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1 Le vendredi 6 mai 2005
2 [Audience publique]
3 [L'accusé est introduit dans le prétoire]
4 [Le témoin est introduit dans le prétoire]
5 --- L'audience est ouverte à 12 heures 48.
6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Le juge Bonomy étant absent, nous
7 allons siéger en application du 15 bis, M. le Juge Kwon et moi-même.
8 Monsieur Paponjak, vous êtes toujours soumis à la déclaration
9 solennelle que vous avez faite.
10 Monsieur Milosevic, vous pouvez commencer.
11 LE TÉMOIN: RADOVAN PAPONJAL [Reprise]
12 [Le témoin répond par l'interprète]
13 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci, Monsieur Robinson.
14 Interrogatoire principal par M. Milosevic : [Suite]
15 Q. [interprétation] Bonjour Colonel.
16 R. Bonjour.
17 Q. Vers la fin de la journée de travail d'hier, nous avons vu un
18 enregistrement vidéo qui a été fait pour les besoins de l'enquête en date
19 du 19 mai.
20 R. Oui.
21 Q. Vous avez déjà précisé que ce jour-là, tout de suite après le
22 bombardement, vous êtes arrivé de la façon la plus rapide sur les lieux.
23 R. Oui, c'est exact.
24 Q. Avez-vous remarqué quoi que ce soit de caractéristique sur
25 l'enregistrement vidéo ? Est-ce que ce qu'on a pu voir et ce qui a été
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1 filmé le 19 ? C'est bien ce que vous avez vu vous-même quand vous êtes allé
2 là-bas ? Ce que je veux dire par là, c'est qu'on voit des pavillons
3 détruits. On voit de la fumée se dégager de certains bâtiments. On voit des
4 corps, des cadavres ensevelis. Qu'avez-vous vu de tout cela ? Est-ce que
5 ceci constitue l'enregistrement authentique de ce qui a été tourné ce jour-
6 là ?
7 R. Oui, c'est authentique. Cela a été fait par la police
8 scientifique du SUP de Pec, lorsqu'ils ont procédé au constat le même jour
9 dans l'après-midi. Je n'ai pas vu moi-même, la totalité des détails de ce
10 que j'ai vu sur la vidéo, parce que je ne suis pas entré dans toutes les
11 parties des bâtiments. Mais, j'ai vu les ruines que j'ai pu revoir ici sur
12 la vidéo et j'ai vu des parties de bâtiments où je suis entré. Je suis
13 entré, notamment, dans le bâtiment administratif et dans ce que l'on
14 appelait la caserne de la garde. J'ai été dans le bureau du directeur de
15 cette unité de détention qui était complètement démolie. Il y avait même un
16 gros trou béant dans le mur et le plancher a été enseveli. Les sièges
17 également étaient couverts de mortier, de bouts de murs écroulés, et
18 cetera.
19 Pour ce qui est des autres détails, s'agissant d'un pavillon où
20 étaient, jusque-là, logés les détenus, je ne suis pas allé à ce moment-là,
21 mais j'ai vu cela ici.
22 Ce que je regrette, c'est que nous ayons été privé hier de certains
23 détails que j'estime être très importants. En effet, la police scientifique
24 a filmé des éléments que nous n'avons pas pu voir ici et cela a notamment
25 trait --
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1 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Paponjak, je vous
2 remercie.
3 Monsieur Milosevic, je vous prierais de poser des questions au
4 témoin. Je n'aime pas, du tout, ces longues réparties narratives. Posez des
5 questions précises afin d'obtenir des réponses tout aussi précises.
6 L'ACCUSÉ : [interprétation] Très bien.
7 M. MILOSEVIC : [interprétation]
8 Q. Colonel, je vous redemanderais de répondre de la façon la plus
9 concise possible. Que constituent les éléments de la vidéo que nous avons
10 pu voir où, notamment, il y a des portes de défoncées, où l'on peut
11 constater que les détenus dans la panique survenue à l'occasion du
12 bombardement ont défoncé les portes de l'intérieur en s'efforçant de
13 s'enfuir de cet endroit.
14 R. C'est précisément de cela que je parlais. La police scientifique a noté
15 cela dans tous les détails. Les prisonniers ont quitté les différentes
16 pièces et ils ont procédé au défoncement des portes depuis l'intérieur pour
17 sortir de cet espace clos par peur du bombardement. Je n'ai pas
18 l'impression que leur intention était de fuir de la prison. Ils voulaient
19 juste se sauver des bombes qui allaient leur tomber dessus.
20 Q. Avez-vous vu les bouts de pieds de lits ou les tiges de fer qui ont été
21 utilisées pour enfoncer les portes ?
22 R. C'est ce qui a été décrit, mais on n'a pas entendu le son ni vu les
23 détails puisqu'on a passé cela en version accélérée, mais selon
24 l'enregistrement cela figure.
25 Q. Bien. Est-ce que vous avez pu conduire à un terme cette enquête ce
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1 jour-là, le 19 ?
2 R. Compte tenu des circonstances l'enquête a été terminée dans une
3 situation assez désordonnée. Il est vrai, nous nous attendions en effet à
4 ce que les attaques soient réitérées. Nous avons fait vite, mais je crois
5 que le constat a été fait, somme toute, assez bien compte tenu des
6 circonstances.
7 Q. Bien. Maintenant, je vous prierais de nous dire si vous savez quand
8 est-ce que la deuxième vague d'attaques a eue lieu ?
9 R. La deuxième attaque a eu lieu le 21 mai pour autant que je le sache. Il
10 y a un rapport détaillé de rédigé à ce sujet, mais comme cela de tête, je
11 crois qu'il s'agissait du 21 mai.
12 Q. Le 21 mai a-t-on diligenté l'enquête jusqu'au bout ?
13 R. Non.
14 Q. Qui est-ce qui a diligenté cette enquête ?
15 R. C'est le juge d'instruction du tribunal du département de Pec et
16 l'équipe correspondante du SUP de Pec.
17 Q. Bien, Colonel, est-ce que ce qui figure à l'intercalaire 8 ici et qui
18 est intitulé : "Informations relatives aux attaques aériennes de l'alliance
19 de l'OTAN sur l'unité de détention Dubrava à Istok le 19, 21 et 24 mai
20 1999, suite à quoi il y a eu décès et grands dégâts matériels," c'est
21 l'information rédigée par votre secrétariat à l'Intérieur ? Je vous demande
22 à présent de vous pencher sur ce document.
23 R. Oui, c'est bien ce document. Ce document a été rédigé au secrétariat de
24 l'Intérieur de Pec après son déménagement. Cela a été rédigé à Kragujevac.
25 Q. Est-ce que cette information se fonde sur la totalité de la
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1 documentation de l'instruction. Les enregistrements vidéo et les rapports
2 du juge d'instruction ?
3 R. Ainsi que sur les déclarations des témoins oculaires dont les
4 témoignages ont été recueillis par l'équipe d'instruction.
5 Q. Au dernier paragraphe de la première page, on dit que la deuxième
6 attaque aérienne de l'OTAN, et c'est ce qui répond à la question que je
7 vous ai posée tout à l'heure.
8 R. Oui, en effet.
9 Q. "Le 21 mai 1999, à plusieurs reprises entre 8 heures 20 et 10 heures 20
10 du matin, 20 obus de grande puissance de destruction."
11 R. C'est exact.
12 Q. On dit également qu'à l'occasion de cette attaque que l'adjoint du
13 directeur, un député au parlement fédéral, a été tué.
14 R. Oui, c'est Nexhmedin Kalicanaj.
15 Q. Oui. Nexhmedin Kalicanaj. Kalicanaj, était-ce un Albanais ?
16 R. Oui. C'était un Albanais, il était député fédéral au parlement fédéral.
17 Q. De Yougoslavie ?
18 R. Oui.
19 Q. On dit aussi, là je vais vous poser la question, on donne le chiffre
20 exact, on dit que : "Six détenus grièvement blessés ont été hospitalisés à
21 l'hôpital général de Pec."
22 R. Oui, c'est exact.
23 Q. Il en allait de même pour ce qui est d'une employée d'une infirmière
24 Repanovic Tanja.
25 Q. Bien. Combien de gens a-t-on tués à l'occasion de cette attaque ?
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1 R. On n'a pas pu le déterminer le jour même.
2 Q. Parce que les destructions étaient si grandes ?
3 R. Oui, en effet.
4 Q. On a vu dès le premier bombardement en date du 19 mai quelles ont été
5 les destructions, mais si on compare celles-ci avec ce qui s'est produit le
6 19, je dirais que ce bombardement était bien plus grave, bien plus sérieux
7 avec beaucoup plus d'obus à grande force de destruction, ce qui a détruit
8 les installations, chose qui n'était pas tout à fait le cas dans le premier
9 enregistrement. On peut le voir sur l'autre vidéo.
10 Q. Fort bien.
11 L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce qu'on peut voir maintenant
12 l'enregistrement fait le 21 mai, enregistrement des conséquences de la
13 deuxième attaque ?
14 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Combien de temps cela va-t-il
15 durer ?
16 L'ACCUSÉ : [interprétation] Cela dure six minutes 20 secondes. Si on la
17 passe en accéléré, cela nous donnera peut-être une minute et demie, ou
18 peut-être même pas. Une minute.
19 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Bien. Qu'on nous la passe.
20 [Diffusion de cassette vidéo]
21 L'ACCUSÉ : [interprétation] Vous pouvez voir la date du 21 mai à 11 heures
22 56. Le bombardement s'est effectué entre 8 heures 20 et 10 heures 20.
23 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous prie de prêter attention à ce qu'on
24 voit ici. Ce sont les détenus.
25 Ici, on voit les dégâts suite aux éclats d'obus.
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1 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Quand est-ce que cet enregistrement
2 a été effectué, Monsieur Paponjak ?
3 LE TÉMOIN : [interprétation] Cet enregistrement a été fait le 21 mai 1999,
4 sur le site.
5 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Le même jour que celui de
6 l'attaque ?
7 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Juste après l'attaque. Le 21 mai 1999.
8 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Qui est-ce qu'il l'a fait ?
9 LE TÉMOIN : [interprétation] La police scientifique du département de la
10 police de Pec.
11 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Est-ce que vous pouvez nous dire
12 combien de temps après les frappes aériennes cet enregistrement a été
13 fait ?
14 LE TÉMOIN : [interprétation] On peut le voir au niveau de l'enregistrement.
15 On voit l'heure du tournage. Je ne peux pas vous le dire par cœur. Si on
16 l'analyse, il nous sera facile de le déterminer. Nous sommes en situation
17 désavantagée parce que nous avons vu une version accélérée de cet
18 enregistrement.
19 L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, je vois.
20 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, je vois cela figure en page 2
21 dans le rapport.
22 L'ACCUSÉ : [interprétation] Dans le rapport lui-même on peut voir que
23 l'attaque aérienne s'est effectuée entre 8 heures 20 et 10 heures 20 du
24 matin et le constat sur les lieux a été entamé, comme on peut le voir dans
25 le rapport, à midi quarante-cinq, le constat lui-même, en présence du juge.
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1 La police a dû se déplacer avant lui, cela ne fait nul doute. La police
2 arrive, elle, avant le juge, elle est plus mobile, plus rapide, plus
3 efficace.
4 Dans cette information en page 2, il est dit qu'il y a eu de nouvelles
5 frappes aériennes et que le constat a été interrompu à
6 14 heures et on dit là que le juge d'instruction, Bojic, a subi des
7 blessures légères. Il a été tiré, à l'occasion de cette attaque-là,
8 quelques 20 obus.
9 R. Oui.
10 Q. On dit, ensuite, le même jour entre 17 heures et
11 18 heures 05, puis, à 23 heures 10, il y a eu plusieurs attaques aériennes
12 avec largage de plus de 40 bombes.
13 R. C'est exact. Alors, du point de vue médical, nous ne pouvons pas parler
14 d'une grande blessure, c'est une blessure légère, il a eu la clavicule
15 cassée et c'est ce que nous avons qualifié de blessure légère, mais il n'a
16 pas pu travailler. Il avait du mal à se déplacer, il a eu une interruption
17 de travail. Je l'ai rencontré ce jour-là.
18 Q. On dit que le jour d'après, le 22, à 6 heures 10, il y a eu une attaque
19 avec plusieurs bombes et l'hôpital qui se trouvait au sein du pénitencier a
20 été touché avec destruction de la centrale de chauffage, le motel, le
21 bâtiment administratif et les véhicules avec toute l'infrastructure.
22 R. Ceux qui sont venus savaient ce qui a été détruit le 21 et savent ce
23 qui a été détruit après. Il est facile de déterminer ce qui a été détruit
24 et à quelle date.
25 Q. Bien. Un autre renseignement figure à l'avant-dernier paragraphe qui
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1 dit : en date du 23 mai 1999, l'aviation de l'OTAN a survolé le ciel au-
2 dessus du pénitencier, raison pour laquelle il n'a pas été possible de
3 prendre les mesures nécessaires pour sauver les condamnés et les évacuer,
4 ainsi qu'il n'y a pas eu possibilité de procéder à la poursuite de
5 l'enquête. Vous n'avez pas pu continuer cela et vous avez dû revenir
6 après ?
7 R. Oui, il était difficile pour nous de nous accéder à ce secteur; il y a
8 bon nombre de personnes qui ont volé dans les airs, suite aux
9 déflagrations, entre autres le juge d'instruction; il était difficile de
10 s'attendre à ce que quelqu'un aille sur les lieux le lendemain même, alors
11 que les avions étaient encore en train de survoler.
12 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Etait-ce le même ensemble de
13 bâtiments qui ont été attaqués et endommagés le 21, tout comme le 19 ?
14 LE TÉMOIN : [interprétation] Il s'agit là d'un complexe de bâtiment entouré
15 d'une clôture et de quelques installations à l'extérieur de la clôture. Le
16 premier jour, j'étais sur place et j'ai pu voir qu'on a endommagé les
17 bâtiments à l'entrée. Le bâtiment administratif était à l'entrée et le
18 bâtiment suivant, c'était le bâtiment des gardes. C'est ce que j'ai vu.
19 Ensuite, on a endommagé les autres bâtiments à l'intérieur de l'enceinte et
20 on a endommagé certains bâtiments, le 19. Le 21, un autre nombre de
21 bâtiments et on les a endommagés davantage encore. Le jour d'après et le 24
22 et 25, lorsque l'équipe s'est déplacée, elle a vu des bâtiments endommagés
23 autres que ceux qui étaient endommagés le 21 mai.
24 On a pu déterminer de quelle façon systématique ce pénitencier a été
25 détruit; on peut le voir sur l'enregistrement vidéo, également.
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1 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci. Monsieur Milosevic, à vous.
2 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Paponjak, je reste sur le même
3 paragraphe. Vous avez dit que le 22, il y a eu une frappe aérienne de
4 l'OTAN avec plusieurs bombes larguées et que le 23, les avions de l'OTAN
5 ont survolé ce secteur du pénitencier. Sur quoi basez-vous cette
6 conclusion ? Est-ce que cela signifie que le 22 et 23, l'équipe
7 d'instruction était restée sur les lieux ?
8 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, l'équipe n'est pas restée. Mais le 21,
9 ils ont déterminé ce qui a été détruit ce jour-là. Lorsqu'ils sont revenus
10 le 24, ils ont constaté tout ce qui a été détruit en sus de ce qu'ils ont
11 constaté comme détruit le 21.
12 C'est partant de là qu'on a pu conclure que la salle de chauffage, le
13 motel, les véhicules de transport, le parc automobile ont été détruits
14 complètement parce que cela n'avait pas été le cas le 21, lorsqu'ils sont
15 passés là-bas. Je ne sais comment vous expliquer autrement.
16 Si, aujourd'hui, ce verre est ici, sur ce pupitre et que deux jours après,
17 je constate que cela a été cassé, je conclus que cela a été cassé entre mon
18 dernier passage et mon arrivée, à présent.
19 On ne pouvait pas faire autrement, compte tenu des bombardements.
20 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Comment savez-vous que cela a été fait
21 suite à des bombardements de l'OTAN ou du fait des bombardements de
22 l'OTAN ?
23 LE TÉMOIN : [interprétation] Parce qu'on a entendu les bombes tomber sur ce
24 secteur. C'est à peine à trois kilomètres d'Istok.
25 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ma question est celle qui porte sur la
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1 source de votre information. Vous dites que l'équipe chargée de
2 l'instruction n'est pas restée dans ce centre pénitentiaire et vous
3 maintenez l'affirmation au terme de laquelle il y a eu bombardement de
4 l'OTAN. De la bouche de qui avez-vous appris cela ou quel est le fondement
5 qui vous permet de l'affirmer ? C'est là ce que je veux vous demander.
6 LE TÉMOIN : [interprétation] Le 24 mai, il y a eu un déplacement de
7 l'équipe du SUP, du secrétariat à l'Intérieur et cette équipe a déterminé
8 ce qu'elle a constaté, une fois arrivée là-bas. La situation qu'ils ont
9 constatée différait de ce qu'ils avaient constaté le 21.
10 M. MILOSEVIC : [interprétation]
11 Q. Mais Colonel, ils étaient là-bas le 21, c'est ce que dit le rapport.
12 Vous êtes en train de parler de l'espace de temps entre le 21 et le 24.
13 R. Oui.
14 Q. Je vous prie maintenant de vous pencher sur ce qui figure à
15 l'intercalaire 46. Au 46, vous avez des documents émanant du juge
16 d'instruction --
17 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Milosevic, allons-nous quitter
18 l'intercalaire numéro 8 ou est-ce que vous allez y revenir ?
19 L'ACCUSÉ : [interprétation] S'agissant de l'intercalaire 8, il s'agit là
20 d'une information émanant de la police; l'intercalaire 46 coïncide avec les
21 renseignements fournis à l'intercalaire 8. Pour les besoins de l'étude que
22 nous effectuons ici, cela constitue un tout. Le 46 est un rapport ou un PV
23 de constat et ce constat, lui, a été effectué en la date du 21 mai.
24 Je vous prie de placer ce PV, ce constat figurant à l'intercalaire 46 sur
25 le rétroprojecteur et nous pourrions brièvement le parcourir.
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1 M. MILOSEVIC : [interprétation]
2 Q. Ici, dans ce PV, il est dit, en première page : "L'équipe de permanence
3 du tribunal départemental de Pec avec M. S. Bojic, le juge d'instruction,
4 en date du 21 mai 1999, est sorti sur les lieux à midi quarante-cinq --"
5 C'est exactement l'heure qui figure dans l'information fournie par le SUP,
6 à savoir que le constat sur les lieux a commencé à midi quarante-cinq.
7 C'est le paragraphe 3, intercalaire 8, on dit que Vladan Bojic a entamé ce
8 rapport en présence du SUP de Pec.
9 Ici, il y une autre phrase à l'intercalaire 8, paragraphe 3, que je
10 n'ai pas lu, mais je vais en profiter pour en donner lecture, maintenant :
11 "Le constat a été fait en présence de dizaines de journalistes étrangers et
12 du pays, lui-même." A l'heure du constat, en date du 21 mai, il y avait des
13 dizaines de journalistes nationaux étrangers.
14 Est-ce que c'est là un renseignement dont vous disposeriez également,
15 Colonel ?
16 R. Oui
17 Q. Partant des renseignements qui figurent ici, les journalistes étaient
18 présents tant le 21 que le 24 ?
19 R. Oui.
20 Q. Bien. On dit dans ce rapport, dans ce constat que partant des
21 renseignements fournis par le MUP, qu'il a été déterminé l'heure des
22 bombardements entre 8 heures 20 et 10 heures 20, étant donné que le juge
23 d'instruction est sorti à midi quarante-cinq. C'est à ce moment-là qu'il
24 indique qu'il y a eu un nombre indéterminé de personnes de tuées, qu'il y a
25 eu de gros dégâts matériels et il précise qu'en plus du juge d'instruction,
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1 il y a un dénommé Zoran Stankovic, policier de police scientifique et un
2 certain Ilincic et un certain Ristovic, qui étaient des techniciens en
3 matière de police scientifique, qui y ont pris part.
4 Est-ce que ce sont les gens qui sont chargés de l'enregistrement
5 vidéo ?
6 R. Oui, c'est exact.
7 Q. Pour finir avec ce premier chapitre du rapport, premièrement, on dit,
8 examen des lieux, des objets et des traces et il indique : "Suivant le
9 rapport de police, les lieux ont été sécurisés dès la cessation des
10 bombardements, à savoir, à
11 10 heures 30 et qu'entre ce moment-là et le début du constat, rien n'a été
12 déplacé. Il n'y a que les blessés graves et légers qui ont été évacués pour
13 hospitalisation." On parle de l'hospitalisation de différentes personnes,
14 A la fin du paragraphe, on dit : "Il a été largué 20 bombes aériennes
15 avec décès d'un nombre indéterminé de détenus."
16 Nous n'allons pas nous attarder sur tout le reste des descriptions de
17 l'aspect des lieux. Mais lui aussi indique dans ce PV qu'à l'occasion de
18 l'établissement du constat, il y a eu présence de dizaines de journalistes
19 nationaux et étrangers qui, après s'être attardés brièvement là, se sont
20 éloignés rapidement à bord de plusieurs véhicules de tourisme.
21 R. Plus tard, on a raconté des choses à ce sujet, sur la raison pour
22 laquelle les journalistes étaient parties le plus rapidement possible.
23 Nous, on a estimé que c'était parce ce qu'ils voulaient préparer leurs
24 articles le plus rapidement possible.
25 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Les interprètes vous demandent de
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1 ralentir, de faire une pause entre les questions et les réponses.
2 L'ACCUSÉ : [interprétation] J'y veillerai, Monsieur Robinson.
3 M. MILOSEVIC : [interprétation]
4 Q. Veuillez, s'il vous plaît, vous reporter au dernier paragraphe de ce
5 rapport où il est dit : "Depuis les murs de l'enceinte qui sont en ruine,
6 on entendait des cris, des appels au secours. Les gardes de cette prison
7 qui ont survécu à ce bombardement impitoyable paraissaient terrorisés,
8 bouleversés. L'objectif consiste à transporter les victimes dont on pouvait
9 voir les corps dans les ruines. Pendant la conversation avec le directeur,
10 dans une tente improvisée, les bombardements ont repris. L'enquête sur les
11 lieux a été interrompue." Ce jour du 22 [comme interprété], l'enquête s'est
12 interrompue ?
13 R. Oui.
14 Q. Ensuite, à la page numéro 2, on voit le titre suivant : "Poursuite de
15 l'enquête sur les lieux." On explique ce qui s'est passé, on explique que
16 c'est la même équipe qui revient le
17 24 mai 1999 avec l'adjoint du procureur de Pec, Slobodan Radovic; il
18 revient sur lieux pour poursuivre l'enquête sur les lieux ?
19 R. C'est ce que je disais. J'ai parlé de ce qui avait été établi à ce
20 moment-là et précédemment, en tenant compte de ce qui s'était passé dans
21 l'intervalle.
22 Q. "L'impact terrible de ces journées de bombardement est apparu pendant
23 la visite. Dans la cantine de la prison, il y avait plusieurs de dizaines
24 de prisonniers morts. Il y avait une ouverture dans le plafond et dans le
25 toit. Les techniciens de la police scientifique ont récupéré des débris de
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1 bombes dans les zones gazonnées."
2 Est-ce qu'on peut voir cela dans l'enregistrement vidéo ?
3 R. Oui, on peut même voir l'impact des bombes; on peut voir le nombre de
4 bombes. Mais il y a beaucoup de choses qu'on n'a pas pu voir correctement
5 parce qu'on a passé l'enregistrement en avance rapide.
6 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Robinson, je sais que l'enregistrement
7 vidéo, dans sa totalité 50 minutes d'enregistrement, a été versé au
8 dossier. Si on souhaite le voir, on peut le voir et vous-mêmes, vous
9 pourrez également le visionner, si vous le souhaitez. C'est avec votre
10 approbation que cet enregistrement a été passé en accéléré.
11 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, c'est exact.
12 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je souhaiterais intervenir, une fois
13 encore. Je voudrais savoir si le document que nous avons à l'intercalaire
14 numéro 46 est un rapport complet établi par le juge d'instruction chargé de
15 l'enquête sur les lieux ?
16 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.
17 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais à l'intercalaire
18 numéro 46, on ne fait pas référence aux bombardements de l'OTAN du
19 22 mai, ni aux passages d'avions de l'OTAN, le 23 mai. Or, c'est quelque
20 chose qui est mentionné à l'intercalaire 8.
21 Précédemment, je vous avais posé la question de savoir d'où venaient
22 ces informations, sur quoi elles reposaient parce qu'on ne trouve rien qui
23 soit en rapport avec cela à l'intercalaire numéro 46.
24 LE TÉMOIN : [interprétation] Le juge d'instruction décrit la situation
25 telle qu'il la trouve sur les lieux avec les informations qu'il a peut-être
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1 reçus de notre part, sur les lieux.
2 S'agissant des événements en question, s'agissant du bombardement, ce
3 sont les équipes compétentes du ministère de l'Intérieur et de l'armée de
4 la Yougoslavie qui en ont gardé la trace. On a procédé à des
5 enregistrements, on a établi des rapports qui ont été envoyés au ministère
6 de l'Intérieur, au secrétariat de l'Intérieur de Pec, transmis, alors, à
7 l'état-major, au ministère de l'Intérieur. C'est à partir de ces rapports,
8 à partir de ces mémos qu'on a préparés le rapport que nous venons
9 d'examiner.
10 Ce qu'on a vu dans l'intercalaire précédent, ce n'était pas un
11 document qui avait été réalisé sur la base de l'enquête sur la base des
12 lieux uniquement, mais sur la base des déclarations faites par toutes les
13 personnes ayant participé à cela. Or, nous avons, ici, un rapport qui a été
14 établi par le juge d'instruction chargé d'enquêter sur les lieux. Ceci met
15 en jeu divers mémos, télégrammes, rapports, et cetera.
16 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Maître Kay.
17 M. KAY : [interprétation] L'intercalaire 46.3, c'est un document qui pourra
18 peut-être vous apporter quelques éclaircissements, la dernière phrase, des
19 notes que l'on trouve dans ce document.
20 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci, Maître Kay.
21 Oui, Monsieur Milosevic.
22 M. MILOSEVIC : [interprétation]
23 Q. Dans ce qui est dit sur la poursuite de l'enquête, il est dit que l'on
24 a pu mettre en évidence les conséquences catastrophiques de plusieurs jours
25 de bombardements. Il est dit que plusieurs dizaines de prisonniers ont été
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1 trouvés morts dans la cantine, et que les techniciens de la police
2 scientifique ont récupéré des débris, des éclats de bombes qui ont touché
3 le complexe.
4 Ensuite, il est dit : "L'équipe chargée de l'enquête sur les lieux a
5 quitté les lieux avec les journalistes. L'enquête sur les lieux s'est
6 terminée à 15 heures 10." Ensuite, on voit que le 25 mai, l'enquête sur les
7 lieux s'est poursuivie. On s'est rendu de nouveau sur les lieux. Une fois
8 encore, à ce moment-là, on a pu constater que des avions de l'OTAN ont
9 survolé la zone. Je cite : "Etant donné l'absence de garantie en matière de
10 sécurité, j'ai donné l'ordre aux techniciens de la police scientifique de
11 procéder à la photographie de la zone, de faire des croquis, de procéder
12 aux enregistrements vidéo de manière aussi rapide que possible. J'ai
13 ensuite ordonné à ce qu'on enlève tous les cadavres récupérés dans les
14 ruines pour les emmener à l'hôpital albanais du village de Donja Susica à
15 quelques kilomètres de là, en direction de Kosovska Mitrovica et de Zubin
16 Potok. J'ai ensuite ordonné à ce que l'on procède à la prise des empreintes
17 digitales de manière individuelle. J'ai également demandé à ce que l'on
18 procède à l'enquête de tous les corps, enquête superficielle. Ceci a été
19 réalisé par le médecin Stijovic de l'hôpital de Pec. Cette procédure a duré
20 jusqu'à 10 heures le 26 mai.
21 "On a enregistré, ou on a trouvé 93 corps dans la prison.
22 "Une fois que toutes les activités d'enquête scientifique ont été
23 réalisées, j'ai ordonné que l'on procède à l'enterrement des corps
24 conformément à la loi."
25 Ensuite, il est dit que toutes les observations prévues par la
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1 législation étaient réalisées de manière adéquate, et que les documents
2 relatifs à l'enquête scientifique constituent une partie intégrante de
3 l'enquête. Ils sont d'ailleurs placés en pièces jointes du rapport.
4 Nous venons d'examiner le document 46.1. J'aimerais maintenant que l'on
5 passe au document 46.2.
6 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous venons de recevoir à l'instant une
7 traduction de ce document.
8 M. MILOSEVIC : [interprétation]
9 Q. Miroslav Ristovic et Zoran Ljusic, des représentants agréés du SUP de
10 Pec, sont les rédacteurs de ce mémo le 21 mai 1999. Ils expliquent ce
11 qu'ils ont vu dans l'entrée en se déplaçant sur les lieux. Ils expliquent
12 ce qu'ils ont vu au niveau de l'enceinte de la prison, dans les murs. Il
13 est dit que c'est dans les pavillons 13, 12, 7, 2, 3 et 4, que l'on a pu
14 constater les dégâts les plus importants, c'est-à-dire, six pavillons où
15 étaient hébergés les prisonniers. D'après ceux qui ont rédigé ce rapport,
16 ces bâtiments étaient très endommagés, en particulier le pavillon numéro 5
17 qui est celui de la surveillance spéciale. Je cite :
18 "On peut constater la présence de cratères importants dans la partie
19 supérieure de ces bâtiments.
20 "Cependant, pendant que cette enquête se poursuivait, une autre
21 attaque a été lancée par les avions de l'agresseur, si bien que l'enquête a
22 dû être interrompue."
23 Le juge d'instruction Vladan Bojic a été grièvement blessé lorsqu'une
24 des bombes ainsi lancée a explosé -- larguée a explosé.
25 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous êtes en train de témoigner
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1 vous-même. Je vous prie de poser les questions au témoin comme il se doit.
2 L'ACCUSÉ : [interprétation] Tout à fait, Monsieur Robinson.
3 M. MILOSEVIC : [interprétation]
4 Q. Je viens de donner lecture de certains extraits d'un mémo. Je voudrais
5 savoir quand il a été rédigé ?
6 R. Il a été rédigé tout de suite après les événements, et il a été joint
7 au dossier. Il y a eu plusieurs mémos de ce type établis en rapport avec
8 cet incident. Ce rapport a trait aux dégâts constatés ainsi que
9 l'interruption de l'enquête sur les lieux au fait que le juge d'instruction
10 a été blessé.
11 Q. Quand ce document a-t-il été préparé ?
12 R. Le 21 mai 1999.
13 Q. Tout ce que nous avons lu a été rédigé ce jour-là ?
14 R. Oui.
15 Q. S'agissant des pavillons, des sept pavillons qui ont été endommagés,
16 c'est une observation qui a été faite le 21 mai 1999 ?
17 R. Oui, tout à fait.
18 Q. A l'intercalaire 46.3, nous avons un autre mémo. Je voudrais savoir qui
19 l'a préparé. 46.3.
20 R. Ceci a été préparé par le juge d'instruction Vladan Bojic à Pec, le 22
21 mai 1999, c'est-à-dire, le jour où Vladan Bojic, le juge d'instruction, a
22 rédigé lui-même ce mémo.
23 Q. Veuillez nous dire quelle est la teneur de ce document. Je ne veux pas
24 donner lecture, je ne veux pas déposer moi-même. Qu'a noté le juge
25 d'instruction Vladan Bojic dans ce mémoire officiel du 22 mai 1999 ?
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1 R. Le juge Bojic a constaté : "Qu'au cours de l'enquête sur les lieux à la
2 prison de Dubrava côté d'Istok, le 21 mai 1999, une enquête qui a débuté à
3 13 heures et qui a duré jusqu'à presque
4 13 heures 40, lui-même et son équipe chargée de l'enquête sur les lieux ont
5 été soumis de manière tout à fait directe aux bombardements de l'OTAN. Il
6 n'y avait dans les champs qui entouraient la prison aucun endroit pour se
7 cacher. Les bombes sont tombées à quelques dizaines de mètres de moi.".
8 "Cette situation sans espoir a duré quelque 40 minutes, au cours de
9 laquelle quelque 15 à 20 bombes ont été larguées par les avions. Ceci nous
10 a mis grandement à l'épreuve. J'ai essayé avec l'adjoint du poste d'Istok
11 M. Pantic, j'ai essayé d'évacuer les personnes qui se trouvaient là. J'ai
12 été touché par le souffle d'une explosion qui m'a envoyé à quelque 10
13 mètres de là. J'ai perdu conscience brièvement. J'ai quitté ensuite
14 l'endroit avec le groupe qui m'accompagnait. J'ai souffert de contusions
15 légères, de commotion légère, et j'ai également souffert d'une fracture et
16 de contusions au niveau de la clavicule et de l'épaule gauche. J'ai
17 souffert de vomissements constants. Je saignais également du nez. On a
18 soigné mon épaule, on l'a pansée, et on m'a fait une piqûre de Trodon; une
19 piqûre d'analgésique."
20 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Bien. Si tout ce que le témoin a
21 l'intention de faire c'est de donner lecture de la déclaration, nous
22 pouvons le faire nous-même. Si vous avez des questions à poser, faites-le.
23 L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui.
24 M. MILOSEVIC : [interprétation]
25 Q. J'avais à l'esprit la question qui avait été posée par
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1 M. Kwon il y a quelques instants, quand il s'informait de la source de
2 toutes ces données relatives aux bombardements de l'OTAN. Ici, on voit
3 qu'il y a un rapport réalisé par le juge d'instruction, et que pendant
4 qu'il était sur les lieux lorsque le bombardement s'est poursuivi. On le
5 voit dans le premier paragraphe, où il dit qu'il y avait des bombes
6 partout. Il explique que ce bombardement a duré jusqu'à 13 heures 40. J'ai
7 pu le voir personnellement depuis Itsok. "On s'était installé de manière
8 temporaire ici."
9 Je viens de donner lecture du rapport. A quelle distance se trouve la
10 prison d'Istok ?
11 R. Trois kilomètres. J'y suis allé ce même jour. Je m'en souviens très
12 bien, quand je suis entré dans le bureau, tout le monde était allongé par
13 terre. Je me suis interrogé. J'ai dit : Pourquoi est-ce que vous êtes là
14 tous allongés par terre ? On aurait dit que tout le monde avait été frappé
15 par la fièvre typhoïde. Tout le monde vomissait.
16 M. NICE : [interprétation] Je l'ai dit hier. Bien sûr, nous avons reconnu
17 qu'il y avait des bombardements les 19 et 20 mai. Nous le disons depuis le
18 début. Je ne sais pas où l'accusé veut en venir, ou il pense qu'il veut en
19 venir s'il pose ce genre de questions.
20 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Que cherchez-vous à prouver,
21 Monsieur Milosevic ? L'existence de bombardements n'est pas contestée.
22 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Reconnaissez-vous qu'il y a eu un
23 bombardement dans la matinée du 22 ?
24 M. NICE : [interprétation] Non, pas le 22. Nos informations concernent le
25 19 et le 21. Si du 21 cela se poursuit au 22, je ne sais pas. Je pourrais
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1 peut-être vérifier d'ici à lundi.
2 L'ACCUSÉ : [interprétation] Une seule chose.
3 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, Monsieur Milosevic.
4 L'ACCUSÉ : [interprétation] Vu ce que vient de dire M. Nice, à savoir qu'il
5 ne conteste pas qu'il y a eu des bombardements. Il y a une différence quand
6 même entre ce qui est cité ici dans le rapport ou dans la note officielle
7 du juge d'instruction. On parle de
8 93 cadavres dans ce rapport officiel. Il n'y a pas eu que des
9 bombardements. Ce document, en plus, montre que 93 personnes ont été tuées
10 par les bombardements. Il y a encore plus de tués. Je vous rappelle que le
11 juge Marinkovic vous a montré le dossier de trois personnes qui étaient
12 mortes à l'hôpital de Lipjan à la suite de leurs blessures. Ici, nous
13 voyons une personne qui est morte à l'hôpital de Pec. Je pense que le
14 colonel en a parlé dans sa déposition auparavant.
15 M. MILOSEVIC : [interprétation]
16 Q. Colonel, dites-nous --
17 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Attendez, attendez Monsieur
18 Milosevic.
19 [La Chambre de première instance se concerte]
20 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Nice, je crois comprendre
21 que ce que fait valoir M. Milosevic, c'est que le nombre de personnes
22 répertoriées à l'annexe J, dont on dit qu'elles ont été tuées dans la
23 prison, qu'en fait, ces personnes étaient peut-être des victimes du
24 bombardement. C'est dans cette mesure que l'élément de preuve concernant
25 les bombardements est important pour déterminer le nombre de personnes
Page 39161
1 tuées. Nous n'avons pas de noms, mais il s'agit là d'un élément de preuve
2 pertinent.
3 M. NICE : [interprétation] Oui, si c'est cela que cela veut prouver,
4 d'accord. Nous avons eu un récit des plus généreux sur des questions qui ne
5 sont pas contestées. C'est à l'accusé de décider de la façon dont il divise
6 le temps qu'il lui est consacré.
7 M. KAY : [interprétation] L'acte d'accusation parle des premières heures du
8 22 mai, et nous avons vu cette note officielle que je vous ai indiquée, qui
9 concerne cette période.
10 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie.
11 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, est-ce que vous
12 allez présenter des éléments plus précis en rapport plus direct nous
13 donnant le nom des personnes énumérées à l'annexe J.
14 L'ACCUSÉ : [interprétation] Malheureusement, je n'ai pas réussi à trouver.
15 Je peux demander au colonel si nos services ont ces noms. N'oubliez pas que
16 ces notes officielles, elles ont été établies les 25 et 26. Il s'agit de
17 celles qui figurent à l'intercalaire 46.1. C'est juste 10 jours avant la
18 fin de la guerre. A ce moment-là, vous savez que nos services se sont
19 retirés après le 10 juin. En d'autres termes, nos services n'ont pas été à
20 même de poursuivre les constats détaillés pour retrouver notamment ces
21 noms. Je tiens à prouver ici que les autorités, les services, ont fait tout
22 ce qui était en leur pouvoir, tout ce que prévoyait la loi vu les
23 circonstances, qu'ils ont fait l'impossible pour faire ce qu'ils pouvaient
24 faire.
25 Prenez l'intercalaire 46.4. Celui-ci vous montre les photographies
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1 prises par la police scientifique. On voit certains cadavres suite à
2 l'agression de l'OTAN. C'était à Pec, le 26. Oui. Il y a une note
3 manuscrite, 26. Pec 164/8, c'est le numéro. La date, c'est celle du 26 mai
4 1999. Vous voyez une mention manuscrite.
5 Ensuite, vous avez toutes ces photographies. Elles sont estampillées.
6 Ce sont les photographies prises des personnes qui ont été tuées sur ces
7 lieux. C'est un document officiel vous montrant les décès provoqués par des
8 bombardements de l'OTAN. Cela se termine le 26. C'est à ce moment-là que le
9 rapport a été établi. La deuxième partie de cet intercalaire, vous avez les
10 empreintes digitales qui ont été relevées afin de déterminer le nombre de
11 cadavres et le nombre d'empreintes digitales pour essayer de faire un
12 recoupement entre les empreintes digitales et les photographies des
13 cadavres. Les autorités ont fait l'impossible. Leurs activités ont été
14 interrompues le 10 puisque, après cette date du 10 juin, ils ne disposaient
15 plus des faits nécessaires leur permettant la poursuite de l'enquête.
16 Si vous prenez la partie 3, nous avons des images qui ont été filmés
17 le 24 mai. Cela ne va pas durer très longtemps si on le fait en diffusion
18 rapide. Nous avons aussi des images filmées le 25, qui vous montrent
19 comment ces corps ont été enterrés. Chaque cadavre a été filmé par caméra
20 vidéo avant d'être enterré. Vous allez avoir la description d'un
21 fonctionnaire de ce qui a pu être constaté, et chaque cadavre reçoit un
22 numéro. Les autres mesures judiciaires, juridiques sont prises.
23 Ce que j'essaie de démontrer, c'est que les autorités ont fait tout
24 ce qui était en leur pouvoir pour essayer de découvrir l'identité de ces
25 corps, pour les répertorier, photographies, empreintes digitales, afin
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1 d'établir l'endroit où ces personnes ont été enterrées. Vous allez voir
2 cela sur la séquence vidéo. Ils étaient 93. Vous les verrez tous dans
3 l'ordre où on s'est occupé de chacun de ces corps, les numérotant, les
4 enterrant, et cetera ainsi que le lieu où ils ont été enterrés.
5 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Qu'est-ce que vous essayez de
6 prouver ?
7 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je prouve par là que ce sont des victimes
8 des bombardements de l'OTAN, comme le dit ce document. Cela prouve que la
9 police a fait tout ce qu'elle pouvait pour déterminer l'identité de ces
10 cadavres, puisqu'elle les a filmés, a relevé des empreintes digitales, les
11 a numérotés, indiqué le lieu de l'enterrement, de la sépulture afin que
12 tout ceci soit consigné pour une enquête ultérieure. Ce sont des faits que
13 la police, le juge d'instruction avaient en ce moment-là. Il n'y a pas un
14 seul fait qui n'aurait pas été consigné.
15 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Est-ce que ce sont là des personnes
16 citées à l'annexe J.
17 L'ACCUSÉ : [interprétation] Ce document-ci ne comporte pas un seul nom.
18 L'annexe J n'a pu être établie en tant que liste que plus tard parce que
19 quand l'enquête a été faite, seuls certains corps avaient été notifiés, et
20 je n'ai pas comparé ces noms avec ceux de la liste J. Il est manifeste
21 qu'en fait il y a eu des bombardements très puissants. Vous avez vu la
22 destruction de sept pavillons. Vous avez vu les séquelles de ces
23 bombardements et 93 cadavres ont été sortis des décombres.
24 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Fort bien, nous allons voir cette
25 séquence vidéo puis nous devrons lever l'audience.
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1 [Diffusion de la cassette vidéo]
2 LE TÉMOIN : [interprétation] Vous voyez des matelas, des couvertures. Là,
3 c'est un membre de l'équipe scientifique qui retire la couverture qui
4 recouvrait les cadavres.
5 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] C'est bientôt terminé ?
6 L'ACCUSÉ : [interprétation] C'est très court. La séquence est très courte,
7 et quand on a fait un avancé rapide, c'est pratiquement terminé, je pense.
8 [Diffusion de la cassette vidéo]
9 M. MILOSEVIC : [interprétation]
10 Q. Est-ce que là c'est la cantine ?
11 R. Oui.
12 Q. Est-ce que vous êtes parvenu à lire ce qui est inscrit ?
13 R. Si c'était diffusé en débit normal, bien sûr, ce serait possible
14 de le lire.
15 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que les gens sont morts là où ils
16 gisaient, là où les cadavres se trouvaient, là où on les voit ?
17 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, vous le voyez, vous pouvez le constater
18 vous-même.
19 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Dans la cantine par exemple, est-ce
20 qu'on voit la preuve qu'il y a eu des bombes qui sont tombées à l'intérieur
21 de la cantine ?
22 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, bien sûr. Je sais qu'il est très
23 difficile de regarder ce genre d'images. Pour moi c'est pénible aussi. Mais
24 si vous regardez avec soin, avec attention vous pourrez récolter pas mal
25 d'informations. C'est peut-être une perte de temps pour vous.
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1 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Au moment où ces images sont filmés on
2 n'avait pas déplacé les corps de l'endroit où ces personnes avaient perdu
3 la vie ?
4 LE TÉMOIN : [interprétation] Cela je ne sais pas. Je ne sais pas si on les
5 a déplacés ou pas. C'est là qu'on les a trouvés lorsque l'équipe
6 scientifique chargée de l'enquête est arrivée sur les lieux.
7 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Il y a beaucoup de détenus qui sont
8 morts à l'extérieur, là dans cet espace dégagé que nous avons vu.
9 LE TÉMOIN : [interprétation] Exactement.
10 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Kwon, j'attire votre attention et je
11 vais d'ailleurs le reprendre dans mes questions, mais vous avez vu un grand
12 nombre de matelas, de couvertures à l'extérieur. Après les premières
13 destructions, ces gens ont quitté les lieux, et ils ont sorti les matelas
14 et couvertures pour pouvoir sortir dehors. C'était la fin de mai.
15 M. NICE : [interprétation] Je crois que la journée est terminée.
16 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, vous savez que
17 ceci n'est pas permis.
18 L'audience va être levée, elle reprendra lundi.
19 M. NICE : [interprétation] Très rapidement, peut-on rappeler au témoin
20 qu'il n'est censé parler à personne de sa déposition, parce que cet
21 avertissement n'a pas encore été transmis. Puis là, je prévoie le
22 calendrier. Ce témoin manifestement va occuper toute la journée de lundi,
23 et peut-être une partie de la journée de mardi.
24 Le témoin suivant est prévu pour une durée de 12 heures, l'interrogatoire
25 principal, ce qui va durer la semaine et une partie de celle d'après. On
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1 peut s'attendre à ce que dans quinze jours donc, le contre-interrogatoire
2 va occuper le reste de la semaine.
3 Jasovic devrait comparaître le 17, mardi. J'aurais à ce moment-là terminé
4 mon enquête. Pas de problème dès lors, mais je dois m'occuper de Jasovic,
5 et je ne pourrai peut-être pas être ici pendant un jour, voire plus, au
6 cours de cette semaine-là.
7 Si ce genre de problème se pose, on pourrait aisément le régler en
8 disant que le témoin suivant sera entendu, et que Jasovic pourrait revenir
9 à la fin de la déposition, donc dans deux semaines.
10 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] A la fin de la déposition du témoin
11 suivant ?
12 M. NICE : [interprétation] Oui. Dans deux ou trois semaines, parce que le
13 contre-interrogatoire de Jasovic, je ne sais pas, je n'ai pas encore
14 terminé, pourrait être assez considérable. Il ne serait pas bon de le
15 mettre en sandwich entre deux témoins importants.
16 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Nous n'allons pas nous prononcer sur
17 la question maintenant. Nous allons l'examiner et nous vous ferons part de
18 notre décision plus tard.
19 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Maintenant vous demandez à surseoir au
20 contre-interrogatoire du présent témoin ?
21 M. NICE : [interprétation] Non, non. Nous pourrons le contre-interroger
22 lundi. A moins que l'accusé n'ait encore besoin de temps, je pourrais
23 terminer lundi, afin qu'on puisse commencer le témoin suivant, Stevanovic
24 mais nous verrons.
25 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci, Monsieur Nice.
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1 Avant de lever l'audience, je tiens à vous dire, Monsieur Paponjak,
2 que vous n'êtes pas autorisé à parler de votre déposition avec qui que ce
3 soit. Ceci inclut bien sûr l'accusé. Ceci reste d'application jusqu'à
4 votre retour en audience lundi. Vous me comprenez ?
5 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, oui, j'ai tout compris.
6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Fort bien, l'audience est levée.
7 --- L'audience est levée à 13 heures 57 et reprendra le lundi 9 mai 2005, à
8 9 heures 00.
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