Page 39272
1 Le mardi 10 mai 2005
2 [Audience publique]
3 [L'accusé est introduit dans le prétoire]
4 [Le témoin est introduit dans le prétoire]
5 --- L'audience est ouverte à 9 heures 04.
6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur McCormack, nous sommes
7 ravis de vous voir ici présent. Vu la mission qui vous est confiée, nous
8 pensons que vous devriez être ici le plus souvent possible.
9 M. McCORMACK : [interprétation] Merci beaucoup.
10 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je suis sûr que vous serez d'une
11 grande utilité à la Chambre lorsque nous allons arriver dans la dernière
12 ligne droite de ce procès.
13 Monsieur Nice, vous avez la parole.
14 M. NICE : [interprétation] Un instant, s'il vous plaît, Monsieur le
15 Président.
16 LE TÉMOIN: RADOVAN PAPONJAK [Reprise]
17 [Le témoin répond par l'interprète]
18 Contre-interrogatoire par M. Nice : [Suite]
19 Q. [interprétation] Je dois revenir à quelques éléments qui se sont
20 produits en 1998, mais sinon passons directement à 1999.
21 M. NICE : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président, Messieurs
22 les Juges, nous accusons un certain retard ce matin, mais cela ne va pas
23 vous gêner mis à part ce petit moment d'hésitation.
24 Q. Lorsque vous déposiez en interrogatoire principal, je ne peux pas
25 reprendre vos propos précis, mais vous avez dit que le fait de tuer des
Page 39273
1 gens lorsqu'on s'occupait de terroristes c'était vraiment un dernier
2 recours, un ultime recours, n'est-ce pas ?
3 R. A peu près. L'objectif a toujours été de priver les terroristes de leur
4 liberté ou de résoudre le problème autrement.
5 Q. Qui était le lieutenant-colonel Blagoje Djordjevic ?
6 R. C'était le chef du département de police, secrétariat de l'Intérieur à
7 Pec.
8 Q. Veuillez examiner cette pièce, la pièce 319, intercalaire 32. Vous avez
9 l'original. Vous allez constater qu'il s'agit d'un document produit par
10 Djordjevic approuvé par votre chef, le chef de police Borislav Vlahovic.
11 M. NICE : [interprétation] Monsieur l'Huissier, est-ce que vous auriez
12 l'obligeance de placer la dernière page du document sur le rétroprojecteur.
13 On ne voit rien. Je ne vois rien apparaître à l'écran. Maintenant cela
14 marche, merci.
15 Q. Nous voyons que cela a été établi par Djordjevic, et on voit en bas de
16 page, approuvé par Vlahovic. Revenons à la première page, tout en haut,
17 nous avons quelque chose en rapport avec votre territoire : "Conformément à
18 l'accord passé avec les membres du SUP de Djakovica et des membres du
19 service de la Sûreté de l'Etat du SUP, donc le secrétariat de l'Intérieur à
20 Pec et Djakovica…". Puis, on parle au niveau du "plan d'embuscade" pour ce
21 qui est de "l'ordre d'exécution" ceci devrait s'établir du 24 au 31 janvier
22 1999, et ce plan d'embuscade précise qu'il a pour objectif : "D'empêcher
23 les déplacements des terroristes sur la route locale susmentionnée,
24 d'éliminer lesdits terroristes…"
25 Ce n'est pas seulement qu'une question de capture. Il s'agit ici
Page 39274
1 d'éliminer. Qu'en dites-vous ? Est-ce qu'en 1999, on ne voulait plus
2 capturer les terroristes, on voulait les liquider, n'est-ce
3 pas ? Est-ce que vous pourriez répondre à cela ?
4 R. Tout d'abord, je dois dire que le papier que j'ai sous les yeux n'est
5 pas signé par Blagoje Djordjevic, comme vous l'avez dit. Deuxièmement, cela
6 n'a pas été signé par le colonel Borislav Vlahovic non plus, et je n'ai
7 aucune idée de quoi il s'agit ici.
8 Q. Je vous pose des questions en me basant sur cette pièce, examinons le
9 paragraphe suivant : "Missions générales. Surveiller la route et d'autres
10 routes locales qui vont de Jablanica et Bucane de ces villages afin de
11 repérer à temps les véhicules susmentionnés et tout autre véhicule utilisé
12 par les terroristes et lorsque les véhicules et leurs passagers auront été
13 identifiés se servir d'un tir concentré afin de neutraliser et de les
14 éliminer."
15 R. Je ne sais pas. Je ne peux pas parler de ceci, parce que ce plan-là
16 m'est tout à fait inconnu. Je ne sais pas si Blagoje Djordjevic, a établi
17 ce plan et qu'il a été approuvé par le colonel Vlahovic. Je peux commenter,
18 mais pas en une qualité qui serait celle d'un plan émanant du secrétariat à
19 l'Intérieur de Pec.
20 Q. [hors micro]
21 M. NICE : [interprétation] Excusez-moi.
22 Q. Dernière chose à propos de ce document, page 3 en anglais. Chiffre
23 romain V : "Les préparations en vue de l'exécution." Je vous demande ceci,
24 Monsieur Paponjak : une des caractéristiques saillantes de ce que vous
25 décriviez comme terroriste, c'est qu'ils se servaient de munitions de
Page 39275
1 provenance chinoise, n'est-ce pas ?
2 R. Je ne sais pas de quoi vous êtes en train de parler maintenant. Les
3 terroristes, les faits nous disent que les terroristes se sont servis de
4 munitions chinoises, cela est bien exact.
5 Q. Car nous voyons ici à ce point V : "Préparations en vue de
6 l'exécution," c'est-à-dire de l'élimination de l'UCK : "Le 23 janvier 1999,
7 le chef de section et les chefs d'équipes du PJP, des équipes et des unités
8 de police spéciale avec le chef de secteur de Celopek vont faire une
9 reconnaissance de la section et des endroits où il y aura des embuscades.
10 Le chef de la section de PJP va fournir des munitions et des lance-grenades
11 fabriqués en Chine…"
12 Pourquoi est-ce qu'on demande qu'on se serve d'éléments venant d'usines
13 chinoises pour mener à bien cette embuscade ? Est-ce que ce n'est pas pour
14 reprocher ce qui s'est passé à l'UCK si les choses tournent mal ?
15 R. Ceci n'est pas du tout une mission confiée à quiconque. Ce document a
16 été établi dans un objectif tout à fait autre. Ceci n'est pas un plan
17 établi par le SUP de Pec.
18 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Nice, pourriez-vous me rappeler
19 ceci, quel est le traitement que nous avons réservé pour déterminer
20 l'authenticité du document ? C'est un document de M. Coo.
21 M. NICE : [interprétation] Cela a été trouvé par le bureau du Procureur au
22 poste de police de Pec en 1999.
23 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.
24 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] J'essaie de comprendre la question
25 que vous posez.
Page 39276
1 M. NICE : [interprétation] Oui.
2 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous dites que l'UCK s'est servi
3 d'armes de provenance chinoise.
4 M. NICE : [interprétation] Beaucoup d'éléments prouvent qu'en général le
5 type d'armes ou de munitions utilisés par l'UCK est souvent d'origine
6 chinoise. Je ne peux vous donner un exemple précis, pour le moment, mais
7 c'est souvent le cas.
8 Q. Monsieur Paponjak, nous ne sommes pas encore arrivés au coeur des
9 allégations formulées contre ceux qui étaient en fonction à Pec à l'époque,
10 à savoir que vous et vos collègues vous vous êtes livrés de façon directe
11 et systématique à --
12 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic.
13 L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que je peux recevoir le document que M.
14 Nice est en train de montrer au témoin ?
15 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Bien sûr. Oui. Fournissons un
16 exemplaire à M. Milosevic.
17 M. NICE : [interprétation] L'accusé comprendra qu'il s'agit d'une pièce
18 déjà versée au dossier.
19 Q. Vous et vos collègues, vous vous êtes livrés à un nettoyage ethnique
20 très, très bien organisé et bien systématique avant le début des
21 bombardements. Vous comprenez que c'est une allégation qui est prononcée
22 contre vous, n'est-ce pas ?
23 R. Il y a peut-être des allégations certes, mais tout ceci n'est pas
24 exact.
25 Q. Non, vraiment ? Vous l'avez fait sous la tutelle ou sur les
Page 39277
1 instructions et la filière remonte à Belgrade et à l'accusé, je suis tout à
2 fait clair. Vous me suivez ?
3 R. Je comprends ce que vous voulez dire, mais cela n'en demeure pas moins
4 inexact.
5 Q. Je vais résumer en quelques phrases les éléments que nous avons
6 entendus il y a quelque temps. Le 23 mars, d'après un témoin, le témoin
7 Zatriqi, des fonctionnaires du MUP de Pec ont emmené trois de ces autocars
8 qu'ils ont utilisés plus tard pour transporter des gens, les faire sortir
9 de la ville. Le 25 mars, d'après le témoin Sokoli, ce témoin a vu des
10 policiers de Pec qui incendiaient et pillaient des maisons. Ce témoin a été
11 frappé par des forces serbes. On l'a fait monter à bord d'un camion et
12 envoyé à Prizren --
13 M. KAY : [interprétation] Est-ce que cela ne devrait pas être des questions
14 davantage que des discours prononcés par le Procureur pour présenter sa
15 thèse ?
16 M. NICE : [interprétation] Je peux les mettre sous forme de questions.
17 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous portez ces questions à la
18 connaissance du témoin, pourquoi ne pas les sérier ?
19 M. NICE : [interprétation] Je pourrais, mais si vous me le permettez ce
20 n'est pas nécessaire. Je viens de dire que je présente de façon synthétique
21 notre thèse afin que le témoin soit au courant.
22 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui. Faites-le d'un coup.
23 M. NICE : [interprétation] Merci.
24 Q. M. Sokoli a dit qu'il a été frappé, forcé de monter à bord d'un camion
25 et chassé; et en fait, le 27 mars, d'après le témoin Konaj, ce témoin lui
Page 39278
1 aussi a été chassé et des policiers lui ont dit qu'il n'avait nulle part où
2 aller si ce n'est au Monténégro.
3 Voilà, en quelques phrases à peine, une synthèse de ces éléments de preuve.
4 J'aimerais que vous me disiez ceci : est-ce que vous entrevoyez la
5 possibilité que des policiers dans votre ville aient fait ce genre de
6 choses ?
7 R. En aucun cas.
8 Q. Quelquefois, bon, il y a toujours des voyous, vous savez dans les rangs
9 de la police, et même un policier de cet acabit aurait pu forcer des
10 Albanais à quitter Pec.
11 R. Quels "voyous" au sein de la police ? J'ai travaillé pendant des années
12 avec ces gens. Je les connais bien. S'il y avait des voyous, ils seraient
13 écartés de la police suivant les modalités prévues par la réglementation,
14 par application de mesures disciplinaires. Etant donné que ce monsieur a
15 dit que les policiers lui avaient confisqué trois autocars, il doit
16 probablement savoir de quels policiers il s'agit. Il peut les citer et
17 donner des noms. On pourra voir qui sont ces policiers, ceux qui étaient à
18 bord des autocars, pourquoi ils ont été confisqués ? Ils connaissaient
19 certainement tous les policiers de Pec, nous n'étions pas si nombreux que
20 cela.
21 Q. D'accord.
22 R. Dans tout ce que vous dites, vous avancez certains policiers, vous
23 parlez de certains effectifs. Or, ils nous connaissaient tous par nos noms
24 et prénoms, et par les renseignements personnels qui nous caractérisent.
25 Ils savent forcément comment ces policiers s'appellent et on arrivera
Page 39279
1 aisément à la vérité.
2 Q. J'y reviendrai sans doute, dans un instant, mais s'il y a eu
3 déplacements d'Albanais du Kosovo par la police, est-ce que cela s'est fait
4 fin mars, début avril ? Est-ce qu'il y a eu déplacements organisés d'un
5 segment quelconque de la population qui auraient été l'œuvre d'une force ou
6 de n'importe quelle force, que ce soit la police ou l'armée ?
7 R. Non.
8 Q. Parce que, vous voyez, vous avez décrit les déplacements de gens à la
9 fin mars et le chaos ou la confusion à Pec, vous organisiez la situation
10 remplie de bonnes intentions mais, malheureusement, dans le chaos. C'est
11 bien l'image que vous avez donnée, n'est-ce pas ?
12 R. C'est exact. Il y avait une situation assez désordonnée. Il y avait des
13 bouchons sur les routes entravant la circulation. Cela c'est bien vrai.
14 Q. Est-ce que vous auriez, dès lors, l'obligeance d'examiner
15 l'intercalaire 36 de la pièce 319 ? Si vous permettez de le dire, ce
16 document ne devrait pas vous surprendre, car il serait facile de le trouver
17 dans des documents publiés depuis 2001. Il s'agit d'un ordre.
18 Monsieur l'Huissier, veuillez prendre la dernière page, vous y voyez la
19 signature du colonel Dusko Antic. Nous voyons qui est l'auteur. Revenons,
20 maintenant, à la première page.
21 La date est celle du 30 mars 1999, Monsieur Paponjak. Voici, ce que
22 ce document dit : "Vu l'ordre donné par le commandant suprême, les
23 déclarant un état de guerre et le déplacement d'une partie de la population
24 pour qu'elle quitte la zone de responsabilité de VO du poste militaire de
25 Pec…"
Page 39280
1 Ici, on parle d'un ordre visant "à faire sortir, à faire se déplacer
2 une partie de la population." Vous nous avez dit qu'aucune force n'avait
3 organisé le déplacement de population. Qu'est-ce que ceci veut dire ?
4 R. Tous ceux qui ont vaqué aux tâches militaires et policières comprennent
5 parfaitement bien de quoi il s'agit ici.
6 Q. Dites-nous.
7 R. Pendant un état de guerre, on s'attend à des conflits, à des combats.
8 Alors, il convient de déplacer la population depuis cette zone de
9 responsabilité pour protéger la vie des gens, en cas de combats. S'agissant
10 --
11 Q. Monsieur Paponjak --
12 R. -- des positions de défense, on ne saurait y tolérer la présence de
13 civils.
14 Q. Monsieur Paponjak, est-ce que je ne vous ai pas donné l'occasion, il y
15 a trois ou quatre questions, de me dire s'il y avait eu déplacement d'une
16 partie de la population ? Est-ce que je ne vous ai pas donné une chance de
17 nous dire ce qu'il en était véritablement ?
18 R. Vous avez posé la question pour ce qui est de la création de colonnes
19 et non pas pour ce qui est de parler des mesures déployées ou mises en
20 œuvre par la police ou l'armée. Ceci est une chose tout à fait normale que
21 fait tout état lorsqu'il y a un état de guerre. Là, on s'attend à des
22 combats. On dispose des positions ou des postes de défense. On transfère la
23 population ou plutôt, on l'a fait déménager vers des endroits plus sûrs.
24 Mais c'est pratiquer partout ce genre de choses.
25 Q. Je vous ai demandé, d'une façon tout à fait claire, si dans le milieu
Page 39281
1 du mois de mars, fin mars, début avril, il y aurait eu de mouvements
2 organisés par une force quelconque, que ce soit la police ou l'armée. Vous
3 avez répondu par la négative.
4 Or, ce document montre que vous êtes un menteur et vous avez menti à
5 ce Tribunal pendant toute la durée de votre déposition, n'est-ce pas ?
6 R. Je comprends bien votre désir de le dire ou de l'affirmer, mais tous
7 ceux qui nous écoutent comprennent parfaitement de quoi il s'agit. Je n'ai
8 jamais menti; à aucun moment, je n'ai menti, Monsieur. Je comprends que
9 vous ayez le souhait de présenter les choses ainsi.
10 Q. Dites-moi combien, d'après vous, il y a de milliers d'Albanais du
11 Kosovo qui auraient, de leur plein gré, quitté leurs foyers entre la fin
12 mars et le mois de juin 1999. Chiffrez-nous cela en milliers ?
13 R. Je ne sais pas. Je n'ai pas fait ce genre d'évaluations.
14 Q. Combien d'habitants y avait-il à Pec avant le conflit ? Vous êtes un
15 policier, vous devriez le savoir.
16 R. Je pourrais le savoir s'ils avaient pris part au recensement. Ils se
17 sont refusés à prendre part au recensement; ce qui fait que je n'ai pas ce
18 type de renseignements.
19 Q. Je vois. Vous n'avez pas la moindre idée du nombre de personnes que
20 vous surveilliez en tant que policier ? Est-ce qu'on parle de centaines, de
21 milliers, de 5 000 personnes ? Donnez-nous une idée.
22 R. Si vous parlez de l'estimation qu'on pourrait faire de la population
23 totale, certaines estimations de notre part ou de ma part à moi, je
24 pourrais vous les communiquer. Mais pour ce qui est des renseignements
25 exacts, personne ne pourrait vous les communiquer. Or, les estimations
Page 39282
1 varient entre elles.
2 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Paponjak, avant de quitter ce
3 document, est-ce que vous êtes en train de nous dire qu'aucun segment de la
4 population n'a été déplacé de la zone de responsabilité du VO de Pec ou
5 est-ce que vous nous dites qu'à un moment donné, une partie de la
6 population a été déplacée ?
7 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne puis affirmer ni l'un, ni l'autre. Je ne
8 puis que supposer que la totalité de la population, tant Serbes
9 qu'Albanais, a été déplacée de tous les endroits occupés par l'armée de la
10 Yougoslavie, voire par les membres du MUP de Serbie, aux endroits où on
11 avait déployé du personnel, des effectifs avec des armements. C'étaient des
12 positions de défense et c'est de là que la population a été déplacée aux
13 fins de protéger leurs vies, au cas où il y aurait des combats et afin de
14 ne pas avoir des pertes de vie de civils. Il ne s'agit pas --
15 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Malheureusement, je crains de ne pas
16 comprendre votre réponse. Mais est-ce que vous fonctions n'étaient pas des
17 fonctions de responsabilité telles que vous devriez savoir dans un sens ou
18 dans l'autre si ce genre d'ordre n'a jamais été exécuté ?
19 LE TÉMOIN : [interprétation] De telles mesures ont été mises en place par
20 les commandants des unités, responsables des unités. C'est pour cela que je
21 ne suis pas en position de savoir. Tout commandant, tout responsable
22 organisant les positions qui sont les siennes prend des mesures de cette
23 nature. C'est pour cela que j'estime que cela a été fait. Il a déployé des
24 gens, il a fait creuser des tranchées et s'il y a une population à
25 déplacer, il vient voir ces gens pour leur dire qu'il faut se déplacer vers
Page 39283
1 un site autre et c'est finalement ce qui est décidé. Moi, mon travail était
2 tout à fait différent. Je ne sais même pas où se trouvaient ces positions.
3 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je ne veux pas, ici, prendre trop de
4 temps. Mais franchement, je ne comprends pas du tout votre réponse parce
5 que le libellé de cet ordre parle du déplacement d'une partie de la
6 population pour la sortir de la zone de responsabilité du VO de Pec. Ce
7 n'était pas un simple déplacement de faible distance; on dit qu'il faut les
8 sortir de votre zone de responsabilité. Si cela s'était passé, est-ce que
9 vous ne seriez pas au courant ?
10 LE TÉMOIN : [interprétation] Ici, on dit "déplacer," non pas "évacuer." On
11 dit "déplacer." Je ne sais pas comment on a traduit cela dans le document
12 que vous avez sous les yeux.
13 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] C'est inutile d'ergoter sur ces mots,
14 mais est-ce que vous n'avez pas, en serbe, les termes qui disent "en dehors
15 de la zone de responsable du VO de Pec ?"
16 LE TÉMOIN : [interprétation] Non. On dit "déplacement d'une partie de la
17 population de cette zone, depuis cette zone de responsabilité de Pec." Il
18 s'agit de déplacer la population se trouvant dans ladite zone.
19 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] C'est quoi la différence entre "de" ou
20 "en dehors de". C'est la même chose, cela revient au même.
21 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, non, ce n'est pas pareil. Cela se
22 rapporte à la population qui vit dans cette zone. Il s'agit de déplacer la
23 population dans cette zone, pas lui faire quitter la zone entièrement. Il
24 s'agit de la déplacer dans le cadre de la zone et la déménager ou la
25 déplacer à l'extérieur de la zone signifierait une évacuation. Si dans le
Page 39284
1 cadre de cette pièce, on déplaçait quelqu'un d'un endroit à l'autre, il
2 resterait dans la pièce. Or, quand on dit, faire quitter la zone, cela veut
3 dire qu'on ferait quitter cette pièce à quelqu'un. Réinstallation de
4 quelqu'un qui se trouverait ici, dans cette pièce, cela voudrait dire qu'on
5 la fait sortir de cette pièce-ci, cette personne.
6 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais la réinstallation d'une personne
7 de cette pièce veut dire qu'on la fait sortir de cette pièce.
8 LE TÉMOIN : [interprétation] Non.
9 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Cela demeurera un mystère, pour le
10 moment, du moins.
11 M. LE JUGE KWON : [interprétation] VO, qu'est-ce cela veut dire ? Est-ce
12 que cela veut dire Vorni Okrug ? Est-ce que c'est une organisation
13 militaire ?
14 M. NICE : [interprétation] Tout à fait, Monsieur le Juge.
15 Q. Vous avez entendu la synthèse que j'ai faite de ce que certains témoins
16 nous ont dit et d'autres témoins ont dit qu'on les a chassés de Pec. Vu la
17 façon dont vous avez répondu à ma question et à celles de M. le Juge, est-
18 ce qu'on peut dire que c'est raisonnable ? Est-ce que cela voudrait dire
19 que ces témoins ont tout à fait tort dans ce qu'ils disent ou c'est vous
20 qui avez tout à fait tort ? Est-ce que vous acceptez cette idée, puisque
21 vous étiez sur place ?
22 R. Non, je n'accepte pas cette affirmation.
23 Q. Mais vous ne permettez pas la possibilité que ces gens se soient
24 franchement, honnêtement trompés en pensant qu'on les avait chassés, que la
25 police avait incendié leurs maisons. Il n'y a pas de possibilité que ces
Page 39285
1 gens se trompent honnêtement ? Soit ils ont tort, soit c'est vous qui avez
2 tort.
3 R. Je sais que j'ai raison. Je ne sais pas ce qu'ils ont pensé ou pourquoi
4 ils ont agi de la sorte.
5 Q. Mais le malheur pour vous -- enfin, il y a deux problèmes : le
6 premier, c'est que les réponses que vous me donnez et celles que vous venez
7 de donner au Juge Bonomy ne contournent pas le fait que lorsqu'on vous a
8 demandé de façon précise s'il y avait eu déplacement organisé d'un segment
9 quelconque de la population par une force quelconque, vous avez répondu par
10 la négative et tout dernièrement, dans vos réponses, vous dites que c'est
11 le contraire et donc, vous avez menti.
12 R. Mais ici, il ne s'agit pas de déplacer les gens en ayant recours à la
13 force. Il s'agit de s'organiser aux fins de protéger ces gens-là, quand on
14 les déplace d'un endroit vers un autre parce qu'ils pourraient être mis en
15 péril.
16 Q. Vous avez pu aider l'accusé et la Chambre en présentant pas mal
17 d'hypothèses, de conjectures, de temps à autre, en disant que les gens
18 avaient peur, avaient essayé de s'échapper de Dubrava. La Chambre a entendu
19 beaucoup de témoins dire qu'ils avaient été forcés de donner leurs papiers
20 d'identité lorsqu'ils sont partis, qu'ils ont franchi la frontière pour
21 aller en Macédoine ou souvent en Albanie. Est-ce qu'il y avait une raison
22 acceptable qui faisait que vos autorités prenaient peut-être comme cadeau,
23 les documents d'identité de ces Albanais qui quittaient le Kosovo ?
24 Pourquoi, à votre avis, est-ce que cela s'est passé ?
25 R. Vous venez d'énoncer tout un récit qu'il est difficile de suivre. Vous
Page 39286
1 avez, tout d'abord, affirmé que j'ai aidé l'accusé en me disant que les
2 gens ont été empêchés de fuir par des coups de feu; puis, ensuite, vous
3 avez parlé de saisies de pièces d'identité.
4 Q. Ecoutez, répondez à ma question et ne tergiversez pas en donnant un
5 commentaire. Attendez, Monsieur Paponjak.
6 Vous êtes au courant de l'existence de cet acte d'accusation depuis
7 des années, n'est-ce pas ?
8 R. A chaque question directe que vous poserez, vous obtiendrez une réponse
9 directe.
10 Q. Vous savez que cet acte d'accusation existe depuis des années.
11 R. Et dans vos questions --
12 Q. Vous savez que cet acte d'accusation existe depuis des années. Vous en
13 parlez dans un des documents que vous signez et que vous présentez comme
14 pièce. Vous connaissez cet acte d'accusation depuis des années, n'est-ce
15 pas ?
16 R. Ce n'est pas contesté. L'acte d'accusation est dressée depuis je ne
17 sais combien --
18 Q. Vous savez depuis des années, comme tout un chacun qui est intéressé
19 par ce conflit, d'ailleurs, qu'on affirme que les Serbes ont chassé les
20 Albanais du Kosovo de leur pays. Vous le savez, n'est-ce pas, depuis des
21 années ?
22 R. Pour cette allégation -- enfin, pour ce qui est de cette allégation,
23 oui.
24 Q. Vous le savez parce que vous avez examiné ou quelqu'un de votre équipe
25 a examiné l'acte d'accusation et vous aurez entendu les témoins en
Page 39287
1 préparation à la Défense aussi, qu'une des allégations les plus
2 importantes, parce que c'est un élément de preuve important, c'est que les
3 Albanais du Kosovo ont été forcés par la police et par l'armée de remettre
4 leurs pièces d'identité, leurs plaques d'immatriculation et ce genre de
5 choses, vous le savez, n'est-ce
6 pas ?
7 R. Mais qu'est-ce que ceci a à voir avec mon témoignage ?
8 Q. Répondez à ma question parce que c'est vous qui déposez. Vous le
9 saviez, ce genre de choses, n'est-ce pas ?
10 R. Oui, mais je ne peux pas être au courant de ces allégations-là.
11 Q. Ma question suivante sera celle-ci : lorsqu'il vous est posé une
12 question fort simple, il vous est demandé d'expliquer quelque chose que
13 vous connaissez que vous connaissez depuis des années, je suppose que vous
14 avez réfléchi, pourquoi choisir, à ce moment-là, de donner une longue
15 réponse pour perdre du temps ? Je veux que vous disiez à ces Juges quelles
16 raisons il peut y avoir pour que des Albanais du Kosovo se voient
17 confisquer ou remettre leurs pièces d'identité. Veuillez répondre à cette
18 question.
19 R. Je ne sais même pas qu'on leur a pris leurs documents, leurs pièces
20 d'identité. Je n'ai rien à voir avec Prizren dont vous êtes en train de
21 parler. Vous êtes en train d'essayer, de laisser entendre que je suis au
22 courant d'une chose et vous me demandez de commenter au sujet d'une chose
23 dont je n'ai pas connaissance.
24 Q. Mais on peut dire ceci : c'est vrai, manifeste, n'est-ce pas, même si
25 vous étiez au courant depuis des années de toutes ces allégations, vos
Page 39288
1 documents - et je laisse entendre qu'ils ont été concoctés de toutes pièces
2 - ces documents ne montrent pas du tout, nulle part, qu'il y aurait eu des
3 enquêtes sur ce genre d'allégations où que ce soit, n'est-ce pas ?
4 R. Ceci ne fait pas partie des compétences du SUP de Pec. Nous n'étions
5 pas appelés, conviés à enquêter au sujet d'événements ou prétendus
6 événements survenus dans un autre secteur.
7 Q. Est-ce que vous n'êtes pas un peu bureaucrate ou bureaucratique dans
8 votre réponse ? Vous n'avez pas d'imagination, vous n'avez pas une idée de
9 ce qui s'est passé en dehors de votre SUP ?
10 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Il a déjà répondu à la question,
11 Monsieur Nice.
12 M. NICE : [interprétation] Fort bien.
13 Q. Alors dites-nous ceci : Zoran Aleksic, pourquoi est-ce qu'il a quitté
14 le territoire de l'ex-Yougoslavie ?
15 R. Je n'en sais rien.
16 Q. Mais vous savez fort bien qui c'est, n'est-ce pas ? N'est-ce pas ?
17 R. Je ne sais pas de quel Zoran Aleksic vous parlez. Si vous vous référez
18 à Zoran Aleksic, nous avons eu un Zoran Aleksic parmi nos employés.
19 Q. Tout à fait, tout à fait. Après tout, si tous les habitants de Pec
20 devaient connaître tous les policiers, tous les policiers devaient se
21 connaître entre eux ? Zoran Aleksic, c'est un de ces policiers. Nous allons
22 le voir pour être bien sûr qu'il existe. Il se trouve à l'intercalaire
23 20.2. Est-ce qu'on peut placer ce document sur le rétroprojecteur ? Le
24 voici. Monsieur l'Huissier, prenez mon exemplaire. Nous allons voir que
25 c'est bien sa signature, ici. C'est lui qui signe le document. Je ne peux
Page 39289
1 pas vous dire ce que c'est parce que ce document n'a pas été traduit, mais
2 peu importe.
3 Est-ce qu'il est capitaine ou était capitaine ?
4 R. Oui.
5 Q. Vous, vous savez que --
6 R. Il était capitaine.
7 Q. Est-ce qu'il s'est déplacé avec vous ? Est-ce qu'il est parti en même
8 temps que vous du Kosovo à Kragujevac ou est-ce qu'il a été muté ailleurs,
9 en ex-Yougoslavie ?
10 R. Je ne m'en souviens pas à présent; je ne sais pas où il a été affecté.
11 Il faisait partie du département de la police scientifique, lui.
12 Q. Quand avez-vous appris qu'il avait quitté le territoire ? Je veux dire
13 ce territoire est si exiguë qu'on peut s'attendre à connaître tous les
14 policiers, on doit savoir ce qui leur arrive, ce qu'ils deviennent.
15 R. Je crains que la réponse ne doive être un peu plus longue, une fois de
16 plus. Le secrétariat à l'Intérieur de Pec avait 800 employés organisés par
17 départements. Dans le cadre du département, il y a le chef de département
18 et les chefs de secteurs, ils sont chargés des différents employés. Ce
19 département de la police scientifique était assez important. Il avait au
20 moins trois secteurs. Il avait des chefs de secteurs et des directeurs de
21 divisions.
22 En ma qualité de chef du secrétariat, je suis rarement en position de
23 savoir quel a été le sort de tout individu, à moins que cela n'ait été mis
24 en exergue quelque part pour parler d'un problème. Pour ce qui est
25 maintenant de ce déplacement ou déménagement du secteur de Pec, la
Page 39290
1 situation était assez chaotique. Dans l'espace ou dans l'intervalle de
2 quelques mois, il a fallu que nous organisions, que nous trouvions des
3 endroits où installer les personnes, chez la famille ou des amis, pour
4 qu'ils puissent survivre. Au fur et à mesure que les gens se sont
5 débrouillés, ils se présentaient au secrétariat à l'Intérieur déménagé de
6 Pec à Kragujevac. Je ne peux pas être au courant de tous les détails.
7 Q. Je ne vois pas comment ceci nous donne des informations à propos de
8 Zoran Aleksic, or, c'est cela qui me concerne directement.
9 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, quel est votre commentaire à ce
10 propos, à propos de cette question ?
11 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne peux pas vous fournir d'informations au
12 sujet d'une centaine d'autres employés. Je n'ai pas eu à tenir compte de
13 tout individu. Je vaquais à l'organisation de ces nouvelles circonstances
14 de travail, et au fur et à mesure qu'ils s'installaient les chefs du
15 département m'informaient de leur personnel.
16 S'agissant du capitaine Zoran Aleksic, je sais, par hasard, qu'il
17 s'en est allé à Cacak et qu'il vivait là-bas. C'est plus suivant une
18 filière privée que je l'ai appris puisque je suis originaire de Cacak moi-
19 même et que j'y ai séjourné assez longtemps.
20 M. NICE : [interprétation]
21 Q. Dites-nous ce que vous avez appris à propos de lui et de ce qu'il a
22 fait après Cacak.
23 R. Je sais qu'il a résidé à Cacak. Je sais que son père résidait là-bas.
24 Je connais la maison de son père. J'ai visité bon nombre de gens. Je sais,
25 qu'à un moment donné, il a quitté le service et qu'il a quitté Cacak.
Page 39291
1 Q. Est-ce qu'il a quitté le service, Monsieur Paponjak, parce qu'il
2 voulait dire la vérité et tirer le signal d'alarme à propos des policiers
3 de Pec ? Est-ce qu'en fait, il n'a pas fait l'objet de menaces ?
4 R. Qui aurait proféré des menaces à son encontre.
5 Q. D'autres policiers serbes ?
6 R. Zoran Aleksic était en relation normale, très bonne avec moi. Il ne
7 m'en a jamais parlé.
8 Q. Prenons un autre sujet. Au début du mois de juin 1999, vous étiez
9 toujours en service à Pec, n'est-ce pas ?
10 R. Oui.
11 Q. S'il y avait eu une opération à Pec au début du mois de juin 1999
12 consistant à déterrer les corps des gens qui avaient été tués par les
13 Serbes entre le mois de mars et le mois de juin avec participation de la
14 police à cette opération, vous l'auriez su, n'est-ce pas ?
15 R. Probablement que oui.
16 Q. Dites aux Juges quand cela s'est passé ?
17 R. Je ne sais pas que cela s'est passé. Vous êtes en train de laisser
18 entendre que cela s'est effectivement passé.
19 Q. Je vais vous soumettre l'hypothèse, du moins je peux vous dire qu'il y
20 a au moins ces personnes-ci qui ont participation : votre chef, Boro
21 Vlahovic; un certain Bato Bulatovic; Mladen Milojevic et Zoran Stanisic,
22 ces deux derniers étaient chef du service de police judiciaire et chef de
23 la police scientifique chez vous. D'autres nombreux d'ailleurs, sans doute,
24 ont déterré les corps pour les envoyer à Batajnica en Serbie. Vous étiez au
25 courant et vous avez participé à cela, j'aimerais maintenant que vous en
Page 39292
1 disiez davantage aux Juges.
2 R. Vous auriez bien pu dire que c'est moi qui les ai déterrés, qui les ai
3 exhumés. Je n'ai pas pris part à cela, et il n'y a pas eu de cela du tout.
4 Q. Est-ce que nous pouvons partir du principe que si, en temps utile, nous
5 avons des preuves attestant du fait que des corps ont été exhumés à la
6 période que je viens de préciser avec l'assistance de la police de la
7 circulation, je suppose que c'est quelque chose que vous auriez su, n'est-
8 ce pas ?
9 R. Je ne peux pas dire une chose de cette nature, parce que je n'en savais
10 rien et j'y ai, encore moins, pris part.
11 Q. A votre avis, les forces serbes, elles ont tué combien d'Albanais du
12 Kosovo au cours de la campagne de bombardements qui s'est déroulée entre
13 mars et juin 1999 ?
14 R. Je vous ai dit à plusieurs reprises que les forces serbes n'ont pas tué
15 d'Albanais du Kosovo.
16 Q. Pas un seul Albanais du Kosovo n'a été tué; c'est cela, pas un seul ?
17 R. Je n'en ai pas connaissance.
18 Q. Je ne vais pas perdre trop de temps, mais nous allons quand même
19 prendre le livre "Under Orders", "Sous les ordres" pour voir une photo qui
20 montre que bon nombre des crimes allégués, crimes de nettoyage ethnique qui
21 se seraient commis à Pec ont fait l'objet de recherches.
22 M. NICE : [interprétation] Regardez cette photographie.
23 Q. Je vais lire la légende lentement afin que vous puissiez m'entendre :
24 "Les témoins ont identifié l'homme qui se trouve à la droite comme étant
25 Nebojsa Minic, surnommé 'Mrtvi' ou 'Mort'. Il a été impliqué dans
Page 39293
1 l'extorsion et l'assassinat de six personnes appartenant à une famille à
2 Pec le 12 juin. A gauche, on voit Vidomir Salipur, un policier de Pec qui
3 aurait été chef du gang des Munja, et qui a été tué par l'UCK le 8 avril
4 1999. La date à laquelle cette photo a été prise et le lieu sont des
5 éléments inconnus."
6 Est-ce que vous, policier, vous ne connaissiez pas du tout ce Nebojsa Minic
7 dont ce livre parle en donnant pas mal de détails ? Est-ce que vous ne le
8 connaissiez pas du tout ?
9 R. Je connais Vidomir Salipur qu'on voit sur cette photo. L'autre
10 personne, je ne la connais pas du tout.
11 Q. Est-il exact de dire que Vidomir Salipur était chef d'un groupe qu'on
12 appelait le gang des Munja, groupe paramilitaire qui tuait des gens ?
13 R. J'ai clairement indiqué qu'il s'agissait du policier, Vidomir Salipur.
14 Je ne sais pas de quel gang que vous êtes en train de parler en corrélation
15 avec ce policier.
16 Q. Fort bien. On n'a pas mené d'enquête suite à ce genre d'allégations
17 qu'on voit dans des documents qui ont été publiés. Votre SUP en exil n'a
18 pas fait d'enquête du tout de ce genre, n'est-ce pas ?
19 R. Nous n'avons pas eu de dépôt de plaintes. Nous n'avons pas eu
20 d'informations à ce sujet. Je ne sais pas d'où vient cette documentation.
21 Je ne sais pas comment cette photo a été prise.
22 Q. Je vous remercie. Le commissaire des Nations Unies chargé des réfugiés
23 nous a dit par le truchement d'un témoin que le 12 avril, quelque 3 000
24 réfugiés d'Istok et d'autres municipalités sont arrivés au Monténégro.
25 Vous, vous avez observé le chaos qui régnait lorsque vous organisiez la
Page 39294
1 circulation dans le centre de Pec, est-ce que cela semble raisonnable que
2 quelque 3 000 personnes d'une municipalité voisine, celle d'Istok, se
3 soient frayées un chemin pour arriver au Monténégro, le 12 avril ?
4 R. Qu'entendez-vous par me semble-t-il raisonnable ?
5 Q. Ecoutez. Il faut qu'on se fasse une idée de ce que vous faisiez,
6 Monsieur Paponjak, et si je comprends bien, excusez-moi si je me trompe,
7 mais vous faisiez de votre mieux en ville pour organiser la circulation,
8 pour permettre aux gens d'avancer. Vous êtes un agent de la circulation
9 chevronné, vous devez avoir une idée de l'importance de la foule. Toutes
10 ces collectivités, toutes ces communautés que vous contrôliez, est-ce qu'il
11 est possible que quelque 12 000 personnes soient allées au Monténégro où
12 elles se seraient retrouvées, le 12 avril ? Est-ce que cela vous semble
13 logique ?
14 R. Pourquoi ne pourraient-elles pas arrivées là-bas ?
15 Q. Et qu'il y en ait 2 000 qui aillent au Monténégro. D'après ce que vous
16 avez observé, cela semble correct comme chiffre ?
17 R. La direction vers le Monténégro, enfin, l'axe vers le Monténégro était
18 complètement bouché tout le temps, parce qu'il s'agit d'une montée. Il
19 s'agit de passer par une espèce de gorge à Kula, le déplacement était assez
20 lent. Les gens allaient en tracteurs, à bord de charrettes et à pied. Cette
21 voie de circulation était assez encombrée. Il y avait beaucoup de monde,
22 mais on arrivait quand même à avancer.
23 Q. Je vous avais donné une chance de répondre à la question. Maintenant,
24 je vais revenir comme je l'avais dit à un événement qui s'est produit en
25 1998. Nous avons examiné l'intercalaire 1.4 des documents. Il s'agit ici de
Page 39295
1 l'incident concernant Salihaj. Nous avons examiné avec vous le point 1.4,
2 le numéro -- je pensais que c'était le numéro 56, mais je ne suis plus trop
3 sûr. Est-ce que vous pourriez me redonner le numéro concernant Salihaj ?
4 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, Monsieur Milosevic, vous voulez
5 intervenir ?
6 L'ACCUSÉ : [interprétation] 59.
7 M. NICE : [interprétation]
8 Q. Lorsque nous allons trouver le numéro 59, je vais demander que
9 l'Huissier le place sur le rétroprojecteur et vous pourriez nous en donner
10 lecture. Ce n'est pas trop long. C'est la seule façon de voir ce que vous y
11 dites. Est-ce que vous pourriez en donner lecture ?
12 R. Il s'agit d'un événement dans la localité de Susica, municipalité
13 d'Istok, en date du 9 août 1998. On dit : "En date du 9 août 1998, vers 6
14 heures du matin, il y a eu attaque terroriste sur la patrouille de police
15 du ministère de l'Intérieur de la République de Serbie au village Susica,
16 municipalité d'Istok. Les membres de la police ont riposté et ont tué, en
17 cette occasion, huit membres de l'UCK, à savoir, Salihaj Saban, Hisen
18 Salihaj, Abedin, Miljazim, Isa, Hisniju, Arben, et Gashi Nazmi qui ont,
19 entre mai et août 1998, procédé à des attaques terroristes contre des
20 citoyens et membres du ministère de l'Intérieur dans ce secteur. Le constat
21 a été réalisé par le juge d'instruction du tribunal départemental de Pec,
22 M. Trajinovic Veselin. L'examen des cadavres a été effectué par le
23 Dr Stijovic Milivoje. Les cadavres ont été remis aux familles pour
24 enterrement suite à ordonnance du juge d'instruction. Il a été rédigé un
25 rapport, KU numéro 270/98, 291, 291 et DR/98 pour l'adresser au ministère
Page 39296
1 public de Pec."
2 Q. C'est tout.
3 R. On dit : "Pièce jointe dossier avec les écritures sous le numéro A/III-
4 59."
5 Q. Est-ce que vous avez ici ce dossier ?
6 R. Ici, non. Après ces brefs rapports, il y a des dossiers de placer dans
7 les archives. Ces dossiers sont au nombre de 1 000 et quelque.
8 Q. Vous voyez, c'est un rapport quand même réduit en sa plus simple
9 expression sur lequel vous vous appuyez et ce document ne nous dit pas
10 lequel de ces soi-disant terroristes avaient 75 ans. Lequel était-ce ?
11 Dites-le nous ?
12 R. Je ne connais aucun d'entre eux. Dans le dossier, il doit y avoir un P-
13 V. du constat sur les lieux et autres notes.
14 Q. Vous laissez entendre aussi que l'un avait 16 ans. C'est indéniable,
15 n'est-ce pas ? Vous n'avez rien ici pour appuyer ce résumé qui est le vôtre
16 et qui est des plus succinct.
17 R. La documentation existe, mais elle n'est pas là. Elle existe et vous
18 pouvez l'obtenir.
19 Q. Je vais vous soumettre une autre hypothèse parce que ceci est dit
20 ailleurs, une des femmes a été enlevée, elle a été tuée et son corps n'a
21 été retrouvé que plus tard, bien des journées plus tard. Ce n'était pas une
22 attaque dirigée contre des terroristes. S'il y avait un membre de l'UCK,
23 c'était, en fait, une attaque en guise de représailles venant de vos forces
24 de police au poste de police. Qui a mené cette attaque dirigée contre ces
25 soi-disant terroristes ? Est-ce que c'est vous ?
Page 39297
1 R. Tout d'abord, je dirais qu'il n'a été enlevé ou tué aucune femme et il
2 ne s'agissait pas d'une attaque.
3 Q. Comment le savez-vous ?
4 R. Je le sais à partir de la documentation officielle. Je le sais suite à
5 la lecture du rapport du juge d'instruction et des autres notes
6 officielles.
7 Q. Est-ce que c'est un des dossiers que vous avez examiné de façon
8 détaillée ? Est-ce que vous en avez laissé le soin à votre équipe ou est-ce
9 que vous en aviez une connaissance personnelle, Monsieur Paponjak ? Alors,
10 vous avez le choix.
11 R. J'ai vu un enregistrement vidéo tourné à l'occasion du constat sur les
12 lieux.
13 Q. Qu'est-ce qu'il a montré ce constat ? Est-ce qu'il vous a montré
14 l'homme de 75 ans ou le gamin de 16 ans ? Est-ce qu'il vous a montré les
15 personnes égorgées, les gorges tranchées ?
16 R. Non. Je ne me souviens pas de cela.
17 Q. Vous ne vous souvenez de rien qui vous incommode, n'est-ce pas ? Ceci
18 vaut pour la totalité de votre déposition. Vous avez toujours un alibi
19 quand cela vous dérange, n'est-ce pas ? Est-ce que vous pensez que c'est
20 comme cela qu'on dépose ?
21 R. Ce que vous venez de dire est tout à fait inexact. Les moments que nous
22 avons vus ici sur des enregistrements étaient désagréables, mais je m'en
23 souviens parfaitement, j'étais sur les lieux. S'agissant des scènes que
24 nous avons vues ici dans le matériel vidéo enregistré, elles sont également
25 désagréables; je les ai vues et je ne nie pas que cela est désagréable.
Page 39298
1 Q. Regardons ces images, intéressons-nous à Dubrava. Je rappelle
2 simplement que les documents relatifs à Dubrava se trouvent à
3 l'intercalaire 8 et que les documents à l'appui de ces images se trouvent à
4 l'intercalaire 46.
5 M. NICE : [interprétation] Dossier numéro 7, je le dis pour les Juges,
6 s'ils veulent se remettre en mémoire les éléments qui le composent.
7 Q. Je vais maintenant demander à mon assistante,
8 Mme Dicklich, et ce, pour gagner du temps, de diffuser la cassette relative
9 à Dubrava que l'accusé a vu en partie, et je ferai un certain nombre de
10 propositions au fil de la diffusion de ces images en posant des questions à
11 la fin de chaque séquence au témoin.
12 Q. Monsieur Paponjak, vous convenez, n'est-ce pas, qu'il n'est pas
13 discutable que l'OTAN a bombardé la prison, le 19 mai. Vous m'avez
14 compris ?
15 R. En effet, cela ne fait pas de discussion. Cela n'est pas contesté.
16 Q. Vous êtes au courant des affirmations qui ont été faites de façon
17 régulière par l'OTAN - nous reviendrons sur ce sujet dans le détail dans
18 quelques instants - quant au fait que la prison de Dubrava a servi de base
19 spéciale de la police ou de base militaire spéciale dans période qui a mené
20 au conflit et pendant tout le conflit ? Vous avez compris la nature de ces
21 affirmations ?
22 R. Il est possible que cela ait été affirmé, je ne suis pas au courant,
23 mais il est fort probable, c'est même le plus vraisemblable, que ce sont
24 les terroristes qui ont monté ces renseignements à l'intention de l'OTAN.
25 Q. Vous vous rendez compte que vous nous avez dit ne vous être jamais
Page 39299
1 personnellement trouvé dans la prison de Dubrava avant votre visite en ces
2 lieux, le 19 et par conséquent, n'avoir aucune connaissance personnelle de
3 l'utilisation qui a été faite de cette prison, n'est-ce pas ?
4 R. En effet, je n'ai pas inspecté cette prison, mais il est certain que
5 nous n'avions aucune force, à nous, à cet endroit.
6 Q. Tout témoin qui aurait dit que ces forces opéraient dans cet endroit ou
7 aux abords de cet endroit serait totalement dans l'erreur, n'est-ce pas ?
8 R. Probablement.
9 Q. La première cassette dont nous allons maintenant diffuser les images --
10 [Diffusion de cassette vidéo]
11 M. NICE : [interprétation] Et ce, grâce au système électronique Sanction,
12 Messieurs les Juges.
13 Q. La première séquence porte sur la journée du 19 mai. Je vérifie que le
14 système électronique Sanction fonctionne bien.
15 M. NICE : [interprétation] Est-ce que les Juges voient bien les images sur
16 leurs écrans ?
17 Q. Ce que nous voyons, dans cette séquence, c'est que nous avons, ici, un
18 certain nombre de cadavres soigneusement étiquetés et numérotés et cette
19 séquence vidéo est datée; nous voyons les
20 chiffres 16.37, 16.38 qui désignent l'heure, également.
21 Selon votre expérience en tant qu'officier de police, ceci constitue,
22 n'est-ce pas, un document de médecine légale tout à fait acceptable,
23 s'agissant de montrer les images d'une scène de crime, n'est-ce pas ?
24 R. En effet, c'est le cas.
25 Q. On avance dans les images et on voit des dégâts, en particulier des
Page 39300
1 prisonniers qui démontent des portes, n'est-ce pas ? Nous reviendrons sur
2 ce sujet plus en détail, un peu plus tard. Vous vous souvenez de cela ?
3 R. Oui.
4 Q. Tout cela montre quelque chose de tout à fait évident, nous voyons des
5 prisonniers qui passent une heure et demie à enfoncer des portes. Mais
6 pourquoi est-ce que personne n'a ouvert ces portes à leur intention ? Est-
7 ce que vous le savez ? Pourquoi est-ce que les gardes n'ont pas
8 déverrouillé les portes pour les laisser sortir ?
9 R. Je dirais simplement que je n'en sais rien. Peut-être les gardiens
10 étaient-ils partis pour se mettre à l'abri au moment du bombardement.
11 Q. Ils n'avaient pas pris la peine -- mais pourquoi est-ce que vous n'avez
12 pas enquêté à ce sujet ? Pourquoi est-ce que personne n'a enquêté quant au
13 fait que les gardiens n'avaient pas pris la peine de laisser sortir les
14 prisonniers ? Comment est-il possible que vous les ayez laissés enfermer
15 sous les bombes où ils ne pouvaient que mourir ? Est-ce que personne n'a
16 posé de questions à ce sujet ?
17 R. Pourquoi est-ce que c'est moi qui aurais posé ces questions ?
18 Q. Si vous n'étiez pas celui qui était chargé de poser ces questions,
19 dites-nous comment il peut se faire que personne n'ait fait rapport à ce
20 sujet ? Vous êtes allé à cet endroit, vous êtes un policier expérimenté,
21 chevronné; vous venez ici pour témoigner au sujet des événements de
22 Dubrava. Excusez-moi de vous poser la question, mais comment peut-il se
23 faire que personne n'ait pris la peine de demander pour quelle raison les
24 portes n'ont pas été déverrouillées et pourquoi il a fallu une heure et
25 demie pour les enfoncer ?
Page 39301
1 R. Lorsque nous sommes arrivés sur les lieux, il n'y avait plus personne
2 sur place. Pourquoi est-ce que nous aurions demandé à qui que ce soit pour
3 quelle raison personne n'avait laissé sortir les prisonniers, puisque pour
4 commencer, les prisonniers n'étaient pas présents à notre arrivée ?
5 Q. Voyez-vous, dans l'intercalaire 8, nous avons l'enregistrement de vos
6 propos quant au fait qu'il n'y a pas eu d'attaque et nous voyons l'équipe
7 médicale qui effectue le constat sur place. Pas d'enquête.
8 Mais passons à la date du 21 mai, deuxième séquence vidéo. Je rappelle à
9 chacun, ici, qu'il y a eu deux phases de bombardements, le 21 mai, le matin
10 et ensuite, une phase ultérieure. Ici, il s'agit toujours d'une séquence
11 vidéo tournée avec le plus grand soin, datée. Les images sont tournées à
12 une vitesse tout à fait raisonnable et nous voyons l'heure, 11:57, sur les
13 images. Est-il exact qu'on tourne ces images à un rythme assez lent et
14 qu'on voit les dégâts infligés aux infrastructures, un trou, notamment,
15 dans le mur, pas loin des installations de chauffage, n'est-ce pas ?
16 R. C'est exact, en effet.
17 Q. Nous voyons les prisonniers, si je ne m'abuse, contre le mur. Des
18 témoins nous ont dit qu'après le bombardement, après la première série de
19 bombardements, le 19, les prisonniers ont dû passer la nuit dans la cour et
20 manifestement, il était plus sûr de se trouver là, s'agissant des bombes
21 qui tombaient, il était plus sûr d'être à l'air libre plutôt que de
22 constituer une cible dans un endroit fermé. Vous ne savez rien qui puisse
23 contrer ces dépositions selon lesquelles les prisonniers ont été sortis
24 après les bombardements du 19 et qu'on les a autorisés à dormir à l'air
25 libre, n'est-ce pas ?
Page 39302
1 R. Je ne sais rien au sujet de ces faits.
2 Q. Le fait qu'on ait découvert des matelas à l'air libre correspond au
3 fait que ces matelas qui se trouvaient dans la cour à partir du 19
4 n'avaient qu'une utilité, à savoir, permettre aux prisonniers de dormir sur
5 ces matelas après les bombardements, n'est-ce pas ?
6 R. Cela signifie simplement qu'ils se trouvaient là. Maintenant, est-ce
7 qu'on les a sortis pour telle ou telle raison ? Cela n'est que spéculation
8 et je suis sûr que les personnes responsables de la sécurité de la prison
9 seraient très à même de répondre à vos questions, à ce sujet.
10 M. NICE : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges, je
11 vous demande quelques instants simplement. Il est très difficile de trouver
12 immédiatement les images de ce qui nous intéresse sur cette séquence vidéo.
13 Je crois que nous y arrivons. Voilà, nous y sommes.
14 Q. Nous voyons, ici, des images qui font partie de la vidéo tournée le 21
15 -- je ne vois pas très bien l'heure, mais cela n'a guère d'importance. Le
16 long du mur, on voit un certain nombre de personnes qui se déplacent,
17 apparemment, en toute liberté. D'après vous, ce sont des prisonniers ?
18 R. Je crois que c'est bien le cas.
19 Q. Nous savons que tout cela s'est terminé. Il y avait, là, des
20 journalistes et si je ne m'abuse, tout le monde a pris la fuite, peut-être
21 à l'exception des prisonniers, au moment où les bombes ont commencé à
22 tomber. Maintenant, nous en arrivons à la troisième séquence vidéo.
23 La première chose que nous remarquons au sujet de cette séquence vidéo,
24 Monsieur Paponjak, j'aimerais votre commentaire, à ce sujet. C'est que
25 cette séquence n'est pas datée. Pouvez-vous expliquer ce fait ?
Page 39303
1 R. Il est possible que l'enregistrement de la date n'ait pas été branché à
2 ce moment-là ou que ces images aient été tournées avec une autre caméra car
3 les choses ont duré plusieurs jours. Il est possible qu'une autre caméra
4 ait été utilisée.
5 Q. Arrêtons-nous un instant sur ce point. Vous avez déclaré qu'il était
6 très important que vos hommes se trouvent dans des endroits de ce genre
7 immédiatement après les faits, comme cela a été le cas le 19 et le 21. A
8 présent, vous laissez entendre que les bombardements se sont poursuivis les
9 22 et 23. Nous n'avons aucun élément de preuve le démontrant. Mais s'il y a
10 eu des bombardements les 22 et 23, pouvez-vous nous expliquer pourquoi le
11 MUP ne s'est pas rendu immédiatement sur place pour effectuer les constats
12 nécessaires ?
13 R. Il était impossible de forcer qui que ce soit à y aller, après ce que
14 ces hommes avaient vécu le 21. On ne trouvait plus personne pour y aller et
15 personne ne pouvait forcer quiconque à y aller.
16 Q. C'est une réponse très intéressante, vraiment très intéressante.
17 J'aimerais vérifier avec vous s'il s'agit du fruit de votre imagination ou
18 de la réalité. Est-ce que vous disposez d'une quelconque déclaration
19 émanant de quelqu'un dans laquelle ceci serait dit ? Avez-vous un rapport
20 de police où il est déclaré : "Je, soussigné capitaine untel ou untel, me
21 suis efforcé d'envoyer des hommes à la prison et ils ont refusé d'y
22 aller ?" Est-ce que vous disposez de telle déclaration ou est-ce que vous
23 inventez ce que vous dites au fur et à mesure, Monsieur Paponjak ?
24 R. Je n'invente pas. Vous m'avez demandé mon opinion à ce sujet et je vous
25 l'ai communiqué.
Page 39304
1 Q. Je ne vous ai pas demandé votre avis. Je vous ai demandé d'expliquer
2 quelque chose. C'est vous qui êtes venu ici avec de nombreux documents, de
3 nombreux rapports et vous affirmez de temps en temps avoir lu, en partie,
4 les documents à l'appui de ces images. S'il y a la moindre ambiguïté dans
5 mes questions, j'aimerais être tout à fait clair. Je vous demande de nous
6 montrer, ne serait-ce qu'un seul document, qui permette de penser que des
7 efforts ont été effectués pour envoyer les hommes à inspecter le lieu où
8 les bombes étaient tombées les 22 et 23 et où il serait dit que personne
9 n'y est allé en raison de la peur ressentie par ces hommes. Est-ce que vous
10 avez compris ma question ? Je vous demande maintenant votre réponse.
11 R. Je vous ai simplement dit que je ne pensais pas que quiconque ait pu
12 forcer quelqu'un à se rendre sur les lieux après ce que ces hommes avaient
13 vécu le 21 car tant qu'il y avait des avions qui survolaient cet endroit et
14 qui bombardaient, personne n'était prêt à y aller pour encourir une mort
15 certaine.
16 Q. Comprenons-nous bien. Lorsque quelqu'un s'est rendu sur place pour
17 filmer les images tournées le 24, est-ce que vous pouvez nous dire qu'il y
18 avait une communication directe ave l'OTAN, ce jour-là et que quelqu'un, un
19 représentant de l'OTAN avait déclaré garanti qu'il n'y aurait pas de
20 bombardement, ce jour-là ? Jamie
21 Shea vous a téléphoné et vous a dit qu'il n'y aurait pas de bombardement de
22 la prison de Dubrava, ce jour-là ?
23 R. Non. Je suppose qu'à ce moment-là, il n'y avait pas d'avions survolant
24 les lieux et que les gens qui vérifiaient la situation avançaient qu'ils
25 étaient sûrs que la sécurité était assurée et qu'on pouvait tourner les
Page 39305
1 images.
2 Q. Comment est-ce que vous le savez ? Comment est-ce que vous pouviez
3 savoir les choses avant qu'elles ne se passent ? Vous inventez ce que vous
4 êtes en train de dire au fur et à mesure, Monsieur Paponjak, n'est-ce pas,
5 parce que vous êtes venu ici pour vous efforcez d'aider l'accusé.
6 R. Est-ce que vous pensez vraiment qu'il n'y avait pas d'équipes de
7 reconnaissance, que personne ne vérifiait la situation et ne rendait compte
8 des vols d'avions dans cette situation ?
9 Q. Est-ce que des éléments de preuve démontrant cela figure dans le
10 dossier de Duvrava ? Est-ce que je peux trouver un document qui le
11 démontre ?
12 R. Ceci n'a rien à voir avec le dossier Dubrava.
13 Q. Poursuivons la diffusion des images. Il y a une chose que montre ces
14 images - je ne vais pas vous interroger précisément à ce sujet maintenant,
15 mais peut-être un peu plus tard - nous voyons des dégâts subis par les
16 bâtiments importants par rapport à ceux du 21. Par exemple, nous avons
17 quelques clichés dont j'aimerais qu'ils soient placés sur le
18 rétroprojecteur, qui nous montrent ce qui s'est passé les 21 et 24. Nous
19 allons regarder ces clichés.
20 M. NICE : [interprétation] Je n'ai pas besoin d'en demander le versement au
21 dossier.
22 Q. Ce sont des images de la zone où se trouvent les installations de
23 chauffage. L'une a été prise le 21. Vous devrez nous faire confiance sur la
24 date. Est-ce que vous voyez cette image diffusée grâce au système Sanction,
25 mais qu'on voit également grâce au rétroprojecteur.
Page 39306
1 Voici l'image prise le 21 et la deuxième qui a été prise le 24.
2 On voit que les dégâts qu'on constate sur les bâtiments les plus
3 intéressants pour nous sont un peu différents sur ces deux images, n'est-ce
4 pas ? N'est-ce pas ?
5 R. Vous me demandez mon commentaire ?
6 Q. Oui, je vous prie.
7 R. Il faudrait montrer ces images à un expert en construction et pas à
8 moi.
9 Q. Cela --
10 M. KAY : [interprétation] Un témoin de l'Accusation, je tiens à le rappeler
11 aux Juges, Jacky Rowland a déclaré qu'il y avait eu des changements
12 importants sur les bâtiments entre sa visite du 21 et sa visite du 24; ceci
13 figure dans la déclaration de cette femme.
14 M. NICE : [interprétation] Oui. Un bâtiment a été endommagé entre-temps,
15 effectivement. Nous pouvons le voir, également et je sais que M. le Juge
16 Kwon s'est intéressé à cela, au moment de la diffusion des images. Mais
17 nous voyons, également, les dégâts qui ont été décrits par Jacky Rowland.
18 J'aimerais que nous revenions au système électronique Sanction.
19 Q. Alors, nous sommes en train de regarder cette séquence vidéo qui n'est
20 pas datée, les images que nous regardions, il y a quelques instants. Ceci
21 n'a rien à voir avec le caractère très professionnel des deux premières
22 séquences vidéo que nous avons vues, auparavant parce qu'au départ, le
23 tournage est assez lent, mais il s'accélère rapidement au moment où on voit
24 des images des cadavres. Est-ce que vous vous souvenez de cela, Monsieur
25 Paponjak ?
Page 39307
1 R. Je n'étais pas sur place au moment du tournage des images. Je suppose
2 que ceux qui tournaient ces images voulaient le faire le plus rapidement
3 possible pour pouvoir partir, quitter les lieux le plus rapidement possible
4 et travailler sur ces images ultérieurement.
5 Q. Pourquoi est-ce qu'ils auraient voulu partir si vite ? Pourquoi ? Vous
6 venez de dire qu'ils voulaient partir. Pourquoi auraient-ils voulu partir
7 si vite s'il n'y avait pas d'avions ?
8 R. Quand ils sont arrivés, il n'y avait pas de danger, mais le danger
9 existait de voir revenir les avions à tout moment.
10 Q. J'aimerais que nous traitions, à présent, de quelques détails
11 complémentaires. Que voyons-nous ici ?
12 R. J'essaie de reconnaître ces images, mais je n'y parviens pas.
13 Q. Est-ce que c'est bien le réfectoire et le trou dans le plafond de cette
14 pièce, sans aucun cadavre en dessous ? Est-ce que c'est bien cela ?
15 Ici, on voit les dégâts que l'on a constatés dans le réfectoire, mais on ne
16 voit aucun signe de la moindre personne tuée par les bombes. Vous voyez les
17 tables et les chaises. Vous avez un commentaire à ce sujet ?
18 R. Je ne sais pas. Je n'étais pas sur place ce jour-là.
19 Q. C'est vous qui avez apporté ces images, cette séquence vidéo et,
20 apparemment, vous êtes incapable de les commenter. Je vous reposerai
21 quelques questions un peu plus tard à ce sujet. En tout cas, passons à
22 autre chose. Nous voyons une autre séquence ici qui est datée. Nous avons
23 un certain nombre de clichés de cette séquence et vous voyez ici sur ce
24 cliché, dont je demande qu'il soit placé sur le rétroprojecteur, un
25 cadavre.
Page 39308
1 Il est clair, n'est-ce pas, que l'indentification ainsi que la date du
2 décès de ces personnes ont été enregistrées par d'autres personnes à la
3 prison ?
4 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous ne voyons pas. Le rétroprojecteur
5 ne fonctionne pas.
6 M. NICE : [interprétation] Que l'on mette en marche, le rétroprojecteur.
7 Q. Nous voyons le nom ici d'Eminazeri -- peut-être que ce n'est pas très
8 lisible. En tout cas, sur la version papier, on le lit très facilement. La
9 date du décès à Dubrava est celle du 23 mai. C'est celle qui est indiquée
10 sur ce papier. Est-ce que vous avez vu cela au moment de la diffusion des
11 images vidéo ?
12 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Robinson.
13 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui.
14 L'ACCUSÉ : [interprétation] Ceci n'est pas acceptable car M. Nice affirme
15 qu'il s'agit de la date du décès. Alors que cela pourrait être la date à
16 laquelle le cadavre a été ramené. Cela peut être n'importe quelle autre
17 date. Il n'est pas dit qu'il s'agit de la date du décès. Nous lisons
18 simplement 23 mai. Peut-être, est-ce la date à laquelle ce cadavre a été
19 filmé, mais M. Nice part du principe que c'est la date du décès qui est
20 indiquée ici.
21 M. NICE : [interprétation] J'aimerais que nous regardions --
22 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Qu'a dit le témoin en réponse à la
23 question ?
24 Est-ce que vous avez un commentaire par rapport à la question de M.
25 Nice au sujet de la date, Monsieur le Témoin, quand au fait que cette date
Page 39309
1 serait celle du décès ?
2 LE TÉMOIN : [interprétation] Je me suis efforcé de dire que je ne savais
3 pas ce que signifiait cette inscription.
4 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Très bien. Monsieur Milosevic, ce
5 que vous venez de dire aurait être aussi bien pu être dit au cours des
6 questions supplémentaires.
7 M. NICE : [interprétation]
8 Q. Voyez-vous, Monsieur le Témoin, nous avons un certain nombre
9 d'exemplaires de ceci à l'intention des Juges -- non, désolé, nous n'en
10 avons pas. En tout cas, ce qui s'est passé, c'est la chose suivante, on
11 voit ici le dernier mot sur l'écran "Dubrava". Donc, Monsieur Paponjak,
12 nous avons une date. Nous avons l'intervention de l'accusé qui a essayé de
13 vous venir en aide pour vous aider à imaginer et à inventer. Nous avons un
14 nom. Nous avons des images, en quelle langue est-ce que ces mots sont
15 écrits ?
16 R. Je ne sais pas si ce sera considéré, encore une fois, comme le fruit de
17 mon imagination, mais j'ai dit hier que ces annotations ne signifiaient pas
18 que nous les avions écrites. Je ne sais pas qui a écrit cela et je répète
19 ma réponse d'hier.
20 Q. Est-ce en Albanais ?
21 R. Je suppose parce que --
22 Q. Apparemment, ceci aurait été écrit par un prisonnier albanais du Kosovo
23 au sujet d'un autre prisonnier. Si nous regardons cet autre cliché, nous
24 voyons qu'il date du 22. Je demanderais qu'il soit placé sur le
25 rétroprojecteur, car j'aimerais en terminer sur ce sujet. J'ai encore une
Page 39310
1 question au sujet de la vidéo et j'en aurais terminé avant la pause. Je
2 demande aux Juges quelques instants de patience.
3 Voici un autre cliché datant du 22. Vous le voyez sur le
4 rétroprojecteur. Nous voyons une date, un nom et la mention "Dubrava".
5 Voilà un format qui a été utilisé pour tous ces clichés. Nous voyons la
6 date à laquelle ces personnes sont décédées et pour l'une de ces personnes,
7 nous voyons la date du 23 et il y en a un certain nombre pour lesquels nous
8 voyons la date du 22.
9 R. Je répète que je ne sais pas à quoi il est fait référence ici. Je pense
10 que nous avons bien démontré que nous avions travaillé exactement comme il
11 fallait que nous travaillions. Tous les détails ont été enregistrés par
12 nous. Il ne s'agit, en aucun cas, d'un quelconque effort déployé par nous
13 comme vous l'affirmez pour masquer ou couvrir une quelconque conspiration.
14 Voilà exactement comment les choses se sont passées. C'est à cela que les
15 images font référence. Je ne sais pas qui est l'auteur de cette note, mais
16 ce sont des spécialistes de la police criminelle qui ont pris ces photos au
17 moment où ils ont découvert les faits.
18 Q. Voyez-vous, vous avez parlé du document Bojic datant du 22 mai,
19 intercalaire 46.3 où il est fait référence à des bombardements ultérieurs
20 survenus après le 22 mai, à 6 heures dix du matin. Même si nous partons du
21 principe que le juge d'instruction avait raison, ce que je réfute. Même si
22 nous admettions que ceci serait exact, cela ne rendrait pas compte des
23 assassinats du 23, à moins que vous ayez des documents prouvant qu'il y a
24 eu des survols de la région ce jour-là ?
25 R. Qu'est-ce que cela a à voir avec des assassinats ?
Page 39311
1 Q. Voyez-vous, ce que je vous affirme, c'est qu'un certain nombre de
2 prisonniers de Dubrava ont été tués après les bombardements et que c'est
3 cela que nous voyons sur les images. Que ce sont les dégâts que nous avons
4 vus. Est-ce que vous comprenez ?
5 R. Je comprends, mais le décès de ces prisonniers résulte des
6 bombardements. Ceci est incontestable et on le voit bien.
7 Q. Excusez-moi, incontestable ? Trente personnes ont des balles qui ont
8 traversé de part en part leurs crânes et qui sont ressorties par un autre
9 orifice. Est-ce que ceci a été provoqué par des bombardements ? Est-ce que
10 vous nous expliquez quel genre de bombardement peut être responsable de ces
11 impacts de balles qui sont des impacts de balles tout à fait courants,
12 Monsieur Paponjak. Peut-être n'étiez-vous pas au courant de cela ?
13 R. De quels impacts de balles parlez-vous ?
14 Q. Je parle d'impacts provoqués par des balles tirées par des fusils. Je
15 n'ai pas le diamètre de ces impacts à votre disposition mais, je vous en
16 prie, regardez un petit peu, nous voyons un certain nombre d'images. Je
17 crois qu'il y a une balle qui est rentrée par le haut du crâne de quelqu'un
18 et qui est ressorti par une partie inférieure du corps. Est-ce que vous
19 pourriez, je vous prie, nous aider sur ce point ? Je ne voudrais pas
20 empiéter trop largement sur l'heure de la pause. Je peux vous montrer un
21 certain nombre de photographies et vous verrez certaines ont été versées au
22 dossier et certaines d'entre elles vous montreront dans quelles conditions
23 ces personnes sont mortes.
24 M. NICE : [interprétation] Peut-être devrais-je remettre cela à la reprise
25 de nos débats après la pause, mais ce sera la seule chose que je remettrais
Page 39312
1 à plus tard. Il y a d'autres images que j'aimerais soumettre au témoin tout
2 de suite avant de parler de la déposition de Baccard.
3 Q. Alors, voilà, vous voyez quelques images.
4 [Diffusion de cassette vidéo]
5 M. NICE : [interprétation] Très bien, très bien.
6 Q. Vous voyez apparemment des techniciens sont en train de filmer.
7 Arrêtez-vous là. Arrêt sur image. Je demande un arrêt sur image. Est-ce que
8 vous voyez le fusil dans la main de ce technicien ?
9 R. Je ne sais pas si c'est un technicien ou un membre des forces de
10 sécurité.
11 Q. Il semble faire partie du groupe d'hommes qui ont photographié les
12 cadavres. Vous êtes policier. Vous l'étiez, en tout cas, à l'époque. Vous
13 connaissez les uniformes. Quels sont ces uniformes ? Sont-ce les uniformes
14 de la police spéciale, de paramilitaires ? Quels sont ces uniformes ?
15 R. J'aimerais que l'on revienne en arrière dans la vidéo et qu'on fasse un
16 arrêt sur image pour me permettre de les reconnaître éventuellement. Mais
17 cela n'aurait rien d'étonnant si des techniciens ou d'autres personnes sur
18 place avaient un fusil à la main. La personne que l'on vient de voir sur
19 l'image est sans doute un technicien, membre de l'équipe d'hommes qui
20 enquêtaient sur place, nous avons vu également un uniforme de policier il y
21 a quelques secondes. Mais les techniciens sont du personnel habilité à se
22 rendre sur place par le ministère de l'Intérieur et il n'y aurait
23 d'étonnant à ce qu'ils portent un fusil en situation de guerre car à
24 l'arrivée et au départ ils peuvent être attaqués, ils l'ont d'ailleurs été
25 au moment de quitter les lieux.
Page 39313
1 Q. Mais on ne voit pas de fusil dans les mains d'autres personnes.
2 R. Ils n'ont pas été filmés à leur sortie des véhicules. Je ne crois pas
3 que nous ayons vu de telles images. Le reste du temps, ils portaient sans
4 doute un fusil. Il était très courant et normal pour eux de porter un fusil
5 dès lors qu'ils se rendaient sur place et quittaient la ville et également
6 au moment de leur retour en ville. C'était une situation de guerre. Il y
7 avait des attaques un peu partout, des terroristes en action, donc il était
8 tout à fait normal que ces hommes soient armés de fusils.
9 Q. Sur la séquence vidéo, nous voyons des matelas à l'air libre et ces
10 hommes ont été forcés de s'aligner avant d'être abattus par balles. Au
11 cours des journées suivantes, certains ont été tués à l'aide de grenades.
12 Nous avons vu toutes les lésions, toutes les blessures sur leurs corps sur
13 des images vidéo qui correspondent à ces dires. Certains ont été tués par
14 le bombardement, d'autres par des grenades et d'autres encore par balles.
15 Alors, voilà la question que je vous pose et je vous demande d'y répondre.
16 R. Les responsables de l'enquête de police, de l'enquête criminelle de la
17 police menée par le SUP de Pec, ont enquêté avec le plus grand soin et
18 examiné ces séquences vidéo avec le plus grand soin. Rien sur ces images
19 n'indique que des personnes aient été abattues par balles comme vous
20 l'affirmez. La conclusion des experts sur la base des éléments disponibles
21 consiste à dire que ceci était la conséquence des bombardements de l'OTAN
22 et rien d'autre.
23 Q. Je vais en terminer --
24 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Nice, je pense que nous
25 allons faire la pause maintenant, le moment est tout à fait bien choisi.
Page 39314
1 Nous avons déjà cinq minutes de retard, donc 20 minutes de pause.
2 --- L'audience est suspendue à 10 heures 36.
3 --- L'audience est reprise à 11 heures 00.
4 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Nice, vous avez la parole.
5 M. NICE : [interprétation]
6 Q. Monsieur Paponjak, nous avions cette série de séquences vidéo; nous
7 avons abandonné la partie où nous voyons les hommes armés de fusils dans la
8 voiture et dans la séquence, on voyait des corps de prisonniers dans la
9 prison. Nous arrivons à la dernière partie où il y a arrêt sur image et on
10 retrouve une date, celle du 25, on voit aussi l'heure et il s'agit des
11 obsèques.
12 M. LE JUGE KWON : [interprétation] C'est toujours sur le système
13 d'affichage Sanction.
14 M. NICE : [interprétation] Oui, excusez-moi, Monsieur le Juge.
15 Q. On voit ici les corps, l'un après l'autre. C'est vous qui avez produit
16 cette vidéo, n'est-ce pas ? Pouvez-vous nous aider. Tout d'abord, à votre
17 connaissance, est-ce qu'il s'agit uniquement d'Albanais du Kosovo qui ont
18 été enterrés cette fois-là ou est-ce qu'il y avait aussi les Serbes ?
19 R. On a enterré tous les cadavres qu'on a trouvés.
20 Q. C'étaient tous des Albanais du Kosovo ?
21 R. Je pense que oui.
22 Q. On a relevé leurs empreintes digitales afin de déterminer leur
23 identité; c'est ce que montre un de vos rapports.
24 R. Oui, c'est exact.
25 Q. Il était évident que dans la distinction que vous avez faite entre
Page 39315
1 l'inquiétude, à l'arrivée des bombes et d'autres moments où il n'y avait
2 pas cette inquiétude-là, manifestement, la personne qui filme ces vidéos
3 prend tout son temps. Elle n'est pas pressée, n'est-ce pas ?
4 R. Oui. On a travaillé à ciel ouvert sur un secteur qui n'a pas été la
5 cible des attaques et on ne s'attendait pas à ce qu'un tel territoire
6 puisse être ciblé quand bien même les avions arriveraient.
7 Q. Qui a décidé de ne pas essayer de déterminer en examinant les corps
8 quelle était la cause des décès ?
9 R. Je ne sais pas que les corps n'ont pas été examinés. Je ne le savais
10 pas.
11 Q. Je vois. Alors, je vous demande ceci : retrouvez dans vos documents
12 celui où on fait une analyse, corps après corps, pour déterminer la cause
13 du décès.
14 R. Je pense que la cause du décès ne saurait être déterminé que par
15 autopsie et on n'avait pas le temps, ni les possibilités de le faire; les
16 autopsies n'étaient faites qu'à Pristina.
17 Q. Même s'il n'était pas possible de faire une autopsie complète, les
18 photographies montrent qu'on n'a même pas enlevé les vêtements de ces
19 cadavres, mis à part quelques pantalons qui ont été enlevés. Qui a pris
20 cette décision de ne même pas procéder à un examen superficiel pour voir si
21 ce qu'on a constaté, s'agissant de
22 37 % d'entre eux, pour constater, par exemple, que ces personnes avaient
23 été tuées par balle ?
24 R. La décision relative à l'autopsie est toujours prise par le juge
25 d'instruction, en application de notre législation. Ce n'est pas le
Page 39316
1 ministère de l'Intérieur qui en décide. Le juge d'instruction procède au
2 constat et c'est lui qui décide d'enterrer ces cadavres.
3 Q. Comment s'appelle ce juge d'instruction ?
4 R. Il y a un constat effectué sur les lieux qui est signé par le juge
5 d'instruction, Vladan Bojic.
6 Q. C'est celui qui a été blessé, lorsqu'il y a eu ce bombardement du 19 ou
7 du 21 -- non, du 21, plus exactement. Qui a pris cette décision -- où se
8 trouve le document qui aurait l'explication suivante, qui expliquerait
9 comment on a décidé d'enterrer si vite ces corps sans qu'il y ait d'examen
10 afin de déterminer la cause des décès ?
11 R. Quoique blessé, le juge d'instruction Bojic a continué à accomplir sa
12 mission; ce n'est pas le seul cas. Tous ceux qui ont été légèrement blessés
13 ont continué à travailler, à moins qu'une hospitalisation n'ait été
14 nécessaire où la personne concernée serait empêchée de travailler.
15 Q. Maintenant, où se trouve le document faisant état de sa décision ?
16 Parce qu'on a beaucoup de classeurs. Où est-ce que je vais le trouver ?
17 R. En page 2 du PV du constat et je vous indique qu'il s'agit de
18 l'intercalaire 46. 46.1.
19 Q. Continuez.
20 R. Je peux vous en donner lecture, si vous n'avez pas la traduction.
21 Q. Quelle est la partie qui nous donne toutes ces explications ? Nous
22 avons déjà examiné une partie de ce document où il était question du survol
23 d'avions, mais où est-ce qu'on trouve le passage qui nous explique pourquoi
24 on a décidé d'enterrer ces corps sans qu'il y ait examen préalable ?
25 R. Dans la deuxième prolongation du constat en date du
Page 39317
1 25 mai 1999, on dit : "En l'absence des circonstances de sécurité les plus
2 élémentaires, j'ai donné l'ordre à la police scientifique de procéder à
3 l'établissement de schéma --
4 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Une référence spécifique, s'il vous
5 plaît.
6 M. NICE : [interprétation] Intercalaire 46.1, page 2 en anglais, bas de la
7 page, sous la rubrique "Poursuite de l'enquête sur les lieux."
8 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Poursuivez.
9 LE TÉMOIN : [interprétation] L'ordre consistait à procéder à des photos et
10 ensuite, à l'enregistrement vidéo. C'est la raison pour laquelle "j'ai
11 ordonné le déplacement des personnes tuées et de les emmener au cimetière
12 albanais de Donja Susica à quelques kilomètres de ces lieux en direction de
13 Kosovska Mitrovica en passant par Zubin Potok. Après avoir déplacé la
14 totalité des cadavres vers cette destination, j'ai donné l'ordre de prendre
15 des photos et de prendre les empreintes de tous les cadavres. J'ai,
16 également, donné l'ordre de procéder à l'examen physique de la totalité des
17 cadavres, chose qui a été réalisé par le médecin M. Stijovic, spécialiste
18 en chirurgie générale, travaillant à l'hôpital générale de Pec. Tout ce
19 processus a duré jusqu'au 26 mai de cette année, à 10 heures. On a déplacé
20 de ce centre pénitentiaire un total de 93 cadavres."
21 M. NICE : [interprétation] Un instant, s'il vous plaît.
22 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, oui, vous voulez
23 intervenir.
24 L'ACCUSÉ : [interprétation] M. Nice a interrompu le témoin dans la lecture
25 de la dernière phrase qui est pertinente pour la question. Elle s'énonce
Page 39318
1 comme suit : "Après avoir effectué toutes ces opérations en matière de
2 police scientifique, j'ai donné l'ordre de procéder à l'enterrement
3 individuel des cadavres suivant la procédure prévue par la loi." C'est là,
4 la réponse à la question qui a été posée.
5 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Effectivement, c'est à la page 2.
6 M. NICE : [interprétation] Merci. Je remercie l'accusé.
7 Q. Vous voyez, Monsieur Paponjak, lorsqu'on essaie de dissimuler des
8 traces, de les effacer, on dit quelquefois des choses qu'on ne devrait pas
9 dire; on ne dit pas des choses qu'on devrait dire. Ici, à mon avis, c'est
10 un bon exemple parce que M. Bojic laisse entendre effectivement que dans
11 son rapport, on s'entend, qu'il aurait dû y avoir un examen physiologique
12 des corps. Pourriez-vous nous montrer, dans les séquences vidéo ou dans les
13 documents que vous avez présentés, une preuve qu'il y a eu examen des
14 corps, examen effectué par le Dr Stijovic ? Est-ce que vous pourriez nous
15 montrer ce passage ?
16 R. Qu'est-ce qui vous fait dire que cela n'a pas été effectué ?
17 Q. Regardez l'enregistrement vidéo. Vous l'avez examiné avec soin. Vous
18 avez expliqué aux Juges qu'il serait utile qu'il fasse de même.
19 On les voit, ils sont tout à fait habillés, à part quelques-uns. On voit
20 les engins de terrassement qui sont en train de creuser des tombes en
21 arrière-plan. Où se trouve la preuve de l'examen de ces corps pour
22 déterminer la cause de décès ? Cela ne se trouve pas sur ces
23 enregistrements dans cette séquence vidéo; il y a tellement de documents
24 qui ne sont pas traduits qu'il y en a peut-être un qui me montrera le
25 rapport du Dr Stijovic, lequel montrerait de quoi sont morts ces
Page 39319
1 malheureux.
2 R. Cela se trouve dans la documentation du tribunal du juge d'instruction,
3 mais pas chez nous. Parce que, pour nous, ce document n'avait aucune
4 pertinence au moment donné.
5 Le Dr M. Stijovic, spécialiste, a présenté un rapport au juge d'instruction
6 et non pas au SUP de Pec.
7 Q. Mais qu'est-ce que cela montrait -- ou est-ce que vous n'êtes pas en
8 mesure de nous le dire parce que ceci relève d'un autre ministère, mais
9 nous avons ici 37 % des victimes qui ont été tuées par balles. Qu'est-ce
10 que cela montre, en ce qui les concerne ?
11 R. Nous n'avons rien de la sorte.
12 Q. Qu'est-ce que vous voulez dire quand vous dites, vous n'avez rien de la
13 sorte ?
14 R. J'entends par là le secrétariat à l'Intérieur de Pec.
15 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Nice, il est dit, ici, que
16 toute la procédure s'est poursuivie jusqu'à 10 heures, le 26 mai de cette
17 année-là. J'aimerais que soit établie la durée d'un examen externe
18 superficiel, j'aimerais savoir combien de temps il a duré, si cela a
19 commencé le 25 mai.
20 M. LE JUGE KWON : [interprétation] On voit, ici, que ces images ont été
21 filmées à 13 heures 25.
22 M. NICE : [interprétation] Effectivement, si l'heure est exacte, cela s'est
23 passé dans l'après-midi.
24 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] On a examiné, à ce moment-là, 93
25 corps.
Page 39320
1 M. NICE : [interprétation]
2 Q. Pourriez-vous aider le Juge Robinson, Monsieur Paponjak, sur ce point ?
3 R. Je ne peux pas l'aider parce que je ne sais vraiment pas. Je n'étais pas
4 présent tout le temps; j'y suis resté peut-être une demi-heure pendant la
5 phase où on avait commencé à enterrer les corps.
6 Q. On a commencé à enterrer les corps quand après votre arrivée ?
7 R. L'enterrement avait déjà commencé.
8 Q. Dites-moi, est-ce que vous avez vu sur place le Dr Stijovic équipé
9 d'une blouse blanche ou verte avec des gants, qui aurait travaillé sous
10 tente à examiner les corps ? Est-ce que vous l'avez vu, ce faisant ou est-
11 ce que vous avez vu simplement le moment où on a enterré les corps qui
12 étaient revêtus ?
13 R. Sur place, j'ai vu les cadavres; j'ai vu un tracteur ou plutôt, c'était
14 une pelle mécanique qui permettait de creuser des tombes et j'ai vu une
15 quinzaine de personnes qui s'affairaient. Mais je n'ai pas vu de tente.
16 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que je peux poser une question ?
17 M. NICE : [interprétation] Bien entendu.
18 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Prenez la dernière phrase, de cet
19 intercalaire, l'intercalaire 46.1. Voici ce qu'elle dit : "La documentation
20 médico-légale fait partie intégrante de ce dossier." Qu'est-ce que cela
21 veut dire ? Est-ce que cela veut dire que le
22 Dr Stijovic a fait un rapport qui est inclus dans ces documents ?
23 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, cela ne signifie pas cela. Le juge
24 d'instruction donne des ordres aux différents intervenants pour ce qui est
25 des activités à déployer. Alors, la documentation technique de la police
Page 39321
1 scientifique, c'est ce que nous avons dans le dossier. C'est ce que nous
2 avons. Les autres intervenants, eux, qui font leur travail, communiquent
3 les résultats de leur travail au juge d'instruction, mais pas à nous. Nous
4 ne sommes qu'une partie de l'équipe qui procède à une instruction. Il y a
5 des professionnels dans différents métiers qui sont recrutés ou engagés par
6 le juge d'instruction et c'est à lui qu'ils présentent leurs rapports.
7 C'est la raison pour laquelle nous n'avons pas le rapport du Dr Stijovic et
8 éventuellement, d'autres rapports présentés à l'intention du juge
9 d'instruction. Ici, nous n'avons que ce qui était en notre possession à
10 nous.
11 M. LE JUGE KWON : [interprétation] J'ai beaucoup de peine à comprendre
12 comment il se fait que vous soyez en mesure d'apporter un rapport de
13 constats, celui rédigé par le juge Bojic, alors que vous n'avez pas été à
14 même d'amener un rapport important, très important, celui du Dr Stijovic.
15 LE TÉMOIN : [interprétation] Le juge d'instruction nous communique,
16 d'habitude, son procès-verbal, à lui. Dans certains dossiers, dans un
17 concours de circonstances, nous avons aussi des copies de jugements rendus,
18 mais nous n'avons pas le reste de la documentation. Cela ne nous est pas
19 communiqué, tout simplement.
20 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie.
21 M. NICE : [interprétation]
22 Q. Vous voyez, Monsieur Paponjak, vous étiez là. Mais si vous étiez agent
23 de la circulation, qu'est-ce que vous faisiez là ?
24 R. Comment, qu'est-ce que je faisais ?
25 Q. Vous étiez agent de la circulation. Que faisiez-vous sur le lieu d'un
Page 39322
1 constat alors qu'on enterre autant de gens ? Est-ce qu'il y a beaucoup de
2 circulation à organiser, à régler ?
3 R. Non, il n'y avait pas beaucoup de circulation, mais cela se trouvait
4 juste à coté de la route.
5 Q. Donc, vous étiez en patrouille et vous êtes simplement passé par là,
6 par hasard, là où on enterrait ces gens ou est-ce que c'est exprès que vous
7 êtes allé là ?
8 R. Non. Si, je suis allé dans une intention déterminée, mais je n'étais
9 pas en train de patrouiller.
10 Q. Pourquoi étiez-vous là, vous qui étiez un inspecteur chargé de la
11 circulation ? Quelle était votre mission ?
12 R. Je n'ai pas eu de mission concrète à ce sujet. Je n'ai eu aucune tâche
13 concrète. Je suis passé là pour me rendre compte, par moi-même, de ce qui
14 s'était passé.
15 Q. Simplement par curiosité, parce que vous vouliez savoir ce qui se
16 passait ?
17 R. Mais je n'avais pas de mission concrète, aucune mission concrète au
18 sujet de cette intervention.
19 Q. La première fois que vous êtes allé là, c'était le 19, vous y êtes allé
20 pour une raison précise ?
21 R. Pareil, je n'avais aucune mission concrète. Il y a eu des bombardements
22 et nous qui nous étions trouvés là, en avons entendu parler et nous nous
23 sommes déplacés sur les lieux.
24 Q. Revenons aux réponses que vous avez données lorsque je vous ai demandé
25 ce que vous avez vu à votre arrivée. Vous avez décrit les corps, le
Page 39323
1 tracteur, l'enterrement, si je partais de vos propres connaissances, je
2 vous ai demandé s'il y avait eu un examen physiologique superficiel des
3 corps, qu'est-ce que vous diriez en guise de réponse ?
4 R. Vous dire si je les ai vus moi-même ? Je vous répondrais que non, je ne
5 les ai pas vus.
6 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Paponjak, j'aimerais tirer
7 une chose au clair. C'est peut-être de ma faute, j'ai peut-être mal compris
8 ce que vous aviez dit, auparavant. Quelles sont vos fonctions précises au
9 bureau de Pec ?
10 LE TÉMOIN : [interprétation] A Pec, j'étais chef du département de la
11 police chargée de la circulation routière.
12 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je vous remercie. C'est plus clair,
13 maintenant.
14 M. NICE : [interprétation]
15 Q. En gardant la question et votre réponse à l'esprit, j'aimerais revenir
16 à un sujet que nous avions abordé, auparavant et j'en aurai ainsi terminé.
17 Souvenez-vous, j'ai laissé entendre que vous aviez bien pu tremper
18 dans les événements que ce que vous avez affirmé, notamment, en ce qui
19 concerne la famille Salihaj et en tout cas, s'agissant du déplacement des
20 corps en direction de Batajnica. Je vais vous présenter quelques détails
21 supplémentaires, s'agissant du déplacement de corps.
22 Une première chose : saviez-vous, est-il exact de dire que ce
23 déplacement de corps avait pour objectif d'éviter qu'on découvre que des
24 crimes avaient été commis ? Sans corps, il n'y a pas de crimes. Est-ce que
25 vous comprenez cela ?
Page 39324
1 R. J'ai compris votre question. Mais cela je ne le savais pas et
2 d'ailleurs, ce n'est pas vrai.
3 Q. Une seconde chose, autre hypothèse que je vous soumets, je vais être
4 clair. Ceci, à mon avis, va apparaître dans quelques mois dans des rapports
5 du domaine public. Alors, réfléchissez avec soin : est-ce que des corps de
6 Pec ont été trouvés sur les sites 2 et 3 [comme interprété] de Batajnica
7 dès 2002 ?
8 R. Non.
9 Q. Etes-vous --
10 R. Si vous le permettez, je peux vous expliquer ce que j'en savais.
11 Q. Bien entendu.
12 R. S'agissant du déplacement des corps, on en a parlé dans les journaux.
13 Ce sont les journaux et la télévision qui m'ont permis d'apprendre qu'on
14 avait découvert des cadavres. Je ne sais plus, au juste, quand, dans le
15 courant de cette année et rien d'autre. Nous n'avons obtenu aucune autre
16 information, encore moins une information qui dirait que c'étaient des
17 corps, des cadavres d'originaires de Pec.
18 Q. Entre décembre 2004 et avril 2005, le juge Dilparic a été chargé de
19 l'instruction et jusqu'à présent, plus de 50 corps venant de ces sites de
20 Batajnica ont été identifiés comme étant originaires de Pec. Le saviez-
21 vous ?
22 R. Nous avons obtenu une certaine quantité d'informations disant que des
23 cadavres auraient été identifiés et qu'ils auraient été confiés à des
24 familles originaires du Kosovo-Metohija, au point de contrôle. Cela est
25 exact et nous retrouvons cette trace-là dans notre documentation.
Page 39325
1 Q. Forcément, cela doit être de ma faute. Est-ce que je vous ai bien
2 compris ? Maintenant, vous reconnaissiez, parce que je viens de donner le
3 nom d'un juge d'instruction, vous venez d'admettre que vous saviez que des
4 corps de Pec avaient été trouvés à Batajnica.
5 R. C'est ce qui se rapporte à la question posée et relative au mois de
6 décembre de l'année passée. La première question se rapportait à 2002,
7 voire à 1999. Alors, je vous réponds avec précision, suivant la question
8 telle que posée.
9 Q. Vous êtes assis ici et tout le long, vous saviez que des corps de Pec
10 avaient été identifiés, avaient été trouvés à Batajnica et avaient été
11 restitués aux membres des familles respectives à Pec. Vous le saviez,
12 n'est-ce pas ?
13 R. Ce ne sont pas des cadavres de Pec. On a identifié des personnes qui
14 provenaient du territoire de Pec.
15 Q. Des personnes identifiées comme étant de la région de Pec ?
16 R. Oui.
17 Q. Mais ce matin, je vous ai posé des questions et je vais essayer de
18 retrouver les réponses précises que vous avez données, pour que vous les
19 examiniez. Vous ne pensiez pas que je pensais à des corps venant de la
20 région de Pec sur lesquels je vous ai posé ces questions ?
21 R. Mais il en découlerait que partant du fait qu'on ait identifié
22 certaines personnes ayant résidé à Pec, que c'était là, un cadavre qu'on
23 avait transporté de Pec vers là-bas. Nous, on a été informé du fait que des
24 personnes, des cadavres étant identifiées comme des personnes originaires
25 de Pec ont été ramenés. Mais cela ne signifie pas qu'on a exhumé les
Page 39326
1 cadavres de Pec pour les envoyer là-bas. Ils auraient pu se trouver là-bas
2 en provenance d'autres endroits.
3 Q. Ce matin, je vous ai posé des questions à propos du déplacement de
4 corps de Pec à Batajnica - je n'ai peut-être pas le temps de retrouver ce
5 passage - mais vous avez dit clairement que vous ne saviez absolument rien
6 du tout, à ce propos. C'est bien le cas, n'est-ce pas ?
7 R. Oui, pour ce qui est des transferts, des transports, rien.
8 Q. Maintenant, vous nous dites que vous êtes au courant de la restitution
9 des corps. Est-ce qu'on peut estimer que forcément, les réponses que vous
10 avez données, au départ, étaient des mensonges sous une forme ou une
11 autre ?
12 R. Vous n'en convaincrez personne parce que ces deux notions n'ont rien à
13 voir, l'une avec l'autre. Je ne sais rien au niveau du déplacement des
14 corps, des transports de corps. Je sais que des corps ont été restitués. On
15 les a découverts quelque part, on les a identifiés comme étant X et Y et on
16 les a restitués. Cela n'a rien à voir avec les transports.
17 Q. J'aimerais vous aider. Je reprends quelques-unes de vos réponses
18 concernant des corps qui auraient été transportés de Pec à Batajnica. Vous
19 avez contesté ce que j'avais dit : "Vous allez dire, tant que vous y êtes,
20 que c'est moi qui les ai déterrés. Cela ne s'est pas passé et je n'ai pas
21 du tout été partie prenante." Puis, vous avez dit : "Je ne peux rien dire
22 de ce genre," lorsque j'ai laissé entendre que vous y avez participé,
23 "parce que cela ne s'est pas passé. Je n'étais pas du tout au courant. A
24 fortiori, je ne peux pas vous dire que j'y aurais participé."
25 C'étaient vos réponses, mais vous essayiez d'induire la Chambre en
Page 39327
1 erreur, n'est-ce pas --
2 R. C'est exact.
3 Q. Vous essayiez d'induire la Chambre en erreur et vous avez été pris sur
4 le fait parce que vous ne pensiez pas que j'avais des preuves, à savoir que
5 le juge d'instruction vous avait déjà dit qu'il y avait des corps qui
6 avaient été transportés de Pec à Batajnica. Vous avez été pris sur le fait,
7 Monsieur Paponjak.
8 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous rappelle également que vous avez
9 déclaré, je vous cite : "Nous n'avons reçu aucune information à ce propos
10 et encore moins que c'étaient des corps de Pec qui auraient été trouvés à
11 cet endroit."
12 LE TÉMOIN : [interprétation] Non. Nous étions en train de parler de
13 cadavres emportés, transportés de Pec. De nos jours encore, il n'y a aucune
14 information, à ce sujet. L'opinion publique a su que des cadavres ont été
15 restitués à leurs familles respectives. Cela n'a été dissimulé à l'égard de
16 personne. Nous n'avons pas eu d'informations disant que des corps
17 réexaminés et exhumés dans les cimetières de Pec pourraient être
18 transportés vers d'autres secteurs de la Serbie. Mais nous avons une
19 information disant que des cadavres ont été exhumés et restitués à leurs
20 familles. Cela n'a rien à voir avec le fait de savoir si, effectivement,
21 ces corps ont été exhumés quelque part ou pas.
22 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] D'après ce que je comprends, voici
23 ce que dit le témoin : il y a peut-être des preuves montrant que des corps
24 ont été trouvés à Batajnica et restitués à leurs familles à Pec. Rien ne
25 prouve que ces corps auraient été exhumés à Pec et transportés à Batajnica.
Page 39328
1 D'après moi, c'est ce que le témoin dit. C'est compréhensible.
2 Mais je voudrais corriger une chose qui se trouve dans le compte
3 rendu d'audience. Lorsque vous avez dit au témoin : "Vous essayez d'induire
4 les Juges en erreur," il y a, au compte rendu, la réponse du témoin :
5 "C'est exact," mais soyons justes, vous n'aviez pas terminé votre
6 intervention, Monsieur Nice. Il faut que cela soit corrigé.
7 M. NICE : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
8 Q. Monsieur Paponjak, le Président vient de dire que votre réponse peut
9 être comprise, mais d'après nous, d'après moi, elle n'a aucun sens.
10 Pourriez-vous nous expliquer comment des corps de personnes tuées dans le
11 cadre d'événements qui se sont déroulés entre mars et juin 1999, se sont
12 emmenés, eux-mêmes, jusqu'à la base aérienne de Batajnica, à proximité de
13 Belgrade, pour être enterrés en même temps que d'autres corps qui avaient
14 été exhumés dans d'autres parties du Kosovo et transportés, afin de
15 dissimuler ces éléments de preuve ? Est-ce que vous pouvez nous donner une
16 explication à tout cela ?
17 R. Cela ne signifie toujours pas qu'ils ont été exhumés à Pec --
18 Q. Où est-ce qu'on les a exhumés ?
19 R. -- chose que vous avez voulu laisser entendre.
20 Q. Où est-ce qu'on les a exhumés ?
21 R. Cela, je ne sais pas.
22 Q. Je vous donne une dernière chance pour vous raviser. Nous avons
23 diverses sources d'information médico-légales et notamment, Zoran Aleksic,
24 un collègue à vous, un policier qui a été chassé parce qu'il était prêt à
25 dire la vérité, à propos de vous et de vos collègues. Voulez-vous réfléchir
Page 39329
1 une fois de plus pour savoir si vous, Vlahovic, Bulatovic, Milojevic,
2 Mladen et Zoran Stanisic avez participé à tout ceci. Est-ce que vous
3 voulez, peut-être, changer d'avis ?
4 R. Je n'ai pas besoin de me pencher ou de re-réfléchir à des choses qui me
5 sont connues. Ce que je puis vous affirmer une fois de plus, c'est que je
6 n'y ai pas pris part. Quand bien même cela serait arrivé et je n'ai pas eu
7 connaissance d'un tel cas.
8 Q. Soyons clairs, la police chargée de la circulation, c'était, notamment,
9 celui de participer à l'identification des corps, des cadavres qu'il
10 fallait transporter en fonction du sexe et de l'âge, c'était de laisser les
11 corps de l'UCK sur place pour emporter les corps de victimes innocentes. Ce
12 que je laisse entendre, c'est que vous et vos collègues, ce groupe de la
13 police, c'est ce que vous faisiez.
14 R. C'est tout à fait ridicule.
15 Q. Fort bien.
16 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci, Monsieur Nice. Monsieur
17 Milosevic, avez-vous des questions supplémentaires.
18 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Robinson, j'en ai.
19 Nouvel interrogatoire par M. Milosevic :
20 Q. [interprétation] Bonjour, Colonel.
21 R. Bonjour.
22 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, si vous avez
23 l'intention de poser des questions supplémentaires, je veux que vous
24 fassiez preuve de discipline et de rigueur. Vos questions doivent découler
25 des questions posées en contre-interrogatoire. Pas de questions directrices
Page 39330
1 et il faut que vous ne preniez pas trop de temps.
2 M. NICE : [interprétation] J'aurais dû préciser une chose avant d'en
3 terminer. S'agissant des pièces, je l'avais déjà dit, j'allais poser des
4 questions sans préjuger de leur recevabilité. Je vous présenterai mes
5 arguments en temps utile pour dire que les arguments et les documents
6 présentés par ce témoin ne sont pas recevables parce qu'il n'a aucune
7 connaissance personnelle de ces détails qui y sont mentionnés. Il a
8 uniquement compté sur d'autres qui ont créé ces documents et les seuils de
9 recevabilité exigibles n'ont pas été réunis. Les critères n'ont pas été
10 réunis.
11 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vous remercie. Monsieur
12 Milosevic, vous avez la parole.
13 M. MILOSEVIC : [interprétation]
14 Q. Tout d'abord, s'agissant des cadavres dont vient de terminer de parler
15 M. Nice. Colonel, pour ce que vous nous avez dit, à plusieurs reprises du
16 reste, que vous n'avez pas rédigé vous-même les documents que vous avez
17 signés. Ce n'est pas vous qui les avez rédigés. C'est ce que vous nous avez
18 dit. Alors, l'avez-vous dit pour expliquer que vous ne pouviez pas
19 connaître par cœur chaque détail ou pour souligner que vous ne les appuyiez
20 pas ou que vous ne confirmiez pas leur bien-fondé.
21 R. Les documents ont été rédigés ensemble. L'équipe qui s'en est chargé
22 l'a fait. J'ai participé à l'élaboration des documents, notamment, à la
23 confection des informations. En aucun cas, je n'ai voulu dire que je ne les
24 confirmais pas, parce que je ne puis qu'appuyer les résultats du travail de
25 l'équipe dont j'ai fait partie. Je soutiens la totalité de ces documents.
Page 39331
1 C'est le fruit de notre travail concerté et conjoint, et j'ai signé en ma
2 qualité du chef du secrétariat à l'Intérieur.
3 Je n'ai pas procédé à certains interrogatoires. C'est tout à fait
4 normal. Bon nombre de dossiers ont été traités par des policiers
5 scientifiques, mais ils étaient tous là, lorsque nous rédigions les
6 informations, ils étaient présents à nos côtés. J'ai des informations et
7 des connaissances directes de certains dossiers qui m'ont intéressé à titre
8 professionnel. Pour ce qui est d'autres cas, je n'ai pas été intéressé à
9 titre professionnel. C'est la substance du récit que je voulais relater et
10 qu'on ne m'a pas laissé relater.
11 Q. Vous avez l'occasion de l'expliquer maintenant. Tous ces documents ont
12 été élaborés au sein du secrétariat à l'Intérieur de Pec déplacé ailleurs
13 et ont été rédigés par une équipe sous votre direction ?
14 R. Tout à fait.
15 Q. Est-ce que tous ces documents sont passés par vos mains, par les mains
16 de vos collaborateurs qui ont travaillé dessus.
17 R. Oui. Sur certains de ces documents, il y a même des notes que j'ai
18 apposées moi-même.
19 Q. Bien. C'est tout ce que je voulais savoir.
20 R. Oui.
21 Q. Dites-nous, suite à l'instruction de la part de qui, est-ce que vous
22 avez rédigé ces informations qui sont celles du ministère de l'Intérieur de
23 Pec déplacé à Kragujevac.
24 R. Suite à l'ordonnance du ministre de l'Intérieur de la République de
25 Serbie.
Page 39332
1 Q. M. Nice a laissé entendre que vous l'avez fait pour m'aider. Qui se
2 trouvait à la tête du ministère de l'Intérieur lorsque vous l'avez fait ?
3 R. M. Dusan Mihaljlovic.
4 Q. M. Nice a dit que certaines personnes ont témoigné ici. Avez-vous
5 suivi, vous, au secrétariat à l'Intérieur, les témoins qui ont témoigné
6 ici ?
7 R. Je n'ai pas tout vérifié.
8 Q. Bien. On vous a demandé de préparer cette documentation. On vous a
9 donné la méthodologie et les intitulés à prévoir. Les personnes qui vous
10 ont donné instruction de préparer cette documentation sont les mêmes
11 personnes qui m'ont envoyé ici ou pas ?
12 R. Il découle de tout ceci que cela est tout à fait vrai.
13 Q. Bien. Alors peut-on supposer que ces gens avaient voulu que vous
14 fassiez quelque chose pour m'aider ?
15 R. Je n'ai aucune raison de penser chose pareille.
16 Q. Bon. Penchez-vous maintenant sur ce qui a fait l'objet du contre-
17 interrogatoire de M. Nice. L'information qui figure à l'intercalaire 2.4,
18 intitulé : "Informations relatives aux déportations forcées des Albanais,
19 persécutions sur des bases raciales et confiscations de leurs pièces
20 d'identité". Est-ce que c'est là l'intitulé qui vous a été confié par le
21 ministère de l'Intérieur afin que vous fournissiez tous les renseignements
22 que nous pouvions recueillir sous cet intitulé ?
23 R. Exact.
24 Q. Est-ce que c'est la raison pour laquelle cet intitulé a été utilisé
25 suivant la méthodologie qui vous a été indiqué par le ministère de
Page 39333
1 l'Intérieur ?
2 R. C'est exact. Nous ne pouvions pas prendre la liberté de faire
3 autrement.
4 Q. Est-ce qu'on dit dans l'avenant et je vais dire que le paragraphe 7 de
5 l'acte d'accusation qui me concerne, parce qu'ici, ce papier ne dit pas
6 l'acte d'accusation me concernant. Est-ce que cela signifie que vous aviez
7 pour mission de recueillir toutes les informations relatives aux
8 déportations forcées des Albanais et leurs persécutions sur des bases
9 raciales, la confiscation de leurs pièces d'identité qui, d'une façon ou
10 d'une autre, viendraient confirmer ce que l'on allègue ici ?
11 R. C'est exact.
12 Q. Est-ce qu'il est clair, il découle clairement de ceci que cela a été
13 fait, non pas pour m'aider moi, mais pour aider M. Nice dans la
14 confirmation des thèses qu'il avance.
15 R. Je ne sais pas. Enfin, je crois que cela a été fait pour déterminer la
16 vérité. C'est ainsi que je l'ai compris, mais on peut le comprendre
17 autrement aussi.
18 Q. Bien. Si l'on demande de collecter toutes les informations relatives à
19 la déportation des Albanais et leurs persécutions sur des bases raciales
20 avec confiscation de pièces d'identité, est-ce que votre équipe a eu pour
21 mission de recueillir tous les renseignements relatifs à ces déportations,
22 persécutions sur des fondements raciaux ?
23 R. Oui, c'est exact.
24 Q. Quelles sont les conclusions que vous avez tirées. Ici, on dit : "Les
25 informations nous disent que cela n'est pas exact."
Page 39334
1 R. Tout à fait exact.
2 Q. Je viens d'entendre l'interprète qui me demande de faire des pauses et
3 je suis bien d'accord avec la nécessité de le faire.
4 Donc, est-il clair ou pas de dire que votre mission consistait à fournir
5 des informations qui se rapportaient à des actes commis contre des Albanais
6 et vous en avez pris bonne note.
7 R. C'est exact.
8 Q. Bien. Dites-moi, vous a-t-on demandé, puisque nous avons ici des
9 documents où l'on voit que cela se rapporte à des délits au pénal au
10 préjudice d'Albanais, alors, veuillez m'indiquer si le ministère de
11 l'Intérieur vous a demandé de fournir d'abord les informations relatives au
12 délit au pénal au détriment des Albanais ou au détriment des Serbes,
13 Monténégrins, Rom et autres.
14 R. On nous a d'abord demandé de procéder à l'étude des infractions au
15 pénal contre les Albanais. Ensuite, on nous a demandé d'englober celles qui
16 étaient à l'encontre des Serbes et autres.
17 Q. Quand il est question de déportations d'Albanais, de persécutions à
18 l'encontre d'Albanais, vous a-t-on demandé ou pas de parler des délits au
19 pénal au détriment d'Albanais ?
20 R. Oui.
21 Q. On ne vous a pas demandé de parler de ceux qui étaient au détriment des
22 Serbes ?
23 R. Cela, on ne l'a pas demandé.
24 Q. Au bout de combien de temps vous a-t-on demandé de faire une
25 information au sujet des délits au pénal au détriment des Serbes ?
Page 39335
1 R. Quelques mois plus tard, mais je ne sais pas vous donner de réponse
2 précise.
3 Q. Est-ce que cela s'est passé après la rédaction de l'information
4 relative au délit perpétré au détriment des Albanais ?
5 R. Tout à fait exact.
6 Q. Très bien. M. Nice vous a posé une question notamment au sujet de
7 l'information relative aux événements avec décès entre le 1er janvier 1998
8 et le 30 juin 1999 qui figure à l'intercalaire 1.4. Il vous a posé des
9 questions au sujet du point 59, dont je n'ai pas besoin de reparler. Il
10 s'agit, comme vous le savez, dont je vais vous citer une partie, on dit que
11 : "Les membres de la police ont riposté à ces tirs." D'abord, on dit qu'une
12 patrouille de la police a été attaquée, et à cette occasion huit membres de
13 l'UCK ont été tués et on énumère leurs noms.
14 M. Nice, à un moment donné, vous a posé la question de savoir ou plutôt a
15 affirmé que des personnes auraient été égorgées. Savez-vous nous dire s'il
16 y a un renseignement quelconque qui dirait qu'il n'en n'a pas été comme
17 cela est indiqué ici, mais qu'il y aurait eu des personnes à la gorge
18 coupée ?
19 R. Quelles gorges coupées ? Il n'en est pas question. Il n'y a rien de
20 tout cela.
21 Q. Est-ce que ce dossier tout entier avec les dossiers A/III, et le
22 dossier complet existe au ministère de l'Intérieur, le SUP de Pec, à
23 Kragujevac ?
24 R. Cela existe, tout comme la totalité des autres dossiers.
25 Q. Est-ce que tous ces dossiers qui sont mentionnés à l'intercalaire 1
Page 39336
1 dans la liste A, suivant un ordre alphabétique et suivant les noms des
2 individus qui font l'objet du dossier ?
3 R. Oui. Cela existe parce que c'est à partir de ces dossiers-là que cette
4 liste a été établie.
5 Q. S'agissant de toutes ces informations que vous fournissez ici, elles
6 existent dans la documentation et il y a des dossiers individuels concrets
7 avec des renseignements se rapportant à chaque dossier au cas par cas.
8 R. C'est tout à fait exact.
9 Q. Est-ce que cela signifie que chacun des documents figurant aux
10 intercalaires constituent un document officiel du ministère de l'Intérieur
11 avec un numéro et une signature qui se fondent sur des dossiers, qui se
12 basent sur des dossiers tels que traités au sein de ce ministère de
13 l'Intérieur ?
14 R. Oui. On ne pouvait pas procéder autrement.
15 Q. Bien. J'espère que nous avons tiré tout ceci au clair.
16 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je vais vous demander, Messieurs, de bien
17 vouloir verser ces éléments de preuve au dossier, notamment si l'on ne perd
18 pas de vue le fait que M. Nice a présenté des éléments de preuve de
19 deuxième, troisième et cinquième main comme les écritures de "Human Rights
20 Watch" et ce livre "Under Orders" à savoir "Sous les ordres" qui n'ont
21 aucune valeur probante. Alors, qu'ici, il s'agit de documents officiels
22 d'instances officielles, de tribunaux et de juges d'instruction collectés
23 au cours des instructions. Si vous comparez la valeur probante des éléments
24 de preuve fournis, j'espère que vous ne perdrez pas de vue le fait que des
25 officiers -- des documents officiels devraient forcément avoir la priorité
Page 39337
1 par rapport au soi-disant éléments de preuve présentés par M. Nice, y
2 compris les émissions montées de toutes pièces de la BBC, et des autres,
3 comme on a pu s'en rendre compte à maintes reprises jusqu'à présent.
4 M. MILOSEVIC : [interprétation]
5 Q. Monsieur Paponjak, Colonel, dites-nous d'où vous êtes originaire ?
6 R. Je suis né à Rudo.
7 Q. Comment ?
8 R. Rudo.
9 Q. Vous êtes de Rudo. Je suis originaire de Pozarevac. Dans ce document
10 que M. Nice essaie de vous montrer et de vous expliquer en langue serbe, je
11 vous parle du document du département militaire de Pec, qui parle "du
12 déplacement d'une partie de la population de la zone de responsabilité,"
13 est-ce qu'on parle de la population originaire de cette localité ?
14 R. J'ai essayé de l'expliquer cela, mais bon nombre de personnes ont l'air
15 de comprendre la langue serbe mieux que moi-même ici.
16 Q. Si on voulait les faire déménager, on les faisait déménager hors de
17 cette région, ici, il est question --
18 M. NICE : [interprétation] Il y a une question qui commence par : "Il est
19 clair…" en général, c'est ce qui prépare une question directrice.
20 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, terminez votre question,
21 Monsieur Milosevic.
22 L'ACCUSÉ : [interprétation] Bien.
23 M. MILOSEVIC : [interprétation]
24 Q. Est-ce que cette première phrase s'énonce comme suit : "Déplacement
25 d'une partie de la population de la zone de la responsabilité de Pec," et
Page 39338
1 dans la prolongation de la phrase, on dit, "dans l'objectif de faire
2 fonctionner comme il se doit la vie dans son ensemble -- de faire se
3 dérouler la vie dans son ensemble dans cette zone de responsabilité." Je ne
4 vais pas vous poser de question pour qu'on ne dise pas que c'est une
5 question directrice : qu'est-ce que cela signifie ?
6 R. Cela signifie ce que j'ai essayé d'expliquer lorsque M. le Procureur
7 m'a posé la question : j'ai voulu dire que l'on réglementait de la sorte le
8 déplacement de la population à partir d'endroits où ils risquaient d'être
9 mis en danger, là, où il y avait des positions ou des déploiements de
10 l'armée ou de la police vers un site qui était plus sûr. Il s'agit de cela,
11 de rien d'autre. Il ne s'agit pas d'un déménagement de la population, mais
12 d'un simple déplacement.
13 Q. L'objectif visait-il à protéger la population ou à persécuter la
14 population civile ?
15 R. Il s'agissait de mesures de protection. Toutes les unités militaires au
16 monde le font lorsqu'elles s'attendent à des opérations de combat.
17 Q. Bien. J'espère que maintenant nous avons tiré cela au clair. A présent,
18 j'aimerais que nous tirions au clair certains autres aspects mentionnés par
19 M. Nice au sujet de cette prison de Dubrava. M. Nice a parlé de
20 l'intercalaire numéro 7.
21 [La Chambre de première instance se concerte]
22 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, pourriez-vous
23 répéter le numéro de l'intercalaire, là, où on parle du déplacement, hors
24 de, ou depuis --
25 M. LE JUGE KWON : [interprétation] L'intercalaire 36.
Page 39339
1 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je n'ai pas cet intercalaire. C'est un élément
2 de preuve qui a été présenté par M. Nice.
3 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] C'est là pièce 319, intercalaire 36.
4 M. NICE : [interprétation] J'ai fourni un exemplaire.
5 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vais en demander la traduction,
6 je vais demander aux interprètes de traduire ce passage.
7 [La Chambre de première instance se concerte]
8 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Ce n'est pas un des intercalaires
9 d'aujourd'hui.
10 M. LE JUGE KWON : [interprétation] C'est une partie de la déposition de M.
11 Coo.
12 M. NICE : [interprétation] Nous avons des copies individuelles pour
13 faciliter l'usage.
14 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je voudrais que la version en serbe
15 soit placée sur le rétroprojecteur de façon à ce que les interprètes nous
16 fassent la traduction.
17 M. KAY : [interprétation] Je n'ai pas le classeur du témoin Coo, je sais
18 qu'il y avait beaucoup de pièces. Je me demande s'il y a des versions en
19 anglais. Si c'est le cas, pourrait-on les distribuer aux Juges et à moi-
20 même.
21 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Ce matin, nous avons eu une version en
22 anglais. C'est cela le problème. On laisse entendre que la traduction est
23 erronée.
24 M. KAY : [interprétation] Mais j'aimerais voir les deux documents, la
25 version en anglais également, pour garder celle-ci à l'esprit, dans la
Page 39340
1 mesure où cela peut être distribuée.
2 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Robinson, j'ai sous les yeux, ceux
3 dont je viens de donner lecture en citant le texte serbe et en posant la
4 question au colonel, mais j'ai la version anglaise qui nous est fournie
5 avec cette pièce, lorsque M. Nice a parlé de ce document. Dans la version
6 anglaise, la traduction est inexacte. Au lieu de dire que "cette population
7 --
8 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Mais mettons-le, ce document, sur le
9 rétroprojecteur.
10 L'ACCUSÉ : [interprétation] "Qu'on a fait sortir une partie de la
11 population --"
12 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je sais que vous êtes as en matière
13 linguistique, que vous êtes doué en langues, mais on va quand même demander
14 la traduction. Je vais demander qu'on fournisse la version en Serbe.
15 Qu'on la mette sur le rétroprojecteur et nous allons demander aux
16 interprètes de faire la traduction.
17 L'ACCUSÉ : [interprétation] Très bien. Mais est-ce que je peux, moi,
18 demander aux interprètes quelque chose parce que, eux, en leur qualité
19 d'expert, sont à même de témoigner, également, du moins, je le suppose.
20 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je ne veux pas qu'on s'éternise là-
21 dessus. Demandons simplement aux interprètes de traduire.
22 Quel est le paragraphe concerné ?
23 L'ACCUSÉ : [interprétation] Il s'agit de la deuxième phrase au tout début:
24 "Déplacement d'une partie de la population de la zone de responsabilité."
25 Je ne vois pas sur le rétroprojecteur ce qu'on y a mis. Il faut descendre,
Page 39341
1 il faut descendre la page plus bas, dans le sens inverse, voilà.
2 Ici, vous voyez, la deuxième phrase dit : "Puis, déplacement d'une
3 partie de la population de la zone de responsabilité de Pec, dans
4 l'objectif d'un bon fonctionnement ou d'un bon déroulement de la vie au
5 total de la zone de responsabilité de Pec."
6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, restez calme.
7 Laissez le temps aux interprètes de faire la traduction.
8 L'INTERPRÈTE : [interprétation] A partir de quelle partie devons-nous
9 traduire, Monsieur le Président ?
10 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous ne pouvez pas le voir sur le
11 rétroprojecteur ?
12 L'INTERPRÈTE : [interprétation] Du début, on lit --
13 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui.
14 L'INTERPRÈTE : [aucune interprétation]
15 L'ACCUSÉ : [interprétation] Vous pouvez sauter cette partie-là.
16 L'INTERPRÈTE : [aucune interprétation]
17 L'ACCUSÉ : [interprétation] Sautez cela.
18 L'INTERPRÈTE : "Sur la base de l'ordre du commandement suprême
19 relatif à la proclamation de l'état de guerre, puis, du déplacement d'une
20 partie de la population de la zone de responsabilité de Pec, dans
21 l'objectif d'un bon déroulement de la vie dans son ensemble, au sein de
22 cette zone de responsabilité de Pec, il est donné l'ordre de…"
23 L'ACCUSÉ : [interprétation] Vous pouvez sauter le début. Sautez cela aussi.
24 C'est tout, c'est tout ce qui nous intéresse. L'interprète vient de
25 traduire correctement et il s'agit de la population "appartenant à cette
Page 39342
1 zone" et on a traduit, dans le document de M. Nice, qu'il s'agissait "d'une
2 partie de la population à déplacer à l'extérieur de la zone;" or, il n'est
3 pas question d'une traduction possible qui dirait "hors de la zone."
4 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Mais elle a aussi parlé de
5 "relocation," en anglais, de réinstallation.
6 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Malheureusement, je le crains fort, le
7 même problème se pose pour moi. Quand on dit "de la zone," pour moi, c'est
8 la même chose que "en dehors de la zone." Pour moi, il n'y a pas de
9 différence, à moins qu'il n'y ait un terme particulier en Serbe ou dans ce
10 contexte "de" veut dire simplement comme "une partie de la zone," mais
11 quand on dit "réinstaller une partie de cette zone," pour moi, cela veut
12 dire "la sortir de cette zone," "la mettre, la réinstaller en dehors de
13 cette zone." Mais c'est peut-être un problème de traduction qui est
14 vraiment très ardu, très épineux.
15 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Bonomy, j'ai interrogé le témoin, pour
16 lui demander : "D'où venez-vous, Monsieur ?". Il a dit : "De Rudo."
17 Alors, en langue serbe, cela veut dire "je viens de là," comme vous,
18 en anglais, vous avez dit "de la zone".
19 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Milosevic, les gens disent la
20 même chose en anglais. Je suis d'Ecosse, je comprends tout à fait cela,
21 mais je ne parlerais jamais de la population d'Ecosse avec le mot "from,"
22 en anglais. Je parlerais de la population écossaise en disant la population
23 "of" Scotland, c'est de là que vient la difficulté.
24 L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais la référence, ici, est erronée en
25 traduction parce que le mot utilisé est erroné. Dans l'original, on parle
Page 39343
1 de réinstallation, mais en anglais, la traduction de ce mot est erronée
2 puisqu'on emploie l'expression "moving out." Un peu plus loin, on trouve
3 les mots anglais, "out of the zone," "hors de la zone." Ces deux
4 expressions, lorsqu'elles sont associées, modifient totalement le sens. Le
5 témoin, cependant, a expliqué ce qu'il en est. J'ai demandé quel était
6 l'objectif poursuivi. Est-ce que cela s'était fait pour protéger ou pour
7 maltraiter et il a répondu pour protéger. Bien entendu, cela a toujours été
8 l'objectif principal, la protection.
9 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je n'ai pas de difficulté à admettre
10 que la traduction exacte du mot n'est pas "from," mais il n'en reste pas
11 moins qu'il y a une difficulté d'interprétation de la phrase entière et
12 c'est à nous qu'il appartiendra de traiter de ce problème, le moment venu.
13 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Veuillez poursuivre, Monsieur
14 Milosevic.
15 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci, Monsieur Robinson.
16 M. MILOSEVIC : [interprétation]
17 Q. Colonel, M. Nice a parlé de l'intercalaire 7. Dans l'intercalaire 7,
18 nous trouvons un rapport au sujet des conséquences du bombardement de
19 l'OTAN dans la zone de responsabilité de Pec. Je ne vais pas lire
20 l'intégralité du document, mais il y est question de toute cette période
21 pendant laquelle a duré l'agression.
22 L'intercalaire 7 comporte des éléments présentés par ordre chronologique et
23 qui commencent au point 64. Nous voyons qu'il est question d'Istok, de
24 Dubrava et du 19 mai, à partir du point 8.20 jusqu'au point 10.20. Ensuite,
25 la référence à autre chose et on arrive au paragraphe 60 où les mots Istok
Page 39344
1 et Dubrava se retrouvent ainsi que la date du 21 mai et nous arrivons au
2 paragraphe 65 avec les mêmes indications de temps.
3 R. Oui, c'est exact.
4 Q. Ensuite, nous arrivons au paragraphe 66 où il est question d'Istok, de
5 Dubrava, du 21 mai, à 17 heures 50.
6 R. C'est exact.
7 Q. Un peu plus loin, les choses se poursuivent par ordre chronologique.
8 Dans tous les cas, il est fait mention des personnes qui ont été tuées.
9 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Nice.
10 M. NICE : [interprétation] Je ne sais pas si la Chambre tiendra compte de
11 ce que je vais dire, mais je n'ai pas contre-interrogé le témoin sur ce
12 document, pas du tout si je me souviens bien, pour une raison entre autres,
13 à savoir que je ne disposais pas de la traduction de ce document. J'ai
14 contre-interrogé le témoin au sujet de l'intercalaire 8, mais pas au sujet
15 de l'intercalaire 7. J'aurais pu souhaiter le faire, si j'avais disposé de
16 la traduction, mais je ne l'avais pas.
17 [La Chambre de première instance se concerte]
18 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, écoutons la
19 question, ce qui nous permettra de déterminer s'il convient de l'autoriser.
20 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Robinson, je suis sûr que vous vous
21 souviendrez que M. Nice a insisté, à plusieurs reprises, sur les divers
22 moments où la prison a été bombardée. Il l'a fait au cours de son contre-
23 interrogatoire. Je traite, maintenant, de l'intercalaire 7. Je me souviens
24 qu'il l'a mentionné, mais il ne l'a pas lu; cela, je l'admets. Mais il est
25 légitime que j'utilise ce document car ces questions ont porté sur les
Page 39345
1 différentes heures où la prison a été bombardée.
2 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais l'intercalaire 7 ne comporte
3 aucune mention de temps. Est-ce que ce serait peut-être l'intercalaire 7.1
4 ou 7.2 ?
5 M. NICE : [interprétation] Je crois que c'est
6 l'intercalaire 7.2. Ici, nous avons vraiment un très bon exemple du
7 problème que pose le fait de ne pas disposer d'un document traduit. Bien
8 sûr, je vois qu'il est fait mention de plusieurs dates où on trouve mention
9 d'Istok et de Dubrava. Mais cela ne faisait pas partie de l'interrogatoire
10 principal et puisque nous n'avons pas la traduction anglaise de ce
11 document, je ne suis pas prêt à traiter de ce document. Voilà ce qu'il en
12 est. Si j'avais pu avoir la traduction anglaise, j'aurais pu déterminer,
13 éventuellement, si des points de ce document m'intéressaient.
14 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Mais le document a été évoqué.
15 Veuillez poursuivre, Monsieur Milosevic.
16 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci, Monsieur Robinson.
17 M. MILOSEVIC : [interprétation]
18 Q. Dans l'intercalaire 7, au paragraphe 64, nous trouvons les mots, prison
19 de Dubrava, de 8.20 à 10.20." Ensuite, au paragraphe 65, encore Dubrava, 25
20 mai à partir de 8 heures 30 et jusqu'à
21 10 heures 30. Paragraphe 66, Dubrava, 21 mai, aux environs de
22 17 heures 50. Puis, au paragraphe 67, toujours la séquence chronologique,
23 il est question de Pec et de Branovacko Brdo [phon], aucun rapport avec
24 Dubrava. Mais au paragraphe 68, nous trouvons, encore une fois, mention
25 d'Istok, Dubrava, 21 mai, de 23 heures 40 à 23 heures 45. Nous en arrivons,
Page 39346
1 ensuite, au paragraphe 69, Istok, Dubrava, 22 mai, de 13 heures à 15
2 heures.
3 Du paragraphe 64 au paragraphe 69 inclus, nous trouvons une mention
4 chronologique de tous les événements qui ont caractérisé le bombardement de
5 la prison de Dubrava, avec une exception, le paragraphe 67 qui figure dans
6 cette séquence de paragraphes à cause de la séquence chronologique, mais où
7 il n'est pas fait mention de la prison de Dubrava.
8 Alors, Colonel, est-ce une façon habituelle, courante de travailler ?
9 Est-ce que les expressions utilisées ici sont les expressions standard ?
10 Mais d'abord, faisons la clarté sur un point particulier : il y a des jours
11 où un certain nombre de personnes ont été tuées, d'autres jours où ce
12 nombre a été inférieur. Les bombes n'ont pas tué, tous les jours, le même
13 nombre de personnes, n'est-ce pas ? Nous le voyons aux paragraphes 64 à 69.
14 Nous voyons, dans chaque paragraphe, mention du nombre de personnes tuées
15 ce jour-là. Ce nombre n'est pas égal tous les jours, n'est-ce pas ?
16 R. Oui.
17 Q. Pouvons-nous --
18 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Un instant, un instant. Au paragraphe
19 69, qu'est-il dit exactement, Monsieur Paponjak ? Paragraphe 69 ?
20 LE TÉMOIN : [interprétation] Il est dit qu'au moment du bombardement de la
21 prison de Dubrava, un certain nombre de personnes ont été tuées.
22 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Vous devriez reprendre, parce que je
23 n'entends pas l'interprétation.
24 L'INTERPRÈTE : Pouvez-vous entendre la traduction anglaise ?
25 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maintenant, je peux.
Page 39347
1 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Recommencez, s'il vous plaît.
2 LE TÉMOIN : [interprétation] Le bombardement du centre pénitentiaire de
3 Dubrava s'est effectué à l'aide de divers projectiles. Plusieurs personnes
4 ont été tuées, certaines blessées gravement ou moins gravement et des
5 dégâts matériels ont été infligés à la prison. Un rapport a été envoyé au
6 ministère de l'Intérieur de la République de Serbie. Au cours des trois
7 jours du bombardement, 100 personnes ont été tuées et 140 autres blessées
8 plus ou moins grièvement. Une enquête a été menée sur place par le juge
9 d'instruction du tribunal régional de Pec avec l'aide des représentants du
10 SUP de Pec. Les documents nécessaires en matière d'enquêtes criminelles ont
11 été établis; les lieux du crime on été filmés, des vidéos ont été tournés
12 et une note officielle établie.
13 Soixante-sept cadavres ont vu leurs empreintes relevées à des fins
14 d'identification. Les empreintes n'ont pas été relevées sur
15 26 cadavres, en raison de l'état de décomposition de ces corps. Les
16 cadavres ont été inhumés séparément, en vertu des lois et réglementations
17 en vigueur. Les annexes vidéo 1/10, 3/10 et 3/11 [comme interprété] sont
18 des séquences partielles filmées jour après jour et montrant les cadavres.
19 Le numéro de l'affaire est J/369.
20 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Est-ce qu'il n'est pas dit, ici, ce
21 qui s'est passé entre 13 heures et 15 heures, le 22 mai ?
22 LE TÉMOIN : [interprétation] Si.
23 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] D'après ce qui est dit ici, que s'est-
24 il passé ?
25 L'ACCUSÉ : [interprétation] Au début, il est écrit --
Page 39348
1 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je vous demande de permettre au témoin
2 de répondre.
3 LE TÉMOIN : [interprétation] Au paragraphe 69, nous avons l'intitulé,
4 "Istok, Dubrava, 22 mai 1999, de 13 heures à 15 heures."
5 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais dans ce paragraphe, qu'est-il dit
6 quant à ce qui s'est passé ? Vous avez lu que le centre pénitentiaire de
7 Dubrava était bombardé à l'aide de plusieurs projectiles, que plusieurs
8 personnes ont été tuées, que d'autres ont été blessées plus ou moins
9 grièvement et que des dégâts matériels ont été enregistrés au niveau de la
10 prison, qu'un rapport a été envoyé au ministère et qu'au cours des trois
11 jours de bombardement,
12 100 personnes ont été tuées.
13 Ce que j'essaie de déterminer, c'est ce qui est écrit dans ce
14 paragraphe, quant à ce qui s'est réellement passé entre 13 heures et 15
15 heures, le 22 mai. Apparemment, il n'est pas question de cela dans ce que
16 vous avez lu. Alors, pouvez-vous m'apporter quelques éclaircissements, à ce
17 sujet ?
18 LE TÉMOIN : [interprétation] Sur la base de ce qui est écrit ici, je ne
19 peux pas apporter d'éclaircissements sur ce point.
20 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci beaucoup.
21 M. MILOSEVIC : [interprétation]
22 Q. Est-ce que les premières lignes de ce paragraphe portent bien sur ce
23 qui s'est passé le 22 mai 1999, de 13 heures à
24 15 heures ? Le fait qu'un bombardement a eu lieu à l'aide de plusieurs
25 projectiles qui ont visé le centre pénitentiaire de Dubrava, et cetera, et
Page 39349
1 cetera et qu'un rapport a été renvoyé au MUP de Serbie --
2 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Ce n'est pas la bonne façon de poser
3 des questions supplémentaires. Le témoin a déjà répondu à cette question
4 qui lui a été posée par moi. Ensuite, il a dit ne pas pouvoir apporter
5 d'éclaircissements complémentaires.
6 M. NICE : [interprétation] Monsieur le Président, excusez-moi
7 d'interrompre, mais compte tenu de l'absence de réponse du témoin et si
8 l'on essaie de comparer l'original et la traduction en ce qui concerne les
9 chiffres, en tout cas, que nous pouvons suivre dans les deux documents, le
10 témoin a fourni une explication au sujet des séquences vidéo tournées
11 partiellement chaque jour et dans lesquelles on voit des cadavres. Je pense
12 qu'il n'en est pas question dans le texte. S'il y avait eu un document
13 écrit à ce sujet, j'aurais pu souhaiter interroger le témoin au sujet du
14 document en question. Bien entendu, compte tenu des réponses fournies par
15 le témoin au sujet de la possibilité de tourner une vidéo dans le cadre de
16 l'enquête sur site le 22, vous vous souviendrez qu'il a dit que ces hommes
17 avaient trop peur, cela semble être une référence à ce qu'il a dit.
18 Beaucoup de ces documents auraient pu nous être fournis en traduction.
19 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, encore une
20 question avant la pause.
21 M. MILOSEVIC : [interprétation]
22 Q. Colonel, dans tous ces paragraphes, je vous demande de vous pencher
23 plus précisément sur les paragraphes 64, 65, 68, 69, est-ce que dans tous
24 ces paragraphes, on trouve d'abord une phrase d'ouverture à savoir : "Le
25 centre pénitentiaire de Dubrava a été pris pour cible par les
Page 39350
1 bombardements," et cetera, et cetera. Ensuite, une autre phrase que l'on
2 trouve dans tous ces paragraphes, à savoir
3 que : "Plusieurs ont été tuées et blessées", et cetera. Est-ce que c'est
4 une présentation identique dans tous ces paragraphes où il est question de
5 la prison de Dubrava avec mention également dans tous ces paragraphes, des
6 blessures plus ou moins graves de certaines personnes et du fait que
7 certaines personnes ont été tuées, même si nous avons établi que le nombre
8 des personnes tuées n'était pas identique dans tous les cas ? Il était
9 quelquefois plus important, quelquefois moins important. Est-ce que ce sont
10 bien les mêmes phrases qui reviennent dans tous ces paragraphes ? Est-ce
11 que c'est bien la terminologie officielle utilisée par vos services ?
12 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, le nombre de
13 questions directrices dans le dernier effort que vous venez d'accomplir est
14 véritablement très important, parce qu'à la fin de votre question, vous
15 avez parlé de terminologie officielle. Je pose la question au témoin.
16 Monsieur, est-ce bien la terminologie officielle utilisée par vos
17 services ? Pouvez-vous répondre à cette question ?
18 LE TÉMOIN : [interprétation] Si vous me le permettez, j'aimerais répondre à
19 l'observation du Procureur. Tout ce qui a été ajouté après que le rapport
20 ait été envoyé au MUP de Serbie a un rapport avec les renseignements que
21 nous avons recueillis sur les événements. Car, dans ces paragraphes, on met
22 noir sur blanc tous les indices recueillis au sujet de cet événement. C'est
23 la raison pour laquelle on y trouve des mentions, des empreintes digitales,
24 du tournage de séquences vidéo, et tout le reste. J'ai cru comprendre que
25 le Procureur désirait dire que le constat a été effectué ce jour-là et que
Page 39351
1 ces renseignements ont été mis noir sur blanc le jour du constat. Ce n'est
2 pas le cas. Il n'y a pas eu de constat ce jour-là. L'enquête sur place a
3 été diligentée et nous voyons qu'il est fait mention d'annexes vidéo, 1/10
4 à 4/10 et 1/11. Ce sont toutes les vidéos qui ont été découvertes dans
5 cette affaire.
6 M. MILOSEVIC : [interprétation]
7 Q. Colonel, au paragraphe 69, les quatre premières lignes font bien
8 référence à l'événement survenu le 22 mai. Est-ce bien la façon standard
9 d'évoquer de tels événements ?
10 R. Oui, tout à fait. C'est la façon standard de procéder.
11 Q. Tout le reste porte sur des renseignements recueillis ultérieurement
12 dans cette affaire comme dans les affaires précédentes. Est-ce que c'est
13 bien ce qui ressort de la lecture du texte ? C'est là-dessus que je
14 souhaite obtenir un éclaircissement de votre part.
15 R. Oui.
16 Q. Vous avez dit --
17 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, je déclare que
18 la pause va se faire maintenant, 20 minutes de suspension.
19 --- L'audience est suspendue à 12 heures 17.
20 --- L'audience est reprise à 12 heures 44.
21 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, à vous.
22 M. MILOSEVIC : [interprétation]
23 Q. Est-ce que dans tous ces paragraphes, paragraphes 64 à 69, à
24 l'exception du paragraphe 67 qui n'a pas de rapport avec Dubrava, est-ce
25 que vous avez constaté que la même phrase revient dans tous ces
Page 39352
1 paragraphes, à savoir : "Plusieurs personnes ont été tuées ou blessées plus
2 ou moins grièvement" ?
3 R. Oui, c'est une phrase standard qui est utilisée, car on ne connaissait
4 pas le nombre de ces personnes.
5 Q. C'est ce que je voulais établir. Donc, il n'y a aucune différence dans
6 la description des événements entre les récits relatifs aux différentes
7 journées. Chaque fois, c'est la même phrase qui est utilisée : "Certaines
8 personnes ont été tuées et d'autres blessées plus ou moins grièvement."
9 R. Oui, parce qu'on n'avait pas les chiffres. Finalement, dans le
10 paragraphe 69, des détails complémentaires issus des constats et autres
11 travaux d'observation sont ajoutés.
12 Q. Est-ce que, Colonel, vous savez si tous les bâtiments de la prison de
13 Dubrava ont été touchés par les bombardements ?
14 R. Oui, tous les bâtiments.
15 Q. Y a-t-il le moindre bâtiment qui serait resté intact ?
16 R. Il n'y en a pas eu un seul.
17 Q. Y avait-il dans cette prison à ce moment-là, comme vous l'avez dit,
18 plus de 1 000 suspects ou condamnés ?
19 R. C'est tout à fait cela. On y trouvait au total 1 004 détenus.
20 Q. Dans une installation où se trouvaient 1 004 personnes, si tous les
21 bâtiments de cette installation sont touchés, est-il permis de penser que
22 le nombre des victimes est égal à ce qui est mentionné ici, à savoir moins
23 de 10 % du total ?
24 R. C'est ce que je pensais.
25 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, question
Page 39353
1 directrice. Elle doit être reformulée.
2 M. MILOSEVIC : [interprétation] Bien, bien.
3 Q. Donc, tous les bâtiments qui constituent ce centre pénitentiaire
4 abritant 1 004 détenus ont été touchés. Sur ce total de 1 004 détenus, 95
5 on été tués. Sont-ce bien là les faits qui ont été établis ?
6 R. Oui, c'est exact. Ce sont les faits établis, 95 personnes ont été
7 tuées, peut-être un peu plus. Je ne me souviens pas du chiffre exact à
8 l'instant.
9 Q. M. Nice a montré le réfectoire où on ne voyait pas de cadavres, est-ce
10 qu'avant cela, vous avez remarqué une image d'une partie du réfectoire où
11 on voyait plusieurs cadavres ?
12 R. Oui. C'est ce que l'on voyait dans cette séquence vidéo.
13 Q. Si une bombe a traversé le plafond du réfectoire, est-ce que
14 normalement il aurait dû se trouver-là des cadavres ?
15 R. Oui, c'est normal et logique de penser qu'on va trouver des cadavres
16 dans une salle qui est touchée par une bombe.
17 Q. A l'intercalaire 46.5, qui est un extrait du livre blanc, donc pas
18 besoin de traduction, est-ce qu'on trouve certaines des photographies
19 relatives à la prison de Dubrava ?
20 R. Je vous demande un instant pour retrouver ce document.
21 Q. 46.5. Une série de photographies.
22 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je pourrais peut-être demander que l'on place
23 certaines de ces photographies sur le rétroprojecteur.
24 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] On est en train de remettre ce
25 document au témoin.
Page 39354
1 LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai trouvé ce document.
2 M. MILOSEVIC : [interprétation]
3 Q. Auriez-vous l'amabilité de bien vouloir placer sur le rétroprojecteur
4 peut-être pas toutes ces photographies, mais prenons, par exemple, les
5 photographies que l'on trouve à partir de la page 322. Ce sont les
6 photographies en question. En voici deux, les suivantes, s'il vous plaît.
7 Suivante.
8 Q. On voit ici les conséquences du bombardement dû à ces avions, n'est-ce
9 pas ?
10 R. Oui, c'est cela.
11 Q. Les suivantes.
12 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Ceci est en rapport avec quoi ? Au
13 cours des questions supplémentaires, vous n'avez pas toute liberté. Ceci
14 découle de quoi ?
15 M. MILOSEVIC : [interprétation] Ceci est en rapport avec les questions
16 posées par M. Nice. Il en a posé d'ailleurs beaucoup au sujet des enquêtes
17 menées éventuellement pour déterminer les causes des décès. Ce sont des
18 questions qui ont été posées au cours du contre-interrogatoire par M. Nice.
19 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous n'avez pas expliqué cela,
20 Monsieur Milosevic. Qu'est-ce que ces photographies ont à voir avec la
21 question ?
22 M. MILOSEVIC : [interprétation]
23 Q. Elles ont un rapport avec cette question --
24 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, vous êtes
25 tenu d'expliquer de quelle façon la question que vous posez est en rapport
Page 39355
1 avec les questions posées au cours du contre-interrogatoire. J'attends vos
2 explications.
3 L'ACCUSÉ : [interprétation] Si vous regardez les photos suivantes, vous
4 constaterez qu'on y voit très clairement un nombre assez important de
5 cadavres comme ici en bas, par exemple, ainsi que sur les photos suivantes.
6 On observe que ceux sont visiblement les images de personnes qui ont été
7 tuées par le bombardement. Ma question --
8 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Mais quel est le rapport avec une
9 question ?
10 L'ACCUSÉ : [interprétation] Ces photographies sont en rapport avec les
11 questions posées par M. Nice au sujet du médecin qui a examiné les
12 cadavres. Il a demandé s'il y avait eu autopsie, examen médical, et cetera.
13 La question que je pose a un rapport direct avec ces questions posées
14 précédemment par M. Nice et ma question est la suivante : lorsqu'il
15 apparaît clairement que la cause du décès est facile à déterminer, est-ce
16 que des autopsies sont pratiquées ?
17 Regardez les photos suivantes. Si le cadavre de quelqu'un est retiré
18 des décombres --
19 [La Chambre de première instance se concerte]
20 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Non, non. Vous êtes autorisé à poser
21 votre question, mais nous n'avons pas besoin de l'aide des photographies.
22 M. NICE : [interprétation] Monsieur le Président, peut-être l'accusé s'est-
23 il un peu perdu et il ne serait pas juste que la confusion soit créée dans
24 l'esprit de qui que ce soit d'autre. Toutes ces photographies sont en
25 rapport avec la date du 19 mai. Il est possible de comparer les
Page 39356
1 photographies aux images des séquences vidéo. S'agissant des photos que
2 nous voyons en ce moment, il n'y a pas de désaccord quant à la cause du
3 décès de ces personnes et aux conditions de leurs décès.
4 L'ACCUSÉ : [interprétation] Si nous tenons à établir exactement ce qu'il en
5 est, nous voyons qu'il est question, ici, des 19 et
6 21 mai. Page 319, au début de l'intercalaire 46.5, nous lisons que
7 95 % des personnes ont été tuées et que 196 ont été blessées. Ceci figure
8 au début de l'intercalaire 46.5 qui est en rapport avec les journées des 19
9 et 21 mai.
10 M. MILOSEVIC : [interprétation]
11 Q. Colonel, je vous demande si, durant le bombardement de l'OTAN --
12 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Avant que vous ne posiez votre
13 question, êtes-vous en train de nous dire que l'une quelconque de ces
14 photographies a un rapport avec une autre période que la journée du 19
15 mai ? Je parle des photographies que vous venez de montrer. Est-ce que vous
16 dites que l'une quelconque de ces photographies a un rapport avec une
17 période ultérieure à la date du 19 mai ? Les photographies où on voit des
18 cadavres.
19 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Bonomy, je ne suis pas en mesure de
20 préciser à quelle date se rattachent ces photographies, mais au début de ce
21 document qui figure au livre blanc, à partir de la page 319, il est fait
22 mention des dates du 19 mai et du 21 mai. Quelles sont les photos qui se
23 rapportent au 19 mai, quelles sont les photos qui se rapportent au 21 mai
24 ou à une période ultérieure, je ne saurais le dire, mais manifestement, il
25 s'agit de photos prises dans la prison après le bombardement. On voit un
Page 39357
1 tas de cadavres de personnes qui ont été tuées au cours de ce bombardement.
2 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] M. Nice vient d'affirmer qu'en se
3 fondant sur la vidéo tournée après le 19 mai, ces cadavres sont des
4 cadavres de personnes tuées le 19 mai. Est-ce que vous contestez cela ?
5 L'ACCUSÉ : [interprétation] Tout cela vient des vidéos tournées les 19 et
6 21 mai et est en rapport avec toutes les images que nous avons vues sur les
7 vidéos, y compris, à d'autres dates. La vidéo est une pièce à conviction,
8 elle résulte de l'enquête menée sur les lieux, mais je ne saurais vous dire
9 exactement quel est le cadavre qui correspond à tel ou tel jour.
10 M. NICE : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges, il
11 est possible que la photographie numéro 4 soit en rapport avec la date du
12 21. Je vais faire photocopier le livre blanc et l'examiner de plus près.
13 Mais je crois avoir défini très clairement ma position au sujet de ces
14 cadavres.
15 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Très bien, Monsieur Milosevic,
16 veuillez poursuivre.
17 M. MILOSEVIC : [interprétation]
18 Q. Ma question est très simple, Colonel. Dans ce document relatif aux
19 conséquences des bombardements de l'OTAN, vous évoquez
20 97 bombardements dans la zone de responsabilité du secrétariat de
21 l'Intérieur où vous travailliez ?
22 R. C'est exact.
23 Q. Chaque fois qu'il y a eu des personnes tuées au cours de ces
24 événements, des cadavres découverts peu de temps après le bombardement, y
25 a-t-il eu enquête particulière, y a-t-il eu autopsie ou était-il tout à
Page 39358
1 fait clair que ces personnes avaient été tuées par le bombardement et dans
2 ces conditions, est-ce que les autopsies n'ont pas été pratiquées ?
3 R. Non, il n'y a peu eu autopsie.
4 Q. Pourquoi ?
5 R. J'ai d'abord dit qu'une autopsie était demandée par un juge
6 d'instruction et il est probable que le juge d'instruction a estimé que les
7 conditions des décès étaient tout à fait claires et indiscutables et que
8 c'est pour cela qu'il n'y a pas eu d'autopsie; c'est la première raison. La
9 deuxième raison, c'est que procéder à des autopsies dans ces conditions
10 était extraordinairement difficile et même parfois impossible. Il était
11 impossible de trouver les légistes qui auraient dû les pratiquer.
12 Q. Merci.
13 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Paponjak, excusez-moi. Sauriez-
14 vous nous dire quand est-ce que ce livre blanc a été publié ?
15 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne connais pas la date exacte mais il me
16 semble que cela a été publié vers 2003, mais je le dis un peu au hasard.
17 L'ACCUSÉ : [interprétation] Non, le livre blanc a été publié en 1999.
18 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne sais pas, je ne l'avais pas.
19 L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais vous avez les livres blancs dans leur
20 totalité, ici.
21 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ce que je me demande est pourquoi il
22 n'est pas question, en page 319, du bombardement du 29 [comme interprété].
23 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne sais pas. Je n'ai pas pris part à sa
24 rédaction.
25 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Veuillez continuer, Monsieur Milosevic.
Page 39359
1 M. MILOSEVIC : [interprétation]
2 Q. Quelques questions encore au sujet de Dubrava. On vous a demandé de
3 dire s'il y a eu une cible militaire dans l'enceinte ou à proximité
4 immédiate du complexe pénitentiaire ?
5 R. Oui, on m'a demandé cela.
6 Q. Y avait-il quelques installations militaires ou moyens matériels,
7 équipements militaires quelconques, par exemple, un camion qui aurait été
8 détruit à l'occasion du bombardement du complexe pénitentiaire ou à
9 proximité de celui-ci ?
10 R. Non. Il n'y avait ni armes, ni installations, ni équipements
11 militaires.
12 Q. Bien. M. Nice vous a demandé quelque chose au sujet de l'intercalaire
13 9. Alors l'intercalaire 9 et 9.1, c'est quelque chose de très volumineux;
14 cette partie 9 vient nous fournir un texte, puis, une liste en 9.1 des
15 informations détaillées sur l'organisation terroriste, les activités
16 terroristes, c'est ainsi que s'intitule ce texte, "Informations relatives à
17 l'organisation terroriste, aux activités terroristes et conséquences des
18 activités terroristes de l'UCK sur le territoire du SUP de PEC."
19 La question qui vous a été posée était celle de donner lecture du
20 premier paragraphe en page 1, sous le titre, "Le séparatisme et
21 l'extrémiste albanais au fil des périodes écoulées" et il vous a demandé
22 pourquoi parliez-vous de 1878 et de la ligue de Prizren.
23 Colonel, d'après ce que je crois voir, toute cette histoire, en guise
24 d'introduction, y compris, la Deuxième guerre mondiale, se termine dès la
25 moitié de la toute première page.
Page 39360
1 R. C'est exact.
2 Q. Est-ce que ces quelques lignes d'introduction, au début, ont été
3 fournies pour brosser une toile de fond historique au regard des événements
4 ou fait-on un descriptif qui viserait à élaborer un texte historique ?
5 R. Ceci a été fait à l'intention des personnes qui liraient pour qu'elles
6 comprennent mieux de quoi on parle. Rien d'autre. C'est une information qui
7 a été rédigée pour nos besoins, à nous.
8 Q. Pour les besoins de la police, avec une toile de fond historique,
9 s'agissant des événements et très rapidement, on passe aux années 1990,
10 n'est-ce pas ?
11 R. Tout à fait exact.
12 Q. La partie relative à cette parapolice qui commence à la moitié de la
13 page 4 --
14 M. NICE : [interprétation] Document très intéressant pour moi. Je n'ai pas
15 eu le temps d'en obtenir la traduction. J'espérais, si nous avions
16 progressé plus rapidement, plus lentement, j'avais espéré que nous
17 pourrions y revenir, mais je n'ai contre-interrogé, cette fois-là, que le
18 premier paragraphe et un tel document ne peut pas être examiné, paragraphe
19 après paragraphe, si nous n'avons pas la traduction.
20 Je ne sais pas la thèse générale que j'aurais pour l'ensemble du
21 document; il faudrait le voir dans sa totalité puisque j'ai pu poser qu'une
22 question et que les Juges n'ont posé qu'une question. Je ne sais pas s'il
23 peut y avoir une valeur quelconque vu quelle était mon intention au niveau
24 de l'interrogatoire supplémentaire.
25 [La Chambre de première instance se concerte]
Page 39361
1 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, je comprends ce
2 que dit le Procureur. Mais je vais, d'abord, vous demander ce que vous
3 cherchez à établir, à prouver.
4 L'ACCUSÉ : [interprétation] Ces questions complémentaires visent à
5 contester les allégations faites par M. Nice aux termes desquelles ceci se
6 trouverait être dépourvu de pertinence. Il voulait dénigrer ce document qui
7 se trouve être très volumineux et qui fournit un aperçu détaillé des
8 activités terroristes sur le territoire du secrétariat à l'Intérieur de
9 Pec. Ceci, du
10 1er janvier 1998 jusqu'au 1er juin 2001. C'est ce qui est dit dans le titre
11 même. Le fait de donner un contexte historique en quelques lignes, pour ce
12 qui est de ces activités terroristes, a incité
13 M. Nice à dénigrer un document qui comporte une énorme quantité de
14 renseignements précieux.
15 Ceci constitue un exemple type de ce dénigrement auquel il est fait
16 recours s'agissant de documents qui ont une grande valeur documentaire. On
17 lit une phrase et on dit, cela est dénué de pertinence.
18 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, vous ne vous
19 êtes jamais servi de ce document au moment de l'interrogatoire principal.
20 L'ACCUSÉ : [interprétation] Il a été utilisé par M. Nice à l'occasion du
21 contre-interrogatoire dans l'objectif de --
22 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Mais il a simplement utilisé la
23 première partie qui porte sur l'histoire. Maintenant, vous essayez
24 d'utiliser le reste du document qui, de toute façon, n'est pas traduit.
25 Nous allons délibérer.
Page 39362
1 [La Chambre de première instance se concerte]
2 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Ce n'est pas autorisé. Passez à une
3 autre question.
4 M. MILOSEVIC : [interprétation]
5 Q. S'agissant de Dubrava, j'ai quelques questions encore à vous poser.
6 Vous avez parlé de votre présence au cimetière de Rakos où on a enterré les
7 détenus qui sont morts à Dubrava, lors des bombardements.
8 R. C'est exact.
9 Q. Est-ce que ce cimetière se trouvait là-bas, avant ?
10 R. Oui, c'était le cimetière musulman du village.
11 Q. Est-ce que pendant la guerre, on a enterré là-bas d'autres personnes
12 qui ont été tuées à l'occasion de combats ou à l'occasion des conflits qui
13 ont fait rage sur ce terrain ?
14 R. Oui, naturellement.
15 Q. M. Nice a dit qu'on avait exhumé de là des personnes qui portaient des
16 traces ou des trous de balle. Est-ce qu'on a pu trouver là-bas bon nombre
17 de personnes d'enterrées qui avaient fort bien pu périr par arme à feu ?
18 R. Oui, c'est certain.
19 Q. M. Nice vous a demandé pourquoi vous étiez pressé d'enterrer ces gens.
20 Nous avons vu un document du juge d'instruction qui a donné l'ordre
21 d'enterrer ces personnes. Y avait-il un danger d'infections au bout de
22 quelques jours ou était-il habituel d'enterrer ces personnes mortes au bout
23 de quelques jours ?
24 R. On n'était pas pressé du tout. On a fait comme on pouvait le faire et
25 comme on devait le faire, pas autrement. Les corps avaient déjà subi des
Page 39363
1 modifications au niveau de l'endroit où ils étaient couchés. Cela
2 commençait à sentir, des parties commençaient à se décomposer. Il est
3 certain qu'il a fallu, de ce point de vue-là, aller un peu plus vite, mais
4 on n'est pas allé plus vite au détriment d'actions à entreprendre ou
5 d'activités à entreprendre.
6 Q. A-t-on omis la prise de photos, d'empreintes digitales ?
7 A-t-on omis de marquer les tombes, pour ce qui est de l'enregistrement
8 vidéo et les photos ?
9 R. Rien n'a été omis. Tout a été fait comme il se devait.
10 Q. Je ne reviendrai plus du tout là-dessus.
11 M. Nice vous a demandé pourquoi, une fois parti à Kragujevac, vous
12 avez continué à œuvrer à la collecte de renseignements relatifs à ces
13 crimes. Il a dit et il l'a dit à la lettre : "Sachant que vous n'alliez pas
14 revenir..." je le cite à la lettre, saviez-vous ou savez-vous qu'en
15 application de la résolution 1244, il était prévu que notre armée et notre
16 police retournent là-bas dès la prise par la KFOR, de l'autorité par la
17 KFOR, pas en grand nombre, mais à un certain nombre ?
18 R. Oui, je ne savais pas que nous n'allions pas revenir.
19 Q. M. Nice vous a aussi demandé si quelqu'un avait procédé à des
20 entraînements, quelqu'un venu d'ailleurs; il a parlé de Bosnie pour
21 demander s'il y a eu une formation de dispensée à l'intention des gens de
22 Pec pour ce qui est de leur entraînement. Savez-vous que quelqu'un serait
23 allé en Bosnie depuis Pec ?
24 R. Non.
25 Q. Savez-vous si l'un quelconque des policiers, puisque nous pouvons
Page 39364
1 parler de policiers avec précision, vu que vous les connaissiez tous, y en
2 a-t-il eu un seul, au moins, à être parti en Bosnie pour un entraînement ou
3 une formation ?
4 R. Non, personne.
5 Q. M. Nice vous a demandé de vous prononcer au sujet des dires du
6 président de "Human Rights Watch" de Pec et sur la télécopie qu'on nous a
7 montrée sur le rétroprojecteur, il n'a pas cité son nom, mais c'est un
8 certain Demaj. Avez-vous entendu parler d'un dénommé Demaj qui se
9 trouverait être président de "Human Rights Watch" à Pec ?
10 R. Non. Je ne connais pas de personne répondant à ce nom.
11 Q. Vous ne le connaissez pas ?
12 R. Non. Ce qu'il a pu dire là-bas, il aurait pu le dire à Pec et venir
13 déclarer à la police, s'il y avait quelque chose à déclarer.
14 Q. M. Nice dit que "Human Rights Watch" oeuvrait publiquement et que
15 c'était une activité tout à fait publique. Se peut-il que le dénommé Demaj
16 ait procédé à des activités tout à fait publiques, qu'il vive à Pec et que
17 vous n'ayez jamais entendu parler de lui ?
18 R. Non. Il est tout à fait certain que cela se trouverait être impossible.
19 S'il y avait eu des abus de la part de la police ou des mauvais traitements
20 d'infligés, il pouvait venir chez les responsables et le leur rapporter. Il
21 aurait été logique de le voir s'adresser au chef du poste de police ou à
22 moi-même en ma qualité d'adjoint.
23 Q. M. Nice a fait plusieurs allégations relatives à des mauvais
24 traitements d'Albanais de la part de policiers. Dans vos réponses, vous
25 avez dit que Pec était une petite ville et que les citoyens connaissaient
Page 39365
1 tous les policiers qui travaillaient à Pec ?
2 R. Oui, c'est exact.
3 Q. Ne serait-il pas justifié si le président de "Human Rights Watch", en
4 cas d'abus de la police, ne vienne dire le nom du policier qui l'aurait
5 fait --
6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, vous posez des
7 questions délibérément directrices, parce que je pense que vous le faites
8 sciemment. Nous avons déjà rencontré cette situation. Vous dites : "Est-ce
9 que ce ne serait pas logique…" C'est comme cela que vous débutez vos
10 questions. Là, c'est excessif et vous devez renoncer à ce genre de
11 pratique, faute de quoi, je vais vous interrompre et vous ne pourrez plus
12 poser de questions supplémentaires. Si vous n'êtes pas en mesure de poser
13 des questions qui ne sont pas de nature à guider le témoin, cela veut dire
14 que vous n'êtes pas compétent pour poser ces questions. A vous de décider.
15 L'ACCUSÉ : [interprétation] Bien.
16 M. MILOSEVIC : [interprétation]
17 Q. M. Nice a affirmé que, d'après les déclarations et informations de
18 "Human Rights Watch" dans le courant de 1993, à Pec, il y a eu des groupes
19 paramilitaires. Avez-vous connaissance de quoi que ce soit au sujet d'un
20 groupe paramilitaire à Pec en 1993, ou à peu près vers cette période-là ?
21 R. Il n'y a pas eu de cela. Je n'en ai aucune connaissance. Il n'y a eu
22 aucun groupe paramilitaire. Dans le contexte dans lequel la question a été
23 posée, il se peut qu'il y ait eu des groupes paramilitaires dans certaines
24 montagnes à Cicavica et ailleurs où il y a eu entraînement des terroristes.
25 Mais, il n'y a pas eu de groupes paramilitaires serbes.
Page 39366
1 Q. D'après ce que M. Nice a cité dans ce rapport de "Human Rights Watch"
2 il y a eu des allégations aux termes desquels un groupe paramilitaire avait
3 disposé d'une caserne à Pec ?
4 R. C'est tout à fait impossible. C'est tout simplement inexact.
5 Q. Se pourrait-il qu'il y ait un groupe paramilitaire qui aurait disposé
6 d'une caserne à Pec sans que vous le sachiez ?
7 R. C'était impossible. Ceux qui ont fourni ce type de renseignements
8 pourraient dire où se trouvait la caserne, nous dire qui est-ce qui se
9 trouvait à l'intérieur ? Nous dire où est-ce qu'elle était, qui il y avait
10 d'installé là ? On ne nous dit même pas qui c'est qui a fourni cette
11 information. Il me semble qu'hier ou aujourd'hui, j'ai déjà dit que s'il y
12 avait eu des abus de la part de policiers, s'ils avaient, par exemple,
13 confisqué des autocars comme l'a indiqué le Procureur en citant un témoin,
14 j'ai répondu qu'il devait certainement connaître le nom et le prénom dudit
15 policier, qu'il devait bien avoir reçu un bordereau, un reçu. Or, on dit
16 des policiers, des membres de, et ainsi de suite.
17 Q. M. Nice a cité le témoignage de ce gentleman de "Human Rights Watch"
18 qui disait que la police avait confisqué l'argent des Albanais qui avaient
19 des magasins à Pec. Avez-vous connaissance de l'un quelconque des cas où il
20 y aurait eu confiscation d'argent de la part de la police à l'égard de
21 propriétaires de commerce ?
22 R. S'il y a eu confiscation, le représentant en question aurait pu
23 parfaitement bien donner le nom et le prénom du policier en question.
24 Q. M. Nice a indiqué dans son contre-interrogatoire que des personnes
25 avaient été arrêtées parce qu'elles s'étaient rassemblées pour discuter.
Page 39367
1 Avez-vous connaissance -- disons maintenant puisqu'il s'agit
2 essentiellement d'Albanais, savez-vous qu'il y a eu un cas d'Albanais
3 arrêté parce qu'il se serait réuni avec quelqu'un pour discuter ?
4 R. Je n'en ai pas connaissance. Si on avait procédé de la sorte, on aurait
5 pu arrêter la ville de Pec toute entière, parce que tout le monde
6 s'arrêtait ou s'attablait pour discuter.
7 Q. M. Nice a parlé d'Adem Bajri, avocat de Pec, qui a défendu 200
8 prisonniers politiques à compter de 1981. Avez-vous eu connaissance de la
9 présence de prisonniers politiques à Pec depuis que vous étiez là-bas, donc
10 depuis les années 1990 et par la suite ?
11 R. Non. Je ne sais pas du tout ce que signifie ce que l'on entend par
12 "prisonniers politiques."
13 Q. Il y a eu un malentendu quelconque et M. Bonomy m'a dit de poser cette
14 question dans mes questions complémentaires et je vais le faire. M. Nice
15 vous a posé des questions au sujet du SUP clandestin. Je voudrais savoir si
16 vous avez connaissance de l'arrestation de vos collègues albanais qui
17 auraient été membres de ce SUP clandestin.
18 Est-ce que l'un quelconque de ces individus qui auraient été membres du SUP
19 illégal se trouvait être, en même temps, collègue à vous ?
20 R. Je ne peux pas dire que c'était un collègue. S'il faisait partie du MUP
21 clandestin de la soi-disant République du Kosovo. Eux, ils venaient après
22 notre constat à nous pour interroger les uns et les autres, pour montrer
23 qu'eux aussi le faisaient. Dans certaines situations, ils arrivaient même
24 avant nous et ils procédaient à des interrogatoires. Essentiellement,
25 c'étaient des situations où il y avait participation d'Albanais. Ils ne
Page 39368
1 venaient pas faire des constats, là où il s'agissait de Serbes.
2 Q. Bien. Connaissiez-vous un policier qui avait travaillé auparavant de
3 façon tout à fait légale au sein du SUP de Pec et qui, par la suite, se
4 serait vu, ou se serait fait arrêter en tant que membre de ce SUP
5 clandestin ?
6 R. Je ne connais pas les détails de tous ceux qui ont été arrêtés, mais je
7 sais qu'il y a eu des rumeurs disant que Serif Shala a été arrêté. Il avait
8 travaillé au centre de sécurité de Pec à un moment donné, puis il a quitté
9 le service, et il a été arrêté au sein d'un groupe se disant constituer le
10 MUP clandestin du Kosovo.
11 Q. Avez-vous ouï dire que l'un quelconque des policiers de Pec aurait été
12 arrêté en tant que membre de ce SUP clandestin ?
13 R. Je ne sais pas combien de personnes ont été arrêtées. Je sais qu'il a
14 eu des procès, mais je n'ai pas suivi l'issue de tout ceci.
15 Q. Bien. M. Nice nous a montré sur le rétroprojecteur un document qui ne
16 nous a pas été distribué et au sujet duquel, il a dit qu'il s'agissait d'un
17 rapport militaire, un document militaire se rapportant au 25 mai 1998
18 concernant un événement à proximité de Decani.
19 M. NICE : [interprétation] C'est une pièce qui existe déjà. Une pièce de
20 l'Accusation, vous en souviendrez.
21 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous avez entendu ce qui vient
22 d'être dit, Monsieur Milosevic ?
23 L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, je l'ai entendu.
24 M. MILOSEVIC : [interprétation]
25 Q. Avez-vous remarqué dans ce document -- ou plutôt au sujet de ce
Page 39369
1 document, M. Nice a précisé qu'il s'agissait d'un document militaire,
2 n'est-ce pas ?
3 R. Oui.
4 Q. Est-ce qu'en mai 1998, au Kosovo, il y avait quelque mission militaire
5 que ce soit ?
6 R. Je n'en ai pas connaissance.
7 Q. Peut-être, y avait-il une mission étrangère, probablement. Avez-vous
8 remarqué que dans ce document, il est dit que, je cite, ils ont dit, les
9 termes utilisés sont les suivants : "Les personnes qu'ils ont trouvées là-
10 bas leur ont dit."
11 R. Oui.
12 Q. C'est ainsi qu'ils se sont exprimés. Avez-vous remarqué que l'on a
13 décrit une personne avec des cartouchières de Kalashnikov ?
14 R. Oui.
15 Q. Qui est-ce qui se trouvait en -- enfin, ceux qui portaient des
16 munitions -- qui était armé en fait, l'UCK ou les civils ?
17 R. Bien sûr qu'il ne s'agissait pas de civils. C'étaient des terroristes.
18 Q. On voit que c'est l'UCK qui a dit à la mission ce qu'elle a, par la
19 suite, couché sur papier ?
20 R. Tout à fait exact.
21 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Robinson, vous prenez en guise
22 d'élément de preuve un rapport qui dit que des membres de l'UCK, quoi que
23 non désignés en tant que tels, mais suivant leur appartenance, or il est
24 évident que c'étaient eux -- leur communiquent des informations. Donc, de
25 deuxième main, par ouï-dire, l'UCK témoigne contre la police, et vous
Page 39370
1 acceptez cela comme un élément de preuve valable.
2 M. MILOSEVIC : [interprétation]
3 Q. Quelques questions encore de ma part, Colonel. M. Nice a dit que les
4 Albanais pensaient qu'on allait les tuer s'ils ne s'en allaient pas. Dites-
5 moi si à cette époque-là, à l'époque dont il est question et au sujet de
6 laquelle vous avez témoigné vous-même, où il y a eu rassemblement d'un
7 grand nombre d'Albanais au centre de Pec et vous avez indiqué également que
8 ces Albanais quittaient Pec en suivant des directions variées, ces jours-
9 là, y a-t-il eu des Albanais de tués ?
10 R. Non. Nous nous sommes assurés de la chose en consultant la liste.
11 Q. Fort bien. Encore une question pour vous. M. Nice vous a interrogé au
12 sujet de cette soi-disant confiscation des pièces d'identité aux Albanais.
13 Est-ce que vous, ou l'un quelconque de vos collègues, ou n'importe quel
14 autre policier que vous connaîtriez, ou quelque soldat que vous
15 connaîtriez, auraient saisi des pièces d'identité aux Albanais ?
16 R. Notre intérêt n'était pas de saisir ces documents. Notre intérêt,
17 c'était de faire en sorte qu'ils aient des documents pour que nous
18 puissions établir leur identité, pour que nous sachions de qui il
19 s'agissait. Il n'y avait aucune logique à confisquer des pièces d'identité,
20 puisque nous les avions délivrées à ces intéressés.
21 Q. Merci, Colonel. Je n'ai plus de questions pour vous.
22 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur
23 Milosevic. Je me tourne vers les interprètes. Je voudrais revenir à la
24 question du déplacement ou de la réinstallation de ces personnes, de la
25 population de la zone. Est-ce qu'on pourrait accepter ces termes-ci : le
Page 39371
1 fait de réinstaller les personnes dans la zone, de réinstaller les
2 personnes faisant partie où appartenant à la zone, où simplement à
3 réinstaller la population de la zone en tant que génitif, ou réinstaller
4 les habitants locaux, ceux de la zone ?
5 L'INTERPRÈTE : Les interprètes demandent à voir l'original, mais toutes ces
6 possibilités paraissent acceptables, sont possibles.
7 L'interprète de la cabine française retraduit le texte sur le
8 rétroprojecteur. Il est question de déplacement d'une partie de la
9 population de la zone de responsabilité de Pec pour assurer le bon
10 fonctionnement ou le bon déroulement de la vie dans la zone de
11 responsabilité.
12 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci.
13 L'ACCUSÉ : [interprétation] J'aimerais attirer votre attention sur le fait
14 qu'on parle de la population, et pas des Albanais.
15 Deuxième point : dans cette même phrase, il est dit que c'est une
16 réinstallation pour que la vie fonctionne mieux, fonctionne bien. C'est
17 donc dans l'intérêt de la population. Cela fait que l'explication fournie
18 par le témoin dit bien que cela a été fait aux fins de protéger la
19 population --
20 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Nous avons compris, nous avons
21 compris --
22 L'ACCUSÉ : [interprétation] -- de ces conflits armés dont il est
23 question ici.
24 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci, Monsieur Milosevic. Je
25 remercie les interprètes. Nous allons consulter le service de traduction.
Page 39372
1 Monsieur Paponjak, c'est ainsi que se termine votre déposition. Merci
2 d'être venu en tant que témoin. Vous pouvez vous retirer.
3 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous remercie.
4 [Le témoin se retire]
5 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Robinson.
6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, Monsieur Milosevic.
7 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je réitère ma demande. Je demande le versement
8 de ces documents en tant que pièces.
9 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Nous allons en discuter maintenant.
10 Nous allons maintenant évoquer la question des pièces.
11 Monsieur Nice.
12 M. NICE : [interprétation] Permettez-moi de répéter ou de présenter mes
13 arguments pour motiver ma demande de rejet de tous ces documents. Il y a le
14 fait assez fondamental, mais en plus de cela, voici une modalité de
15 traitement de documents alors qu'il n'y a pas traduction de tout ceux-ci.
16 Il est peu réaliste de penser que nous allons revenir à l'examen détaillé
17 de toutes ces pièces puisque le témoin a maintenant terminé sa déposition.
18 En ce qui me concerne, on ne va pas demander à ce qu'il revienne.
19 Mon objection plus fondamentale, c'est le témoin qui l'a prononcée lui-
20 même. Je vous cite quelques extraits de ce qu'il a dit. Je lui ai dit ceci
21 : "Je vais répéter ma question en ajoutant un élément. Lorsque vous avez
22 signé tous ces documents en 2002, sauf les documents concernant la police
23 de la circulation, à partir de vos connaissances, vous n'étiez pas à même
24 de garantir l'exactitude de ces documents ?" Il a répondu ceci : "A partir
25 de mes connaissances personnelles, ce n'était pas possible."
Page 39373
1 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Nice, la présente Chambre,
2 ce Tribunal, a accueilli des éléments de preuve provenant de témoins qui,
3 je reprends vos mots, ne peuvent pas garantir l'exactitude des documents
4 qu'ils présentent.
5 M. NICE : [interprétation] Tout à fait. Mais voyons ce que dit ce témoin de
6 façon détaillée pour voir si ceci est acceptable ou pas, si ces documents
7 sont recevables ou pas.
8 Puis, il a poursuivi sa réponse. Il a dit que si le chef du
9 secrétariat veut trouver quelque chose comme je lui demande, il faudrait
10 qu'il interroge lui-même chaque contrevenant, qu'il s'occupe de chaque
11 détail lui-même, qu'il lise chacun des documents. La Chambre se rappellera
12 qu'il a dit clairement qu'il n'avait pratiquement jamais fait ceci, ce qui
13 est en contraste très net avec certains témoins qui présentent des recueils
14 de documents importants, qui donnent un récit détaillé de la méthode de
15 travail utilisée, mais outre cela, expliquent chaque fois que ce témoin a
16 vérifié les documents. Or, celui-ci n'avance même pas cette idée.
17 Une autre réponse qu'il a fournie, c'est celle-ci : "Personnellement,
18 je n'ai rédigé aucun de ces rapports d'information. J'ai dit quelque part
19 que le chef du SUP, en fait, on peut dire que c'est un gestionnaire. Il
20 n'établit pas de documents. Il n'interroge personne. Ce n'est pas son
21 travail. Il n'étudie aucun document. Tout ce qu'il fait, c'est signer des
22 documents, vu ce qu'il est, vu sa fonction en tant que fonctionnaire."
23 C'est tout à fait différent de tous les éléments que nous nous avons
24 produits, même si on peut dire que, quelque part, ces éléments se
25 ressemblent. J'estime que le critère de recevabilité est loin d'être
Page 39374
1 rempli.
2 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Il dit qu'il n'étudie pas de
3 documents. Qu'est-ce que vous voulez dire ? Qu'il ne les a pas lus.
4 M. NICE : [interprétation] C'est que le témoin a dit, et il l'a dit assez
5 clairement. Il n'a étudié aucun document. Il a dit qu'il connaissait une
6 partie de la séquence vidéo en ce qui concerne les documents Salihaj --
7 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous dites qu'il a dit qu'il n'avait
8 jamais lu les documents qu'il a signés.
9 M. NICE : [interprétation] Non, il n'a pas dit qu'il ne les avait pas lus.
10 Il les a signés. Il a dit clairement, il a dit qu'il n'avait pas rédigé
11 lui-même ce document.
12 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, oui.
13 M. NICE : [interprétation] Bien sûr, il faut une distinction entre le
14 rapport d'informations, c'est le document synthétique qui présente les
15 conclusions générales et les pièces jointes, si vous voulez. C'est comme
16 cela que cela s'est présenté dans chaque classeur. Il y a un document qui
17 fait référence à l'acte d'accusation de La Haye, vous savez qu'il a voulu
18 prendre beaucoup de recul par rapport à cela. Mais ses réponses sont
19 claires : il dit que ce n'est pas son travail. Il n'a pas pour travail
20 d'étudier des documents, c'est uniquement son travail de signer ces
21 documents vu son titre, vu ses qualités.
22 Vous aurez vu aujourd'hui ce qu'il savait si l'on étudie les questions dans
23 le détail. Je n'étais pas du tout d'accord pour que l'accusé évoque le
24 point 7.2 point 69, c'est tout à fait intéressant comme rubrique, on le
25 voit maintenant, parce que ceci se passe apparemment le 22 mai.
Page 39375
1 Manifestement, c'était afin de soutenir la thèse de l'accusé s'agissant de
2 bombardements qui se seraient produits ce jour-là, alors qu'on enterre déjà
3 des corps qui auraient perdu la vie trois jours plus tard. Voilà une faille
4 dans ces documents, le témoin n'était pas du tout au courant de ces
5 documents. Il n'était pas préparé. Il n'était pas prêt à donner le nom des
6 personnes qui ont rédigé ces documents même si je lui ai donné l'occasion
7 de le faire.
8 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Peut-on dire que s'agissant des
9 témoins que vous avez présenté, par exemple, pour introduire le livre
10 "Under Orders" ou le rapport de "Human Rights Watch" vous pensez que ces
11 personnes avaient étudié le document qu'ils avaient présenté ?
12 M. NICE : [interprétation] Je n'ai pas un souvenir détaillé, mais pour ce
13 qui est de la méthode de travail, ils ont vraiment bien suivi, cette
14 méthode de travail était bien plus détaillée. Ils ont vérifié le travail
15 qui était à l'origine de ces livres qu'ils ont rédigés, tout à fait.
16 Or qu'ici, c'est une donne tout à fait différente. On est loin, loin
17 du critère. Au fond, ils se bornent à dire, voilà, il y a des gens qui ont
18 préparé des rapports, et j'ai signé le rapport synthétique.
19 A cela s'ajoute le problème de la traduction, nous estimons somme
20 toute qu'il faut rejeter ces documents, et que ceci serait peut-être utile
21 pour l'accusé s'il cherche à demander le versement de tels documents, il
22 faut que ces documents soient traduits, mais il faut aussi mieux motiver la
23 base.
24 Puisque j'ai la parole, permettez-moi d'aborder un sujet tout à fait
25 différent en rapport avec les bombardements par l'OTAN de la prison de
Page 39376
1 Dubrava. Je n'ai pas pris la peine de le présenter au témoin puisque, de
2 toute façon, il n'aurait pas reconnu ce document. Il n'aurait pas voulu en
3 parler, donc je n'ai pas posé la question pour ne pas perdre de temps, mais
4 j'ai un document qui vient de l'OTAN. L'OTAN reconnaît qu'il y a eu des
5 bombardements le 19 et le 21 mai. Nous avons la liste des missiles utilisés
6 lors de ces bombardements. C'était en réponse à une question détaillée. A
7 vous de juger quand vous voudrez voir ce document.
8 Je pourrais, bien entendu, essayer de l'introduire au moment de la
9 réplique, mais nous allons sans doute avoir beaucoup de témoins dans cette
10 phase du procès. Peut-être que trop de temps s'écoulera d'ici là, et que
11 vous voudriez plutôt avoir la réponse de l'OTAN pour ce qui est des
12 bombardements effectués ces jours-là. J'ai ce document.
13 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vous remercie.
14 Maître Kay.
15 M. KAY : [interprétation] Si vous étudiez la question, il est utile pour ce
16 faire de voir quels sont les éléments présentés par l'Accusation pour ce
17 qui est des éléments d'enquête à Dubrava. C'est le Dr Eric Baccard qui a
18 présenté ces éléments, quatre classeurs sont arrivés dans le prétoire et il
19 a répondu à quatre questions que j'ai ici d'ailleurs. Notamment, sur les
20 blessures occasionnées par des engins explosifs et des morts par balle ou
21 blessures par balle, 37 % des personnes avaient été tuées par balle, 40 %
22 par des engins explosifs.
23 Dans ces quatre classeurs, nous avions un enregistrement vidéo fait
24 par quelqu'un d'autre, Jacky Rowland qui est venu déposer plus tard. Il y
25 avait un rapport circonstancié d'une équipe d'enquête espagnole s'agissant
Page 39377
1 de l'identité des cadavres. Ce n'était pas le travail qu'avait fait ce
2 témoin. Il s'était contenté de veiller à l'arrivée de ce document dans le
3 prétoire. Puis, il y avait un rapport détaillé d'une équipe d'enquêtes
4 danoise s'agissant du constat sur les lieux.
5 Dans ces rapports, on trouve des éléments venant de quelqu'un
6 qui est décrit comme étant un témoin et qui décrit les événements, il
7 explique en quoi ces éléments sont la base de l'enquête menée par l'équipe
8 danoise. On ne donne même pas le nom de cette personne. On dit simplement
9 que c'est un témoin qui dit qu'il y a eu un massacre dans une partie et qui
10 guide l'équipe danoise pour lui montrer ces bâtiments.
11 Prenez un exemple, l'intercalaire 9 de la pièce 165, document qui a
12 pour titre K0173927, paragraphe 3. Là, nous avons des informations
13 tactiques et on voit le récit que fait cette personne des événements.
14 Je suppose que la Chambre déterminera le poids qu'il convient à
15 cet élément. Elle ne va sans doute pas parler en considérant que ce sont
16 des éléments présentés sous serment. Je pense qu'ici nous avons une
17 condition identique avec M. Paponjack, il vient un peu comme M. Baccard qui
18 a produit beaucoup de documents qui provenaient d'autres équipes, auxquels
19 il n'a pas participé et il présente les conclusions. C'est, en fait, le
20 contenu de ces dossiers et de ces classeurs qui constituent des éléments de
21 preuve importants.
22 Nous avons fait objection à l'époque, malgré tout, cela a été déclaré
23 recevable même si on a ôté certaines parties, par exemple, les déclarations
24 récapitulatives d'un enquêteur, M. Nigel Stuart. Cela a été enlevé. Cela
25 n'a pas déclaré recevable. La Chambre est quand même saisie de la teneur de
Page 39378
1 ces dossiers. Ce que fait l'accusé ici pour se défendre, c'est assez
2 identique à ce qu'a fait l'Accusation.
3 Il y a un grand nombre de pièces qui ont été rédigées et préparées à
4 l'époque des faits en 1999. Les documents vous le montrent, et les
5 séquences vidéo sont aussi des documents authentiques qu'on peut
6 parfaitement comparer à ce qu'a produit Mme Rowland, témoin à charge qu'on
7 a présenté comme élément de preuve et qui a été déclaré recevable.
8 L'Accusation a présenté cela comme étant un élément filmé à l'époque des
9 événements.
10 J'estime que l'accusé a le droit de s'appuyer sur ces documents tout
11 comme l'a fait l'Accusation puisqu'on a autorisé l'Accusation à présenter
12 ce même genre de preuves documentaires.
13 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Robinson.
14 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui.
15 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je pense qu'aucune des objections soulevées par
16 M. Nice ne seraient être admises parce qu'après M. Nice, et précisément
17 parce qu'à l'occasion du contre-interrogatoire, il a déposé certaines
18 questions, j'ai procédé à des éclaircissements avec le témoin pour ce qui
19 est de savoir ce que signifiait son explication au sujet de la lecture.
20 S'il ne se souvenait pas des détails ou s'il n'appuyait pas -- ne sous-
21 tendait pas ce qui y était dit. Il a dit qu'il sous-tendait absolument la
22 totalité de la teneur des documents. Il les a lus. Il les a examinés. Il a
23 disposé de tous les dossiers cités par ces documents. Cela fait qu'à tout
24 point de vue, il les sous-tendait.
25 M. Nice voulait présenter M. Paponjak comme s'il avait répondu qu'il
Page 39379
1 avait signé comme un robot, comme une espèce de robot, tout ce qui lui
2 était apporté par ces services. Bien au contraire, M. Paponjak, en sa
3 qualité de chef du secrétariat de l'Intérieur de Pec, était à la tête de
4 l'équipe. Il a dit qu'il n'a pas rédigé, lui-même, mais que c'était une
5 équipe entière. Mais il se trouvait à la tête de cette équipe; il
6 contrôlait le travail de cette équipe; il signait les documents, une fois
7 qu'il s'était assuré, au-delà de tout doute raisonnable, pour reprendre
8 l'un de vos termes, que ces documents reprenaient tous les faits pertinents
9 et les éléments dont avait disposé ce secrétariat de l'Intérieur. A tout
10 point de vue, il se trouvait être compétent pour venir témoigner au sujet
11 de des documents.
12 M. Nice a également dit, quel est le justificatif pour l'admission ? Mais
13 le justificatif, c'est que le témoin était là. Il a tout le temps été à
14 Pec. Il se trouvait à la tête d'une équipe qui est intervenue pour ce qui
15 est de la rédaction de ces documents. Le témoin est la personne qui a signé
16 tous les documents dont elle est venue témoigner et aucun argument de la
17 part de M. Nice ne saurait contester ce fait. Il s'agit de documents
18 officiels émanant de la police à l'époque de la rédaction de ces documents.
19 Il n'y a aucune raison pour ce qui est de ne pas admettre, de ne pas verser
20 au dossier ces éléments de preuve.
21 M. Nice a également dit qu'il y avait des documents annexes que le témoin
22 n'a pas utilisés en temps utile. Mais les documents annexes se trouvaient
23 tout le temps dans les intercalaires. Il se peut que le témoin n'ait pas eu
24 idée de se référer à un dossier quelconque, mais tous les documents annexes
25 utilisés par lui en répondant aux questions ou pas se trouvent être
Page 39380
1 présents dans ces classeurs et ont été placés avant le début du témoignage.
2 On ne peut pas dire qu'un document qui vous a été présenté, qu'il ait
3 été traduit ou pas traduit, qu'on voulait le dissimuler ou le passer sous
4 silence. Le fait de la présentation d'un document illustre bien qu'il y
5 avait intention de versement au dossier en tant qu'éléments de preuve pour
6 que ce document soit examiné. S'agissant, maintenant, de l'objection
7 relative à la traduction, je crois avoir expliqué pourquoi et en quoi ont
8 consisté les difficultés de traduction. Cet argument peut être souligné
9 pour dire que le versement pourrait se faire une fois la traduction assurée
10 et on pourrait, en attendant, le prendre avec une cote pour identification,
11 mais pas rejeter le versement au dossier parce que ce dossier n'a pas été
12 traduit.
13 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vous remercie,
14 Monsieur Milosevic.
15 [La Chambre de première instance se concerte]
16 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] De façon générale, la Chambre estime
17 que les documents sont pertinents et d'une fiabilité suffisante pour avoir
18 une valeur probante. Ces documents sont déclarés reçus au dossier. La
19 question du poids à leur accorder, bien sûr, est une autre question.
20 Il y a trois catégories. Il y a les documents qui ont été traduits. Ils
21 sont versés au dossier pour autant qu'ils aient été utilisés. Les documents
22 qui ont été traduits et utilisés au cours de la déposition sont versés au
23 dossier.
24 Les documents qui n'ont pas été traduits, mais ont été utilisés recevront
25 une cote provisoire pour identification en attente de traduction.
Page 39381
1 Troisième catégorie, documents qui n'ont pas été utilisés. Ceux-là ne
2 seront pas versés au dossier. Il y a dans cette catégorie les intercalaires
3 9, 11 à 19, 24 à 26, 28 à 32, 34, 35, 39, 41, 42, 44, 45 et 47 à 49.
4 Voici la décision prise par la Chambre. Les débats reprendront --
5 [La Chambre de première instance se concerte]
6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, votre témoin
7 suivant, Monsieur Stevanovic, dites-nous sur quelles parties de l'acte
8 d'accusation va porter sa déposition; de cette façon, nous pourrons nous
9 préparer à sa déposition, à son audition. Vous allez consacrer cinq minutes
10 à nous en parler, demain matin.
11 Demain, nous reprendrons à 9 heures.
12 --- L'audience est levée à 13 heures 53 et reprendra le mercredi 11 mai
13 2005, à 9 heures.
14
15
16
17
18
19
20
21
22
23
24
25