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1 Le lundi 6 juin 2005
2 [Audience publique]
3 [L'accusé est introduit dans le prétoire]
4 [Le témoin est introduit dans le prétoire]
5 --- L'audience est ouverte à 9 heures 02.
6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Nice, vous pouvez continuer
7 je vous prie.
8 LE TÉMOIN: OBRAD STEVANOVIC [Reprise]
9 [Le témoin répond par l'interprète]
10 Contre-interrogatoire par M. Nice : [Suite]
11 Q. [interprétation] Monsieur Stevanovic, la semaine passée, vous avez eu
12 l'opportunité de voir des documents et des photos aux fins de vous re-
13 pencher sur la situation au sujet de certains éléments. Pour ce qui est de
14 la documentation, la présence des membres du MUP, à savoir, des Skorpions
15 dans le secteur de Srebrenica et de Jahorina, à l'époque du massacre de
16 Srebrenica, quelle est votre position ?
17 R. Est-ce que je dois répondre pour ce qui est de l'engagement que j'ai
18 contracté pour ce qui était de vérifier certaines données ?
19 Q. Maintenant, aux mêmes documents pour ce qu'ils sont censés
20 représenter ?
21 R. Non, je ne suis pas à même d'accepter que ces documents démontrent que
22 les membres de ce groupe, que nous avons vu sur la vidéo, étaient, à ce
23 moment-là, membres du MUP de la République de Serbie.
24 Q. Divisons tout ceci par morceau. Oublions l'enregistrement vidéo pour un
25 instant, attachons à penser aux documents que vous aviez été enclin à
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1 contester, ces documents qui montrent la présence du MUP ou de Skorpions
2 dans la région de Srebrenica et Jahorina.
3 Est-ce qu'aujourd'hui, vous êtes à même de reconnaître que ce sont là
4 des documents authentiques ? Est-ce que vous pouvez accepter maintenant
5 cette idée ?
6 R. Vous devez forcément me dire à quels documents au juste vous vous
7 référez.
8 Q. J'ai bien compris que vous avez eu le droit, grâce à une autorisation
9 des Juges, de consulter les documents qui avaient été contestés; je pense
10 que vous les aviez reçu. Vous vous souvenez de ces documents ?
11 R. Oui, maintenant, je comprends.
12 Q. Fort bien. Est-ce que vous avez réussi à consulter ces documents pour
13 vérifier ?
14 R. Lors de la dernière journée de mon témoignage, j'ai établi un contact
15 avec certaines personnes au ministère de l'Intérieur. Je leur ai envoyé, le
16 même jour, par fax, les documents que j'ai repris. Hier, une information
17 m'a été communiquée, à savoir qu'aujourd'hui, on me communiquerait les
18 informations sur les trois documents que je leur ai envoyés.
19 Je pense que les Juges de la Chambre et vous-même devez forcément
20 savoir, s'agissant de la vidéo, qu'on a vue ici et les photos qu'on a
21 montrées sur le rétroprojecteur --
22 Q. Je vais -- un instant. Je veux procéder afin que nous prévoyions
23 comment va se dérouler l'audience, et vous parlez d'une réponse du
24 gouvernement face à trois documents que vous avez envoyés et qui
25 parleraient de la présence du MUP ou de Skorpions dans la zone de
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1 Srebrenica au mois de juillet 1995.
2 R. Je ne conteste pas, Monsieur le Procureur, la présence de ces membres
3 de Skorpions que vous avez mentionnés à Srebrenica. Ce que je conteste - et
4 je le conteste avec certitude - c'est le fait qu'ils aient appartenu au
5 secteur de la Sécurité publique, alors, de là, à savoir s'ils faisaient
6 partie d'un autre secteur du ministère de l'Intérieur, je vous l'ai déjà
7 indiqué, je n'en ai absolument pas connaissance.
8 Q. Nous sommes toujours à examiner les documents, nous ne parlons pas de
9 l'enregistrement vidéo, pas encore. Est-ce que votre réponse est que vous
10 ne contestez pas la présence de Skorpions à Srebrenica ? Est-ce que c'est
11 la même chose que ce que vous avez dit, la semaine dernière dans votre
12 déposition, est-ce que c'est différent ?
13 R. Je ne mets pas en cause la présence des personnes qu'on a vues dans le
14 clip à l'endroit qui nous a été montré, ce que je n'ai pas vu et les
15 éléments de preuve que je ne dispose pas --
16 Q. Désolé de vous interrompre. Si mes questions ne sont pas claires, j'en
17 suis désolé, mais j'essaie de rester sur cette voie. Essayez de me suivre.
18 Avant de voir l'enregistrement, on vous a posé des questions à propos des
19 documents qui montrent la présence de Skorpions ou de membres du MUP à
20 Srebrenica. Vous avez contesté ces documents, à moins que mon souvenir de
21 cette chose ne soit tout à fait erroné, vous n'avez pas accepté la présence
22 des Skorpions. Alors, est-ce que vous avez changé d'avis ? Est-ce que vous
23 avez changé d'opinion ? Si c'est le cas, pourquoi ?
24 R. Je n'ai pas changé d'avis en aucune façon. S'agissant de ce fait, à
25 savoir que les Skorpions étaient partis du ministère de l'Intérieur, là je
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1 n'ai pas changé d'avis du tout.
2 Q. Mais je pense que vous saviez où je voulais en venir; est-ce que vous
3 avez changé d'avis sur la question de savoir si les Skorpions étaient
4 présents à Srebrenica en juillet 1995 ?
5 R. Je répète une fois de plus, je n'exclus pas la possibilité que les
6 membres de ce groupe aient été là-bas. Ce que j'exclus comme possibilité,
7 c'est qu'ils aient fait, en quelque façon que ce soit, partie du secteur de
8 la Sécurité publique du ministère de l'Intérieur de Serbie.
9 Q. On reviendra à ce sujet-là, mais venons à notre volet,
10 l'enregistrement. Je ne sais pas si les Juges de la Chambre le savent,
11 mais, aux fins du dossier de l'audience, je tiens à expliquer quelque chose
12 que vous pourrez confirmer.
13 A la suite de la diffusion d'un bref extrait de cet enregistrement, et
14 suite à la demande que nous vous avons faite d'identifier certains
15 individus, il se fait que soit une version intégrale de ce qui semblerait
16 être le même enregistrement et une version beaucoup plus longue aurait été
17 diffusée à la télévision de Serbie.
18 R. Ce que je sais, c'est que ces vidéos ont été diffusées, mais je ne sais
19 pas dans quelle version et dans quelle envergure. Ce que je crois savoir
20 c'est qu'on a montré ici.
21 Q. Ceci a eu pour résultat, notamment, c'est une chaîne tout à fait
22 indépendante du bureau du Procureur, quelque chose qui n'a rien à voir avec
23 nous. A la suite de cette diffusion, on a identifié des victimes et des
24 auteurs présumés ont été arrêtés, n'est-ce pas ?
25 R. Ce sont les informations qui m'ont été transmises par les médias qui
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1 publient en langue serbe.
2 Q. Dix personnes ont été arrêtées en quelques heures, et quatre de ces
3 individus auraient été placés en détention préventive.
4 R. Les informations que j'en ai portées sur la première partie de votre
5 constatation, à savoir que huit à dix membres, ou membres allégués de cette
6 unité, ont été arrêtés de ceux qui ont -- que l'on pouvait voir sur
7 l'enregistrement vidéo.
8 Q. Vous qui avez été policier d'active, qui aviez été employé du MUP,
9 pourriez-vous m'aider ? Comment était-ce possible que ces gens, qui
10 apparemment n'avaient rien à voir avec le MUP, que ces gens soient arrêtées
11 quelques heures à peine après la diffusion d'un extrait de cet
12 enregistrement vidéo ?
13 R. Il m'est difficile de répondre à cette question, mais j'ai longuement
14 réfléchi à tout ce qui s'est passé ici, et il y a une chose qui est tout à
15 fait sure. C'est qu'à l'époque où j'étais membre d'active du ministère de
16 l'Intérieur. Si nous avions disposé de cet enregistrement vidéo, nous
17 aurons pris des mesures urgentes, immédiates pour retrouver ces personnes,
18 pour les arrêter. Je crois que le ministère de l'Intérieur, partant de cet
19 enregistrement vidéo et peut-être qu'il était disposé de certaines
20 informations au préalable, a réagi de façon urgente, pratiquement
21 immédiate. Il est normal de réagir de la sorte. La question qui se pose
22 c'est de savoir si les résultats sont suffisamment bons. Il me semble qu'en
23 ce moment-ci, ils le sont.
24 Q. Qu'aujourd'hui, désormais, vous acceptez que la partie de
25 l'enregistrement que nous avons vue la semaine dernière et dont vous avez
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1 reçu des noms et des photographies; est-ce que vous acceptez, désormais,
2 que cette vidéo montre des membres d'un groupe, appelé "les Skorpions", en
3 train de tuer un groupe de personnes emmenées de Srebrenica ?
4 R. Je n'ai pas eu de raisons de douter de ce que vous avez dit ou de ce
5 que vous avez montré. Je n'ai pas vu d'insignes ou d'inscriptions qui
6 pourraient permettre d'affirmer qu'il s'agit bel et bien de ce groupe-là,
7 mais je veux bien vous croire et je veux bien croire à ce qui a été montré.
8 Ce que j'affirme c'est qu'ils n'ont, en aucune façon, fait partie du
9 ministère de l'Intérieur ou plutôt de son Département de la Sûreté
10 publique.
11 Q. Très bien. Ces plans fixes, tirés de l'enregistrement vidéo, vous ont
12 été remis, quelques propositions de noms aussi; est-ce que vous avez
13 maintenant pu mener une enquête pour savoir si ces noms étaient le nom de
14 personnes qui, à l'époque, faisaient partie du MUP ?
15 R. Les noms de cette liste et les photographies, je ne les ai pas envoyés
16 à Belgrade parce qu'avant que je décide de les envoyer, j'ai été informé du
17 fait que ce groupe avait déjà été arrêté. S'agissant de ce groupe, en dépit
18 de l'engagement que j'ai pris, il n'eut pas été professionnel, ni correct
19 de le faire, parce que cela aurait influé sur la procédure en matière
20 d'enquête. Je suppose que vous allez recevoir cette information de la part
21 du ministère. Je me suis décidé à faire en sorte que ces trois documents,
22 ces trois textes soient envoyés et dans le courant de la journée
23 d'aujourd'hui, je m'attends à recevoir des informations sur les résultats
24 des vérifications opérées à ce jour. A quelques moments que ce soit,
25 lorsque j'aurais obtenu des informations, je le ferais parvenir au Greffe,
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1 à savoir, aux personnes qui travaillent dans le Tribunal et qui sont
2 chargées de communiquer avec moi.
3 Q. Vous avez suggéré que les Skorpions n'étaient pas subordonnés au MUP,
4 j'y reviens. Veuillez prendre au volume 4 ou au classeur 4, l'intercalaire
5 151.
6 Heureusement, nous avons une traduction de ce document. En guise de rappel
7 aux Juges, si vous prenez la traduction en anglais, le témoin pourra
8 prendre l'original, au 151, et nous parlons ici de crimes dont a fait état
9 un employé du OUP de Podujevo. L'OUP c'est toujours une section -- un
10 service du MUP, n'est-ce pas ?
11 R. Oui, c'est une partie du secrétariat de l'Intérieur à Pristina. Cela
12 fait partie du secrétariat à l'Intérieur.
13 Q. Apparemment, plusieurs corps, à la rue Rahmana Morine, auraient été
14 trouvés et on fait une enquête.
15 R. Je suis au courant de ce cas.
16 Q. 19 corps parmi lesquels les corps d'enfants, de femmes, n'est-ce pas ?
17 A la fin, on dit que le rapport d'enquête préliminaire a été soumis contre
18 des auteurs connus sous le nom de Sasa Cvijetan et Dejan Demirovic, n'est-
19 ce pas ?
20 R. Oui, c'est ce que j'ai déjà dit à l'occasion de l'interrogatoire tenu à
21 ce jour.
22 Q. On dit que ces individus sont membres des forces de réserve de la
23 République de Serbie, SAJ, cela ne fait pas l'ombre d'un doute que c'est là
24 une unité qui relève de votre secteur -- de votre service de Police, n'est-
25 ce pas, la SAJ ?
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1 R. C'est exact. C'est une unité qui faisait partie du Département de la
2 Sécurité publique. A un moment donné, elle n'a fait partie de mon
3 département, mais je crois qu'à ce moment-là, elle en faisait partie.
4 M. NICE : [interprétation] Monsieur le Président, juste un instant, s'il
5 vous plaît.
6 Q. Ces deux hommes ont fini par l'objet de poursuites pour crimes. Nous
7 allons, maintenant -- ou un peu plus tard, voir les statistiques en matière
8 de poursuite, mais, si je parle de ce document-ci maintenant, c'est parce
9 qu'il est en rapport avec les Skorpions.
10 R. Oui, à la lecture de la presse, j'ai appris que les personnes, arrêtées
11 et qui ont fait l'objet de plaintes au pénal ou de renvois au ministère
12 public, ont quelque chose à voir, en effet, avec les Skorpions.
13 Q. Quelles personnes arrêtées ?
14 R. Les deux, à l'encontre desquelles il a été déposé des plaintes au pénal
15 et qui ont été arrêtées d'ores et déjà.
16 Q. Mais vous êtes en avance sur moi parce que vous savez que le récit, que
17 vous avez fait à propos du fait que les Skorpions ne seraient pas
18 subordonnés à votre service, c'est malhonnête. Maintenant, vous attendez à
19 ce qui va venir, donc, vous vous préparez en essayant de vous défendre.
20 R. Non.
21 Q. Pourquoi, tout d'un coup, est-ce que vous avez -- qu'est-ce vous avez
22 ce weekend, s'il vous plaît, aidez-nous. Qu'est-ce que vous avez -- qui,
23 tout d'un coup, a attiré votre attention sur le fait que ces deux hommes,
24 Cvijetan et son collègue, étaient manifestement subordonnés au MUP, en
25 passant par la SAJ, et avaient un lien direct avec les Skorpions ? Qu'est-
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1 ce qui a attiré votre attention sur ce fait, le weekend dernier ?
2 R. Mais, c'est tout à fait simple, j'ai lu les journaux. Je les ai dans
3 mon hôtel.
4 Q. Quels journaux ?
5 R. Je les ai à l'hôtel. Je peux vous les emmener. Je n'ai pas les
6 documents.
7 Q. Quel est le journal, votre journal qui montrerait que Cvijetan et son
8 collègue étaient des membres des Skorpions ? Ce journal aurait dit qu'ils
9 étaient des membres d'une SAJ ou étaient membres de réserve du MUP ? Mais
10 quel document a montré que c'était des Skorpions ?
11 R. C'est ce que je vais justement vous expliquer. Je crois avoir été
12 clair. La presse m'a fait savoir que ces gens avaient quelque chose à voir
13 avec les Skorpions. Je ne sais pas expliquer le reste, soit vous allez me
14 poser des questions, soit je vous apporterai des réponses plus étoffées. Je
15 me suis procuré une information disant qu'ils avaient quelque chose à voir
16 avec. Je ne peux pas vous confirmer cette information. Je ne peux pas la
17 démentir non plus, mais ce que je veux dire --
18 Q. Je vous ai demandé de nous aider le mieux possible, mais essayons
19 d'agir de façon logique ?
20 R. Bien sûr.
21 Q. Vous m'avez parlé de médias, d'informations. Je voudrais que vous nous
22 disiez, de façon précise, ce que vous avez reçu le weekend dernier qui vous
23 a dit que ces hommes étaient des membres des Skorpions ?
24 R. Ce que je peux faire c'est vous apporter le journal que j'ai lu, Vesti
25 [phon] et Novosti [phon] et là, il est fait état du fait que ces deux
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1 hommes, qui ont fait l'objet de renvoi au procureur, avaient été membres
2 des Skorpions. Tout ce que j'ai dit c'est que ces deux hommes ont fait
3 partie de cette Unité antiterroriste spéciale. Ils n'ont pas pu faire
4 partie d'un groupe paramilitaire et ce n'est qu'à titre individuel qu'ils
5 ont été membres des effectifs de réserve de cette unité. Ce qui est
6 possible encore --
7 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Général, ce document ou ce journal,
8 que vous avez lu, il porte quelle date ?
9 LE TÉMOIN : [interprétation] Ce journal est daté d'hier ou d'avant-hier. Ce
10 sont des journaux en langue serbe qui transmettent des commentaires au
11 sujet des événements qu'on nous a montrés dans la vidéo. A ce sujet, il est
12 mis en corrélation ce groupe avec ce qui fait l'objet de l'intercalaire que
13 nous avons ici.
14 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Poursuivez, Monsieur Nice.
15 M. NICE : [interprétation]
16 Q. Il ne m'est pas possible d'accepter ou de rejeter ce que vous dites.
17 J'ai, bien sûr, vérifié. Je ne peux pas me prononcer sur la question de
18 savoir si, le weekend dernier, les journaux ont rappelé le procès intenté à
19 Cvijetan et à son collègue, en montrant que c'était là deux Skorpions. Je
20 vais vous montrer deux comptes rendus établis, à l'époque, de ce procès.
21 Ceci vient de Vreme, la date est celle du 25 décembre 2003. Deux passages
22 en ont été traduits.
23 Le premier document que je vous soumets, vous voyez que le passage
24 est à la page 24 ou 25, oui. Voici ce qu'il dit : "Le crime de la rue
25 Rahmana Morine, numéro 7, s'est passé le 2 mars 1999, quatre jours à peine
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1 après le bombardement de l'OTAN. Ce jour-là, un groupe de forces spéciales
2 les Skorpions se composant d'anciens des vétérans de la guerre en Bosnie et
3 en Croatie qui faisaient partie de l'Unité SAJ a été envoyé vers la ville."
4 Le rapport dit : "Ensuite, que même si le tribunal ne s'est toujours
5 pas prononcé sur les faits précis de ce qui s'est passé après l'entrée des
6 Skorpions à Podujevo, une chose claire. Le commandant de l'unité, Slobodan
7 Medic, est parti pour une réunion en ville, et il a donné l'ordre à ses
8 soldats d'attendre dans les bus son retour, mais les soldats ne l'ont pas
9 écouté. Ils sont partis en groupe. Ils sont partis du bus et se sont
10 dispersés dans les maisons avoisinantes, apparemment, en cherchant un
11 logis. Ce faisant, ils ont aussi dévalisé des commerces, fouillé des
12 citoyens qu'ils rencontraient dans la rue ou chez eux, emportant --
13 confisquant leurs biens peu à près qu'un Skorpion soit entré dans une
14 maison remplie de civils dans la rue Rahmana Morine. On a entendu le bruit
15 de coup de feu, et dans la cours d'une maison il y avait une pile de corps.
16 Aussitôt après l'incident, le commandant Boca est arrivé et a pris la
17 parole. Je ne peux même pas vous laisser une seconde sans que -- et
18 certains termes assez vulgaires sont exprimés pour dire ce qu'il pense. Il
19 a donné l'ordre aux Skorpions de remonter à bord des bus pendant qu'une
20 unité était renvoyée en Serbie."
21 Est-ce que ceci concorde avec le souvenir que vous avez de la façon le
22 procès intenté à ces deux hommes s'est déroulé ?
23 R. Je n'ai pas souvenance de ce qui s'est produit à l'occasion du procès
24 de ces gens. Certains des détails peuvent être lus dans les journaux que
25 j'ai lus, et puisque cela vous intéresse, je vous fournirais les journaux
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1 que j'ai lus et vous allez ce que je vous ai dit est tout à fait vrai.
2 Donc, jusqu'à hier, je n'ai pas disposé d'une information au terme de
3 laquelle il s'est trouvé là-bas un groupe appelé "Les Skorpions". Jusqu'à
4 hier ou avant-hier, je n'ai aucune information disant que Boca s'y
5 trouvait. Si vous me le permettez, j'aimerais dire quelque chose
6 d'important parce que, si je réponds trop brièvement, je ne dirai pas des
7 éléments -- ou je ne fournirais pas des éléments importants.
8 De quoi s'agit-il en somme ? Il s'agit de membres des effectifs de
9 réserve. Ils peuvent intégrer dans les rangs de la police en tant
10 qu'individus. Je ne vais pas contester, en ce moment-ci, la possibilité
11 qu'il y ait eu, après la guerre en 1996, quelqu'un parmi les membres de ces
12 unités-là à faire partie des effectifs de réserve conformément à la
13 procédure légale. Ce que j'affirme c'est qu'à l'époque, dans le cadre du
14 ministère, il ne pouvait pas y avoir une unité étrangère, une unité autre
15 en provenance d'une guerre précédente pour faire partie des formations. Une
16 formation pouvait faire partie des effectifs de réserve de la police ou de
17 tout autre unité. Or, c'est une question qui doit être résolue sur un plan
18 tactique. Ce n'est pas le niveau moyen ou le niveau stratégique qui en
19 décide.
20 Je répète, une fois de plus, je ne peux pas vous le confirmer, ni le
21 démentir. Ce sont des textes qui ont été publiés par les journaux. Je n'ai
22 aucune raison d'en douter. Ce qui fait l'objet de doute c'est qu'on n'ait
23 pas interprété les faits de façon appropriée. Il est clair ici qu'il s'agit
24 d'effectifs de réserve, et s'agissant des effectifs de réserve, on n'en
25 fait pas partie et on n'en fait pas faire partie d'une unité, mais des
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1 individus. S'il y a eu une unité d'intégrer aux effectifs de réserve c'est
2 une chose que je n'exclus, mais ma foi --
3 Q. Je crains ne devoir vous demander de conclure. Excusez-moi de vous
4 interrompre. Il découle de ce que vous dites deux choses immédiatement
5 avant de continuer. Nous allons découvrir qu'il y avait peut-être deux ou
6 trois, quatre, ou cinq, ou six membres du MUP qui avaient poursuivi vous en
7 1999. C'est vous qui aviez la responsabilité du Kosovo dans une large
8 mesure. Vous êtes toujours dans le MUP en 2003 lorsque ce crime est supposé
9 être intervenu. Est-ce que vous dites la vérité quand vous dites ne pas
10 vous souvenir de ce procès intenté à des personnes qui étaient censées être
11 subordonnées au SAJ et qui commettent ces crimes odieux ? Vous dites
12 jusqu'au weekend dernier, vous n'aviez aucun souvenir de ce crime.
13 R. Ce n'est pas ce que je dis.
14 Q. -- peux voir. Est-ce que vous faisiez là après 1999 et 2003 ? Vous ne
15 regardiez pas la télévision ? Vous ne lisiez pas les journaux ? Vous ne
16 parliez pas à vos collègues ? Comment pourriez-vous être dans une telle
17 ignorance ?
18 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Excusez-moi. La réponse dit : "Ce
19 n'est pas du tout ce que je dis." C'est la réponse du témoin qui sème une
20 certaine confusion dans mon esprit.
21 M. NICE : [interprétation]
22 Q. Aviez-vous connaissance ou souvenir de ce procès jusqu'au moment de
23 lire ce que vous avez lu dans les journaux le weekend dernier ?
24 R. Bien sûr, que j'ai eu connaissance de ce procès. Je vous ai dit qu'à
25 l'occasion de l'une des journées précédentes, je crois l'avoir dit et même
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1 après trois reprises, qu'il y avait un procès qui se déroulait en Serbie.
2 Vous voulez me jeter dans la confusion. Alors, j'ai à plusieurs reprises
3 indiquer que j'ai eu connaissance de l'événement depuis qu'il est survenu,
4 et je sais qu'au même moment, les membres de ce groupe, suspecté d'avoir
5 commis cet acte ou ce crime, ont été renvoyés en Serbie au même moment.
6 L'enquête a été diligentée de façon urgente, immédiate. Il y a eu un renvoi
7 au ministère public. Il y a eu identifications des auteurs. Ils ont été
8 arrêtés à Novi Sad. Monsieur le Procureur, pour moi, à mes yeux de ministre
9 adjoint, c'est ce qui m'intéressait. En ma qualité de ministre adjoint, je
10 ne peux pas traiter de biographies de 25 000 policiers, et de biographies
11 de quelques milliers de membres des effectifs de réserve. Donc, je ne
12 connais pas leurs biographies, mais tout ce qui est indiqué dans la plainte
13 au pénal, je suis au courant de ce qui est indiqué, et j'ai suivi le
14 procès. Je n'ai pas placé en corrélation les accusés avec les Skorpions.
15 C'est tout ce que j'affirme, et tout le reste, je l'ai dit au moins deux
16 fois jusqu'à présent.
17 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Puis-je poser une question ? Monsieur
18 Nice, est-ce que ceci va perturber l'ordre de vos questions ?
19 M. NICE : [interprétation] Pas du tout.
20 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Est-ce qu'il faut déduire, Monsieur
21 Stevanovic, que vous, vous avez compris que ces policiers, qui avaient été
22 arrêtés, faisaient partie du service de Sécurité publique -- du secteur de
23 Sécurité publique du MUP ?
24 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.
25 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Est-ce qu'il faut aussi en déduire que
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1 Boca faisait aussi partie du secteur de Sécurité publique du MUP ?
2 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est ce qui en découle, de façon évidente, si
3 cela s'est produit là.
4 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Est-ce que, par conséquent, on peut
5 aussi déduire que le secteur de Sécurité publique du MUP a la
6 responsabilité de ce qui semble avoir été un massacre à la rue Rahmana
7 Morine ?
8 LE TÉMOIN : [interprétation] Ce n'est pas contestable. Ce massacre a
9 perpétré par des membres du service de Sécurité publique du MUP de Serbie.
10 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je vous remercie.
11 M. NICE : [interprétation]
12 Q. Des témoins sont venus ici dans ce prétoire, notamment, un certain
13 Milan Milanovic, alias Mrgud. Je pense que sa déposition s'est faite en
14 audience publique, et dites-le-moi si ce n'est pas le cas. Ce témoin a
15 révélé que Medic, en réponse à une demande dans votre effectif, avait
16 marqué son accord pour aller début 1999 au Kosovo avec environ 150 hommes
17 de Novi Sad. Est-ce que vous vous souvenez de ce qui s'est passé, et que
18 cela s'est passé ?
19 R. Je ne m'en souviens absolument pas. Je ne me souviens d'aucune
20 conversation avec le dénommé Medic. Je vous ai dit quand est-ce que je l'ai
21 vu et en quelques circonstances, jamais plus tard, je ne sais pas ce qui
22 s'est produit. Je n'ai pas eu de contact. Cela ne m'a pas intéressé. Je ne
23 sais pas si quelqu'un du MUP a eu des contacts avec lui.
24 Q. Vous voyez, vous, vous avez un poste très élevé. Vous avez accès à des
25 informations grâce aux réunions où vous y assistiez. Comment se fait-il que
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1 Medic, qui est un homme très connu et qui a 150 hommes, et qu'on l'envoie à
2 l'aide au Kosovo -- pour aider le Kosovo sans que vous le sachiez à votre
3 insu ? Comment est-ce possible ?
4 R. S'ils ont effectivement été envoyés ces 150 hommes au Kosovo, à partir
5 d'un groupe de cette nature, ce qui me semble incroyable, c'est que je ne
6 le sache pour autant, mais soyez assuré que je ne le savais pas. Je ne sais
7 d'abord pas s'ils en étaient envoyés, 150. Ce que je sais c'est ce qui a
8 été rédigé dans cette plainte au pénal, et en partie de ce que vous avez
9 dit, mais je ne sais pas qu'il y a eu une corrélation entre les auteurs de
10 ces crimes et le groupe des Skorpions. Cela je ne le sais vraiment pas.
11 Q. Est-ce que vous vous souvenez de ceci, peut-être : après ce que ce
12 crime odieux a été commis, le groupe Medic a été retiré du Kosovo ?
13 R. Je sais fort bien qu'un groupe de réservistes antiterroristes -- de
14 cette Unité antiterroriste spéciale, qui a été suspectée d'avoir commis ce
15 crime, ce groupe a été renvoyé à l'instant même du Kosovo, dans un délai
16 d'au maximum d'une demi-heure. Cela a véritablement été un crime grave.
17 Nous avons tous été informés, et l'attitude adoptée a été communément
18 prise, à savoir que ces gens devaient être renvoyés immédiatement, et ce
19 qui importait le plus empêcher la perpétration de ce crime, identification
20 des auteurs, plaintes au pénal, arrestation des fautifs, et c'est ce qui a
21 été fait.
22 Q. Pourriez-vous m'expliquer ceci ? Le général Vlastimir Djordjevic, quel
23 rôle a-t-il joué au Kosovo entre mars et juin 1999 ?
24 R. Le général Djordjevic a exercé ses fonctions. En ce temps, il était à
25 la tête du Département de la Sûreté publique, et il avait des compétences
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1 en temps de paix --
2 Q. [aucune interprétation]
3 R. -- en sa qualité de chef du Département de la Sécurité publique.
4 Q. Fort bien. Est-ce qu'il vous était subordonné ? Est-ce qu'il était au
5 même échelon que vous, ou est-ce qu'il était votre supérieur ?
6 R. Il n'a pas été mon subordonné. A l'époque, je ne peux pas dire non plus
7 qu'il a été mon supérieur. Il était à la tête de ce secteur de Sûreté
8 publique et que je me trouvais à faire partie de ce secteur de la Sûreté
9 publique, mais nous étions tous les deux adjoints du ministre. A l'époque,
10 c'était le ministre qui nous donnait des ordres et lui aussi recevait ces
11 ordres de la part du ministre. Ce qui fait qu'on peut dire c'est qu'on
12 était sur pied d'égalité, placés sous les ordres du ministre.
13 Q. Est-ce que vous vous faisiez confiance, Djordjevic et vous ?
14 R. En principe, oui.
15 Q. Est-ce qu'il lui est arrivé au général Djordjevic ne pas vous dire
16 certaines choses ?
17 R. Je ne sais pas. Je ne sais pas s'il a dissimulé des choses à mon égard.
18 Je sais qu'il y a des choses qui m'a dites. Je ne sais s'il y a des
19 éléments qu'il a gardé à l'abri de mes yeux ou de --
20 Q. Il a fallu que vous sachiez certaines choses.
21 R. Que vous voulez que j'aie dû savoir ?
22 Q. Pourquoi est-ce que Djordjevic vous aurait caché le fait qu'il pouvait
23 obtenir des renforcements d'effectifs au Kosovo, ou la question du
24 déploiement d'effectifs, n'est-ce pas ?
25 R. Je pense qu'il n'a rien dissimulé. Les renforts pour le Kosovo était
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1 une chose assez régulièrement faite. Je n'affirme pas avoir tout su, mais,
2 pour ce qui est des renforts envoyés au Kosovo, j'ai été mis au courant,
3 ainsi que du retrait des troupes.
4 Q. Aidez-moi sur ce point, s'il vous plaît : ce même témoin nous a dit
5 que, quelques semaines après le retrait des Skorpions, Djordjevic les a
6 faits revenir. Qu'en dites-vous ? Cela se trouve aux pages 27 830 du compte
7 rendu d'audience.
8 R. Cela, je n'en ai pas connaissance du tout. Ce que je sais, c'est qu'au
9 Kosovo, à l'époque, il y a eu plusieurs Unités de la Police, pratiquement
10 toutes les Unités spéciales, l'Unité antiterroriste spéciale et les SAJ. Si
11 l'un quelconque des membres des effectifs de réserve de cette Unité
12 antiterroriste spéciale a été renvoyée au Kosovo, cela n'a rien
13 d'exceptionnel. Je n'ai aucune information disant que le groupe de
14 Skorpions a été renvoyé au Kosovo. Je vous répète une fois de plus : si
15 dans cette Unité spéciale, en sa qualité de membres des effectifs de
16 réserve, il y avait l'un quelconque des membres des Skorpions de la
17 République de la Krajina serbe, cela n'a pu se faire que, si après la
18 guerre suivant une procédure légale, en sa qualité d'individu, il a pu
19 faire partie des effectifs de réserve d'une Unité spéciale, mais personne
20 n'a pu prendre la décision d'intégrer une formation entière dans les
21 effectifs de réserve. Les effectifs de réserve c'est un groupe -- une
22 entité constituée d'individus et non pas d'unités. S'il y a eu une décision
23 de cette nature, il n'y a que le ministre avoir pu la prendre cette
24 décision, et je n'ai pas connaissance de la prise d'une telle décision.
25 M. NICE : [interprétation] Pourrions-nous passer en espace de quelques
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1 minutes à huis clos partiel.
2 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui.
3 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel.
4 [Audience à huis clos partiel]
5 (expurgée)
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1 (expurgée)
2 (expurgée)
3 (expurgée)
4 (expurgée)
5 [Audience publique]
6 M. NICE : [interprétation]
7 Q. Dernier élément en ce qui concerne ces articles relatifs au procès
8 intenté à Cvjetan. C'est la page 25, pour vous, qui nous intéresse, quand
9 on dit "Les Gardiens du pétrole." Medic fait un récit. Nous allons voir si
10 ceci vous aide sous une forme ou une autre.
11 "Slobodan Medic, alias Boca, commandant des Skorpions a parlé devant le
12 Tribunal de l'historique de son unité. Mais parfois ce qu'il a dit à ce
13 sujet était un peu différent. Lors de sa comparution le 28 mars 2003, il a
14 déclaré : 'Les Unités des Skorpions avaient été constituées en 1991 et
15 qu'elles faisaient partie en tant qu'unités régulières de l'armée
16 yougoslave, qu'elles opéraient en Bosnie et en Croatie. A la fin des
17 opérations de guerre en Bosnie et en Croatie, ces unités ont été mutées en
18 Serbie. Les hommes ont été déchargés de leurs fonctions. Mais coeur de
19 l'unité a été conservé conformément au Règlement, et nous avons reçu des
20 instructions pour veiller à ce que les hommes mènent une vie normale.'
21 Quelques mois plus tard, le 5 décembre, Boca a répondu à la même question
22 de la façon suivante : 'Les Unités des Skorpions ont été créées en mai 1992
23 afin de protéger "l'industrie du pétrole en Krajina." Elles ont poursuivi
24 ces activités de 1992 à 1996. Par la suite, parce que j'avais exigé que mon
25 unité fasse partie du MUP de Serbie, les Skorpions sont devenus une partie
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1 de réserve de l'Unité spéciale antiterroriste du MUP de Serbie.' Il est
2 bien connu que les activités pétrolières de l'est de la Slavonie étaient
3 des sources très rentables de profits pour le président de la RSK, Goran
4 Hadzic, et pour feu Arkan."
5 Etes-vous à même de nous aider ? Ce que dit ici Medic, est-ce faux ou
6 exact ? D'abord, en ce qui concerne le fait que les Skorpions faisaient
7 partie de l'armée. C'est bien votre souvenir à vous aussi ?
8 R. Ce que je peux répéter, c'est ce que j'ai déjà dit : tout ce que je
9 sais à leur sujet, je le sais partant du fait qu'en 1995, dans la deuxième
10 moitié de 1995, j'ai séjourné en Slavonie de l'est. J'ai rencontré cet
11 homme par hasard deux ou trois fois, et qu'à l'époque, j'étais convaincu
12 qu'il faisait partie de l'armée de la RSK, voire de leur police. Rien de
13 tout le reste ne m'est connu. Je n'ai pas connaissance du tout de la date
14 de la création, des domaines d'intervention. Je ne sais pas ce qui s'est
15 produit après le retrait de la police de Serbie de cette Slavonie
16 orientale. Je ne sais pas s'il a demandé ou pas de passer dans les
17 effectifs de réserve du MUP de Serbie. Je ne sais pas si l'un d'entre eux
18 est effectivement passé dans ces effectifs. Ce qui me semble incroyable,
19 c'est qu'ils aient pu faire partie des effectifs de réserve en tant
20 qu'unité, en tant que formation. Ce n'est pas prévu par la loi, et ce n'est
21 pas un chef de département qui pouvait en décider. Si le ministre avait
22 pris une décision de cette nature, je pense devoir l'apprendre, mais je
23 n'exclus pas que le ministre ait pu en décider sans m'en informer. Mais je
24 ne pense pas toutefois qu'il ait pris une décision de cette sorte sans que
25 je sois mis au courant, parce qu'une décision de cette nature ne serait pas
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1 tout à fait conforme avec la loi.
2 La loi dit qu'un individu répondant aux conditions requises pour ce
3 qui est des effectifs de réserve pouvait être admis dans ces effectifs de
4 réserve. C'est ce qui est prévu au niveau tactique. Pour l'admission d'un
5 individu, il ne faut pas de décision de prise à un niveau élevé.
6 Q. Ma dernière suggestion en ce qui concerne les Skorpions et M. Medic, la
7 voici : vous avez été tout sauf franc et honnête dès la première fois que
8 j'ai mentionné Skorpions et Medic. Maintenant, vous êtes forcé à faire ces
9 concessions parce que vous avez devant vous des éléments de preuve qu'il
10 est impossible de contrer. N'est-ce pas là la vérité ?
11 R. Ce n'est pas vrai, Monsieur le Procureur. Véritablement, vous essayez
12 de me mettre en corrélation avec tout ce qu'il y a de mauvais qui se soit
13 produit sur le territoire de l'ex-Yougoslavie. Je m'attendais plutôt à être
14 épargné de tels qualificatifs. Ce que je vous affirme, c'est que je n'ai
15 rien à voir avec les Skorpions et je suis certain du fait que cela
16 s'avérera être vrai au fil du temps. Je resterai ici, et on pourra se
17 confronter si vous le souhaitez.
18 Je comprends votre volonté de me compromettre et je comprends aussi,
19 de la part des Juges, que vous avez le droit de le faire. Mais je ne veux
20 pas que vous me placiez en corrélation avec tout ce qui s'est passé de
21 vraiment moche sur le territoire de l'ex-Yougoslavie.
22 Q. Je dois passer à un autre sujet. Je n'ai pas d'ordre particulier, mais
23 si j'ai retenu cet ordre, c'est parce que j'avais de bonnes raisons. Nous
24 allons commencer par Racak.
25 M. NICE : [interprétation] Monsieur l'Huissier, veuillez nous amener le
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1 plan qui se trouve adossé au mur du prétoire. Il nous faudra peut-être un
2 chevalet. Nous allons brièvement parler de Racak.
3 Q. La semaine dernière, vous nous avez expliqué qu'au fond, vous n'aviez
4 aucune connaissance détaillée en ce qui concerne Racak. Vous vous en
5 souvenez ?
6 R. Je crois avoir expliqué que je n'étais pas sur les lieux. Je ne suis
7 jamais allé à Racak. J'ai expliqué le fait qu'à l'époque de ces événements,
8 je n'étais pas au Kosovo, mais à Belgrade. J'ai expliqué également que mes
9 connaissances proviennent notamment de la documentation officielle et des
10 informations communiquées au ministère par le QG du SUP à Urosevac.
11 Q. Mais même après avoir lu ces documents, vous n'aviez qu'une
12 connaissance très limitée, si j'ai bien compris, de ce qui s'est passé à
13 Racak; c'est bien cela ?
14 R. Il est exact de dire que je n'ai pas eu des informations complètes.
15 J'aurais eu beaucoup plus d'informations si je m'étais trouvé sur place.
16 Mais le dossier Racak je l'ai lu et j'ai été en contact avec la plupart des
17 documents.
18 Q. D'après ce que vous avez compris, ceux qui ont trouvé la mort, est-ce
19 qu'ils auraient été attaqués en tant que groupe et battus en tant que
20 groupe, et on leur a pris leurs armes à l'endroit où ils étaient tombés ?
21 C'est bien comme cela, à peu près, que vous avez compris les choses ?
22 R. Tout d'abord, je n'ai pas cru comprendre qu'ils ont été attaqués. J'ai
23 déjà, à plusieurs reprises, essayé de vous expliquer comment j'ai compris
24 la chose. C'est la police qui a été attaquée depuis Racak lorsqu'elle a
25 essayé de procéder à une mission légitime, et en raison de ces attaques en
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1 provenance de Racak, il y a eu de combats.
2 Toutes mes connaissances de ce sujet disent que ces personnes ont été
3 tuées suite à usage licite d'armes à feu de la part de la police.
4 Q. Très bien. Vous n'avez pas réussi à nous aider en ce qui concerne le
5 plan. Nous allons maintenant consacrer quelques instants à l'examen de
6 cette carte. Prenez quelques instants pour vous y retrouver. Il y a
7 certains endroits qui ont été indiqués. Vous avez l'anglais à gauche, mais
8 que ceci ne vous préoccupe pas, ce sera interprété pour vous autant que de
9 besoin.
10 M. NICE : [interprétation] Je vais demander un plan rapproché, un gros
11 plan, parce que d'ici, je ne vois pas grand-chose.
12 Q. Est-ce que vous savez personnellement où on a trouvé les cadavres ?
13 R. Je ne sais pas exactement où est-ce qu'on a retrouvé les cadavres, mais
14 je me souviens de ces vues prises dans la mosquée où on a rassemblé les
15 cadavres et où, si mes souvenirs sont bons, il y a eu examen superficiel
16 des cadavres et peut-être une partie des autopsies, mais je ne sais pas où
17 les cadavres se trouvaient auparavant.
18 Q. Regardez la carte que vous avez sous les yeux. Cherchez le numéro 5.
19 C'est cette ravine où un grand nombre de personnes ont été trouvées mortes,
20 au nombre de 20. Est-ce que, d'après ce que vous avez lu, vous avez appris,
21 qu'une vingtaine de personnes avaient été trouvées mortes dans cette
22 ravine ?
23 R. Oui, je me souviens de certaines vues qui sont liées à cette ravine.
24 Q. Je vous remercie. Je vais vous demander d'examiner ces deux
25 photographies.
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1 M. NICE : [interprétation] On pourra les placer sur le rétroprojecteur.
2 Monsieur l'Huissier, je vous remets ces deux photos.
3 Q. Posez d'abord cette pièce qui vient de l'intercalaire 5, pièce 156.
4 Veuillez regarder cette photo. Voilà des corps qui ont été trouvés dans la
5 ravine.
6 Photo suivante, Monsieur l'Huissier.
7 Vous avez ici ce même corps avec la trace laissée par la balle lorsqu'elle
8 entre dans le cou. Est-ce que vous avez un rapport présentant ce genre de
9 constat ? Est-ce que vous avez suffisamment d'expérience en tant que
10 policier pour savoir ce que ceci indique ?
11 R. Je peux vous donner mon opinion, bien sûr, mais je tiens à préciser que
12 je ne suis pas un expert en médecine légale et je ne suis pas dans la
13 police scientifique.
14 Ce que je puis voir, en ma qualité de policier tout à fait ordinaire, c'est
15 qu'il s'agit là d'une blessure par impact de balle. Ce sont des choses
16 qu'on nous a enseignées alors que j'étais à l'école secondaire du ministère
17 de l'Intérieur.
18 Q. Fort bien. Nous allons retirer cette photo et revenir à la carte.
19 R. Mais je ne sais pas vous dire plus en détail tout ce que ceci peut
20 signifier.
21 Q. Je n'ai que quelques questions à vous poser pour voir si vous êtes à
22 même de nous aider. Reprenez l'examen de la carte. Vous allez voir
23 qu'autour du numéro 5, il y a beaucoup d'autres endroits qui sont signalés,
24 4, 3, 2, 1. Vous voyez ces numéros. Vous savez, pour connaître la région,
25 que la distance entre le numéro 3 et le 4, le 4 et le 5, cela fait une
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1 distance assez considérable. Ce n'est pas simplement quelques mètres de
2 distance. Vous avez le numéro 3, vous l'avez trouvé ? Puis, vous avez le
3 3/7.
4 M. NICE : [interprétation] Je vais demander qu'on place ces documents sur
5 le rétroprojecteur afin que vous sachiez où je veux en venir avant de vous
6 poser la question.
7 Q. D'abord, la première page, lieu 3/7. On montre la direction suivie par
8 les victimes et le témoin. On a une personne qui a 22 ans, deux Mehmeti qui
9 ont été tués, le père et le frère -- excusez-moi, sœur, 22 et 54 ans.
10 Maintenant, je vais vous demander d'examiner la photo ou les photos.
11 Vous voyez ici le fils qui a survécu, qui a été blessé et qu'il a été
12 possible de voir à l'hôpital. C'est son père et sa sœur qui ont été tués.
13 Photo suivante, on voit ce même gamin.
14 Si vous regardez l'endroit, vous avez le pointeur dirigé sur cet
15 endroit, le 3/5. L'accusé voudrait que, par votre truchement, soit déposée
16 toute une série de documents au dossier. Je suppose que vous connaissez ces
17 documents dès lors. Il y en a-t-il un seul qui aurait montré que l'homme et
18 sa fille, qui sont morts là, dans ce lieu, portaient des armes et qu'on
19 aurait pris ces armes à cet endroit ?
20 R. Bien sûr que je ne peux pas répondre à ces questions parce que je n'en
21 ai aucune connaissance.
22 Q. Mais je suis désolé, Monsieur Stevanovic. Vous demandez à la Chambre
23 d'accepter 140 documents qui analysent les incidents de Racak. Je ne le
24 veux pas. J'ai fait une recherche, une recherche honnête qui a pour
25 objectif de trouver des documents qui montrent de quelle façon on a
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1 récupéré des armes de ces endroits, notamment, du lieu numéro 5.
2 Ici, un homme et sa fille ont été tués. Le fils a été blessé. C'est vous
3 qui avez porté ces documents. Est-ce qu'il y a dans ces documents, un seul,
4 où qu'il soit, qui montre qu'on a récupéré des armes de ces lieux éloignés
5 où ces personnes ont trouvé la mort ? Pourriez-vous nous aider sur ce
6 point.
7 R. Je puis vous aider en ce sens-ci : il est certain que dans le village
8 de Racak, il y a eu des combats. Cela, c'est incontestable. Le motif de ces
9 conflits a été une attaque depuis Racak contre la police qui avait pour
10 objectif de trouver et d'arrêter des terroristes.
11 Je ne peux pas témoigner sur des faits de détails, de telle nature qui
12 parleraient des circonstances dans lesquelles telle ou telle personne a été
13 tuée et si cette personne portait une arme ou pas.
14 Vous n'ignorez pas, et je n'ignore pas non plus, que s'agissant des
15 enquêtes diligentées qui auraient dû être effectuées après l'événement
16 même, et je ne sais pas si les corps ont été déplacés puisque l'unité n'est
17 pas restée là la nuit en raison du danger d'être attaquée. Ce qui fait que
18 je ne suis pas un témoin susceptible de parler de ces détails aussi
19 infimes, importants certes, mais infimes quand même, sur lesquels vous avez
20 insisté tout à l'heure. C'est là une question qui relève d'une enquête
21 détaillée et de longue haleine.
22 Q. Mais, Monsieur Stevanovic, à tout moment au cours de l'interrogatoire
23 principal mené par l'accusé sur ce sujet, lorsque vous avez été interrogé
24 au sujet du site où un crime s'est produit, vous avez fourni des réponses
25 qui blanchissaient l'accusé et les Serbes. Vous le faites en vous fondant
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1 sur des documents que vous dites avoir examinés, et je ne puis pas
2 m'excuser à votre égard de vous demander des détails infimes car si vous ne
3 pouvez pas aider l'accusé, je ne vois pas qui vous pouvez aider, voyez-
4 vous.
5 Vous pourriez peut-être regarder ce document. Je vous demande de retrouver
6 sur la carte numéro 4, le lieu numéro 9.
7 R. Je suppose, Monsieur le Procureur, que cette question est très
8 similaire à la précédente. Si je dois vous répondre en vous disant ce qui
9 s'est passé précisément en un lieu déterminé à un moment déterminé, dans ce
10 cas, ce sera une question --
11 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Attendez la question --
12 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.
13 M. NICE : [interprétation] Je demanderais à M. l'Huissier de vous montrer
14 sur le rétroprojecteur.
15 Q. Vous avez vu où est le point 9 du lieu du crime numéro 4, n'est-ce pas
16 ?
17 M. NICE : [interprétation] Monsieur l'Huissier, d'abord, la page comportant
18 l'intitulé. Oui, laissez-là sur le rétroprojecteur, Monsieur l'Huissier.
19 Q. Il s'agit du lieu de crime numéro 4, scène numéro 9, des photographies
20 qui montrent les différentes directions et l'orientation des endroits où
21 les cadavres ont été trouvés, le cadavre d'un homme âgé de 21 ans, un autre
22 de garconnet de 14 ans, et un autre d'un homme de 54 ans.
23 Photographie suivante, je vous prie. Ici, nous voyons une carte où par
24 photographie aérienne, on nous montre la route -- l'itinéraire suivi par
25 ceux qui voulaient fuir.
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1 Photographie suivante, je vous prie. Ceci nous montre les trois personnes
2 qui ont trouvé la mort à l'endroit où elles sont mortes, elles ont dû
3 entrer dans une maison. On voit le garconnet de 14 ans, et les deux autres
4 hommes.
5 M. NICE : [interprétation] Maintenant, dernière photographie, je vous prie,
6 Monsieur l'Huissier.
7 Q. Le père avec sa canne qui l'aide a marché, comme vous le voyez.
8 Je vais maintenant vous poser deux questions au sujet de cette partie du
9 document qui a été versé au dossier. D'abord, première question : est-ce
10 que vous pouvez, dans ces documents, me montrer le moindre bout de papier
11 qui démontrerait que des armes ont été retrouvées dans ce secteur, à
12 savoir, la scène numéro 9 sur le lieu numéro 4, où ces personnes ont trouvé
13 la mort ?
14 R. Je pense qu'il n'y a pas dans les intercalaires un seul document
15 démontrant que des armes ont été trouvées sur une personne déterminée. Pour
16 autant que je m'en souvienne, au moment où l'enquête a été menée sur les
17 lieux des armes ont été trouvées à un certain endroit ou quelques armes ont
18 été trouvées, la police a dû quitter les lieux assez rapidement.
19 J'ai apporté des documents qui ont été établis au moment des faits et les
20 documents en question ont été établis un peu après les événements, après la
21 situation que l'on voit -- après une certaine modification de la situation
22 sur place. Toutes les informations dont je dispose indiquent que ce n'est
23 pas la police qui a modifié la situation sur place, mais que ce sont les
24 villageois qui l'ont fait ou les terroristes, selon ce qu'il s'avérera
25 exact.
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1 Q. Toutes les informations dont vous disposez. Bien. Dites-nous, si vous
2 voulez bien : quelles sont ces informations ? Quelles sont ces informations
3 qui démontrent que ce sont les villageois qui ont modifié l'aspect de la
4 scène du crime ? Si vous voulez bien avoir l'amabilité de le faire.
5 R. Les informations dont je dispose viennent des documents que j'ai lus et
6 viennent d'un certain nombre de renseignements que j'ai obtenus oralement
7 de la part des personnes responsables de l'investigation sur place. Je
8 crois que les documents démontrent également que peut-être une nuit
9 l'endroit en question n'a pas été sous le contrôle de la police qui a dû
10 quitter les lieux par crainte d'une attaque.
11 Q. Absolument exact. Absolument exact. Mais, avant que vous mettiez en
12 doute la situation des personnes qui ont trouvé la mort, je souhaite que
13 vous observiez -- que vous fassiez remarquer que ce n'est pas la police qui
14 a modifié la situation sur place, mais les villageois qui l'ont fait ou les
15 terroristes puisque c'est ce que vous avez dit. Je voudrais que vous le
16 prouviez -- que vous me le démontriez.
17 R. Je peux démontrer la réalité des éléments d'information dont je
18 dispose, qui se trouvent dans les documents que j'ai apportés. Je répète.
19 Je n'ai pas été témoin oculaire de ces événements. Je ne peux pas vous dire
20 que c'est la police ou que ce sont d'autres personnes qui ont modifiée la
21 situation.
22 Q. Je vous en prie, ne battez pas en retraite. Tout ce que les habitants -
23 - tout ce que les gens sur place vous ont dit indique ce que vous affirmez
24 d'après vous, alors, montrez-nous un document particulier qui prouve des
25 modifications sont intervenues sur place du fait de la population ou des
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1 terroriste.
2 R. Je vous ai déjà dit, Monsieur le Procureur, quels sont les éléments
3 d'information dont j'ai disposé au moment de l'enquête sur place au moment
4 où les cadavres ont été découverts au niveau de la mosquée. Je ne pourrais
5 vraiment pas imaginer que quelqu'un puisse déplacer les cadavres et les
6 mettre dans la mosquée alors qu'il y avait danger de se faire tirer dessus
7 sur place.
8 Q. C'est absolument exact et tout le monde est d'accord avec cela. Les
9 cadavres ont été retrouvés. Ce n'est pas ce que vous êtes en train de dire.
10 Vous êtes en train de dire que des informations faussées ont été fournies
11 quant à l'endroit où les cadavres ont été retrouvés.
12 R. Non. Je vous en prie, je n'ai absolument pas dit cela. J'ai relaté une
13 constatation générale, à savoir qu'à partir du moment où les combats ont
14 cessé et jusqu'au moment où les policiers et les enquêteurs sont arrivés
15 sur place, la situation sur place a été modifiée.
16 M. NICE : [interprétation] Monsieur l'Huissier, je vous prie.
17 Q. Monsieur Stevanovic, je voudrais maintenant d'examiner le lieu de crime
18 numéro 2, emplacement numéro 2, scène de crime numéro 2, voyons d'abord la
19 carte, donc, lieu de crime numéro 2, vous voyez où cela se trouve, scène
20 numéro 2, cela se trouve à une certaine distance de la Ravine, n'est-ce
21 pas, du numéro 5 ?
22 M. NICE : [interprétation] Monsieur l'Huissier, je vous demanderais de
23 placer la page de titre sur le rétroprojecteur, si vous voulez bien. Donc
24 2/2, la photographie qui montre le rapport entre le village et l'endroit où
25 trois hommes âgés de 60, 62, et 58 ont été tués. Première photographie, je
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1 vous prie.
2 Q. Alors, on voit les corps de trois frères qui gisent sur le sol non loin
3 de leur maison, je crois que c'est leur maison. Je vous pose à leur sujet
4 la même question que tout à l'heure : avez-vous le moindre document -- le
5 moindre bout de papier qui explique, qui, quand, et comment les armes ont
6 été retirées de cette scène de crime ?
7 R. Il est tout à fait certain qu'il n'y a aucun élément concret qui
8 indique à quel moment, comment dans quelle condition, et où les
9 photographies ont été prises à telles ou telles personnes. Cela j'en suis
10 tout à fait sûr. Pourriez-vous, je vous prie, être assez aimable pour me
11 dire quelle est l'origine de ces photographies ? Est-ce qu'elles ont été
12 prises par la police ou par qui ? Je ne me souviens de les avoir vues.
13 Q. Ces photos ont été prises par des représentants de l'OSCE lorsque
14 l'OSCE est arrivé pour la première fois sur place, autrement dit, au moment
15 où la présence internationale a été assurée. Elles ont été prises par un
16 témoin qui a comparu devant la Chambre.
17 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Robinson.
18 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, Monsieur Milosevic.
19 L'ACCUSÉ : [interprétation] Bien. Voilà, finalement, M. Nice explique
20 quelle est la nature de ces éléments de preuve. Il m'est en doute des
21 éléments de preuve qui ont un rapport direct avec Racak, et qui sont très
22 volumineux, comme vous le savez. Ce sont des éléments apportés par M.
23 Stevanovic. Pour ce faire, ce n'est pas au témoin des éléments de preuve
24 issus du témoignage du témoin, mais des éléments de preuve qui lui
25 appartiennent, qu'ils sont des éléments de preuve de la partie d'en face.
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1 Je crois que le général Stevanovic n'est pas ici pour témoigner à ce sujet.
2 Je ne pense pas qu'il soit acceptable de contester des éléments tels que
3 ceci, et dont il n'a absolument pas été question jusqu'à présent dans la
4 déposition de M. Stevanovic. Le témoin n'a pas parlé des éléments de preuve
5 dont dispose M. Nice. Il a parlé de documents qui étaient en possession de
6 la police et, à présent, M. Nice lui demande d'expliquer la nature de ces
7 éléments de preuve qu'il lui soumet. Je demande comment le général
8 Stevanovic peut expliquer la nature des éléments de preuve de M. Nice.
9 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, le Procureur a
10 tout à fait le droit de contre-interroger le témoin en lui soumettant un
11 document, y compris si ce document n'a pas été présenté au cours de
12 l'interrogatoire principal.
13 S'il y a un problème d'authenticité de source des documents, vous
14 pourrez l'évoquer avec le témoin plus tard.
15 Veuillez procéder, Monsieur Nice.
16 M. NICE : [interprétation]
17 Q. Monsieur Stevanovic, vous avez entendu les accusations proférées par
18 l'accusé. Vous m'avez entendu un certain nombre de fois au cours des
19 dernières minutes insister sur la demande que je vous fais, à savoir --
20 demande qui consiste à vous demander si, parmi le morceau d'éléments de
21 preuve présentés par l'accusé, il y en a un qui serait susceptible de
22 répondre aux questions que je pose sur ce sujet ? Y a-t-il des documents
23 dans les éléments de preuve dont l'accusé souhaite le versement au dossier
24 qui pourraient répondre à ces questions ?
25 R. J'ai examiné tous les documents qui constituent les différents
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1 intercalaires qui ont en rapport avec Racak, ce sont des documents que les
2 policiers et le Juge d'instruction ont établis, policiers et Juge
3 d'instruction en charge de cette affaire, et ce sont des documents que j'ai
4 déjà vus. Je n'ai pas eu la possibilité de voir les photographies prises
5 par d'autres personnes que celles-ci. Je les ai peut-être vues à la
6 télévision sans savoir de quelles photographies il s'agissait, bien
7 entendu.
8 Selon ce que je sais, selon ce qui est disponible au ministère de
9 l'Intérieur, et j'ai dit ce que j'ai dit à ce sujet, j'ai apporté ces
10 documents ils sont contenus dans les différents classeurs que nous avons
11 ici.
12 Quant aux détails au sujet des événements -- des événements, je
13 répète qu'au sujet de ce qui s'est passé au niveau tout à fait détaillé sur
14 les lieux en question, je ne peux vraiment pas répondre.
15 Q. Vous vous souvenez que vous avez entendu une question posée si je ne
16 m'abuse par M. le Juge Bonomy au sujet de Racak. Il vous a demandé s'il
17 existait une déclaration émanant de l'homme qui était responsable du
18 travail sur place, et je vous ai posé une question tout à fait similaire. A
19 mes yeux, il est absolument clair que c'est vous qui étiez le policier ou,
20 en tous cas, la personnes chargée de l'ordre publique, qui vous occupiez
21 des différencies tous ces crimes s'est produits. Je n'ai donc personne
22 d'autre à interroger à par vous, c'est la raison pour laquelle je vous pose
23 ces questions; vous comprenez cela, n'est-ce pas ?
24 M. NICE : [interprétation] Monsieur l'Huissier, photographie suivante je
25 vous prie.
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1 LE TÉMOIN : [interprétation] Est-ce que je peux répondre ? Je réponds aux
2 questions lorsque j'ai des éléments d'information pour répondre, mais ce
3 qui est regrettable c'est qu'en général vous me posez des questions sur des
4 éléments au sujet desquels j'ai le moins de renseignements.
5 Si vous m'aviez posé des questions au sujet d'éléments sur lesquels
6 j'avais des informations bien entendu j'aurais répondu, mais le choix que
7 vous faites des questions que vous me posez, c'est que de façon assez
8 systématique, vous me demandez des détails tout à fait que, bien sûr, sont
9 importants, mais il est tout à fait normale que je vous réponde de façon
10 négative car je n'étais pas -- je n'ai pas été témoin oculaire des
11 événements et je ne suis pas allé sur place.
12 M. NICE : [interprétation]
13 Q. Je vais encore vous poser quelques petites questions et ensuite nous
14 passerons à autre chose.
15 Donc, la photographie que nous voyons ici en ce moment montre des marques
16 blanches et des marques noires. Les marques bleues sont posées à
17 l'emplacement où se trouvaient des balles, et les marques blanches à
18 l'endroit où se trouvaient des cadavres. Vous voyez cela, n'est-ce pas ?
19 Alors, il est permis de penser, je ne sais pas si c'est ce que vous
20 penserez, mais il est permis de penser que les cadavres ont été replacés
21 dans ce secteur de Racak alors qu'ils ont -- que ces hommes ont été tués
22 ailleurs. J vous demande s'il y au un seul document, s'il y a le moindre
23 petit bout de papier ou même un vague d'élément d'ouie dire indiquant qu'un
24 villageois -- ou plutôt qui vous aurez été fourni par un villageois selon
25 lequel, Monsieur Stevanovic, que vous pourriez expliquer dans quelles
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1 conditions ces trois hommes de 58 à 60 ans à peu près se sont retrouvés là,
2 gisant sur le sol avec des balles tout autour de leur corps et sans que
3 rien ne prouve que des armes auraient été retirées à ces trois frères. Y a-
4 t-il quelque chose qui serait susceptible d'expliquer cela ?
5 R. Malheureusement, ma réponse sera tout à fait comparable à celle que
6 j'ai faite jusqu'à présent. D'abord, je ne sais pas si des armes ont été
7 retrouvées en rapport direct avec ces trois victimes.
8 Deuxièmement, je ne sais pas si ces cadavres ont été déplacés ou non
9 par rapport à l'endroit qui est montré sur cette photographie. De façon
10 générale, je sais qu'après le début de l'enquête sur place, il y a eu des
11 changements asses importants au niveau de la scène du crime car les
12 cadavres se sont pour la plupart retrouvés plus tard dans la mosquée -- au
13 niveau de la mosquée, c'est-à-dire, dans le village, au centre du village.
14 M. NICE : [interprétation] Ma dernière question sera la suivante : Monsieur
15 Nort, aidez-moi encore pour cette question, donc, intercalaire 12 pièce
16 152. Veuillez la placer sur le rétroprojecteur, s'il vous plaît.
17 Q. Monsieur Stevanovic, nous revenons à la -- là ou la plupart de la
18 majorité des cadavres ont été retrouvés, là où a travaillé une équipe de
19 l'Union Européenne. Les couleurs n'apparaissent pas de façon très claire en
20 tous cas sur mon écran, mais j'espère que cela suffira pour voir de quoi il
21 s'agit. Donc des balles et des douilles ont été retrouvées à cet endroit au
22 niveau de la ravine. Les numéros en noirs concernent les cadavres qui ont
23 été découverts à cet endroit. Vous voyez cela ?
24 R. Oui.
25 Q. Les numéros en bleu qui se situent tous pratiquement dans la ravine ou
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1 aux environs immédiats, représentent l'emplacement des balles. Les numéros
2 en rouges sont des douilles.
3 Alors, vous avez une bonne expérience de la situation au Kosovo, vous
4 nous l'avez dit, vous étiez responsable d'Unité spéciale en Croatie. Vous
5 étiez officier de haut rang chargé de la zone frontalière avec la Bosnie,
6 donc vous avez une grande expérience de cette guerre. Est-ce que la
7 répartition des douilles et des balles et des cadavres vous permet de
8 penser à une exécution ?
9 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Robinson.
10 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, Monsieur Milosevic.
11 L'ACCUSÉ : [interprétation] M. Nice a déjà posé cette question à un autre
12 témoin, le professeur Dobricanin, qui est expert en médecine légale, et il
13 a obtenu une réponse indiquant que cela était impossible compte tenu de la
14 façon dont sont disposées les balles. Je pense qu'il ne sert à rien de
15 reposer la même question.
16 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, si le témoin ne
17 peut pas répondre à la question, il peut le dire lui-même.
18 Monsieur Stevanovic, êtes-vous en mesure de répondre à cette question ?
19 LE TÉMOIN : [interprétation] Effectivement, je ne suis pas un expert en
20 balistique et, contrairement à ce que dit M. Nice, je n'ai pas eu une
21 grande expérience de la guerre. Je n'ai participé dans ma vie à aucun
22 combat, et je n'ai jamais étudié les trajectoires des balles, l'emplacement
23 où l'on retrouve des balles ou des douilles, je ne suis en mesure de parler
24 de ces sujets qu'en tant que peut-être quelqu'un d'un tout petit peu plus
25 au courant que tout un chacun puisque tout de même j'ai terminé. J'ai
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1 obtenu un diplôme de l'Académie militaire, mais je ne suis vraiment pas
2 quelqu'un qui peut fournir une réponse qualifiée sur ces questions.
3 M. NICE : [interprétation]
4 Q. Dernière question sur ces documents : si les hommes, dont les cadavres
5 ont été retrouvés dans la ravine, ont trouvé la mort à l'endroit où on a
6 retrouvé leurs corps, et s'ils ont tiré en riposte, est-ce qu'on
7 s'attendrait à retrouver des douilles à cet endroit, des douilles qui
8 seraient tombées de leurs fusils ? Est-ce qu'il y un document que vous
9 connaissiez ou qui auraient été produit par vous, qui puisse expliquer
10 pourquoi aucune douille n'a été retrouvée ?
11 R. En principe, je puis dire mon accord à la première partie de votre
12 déclaration, mais je répète que la police n'a pas enquêté sur place
13 immédiatement après les événements. La police n'a pas enquêté au moment où
14 les cadavres étaient à l'emplacement où ils sont tombés. Manifestement,
15 vous avez déployé de grands efforts pour développer la conception qui est
16 la vôtre. C'est la première fois que je vois cette photographie et, pour
17 répondre, il faudrait que je réfléchisse beaucoup plus longtemps et que je
18 consulte pas mal d'autres documents car tout ce qui s'est passé sur place.
19 Toute sorte de choses peuvent s'être passées dans l'heure qui a suivi
20 l'événement, sans parler de tout ce qui peut changer en une année ou même
21 plus. C'est là des axiomes dans le cadre d'une enquête criminelle. Chacun
22 sait qu'on doit, pour démarrer correctement, démarrer sur une base stable;
23 or, malheureusement, ce n'est pas ce qui s'est passé ici.
24 Q. Vous n'avez jamais étudié les éléments de la police scientifique, des
25 photographies ou d'autres documents, d'autres éléments de preuve fournis à
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1 cette Chambre, n'est-ce pas ?
2 R. J'ai examiné les documents contenus dans les intercalaires que j'ai là,
3 à côté de moi, dans ce prétoire. Quant aux autres éléments de preuve dont
4 vous disposez, je ne les ai pas eus sur les yeux à part ce que vous avez
5 montré pendant ma déposition.
6 Q. Maintenant, pour ce qui est --
7 M. NICE : [interprétation] Merci, Monsieur l'Huissier. Je crois que nous
8 n'aurons plus besoin des documents qui sont placés sur le rétroprojecteur.
9 Q. S'agissant maintenant de l'identité des victimes, que pouvez-vous nous
10 dire pour nous aider sur ce point ? Qui étaient les victimes ?
11 R. D'après mes souvenirs, une grande majorité des victimes étaient des
12 hommes. Si je me souviens bien, il y avait une femme, une seule et peut-
13 être un enfant, mais je ne pense pas qu'il y ait eu un nombre plus
14 important de personnes tombant dans cette deuxième catégorie. La grande
15 majorité était composée d'hommes, de tranches d'âges assez diverses.
16 Q. Quant à la proposition selon laquelle, les victimes étaient des civils
17 ou des membres de l'UCK. Donc, des civils ou des combattants de l'UCK, que
18 pouvez-vous nous dire pour nous aider sur ce point ?
19 R. Tous les renseignements dont je dispose indiquent qu'il s'agissait de
20 personnes qui se battaient.
21 Q. Des détails, je vous prie. Donnez-nous tous les éléments de ce que vous
22 savez à ce sujet ?
23 R. Bien sûr, il peut y avoir des conséquences collatérales dans des
24 combats également. Quant aux détails, je n'en ai pas. Je n'ai vraiment
25 aucun détail.
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1 Q. Tout ce que vous savez. Si vous savez quelque chose, est-ce que vous
2 pouvez l'expliquer ? Dites-nous : pourquoi affirmez-vous que ce sont des
3 gens qui faisaient partie de l'UCK ?
4 R. Je l'ai dit sur la base des éléments d'informations dans lesquels
5 j'avais confiance, à l'époque, et dans lesquels j'ai toujours confiance
6 aujourd'hui : sur la base d'éléments informations que j'ai reçues des
7 personnes responsables de ce secteur de Racak, sur la base de documents que
8 j'ai lus dont j'ai pris connaissance et qui sont contenus dans les
9 intercalaires que nous avons ici.
10 Q. Mais, vous faites des commentaires généraux et il ne nous aide en rien,
11 Monsieur Stevanovic. Qui vous a parlé ? Qui vous a dit qu'il s'agissait de
12 membres de l'UCK ? De quels documents parlez-vous ? Définissez-les.
13 R. Il est question d'une attaque dont la police a fait l'objet, attaque
14 menée à l'aide d'armes à feu. Or, il est tout à fait certain que des civils
15 n'ont absolument aucune chance d'attaquer la police avec des armes à feu.
16 Cela, c'est tout à fait évident, mais cela peut se produire dans ces cas
17 extrêmes lorsque quelqu'un -- et quand on voit que quelqu'un attaqué la
18 police avec des armes à feu et qu'il y a quelque chose qui ressemble à un
19 QG de l'UCK, il est logique de penser que ces hommes faisaient partie de
20 cette formation, de ce groupe.
21 Il peut y avoir des exceptions. Bien entendu, il peut y avoir d'autres
22 situations mais les conséquences en cas de terroristes sont plus graves
23 qu'en d'autres cas. La zone en question est tellement proche des zones
24 résidentielles qu'il est impossible d'exclure cette possibilité.
25 Q. Vous ne connaissez aucune autre déclaration d'une personne ou tirée
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1 d'un document, sauf celle qui émane de celui qui dirigeait l'opération pour
2 la police serbe qui puisse -- vous n'avez rien d'autres, pas de
3 déclarations orales, pas de déclarations écrites, sauf cette déclaration de
4 ce policier. Dites-nous : qu'avez-vous lu d'autres ?
5 R. Dans la documentation que j'ai eue sous les yeux, il n'y a
6 effectivement aucune déclaration que celle de la personne qui a mené
7 l'opération. Nous avons dit cela, déjà, à plusieurs reprises. Mais il y a
8 un rapport qui comporte également ces éléments d'informations. Bien
9 entendu, cela ne signifie pas qu'aucun témoin ne viendra ici comme vous
10 l'avez dit, il y a un instant, pour parler de cela, mais je n'étais pas
11 témoin oculaire des faits. Vous insistez pour que je parle de la situation
12 sur le terrain, mais je ne peux vous donner que des éléments généraux car
13 je n'étais pas témoin oculaire.
14 Q. Dans les documents que vous avez produits, y a-t-il un document
15 particulier qui montrerait que les victimes étaient effectivement membres
16 de l'UCK ?
17 R. Je me suis servi de documents que nous avons cités en partie durant
18 l'interrogatoire principal.
19 Q. Mais de quels documents parlez-vous, dites-le nous ?
20 R. Je viens d'en mentionner un, le rapport dont nous avons cité des
21 extraits. Le rapport comportant les constatations faites. C'est un document
22 qui existe dans son intégralité en tant intercalaire, nous pouvons le
23 reprendre maintenant, si vous voulez. Mais c'est à vous de m'indiquer la
24 cote de ce document ou le numéro d'intercalaire. Je ne peux pas me rappeler
25 tous les documents que nous avons examinés.
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1 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Robinson.
2 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, Monsieur Milosevic.
3 L'ACCUSÉ : [interprétation] J'appelle votre attention, sur le fait que les
4 documents relatifs à Racak et qui ont été présentés ici, au cours de
5 l'interrogatoire principal, du général Stevanovic, se trouvent dans les
6 classeurs, 7, 8 et 9. Il s'agit de trois classeurs et d'un nombre très
7 important de documents. Si M. Nice veut interroger le témoin au sujet d'un
8 document particulier, il conviendrait qu'il indique exactement de quels
9 documents il parle au témoin. On ne peut tout de même pas s'attendre à ce
10 que le témoin se souvienne de tous ces documents par cœur. En tout cas, il
11 les a à côté de lui, sur le chariot, on peut lui indiquer un document, en
12 particulier. Pour le moment, la façon d'interroger n'est pas équitable à
13 l'égard du témoin.
14 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Nice, si vous pensez à un
15 document particulier, dans les différents intercalaires, pouvez-vous
16 l'indiquer au témoin ?
17 M. NICE : [interprétation] Si je l'ai choisi, Monsieur le Président, mais
18 ce n'est pas mon choix.
19 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais pourquoi M. Nice définirait-il
20 tel ou tel document au témoin, alors que le témoin affirme avoir
21 connaissance du document en question ?
22 M. NICE : [aucune interprétation]
23 Q. Je n'ai plus d'autres questions précisément liées à Racak. En tout cas,
24 je pense, mais j'aimerais vous poser une autre question qui finalement
25 pourrait être associée à ces questions, au sujet de Racak. C'est la
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1 suivante, en tant que policier de haut rang, si des documents qui ont paru,
2 démontraient que l'un de vos postes de police, que les hommes qui
3 travaillaient dans l'un de vos postes de police se serait comporté d'une
4 façon illicite, quelles sont les actions que vous auriez entreprises ?
5 R. Si j'apprenais qu'un policier et notamment, une Unité de la Police
6 toute entière s'était comportée d'une façon contraire à la loi, selon les
7 réglementations en vigueur, le dirigeant de ce poste de police serait
8 informé du fait qu'un rapport était en cours d'établissement et il serait
9 informer de la nécessité d'agir comme il se doit. Si la plainte était plus
10 grave que cela, alors, le rapport suiverait, au niveau hiérarchique, vers
11 le haut et des mesures seraient prises après vérification et discussions
12 avec la personne concernée au sujet de ce rapport --
13 Q. Très bien.
14 R. -- et cetera.
15 M. NICE : [interprétation] Je ne sais pas si --
16 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] L'heure de la pause est arrivée, 20
17 minutes de suspension.
18 --- L'audience est suspendue à 10 heures 31.
19 --- L'audience est reprise à 10 heures 54.
20 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Veuillez continuer, Monsieur Nice.
21 M. NICE : [interprétation] Avant d'en revenir là où nous nous trouvions, je
22 voudrais que l'on ne passe pas sous silence un élément, à savoir, je tiens
23 à dire que nous avons identifié ce matin un article de journal - on est
24 aujourd'hui le 6 juin, n'est-ce pas ? - alors, il est question d'un procès
25 intenté à l'encontre d'un membre des Skorpions, le dénommé Cvjetan,
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1 continuation de ce procès. Cela ne modifie pas ma position à l'égard de ce
2 témoin, mais il est exact de dire que la question est soulevée dans les
3 journaux d'aujourd'hui.
4 Q. Je me propose de revenir, à présent, là où nous nous trouvions tout à
5 l'heure. Je vous prie de vous pencher sur ce document, ce n'est pas encore
6 une pièce à conviction.
7 M. NICE : [interprétation] J'aimerais qu'on la place sur le
8 rétroprojecteur. Nous avons la version anglaise, un exemplaire pour
9 l'accusé, et un exemplaire pour le rétroprojecteur, Monsieur Nort. Merci.
10 Q. Alors, si nous nous penchons à présent sur l'avant-dernière des pages,
11 vous y retrouverez la numérotation 31 tout à fait en bas à droite, et je
12 parle de l'avant-dernière des phrases. C'est cela, vous l'avez trouvé.
13 Il s'agit d'un document --
14 M. NICE : [interprétation] Monsieur l'Huissier, déplacez la feuille là où
15 il y a "Note". Voilà. "Ce rapport," dit-on, "des Albanais du Kosovo a été
16 envoyé au parlement, au gouvernement, au ministère de l'Intérieur, au
17 ministère de la Justice, au bureau du procureur, au président de la
18 République fédérale de Yougoslavie, et aux mêmes institutions de la
19 République de Serbie.
20 "Ce même rapport a été envoyé à l'assemblée générale des Nations Unies, au
21 conseil de Sécurité, et à la commission chargée des droits de l'homme."
22 Il s'agit d'un rapport préparé par le centre du Droit humanitaire.
23 Je voudrais que nous revenions à la page 1, Monsieur Nort. On voit
24 qu'il s'agit ici du rapport numéro 16. On parle des "Albanais du Kosovo."
25 La date est celle du mois de février 1995.
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1 Q. Est-ce que vous personnellement vous saviez que les organes du
2 gouvernement dont il est question avaient reçu ce document ?
3 R. Non. C'est la première fois que je vois un rapport avec cette page de
4 garde et je n'ai pas connaissance de cette communication à qui que ce soit.
5 Q. Vous n'avez pas de raisons de douter du fait que le centre du droit
6 humanitaire, qui a pour objet de publier ces infractions et de prendre des
7 actions, aurait envoyé ceci aux organes du gouvernement qui sont mentionnés
8 ici. Vous n'avez pas de raisons de douter de cela, n'est-ce pas ?
9 R. En principe, non. Mais je ne sais pas si cela a été effectivement fait
10 ou pas.
11 J'aimerais que l'on augmente le volume de la traduction. J'ai du mal à
12 entendre l'interprète.
13 M. NICE : [interprétation] Monsieur l'Huissier, est-ce qu'on peut prendre
14 la page 15; c'est le coin inférieur droit qui nous intéresse, et on passera
15 à la page 16.
16 Q. Ce rapport a été envoyé à tous les organes du gouvernement. Voyez le
17 bas de la page. On voit au point 3 : "Electrochoc au poste de police
18 d'Urosevac." On dit ceci : "FE, une personne de 18 ans, vit avec sa mère et
19 ses frères cadets. Le matin du 11 avril 1994, il a été réveillé par la
20 sonnette à la porte." Avant qu'il ne puisse s'habiller et descendre, la
21 police était déjà dans la maison. Ils avaient brisé la vitre de la porte
22 d'entrée et étaient pénétrés dans la maison. Ils parlaient serbe, mais
23 lorsque FE a dit qu'il ne comprenait pas, ils sont passés à la langue
24 albanaise. Ils ont demandé son passeport, qu'ils ont pris, ainsi que son
25 permis de conduire. Ils ont dit qu'ils savaient qu'il dissimulait des armes
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1 et qu'ils allaient fouiller la maison. Ils ont regardé sous le lit de FE,
2 rien de plus, puis l'ont emmené au poste de police.
3 "Ils m'ont forcé à enlever mes souliers et à m'asseoir par terre. Deux
4 d'entre eux se sont assis sur mes jambes et m'ont demandé si j'avais des
5 armes. J'ai répondu que non. Ces deux hommes, ils ont donné dix coups de
6 matraque sur la semelle de mes pieds et ils m'ont posé la même question.
7 Ils m'ont de nouveau donner dix coups chacun, et c'est alors qu'ils ont dit
8 qu'ils allaient tuer ma mère si je ne leur donnais pas d'information. J'ai
9 eu, en tout, 30 coups de matraque sur chaque plante de pied. Ils m'ont fait
10 me redresser, m'ont adossé au mur. Ils m'ont donné des coups à la tête et
11 aux oreilles et ils m'ont donné des coups de matraque jusqu'au moment où
12 j'ai commencé à saigner par la bouche. Puis, je suis tombé, et ils m'ont
13 relevé et m'ont reposé la même question. J'ai dit, Vous pouvez faire tout
14 ce que vous voulez, mais je n'ai pas d'armes. Ils m'ont donné l'ordre
15 d'enlever mon pantalon. J'ai pris un certain temps, à cause de la douleur
16 que je ressentais. Ils m'ont enlevé mon pantalon. Ils m'ont ligoté les
17 mains dans le dos avec ma ceinture. Ils m'ont forcé à m'allonger par terre.
18 J'ai vu quelque chose qui ressemblait à un téléphone. Lorsque j'ai essayé
19 de me relever, ils m'ont poussé encore plus fort. L'un d'entre eux m'a tenu
20 la tête alors que l'autre s'est assis sur mes jambes. Ils ont placé des
21 fils de l'appareil qui ressemblait à un téléphone dans mes oreilles et dans
22 mon organe génital. La douleur était terrible. C'était à ce point terrible
23 que je les ai soulevés alors que j'étais par terre. Lorsque j'ai commencé à
24 crier, ils m'ont dit : 'Arrête, cela dérange.' Ils ont branché le courant
25 électrique trois fois. Entre-temps, ils ont fumé des cigarettes. Ils m'en
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1 ont offert une. Pendant que le courant était branché, ils m'ont forcé à
2 dire : 'Bonjour,' 'Je viendrai demain,' ce genre de bêtises. Finalement,
3 ils m'ont dit de réfléchir soigneusement à tout cela et de revenir deux
4 jours plus tard avec les armes. Jamais ils n'ont dit de quelles armes il se
5 serait agit." J'ai dû me tenir aux clôtures pour rentrer chez moi."
6 C'est là quand même une accusation terrible portée contre le poste de
7 police, n'est-ce pas ?
8 R. Bien sûr. Si ceci serait exact ou en partie exact, ce serait une
9 accusation terrible à l'encontre de ce poste de police.
10 Q. Vu ce que vous nous avez dit avant la pause, de telles informations
11 exigent que les forces de police, dont vous, meniez une enquête.
12 R. Une information de cette nature requiert, bien entendu, une enquête
13 urgente de la part des dirigeants compétents du ministère de l'Intérieur.
14 Mais ce que je dois vous dire, c'est que je ne me souviens vraiment pas
15 d'un événement de la sorte. Cela ne veut pas dire qu'il n'aurait pas fait
16 l'objet d'une enquête et de mesures adéquates, mais je n'ai pas
17 d'information à ce sujet. Je ne sais pas si la police est intervenue à un
18 sujet de cette nature.
19 Q. Vous êtes de nouveau en avance sur moi. Je voulais que vous nous
20 indiquiez l'endroit où nous pourrions voir que votre police a mené une
21 enquête suite à cette allégation, car la police pourrait et devrait dire
22 quel est le policier concerné. Pourriez-vous m'indiquer un endroit où je
23 trouverais une trace d'une telle enquête ?
24 R. Bien entendu, l'adresse portant sur les vérifications relatives à ce
25 qui a été fait, et si information a été communiquée au ministère de
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1 l'Intérieur, l'adresse à laquelle il faut s'adresser, c'est le ministère de
2 l'Intérieur de la République de Serbie. Je ne pense pas qu'il ait pu se
3 produire que quiconque au sein du ministère de l'Intérieur obtienne des
4 informations de cette nature sans entreprendre des mesures urgentes pour
5 vérifier les dires contenus dans ces informations.
6 Q. En vérité, en 1995, le Kosovo était devenu un Etat policier violent, et
7 ce genre d'information serait négligé parce que c'était monnaie courante.
8 Ai-je tort ou ai-je raison ?
9 R. Non. Je tiens à vous rappeler une chose, et vous expliquer pourquoi je
10 n'ai pas disposé d'une information de cette nature, si tant est qu'elle est
11 arrivée au ministère. Je vous rappelle qu'en 1995 et 1996, j'ai séjourné en
12 Slavonie orientale, c'était la mission que je devais accomplir à l'époque.
13 Bien entendu, je n'ai pas prêté attention à la date de l'information, et
14 notamment à la date d'arrivée au ministère, mais il ne pourrait pas se
15 produire qu'une information parvienne au ministère à l'époque où je me
16 trouvais à Belgrade. Il se peut qu'une information de cette nature soit
17 arrivée à un moment où je n'étais pas présent à Belgrade. Indépendamment de
18 la date de son arrivée, je suis certain que des mesures ont forcément dû
19 être prises pour déterminer la véracité de ces allégations ou déterminer si
20 cela est inexact.
21 Q. Si vous parvenez à nous trouver ces documents, je voudrais les avoir.
22 Je veux dire autre chose : le 22 mai 2002, il y a trois ans de cela, page 5
23 554 à 5 557 du dossier de l'espèce, un témoin nous a fait le récit suivant.
24 Il n'a pas lui-même été battu, mais il a assisté à des passages à tabac
25 faits par deux policiers qu'il a nommés, un certain Jasovic et un autre qui
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1 s'appelait Sparavalo. Est-ce que vous connaissez ces policiers ?
2 R. J'ai fait la connaissance de M. Jasovic à La Haye lorsque nous
3 attendions de témoigner. Je ne connaissais pas, avant cela, ni l'un ni
4 l'autre de ces noms.
5 Q. Ce que ce témoin a dit, bien avant le début de la présentation des
6 moyens à décharge, bien avant les questions que vous avez soulevées, c'est
7 qu'il avait vu Muhamed Bega, un homme de 50 ans de Ferizaj, attaché à une
8 chaise, menotté, et frappé par ces deux policiers. Vous n'êtes au courant
9 de rien qui pourrait contredire ce que ce témoin nous a dit ?
10 R. Tout d'abord, je ne suis pas au courant de ce témoignage. Je ne sais
11 pas si ce témoin a dit la vérité ou pas. Pour pouvoir dire quoi que ce soit
12 au sujet d'un événement, au sujet d'une information, il faudrait que je
13 prenne connaissance de sa teneur pour voir si je suis au courant ou pas. Je
14 tiens à répéter une chose : il importerait, dans l'un et l'autre cas, si
15 tant est que ces cas sont survenus, ce sont des cas graves. Mais il est
16 certain, à condition que cela se soit produit effectivement, il est certain
17 que cela fait l'objet de comportement illicite de la part de particuliers,
18 d'individus, de policiers particuliers, et cela existe dans tous les pays.
19 Maintenant, la question qui se pose de savoir, c'est dans quelle mesure,
20 dans quelle envergure de tels comportements surviennent. Il est certain
21 qu'on ne peut pas généraliser et déduire de cela que la police au Kosovo a
22 été violente et qu'au Kosovo, il y avait règne d'un Etat policier, comme
23 vous l'avez dit. Mais des comportements de cette nature sont, de toute
24 manière, condamnables; la chose n'est pas contestée, si tant est que de
25 tels comportements se sont effectivement produits dans la réalité.
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1 Q. Très bien.
2 M. NICE : [interprétation] Je crois que j'ai terminé le volet du Kosovo,
3 Messieurs les Juges. Permettez-moi de faire les remarques suivantes afin de
4 vous aider -- non, encore une question peut-être au témoin avant d'y venir.
5 Q. En ce qui concerne Racak, Monsieur Stevanovic, vous avez présenté des
6 documents qui montrent, c'est d'ailleurs là quelque chose qui a été dit
7 ici, ils montrent la présence de l'UCK à Racak. L'UCK s'est servi d'armes
8 dans la matinée du 15.
9 R. Oui. C'est ce que montrent les documents que j'ai lus et les
10 informations mises à ma disposition au sujet des événements de Racak. Il y
11 a toute une série d'informations opérationnelles et de notes officielles
12 parlant des activités des terroristes à Racak.
13 Q. Merci.
14 R. Parlant également de la mise en péril qui était réelle s'agissant de la
15 voie de communication à Stimlje et Prizren, et Stimlje-Urosevac.
16 Q. Je vous remercie. J'essaie d'obtenir de vous des réponses courtes. Les
17 documents que vous avez produits, parmi eux, il n'y a aucun récit d'un
18 témoin oculaire qui aurait été là quand cela s'est passé. Pour les Serbes,
19 au mieux, ce sont des déductions qui sont tirées. Est-ce que ce n'est pas
20 là la réalité des faits ?
21 R. Dans ces intercalaires, il y a un rapport au sujet des événements de
22 Racak, un rapport rédigé par un groupe de travail. On peut y voir quel a
23 été l'ordre des activités déployées et ce que chacune des unités là-bas a
24 fait, et quelles en ont été les conséquences. Pour ce qui est des autres
25 documents, on peut avoir bon nombre d'autres détails. Mais il est certain
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1 que tous ces détails figurant dans les documents se fondent sur les
2 connaissances d'avant les événements, pendant, et après les événements,
3 date à laquelle il y a eu enquêtes et autres activités suivies de tous les
4 problèmes dont on a déjà parlé auparavant.
5 Q. Une dernière chose, même si vous allez peut-être dire que vous êtes
6 dans l'incapacité de répondre, je vous présente cette thèse pour que ma
7 position soit claire : diverses autorités serbes ont préparé des documents,
8 mais dans ces documents, on évite d'aborder des détails afin de rendre plus
9 opaque la vérité. Ils n'évoquent jamais, par conséquent, la question de la
10 récupération d'armes ou l'emplacement de cadavres. Qu'en dites-vous ?
11 R. Si, par cette question, vous parlez de Racak même, il est clair
12 pourquoi ces petits détails sont omis. Ils sont omis parce que la
13 documentation relative à l'événement entier a été réalisée après un
14 changement de la situation sur les lieux.
15 Je vais vous l'expliquer. Si vous vous penchez sur d'autres dossiers qui
16 figurent dans les intercalaires, vous verrez les moindres détails, les
17 détails les plus importants de documentés, lorsqu'il y a eu constat
18 d'effectuer immédiatement après l'événement. Vous avez les événements de
19 Suva Reka et autres localités, je n'arrive à m'en souvenir à présent.
20 Q. Très bien.
21 M. NICE : [interprétation] Messieurs les Juges, permettez-moi de vous
22 expliquer ce que nous avons fait. J'ai puisé dans toutes les sources
23 possibles pour trouver des récits faits par le côté serbe à propos de Racak
24 de façon chronologique. Si je veux le faire par le truchement de témoins,
25 cela prendra beaucoup de temps. La plupart des documents émanent de sources
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1 autres que celles proposées dans les documents de ce témoin, mais il y a
2 certaines sources qui se trouvent dans les quelques 140 documents qu'il a
3 présentés. Je le mentionne parce que, manifestement, nous allons demander
4 que tous les documents qu'il veut présenter soient déclarés irrecevables,
5 mais à un moment donné suivant la tradition, il serait utile de vous
6 présenter ces documents suivant la chronologie des événements. Je ne vais
7 pas le faire maintenant pour ne pas perdre trop de temps. Nous pourrons
8 peut-être revenir à ces documents par le truchement d'un autre témoin.
9 Q. Est-ce que nous pouvons maintenant parler d'Izbica ? Dans votre
10 déposition, vous avez parlé d'Izbica. Bien sûr, une fois de plus, vous ne
11 vous vous êtes jamais trouvé sur les lieux; c'est cela ?
12 R. Non, je ne suis jamais allé là-bas.
13 Q. Prenons, si vous le voulez bien, l'intercalaire 69 qui se trouve dans
14 le deuxième classeur.
15 Avez-vous assisté à cette réunion ?
16 R. Oui.
17 Q. Pour le moment, je ne parviens pas à trouver ma référence, la référence
18 qui concerne Izbica.
19 R. Je ne pense pas qu'on mentionne Izbica dans ce PV. Il s'agit du 17
20 février. Cela se peut quand même. Est-ce que vous parlez bien de
21 l'intercalaire 69 ?
22 Q. Oui.
23 R. [aucune interprétation]
24 Q. Je vais y revenir. Il se peut que je me sois trompé.
25 Lorsque le mois de mars 1999 arrive, à ce moment-là, est-ce que le MUP et
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1 la VJ opéraient dans la région de Drenica ?
2 R. Jusqu'au mois de mars 1999, dites-vous ?
3 Q. Oui. Vers le mois de mars 1999.
4 R. En 1998 et en 1999, la police et l'armée sont intervenues dans le
5 Kosovo tout entier, à Drenica très certainement.
6 Q. Très bien. Est-ce que ces forces opéraient de concert ?
7 R. Chacun faisait son travail. Pour ce qui est de la réalisation des
8 activités antiterroristes planifiées, oui là, ils intervenaient ensemble.
9 Q. Ce que vous dites à propos d'Izbica, est-ce que cela conteste le fait
10 que les gens rassemblés à Izbica étaient séparés, qu'on mettait les femmes
11 d'un côté et les hommes de l'autre ?
12 R. S'agissant de la séparation des personnes rassemblées en groupe homme
13 et groupe femme, je l'ai appris dans l'acte d'accusation, suite aux parties
14 de l'acte d'accusation dont vous avez donné lecture et des questions que
15 vous avez posées.
16 Q. Si des témoins étaient venus dire aux Juges que c'est bien ce qui s'est
17 passé et qu'il y avait eu massacre, avez-vous la moindre raison de douter
18 de l'exactitude de ce qu'ont dit ces témoins ?
19 R. J'ai des raisons d'en douter parce que -- et cela si mes souvenirs sont
20 bons, je le dis qu'il est question de quelques milliers de civils. On dit
21 que les hommes ont été séparés des femmes, des enfants et des vieillards et
22 qu'ils ont été exécutés. Partant d'une formulation de cette nature ou
23 partant d'un contexte ainsi énoncé, il semblerait que dans un groupe de 4
24 000, 5 000 civils, il n'y avait qu'une centaine d'hommes. Cela me semble
25 tout à fait illogique. C'est cet illogisme qui m'est resté à l'esprit. Tout
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1 ce que la police a su au sujet d'Izbica, elle l'a su à partir du moment où,
2 sur l'Internet ou sur une chaîne de télévision quelconque, on a présenté
3 une vue prise par satellite. La police n'a pas connaissance de ce qui s'est
4 produit avant cela dans ce secteur.
5 Q. Vous voyez ce que ces témoins nous ont dit comprenait notamment des
6 éléments apportés sous forme de photographies. Nous en avons une ici. Cela
7 vient de la pièce 162, intercalaire 4. Nous avons ici la photo d'un homme
8 avec des béquilles ou une béquille. C'est un simple exemple que je voudrais
9 vous montrer ici.
10 Lorsque vous avez été interrogé en tant que suspect, vous n'avez pas laissé
11 entendre -- j'ai une autre photo ici que vous pouvez voir, même pièce.
12 Vous n'avez pas laissé entendre que ces victimes c'étaient des
13 combattants actifs de l'UCK. Vous maintenez ce que vous avez dit alors ?
14 R. J'ai parlé de victimes retrouvées dans un cimetière récent à Izbica,
15 partant des vues de la dernière prise. Il me semble me rappeler une chose,
16 à savoir je n'ai pas dit d'où venaient les personnes qu'on a enterrées et
17 je n'ai pas parlé de causes de décès. C'était censé faire l'objet d'une
18 enquête.
19 Q. Mais si enquête il y a eue et si ce fut une enquête consciencieuse,
20 elle n'a jamais révélé, n'est-ce pas, que des personnes telles que celles
21 qu'on voit ici sur cette photo c'étaient des membres de l'UCK qui auraient
22 été des combattants actifs, parce que c'est comme cela qu'on les trouvés.
23 Regardez.
24 R. Si mes souvenirs sont bons, à l'occasion de ce témoignage, dans les
25 documents existants dans la documentation, nous avons pu constater qu'il y
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1 avait au moins quatre éléments de preuve de grande valeur. Disons qu'au
2 moins quatre de ces personnes devaient faire partie de l'UCK. S'agissant
3 des autres personnes, à l'époque pas plus que maintenant, cela n'a été ni
4 confirmé, ni démenti. Pour ce qui est de la photographie que je vois, je ne
5 peux pas dire si cette photographie à quoi que ce soit à voir avec les
6 personnes qui ont péri et qu'on a retrouvé dans le cimetière, qui ont été
7 exhumées par la suite, et où la procédure a été réalisée conformément à ce
8 que le dossier qui se trouve ici nous dit.
9 Q. Ecoutez, n'hésitez pas, si vous voulez maintenant dire quelque chose de
10 différent de ce vous avez dit au moment de l'interrogatoire. Si vous voulez
11 dire qu'ils étaient tous des combattants de l'UCK, faites-le, dites-le.
12 Est-ce que c'est cela que vous voulez dire en tant que témoin ?
13 R. Bien sûr que non. Je ne peux pas dire quoi que ce soit quand je ne sais
14 pas, quand je ne suis pas sûr, quand je n'ai pas d'informations. Je ne puis
15 vous parler que de ce que je sais. Je ne veux pas modifier mon témoignage.
16 Bien sûr que non.
17 Q. Très bien.
18 M. NICE : [interprétation] Monsieur l'Huissier, veuillez me rendre la
19 photographie.
20 Q. Vous vous êtes attardé sur le fait qu'il s'agissait de tombes
21 individuelles et pas d'une fosse commune. C'est ce qui m'a semblé que vous
22 avez dit, mais elles ont toutes été creusées ces tombes en même temps. Vu
23 ce que vous avez dit, vu les photos que nous avons montrées qui
24 ressemblaient à celles de l'Accusation, c'était manifeste, toutes ces
25 tombes ont été creusées en même temps, au même moment. C'est bien cela,
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1 n'est-ce pas ?
2 R. S'agissant de ces tombes individuelles, elles ont été creusées en
3 même temps, enfin en l'espace d'un ou deux jours, je ne sais pas trop.
4 Chaque personne enterrée était enterrée dans une tombe individuelle et
5 toutes les tombes individuelles se trouvaient à un site. Je n'ai pas pensé
6 que cela devait être considéré comme étant un charnier, mais comme un
7 cimetière. C'est la façon dont je comprends la chose.
8 Q. Est-ce que quelque part vous critiquez les villageois, ceux qui ont
9 perdu les leurs, qui ont donné à chaque corps sa tombe ? Est-ce que vous
10 auriez préféré qu'ils soient tous mis dans un charnier, dans une fausse
11 commune ?
12 R. Cela n'a absolument rien à voir avoir avec l'idée que vous avancez. Je
13 parle de faits constatés sur les lieux, loin de moi la préférence d'avoir
14 affaire à un charnier. J'aurais préféré qu'au Kosovo qu'il n'y ait pas eu
15 de victimes du tout, j'aurais préféré qu'il n'y ait pas eu de guerre, qu'il
16 n'y ait pas eu de terrorisme. Vous essayez, et je regrette d'avoir à le
17 dire, mais vous essayez de me placer dans un contexte selon lequel je
18 serais l'auteur idéologique de ce qui s'est passé au Kosovo. Il ne m'est
19 jamais venu à l'esprit de penser quoi que ce soit de mal
20 Q. Monsieur Stevanovic, nous vous écoutons quand vous parlez de tombes
21 individuelles, nous asseyons de vous comprendre, mais si vous dites
22 comprendre et vouloir la dignité à donner aux morts, dites-nous ceci,
23 lorsque vos autorités ont exhumé ces corps, ils se sont servi de quoi pour
24 le faire, de quel outils, de quel engin ?
25 R. Je ne sais vraiment pas, je ne sais vraiment pas quel --
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1 Q. Ils se sont servis d'un bulldozer, d'une excavatrice ?
2 R. Je ne pense pas qu'on ait utilisé une excavatrice, on a des
3 photographies des tombes et des cadavres. Mais je ne sais vraiment pas si
4 une excavatrice a été utilisée, ce ne serait vraiment une façon digne de ce
5 nom d'enterrer quelqu'un en utilisant une excavatrice.
6 Q. Revenons à l'intercalaire 69, c'était le bon, ma collègue avait raison,
7 c'est moi qui n'avais pas trouvé le bon passage. Revenons donc à cet
8 intercalaire 69, s'il vous plaît.
9 A la page 2 en anglais, le paragraphe commence par ces termes-ci, en
10 anglais du moins, par le terme "Monténégro." Je crois que c'est le bas de
11 la première page ou de la deuxième page dans votre version, je ne suis pas
12 sûr.
13 Mais est-ce que vous trouvez ce passage vers les trois quarts de la
14 page, où il est dit ceci : "A cette réunion du MUP, l'état-major prévoit
15 d'effectuer trois opérations de nettoyage dans ces trois régions; Podujevo,
16 Dragobilje et Drenica" ? C'est tout à la fin de la page un, vous trouvez ?
17 R. Non.
18 Q. Parce qu'on dit que : "Quelque 4 000 policiers, environ 70 policiers du
19 groupe opérationnel et environ 900 policiers de réserve. Vous voyez cet
20 endroit ? C'est le bas de la page 1 ?
21 R. Je n'arrive toujours pas -- Le bas de la page 1 dit : "Le principe
22 fondamental de l'accord et interruption et cessation des activités de
23 combat." On parle de l'OSCE. Nous avons peut-être des documents différents.
24 Q. Regardez, je vous donne la page, bas de la page. On parle "Du plan
25 qu'avait l'état-major d'effectuer trois opérations de nettoyage."
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1 R. Oui, excusez-moi je m'étais trompé d'intercalaire.
2 Q. Avant de parler de ces événements--
3 R. Oui, maintenant je le vois.
4 Q. Merci bien. Avant de commencer à parler de ces événements survenus en
5 mars, nous voyons que le MUP avait planifié des opérations de nettoyage
6 notamment dans la zone d'Izbica. Qu'est-ce que vous entendez par
7 "nettoyage", qu'est-ce que cela voulait dire pour vous lorsque vous vous
8 trouviez à cette réunion du 17 février ?
9 R. A plusieurs reprises, je vous ai déjà expliqué cette notion de
10 "nettoyage" qui sous-entend de nettoyer le territoire de ces terroristes.
11 Il y a deux autres significations, déblaiement des voies de communication
12 et nettoyage du territoire dans le sens d'un assainissement du territoire.
13 Ici, s'agissant de l'opération, il s'agit d'opérations antiterroristes qui
14 ont été planifiées à ce moment-là dans certaines régions. Là, la chose ne
15 devrait pas être contestée. On parle de Podujevo, Dragobilje et Drenica,
16 trois secteurs dans le Kosovo qui étaient notoirement connus de par la
17 présence et de par les activités déployées par les terroristes.
18 Q. Je suppose dès lors que les forces de l'ordre régulier en février 1999,
19 si elles parlaient de "nettoyage", voulaient parler de l'arrestation là où
20 c'était possible, elles n'auraient recours à la violence pour tuer des gens
21 que si c'était absolument indispensable. C'est bien cela ?
22 R. Dans un certain sens ce que vous venez de dire se trouve être exact. Je
23 vous ai dit quel été l'objectif et les conséquences ont été des
24 conséquences qu'on n'avait pas souhaitées.
25 Q. Je vous remercie. Prenons maintenant votre journal personnel, à la page
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1 98 en anglais. Nous allons placer cette page sur le rétroprojecteur. Je
2 vais essayer de la retrouver à votre attention.
3 M. NICE : [interprétation] Je ne sais pas si c'est possible, Monsieur
4 l'Huissier, est-ce que vous pourriez placer la version en B/C/S sur le
5 rétroprojecteur avec la version en anglais. Je ne sais pas si cela va être
6 possible vu les dimensions.
7 LE TÉMOIN : [interprétation] Est-ce que vous pouvez me dire une fois de
8 plus de quel intercalaire il s'agit ?
9 M. LE JUGE KWON : [interprétation] 440.
10 M. NICE : [interprétation] Merci, Monsieur le Juge.
11 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Classeur 17.
12 LE TÉMOIN : [interprétation] Je n'ai pas cela. Dans mon jeu
13 d'intercalaires, je n'ai pas ce classeur là.
14 M. NICE : [interprétation]
15 Q. Nous allons vous remettre la page concernée pour gagner du temps.
16 L'INTERPRÈTE : M. Nice est hors micro.
17 M. NICE : [interprétation]
18 Q. Que voyons-nous ici dans cette mention qui concerne le 21 mai, d'après
19 la page précédente en anglais ? C'est une rubrique qui dit ceci :
20 "Nettoyage de terrain, Izbica." Cela portait sur quoi ? Qu'est-ce que cela
21 couvrait ?
22 R. Laissez-moi le temps de retrouver. Excusez-moi. Vous avez parlé de la
23 page 79, n'est-ce pas ?
24 Q. Point 2, point 2 --
25 R. Oui, oui, oui.
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1 Q. "La légalité, nettoyage du terrain, Izbica. Infractions pénales.
2 Isolement. Restitution d'armes."
3 R. Oui. Au point 2, on ne parle pas de nettoyage de terrain, mais on parle
4 "d'assainissement du terrain," cela, c'est d'un. Mais je tiens à vous
5 rappeler autre chose : j'ai déjà indiqué que, s'agissant d'Izbica, nous
6 avons été mis au courant via une vue prise par satellite. Je vous rappelle
7 que pendant plusieurs jours, nous avons recherché une localité répondant au
8 nom d'Izbica. Je ne peux pas vous confirmer qu'à ce moment-là, nous
9 l'avions déjà retrouvée, mais il semblerait que cela a effectivement été le
10 cas.
11 "Assainissement," on sait que cela sous-entend. S'agissant de Pusto Selo,
12 il y avait une note à ce sujet. Dans ce cas-là, on entend tout ce qui est
13 réalisé en application du code pour la procédure pénale, exhumation,
14 vérification de l'exactitude des informations, et ici, les informations
15 d'évidence étaient vérifiées, puis tout le reste, exhumations suite à une
16 instruction de la part du Juge d'instruction, constat sur les lieux,
17 autopsies, et tout le reste qui a été fait et qui fait l'objet du dossier
18 que je vous ai apporté ici.
19 Q. Je vous demande de faire une pause.
20 R. Il s'agit de personnes qui ont péri.
21 Q. S'il fallait mener une enquête à Izbica, c'est parce que des choses
22 avaient été rendues publiques et des instances internationales avaient
23 présenté des photographies aériennes, ce qui veut dire que vous n'aviez pas
24 le choix; c'est exact, n'est-ce pas ?
25 R. Ce n'est absolument pas vrai. Il n'y a que deux cas d'information qui
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1 étaient présents. Il n'y avait qu'Izbica et Pusto Selo. Tous les autres,
2 les 1 500 autres cas, nous ont été communiqués d'une façon tout à fait
3 autre.
4 Q. Je voudrais vous poser une autre question. Je suppose que vous nous
5 demandez d'accepter l'idée, indépendamment du nombre de policiers qu'il y
6 avait au Kosovo, peut-être 1 500, c'est que quand il y avait des gens qui
7 mourraient, il fallait l'aide de la communauté internationale pour vous
8 dire qu'il y avait des crimes qui avaient été commis, et qu'il fallait des
9 journées entières pour trouver le village concerné. C'est bien ce que vous
10 nous dites, Monsieur Stevanovic ?
11 R. Je tiens à dire tout d'abord qu'il n'y a eu jamais 150 000, mais qu'il
12 y a eu 15 000 policiers au maximum. Bien sûr, qu'il ne s'agissait pas
13 d'attendre une information de la part des organisations internationales. On
14 nous a --
15 Q. [aucune interprétation]
16 R. -- en termes simples, il nous fallait d'abord avoir une information
17 quelconque.
18 Q. Le territoire du Kosovo est petit. Il vous faut autant de temps, autant
19 de journées pour trouver ce village, pour le repérer ? Ce n'est pas
20 possible, n'est-ce pas ?
21 R. Je vous affirme que c'est exact. Cela peut sembler illogique en effet.
22 Mais, tout simplement, il nous a été difficile de le retrouver. On voit des
23 vues où les journalistes ont cherché avec nous en parallèle, et on a fini
24 par retrouver cette localité au bout d'au moins sept jours, d'après moi. Je
25 n'arrive pas à me le remémorer exactement.
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1 Q. Fort bien, c'est ce que vous dites.
2 R. C'est ce qui est exact.
3 Q. J'aurais dû vous demander quelque chose : on voit ici, dans votre
4 journal, "infractions pénales, crimes." Vous parliez de quoi, si on parle
5 uniquement de l'assainissement du terrain, si c'est seulement cela qui
6 était en cause ?
7 R. Monsieur le Procureur, si vous vous penchez avec plus de précision,
8 vous verrez, au point 2, "La légalité". L'assainissement est l'une des
9 opérations qui permet d'assurer la légalité de ce qu'on fait. "Les délits,
10 les infractions au pénal," doivent faire l'objet d'identification, et il y
11 a une légalité de prévue conformément à ce qu'il est prévu de faire quand
12 crimes il y a eu, d'une manière tout à fait générale.
13 Q. Désolé, je ne comprends pas. A ce moment-là, à votre avis, quelles
14 étaient les infractions pénales qui auraient été commises ? Ou est-ce que,
15 plutôt, c'est que vous saviez qu'il y en avait des infractions qui avaient
16 été commises ?
17 R. Il n'est pas contesté le fait qu'à l'époque, il y avait bon nombre de
18 crimes de commis. Je vous ai montré des tableaux au sujet des délits au
19 pénal de commis. Il y a des listes entières. Maintenant, quand on insiste
20 sur la légalité, il convient de dire que les crimes au pénal ont la
21 priorité du point de vue d'élucider l'acte en tant que tel, de retrouver
22 les auteurs. Enfin, tout ce qui est en corrélation avec ce type
23 d'infractions au pénal, il s'agit de faire en sorte que la légalité soit
24 respectée dans la façon de procéder.
25 Peut-être, seriez-vous d'avis -- enfin, je ne peux pas adopter votre
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1 façon de réfléchir, parce que toute thèse, si vous êtes unilatéral ou
2 malintentionné, pourrait être interprétée de façon différente.
3 Q. Je veux vous donner l'occasion d'interpréter un terme qui va peut-être,
4 en temps utile, intéresser les Juges. Si vous n'avez rien à dire à propos
5 des crimes, revenons à cette page 100 que nous examinions auparavant. Nous
6 vous en donnons un exemplaire pour accélérer les choses. Nous avons parlé
7 du contexte en haut de la page où on disait : "Éliminer toute trace de
8 violence à l'encontre des biens." Vous aviez remplacé le terme "civils,"
9 par "biens." Mais au-dessus de cela, nous avons une autre mention qui dit
10 ceci : "Nettoyer le terrain."
11 R. [aucune interprétation]
12 Q. "Nettoyer le terrain --"
13 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, Monsieur Milosevic.
14 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je vous demanderais de prier
15 M. Nice de faire en sorte, quand il parle des pages, de le faire comme il a
16 fait les journées précédentes, en indiquant le numéro ERN, parce qu'il est
17 difficile de retrouver, dans ce journal, les pages telles qu'il en fournit
18 la numérotation.
19 M. NICE : [interprétation] R0172446.
20 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci.
21 M. NICE : [interprétation]
22 Q. Ici, vous voyez : "Nettoyage du terrain. Il nous faut savoir la vérité.
23 Il faut élucider chaque cas. Izbica - Buha."
24 Alors, parlez-nous de Buha. C'était un commandant de PJP ?
25 R. C'est exact. Il se trouvait être commandant d'un détachement de la PJP.
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1 Nous avons supposé qu'à ce moment-là, il devait disposer d'une unité sur ce
2 secteur, et on indique que c'est à lui --
3 Q. Pas trop vite. N'allez pas trop vite, s'il vous plaît. Une chose à la
4 fois. "Nous avons supposé qu'il avait une unité dans la zone." Pourquoi
5 faire une telle supposition ?
6 R. Tout simplement, parce que l'on savait à peu près dans quelle zone
7 étaient déployées les différentes unités. Je viens de vous indiquer que ces
8 unités, en fonction des missions qui leur étaient assignées, changeaient de
9 secteur d'intervention.
10 Q. Par conséquent, je prends un exemple. Vous avez une Unité de la PJP qui
11 aurait été l'auteur de ce terrible massacre, on pouvait penser que c'était
12 l'Unité de Buha; exact ?
13 R. En supposant qu'à l'époque il se trouvait réellement là-bas. Nous
14 sommes en train de parler du moment où l'on a découvert des tombes. On ne
15 parle pas du moment des événements. Je tiens à vous rappeler que le moment
16 des événements relatifs à l'acte d'accusation, c'est le mois de mars. Or,
17 on a retrouvé ces tombes au mois de mai. On suppose donc --
18 Q. [aucune interprétation]
19 R. -- qu'à ce moment-là, M. Buha --
20 Q. Arrêtez-vous, arrêtez-vous. Ne vous emportez pas.
21 R. Excusez-moi, excusez-moi, je n'avais pas l'intention de m'emporter.
22 Q. Vous dites : "Voilà, il faut élucider chaque cas." Je reprends ce que
23 vous dites dans votre journal. "Izbica Buha," est-il dit. Expliquez-nous
24 comment le fait de découvrir la fosse peut permettre d'élucider l'affaire
25 et de parvenir à la vérité.
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1 R. Bien, tout d'abord, il s'agit de trouver les tombes qu'on a vues sur la
2 vue aérienne. On ne saurait faire quoi que ce soit avant que de vérifier
3 l'exactitude de ce que montre cette vue aérienne; cela, c'est d'un. Suite à
4 cela, il y a toute une série d'activités liées à l'enquête et autres
5 activités qui permettent d'arriver à la vérité.
6 Vous trouverez dans le dossier tout ce qui a été fait une fois qu'on
7 a retrouvé le cimetière.
8 Q. Je vous demande une fois de plus de vous arrêter. L'unité qui vous
9 intéressait le plus pour essayer de faire se manifester la vérité et
10 d'élucider cette unité qui se trouvait en mars, donc au moment des faits,
11 sur les lieux, quelle était cette unité et pourquoi est-ce que vous n'avez
12 consigné son nom nulle part, s'il vous plaît ?
13 R. Je vous dis, une fois de plus, qu'à l'époque où nous parlions d'Izbica,
14 nous n'avions pas d'informations au sujet des événements que vous avez
15 décrits ultérieurement à l'acte d'accusation. Nous ne pouvions pas penser
16 au mois de mars. Nous pensions aux faits, et les faits disaient qu'il y
17 avait un endroit déterminé, un cimetière. Pour en venir au mois de mars, il
18 fallait que nous prenions connaissance de l'acte d'accusation. Mais, à ce
19 moment-là, nous n'avions pas --
20 Q. Je vous demande une fois de plus de vous arrêter, parce que, Monsieur
21 Stevanovic, je pense que vous essayez d'inventer les choses au fur et à
22 mesure pour essayer de vous conformer aux documents contemporains.
23 R. [inaudible] rien.
24 Q. Alors, dites-moi ceci : vous avez fini par découvrir 100 personnes
25 assassinées dans des circonstances que les photographies nous montrent.
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1 Vous comprenez que cela s'est passé fin mars. Vous devriez trouver l'Unité
2 de la PJP qui se trouvait dans la zone et vous devriez mener une enquête.
3 Est-ce que vous pourriez me montrer un document indiquant qu'il y a eu
4 enquête portant sur l'Unité de la PJP qui se trouvait à ce moment-là, au
5 moment des faits, dans la zone.
6 R. Une fois de plus, vous venez de parler de la fin mars. Une fois de
7 plus, j'indique que nous avons eu des informations seulement en fin mai.
8 Les documents vous montreront que des enquêtes ont été diligentées au début
9 juillet peut-être. Le 30 mai, je pars à Belgrade et, le 2 ou le 4 juin, je
10 suis à Kumanovo. Comme vous le savez, je reste, jusqu'au 20 juin, au
11 Kosovo. Je ne traite pas de tout cela. Je ne traite de rien de similaire.
12 Je parle de la KFOR et de la mise en œuvre de cet accord militaire
13 technique.
14 Q. Vous apportez tous ces documents. Un simple rappel : le communiqué de
15 presse de l'OTAN est du 17 avril, et on en a même discuté de façon très
16 négative à la télévision de Belgrade le 16 avril et le 15. Il était
17 possible de déterminer quel était le groupe à Izbica, jusqu'à la période
18 qui a précédé le mois d'avril. Est-ce que la police s'est jamais chargée de
19 faire une telle chose ? Si elle ne l'a pas fait, pourquoi ne l'a-t-elle pas
20 fait ?
21 R. Mais, je ne sais vraiment pas ce qu'il faudrait que je dise si vous ne
22 voulez pas me croire que nous ne savions pas où se trouvait Izbica avant le
23 20 mai. C'était la seule raison. Nous avons retrouvé Izbica en fin mai. La
24 première des patrouilles à se déplacer sur les lieux et à retrouver la
25 localité est une patrouille qui s'y trouvait vers le 25. Mais, en tout état
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1 de cause, après le 20 mai. Les interventions, les activités, ont été
2 effectuées jusqu'en début juin. C'était la date à laquelle il avait été
3 possible de le faire. Jusque-là, aucune information relative à des
4 événements qui se seraient produits au mois de mars, nous n'en n'avions
5 pas.
6 Q. Entre parenthèses, Buha, Bosko Buha, qui avait la responsabilité de la
7 PJP, est-ce que c'est celui qui a été assassiné en 2002 ?
8 R. Oui, c'est cet homme-là.
9 Q. Est-ce que cet assassinat a été élucidé par le MUP ou est-ce que c'est
10 un cas de plus où il n'y a pas eu d'élucidation ?
11 R. Je crois que c'est encore l'un de ceux qui n'ont pas été élucidés, mais
12 je sais qu'une enquête intensive est diligentée à Belgrade à ce sujet.
13 Q. Est-ce qu'il y a des rumeurs qui circulent expliquant pourquoi on a
14 éliminé Buha ? Je ne sais pas si vous êtes au courant. Cela se pourrait.
15 R. Je ne sais pas. Cela, je ne le sais vraiment pas. Je ne suis pas les
16 rumeurs. Je suis un professionnel. Je vous l'ai déjà indiqué. Les rumeurs
17 peuvent nous aider dans les enquêtes que nous diligentons, mais depuis
18 2001, je ne vaque pas aux enquêtes, je travaille à l'académie de police,
19 j'enseigne, et je mes suis consacré aux activités scientifiques.
20 Q. Après l'exhumation des corps, ce que les forces de Serbie ont fait,
21 qu'est-il advenu de ces corps ?
22 R. D'après ce que j'en sais et d'après la documentation dont je dispose,
23 il a été procédé à un examen physique à leur égard. Je crois qu'il y a
24 également eu autopsie, mais je ne peux pas l'affirmer, parce que là
25 maintenant, je suis en train de confondre les différents dossiers.
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1 Q. Pourquoi ?
2 R. Je n'ai pas compris ce que vous voulez dire là.
3 Q. Pourquoi a-t-on procédé à un examen superficiel des corps ? Les forces
4 serbes les avaient exhumés, et je reviens dans un instant pour confirmer ou
5 exclure l'utilisation d'une excavatrice pour évacuer tout doute, ces corps
6 ont été exhumés par les forces serbes. En l'espace d'un jour, ou à peu
7 près, on les a examinés de façon superficielle. Puis, qu'est-ce que vous
8 avez fait de ces corps ?
9 R. Depuis l'ordre donné par le Juge d'instruction de procéder aux
10 exhumations, tout le reste s'est produit en conformité avec l'ordonnance
11 rendue par le Juge d'instruction. Pour autant que je me souvienne, le
12 dossier a été cédé aux instances militaires chargées de l'enquête ou sont
13 ceux-là, peut-être, des membres de l'académie médicale militaire qui ont
14 été impliqués dans les autopsies.
15 Toutes les autres mesures sont réalisées conformément à l'ordonnance
16 du Juge d'instruction. La police, là, ne fait qu'assister ceux qui
17 exécutent les instructions du Juge d'instruction.
18 Q. Nous allons regarder une carte qui n'est pas encore devenue une pièce à
19 conviction, mais elle nous montre une partie du territoire, et quelques
20 lieux sont indiqués.
21 Vous admettez, n'est-ce pas, qu'au fil du temps, depuis le début de ce
22 procès, il y a de plus en plus de preuves sur la destination de ces corps,
23 surtout après ce qu'on a découvert à Batajnica et aux alentours ?
24 R. Vous parlez du lieu de destination des cadavres qui ont été retrouvés à
25 Izbica ?
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1 Q. Oui.
2 R. En effet, je disposais de ces informations disant que certaines
3 personnes qui ont péri là-bas ont été retrouvées dans la fosse commune à
4 Batajnica.
5 Q. Voyons le résumé de ce qui, d'après moi, s'est passé après que les
6 forces serbes ont exhumé ces corps. Ces corps ont été envoyés, notamment,
7 après Izbica, à Suvi-Do, nord de Mitrovica, Supkovac, Nevolane, et Brusnik,
8 mais certains sont envoyés aussi à Petrovo Selo au nord, ainsi qu'à
9 Kladovo. Pouvez-vous nous expliquer pourquoi ?
10 R. Je crois l'avoir expliqué avec toute la clarté possible. Je ne sais pas
11 comment vous expliquer pourquoi des corps exhumés ont été transférés à
12 Batajnica ou Petrovo Selo. Pour ce qui est du Petrovo Selo, je n'en sais
13 rien, je n'ai pas entendu parler.
14 Q. Je vais maintenant vous demander d'examiner une annexe que nous avons
15 préparée. C'est une liste ou un tableau qui s'appuie en partie sur des
16 pièces déjà versée et en partie sur de nouveaux documents qui feront objet
17 d'une requête à moins qu'il y ait peut-être intervention ou admission par
18 l'accusé ou par les personnes qui le représentent.
19 M. NICE : [interprétation] Remettons d'abord un exemplaire au témoin. Il
20 l'a, très bien.
21 Q. Prenez cette liste, je vous ai expliqué comment elle a été structurée.
22 Elle se trouve à votre droite, Monsieur Stevanovic. Prenez la cinquième
23 page, vous voyez la légende pour expliquer les sites PSII, FHH, FLP, puis
24 vous revenez à la première page, vous allez voir comment ce tableau a été
25 constitué. Il vous donne les noms des victimes à partir du témoin oculaire
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1 qui a filmé et d'autres témoins qui étaient présents au moment où on a
2 trouvé ces corps, à l'endroit où on trouvait ces corps. On dit, en anglais,
3 je ne sais pas si cela sera tout à fait clair pour vous sur le champ. On
4 parle des "victimes récupérés au Kosovo." Cela c'est une colonne, et vous
5 avez les "victimes récupérés en Serbie." Ce qui nous permet de voir qu'il y
6 a Asllan Amrushi, qui a été retrouvé ou récupéré en Serbie à PSII-17, cela
7 fait Petrovo Selo, alors qu'Asslan Bajra on l'a retrouvé au cimetière de
8 Suvi-Do au Kosovo. Est-ce que vous comprenez cette partie là du document ?
9 R. J'ai compris le principe, oui.
10 Q. Vous ou l'accusé, vous avez attiré notre attention sur la différence
11 qu'il y a entre la liste de noms qu'on trouve à gauche, et les noms qu'on
12 avait identifiés suite à l'exhumation par les forces serbes. Nous voyons,
13 par exemple, il y a le numéro 12, qui figure bien dans votre pièce, à
14 l'intercalaire 471. Si vous voyez, le bas de la page, le numéro 23, notre
15 page a le numéro 52, il y a correspondance. C'est aussi pour le numéro 54,
16 le numéro 67, le numéro 73 et il y a le numéro 86, le numéro 103, dernière
17 page, numéro 109, numéro 113, numéro 115. Autant de corps pour lesquels il
18 y a correspondance entre les éléments que vous avez par exhumation, et
19 concordance, disais-je, avec ce que certains témoins ont dit. Vous
20 comprenez ?
21 R. Je comprends.
22 Q. Merci. Revenons au numéro 17.
23 L'INTERPRÈTE : Les interprètes précisent qu'ils ne disposent pas de ce
24 texte.
25 M. NICE : [interprétation]
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1 Q. Nous avons un certain Dibran Dani, il a été identifié sur les lieux.
2 C'est une personne qui figure de la liste serbe des personnes exhumées.
3 Voyez-vous, il a fini -- on a fini par le retrouver son corps, on a fini
4 par le retrouver à Petrovo Selo. Nous avons le certificat de décès, je peux
5 fort bien les produire, mais cela prend un certain temps. Nous pourrons
6 peut-être faire cela plus rapidement plus tard. Si la Chambre est convaincu
7 que c'est bien ce qui s'est passé.
8 Expliquez-nous pourquoi au moins un des corps exhumé par les forces
9 serbes est déplacé du lieu où l'homme a péri, là où il est né, et que ce
10 corps est déplacé dans le nord de la Serbie.
11 R. Bien sûr que je ne peux pas vous répondre. Je vous l'ai expliqué à
12 plusieurs reprises le fait de ne pas pouvoir vous répondre parce que c'est
13 vraiment surprenant.
14 Q. [aucune interprétation]
15 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Quelle est distance qui sépare
16 Izbica --
17 M. NICE : [interprétation] De Petrovo Selo ? Je suppose que le témoin, qui
18 est un policier chevronné, pourra donner le temps que cela prend ou la
19 distance à vol d'oiseau et l'autre par la route.
20 Q. Combien y a-t-il de kilomètres à peu près entre Izbica et Petrovo
21 Selo ?
22 R. Il doit y avoir 350 à 400 à vu de nez par la route, j'entends.
23 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vous remercie.
24 M. NICE : [interprétation]
25 Q. Aucune de ces routes n'est une autoroute mis à part peut-être un petit
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1 tronçon, ce ne sont pas des voies rapides, n'est-ce
2 pas ?
3 R. Ce sont des voies régionales et pas locales.
4 Q. Les survivants, qui sont venus déposer, Monsieur Stevanovic, disent
5 qu'on s'est servi d'excavatrice pour exhumer ces corps. Pourquoi a-t-on
6 voulu exhumer ces corps ? C'était pour les cacher quelque part, n'est-ce
7 pas ?
8 R. Cela serait tout à fait illogique. Il y a une documentation disant où
9 chaque cadavre a été enterré. Il y a un schéma, et si mes souvenirs sont
10 bons, il y a des photographies de chacun des corps. Ce que je n'explique
11 pas, c'est pourquoi on élaborerait une documentation de cette nature,
12 pourquoi on la rendrait publique à titre durable pour laisser entendre en
13 parallèle qu'on avait l'intention de dissimuler les cadavres. Enfin, cela
14 n'a aucun appui
15 -- n'a aucun point d'appui, ni dans la logique, ni dans les comportements
16 censé de tout un chacun.
17 Q. Si vous ne pouvez pas nous aider à mieux comprendre comment il se fait
18 que des cadavres sous la responsabilité des Serbes ou, en tous cas, un
19 cadavre sous la responsabilité des Serbes s'est retrouvé à 350 kilomètres
20 par la route à Petrovo Selo, est-ce que vous pouvez nous dire qui a fait
21 cela ?
22 R. Ceux, qui l'ont fait, l'ont fait. Je ne sais pas qui l'a fait. La seule
23 personne qui sait qui l'a fait, c'est l'auteur de cet acte.
24 Ce que nous avons fait dans cette période vous le voyez dans ces
25 documents, mais ce que d'autres ont pu faire, et que je ne savais pas, je
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1 ne peux pas vous aider sur ce point.
2 Q. C'est un mépris choquant pour une personne décédée que de l'exhumer
3 pour la transporter vers un lieu où il serait impossible de la retrouver.
4 Vous êtes d'accord avec cela ?
5 R. Avec cette affirmation, je puis exprimer mon accord.
6 Q. Personne, n'est-ce pas, n'a été identifiée comme responsable du
7 transport des cadavres ? Je reprends ma phrase, excusez-moi. Il n'y a eu
8 aucune enquête, n'est-ce pas, qui ait permis d'identifier les personnes ou
9 la personne qui a déplacé les cadavres d'Izbica jusqu'à Petrovo Selo ?
10 R. Pour autant que je le sache, depuis le moment où l'on appris qu'il
11 existait des tombes à Batajnica et à Petrovo Selo, une enquête a commencé,
12 et je répète toujours, sur la base des renseignements à ma disposition,
13 renseignements généraux. Cette enquête, à ma connaissance, est encore en
14 cours en Serbie. Je dis pour ma part que cette enquête est en cours parce
15 qu'elle a été nécessitée par le fait que la chose a été rendue publique.
16 Q. Mais voyons l'intercalaire 320, un autre sujet. Ce dont je parle, en ce
17 moment, c'est l'objectif assigné au déplacement de ces corps que l'on voit,
18 selon moi, d'après la façon très grossière dont les exhumations ont été sur
19 cette photo aérienne, vous voyez les marques de tracteurs qui prouvent que
20 des manipulations de tombes ont eu lieu à Izbica. Est-ce que vous voyez à
21 quel point la terre est remuée, ce 3 juin ? Quel est ce tracteur ou cette
22 pelleteuse qui est nécessaire pour exhumer des corps dans des tombes comme
23 celles-ci ? Est-ce que vous pourriez nous le dire ?
24 R. C'est la première fois que je vois ces deux photographies. Sur celle de
25 droite, bien entendu, je reconnais une marque qui a l'air d'être le
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1 résultat du passage d'un véhicule lourd, mais je ne vois qu'une seule
2 marque, et on voit que la marque va jusqu'à ce point assez foncé et repart
3 dans un autre sens. Selon mon expérience, je dis encore une fois que si la
4 chose avait été faite, comme vous le dites, il aurait fallu y avoir ici
5 plusieurs traces, à moins que je ne les voie pas.
6 De toute façon il y a une ombre trop importante à l'endroit où se trouvait
7 la tombe sur cette photographie et je ne suis vraiment pas en mesure de
8 d'identifier quoi que ce soit sur ces ombres très foncés.
9 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Quel est le numéro de l'international ?
10 Vous pouvez nous le redire.
11 M. NICE : [interprétation] Pièce 320, intercalaire 75. Je vous demande un
12 instant, Monsieur le Président.
13 Je vous prie de m'excuser, Monsieur le Président, Messieurs les Juges.
14 Avant de me pencher sur les scènes de crime, je tiens à dire quelle est la
15 position de l'Accusation au sujet de Kotlina. M. le Juge Kwon m'a posé une
16 question à un certain moment au vu d'un document qui avait été remis à
17 l'accusé, il m'a demandé si tous les noms qui figurent sur le tableau L,
18 relatif à Kotlina ont été identifiés comme des membres de l'UCK. En même
19 temps, il a été fait référence à un ouvrage publié par l'UCK intitulé : "Le
20 Phoenix de la Liberté," qui a été communiqué à l'accusé récemment. Je
21 reprends ces deux points en sens inverse. L'ouvrage de l'UCK a été produit
22 en application de l'Article 68, mais, en fait, ce n'était pas nécessaire
23 car il s'agit d'un document public qui est tout à fait disponible dans
24 n'importe quelle librairie et qui donc ne peut tomber sous le coup de
25 l'Article 68 du Règlement, mais c'est par souci de précaution pour assurer
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1 que -- pour veiller à ce l'accusé dispose de tout ce qui est disponible et
2 que cet ouvrage lui a été communiqué.
3 Dans cet ouvrage, on trouve quatre noms dans le tableau L sur une liste de
4 17 noms, et je crois savoir que l'un de ces noms a été confirmé par le
5 frère de l'une des personnes décédées comme étant celui d'un membre de
6 l'UCK. La référence au fait que toutes les victimes auraient été membres de
7 l'UCK est liée à des documents communiqués à l'accusé dans lesquels on
8 trouve un rapport d'enquêteur qui évoque ces cadavres comme ayant été
9 enterrés dans un cimetière de l'UCK, 12 cadavres sur 24 auraient été
10 enterrés dans ce cimetière de l'UCK, mais aucun nom n'est fourni dans ce
11 document. Tout ceci se résume à une chose, c'est qu'au vu des documents
12 disponibles et des noms que l'on voit apparaître sur ces documents et dans
13 le livre : "Le Phoenix de la Liberté," comme étant membre de l'UCK, un nom
14 est effectivement confirmé comme étant celui d'un membre de l'UCK, à
15 présent, son frère. Mais la signification exacte accordée aux autres
16 références que l'on trouve dans l'ouvrage en question est un point que nous
17 aborderons plus tard, voilà à quoi se résume toute l'affaire.
18 Il est possible que j'ai des questions supplémentaires à poser au sujet du
19 déplacement des cadavres, mais, pour l'instant, je voudrais revenir sur ce
20 que vous nous avez dit au sujet des poursuites judiciaires engagées contre
21 des membres présumés du MUP. Regardons d'abord l'intercalaire 79.01, qui se
22 trouve dans le classeur numéro 2.
23 Je crois que ce document est traduit. En fait, ce n'est pas le 79.01, mais
24 79.1. Excusez-moi.
25 Avant de traiter plus en détails de ce sujet, j'aimerais rappeler aux Juges
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1 de la Chambre que nous attendons encore de nombreuses traductions, et j'ai
2 insisté auprès du chargé de liaison au sujet de la traduction de ce
3 document précis, en lui disant que c'était un document urgent, mais la
4 traduction n'est toujours pas disponible. Je ne sais pas si ce document a
5 été traduit ce matin, peut-être, mais, en tout cas, il faudra quelques
6 temps pour que nous disposions de toutes les traductions, en tout cas, ce
7 document est potentiellement important, et nous devrons pour le moment
8 travailler sur ce document sans traduction.
9 Q. Bien. Intercalaire 79.1. Ce document s'agit de meurtres présumés d'un
10 des membres du MUP, Monsieur Stevanovic, et nous allons associer la liste
11 de statistiques qui figurent ici, et qui est disponible en traduction.
12 M. NICE : [interprétation] Monsieur le Président, comme vous pouvez le
13 constater, avec la version originale, et nous verrons que six ou sept
14 lignes à partir du début on voit trois références qui traitent -- "qui sont
15 liées à des vols." Les points 1, 2, 3. Nous voyons qu'au total, entre
16 janvier et juin 1998, le nombre de meurtres se monte à un; entre juillet et
17 décembre, à deux; et un peu plus bas, nous avons homicide volontaire, et
18 nous voyons qu'il s'en produit deux de juin à juillet 1998.
19 Q. C'est bien cela, n'est-ce pas, Monsieur Stevanovic ?
20 R. Oui, c'est ce qui est écrit dans ce tableau.
21 Q. Pas d'assassinat pas d'homicide volontaire dans les -- au cours des
22 deux premiers trimestres de 1999, cinq assassinats du 24 mars au 10 juin
23 1999, n'est-ce pas ?
24 R. C'est cela.
25 Q. Il s'agit d'assassinat et d'homicide volontaire, mais prenons deux
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1 événements dont les noms sont bien connus, les massacres de Jashari et de
2 Salihaj. Dans le premier cas, il est possible que plusieurs membres de
3 l'UCK aient été tués en même temps qu'un grand nombre de membres de la
4 famille en question; et dans le cas Salihaj, nous avons un membre de l'UCK
5 qui a été tué en même temps qu'un grand nombre de membres de la famille en
6 question; est-ce que ces assassinats figurent dans vos statistiques ? Je
7 parle d'assassinats de personnes qui ont eu lieu au cours des événements
8 tel que l'assassinat de Jashari et Salihaj ?
9 R. Ici, il est question d'actes qui sont qualifiés d'assassinats.
10 L'événement lié à la famille Jashari, et l'événement lié à l'autre famille
11 dont je ne me rappelle pas le nom à l'instant, correspondent sans doute à
12 des qualifications différentes. Ce sont des événements qui, au stade de
13 l'enquête, ont continué à être qualifiés de combats -- d'affrontements. Au
14 cours de ces affrontements, effectivement, un certain nombre de personnes
15 ont trouvé la mort, et si je me souviens bien, un au minimum, et peut-être
16 même deux ou trois policiers ont trouvé la mort également au cours de ces
17 événements. Il est probable que cet événement n'est pas été qualifié
18 d'assassinats. Il en est resté au stade de l'enquête, et c'était à
19 l'instruction de déterminer la qualification exacte.
20 Il est question ici d'actes criminels, qui traitent -- …
21 Manifestement, ont été considérés comme des assassinats, comme des
22 meurtres.
23 Q. Je tiens beaucoup à ne pas vous interrompre, mais ceci a des
24 conséquences directes sur le temps qui est utilisé. Ma question était très
25 simple. Dans l'affaire Jashari, on a des femmes et des enfants qui sont
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1 tués; dans l'affaire Salihaj, on a un homme de 70 ans et un jeune garçon de
2 16 ans, qui sont assassinés entre autres parmi les membres de la famille
3 concernée. Lorsque cela se produit, la police doit assumer ses
4 responsabilités. Si elle a tué ces personnes, elle a peut-être des excuses,
5 mais elle doit assumer ses responsabilités.
6 Est-ce que les statistiques produites par vous -- est-ce que, dans ces
7 documents que vous avez produits, on trouve une façon de couvrir ces
8 meurtres, soit en produisant une excuse, une justification, c'est-à-dire,
9 en disant qu'une enquête a été lancée ou simplement en les passant par
10 perte et profit, en les mettant aux oubliettes ? Est-ce que ce document
11 couvre la chose en question ?
12 R. Le document que nous avons ici ne le fait pas. Mais l'affaire Jashari,
13 l'événement qui s'est produit tout près de ce village de Srbica, cet
14 événement a donné lieu à des poursuites qui se sont menées dans des
15 conditions très similaires aux autres affaires, Izbica, Pusto Selo, Suva
16 Reka, Podujevo. Les documents disponibles sont très similaires dans toutes
17 ces affaires. Je répète, bien entendu, qu'il est question dans toutes ces
18 affaires d'attaques de la police, d'attaques dont la police était victime,
19 et d'affrontements entre la police et les habitants. Tout ce qui s'est
20 passé figure certainement dans le dossier de ces affaires avec des
21 documents en nombre suffisant. L'enquête est toujours en cours. J'ai parlé
22 des problèmes auxquels nous nous sommes trouvés confrontés au Kosovo
23 longuement.
24 Q. Est-ce que tout ceci revient à dire que tout décès avec présence du MUP
25 est qualifié d'acte non criminel simplement parce qu'il ne figure pas dans
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1 les statistiques ?
2 R. Ceci figure dans d'autres statistiques, dans le dossier A, où il est
3 question de tous les événements ayant conduit à mort d'hommes. Donc, ce
4 dossier figure très certainement dans ce registre en tant qu'événement
5 particulier qui a eu, pour conséquence, la mort d'un nombre déterminé de
6 personnes.
7 Lorsqu'un dossier de ce genre est établi, il est remis au Procureur
8 et c'est le Procureur qui décide de la suite à donner à ce dossier et, bien
9 entendu, il le fait après consultation des policiers et des instances
10 chargés de l'instruction. Aujourd'hui, ici, je ne saurais vous dire
11 exactement ce qui a été fait dans le cas dont vous parlez. Mais il existe
12 très certainement de très nombreux documents au sujet de cette affaire, il
13 existe certainement un dossier.
14 Q. Je vais retourner peut-être --
15 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Nice, si cela vous
16 convient, nous pouvons faire la pause ?
17 M. NICE : [interprétation] Certainement, Monsieur le Président.
18 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Nous suspendons pendant 20
19 minutes.
20 --- L'audience est suspendue à 12 heures 16.
21 --- L'audience est reprise à 12 heures 40.
22 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Nice, à vous.
23 M. NICE : [interprétation] Intercalaire 77, Monsieur Stevanovic, je vous
24 prie, 77. Ce document a été traduit. Il s'intitule : "Récapitulatif des
25 crimes contre les Albanais au Kosovo et Metohija, du 1er janvier 1998 au 10
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1 à 20 juin 1999."
2 En page 1, prenons le paragraphe A2, Article 47 qui concerne les meurtres.
3 Nous voyons qu'il y a eu un total de 408 meurtres d'Albanais du Kosovo,
4 identifiés dans cette période.
5 Les documents présentés par vous, comme nous le constaterons, permettent de
6 penser que cinq de ces affaires peuvent être considérées comme des crimes
7 commis par des membres du MUP, n'est-ce pas ?
8 R. Je ne sais pas s'il en a que cinq. D'après ce que j'ai pu voir, tout à
9 l'heure, je lis huit actes criminels. Ici, effectivement, il y a 400 et
10 quelques, mais je juge nécessaire de souligner que ceci ne signifie pas
11 qu'il y a eu 408 personnes tuées. Le nombre peut être plus élevé. Il y a eu
12 480 actes identifiés, mais le nombre peut être plus important. C'est peut-
13 être l'explication qui peut être prise en compte.
14 Q. Qu'est-ce que cela révèle ? Est-ce que cela révèle que, dans vos
15 statistiques, les gens commettaient des meurtres, ou est-ce que cela
16 signifie que les militaires tuaient des civils ? Qu'est-ce que cela nous
17 montre ?
18 R. Cela nous montre le nombre de crimes, d'actes criminels qui ont été
19 commis, et les auteurs de ces actes, bien entendu, peuvent être issus de
20 toutes les couches de la société. J'ai eu l'occasion de vous donner
21 plusieurs exemples, des exemples très différents qui indiquent que les
22 auteurs de ces actes étaient très divers et que les victimes étaient très
23 diverses également. Dans le cas présent, les victimes sont principalement
24 des Albanais. Les auteurs de ces actes
25 --
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1 Q. Nous avons entendu des témoins qui ont parlé de centaines et de
2 milliers de personnes tuées, et on dit que dans la majeure partie des cas,
3 ces personnes avaient été tuées par la police et par l'armée, qui forçaient
4 les Albanais du Kosovo à quitter la région. Est-ce que ces allégations sont
5 prises en compte dans ce chiffre de 408 ? Parce que si c'est le cas, il y a
6 eu enquête. C'est que j'aimerais savoir.
7 R. Il est question ici de 400 actes qualifiés d'assassinats ou de
8 meurtres. Comme je l'ai déjà dit, il y a eu 1 500 événements qui ont fait
9 des victimes, mais à l'heure actuelle, un certain nombre ne sont pas encore
10 qualifiés comme assassinats ou comme meurtres, ce qui ne signifie pas qu'il
11 n'y a pas eu morts d'hommes. Dans tous les cas, si la lumière est faite sur
12 toutes les affaires, il est possible que certains cas soient qualifiés de
13 meurtre ou d'assassinat, en fonction de la façon dont s'appliquera le code
14 pénal.
15 Q. Revenons sur les enquêtes dont vous nous avez parlé ou sur les mises en
16 accusation.
17 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Robinson.
18 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui.
19 L'ACCUSÉ : [interprétation] J'ai l'impression que M. Nice ne pose pas les
20 bonnes questions au témoin, car dans ce même document, en page 2, on trouve
21 une autre référence, un autre chapitre qui se lit comme nombre d'auteurs de
22 crimes découverts, et vous avez les civils, les forces de police, d'active,
23 de réserve, l'armée, d'active et de réserve, et cetera. Tous ces
24 renseignements se trouvent en page 2 de ce même document. Les réponses aux
25 questions posées figurent dans ce document.
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1 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, Monsieur Milosevic. Ceci est un
2 point que vous pourrez aborder au cours des questions supplémentaires.
3 M. NICE : [interprétation]
4 Q. Passons maintenant aux crimes dont vous nous avez parlé. Nous avons
5 parlé de Cvjetan et de Demirovic. J'aimerais faire deux commentaires sur ce
6 sujet. D'abord, Demirovic s'est enfui au Canada, n'est-ce pas ?
7 R. Je ne suis pas au courant.
8 Q. Cvjetan a finalement été condamné à 20 ans de prison, si je ne trompe
9 pas; c'est bien cela ?
10 R. Malheureusement, je ne dispose pas de ce renseignement.
11 Q. Il était le seul, parmi tous les auteurs dont vous pouvez parler, je
12 suppose, et vous le confirmerez éventuellement, il est le seul qui a été
13 accusé de crime de guerre.
14 R. Je ne suis pas très certain de la qualification qui a été décidée, mais
15 je crois me rappeler que des renseignements en ma possession indiquaient
16 que c'est bien le cas.
17 Q. La seule raison pour laquelle il a été accusé de crime de guerre, c'est
18 qu'il y a eu pourparler entre les organisations non gouvernementales et ses
19 conseils de la Défense, avec insistance sur la nécessité de l'accuser pour
20 crime de guerre et pas simplement pour assassinat, n'est-ce pas ?
21 R. Je ne sais vraiment pas. Je ne sais pas quelle a été la thèse et qui
22 l'a emportée dans cette affaire.
23 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Nice, si vous avez des
24 renseignements à ce sujet, cela m'intéresserait. Je crois que ce serait
25 utile pour la Chambre.
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1 M. NICE : [interprétation] Certainement. Nous retrouverons cet élément si
2 le temps nous le permet. Nous retrouverons l'intercalaire exact.
3 Q. Les raisons de cette affaire résident dans le fait qu'y compris dans
4 l'affaire Cvjetan, en dépit du très grand nombre de personnes qui ont
5 trouvé la mort, sa condamnation a été annulée en appel, n'est-ce pas ?
6 R. Non, vraiment, je ne sais pas comment s'est déroulé la procédure et je
7 ne sais pas quelles en ont été les conséquences.
8 Q. Très bien. Nous passerons à autre chose. Mais voyez-vous, les raisons
9 pour lesquelles j'ai besoin de ces éléments vont vous apparaître très
10 nettement. Maintenant, avant de passer à un autre sujet, encore un détail :
11 est-ce que vous avez entendu la déposition de M. Gojovic, témoin de
12 l'Accusation dans la présente affaire ? Avez-vous entendu ce qu'il a dit au
13 sujet des militaires ? Est-ce que vous l'avez entendu ou est-ce qu'on vous
14 en a parlé ?
15 R. Non. La seule chose que je sais, c'est qu'il a témoigné, mais je n'ai
16 pas suivi sa déposition.
17 Q. Avez-vous appris, par la lecture de la presse ou autrement, qu'un homme
18 répondant au nom de Djurovic a résisté à ce qu'il a qualifié de politique
19 de "laisser aller" au Kosovo, et que tout en étant colonel au bureau du
20 procureur, il a été renvoyé en Serbie et a dû quitter le Kosovo. Est-ce que
21 vous avez entendu parler de cela ?
22 R. Non. Ce patronyme ne me dit rien.
23 Q. Est-ce que le MUP et l'armée avaient la même démarche au Kosovo, c'est-
24 à-dire que l'armée, tout comme la police, fermait les yeux sur les actes
25 qui normalement auraient dû donner lieu à poursuite judiciaire dans des
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1 conditions comme celles-ci ?
2 R. Non. Ceci n'est pas vrai. J'ai même donné des exemples de pression
3 importante exercée par la police pour empêcher que des personnes partent
4 sans problème et ne soient pas poursuivies, et la police n'a jamais cédé
5 aux pressions.
6 Q. Etes-vous au courant du fait, et est-ce que cela vous surprendrait, que
7 simplement parce que son nom a été mentionné dans ce Tribunal, pas en tant
8 que témoin, mais parce que son nom a été mentionné dans ce Tribunal, le
9 responsable des accusations a perdu son emploi ? Est-ce que vous êtes au
10 courant de cela ?
11 R. Je n'ai pas très bien compris. Est-ce que vous me demandez si je suis
12 au courant que s'il avait témoigné, il aurait perdu son emploi ?
13 Q. Son nom a été mentionné dans ce Tribunal comme celui d'une personne
14 favorable à la mise en accusation, et depuis lors, il a perdu son emploi.
15 Est-ce que vous êtes au courant de cela ? Parce que ceci démontre
16 l'environnement dans lequel travaillent ces personnes, d'après moi ?
17 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Nice.
18 M. NICE : [interprétation] Oui.
19 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] L'affaire qui a été soumise à la
20 Chambre d'appel et la condamnation annulée m'intéresse également.
21 M. NICE : [interprétation] Non, non.
22 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Cela m'intéresserait de savoir
23 pourquoi et dans quelles conditions.
24 M. NICE : [interprétation] Très bien. Pour le moment, tout ce dont je
25 dispose, à savoir un extrait de cet article de presse au sujet duquel j'ai
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1 interrogé le témoin lorsqu'il a dit qu'il se rappelait un certain événement
2 parce qu'il l'avait lu dans la presse, c'est ce document dans lequel je
3 vois que l'affaire devait se poursuivre devant les tribunaux et que Cvjetan
4 avait été condamné à 20 ans pour crimes de guerre, et qu'ensuite, la Cour
5 suprême a annulé cette condamnation pour demander un nouveau jugement pour
6 vices de procédure.
7 Voilà ce que je vois dans ce document, mais je n'ai pas de détails
8 supplémentaires.
9 Quant à l'autre affaire, Monsieur le Président, non, je n'ai pas encore la
10 réponse à votre autre question.
11 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci.
12 M. NICE : [interprétation] Mais pour l'instant, nous allons avancer.
13 M. NICE : [interprétation]
14 Q. Le crime suivant dont vous nous avez parlé a été commis par Djeletovic
15 et par un certain Ivan Ivanov, meurtrier de plusieurs membres d'une même
16 famille. Intercalaires 158 à 167 dans vos documents. Mais nous n'avons pas
17 besoin de prendre tous ces documents maintenant. Alors, est-ce que ce crime
18 a été poursuivi en tant que crime normal et pas en tant que crime de
19 guerre ?
20 R. Je crois que la plainte au pénal portait sur un acte criminel
21 d'assassinat.
22 Q. Bien sûr, le fait de poursuivre quelqu'un pour assassinat permet de
23 contourner la nécessité de le poursuivre pour crimes de guerre, ce qui
24 impliquerait la participation de personnalités politiques et militaires
25 importantes à des crimes de ce genre, n'est-ce pas ? Ce qui permettrait de
Page 40514
1 les mettre en lumière.
2 R. En soi, cela ne suffit pas. Mais je répète encore une fois que je ne
3 puis pas m'exprimer ici en tant qu'expert juridique, car je n'ai pas de
4 formation juridique, mais bien sûr, j'ai une grande expérience acquise au
5 sein de la police. Ce dont j'ai parlé, c'est d'un événement qui ne se
6 situait ni dans le cadre de combats, ni dans le cadre d'un plan, ni dans le
7 cadre de quoi que ce soit d'organisé. Un assassinat a eu lieu, dans un lieu
8 déterminé, en dehors de toute action de la part de la police ou de quoi ce
9 soit de ce genre. Un simple assassinat, quatre policiers se sont jetés sur
10 une famille qui se trouvait là à ce moment-là.
11 Q. Avant de conclure, j'ai encore une question à vous poser sur ce crime
12 particulier. Il y a une chose que ni vous-même, ni personne à cette époque
13 --
14 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, Monsieur Milosevic.
15 L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que vous considérez qu'il est normal
16 quand M. Nice affirme quelque chose ? Il a parlé d'un colonel. Il a affirmé
17 que ce colonel avait été licencié de son travail parce que son nom avait
18 été mentionné ici. Il a affirmé également qu'un jugement avait été annulé.
19 Vous avez dit que vous vous intéressiez à ces questions, mais n'estimez-
20 vous pas qu'il serait nécessaire de dire à quel moment ce colonel a été
21 démis de ces fonctions et à quel moment la Chambre d'appel à annulé le
22 jugement en première instance ?
23 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] M. Nice s'est engagé à nous fournir
24 ces renseignements.
25 M. NICE : [interprétation]
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1 Q. Une chose que ni vous-même ni qui que soit d'autre qui comparaît ici
2 pour l'accusé qui se trouve ici ne pourrait contester, c'est que les
3 avocats, Agani et Kelmendi, ont été assassinés peu de temps après le début
4 des bombardements et que c'étaient des hommes très bien, qu'ils ne
5 faisaient que leur travail, n'est-ce pas ?
6 R. J'ai entendu le nom de Fehmi Agani. Pour autant que je le sache,
7 c'était l'un des dirigeants d'un parti albanais du Kosovo et Metohija, mais
8 je ne me rappelle pas le nom "Kelmendi". Ce nom me dit quelque chose, mais
9 je ne suis pas au courant qu'il se soit agi d'un avocat. Je sais qu'Agani a
10 été tué; cela, c'est incontestable.
11 Q. Vous nous dites très sérieusement, en tant que policier très
12 expérimenté, que vous n'êtes pas au courant du fait que
13 M. Kelmendi et son fils ont été emmenés hors de leur domicile par des
14 représentants des forces serbes en uniforme avant d'être assassinés. Vous
15 nous dites sérieusement cela, n'est-ce pas ? L'un des représentants les
16 plus éminents sans doute de la défense des droits de l'homme a été
17 assassiné, et vous nous dites que vous ne vous rappelez même pas son nom;
18 c'est cela ?
19 R. En toute responsabilité, je vous dis que je suis au courant de
20 l'assassinat de Fehmi Agani. Je sais que je me suis personnellement
21 intéressé à la procédure en rapport avec cet assassinat-là. Mais
22 l'assassinat de Kelmendi, je ne me souviens d'aucun détail, même si j'ai
23 bien à l'esprit l'idée que cet avocat a été assassiné, mais je ne me
24 souviens ni de l'endroit, ni du moment, ni d'aucun autre détail.
25 Quant à l'assassinat d'Agani, j'ai des informations à ce sujet et je
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1 me suis personnellement intéressé à la façon dont l'affaire s'est déroulée.
2 A un certain moment, j'ai même demandé ce qui pouvait être fait en
3 parallèle pour faire la clarté sur toute cette affaire, sur l'assassinat de
4 toutes ces personnes. Est-ce qu'il y avait un rapport entre cet assassinat
5 et l'assassinat d'une famille, mais il s'est avéré que non.
6 Q. Bien, exactement -- je reprends. Nikolic et Djeletovic ont apparemment
7 été interrogés en rapport avec l'assassinat d'Agani. Il s'agissait de
8 quelqu'un qui était descendu du train à un certain endroit, qui avait été
9 pris pour quelqu'un d'autre. L'enquête, finalement, a permis de l'exonérer,
10 mais tout cela, à votre avis, fait partie de simples assassinats, de crimes
11 normaux dont ont été victimes les membres de la famille Bljakcori; c'est
12 bien cela ?
13 R. J'ai déjà dit que j'ai été informé du fait que la clarté a été faite
14 sur cette affaire. D'ailleurs, je crois l'avoir dit à vos enquêteurs. Mais
15 ce que j'ai voulu faire, c'est vérifier dans le détail que cela avait bien
16 été le cas, et donc j'ai consulté la documentation disponible, le dossier,
17 et j'ai pu constater que l'assassinat de Fehmi Agani n'avait pas été prouvé
18 au cours de l'instruction et que l'enquête était toujours en cours.
19 Quant à l'assassinat des membres de la famille Bljakcori, il a été établi.
20 Il a eu lieu dans une localité située non loin de là, si je me souviens
21 bien, le même jour. Cet assassinat a été prouvé. Dès que l'affaire a été
22 résolue, quatre policiers ont été emprisonnés et sont demeurés en détention
23 jusqu'à la fin de la guerre. Par la suite, je n'ai plus suivi l'évolution
24 de cette affaire. Je l'ai dit également. J'ai dit que nous avons subi 20
25 jours de pression intense exercée à notre encontre par les habitants
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1 convaincus que ce n'était pas les policiers qui étaient responsables de ces
2 actes. Je leur ai dit que ces policiers, s'ils étaient responsables, ne
3 seraient jamais relâchés. Donc, voilà ce que je sais au sujet de cet
4 événement particulier, ainsi qu'au sujet de l'assassinat de Fehmi Agani.
5 Q. Le fait est qu'il y ait eu de nombreuses victimes; il y a Cvjetan, il y
6 a cette famille tuée par Nikolic et Djeletovic. On peut dire que ce sont là
7 des excès individuels et isolés, mais lorsqu'on tue, à un moment
8 particulièrement critique, un défenseur des droits de l'homme, un homme
9 comme Kelmendi, lorsqu'on tue un dirigeant important comme Agani, il n'est
10 pas possible de le dissimuler, de le déguiser de cette façon, parce que les
11 motifs sont politiques, et c'est la raison pour laquelle l'enquête n'a
12 jamais été menée à son terme, n'est-ce pas ?
13 R. Je vous en prie. Il y a une chose qui est claire. L'enquête de la
14 police, le travail de la police, pour être concret, a été conduit à son
15 terme dans ces cas-là. Il y a eu des plaintes au pénal contre auteurs
16 inconnus du méfait, et toutes les autres preuves ont été communiquées à ce
17 sujet au procureur public. Cela n'est pas contestable. Je n'ai pas le
18 dossier, mais il doit exister, et ce dossier montre qu'il y a un renvoi au
19 procureur contre inconnu, puis contre auteur connu dans le cas de
20 Bljakcori.
21 Mais pour ce qui est de Fehmi Agani, je sais qu'il y a une plainte au pénal
22 déposée pour auteurs inconnus. Pour ce qui est de Kelmendi, je n'en suis
23 pas certain. Mais ce que je sais, c'est que ce qu'on a dû au moins faire,
24 c'est de déposer une plainte contre auteurs inconnus. Je ne peux pas être
25 catégorique parce que je ne me souviens pas du dossier.
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1 Q. Assassinat suivant par le MUP dont vous avez parlé, vous en avez parlé
2 aux intercalaires 172 et 173. Il s'agissait notamment de Simic Djordje et
3 d'un homme répondant au nom de Boban Petkovic. Le procès, c'était un
4 procès, alors que l'accusation était simple meurtre, n'est-ce pas, et pas
5 un crime de guerre ?
6 R. Il faudrait que vous me rappeliez la localité, parce que les noms de
7 famille ne me permettent pas d'identifier le cas. Il se peut que ce soit
8 Orahovac, Mitrovica.
9 Q. Oui, c'était Orahovac.
10 R. Oui. Il me semble qu'il y avait là deux plaintes au pénal ou au moins
11 une plainte pour deux délits. Mais il s'agit de délits au pénal qualifiés
12 d'assassinat.
13 Q. C'est le seul, parmi tous ceux que vous avez énumérés, le seul qui a
14 commencé avant que l'accusé n'ait quitté ses fonctions, et même celui-là,
15 il n'a commencé qu'en juin 2000. Quand je dis le crime, je voulais parler
16 de la procédure d'enquête et le procès. Je parlais du procès en tant que
17 tel.
18 R. Il s'agit d'événements au sujet desquels j'ai eu certaines
19 connaissances. J'ai donné la suggestion à la Défense de présenter ces
20 dossiers-là. Ils existe toute une série de dossiers similaires qui en sont
21 à une phase plus ou moins analogue, pour ce qui est des pertes parmi les
22 civils. Je ne sais pas combien de dossiers il y a à être placés en
23 corrélation avec des policiers, mais nous avons des données certes.
24 S'agissant de ces quelques affaires, j'ai des informations quelque peu plus
25 amples dans ce cas là que dans d'autres cas.
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1 Q. L'affaire Orahovac, Boban Petkovic et Djordje Simic c'est là qu'il y
2 avait accusation d'assassinat, et vous avez parlé de deux autres, Boban
3 Petkovic, intercalaire 174, et Goran Veselinovic et Dragan Todosijevic,
4 intercalaires 170 et 171, cela n'a jamais été traduit en justice, n'est-ce
5 pas ?
6 R. Je ne peux pas vous le confirmer. Mes informations disent que oui, mais
7 je ne peux pas vous le confirmer.
8 Q. Fort bien. S'il vous est possible de nous montrer, dans vos documents,
9 lequel qui est concerné, ce sera très bien. Il n'y a jamais eu de mise en
10 accusation pour le crime ou l'infraction d'expulsion de transfert forcé à
11 l'encontre du MUP.
12 R. D'après ce que j'en sais, non.
13 Q. Bien entendu, c'est vrai aussi pour ce qui est de poursuites engagées
14 contre des hommes politiques, des avocats. Quand je parle d'expulsion, il
15 faut forcément l'intervention d'un supérieur -- on ne peut pas se contenter
16 d'accuser quelqu'un qui a un échelon plus bas et s'en sorti comme cela.
17 Est-ce que c'est la raison pour laquelle il n'y a jamais eu de mise en
18 accusation pour expulsion ?
19 R. Non, la raison pour laquelle il n'y a pas eu de plaintes au pénal pour
20 expulsion, et l'absence d'informations aux termes desquelles il y aurait
21 déplacement forcé de qui que ce soit par qui que ce soit. Nous avons
22 envisagé la possibilité, nous étions préoccupé par celle-ci. Mais il n'est
23 pas question de dire que l'une - un dépôt de plaintes et des fonctions de
24 l'appartenance ethnique de la victime ou de l'auteur. On ne peut pas dire
25 que les assassinats de Fehmi Agani et de Kelmendi n'ont pas été poursuivis
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1 en justice parce qu'ils étaient avocats. J'ai dit a plusieurs reprises que
2 toutes les victimes, du point de vue du traitement policier, ont été mis
3 sur un pied d'égalité et ont bénéficié d'un traitement tout à fait
4 identique.
5 Q. [aucune interprétation]
6 R. Les expulsions devaient forcément en parler à titre individuel s'ils --
7 qu'il aurait -- bien entendu, il s'agirait de trouver une qualification
8 appropriée pour ce type de comportement, mais je pense que cela ne devrait
9 pas constituer un problème.
10 Q. Est-ce qu'on a poursuivi qui que ce soit pour avoir brûlé les pièces
11 d'identité de quelqu'un ?
12 R. Je pense que non, je n'en suis pas certain, je n'ai pas d'informations.
13 Q. Vous dites que les éléments de preuve, qui furent nombre sous une forme
14 ou une autre preuve de personnes chassées de chez eux, du Kosovo par la
15 police aux frontières, cela n'avait pas de sens parce que vous disiez que
16 ces gens avaient la possibilité de redemander l'octroi de cette
17 citoyenneté, de cette nationalité aussitôt. Est-ce que vous avez des
18 exemples allant dans ce sens, demande qui aurait été faite et qui aurait
19 été accueillie ?
20 R. Je ne sais pas; demande de quoi ? De retour ?
21 Q. Je vais ralentir. Vous avez déclaré, dans votre déposition, que tout ce
22 qui nous a été raconté par des personnes dont on a pris pièces d'identité,
23 les plaques minéralogiques, éléments qui auraient été détruits, mais
24 empilés et détruits par le feu, que tout ceci est sans intérêt car chaque
25 personne a le droit de faire une demande à la police, aux autorités, et
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1 qu'il y avait une base de données qui pouvait confirmer que chaque personne
2 avait droit d'être traitée comme un citoyen du Kosovo; voici quelle était
3 ma question.
4 Est-ce que vous pouvez me donner un seul exemple d'une personne qui aurait
5 fait cette demande ?
6 R. D'abord, je dois dire que ma réponse ne s'est pas du tout située dans
7 ce contexte. Je n'ai pas contesté le fait que ce que s'est produit était
8 illégal. Je n'ai pas dit non plus que cela n'importe pas, et que cela
9 n'avait pas de sens si nous avions déjà un système informatisé unique.
10 Alors, en répondant à une question, j'ai dit que cela ne pouvait pas
11 constituer un motif crucial pour la non obtention d'une nationalité.
12 Mais s'agissant d'une demande concrète, qui aurait été présentée par
13 quelqu'un qui serait dépourvu de passeport, mais je crois qu'il doit y
14 avoir des cas probablement de cette nature. Mais, s'agissant du Kosovo, je
15 n'ai pas connaissance d'un cas de cette nature.
16 Q. Vous savez, tout à fait, bien que lorsque les gens avaient été chassé,
17 avaient vu de crimes communication dans les colonnes des réfugiés et c'est
18 gens n'allaient pas demander de revenir dans ce pays et faire la demande
19 aux mêmes forces pour le faire. Vous savez que c'était comme cela que cela
20 s'était passé, n'est-ce pas ?
21 R. Cela n'a pas été le cas. Mais on n'a pas non plus eu de cas généralisé
22 par -- au terme de quoi tout le monde aurait été chassé, tous auraient été
23 chassés pour ne pas revenir là. Le départ des gens, dans la majeure partie
24 des cas, était une affaire de volonté de leur part ou plutôt d'une
25 nécessité de quitter un territoire sous l'emprise de la guerre, pour toutes
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1 les autres raisons que je vous ai avancées en guise d'explications dans mes
2 réponses précédentes.
3 Q. Les trois dernières questions sur les assassinats perpétrés par les
4 forces du MUP parce que je veux aussi apporter d'autres sujets. Il n'y a
5 que trois cas où les policiers du MUP ont été accusés de crimes de guerre
6 dans le cadre d'assassinat lié à l'affaire Cvjetan dont on a déjà parlé, et
7 qui fait l'objet maintenant d'un nouveau projet, cela concerne le Kosovo.
8 La deuxième affaire, c'est une affaire Strpce, ce train qui est entre les
9 deux frontières dont on a fait sortir des gens, personnes qu'on a tuées,
10 qu'on appelle aussi l'affaire Sjeverin; c'est exact ?
11 R. Ce sont deux cas qui sont liés l'un à l'autre en effet. Sjeverin
12 c'était un enlèvement d'un autocar, et Strpce cela a été un enlèvement mais
13 à partir d'un train.
14 Q. Excusez-moi un instant. Cela s'est passé quand ? En 1992 ?
15 R. Je n'en suis pas sûr maintenant, c'est arrivé en 1992 et peut-être bien
16 début 1991. Je pense que c'était plutôt 1992. Enfin, j'avais une meilleure
17 souvenance des événements lorsque je répondais à ces questions-là. Mais il
18 y en a un qui arrivé, pour dire effectivement, 1992.
19 Q. L'auteur principal, l'assassin, c'est un certain Milan Lukic, qui est
20 un tueur en série notoire ?
21 R. Cet enlèvement a eu lieu; oui, cela s'est fait par un groupe dirigé par
22 Milan Lukic.
23 Q. Ce qui s'est passé c'est ceci : il a été extradé comme si cela pouvait
24 se passer. Il a été remis à l'instance qu'on connaît sous le nom de
25 Republika Srpska, et de là, il a disparu. Donc, il n'a jamais du subir un
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1 procès, n'est-ce pas ?
2 R. Si mes souvenirs ont bon, il a été arrêté sur le territoire du SUP
3 d'Uzice. Je crois qu'il a été placé en préventive peut-être à Belgrade et
4 il me semble, comme souvenir, qu'il a été relâche pour de procédures, alors
5 je ne sais pas s'il a été extradé, s'il a été juste relâché ou quelque
6 chose d'autres, je ne sais pas. Cela s'est produit lorsque, moi-même, j'ai
7 été pris dans ces activités au sujet de la Drina. Donc, nous avons parlé
8 davantage au fil des journées précédentes.
9 Q. [aucune interprétation]
10 R. Pour moi, il importait de ne pas voir de tels événements se reproduire.
11 Cela ne s'est pas reproduit en effet à partir du moment où j'ai envoyé des
12 unités sur ce terrain...
13 M. NICE : [interprétation] Messieurs les Juges, je vous demande
14 l'autorisation de fournir au témoin un document original. La pièce est déjà
15 versée au dossier et, je demanderais que ce soit placé sur le
16 rétroprojecteur, en tout cas, qu'on place sur le rétroprojecteur un copie
17 présentant des annotations.
18 C'est une partie de la pièce 667, l'intercalaire 8. Monsieur l'Huissier,
19 veuillez remettre ce document-ci au témoin, et placer cette partie-ci de
20 l'autre document sur le rétroprojecteur.
21 Q. C'est une pièce versée au dossier qui vient du conseil suprême de la
22 Défense, 8e session. Veuillez regarder le bas de la page, l'accusé parle de
23 certaines mesures et il est dit : "Il n'y a eu qu'un homme qui avait le
24 contrôle ou qui contrôlait et les autres sont montés dans le train à
25 Strpce. Un homme s'est glissé ici et il l'a continué à regarder partout.
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1 Nous devons tous l'attraper.
2 "Bulatovic : Une rançon a été exigée et nous avons essayé de payer la
3 rançon pour ces gens, mais ils ont tous été tués. Notre service de la
4 Sûreté d'Etat a découvert que c'était le groupe de Lukic qui avait
5 l'intention de tuer." Page suivante. "Notre police a arrêté Lukic et il est
6 derrière les barreaux. Nous allons voir ce que nous allons maintenant
7 faire. Il ne faut pas en parler parce que nous voulons en arrêter d'autres.
8 C'est un meurtrier et un criminel."
9 "Bulatovic dit : Dans le fond, c'est une personnalité tragique que la
10 sienne. Voilà."
11 Saviez-vous que les hommes politiques haut placés savaient parfaitement qui
12 avait commis le massacre de Strpce, et ils le savaient il y a longtemps de
13 cela ?
14 R. Il me semble logique d'affirmer qu'il le savait parce que c'est un
15 massacre grave qui a eu lieu. Je n'ai pas connaissance de ces réunions ou
16 de ces allocutions enfin ces discours que vous venez de mentionner.
17 Q. [aucune interprétation]
18 R. Les événements se sont déroulés aussi tôt après.
19 Q. Très bien. Quand on parle d'extradition, notamment, vers la Republika
20 Srpska à quel échelon du pouvoir faut-il s'adresser pour qu'il puisse y
21 avoir extradition pour procès dans cet endroit et disparition en fin de
22 compte, mais à qui fallait-il renvoyer ce document ? A l'accusé ?
23 L'INTERPRÈTE : Tout le monde l'a pris aussitôt après tout à l'heure.
24 LE TÉMOIN : [interprétation] Je crois que c'était quelqu'un dans les
25 structures des instances judiciaires. Je ne pense pas que, s'agissant d'une
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1 extradition d'un ressortissant d'un autre Etat ou l'Etat détenteur doit
2 avoir décidé, je ne suis pas très au courant de la procédure d'extradition.
3 Q. [aucune interprétation]
4 R. Il me semble que ce soit là une procédure déterminée ou précisée dans
5 le détail par le code pénal -- de la procédure pénale.
6 Q. Vous ne saviez pas que la Republika Srpska ce n'était pas un Etat, en
7 tout cas, pas à ce moment-là ?
8 R. Je ne peux pas à présent parler dans ces catégories. Il est certain que
9 la Bosnie-Herzégovine c'était un autre Etat.
10 Q. Très bien.
11 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Robinson.
12 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui.
13 L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que je peux obtenir une copie du
14 document qu'on vient de citer tout à l'heure ? On a parlé de la 8e session,
15 de la huitième réunion du conseil suprême de la Défense --
16 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, veillons à ce que M. Milosevic
17 reçoive une copie.
18 M. NICE : [interprétation] Oui, je demandais la permission de le passer sur
19 le rétroprojecteur. Mais peut-être peut-on remettre l'original à M.
20 Milosevic et j'aurais l'autre document en retour. Je demande que me soit
21 remis l'exemplaire, en anglais, et qu'on donne l'orignal à l'accusé. Merci
22 beaucoup, Monsieur l'Huissier.
23 Quelques points de moindre importance que j'aimerais aborder maintenant, et
24 je suppose que nous n'avons toujours pas la traduction en anglais de la
25 pièce 144, toujours pas arrivé.
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1 Q. Au début de votre déposition, vous aviez dit de ne pas avoir
2 connaissance de la formation des Bérets rouges fin 1991, et aussi de ce qui
3 était de venu la JSO. Vous avez dit ce qui s'était passé en 1996 lors de la
4 commémoration c'était différent de ce qu'on avait vu sur les ouï-dire en
5 1997. Je vous dis que c'est un mensonge que vous avez formulé et je vais le
6 prouver de la façon qui suit : la semaine dernière, vous avez confirmé que
7 votre supérieur Djordjevic était présent et qu'on l'avait vu dans
8 l'enregistrement de Kula en 1997; c'est bien cela, n'est-ce pas ?
9 R. Le général Djordjevic peut être vu dans l'enregistrement de Kula de
10 1198, oui.
11 Q. Vous étiez son adjoint, et vous aviez de nombreuses associations avec
12 lui.
13 R. Je n'ai pas été son adjoint, jamais. Une fois seulement dans ma
14 profession j'ai été adjoint du chef de l'administration de la police.
15 Djordjevic et moi avons été nommés par le gouvernement adjoint du ministre
16 --
17 Q. [aucune interprétation]
18 R. -- et par décision du ministre, il était à la tête d'un secteur, mais
19 nous avons été adjoints du ministre et je n'ai jamais été son adjoint à
20 lui.
21 Q. [aucune interprétation]
22 R. Peut-être ai-je été une fois adjoint dans l'administration de la
23 police.
24 Q. Je fais valoir que ce que vous avez dit, à savoir que Frenki Simatovic
25 a dit en une année une chose différente de ce qu'il avait dit, notamment,
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1 l'année suivante à Djordjevic et à d'autres, c'est quelque chose de tout à
2 fait ridicule que vous avez été forcé de le dire parce que vous essayez de
3 dissimuler le fait que vous connaissez l'existence des Bérets rouges.
4 R. Non, ce n'est pas exact. Je n'essaie pas de dissimuler des
5 connaissances quelles quelle soient. Je me souviens d'avoir été invité à
6 une cérémonie à l'occasion de la création d'une Unité chargée des
7 Opérations spéciales. Je ne me souviens pas de tous les détails des
8 discours, mais tous mes souvenirs relatifs à cette cérémonie disent que
9 l'unité a été créée ces jours-là, et je crois que la cérémonie c'était à
10 l'occasion de la date de création de cette unité.
11 Q. Point suivant, qui concerne les intercalaires 82 et 83. Inutile de le
12 regarder. Ils portent tous les deux la date de la mi-avril 1999, on parle
13 des déplacements de civils. La pièce 234 nous l'a montré, c'est Neill
14 Wright, du Haut commissariat réfugié; est-ce que vous avez accepté l'idée
15 que, lorsque arrive la date du 5 avril, quand on prenait le total des
16 réfugiés, cela donnait 400 000 personnes ? Acceptez-vous ce chiffre ?
17 R. Je ne peux pas dire si c'est bien ce chiffre-là. Il est certain que
18 vers ces dates il y a eu des déplacements importants de civils et un bon
19 nombre de civils ont quitté le Kosovo et Metohija. Au quotidien, le MUP
20 était informé du nombre de personnes ayant traversé la frontière, et mes
21 souvenirs s'agissant de ce chiffre de 800 000 au total, donc au total des
22 personnes qui ont quitté le Kosovo et Metohija pendant la guerre. Jusqu'à
23 cette date-là, je n'ai pas souvenance du chiffre exact, mais il se peut que
24 ce chiffre soit réaliste.
25 Q. Ce que je laisse entendre c'est que, notamment, au 82 et au 83, ce sont
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1 des intercalaires qui montrent des documents qui ont été créés pour
2 dissimuler ce qui s'était passé, et que c'était quelque chose destinée à
3 faire uniquement cela, une fois que les gens étaient déjà partis.
4 R. Je ne sais pas quelles ont été les dates des ordres, mais je veux bien
5 croire que cela a été celle-là. Ce que j'affirme, c'est ce que j'ai affirmé
6 jusqu'à présent; les administrations de toutes les Unités de la Police et
7 même de l'Armée, pour autant que je m'en souvienne, ont été préoccupées
8 par ce fait et ont tout fait aux fins de faire mettre un terme à ces
9 déplacements de civils; par tous les moyens, excepté l'usage de la force.
10 Je vais vous dire qu'après le début des bombardements de l'OTAN, cette
11 question a constitué un gros problème au quotidien, mais il n'y avait pas
12 de moyens de faire mettre un terme à ces déplacements civils --
13 Q. Lorsque vous --
14 R. -- mis à part le recours à la force, mais cela constituerait également
15 un crime.
16 Q. Pièce 144, intercalaire 3. Cela doit être l'intercalaire 4. Excusez-
17 moi, nous n'avons pas de traduction. Classeur 4.
18 M. NICE : [interprétation] C'est difficile de m'occuper de ce document.
19 J'avais peu de ressources et je n'ai pas pu obtenir une traduction. Ce
20 n'était pas sûr qu'il n'ait pas été déjà traduit.
21 Q. Prenez quelques phrases, vous verrez ce dont il s'agit. Dites-
22 nous, en une phrase, ce dont il s'agit.
23 R. Je pense que nous avons déjà cité en partie ce document-ci, et
24 l'intitulé même nous montre bien de quoi il s'agit.
25 Q. Oui ?
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1 R. Ce "QG opérationnel entre secteurs pour contrecarrer le terrorisme,"
2 cela ne me dit pas grand-chose. Mais les noms des personnes me disent que
3 la composition est adéquate pour ce type de réunion.
4 Q. C'est l'accusé qui a convoqué cette réunion ?
5 R. Je pourrais dire que cela me semble logique, mais la réunion a été
6 convoquée par le ministre de l'Intérieur et non pas le président de la RFY.
7 Q. Nous voyons que, vraiment, on a tout le sommet de la hiérarchie, civile
8 et politique est là, militaire aussi, police; Djordjevic, Milosevic, tout
9 le monde y est.
10 R. On voit qui sont les personnes présentes, en effet.
11 Q. Qu'est-ce qu'il y a eu comme proposition à l'issue de la réunion ?
12 R. Je dois me rafraîchir la mémoire. En effet, les conclusions figurent en
13 dernière page.
14 Q. "Poursuite de l'existence du commandement conjoint." Est-ce que cela
15 est une des propositions faites à l'issue de la réunion ?
16 R. Oui. Je crois en avoir donné lecture. Il y a eu une conclusion de ce
17 type, mais j'ai dit qu'elles étaient les conclusions du commandement
18 conjoint, tel que je l'ai expliqué.
19 Q. Y a-t-il d'autres documents montrant qu'il y a eu ce genre de réunions,
20 comme le prouve celui-ci ?
21 R. En ce moment-ci, je n'ai pas connaissance d'autres documents qui
22 existeraient au sujet de cette réunion-ci.
23 Q. Je devrai présenter ce document, une fois traduit, par un autre témoin.
24 Vous avez été promu général par l'accusé ?
25 R. Oui. J'ai été promu au rang de général par le président de la
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1 République de Serbie. Cela se trouvait être conforme à la loi.
2 Q. On estimait que la police était très bien payée par rapport à l'armée ?
3 R. Les renseignements dont je disposais, je ne pourrais pas vous les
4 communiquer. J'ai eu l'impression que la police à l'époque était payée de
5 façon appropriée ou conforme aux problèmes auxquels elle devait faire face.
6 S'agissant maintenant du rapport entre les salaires de la police et de
7 l'armée, je ne suis pas très sûr de pouvoir en parler.
8 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Est-ce que c'était là l'objet de
9 votre question ? Est-ce que vous vouliez avoir comme réponse le fait que la
10 police était mieux payée que l'armée ?
11 M. NICE : [interprétation] Oui, c'est là-dessus que portait ma question.
12 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je crois avoir lu un passage où il dit,
13 Ne dites pas à l'armée, parce que l'armée est moins bien payée. Mais pour
14 le moment, je ne me rappelle pas du numéro de l'intercalaire.
15 Vous vous en souvenez, mon Général ?
16 LE TÉMOIN : [interprétation] Il est un fait qui l'indique, mais il ne
17 s'agit pas de salaires. Il s'agit d'indemnités pendant le séjour au Kosovo
18 et étant donné que ces indemnités se trouvaient être aménagées par des
19 Réglementations différentes, il est vrai de dire que la police avait des
20 indemnités journalières pour avoir à travailler à l'extérieur du siège de
21 leur propre unité, unité d'origine.
22 M. NICE : [interprétation]
23 Q. Des grades ont été attribués, en partie, parce que Badza le voulait,
24 mais aussi parce que ceci traduisait l'évolution, la militarisation extrême
25 de la police, des forces de l'ordre dont vous faisiez partie ?
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1 R. Laissez-moi dire d'abord qu'il ne s'agisse pas là de grades militaires.
2 On peut parler de grades qui s'appellent de façon analogue à ceux de
3 l'armée. Mais, il y a une loi régissant les grades des membres de la
4 police. Peut-être la loi s'appelle-t-elle autrement, mais il ne s'agit pas
5 de grades militaires. On peut parler d'appellations ou de termes utilisés
6 pour les grades dans la police qui ressemblent à des grades dans l'armée.
7 Je crois avoir expliqué dans le détail, me semble-t-il, que le fait d'avoir
8 des grades ne signifie pas qu'il y a militarisation, parce que le grade
9 n'est pas source de droits, de compétences, et d'attributions. C'est le
10 poste qui l'est. C'est l'emploi où on intervient qui l'est, et le grade
11 montre les années d'ancienneté, les années d'expérience --
12 Q. Je vous demande de vous arrêter un instant. Un point d'histoire : la
13 Cour constitutionnelle de Serbie, a-t-elle décidé par la suite que l'acte
14 de l'accusé, en préparant une échelle de grades pour la police, avait agi
15 de façon anticonstitutionnelle ?
16 R. Disons d'abord que certaines dispositions de cette loi ont été
17 déclarées comme étant anticonstitutionnelles. Je ne pouvais pas dire que le
18 président de la Serbie a promulgué des lois. On sait fort bien qui est-ce
19 qui promulgue les lois.
20 Q. Quelques autres points, puis j'aborderai un sujet assez brièvement, car
21 il nous faut revenir à ce sujet. Simple question de fait : deux du
22 ministère de l'Intérieur qui se seraient trouvés entre l'accusé et les
23 personnes en dessous de lui, Stojiljkovic et Sokolovic, tous les deux se
24 sont suicidés, n'est-ce pas ?
25 R. C'est exact.
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1 Q. Autres points de fait, après que ces guerres se soient terminées, vous,
2 Djordjevic et Lukic, vous avez tous bénéficié des mêmes distinctions qui
3 vous ont été attribuées par l'accusé, n'est-ce pas ?
4 R. Je ne pense pas que cela se soit passé d'une façon identique --
5 Q. [aucune interprétation]
6 R. -- mais il y a un millier de policiers dans ce cas.
7 Q. A l'ordre du drapeau yougoslave de première classe, c'est ce que vous
8 avez reçu comme distinction, n'est-ce pas, vous, Djordjevic et Lukic ?
9 R. Peut-être n'allez-vous pas me croire, mais je ne sais pas comment la
10 distinction s'appelle, en réalité.
11 Q. Les dirigeants pouvaient vous faire une confiance absolue avant --
12 après que vous soyez général et même avant, et Srebrenica en est la preuve.
13 Rappelez-vous, vous, nous nous avez rappelé ce que vous aviez fait à la
14 frontière, et je vous ai laissé entendre que, forcément, vous deviez savoir
15 qui et quoi franchissaient cette frontière. Vous vous souvenez de ce que je
16 vous ai dit ?
17 R. Oui. Je vous l'avais dit, je vous ai répondu, et je vais répondre une
18 fois de plus, que je n'ai rien à voir avec les événements de Srebrenica.
19 S'agissant de ces événements, des unités, auxquelles j'aurai commandé,
20 n'auraient rien à voir avec non plus.
21 Q. Vous avez escorté le Bataillon néerlandais qui partait. Est-ce qu'en
22 route, vous vous souvenez que vous avez été arrêtés par des chars -- ou
23 retardés, plus exactement, par des chars serbes, qui passaient de la
24 Republika Srpska en Serbie même. Vous vous souvenez de cela ?
25 R. Non, cela ne s'est pas produit.
Page 40533
1 Q. Mais il y avait un certain colonel néerlandais qui s'appelait Franken;
2 vous vous souvenez de lui ?
3 R. Je ne me souviens pas d'un officier portant ce nom. Il me semblait
4 qu'il s'agit d'un général. Je n'arrive plus à me souvenir de son nom, mais,
5 si vous essayez de me rafraîchir la mémoire, je vais bien vous le dire.
6 Je me souviens d'un général néerlandais aux cheveux blancs, grande
7 taille. Je crois que je connaissais son nom de famille, mais je n'arrive
8 pas à m'en souvenir, en ce moment.
9 Q. Je me suis sans doute trompé pour ce qui est de son grade. Je ne dis
10 pas qu'il a parlé de ceci dans sa déposition devant les Juges, mais qu'il a
11 vu le départ du Bataillon néerlandais de Bratunac ou de Srebrenica. Il a
12 dit qu'il avait vu des chars qui partaient, et je suppose que vous,
13 forcément, aussi, vous l'avez vu.
14 R. Non, je n'ai pas vu de chars nulle part, je n'en ai vu nulle part, ni
15 jusqu'à Bratunac, ni après Bratunac, et je vous ai dit que Bratunac se
16 trouvait à deux kilomètres et je crois qu'il doit y avoir moins d'un
17 kilomètre du pont sur la Drina. Je n'arrive pas à reconstruire dans ma
18 mémoire la distance, mais je sais que c'est très près.
19 Q. Revenons à un sujet avec quelques questions. Lorsque vous vous êtes
20 trouvé à Bratunac, à ce moment-là, les assassinats étaient pratiquement
21 terminés. Tout était passé et nous l'avons vu par vidéo, c'était à grande
22 échelle, des câbles codés, des télégrammes codés sont passés entre la
23 Yougoslavie et à ses instances à New York, Washington, sans doutes à
24 Belgrade. Vous êtes resté sept jours avant d'être envoyés sur les lieux.
25 Vous devez avoir eu connaissance de la disparition et du sort qui avait
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1 sans doute été réservé à ces Musulmans de Srebrenica.
2 Je vais vous demander maintenant de regarder ces images vidéo.
3 [Diffusion de la cassette vidéo]
4 L'INTERPRÈTE : [Voix sur Voix]
5 "Je voudrais répondre avant."
6 M. NICE : [interprétation] Je crois qu'il faut placer l'écran qui se trouve
7 devant le témoin, de façon à ce qu'il voit les images.
8 Q. Là, nous nous sommes arrêtés, c'est un plan fixe d'un homme barbu.
9 Pourriez-vous nous dire qui cet homme était ou est ?
10 R. Je ne sais vraiment pas, je ne me souviens pas de cet homme.
11 Q. L'homme qui est à sa droite, à notre gauche, et qui porte des lunettes
12 solaires, qui est-ce ?
13 R. Je ne le vois pas suffisamment bien, et je n'arrive pas à le
14 reconnaître.
15 Q. [Aucune interprétation]
16 R. Si vous avez une vue un peu meilleure, peut-être pourrais-je le faire ?
17 Q. Nous allons poursuivre.
18 [Diffusion de cassette vidéo]
19 M. NICE : [interprétation]
20 Q. C'est vous ?
21 R. Oui.
22 [Diffusion de cassette vidéo]
23 M. NICE : [aucune interprétation]
24 [Diffusion de cassette vidéo]
25 M. NICE : [interprétation]
Page 40535
1 Q. C'est le moment où le Bataillon néerlandais est remis par Mladic
2 parce qu'il était gardé en otage par Mladic pendant une semaine ou deux, et
3 c'est le moment où ce bataillon vous est remis. Des milliers des personnes
4 avaient déjà été tuées, Belgrade avait ses informations depuis plus d'une
5 semaine, savait que les choses allaient mal, et c'est le moins qu'on puisse
6 dire.
7 [Diffusion de cassette vidéo]
8 M. NICE : [interprétation]
9 Q. L'homme que nous voyons ici a notre droite, est-ce qu'il est descendu
10 avec vous de Belgrade ?
11 R. Oui. Je le reconnais maintenant. Il s'agit du général Miletici Puzovic.
12 Q. Il appartient à quelle partie du service ?
13 R. Il faisait partie du secteur de la Sécurité publique. Je crois qu'à ce
14 moment-là, il était directeur de l'Administration de la police frontalière.
15 Q. Où est-ce que vous l'avez pris, ou est-ce qu'il est venu tout seul ?
16 R. Non, nous avons voyagé ensemble. Lui et moi avons voyagé ensemble
17 jusqu'à Bratunac, nous avions la même mission.
18 Q. Il devait avoir eu des contacts avec les dirigeants, accès que vous
19 vous aviez aussi, notamment, contact avec Mladic, n'est-ce pas ?
20 R. Cela je ne le sais pas. Je n'ai pas eu accès à Mladic. Mladic se
21 trouvait là-bas, là où nous sommes allés.
22 [Diffusion de cassette vidéo]
23 M. NICE : [interprétation]
24 Q. Cet homme-ci, celui qu'on voit à droite aux cheveux gris ?
25 R. Il faudrait que je voie une fois de plus parce que je n'ai pas eu le
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1 temps de voir
2 Q. Il est venu avec vous ?
3 R. Il faut que je le revoie, je ne me souviens pas de quiconque d'autre à
4 avoir voyagé avec nous.
5 [Diffusion de cassette Vidéo]
6 M. NICE : [interprétation]
7 Q. [aucune interprétation]
8 R. Cet homme là je ne le reconnais pas du tout, vraiment. C'est un homme
9 que je ne connais pas.
10 Q. Vous veniez de Belgrade, et on vous faisait confiance, vous pouviez
11 parler avec Mladic, et est-ce qu'on vous a dit de ne pas lui poser de
12 questions ?
13 R. Non.
14 Q. Vous-mêmes, à ce moment-là, est-ce que vous ne teniez pas à savoir ce
15 qu'il était advenu de ces gens qui manifestement étaient à la merci de
16 Mladic, avec des hollandais qui étaient ses otages depuis plus d'une
17 semaine ? En tant que policier, cela ne vous intéressait pas ?
18 R. Monsieur le Procureur, vous êtes en train de me faire glisser vers une
19 histoire avec laquelle je n'ai rien à voir. C'était une mission assez
20 spécifique parmi tant d'autres qu'on m'a confiée et que j'ai réalisée.
21 Je vais vous rappeler une chose. S'agissant de Srebrenica, des événements
22 de Srebrenica, mes unités ont accueilli 800 combattants de l'ABiH, des
23 combattants musulmans, et il n'a manqué aucun cheveu de la tête de ces
24 combattants, ce qui prouve de quelle façon nous nous sommes comporté à
25 l'égard de quiconque qui aurait essayé de traverser la frontière. Même
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1 lorsqu'il s'agissait de combattants de l'ABiH, il s'agissait là d'une
2 mission concrète qui m'a été confiée par mon supérieur, et il s'agissait de
3 faire passer le Bataillon hollandais en toute sécurité par la Serbie et
4 rien de tout ce que vous êtes en train de me raconter ne m'était connu et
5 je ne pouvais tirer des conclusions de ce type partant des conversations
6 que j'ai eues.
7 Etant donné qu'il s'agissait d'un général du Bataillon hollandais, il était
8 tout à fait normal d'envoyer là-bas quelqu'un du même rang. Bien sûr, il
9 s'agit de la police si on peut comparer ces grades.
10 Q. [aucune interprétation]
11 R. Bien sûr, il s'agit de la police, si on peut comparer ces grades.
12 M. NICE : [interprétation] Inutile de vous importuner davantage si ce n'est
13 pour dire ceci, Messieurs les Juges. Les documents, nous ne savons
14 lorsqu'ils vont arriver et nous aurons, bien sûr, peut-être un suivi au
15 film, c'est tout ce que j'avais à poser comme question au témoin.
16 Est-ce que nous pourrons parler des pièces demain ou après les questions
17 supplémentaires ?
18 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui. Sans doute, après les questions
19 supplémentaires.
20 Nous allons maintenant suspendre l'audience, elle reprendra demain à 9
21 heures.
22 --- L'audience est levée à 13 heures 44 et reprendra le mardi
23 7 juin 2005, à 9 heures 00.
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