Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 Le mardi 29 novembre 2005

2 [Audience sur requêtes]

3 [Audience publique]

4 [L'accusé est introduit dans le prétoire]

5 --- L'audience est ouverte à 9 heures 05.

6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] La Chambre avait prévu de tenir une

7 audience ce matin pour entendre les arguments des parties sur la question

8 de la disjonction de l'acte d'accusation du Kosovo pour permettre de

9 terminer cette partie du procès.

10 Nous allons tout d'abord entendre le Procureur.

11 M. NICE : [interprétation] Nous avons déposé un document tardivement hier

12 après-midi. Je ne sais pas si la Chambre de première instance a eu

13 l'occasion de voir ce document.

14 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Non, Monsieur Nice, je viens de le

15 recevoir, et je n'ai pas pu lire au-delà de la page 2.

16 M. NICE : [interprétation] J'ai procédé aux questions préparation hier et

17 il y a quelques questions qui devaient être amendées, donc, je crois que la

18 version qui vous a été remise est une version qui a été retirée de la

19 circulation. Il y a un document légèrement modifié qui va vous être remis

20 incessamment sous peu, mais, eu égard au contenu, c'est la même chose. Il

21 n'y a pas de modification au niveau de la numérotation des paragraphes.

22 Je demanderais à la Chambre de bien vouloir l'examiner en détail, je n'ai

23 pas l'intention d'aborder ce document dans le détail aujourd'hui, je sais

24 que la Chambre de première instance n'a pas eu l'occasion de lire ce

25 document à l'avance.

26 Je peux résumer notre position telle qu'elle est décrite dans ce document,

27 et peut-être agrémenter cela d'une ou deux observations. L'Accusation

28 s'oppose farouchement à toute disjonction de cet acte d'accusation. Le

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1 Procureur s'oppose également si ceci doit être pris en compte aujourd'hui,

2 à ce qu'un temps supplémentaire soit accordé à cet accusé pour la

3 présentation des moyens à décharge de la Défense de l'accusé, à l'exception

4 d'un cas que j'aborde dans mon document. Le Procureur estime qu'il ne

5 devrait pas y avoir de retard dans les audiences consacrées à la

6 présentation des moyens à charge de la Défense de l'accusé et qu'il ne faut

7 pas que ceci soit retardé à cause de l'état de santé de l'accusé.

8 Concernant ce dernier point, je crois que vous avez obtenu des rapports

9 médicaux, rapports médicaux qui n'ont pas été remis au Procureur. Par

10 conséquent, la position au plan médical est celle qui figure dans les

11 rapports présentés par l'Accusation, et semble indiquer qu'il n'y ait pas

12 de changement particulier de l'état de santé de l'accusé, tel que cela a

13 été mentionné plus tôt.

14 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Pourquoi dites-vous, "semble-t-il",

15 l'état de santé semble-t-il ?

16 M. NICE : [interprétation] Car il y a des antécédents dans ce cas, on ne

17 sait pas si l'accusé a pris comme il fallait les médicaments qui lui ont

18 été prescrits, quelque chose qui a été évoqué dans les écritures récentes

19 et présentées par les experts médicaux. C'est tout ce que je peux dire.

20 L'ordonnance portant calendrier de la Chambre de première instance qui a

21 tenu à convoquer cette audience aujourd'hui a pu mettre en exergue un

22 certain nombre de facteurs, sans pour autant si je puis le permettre, sans

23 pour autant clairement indiquer quelles sont ses préoccupations, en tout

24 cas, les points qu'elle souhaitait que les différentes parties abordent

25 aujourd'hui. Si je puis suggérer le manque de clarté eu égard aux questions

26 auxquelles nous devons répondre est quelque peu malheureux. Est-ce

27 qu'aujourd'hui, nous allons réexaminer la question de la disjonction compte

28 tenu de nouveaux éléments qui étayent l'état de santé de l'accusé ? Est-ce

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1 que nous réexaminons la question de la disjonction de l'acte d'accusation,

2 compte tenu de la manière dont l'accusé a préparé sa défense, ou est-ce

3 qu'il s'agit d'une association des deux, ou autre chose ? A cause de ce

4 manque de certitude dans laquelle nous nous trouvons, nous avons quelques

5 difficultés tel que je le signale dans le document que je vous ai présenté

6 à pouvoir aborder les arguments aujourd'hui. Comme cela avait été prévu

7 dans les arguments que nous avons présentés par écrit l'année dernière déjà

8 ceci est -- il y a eu des débats sur la question, débat peu flatteur et peu

9 utile en ex-Yougoslavie sur les véritables objectifs ici que l'on met en

10 avant pour arguer de la disjonction de l'acte d'accusation. Il semblerait

11 que le Tribunal donc semble vouloir aider les Albanais du Kosovo étant

12 donné qu'il n'y a pas de preuve à l'encontre de l'accusé. Il se peut que la

13 liberté de s'exprimer de la sorte découle de ce manque de clarté et des

14 raisons pour lesquelles nous abordons encore une fois la question de la

15 disjonction de l'acte d'accusation au jour d'aujourd'hui.

16 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Puis-je vous dire, dès le départ,

17 Monsieur Nice, que je considère qu'il s'agit là d'un argument véritablement

18 désagréable et tout à fait désobligeant que vous donniez crédit à quelque

19 chose de la sorte. Cela me surprend énormément.

20 M. NICE : [interprétation] C'est tout à fait le contraire.

21 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Parce que vous venez de dire que

22 l'ordonnance qui a été rendue n'est absolument pas claire. C'est ce que

23 vous venez de dire.

24 M. NICE : [interprétation] Oui, je suis absolument désolé de voir que vous

25 réagissez de la sorte.

26 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais soyez assuré que je réagis de la

27 sorte.

28 M. NICE : [interprétation] La position de l'Accusation est celle-ci

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1 jusqu'au jour d'aujourd'hui. Nous avons -- nous sommes devant un procès. Il

2 s'agit ici d'un homme d'Etat qui est jugé dans ce procès, en tout cas,

3 quelqu'un qui a pris part à ce -- ou qui a été impliqué dans certaines

4 régions de l'ex-Yougoslavie, quelqu'un qui a un état de santé qui n'est pas

5 surprenant pour l'âge qu'il a. Un procès qui par conséquent joue les

6 prolongations. Comme je l'ai dit, ce procès a été prolongé comme il a été

7 prolongé. Il est essentiel de répéter cela de façon à ce que l'opinion

8 publique comprenne bien ce qui se passe et on doit corriger certains

9 éléments à cet égard. L'Accusation ou les éléments présentés à charge par

10 l'Accusation n'ont duré somme toute que sept semaines du temps de cette

11 Chambre de première instance; autrement dit, sept semaines pour chaque acte

12 d'accusation concerné, ce qui ne représente pas un temps trop long.

13 Dans ce laps de temps, car l'Accusation a véritablement usé de ses

14 ressources pour faire valoir l'économie judiciaire lorsqu'elle a présenté

15 ses moyens de preuve, l'Accusation a cité à la barre quelque 195 [comme

16 interprété] témoins, 50 sous forme écrite et donc 352 au total. Avant de

17 parler de la nécessité de prolonger un procès comme celui-ci, en se fondant

18 sur le fait que l'accusé a droit au même temps de préparation et de

19 présentation de ces moyens qu'a eu l'Accusation, pourquoi alors, dans le

20 temps qui lui était imparti, aurait-elle eu l'occasion de citer 200, 300

21 témoins ? Par conséquent, quelle que ce soit la perception qu'on en ait on

22 a l'impression que c'est un procès qui est incroyablement long, peut-être

23 qu'on en vienne même à croire que c'est un procès ingérable. Il faut

24 véritablement regarder ceci de plus près. Le temps utilisé finalement, un

25 temps relativement court étant donné la taille de l'entreprise en question.

26 21 semaines pour l'interrogatoire principal de l'Accusation, pour la

27 présentation de ses moyens. Ceci a été doublé en réalité ce temps par

28 l'accusé. Ce qui représente quelque 42 semaines. Si vous doublez ce chiffre

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1 pour l'Accusation et la Défense ceci représenterait une année au total. En

2 réalité, nous ne parlons pas d'un procès qui doit être décrit comme étant

3 un procès beaucoup trop long.

4 Je vais parler maintenant des caractéristiques de ce procès et du fait que

5 c'est un procès très long. Le fait que l'accusé ne reconnaît pas cette

6 Chambre de première instance quelque chose auquel on doit s'attendre et

7 qu'il cherchait évidemment à -- il a des objectifs qui ne sont pas

8 forcément judiciaires. Ceci avait été prévu déjà lorsqu'il s'agit de procès

9 de ce type. L'approche de l'Accusation à toutes ces difficultés auxquelles

10 doit faire face cette Chambre de première instance, difficultés auxquelles

11 doit faire face un tel homme. Je crois qu'il faut dans les circonstances

12 qui avaient pu être prévues, je crois que cet homme doit pouvoir être jugé

13 et jugé jusqu'à -- on doit pouvoir terminer le procès. Par conséquent, la

14 disjonction de lac a première vue est peut-être à deuxième et troisième

15 vue, je crois que ceci ne me semble pas approprié du tout.

16 Je vais maintenant me référer toujours à mon document et parler d'un

17 paragraphe, du paragraphe suivant. Les paragraphes restent inchangés dans

18 la version en anglais. Je souhaite évoquer cette question, c'est le temps

19 utilisé par l'accusé eu égard au temps qui lui a été accordé. Pour faire

20 valoir l'argument suivant, on ne devrait pas lui accorder un temps

21 supplémentaire, hormis un cas particulier. Vous retrouvez ceci au

22 paragraphe 12 et suivants.

23 Cet accusé a pris des décisions en toute connaissance de cause. Il sait

24 comment utiliser son temps. Il a utilisé son temps pour parler quasiment et

25 exclusivement de la partie Kosovo de cette affaire, ce qui signifie qui lui

26 reste peu de temps pour présenter les éléments à décharge sur les parties

27 concernant la Bosnie et la Croatie dans cette affaire.

28 Cette Chambre lui a dit à maintes reprises de façon tout à fait équitable

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1 que c'est à lui de juger de l'utilisation de son temps, qu'il ne doit pas

2 s'attendre à une prolongation des délais. Dans ces circonstances là cet

3 accusé peut-être, nous sommes ici aux paragraphes 14 et 15, donc, ce qui

4 semble maintenant poser problème par rapport aux éléments de preuve

5 présentés dans le cadre de la Bosnie et de la Croatie. Il faut traiter cet

6 accusé comme si c'était un homme qui a pris les décisions en toute

7 connaissance de cause, comme s'il n'avait pas l'intention de présenter des

8 moyens à décharge concernant ces deux parties là de cette affaire. Il n'a

9 absolument pas tenu compte des ordonnances rendues par la Chambre,

10 pardonnez-moi, Monsieur le Juge.

11 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Pourquoi parlez-vous de la prorogation

12 des délais. J'ai regardé l'ordonnance qui a convoqué cette audience. Nous

13 n'avons parlé que de question santé dans cette ordonnance. Vous savez

14 pertinemment bien que le problème qui doit être résolu aujourd'hui est

15 celui-ci, nous avons parlé simplement du temps de repos dont a besoin

16 l'accusé. C'est la raison pour laquelle cette ordonnance a été rendue. Ou

17 trouve t-on cette demande de prorogation des délais ?

18 M. NICE : [interprétation] Il n'y en a pas eu.

19 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Est-ce que c'est simplement maintenant

20 vous réagissez par rapport à ce qu'a dit la presse serbe, et c'est cette

21 question là maintenant que vous souhaitez soulever devant la Chambre ou

22 est-ce qu'il s'agit véritablement de questions qui doivent être abordées

23 par la Chambre de première instance ?

24 M. NICE : [interprétation] Page 3 de l'ordonnance portant calendrier que

25 vous avez rendue, Messieurs Juges, indique que la présentation des moyens à

26 décharge représente quelque 75 % de son temps et 360 heures pour présenter

27 ses moyens et l'interrogatoire principal. L'accusé n'a pour l'instant

28 simplement parlé que des questions relatives au Kosovo et la fin de la

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1 présentation des moyens à décharge, étant donné qu'aucun temps

2 supplémentaire, qui lui a été accordé, étant donné que nous n'avons pas non

3 plus tenu compte du temps perdu, dû à ces questions de santé. Le temps pour

4 conclure les moyens de présentation à décharge est maintenant a été fixé au

5 mois de mars 2006. Il semble que cette question ait été abordée dans cette

6 ordonnance portant calendrier.

7 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Quelque chose que les Juges de la

8 Chambre doivent faire et que le Procureur ne doit pas faire, et de voir --

9 de garder un esprit ouvert. Je crois qu'il serait absurde que la Chambre de

10 première instance pose le genre de question que celle que vous venez de

11 poser dans la première page de votre argument. Mais, ayant déjà entendu ou

12 tenu compte de la demande de prorogation de délai, étant donné qu'il y a

13 déjà eu une perte de temps et compte tenu du fait qu'il y aurait davantage

14 de temps perdu, cela n'a aucun sens de présenter des questions qui

15 pourraient avoir être pertinentes à l'avenir. Ce qui me préoccupe

16 aujourd'hui, c'est la question qui porte sur l'ajournement du procès en

17 raison de l'état de santé de l'accusé.

18 M. NICE : [interprétation] Si la seule préoccupation des Juges de la

19 Chambre porte sur l'état de santé de l'accusé parce que le calendrier qui

20 avait été prévu à l'origine à quelque chose auquel il faut se tenir. Mais

21 je dois dire qu'à la lecture de l'ordonnance portant calendrier, tel que je

22 viens de vous citer, il m'est apparu clairement et cela semblait être une

23 situation qui pourrait se produire, que ceci pourrait avoir une incidence

24 sur le déroulement futur du procès et qu'il y aurait peut-être -- nous

25 serons, peut-être obligés ou peut-être qu'il serait nécessaire de lui

26 accorder une prorogation de délai à la manière dont la Chambre et l'accusé

27 ont clairement déjà abordé ce sujet, à savoir que l'accusé a dit qu'il

28 manquait de temps, qu'il en fait part aux Juges de la Chambre.

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1 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] La question qui est celle qui est

2 abordée aujourd'hui, c'est celle de la disjonction de l'acte d'accusation.

3 Donc, je ne vois pas en quoi ce manque de temps est une incidence là-

4 dessus.

5 M. NICE : [interprétation] Si les Juges de la Chambre estiment que cette

6 question-là n'a aucune incidence sur la question de la disjonction de

7 l'acte d'accusation et, donc, si vous estimez que c'est le cas et que cela

8 n'a aucune incidence, je passerais directement aux questions de l'état de

9 santé de l'accusé.

10 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je ne vois pas comment, si le procès

11 doit se dérouler normalement, je ne vois en quoi la question de la

12 disjonction de l'acte d'accusation pourrait poser problème.

13 M. NICE : [interprétation] Je reviendrai peut-être, si on me pose davantage

14 de questions là-dessus si, Messieurs les Juges, vous souhaitez me poser

15 d'autres questions là-dessus. Mais je souhaite être tout à fait clair là-

16 dessus en traitant la question comme je l'ai fait, j'essayais de - et

17 j'espère que je réussirai à le faire - de couvrir toutes les difficultés

18 éventuelles qui pourraient surgir à l'avenir et qui pourraient inciter les

19 Juges de la Chambre à prendre certaines décisions dans ce procès. La

20 question qui pourrait surgir est celle du temps utilisé par l'accusé. Je

21 pense que ceci pourrait être un facteur important à l'avenir, mais, si nous

22 pouvons passer à autre chose, en tout cas, pour l'instant, à ce moment-là,

23 je suis tout à fait disposé à le faire. Je répète simplement, je souhaitais

24 simplement réitérer la position de l'Accusation et l'Accusation estime

25 qu'il ne faut pas accorder un temps nécessaire à l'accusé, étant donné le

26 comportement qui est le sien. Je souhaite vous parler simplement d'un dépôt

27 d'écriture puisque des motifs ont été évoqués pour ce temps supplémentaire,

28 paragraphe 21, 24 et 27 du dépôt de notre écriture. Je ne souhaite pas en

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1 parler à ce stade.

2 Bien. Si nous décidons d'aborder la question, la disjonction de l'acte

3 d'accusation de façon générale et si cela a une incidence, si incidence il

4 y a sur l'état de santé actuelle de l'accusé, nous sommes aidés en ceci, et

5 beaucoup aidés par la décision rendue par la Chambre d'appel, le 1er

6 novembre 2004, sur la commission d'office d'un conseil de la Défense pour

7 l'accusé. Puis-je ajouter à cette décision dont je viens de citer certains

8 extraits qui figurent dans notre écriture ? Je souhaite faire référence à

9 une ou deux autres extraits de cette décision. La Chambre d'appel a noté,

10 bien évidemment, qu'il y a un droit -- que l'accusé à le droit d'assurer sa

11 propre défense et a clairement indiqué que le droit d'assurer sa propre

12 défense est un droit ou en tout cas cela peut être décidé ainsi, à savoir

13 si le droit d'assurer sa propre défense peut être limité si c'est -- ceci

14 pose obstacle et gêne le déroulement normal du procès. Dans ces

15 circonstances-là, la Chambre peut décider de limiter les droits de l'accusé

16 en la matière.

17 Ensuite, aux paragraphes 13 et 14, ces observations ont été faites. Je cite

18 13, peut-être; 14, on parle de la possibilité de cette éventualité-là. On

19 peut parler d'un état de santé qui va de mal en pis. "Comment peut-on

20 traiter un accusé lorsqu'il s'agit de tenir compte d'un état de santé d'un

21 accusé qui déjà dans la vie quotidienne a du mal, mais qui a des

22 difficultés lors d'un procès où il faut être particulièrement résistant, et

23 les nuits tardives, les contre-interrogatoires qui génèrent beaucoup de

24 stress et différentes confrontations, celles d'endurances." Évidemment,

25 ceci doit réduire le temps imparti à l'accusé est passé d'un à deux jours.

26 La Chambre d'appel parle ici d'une question tout à fait théorique. Mais la

27 Chambre est autorisée à relâcher l'accusé et permettre, à ce moment-là, au

28 procès de conclure. D'après la Chambre d'appel, la question que l'on peut -

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1 - la Chambre d'appel répond à cette question.

2 Au paragraphe 15, on parle de deux conditions ici, à savoir, décision

3 de la Chambre telle qu'elle a été infirmée, mais une partie a été affirmée,

4 une partie a été confirmée. "Il y avait une base légitime pour que la

5 Chambre de première instance estime que le procès pourrait durer pour un

6 temps indéterminé ou pourrait, peut-être, ne pas se terminer si Milosevic

7 serait autorisé à assurer sa propre défense. Étant donné cette conclusion-

8 là, la Chambre de première instance avait le pouvoir discrétionnaire de

9 nommer un conseil, nonobstant, l'opposition de l'accusé."

10 Au paragraphe 17, il est dit : "Que toutes restrictions, imposées aux

11 droits de Milosevic de se défendre lui-même, doivent être limitées au

12 minimum nécessaire aux fins de protéger les intérêts du Tribunal et

13 s'assurer que ce procès puisse se dérouler de façon relativement rapide."

14 Egalement, on parle : "De limites imposées à un droit fondamental. Ceci

15 doit clairement tenir compte d'un objectif bien clair."

16 Au paragraphe 18, peut-être qu'il s'agit évidemment d'un point important.

17 La Chambre d'appel remarque que lorsque la décision a été prise par la

18 Chambre de première instance que la conclusion en vertu de quoi la Chambre

19 de première instance a imposé des limités trop importantes sur le droit de

20 la Défense de l'accusé étaient pour trois raisons car les rapports médicaux

21 se sont clairement fondés sur le fait que l'état de santé de l'accusé est

22 un état permanent.

23 Deuxièmement, Milosevic ne semblait pas avoir souffert de problèmes de

24 santé depuis le mois de juillet.

25 Ensuite ceci, troisième point, Milosevic a mené, a clairement fait de

26 déclarations liminaires pendant deux jours sans difficultés.

27 Au paragraphe 19, la Chambre d'appel insiste là-dessus, la Chambre de

28 première instance s'est reposée sur l'état de santé de l'accusé à ce stade-

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1 là pour justifier de ce qui semblait être "une simple présomption" compte

2 tenu de la décision de la Chambre d'appel et compte tenu du fait que

3 Milosevic doit continuer à mener sa défense.

4 Le paragraphe cité dans notre conclusion : "Si tout va bien, la Chambre

5 devrait continuer à mener ses audiences comme elle l'a fait lorsque

6 l'accusé était en bonne santé."

7 Un peu plus loin, nous lisons : "Si Milosevic a des problèmes de santé,

8 nous en traiterons volontiers, mais la présence d'un conseil nommé d'office

9 permettra au procès de se poursuivre même en cas d'incapacité temporaire de

10 Milosevic à participer."

11 Je reviens maintenant à ce qui a été dit au départ, à savoir que, sur le

12 plan médical - et il s'agit de l'avis des médecins qui ont été appelés par

13 la Chambre pour donner leur avis - donc, sur la base de la lecture de leur

14 avis, il n'y a rien qui permette de changer de position fondamentalement,

15 en tout cas pour des raisons médicales. Cependant, l'accusé s'est présenté,

16 il y a une semaine à peu près, pour nous dire qu'il n'avait pas l'intention

17 de continuer dans les mêmes conditions et qu'il préfèrerait demander un

18 report d'audience, un délai dans l'affaire. Il a argué de son incapacité à

19 participer aux débats et cherchait l'avis d'experts, de médecins pour

20 confirmer ses dires, mais manifestement, il était tout à fait apte à

21 participer à l'époque. Il n'était pas dans le même état de santé que celui

22 qui a été examiné par la Chambre d'appel, donc les modalités imposées par

23 la Chambre précédemment pourraient être modifiées.

24 J'appelle votre attention sur ce thème, bien entendu, en tenant compte de

25 l'avis médical rendu récemment. La Chambre d'appel a usé de son droit

26 discrétionnaire, comme cela peut être le cas de la présente Chambre de

27 première instance d'ailleurs, en tout cas c'est l'avis de l'Accusation,

28 pour évoquer les modifications de circonstances pour la Défense dues à

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1 l'incapacité de comparaître pour raisons médicales de l'accusé, elle a

2 estimé que ceci était un argument valable et qu'il était possible de rendre

3 une conclusion temporaire en l'espèce.

4 Compte tenu du changement de ces conditions, de ces circonstances, la

5 Chambre de première instance pourra se reporter au paragraphe 20 de l'arrêt

6 de la Chambre d'appel qui envisage de confier à un conseil commis d'office

7 la Défense de l'accusé au cas où il serait temporairement incapable de

8 participer au débat. Je sais que des échanges d'écritures ont eu lieu sur

9 ce sujet depuis le mois de mai de l'année dernière, échanges d'écritures au

10 cours desquelles les positions juridiques sur la commission d'un conseil

11 d'office ont été discutées.

12 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Nice, il était question de

13 changer les circonstances temporaires, mais pas de façon permanentes dans

14 ces écritures. Le cas qui était examiné, c'était par ailleurs la situation

15 dans laquelle : "L'accusé serait temporairement incapable de participer au

16 débat," et pas la situation dans laquelle l'accusé se verrait rendu

17 incapable d'assurer sa défense.

18 En tout état de cause, la question dont nous discutons aujourd'hui

19 s'est posée il y a une ou deux semaines, il convient de répondre à la

20 question suivante : que se passera-t-il ? Comment répondrons-nous à cette

21 question au cas où l'accusé n'est plus apte à être présent physiquement

22 dans cette salle ?

23 M. NICE : [interprétation] C'est ce que j'avais à l'esprit lorsque j'ai

24 appelé votre attention, il y a quelques instants, sur un passage de l'arrêt

25 de la Chambre d'appel où il était apporté une réponse à la question

26 rhétorique de savoir ce qui se passerait si le procès pouvait être réduit

27 d'un jour, d'une semaine ou d'un mois. Je pense que poser la question

28 consiste à y répondre.

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1 Si nous en arrivons à une situation où l'accusé ne sera plus apte à

2 comparaître au cours du procès, et je pense que c'est un minimum, pour une

3 durée disons trois jours par semaine, il conviendra de changer les

4 conditions judiciaires de sa comparution de façon à lui éviter les

5 conséquences nocives de son mauvais état de santé tout en -- et donc cela

6 passera par une réduction de la durée de sa présence dans le prétoire

7 chaque semaine, mais ce avec une participation plus active, plus importante

8 du conseil qui lui a été affecté.

9 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Une autre façon de répondre à ce

10 problème pourrait être de disjoindre la partie Kosovo de l'affaire des

11 autres volets, puisque le volet Kosovo est pratiquement achevé. Cela

12 permettrait à l'accusé de se remettre sur le plan physique pour ensuite

13 participer au reste de son procès, si vous estimez que cela peut se faire

14 une fois que le volet Kosovo aura été terminé.

15 M. NICE : [interprétation] Rien de substantiel, rien de positif ne permet

16 de penser que l'accusé pourra se remettre physiquement dans les conditions

17 qui viennent d'être évoquées. Bien entendu, nous ne savons pas ce qu'il en

18 est exactement car il faut que nous ayons des éléments médicaux plus

19 détaillés, plus approfondis pour en juger de façon plus sûre. Nous ne

20 savons pas s'il a été entièrement établi que le régime médical qui lui est

21 imposé peut permettre d'améliorer son état de santé, mais rien pour

22 l'instant ne permet de penser le contraire ni, d'ailleurs, d'affirmer que

23 ce sera bel et bien le cas.

24 Je ne puis vous aider, Monsieur le Président, Messieurs les Juges,

25 quant à savoir si le procès pourra se poursuivre sans avoir de réponse à

26 cette question. Donc j'en reviens à ma première observation, à savoir que

27 l'Accusation est totalement contre une disjonction d'actes d'accusation,

28 bien entendu, cela irait à l'encontre de l'examen approprié des volets

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1 Bosnie et Croatie du procès. Une décision définitive doit être rendue à la

2 matière.

3 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Bien, voyez-vous, nous sommes à peu

4 près du même avis, me semble-t-il, Monsieur Nice, si nous partons du

5 principe que ce n'est pas à l'Accusation de décider de l'avenir d'un

6 procès. Il faut que les décisions se prennent au fur et à mesure et vous

7 n'avez absolument aucun élément sur lequel vous pouvez vous fonder pour ce

8 faire au jour d'aujourd'hui.

9 M. NICE : [interprétation] Bien, soyons clair --

10 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Il s'agirait ici d'un exercice qui

11 serait plutôt de nature politique.

12 M. NICE : [interprétation] Disons les choses clairement : si la Chambre

13 évoque une possibilité, à savoir que suite à une éventuelle condamnation

14 dans le volet Kosovo de l'affaire, l'Accusation pourrait poursuivre en

15 abordant les volets Croatie et Bosnie du procès, bien, je tiens à être

16 absolument clair en vous disant que la tâche de l'Accusation prévoit un

17 devoir à l'égard des victimes, et qu'il ne fait aucun doute que dans des

18 conditions aussi graves que celles qui font l'objet des accusations portées

19 contre l'accusé dans la présente affaire où il est notamment question de

20 génocide par rapport à Srebrenica, l'Accusation estime que c'est un de ses

21 devoirs fondamentaux dans des procès de ce genre.

22 Si je puis me permettre de le dire, une question demeure à l'esprit de

23 tous, à savoir que l'Accusation admet quels sont ses devoirs. L'Accusation

24 est représentée par un être humain qui assume ses responsabilités au plus

25 haut point. Nous avons fait venir des centaines de témoins dont la famille,

26 dont les amis ont souffert suite à des crimes de la plus grave importance

27 commis par l'homme qui se trouve ici et par d'autres. Il n'est pas question

28 de poursuivre l'affaire à tout prix aux dépens de ce principe qui est

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1 capital et pour aller plus vite uniquement. Si ces affaires ne sont pas

2 jugées en donnant lieu à condamnation dans de bonnes conditions, il faudra

3 en voir le résultat d'autres volontés que celles de l'Accusation. Je tiens

4 à répéter cela de la façon la plus claire qui soit.

5 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Nice, il y a ici une Chambre

6 qui juge des personnes, mais ces personnes peuvent être condamnées tout

7 comme acquittées, et la présomption que vous faites d'une condamnation au

8 départ est quelque chose qui n'est pas digne de vous.

9 M. NICE : [interprétation] Je ne faisais pas cette présomption Monsieur le

10 Juge. Je l'exprimais, je l'évoquais en tant que possibilité uniquement.

11 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Vous avez dit : "Si des affaires comme

12 celles-ci ne sont pas jugées en donnant lieu à condamnation, mais vous

13 parlez également d'un accusé qui pourrait éventuellement ne pas être en

14 capacité physique de suivre les débats." Vous dites ensuite que : "La

15 décision définitive ne sera pas, dans ce cas, le fait de l'Accusation." Je

16 trouve cette expression absolument insupportable.

17 M. NICE : [interprétation] C'était peut-être un lapsus, de ma part. Je

18 pensais que vous parliez à ce qui a été dit de l'aspect Kosovo de

19 l'affaire. Ce que je voulais dire, je vous prie de bien le comprendre,

20 c'est si cette affaire n'était pas "jugée jusqu'à son terme," bien entendu,

21 je pense au terme et pas à la condamnation.

22 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci pour cette correction.

23 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Nice, je crois comprendre -

24 -

25 M. NICE : [interprétation] Manifestement, c'est ce que j'avais à l'esprit.

26 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je comprends ce que vous dites.

27 Indépendamment de la conclusion de l'aspect Kosovo de l'affaire, s'il y

28 avait disjonction, le Procureur serait déterminé à poursuivre avec les

Page 46655

1 autres volets du procès.

2 M. NICE : [interprétation] Absolument. Il ne fait aucun doute qu'aucun de

3 ces aspects du procès ne doit être abandonné. Bien sûr, il y a une

4 possibilité pour moi de répondre à ce que vient de dire, M. le Juge Bonomy

5 à savoir que si l'accusé devait être acquitté, cette décision

6 d'acquittement aurait ou risquerait d'avoir un effet de diffusion sur les

7 autres volets du procès. C'est la raison pour laquelle l'Accusation

8 réfléchit beaucoup à la question. Nous ne sommes pas ici dans la même

9 situation que celle où il convient simplement de se prononcer sur la

10 nécessité ou pas de poursuivre avec les charges existantes. Manifestement,

11 la situation est assez unique et il faut qu'il y ait changement dans cette

12 situation. C'est tout.

13 Avant de parler de l'état de santé de l'accusé et des arguments qu'il

14 avance en faveur d'une disjonction et compte tenu des débats qui ont eu

15 lieu à plusieurs reprises à l'instigation de l'accusé sur ce point, il faut

16 tenir compte du nombre assez limité de jours qui constitue le temps qui

17 reste à la Défense. Il y a aussi une autre raison pour laquelle nous

18 abordons cette question aujourd'hui, c'est que, si je comprends bien, nous

19 partons du principe et ce n'est qu'un principe que la Chambre n'accordera

20 pas un délai supplémentaire à la Défense jusqu'à, mettons mars, l'année

21 prochaine.

22 En tout cas qu'au mois de mars, la présentation des éléments de la

23 Défense devrait être terminée si les audiences reprennent et que ces

24 éléments de la Défense auront été présentés pour les trois volets de l'acte

25 d'accusation. Il est possible, à ce moment-là, qu'il y ait réplique ou

26 duplique, mais fondamentalement, les éléments de preuve relatifs aux trois

27 parties de l'acte d'accusation auront été présentés de façon définitive de

28 la part de la Défense au mois de mars de l'année prochaine. Disjoindre en

Page 46656

1 fonction de l'état de santé de l'accusé parce qu'on pense qu'il ne sera

2 plus capable de siéger jusqu'à la fin du volet Kosovo, nous donne encore

3 pas mal de temps jusqu'au mois de mars. Je pense qu'en tout état de cause,

4 le temps nécessaire est disponible et, avec le respect que je dois à la

5 Chambre, je dirais qu'il serait tout à fait injuste d'enlever, à la

6 présente Chambre de première instance, la possibilité de prononcer un

7 jugement dans les volets Croatie et Bosnie du procès, simplement parce que

8 l'accusé n'a pas la capacité de continuer à comparaître jusqu'à la fin de

9 la présentation des éléments relatifs au Kosovo.

10 J'aimerais maintenant aborder la question de la disjonction d'actes

11 d'accusation de façon plus générale en m'appuyant sur le paragraphe 42 et

12 sur l'annexe numéro 1 ou 2 qui l'accompagne.

13 Bien sûr, la Chambre se penchera sur mes arguments de façon plus

14 approfondie ultérieurement, mais j'aimerais rappeler ce qu'a dit la Chambre

15 d'appel lorsqu'elle a traité de cette question de la disjonction d'actes

16 d'accusation en avril 2002, déjà.

17 Paragraphes 30 et 31 de l'arrêt de la Chambre d'appel. Je

18 cite :

19 "Tout préjudice éventuel à l'égard de l'accusé au cas où il aurait à

20 faire face à un seul procès, la Chambre d'appel n'en voit aucun pour le

21 moment, serait totalement inférieur au fait qu'un corps important

22 d'éléments de preuve pertinents s'agissant des actes et du comportement de

23 l'accusé en Croatie et en Bosnie a également sa part dans la sentence qui

24 sera rendue à l'égard du Kosovo."

25 Un peu plus loin, nous lisons, je cite : "S'il doit y avoir deux procès

26 distincts, il y aura évidemment un corps d'éléments de preuve plus

27 important dont une partie sera reprise d'un volet du procès à l'autre."

28 Au paragraphe 31, la réflexion va encore plus loin lorsque nous lisons ce

Page 46657

1 qui suit, je cite :

2 "Toute parole ou comportement de l'accusé qui permet d'indiquer

3 l'existence d'un état d'esprit particulier de sa part et pertinent par

4 rapport à la nécessité de prouver l'existence de cet état d'esprit, de

5 cette intention. Il importe peu que les mots ou le comportement en question

6 aient eu lieu avant la période des crimes qui font l'objet des charges

7 retenues contre l'accusé ou après cette période pour peu que ces mots et ce

8 comportement fassent partie des éléments de preuve apportés à la Chambre et

9 aient été considérés comme admissibles. L'Accusation aura le droit d'arguer

10 de ces arguments à titre de preuves dans le volet Kosovo du procès et, le

11 cas échéant, dans les volets Croatie et Bosnie également. La répétition de

12 la présentation de ces éléments de preuve risquent de faire perdre un temps

13 important sans intérêt notoire pour la Chambre."

14 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] J'ai deux questions à ce sujet,

15 Monsieur Nice.

16 Première question : est-ce que vous êtes en train de dire que la

17 première proposition que vous avez citée s'est vue matérialiser et qu'il

18 existe un corps, un corpus d'éléments de preuve pertinents qui est

19 important par rapport aux actes et comportements de l'accusé en Croatie et

20 Bosnie qui auraient sa pertinence pour le volet Kosovo de l'affaire.

21 M. NICE : [interprétation] Si vous me le permettez, Monsieur le Juge

22 --

23 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Parce qu'en fait, c'est ce qui a

24 été dit dans cette phrase.

25 M. NICE : [interprétation] Oui. Si vous voulez avoir l'amabilité de

26 vous pencher sur des écritures qui, j'espère, vous ont été distribuées. Il

27 s'agit de l'Annexe B. Dans le temps disponible, nous aimerions examiner de

28 plus près ce document qui est confidentiel, je le rappelle. Cependant, en

Page 46658

1 Annexe B, vous trouverez la liste de tout ce qui a permis une analyse

2 exhaustive de la situation du point de vue temps. Nous nous efforçons de

3 tenir compte du temps qui a été imparti à chacun des témoins et à toutes

4 les personnes entendues.

5 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] C'est très utile effectivement.

6 Mais ma deuxième question est la suivante : nous sommes certainement

7 maintenant un peu plus loin que l'endroit où nous étions au moment de

8 l'arrêt de la Chambre d'appel parce que les éléments de preuve ont été

9 présentés et il n'y en a pas eu qui ont été présentés deux fois. Vérifiez.

10 M. NICE : [aucune interprétation]

11 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Est-ce que c'est exact ou pas ?

12 M. NICE : [interprétation] C'est très certainement exact. Nous avons

13 entendu les éléments de preuve et il est exact qu'il n'y en pas qui ait été

14 présenté deux fois, une fois dans le cadre Kosovo et une fois dans le cadre

15 Croatie, Bosnie. Mais si un élément de preuve pourrait avoir une

16 importance, une pertinence dans le volet Kosovo de l'affaire, alors, la

17 conséquence c'est : soit premièrement, qu'il faut accorder un certain délai

18 à l'accusé et ce dans des conditions bien particulières. Donc, on en

19 revient aux problèmes de l'extension de délais à accorder à l'accusé et

20 dont il faudra bien discuter concrètement; ou bien, une deuxième

21 possibilité, la Chambre pourrait essayer de faire l'impossible, c'est-à-

22 dire, de mettre de côté dans son esprit, les Juges de la Chambre devraient

23 mettre de côté dans leur esprit tout ce qui concerne le Kosovo dans les

24 éléments de preuve pour se pencher uniquement sur ceux qui ne concerne pas

25 le Kosovo dans les volets suivants de l'affaire.

26 Une fois que nous avons cela à l'esprit et nonobstant l'arrêt de la

27 Chambre d'appel au sujet de la jonction des actes d'accusation, la Chambre

28 pourrait vouloir se pencher sur un paragraphe particulier des écritures que

Page 46659

1 je viens de distribuer où je cite une affaire anglaise récente, Cohen et

2 Autres, connue également comme l'affaire de la Flèche bleue, un juge qui

3 siégeait à la Chambre chargée de cette affaire a dit vers la fin du procès,

4 il convenait de disjoindre les actes d'accusation en ne laissant à juger

5 par le jury qu'un certain nombre des chefs d'accusation initiaux, compte

6 tenu du fait qu'un certain nombre d'autres chefs n'étaient désormais plus

7 pertinents d'après lui. Il a donc dit, je cite : "Je suppose que des

8 éléments de preuve venus d'autres sources et qui pourraient être très

9 négatives pour l'accusé doivent être laissés de côté, alors que les Juges

10 ne doivent se pencher que sur les éléments de preuve qui sont les plus

11 favorables a priori pour l'accusé." Donc, il est manifeste que dans cette

12 affaire les Juges ont donné des orientations favorables à l'accusé au jury.

13 Je cite le paragraphe 46 maintenant de ce jugement, je cite :

14 "La Chambre d'appel d'Angleterre a reconnu le pouvoir du subconscient et a

15 admis qu'une impression acquise au moment où on prend connaissance d'un

16 document ne peut être pas écarté par la suite, quel que soit les efforts

17 conscients déployés pour ce faire. En tout cas, il n'est pas question de

18 possibilité d'effacement complet. Par ailleurs, la Chambre d'appel a conclu

19 qu'aucune analyse n'échappe au fait que le jury avait à sa disposition une

20 grande partie des éléments de preuve versés au dossier qui étaient sans

21 aucun doute des éléments de preuve particulièrement -- dont la pertinence

22 pouvait être remise en question et qu'une seule décision était soumise --

23 qu'une seule question était soumise à décision. La décision rendue dans la

24 présente affaire l'a donc été sur des éléments de preuve dont la pertinence

25 n'était pas prouvée."

26 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Mais quel est le rapport avec notre

27 situation ?

28 M. NICE : [interprétation] Monsieur le Président, je vous invite à revenir

Page 46660

1 sur la dernière ligne, je cite : "La Chambre de première instance pourrait

2 souhaiter faire preuve d'une certaine prudence avant de contredire le

3 principe général très raisonnablement exprimé ici." Pour disjoindre les

4 actes d'accusation - et là je parle de l'acte d'accusation Kosovo par

5 rapport aux autres - donc, un volet qui a sa pertinence. Il s'agirait de

6 disjoindre également les éléments de preuve ce qui pourrait avoir une

7 incidence particulière sur la décision rendue à l'égard de cet accusé par

8 ceux qui ont le pouvoir de le faire.

9 Mais il importe de déterminer qui a ce pouvoir bien entendu de la

10 façon la plus précise qui soit. --

11 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Nice, j'estime que

12 ceci n'est pas admissible, n'est pas valable.

13 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je suis d'accord avec le

14 Président. Je pense --

15 M. NICE : [interprétation] Je ne suis pas sûr qu'il ait été question

16 de source de pouvoir en ces termes, mais, Monsieur le Président, Messieurs

17 les Juges --

18 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Cette décision repose très

19 certainement sur le procès à l'anglais, c'est-à-dire, le procès devant un

20 jury. Il n'y a aucune raison pour ne pas penser que le jury a rendu sa

21 décision dans les conditions dans lesquelles il est tenu de la rendre et

22 sur la base d'éléments de preuve qui ne seraient pas pertinents. Mais on

23 demande simplement aux membres du jury d'écarter au moment de leur

24 délibération, d'écarter de leur esprit les éléments de preuve qui ne

25 seraient pas entièrement pertinents par rapport à l'affaire. Mais pas de

26 les effacer complètement.

27 M. NICE : [interprétation] Avec le respect que je dois à la Chambre,

28 je m'en tiens à ma position et je vous dis ce qui suit : nous avons déjà

Page 46661

1 essayé de chercher dans d'autres systèmes judiciaires d'autres sources du

2 droit qui pourrait aider la Chambre dans sa décision à rendre par rapport à

3 la jonction ou disjonction d'acte d'accusation. Ici nous avons regardé ce

4 qui se passait en Allemagne. Je pense que ceci est tout à fait autorisé,

5 c'est le principe. Nous avons trouvé quelque cas de disjonction. Une

6 Chambre d'appel allemande par exemple a décidé de disjoindre des actes

7 d'accusation après que la Chambre de première instance avait déjà rendu sa

8 décision définitive. Donc c'est une situation qui je crois ressemble

9 beaucoup à ce qui se passe dans les systèmes judiciaires de "common law" au

10 moment où a lieu le recours en appel, c'est-à-dire, lorsque la Chambre

11 d'appel renvoie une affaire pour de nouveau jugement devant une autre

12 Chambre, par exemple.

13 Nous avons examiné ce qui se passait dans l'ex-Yougoslavie. Cela ne

14 figure pas dans le document que j'ai distribué parce que les renseignements

15 nous sont parvenus trop tard, mais nous avons trouvé plusieurs cas de

16 disjonction. Un accusé, par exemple, dans un procès -- plusieurs accusés --

17 a bénéficié d'une disjonction tardive parce que l'accusé était trop malade

18 pour participer aux débats. Donc, il a finalement été jugé séparément de

19 ces co-accusés. Mais, en dehors d'affaire de ce genre -- de situation de ce

20 genre, nous n'avons pas trouvé dans d'autres systèmes judicaires de

21 situation absolument parallèle à celle dont nous nous occupons pour

22 justifier ou non une disjonction d'acte d'accusation.

23 Je crois savoir donc qu'au moins deux de ces décisions judiciaires

24 sont contre moi, l'affaire de la flèche bleue étant celle qui peut faire

25 l'objet d'un parallèle très proche avec la nôtre. Je vous laisse le soin

26 d'y réfléchir à loisir plus tard.

27 Monsieur le Président, Messieurs les Juges, j'ai donc traité de façon

28 générale du problème de la jonction ou disjonction de l'acte d'accusation.

Page 46662

1 Je vous ai présenté le paragraphe 42 de nos écritures et les arguments de

2 l'Accusation.

3 Dans une certaine mesure il pourrait s'avérer nécessaire d'examiner

4 deux situations de rechange éventuellement par rapport à celle que nous

5 avons à l'esprit, ces deux autres situations sont les suivantes, fin de

6 l'affaire Kosovo, début de l'affaire Croatie Bosnie qui serait jugée plus

7 tard par une autre Chambre de première instance. Puis, deuxième autre

8 possibilité, jugement par la même Chambre de première instance, mais, plus

9 tard, commencer du verdict dans le volet Kosovo de l'affaire.

10 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Un instant, Monsieur Nice.

11 [La Chambre de première instance se concerte]

12 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, Monsieur Nice, vous

13 pouvez continuer.

14 M. NICE : [interprétation] Messieurs les Juges, nous avons donc ces deux

15 possibilités à prendre en considération, voir donc les volets Bosnie-

16 Herzégovine se dérouler devant une autre Chambre ou devant celle-ci.

17 Maintenant, si nous penchons sur le paragraphe 42 de nos écritures, le

18 paragraphe en question doit être mis de côté.

19 Maintenant, au paragraphe 43, il est dit que s'il y a une pause importante

20 entre la fin du volet Kosovo et le reste du procès concernant la Croatie et

21 la Bosnie, il y aurait un préjudice très important et un écart trop grand

22 entre la présentation des éléments de preuve à charge et les éléments

23 présentés à décharge.

24 Au paragraphe 44, on parle des problèmes d'ordre du jour se

25 trouverait compliquer. Au cas où la Chambre aurait l'intention de continuer

26 avec les volets Croatie et Bosnie immédiatement après nous aurions la

27 position suivante : la Chambre de première instance devrait prêter

28 intention aux éléments de preuve présentés avec dans un esprit ouvert, en

Page 46663

1 même temps il serait en train de délibérer et d'examiner la conclusion

2 finale concernant les questions de vérité ou de culpabilité ou d'innocence

3 de l'accusé. C'est là quelque chose de très défavorable.

4 Le problème qui se poserait est le suivant : au cas où la Chambre

5 déciderait de cette façon ou d'une autre, la décision pourrait faire

6 l'objet d'un appel. En l'occurrence la Chambre se trouverait dans une

7 situation d'attente d'une décision tout en entendant les éléments de preuve

8 relatifs à la Croatie et la Bosnie, et attendre le jugement rendu par une

9 Chambre d'appel pendant la présentation d'éléments de preuve concernant la

10 Croatie et Bosnie pourraient se traduire par une période assez longue.

11 J'ai parlé des paragraphes 46, j'ai parlé du 47, 48, que je viens

12 d'amplifier tout à l'heure. J'en viens au 49, où il est question des

13 aspects de santé et de mortalité qui doivent être pris en considération

14 lorsque l'on parle de l'organisation de ce procès, et la disjonction

15 d'instance nous amènerait de façon inévitable à un ajournement très grand

16 concernant le jugement rendu au sujet de la Croatie et de la Bosnie, ce qui

17 priverait bon nombre de personnes en ex-Yougoslavie, de la possibilité

18 d'entendre le jugement rendu puisqu'il ne serait plus en vie.

19 Au paragraphe 50 dont j'ai déjà parlé, il conviendrait d'ajouter peut-être

20 la nature intégrale de ce procès. Comme les Juges de la Chambre le savent

21 certainement, l'Accusation a toujours eu une préférence pour la

22 présentation chronologique des éléments de preuve, à savoir, Croatie,

23 Bosnie, Kosovo. Or, la Chambre d'appel, dans sa décision de jonction

24 d'instance, a demandé à ce qu'une présentation des éléments de preuve

25 relatifs au Kosovo soient présentés en premier en février 2002, raison pour

26 laquelle il a été dit que l'on ne pouvait pas présenter des éléments de

27 preuve concernant la Croatie avant l'écoulement de certains délais pour ce

28 qui est de la divulgation des pièces et ainsi de suite, c'est ainsi qu'on

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1 en est venu à entendre d'abord les éléments de preuve à charge concernant

2 le Kosovo.

3 Une fois que le temps est venu pour l'accusé de présenter ses éléments de

4 preuve à lui, j'ai exprimé notre préférence qui aurait été celle de

5 procéder dans l'ordre chronologique, mais la Chambre a rendu décision pour

6 ce qui était d'entamer avec le Kosovo au départ. La conséquence en est,

7 tout d'abord, qu'il y a ce problème de présentation des éléments de preuve

8 auxquels je me suis référé tout à l'heure. Il y a également un intérêt qui

9 ne revêt qu'un caractère historique parce que, si nous avions parlé de la

10 Croatie, Bosnie et Kosovo, nous ne serions trouvés dans le volet Bosnie du

11 procès, et dans ce volet-là, on pourrait dire que c'est là la substance

12 même de l'affaire, qui nous intéresse, et l'Accusation a déjà dit dans des

13 écritures à elle, qu'elle se trouverait neutre concernant la disjonction

14 d'instance, et ceci notamment parce qu'elle était neutre vis-à-vis des

15 souffrances d'une catégorie de victimes plutôt que des souffrances d'une

16 autre, d'une troisième catégorie de victimes.

17 Il y a maintenant les paragraphes 51 à 52 et 53, où il est question des

18 différentes formes de préjudice dont les uns et les autres pourraient

19 pâtir, mais, en substance, l'Accusation estime que cette affaire-ci doit

20 être prise comme un tout. Il s'agit d'une entreprise criminelle commune qui

21 se définie différemment dans les différents volets de l'acte d'accusation,

22 mais nous en avons déjà parlé. Je tiens à dire que ces affaires se trouvent

23 être entièrement intégrées les unes aux autres, et nous parlent de l'état

24 d'esprit de l'accusé avec la façon dont cet état d'esprit s'est reflété sur

25 les événements dans un deuxième et troisième cas, on voit le système de

26 comportement qu'il a manifesté. On voit que son manque de respect du droit

27 a été systématique et c'est la raison pour laquelle nous estimerions qu'il

28 serait injuste de procéder vis-à-vis de l'Accusation et vis-à-vis des

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1 personnes qui ne sont pas judiciairement intéressées à l'évolution de ce

2 procès de voir survenir une disjonction des actes d'accusation.

3 Il y a un autre groupe de points que j'avais voulu soulever. Si nous en

4 revenons à une économie de temps potentiel en cas de disjonction

5 d'instance, il me semble que c'est le Juge Bonomy qui a dit que le volet

6 Kosovo en était à sa fin. D'après la liste des témoins communiquée par

7 l'accusé, or, la liste ne se trouve pas encore être enregistrée à titre

8 officielle, et je crois que nous avons quelque chose à rajouter dans nos

9 écritures, donc sur cette liste, il y a encore 37 témoins, qui se

10 rapportent toujours et encore au Kosovo, dans les résumés de ces

11 témoignages en application de l'Article 65 ter il est question -- laissez-

12 moi un instant, je vous prie.

13 [Le conseil de l'Accusation se concerte]

14 M. NICE : [interprétation] En sus, disais-je, de ces 37, nous avons

15 identifié huit autres témoins qui semblent être des candidats susceptibles

16 de nous parler du Kosovo, ce qui nous amène à un chiffre qui est celui de

17 45 témoins au total. Les témoins de haut rang que l'accusé pourrait citer

18 pour parler de l'entreprise criminelle commune et, notamment, s'agissant de

19 la Croatie et de la Bosnie pourrait exercer une certaine influence sur ce

20 qui s'est produit au Kosovo et qui aurait été consistant avec le plan de

21 l'accusé.

22 Ce que nous affirmons, c'est que l'accusé semble avoir décidé

23 d'utiliser la totalité du temps qui lui a été impartie au volet Kosovo, et

24 dans cette situation-là la disjonction d'instance ne nous mènerait à rien

25 si ce n'est que cela empêcherait le prononcé d'un jugement sur les deux

26 autres segments, à moins qu'on ne lui accorde un temps supplémentaire, et

27 on en revient au tout début de mon exposé.

28 Messieurs les Juges, ce sont là nos positions. Nous avons essayé de

Page 46666

1 les communiquer aux parties intéressées à l'avance, nous avons présenté une

2 première version de nos écritures hier où j'ai été convié à prendre la

3 parole en premier. Je vais demander à ce que l'occasion me soit fournie de

4 présenter des réponses concernant des arguments qui pourraient soulever

5 parce que je ne sais pas de quoi pourraient encore parler les autres

6 parties en présence.

7 Merci.

8 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Peut-être vont-ils tomber

9 d'accord avec vous, Monsieur Nice ?

10 M. NICE : [interprétation] Cela se peut, mais je n'en suis pas tout à

11 fait certain.

12 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Maître Kay.

13 [La Chambre de première instance se concerte]

14 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Maître Kay, nous allons d'abord

15 entendre l'accusé.

16 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je vous prendrais bien moins de temps que cela

17 n'ait été le cas avec M. Nice.

18 Je me suis adressé à vous il y a deux semaines pour vous demander de vous

19 en tenir aux positions formulées par ce conseil de médecins d'originaire de

20 France, de Russie, et Serbie demandant à ce qu'une période de repos me soit

21 accordée, c'est ce qui est constaté dans leurs constats à savoir que mon

22 état de santé n'était pas stabilisé, il y avait possibilité de

23 complications, et ils disent qu'il faudrait m'accorder du repos pendant une

24 période au moins six semaines.

25 Vous avez demandé à ce que des médecins hollandais se prononcent sur la

26 question, et compte tenu de leur opinion que vous avez, vous pouvez

27 statuer. M. le Dr van Dijkman, qui est un spécialiste que vous avez choisi

28 ici, et lui, dans son rapport, il a rédigé entre autres ce qui suit : "Je

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1 recommande avec insistance qu'il y est un repos suffisant."

2 Il a ajouté : "Une période de six semaines de repos parait être quelque peu

3 excessive." Par conséquent, le cardiologue que vous avez choisi a, lui

4 aussi, confirmé la nécessité d'avoir du repos. La question qui se pose

5 c'est celle de savoir six semaines se trouvaient être excessif ou pas.

6 C'est là un fait et un point à soulever.

7 Aucun des médecins, qui se sont penchés sur les rapports que vous avez

8 reçus, n'a contesté les constatations faites par ce concile de médecins

9 originaires de Russie, de France et de Serbie.

10 Je tiens à dire également qu'à la date du 15 novembre -- et

11 M. Nice a dit que j'étais venu, que j'avais dit que je ne pouvais pas

12 fonctionner. Je sais exactement ce que j'ai dit : j'ai dit que je me ne

13 sentais pas bien. C'est la première fois que je l'ai dit au cours de ces

14 quatre dernières années. C'est la première fois au fil des quatre ans

15 écoulés que j'ai demandé à ce qu'il y ait une interruption parce que je me

16 sentais vraiment mal. Même-là, vous avez accueilli cette demande qui a fait

17 en sorte que j'ai attendu dans la petite pièce à côté pendant une heure et

18 demie ici à l'étage avant que d'être examiné par votre médecin.

19 Or, pour ce qui est de la période où vous mettez en cause les

20 constatations du concile qui se sont vues confirmer par vos médecins, le

21 médecin de l'unité de détention m'a interdit de venir au procès le 11 et le

22 21. Je m'étais déjà préparé. Je m'étais habillé et j'avais mis ma cravate.

23 J'ai été informé de l'heure du transport et on m'a interdit de venir. Ce

24 que dit M. Bonomy au sujet de l'impossibilité de venir, je préciserais que

25 je n'ai pas pu venir parce que votre médecin à vous m'a interdit de venir.

26 Soyons tout à fait clairs.

27 Pour finir, la question au sujet de laquelle je m'étais plaint le 15

28 où j'ai attendu patiemment pendant deux mois avec des désagréments qui

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1 allaient en croissant pour ce qui est de résoudre des questions au niveau

2 de mon état de santé, il s'agit de symptômes assez importants, j'ai une

3 pression très importante dans les oreilles et j'ai une hypersensibilité

4 auditive. Au centre médical de l'université de Leiden, le Dr Dalal m'a

5 examiné dans le détail et a rédigé un constat objectif. Quand je dis

6 "objectif," je parle d'un constat qui n'a pas impliqué une participation

7 active du patient. Le patient n'a eu qu'une participation passive, étant

8 donné qu'il est soumis à un suivi électronique constant et les constats de

9 ce médecin ont confirmé complètement et entièrement les problèmes de santé

10 dont je souffre.

11 Donc, les médecins que j'ai choisis moi-même, qui sont venus parce

12 que rien ne s'est amélioré en termes pratiques au fil des deux mois écoulés

13 et les médecins que vous avez choisis, vous-mêmes, se sont prononcés en

14 termes pratiques de la même façon. Votre médecin à l'unité de détention a

15 dit qu'en ces quelques jours, j'ai probablement rassemblé des forces pour

16 subir cette pression que j'ai dans les oreilles et cette pression auditive

17 parce qu'il m'a laissé entendre que le Dr Dalal qui est quelqu'un

18 d'extrêmement calé en la matière avait en vue une solution pour, si ce

19 n'est pas écarté complètement mes problèmes, me soulager grandement. C'est

20 une position médicalement intéressante, mais je ne propose pas de la

21 commenter à présent.

22 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, nous

23 n'avons pas eu l'avantage de nous pencher sur le rapport du Dr Dalal. Or,

24 vous vous référez à ce rapport et c'est ce que je voudrais savoir moi

25 aussi.

26 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Robinson, je ne l'ai pas vu non

27 plus. Je sais ce qu'il m'a dit après m'avoir examiné. Je suis allé au

28 centre médical de l'université de Leiden. J'ai été examiné longuement là-

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1 bas. Il s'agit d'examens avec des instruments électroniques qui durent

2 longuement où le patient est allongé, mais il n'y a pas de questions, de

3 réponses, ni rien du tout. Il y a des examens électroniques et, par la

4 suite, il m'a dit que ces constatations objectives n'ont fait que confirmer

5 les malaises dont je me plaignais. Il a probablement rédigé quelque chose.

6 Le Dr Falke qui est venu me voir et me dire que le Dr Dalal avait

7 estimé qu'il pourrait soulager mes peines. Alors, je lui ai posé une

8 question logique : quand ? Il m'a dit, ces jours-ci, nous allons nous

9 dépêcher. Mais je lui ai demandé : comment je vais travailler entre-temps ?

10 Il m'a dit : vous avez quand même pu rassembler suffisamment de forces pour

11 tenir encore un peu, vous avez tenu assez longtemps, et ainsi de suite.

12 J'ai fait une irradiation magnétique en septembre à l'hôpital de Bronnovo.

13 Auparavant, je suis allé voir un spécialiste en oto-rhino-laryngologie et

14 cela dure depuis des mois et la situation n'allait qu'en s'aggravant.

15 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, je voulais

16 juste porter à votre connaissance le fait que nous n'avions pas en notre

17 possession le rapport que vous avez mentionné. Vous pouvez continuer sur la

18 question de disjonction d'instance.

19 L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, je vais y arriver, c'est en

20 corrélation.

21 J'imagine que vous avez le rapport du Dr van Dijkman ?

22 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, nous avons le rapport du

23 Dr Dijkman, les deux rapports.

24 L'ACCUSÉ : [interprétation] Ici, il est question de me fournir un délai de

25 repos, un délai suffisant. C'est ce qui est dit.

26 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Comme vous l'avez probablement

27 constaté, il n'est pas allé jusqu'à envisager une période six semaines.

28 L'ACCUSÉ : [interprétation] Il a dit : "Somewhat too much." Quelque peu

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1 excessif.

2 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, quelque peu excessif.

3 L'ACCUSÉ : [interprétation] C'est ce que j'ai dit. Je ne voulais pas citer

4 faussement ce qu'il a dit.

5 Donc, Messieurs, mon droit est celui de réclamer auprès de vous

6 l'exercice d'un droit, celui qui consiste à protéger mon état de santé et

7 j'estime que ce droit doit être protégé, doit être préservé. Ce droit prime

8 sur les autres droits ou préoccupations qui vous ont incités à convoquer

9 l'audience de ce jour.

10 Ma requête est, du moins je l'espère, suffisamment claire. Je demande

11 à ce qu'il me soit fourni une pause pour me permettre de me rétablir.

12 Je comprends que le fait que votre préoccupation primordiale --

13 [La Chambre de première instance se concerte]

14 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, continuez, Monsieur

15 Milosevic.

16 L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui. J'ai attendu pour que vous terminiez votre

17 conversation.

18 M. Nice a, entre autres, mentionné la question de savoir si je prenais mes

19 médicaments. Cela peut-être dit par quelqu'un qui ignore complètement la

20 façon de procéder en prison. En prison, on prend les médicaments en

21 présence des gardiens, cela n'est pas valide pour moi seulement, mais c'est

22 valide pour tout le monde et on inscrit au registre l'heure exacte de la

23 prise de tel ou tel médicament.

24 C'est moi qui ai demandé au Dr Falke de procéder à des analyses de

25 laboratoire pour voir quel était l'effet des médicaments dans le contexte

26 de tous les autres efforts que j'ai investis pour m'aider moi-même. Je

27 précise que les médecins que j'ai conviés à venir, ils sont venus plus de

28 deux mois après ma demande versée auprès du Dr Falke et après les examens.

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1 Donc, cela s'est fait sans perturber en quoi ce soit vos plannings à vous.

2 Entendons-nous très bien, je ne veux plus entendre des choses dénuées

3 de sens telles que présentées par M. Nice. Messieurs, votre préoccupation

4 primordiale, c'est le temps. Or, le temps, vous vous en souciez à tel point

5 que lorsque vous parlez de mon état de santé, vous en parlez uniquement

6 comme cela se trouve être dit au sixième paragraphe, comme étant un état de

7 santé et des éléments qui de tout temps n'ont fait que perturber le

8 déroulement de ce procès. J'estime que pour la protection de la santé, la

9 mesure où ce procès mégalomaniaque, avec votre autorisation, a été initié

10 par la partie adverse, porte atteinte à ma santé. Cela, me semble-t-il, ne

11 vous semble pas être important.

12 Je vous rappelle qu'au paragraphe 4 de votre décision, il a été fait

13 état de la chronologie du soin que vous avez pris à la rapidité du procès.

14 Je ne vais pas citer les passages puisque vous avez ce texte. Ce qui est

15 intéressant et ce qui est indicatif, c'est que cette chronologie, à savoir

16 ce grand soin que vous portez au déroulement rapide du procès prend son

17 début en juillet 2004. C'est ce que dit votre chronologie. C'est

18 précisément le moment où je dois commencer à présenter les éléments à

19 décharge, et ceci, pendant 150 jours au sujet de quoi vous avez dit cela

20 correspondait aux 300 jours dont a bénéficié la partie adverse. Il y a

21 quelques semaines, j'ai dit ici que le nombre d'heures qui m'a été attribué

22 par la partie adverse montre qu'il y a un total, une somme où il manquait

23 70 jours. Vous ne m'avez pas laissé continuer et je ne pas continué. Je ne

24 vais pas en parler maintenant non plus. Ce que je veux dire maintenant,

25 c'est que ceci demeure un fait.

26 Le soin que vous avez consacré à la rapidité de ce procès, cela

27 commence quand ma mi-temps a commencé et cela se fait à mon détriment, à

28 mes dépens. La vitesse du déroulement devient importante lorsque je dois

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1 présenter des faits concernant ce qui s'est passé. Cela devient plus

2 important que les faits et plus important que mon état de santé.

3 Si vous aviez fait preuve d'un tel soin relatif à la rapidité pendant

4 la présentation des éléments de preuve par M. Nice et par

5 Mme Del Ponte, on n'aurait pas entendu ici bon nombre de témoins. Monsieur

6 Robinson et Monsieur Kwon, vous vous souvenez certainement que nous avons

7 entendu ici des témoins, provenant d'un institut qui a été créé à la va-

8 vite, il y a quelques jours à peine, d'Amsterdam et qui nous a parlé du

9 génocide à l'égard des Arméniens en Turquie, du génocide au Rwanda et je ne

10 sais plus dans quel autre pays, un troisième pays a été mentionné aussi, je

11 ne m'en souviens plus. Cet Hollandais nous a relaté cela. Vous n'auriez pas

12 autorisé à ce que des éléments de témoignage soient présentés ici, ainsi

13 que des témoignages autres que je ne mentionnerai pas, donc, on a parlé

14 d'Arménie, on a parlé d'un institut hollandais qui a été créé et au sujet

15 du seul mot hollandais que le monde entier connaît et qui est celui

16 "d'apartheid." On n'a pas parlé d'apartheid, on a parlé des Arméniens et de

17 la Turquie et cela a fait partie d'un des éléments de preuve présentés par

18 la partie adverse. Je ne cite pas d'autres éléments de preuve présentés qui

19 sont dénués de sens et qui n'ont constitué qu'une perte de temps pure et

20 simple.

21 Vous avez fait preuve de compréhension pour des ambitions

22 mégalomaniaques --

23 M. LE JUGE ROBINSON : [hors micro]

24 L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, Monsieur Robinson.

25 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous êtes en train de gaspiller

26 notre temps. Il vous appartenait de parler de deux questions, à savoir, de

27 la disjonction d'instance et du deuxième sujet qui est votre état de santé.

28 J'aimerais que vous limitiez votre exposé à ces deux questions.

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1 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Robinson, vous n'avez pas interrompu

2 M. Nice lorsqu'il a avancé des allégations des plus absurdes. J'estime que

3 s'agissant des allégations absurdes qu'il a faites, il devrait m'être

4 fourni le droit de --

5 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, si vous allez

6 continuer de cette façon, je vais vous couper la parole.

7 L'ACCUSÉ : [interprétation] D'accord.

8 Il vous appartient à vous de décider si vous voulez présenter des arguments

9 ou pas. Si je n'ai pas interrompu M. Nice, c'est parce qu'il n'y a pas eu

10 de raison de l'interrompre. Allons de l'avant je vous prie.

11 L'ACCUSÉ : [interprétation] De l'avant, je me réfère à ce qui est dit dans

12 votre décision figurant dans la décision dont nous sommes en train de

13 débattre. Il est question de perte de temps dites-vous en raison de mon

14 état de santé depuis le moment où vous vous intéressez de façon très

15 intense au délai et à la rapidité du procès.

16 Or, je tiens à vous rappeler que le temps que vous qualifiez de perdu

17 se trouve être beaucoup plus court que le temps perdu pour une autre raison

18 et là je parle de la privation de mon droit à me défendre en septembre de

19 l'an passé suite à une décision de votre part. C'est parce que vous avez

20 décidé de la sorte que certains délais que vous avez fixés vous-même, et

21 que vous citez dans la chronologie dont je viens de parler, se sont vus

22 dépassés au moment où la présentation de mes éléments à décharge a commencé

23 suite à la décision rendue par la Chambre d'appel, votre Chambre d'appel à

24 vous.

25 Donc, Messieurs, ce n'est pas sur le compte de mon état de santé

26 qu'il faut mettre cela, état de santé dont je ne suis pas coupable et ceci

27 notamment suite à une absence de respect du droit de votre part.

28 Maintenant pour ce qui est de mon état de santé, la responsabilité relative

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1 à la détérioration de mon état de santé retombe sur la partie adverse,

2 parce que celle-ci, avec son approche mégalomaniaque, m'a exposé à une

3 sorte de torture, torture à laquelle vous ne vous êtes pas opposée.

4 Au paragraphe numéro 5, vous fixez la tenue de cette audience, il est fait

5 référence aux positions adoptées par la Chambre d'appel. Il me semble qu'en

6 raison de l'importance de la question, il convient de se pencher sur ce qui

7 est dit au paragraphe 26 en question. Il est dit :

8 "Si l'Accusation," - je dis bien "si l'Accusation" - "n'accomplit pas cette

9 obligation ou cette responsabilité, la Chambre de première instance a des

10 pouvoirs suffisants en application du Règlement de procédure et de preuve

11 d'ordonner à l'Accusation une réduction de sa liste de témoins pour assurer

12 la tenue du procès dans des limites gérables et pour finir au cas où les

13 Juges de la Chambre comprendraient que le procès se développe de façon à le

14 rendre ingérable, notamment, par exemple, si l'Accusation se trouve être

15 incapable ou n'a pas la volonté d'exercer ses responsabilités et ne

16 souhaite pas limiter la quantité des éléments de preuve présentés, les

17 Juges de la Chambre de première instance pourront, à ce moment-là, ordonner

18 une disjonction d'instance pour ce qui est de l'un ou des trois volets de

19 l'ex-Yougoslavie."

20 Ici, il est question des moyens qui sont à votre disposition au cas

21 où la partie adverse, et là on le souligne, ne se conformerait pas à ses

22 obligations prévues à l'Article 25 qui sont celles d'assurer en cas

23 d'impossibilité de gérer le procès pour cause d'une trop grande

24 présentation de documents, et cetera. Votre Chambre d'appel se réfère à

25 cette impossibilité de gérer le procès pour ce qui est de la présentation

26 des éléments de preuve d'une partie.

27 Mais il n'y a pas que cela. Il y a interprétation systématique de ce

28 que la Chambre d'appel a dit compte tenu du contexte de la disjonction

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1 d'instance où l'on précise clairement qu'on a tenu compte de la situation

2 qui est créée en raison de cette approche mégalomaniaque de l'Accusation

3 dans cette opération que vous qualifiez de procès.

4 Je tiens à préciser également que mon état de santé n'a pas du tout

5 été pris en considération par la Chambre d'appel, et je ne pense pas

6 qu'elle aurait dû en prendre compte, à l'époque. Mais, sans prendre cet

7 élément-là en considération, il y a quand même eu une mention de la

8 nécessité d'un repos. On dit bien au paragraphe 37 :

9 "Comme cela s'est avéré être vrai, les Juges de la Chambre de

10 première instance devront de temps en temps procéder à des pauses dans

11 l'audition des éléments de preuve pour épargner leur force et pour

12 permettre à l'accusé de se reposer de la charge de travail qui est la

13 sienne. Messieurs, lorsque celui se défend lui-même."

14 Messieurs, le seul effet produit sur le procès par mon état de santé, ce

15 sont des arrêtes intermittents en raison de détérioration. Mais, si des

16 pauses préventives avaient été faites pour me permettre de me reposer, on

17 aurait empêché la survenue de telles circonstances. On dit que c'est là une

18 situation et des facteurs qui ne font que perturber le déroulement de ce

19 procès. Or, vous vous référez, vous, au paragraphe 26 de la Chambre

20 d'appel. Vous dites qu'il y a ingérence, enfin, impossibilité de gérer et

21 vous préconisez une disjonction, mais c'est une autre façon de dire la même

22 chose, parce que je vous ai cité le paragraphe 26. Il y a instructions de

23 la part de la Chambre d'appel pour ce qui est de rendre ce procès gérable.

24 Alors, il est question de pauses de temps en temps.

25 Pensez-vous qu'il serait suffisamment fou pour croire -- que

26 quiconque serait suffisamment fou pour croire que la Chambre d'appel au

27 paragraphe 26 donnerait instructions de prendre des mesures qui seraient en

28 contravention avec le paragraphe 26 de leurs propres décisions. Si l'on se

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1 référerait à la logique présentée ici par

2 M. Nice, c'est exactement ce qui se produirait. Bien entendu, la conclusion

3 correcte, c'est de faire en sorte qu'il y est enfreint ou violation de la

4 décision de la Chambre d'appel en procédant à une disjonction d'instance et

5 vous êtes en train d'interpréter erronément les propos même de la Chambre

6 d'appel. Ce serait là un abus ou il y aurait abus d'un document en se

7 servant de certaines dispositions énoncées dans ce document pour contester

8 le même document. Ce qui est incroyable. Ce n'est pas logique.

9 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Milosevic, ce que vous

10 ignorez en permanence lorsque vous parlez de ce document, c'est que le fait

11 que les Juges de la Chambre d'appel ont rendu ces décisions à l'époque où

12 la Chambre siégeait cinq jours par semaine. Depuis, tout le monde s'est mis

13 en quatre pour vous fournir suffisamment de repos tout au long de 2003.

14 L'ACCUSÉ : [interprétation] Quand est-ce que vous m'avez donné -- rappelez-

15 moi, rappelez-moi, je vous prie ?

16 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Chaque semaine, vous avez du repos

17 parce que vous ne pouvez travailler que trois jours par semaine.

18 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je travaille cinq jours par semaine et,

19 notamment, pendant une période très longue, et personne ici ne travaille

20 cinq jours par semaine pendant une période de temps aussi prolongée, alors,

21 dans le rapport du Dr van Dijkman, que je n'ai pas cité, au paragraphe qui

22 précède celui que j'ai cité, et on dit : "Compte tenu de l'emploi du

23 travail, il est compréhensible que le fait que le patient se sente fatigué.

24 Il a trois audiences par semaine et il passe le reste du temps à se

25 préparer pour ses audiences, y compris les interviews avec les témoins."

26 Comment pensez-vous que je puisse parler moi aux témoins pendant des

27 journées si je n'ai pas des journées de disponibles. Je ne comprends pas du

28 tout la logique qui semble être le --

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1 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous pouvez avoir du repos si vous

2 mettez à profit les services qui vous sont mis à disposition. Vous ne

3 voulez pas. Ces interviews peuvent être effectuées par le conseil commis

4 d'officie. C'est vous qui avez choisi de ne pas procéder ainsi.

5 L'ACCUSÉ : [interprétation] J'ai vu comment les conseils commis d'office

6 travaillaient avec les témoins notamment lorsque vous avez par la force

7 rendu possible des interviews de leur part vis-à-vis des témoins, et j'ai

8 conclu que cela n'était approprié du tout.

9 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, ce qui me vient

10 à l'esprit ce sont des propos de Marc Antoine aux obsèques de Jules César :

11 "L'ingratitude est plus forte que --"

12 L'INTERPRÈTE : L'interprète dit qu'il n'a pas entendu.

13 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous vous trouvez être ingrat vis-à-

14 vis des conseils commis d'office et de toute l'aide qu'ils vous apportent.

15 Cela n'est pas à votre avantage.

16 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je ne veux pas du tout offenser, ni Mme

17 Higgins, ni Me Kay, pas du tout. Mais, eux aussi, ils savent pertinemment

18 bien qu'ils en savent assez peu au sujet de la situation prévalant en ex-

19 Yougoslavie, notamment, lorsqu'il est question des éléments qui me sont

20 reprochés ici par M. Nice et par la partie qu'il représente ici. M. Nice

21 ici a présenté des allégations absurdes concernant des crimes que j'aurais

22 commis en Bosnie et en Croatie, et dont toute la présentation des éléments

23 de charge, il n'a présenté aucun élément à charge ou aucune preuve qui

24 parlerait de ma responsabilité. Il a parlé de crimes en Bosnie-Herzégovine

25 et les événements là-bas. Mais d'un autre côté, il y a suffisamment de

26 preuves qui disent que je me suis surtout employé en faveur de la paix là-

27 bas, et tous les leaders occidentaux ont reconnu ce fait et ils ont dit que

28 j'étais la personne qui a le plus grandement contribué à l'aboutissement à

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1 la paix.

2 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, je vais

3 m'arrêter maintenant. Je souhaite entendre les arguments sur les deux

4 questions, qui sont celles qui doivent être débattues,

5 aujourd'hui, à savoir, la disjonction et dans la mesure où c'est pertinent

6 les questions de votre santé. C'est ce qui m'intéresse ici aujourd'hui.

7 Nous allons maintenant faire une pause de 20 minutes.

8 --- L'audience est suspendue à 10 heures 39.

9 --- L'audience est reprise à 11 heures 07.

10 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je souhaite simplement m'assurer que

11 le compte rendu d'audience est exact par rapport à la référence que j'ai

12 faite lorsque j'ai cité Marc Antoine: "L'ingratitude est un sentiment plus

13 fort que l'arme des traîtres." Il y a quelque chose, un point sur lequel

14 vous pouvez nous aider, je crois.

15 Monsieur Milosevic, vous avez 37 ou 45 témoins qui n'ont pas encore

16 été entendus dans le volet Kosovo. Comment -- compte tenu du nombre de

17 jours qui vous restent pour présenter votre thèse, comment avez-vous

18 l'intention de gérer tout ceci de façon à pouvoir terminer le volet Kosovo

19 ainsi que le volet Bosnie et Croatie ? Je vous prie, je ne souhaite pas

20 entendre le même refrain, ce qui, encore une fois, est un exemple de manque

21 de temps qui vous a été accordé ou du peu de temps qui vous a été accordé.

22 L'INTERPRÈTE : Microphone, s'il vous plaît.

23 L'ACCUSÉ : [interprétation] Le micro n'était pas allumé. Ce que je

24 disais était comme suit : la question du temps est quelque chose que vous

25 placez au premier plan, donc, je suppose que vous n'aurez rien contre le

26 fait que j'ai des observations à faire à cet égard.

27 J'ai cesse de vous rappeler, Monsieur Robinson, qu'il y a quelques

28 temps déjà, j'ai clairement indiqué que j'avais besoin d'avoir le temps

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1 nécessaire ici. Si -- et, vous-même, vous avez dit que c'était trop tôt

2 pour aborder cette question-là; autrement dit, c'était trop tôt pour dire

3 qu'il fallait me donner le temps dont j'avais besoin.

4 Pour reprendre à l'endroit où vous m'avez interrompu lorsque vous

5 avez fait des commentaires et dire que je devais utiliser les services du

6 conseil, commis d'office, je vais vous présenter ma position et vous

7 pourrez conclure, comme bon, vous semble, mais je ne pense pas que vous

8 serez en mesure de contredire ma position.

9 J'ai le droit d'assurer ma propre défense et ce droit découle du

10 droit international et, malgré dans votre statut, vous avez le devoir de me

11 permettre d'utiliser ou de ce droit à bon escient, on ne peut pas compenser

12 ce droit par un conseil commis d'office. J'ai le droit d'assurer ma propre

13 défense et ceci est fondé et justifié dans les documents que vous

14 connaissez bien. Donc, vous avez le devoir de me permettre d'utiliser ce

15 droit à bon escient et non pas à un quelconque droit fictif qui me serait

16 octroyé de façon officielle, alors que, dans la réalité, ce droit m'est

17 enlevé. Si ce droit existe, vous devez me permettre d'utiliser ce droit qui

18 est le mien.

19 Je veux dire que je ne dois pas auditionner les témoins avant

20 l'audience, c'est la même chose que de dire que je ne peux pas me servir du

21 droit qui existe. Il se trouve que j'ai décidé de faire valoir ce droit

22 même si c'est à mes dépens. Donc, en somme, j'ai l'intention d'utiliser ce

23 droit, comme bon, me semble.

24 Pour ce qui est de la question du temps comme l'a dit M. Nice et la

25 question de différents documents. Vous allez m'autoriser à citer des

26 extraits de différents documents, comme l'a fait M. Nice. J'ai certains

27 nombres d'exemples à vous citer, car il s'agit d'un texte en serbe. C'est

28 une déclaration faite par un groupe de membres d'avocats russes du droit

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1 international en vue de surveiller le procès le Procureur contre Slobodan

2 Milosevic en ex-Yougoslavie, il y a quelques jours publiée dans le journal

3 de Moscou sur le droit international. Ceci a été traduit à partir du

4 journal de Moscou. Il s'agit d'un forum très important en Russie. C'est un

5 journal également très important et très connu en Russie qui parle beaucoup

6 des questions de droit international.

7 Entre autres, au point numéro 1, qui est un point qui a été débattu, c'est

8 le droit de l'accusé que d'avoir suffisamment de temps. Ce terme "suffisant

9 de temps" signifie suffisamment de temps pour préparer sa défense. Ceci est

10 un extrait de "documents internationaux," et c'est ce que dit le texte en

11 question :

12 "Après la signature du premier acte d'accusation dressé contre Slobodan

13 Milosevic par le Procureur et jusqu'entre le début de la présentation des

14 moyens à charge de l'Accusation, deux années se sont écoulées et deux

15 années et huit mois. Entre-temps, l'acte d'accusation a été préparé. Ceci a

16 duré huit mois au cours desquels l'accusé était en prison. Pour ce qui est

17 de la préparation des moyens de la Défense, Slobodan Milosevic a eu trois

18 mois pour se préparer."

19 Ensuite, l'ordonnance sur la préparation des moyens de la Défense,

20 ordonnance qui a été rendue le 17 décembre 2003. On fait référence à cette

21 ordonnance dans l'article.

22 "Après une prorogation des délais compte tenu de l'état de santé de

23 l'accusé, les présentations des moyens de la Défense peuvent durer six

24 mois, mais cette prorogation de délai n'a pas été utilisée pour la

25 préparation de la Défense car le Greffe n'a pas autorisé l'accusé à

26 rencontrer ses témoins à cause de son état de santé. S'il s'agit de temps

27 pour préparer sa défense, il s'agit de crimes qui portent sur 66 chefs

28 d'accusation et 1 000 événements qui se sont produits. Ici, on parle

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1 d'égalité des armes et de justesse. Je crois que l'accusé devrait avoir

2 autant de temps pour se préparer que le Procureur a eu à partir du moment

3 où l'acte d'accusation a été signé, ceci conformément au droit de l'accusé,

4 il doit pouvoir avoir le même temps pour se préparer, préparer sa défense.

5 Compte tenu de la complexité de l'affaire en question, S. Milosevic doit

6 avoir le temps nécessaire pour se préparer, six mois ne suffisent pas et

7 sont considérés comme étant insuffisants en la matière. L'accusé a demandé

8 à avoir davantage de temps, demande qui lui a été refusée par la Chambre

9 d'appel, 'le choix qu'il a fait de se défendre lui-même, l'accusé a

10 abandonné son droit qui est celui de l'équipe de la Défense en général'."

11 Encore une fois, je cite : "Il aura à supporter les conséquences puisqu'il

12 a refusé d'utiliser les services des conseils de la Défense commis

13 d'office."

14 Décision rendue au mois de janvier 2004. Par rapport à cela, la Chambre

15 d'appel a cité quatre décisions rendues par des juridictions nationales qui

16 ne parlent pas des critères appliqués en matière de droit international, et

17 c'est une Chambre de première instance qui a le devoir de protéger les

18 droits de l'accusé, ceci a été confirmé par la décision illégale rendue par

19 la Chambre de première instance au détriment de l'accusé puisqu'il a décidé

20 de se défendre lui-même, arguments présentés sont insuffisants.

21 "Ce droit fait partie des droits sur lesquels on impose aucune limite de

22 temps. Article 3 de la convention des droits internationaux tout un chacun

23 a droit aux garanties minimum suivantes." Pour conclure, la conclusion de

24 ce groupe de l'Association internationale des avocats en Russie : "L'accusé

25 n'a pas eu le temps nécessaire pour préparer sa défense."

26 Je ne veux pas continuer à citer ce texte. Je vais simplement vous demander

27 d'analyser cette décision. Je suis sûr que vos traducteurs seront en mesure

28 de le traduire vers l'anglais. Il y a bon nombre d'autres points

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1 intéressants dans cet article, mais je crois que ce serait utile que vous

2 vous penchiez dessus.

3 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Est-ce que je vous ai bien compris

4 lorsque vous avez dit que vous lisez un extrait du journal de droit

5 international, que ce droit fait partie du droit sur lequel aucune

6 restriction de temps n'est imposée; c'est exact. Est-ce effectivement ce

7 que vous avez lu sur les restrictions imposées ?

8 L'ACCUSÉ : [interprétation] J'ai lu ce qui figure dans cet article. Je vais

9 y revenir.

10 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] A quoi faites-vous allusion ici ? Le

11 droit de la défense ? Le droit d'un accusé à se défendre lui-même ? De quoi

12 s'agit-il ?

13 L'ACCUSÉ : [interprétation] Le droit de l'accusé, ensuite, je cite : "Pour

14 avoir suffisamment de temps pour préparer sa défense." Ceci au point 1, que

15 j'ai cité.

16 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Est-ce ce droit sur lequel ne peut

17 être imposé aucune restriction de temps ? Il s'agit du même droit ?

18 J'essaie de comprendre ce que vous venez de nous lire.

19 L'ACCUSÉ : [interprétation] Bien, Monsieur Robinson, ce texte ne dit pas

20 qu'une restriction de temps peut être imposée. Ce qu'on dit ici, c'est que

21 le temps nécessaire ou le temps octroyé à la partie adverse pour rédiger

22 l'acte d'accusation, on dit ici que l'on doit m'accorder le même temps. On

23 cite exactement la date à laquelle l'acte d'accusation a été signé et

24 combien de temps il a fallu pour préparer les moyens de présentation à

25 charge du Procureur. Il ne s'agit pas ici d'une catégorie floue, il s'agit

26 de quelque chose de très précis. On compare le temps qu'a eu la partie

27 adverse et le temps qui m'est octroyé par vous. Cette période de six mois,

28 ou à peine, ces six mois à peine, ne peut pas être comparée à trois ans,

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1 hormis le fait également que je prépare ma propre défense, alors que Mme

2 Del Ponte et M. Nice ont tout un système à leur disposition, experts, et

3 cetera.

4 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci.

5 L'ACCUSÉ : [interprétation] Lorsque j'ai évoqué, Monsieur Robinson, lorsque

6 j'ai évoqué le pacte des officiers de l'OTAN, je souhaite vous rappeler que

7 l'expert militaire, M. Theunens, était ici et a dit au nom du groupe qui

8 travaillait sur cette question-là, qu'ils avaient étudié des milliers de

9 documents, et je lui ai demandé, assis ici : "Est-ce que vous êtes en

10 possession d'un document qui m'appartient ?" Il a répondu en disant :

11 "Oui." Vous vous en souviendrez certainement, Monsieur Robinson, et je lui

12 ai demandé de le passer sur le rétroprojecteur.

13 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic --

14 L'ACCUSÉ : [interprétation] Vous vous souvenez de cela ?

15 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] -- je comprends très bien votre

16 argument et je comprends qu'un accusé doit avoir le temps de se préparer,

17 mais je n'accepte pas que vous me disiez qu'une restriction de temps ne

18 puisse pas être imposée à la présentation de la thèse de la Défense. Vous

19 avez droit à un temps convenable. Si votre association d'avocats russes a

20 dit qu'il n'y avait pas de restriction de temps imposée à la Défense, et

21 s'ils entendaient par là qu'un accusé aurait le droit de se défendre à

22 l'infini, je rejette cette idée-là. Vous avez droit à un temps convenable

23 pour présenter votre défense.

24 Veuillez poursuivre, Monsieur Milosevic.

25 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Robinson, en répondant à votre

26 question, j'ai dit précisément que ce n'est pas ce qu'ils ont dit, que

27 l'accusé a des droits illimités. Tout ce qu'ils allèguent c'est que

28 l'accusé doit avoir le même temps que le temps qui est accordé à

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1 l'Accusation pour préparer l'acte d'accusation. Ils ont pu calculer ce

2 temps de façon précise puisqu'ils ont comparé la date à laquelle l'acte

3 d'accusation a été dressé et la date à laquelle le procès a commencé ici.

4 Ce temps a été calculé au jour près avant même d'avoir dressé l'acte

5 d'accusation, ils ont dû se préparer également.

6 Vous n'avez pas compris l'explication qui a été fournie ni le texte que je

7 viens de vous citer. Je propose que vous lisiez ce rapport vous-même, car

8 je crois qu'il s'agit d'avocats de droit international éminents, c'est

9 important. Il s'agit d'une déclaration qui est extraite de la Fédération

10 russe des avocats internationaux. Il s'agit d'un journal tout à fait

11 sérieux. C'est toute une série d'experts d'autres pays également qui ont

12 pris part à cela également. Ceux qui ont évoqué la conduite de Kofi Annan à

13 mon égard ainsi que différentes personnes qui ont rendu visite au

14 secrétaire-général des Nations Unies. Il s'agit d'une attitude très

15 répandue et si j'étais à votre place, je tiendrais compte de cette opinion

16 qui est présentée par les experts qui font partie de cette Fédération russe

17 et de gens éminents qui connaissent bien le domaine du droit international.

18 Comme je vous le disais, je vais poursuivre. La situation actuelle

19 est due à l'ambition mégalomaniaque de la partie adverse. Sans doute qu'il

20 souhaite que cette pléthore d'arguments remplace les preuves qui pourraient

21 exister à mon encontre. C'est la quantité qui prime sur la qualité car on

22 ne peut pas avoir des moyens de preuve et des preuves valables pour ce qui

23 ne correspond pas à la vérité. Vous avez eu des rapports tout à fait

24 cordiaux. Vous avez fait preuve de beaucoup de tolérance à l'égard de la

25 partie adverse. Je suis la principale victime de tout cela. J'ai été

26 bombardé de documents, de témoins qui permettaient de présenter ces

27 différents documents. Je crois qu'il s'agit d'une forme de torture et d'un

28 certain cynisme que de placer la charge de la preuve sur moi de cette

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1 manière, d'autant plus que ceci a un rapport avec mon état de santé, mon

2 état de santé est ce qu'il est à cause de la torture que j'ai eue à subir.

3 Je dois vous rappeler que lorsque M. Stevanovic est venu témoigner ici, je

4 ne me souviens pas du cas précis, si vous voulez connaître le contexte

5 exact de sa déposition, j'ai dit que la partie adverse a présenté quelques

6 millions de pages sur moi. M. Nice est levé à ce moment-là et a dit qu'il

7 ne s'agissait que de 600 000, alors que, dans certains cas, il s'agit de

8 documents qui avaient été présentés deux fois.

9 Je crois qu'il faudrait tout relire pour voir si ces chiffres sont

10 exacts. Rien ne permet de justifier cela non plus, mais je crois qu'il

11 s'agit d'un nombre très important de documents. Chaque partie présente à ce

12 procès a dû lire 500 à 1 000 pages tous les jours, et ce pendant deux ans

13 et demi sans exception aucune, sans tenir compte des autres obligations.

14 Tout être humain qui se respecte ne peut pas lire une telle quantité de

15 documents par jour. Je pense que personne ne peut prétendre être un

16 surhomme ici. Donc, nous arrivons à la conclusion que cette situation est

17 totalement irréaliste. Un certain nombre de personnes ont pris part à ce

18 qu'on appelle un procès semble-t-il, mais aucune des parties présentes ici

19 sait ce que contient ces documents à propos desquels les débats sont tenus

20 ici.

21 L'INTERPRÈTE : Correction de l'interprète, il ne s'agit pas des

22 documents qui appartiennent à M. Milosevic mais dont il est l'auteur et

23 qu'il a signé de sa main.

24 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je vous en prie, jusqu'à un certain point

25 ce n'est pas seulement cet élément là qu'ignore le public, mais il y a

26 également un autre point, les gens ne savent pas pourquoi je suis accusé et

27 ce pour quoi je suis accusé. La question, la Grande-Serbie, c'est quelque

28 chose qui a été présentée par la partie adverse. Il y a quatre ans lorsque

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1 la partie adverse a demandé à ce qu'il ait jonction d'instances, on a

2 indiqué qu'il s'agissait du fil rouge qui réunissait les différents

3 éléments de l'affaire. La Chambre d'instance était d'accord sur ce point

4 là. Donc on ne peut pas parler de disjonction sans parler de cette

5 question-là.

6 Le 25 août de cette année, M. Nice, après trois ans et demi de

7 procès, a déclaré qu'il ne me poursuivait pas pour cette idée de la Grande-

8 Serbie et c'est quelque chose dont il a fait état dès le début de ses

9 remarques liminaires. Pendant la déposition de la moitié de ses témoins,

10 ces témoins ont évoqué la question de la Grande-Serbie. Je me suis opposé

11 et j'ai répondu aux questions, à toutes les questions qui m'ont été posées

12 dans ce contexte-là.

13 Comment pouvez-vous parler de disjonction dans ce cas-là avant même

14 de répondre à certaines questions. Quel est le sort, quel doit être

15 l'aboutissement de cette procédure qui dure depuis trois ans et demi. Vous-

16 même et la partie adverse vous pensiez que j'étais poursuivi pour cette

17 idée de Grande-Serbie, quelque chose qui correspondrait à une entreprise

18 criminelle commune. Prétendument, c'est ce à quoi nous avons essayé de

19 répondre lorsque nous avons posé des questions aux témoins et essayé de

20 répondre à tous ces éléments de preuve, car c'est ce qu'arguait M. Nice par

21 l'intermédiaire de ses témoins.

22 Quelle est la valeur juridique de cette partie-là de la procédure ?

23 Alors qu'on nous faisait tous croire que c'était le principal objectif du

24 Procureur. Quel est l'intérêt de faire venir tous ces témoins qui ont parlé

25 de l'idée de la Grande-Serbie qui, semble-t-il, aurait été mon objectif

26 principal ? Est-ce que vous avez l'intention de sortir cette idée-là des

27 moyens de preuve présentés ou est-ce que vous allez me laisser entendre les

28 témoins sur la question ?

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1 Qu'en est-il de cette entreprise criminelle commune ? Quels étaient

2 les objectifs de cette entreprise criminelle commune après les

3 changements ? Que cette idée d'une entreprise criminelle commune, quelque

4 chose qui est évoqué ici et qu'est-ce que l'on prétend ? Les gens qui sont

5 assis ici, y compris moi-même, y compris vous-même, d'une part, vous ne

6 pouvez pas savoir tout ce que contiennent ces documents que M. Nice vous a

7 présentés, des millions de pages, ni plus ni moins et personne ne sait ce

8 que le Procureur entend poursuivre, y compris Mme le Procureur elle-même.

9 Elle ne sait pas ce qu'elle entend poursuivre. Je crois que Franz Kafka

10 lui-même aurait l'impression qu'il manquait d'imagination par rapport à

11 cette affaire-ci.

12 Messieurs, après quatre ans quasiment de jonction d'instances, après

13 avoir omis de répondre à vos obligations, après avoir limité la partie

14 adverse, d'après les instructions données par la Chambre de première

15 instance, vous auriez pu procéder à la disjonction d'instance maintenant,

16 alors que vous aurez pu le faire il y a quatre ans déjà. Quatre ans plus

17 tard. Au cours de ces quatre ans, il s'agissait d'une affaire que l'on

18 pouvait considérer dans sa totalité par rapport aux documents présentés,

19 alors que la partie adverse a présenté ces documents comme documents

20 présentés dans leur totalité et moi-même j'ai préparé ma défense en tenant

21 compte de cela.

22 Étant donné que le temps nous est limité, nous est compté quelque

23 chose qui revient sans cesse, les témoins qui sont venus témoigner à propos

24 du Kosovo, à propos de la Bosnie, à propos de la Croatie, il semble que

25 maintenant je sois obligé de faire une sélection de tout ceci. Ceci me

26 demande beaucoup d'efforts.

27 Evidemment se pose tout de suite une autre question : pour ce qui est

28 de ces témoins qui, pour la plupart, sont des témoins qui viennent parler

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1 du Kosovo, mais certains témoins viendront parler également de la Bosnie et

2 de la Croatie. Parmi ces témoins, il y a des témoins que je vous ai demandé

3 de citer à la barre : Clinton, Clark. Au cours de sa déposition, vous ne

4 m'avez pas autorisé à lui poser des questions sur la guerre qui l'a

5 commandé et, oui, le livre qu'il a écrit. Il s'agit de témoins clés et,

6 pendant un an, vous avez entretenu une correspondance avec eux. Il est

7 grand temps que vous compreniez qu'ils ne viendront pas ici si vous ne

8 rendez pas une ordonnance à cet effet.

9 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] C'est une question, je crois, pour

10 laquelle vous devriez faire montrer de gratitude à l'égard des conseils

11 commis d'office. Grâce à leur professionnalisme, nous sommes maintenant en

12 train d'examiner une requête visant à faire comparaître certains témoins.

13 Sans l'intervention et l'aide des conseils de la Défense commis d'office,

14 ceci n'aurait pas pu avoir lieu.

15 L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui. Je suis au courant de cela. Je suis au

16 courant, Monsieur Robinson.

17 Donc, la disjonction d'instance est quelque chose qui nous mettrait

18 dans la situation suivante que je sois poursuivi pour une chose et,

19 ensuite, à mi-chemin, je mettrais à me défendre d'autres choses dont je

20 serais accusé. Je dois me défendre un petit peu sur un plan et un petit peu

21 sur un autre plan, ou sur un autre volet, donc, ce que je fais ici lorsque

22 je parle de la vérité quelque chose qui est sabotée si vous voulez car ceci

23 est déformé. Le fait que M. Nice change de positions par rapport à l'idée

24 de la Grande-Serbie, à mi-chemin, ne fait que de multiplier mes efforts.

25 Ce qu'il a dit est vrai à propos du Kosovo. À ce moment-là, vous

26 seriez en mesure de décider après avoir entendu pendant des années, des

27 accusations infondées sur la Bosnie et la Croatie. Il parle de victimes

28 ici. Je vais vous dire. Je vais vous présenter une de mes victimes à moi.

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1 Il n'a jamais établi de liens du tout.

2 L'INTERPRÈTE : Dans le propos de Milosevic, remplacez, avocat commis

3 d'office par imposer d'autre part, dans la dernière phrase, il est exact

4 que les décisions de la Chambre seraient prises dans le cas du Kosovo --

5 dans le cas de la Bosnie et de la Croatie sur la base d'idée préconçue

6 acquise à l'issue de la présentation des éléments relatifs au Kosovo.

7 L'ACCUSÉ : [interprétation] Il parle ici de victimes et je vais vous

8 présenter une de mes victimes à moi, qui n'a jamais établi le moindre lien

9 entre ce qui est présenté ici, les éléments présentés, les éléments de

10 preuve et les charges qui ont retenues contre moi. Ces victimes ne méritent

11 pas d'être traitées ainsi. Elles ne méritent que des personnes

12 incompétentes soient accusées de choses qu'elles -- soient autorisées à

13 m'accuser qui n'ont pas été faites.

14 M. Nice a parlé de l'annexe B. Je n'ai pas le temps d'en donner lecture

15 mais j'aimerais que nous y jetions un coup d'œil. La première victime qui a

16 parlé ici, Stjepan Mesic, président actuel de la Croatie a témoigné donc

17 ici. C'est la première personne dont le nom figure dans l'annexe B. Il est

18 bien connu, Stjepan Mesic, qui a fait de son mieux dès le départ pour

19 démanteler la Yougoslavie et qui a dit, lui-même, qu'il était responsable

20 de ce travail accompli par lui, qu'il était responsable de la disparition

21 de la Yougoslavie à l'heure actuelle. Il déclare dans sa déposition. Je

22 cite : "C'est moi qui ai dit cela," et cetera, et cetera, et cetera… Tout

23 cela n'a absolument aucun, de sens. Mesic présente donc sa vision déformée

24 de la réalité. Il est repris par la télévision, par la chaîne de télévision

25 britannique BBC qui semble être l'élément star des sources utilisées par M.

26 Nice.

27 Donc, les actes d'accusation ne sont pas fondés sur des faits. Or, un

28 procès n'est pas un spectacle de télévision, n'est pas une émission. Donc,

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1 cela peut paraître totalement irréaliste tout cela. La présentation des

2 éléments de preuve par l'Accusation, tant du point de vue des sources que

3 du point de vue de la façon dont les éléments sont présentés est totalement

4 surréaliste, kitsch.

5 Mais maintenant, je ferai une autre comparaison, une comparaison avec

6 un match de foot. Un match de foot dure 50 minutes et c'est seulement dans

7 la deuxième mi-temps que parfois, les footballeurs se mettent à jouer au

8 basket. Mais dans ce cas, le match est mauvais. Ici, nous sommes dans une

9 situation encore pire que cela. En tout cas, de mon point de vue, les

10 effets négatifs sont encore plus graves.

11 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vous demande un instant.

12 [La Chambre de première instance se concerte]

13 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, veuillez

14 poursuivre.

15 L'ACCUSÉ : [interprétation] Donc, la proposition d'interrompre,

16 d'arrêter le procès est dépourvue de sens. Je pense que, vous-même, vous

17 avez dit, et je cite :

18 "Il est possible que ce soit dans l'intérêt de la Justice qu'au cours

19 de ce procès, l'acte d'accusation relatif au Kosovo soit séparé des autres,

20 qu'un point final soit mis à cette partie du procès relative au Kosovo et

21 donne donc lieu à prononcer de verdict."

22 Voilà, Messieurs les Juges, les mots que vous avez prononcés ici. Ces mots

23 sont très clairs, cette partie du procès. Donc, l'objectif devrait

24 consister à mettre un point final à cette partie du procès. Or, il est

25 impossible de mettre un point final à toutes les parties du procès car une

26 partie ne peut pas être amenée à un point final. Seul, peut être amené à un

27 point final, un tout et pas une partie.Or, conclure, se prononcer de façon

28 définitive sur une partie du procès, ce serait un délit de justice

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1 finalement. Mettre un point final à une partie du procès serait en fait une

2 erreur judiciaire.

3 La situation kafkaïenne que j'ai décrite, tout à l'heure, cette

4 situation kafkaïenne, créée par la nécessité de rendre une décision au

5 sujet de la séparation du volet Kosovo par rapport aux autres volets du

6 procès, je pense que, si cette décision devait être rendue, il s'agirait

7 d'un délit de justice, d'une erreur judiciaire. La situation n'en

8 deviendrait que d'autant plus absurde et d'autant invraisemblable.

9 Bien entendu, il vous appartient de rendre cette décision. Vous comprenez

10 pourquoi dans le monde entier, dans ce cas, le procès que nous vivons ici

11 serait considéré comme une véritable farce.

12 Donc, Messieurs, je suis contre votre ordonnance et la première chose que

13 je vous demande c'est de reprendre le débat au sujet de mon état de santé,

14 de façon à me donner la possibilité de me remettre physiquement.

15 S'agissant de ce qu'a dit M. Bonomy, qui a dit être surpris d'entendre M.

16 Nice invoquer ce dont discute l'opinion, je tiens à vous rappeler ce qui

17 suit. Dans tous les paragraphes de l'acte d'accusation relatifs au Kosovo,

18 des crimes sont cités, crimes qui auraient été commis à l'encontre

19 d'Albanais désarmés. Je cite : "Les forces de la République fédérale de

20 Yougoslavie et de la République de Serbie," ce sont les mots que l'on

21 trouve à l'envie dans le texte de l'acte d'accusation, pratiquement dans

22 tous les paragraphes.

23 Or, chacun en Serbie, chacun dans l'opinion de façon générale s'est bien

24 que : "Les forces de la République fédérale de Yougoslavie et de la

25 Serbie," défendaient leurs pays contre le terrorisme et contre une

26 agression venue de l'étranger. Cela, c'est quelque chose qui est tout à

27 fait claire, aux yeux de tous. Alors, l'expression, que j'ai citée à

28 l'instant et qui apparaît dans tous les paragraphes de l'acte d'accusation,

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1 fait état de crimes présumés, qui auraient été commis par les forces de la

2 République fédérale yougoslave et de la Serbie. Sur ce point, c'est à vous

3 qu'appartient la décision finale. C'est à vous qu'il appartiendra de peser

4 l'importance des négociations menées au sujet du Statut du Kosovo-Metohija,

5 ainsi que, bien entendu, c'est une condition préalable de peser ce que

6 valaient les différents arguments développés au sujet de la nécessité ou

7 pas de commencer la guerre ce dans le cadre de l'examen également des

8 garanties internationales d'intégrité territoriale et de souveraineté dont

9 jouissent tous les pays du monde. Cela est quelque chose qui -- ce sont

10 deux éléments qui sont à peu près sur un pied d'égalité du point de vue de

11 leur poids. Je ne pense pas que qui ce soit accepterait de dire d'emblée

12 que la République fédérale yougoslave et la Serbie doivent être tenues pour

13 coupables, doivent être déclarées coupables d'avoir simplement défendu leur

14 territoire leur intégrité territoriale et leur souveraineté dans le cadre

15 de la défense d'un certain nombre d'objectifs géopolitiques. Ceci c'est une

16 idée très claire pour l'opinion de façon générale et chacun le comprend

17 immédiatement sans nécessité d'explications très longues.

18 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Milosevic, je me demandais si

19 vous pouviez m'aider sur un point, car vous parlez d'éléments de preuve que

20 j'aurais à ma disposition et vous avez ajouté que je serait dans une

21 situation où des ordres m'auraient été donnés. Alors, sans vous demander de

22 répondre d'abord à d'où viendraient ces prétendus ordres, je vous demande

23 quels sont les éléments de preuve que j'ai à ma disposition et qui

24 viendraient de ces personnes qui m'auraient donné des ordres ?

25 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Bonomy, ce Tribunal au départ a été

26 créé en tant qu'instrument destiné à agir contre mon pays dans le cadre

27 d'une guerre. Il a été créé de façon illégale, il a été créé suite à une

28 décision illégale prise par des instances qui voulaient lancer la guerre

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1 contre mon pays. Cela est la seule chose qui est exact dans tout ce qui a

2 été dit ici : il a existé bel et bien une entreprise criminelle commune,

3 mais elle n'avait pas son siège à Belgrade, ni en Yougoslavie, elle avait

4 son siège, là, où se trouvaient ceux qui depuis 1991, se sont employés à

5 obtenir la destruction de la Yougoslavie. La Yougoslavie ne s'est pas

6 démantelée --

7 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Vous n'avez pas répondu à ma question.

8 Je vous demanderais de répondre à ma question plutôt que de vous lancer

9 dans des discours politiques.

10 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Robinson, ou plutôt, Monsieur Bonomy,

11 je ne fais pas de discours politiques en ce moment. Je crois savoir que

12 vous êtes au service de ceux qui ont commis des crimes contre mon pays et

13 contre mon peuple, et vous êtes payé pour cela, vous touchez un salaire

14 pour cela.

15 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Est-ce que vous acceptez de répondre,

16 oui ou non, à la question que je vous ai posée ?

17 L'ACCUSÉ : [interprétation] Non, non, non, je ne refuse pas de répondre. Je

18 vous demande simplement si vous allez prétendre que votre salaire vient des

19 Nations Unies. Qui finance ce Tribunal, Monsieur Bonomy ? Qui a créé ce

20 Tribunal ? Est-ce que c'est votre pays ou quelqu'un d'autre ? A qui est-ce

21 que j'ai demandé de venir témoigner ici ? J'ai bien demandé cela à vos

22 présidents et premiers ministres.

23 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Est-ce que vous laissez entendre que

24 je ne serais pas payé par les Nations Unies ?

25 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je prétends, Monsieur Bonomy, parce que les

26 Nations Unies financent ce Tribunal illégal. Il n'est pas financé que par

27 les Nations Unies. Il est financé par des sources diversifiées. J'en ai

28 énuméré déjà certaines. Alors, sur le plan officiel, que vous receviez

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1 votre salaire de quelqu'un ou de quelque chose qui s'appelle Nations Unies

2 ou pas cela n'a guère d'importance pour ce qui me concerne.

3 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Bien, veuillez passer à autre chose

4 puisque vous venez d'obtenir la preuve que vous étiez dans votre tort.

5 Concentrons-nous sur la question qui doit nous intéresser à savoir celle de

6 la séparation des dossiers Kosovo et autres de l'acte d'accusation.

7 L'ACCUSÉ : [interprétation] Par conséquent, Messieurs, comme je vous l'ai

8 déjà dit, je suis contre cette séparation des volets de l'acte d'accusation

9 car il n'y a eu qu'une seule et même guerre. J'ai dit que la Yougoslavie ne

10 s'était pas démantelée et n'avait pas disparue par enchantement, elle a été

11 détruite de façon planifiée, sous la contrainte par le truchement d'une

12 guerre, et cette guerre est toujours en cours, elle fait toujours rage.

13 L'un des instruments de cette guerre c'est votre Tribunal illégal.

14 Je dirais de la façon la plus nette qui soit, que s'agissant de votre

15 décision finale que vous décidiez de disjoindre ou de ne pas disjoindre les

16 différents aspects de l'acte d'accusation, ou de maintenir un seul procès

17 intégré, je ne crains pas votre décision, car si votre jugement est à

18 comparer aux droits et à la vérité -- si votre jugement avait eu le même

19 poids que la vérité et le droit et la loi, il n'aurait pas eu lieu pour

20 commencer. Mais puisqu'un procès a été commencé, il doit finir d'une façon

21 ou d'une autre : une décision doit être rendue qui signifie l'absence de

22 culpabilité. Si vous ne rendez pas la justice en fonction de la vérité,

23 alors votre décision disparaîtra, se dissipera comme une bulle de savon,

24 parce que le tribunal du monde et le tribunal où se rend la justice et où

25 se dit la vérité n'ont rien à voir avec ce Tribunal. Il appartient à chacun

26 d'entre nous ici, et à chacun de vous, Messieurs, de choisir et de donner

27 la place qui lui revient à l'histoire, et c'est en fonction de ce tribunal

28 existant dans l'histoire que votre décision doit être rendue. Donc, ne vous

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1 faites aucune illusion sur ce point.

2 Par conséquent, comme je l'ai dit, je suis opposée à la disjonction. Je

3 demande qu'on me donne un certain temps pour me remettre physiquement.

4 J'insiste également sur mon mauvais état de santé, très mauvais état de

5 santé, mais je suis venu de façon à ce que les débats se poursuivent. Je

6 vous demande de vous pencher sur ma demande, et de m'accorder un certain

7 temps de repos. Quant à la disjonction ou la non disjonction, je me suis

8 exprimé sur ce point également.

9 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci, Monsieur Milosevic.

10 Maître Kay.

11 M. KAY : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

12 Les arguments de l'accusé sont centrés sur deux questions de la plus haute

13 importance à mes yeux, la première étant son état de santé et la deuxième,

14 l'importance des charges retenues contre lui et le grand nombre de

15 documents qu'il a à examiner. Il est clair que sa défense a été menée

16 pratiquement sans interruption depuis pratiquement un an, date à laquelle

17 son état de santé s'était compliqué, or, l'Accusation parle de prétendue

18 maladie, ce qui n'est absolument pas le cas. En effet, cette maladie, ce

19 mauvais état de santé est bien réel, il existe des rapports médicaux qui le

20 démontrent, et je crois savoir que le dernier rapport en date a été discuté

21 ce matin et sera prêt une fois traduit pour distribution générale cet

22 après-midi, vous y trouverez les derniers éléments relatifs à son état de

23 santé.

24 Lorsque ce procès a commencé, c'est l'Accusation qui a demandé que les

25 trois volets de l'acte d'accusation soient intégrés en un seul et même

26 acte. Elle l'a fait même si au départ dans la première mouture de l'acte

27 d'accusation de la part du bureau du Procureur il existait trois textes

28 différents.

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1 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Robinson.

2 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, Monsieur Milosevic.

3 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je tiens à dire pour le public qui écoute en

4 serbe, que l'interprète a dit que c'était la Défense qui avait demandé que

5 le texte soit intégré, or, je vois au compte rendu d'audience, que le mot

6 prononcé en anglais par Me Kay était l'Accusation et non la Défense.

7 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci. C'est exact.

8 M. KAY : [interprétation] Merci beaucoup. Je vous remercie. C'était très

9 clair. C'est à l'initiative de l'Accusation que le texte de l'acte

10 d'accusation devait être intégré la Chambre de première instance n'était

11 pas favorable à cela, il y a donc eu audience en appel, et des arguments

12 ont été présentés sur la forme que devait revêtir le procès. Nous sommes

13 aujourd'hui plusieurs années après cela puisque cela s'est passé en 2001,

14 2002 et, à l'époque, il est impossible de savoir quel serait le déroulement

15 exact, concret du procès dans la réalité.

16 Mais, dans l'arrêt rendu par la Chambre d'appel que je viens

17 d'évoquer, il est était clair que ce qui préoccupait un peu la Chambre

18 c'était d'arriver à une situation où la Chambre de première instance ne

19 serait plus capable de gérer le procès, ou à une situation dans laquelle

20 l'accusé ne pourrait plus gérer le procès et que cela exigeait une décision

21 qui ne devait en aucun cas être une décision permanente, mais bien une

22 décision temporaire de façon à ce qu'il puisse y avoir ultérieurement

23 réexamen par la Chambre de cette question d'intégration de l'acte

24 d'accusation ou de séparation des différents volets.

25 Ce qui nous préoccupe, nous, aujourd'hui, c'est que l'état de santé de

26 l'accusé, qui se défend lui-même, risque d'évoluer de telle façon que

27 l'accusé se verrait un jour dans l'incapacité de continuer à se défendre

28 lui-même. Nous tenons également beaucoup à ce que le temps global imparti à

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1 l'accusé pour se défendre par rapport aux trois volets de l'acte

2 d'accusation soit suffisant de façon à lui permettre d'assurer une défense

3 effective.

4 Au stade du procès où nous sommes arrivés aujourd'hui, eu égard au temps

5 qui a été accordé par la Chambre à l'accusé pour se défendre, nous avons

6 déjà utilisé pratiquement 75 % du temps qu'il lui était imparti. Il devient

7 clair aux yeux de chacun que, dans le temps qui reste, il ne peut pas être

8 question de défense efficace de la part de l'accusé par rapport au volet

9 Croatie et Bosnie de l'acte d'accusation. Donc, ce qui nous inquiète un

10 petit peu c'est qu'il risque fort de se produire que l'accusé ne soit pas

11 capable dans un temps insuffisant d'une part, de conclure la présentation

12 de ses moyens au sujet du volet Kosovo de l'acte d'accusation et, ensuite,

13 d'assurer ou de préparer en tout cas une défense suffisamment solide par

14 aux deux autres volets, à savoir Bosnie et Croatie de ce même acte

15 d'accusation.

16 Il est possible que cela soit dû pour partie au volume des éléments de

17 preuve. Si l'on prend en compte uniquement le volet Kosovo de l'acte

18 d'accusation, et qu'on le divise en fonction des différents chefs

19 d'accusation existants dans le texte par rapport aux différents crimes

20 présumés commis, et que l'on se pose la question de la responsabilité

21 pénale qui est alléguée à l'Article 7(1) du Statut, donc, responsable pénal

22 individuel ainsi que de la responsabilité au titre de la supériorité

23 hiérarchique qui est énoncée dans l'Article 7(3) du Statut. Donc, si l'on

24 segmente les différents paragraphes de l'acte d'accusation par rapport à

25 ces deux articles du Statut, par rapport à ces deux formes de

26 responsabilité, par conséquent, par rapport aux différentes charges

27 retenues contre l'accusé, ainsi que par rapport au lieu, c'est-à-dire, aux

28 différentes municipalités où les crimes auraient été commis, c'est une

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1 pratique -- c'est une façon de procéder qui est tout à fait courante pour

2 tout avocat qui se respecte, et je peux vous dire qu'on en arrive à un

3 total de 150 à 200 rubriques différentes à traiter dans le cadre de la

4 défense. Cela nous amène à un total de ce qu'on peut appeler 200 chefs à

5 traiter; autrement dit, multiplier par dix par rapport au nombre initial.

6 La Chambre de première instance devant laquelle nous nous trouvons a

7 affaire à 2 000 faits différents par rapport à 200 incidents cités,

8 puisqu'on peut compter une dizaine de faits démontrés pour un incident.

9 Ce qui nous met en présence d'un très grand nombre de faits qu'il faut

10 nier, lorsqu'on veut assurer une défense suffisante et solide. Dans les

11 trois volets de l'acte d'accusation, nous avons sur le papier 66 chefs

12 d'accusation. Là, je parle des différents chapitres et des têtes de

13 chapitre uniquement. Si l'on ajoute au raisonnement les deux formes

14 différentes de responsabilité, c'est-à-dire, la responsabilité retenue à

15 l'Article 7(1) et à l'Article 7(3) du Statut, responsabilité individuelle

16 et responsabilité au titre de la supériorité hiérarchique, on voit que

17 l'accusé doit faire face à 132 chefs d'accusation dans trois parties de

18 l'acte d'accusation. Si on procède de la même façon pour le volet Kosovo

19 isolément, on voit que le nombre de charges auxquelles qu'il doit

20 effectivement traiter et décupler par rapport aux chiffres d'origine est

21 qu'on arrive facilement à 10 000 dans l'acte d'accusation Kosovo.

22 A notre avis, il n'est pas étonnant que vu le volume des éléments de preuve

23 présentés la santé de l'accusé se soit dégradé, ainsi d'ailleurs que la

24 possibilité de gérer ce procès.

25 Nous en sommes arrivés à un moment où l'accusé a dit très récemment en

26 audience publique qu'il lui restait 19 témoins à entendre pour le Kosovo.

27 Une liste de témoins a été fournie à la Chambre de première instance. On

28 voit qu'au départ il pensait à interroger à peu près 200 témoins. Donc, 200

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1 c'est pour les trois volets de l'acte d'accusation. C'est le total des

2 témoins qu'il avait l'intention d'entendre. A notre avis encore une fois,

3 je le répète il n'est pas étonnant qu'un nombre si important de témoins

4 potentiels et le travail qu'implique la préparation de ces auditions ait

5 joué un rôle négatif sur son état de santé.

6 L'Accusation pendant tout le procès s'est plainte du fait qu'elle n'était

7 pas prévenue suffisamment à l'avance des questions qui allaient être

8 débattues dans le prétoire. Nous ce qui nous préoccupe un petit peu, c'est

9 que l'accusé se voit accorder un temps suffisante et nécessaire pour

10 effectivement assurer une défense efficace par rapport aux trois aspects,

11 aux trois volets de l'acte d'accusation.

12 Je parlerais maintenant des témoins qui ont déjà entendu, qui ont

13 déjà été entendus jusqu'à présent. Si l'on examine rapidement la situation

14 des témoins de la Défense déjà entendus, on voit qu'ils ont occupé à peu

15 près 15 pour cent du temps alloué à la Défense dans le volet Kosovo, qu'ils

16 ont déjà -- on voit que pendant 15 pour cent du temps consacré à l'audition

17 des témoins relatifs au Kosovo, des témoins qui ont également parlé de la

18 Croatie et de la Bosnie ont été entendu. Donc pendant 15 pour cent du temps

19 il y a eu chevauchement.

20 Un certain nombre de faits et de chiffres maintenant qui vous

21 prouveront le volume et l'importance numérique des éléments qu'il importe à

22 notre avis de prendre en compte, s'agissant de déterminer si oui ou non le

23 procès reste gérable et si oui ou non l'état de santé de l'accusé mérite

24 des décisions particulières. Donc pour vous démontrer quelle pression subie

25 par l'accusé compte tenu du volume des éléments de preuves, je vous informe

26 du fait que le Conseil commis d'office a établi un tableau qui permet

27 d'examiner l'aspect numérique de la situation et de la replacer par rapport

28 au contexte.

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1 Nous en sommes à quelque 46 000 pages de compte rendu d'audience en ce

2 moment-ci, et dans le cours du procès contre l'accusé qui a été entamé en

3 juillet 2001, nous avons eu 2 256 écritures distinctes de présentées. Le

4 nombre de pages englobées par ces écritures se chiffre à 63 775.

5 Les éléments de preuve produits par l'Accusation qui sont au nombre de 930

6 se trouvent être répartis en intercalaires et sections, et il y a 85 000

7 pages d'éléments de preuve, ce qui n'inclut les DVD, les CD et les

8 informations qui y sont contenus. L'Accusation a également présenté 117

9 enregistrements vidéo. La Défense a présenté 328 pièces à conviction sur

10 quelque 9 000 pages à ce jour.

11 Pour ce qui est de la communication des pièces et des éléments de

12 preuve présentés à ce jour pour que les parties traitent de l'affaire, le

13 nombre de pages des documents communiqués en application de l'Article

14 66(A)(ii), à savoir les déclarations sur lesquelles nous nous sommes

15 appuyées pendant le procès se chiffrent, elles, à 106 000 pages. Le nombre

16 de pages communiquées en application du 66(B) est de 207 000 pages. En

17 application de l'Article 68 pour ce qui est de pièces servies par

18 l'Accusation, nous en sommes à 930 000 pages.

19 Nous sommes en train de conduire une affaire ici qui englobe plus

20 d'un million de pages de documents ou plutôt pour être plus exact, 1

21 million 200 milles pages.

22 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Maître Kay, je suis désolé de

23 vous interrompre.

24 Monsieur Nice, je vais vous demander de répondre à tout ceci et

25 notamment à une question en particulier. J'ai l'intention de vous dire

26 laquelle pour que vous puissiez vous préparer. Quand vous avez fait votre

27 présentation, j'aimerais que vous vous référiez à la maladie apparente qui

28 semble être celle de l'accusé, avez-vous dit ? M. Kay s'est référé à cet

Page 46702

1 élément et l'accusé l'a fait.

2 M. NICE : [interprétation] J'ai vérifié ceci et je crois que rien ne se

3 trouve confirmer les écritures dans ce sens.

4 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Il s'agit d'écritures de l'année

5 passée.

6 M. NICE : [interprétation] J'ai vérifié et je voulais de toute manière

7 attirer votre attention sur ce fait.

8 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci.

9 Monsieur Kay, continuez.

10 M. KAY : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

11 Nous savons que l'accusé a passé quatre ans et cinq mois et pendant cette

12 période, il a dû traiter une quantité de documents telle celle qui a été

13 produite. Nous savons que l'infrastructure de ce Tribunal a souvent eu des

14 difficultés d'admettre de copier ces volumes de documents. Nous avons eu

15 des difficultés également pour ce qui est de la traduction des pièces. Le

16 maximum de pages que l'on peut traduire par mois est de quelque mille

17 pages. Or, la quantité est facilement dépassable si l'on se penche sur le

18 nombre des documents que l'accusé est censé présenter. Nous savons

19 également que les documents présentés par l'Accusation ont dépassé très

20 souvent cette limite.

21 Nous savons qu'il est très difficile parfois de retrouver certains

22 documents et il en a été question dans des écritures récentes. Il a

23 également été question d'identification des documents ou plutôt des

24 documents portant une cote à des fins d'identification et nous avons traité

25 de la façon dont il convient de les suivre au fur et à mesure de leur

26 passage par les services de traduction jusqu'à versement au dossier. On a

27 parlé des documents pour et contre leur admissibilité. Il y a eu quatre

28 semaines de travail de la part des collaborateurs, des stagiaires notamment

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1 qui viennent de l'extérieur pour essayer de se débrouiller dans toutes ces

2 pièces. Nous savons également que l'accusé n'a pas fait de requête par

3 écrit à ce sujet. Mais je crois savoir qu'il ne lui a pas été possible

4 d'accomplir la tâche dont nous nous sommes chargés.

5 Il y a eu également des difficultés au niveau de ces écritures parce

6 que le Procureur a fourni sa réponse à l'un de nos documents où il est fait

7 état d'une erreur évidente qu'ils ont qualifié d'erreur technique, mais

8 c'est, de façon certaine, une erreur qui est survenue en raison du volume

9 des documents qu'il convient de traiter ici. Il n'est point étonnant de

10 voir survenir des malentendus concernant une section ou une partie

11 particulière et l'erreur s'est répercutée au fil du document et des

12 documents qui ont suivi.

13 Ce n'est pas bien du point de vue de la gestion. Ce n'est pas bien

14 non plus pour ce qui est de la conduite de la présentation des éléments de

15 la Défense, comme cela n'a pas été bon pour ce qui est de la présentation

16 des éléments à charge. Il est dans notre intérêt de voir les pièces à

17 conviction de l'accusé versées au dossier et une fois qu'ils seront

18 produits, il convient qu'un maximum de documents de ce type ait déjà été

19 traduits afin que les Juges de la Chambre aient la possibilité d'en prendre

20 connaissance et de les comprendre. Il vaut mieux faire cela que de traduire

21 ici en salle d'audience à partir du rétroprojecteur.

22 Au moment où il y a eu jonction d'instances, il est apparu clairement

23 que l'Accusation a demandé cela parce que, de son avis, il y avait un plan

24 de création d'une Grande-Serbie. Ils ont fait état de la participation de

25 l'accusé à la mise en œuvre de ce plan. Ils l'ont fait au travers

26 d'arguments présentés et les Procureurs se sont relevés à ce sujet et bon

27 nombre d'arguments ont été présentés, mais c'est ce lien qui a toujours été

28 au centre de l'attention.

Page 46704

1 Maintenant, en 2001/2002, nous n'avons pas été mieux informés non

2 plus de l'apparence des éléments de preuve dont ils ont disposé. Alors,

3 nous avons beaucoup plus d'informations à ce sujet parce que nous avons

4 entendu leurs éléments de preuve et nous avons entendu les éléments de

5 preuve de la Défense à cet égard et, notamment, les éléments de preuve

6 concernant le Kosovo. Il est clair que le concept relatif à la Grande-

7 Serbie ne s'intégrait pas et ne s'intègre aux allégations faites par

8 l'Accusation concernant la Croatie et la Bosnie. Ce que l'Accusation a

9 affirmé à l'époque n'a pas été, de notre avis, prouvé par les éléments de

10 preuve qui ont été présentés à ce jour. Du moins, c'est notre opinion.

11 Pendant les débats tenus en 2001 devant les Juges de la Chambre,

12 l'Accusation a été sollicitée pour ce qui était d'apporter leurs

13 explications. Les amis de la Chambre ont également été sollicités pour ce

14 qui était de présenter leurs opinions par écrit au sujet des différences

15 survenant entre les différents segments ou les différents volets de l'acte

16 d'accusation Kosovo, Bosnie et Croatie, et les Juges de la Chambre ont

17 demandé des éclaircissements. À aucun moment, l'Accusation n'a émis de

18 réserves, des réserves concernant ce concept particulier et l'idée en tant

19 que telle. C'est l'idée qui est demeurée aux termes de laquelle il y a eu

20 volonté de créer une Grande-Serbie et c'est la raison pour laquelle les

21 actes d'accusation ont été regroupés.

22 Maintenant, il convient aux Juges de la Chambre de procéder à une

23 rétrospective s'agissant des éléments de preuve et de juger de leur

24 validité, de la validité des allégations présentées. Il est de notre avis

25 que quelles qu'aient été les allégations présentées par l'Accusation au

26 sujet de la Croatie et de la Bosnie, tout ceci ne s'intègre pas à l'image

27 d'ensemble quand il s'agit du volet Kosovo de l'acte d'accusation.

28 L'Accusation a présenté une requête hier ou aujourd'hui, au sujet de

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1 ce qui a fait l'objet de notre audience. J'ai reçu le document ce matin. Il

2 s'agit de l'Avenant B qui comporte une liste de témoins que l'Accusation a

3 cité à comparaître ici dans la phase des volets Croatie et Bosnie, et il y

4 est établi les relations qu'il y a entre le témoignage de ces témoins-là et

5 l'acte d'accusation volet Kosovo. Il s'agit de quelque 20 à 25 pages. Je

6 n'ai eu que très peu de temps pour m'y pencher, j'ai parcouru ce texte,

7 mais je crois pouvoir apporter un commentaire. Lorsqu'il s'agit de ces

8 écritures de l'Accusation, je précise qu'il nous faudrait deux ou trois

9 semaines de travail. Mais je puis, d'ores et déjà, parler de la première

10 page parce que c'est là un aspect que j'ai déjà examiné très attentivement

11 il y a peu de temps, lorsque j'ai procédé aux préparatifs de nos écritures

12 de clôture.

13 Le premier témoin, le C-37, a été qualifié : "De témoin dont le témoignage

14 se trouvait être lié à l'équilibre ethnique au Kosovo." Cependant, il n'a

15 apporté aucun, absolument aucun élément de preuve qui concernerait les

16 questions contestées de l'acte d'accusation Kosovo. Une partie de son

17 témoignage concerne la Croatie et son rôle là-bas. Si vous vous penchez sur

18 le compte rendu d'audience et les propos qu'il a tenus, je ne pense pas

19 qu'il puisse être considéré comme étant un témoin ayant quoi que ce soit a

20 à voir avec le Kosovo.

21 Le deuxième témoin, M. Mesic, est une personne que l'accusé a contactée

22 souvent. Vous avez pu lire son témoignage et relire son témoignage. Il

23 n'avait rien à voir avec le volet de l'acte d'accusation Kosovo. Il est dit

24 ici que : "Milosevic avait occupé une place centrale dans le nationalisme

25 serbe." Or, M. Mesic n'a pas été nécessaire ici en sa qualité de témoin

26 pour ce qui est de la présentation des éléments de l'allégation de la part

27 du bureau du Procureur. Le bureau du Procureur a essayé de citer un nombre

28 maximum de témoins à ce sujet dans le volet Kosovo pour essayer d'établir

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1 les corrélations qu'il voulait établir au sujet du volet Kosovo. Mais cela

2 n'a pas du tout eu cette valeur là.

3 Le témoin suivant, M. Matovina a parlé de question de nature générale au

4 sujet du Kosovo. Il a parlé de la toile de fond au Kosovo, il a parlé de la

5 province autonome dans le cadre de l'Etat et rien, dans son témoignage,

6 n'est venu conforter les chefs d'accusation.

7 Le journaliste Anastasijevic a parlé du "modus operandi de l'accusé ou

8 plutôt d'un modèle de comportement de sa part." C'est un journaliste qui a

9 rédigé des articles au sujet des conflits en Croatie et Bosnie. Mais aucune

10 corrélation avec le Kosovo du tout.

11 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Quelle est la finalité de votre part

12 pour ce qui est de contester les témoignages de ces témoins un par un,

13 alors qu'il suffirait de dire que tôt ou tard nous y arriverons au mémoire

14 de clôture ?

15 M. KAY : [interprétation] Il est tout à fait clair que l'on est en train de

16 présenter des éléments de preuve liés à l'acte d'accusation volet Kosovo et

17 on voit l'Accusation se servir de tout ce qui lui tombe sur la main pour

18 essayer de montrer qu'il y a là corrélation. Nous sommes censés y répondre.

19 L'accusé lui-même est censé répondre à cela. Or, si les arguments ne sont

20 pas fondés sur la réalité, cette approche fragmentée ne se centre pas sur

21 l'acte d'accusation et, de notre avis, il est complètement dénué de sens de

22 traiter de toutes ces questions rien qu'aux fins de les contester ou de les

23 réfuter. On voit, dans l'annexe même, que M. Nice présente des allégations

24 qui ne se fondent pas sur des arguments valides et sur un raisonnement

25 solide. Je doute vraiment que M. Nice ait lui même rédigé ceci.

26 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Il y a quelque chose que je ne

27 comprends pas. Vous avez mentionné Matovina et vous avez dit que : "son

28 témoignage n'avait que peu de pertinence au sujet du Kosovo, si pertinence

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1 il y a." Comment dois-je comprendre cela, Monsieur Nice ? Comment se fait-

2 il que cela soit inclu dans cette liste s'il n'y a pas de pertinence ?

3 M. NICE : [interprétation] Nous avons placé là tous les témoins afin que

4 vous voyez en expression proportionnelle, s'agissant des chiffres le nombre

5 des témoins dont le témoignage a été directement pertinent s'agissant du

6 volet Kosovo. On dit ici, par exemple, pertinence limitée ou nulle, parce

7 qu'il y a toujours possibilité qu'il y ait quelque chose dans le témoignage

8 qui se trouverait à avoir de la pertinence. Nous avons dû rédiger une liste

9 complète autrement cela paraîtrait être sélectif.

10 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, Maître Kay.

11 M. KAY : [interprétation] Je crois que le moment est venu de commenter le

12 témoignage d'un autre témoin, à savoir, le Témoin C-1220. Il est dit à son

13 sujet que : "La pertinence Kosovo de son témoignage se trouve être limitée

14 sinon nulle." S'agissant d'Anastasijevic, il y a un texte quelque

15 troublant, on dit : "Similaire ou analogue", d'après le témoignage de ce

16 témoin : "Il a fallu à l'accusé un autre conflit que celui du Kosovo pour

17 rester au pouvoir étant donné que les parties de l'opposition l'avaient

18 accusé d'une fraude électorale en hiver 1996/1997."

19 C'est le journaliste qui a rédigé des articles qui ont fait l'objet d'une

20 grande controverse à l'époque et il me semble qu'à cet effet l'accusé avait

21 dit qu'on avait permis aux témoins de l'Accusation de dire tout ce qu'ils

22 voulaient, peu importait ce qu'ils pensaient et ce qu'ils avaient rédigé.

23 Le Procureur s'était référé à leurs propos et à leurs écrits.

24 Je continue sur la liste, Dulovic, on dit qu'il n'y a rien de pertinent

25 dans le témoignage Dulovic quant à l'acte d'accusation Kosovo et on fait

26 des comparaisons entre l'opinion qu'il a exprimée dans un contexte pour le

27 transposer à un autre contexte, mais cela n'a rien à voir avec les chefs

28 d'accusation à l'encontre de l'accusé dans le cadre de l'acte d'accusation.

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1 Cela ne fait qu'inciter l'accusé à gaspiller son temps, son énergie et les

2 ressources qui sont les siennes pour traiter ou pour répondre à cette

3 approche au cas le cas de la part de l'Accusation.

4 S'agissant du Témoin C-020, la même question que se pose. Il est question

5 des paramilitaires qui sont intervenus en Croatie et ultérieurement au

6 Kosovo. C'est tout ce dont il a en réalité parlé, le témoin C-020.

7 Je vais m'arrêter là, je ne vais pas me référer aux 50 pages qui suivent.

8 Lazarevic. Lazarevic nous a parlé quelque peu du Kosovo, il y a d'autres

9 éléments auxquels s'est référé davantage l'Accusation qui ont été formulés

10 de façon différente. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle c'est un

11 témoin qui est prévu pour le volet Croatie du procès.

12 Mustafa Candic, lui, a parlé de la corrélation qu'il y avait entre tout

13 ceci et la Grande-Serbie. C'est comme si vous vous efforciez de lire des

14 lettres toutes petites pour ce qui est d'un manuel d'instruction ou d'un

15 manuel d'emploi d'une machine à laver, d'un lave-linge --

16 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] S'agissant d'une Grande-Serbie, on a

17 dit une Serbie agrandie. Je crois que cela avait été la thèse argumentée

18 par l'Accusation.

19 M. KAY : [interprétation] Le Kosovo fait de toute manière partie de la

20 Serbie, et je crois que ceci ne fait aucun sens à mon avis parce qu'une

21 Serbie agrandie ce n'est pas la même qu'une Grande-Serbie peut-être cela

22 allait-il jusqu'aux mêmes frontières, mais je me suis penché sur la

23 question déjà.

24 Milan Babic, une fois de plus, n'a rien à voir avec le Kosovo.

25 C'est donc là l'échelle et la portée de ces documents-ci, l'on se réfère

26 maintenant aux faits concrets et vous être à même de le faire davantage à

27 présent que dans la phase initiale du procès lorsque vous voyez de quelle

28 façon l'acte d'accusation est formulé, quels sont les éléments de preuve

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1 sur lesquels s'appuie l'Accusation et, si vous vous penchez sur les

2 éléments de preuve produits par la Défense, vous avez le sentiment qu'il y

3 a perte de temps et gaspillage de temps et de ressources parce que vous

4 êtes en train de traiter de questions qui vont se solder par rien du tout.

5 Enfin, ce sont nos opinions. Nous ne savons pas quel va être l'opinion des

6 Juges de la Chambre de première instance.

7 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Kay, je viens d'être

8 rappelé par mes confrères que l'heure est venue de faire une pause.

9 M. KAY : [interprétation] Je m'excuse.

10 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Nous allons faire une pause de 20

11 minutes.

12 --- L'audience est suspendue à 12 heures 23.

13 --- L'audience est reprise à 13 heures 04.

14 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Maître Kay.

15 M. KAY : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

16 Nous avons un calendrier des témoins de la Défense qui est préparé et qui

17 contient les pages du compte rendu d'audience sur la Croatie et la Bosnie,

18 et je crois que s'il y a un chevauchement, eu égard aux actes d'accusation,

19 ceci pourrait être utile pour les Juges de la Chambre. Vous avez peut-être

20 une impression sur la question, mais quelquefois c'est utile de voir ceci

21 dans la réalité, je crois que les chiffres peuvent être utile, ceci a été

22 préparé par nos assistants, ce qui nous est fort utile.

23 La Chambre de première instance constatera que les témoins cités à la barre

24 par la Défense qui chevauchent avec les volets Croatie et Bosnie, au début

25 du procès, M. Seselj, bien évidemment, qui a consacré plus de temps que les

26 autres témoins à sa déposition sur des documents qui se chevauchent, ceci

27 correspond à 10 % du volet en question. Les autres témoins représentent 6

28 %, environ.

Page 46710

1 J'espère que ceci pourrait s'avérer utile pour les juges de la Chambre. En

2 réalité, j'en ai presque terminé avec mon argument aujourd'hui.

3 Pour ce qui est de la manière dont la Défense gère la présentation de

4 ses moyens, l'Accusation, encore une fois aujourd'hui, a saisi l'occasion

5 pour critiquer la Défense, je souhaite rappeler aux Juges de la Chambre que

6 l'Accusation, par l'intermédiaire de 29 requêtes différentes à souhaiter

7 modifier sa liste de témoins, rajouter des témoins, enlevés des témoins. A

8 la date du 4 novembre 2003; autrement dit, au cours de quatre dernier mois

9 de la présentation des moyens à charge, la Chambre de première instance a

10 dû prendre une ordonnance demandant au Procureur de donner une liste

11 définitive de ces témoins, et pour que cette liste définitive des témoins

12 soit fournie à ce stade du procès. En réalité, l'ordonnance portant sur la

13 production d'une liste définitive des témoins est datée du 13 septembre

14 2003, à cette date-là, une liste définitive n'avait toujours pas été

15 fournie. La raison est exactement la même qui est celle à laquelle se

16 trouve confronter l'accusé; autrement dit, les témoins peuvent changer --

17 peuvent modifier certains aspects à être abordés, et au cours du procès,

18 certaines idées deviennent plus importantes que d'autres, et ceci est

19 important tout au long du déroulement du procès. Par conséquent, il s'avère

20 que certaines modifications sont nécessaires, pour aussi -- s'il s'agit

21 d'appliquer de façon très rigide les critères qui ont été appliqués par le

22 Procureur sur l'accusé est quelque chose qui a été abordé par la Chambre de

23 première instance, et il faut dire qu'on doit appliquer les mêmes

24 circonstances aux deux, et reconnaître que les deux ont droit à cette même

25 attitude. Nous insistons là-dessus puisqu'il s'agit de quelque chose qui

26 doit être reconnu et apprécié étant donné que l'accusé assure sa propre

27 défense.

28 Il s'agit là de questions auxquelles je souhaite que les Juges de la

Page 46711

1 Chambre portent leur attention car ce sont de véritables sujets de

2 préoccupation. Nous sommes inquiets car l'accusé a des problèmes de santé

3 que nous connaissons, et il a un temps qu'il lui a été accordé, il doit

4 présenter les moyens à décharge de la façon la plus efficace possible par

5 rapport aux actes d'accusation concernés.

6 Je ne sais pas si je puis être d'une quelconque utilité.

7 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Maître McCormack, si vous avez

8 quelque chose à faire à l'égard des arguments présentés jusqu'à présent,

9 vous avez la parole.

10 M. McCORMACK : [interprétation] Je souhaite ici présenter un contre

11 argument, je ne sais pas, si je puis le faire. Je ne sais pas si ceci s'est

12 déjà présenté au procès. Je ne sais pas si les deux parties ont été

13 d'accord ou si les arguments ont été tellement différents tel que c'est le

14 cas, à savoir si la situation est nouvelle ou pas. Je souhaite néanmoins

15 présenter un autre argument en faveur de la disjonction de l'acte

16 d'accusation du Kosovo ce qui vous permettra peut-être au cours de vos

17 délibérations, à savoir si, oui ou non, il faut procéder à cette

18 disjonction.

19 Il me semble que l'argument le plus important en faveur de la

20 disjonction de l'acte d'accusation du Kosovo est la longueur du procès

21 jusqu'au jour d'aujourd'hui. La Chambre d'appel, dans sa décision de

22 commettre d'office un conseil de la Défense le

23 1er novembre 2004, au paragraphe 19, du premier paragraphe de ce dispositif,

24 a utilisé la métaphore du transport maritime dans la dernière phrase de ce

25 même paragraphe : "Par conséquent, cela incombe à la Chambre de première

26 instance et, compte tenu de ses pouvoirs discrétionnaires la Chambre de

27 première instance peut effectivement exercer son -- peut autoriser M.

28 Milosevic à exercer son droit à se défendre lui-même, tout en protégeant

Page 46712

1 les meilleurs intérêts du Tribunal et la manière rapide dont ce procès doit

2 être évolué. Il s'agit ici de tenir la barre du bateau de façon approprié."

3 La Chambre d'appel parle du droit d'assurer sa propre défense, et je

4 crois qu'il s'agit ici du droit de l'accusé. Il s'agit d'une part de tenir

5 la barre du bateau de façon approprié, et de l'autre de protéger les

6 intérêts de ce Tribunal, et faire en sorte que cette affaire soit menée à

7 bien en temps et en heure. Peut-être qu'en ce qui concerne les droits de

8 l'accusé, il ne faudrait plusieurs parler de quelqu'un qui tient la barre,

9 mais il faudrait parler de l'objectif qui est un aboutissement relativement

10 rapide de ce procès.

11 Nous avons entendu les arguments des parties. Nous avons même

12 entendu les arguments, nous avons même entendu M. Nice, M. Milosevic et Me

13 Kay, respectivement. Nous avons entendu les arguments avancés pour

14 expliquer les raisons pour lesquelles ce procès a duré aussi longtemps,

15 mais quel que soit par l'évaluation qu'on puisse faire, objective ou non,

16 de la longueur de ce procès, le fait est que, dans deux mois, nous allons

17 pouvoir fêter le quatrième anniversaire du début de ce procès.

18 Lorsque le Procureur au début a présenté une requête aux fins de joindre

19 les trois actes d'accusation. Le 27 novembre 2001, ils ont mis en exergue

20 certains éléments clés en faveur de leur requête. La première concernait

21 l'économie judiciaire, l'intérêt du public et dans l'administration

22 efficace du droit international à l'époque. En novembre 2001, le Procureur

23 arguait du fait que ce point précis à savoir l'intérêt du public et le fait

24 de protéger les intérêts du droit international requéraient un seul et

25 unique procès, ce qui était valable à l'époque. Mais je crois qu'on peut

26 dire quatre ans plus tard que pour une gestion efficace de ce procès, il

27 serait important de procéder à la disjonction de l'acte d'accusation du

28 Kosovo.

Page 46713

1 À la lumière des différentes observations dans l'ordonnance portant

2 calendrier, la Chambre parle de ce qui a été évoqué au mois de juillet,

3 l'année dernière; autrement dit qu'en octobre 2005, la Défense devait

4 terminer la présentation de ces moyens. Quoiqu'il en soit, quelque soit les

5 raisons, cette date est passée. Ceci n'aurait pas pu être envisagé au début

6 du procès. Nous n'aurions pas pu prévoir que nous allions perdre 66 jours

7 pendant la présentation des moyens à charge parce que l'accusé, M.

8 Milosevic était malade. Ceci ne pouvait pas -- n'était pas prévisible à

9 l'époque. On ne pouvait pas non plus prévoir que nous allions siéger trois

10 jours au lieu de cinq. Toutes sortes de raisons qui expliquent pourquoi ce

11 procès a duré aussi longtemps et pour expliquer la raison pour laquelle

12 nous sommes là où nous sommes.

13 L'INTERPRÈTE : Les amici, ralentissez, s'il vous plaît.

14 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Les interprètes nous demandent de

15 ralentir, s'il vous plaît.

16 M. McCORMACK : [interprétation] Je m'excuse auprès des interprètes.

17 Je souhaite simplement revenir au paragraphe 26 de la décision de la

18 Chambre d'appel à propos de la jonction des trois actes d'accusation. La

19 décision qui est celle du 18 avril 2002. Un paragraphe qui précise que M.

20 Nice et M. Milosevic ont cité tous les deux. Je crois qu'on peut arguer de

21 la gestion du procès auquel a fait référence la Chambre de première

22 instance lorsqu'elle a reconnu que la Chambre de première instance

23 disposait de pouvoir discrétionnaire. Si à posteriori, il semble que le

24 procès a évolué de la --

25 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur, on vous dit que vous

26 n'avez pas ralenti.

27 M. McCORMACK : [interprétation] Peut-être que c'est mon accent qui dérange.

28 L'argument que je fais valoir est celui-ci. Si ce procès n'est pas gérable,

Page 46714

1 je crois qu'on peut arguer du fait qu'il n'est pas raisonnable ou gérable

2 dans la mesure ou l'aboutissement ne peut pas être rapide. Je ne suis pas

3 en train de dire que c'est un procès qui n'est pas gérable puisque c'est un

4 procès qui est géré convenablement mais pour ce qui est de l'objectif qui a

5 été fixé à de multiples reprises au cours du procès, à savoir l'importance

6 de trouver un aboutissement rapidement, je crois qu'à ce moment-là, la

7 question se pose de savoir si le procès avec la jonction d'instance telle

8 qu'elle existe est véritablement un procès gérable.

9 Donc, l'argument que j'avance est celui que je souhaite présenter

10 aujourd'hui est celui-ci. Si vous tenez compte de la disjonction de l'acte

11 d'accusation du Kosovo, des actes d'accusation portant sur la Croatie et la

12 Bosnie, la Chambre, à ce moment-là, a la possibilité de conclure un volet

13 très important de ce procès, à savoir, l'acte d'accusation du Kosovo, et

14 l'accusé, lui-même, a mis le droit sur l'importance de ceci car il a

15 indiqué que c'est dans la présentation de ces moyens à décharge qu'il

16 s'était concentré uniquement sur le Kosovo. Compte tenu des allégations qui

17 sont celles qui figurent dans l'acte d'accusation du Kosovo et allégations

18 faites par l'Accusation.

19 Je souhaite que la Chambre tienne compte de ces arguments et tiennent

20 compte également des arguments présentés par Me Kay,

21 M. Milosevic et par M. Nice arguant du fait que toute tentative de

22 disjonction de l'acte d'accusation du Kosovo serait rejetée.

23 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vous remercie, Maître

24 McCormack.

25 Monsieur Nice.

26 M. NICE : [interprétation] Tout d'abord, j'ai présenté dans nos écritures

27 ceci. Nous adoptons et nous n'allons pas répéter le dépôt d'écritures du

28 mois de juillet 2004. Donc, à propos de cette question-ci, tous les points

Page 46715

1 cités dans ce document sont toujours valables. Peut-être que la Chambre

2 s'intéressera à quelques points évoqués par l'accusé. Au paragraphe 25,

3 prévision, ou prévoit que toute forme de disjonction pourrait conduire ou

4 occasionné certaines personnes en ex-Yougoslavie comme étant l'expression

5 d'un choix alors qu'il y aurait un ordre du jour caché.

6 Les problèmes de santé sont des problèmes de santé comme le sait la Chambre

7 qui existe. Néanmoins, l'accusé ne souhaite pas que du temps soit -- qu'il

8 y ait une restriction de temps à cause des problèmes de santé. Lorsque l'on

9 parle du Kosovo, il a refusé de dire combien de temps il lui fallait. Il

10 reste en réalité 25 %, ce qui correspond à quelque 90 heures et en moyenne,

11 en moyenne, les témoins ont été jusqu'à présent, ont entendu pendant six

12 heures et 90 heures permettraient, par conséquent, d'entendre 15 témoins de

13 la sorte, de l'accusé. Il y a aucune raison de croire que, si cette -- il y

14 a disjonction d'instance, l'accusé vous demandera d'utiliser le temps qui

15 lui a été accordé pour les trois actes d'accusation, il souhaitera utiliser

16 ce temps pour un seul des actes d'accusation. C'est le temps qui lui a été

17 accordé d'après votre propre décision. Il aurait dû présenter tous ces

18 éléments à décharge et il aurait dû terminer la présentation des moyens à

19 décharge de façon à ce que la Chambre puisse rendre son jugement.

20 L'accusé a fait une observation qui n'est pas correcte sur l'efficacité et

21 l'utilisation du temps et avoir précisé que ceci n'a été mentionné qu'au

22 moment où l'Accusation était au milieu de la présentation de ces moyens à

23 charge. Le 11 décembre 2001, devant cette Chambre, je demandais à ce qu'on

24 utilise au mieux les 92 bis. C'était la seule façon pour nous, à l'époque,

25 d'avancer plus rapidement, plus rapidement que les auditions de témoins

26 viva voce. Dès le 11 décembre 2002, dans ce dépôt d'écritures, pour la

27 première fois, j'ai évoqué l'idée. Je crois que c'était la première fois

28 que j'ai évoquée cette idée qu'il ne faudrait utiliser un système ou

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1 d'interrogatoire principal, que l'on puisse utiliser dans l'interrogatoire

2 principal des déclarations écrites, ce qui n'a pas été perçu comme tel par

3 la Chambre de première instance, à l'époque. Ce n'est qu'après une décision

4 rendue par la Chambre d'appel lorsque l'Accusation avait déjà présenté ces

5 moyens que nous avons tentés d'utiliser cela pour chaque témoin.

6 Je fais cette remarque pour les raisons suivantes : non seulement

7 l'Accusation a tort lorsqu'elle dit que nous n'avons pas utilisé le temps

8 de façon efficace dès le départ, ce qui n'est pas vrai car cela a été le

9 cas dès le début. Mais il s'ensuit que, depuis que le 89 (F) est quelque

10 chose que nous pouvons utiliser, nous ne nous opposerons jamais à

11 l'utilisation de cet article par l'accusé. L'accusé aurait pu utiliser le

12 temps qui lui était imparti, qui correspond exactement au temps qui était

13 celui -- qui était le nôtre. Il aurait pu entendre davantage de témoins car

14 tout au long de cette -- au cours de ce laps de temps, en utilisant ce

15 système-là, il aurait pu entendre tous les témoins -- tous ces témoins.

16 L'accusé a fait une observation en disant que personne dans cette

17 institution ne travaillait cinq jours par semaine. Je souhaite lui dire

18 d'emblée que jusqu'à présent, en ce qui concerne le Procureur, il a tout à

19 fait raison car le Procureur travaille, depuis quatre ans, sept jours ou

20 peut-être six jours par semaine. Je fais cette remarque, je ne savais pas

21 que je souhaite -- je ne souhaite pas envoyer des fleurs à l'Accusation.

22 Mais je souhaite simplement évoquer la question de la commission d'office

23 du conseil de la Défense au paragraphe 14, note en bas de page, numéro 42.

24 La Chambre d'appel précise ceci, il s'agit du calendrier qui pourrait

25 passer à un jour d'audience ou même à un jour d'audience par mois, quelque

26 chose que j'ai déjà évoquée. La Chambre a rejeté l'argument : "En vertu de

27 quoi M. Milosevic ne pouvait pas assurer sa propre défense et, par

28 conséquent, il ne pourrait pas assister à son procès." Il poursuit en

Page 46717

1 disant : "Que les litiges et les plaidoyers aient quelque chose qui est

2 très exigeante et il n'y a pas que les accusés qui peuvent répondre à ces

3 exigences qui peuvent véritablement assister aux audiences et mener leur

4 thèse à bien."

5 Ceci est un principe très important qu'il faut garder à l'esprit

6 surtout à la lumière de cette demande, la Chambre -- non pas demande, mais

7 il est important que la Chambre tienne compte de cela. C'est l'accusé lui

8 même qui a choisi de tout faire lui-même et ensuite il se plaint des

9 conséquences.

10 Je remarque, pour finir, concernant cette question de temps toujours,

11 que l'accusé a maintenant, après avoir entendu quelque 200 témoins, il y en

12 a 40 qui ont été entendus jusqu'à ce jour; 240 est tout à fait un chiffre

13 qu'il aurait pu gérer dans le temps qui lui avait été imparti. S'il avait

14 utilisé les méthodes efficaces que nous avons utilisées nous-mêmes et dont

15 il disposait également.

16 Je souhaite également faire une autre remarque avant d'oublier,

17 remarque faite par Me Kay au sujet de l'utilisation des listes de témoins.

18 Nous n'avons obtenu aucune liste de témoins de la part de l'accusé

19 récemment, hormis celle qui a été déposée de façon officielle. Il s'agit

20 ici d'une copie qui nous a été remise par les bons soins de quelqu'un, nous

21 ne savons pas quels seront les témoins qui seront entendus. Nous avons

22 toujours répondu aux demandes de la Chambre. Nous avons toujours avisé la

23 Chambre lorsqu'il y avait une modification dans l'ordre dans lequel

24 seraient entendus les témoins. Nous avons toujours été très transparents

25 sur le nom des témoins, les gens que nous souhaitions entendre et nous

26 avons toujours fait part de ces changements. La Chambre de première

27 instance le sait car nous disions par exemple que ce témoin n'est pas celui

28 que nous souhaitons citer à la barre, mais peut-être que la Chambre

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1 souhaitera citer à la barre ce témoin ultérieurement, conformément à

2 l'Article 98.

3 Donc ce que je souhaite dire sur ce point, c'est que bien évidemment

4 s'il y a disjonction d'instance cela ne nous aidera en rien, eu égard à la

5 question de la gestion du temps. Nous estimons que les décisions rendues

6 sur la jonction des instances, la jonction des actes d'accusation, il y

7 aura une décision qui ne sera rendue que sur un acte d'accusation. Nous

8 estimons qu'il est important d'avancer rapidement dans ce procès eu égard

9 aux trois actes d'accusation.

10 Pour ce qui est des rapports médicaux, je pense que ces rapports

11 médicaux sont en réalité confidentiels. Nous les avons mentionnés, je

12 souhaite maintenant faire état de deux rapports médicaux en particulier.

13 Est-ce que nous devons passer à huis clos partiel ? Un passage a déjà été

14 évoqué. Peut-être que l'autre a déjà été évoqué également.

15 [La Chambre de première instance se concerte]

16 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Pour ce qui est de ces

17 questions, Monsieur Nice, lorsque la question a été abordée et que nous

18 avons décidé que nous entendrions différents arguments par rapport à ces

19 rapports médicaux, nous avons estimé que cela devait être entendu en

20 public, car c'était dans l'intérêt du procès et conformément à la

21 jurisprudence du Tribunal.

22 M. NICE : [interprétation] Oui.

23 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] C'est vrai que, s'il y a levée de

24 confidentialité, nous allons le faire. Nous allons, si c'est nécessaire,

25 lever la confidentialité.

26 M. NICE : [interprétation] Très bien.

27 Donc, le Dr van Dijkman, dans son premier rapport le 18 novembre

28 2005, a clairement indiqué qu'il n'était pas utile de changer la situation

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1 : "Et au plan cardiologique non plus, il n'était pas nécessaire de modifier

2 le régime actuellement imposé à l'accusé."

3 Ensuite, dans son deuxième rapport, qui est daté du 23 novembre 2005,

4 où il parle ou ne parle pas des questions posées par la Chambre avec lui,

5 il en conclut, c'est le passage auquel a fait référence l'accusé : "Comme

6 par le passé, je recommande que les dispositions soient prises pour que

7 l'accusé puisse prendre du repos, mais il semble que la période de six

8 semaines soit trop longue."

9 Si on lit cela, c'est que les conseils prodigués auparavant sont

10 quelque chose dont a tenu compte le calendrier lorsqu'il a été fixé.

11 C'était quelque chose ce qui n'était pas utile de modifier. A mon sens,

12 rien ne semble indiquer dans ce rapport qu'il nous faut un très long temps

13 de repos. J'estime que le rapport n'est pas très clair à cet égard, mais il

14 me semble qu'il parle de l'époque à l'origine où il indiquait que le repos

15 était quelque chose d'approprié. C'est ce dont a tenu compte la Chambre de

16 première instance auparavant.

17 Pour ce qui est de la situation au plan médical de l'accusé, si la

18 position est différente; autrement dit, si les choses se sont aggravées, en

19 tout cas si telle est la position adoptée par les médecins, à ce moment-là,

20 la position n'est pas celle qui a été décrite par la Chambre d'appel

21 lorsqu'elle a décidé qu'il fallait adopter un mode de procédure particulier

22 et travailler avec un conseil de la Défense commis d'office. Cette

23 proposition est étayée dans les paragraphes 28 à 32 de nos dépôts

24 d'écritures. Quelle que soit les raisons, quelles soient médicales ou

25 autres, quelles que soient les raisons, si raison il y a, la Chambre de

26 première instance peut estimer qu'il y a des difficultés à propos du procès

27 et estime que ce procès ne pourra pas se dérouler comme il a fait par le

28 passé. Maintenant, le temps est venu d'utiliser un conseil commis d'office

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1 de façon beaucoup plus rigoureuse que par le passé pour pouvoir contrer les

2 entraves qui seraient des entraves générées, occasionnées par l'accusé ou

3 par d'autres, indiquant clairement qu'il faut être ferme et que la Chambre

4 de première instance souhaite véritablement voir aboutir ce procès.

5 Il y a une citation qu'a fait valoir l'accusé lorsqu'il a parlé de la

6 demande aux fins de jonction, au paragraphe 27. Je viens de remettre la

7 main dessus. Il a omis de citer la phrase qui suit, dont la Chambre se

8 souviendra certainement, à savoir, que comme suit : lorsque l'accusé a

9 besoin de repos, la Chambre poursuit en disant

10 que : "La responsabilité de ne pas utiliser les services d'un conseil de la

11 Défense, la responsabilité qui est la sienne d'agir ainsi ne peut pas -- il

12 ne peut pas, par conséquent, ne pas à faire porter la responsabilité au

13 Tribunal."

14 Il est responsable de ses actes. Il est responsable d'avoir entrepris

15 quelque chose qui va au-delà de ses forces et qui pose maintenant un

16 problème au plan médical. Personne d'autre n'est responsable de cela.

17 Ce procès, je dois répéter ceci, ce procès aurait pu être géré de

18 façon très clairement définie dans le temps comme le montre la présentation

19 des moyens à charge de l'Accusation. Il n'y a eu de prorogation des délais

20 qu'au moment où l'accusé s'est livré à des contre-interrogatoires qui ont

21 duré très longtemps. On avait demandé au Procureur de limiter le temps du

22 contre-interrogatoire. Ce qui a été fait du reste compte tenu des

23 paramètres qui nous ont été fixés. Donc, si l'accusé prend un temps plus

24 long, il en est responsable. Le fait qu'il assure sa propre défense ne

25 permet pas de faire porter la responsabilité ou le blâme à quelqu'un

26 d'autre.

27 L'accusé a soumis à votre attention un extrait de l'arrêt de la

28 Chambre d'appel favorable à une jonction des actes d'accusation, paragraphe

Page 46721

1 26, où il est dit que si l'Accusation ne remplit pas ses responsabilités,

2 responsabilités décrites au préalable par la Chambre d'appel, la Chambre de

3 première instance a des pouvoirs suffisants, et cetera. Bien sûr,

4 l'Accusation rappelle qu'elle a effectivement rempli ses responsabilités,

5 qu'il n'est pas question d'essayer de fonder une décision de séparation des

6 volets des actes d'accusations qui serait prise actuellement sur un acte

7 qu'aurait commis l'Accusation. Cette possibilité, si elle a jamais existé,

8 n'a pu exister qu'il y a très longtemps et n'existe plus aujourd'hui.

9 D'autres observations de l'accusé que j'aimerais reprendre

10 rapidement. Il déclare que le lien n'a pas été établi entre les différents

11 volets. Pourquoi, dans ce cas, est-ce qu'il cite à la barre un nombre si

12 important de témoins ? S'il estime pouvoir raccourcir sa liste de témoins,

13 pouvoir enlever un certain nombre de noms de personnes qui n'ont pas un

14 rôle particulièrement efficace dans le procès, qu'il le fasse.

15 Il a également parlé de torture compte tenu du grand nombre de

16 documents qui lui étaient distribués. Dans une affaire où c'est un chef

17 d'Etat qui est jugé, en tout cas un ancien chef d'Etat, compte tenu des

18 obligations relatives à l'Article 68 du Règlement qui pèse sur nous, bien

19 sûr, le nombre de documents est très important, c'est inévitable. La

20 Chambre ne manquera pas de se rappeler, si elle prête attention à cette

21 observation, elle ne manquera pas de se rappeler que l'Accusation a admis

22 que l'accusé aurait des difficultés de ce fait. D'ailleurs, Me Kay,

23 également, ainsi que tous les autres qui participent à la Défense, c'est un

24 des éléments qui constitue par définition les difficultés qui se posent à

25 toutes ces personnes, le nombre de rapports publiés, le grand nombre de

26 documents, et le nombre de commentaires écrits qui sont demandés à l'une ou

27 à l'autre des parties, l'intervention des Juges, tout cela, bien entendu, a

28 modifié un peu les choses. Nous avons, cela étant, rempli nos

Page 46722

1 responsabilités de façon absolument irréprochable. Nous avons évolué au fur

2 et à mesure que les critères se modifiaient, et je dirais à mon collègue de

3 la Défense, Me Kay, qu'à aucun moment, il n'a été demandé par nous de

4 réduire, de limiter, de circonscrire ces paramètres, tout cela. Ce que nous

5 avons demandé n'était que le résultat de l'application du Statut et du

6 Règlement de ce Tribunal. Nous n'avions aucun choix en la matière.

7 La Grande-Serbie, elle a été évoquée par ceux qui se sont adressés aux

8 Juges ce matin devant cette Chambre. L'Accusation estime que la Grande-

9 Serbie, l'idée de la Grande-Serbie a été traitée d'ailleurs il y a peu de

10 temps relativement en détail, assez longuement. Je rappellerai simplement à

11 la Chambre que sur la Grande-Serbie, à partir du moment où j'ai fait mon

12 entrée dans cette affaire, j'ai pris le plus grand soin de bien choisir les

13 mots que j'utilisais. Si vous vous penchez sur ce qui a été dit au cours de

14 l'audience où il a été question d'intégration des trois volets de l'acte

15 d'accusation ou de séparation de ces trois volets, je me suis exprimé avec

16 la plus grande prudence. La Chambre d'appel, comme cela ressort de la

17 lecture de son arrêt du 18 avril 2002, a adopté la position de l'Accusation

18 ce qui n'est pas une surprise. Il est vrai qu'au paragraphe 8, on trouve

19 une référence au concept de "Grande-Serbie," ensuite, dans les paragraphes

20 20 et 21, c'est la thèse de l'Accusation qui est décrite de la façon la

21 plus claire qui soit dans les mots suivants, je cite : "L'objectif qui a

22 justifié les événements dans les trois régions, événements qui ont donné

23 lieu à des charges pénales retenues contre l'accusé résident dans le

24 déplacement forcé de la majorité de la population civile non-serbe hors des

25 zones où les autorités serbes souhaitaient établir leur pouvoir, ou dans

26 lesquels ces autorités serbes souhaitaient maintenir leur contrôle par le

27 biais de crimes qui ont été commis et qui font l'objet des charges retenues

28 contre l'accusé. Le fait que certains événements se sont produits dans une

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1 province de Serbie et d'autres dans des Etats voisins ne changent en rien

2 la réalité du fait que, dans tous les cas, l'accusé se voit reprocher des

3 actes destinés à établir ou à maintenir le contrôle serbe sur ces zones où

4 ce contrôle n'existait pas à moins qu'il ait existé et qu'il faille le

5 maintenir, des régions de l'ex-Yougoslavie, bien entendu."

6 Deuxième paragraphe, je cite : "Une entreprise criminelle commune destinée

7 à déplacer par la force la majorité la population non-serbe hors des zones

8 où les autorités serbes souhaitaient établir ou maintenir leur contrôle par

9 le biais de crimes qui ont été commis et constituent la base des charges

10 retenues contre l'accusé, indépendamment du fait que, de temps en temps, ce

11 fait puisse être mis en rapport avec d'autres, doit être jugée."

12 Les propos que j'ai utilisés dans mon interrogatoire des témoins ont

13 toujours correspondu à la même prudence depuis le début de ce procès. Je me

14 suis exprimé avec prudence dans mes remarques liminaires où j'ai reconnu,

15 je crois que les mots "Grande-Serbie" n'ont jamais été prononcés par

16 l'accusé, d'après ce que nous savons.

17 Le plan qui a été défini et qui fait l'objet d'un certain nombre de

18 dépositions liant les trois aspects de l'acte d'accusation les uns aux

19 autres, l'Accusation estime, avec le respect qu'elle doit au Tribunal, que

20 ce serait ne pas lui faire justice que de ne pas l'autoriser à mener à bien

21 jusqu'à son terme le travail qui a été commencé sur ce sujet.

22 Mon collègue, Me Kay, lorsqu'il parle du Kosovo, rapidement d'ailleurs et

23 sans lui accorder une grande importance, je le dis sans vouloir l'offenser,

24 mais cela ressort des éléments de preuve présentés à la Chambre où l'on

25 voit que, depuis le début, le Kosovo et au centre de ces événements qui se

26 sont déroulés au début, à la fin et au milieu des événements qui nous

27 intéressent. La réaction de l'accusé peut être considérée de diverses

28 manières, mais si je me contente de lire les gros titres pour définir sa

Page 46724

1 position à La Haye, il a dit qu'à Dayton il a fait ce qu'il fallait pour

2 défendre un certain nombre de positions qui ensuite ont été rejetées, il a

3 fait de son mieux pour que le Kosovo soit discuté à Dayton. Par conséquent,

4 les Serbes de Bosnie, en 1994, ont lancé une pétition. Nous avons entendu

5 Bulatovic qui s'est plaint de la façon dont les Serbes de la Republika

6 Srpska l'ont traité lorsqu'il exigeait une réponse de l'accusé par rapport

7 au Kosovo et l'Accusation a tenu compte de ces événements de 1995, des

8 procès qui ont été intentés, de la répression lancée contre les Albanais du

9 Kosovo. Bien entendu, récemment, nous avons entendu des dépositions qui ont

10 mis en exergue une garde villageoise des domiciles, qui apparaissent sous

11 un jour très favorable, très positif, et qui tendraient à dissimuler le

12 recours excessif à la force dans cette répression. Le Kosovo est à la base

13 de l'explication de la façon dont toutes les infractions ont été commises.

14 S'il est possible pour ceux qui connaissent l'histoire dans son ensemble,

15 on doit examiner les choses ensemble et ne pas les séparer les unes des

16 autres.

17 L'Annexe B de nos écritures, bien sûr, nous assumons la responsabilité de

18 ce document, Me Kay a laissé entendre que je n'y aurais pas participé. J'y

19 ai participé par les consignes que j'ai données avant son élaboration.

20 Chaque fois que j'en ai eu la possibilité sur le plan du temps, j'ai révisé

21 ce document, donc j'en suis aussi responsable que tous les autres.

22 Il a été établi rapidement. Je suis d'accord. Je pense que cela a été dit

23 clairement depuis le début. Si, par exemple, vous prenez la page examinée

24 par la Défense il y a un instant, la page 1, pièce

25 C-037, il s'agit de Babic, Babic, celui qui a témoigné. On ne peut pas se

26 placer d'un seul côté pour évaluer l'importance de ce document. Babic

27 déclare que tout à commencer à Kosovo. C'est à son avis ce qui a conduit

28 aux problèmes survenus à Knin par la suite et il déclare que la fuite, le

Page 46725

1 départ des Serbes qui ont été invités à se rendre au Kosovo est une des

2 sources du problème. Prenez Mesic, en 1990, il se dit inquiet de la façon

3 dont la Serbie traite l'incident du Kosovo et l'accusé lui répond : "Quand

4 vous leur aurez donné une bonne gifle en pleine figure, ils deviendront

5 obéissants. Voilà, comment la question a été réglée."

6 Prenons d'autres exemples, d'autres témoins, je ne vais pas donner le nom

7 de tous ces témoins. Ils ont déposé. Vous avez leurs dépositions. Ces

8 dépositions ont été considérées comme admissibles, que les personnes en

9 question soient au pouvoir ou pas à l'époque, qu'elles aient participé ou

10 pas aux affrontements du Kosovo, mais ce qui est encore plus important ce

11 sont les faits sur lesquels votre opinion se fondera. Il y a, bien entendu,

12 la hiérarchie militaire à prendre en compte et il y a aussi ce qui s'est

13 passé ailleurs, et pas simplement au Kosovo.

14 Arkan en Croatie et, plus tard, au Kosovo. Le fait que l'accusé connaissait

15 bien les paramilitaires, tels que les Bérets rouges d'Arkan, est d'une

16 extrême importance quel que ce soit l'endroit dont nous parlons. C'est

17 notre avis du côté de l'Accusation, et il ne serait pas réaliste de laisser

18 cela de côté ou de l'ignorer dans l'examen des dossiers Croatie et Bosnie,

19 également. Ce sont des éléments qui reviennent très souvent dans la bouche

20 des témoins interrogés dans le cadre de l'examen du volet Kosovo de l'acte

21 d'accusation.

22 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Nice, la Chambre devra se

23 pencher plus en détail sur l'Annexe B.

24 M. NICE : [interprétation] Oui.

25 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Parce qu'apparemment, il y a tout de

26 même une exagération du rapport de cause à effet.

27 M. NICE : [interprétation] Je suis désolé que les Juges de cette Chambre se

28 montrent enclins à décrire un document préparé en vue de leur apporter de

Page 46726

1 l'aide en utilisant le mot d'exagération, au nom des rédacteurs de ce

2 document, je rejette absolument cette remarque et avec le respect que je

3 dois à la Chambre, je fais remarquer que la Chambre d'appel a dit très

4 clairement, dans son arrêt au sujet de l'intégration de l'acte

5 d'accusation, donc, je reprends les mêmes termes même si j'en ai déjà

6 parlé. En tout cas, dans l'arrêt de la Chambre d'appel, à l'époque, qui

7 reste valable encore aujourd'hui, il n'y a pas de raisons de changer de

8 terminologie. Il y a été dit, je cite : "Qu'un corpus important d'éléments

9 de preuve pertinents par rapport aux questions qui sont censées déterminer

10 les actes et les comportements de l'accusé en Croatie et en Bosnie, ont

11 également de la pertinence par rapport au volet Kosovo du procès."

12 L'Accusation est donc en droit de dire ce qu'elle affirme au sujet du lien

13 entre l'aspect Kosovo et l'aspect Bosnie et Croatie. Dupliquez les

14 dépositions seraient une perte de temps et de moyens matériels. Je me rends

15 compte que ceci n'est peut-être pas un critère valable pour la Chambre de

16 première instance. S'agissant de déterminer s'il convient de disjoindre ou

17 d'intégrer, mais cela a été considéré comme valable à présent une autre

18 Chambre. J'en ai presque fini.

19 J'invite la Chambre de première instance à se poser la question se savoir

20 si l'accusé s'est bien comporté comme les allégations le laissent entendre.

21 S'il y a séparation du volet Kosovo par rapport aux autres volets, est-ce

22 que l'on prévoit que l'accusé se comportera à l'avenir différemment devant

23 cette Chambre de première instance ? Il n'a rien demandé. En fait, à

24 l'heure actuelle - et j'ai pris note des mots qu'il a prononcés il y a

25 quelques instants - il vous a effectivement réclamé quelque chose. De la

26 même façon qu'il réclamait un ajournement l'autre jour, il réclame

27 aujourd'hui une certaine période de repos. S'il y a la moindre raison de

28 croire qu'avec le temps il traitera par rapport aux deux autres volets de

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1 l'acte d'accusation, il se comportera d'une façon différente de ce qu'il a

2 fait par rapport au volet Kosovo. Ce serait faire preuve de générosité que

3 de le penser.

4 Il est, bien entendu, que ce ne sera pas le cas. Tout ce qui se passera,

5 c'est que le procès de cet accusé pour génocide restera suspendu en l'air

6 et il est permis de se demander s'il donnera lieu à un verdict. Quant à ce

7 qu'a dit mon collègue, M. McCormack, au sujet de l'économie judiciaire, je

8 pense que nous en avons déjà parlé. Il n'admet pas dans ces arguments que

9 le seul changement possible au procès ne peut dépendre que de l'état de

10 santé de l'accusé. Il faut, s'agissant de l'économie judiciaire, déterminer

11 qui est au commande de ce procès et est-ce qu'il serait intelligent et

12 rationnel de recourir -- de tenir de ce genre d'argument. Est-ce que ce

13 sont les avocats qui tiennent le procès ou quelqu'un d'autre ?

14 S'agissant du caractère gérable du procès, mes collègues de la Défense --

15 mon collègue, M. McCormack, s'est penché sur le même passage de l'arrêt de

16 la Chambre d'appel. Savoir si le procès est gérable ou pas n'est pertinent

17 que si c'est à l'accusé de gérer un certain nombre de choses. Regardez, par

18 exemple, la discussion au moment où un conseil lui a été proposé. Il y a eu

19 inversion par rapport à la réalité des choses. Quant à savoir ce qui était

20 gérable ou pas gérable, la question qui se pose c'est : est-ce que l'accusé

21 est capable de gérer correctement ce qu'il a à gérer ?

22 Alors, Monsieur le Président, Messieurs les Juges, je pense que j'ai fourni

23 mes dernières remarques sur tous ces sujets et que l'élément le plus

24 objectif c'est le comportement de l'accusé dans cette affaire s'agissant de

25 décider si un ajournement sera accordé ou pas. Prenez en compte les

26 éléments objectifs, les possibilités données à l'accusé. Il est fort

27 probable que son comportement ne fera qu'empirer et son état de santé

28 également, et nous insistons auprès de la Chambre pour qu'il n'y ait pas

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1 séparation d'instance.

2 [La Chambre de première instance se concerte]

3 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Bien, les débats

4 d'aujourd'hui donnent lieu à la nécessité de se pencher sur un certain

5 nombre de sujets.

6 Monsieur Milosevic, vous voulez la parole.

7 L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que j'aurais l'occasion de dire quelques

8 mots au sujet des différents éléments de l'intervention de M. Nice ?

9 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous avez déjà parlé. Nous vous

10 avons entendu. Avez-vous quelque chose à ajouter très rapidement ?

11 L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais lui a été entendu avant que je ne prenne

12 la parole et à l'instant il vient de parler une deuxième fois et assez

13 longuement.

14 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] C'était en réponse à votre propos.

15 C'est la procédure habituelle mais si vous avez quelque chose à ajouter, je

16 vous entendrais rapidement.

17 L'ACCUSÉ : [interprétation] Avant de revenir sur un certain nombre

18 d'imbécillité que M. Nice vient de répéter comme c'est son habitude,

19 j'aimerais simplement apporter une information à M. Bonomy, qui me l'a

20 demandée.

21 Monsieur Bonomy, s'agissant du mode de financement de votre Tribunal

22 illégal dans votre Article 32 de votre Statut, il est dit : "Que les frais

23 sont couverts par le budget régulier des Nations Unies." En réalité, ces

24 financements viennent de source très obscurs, et parmi ces sources, la plus

25 importante c'est l'OTAN et ainsi que certains nombres de fondations

26 diverses et variées, et des fondations de pays islamiques, notamment, ainsi

27 que -- ce milliardaire financier.

28 Sur les pays de l'OTAN : "Je vous demande de regarder la liste des témoins.

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1 Je souhaite pour ma part traduire en justice les criminels de guerre. Je

2 suis certain que si vous examinez les faits, si vous les prenez en compte,

3 si vous regardez également les gens qui ont été traduits en justice de

4 nationalité yougoslave, je ne prévois pas que de nouvelles soient prises à

5 ce stade."

6 Donc, le premier financier de votre Tribunal, c'est l'OTAN. Quant aux

7 autres, un certain nombre de fondations islamiques, entre autres, et

8 cetera… Cela, c'est tout à fait clair.

9 Maintenant, voyons un autre chiffre, 35 550 pages de comptes rendus

10 d'audience et j'aimerais citer M. Nice qui a parlé d'un certain témoin. Il

11 a dit, je cite : "Si nous regardons les pages 2 à 11, au milieu de la page,

12 nous voyons que ceci n'est absolument pas écrit par des gens qui sont amis

13 du TPY ou qui appartiennent à une conspiration occidentale car l'auteur

14 décrit l'intervention de l'OTAN comme une intervention violente et

15 illégale, illégitime de la part des pays -- des forces de l'OTAN contre le

16 pays. Donc, vous admettrez qu'il n'y a aucun favoritisme, vis-à-vis, des

17 forces et des pouvoirs qui sont à l'origine de la création de ce Tribunal,"

18 et cetera, et cetera…

19 Par conséquent, Monsieur Bonomy, aux yeux de M. Nice, il n'y a absolument

20 pas la moindre hésitation, pas le moindre doute sur ce qui apparemment

21 semble susciter un doute dans votre esprit. Peut-être pourrez-vous discuter

22 avec lui pour vous renseigner ? Vous m'avez dit que vous n'étiez pas au

23 courant, donc, je vous informe. Je suis sûr que vous êtes un homme

24 honorable qui s'intéressera et prendra en compte ces éléments

25 d'information. Je suis absolument certain que vous voudrez vérifier au cas

26 où vous seriez entré dans le bain dans lequel vous êtes entré sans -- à

27 votre insu, je suis sûr que vous voudrez vérifier sur quelle base vous vous

28 êtes entré dans ce bain. Quant à ce que M. Nice vient de dire, je le

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1 qualifierais de parfaite imbécillité.

2 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je dois dire que je n'ai pas la

3 moindre idée de ce dont vous avez parlé il y a un instant. En fait, plus je

4 lis le compte rendu moins je comprends ce qui a fait l'objet de votre

5 dernière intervention.

6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, je dois vous

7 dire que vous n'avez pas total liberté de vous exprimer ici. Je vous ai

8 donné la parole pour que vous repreniez un certain nombre d'éléments

9 abordés dans l'intervention précédente si vous estimiez que ces éléments

10 étaient importants. L'Accusation n'a pas déposé de requête et j'ai donné la

11 parole à l'Accusation en premier. Donc puisque nous sommes dans un système

12 contradictoire, j'ai ensuite donné la parole à l'Accusation pour répondre à

13 votre propos. Dans ces conditions, je ne crois pas que vous ayez eu selon

14 la procédure le droit de reprendre la parole. Mais vous avez semblé vouloir

15 dire quelque chose qui était particulièrement intéressant à l'issue de la

16 présente audience et c'est la raison pour laquelle je vous ai permis à

17 prendre la parole au stade où nous en sommes. N'abusez pas du droit que je

18 vous ai donné.

19 Veuillez poursuivre, mais nous n'oubliez qu'il ne nous reste que -- qu'il

20 est déjà 13 heures 53.

21 L'ACCUSÉ : [interprétation] S'agissant de ce que M. Nice a dit au sujet

22 d'un des points les plus importants à savoir cette question-clé de la

23 Grande-Serbie. Bien, nous venons de l'entendre dire que je n'ai pas

24 prononcé ces mots, mais qu'il suppose que des actes existent, qui, selon

25 lui, doivent être pris en compte. Bien, moi aussi, je pense que ces actes

26 doivent être examinés. Voilà ce qu'il advient lorsqu'on examine les actes,

27 Monsieur Robinson, et Messieurs. Dans toute cette période depuis 1991,

28 personne n'a été expulsé parce qu'il était d'appartenance ethnique serbe.

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1 Personne n'a été expulsé de Serbie en raison de son appartenance ethnique.

2 Personne n'a subi la moindre discrimination en Serbie depuis 1991. Personne

3 n'a subi la moindre discrimination en République fédérale de Yougoslavie,

4 discrimination qui aurait reposé sur sa religion, sa race, ou ses

5 convictions personnelles. Cela c'est une réalité. C'est un fait, Messieurs.

6 Dans l'époque qui vous intéresse, je présidais la Serbie et je présidais la

7 Yougoslavie. Je n'ai jamais -- et personne n'a jamais été expulsé, ni de la

8 Yougoslavie, ni de la Serbie. Cela est un fait.

9 Alors, ce que M. Nice essaie de m'imputer --

10 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je tiens à dire le plus clairement

11 qui soit que tout ceci ne m'intéresse pas. Ce qui m'intéresse c'est le

12 problème de la disjonction d'instance.

13 L'ACCUSÉ : [interprétation] Très bien. Bien, je dirais, Monsieur --

14 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Apparemment, je n'ai pas été

15 compris. Est-ce que vous avez entendu ce que j'ai dit ? J'ai dit, "Que la

16 discussion générale au sujet de la Grande-Serbie ne m'intéressait pas." Si

17 vous avez quelque chose à dire au sujet de la Grande-Serbie, faites-le à

18 condition que ce que vous avez à dire est en rapport avec le problème de la

19 disjonction d'instance. Dans ce cas-là, je vous autoriserais. Ne nous

20 redonnez pas une nouvelle mouture des arguments que nous avons déjà

21 entendus, ad nauseam jusqu'à présent.

22 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Robinson, la question du temps a été

23 évoquée ici, et M. Nice a consacré une très grande importance à ce problème

24 du temps dans les propos qu'il vient de prononcer. Selon M. Nice, ce qui

25 serait préférable c'est que tout le monde témoigne -- c'est non pas que

26 tous les témoins témoignent de vive voix, mais que tout se fasse par écrit.

27 M. Nice nous explique ici qu'il a respecté tous les règlements, que

28 l'Accusation a été très économique et très rapide dans son travail, et ceci

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1 est dit par

2 M. Nice aujourd'hui, en dépit, des immenses tas de papier qui constituent

3 les témoignages 92 bis et 89(F), témoignages qui ont nécessité tout de même

4 300 jours d'audition. Je vous prie de prendre en compte tout cela et de ne

5 pas vous limiter de la simple arithmétique. Je n'ai pas dit tout à l'heure

6 que personne ne travaillait cinq jours dans ce Tribunal.

7 J'essayais simplement de dire qu'aucune des personnes qui doivent

8 siéger ne siègent cinq jours. Bien entendu, je travaille plus de cinq jours

9 par semaine, même si nous ne siégions que trois jours. Après qu'a écrit le

10 Dr van Dijkman au sujet de la durée du temps de travail et de ce que je

11 devais faire dans le temps qui reste, c'est-à-dire me reposer, je ne vois

12 pas comment je pourrais préparer les témoins -- entendre les témoins avant

13 leurs dépositions. Chacun le sait très bien ici.

14 M. Nice me conseille de recueillir des déclarations

15 écrites des témoins. Un témoignage public a pour principal objectif de

16 faire entendre la vérité parce que si nous devions nous en arrêter à la

17 proposition de M. Nice, c'est-à-dire, tout obtenir par écrit, avec l'aide

18 de mes associés, le travail pourrait être fait, mais cela constituerait un

19 mensonge monstrueux. Pour que la vérité soit entendue, il faut que

20 l'intérêt de chacun soit respecté, l'intérêt historique avant tout. Je

21 dirais que l'intérêt de mon peuple et de mon pays doit également être

22 également pris en compte, mais pas seulement celui de mon peuple et de mon

23 pays, celui de l'humanité de façon générale doit être respecté au cours du

24 temps, c'est-à-dire, dans l'histoire. Je tiens à ce que la vérité soit

25 entendue. Je tiens à ce que les véritables auteurs de ce qui s'est passé en

26 Yougoslavie soient mis en lumière. Vous avez dit vous-même, Monsieur

27 Robinson, que vous n'étiez pas responsable de ce qu'a fait l'OTAN. Vous

28 l'avez dit à un certain moment. Vous savez que le fondement même du droit

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1 de tous les pays du monde c'est que le droit ne s'applique pas à des

2 individus mais à tout le monde.

3 Par conséquent, je demande un temps suffisant pour accomplir cette

4 tâche.

5 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Encore une fois, je dois dire

6 que je ne comprends pas ce que vous êtes en train de dire parce que, si

7 quelque chose est mis par écrit, cela ne signifie pas que c'est rendu

8 public. Tout ce qui est écrit ici est soumis par écrit, n'est pas

9 nécessairement automatiquement rendu public, il y a des documents qui sont

10 confidentiels. Je ne vois pas quels sont les mensonges dont vous parlez au

11 cas où les documents seraient présentés par écrit. Je ne vois pas où repose

12 votre argument selon lequel la vérité ne peut pas être présentée par écrit.

13 Vous semblez renverser les arguments et, en fait, tenir des propos qui vont

14 à l'encontre de votre intérêt dans la présente affaire car il ne peut être

15 que dans votre intérêt de déposer des documents écrits qui pourraient aller

16 dans le même sens que votre thèse.

17 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je pense, Monsieur Bonomy, que vous renversez

18 les choses.

19 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Est-ce que vous en avez terminé,

20 Monsieur Milosevic ?

21 L'ACCUSÉ : [interprétation] M. Nice a présenté un grand nombre d'autres

22 éléments ici qui selon lesquels je serais censé systématiquement m'opposer

23 au respect de la loi. Ce qui est un mensonge. Il n'a pas présenté un

24 milligramme d'éléments de preuve à cet effet. Il a parlé de mon rôle auprès

25 des paramilitaires qui aurait été démontré. Le seul rôle que j'ai eu

26 s'agissant des paramilitaires à consister à les mettre en état

27 d'arrestation, pas le moindre d'élément de preuve n'a été apporté qui irait

28 dans le sens de ce qu'a dit M. Nice. Donc, il est en train de manipuler --

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1 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, il importe que

2 vous parliez d'éléments pertinents par rapport à la question qui est posée

3 ici. Si vous n'avez rien à ajouter sur la question de la séparation du

4 volet Kosovo par rapport aux autres dans l'acte d'accusation, nous nous

5 arrêterons ici. Nous avons déjà un retard de 15 minutes.

6 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je parle ce dont lui a parlé.

7 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous n'êtes pas nécessairement en

8 droit de le faire. Je vous ai expliqué dans quelques conditions je vous ai

9 autorisé à prendre la parole. J'ai expliqué pourquoi M. Nice avait eu un

10 droit de réponse. Pourquoi constitution lui qui avait parlé le premier ?

11 Est-ce que vous avez quelque chose de pertinent à ajouter ? Je ne

12 m'intéresse pas aux questions générales. Si vous n'avez rien de pertinent à

13 ajouter, je vais lever l'audience.

14 L'ACCUSÉ : [interprétation] J'ai dit ce que je considérais comme pertinent.

15 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci, Monsieur Milosevic.

16 J'aimerais évoquer maintenant quelques questions qui doivent être prises en

17 compte pour qu'une décision soit rendue par la Chambre de première

18 instance, sur cette question que nous débattons aujourd'hui. Nous attendons

19 toujours un rapport du Dr Dalal qui devait nous être rendu aujourd'hui. Il

20 y a également le rapport attendu d'un neurologue. Tous ces rapports devront

21 être rendus aux Juges et examinés par eux avant que la Chambre ne puisse

22 rendre sa décision définitive. Nous ne rendrons donc notre décision

23 qu'après examen de ces documents.

24 M. NICE : [interprétation] Je m'apprêtais à demander à la Chambre la

25 possibilité de l'audition des témoins puisque l'accusé est venu ici

26 aujourd'hui et, compte tenu de ce qu'a dit le Dr van Dijkman, je ne sais

27 pas si la Chambre peut nous aider sur ce point. Dans nos écritures, nous

28 proposons que le prochain témoin, M. Sel soit entendu immédiatement.

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1 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, nous prévoyons de poursuivre

2 nos débats demain à partir de 9 heures.

3 J'aimerais, Monsieur Milosevic, que vous nous confirmiez que le témoin,

4 dont l'audition est prévue demain, est bien M. Sel.

5 L'ACCUSÉ : [interprétation] Le témoin suivant est Janos Sel.

6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vous remercie. Suspension

7 d'audience jusqu'à 9 heures 00 demain.

8 --- L'audience est levée à 14 heures 03 et reprendra le mercredi 30

9 novembre 2005, à 9 heures 00.

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