce crime ?

14 R. Il n'y en a pas ici. Il faudrait voir la liste des affaires. Je n'ai

15 pas eu la liste des affaires entre les mains. J'ai simplement ce rapport

16 court du tribunal militaire de Nis, et ces trois hommes ont été condamnés.

17 Vous aviez une note, si je ne m'abuse, si je me souviens bien, une note sur

18 votre photocopie, une note rédigée par quelqu'un ultérieurement au fait, et

19 ce qui figure sur cette note est tout à fait exact. Ce numéro 1 a d'abord

20 été accusé du crime, puis condamné à 9 ans d'emprisonnement. Quant à

21 l'autre individu, il a été condamné à sept ans, et je pense que le jugement

22 a été appliqué. Ces hommes ont été condamnés, mais le procureur est revenu

23 sur la qualification de crime de guerre contre la population civile. Quatre

24 autres individus ont été condamnés, deux officiers, comme vous l'avez dit,

25 vous avez reçu toutes ces notes de ces rapports du tribunal. Mais, je vois

Page 37643

1 que vous ne faites aucun commentaire à ce sujet, alors que vous avez reçu

2 la liste de ces affaires dans lesquelles deux officiers ont été condamnés;

3 l'un à sept ans, et l'autre à cinq ans, les autres auteurs ayant été

4 condamnés à quatre ans d'emprisonnement et trois ans d'emprisonnement. Vous

5 êtes au courant de tous ces faits. Vous avez tous ces chiffres.

6 Q. Général, tout ce que je souhaite c'est d'obtenir votre aide, si vous

7 pouvez me l'apporter, quant aux conditions l'enquête a été diligentée --

8 R. Oui.

9 Q. Je parle bien de l'enquête. J'en arrive à ce que je tiens à vous dire.

10 Nous allons ensuite nous pencher sur un autre exemple. Pouvez-vous me dire

11 qui est à l'origine de l'enquête ? Qui a découvert le crime ? Qui a décidé

12 qu'il fallait qu'une enquête ait eu lieu, et cetera. Pouvez vous me dire --

13 R. Vous devriez examiner la liste des affaires et trouver la réponse sur

14 cette liste.

15 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Général, Général, écoutez la

16 question. Ou vous ne pouvez pas y répondre ou vous ne voulez pas le faire.

17 Pouvez-vous nous dire comment a commencé cette enquête ? Qui l'a

18 diligentée ? Qui est à l'origine de cette enquête ? Soit vous le savez soit

19 vous ne le savez pas. Nous n'avons pas besoin d'un discours de votre part.

20 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vais vous dire, non, je ne vais pas faire

21 de discours, mais manifestement, vous n'écoutez pas ce que je dis. Tout ce

22 que je sais est écrit dans ce document. Je me répéterai : L'enquête est

23 menée par le tribunal, suite à une demande émanant du procureur. Ici vous

24 êtes en train de tout mélanger. Vous parlez de ceux qui ont découvert le

25 crime, de ceux qui ont mené l'enquête, mais les procédures ne peuvent

Page 37644

1 démarrer que sur demande du procureur. C'est le tribunal qui doit prendre

2 une mesure à cet égard. Qui a fait connaître le crime, je ne sais pas. Tout

3 ce que je sais c'est que le procureur a été informé et qu'il a lancé la

4 procédure. Selon nos lois, une procédure au pénal n'est lancée que sur

5 demande du procureur.

6 M. NICE : [interprétation]

7 Q. Voyez-vous, Général, le rapport récapitulatif semble indiquer que ceci

8 est un exemple tout à fait classique de massacre au cours d'une opération

9 de nettoyage ethnique, et c'est résumé de cette façon. Deux personnes qui

10 n'ont pas voulu quitter le village, et pour cette raison elles ont été

11 tuées, assassinées.

12 Je ne sais pas si vous êtes au courant, mais ceci est très comparable

13 à d'autres allégations qui sont formulées dans la présente affaire. Cela

14 nous aiderait si nous pouvions savoir qui a été à l'origine des procédures

15 judiciaires ou de l'enquête, car nous savons sur la base de la déposition

16 d'Aleksandar Vasiljevic que c'est lui qui a été à l'origine de l'enquête.

17 C'est la raison pour laquelle je souhaiterais votre aide. Pouvez-vous nous

18 montrer des documents originaux qui seraient la source de cette enquête,

19 qui serait à l'origine du démarrage de cette enquête ?

20 R. Sur la base du document que j'ai entre les mains, je vois que ces

21 personnes n'ont pas quitté le village, qu'elles ont été tuées, et c'est

22 tout ce qui a justifié le début des procédures engagées par le tribunal.

23 Ces éléments sont tout à fait contraires à ceux sur lesquels vous mettez

24 l'accent avec insistance. Je ne connais pas les détails. Je devrais

25 regarder la liste des affaires. Je ne peux vraiment pas vous donner de

Page 37645

1 détails quant aux documents. Ces hommes ont été condamnés pour leur

2 comportement.

3 Q. Avant de passer à ma question suivante --

4 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Avant de le faire, je pense que vous

5 avez dit, Général, que d'autres personnes ont été condamnées, d'autres

6 personnes que celles qui figurent dans le récapitulatif que nous avons ici.

7 Est-ce que les détails au sujet de ces autres condamnations se trouvent

8 quelque part dans l'intercalaire 18 ?

9 LE TÉMOIN : [interprétation] Non. Trois hommes sont concernés ici en

10 rapport avec cet événement précis.

11 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Ce sont les seules personnes dont vous

12 parlez.

13 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, quant aux autres cas, nous en avons parlé

14 précédemment. Mais j'ai dit en passant qu'il y avait quatre autres

15 personnes pour lesquelles le procureur avait été informé, mais qui ne sont

16 pas évoquées dans le document que j'ai entre les mains, quatre autres qui

17 ont donné lieu à constitution de dossier, et dont les noms figurent sur les

18 listes des affaires, mais elles ne sont pas évoquées dans cet intercalaire

19 parce que se sont des individus qui ont été condamnés plus tard, après la

20 période concernée par cet intercalaire et l'établissement de ce document.

21 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Vous avez dit, entre autres qu'une

22 partie de l'enquête l'a été pour crime de guerre; est-ce exact ? Ou ne vous

23 ai-je pas bien compris ?

24 LE TÉMOIN : [interprétation] De quoi parlons-nous maintenant ? Qu'est-ce

25 que vous voulez dire ? Quels crimes de guerre ?

Page 37646

1 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je pensais --

2 LE TÉMOIN : [interprétation] Nous parlons de cet événement-ci, de

3 l'événement figurant dans ce document, des trois hommes dont nous sommes en

4 train de parler, qui ont d'abord été accusés d'avoir tué plusieurs

5 personnes et l'acte d'accusation a été modifié et elles ont été accusées de

6 crime de guerre qui est une qualification moins importante que la première

7 qualification d'assassinat.

8 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Ceci figure à l'Article 47, assassinat

9 multiple; c'est bien cela ?

10 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. C'est la première qualification envisagée

11 par le tribunal, celle sur laquelle la procédure a commencé, mais elle

12 s'est achevée sur une qualification différente.

13 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] S'agissant de ces trois accusés la

14 condamnation prononcée l'a été pour crimes de guerre; c'est bien cela ?

15 Merci.

16 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, oui.

17 M. NICE : [interprétation] Monsieur le Président, pensez à l'amendement

18 manuscrit dont le témoin ne savait pas de quelle main la note avait été

19 consignée.

20 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Gojovic, dans votre réponse

21 précédente, vous avez dit que vous ne pouviez pas donner de détails à moins

22 d'avoir la liste des affaires sous les yeux. Pourriez-vous expliquer de

23 quel document vous parlez lorsque vous parlez "d'une liste des affaires" ?

24 LE TÉMOIN : [interprétation] En fait, je parle du dossier des différentes

25 affaires. Pas d'une liste des affaires mais des dossiers dans lesquels on

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1 trouve tous les éléments de preuve qui servent de base au jugement. Je

2 parlais des dossiers. Pas des listes des affaires, mais de dossiers au

3 pénal.

4 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

5 M. NICE : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges, je

6 n'aurais pas le temps d'entrer dans le détail. Dans les autres affaires, il

7 est question d'assassinats multiples qui pourraient correspondre à des

8 actes de nettoyage ethnique, mais nous ne savons pas dans quelles

9 conditions les procédures ont été engagées parce que nous n'avons pas les

10 documents à la source de ces accusations.

11 Q. Pourriez-vous, Général Gojovic, confirmer avant que je ne l'oublie et

12 je n'aurais peut-être pas le temps de vous présenter tous les documents

13 pertinents, bien que j'essaie d'être le plus efficace possible.

14 L'intercalaire 18 vous a été remis en janvier 2004, je pensais que cela

15 avait été fait à une autre date, mais j'ai vérifié et ce document a été

16 fourni sans doute par courrier à la fin de l'automne 2003, et il nous est

17 arrivé en 2004, mais il n'avait aucun rapport avec la déposition de ce

18 témoin la semaine dernière.

19 J'aimerais maintenant passer à autre chose. Le lieutenant-colonel Djorovic,

20 c'était l'un de vos juges, n'est-ce pas ?

21 R. Non, ce n'était pas un juge.

22 Q. Etait-ce le procureur ?

23 R. Oui, le procureur adjoint.

24 Q. Un homme d'expérience.

25 R. Il n'avait pas d'expérience dans les affaires de poursuites

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1 judiciaires.

2 Q. Bien --

3 R. Non.

4 Q. Nous savons --

5 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Robinson.

6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, Monsieur Milosevic.

7 L'ACCUSÉ : [interprétation] Au compte rendu d'audience en anglais, il est

8 écrit : "Je n'avais pas d'expérience de procureur dans ces affaires," comme

9 si c'était le témoin qui parlait de lui --

10 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, oui. Merci de cette correction.

11 L'ACCUSÉ : [interprétation] -- alors que la réponse ne concernait pas le

12 témoin.

13 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci de cette correction, Monsieur

14 Milosevic.

15 M. NICE : [interprétation]

16 Q. Vous avez expliqué que compte tenu du conflit au Kosovo les réservistes

17 ont été rappelés. Vous avez parlé de 125 réservistes, y compris de

18 personnes qui travaillaient dans diverses professions, mais le lieutenant-

19 colonel Djorovic n'était-il pas un de ces réservistes ?

20 R. Je dois rétablir les choses, et je vous prie de m'en excuser.

21 J'aimerais demander au Président de me permettre de le faire. Aucun juge ne

22 venait -- n'était recruté par une agence de l'emploi. Il y avait des

23 procureurs et des juges dans les tribunaux municipaux, les tribunaux

24 régionaux qui étaient très expérimentés sur le terrain, qui n'étaient pas

25 des recrues de l'agence pour l'emploi. Je ne sais pas à quelle manipulation

Page 37649

1 nous insistons ici. C'étaient des juges qui avaient été nommés à leur poste

2 et qui avaient beaucoup d'expériences dans les tribunaux municipaux et

3 régionaux. Je vous en prie, ne posez pas de questions de ce genre.

4 Q. Je ne fais que lire le compte rendu d'audience en anglais, Général

5 Gojovic, mais --

6 R. C'est ce que j'ai entendu par la bouche des interprètes. Je ne connais

7 pas l'anglais. C'est ce que j'ai entendu, qu'ils venaient de l'agence pour

8 l'emploi --

9 Q. Nous pouvons passer à autre chose.

10 R. -- cela n'est pas vrai, ce n'est pas exact.

11 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, c'est ce que nous avons

12 entendu.

13 LE TÉMOIN : [interprétation] La personne que vous invoquez était un

14 officier. C'était un homme d'expérience qui avait travaillé au bureau du

15 Procureur pendant une brève période et qui avait été remplacé parce qu'il

16 n'était plus dans les conditions de remplir ses fonctions correctement.

17 M. NICE : [interprétation]

18 Q. Il --

19 R. Alors ne le mettez pas en cause, je vous prie.

20 Q. Excusez-moi.

21 R. Je ne souhaite pas être en situation --

22 Q. Il a dit la vérité au sujet de ce qui s'est passé.

23 R. Je suis heureux de l'entendre.

24 Q. Ce qui s'est passé c'est la chose suivante : il est allé au Kosovo et

25 il était très enthousiasme par rapport à son travail, il souhaitait mettre

Page 37650

1 en accusation des gens qui sur lesquels des éléments de preuve et des

2 charges pesaient et, finalement, il a été renvoyé -- on lui a dit qu'il ne

3 devait pas remplir ses fonctions; c'est bien cela ?

4 R. Non, ce n'est pas cela. Il avait toute compétence pour lancer des actes

5 d'accusation. Mais ce qu'il souhaitait c'était -- ce qu'il a souhaité faire

6 s'est tué son adjoint parce qu'un jour ils se sont enivrés ensemble et ils

7 ont fait toute sorte de choses idiotes. C'est la raison pour laquelle il a

8 été démit de ses fonctions. C'est pourquoi j'ai dit que je ne voulais^ pas

9 qu'on me mette ici dans une situation difficile.

10 Q. C'est un affrontement personnel entre lui et son adjoint ou son

11 supérieur qui a été à la cause de tout cela, mais avant, il avait cherché à

12 porter plaintes et à lancer des actes d'accusation.

13 R. Son adjoint.

14 Q. Il avait cherché à lancer des actes d'accusation et on l'avait empêché

15 de le faire, n'est-ce pas ?

16 R. Non, ce n'est pas exact. Il avait pleine compétence pour lancer des

17 actes d'accusation. Personne ne pouvait l'empêcher de le faire, et personne

18 n'a essayé de l'empêcher de le faire. Il n'y avait personne qui pouvait

19 l'empêcher de le faire.

20 Q. Il a lancé une plainte contre vous -- ou vous avez porté plainte contre

21 des juges et d'autres personnes du tribunal militaire et du commandement

22 militaire de la région, il a porté plainte le 13 juin 2001, sur la base

23 d'allégations selon lesquelles il aurait été freiné dans son travail,

24 n'est-ce pas ?

25 R. Je vous en prie. Il n'a pas été freiné dans son travail, il a porté

Page 37651

1 plainte pour des raisons tout à fait différentes.

2 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Général, la question qu'on vous a

3 posée consistait à vous demander s'il avait porté plainte contre vous.

4 LE TÉMOIN : [interprétation] Porter plainte contre moi ? Je ne suis pas au

5 courant de cela, je ne suis pas au courant qu'il aurait porté une

6 quelconque plainte contre moi. Il n'avait aucune raison de le faire.

7 M. NICE : [interprétation]

8 Q. Est-ce qu'il a porté plainte contre des juges non identifiés du

9 tribunal militaire et du commandement militaire de la région de Pristina

10 ainsi que contre des membres de l'armée et des services de sécurité de la

11 police militaire. Est-ce qu'il a porté plainte contre des personnes de ce

12 genre ?

13 R. Je ne sais pas. Je ne sais pas s'il l'a fait ou pas, parce que ceci

14 c'était la compétence du procureur. Il aurait pu envoyer le procureur

15 suprême agir de la sorte. Mais qu'il les fait ou pas, je ne suis pas au

16 courant. Je n'ai pas été informé, j'étais chef du département juridique

17 d'un département au ministère. Je n'étais pas chef d'état-major.

18 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Nice --

19 LE TÉMOIN : [interprétation] Des charges criminelles ont été retenues

20 contre un certain nombre d'hommes en raison du conflit. Il est possible que

21 cela ait été fait, que ces procédures ont été engagées contre lui sur la

22 base d'une plainte du procureur, mais ceci n'avait rien à voir avec ce

23 travail.

24 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Nice, c'est l'heure de la

25 pause.

Page 37652

1 M. NICE : [interprétation] Monsieur le Président, oui.

2 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Pourquoi combien de temps en avez-

3 vous encore ?

4 M. NICE : [interprétation] J'espérais en terminer à la fin de cette partie

5 de la matinée. Ce qui m'aurait amené à utiliser 50 % du temps consacré à

6 l'interrogatoire principal, mais pour des raisons qui ne m'incombent pas,

7 uniquement à moi, les choses sont allées, un peu plus lentement que prévu.

8 Je vais faire un tri parmi les questions, pour ne garder que, les plus

9 importantes qui me restent. Je pourrais en terminer en une demi-heure.

10 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Ne nous battons pas pour cela. Cela

11 ne fera que 55 % du temps. Pause de 20 minutes.

12 --- L'audience est suspendue à 10 heures 33

13 --- L'audience est reprise à 11 heures 02.

14 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Nice, poursuivez.

15 M. NICE : [interprétation]

16 Q. Avant de revenir à l'historique de vos entretiens avec le général

17 Djorovic, je vais reprendre l'ordre chronologique à ce propos, mais,

18 d'abord, quelques corrections par rapport aux réponses que vous avez déjà

19 fournies. S'agissant de la MINUK, tout d'abord, son pouvoir légal ne

20 concernait que le territoire du Kosovo. La MINUK n'aurait jamais eu

21 compétence pour mener des enquêtes sur des allégations de crimes de

22 nettoyage ethnique, commis par des soldats serbes qui résidaient en Serbie,

23 n'est-ce pas ?

24 R. Je pense que non.

25 Q. Par conséquent, le fait de dire que la MINUK n'avait pas voulu

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1 collaborer s'il y avait une requête légitime formulée par la Serbie, en

2 passant par des filières officielles, afin d'avoir une entraide judiciaire,

3 s'agissant de l'enquête sur des crimes. C'est ridicule comme suggestion

4 parce que si, vous aviez, si quelqu'un avait formulé cette demande à la

5 MINUK. La MINUK aurait coopéré, n'est-ce pas ?

6 R. Je vous ai déjà répondu que les procureurs, à cet effet, ont constaté

7 qu'il n'y avait pas d'éléments qui permettraient d'enquêter sur un

8 nettoyage ethnique parce que celui n'a pas eu lieu.

9 Q. Si c'est là, votre réponse, parfait, je vais passer à autres choses.

10 J'ai obtenu des documents, mais je ne veux pas les présenter, perte de

11 temps à la présentation, à moins que ce ne soit vraiment nécessaire.

12 Admettez-vous qu'à partir de 2001, un tribunal de Nis, qui était saisi

13 d'une allégation de viol, en rapport avec une exaction commise au Kosovo

14 pendant le conflit, aurait pu obtenir la participation d'un témoin du

15 Kosovo, dans ce procès qui concernait une allégation de viol. Est-ce que

16 cela aurait été possible ?

17 R. De quel tribunal êtes-vous en train de parler maintenant ? Militaire ou

18 civil.

19 Q. En tout cas, il y a une allégation qui a d'abord été formulée devant un

20 tribunal militaire, d'abord, pour passer ensuite, à un tribunal civil,

21 mais, est-ce qu'il n'aurait pas été difficile d'obtenir la comparution d'un

22 témoin du Kosovo, à Nis, en 2001 ?

23 R. J'ai des renseignements, s'agissant du tribunal militaire. Il y a eu

24 une demande adressée à la MINUK. Il n'y a pas eu de réponses pour deux cas,

25 notamment.

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1 Q. Fort bien. Auquel cas, je vais vous remettre --

2 R. Justement, quand il s'agissait de viols, précisément de viols.

3 Q. Je vais vous montrer un document, étant la protection accordée à cette

4 victime du viol, ce document ne sera pas placé sous le rétroprojecteur mais

5 affirmez-vous que c'est là, un des noms, pour lesquels, on a demandé

6 l'assistance de la MINUK, et ceci, avait été rejeté. Si c'est nécessaire,

7 les Juges pourront obtenir un exemplaire. Mais, est-ce que vous acceptez

8 ceci ?

9 Est-ce que ce document concerne ce procès ou est-ce que c'est un cas

10 différent ou, d'après vous, la collaboration -- la coopération était

11 refusée ?

12 R. J'essaie d'identifier la personne concernée ici, partant des données

13 qui sont reprises dans les deux cas. Mais, je ne vois de coïncidence des

14 noms.

15 Q. Si je suggère --

16 R. Il se peut, je n'exclu pas la possibilité, mais je ne vois pas que le

17 nom coïncide dans ces déclarations et dans ce que j'ai --

18 Q. Monsieur l'Huissier, prenez le nom de la personne ici, accusé, montrez

19 ce document au témoin. Je ne veux pas ajouter au dossier déjà volumineux

20 cette pièce ?

21 Mais, est-ce que c'est le même nom ou c'est un nom différent.

22 R. Oui, c'est celui-là. Si c'est le même acte d'accusation, alors tout va

23 bien. C'est cela.

24 Q. Vous l'admettez, inutile d'importuner la Chambre par ces documents

25 mais, ici, en l'espèce, en ce qui concerne l'année 2001, il était possible

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1 d'avoir assistance, entraide pour ce qui est de la fourniture de témoins

2 venant du Kosovo à la Serbie ?

3 R. Oui, mais de fait, je ne pense pas. Je sais que des demandes ont été

4 envoyées et que, pendant très longtemps, il n'y a pas eu de réponses. Pour

5 ce qui est de ce qui s'est passé ultérieurement, je ne sais pas. Je n'ai

6 pas tout vérifié.

7 M. NICE : [interprétation] Je vais demander que ces documents me soient

8 restitués. La Chambre peut en disposer ainsi que l'accusé, le conseil

9 commis d'office, mais je ne veux pas ajouter ceci au dossier.

10 Q. Autres choses, avant de passer au sujet suivant. Est-il juste de dire

11 que, s'agissant d'infractions graves qu'on pourrait de crimes de guerre ou

12 de crimes graves à la suite du conflit, des condamnations ont été

13 prononcées pour Ivan Nikolic, Dragisa Petrovic et Mancic, dans ces trois

14 procès ?

15 R. C'est ce qui découlait des données dont je dispose.

16 Q. La personne la plus haute placée ou ayant le grade le plus élevé, qui

17 aurait été condamné, c'était un capitaine, n'est-ce pas ?

18 R. Capitaine de première classe et un commandant. Mancic était commandant.

19 Q. Pour de colonels, pas de généraux, personne n'a fait l'objet

20 d'enquêtes, encore moins, d'accusation ou de mise en accusation ?

21 R. Il n'y avait pas d'éléments de preuve, disant qu'ils auraient perpétré

22 un acte au pénal.

23 Q. S'agissant des noms que nous avons examinés pour les raisons déjà

24 avancées. Il nous est impossible de dire ce qui a déclenché ces enquêtes

25 ayant emporté condamnations, n'est-ce pas, puisque nous n'avons pas les

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1 documents pour en juger ?

2 R. Il y a eu des comportements contraires à la loi et il y a des plaintes

3 de déposer par des individus. Il faudrait que nous penchions sur les

4 dossiers pour pouvoir le constater.

5 Q. Vous avez produit beaucoup de documents, intercalaires 1 à 16, qui

6 tendaient à montrer qu'il y avait des instructions, des réglementations

7 exigeant de respecter les Règles de la guerre et le fonctionnement d'un bon

8 système judiciaire. Est-ce que vous connaissez ce qu'a dit un témoin, venu

9 déposer ici, le colonel -- Sir Peter de la Billière, qui s'est dit surpris

10 de voir autant de documents. Est-ce que vous connaissez la déposition de ce

11 témoin ?

12 R. Non.

13 Q. Il a dit qu'il était surpris de voir le nombre d'ordres où la nécessité

14 de les voir répéter à des intervalles aussi réguliers ?

15 R. De quels ordres parle-t-il ? Je n'ai parlé que de deux ordres et d'un

16 aide-mémoire qui n'était pas un ordre. Je n'ai parlé que de deux ordres

17 émanant de l'état-major du commandement Suprême et cela était largement

18 suffisant.

19 Q. C'est ce que ce témoin a dit. Vous savez qu'un ouvrage a été publié en

20 2001, intitulé : "L'application des règles de droit international en cas de

21 conflits armés." C'est devenu une pièce à conviction de ce procès. Vous

22 savez que ce livre a été publié, n'est-ce pas ?

23 R. Oui.

24 Q. Est-ce que cet ouvrage, il a été publié pour informer le TPY. Il disait

25 que la VJ était très disciplinée, se comportait très bien ?

Page 37657

1 R. Je ne sais pas ce que l'auteur de ce livre et sa maison d'édition avait

2 pour objectif, mis à part la volonté de présenter ce qui a été fait en

3 contrebas par les commandements inférieurs.

4 Q. Lorsque le général Pavkovic a été interrogé, beaucoup de documents très

5 complexes ont été remis. Par ceux-là, se trouvaient des documents qui

6 voulaient montrer le bon comportement de la VJ. Est-ce que vous avez

7 participez à l'élaboration de ces documents qui ont été remis au nom du

8 général Pavkovic.

9 R. Non.

10 Q. Ce que je vous laisse entendre, Général, c'est que, dès le début du

11 conflit, on savait qu'il était nécessaire de donner l'impression que tout

12 était en place pour mener une guerre de façon légale et pour sanctionner,

13 pour punir ceux qui commettaient des infractions. C'est en tout cas l'idée

14 que je vous soumets.

15 R. C'est ainsi que les gens ont procédé. Il s'agissait de se conformer au

16 droit de guerre internationale et de punir les contrevenants, c'est ce qui

17 a été fait. Là où les procureurs ont disposé de plaintes ou ont eu

18 connaissance de violations du droit de guerre internationale, ils ont

19 entrepris des poursuites en justice contre les auteurs présumés.

20 Q. Je complète cette hypothèse que je vous soumets avant de passer à

21 l'examen d'autres documents. Il y a eu très peu de condamnations, personne

22 ayant un grade élevé n'a été condamné. Mis à part un capitaine ou un

23 commandant, on n'a pas enquêté sur les comportements de généraux, ni des

24 allégations de nettoyage ethnique. Tout ceci montre que c'était une

25 mascarade de la part de l'armée, n'est-ce pas, et vous le savez ?

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1 R. Tout d'abord, il ne s'agit pas là d'une omission de la part de l'armée.

2 Vous essayez de me convaincre du fait de savoir quelque chose dont je n'ai

3 pas connaissance, qui n'a pas eu lieu. A savoir que si un général avait

4 donné un ordre de commettre des crimes de guerre, je l'aurais appris, mais

5 il n'y a pas eu de cela. Vous ne pensez tout de même pas que les généraux

6 ou les commandants des brigades allaient donner des ordres de cette

7 nature ? D'où vous vient l'idée d'affirmer une chose pareille ?

8 Q. Avant de passer à autre chose, je vous rappelle que la semaine dernière

9 lorsque nous avons examiné l'intercalaire 18, nous avons vu qu'on avait

10 mené une enquête sur inconnus, parce qu'on avait trouvé des corps à Izbica.

11 Vous nous avez expliqué comment il s'était fait qu'une unité, qui passait

12 par là, avait vu quelque chose, avait mené une enquête. Pourriez-vous nous

13 aider sur ceci ? Est-ce que les unités de la VJ ou d'autres unités, les

14 unités de la VJ, comment se trouvaient-elles à être les premières sur les

15 lieux ?

16 R. S'agissant des donnés présentées par le commandant de l'unité, je

17 dirais qu'il découle de ses dires que l'unité, en passant, avait constaté

18 la présence de tombes fraîches. Ils ont trouvé la chose suspecte et ils ont

19 informé le procureur qui a, lui, demandé à ce que des mesures soient prises

20 pour fins d'exhumer ces tombes. Ce qui a été fait. Maintenant, de là à

21 savoir si une unité avait séjournée sur les lieux auparavant, cela c'est un

22 renseignement dont je ne dispose pas.

23 Q. J'aimerais que vous examiniez un document dont nous disposons

24 maintenant, ce qui n'était pas le cas lorsque nous, nous avons présenté nos

25 éléments à charge pour le volet Kosovo. Il n'existe qu'en anglais, mais je

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1 voudrais vous citer un bref passage. Malheureusement, il n'existe qu'en

2 anglais ce document.

3 M. NICE : [interprétation] Nous n'avons pas préparé tout le rapport, mais

4 il est disponible si vous le souhaitez. Ce qui nous intéresse, c'est

5 uniquement une chose à ce stade de toute façon. Monsieur l'Huissier,

6 veuillez placer la première page sur le rétroprojecteur.

7 Q. Il s'agit d'un rapport d'activités 2002, 2004 qui vient du bureau

8 s'occupant des personnes portées disparues et des questions médico-légales

9 de la MINUK. On voit simplement le sommaire à la première page, mais à la

10 troisième page, je vais vous lire quelque chose. Ce rapport de la MINUK dit

11 ceci, paragraphe du milieu : "Jusqu'à présent, les restes humains récupérés

12 des fosses communes en Serbie, en Serbie même, sont reliés à des cas connus

13 de disparitions et chaque site correspond à un événement précis : ainsi,

14 les corps exhumés du site Batajnica 2 appartiennent à ceux qui ont été

15 portés disparus à Meja… et ceux qui ont été exhumés de Petrovo Selo

16 appartiennent à des victimes du massacre d'Izbica."

17 C'est le seul document que nous avons qui ait été versé au dossier pour

18 étayer notre thèse jusqu'à présent. Pourriez-vous nous expliquer comment il

19 se fait s'il y avait présence de la VJ, si votre organisation menait de

20 bonnes enquêtes sur ce site d'Izbica, comment il se fait que des corps

21 aient été transférés à Petrovo Selo en Serbie pour essayer de les

22 dissimuler ?

23 R. C'est une question à poser à ceux qui ont fait cela. A ceux qui ont

24 dissimulé tout cela. Je ne peux pas moi vous apporter des réponses si tant

25 est que ces renseignements-là sont exacts. Là, j'en doute.

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1 Q. Mais si une enquête médico-légale est menée en bonne et due forme suite

2 à un crime massif, si on maintient bien les lieux de crimes comment voulez-

3 vous que certains de ces corps soient enlevés et soient enterrés ailleurs ?

4 R. L'exhumation aurait été faite, d'après les renseignements dont je

5 dispose, fin mai, début juin. On a découvert la chose le 29 mai, le temps

6 de s'organiser cela a commencé le 1er juin. L'agression avait encore cours.

7 On a entrepris ce qu'on pouvait entreprendre. La procédure à suivre

8 relevait de la compétence du procureur.

9 Q. -- et quand même sous votre surveillance, vous étiez de garde. Comment

10 se pourrait-il que des cadavres examinés en bonne et due forme par des

11 médecins légistes avec un juge d'instruction, comment ces corps, grand

12 dieu, peuvent-ils avoir été enlevés et enterrés ailleurs; dites-le nous ?

13 R. Mais après enterrement et après les mesures qui ont été prises, ce

14 qu'on a constaté a été consigné, 144 tombes, 101 exhumations d'effectuées,

15 et avec cette partie de la tâche les instances ont terminé leur travail. Ce

16 qui s'est passé par la suite, est-ce qu'il s'est passé quelque chose, cela

17 ce sont des choses que je ne peux pas vous répondre, je n'ai pas de

18 connaissances, je n'ai pas d'informations à ce sujet-là.

19 Q. Oui, mais vous faisiez partie de ce comité qui était présidé par Terzic

20 et ce comité a été saisi de demandes formulées par le bureau du procureur

21 pour obtenir des documents, donc de la VJ, par ce conseil chargé de la

22 coopération. Dites-nous quels sont les documents qui existent et qui

23 parlent du transfert de corps de Kosovo à Batajnica, parce que ceci n'a pas

24 été contesté, ces corps ont bien été transférés du Kosovo à Batajnica et à

25 Petrovo Selo. Quels sont les documents existants ?

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1 R. Les documents relatifs au fait de savoir s'ils ont été transférés ou

2 pas, nous n'en avons pas disposé. La commission de l'état-major et les

3 archives de l'état-major ne dispose pas de données de ce genre. Ceux qui

4 ont dissimulé ces cadavres, c'est à eux qu'il faut poser la question. Ceux

5 qui les ont découverts savent où et comment ils en sont venus là.

6 Q. Dites-le nous. Dites-le nous, qui est-ce qui a dissimulé puisque vous

7 étiez au centre même de la vie de la VJ pendant très longtemps ? Qui a

8 transféré, qui a déplacé ces corps ?

9 R. Ecoutez, je vous en prie, vous voulez laisser entendre au travers de

10 mon témoignage à moi que cela devait forcément être quelqu'un de l'armée de

11 la Yougoslavie, je dirais que ce n'est personne de l'armée de la

12 Yougoslavie qui l'a fait, et il n'y a pas de renseignements chez nous. Si

13 l'on en avait eu, notre commission et les procureurs militaires se seraient

14 procurés ces renseignements. S'il y a eu transfert, cela s'est fait à

15 l'extérieur du système de l'armée de la Yougoslavie. Ces transferts se sont

16 faits sans aucune --

17 Q. Passons à autre chose, je n'ai pas beaucoup de temps. Vous avez engagé

18 des poursuites qui ont entraîné environ six condamnations pas plus, mais

19 voyons ce à quoi vous étiez prêt à consacrer votre énergie.

20 Nous avons un document dans les deux langues, c'est un document qui a été

21 publié par Natasa Kandic, elle est le chef d'une organisation non

22 gouvernementale à Belgrade. Il a été publié le 12 et le 13 août 2000. Vous

23 pouvez le parcourir rapidement et de façon un peu plus approfondie plus

24 tard, elle formule des accusations très graves quant au comportement de

25 l'armée, de l'armée de la République fédérale de Yougoslavie dans le cadre

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1 du conflit, n'est-ce pas ? Ou des conflits, en général

2 R. Elle cite tout un tas de choses d'ailleurs ici.

3 Q. Dites-nous, en 2000 qui avait-il qui soit à ce point grave que vous

4 ayez ressenti le besoin de la mettre en accusation au pénal pour avoir

5 critiqué l'armée alors que votre groupe ne pouvait pas mener d'enquête sur

6 le nettoyage ethnique. Qu'est-ce qu'il y avait de si grave dans cet article

7 qui vous a poussé à poursuivre Natasa Kandic ?

8 R. Moi, je ne l'ai pas poursuivie en justice. Pourquoi l'aurais-je

9 poursuivie en justice pénale ? C'est peut-être le procureur qui l'a fait,

10 mais pas moi.

11 Q. Voyons rapidement la séquence des événements. Nous allons examiner le

12 document suivant, qui est la réponse de l'armée. C'est vrai, n'est-ce pas,

13 il y a une réponse de la part de l'armée ?

14 R. Je n'en ai pas connaissance. A l'époque, j'étais en vacances lorsque ce

15 dont parle Natasa a eu lieu.

16 Q. C'est ce que vous dites. Regardez quand même le document. Apparemment,

17 ce sont des accusations tout à fait prématurées de la part de cette dame,

18 elle a eu le courage de répondre le 21 août, et nous pourrons voir sa

19 réponse rapidement, mais je vous demande d'examiner ce qui est dit le 21

20 août.

21 M. NICE : [interprétation] Monsieur l'Huissier, vous allez bientôt recevoir

22 ces documents. Les voici. Nous allons passer quelques minutes à l'examen de

23 celui-ci.

24 Q. Natasa Kandic, directeur de ce centre de droit humanitaire, le 21 août,

25 dit ceci notamment. Elle parle de la réponse de l'armée yougoslave qui

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1 tient des procès secrets. Elle dit qu'elle ne gardera pas le silence face à

2 l'horreur des généraux qui ont envoyé de jeunes appelés à être les témoins

3 de ces choses au Kosovo. A la fin de la page, elle dit qu'elle a vu des

4 villages albanais encerclés par des chars, et qu'elle a vu des pilonnages,

5 et des habitants quitter par milliers leurs villages.

6 C'est une Serbe, ici, de Belgrade qui a l'audace de faire face à l'armée et

7 de la contester; c'est bien vrai, Général ?

8 R. S'agissant de Natasa Kandic et de ses arguments à elle, j'ai une

9 opinion tout à fait autre. Tout d'abord, Natasa Kandic n'a rien derrière

10 elle pour ce qui est des institutions à caractère scientifique pour

11 déterminer s'il y a des arguments juridiquement valables. Ses observations

12 communiquées aux médias ou ses déplacements vers les lieux sont des choses

13 qui la font tout voir et tout entendre. C'est sa façon d'observer les

14 choses. Maintenant, est-ce que cela a quelque --

15 Q. Attendez un instant.

16 Voyez ce qu'elle dit au bas de la page publiquement, et elle comprend

17 qu'elle là face à la totalité de l'armée yougoslave. Voici ce qu'elle dit :

18 "J'ai parlé à des gens qui étaient à Izbica le 26 mars." Elle relate ceux-

19 ci.

20 Passez à la page suivante, trois lignes plus loin. Elle a parlé à quelqu'un

21 dont le fils a été abattu, elle parle de 10 000 civils qui sont obligés de

22 quitter un champ à cause du pilonnage. Elle parle de ceux auxquels elle a

23 parlé, c'est un fait. "… c'est une vérité cruelle pour ce qui est de

24 Vucitrn et d'autres endroits." Elle dit : "Je suis ici et je plaide

25 coupable parce que je n'ai rien fait pour empêcher la commission de ces

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1 crimes. Vous m'avez critiquer de ne pas avoir félicité l'armée yougoslave…"

2 Quant on parle de Natasa Kandic, on dit que l'armée va la poursuivre. Même

3 si vous étiez en congé, vous devez avoir eu connaissance du document

4 puisque vous l'avez signé.

5 Le document va bientôt vous parvenir, mais diriez-vous que la Serbie-et-

6 Monténégro sont des pays où régnait la liberté de parole ?

7 R. Oui.

8 Q. Fort bien. Voici une décision que vous avez signé le 26 septembre 2000.

9 Je vais demander à l'Huissier de passer le document sur le rétroprojecteur.

10 R. Oui, tout à fait.

11 Q. "Une enquête disciplinaire a été diligentée à l'encontre Djorovic

12 Lakic, lieutenant-colonel au ministère de la Défense…"

13 Paragraphe suivant : "Etant donné les soupçons légitimes selon lesquels en

14 tant que lieutenant-colonel servant dans l'administration du ministère

15 fédéral de la Défense le 1er septembre 2000 lorsque le colonel Mihajlovic

16 remplaçait le chef du service juridique de l'administration, en son absence

17 en tant que supérieur dans le service, il lui a donné l'ordre, à partir des

18 pièces fournies par l'état-major général de l'armée yougoslave, de

19 poursuivre au pénal Natasa Kandic, directeur du fonds du droit humanitaire

20 de Belgrade, pour des actes criminels correspondant et des violations

21 découlant de l'interview qu'elle a publiée dans le journal Danas les 12 et

22 13 août 2000. Il n'a pas exécuté les ordres, alors qu'il avait le devoir de

23 le faire. Au contraire, il a dressé un procès-verbal dans lequel il a dit

24 notamment ceci : la majorité des avis Natasa semblent tout à fait

25 justifiés, et je suis tout à fait d'accord avec elle, c'est-à-dire que je

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1 partage l'avis qu'elle présente…"

2 Je m'arrête là, cet homme se trouvait au Kosovo et il faisait partie de

3 votre groupe et il marque son accord avec l'avis donné par Natasa Kandic.

4 Vous dites qu'on avait la liberté de parole en Serbie-et-Monténégro ?

5 R. Ecoutez, je vous en prie, il ne s'agit pas de liberté de parole. Il

6 s'agit de présentation d'informations erronées, Natasa Kandic a fait cela

7 sans présenter d'arguments. L'état-major lui a demandé de présenter des

8 arguments, non pas des ouï-dire et des récits. Quand vous mentionnez ce

9 lieutenant-colonel, lui, il a reçu un ordre de réaliser un projet, à

10 savoir, de traiter techniquement, à savoir, d'élaborer un projet de

11 plaintes à l'intention du procureur pour infractions et leurs officiers

12 supérieurs étaient chargés de la suite de la procédure. De là, à savoir, si

13 cela allait donner à un acte d'accusation, c'est tout à fait autre chose.

14 Djorovic n'a pas eu pour mission de juger si, oui ou non, il devait faire

15 un signe ou pas, et en sa qualité de subordonné, il devait un réaliser un

16 ordre, exécuter un ordre. Tout ordre doit être exécuté. C'est sur ce fait

17 que se fonde toute armée. Maintenant, placez ceci dans le contexte que vous

18 citez est tout à fait injustifié devant ce tribunal.

19 Q. Vous comprenez pourquoi je pose la question, mais je voulais d'abord

20 que c'est bien votre signature que vous avez ici au bas du document, en vue

21 de cet homme ?

22 R. C'est exact. Je ne conteste pas du tout.

23 Q. Voici quel est le contexte. Vous et vos collaborateurs, vous auriez

24 tout fait pour faire taire des gens comme le lieutenant-colonel Djorovic ou

25 Natasa Kandic qui étaient prêts à dire la vérité ou à mener des enquêtes

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1 sur des individus à l'école pour défendre l'armée. C'est bien ce que vous

2 faites aujourd'hui, ici même, n'est-ce pas ?

3 R. Djorovic, alors qu'il était procureur, avait pour mission d'entamer des

4 procédures, mais c'est quand il fait l'objet d'une procédure, lui-même, en

5 raison d'un comportement et d'agissements qui ne sont pas dignes d'un

6 officier et encore moins digne d'un procureur. Le voilà, maintenant, qu'il

7 essaie de trouver et de rechercher de l'aide auprès de Natasa Kandic. C'est

8 comme si, quand on a une maladie grave, si on allait voir un sorcier pour

9 se faire soigner.

10 Q. Voyons un autre document, la date concernait le 2 novembre 2001.

11 Gojovic, vous, Général Gojovic, vous faites l'objet d'une plainte. Je n'ai

12 pas le temps de parcourir la totalité du document et ici, le grief, c'est

13 que vous avez forcé tout le monde qui faisait partie de votre département,

14 de vos services à aller voter pour l'accusé. Il a eu le courage de formuler

15 cette plainte contre vous, n'est-ce pas ?

16 R. Il a présenté des plaintes au pénal contre bon nombre de personnes et

17 tout cela a été rejeté. Mais, en sa qualité de militaire qui a subi un

18 préjudice, pourquoi n'a-t-il pas entrepris les mesures qu'il fallait. Il

19 avait la possibilité de le faire --

20 Q. Finalement --

21 R. [aucune interprétation]

22 Q. Un dernier document, finalement, la date est celle du 13 juin 2001. Le

23 document est long et nous ne pouvons pas le parcourir dans sa totalité,

24 mais vous le connaissez sans doute. J'y ai déjà fait référence ce matin et

25 je voulais le replacer dans l'ordre chronologique. Plaintes contre un juge

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1 dont l'identité n'est pas précisée, juge du tribunal militaire parce que le

2 dossier dont il était responsable n'a pas bien été traité, ce genre de

3 choses. Vous vous souvenez de cette plainte ?

4 R. Je ne sais pas, mais c'est son comportement qui lui a fait bénéficier

5 des annotations dont il a fait l'objet. Il a des remarques à formuler au

6 sujet de tout à chacun et quand il est en position, quand il a les

7 compétences de faire quoique ce soit, il ne le fait pas. Pourquoi il n'a

8 pas nommé les juges en question, puisqu'il les connaissait tous. Il est en

9 train de se jouer du public et il se réfère à Natasa Kandic qui n'attendait

10 que cela.

11 Q. Mais, il n'avait pas peur de donner votre nom. Il a eu le courage, il

12 fallait de la bravoure dans votre Etat, n'est-ce pas, pour vous s'opposer à

13 l'armée ?

14 R. Pourquoi, il n'a pas pris les poursuites au pénal alors que le

15 procureur a rejeté cette plainte. Il avait le droit de prendre sur soi la

16 responsabilité d'entamer une procédure au pénal contre moi. Il avait le

17 droit et la possibilité de le faire. Il ne l'a pas fait. Mais, devant un

18 tribunal, il faut présenter des éléments de preuve. Or, c'est la raison

19 pour laquelle, il n'a pas osé le faire. Mais, il a fait des écritures et

20 cela vous parle et vous illustre le droit à appliquer. Il pouvait le

21 présenter, une plainte au pénal, se présenter les choses en public, mais il

22 n'a pas fait ce qu'il fallait, quand il fallait entamer une procédure en

23 bonne et due forme.

24 Q. Je veux que vous vous attachiez aux choses importantes, en ce qui

25 concerne le comportement et la conduite de Djorovic. Ceux qui dirigeants le

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1 système judiciaire militaire étaient pour beaucoup d'entre eux, des

2 réservistes. Beaucoup n'avaient pas l'expérience que cet homme avait. Je

3 vous laisse entendre qu'il aurait fallu beaucoup de courages, de leur part,

4 pour essayer de faire passer l'idée selon laquelle les personnes coupables

5 de comportements répréhensibles devraient être condamnées et c'est pour

6 cela qu'on n'a pas beaucoup de documents aux intercalaires 17 et 18, n'est-

7 ce pas ?

8 R. Je ne suis pas d'accord. C'est une appréciation de votre part qui est

9 tout à fait erronée.

10 Q. Une dernière chose, voyons si vous étiez prêt à poursuivre, vous, les

11 autorités. Est-ce que vous vous souvenez de Miroslav Filipovic, un

12 journaliste ?

13 R. Je ne sais pas de qui il s'agit. Il y a eu quelque chose dans les

14 médias mais, je n'ai pas suivi. S'agissant de journaliste, cela ne m'a

15 jamais intéressé.

16 Q. C'est un journaliste qui a été poursuivi pour avoir dit des choses qui

17 ne plaisaient pas à l'armée ?

18 R. Je ne sais pas si cela plaisait ou ne plaisait à l'armée. Ce n'est pas

19 une question qui concerne. Cela concerne le ministère public. Or, l'armée

20 ne fait pas partie d'un ministère public.

21 Q. Maintenant, chose technique, j'aimerais terminer.

22 M. NICE : [interprétation] J'ai un élément, je ne sais pas si cela va

23 devenir une pièce à conviction mais je voulais vous parler des tentatives

24 que nous avons entreprises pour que vous obteniez ces documents, pour que

25 vous ayez une idée et que vous sachiez mieux si ces documents que vous avez

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1 reçus étaient complets. Je posais une question à propos de la première des

2 documents.

3 Malheureusement, ceci n'a pas été traduit en B/C/S, en Serbe, mais ce n'est

4 qu'un support visuel, un aide-mémoire, en quelque sorte pour le moment.

5 Q. Général Gojovic, je l'ai déjà laissé entendre. Vous avez été saisi de

6 requêtes afin que soient fournis des documents et j'espère que vous pourrez

7 confirmer, en mai 2001, déjà, une requête vous avait été transmise pour

8 obtenir des documents, en rapport avec des enquêtes ou poursuites

9 diligentées devant les tribunaux, qu'il soit militaire ou civil. Vous vous

10 souvenez de cette requête ?

11 R. Oui. Je m'en souviens.

12 Q. En novembre 2001, on a demandé des documents à propos de Racak. Vous

13 vous souvenez de cette demande-là ?

14 R. Cette demande n'a pas été adressée à nous-mêmes. Cela a été adressé aux

15 instances compétentes.

16 Q. Est-ce que vous vous souvenez qu'en juillet 2002, à peine huit dossiers

17 ont été fournis ? En juillet 2002, huit dossiers, à peine, ont été fournis.

18 Quand je parle de dossiers, il se pouvait qu'il n'y ait, qu'une page ou

19 deux, un feuillet ou deux, dans chacun des ces dossiers et il y avait aussi

20 certaines archives concernant Racak. Vous souvenez-vous que ces documents,

21 ont été fournis à l'époque ?

22 R. Je vais vous répondre, lorsque vous avez demandé la liste de toutes les

23 procédures, au pénal. Je ne sais pas si c'était vous ou Mme Carla Del

24 Ponte, qui l'avait fait. Vous avez demandé une assistance technique mais

25 les tribunaux n'avaient pas les moyens techniques de procéder à la

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1 fabrication de copies de tous les dossiers pour pouvoir vous communiquer la

2 totalité des copies de ces dossiers. On nous a demandé une assistance

3 publique pour traiter ces dossiers. L'assistance technique ne nous est pas

4 parvenue et c'est la raison pour laquelle ces copies de dossiers ne vous

5 ont pas été communiquées. C'est la seule raison de ce qui s'est produit.

6 Q. Ces efforts se sont poursuivis de notre part en août 2002, nous avons

7 demandé des documents, s'agissant de sévices sexuels commis par les membres

8 de la VJ. Vous vous en souvenez ?

9 R. Ces renseignements vous ont été communiqués, ceux qui étaient

10 disponibles et qui sont repris par la liste vous ont été communiqués.

11 Q. En octobre 2002, on a demandé votre aide en ce qui concerne des

12 documents de tribunaux, ce qui concerne Mancic, Radivojevic et Seregi,

13 ainsi que Tesic, vous en souvenez ?

14 R. Il n'y avait pas eu de jugement de rendu pour ce qui est de Mancic. Le

15 jugement à Mancic a été rendu bien plus tard. Cela a été dû à une

16 impossibilité technique. Nous avons demandé une assistance technique, on

17 n'a pas reçu mais c'est tout.

18 Q. C'est un problème technique. Puis, le 4 décembre, Mme Tromp et M.

19 Treanor vous ont rencontré et vous avez, notamment, expliqué que

20 l'intercalaire 18, présenté autrement, existait bien et que, si nous

21 voulions, nous devions en faire la demande; vous vous en souvenez ?

22 R. Je me souviens de cette conversation, mais je n'ai pas très bien

23 compris de quel intercalaire vous avez parlé. Je me souviens d'une réunion

24 il a été question de cela et il a une fois de plus été question d'une

25 assistance technique. On nous a promis une assistance technique, elle ne

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1 nous est jamais parvenue. Pour des raisons techniques, les tribunaux n'ont

2 pas pu procéder à la fabrication de copies pour compléter les dossiers et

3 cela, autrement, aurait été fait avec grand plaisir.

4 Q. J'ai dit "novembre", je voulais dire "décembre". En 2003, rapidement,

5 le 14 avril, des questions vous ont été posées pour savoir si c'est tout ce

6 qu'il y avait s'agissant de dossiers de tribunaux militaires. Vous avez

7 envoyé votre réponse, le 11 septembre. Ce sont des documents que nous

8 trouvons au point 1 de l'intercalaire 18, et d'autres documents ont été

9 envoyés, mais ce n'était pas très nombreux pour ce qui est des autres

10 dossiers; vous vous en souvenez ?

11 R. Le 11 septembre, je ne faisais plus partie de cette commission. Cette

12 commission a été dissoute et il y a eu des problèmes pour ce qui est des

13 requêtes en provenance de ce Tribunal-ci. Cette commission n'a plus rien

14 faire à compter du mois d'avril.

15 Q. Elle a été dissoute, mais cela a été sur décision du ministre Tadic,

16 c'est cela ?

17 R. Oui.

18 Q. Au motif que le comportement de cette commission était incorrect et en

19 fait était de nature à poser des obstacles à la collaboration avec le TPY ?

20 R. L'essentiel c'était d'écher tous éléments de preuve d'être communiqués

21 au président Milosevic pour sa Défense et non pas pour entraver les

22 activités du bureau du Procureur. Au contraire les activités du bureau du

23 Procureur ont été facilitées par tout ce qu'ils ont fait et il s'agissait

24 d'empêcher tous les éléments à décharges d'être communiqués à l'accusé. Je

25 crois que c'est la seule raison qui a motivé M. Tadic.

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1 Q. Soyons bien clair sur une chose. Le bureau du Procureur a fait

2 l'impossible pour obtenir les documents originaux, les dossiers, la

3 documentation et ce qu'on a reçu c'est soit ce que vous voyez ici, quelques

4 autres dossiers assez rares et sinon, c'était la réponse impossible pour

5 des raisons techniques; c'est bien cela ?

6 R. S'agissant de documents originaires ou originaux, vous savez qu'on ne

7 donne jamais les originaux dans les archives. On ne peut fournir que des

8 copies et s'agissant de ces copies --

9 Q. D'accord, des copies d'originaux, nous avons fait l'impossible pour

10 obtenir les copies des dossiers de poursuites et tout ce que nous avons

11 reçu c'est ce que vous trouvez aux intercalaires 17 et 18 et quelques rares

12 autres documents que j'ai soumis au Juge. C'est tout ce que nous avons

13 réussi à obtenir de votre part, n'est-ce pas ?

14 R. Mais pourquoi n'avez-vous pas apporté ces assistances techniques pour

15 obtenir tout le reste de ce que vous avez demandé ? Vous n'avez pas déployé

16 tous les efforts que vous dites, efforts que vous pouviez déployer sur le

17 plan technique d'ailleurs.

18 Q. A propos, quel a été le motif officiel avancé par le ministre Tadic

19 pour décider de mettre fin aux activités de votre commission ?

20 R. Il n'a avancé aucune raison officielle, il n'y a eu que ce comportement

21 assez typique, dans les journaux il y a eu plusieurs articles qui ont été

22 publiés disant qu'une commission mystérieuse alors que celle-ci avait été

23 entérinée officiellement, avait été en train de préparer des éléments de

24 preuve au profit du président Milosevic et c'est ensuite Tadic a supprimé -

25 - enfin a aboli cette commission sans apporter ses explications uniquement.

Page 37673

1 Q. Il y a un commandement conjoint n'est-ce pas ?

2 R. Vous voulez que je réponde ?

3 Q. Oui. Volontiers.

4 R. Cette notion je l'ai rencontrée dans un document portant sur les

5 travaux de cette commission. Il est arrivé un papier sur une page, une page

6 et demi ou deux, où on a dit au commandement Suprême le numéro

7 d'inscription était --

8 Q. Un instant nous pourrions examiner ce document, mais il faudra un

9 certain temps pour le faire. Je vous demande simplement une confirmation.

10 Pendant toute la durée du conflit au Kosovo de mars à juin 1999, il

11 existait une instance qui administrait les choses pour la Serbie-et-

12 Monténégro. C'était le commandement conjoint pourquoi ? Parce qu'on y

13 comptait des représentants, des autorités civiles, Sainovic, et des

14 autorités militaires, n'est-ce pas ?

15 R. Je ne savais rien, je ne faisais pas parti de ce système de

16 commandement, j'ai trouvé un document ultérieurement dans les archives de

17 la commission et nous étions très surprit parce que c'était un projet

18 d'ordre sans signature sans cachet et c'est le seul renseignement que j'ai

19 pu me procurer pour apprendre qu'il y avait un organisme correspondant ou

20 répondant à cette appellation, mais c'est tout ce que j'ai eu.

21 Q. Un instant. Mais vous aviez la responsabilité du système judiciaire

22 militaire. Dites-nous : comment ce conflit a-t-il été géré ou allons nous

23 trouver des archives en ce qui concerne cette administration du conflit,

24 parce que jusqu'à présent nos efforts sont restés vains, comment est-ce que

25 ce conflit a été dirigé ?

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1 R. De quel conflit parlez-vous ?

2 Q. La réponse à l'OTAN, comment est-ce que cela a été dirigé, qui a pris

3 les décisions, qui a déployé les effectifs, qui a pris des décisions

4 concernant les civils ? Cela a été un commandement conjoint, n'est-ce pas ?

5 Forcément vous devez le savoir, Général.

6 R. Mais non. Vous confondez tous ces tas de choses, tous les ordres

7 provenaient de l'état-major du commandement Suprême et c'est le système de

8 commandement à la chaîne de commandement qui fonctionnait. A un

9 commandement conjoint si tant qu'il en existait un, était un organe de

10 coordination avec les activités de la protection civile du ministère de

11 l'Intérieur, il fallait bien que quelqu'un coordonne tout cela. Enfin,

12 leurs activités mutuelles, leur coopération, et interventions, mais l'armée

13 elle, fonctionnait suivant le principe de subordination du commandement

14 Suprême jusqu'à l'unité en bas. S'il y a eu coordination ? Oui, il y a eu

15 coordination, mais cela n'a rien de nouveau il est certain que les organes

16 civils doivent coordonner, il faut bien qu'on vive, il faut bien qu'on

17 approvisionne ces unités. Il faut que ces gens reçoivent tout ce dont ils

18 ont de besoin. Il faut bien que quelqu'un voie à ces occupations.

19 Maintenant, si c'est ce qui prête à confusion cette appellation de

20 "commandement conjoint", cela est une autre question.

21 Q. Je n'ai pas beaucoup de temps mais, dites-nous ceci : nous avons

22 entendu beaucoup de témoins qui ont parlé du déploiement de l'unité de la

23 régit qui ont escorté les Albanais du Kosovo pour que ceux-ci quittent leur

24 pays vers la Macédoine, l'Albanie. Vous, vous avez parcouru, examiné toutes

25 les demandes présentées par le bureau du Procureur pour obtenir des

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1 documents pendant que vous étiez à la commission. Où allons nous trouver

2 ces documents qui expliqueraient le déploiement des forces qui

3 expliqueraient la mission confiée à ces soldats ? Parce que nous, nous

4 voulons le savoir.

5 R. Toute opération de l'armée, tout déplacement doit être précédé d'un

6 ordre d'un supérieur hiérarchique, ces ordres existent. Vous allez tout de

7 même pas me dire que les ordres ne pouvaient pas répartir les unités d'un

8 pays sur un territoire qu'il est le nôtre suite à une attaque de l'OTAN

9 avec appui -- à l'artillerie de la part des forces terroristes sur le

10 terrain. C'est un cas unique dans l'histoire de guerre de tout le temps.

11 Q. Vous n'avez aucune difficulté à fournir 8 000 pages de documents

12 concernant les infractions commises par l'UCK, là vous n'avez pas eu la

13 moindre difficulté ? Ce faisait 8 000 pages à peu près.

14 R. Cela a été fait par le ministère de l'Intérieur. Le ministère de

15 l'Intérieur est une institution tout à fait distincte.

16 Q. Je vois. Plus efficace que la vôtre ?

17 R. Il se peut qu'il soit plus efficace pour ce qui est de la coopération

18 et avec vos requêtes, ils avaient les possibilités techniques qu'il

19 fallait, et ils devaient probablement bénéficier d'un certain soutien. Nous

20 n'avons pas bénéficié de ce soutien.

21 Q. Si vous ne reconnaissez pas l'existence de ce qu'on appelait le

22 commandement, que vous connaissiez bien le conseil Suprême de la défense

23 qui avait coutume de se réunir, n'est-ce pas ?

24 R. Cela est une institution prévue par la constitution.

25 Q. Quelles devaient être les fonctions de ce conseil après le 26 mars

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1 1999. En effet, nous n'avons reçu aucun document indiquant quelles étaient

2 ses fonctions. Pourriez-vous nous aider là-dessus ?

3 R. Je n'avais pas, moi, une vue d'ensemble sur ce que faisait le conseil

4 Suprême de la Défense. Leurs ordres et leurs décisions ne m'étaient pas

5 communiqués à moi.

6 Q. Je vous remercie.

7 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci, Monsieur Nice.

8 Monsieur Milosevic, avez-vous des questions supplémentaires ?

9 L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui.

10 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Est-ce que vous voulez demander le

11 versement des pièces ?

12 M. NICE : [interprétation] Oui. Cette série de documents que j'ai

13 présentée, je voudrais la verser au dossier. Tous à part le dernier

14 document ont été reconnus quant à leur teneur par le témoin. Le dernier

15 document, c'était la plainte déposée par Djorovic lorsqu'il était procureur

16 vers le mois de mai 1999. Le document n'avait pas été reconnu en tant que

17 tel par le témoin, mais je ne pense pas qu'il ait nié le fait que Djorovic

18 ait déposé cette plainte. Je demande le versement de ce dernier document

19 aussi.

20 [La Chambre de première instance se concerte]

21 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Nice, pour ce qui est du

22 traitement à réserver aux documents, c'est devenu une question qui nous a

23 beaucoup préoccupé. Personnellement, je pense que dans le contexte que vous

24 venez d'esquisser d'être prudent, très prudent, il ne suffit pas d'être

25 invité à verser ces documents en tant que documents de façon générale; il

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1 faut donner quand même une explication quant à la valeur en tant

2 qu'éléments de preuve que vous accordez à chacun de ces documents, parce

3 que je pense que les réponses fournies par le général ont été diverses par

4 rapport à chacun.

5 Est-ce que nous pourrions les parcourir un à un ?

6 M. NICE : [interprétation] Oui. Excusez-moi, j'étais peut-être un peu

7 brusque. C'est parce que je suis pressé par le temps.

8 D'après mes documents, c'est la publication des 12 et 13 août 2000.

9 Evidemment, j'ai posé des questions --

10 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Attendez, que je le retrouve

11 rapidement.

12 M. NICE : [interprétation] Le document des 12 et 13 août 2000. C'est une

13 interview.

14 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je vois. Quelle est la valeur probante

15 de ce document ?

16 M. NICE : [interprétation] La voici. En réalité, le comportement du général

17 et des autorités qu'il représentait c'était qu'un article de ce genre

18 allait entraîner des poursuites ou des tentatives de poursuite alors qu'on

19 n'a pas essayé de poursuivre face aux crimes graves qui étaient reportés

20 dans la presse de façon publique. C'est la substance de toute cette série

21 de pièces.

22 Si vous gardez ceci à l'esprit, vous avez une séquence d'événements, vous

23 avez la réponse de l'armée, c'est le document suivant, c'est le document

24 qui a pour titre "Mme Kandic lance des accusations infondées et

25 prématurées." Puis, vous avez, le 21 août, la réponse de Mme Kandic où vous

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1 avez le titre de "HLC, en ce qui concerne le procès pour crimes de guerre

2 Kandic," et vous avez la réponse. Mais le thème est toujours le même. Ce

3 sont des documents préparatoires nécessaires, si vous avez le document qui

4 porte la date du 6 septembre et que signe le présent témoin dans ce

5 document, il signe une décision qui vise à enclencher des poursuites contre

6 Djorovic.

7 Je vais demander que ceci soit considéré comme une séquence directe et je

8 demande le versement de tous ces documents.

9 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Et --

10 M. NICE : [interprétation] Je m'arrête ici avant de parler du document

11 suivant.

12 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je comprends maintenant et je saisis

13 l'objectif que vous poursuivez. Vous tenez à établir que ces éléments aient

14 été écrits et qu'ils ont donné lieu à réponse.

15 M. NICE : [interprétation] C'est exact, oui.

16 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] La lettre suivante est intitulée,

17 "Bureau du procureur militaire de Belgrade"; c'est cela --

18 M. NICE : [interprétation] Non, la prochaine --

19 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Cela fait partie de la même série ?

20 M. NICE : [interprétation] Oui, ou plutôt, non, la suivante défend un

21 argument un peu différent. Il s'agit de la lettre intitulée, Bureau du

22 procureur militaire de Belgrade est une plainte déposée par Djorovic à

23 l'encontre du présent témoin, une plainte dans laquelle il est dit qu'il y

24 a eu convocation par ce témoin qui a exigé qu'il vote pour l'accusé, et

25 ceci, bien sûr, a un rapport direct avec la crédibilité.

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1 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui. Le problème c'est que je ne pense

2 pas que vous ayez posé au témoin la question que vous venez d'évoquer.

3 M. NICE : [interprétation] Je pense que je l'ai fait, Monsieur le

4 Président. Je pense que vous avez raison.

5 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Il n'y a pas de valeur probante --

6 M. NICE : [interprétation] Avec votre autorisation, j'aimerais poser cette

7 question en dehors des délais, mais peut-être que compte tenu de son

8 importance puisqu'elle porte sur la crédibilité, je pourrais le faire.

9 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Bien, cela dépendra de l'existence au

10 nom d'éléments de preuve à l'appui de cela.

11 M. NICE : [interprétation] Oui.

12 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Bien, vous pouvez poser cette

13 question, Monsieur Nice.

14 M. NICE : [interprétation] Je vous en remercie de tout cœur.

15 Q. Général Gojovic, vous connaissez cette allégation du colonel ou plutôt

16 du lieutenant-colonel Djorovic selon laquelle le matin du 3 octobre 2000

17 vous avez convoqué des gens dans votre bureau pour leur demander de voter

18 d'une certaine façon. Vous connaissez cette allégation, n'est-ce pas ?

19 R. Je connais cette allégation, mais elle ne correspond pas à la réalité.

20 Il y a eu effectivement une rencontre qui portait sur un ordre du jour

21 complètement différent, à savoir, traiter les affaires courantes, donc le

22 deuxième tour des élections. Il y avait pas mal de propagandes quant au

23 fait que les gens devaient aller voter ou pas voter. Rien de tout cela

24 n'avait de rapport avec ce que vous venez de dire. Je n'ai pas donné

25 l'ordre à qui que ce soit de voter conformément à ma volonté. Le vote se

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1 fait par bulletin secret. La cour constitutionnelle a dû se prononcer sur

2 ce point. Elle a prouvé que le premier tour des élections ne s'était pas

3 déroulé correctement. Il fallait qu'il y ait une autre consultation.

4 Q. Encore une question, si vous le voulez bien, Monsieur le Président. Je

5 vous prie de m'en excuser.

6 Vous avez confirmé que les élections ont été le sujet du débat lors de

7 cette réunion ?

8 R. Non, pas le sujet du débat. Ce n'était pas une réunion officielle pour

9 parler des élections. La réunion officielle portait sur quelque chose de

10 totalement différent, et après cela il y a eu certaines polémiques entre

11 les collègues puisque ce sont des collègues, des gens qui travaillent

12 ensemble. Est-ce qu'il faut aller voter ou pas, en fait, chacun avait à se

13 prononcer là-dessus. La position officielle de la cour qui l'a rendue

14 publique, cette position, c'était que le premier tour des élections n'avait

15 pas réussi sur le plan légal, et voilà quelle était la situation. C'est

16 pourquoi, apparemment, vous ne semblez pas savoir pourquoi il n'y a pas eu

17 de deuxième tour. Tout cela s'est passé après le premier tour des

18 élections.

19 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Général, est-ce que vous savez qu'une

20 plainte avait été déposée.

21 LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai d'abord pris connaissance de cette

22 plainte avec le groupe d'avocats manipulé dans cette procédure. C'est ainsi

23 que j'en étais informé après pas mal de temps. Ils m'ont fait suivre sa

24 plainte et je ne sais absolument pas ce qui l'a motivé.

25 M. NICE : [interprétation] Je ne demanderais pas l'autorisation de poser

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1 davantage de questions.

2 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] J'ai un autre document --

3 M. NICE : [interprétation] Le dernier document, c'est un document que j'ai

4 délibérément mis de côté et séparé des autres. Lorsque j'ai demandé ma

5 demande de versement au dossier global, je l'ai mis de côté parce que le

6 témoin n'en a pas reconnu l'existence. Il n'a pas reconnu que la plainte

7 avait été déposée sous cette forme.

8 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] C'est le document intitulé "Plaintes

9 au pénal".

10 M. NICE : [interprétation] Oui. C'est un document très long qui traite des

11 vues du lieutenant-colonel Djorovic, en mai 1999.

12 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Vous ne demandez pas son versement au

13 dossier ?

14 M. NICE : [interprétation] Je demande aux Juges d'envisager de le verser au

15 dossier, mais de prendre en compte le fait que le témoin ne l'a pas reconnu

16 dans le cours de sa déposition. Il a reconnu que des plaintes de cette

17 nature avait été faite par Djorovic, même si les motifs invoqués étaient

18 différents. Vous vous souviendrez que Djorovic a été renvoyé hors du

19 Kosovo, en disant que cela avait à voir avec un combat et que cela n'avait

20 rien à voir avec ces plaintes.

21 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Est-ce que vous avez la pièce à

22 conviction, le récapitulatif --

23 M. NICE : [interprétation] Monsieur le Juge, c'est un aide-mémoire pour le

24 tribunal. Bien sûr, il peut être considéré comme utile --

25 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Qu'en est-il des rapports d'activités de

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1 la MUNIK ?

2 M. NICE : [interprétation] J'ai demandé --

3 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Micro, s'il vous plaît.

4 M. NICE : [interprétation] Les fondements sont plus difficiles à déterminer

5 en la matière car on ne peut se fonder sur aucune des catégories reconnues

6 par nous jusqu'à présent. La position est la suivante : Le témoin vient au

7 tribunal et affirme qu'il y a une enquête légitime, ou plutôt, peut-être

8 pas légitime, mais en tout cas, en bonne et due forme au sujet des crimes

9 d'Izbica. Il en sorti, bien sûr, que depuis la fin de la présentation des

10 éléments de preuve relatifs au Kosovo dans la présente affaire, des

11 documents montrent que des corps d'Izbica ont été dissimulés en Serbie.

12 Ceci apparaît, peut-être, un peu contradictoire avec l'enquête judiciaire

13 menée précédemment au sujet du crime d'Izbica, et par conséquent je

14 demanderais que ces documents soient versés au dossier au stade où nous en

15 sommes actuellement. Il peut y avoir possibilité d'admission davantage

16 d'éléments de preuve plus tard, mais l'admission au jour d'aujourd'hui de

17 certains documents permet d'aller à l'encontre de la proposition selon

18 laquelle une enquête en bonne et due forme aurait été menée sous la

19 supervision du présent témoin. De cette façon, nous sommes, en fait, face à

20 un argument qui ressemble beaucoup à celui qui est développé depuis

21 plusieurs semaines, sinon, plusieurs mois, au sujet de l'admission de

22 nouveaux documents de la part de l'Accusation au cours de la présentation

23 des éléments de preuve de la Défense. Nous ne pouvions savoir que ce témoin

24 allait témoigner et produire son interprétation de l'intercalaire 18, et

25 c'est en réponse à cela que nous demandons le versement de ces éléments. La

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1 situation est peut-être un peu différente.

2 Je pense au fait que même si je n'ai pas retrouvé le chapitre indiqué il y

3 a quelques instants, il pourrait être nécessaire d'ajouter des éléments de

4 preuve au sujet des exhumations de façon générale, et des exhumations de

5 Batajnica ou de Petrovo Selo, d'une autre façon particulière, parce que ces

6 renseignements sont arrivés plus tard dans la procédure.

7 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Cela, nous en parlerons une autre

8 fois, Monsieur Nice.

9 [La Chambre de première instance se concerte]

10 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Maître Kay.

11 M. KAY : [interprétation] Les Juges pourraient peut-être me faire savoir

12 d'abord quelle est leur décision ? Cela permet d'être plus efficace,

13 d'après mon expérience.

14 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui. Bien, je pense que les deux --

15 M. KAY : [interprétation] Le rapport d'activités.

16 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Le rapport d'activités.

17 M. KAY : [interprétation] Et la plainte au pénal.

18 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Et la plainte au pénal.

19 M. KAY : [interprétation] Je ne suis pas en contradiction avec les

20 conclusions du tribunal.

21 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous aimerions vous entendre sur le

22 rapport d'activités.

23 M. KAY : [interprétation] Le rapport d'activités, et là encore, nous avons

24 un élément de preuve qui a été produit pendant la présentation des éléments

25 de preuve de l'Accusation qui porte sur les cadavres découverts en Serbie,

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1 qui ont fait l'objet de pas mal de dépositions. Ceci n'apporte rien. Il n'y

2 a pas de raison que ce document soit versé au dossier. Il n'a rien à voir

3 avec le présent témoin. C'est simplement un rapport qui émane de quelqu'un

4 dans une affaire en justice. Cela ne nous mène pas à un millimètre plus

5 loin et c'est simplement un élément de preuve qui est en suspens, qui n'a

6 aucune pertinence par rapport au présent témoin dont nous avons entendu la

7 déposition qui est d'ailleurs beaucoup plus détaillée que le paragraphe qui

8 intéresse le Procureur dans ce document. A mon avis, il n'a simplement rien

9 à voir dans l'affaire. C'est quelque chose qui peut être décrit comme

10 munition destinée au contre-interrogatoire. Je me souviens le Juge May

11 disant cela à un certain moment de la procédure. Employons cette expression

12 de "munition" pour le contre-interrogatoire, et rien de plus.

13 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Le revers de la médaille c'est que cela

14 ne peut pas faire de mal de le verser au dossier. Par conséquent, c'est

15 déjà un élément de preuve.

16 M. KAY : [interprétation] Cela peut faire du mal parce qu'il y a pas mal de

17 documents que nous avons à traiter. Nous ne savons s'il y a un dossier en

18 réponse à celui-ci, et comment traiter cet élément. Cela multiplie sans

19 aucune utilité les documents à examiner.

20 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Il me semble qu'il y a tout de même un

21 problème de principe ici, parce que même si ce document ne peut pas faire

22 de mal, je ne serai pas plus précis que cela, il y a tout de même un

23 principe à savoir que l'Accusation peut présenter des documents au cours du

24 contre-interrogatoire. A un stade ultérieur, ce document pourrait devenir

25 un élément particulièrement important qui pourrait exiger que les Juges le

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1 prenne en compte pour se prononcer, c'est cela qui me préoccupe. Peut-être

2 que ce document, à l'instant, n'a pas beaucoup d'importance, mais c'est le

3 principe qui m'inquiète.

4 M. KAY : [interprétation] Exactement. C'est notre position depuis --

5 L'INTERPRÈTE : Les interprètes demandent à Me Kay de brancher son micro,

6 s'il vous plaît.

7 M. KAY : [interprétation] C'est notre position sur ce point. Il y a

8 accumulation, ensuite on doit en tenir compte. Ce ne sont pas des documents

9 en suspens dans la procédure, mais ce sont des documents qui peuvent être

10 des bombes dormantes et qui pourraient acquérir une certaine importance

11 plus tard qu'ils n'ont pas aujourd'hui.

12 Par rapport à la plainte au pénal, il ne savait rien à ce sujet, et je

13 pense que nous ne devrions pas aller plus loin. Cela n'intéresse pas non

14 plus la procédure et n'est pas réellement pertinente.

15 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci, Maître Kay.

16 Monsieur Milosevic, ces deux documents, le rapport d'activités et la

17 plainte au pénal, vous avez quelque chose à en dire ?

18 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je n'ai pas compris que vous étiez en train de

19 discuter le rapport d'activités de la MINUK. Vous parliez du rapport

20 d'activités du MPF, n'est-ce pas, ou peut-être n'ai-je bien compris ?

21 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui. Le rapport d'activités --

22 [La Chambre de première instance se concerte]

23 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, vous pouvez

24 commenter la situation des autres documents également.

25 L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, merci. Puis-je commencer maintenant ou

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1 est-ce que vous pensez à faire une pause ? Je regarde l'heure.

2 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui. Nous vous entendrons sur ce

3 document et nous ferons la pause. Je ne pense pas que ce sera très long.

4 L'ACCUSÉ : [interprétation] Vous parlez du contre-interrogatoire ?

5 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Bon. Vous n'avez rien à dire sur ces

6 documents.

7 L'ACCUSÉ : [interprétation] Non. Par rapport à celui-ci, j'ai simplement

8 demandé si nous étions en train de parler du document du MPF ou de la

9 MINUK. C'est cela que je vous ai demandé. Un point d'éclaircissement que je

10 vous ai demandé.

11 M. NICE : [interprétation] Puis-je répondre en deux phrases ? Monsieur le

12 Président, s'agissant du document de la MINUK comme on l'appelle, je pense

13 qu'il constitue un nouveau document au dossier puisqu'il y a un lien entre

14 Izbica et les sites d'inhumation en Serbie. Il y a un lien entre Meja et

15 Batajnica, c'est un document nouveau. Quant à l'autre document, il est

16 important en raison du fait qu'une affaire au pénal a été freinée grâce à

17 l'intervention consciente d'un procureur militaire, ce qui pourrait avoir

18 son importance par rapport à la déposition du présent témoin. Donc

19 potentiellement, il est important. Cela ne règle pas le problème de

20 l'admission, mais je n'admets pas que ce document soit considéré comme

21 n'étant potentiellement pas important.

22 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, Monsieur Milosevic.

23 L'ACCUSÉ : [interprétation] Fort bien. S'agissant de ce document qui, comme

24 M. Nice vient de le signaler, établit un lien entre des tombes en Serbie et

25 les victimes, les cadavres d'Izbica, M. Bonomy a déclaré que ce document ne

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1 présentait aucun danger pour la Défense. Moi, j'irais encore plus loin, en

2 disant que ce document est utile pour la Défense, car j'appelle votre

3 attention sur le fait que le présent témoin et les documents qui ont été

4 portés à votre connaissance, donc dans le témoignage de ce témoin et dans

5 les documents soumis par lui, votre attention est appelée sur le fait que

6 le 29 mai 1999, nos instances ont découvert des cadavres à Izbica. Il

7 montre, y compris que des exhumations de 101 cadavres ont été effectuées

8 par des médecins légistes, et cetera. Pour tout auditeur de ces débats et

9 pour vous également, Monsieur le Président, Messieurs les Juges, la

10 question est posée de savoir dans l'intérêt de qui peut aller le fait que

11 des exhumations aient été effectuées, que des autopsies aient été réalisées

12 et qu'une affaire ait été intentée dès le 25 mai. Ce serait après tout cela

13 que ces cadavres auraient été emmenés en Serbie pour y être cachés. Ces

14 cadavres auraient quelque chose à voir avec les poursuites au pénal qui ont

15 commencé pendant la guerre dès ce moment-là. C'est quelque chose qui est

16 tout à fait incompréhensible, qui doit être incompréhensible pour toute

17 personne à peu près sensée et raisonnable. Finalement, cela ramène au

18 contexte. Il faudra bien le prendre en compte et se demander pourquoi et

19 comment ces cadavres ont été enterrés en Serbie ? Ces documents démontrent

20 de façon indubitable qu'il y a eu actions criminelles actives dès le mois

21 de mai 1999. Les cadavres ont été exhumés. Pourquoi et qui est-ce qui a

22 réalisé ces exhumations ? Cela devrait être rétabli pour expliquer les

23 choses. Je n'ai rien contre le versement au dossier de ce document, pas du

24 tout.

25 Quant au rapport, à savoir la plainte au pénal, je ne sais pas ce que vous

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1 voulez dire exactement, parce que M. Nice utilise les mêmes expressions. Il

2 dit de façon très convaincante ce que le lieutenant-colonel Djorovic

3 pensait de ce qui a été fait. Je pense qu'il est nécessaire de verser ce

4 document au dossier de façon à démontrer à quel point M. Nice est

5 responsable de mystification ici.

6 Le lieutenant-colonel Djorovic, dans cette plainte au pénal, n'évoque, en

7 aucun cas, le problème d'un document qui aurait eu un rapport avec les

8 crimes mis en accusation en application des lois de la législation sur la

9 guerre, c'est-à-dire qu'il y aurait eu violations des lois de la guerre, et

10 cetera, et cetera. Cette plainte au pénal qui comporte plusieurs pages n'a

11 à voir qu'avec 17 cas de vols, et toutes les affaires ont été envoyées à la

12 fin du mois de mai. C'est tout à fait clair.

13 Il s'agit ici d'une manipulation, si c'est le mot qui s'applique puisque

14 tout cela ne se résume qu'à des vols et cambriolages.

15 M. Nice affirme à l'encontre du général Gojovic que, dans les statistiques,

16 il y a plusieurs cas de crimes, de vols à main armée, et cetera, qui sont

17 évoqués. Ces éléments sont présents ici parce qu'il s'agit de crimes, et

18 ils sont les plus nombreux.

19 Si vous lisez cette plainte au pénal, je ne pense pas que vous l'avez lu

20 entre-temps, mais lisez-la. Si vous en lisez chaque lettre, vous verrez que

21 plusieurs cas sont exposés avec des éléments très spécifiques pour chacun

22 d'entre eux qui vont quelquefois jusqu'au numéro d'un châssis automobile.

23 Le nombre de cassettes audio volées, et cetera, et cetera. Il est question

24 de vols, de cambriolages, il n'est pas question de cacher des documents qui

25 seraient susceptibles d'être la preuve de tels vols. Je veux dire qu'il n'y

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1 a pas eu dissimulation de documents au sujet de violations graves du droit

2 humanitaire sous forme d'assassinats, de viols, de tentatives de meurtres,

3 et cetera. Cette plainte au pénal est quelque chose que vous aurez sous les

4 yeux et qui vous démontrera qu'il n'y aucun document qui ait pu être

5 dissimulé et qui aurait un rapport avec des violations du droit

6 humanitaire.

7 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, vous avez vu ce

8 document et vous le considérez comme susceptible de vous aider ?

9 L'ACCUSÉ : [interprétation] Il est inutile, absolument aucune utilité à ce

10 document. J'ai dit ce que j'ai dit à son sujet parce que M. Nice tente une

11 mystification. Il déclare que quelqu'un a caché quelque chose et que ce

12 lieutenant-colonel qui est le plus honnête des hommes serait venu ici pour

13 dire que certains crimes n'auraient pas fait l'objet de poursuites. C'est

14 simplement au contraire à la réalité. Ce document n'a de rapport qu'avec

15 des vols. Bien sûr, c'est un délit, mais c'est un délit qui n'a rien à voir

16 avec les éléments dont nous discutons ici. Que quelqu'un ait volé un

17 véhicule ou pas cela doit être déterminé par un tribunal local. Cela n'a

18 rien à voir avec les questions en débat ici.

19 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci, Monsieur Milosevic.

20 A la fin de la pause, nous rendrons notre décision qui permettra de

21 démystifier les choses. Pause de 20 minutes.

22 --- L'audience est suspendue à 12 heures 23.

23 --- L'audience est reprise à 12 heures 45.

24 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Nous admettons tous les documents

25 proposés par l'Accusation et, ce faisant, nous prenons note de l'accord de

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1 l'accusé vis-à-vis du versement au dossier des deux derniers documents

2 évoqués, à savoir la plainte au pénal et le rapport d'activités.

3 M. NICE : [interprétation] Monsieur le Président, je vous remercie. Je vous

4 prie de m'excuser pour les problèmes suscités par le fait que nous devons

5 sans cesse regarder la montre et essayer d'aller le plus vite possible.

6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Mais tout va bien Monsieur Nice,

7 puisque vous vous en sortez.

8 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Pour le rapport d'activités qui porte

9 le numéro 200 [comme interprété], 20004, il s'agira de la pièce P841.

10 La pièce P841 sera l'interview du journal Danas.

11 P842 pour le document suivant intitulé : Kandic lance des allégations

12 prématurées.

13 P843 pour le document datant du 21 août 2000.

14 P844 pour la décision datant du 26 septembre 2000.

15 P845 pour le document intitulé : Bureau du procureur militaire datant

16 du 7 novembre 2000.

17 P846 pour la plainte au pénal.

18 P847 pour le récapitulatif des requêtes de l'Accusation.

19 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci.

20 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

21 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, questions

22 supplémentaires.

23 L'ACCUSÉ : [interprétation]

24 Nouvel interrogatoire par M. Milosevic :

25 Q. [interprétation] Général Gojovic, ce matin au début de l'audience, M.

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1 Nice vous a posé des questions relatives à la caserne de Viktor Bubanj de

2 Sarajevo. Je ne perds pas de vue le fait que la semaine dernière lorsque

3 vous en avez parlé, vous avez déclaré qu'il se trouvait dans les locaux de

4 la caserne de Viktor Bubanj, un tribunal, des cellules d'incarcération

5 préalable au procès, un centre de détention, une compagnie de la police

6 militaire et d'autres instances tel que, par exemple, le bureau géodésique.

7 Toutes ces instances étaient logées dans les locaux de la caserne et il a

8 été noté que 120 personnes faisaient partie de la compagnie de police

9 militaire qui occupait une partie de la caserne Viktor Bubanj, est-ce qu'on

10 pouvait, dans ces conditions, la considérer comme une unité de combat ?

11 R. Non. C'était une institution. C'était l'institution chargée d'héberger

12 les hommes, d'ailleurs l'endroit s'appelait caserne Viktor Bubanj, mais en

13 dehors de cela, il y avait d'autres instances militaires qui étaient logées

14 dans ce bâtiment. Le tribunal, par exemple, le bureau du procureur

15 militaire, le bureau géodésique et il y avait une partie du bâtiment qui

16 était vide.

17 Q. Fort bien. Nous avons fait la lumière sur ce point. M. Nice a déclaré

18 qu'un système de poursuites judiciaires existait, qu'il était efficace au

19 sein de l'armée. J'ai pris note de ce qui a été dit à ce moment-là, il a

20 dit aussi qu'aucune tentative n'avait été faite pour poursuivre en justice

21 des crimes graves. J'ai pris note du fait que M. Nice a dit cela.

22 A ce sujet, j'aimerais vous renvoyer d'abord à l'intercalaire 14, page 1 où

23 nous trouvons la liste des condamnations et en page 2, la liste des

24 personnes mises en accusation.

25 Général Gojovic, je ne vais pas vous soumettre toutes les colonnes, mais

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1 simplement la colonne intitulée crimes contre la vie et atteinte à

2 l'intégrité physique, c'est la première colonne, et la deuxième colonne

3 intitulée où nous voyons un numéro, 55 personnes mises en accusation pour

4 crimes contre la vie et atteinte à l'intégrité physique. Est-ce que c'est

5 bien ce qui est écrit ici ? Est-ce que c'est bien le chiffre total qui

6 figure dans ce document ?

7 R. Oui, et la date est c'elle du 15 mai 1999.

8 Q. Fort bien. Alors 55 personnes sont accusées de ces crimes à la date du

9 15 mai 1999. Crimes qui se composent de suppression de la vie ou d'atteinte

10 à l'intégrité physique. Tout cela au cours des 50 premiers jours de

11 l'agression de l'OTAN, n'est-ce pas ?

12 R. Oui.

13 Q. Est-ce que vous savez que les bombardements au Kosovo étaient

14 ininterrompus, ils duraient 24 heures sur 24 ?

15 R. Oui, je sais cela. Pas seulement au Kosovo d'ailleurs, mais dans

16 l'ensemble de la République fédérale yougoslave.

17 Q. Oui, mais spécialement au Kosovo ?

18 R. Oui, spécialement au Kosovo. C'était le point le plus important.

19 Q. Savez-vous que 16 000 tonnes de bombes sont tombées sur le Kosovo ?

20 R. Je connais les chiffres réels. Il y a eu des bombardements nombreux et

21 des quantités énormes de bombes déversées, mais je n'ai pas le chiffre

22 exact en tête.

23 Q. La semaine dernière vous avez dit que des unités militaires, des

24 institutions, des tribunaux, des bureaux de procureur ont été déménagés,

25 ont dû s'installer ailleurs en raison de la fréquence des bombardements;

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1 ceci est-il exact ?

2 R. Oui.

3 Q. Dans ces conditions de bombardement 24 heures sur 24 pendant la guerre

4 jusqu'au 15 mai, 55 personnes sont accusées de crimes contre la vie et

5 d'atteinte à l'intégrité physique, comme nous le voyons dans ce premier

6 tableau. Si nous faisons le total de six plus deux cela nous donne huit qui

7 sont condamnées dans cette catégorie d'atteinte à la vie et d'atteinte à

8 l'intégrité physique. Six plus deux, cela fait huit.

9 R. Oui.

10 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Général, est-ce que vous savez dans

11 quelles conditions ces crimes ont été commis, parce que la qualification

12 "d'atteinte à la vie et à l'intégrité physique" est assez générale. De

13 quels crimes s'agissaient-ils exactement ?

14 LE TÉMOIN : [interprétation] Ce sont des crimes qui portent atteinte à la

15 vie ou à l'intégrité physique, qui mettaient en cause la vie humaine. Il

16 s'agit de meurtres, d'assassinats, et cetera, pour la plupart des meurtres.

17 A l'intercalaire 18, vous trouvez un récapitulatif à la date du 20 juin

18 1999. Vous constatez que 188 personnes ont été condamnées et 382 procédures

19 engagées devant les tribunaux dans cette catégorie particulière, c'est-à-

20 dire, atteinte à la vie et l'intégrité physique de la population civile,

21 meurtres multiples, tentatives de meurtres, et cetera.

22 M. MILOSEVIC : [interprétation]

23 Q. Fort bien, Général. Ici, compte tenu des circonstances dans lesquelles

24 fonctionnaient les instances de la justice militaire, les institutions

25 chargées de faire régner l'ordre, la police, les commandements et autres

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1 institutions pendant les bombardements, est-ce qu'en votre qualité de juge

2 professionnel, de procureur, et de chef du département juridique au grand

3 état-major, est-ce que vous pensez que vous pourriez apprécier la grande

4 efficacité --

5 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Non, non, Monsieur Milosevic. Cette

6 question est particulièrement tendancieuse et directrice. "Est-ce que vous

7 pensez que l'efficacité est telle et telle ?" Il vous répondra qu'elle

8 l'était.

9 L'ACCUSÉ : [interprétation] Très bien, mais je n'avais pas terminé ma

10 question. Ce que je voulais demander au témoin, c'était :

11 M. MILOSEVIC : [interprétation]

12 Q. Est-ce que c'était un niveau d'efficacité important, moyen ou bas ?

13 Comment est-ce qu'il considérait ce niveau d'efficacité du point de vue de

14 son expérience de professionnel ?

15 LE TÉMOIN : [interprétation] Suis-je autorisé à répondre ?

16 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui.

17 LE TÉMOIN : [interprétation] Si nous ne perdons pas de vue que 2 811

18 personnes ont été condamnées au cours de deux mois, le premier verdict

19 ayant été prononcé aux environs du 1er avril 1999, plus de 6 000 personnes

20 ont été mises en accusation, et en première instance il y a eu 2 811

21 condamnations, ce qui signifie une grande efficacité, sans aucun doute.

22 Evidemment, on n'inclut pas dans ce chiffre tous les crimes graves qui ont

23 pu être commis, les crimes les plus graves demandant des enquêtes beaucoup

24 plus longues, mais si vous prenez ce chiffre ici, il parle de lui-même.

25 Aucun tribunal en temps de paix n'aurait pu se montrer plus efficace que

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1 celui-ci. Cela fait très longtemps que je suis l'activité des tribunaux,

2 depuis 1991, en fait.

3 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Général --

4 [La Chambre de première instance se concerte]

5 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Général, essayons de tirer les

6 choses : Tous ces crimes ont-ils été commis par des soldats, par des

7 militaires ?

8 LE TÉMOIN : [interprétation] Ce dont je parle, ce sont des délits qui ont

9 été commis par des membres de l'armée de la Yougoslavie.

10 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vous remercie. Vous pouvez

11 continuer, Monsieur Milosevic.

12 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci, Monsieur Robinson.

13 M. MILOSEVIC : [interprétation]

14 Q. En aucun cas, ces délits au pénal dont vous avez parlé, dont a traité

15 la justice militaire, n'ont englobé ceux des délits au pénal qui étaient

16 poursuivis en justice par la justice civile ?

17 R. Non.

18 Q. Bien. Je vous demande maintenant de vous pencher sur l'intercalaire 18,

19 à compter de la page 2. En version anglaise, ce serait la page 4, en

20 version anglaise. Notre page numéro 2 est la page numéro 4 en anglais. Vous

21 avez les crimes de guerre commis contre la population civile. Je ne me

22 propose que de m'attarder brièvement là-dessus, puisque M. Nice, la semaine

23 passée, a posé des questions ou une question dont il a découlé que des

24 soldats auraient été sortis de prison pour exécuter des gens. Puis, il a

25 dit qu'il allait revenir sur la question. Il n'est pas revenu, mais c'est

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1 moi qui vais le faire.

2 On dit ici - et je n'ai pas la version anglaise, mais je suppose que

3 l'anglais nous dit la même chose - on énumère tous ces accusés puis on dit

4 : "Avec préméditation, ils ont privé de vie 5 Albanais dont l'identité n'a

5 pas été dévoilée et qui auraient été emprisonnés à l'occasion d'une

6 opération militaire et mis en détention. Après les avoir sorti de l'unité

7 de détention, ils les ont placé le long du mur d'une maison et ils ont tiré

8 dessus à l'arme automatique pour les tuer tous. Ils les ont jeté dans un

9 puits où ils ont mis de l'essence et ils ont mis le feu ensuite à tout ce

10 qui se trouvait dedans."

11 Par conséquent, il se trouve être que ces personnes tuées ont été sorties

12 d'une unité de détention ? Ce ne sont pas des soldats qu'on a tiré d'une

13 unité de détention pour qu'ils commettent un crime.

14 R. Oui, c'est exactement ce que cela veut dire.

15 Q. Très bien. Maintenant, de la page 2 à la page 19, où l'on parle de cas

16 graves, de vols à main armée, et à la page 17, par exemple, ces cas de vols

17 graves s'accompagnent de meurtre. C'est pour cela que se sont des délits

18 graves, étant donné qu'ils se sont accompagnés de meurtres. Sur ces 17

19 pages, on énumère les noms et prénoms des auteurs connus, s'agissant de

20 délits qui englobent le meurtre. On dit qu'il y a en tout et pour tout, 25

21 personnes.

22 R. En effet. C'est ce qui est donné dans l'aperçu, le sommaire, en tant

23 que chiffre au total.

24 Q. Quand vous examinez tous les noms et prénoms, vous allez aboutir à un

25 total de 25. Est-ce que dans cette rubrique portant sur la décision

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1 d'entamer une procédure, lorsqu'on a recueilli tous les renseignements, les

2 données nécessaires, et qu'il a été rendu une décision d'entamer un

3 procédure, est-ce que l'on voit quand est-ce que ces procédures ont été

4 effectivement entamées ? En page 2 [comme interprété], on dit le 4 août;

5 puis, on parle du 10 juin, toujours en 1999; puis, le 22 mai, à la page

6 suivante; puis toujours à la même page, le 4 juin; puis, à la page

7 suivante, 21 mai, 17 mai, 15 juin, 25 avril, mai 1999, sans date, 26 mai

8 1999, 11 mai 1999, 4 mai 1999, 9 mai, et ainsi de suite, ce qui fait que

9 tous ces délits graves ont été poursuivis en temps de guerre ?

10 R. Exactement. J'ai expliqué que la rubrique disant : Décision de lancer

11 une procédure, c'est une décision qui est prise par le juge d'instruction.

12 Le procureur militaire avant cela avait des renseignements à ce sujet. Il a

13 recueilli des informations, il a vérifié les données et il a déposé une

14 demande au tribunal. Lorsque le tribunal rend une décision à ce sujet, pour

15 ce qui est d'entamer une instruction en vertu de notre loi, on estime que

16 la procédure au pénal a commencé. Tout ce qui précède est préalable à la

17 procédure au pénal, et c'est le juge d'instruction qui s'en charge. Le

18 procureur a eu connaissances bien avant que la date de la décision

19 d'entamer la procédure. Toutes ces procédures ont été entamées, s'agissant

20 des intéressés susmentionnés dans le courant du printemps 1999 --

21 Q. Général --

22 R. -- et pendant l'agression de l'OTAN.

23 Q. Très bien, Général. Tirons une chose au clair. En répondant tout à

24 l'heure aux questions posées par M. Nice, vous avez répondu que certains de

25 ces actes au pénal se trouvent être poursuivis, ou plutôt, qualifiés au

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1 départ comme meurtres multiples, meurtres de plusieurs personnes. Puis,

2 ensuite les décisions, les jugements rendus ont été des jugements portant

3 sur des crimes de guerre. Alors que les choses soient dites clairement :

4 est-ce que les procureurs, à l'occasion de qualificatifs -- fait et l'ordre

5 des actes d'accusation dressés ont opté en faveur d'une qualification grave

6 ou légère ?

7 R. J'ai déjà expliqué cela. Chaque fois qu'il n'y avait pas suffisamment

8 de données ou d'éléments de preuve, et qu'ils avaient des instructions de

9 la part de leurs supérieurs concernant des meurtres, ils ont toujours

10 qualifié de façon plus grave de meurtres d'une ou plusieurs personnes. En

11 application de la loi de la république qui était encore en vigueur à

12 l'époque, la peine encourue était la peine de mort et la peine la plus

13 bénigne était celle de dix ans d'emprisonnement.

14 Q. Bien. Alors, soyons encore plus clair : Si l'on démarre avec une

15 qualification plus grave, le procureur peut changer cette qualification

16 pour la rendre moins grave.

17 R. Oui, c'est exact.

18 Q. Mais s'il démarre avec un qualificatif moins grave, est-ce qu'il peut -

19 - il peut atténuer, mais par la suite, en commençant par une qualification

20 atténuée, est-ce qu'il peut requalifier pour un qualificatif plus grave ?

21 R. Non. Justement. S'il parle d'une qualification atténuée, il ne peut

22 plus requalifier pour aggraver ces qualificatifs.

23 Q. Bien. En vertu de notre législation, le meurtre de plusieurs personnes

24 impliquent-ils une peine plus grave que le crime de guerre ?

25 R. Absolument. Pour ce qui est de la peine maximum encourue et pour ce qui

Page 37699

1 est de la peine minimum encourue, parce que la peine minimum c'est cinq ans

2 de prison.

3 Q. Pour le meurtre de plusieurs personnes ?

4 R. Oui, oui.

5 Q. On commence par meurtre de plusieurs personnes pour adopter un

6 qualificatif atténué de crime de guerre, c'est ce que vous avez essayé

7 d'expliquer dans votre réponse à l'attention de M. Nice ?

8 R. Oui, bien sûr, c'est ce que je voulais dire.

9 Q. Merci. Général, étant donné que la question a été posée ici de savoir

10 si l'on a poursuivi tous les délits qui ont été constatés, or, vous nous

11 l'avez déjà expliqué. Mais j'aimerais un peu plus de précision pour ce qui

12 est de ce que je vais vous demander. Y a-t-il eu, ne serait-ce qu'un cas de

13 délit au pénal où les instances judiciaires de la Yougoslavie, quand je dis

14 "instances de Yougoslavie" je parle des instances au bas de l'échelon

15 jusqu'au sommet de l'échelle, pour ce qui est de poursuite en justice, est-

16 ce qu'il y a eu un seul cas de délit au pénal où les autorités en auraient

17 eu vent sans pour autant lancer une procédure au pénal ?

18 R. Je n'ai pas connaissance d'un cas de ce genre. Tout ce qu'on a appris a

19 fait l'objet d'une procédure au pénal par les bons soins du procureur.

20 Q. Bien. M. Nice a notamment parlé, et là je vais vous demander de nous

21 fournir des explications. Il s'est attardé notamment sur l'intercalaire 17,

22 page 43, en langue serbe, et il me semble qu'il avait parlé de la page 56

23 en version anglaise. Alors, je crois qu'au numéro 7 vous avez --

24 R. Vous pouvez répéter la page.

25 Q. Page 43, de la version serbe de cet intercalaire 17. Il a justement

Page 37700

1 parlé de cette page.

2 R. Oui, je vois.

3 Q. Il a dit que cela correspondait à la version anglaise en page 56.

4 Au numéro 7, on voit la procédure entamée contre un lieutenant-colonel et

5 quatre soldats ordinaires. Alors, il a demandé -- ou plutôt, il a laissé

6 entendre que l'on a poursuivi que des peu gradés, alors que les hauts

7 gradés n'ont pas été poursuivis. Il a pris pour exemple la sécession de la

8 procédure à l'égard du lieutenant-colonel. Cette procédure à l'égard du

9 lieutenant-colonel a été mise à terme parce que c'était un lieutenant-

10 colonel ou parce qu'il y avait des raisons juridiques de procéder à un non

11 lieu ?

12 R. Ce n'est pas parce qu'il était lieutenant-colonel. Au contraire.

13 D'après ce que je crois voir ici, et d'après les explications qui y

14 figurent, il s'agissait-là d'un officier de la sécurité chargé de la

15 sécurité des personnes détenues. Il a enquêté au sujet des raisons de la

16 détention et les soldats indiqués ici ont sorti des personnes de la prison

17 sans que l'officier ne le sache et les ont abattues. Il y a eu une

18 procédure d'initier à l'encontre du lieutenant-colonel, mais on a constaté

19 dans le courant de la procédure que ces soldats sans l'approbation du

20 lieutenant-colonel ont commis ce qu'ils ont commis. C'est la raison pour

21 laquelle, à l'occasion de la procédure, il y a eu un non lieu à l'encontre

22 du lieutenant-colonel parce que le procureur n'avait aucun justificatif

23 pour ce qui était de le poursuivre. Les autres soldats ont été poursuivis

24 et il y a eu deux autres cas. En page suivante, le même groupe a également

25 répondu du deuxième volet du crime; sept personnes au total.

Page 37701

1 Q. Lieutenant-colonel a fait l'objet d'une procédure parce qu'il était la

2 personne chargée de cette prison dont on a sorti des personnes détenues.

3 R. Oui.

4 Q. Il y a eu non-lieu parce qu'il s'est avéré qu'il n'avait pas

5 connaissance du fait que l'on ait sorti des détenus.

6 R. Exactement.

7 Q. Très bien. Vous avez vu un enregistrement qu'on nous a diffusé ici par

8 les bons soins de M. Nice. Dans l'enregistrement en question, il nous a été

9 donné de voir bon nombre de civils. Je ne sais pas si vous avez remarqué

10 une chose, à savoir que l'enregistrement commence par un commentaire et des

11 images. On voit un passage frontière, on voit ce petit bâtiment, un drapeau

12 yougoslave, et le drapeau de la République de Serbie, je suppose, parce

13 qu'on ait passé très vite sur ce cadre. Puis, le commentateur dit : "Sous

14 les symboles du nationalisme serbe, les autorités expulsent des Albanais."

15 Est-ce que le drapeau de l'état qui figure à un passage frontière peut être

16 considéré comme le symbole du nationalisme serbe sous lequel l'on expulse

17 des Albanais ?

18 R. Bien entendu, tout le monde le sait, tout le monde sait que ce n'est

19 pas le cas. Mais, on se croirait à un match de foot. Le reporter met des

20 émotions dans son discours vis-à-vis d'une population qui est en train de

21 fuir.

22 Q. Bien. Il est tout à fait clair du fait qu'il s'agit-là d'une

23 information plutôt liée à la propagande qui est très tendancieuse.

24 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Non, je ne vais pas vous autoriser à

25 ce faire, Monsieur Milosevic. Posez une autre question.

Page 37702

1 L'ACCUSÉ : [interprétation] Très bien.

2 M. MILOSEVIC : [interprétation]

3 Q. Alors il dit ensuite : "Les forces serbes se déplacent des limites du

4 Kosovo vers Pristina," comme si l'armée de la Yougoslavie était en train de

5 conquérir le Kosovo. Avez-vous connaissance du fait que les unités de

6 l'armée de la Yougoslavie à ce moment-là et avant cela et des années encore

7 avant cela se trouvait à Pristina même, ce qui signifie qu'il ne s'agit pas

8 là d'un déplacement de troupes des limites des frontières vers Pristina,

9 mais qu'il s'agit d'un territoire intégral où l'armée se trouve sur son

10 propre territoire ? En avez-vous connaissance ou pas ?

11 R. On sait très bien qu'au Kosovo-Metohija, il y avait plusieurs garnisons

12 avec des unités militaires, en temps de paix et notamment en temps de

13 guerre. Cette constatation à elle seule de la part de ce journaliste

14 disqualifie sa façon de s'exprimer, comme si le Kosovo était le territoire

15 d'un autre état et que ces unités-là étaient en train d'envahir le

16 territoire d'autrui. On laisse entendre une chose qui est tout à fait

17 contraire à la vérité.

18 Q. M. Nice laisse entendre également le fait que l'on avait planifié un

19 nettoyage ethnique. Général, il se réfère notamment, j'ajouterais au

20 rapport présenté dans l'opinion publique mondiale disant que l'on expulsait

21 des Albanais. Or, avez-vous connaissance du fait que ce récit de nettoyage

22 ethnique avait été monté de toute pièce pour justifier cette agression

23 illégale ?

24 R. Justement l'agression à elle --

25 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, si vous

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1 continuez de la sorte, je vais terminer les questions supplémentaires.

2 L'ACCUSÉ : [interprétation] Très bien, Monsieur Robinson.

3 M. MILOSEVIC : [interprétation]

4 Q. Vous nous avez expliqué que la création de tribunaux de guerre était

5 quelque chose de prévu par la loi. Général, les tribunaux militaires

6 existent de tout temps; de l'existence d'un Etat; cela date de très

7 longtemps.

8 R. Cent soixante ans d'histoire de justice militaire ininterrompue jusqu'à

9 l'an passé. Cela fait 160 ans au total, en temps de paix, j'entends.

10 Q. Très bien. La loi réglemente très clairement qu'au cas de la

11 proclamation d'un état de guerre, le fait de proclamer un état de guerre

12 fait que les tribunaux militaires sont tout à coup, ou deviennent tout à

13 coup des tribunaux de guerre ?

14 R. Oui. C'est ce qui découle des dispositions régissant la proclamation de

15 l'état de guerre. Une fois l'état de guerre proclamé et déclaré ces

16 tribunaux suivent une formation de guerre.

17 Q. Cette formation et organisation de guerre impliquaient-elles des

18 effectifs plus grands qu'en temps de paix dans les circonstances

19 concrètes ? Cette organisation en temps de guerre était-elle plus grande,

20 plus numériquement importante qu'en temps de paix ?

21 R. Les organisations en temps de guerre avaient en tout et pour tout 24

22 tribunaux de guerre, alors qu'en temps de paix, il n'y avait que trois

23 tribunaux de première instance avec une instance d'appel. Par conséquent,

24 le ministère public était au nombre de trois et un ministère public au

25 sommet de l'Etat, ils étaient dans le deuxième cas 155 juges, et dans le

Page 37704

1 premier des cas en temps de paix 60 juges.

2 Q. Sans pour autant parler de toutes les personnes qui sont énumérées ici

3 à l'intercalaire 17 et 18, M. Nice vous a posé des questions au sujet d'un

4 ou de deux cas. Je ne suis pas très certain. Je crois que c'était deux cas.

5 Pour ce qui était de savoir qui est-ce qui avait lancé l'initiative,

6 découvert des crimes, et ainsi de suite.

7 En répondant à l'une de mes questions pour savoir si ces documents étaient

8 accessibles au public, vous avez répondu par l'affirmative, la semaine

9 passée ?

10 R. C'est exact.

11 Q. Est-ce que les écrits dans tout dossier individuel qui englobent

12 j'imagine tous les faits pertinents liés à tel dossier individuel, il est

13 donné de la possibilité de savoir qui est-ce qui a entamé la procédure, et

14 cetera.

15 R. Oui. Dans tous les cas de figure ce renseignement existe.

16 Q. Est-ce que s'agissant de toutes ces personnes qui sont énumérées ici,

17 il existe des dossiers avec des numéros de dossier auprès du tribunal

18 compétent ou plutôt de l'institution judiciaire compétente en Yougoslavie ?

19 R. Oui. Tout ceci, notamment ce qui se rapporte au tribunal militaire de

20 Nis, maintenant cela a été renvoyé à l'instance civile de Nis puisque les

21 tribunaux militaires ont cessé d'exister vers la fin de l'an passé.

22 Q. M. Nice vous a posé des questions au sujet de la coopération avec la

23 MINUK. Avant que de vous demander d'étoffer votre propos au sujet de cette

24 coopération, j'aurais de petites questions préalables à vous poser.

25 Général, avez-vous connaissance du nombre de Serbes, Monténégrins et non-

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1 Albanais ayant été chassés du Kosovo-Metohija à compter du moment où les

2 Nations Unies ont pris le pouvoir au Kosovo, à savoir la MINUK ?

3 R. Pratiquement toute la population. Un très petit nombre de ces gens est

4 resté. Je ne saurais pas vous dire leur nombre, mais la majorité est

5 chassée, et ceci sous les yeux des représentants des Nations Unies.

6 Q. Avez-vous connaissance du nombre de Serbes et autres non-Albanais y

7 compris Albanais qui ont été tués depuis ?

8 R. Un très grand nombre de personnes kidnappées et tuées, plus de mille.

9 Q. Avez-vous connaissance du nombre de monastères et églises détruits sous

10 l'autorité de la MINUK ?

11 R. Très grand nombre, allant je crois, enfin se situant aux alentours de

12 150. Ce sont des monuments historiques de grande importance.

13 Q. Savez-vous combien de dizaines de milliers de maisons et de propriétés

14 de familles serbes ont été incendiées et détruites sous l'autorité de la

15 MINUK ?

16 R. Le plus grand des pourcentages. Plus de 80 % à coup sûr.

17 M. NICE : [interprétation] Je ne sais pas trop ce que signifie la question

18 lorsqu'on parle de la MINUK et de l'autorité qu'elle aurait exercée. Je ne

19 sais pas si ceci découle du contre-interrogatoire. M. Milosevic peut poser

20 la question, mais on dit : mais quelque part la MINUK aurait autorisé. Est-

21 ce que c'est bien la suggestion qui est faite et est-ce que le témoin est

22 conscient de répondre de cette façon à cette question-là ?

23 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, effectivement,

24 il n'est pas clair que ceci découle du contre-interrogatoire. Quoi qu'il en

25 soit, il faut tirer ceci au clair, la question était celle-ci : "Savez-vous

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1 combien de monastères, d'églises ont été détruites sous l'autorité de la

2 MINUK," avez-vous posé comme question, ceci semble indiquer que la

3 destruction de ces monastères s'est produite quelque part avec la

4 connivence, avec l'appui de la MINUK; est-ce bien ce que vous voulez dire ?

5 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Robinson, il ne fait point de doute,

6 le fait que nous avons maintenu l'ordre au Kosovo avec 10 000 policiers et

7 les Nations Unies avec 40 000 soldats ne sont pas à même d'empêcher la

8 perpétration de tant de crimes. Il ne peut être question d'un rôle actif de

9 leur part pour ce qui est de la protection de cette population mais, tout

10 au contraire, c'est sous l'égide de ces gens-là qu'ont été perpétrés les

11 plus graves des crimes; 300 000 personnes ont été chassées; 70 000 maisons

12 ont été incendiées; 150 églises ont été détruites; plusieurs milliers de

13 personnes --

14 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vous arrête, mais vous n'avez pas

15 de preuves venant étayer ce que vous affirmez, à savoir que la MINUK aurait

16 soutenu ou encouragé la destruction de ces monastères, n'est-ce pas ?

17 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Robinson, il existe même des

18 enregistrements vidéo où l'on voit des soldats de ces forces-là au Kosovo

19 actuel pendant que des monastères et des églises sont en train de brûler.

20 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je ne vous autorise pas à poser ce

21 genre de questions. Passez aux sujets principaux.

22 L'ACCUSÉ : [interprétation] Très bien.

23 M. MILOSEVIC : [interprétation]

24 Q. Est-ce que c'est cette même MINUK, à laquelle, vous vous êtes adressé

25 et au sujet de laquelle vous avez dit qu'ils n'ont pas répondu à vos

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1 demandes d'aide juridique pour ce qui est des enquêtes judicaires

2 diligentées par les instances judiciaires militaires dans le cadre de leur

3 compétence ?

4 R. Ce que je sais, c'est que le procureur et le tribunal se sont adressés

5 aux instances de la justice au Kosovo sous l'égide de la MINUK pour obtenir

6 une aide juridique et qu'ils n'ont pas reçu cette aide.

7 Q. Bien. Mais étant donné que l'on n'ignore pas le nombre de délits et je

8 les ai cités tout à l'heure, savez-vous nous dire combien d'auteurs de ces

9 délits au Kosovo ont été condamnés s'agissant des délits que je viens de

10 vous citer ou plutôt savez-vous nous dire combien il en a été arrêté, ne

11 serait-ce qu'arrêté ?

12 R. Je n'ai pas de renseignement au sujet du nombre d'arrêtés et de jugés

13 au Kosovo. Ce ne sont pas là des chiffres qui sont portés à ma

14 connaissance.

15 Q. Savez-vous que les autorités de la Réplique de Serbie à savoir les

16 instances de la Serbie ont demandé une coopération au sujet de crimes

17 perpétrés par des personnes nommées avec précision, Agim Ceku, Hashim Thaci

18 et autres ? Y a-t-il eu là une coopération quelconque avec la MINUK ?

19 R. Le fait que Ceku a été privé de sa liberté à l'aéroport de Hongrie

20 suite à un avis de recherche international, il a été relâché après

21 intervention de la MINUK, quoi qu'il ait fait l'objet d'un procès devant le

22 tribunal compétent de la Serbie.

23 Q. Quelle est l'aide que vous avez demandée auprès de la MINUK, sans que

24 celle-ci ne vous soit fournie ?

25 R. Il s'agit de plusieurs affaires, ou plusieurs délits, notamment de

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1 viols, donc délits au pénal. Il s'agissait de les interviewer, de les

2 amener au tribunal en garantissant leur sécurité mais il n'y a pas eu de

3 suite. Il n'y a pas eu de suite sous forme juridique ou légale quelle

4 qu'elle soit pour autant que j'en ai eu connaissance.

5 Q. Général Gojovic, on a parlé ici d'Izbica. Veuillez nous dire ce que

6 vous savez au sujet d'Izbica. Qu'a-t-on fait au sujet d'Izbica ?

7 R. Ce que je sais, je l'ai déjà --

8 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je ne vous autorise pas à revenir

9 sur cette question. Izbica a été mentionnée. Si vous avez une question

10 précise qui découlerait de quelque chose qui aurait été posé dans le

11 contre-interrogatoire à propos d'Izbica, libre à vous de le faire, mais ne

12 dites pas simplement : "Dites-nous ce que vous savez à propos d'Izbica." Ce

13 n'est pas une question qu'il faut poser. Si vous n'avez pas de question

14 précise qui est en rapport avec quelque chose qui aurait été posé au

15 contre-interrogatoire, passez à un autre sujet. Vous consacrez trop de

16 temps aux questions supplémentaires, Monsieur Milosevic.

17 L'ACCUSÉ : [interprétation] Fort bien. Fort bien, Monsieur Robinson.

18 M. MILOSEVIC : [interprétation]

19 Q. Avez-vous, Général, connaissance ou plutôt je vais vous demander ce qui

20 suit. M. Nice a parlé des cadavres d'Izbica et a établi une corrélation

21 avec des fosses communes en Serbie. J'espère que maintenant, on sait

22 clairement de qui cela pouvait être l'intérêt, est-ce que cela pouvait être

23 l'intérêt de l'Etat ou --

24 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Un instant, Monsieur Milosevic. Je

25 vous ai coupé le micro, vous manifestez un parfait mépris du règlement, et

Page 37709

1 si vous poursuivez de la sorte, nous allons mettre fin à vos questions

2 supplémentaires et vous allez devoir appeler votre prochain témoin, et vous

3 allez dans ce sens-là.

4 M. MILOSEVIC : [interprétation]

5 Q. Général, quel est le nombre de cas découverts par nos instances à

6 Izbica ?

7 R. Il est question de 144 tombes fraîches. On a exhumé 101 cadavres, et on

8 les a autopsiés. Il y a une documentation afférente, mais on a découvert

9 144 tombes. De là, à savoir comment ces cadavres se sont trouvés dans une

10 fosse commune à Batajnica, c'est toute autre question qui nécessite des

11 explications.

12 Q. Avez-vous pris lecture de l'acte d'accusation Kosovo ?

13 R. Oui.

14 Q. De quel chiffre parle-t-on s'agissant d'Izbica ?

15 R. Il est question de plusieurs chiffres, mais le nombre final est de 118

16 plus deux.

17 Q. Est-ce que cela signifie que nos instances ont constaté, partant d'une

18 procédure lancée le 29 mai 1999, plus de cadavres qu'on en mentionne ici ?

19 R. Ici, il est question de 144 tombes.

20 Q. Grand merci. Je ne vous poserai pas davantage de questions au sujet

21 d'Izbica.

22 M. Nice dans son contre-interrogatoire, et là, je pense que cela ne vous

23 regarde pas, mais lui, il s'est adressé à vous puisque c'est à vous qu'il a

24 posé des questions au sujet de votre doctorat et agrégation. S'agissant de

25 votre promotion au grade de général, il faut une agrégation. Partant de la

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1 réglementation en vigueur en Yougoslavie pour ce qui est de nommer

2 quelqu'un ou de promouvoir quelqu'un au grade de général, on ne peut

3 promouvoir qu'un colonel pour en faire un général. Est-ce qu'il faut qu'il

4 ait un diplôme d'études avancées ?

5 R. S'agissant des services juridiques, il faut un doctorat, en temps de

6 paix. Cependant pendant les temps de guerre, il y a une réglementation

7 autre de mise en œuvre. Un article concret régissant l'armée de Yougoslavie

8 prévoit la nécessité de promouvoir des gens pour compléter les unités. On

9 fait référence au succès au commandement, au succès en temps de guerre et à

10 l'accomplissement de ces fonctions avec beaucoup de mérite en temps de

11 guerre.

12 Q. Vous parlez de service juridique ?

13 R. Oui.

14 Q. S'agissant des autres généraux a-t-on besoin de cela ?

15 R. Non. Il faut d'autres écoles militaires et pas une agrégation ou un

16 diplôme d'études avancées.

17 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] J'étais sur le point de dire ne vous

18 en faites pas. Cela n'a beaucoup d'importance.

19 L'ACCUSÉ : [interprétation] Très bien.

20 M. MILOSEVIC : [interprétation]

21 Q. Je vais m'attarder une minute seulement sur le texte qui vous a été

22 communiqué en même temps qu'à moi. J'entends ici, au sujet de quoi M. Nice

23 nous a dit qu'il n'avait pas le texte en serbe mais en anglais seulement.

24 "Demande d'aide en ce qui concerne des archives concernant des événements

25 ayant entraîné la poursuite de membres de la VJ…"

Page 37711

1 Je vais vous donner lecture d'une partie où il est question de vous, de

2 votre nom et de votre prénom. Il s'agit d'une réunion en date du 4 décembre

3 2002, et on dit : "Réunion à la 'maison de la VJ,'" je suppose que c'est la

4 maison de l'armée ?

5 R. Je n'ai pas entendu, je n'ai pas compris.

6 Q. Il est dit ici : "Dans la maison 'de l'armée'," je suppose que c'est la

7 maison de l'armée. C'est là que s'est tenue la réunion ?

8 R. Il y en a eu une là et l'autre au ministère de l'Intérieur.

9 Q. Fort bien. Voici ce qui est dit, notamment, vous étiez présent, et vous

10 dites, on dit voilà : "Le général Gojovic a dit que beaucoup des dossiers

11 militaires concernant le Kosovo étaient toujours en traitement et que

12 d'autres ont été renvoyés à des tribunaux civils. Sur les 382 dossiers

13 concernés, 188 ont entraîné des condamnations par des tribunaux militaires

14 et 137 dossiers ont été renvoyés. Il y a eu aussi plusieurs dossiers

15 concernant la mort de 580 personnes, les auteurs étaient inconnus,

16 l'enquête se poursuit de la part des autorités militaires ou civiles…" et

17 ainsi de suite.

18 Est-ce que ce sont là les statistiques générales que vous aviez à ce

19 moment-là à votre disposition en ce qui concerne les dossiers, les affaires

20 où étaient concernées les organes de la Yougoslavie ?

21 R. Oui. Ce sont des faits et des chiffres qu'on trouve à l'intercalaire

22 18, c'est un tableau de synthèse où on parle de ces 382 affaires, 188

23 condamnations et renvois devant les tribunaux civils de 137 affaires. Puis

24 il y a un autre chiffre, celui de 580, en fait, cela concernait 598

25 personnes.

Page 37712

1 Q. Fort bien.

2 R. C'est bien le résultat de cette synthèse.

3 Q. Je vous remercie. Je n'ai plus d'autres questions à vous poser,

4 Général.

5 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Ceci met fin à votre déposition,

6 Général. Je vous remercie d'être venu à titre de témoin. Vous pouvez

7 désormais quitter le prétoire.

8 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous remercie de votre attention.

9 [Le témoin se retire]

10 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, quel est votre

11 témoin suivant.

12 L'ACCUSÉ : [interprétation] Ce sera le Juge Danica Marinkovic.

13 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

14 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vais demander au témoin de

15 prononcer la déclaration solennelle.

16 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

17 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

18 LE TÉMOIN: DANICA MARINKOVIC [Assermenté]

19 [Le témoin répond par l'interprète]

20 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vous remercie. Madame, veuillez

21 vous asseoir.

22 Monsieur Milosevic, commencez votre interrogatoire principal.

23 N'oubliez pas que vous n'avez qu'environ sept minutes. Car, il y a une

24 audience qui se tient ici cet après-midi dans ce prétoire.

25 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci, Monsieur Robinson.

Page 37713

1 Interrogatoire principal par M. Milosevic :

2 Q. [interprétation] Madame Marinkovic, dites-nous votre date de naissance

3 et le lieu de naissance ?

4 R. Je suis née en 1951 à Bosanski Brod.

5 Q. Quel est votre appartenance ethnique ?

6 R. Je suis Macédonienne et mon nom de jeune fille est Drakulovska.

7 Q. Quelles études avez-vous faites et où ?

8 R. J'ai mes études secondaires, mon lycée et ma faculté de droit à Skopje

9 en Macédoine, en langue macédonienne.

10 Q. Veuillez nous indiquer brièvement, je vous prie, quand est-ce que vous

11 avez terminé vos études universitaires ?

12 R. Mes études de droit, je les ai terminées en 1975.

13 Q. Où avez-vous travaillé ?

14 R. J'ai commencé à travailler en tant que débutante en matière juridique

15 au tribunal municipal de Skopje.

16 Q. Où avez-vous travaillé par la suite ?

17 R. Un an plus tard, après avoir eu droit à me présenter à une épreuve en

18 matière judiciaire, je me suis présentée devant une commission du ministère

19 de la Justice de la Macédoine, à Skopje. Après avoir réussi à cet examen,

20 je suis passer vivre à Pristina avec ma famille. J'ai commencé à y

21 travailler en tant que collaborateur expert au tribunal dans la cour

22 suprême.

23 Q. Quand avez-vous été élue juge du tribunal municipal ?

24 R. J'ai été élue juge du tribunal municipal en 1984 pour ce qui est de

25 Pristina.

Page 37714

1 Q. Quand êtes-vous devenue juge d'instruction de ce tribunal municipal de

2 Pristina ?

3 R. J'ai commencé à travailler en tant que juge d'instruction en novembre

4 1994.

5 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je m'excuse. Vous avez dit que vous avez

6 été élue aux fonctions de juge. Si vous avez été élue, par qui cela s'est-

7 il fait ?

8 LE TÉMOIN : [interprétation] A l'époque, le parlement de la province à

9 Pristina était chargé de l'élection des juges.

10 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

11 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur Kwon, en application de notre

12 législation, les juges sont nommés par l'assemblée populaire.

13 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie.

14 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Est-ce que c'est une nomination ou

15 une élection ?

16 LE TÉMOIN : [interprétation] On appelle cela élection des juges. Est-ce que

17 je peux vous l'expliquer ?

18 L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, justement. Que Mme Marinkovic l'explique,

19 elle le sait mieux que moi.

20 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] En effet, laissons le témoin nous

21 expliquer cela. Je suis certain qu'elle le sait mieux que vous.

22 LE TÉMOIN : [interprétation] Les juges sont élus. Une fois qu'ils sont élus

23 par l'assemblée, et après qu'ils ont prêté serment devant le Parlement qui

24 les a élus, ces juges commencent à travailler, exercer leurs fonctions de

25 juge.

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1 M. MILOSEVIC : [interprétation]

2 Q. Madame Marinkovic, veuillez nous expliquer très brièvement, je vous

3 prie, comment l'assemblée procède à l'élection des juges. Comment vous

4 avez, vous-même, été élue juge ? Est-ce que vous vous êtes présentée à un

5 concours public ? Quel est l'engrenage qui réglemente cette procédure ?

6 R. D'abord, il y a les médias qui publient un concours public. Ce concours

7 prévoit des conditions prévues par la loi que tout candidat doit réunir

8 pour prendre part au concours déterminé. Après ceci, il y a vérification de

9 tous les renseignements et vérification des candidats et des dires de ces

10 candidats. Puis, il y a une procédure qui communique la totalité des

11 renseignements à l'assemblée. Il y a une commission de créer qui se penche

12 sur la totalité des documents et qui propose à l'assemblée un certain

13 nombre de juges et c'est l'assemblée qui élise tel nombre de juges.

14 Q. Pour pouvoir vous présenter, qu'elles étaient les conditions qu'il

15 fallait réunir ?

16 R. Pour qu'un candidat puisse se présenter au concours d'élection d'un

17 juge, il faut qu'il ait un diplôme de faculté de droit, un examen en

18 matière judiciaire et un certain nombre d'années d'expérience suivant le

19 tribunal où il se présente pour ce qui est de savoir s'il s'agit d'un

20 tribunal municipal ou départemental. Pour le municipal, il faut au minimum

21 trois ans d'expérience et pour le tribunal départemental, il faut au moins

22 sept années d'ancienneté.

23 Q. Merci, Madame Marinkovic. Au paragraphe 87 de l'acte d'accusation au

24 Kosovo, il est dit, et je vais vous donner citation de ce paragraphe :

25 "Après la suppression au Kosovo en 1989 de suppression pratique de

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1 l'autonomie, il y avait division de plus en plus graves. Dans le courant de

2 1989, 1990 et 1991, des milliers d'Albanais du Kosovo, de médecins,

3 d'enseignants, de professeurs, d'ouvriers, policiers, et autres employés de

4 l'Etat, ont été licenciés de leur poste de travail. Les tribunaux locaux au

5 Kosovo ont été supprimés et bon nombre de juges ont été révoqués. Les

6 violences à l'égard des Albanais du Kosovo se sont renforcées."

7 Madame Marinkovic, je viens de vous citer ce qui est dit exactement dans

8 cet acte d'accusation. Cela est-il exact ?

9 R. Ce que vous venez de lire dans ce paragraphe est tout à fait inexact.

10 Q. Etant donné que nous avons entendu ici des déclarations de témoins au

11 sujet de cette situation générale qui est décrite ici, et notamment

12 s'agissant de catégories professionnelles, je voudrais vous poser la

13 question suivante, et je me réfère notamment au fait que vous êtes juge. Je

14 vais vous poser une question, tout d'abord, en premier lieu au sujet des

15 juges. En votre qualité d'intervenant de longue date en matière judiciaire

16 à la justice de Kosovo-Metohija, puis en votre qualité de juge, j'aimerais

17 que vous nous commentiez ce paragraphe compte tenu de la situation en

18 matière de justice. Je vais être très précis, dirais-je même : combien de

19 juges a-t-on révoqués en 1990 ? Pour autant que vous le sachiez, nous

20 parlons du tribunal départemental de Pristina, vous vous y trouviez, comme

21 vous nous l'avez dit tout à l'heure. Nous pouvons parler également du

22 tribunal municipal de Pristina, je suppose que vous êtes au cours des

23 chiffres au sujet de ces deux tribunaux.

24 R. Avant de répondre à ces questions, avec l'autorisation de la Chambre,

25 j'aimerais expliquer, clarifier quelque peu ce qui est dit dans le

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1 paragraphe au sujet des tribunaux locaux où des juges auraient été

2 révoqués.

3 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, nous allons entendre cette

4 explication et la réponse, mais nous le ferons demain. Car maintenant,

5 l'heure est venue de lever l'audience. L'audience reprendra demain à 9

6 heures.

7 --- L'audience est levée à 13 heures 45 et reprendra le mercredi 23 mars

8 2005, à 9 heures 00.

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