Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 Le mardi 28 février 2006

2 [Audience publique]

3 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

4 [L'accusé est introduit dans le prétoire]

5 --- L'audience est ouverte à 9 heures 02.

6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vous en prie, veuillez

7 poursuivre, Monsieur Milosevic.

8 LE TÉMOIN: SLOBODAN JARCEVIC [Reprise]

9 [Le témoin répond par l'interprète]

10 L'INTERPRÈTE : Le microphone pour l'accusé, s'il vous plaît.

11 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Microphone.

12 Interrogatoire principal par M. Milosevic : [Suite]

13 Q. [interprétation] Monsieur Jarcevic, vous disiez que vous vous êtes

14 rendu à différentes négociations pour y participer. Compte tenu des

15 circonstances, aviez-vous la possibilité de prendre l'avion à un autre

16 aéroport que celui de Belgrade ?

17 R. Oui. Lorsque nous nous sommes rendus auprès des représentants de

18 différents partis politiques, bien entendu, là, il ne s'agissait pas de

19 négociations. Comme c'était en Italie, on partait de Timisoara. Il me

20 semble que deux fois en partant pour Moscou, on s'est envolé également de

21 Timisoara.

22 Ecoutez un point que je souhaite ajouter. Généralement, quand on se

23 déplaçait à bord des avions de la FORPRONU, ils nous prenaient de Belgrade

24 à Genève. Ensuite, ils ont passé par la France pour aller aux Etats-Unis

25 d'Amérique.

26 L'ACCUSÉ : [interprétation] Ecoutez, je dois m'organiser un petit peu. Il y

27 a quelque chose qui ne fonctionne pas ici. Un dispositif qui généralement

28 fonctionne --

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1 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Peut-on y remédier, s'il vous plaît,

2 Monsieur l'Huissier ?

3 L'ACCUSÉ : [interprétation] L'interprète peut-il dire quelque chose pour

4 que je voie si je l'entends bien ? Oui. Je vous remercie. Cela marche à

5 présent. Merci.

6 M. MILOSEVIC : [interprétation]

7 Q. Pourriez-vous répéter, s'il vous plaît, ce que vous avez dit dans votre

8 dernière réponse ? Le plus souvent vous partiez de Belgrade ou non ?

9 R. Oui, le plus souvent on partait de Belgrade, et avant tout, lorsque

10 c'était la FORPRONU qui nous transportait, je sais que la République de

11 Serbie ou la République fédérale de Yougoslavie prêtait à la FORPRONU ses

12 avions.

13 Q. Ce n'est pas cela qui est important. Le plus souvent vous partiez de

14 Belgrade, compte tenu des circonstances, j'aimerais savoir s'il s'est

15 produit que votre délégation vienne me voir avant le départ au début d'un

16 voyage lorsque vous partiez tous ensemble ?

17 R. Généralement, on ne venait pas vous voir. Je sais seulement qu'une

18 fois, on est venu dans votre bureau -- votre cabinet, mais c'était

19 plusieurs jours avant qu'on ne parte en négociations, et nous vous avons

20 fait du fait que ces négociations allaient avoir lieu. C'était en mars à

21 Genève. Si vous le souhaitez, je peux répéter de quoi nous avons parlé.

22 Q. Oui, vous pouvez dire de quoi vous nous parlez.

23 R. Vous ne vous êtes pas intéressé dans les détails de notre plateforme ou

24 notre programme, vous n'avez pas du tout avancé de suggestions -- de

25 remarques au sujet de la méthode de négocier. Vous n'avez dit qu'une seule

26 phrase, à savoir, signer l'accord. Mettez-vous d'accord avec les Croates

27 pour que ces enfants ne perdent pas leur vie à la frontière de part et

28 d'autre. Je n'ai entendu rien d'autre de votre part, même si je m'attendais

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1 à ce qu'on trouve un accord commun sur ces choses. C'était mon premier

2 entretien avec vous, alors que j'étais face à des obligations

3 internationales importantes et les représentants internationaux nous ont

4 dit qu'à Genève, on allait signer un accord qui allait nous permettre

5 d'établir une paix durable.

6 Q. Je vous remercie, Monsieur. Revenons maintenant aux affirmations de

7 Milan Babic prononcées ici. Le 19 novembre 2002, pages 13 065 à 67, et 13

8 051, 14 104, et 105, pages du compte rendu d'audience. Pour résumer, il a

9 dit que les raisons officiellement invoquées dans les médias, disant que la

10 JNA est en train d'intervenir pour séparer les parties belligérantes et

11 pour lever le siège des casernes, qui n'en a pas été ainsi en réalité, que

12 la JNA est intervenue afin en tant qu'instrument de ma politique. Qu'avez-

13 vous à dire à cela que la JNA ne cherchait pas à séparer les parties

14 belligérantes ou à libérer les casernes, mais que c'était pour d'autres

15 raisons qu'elle annonçait des actions ?

16 R. Si l'on essaie d'examiner cette déclaration de M. Babic, il faut qu'on

17 sache de quel moment il parle. C'était l'année 1991 et partiellement en

18 1992, lorsque l'armée populaire yougoslave se trouvait dans la République

19 serbe de Krajina.

20 Q. Il dit que c'est à un moment en 1991.

21 R. Je souhaite simplement rappeler qu'en 1991, la présidence de la

22 République socialiste fédérative de Yougoslavie était en place. Elle

23 fonctionnait. Les positions y étaient occupées par les représentants

24 croates et slovènes, précisément, parce que le sommet de la JNA regorgeait

25 de Croates et de Slovènes.

26 Un point qui me semble intéressant à ajouter, tous les ambassadeurs de la

27 Mission diplomatique en Europe étaient pour l'essentiel de Croatie et de

28 Slovénie. Il n'y avait qu'un seul représentant de Serbie et il était au

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1 Royaume-Uni. Donc, vous voyez bien comment pouvaient fonctionner ces

2 importations illégales d'armes vers la Croatie. Je suis convaincu que la

3 plupart de ces membres du corps diplomatique étaient déjà prêts pour que

4 cette sécession s'opère de leurs Républiques de la Yougoslavie.

5 Encore un point, l'information que donne Babic était tellement erronée --

6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vous remercie. Je vous prie de ne

7 pas faire de digression par rapport aux questions qui vous sont posées.

8 M. MILOSEVIC : [interprétation]

9 Q. Il a dit que la structure de l'attaque était telle que la police et les

10 volontaires de la Krajina lançaient des provocations, tiraient des coups de

11 feu isolé vers les localités croates. Par la suite, les forces croates

12 ripostaient. Ce qui fournissait une justification à la JNA pour qu'elle

13 intervienne et d'après lui, la JNA employait des pièces d'artillerie lourde

14 et les différentes unités qui étaient placées sous son commandement pour

15 attaquer les localités croates, les villes croates.

16 Est-ce que vous pouvez nous en dire quelque chose ? Est-ce exact ?

17 R. Ceci n'est absolument pas exact. La JNA n'a absolument pas reçu ce

18 genre de mission. Elle n'a pas attaquée les villes croates pour s'en

19 emparer ou pour en chasser la population croate. Elle s'est contentée

20 uniquement de protéger le peuple serbe dans une partie de l'ex-Croatie et

21 comme nous l'avons vu, les 400 000 Serbes expulsés n'avaient rien à voir

22 avec les provocations dont parle Babic. Ils ont néanmoins été obligés de

23 quitter leurs foyers.

24 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Un instant, s'il vous plaît. Comment

25 avez-vous été mis au courant des missions de la JNA si jamais tel a été le

26 cas ?

27 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, c'était simple. Si la

28 JNA avait des missions telles que dit par Babic, elle aurait pu se déployer

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1 à la frontière italienne sans aucun problème. Il suffit de faire preuve de

2 logique. La JNA -- l'armée croate ne représentait rien d'important pour

3 pouvoir arrêter la JNA si la JNA avait reçu pour mission ce que dit Babic.

4 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] C'est juste une question de

5 raisonnement et de logique. Vous n'avez pas reçu d'éléments d'informations

6 en particulier.

7 LE TÉMOIN : [interprétation] En ma qualité de ministre du gouvernement de

8 la République serbe de Krajina, je recevais des informations. Je sais que

9 nous nous sommes plaints du fait.

10 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Mais, à l'époque, vous étiez

11 ministre des Affaires étrangères ?

12 LE TÉMOIN : [interprétation] J'étais ministre des Affaires étrangères comme

13 je vous l'ai dit hier. Depuis le mois d'octobre 1992 jusqu'en avril 1994;

14 cependant, j'avais des informations au sujet des activités de la JNA, en

15 1991. Ces activités sur le territoire de la République serbe de Krajina.

16 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, Monsieur Milosevic.

17 M. MILOSEVIC : [interprétation]

18 Q. Page 13 234 du compte rendu d'audience. Babic dit que les dispositions

19 du plan Vance n'ont pas été respectées dans la Krajina.

20 R. Excusez-moi, Monsieur le Président --

21 Q. Oui. Très bien. Dites-le.

22 R. Monsieur le Président, nous avons déjà abordé cette question hier au

23 sujet du plan Vance. Aux termes de cet accord, la police de la RSK ne

24 devait avoir que des armes personnelles, en fait, le pistolet, mais, en

25 temps de paix, seulement, comme nous l'avons vu, il y a eu des agressions

26 de l'armée Croate. Il y a eu en plus des harcèlements, des intimidations

27 des Serbes au quotidien en passant par la frontière, et la police de la

28 Krajina a dû garder avec des fusils automatiques un certain nombre

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1 d'hommes. Donc, c'est la raison pour laquelle Babic dit que le plan Vance

2 n'a pas été respecté, mais le fait qu'il n'y avait pas de paix comme

3 c'était prévu par le plan Vance, cela, ce n'est pas quelque chose qui

4 intéresse M. Babic.

5 Q. Il dit qu'on empêchait le retour des Croates, que Milosevic le

6 soutenait de manière tacite ou implicite, et cetera. Est-ce que vous en

7 savez quelque chose du fait qu'on ait empêché les Croates à retourner dans

8 leurs maisons ?

9 R. Oui, Monsieur le Président, j'en sais beaucoup. C'est la résolution 762

10 de 1992. C'est la première résolution qui parle du retour des Croates dans

11 la République serbe de Krajina. Puis, le gouvernement de la RSK exigeait un

12 traitement équitable à l'égard du peuple serbe qui a été chassé, lui, en

13 plus grand nombre et le Conseil de sécurité s'est tu. Il n'a rien fait.

14 Q. Page 12 921. Il dit que l'armée de la République serbe de Krajina

15 dépendait de l'armée yougoslave. Vous en savez quelque chose. Les

16 commandants étaient nommés par moi d'après lui. Cela, vous en savez quelque

17 chose ?

18 R. Monsieur le Président, pendant que j'étais au gouvernement de la RSK,

19 les relations entre la République serbe de Krajina et la République

20 fédérale de Yougoslavie se caractérisaient par des éléments qui

21 caractérisent normalement des relations entre deux Etats, compte tenu, bien

22 entendu, les circonstances spécifiques, à savoir, le blocus total --

23 l'isolement total vis-à-vis de l'étranger. Donc, l'industrie, les échanges,

24 le développement, coopération militaire et policière. Tout cela, c'étaient

25 des éléments de relations.

26 Un fait, si vous me le permettez. M. Babic reproche des liens entre notre

27 armée et celle de la Yougoslavie, mais ces liens, ils existaient dans

28 d'autres domaines. Par les météorologues qui travaillaient à Knin ne

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1 recevaient plus leurs rémunération, leurs salaires de Zagreb. Les Croates

2 ne leur envoyaient plus leur argent alors qu'ils continuaient de

3 travailler. Donc, ce poste a été rattaché à celui de Belgrade. Bien

4 entendu, on a commencé à verser leurs salaires à ce genre d'employés, des

5 vétérinaires, des ingénieurs, des électriciens puisque tout devait

6 continuer de fonctionner. Je pense qu'il n'aurait pas été correct que cette

7 population qui se trouvait dans la Krajina soit abandonnée à la mort, que

8 la Yougoslavie --

9 Q. Merci, Monsieur Jarcevic. Slobodan Lazarevic est venu déposer ici. Est-

10 ce que vous le connaissez ?

11 R. Oui. M. Lazarevic, je l'ai rencontré --

12 Q. Donc, je vous remercie, vous le connaissez. Il a dit ici, page 12 309,

13 12 310, qu'à la veille de la Conférence de Norvège, il s'est entretenu avec

14 Hadzic et Rakic. Donc, Lazarevic a parlé à Hadzic et Rakic et qu'à ce

15 moment-là, il lui aurait dit que soi-disant "le chef" - moi - leur aurait

16 donné des ordres explicites qu'il ne fallait pas qu'ils aboutissent à un

17 accord lors de cet entretien. Alors, dites-moi : vous avez été présent à

18 cet entretien; est-ce que c'est quelque chose que vous avez appris ?

19 R. Monsieur le Président, je n'ai pas été à l'entretien avec vous.

20 Q. Non, non. Mais, lui non plus. Il dit que Hadzic et Rakic lui avaient

21 dit m'avoir rencontré et que d'après eux, je leur ai demandé de ne pas

22 mener à bien les négociations en Norvège.

23 R. Mais, Monsieur le Président, j'ai bien commencé ma réponse. Je n'ai pas

24 été à l'entretien avec vous et M. Hadzic et Rakic ne m'ont pas informé de

25 leur mouvement, donc, ni d'avoir été ou de ne pas avoir été à l'entretien

26 avec vous. Je vous ai dit hier comme se sont déroulées les négociations

27 secrètes de Norvège. Notre délégation sur projet proposé Vollebaek ait reçu

28 un aval de la part de la Croatie prête à signer cet accord. Autrement dit,

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1 personne n'a influé sur nous. Vous pas plus que quelqu'un d'autre, parce

2 que nous n'étions pas la partie qui l'a refusé.

3 Q. Vous n'étiez pas ceux qui ont refusé de signer. Vous vouliez signer,

4 c'est cela ? Vous vouliez signer l'accord de Norvège ?

5 R. Oui.

6 Q. Ici, il a dit qu'à la veille de toute conférence de paix, lui et tous

7 les autres participants à la conférence se réunissaient à Belgrade pour

8 recevoir les instructions de la part du gouvernement serbe, à savoir, le

9 chef de la délégation se rendait auprès de moi et par la suite, tout membre

10 de la délégation rencontrait un représentant serbe et fédéral de l'autre

11 partie. Quelqu'un rencontrait un représentant de mon cabinet, un autre

12 rencontrait d'autres individus, et cetera. En a-t-il été ainsi, comme le

13 dit ce témoin ? Ces affirmations sont-elles exactes ?

14 R. Pour toutes les négociations que j'ai évoquées, ce n'est pas vrai. Je

15 vous ai expliqué hier que j'étais celui qui préparait des projets.

16 Q. Est-ce que vous avez participé à toutes les négociations ?

17 R. Comme je l'ai dit hier, j'ai participé aux négociations les plus

18 importantes. La seule fois où j'ai été absent, c'était dans la délégation

19 qui devait négocier fin 1993 à Topusko; cependant, ces négociations ont

20 échoué parce que les Croates ont lancé des contrevérités disant que la

21 partie serbe ne souhaitait pas négocier. Mais, par la suite, il y a eu la

22 Norvège, puis Dobanovci, et toujours sur proposition des médiateurs

23 internationaux.

24 Q. Mais ces négociations de Topusko, là encore, c'était sur le territoire

25 de la Krajina, dans la zone frontalière. C'est là que se situe Topusko ?

26 Pouvez-vous nous le dire ?

27 R. Oui. Topusko se situe dans la région de Kordun, à 30 kilomètres à vol

28 d'oiseau de Zagreb. Les Croates ont accepté de s'y rendre, puis je suppose

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1 qu'ils ont regretté leur promesse. Finalement, ils ont trouvé des raisons

2 qui n'étaient pas fondées dans les faits, parce que le premier ministre

3 Djordje Begovic m'a dit qu'ils sont arrivés à peu près avec une demi-heure

4 de retard, mais pas plus, et que ce fait, les Croates s'en sont servis

5 comme d'un prétexte pour informer leur opinion du fait que les Serbes ne

6 souhaitaient pas coopérer.

7 Q. Ce témoin affirme que pendant ces négociations, ces entretiens, Goran

8 Hadzic s'est entretenu avec le président de la République fédérale de

9 Yougoslavie Zoran Lilic, et que pendant les entretiens en fonction du

10 thème, il a parlé au chef du Grand état-major Perisic ou à Stanisic. Dites-

11 moi, s'il vous plaît : Slobodan Lazarevic, est-ce qu'il pouvait disposer de

12 ce genre d'information, même si cette chose-là avait eu lieu ?

13 R. Monsieur le Président, le président Hadzic n'a jamais informé le

14 gouvernement de ce genre de visite, ni d'éventuelles conclusions apportées

15 par le gouvernement serbe ou par les leaders militaires ou de la police.

16 Nous, on ne recevait pas ce genre d'information. Quant à M. Lazarevic, il

17 ne pouvait pas savoir ce que faisaient le gouvernement ou la présidence,

18 puisqu'il était basé à Topusko. Compte tenu de la taille de la RSK et de la

19 Croatie, c'est loin de Knin et c'est loin de la base du président Hadzic,

20 qui lui était à l'est, donc aux frontières occidentales de la Serbie.

21 Q. Mais qu'en savez-vous ? Que faisait Lazarevic à Topusko ?

22 R. Je l'ai croisé dans le corps d'armée de Kordun, et on me l'a présenté

23 comme l'interprète du corps. Il interprétait à l'intention de nos officiers

24 qui généralement, ne parlaient pas les langues étrangères, donc il

25 interprétait pendant nos contacts avec les commandants de la FORPRONU.

26 Q. Lazarevic est venu déposer ici et il a parlé aussi des remarques qu'il

27 a faites ou des observations qu'il a faites pendant qu'il se déplaçait vers

28 Knin. Le 29 octobre 2002, c'est la date de sa déposition. En se déplaçant

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1 vers Knin, où il y avait des barrages sur la route pendant ce qu'on a

2 appelé la révolution des troncs d'arbres, il a vu nombre de voitures qui

3 avaient des plaques d'immatriculation serbes, donc pas des plaques locales.

4 Cela a renforcé sa conviction que ce qu'il pensait être une révolution

5 spontanée locale, c'était quelque chose d'orchestré, d'organisé de Serbie.

6 R. Oui, Monsieur le Président. Sur un point, il a raison. La moitié de la

7 Serbie était, à ce moment-là, dans la Dalmatie et dans ces régions parce

8 que c'était en été. Vous savez que la population serbe venait passer ses

9 vacances d'été dans cette partie-là de la Yougoslavie. En 1991, c'était

10 encore le moment où les Serbes s'y sont rendus pour passer leurs vacances.

11 Q. Mais qu'en savez-vous de l'éventuelle implication de quelqu'un venu de

12 Serbie, d'un ressortissant serbe à ces barrages, et cetera ? C'était en

13 1990 ?

14 R. Mais au nom de Dieu, quelle incitation devait venir de l'étranger pour

15 encourager les gens à protéger leur maison, leur famille ? Si vous voulez,

16 je peux vous lire des extraits de la presse croate de l'époque, et vous

17 verrez que dans de nombreuses villes à ce moment-là on détruisait, on

18 incendiait, on pillait les maisons et les commerces serbes. A ce moment-là,

19 déjà --

20 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Non, je ne pense pas que l'on

21 souhaite savoir ce que le peuple serbe avait à dire à ce sujet, mais nous

22 voulons savoir si d'après vous, il y a eu une implication serbe dans les

23 barrages. Vous faites une digression, comme d'habitude.

24 LE TÉMOIN : [interprétation] Excusez-moi. Non, les barrages ne sont

25 absolument pas le résultat d'une influence qui se serait exercée de Serbie.

26 Je pense que j'ai été clair là-dessus.

27 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Non, mais c'est l'implication des

28 citoyens, des ressortissants serbes dans le fait de dresser ces barrages.

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1 C'est cela la question, et non pas l'influence. Vous dites qu'ils n'y ont

2 pas pris part; c'est cela ?

3 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, mais comment voulez-vous qu'on vérifie

4 cela ? On ne pouvait pas le vérifier à l'époque et on ne peut pas le faire

5 aujourd'hui. Je vous ai dit que deux millions de ressortissants serbes sont

6 originaires de ces régions-là. Il est tout à fait possible que quelqu'un se

7 soit rendu auprès de son frère pour l'aider à le faire.

8 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous-même, est-ce que vous avez vu

9 ces barrages, vous-même ?

10 LE TÉMOIN : [interprétation] A l'époque, j'étais à Thessaloniki en Grèce.

11 J'étais là en poste, d'avril à septembre 1991.

12 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Mais comment alors pouvez-vous être

13 sûr de ce que vous dites au sujet de la participation des ressortissants

14 serbes ?

15 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, j'ai rencontré beaucoup

16 de gens qui ont participé à la création de ces barrages routiers. C'était

17 surtout des gens de la région, de la région où ces barrages routiers ont

18 été érigés.

19 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Poursuivez, Monsieur Milosevic.

20 M. MILOSEVIC : [interprétation]

21 Q. Ce témoin a dit ici que souvent, dans des colis ou des envois de Serbie

22 en Krajina, il y avait des armes, du matériel militaire qui était

23 dissimulé, et qu'on présentait comme étant de l'aide humanitaire. Est-ce

24 que ce témoin aurait pu recueillir des informations sur le fait qu'il y

25 aurait eu des envois d'armes et de matériel militaire sous forme d'aide

26 humanitaire ?

27 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, je ne peux pas vous répondre. Je ne sais

28 pas si ces informations sont exactes, ou si simplement il a voulu tromper

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1 les Juges de la Chambre. Je peux vous dire que j'ai rencontré beaucoup

2 d'officiers qui ont tenu des propos analogues à propos du secours

3 humanitaire. C'étaient les officiers ou les bureaux de la FORPRONU. En

4 passant par la Krajina et Krajina de Bosnie, on a envoyé des armes aux

5 Musulmans de Bihac. On a même vendu des armes à des unités croates. Je peux

6 vous donner le nom d'un homme qui a fait une étude là-dessus, c'est un

7 colonel, et peut-être que les Juges voudront l'appeler à la barre. C'était

8 un colonel de l'armée Republika Srpska.

9 Q. Je vous remercie, Monsieur Jarcevic. Si Nikola Samardzic est venu

10 déposer ici, pages du compte rendu d'audience 11 428, et 11 429. Il a dit

11 que l'objectif de la JNA, c'était de s'emparer de la Slovanie et du Srem

12 occidental pour parvenir à la ligne Karlovac-Virovitica. Que savez-vous à

13 ce propos ? Cependant, avant que vous ne répondiez, je voudrais vous dire

14 ceci.

15 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Robinson, j'aimerais attirer votre

16 attention sur un fait, ce qu'on appelle la révolution des troncs d'arbres.

17 Elle s'est passée en 1990 et pas en 1991, lorsque ce témoin a dit qu'il

18 était, si je me souviens bien, en Grèce d'avril à septembre.

19 M. MILOSEVIC : [interprétation]

20 Q. Je vous posais la question suivante : Samardzic dit que l'objectif de

21 la JNA, c'était de parvenir à ligne Karlobag-Karlovac-Virovitica. Savez-

22 vous quel était l'objectif de l'armée, si c'était bien celui-là ?

23 R. Je vous l'ai dit hier. Je vous ai dit que ce genre de choses, c'étaient

24 des sornettes. Si ce plan avait existé, il aurait été appliqué. L'armée ou

25 les paramilitaires croates n'auraient pas pu empêcher la JNA de le faire.

26 Q. A la page du compte rendu d'audience 14 836 à 14 892, le témoin Kriste

27 a dit qu'en fait, Dubrovnik avait été attaqué parce qu'il y avait un projet

28 de créer une Grande-Serbie et il y avait des prétentions territoriales, et

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1 ce n'était pas pour sauvegarder l'ordre constitutionnel. Que pensez-vous de

2 ces dires ?

3 R. Je pense que ceci est dans le profil du précédent propos. S'il y avait

4 eu un plan, la JNA n'aurait eu aucune difficulté à s'emparer de Dubrovnik.

5 Il y avait beaucoup d'hommes politiques qui étaient favorables à cette

6 idée. Où qu'on remonte dans l'histoire, on sait que Dubrovnik a été une

7 ville serbe, et même aujourd'hui, on ne parle pas le croate à Dubrovnik.

8 Q. Nous n'allons pas nous lancer dans les explications historiques, mais

9 est-ce qu'on voulait s'emparer de Dubrovnik pour créer une Grande-Serbie ?

10 R. Non. Si cela avait été l'objectif, il aurait été réalisé.

11 Q. Vous avez dit que vous n'étiez membre d'aucun parti --

12 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Quel était l'objectif ?

13 LE TÉMOIN : [interprétation] Vous me posez cette question-ci à moi ? Je

14 m'excuse. L'objectif, c'est le même objectif que dans tous les endroits où

15 la population était menacée. La JNA était là pour protéger la population.

16 Vous savez que 2 200 Serbes ont été expulsés de Dubrovnik avant ces combats

17 dont on parle autant ici, et vous savez que tout l'arrière pays de

18 Dubrovnik avait été nettoyé de sa population serbe. L'armée croate avait

19 fait disparaître de la carte un monastère orthodoxe du XIVe siècle. Ce sont

20 là des monastères qu'on ne trouve nulle part ailleurs en Europe

21 occidentale. Tout ceci, c'était en partie pour empêcher à l'armée de

22 parvenir jusqu'à la côte, et au-delà de cette ligne, c'étaient les Serbes

23 qui habitaient dans la région.

24 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Poursuivez, Monsieur Milosevic.

25 M. MILOSEVIC : [interprétation]

26 Q. Le témoin, Stjepan Mesic, a dit ici la chose suivante : "Au début,

27 lorsqu'a été créé le Parti démocratique serbe, il ne semblait pas --" - a-

28 t-il dit - "-- que ce parti allait autant se radicaliser, parce qu'il

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1 prônait une autonomie culturelle; cependant, au fil du temps, il est apparu

2 clairement que ce parti était manipulé par Belgrade, donc, par le régime --

3 " - a-t-il dit - "-- de Slobodan Milosevic qu'il manipulait

4 personnellement, et que tout ceci c'était pour créer une Grande-Serbie, un

5 territoire ethniquement pur, nettoyé de sa population non-serbe."

6 Quelles sont les activités du SDS ? Est-il vrai de dire que j'ai manipulé

7 ce parti ? Est-ce que les dirigeants du SDS ont maintenu des contacts avec

8 moi ? S'il y avait des rapports, quels étaient-ils ? Avez-vous des

9 informations à ce propos ?

10 R. Monsieur le Président, je sais que deux dirigeants du SDS, le Dr Babic

11 et le Dr Raskovic, étaient vos adversaires politiques. Je voudrais bien

12 savoir pourquoi on vous attribue ce rôle d'avoir contribué à la fondation

13 de ce parti. Peut-être que je deviens ennuyeux, maintenant, à force de me

14 répéter, mais il faut quand même que je le fasse. La création de ce parti a

15 été provoquée par le comportement des partis politiques croates et le fait

16 que les Serbes aient été expulsés des villes de Croatie. Ce parti est

17 devenu plus extrême par la suite qu'il ne l'était au début. C'est ce qui

18 est dit, mais c'est tout à fait faux. Fin 1993 et début 1994, de nouvelles

19 sections de ce parti ont vu le jour, et ces sections ont participé aux

20 premières élections démocratiques pluripartites, sous les auspices du

21 Conseil de sécurité, et les deux partis sont nés de ce premier parti-là; à

22 sa tête, M. Solaja, et l'autre, M. Babic. M. Babic a été élu au parlement.

23 Je crois qu'il a recueilli la majorité des voix. Le parti se trouvait

24 surtout sous sa houlette, et dire qu'il était votre homme à vous, je peux

25 vous dire que ce n'est pas vrai.

26 Q. Le témoin Mesic a également déclaré que là où le SDS a pris le pouvoir,

27 il y avait eu un nettoyage absolu de tous les non-Serbes --

28 L'INTERPRÈTE : Les interprètes n'ont pas saisi la page du compte rendu

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1 d'audience.

2 LE TÉMOIN : [interprétation] Nous avons entendu dire que

3 189 000 Croates vivaient en Krajina. Je ne sais pas combien ils sont

4 restés, mais je suis convaincu d'une chose. Le départ des Croates de la RSK

5 a été organisé par l'Etat croate, et si cela a été fait, c'était pour

6 donner l'impression que les Serbes chassaient la population qui n'était pas

7 serbe.

8 M. MILOSEVIC : [interprétation]

9 Q. Dans sa déclaration, page du compte rendu d'audience

10 10 559, le témoin Mesic, au moment du contre-interrogatoire, a dit qu'il

11 était exagéré de dire qu'il régnait un climat de peur parmi les Serbes de

12 Croatie, mais il a reconnu qu'il y a eu des déclarations qui n'avaient pas

13 lieu d'être et qui n'étaient pas acceptables, et cela est un fait. Il y a

14 aussi, a-t-il dit, il y a eu des licenciements qui n'étaient pas corrects,

15 mais les gens qui ont été licenciés ont pu engager des poursuites devant

16 les tribunaux et ils ont eu gain de causes. Quel est votre commentaire ?

17 Est-ce vrai ?

18 R. Non. M. Mesic a fait l'impasse sur deux faits, deux faits qu'on trouve

19 nulle part ailleurs dans le monde. La question de la nationalité des Serbes

20 -- vous savez qu'il y avait un décret qui avait privé les Serbes de leur

21 statut de peuple constitutif. Or, cela ne s'était jamais passé nulle part

22 dans le monde même si les personnes concernées sont des criminels. Autres

23 faits, vous savez que les droits de bail, par exemple, ou d'achats, étaient

24 annulés pour les Serbes. Les Serbes n'ont pas eu le droit d'acheter les

25 appartements dont ils étaient locataires, et les maisons qu'ils avaient

26 leur ont été confisquées immédiatement. Or, cela ne s'est jamais passé

27 nulle part ailleurs dans le monde.

28 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Fort bien. Nous allons faire une

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1 pause de cinq minutes.

2 --- La pause est prise à 9 heures 39.

3 --- La pause est terminée à 9 heures 45.

4 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Poursuivez, Monsieur Milosevic.

5 M. MILOSEVIC : [interprétation]

6 Q. Monsieur Jarcevic, vous n'avez pas répondu à la deuxième partie de ma

7 question. Il a expliqué qu'il y avait des Serbes qui avaient été licenciés,

8 qu'ils avaient intenté des poursuites en justice et qu'ils avaient eu gain

9 de cause ?

10 R. Je sais que récemment il y a eu ce genre de poursuites en justice, mais

11 pas dans une mesure égale aux violations qu'il y a eues. Des gens ont perdu

12 la volonté de le faire. Par exemple, il y avait des permis écrits en

13 cyrillique et les Croates ont attendu qu'en fait tout ceci -- dont cela a

14 été mis dans un tiroir, et on a attendu que ce soit écrit en alphabet

15 latin, ce qui veut dire que s'il y a eu des poursuites, des actions en

16 justice, elles ont commencé uniquement cette année-ci.

17 Q. Mesic a dit qu'effectivement, il y avait eu des crimes en Croatie et

18 qu'il avait toujours insisté pour que des enquêtes soient diligentées pour

19 que les auteurs de ces méfaits soient traduits en justice, mais que la

20 Croatie n'avait pas eu suffisamment de force sur le plan judiciaire; et

21 qu'il avait gagné les élections parce qu'il voulait faire valoir un Etat de

22 droit -- installé un état de droit en Croatie.

23 Alors, est-ce que vous savez que la Croatie n'avait pas ces règlements,

24 cette législation ? Avez-vous des informations à ce propos ?

25 R. Je suis étonné parce que je suis étonné qu'un Etat -- un homme d'Etat,

26 même si c'est le président de la Croatie, tienne ce genre de propos. C'est

27 un homme qui aurait pu empêcher que ces crimes soient commis parce qu'il

28 était toujours au sommet de cet Etat ou dans les échelons les plus

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1 supérieurs, donc, je veux dire que cette responsabilité du supérieur

2 hiérarchique elle s'applique aussi à

3 M. Mesic.

4 Q. Il dit que lorsqu'il a été élu président, il espérait pouvoir résoudre

5 la crise yougoslave par des moyens politiques et qu'il pourrait continuer à

6 éviter la guerre.

7 R. M. Mesic, s'il avait emprisonné tous ceux qui ont importé des armes en

8 1990, en 1991, il aurait pu le faire. Il aurait pu exaucer ce vœu pour

9 autant qu'il ait vraiment eu cette volonté.

10 Q. Mesic a dit qu'il n'y avait pas de camps en Croatie; est-ce vrai ?

11 R. Pas du tout. En 1991, fin 1991, ou peut-être était-ce en 1992, il y a

12 eu une exposition qui a montré que plus de 100 Serbes ont été massacrés à

13 Gospic. C'étaient de bons citoyens. Ils ont signé ce que les autorités

14 croates voulaient qu'ils signent -- cette manifestation d'allégeance aux

15 autorités croates. Ils ont été abattus et jetés dans des fosses, comme cela

16 avait été le cas sous la main des fascistes en 1941. Je peux vous dire que

17 moi aussi j'ai eu des échanges avec le Conseil de sécurité à propos d'un

18 certain camp, après quoi plusieurs centaines de personnes ont sans doute

19 été exécutées à Malino Selo, un petit village de Slavonie occidentale. Nous

20 avons demandé au Conseil de sécurité que soit menée une enquête. Nous avons

21 offert qu'on fasse des exhumations à Ovcara, mais le Conseil de sécurité a

22 abandonné cette idée parce que déjà on avait pointé du doigt le côté serbe.

23 Q. Mesic a dit que la Croatie s'était défendue parce que la JNA sous mon

24 commandement aurait attaqué ce territoire, et que personne n'avait attaqué

25 les casernes, mais quelles avaient été assiégées pour empêcher qu'elles

26 soient attaquées; êtes-vous au courant de cela ?

27 R. Mais, Monsieur le Président, cela n'a pas de sens. Je ne sais pas

28 comment qualifier ce genre de déclaration. Il y a des millions de gens dans

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1 le monde entier qui ont vu les Croates attaqués les casernes à Split et qui

2 ont vu étrangler des jeunes soldats de Macédoine. Alors, maintenant, on

3 essaie de présenter ce genre de comportement comme étant un conflit

4 international. C'est la Croatie et la Macédoine qui auraient dû entrer en

5 guerre parce que le premier soldat à être tué était de Macédoine. Mais

6 toutes les garnisons ont été attaquées et, d'après ce que dit ce document,

7 des Nations Unies ont qualifié ces attaques des casernes d'agression.

8 Q. Kurt Vollebaek est venu déposer ici et il a dit que c'était moi qui

9 avais fait pression sur les Serbes de Knin pour qu'ils négocient de cette

10 proposition qu'il avait faite. Qu'en savez-vous ?

11 R. Je n'ai pas compris votre question. Je ne sais pas non plus de quelle

12 période vous parlez.

13 Q. Je parle de l'époque où il a négocié avec vous. Kurt Vollebaek a dit

14 que j'ai fait pression sur vous pour que vous acceptiez de négocier avec

15 les Croates suite à la proposition que Kurt Vollebaek avait faite. Il

16 m'aurait demandé de faire pression sur vous pour que vous acceptiez de

17 négocier avec les Croates. Est-ce que vous avez refusé les négociations à

18 quelque moment que ce soit ?

19 R. Je m'excuse. Peut-être que je vais trop vite pour les interprètes, mais

20 je voudrais vous dire que M. Vollebaek a toujours une politique de la porte

21 ouverte en matière de négociations avec le gouvernement de la RSK. Je pense

22 qu'effectivement, qu'il est allé vous voir. Il vous a sans doute informé,

23 fait part de ses intentions. Ce serait insensé de supposer que vous, vous

24 n'étiez pas d'accord pour que nous négociations.

25 Q. Oui. Mais, ce qui m'intéresse, c'est votre réponse à la question que

26 j'ai posée. Était-il nécessaire que je fasse pression sur vous pour que

27 vous acceptiez de participer aux négociations ? Enfin, pour que les

28 dirigeants serbes, des régions serbes le fassent; est-ce que ces dirigeants

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1 ont refusé de négocier ? Est-ce qu'ils ont refusé un Règlement ? Est-ce

2 qu'ils ont refusé des ordres qui auraient été faits ? Puisque vous, vous

3 avez participé à toutes les négociations, mis à part cette série à Topusko

4 qui n'a jamais eu lieu, qu'est-ce que vous en savez ?

5 R. Jamais. On n'a refusé. On a quelquefois fait des dérogations, mais je

6 vous ai dit hier, j'ai oublié de dire que nous avons toujours été d'accord

7 qu'on négocie sur territoire croate ou pas. Il y a eu un moment où je

8 n'étais pas membre du gouvernement et là, il y a eu une négociation et

9 c'était début 1995. On a posé une condition au côté serbe, il était

10 manifeste que le Conseil de sécurité allait adopter une nouvelle résolution

11 qui allait changer le statut des forces de maintien de la paix en

12 Yougoslavie. Jusqu'alors, ces forces portaient le nom des forces de

13 protection, et Stoltenberg a proposé un projet d'accord selon lequel ce ne

14 serait plus des forces de protection, mais qu'un nouveau nom serait donné à

15 ces effectifs, des forces destinées à renforcer la confiance. Cela se

16 passait au moment où l'ambassadeur américain Galbraith a fait cette fameuse

17 proposition du plan Z-4, à Knin. Je vous ai dit qu'en fait, il y avait déjà

18 eu plusieurs moutures de ce plan mais pas sous le nom de plan Z-4. Ce

19 n'était pas vraiment sérieux parce que cela voulait dire que, pratiquement,

20 il n'y avait que négociations entre deux villes et leurs environs. Martic a

21 dit à l'ambassadeur américain que nous allions négocier, mais que le même

22 statut devait être confirmé. S'agissant de ces forces onusiennes, elles

23 devraient avoir le même statut qu'en vertu du plan Vance. Mais ceci a été

24 utilisé pour faire porter le blâme à Martic en disant qu'il ne voulait pas

25 coopérer.

26 Q. Merci. J'ai terminé.

27 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci.

28 Madame Uertz-Retzlaff, vous avez la parole.

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1 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

2 Contre-interrogatoire par Mme Uertz-Retzlaff :

3 Q. [interprétation] Vous êtes en Bosnie, n'est-ce pas, Monsieur Jarcevic ?

4 R. C'est exact. Je vous l'ai dit. Je suis né le 2 février 1942.

5 Q. Contentez-vous de répondre à mes questions. Je n'ai pas besoin d'autres

6 éléments d'informations. Après et surtout au cours de la période qui nous

7 intéresse, vous avez toujours vécu à Belgrade ?

8 R. Oui, à partir de 1970.

9 Q. Vous l'avez déjà dit, d'avril à septembre 1991, vous vous trouviez en

10 Grèce. Mais avant cette date, avant avril 1991, où est-ce que vous étiez ?

11 Où étiez-vous en poste ?

12 R. En 1990, je travaillais au ministère des Affaires étrangères de la

13 RSFY, au service du personnel.

14 Q. Vous étiez donc à Belgrade avant le mois d'avril 1991 ?

15 R. Oui.

16 Q. Après le mois de septembre 1991, vous trouviez-vous à Belgrade ou

17 ailleurs ?

18 R. A Belgrade.

19 Q. Après septembre 1991, est-ce que vous avez été en poste dans d'autres

20 pays pour un certain temps du moins ?

21 R. Non.

22 Q. S'agissant des années 1992 jusqu'au mois d'octobre 1992, vous ne vous

23 êtes jamais trouvé dans ces régions déclarées autonomes, les SAO de

24 Croatie, n'est-ce pas ?

25 R. Est-ce que vous pourriez répéter la question ?

26 Q. En 1990 et jusqu'au moment où vous avez été nommé en RSK, en 1992, vous

27 n'avez jamais résidé dans les zones ou régions proclamées indépendantes ou

28 autonomes, les SAO de Croatie ?

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1 R. Non.

2 Q. Vous n'êtes jamais allé dans ces régions ?

3 R. Mais, bien sûr que si. J'ai participé à un tournoi international

4 d'échec et je pense que cela s'est passé en mars 1991, à Pula.

5 Q. Mais Pula, c'est en Croatie. Ce n'est pas dans les régions autonomes de

6 Croatie.

7 R. Oui. Je n'ai pas été dans ces régions autonomes, les SAO, mais j'ai été

8 en Croatie.

9 Q. Mais nous parlons de ce qui se passait dans les SAO au cours de cette

10 période qui va de 1990 au milieu de l'année 1992. Vous n'avez pas pu

11 observer de vos propres yeux, quoique ce soit qui se passait sur le

12 terrain, n'est-ce pas ?

13 R. Non. Je ne connaissais même d'ailleurs personne du gouvernement de la

14 RSK.

15 Q. Puisque vous ne connaissez personne dans ce gouvernement à Knin ou à

16 Erdut, vous ne sauriez nous être utile en parlant des rapports qu'auraient

17 eu ces personnes du gouvernement du cabinet avec M. Milosevic ou des

18 membres de son gouvernement en Serbie ?

19 R. Je ne vous ai pas dit que j'aurais été en mesure de vous parler de ces

20 rapports.

21 Q. S'agissant de la Défense territoriale serbe, de la police serbe en

22 Krajina et en Slavonie occidentale --

23 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je n'ai pas bien compris la réponse

24 du témoin.

25 Monsieur le Témoin, Est-ce que vous vouliez dire que vous ne pouviez pas

26 nous aider, nous être utile s'agissant de ces rapports entre Milosevic, son

27 cabinet et ces régions ?

28 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur Robinson, je vous ai dit qu'à

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1 l'époque, je ne connaissais pas le moindre membre du gouvernement de la

2 RSK. Il m'est donc impossible de confirmer ou d'infirmer si ces personnes

3 avaient des contacts à l'époque avec

4 M. Milosevic.

5 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci.

6 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation]

7 Q. Puisque vous n'avez pas de contacts, de liens avec ces personnes de

8 Krajina ou de la Slavonie orientale, vous ne pouvez pas nous être utile

9 s'agissant des questions relatives à leur police ou à leur Défense

10 territoriale ?

11 R. Comment est-ce que je ne pourrais pas vous aider ? Si vous avez besoin

12 de mon aide, je peux vous donner mes impressions, mes conclusions.

13 L'impression qu'ont eu à l'époque les habitants de Serbie.

14 Q. Ce n'est pas ce que je vous ai demandé. Je voulais simplement que vous

15 confirmiez que vous n'étiez pas en mesure de nous aider, de dire quoique ce

16 soit à propos de la question de savoir quoique ce soit à propos de la

17 Défense territoriale, de savoir s'il y avait un rapport de subordination et

18 de coordination avec la JNA, par exemple, à l'époque.

19 L'ACCUSÉ : [aucune interprétation]

20 M. LE JUGE ROBINSON : [aucune interprétation]

21 L'ACCUSÉ : [interprétation] J'ai bien peur que le témoin ne comprenne pas

22 bien la question parce qu'on parle : "D'aider, être utile, assister." Si

23 vous lui demandez s'il est au courant, il pourra vous répondre par oui ou

24 par non. Mais quand on demande s'il peut être utile, cela n'existe pas dans

25 le génie de la langue serbe. Donc, il a du mal à comprendre. Si vous lui

26 demandez, est-ce qu'il sait ou pas, à ce moment-là, il pourra vous

27 répondre ? Mais ce genre de phraséologie, il a peine à la comprendre. En

28 effet, d'après ce que dit Mme Uertz-Retzlaff, il semblerait que le témoin

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1 ne sait rien de ce qui s'est passé en Krajina, qu'il aurait été parachuté

2 en tant que ministre des Affaires étrangères dans la région.

3 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Jarcevic, ce qu'est en

4 train de vous dire Mme Uertz-Retzlaff, c'est que vous n'avez aucun élément

5 à communiquer aux Juges de la Chambre sur votre connaissance personnelle

6 des événements, donc vous n'avez aucun élément à fournir au sujet de la

7 Défense territoriale et de sa subordination à la JNA ou de la coordination

8 avec la JNA. Est-ce que vous reconnaissez ce fait ?

9 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, Monsieur Robinson.

10 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation]

11 Q. Monsieur Jarcevic, vous étiez employé au ministère des Affaires

12 étrangères de la RSFY. Pendant la période d'avril 1992 jusqu'à octobre

13 1992, quand la RSFY n'existait plus, que faisiez-vous ?

14 R. Je travaillais au ministère des Affaires étrangères, j'occupais le même

15 poste qu'avant. La situation avait simplement changé et la structure,

16 aussi, du ministère des Affaires étrangères, parce que les cadres de

17 Slovénie et de Croatie, et cetera, ont commencé à partir de manière

18 organisée.

19 Q. Quand vous êtes devenu, en octobre 1992, ministre des Affaires

20 étrangères de la RSK, avez-vous continué à habiter à Belgrade ?

21 R. Oui, je l'ai expliqué hier. J'ai expliqué pourquoi.

22 Q. Si je vous ai bien compris, vous avez expliqué que le ministère des

23 Affaires étrangères de la RSK se trouvait à Belgrade. Est-ce que c'est à

24 cela que vous faites référence ?

25 R. Oui.

26 Q. Donc même après octobre 1992, vous n'êtes pas allé à Knin ni à Erdut,

27 n'est-ce pas ?

28 R. Bien sûr que j'y suis allé, Madame. J'y suis allé dans le cadre de mes

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1 déplacements officiels au moins une fois par semaine.

2 Q. Mais vous habitiez à Belgrade, donc vous ne pouvez pas nous dire, vous

3 ne savez pas ce que M. Lazarevic et les autres représentants officiels, les

4 autres dirigeants officiels, faisaient au quotidien et qui ils

5 rencontraient.

6 R. Ce n'est pas une question des plus claires. Je savais ce que M.

7 Lazarevic faisait, vu mon implication dans certaines questions.

8 Q. Quand vous alliez à l'étranger ou ailleurs, vous pouviez rencontrer M.

9 Lazarevic lors des négociations, mais vous n'étiez pas là lorsqu'il

10 rencontrait M. Hadzic et les autres dans la région. Vous ne le savez pas,

11 vous ne savez pas ce qui se passait puisque vous n'étiez pas là.

12 R. Madame, j'ai dit qu'il habitait à Kordun et que Hadzic habitait loin de

13 là, qu'il avait des affaires à Kordun, et que cela avait trait à des

14 questions locales, pas à des chefs d'Etat.

15 Q. Monsieur, vous faisiez la liaison entre la RSK et les autorités de

16 Belgrade. C'était l'essentiel de votre fonction à Belgrade.

17 R. Non. Vous vous trompez complètement, Madame. Ce n'est pas du tout comme

18 cela que les choses se présentaient.

19 Q. Qui a proposé votre nom pour cette position que vous occupiez au sein

20 de la RSK ?

21 R. Je vais répondre à cette question, si la Chambre de première instance

22 et M. Robinson me permettent de donner une explication, parce que je ne

23 peux pas répondre de manière brève à une question de ce type.

24 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, allez-y.

25 LE TÉMOIN : [interprétation] J'étais membre de l'Association des Serbes de

26 Bosnie-Herzégovine et comme je l'ai déjà expliqué, je suis l'un des rares

27 bébés à avoir survécu dans ma génération. Nous avions très peur pour les

28 Serbes en Krajina. Un docteur, le Dr Nikic, un médecin, est venu voir. Il

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1 habitait, M. Stanislav Nikic, dans le village voisin. Il avait fait ses

2 études à l'Académie militaire de Belgrade et il a appris que les Croates

3 s'apprêtaient à massacrer les gens en Bosnie, à Livno et dans un village à

4 côté de Duvno, et il m'a dit : "Il faut qu'on sauve les nôtres. Cette

5 année, le Portugal occupe la présidence de la Communauté européenne, et il

6 faut que tu appelles l'ambassadeur du Portugal."

7 A cette époque, beaucoup de Serbes de Bosnie, comme moi, se sont

8 rassemblés. Effectivement, j'ai appelé l'ambassadeur. Je suis désolé, mais

9 j'ai oublié son nom et son prénom, parce que tout cela s'est passé en 1992.

10 Je lui ai dit : "M. l'Ambassadeur, d'après les informations dont nous

11 disposons, l'armée croate s'apprête à massacrer tous les habitants d'un

12 village dans la municipalité de Duvno. Ce village s'appelle Rascani." J'ai

13 expliqué qu'ils s'apprêtaient à massacrer les gens de la ville Livno, à se

14 livrer à pogrom parce qu'au centre de la ville de Livno, il y avait des

15 Serbes qui habitaient. Ces deux municipalités, dans la Deuxième guerre

16 mondiale, ont vu 72 % de leur population se faire massacrer : 72 % dans

17 l'une de ces localités et 89 % de la population massacrée dans l'autre.

18 Il a été très prévenant, il m'a écouté et il m'a demandé d'épeler le nom de

19 ces villages --

20 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vous ai permis de répondre à

21 cette question sans être trop succinct, mais là, vous êtes vraiment trop

22 long. Essayez, s'il vous plaît, de répondre précisément.

23 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous ai dit que c'est à ce moment-là que

24 j'ai décidé de prendre le poste du ministère des Affaires étrangères de la

25 Krajina, parce qu'on s'est rendu compte de ce qui se passait, on a vu ce

26 qui arrivait, et tout le monde m'a félicité.

27 L'ambassadeur a dit : "M. Jarcevic, mon ami d'enfance et ministre des

28 Affaires étrangères du Portugal, on va appeler l'ambassadeur à Zagreb,

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1 notre ambassadeur va aller voir Tudjman." Le lendemain, il y est allé pour

2 prendre des contacts. Cela a été un moment décisif, un moment-clé. Les

3 Serbes qui ont écouté cette conversation téléphonique, ce sont eux qui ont

4 proposé que je devienne ministre des Affaires étrangères.

5 Voilà. Bon, l'explication n'était pas si longue que cela.

6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci.

7 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation]

8 Q. Monsieur Jarcevic, vous ne connaissiez pas ceux qui incarnaient

9 l'autorité dans la Krajina ou à Erdut, et eux-mêmes ne vous connaissaient

10 pas. Ma question est donc la suivante : ce sont ces Serbes qui ont proposé

11 votre nom ? Pas les Serbes de la région, mais d'autres Serbes ?

12 R. Je vous ai déjà dit que ce sont les Serbes de Bosnie, de la Krajina de

13 Bosnie.

14 Q. Monsieur Jarcevic, vous avez affirmé hier qu'aucun Croate n'a été

15 chassé de Serbie ou victime de persécution en Serbie pendant tous ces

16 événements. C'est ce que vous avez dit hier. Maintenant, j'aimerais vous

17 présenter un rapport émanant des Nations Unies.

18 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Il s'agit d'une pièce que nous avons

19 déjà présentée en l'espèce. Pièce 771. C'est un document en anglais. On

20 pourrait le placer sur le rétroprojecteur. J'aimerais que le paragraphe 123

21 soit placé sur le rétroprojecteur. Page 34. Page 34, paragraphe 133.

22 Q. Monsieur Jarcevic, il s'agit d'un rapport de l'assemblée générale, ou

23 plutôt, destiné à l'assemblée générale, un rapport en date du 14 novembre

24 1992. A la page 34, il est question des événements qui se sont déroulés en

25 Vojvodine, et ici, au paragraphe 123 --

26 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] L'image est très floue. Est-ce qu'on

27 pourrait améliorer la qualité ? Apparemment, ce n'est pas possible.

28 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation]

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1 Q. Je vais redonner lecture de certains passages. Je cite : "L'éclatement

2 des combats dans les régions voisines de Croatie et l'arrivée de réfugiés

3 serbes ont coïncidé avec l'augmentation des cas de harcèlement et de

4 violence contre les non-Serbes en Vojvodine avec des cas de viols, des

5 tirs, des menaces de mort, l'utilisation des expulsions forcées."

6 Plus bas, on peut lire la chose suivante, je cite : "Le rapport cite

7 l'exemple d'Hrtkovci, où 500 familles de réfugiés, dont 350 anciens

8 militaires, ont été réinstallés en mai 1992. Une campagne d'intimidation et

9 de harcèlement a été déclenchée avec des sévices infligés qui ont entraîné

10 la mort d'une personne et le départ de 600 personnes qui sont allées se

11 réfugier en Croatie."

12 Page suivante, au paragraphe 124, on peut lire la chose suivante, je cite :

13 "La ville de Novi Slankamen a également été le théâtre d'incidents

14 violents. Un centre culturel croate a été détruit et une église catholique

15 romaine, endommagée en 1991. Un certain nombre de maisons croates ont été

16 endommagées suite à des tirs de mitraillettes ou la détonation d'explosifs,

17 une personne a été violée, et beaucoup d'autres ont été victimes de sévices

18 ou menacés. Dans la ville de Sombor, une église a été plastiquée dans la

19 nuit du 31 décembre au 1er janvier 1992, et deux nuits plus tard, deux

20 restaurants croates et la maison du dirigeant d'un parti politique croate

21 ont été plastiqués. Ces crimes ont été annoncés à la radio locale par le

22 dirigeant paramilitaire Arkan. Les Croates de souche se sont vu dire qu'ils

23 devaient partir avant une certaine date, sous peine de mort. A Subotica, où

24 les Hongrois représentent le groupe ethnique le plus important, des sites

25 religieux ont été attaqués et vandalisés, et ceci est quelque chose qui se

26 répète régulièrement depuis 1991. La cathédrale a été plastiquée. On a

27 essayé d'incendier une école religieuse, un monastère, et cetera.

28 Ensuite, paragraphe suivant : "Les autorités locales et les dirigeants

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1 politiques qui ont rencontré la délégation ont indiqué que selon leurs

2 estimations, 90 000 Croates et Hongrois ainsi que des membres d'autres

3 minorités avaient quitté la Vojvodine ou l'avaient fui."

4 Monsieur Jarcevic, vous habitiez en Serbie, donc vous devez être au courant

5 de ces événements, n'est-ce pas ?

6 R. Madame, j'ai grandi en Vojvodine. Je suis allé habiter en Vojvodine à

7 l'âge de 4 ans, donc je connais parfaitement la situation dans cette

8 province. Voilà ce que j'ai à répondre à votre question. La structure --

9 enfin, le gouvernement de la République de Serbie n'a pas participé à tout

10 cela, et on a essayé d'empêcher que des incidents se déclenchent, qui

11 auraient pu avoir des conséquences encore plus graves que ceux que vous

12 venez d'énumérer maintenant.

13 Permettez-moi d'ajouter une chose. Les gens honnêtes, même ceux qui

14 venaient du bureau d'Hrtkovci, ont expliqué aux autorités de Serbie que la

15 plupart des habitants de ce village travaillaient de concert avec le HDZ,

16 rassemblaient des fonds et envoyaient cet argent pour armer les formations

17 paramilitaires croates. Bien entendu, ce type d'activités a entraîné une

18 réaction de la part des réfugiés qui venaient de Croatie. Je crois que ces

19 crimes, en fait, sont peu importants proportionnellement parlant, parce que

20 les organes du pouvoir de Serbie et de Yougoslavie ont réussi à empêcher

21 que d'autres choses ne se produisent si on avait laissé faire les

22 volontaires et ceux qui étaient venus de Croatie.

23 Est-ce que je peux ajouter quelque chose ? Contrairement à la Croatie où

24 toute la structure de l'Etat a pris part à la persécution des Serbes --

25 Q. [aucune interprétation]

26 R. Bon, je m'arrête.

27 Q. Monsieur Jarcevic, nous avons entendu un témoin --

28 M. KAY : [interprétation] Est-ce que je peux intervenir ? Pour poser sa

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1 question, le Procureur a eu besoin de trois minutes 30, quatre minutes, en

2 nous lisant un passage très détaillé d'un rapport émanant des Nations

3 Unies, qui n'a finalement qu'une pertinence très mince, ici, le passage qui

4 parle de 1992, de novembre 1992. Le témoin nous parle de la Croatie, ce qui

5 concerne le passage de l'acte d'accusation concernant août 1991 à juin

6 1992. On est en train de s'éloigner, de partir vers la Vojvodine. Si

7 l'Accusation estime vraiment que le temps lui est compté, comme elle ne

8 cesse de l'affirmer, il faudrait peut-être se concentrer sur des éléments

9 beaucoup plus pertinents au lieu de lire de longs passages d'un texte,

10 comme on vient de le faire, et ensuite, d'empêcher le témoin de répondre de

11 manière complète.

12 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, Maître Kay. J'en prends note.

13 Mme UERTZ-RETZLAFF : [aucune interprétation]

14 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Madame Uertz-Retzlaff, pourquoi

15 parlez-vous de la Vojvodine ?

16 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] J'en parle parce que le témoin nous a

17 dit, pendant l'interrogatoire principal, qu'aucun Croate n'a été victime

18 d'aucun acte quelconque en Serbie, qu'il n'y a pas eu de persécution des

19 Croates en Serbie, et ce n'est pas vrai. Le témoin doit le savoir parce

20 qu'il était là et il sait très bien ce qui s'est passé en Vojvodine. S'il

21 s'agit maintenant de déterminer l'importance de cet événement pour le

22 procès, bien entendu que l'acte d'accusation et sa partie concernant la

23 Croatie ne concernent que les années 1991 et 1992, mais nous avons ici une

24 jonction d'instance. Nous avons ici un procès qui traite d'une entreprise

25 criminelle commune avec une coopération qui a duré de 1990 à 1999, dans le

26 cas de cette entreprise criminelle commune. C'est dont crucial, tout cela.

27 Si on parle de la Croatie, on est en train de parler de relations qui

28 existaient entre un certain nombre de personnes et qui se sont prolongées

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1 dans le temps. Ce que je dis c'est que ce témoin ne sait pas vraiment ce

2 qui s'est passé en Croatie en 1991 et en 1992, pour une partie de cette

3 année, du moins. Je vais parler d'événements qui n'ont pas trait à ce qui

4 s'est passé en Croatie à l'époque.

5 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous vouliez ajouter quelque chose.

6 Je vais vous permettre de vous exprimer brièvement.

7 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vais répéter ce que j'ai dit. Les

8 structures gouvernementales de la Serbie et de la Yougoslavie ont essayé

9 d'empêcher que des tragédies ne se déclenchent. C'est un véritable miracle

10 si les choses n'ont pas pris un tour encore plus tragique.

11 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous l'avez déjà dit.

12 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Oui.

13 Q. Monsieur Jarcevic, nous avons entendu ici un témoin, le Témoin C-047,

14 qui se trouvait en Vojvodine pendant ces événements, et il nous a dit --

15 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Il s'agit du témoin qui parle

16 d'Hrtkovci et des autres événements.

17 Q. Il nous dit, aux pages du compte rendu d'audience T21578 et T21641,

18 qu'il y a eu campagne de persécution à Subotica et à Hrtkovci après

19 l'arrivée de Vojislav Seselj à cet endroit, et il dit que les autorités

20 n'ont rien fait pour empêcher que ces événements ne se produisent. Qu'avez-

21 vous à répondre à cela ? Est-ce que c'est également ce que vous avez

22 entendu dire ?

23 R. Madame, Seselj n'a eu aucune influence sur ce type d'activités

24 criminelles et la propagation en Serbie. Non, lui, il appelait simplement à

25 la protection du peuple serbe.

26 Q. J'ai une question à vous poser au sujet d'un autre passage du rapport

27 susmentionné. Vous nous avez parlé du rôle des médias en Serbie. Je me

28 réfère à la pièce 771, encore une fois, page 28, paragraphes 95 et 96.

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1 Dans l'interrogatoire principal, vous avez dit, Monsieur Jarcevic, qu'en

2 Serbie, les médias étaient modérés lorsqu'ils parlaient de qui se passait

3 en Croatie et ailleurs. J'aimerais reprendre ici les conclusions du rapport

4 des Nations Unies. Au paragraphe 95, on peut lire, je cite : "Les médias

5 contrôlés par le gouvernement, et les médias électroniques se sont lancés

6 dans une campagne de propagande nationaliste et unilatérale. Les médias

7 officiels n'ont rien fait pour prendre leur distance de la politique

8 d'intolérance qui est prônée et ont attisé le feu de la haine."

9 Paragraphe 96, je cite : "On constate que souvent les faits sont déformés.

10 Les informations sont présentées de manière erronée. On invente de toute

11 pièce des atrocités pour créer une atmosphère de haine mutuelle. Les médias

12 utilisent un langage très insultant et des termes extrêmement violents et

13 présentent de manière totalement fausse les activités des organisations

14 internationales. On crée une atmosphère de siège," et cetera.

15 Qu'avez-vous à dire à cela, Monsieur Jarcevic ?

16 R. Madame, ce rapport ne correspond pas à la réalité. Mais réfléchissez,

17 il a eu 400 000 Serbes qui ont été expulsés de Croatie. On n'en a même pas

18 parlé correctement en Serbie. C'est maintenant seulement qu'on apprend ce

19 qui s'est passé. Ce rapport des Nations Unies alors, pourquoi est-ce que ce

20 type d'informations n'a jamais été fourni par les Nations Unies, sauf dans

21 le rapport de Boutros Boutros-Ghali, le 15 mai 1993, encore, même ce

22 rapport-là était incomplet ?

23 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Toujours, s'agissant de cette même

24 pièce à conviction, j'aimerais que l'on place le paragraphe 78 du rapport

25 sur le rétroprojecteur, page 25.

26 Q. Monsieur Jarcevic, vous nous avez parlé du plan Vance ?

27 R. Oui.

28 Q. Vous avez expliqué que la partie croate n'avait pas respecté ce plan et

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1 j'aimerais vous présenter quelque chose qui a trait à l'attitude des Serbes

2 en l'espèce. Vous étiez ministre des Affaires étrangères. Donc, vous

3 pourrez nous répondre. On parle ici du secteur sud, paragraphe 78, Krajina

4 serbe, je cite : "Dans le secteur sud, une partie de ce qui est appelé la

5 Krajina serbe ou la République de la Krajina plutôt a été le théâtre de

6 pratiques discriminatoires de la part des autorités locales."

7 Ensuite, on peut lire, je cite : "Les représentants des Nations Unies ont

8 pu obtenir des informations indiquant qu'il y avait eu des meurtres, des

9 cambriolages, des pillages et d'autres types d'exactions souvent en rapport

10 avec des campagnes de nettoyage ethnique et conformément à leurs missions,

11 ces éléments d'informations ont été transférés aux autorités locales. Or,

12 ces autorités locales hésitent à intervenir et sont parfois même

13 complètement opposées à toute coopération. Les représentants de la FORPRONU

14 ont expliqué que les ministres serbes qui devaient être désarmés ont tout

15 simplement pour beaucoup changé d'uniformes et travaillent de concert avec

16 la police spéciale, la police des frontières ou les brigades spéciales.

17 Jusqu'à la démilitarisation, la FORPRONU et ses représentants estiment

18 qu'on ne peut garantir la sécurité des réfugiés ou des minorités qui

19 restent encore dans ces territoires."

20 Monsieur Jarcevic, tout ceci se passe alors que vous êtes ministre des

21 Affaires étrangères de la RSK. Cela s'est bien passé.

22 R. Madame, est-ce que je n'ai pas déjà assez suffisamment expliqué ? Est-

23 ce que je n'ai pas expliqué ? Mais il est tout à fait clair hier que nos

24 policiers ne pouvaient pas disposer de ces armes automatiques, qu'il y a eu

25 d'autre part une réunion avec Cyrus Vance, à Knin. M. Martic a expliqué que

26 toutes ces unités venaient dans un autre Etat.

27 S'agissant de l'équipement du ministère de l'Intérieur --

28 Q. Ce rapport a trait aux violations des dispositions du plan Vance

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1 s'agissant de la démilitarisation. On parle également de nettoyage ethnique

2 mené par les Serbes.

3 Maintenant, j'aimerais qu'on regarde de ce qui est dit, dans le rapport au

4 sujet du secteur est, page 83 -- secteur est, Slavonie orientale, Baranja

5 et Srem occidental.

6 Je cite : "Le nettoyage ethnique se poursuit. Il est mené par les autorités

7 locales et les ministres locales. Départ des Croates et des Slovaques qui

8 n'étaient pas partis volontairement, et que s'ils ne partent pas sont

9 menacés de représailles violentes de la part des institutions."

10 Monsieur Jarcevic, il est exact, n'est-ce pas, qu'il y a eu nettoyage

11 ethnique ?

12 R. Non. Les organes de pouvoir de la Krajina serbe n'ont pas mené de

13 campagnes de nettoyage ethnique. Il y a eu des actes de criminalités qui

14 ont fait l'objet de poursuites.

15 J'aimerais placer un document sur le rétroprojecteur qui vous montrera

16 qu'un homme qui avait tué des Croates a été arrêté dans le secteur sud dont

17 on vient de parler.

18 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Cela pourrait être fait lors des

19 questions supplémentaires.

20 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui. Tout à fait d'accord. Si M.

21 Milosevic souhaite en parler, il peut le faire.

22 M. KAY : [interprétation] Mais il s'agit d'une réponse à une question qui

23 comprenait trois questions. On le réprimande parce qu'il répond à une ou

24 autres questions. Il veut y répondre en fournissant un document. Donc, je

25 pense qu'on devrait lui permettre de répondre de cette manière. Le

26 Procureur doit, quant à elle, tenir compte des éléments qui sont présentés

27 par le témoin dans sa réponse.

28 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Bon, je vous permets de nous

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1 présenter ce document.

2 LE TÉMOIN : [interprétation] Voyez-vous cela, c'est la Défense territoriale

3 de la République serbe de Krajina. Elle informe du fait -- on ne voit pas

4 très bien. Le 17. Excusez-moi.

5 L'INTERPRÈTE : Les interprètes signalent qu'ils n'ont pas le texte.

6 LE TÉMOIN : [interprétation] "Le 11 mars 1992, à Skabrnja, on a tué cinq

7 habitants et Gornja Zemunik, quatre habitants, également Croates. On pense

8 que ces assassinats ont été faits par Maricic, Stevo Boze, d'appartenance

9 serbe, originaire de Zemunik Gornji. Le suspect est membre de la 3e Brigade

10 de la Défense territoriale de Benkovac. L'individu en question a été

11 interpellé. Il est placé au poste de Benkovac. Nous ignorons toujours

12 quelles sont les identités des tués. Nous ne connaissons pas les détails de

13 l'enquête.

14 "Vers 21 heures 30, des auteurs inconnus ont détruit deux églises

15 catholiques dans les villages de Perusic et Podgradje. C'est au sud-est de

16 notre municipalité. Les églises ont été pratiquement rasées et plusieurs

17 tombes ont été vandalisées."

18 L'INTERPRÈTE : L'interprète n'entend pas le témoin.

19 L'ACCUSÉ : [interprétation] Il serait peut-être utile, Monsieur Robinson,

20 de placer le document sur le rétroprojecteur, puisqu'il s'agit d'un

21 document qui n'a pas été traduit pour que les interprètes puissent le voir

22 et nous aussi.

23 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, oui. Je vous en prie. Placez-le

24 sur le rétroprojecteur.

25 Monsieur Jarcevic, pouvez-vous nous dire quel est ce document ?

26 LE TÉMOIN : [interprétation] Ce document fait état des crimes commis, des

27 crimes dont la dame --

28 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] C'est un document officiel ?

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1 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est un rapport établi par les organes

2 militaires de la République serbe de Krajina, et l'on voit que ces crimes

3 n'étaient pas commis par des autorités de l'Etat, mais que l'auteur du

4 crime a fait l'objet de poursuite. On ne peut blâmer la République serbe de

5 Krajina, son gouvernement, pour des actes commis par des individus. Si nous

6 l'avions organisé, nous aurions tout fait pour dissimuler l'auteur.

7 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation]

8 Q. Comment peut-on savoir d'après ce document que l'individu en question a

9 été, ne serait-ce qu'accusé et encore moins condamné pour cela ?

10 R. Madame, on trouve tout cela dans les archives de la République serbe de

11 Krajina, les archives qui ont été confisquées et transportées à Zagreb.

12 C'est un des rares documents qui ont été conservés pour ce qui est du

13 domaine de ce qui vous intéresse maintenant. Vous avez commencé à lire des

14 documents qui portent sur la Krajina orientale. Un homme qui a tué

15 plusieurs Croates et un ou deux Hongrois, si je ne me trompe pas, était

16 condamné à plusieurs années de prison. Le tribunal -- ou les tribunaux de

17 la République serbes de Krajina l'ont jugé. Mais je ne peux pas vous

18 apporter ce dossier, ni ce prononcé de peine, vous pouvez vous procurez

19 cela à Zagreb.

20 Q. Monsieur Jarcevic, quelle a été la peine qui a été prononcée contre cet

21 individu, le savez-vous ? Savez-vous si à l'issue de ce rapport il y a

22 vraiment eu une condamnation ?

23 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, plutôt un procès ?

24 LE TÉMOIN : [interprétation] La République serbe de Krajina a fonctionné

25 dans des circonstances difficiles et cela ne l'a pas empêché d'être un

26 Etat. Il y a eu beaucoup de procès dans la Krajina. Je n'ai pas pu me

27 pencher sur les détails, j'étais occupé par d'autres choses. Mais vous

28 aviez trois ministres de la Justice en tout qui ont été nommé dans la

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1 Krajina, et ils peuvent vous en témoigner.

2 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Nous pouvons peut-être aller de

3 l'avant.

4 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, je vous en prie.

5 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation]

6 Q. Monsieur Jarcevic --

7 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Le moment est venu de faire une

8 suspension. Nous allons faire une pause de 20 minutes.

9 --- L'audience est suspendue à 10 heures 33

10 --- L'audience est reprise à 10 heures 55.

11 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vous en prie, veuillez

12 poursuivre, Madame Uertz-Retzlaff.

13 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

14 Q. Pendant votre déposition, Monsieur Jarcevic, vous avez cité un nombre

15 de Serbes vivant en Croatie d'après le recensement, et vous avez dit qu'un

16 million de Serbes, d'après vos informations vivaient en Croatie. Alors, je

17 voudrais maintenant vous soumettre quelques statistiques. Le premier

18 élément c'est un document qui provient du recensement et ce sont les

19 données de l'agence de la République de Croatie chargée des statistiques,

20 donc c'est un document en langue croate, mais les chiffres quant à la

21 population se trouvent en troisième page. Si on le place sur le

22 rétroprojecteur tout un chacun pourra le comprendre facilement. Il se passe

23 d'explication.

24 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] La page 3, peut-on la placer sur le

25 rétroprojecteur, s'il vous plaît.

26 Q. Il s'agit des statistiques pour le recensement de 1991, et l'on voit

27 ici les résultats pour d'autres années également. Donc si vous cherchez les

28 chiffres sous l'entrée serbe, il est dit pour l'année 1991, 581 000 et

Page 49018

1 quelques -- Un peu plus bas pour ce qui est des pourcentages pour les

2 Serbes, l'on lit 12,2 %. En fait, ce sont les chiffres que nous a donnés M.

3 Kostic qui est venu déposer ici peu avant vous. Vous avez parlé d'un

4 million de Serbes, vous. Mais ce chiffre on ne le retrouve pas ici. Est-ce

5 que vous pouvez étayer cette information par des informations officielles ?

6 R. Oui, je peux vous aider avec cela, Madame. Tout d'abord, je vais vous

7 dire que c'est écrit en langue serbe parce que les Croates sont le seul

8 peuple du monde qui ait renoncé à sa langue, qui n'est plus utilisée depuis

9 100 ans.

10 Je vous ai dit que ces documents sont falsifiés parce qu'ils ne

11 représentent pas le chiffre exact des Serbes. L'ambassadeur de Croatie,

12 Mario Nobilo, dès 1993, a prononcé un démenti sur ces chiffres. Il a dit

13 qu'à l'extérieur de la Krajina, il y avait 471 000 Serbes, or, dans le

14 document que nous avons vu hier dit, que 251 000 vivent dans la Krajina,

15 sans les Yougoslaves, et additionner ces deux chiffres et vous verrez que

16 cela fait un million de personnes.

17 Je vous ai dit qu'au Kosovo également, on a multiplié par deux et

18 demie le nombre de Kosovars à tort, donc c'est une Yougoslavie où les non-

19 Serbes préparaient la décomposition de l'Etat. Mme Uertz-Retzlaff a mal

20 prononcé le nom du témoin -- en quoi le témoin a répondu : Je suis

21 Jarcevic.

22 Q. Je voudrais vous soumettre également une autre source officielle, c'est

23 un document intitulé : "Etudes yougoslaves." C'est un document de 1992 de

24 Belgrade.

25 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Encore une fois, je vais demander que

26 la deuxième page du document soit placée sur le rétroprojecteur.

27 Q. Monsieur Jarcevic, voyez-vous nous retrouvons le même chiffre ici pour

28 le recensement de 1991, donc, encore une fois, les mêmes chiffres et les

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1 mêmes pourcentages, eu égard aux Serbes ?

2 R. Encore une fois, je n'apporte aucune foi à ces chiffres qui ont été

3 apportés de Croatie et qui ont été repris de Croatie et il y a eu des

4 pacifications pour ce qui est de ce recensement au niveau de la république,

5 on a cherché à diminuer le nombre de Serbes.

6 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Qu'en est-il de cette revue ? Elle

7 provient d'un institut --

8 LE TÉMOIN : [aucune interprétation]

9 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] -- qui a été créé par l'assemblée de

10 la République fédérale de Yougoslavie.

11 LE TÉMOIN : [interprétation] Ce sont des chiffres qui ont été repris de

12 Zagreb, et je vous ai dit par trois fois tout ce qu'il y avait à dire au

13 sujet de ces chiffres de Zagreb.

14 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] C'est ce que j'ai compris. Je vous

15 entends bien. Maintenant je pose ma question au sujet de ce document

16 intitulé Etude yougoslave, et je voudrais, s'il vous plaît, que vous me

17 répondiez à ma question.

18 Pourquoi vous n'ajoutez pas foi à cette édition-là ?

19 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous ai dit hier qu'à Knin nous avons

20 revérifié ces chiffres et nous sommes arrivés à un total de plus d'un

21 million de Serbes et des données statistiques le confirment.

22 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Cela est un autre point, Monsieur

23 Jarcevic, ceci a à voir avec l'exactitude des chiffres. Qu'avez-vous à nous

24 dire au sujet de la fiabilité de cette publication ? Pourquoi vous dites

25 qu'elle n'est pas fiable ? Y a-t-il autre chose que les chiffres ?

26 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous ai dit que nous avons vérifié ces

27 chiffres à Knin et nous sommes arrivés à d'autres chiffres. Bien entendu,

28 nous n'avons plus nos archives qui ont été confisquées.

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1 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je vais vous poser ma question

2 autrement : est-ce que vous connaissez cette publication ?

3 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

4 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Est-ce que vous avez une autre raison

5 qui éclairait vos doutes quant à la fiabilité de cette publication ?

6 LE TÉMOIN : [interprétation] Les données statistiques qu figurent dans

7 cette publication sont ce qu'elles sont. Je ne pense pas que le nombre de

8 Serbes tel que publié dans cette publication est exact. Je ne vois pas ce

9 que je devrais vous dire d'autre. Je ne pense pas non plus qu'il y est un

10 million 700 000 Siptar au Kosovo-Metohija.

11 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je vous remercie.

12 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Je demanderais à

13 M. l'Huissier de m'aider. Je voudrais vous soumettre d'autres statistiques

14 de ce même institut des études statistiques basées à Belgrade; cette fois-

15 ci ce sont des chiffres ou la publication plutôt de 1997. Je voudrais que

16 l'on examine la deuxième page de ce rapport. Il s'agit là de la structure

17 et du nombre des personnes qui ont été touchées par la guerre pour ce qui

18 est de leurs lieux de résidence. C'est le tableau V au milieu de cette page

19 que nous allons examiner, page 95. Pour la Croatie l'on voit que le nombre

20 de personnes qui ont été touchées par la guerre sont pour les zones sous la

21 protection des Nations Unies, bien, c'est 284 007, et dans d'autres gens de

22 la Croatie, bien, c'est 51 992.

23 Q. Ceci n'a rien à voir avec ce que vous nous avez dit, à savoir, 471 000

24 Serbes vivant dans les villes croates et 400 expulsés de là.

25 Ce que vous nous avez dit au sujet des personnes expulsées des villes, on

26 ne retrouve pas ici, n'est-ce pas, dans ces chiffres ?

27 R. Madame, ceci se trouve refléter dans le document de Boutros Boustros-

28 Ghali, il dit le 15 mai. Nous avons ici un document qui a été remis par M.

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1 Milosevic, il dit des ZPNU que 251 000 Serbes ont été expulsés. Cela est

2 son chiffre à lui, et non pas le mien. Le chiffre de 471 000 provient de

3 l'ambassadeur croate. Vous n'avez pas à m'imputer la responsabilité de ces

4 chiffres, je me suis contenté de les noter.

5 Pour ce qui est des personnes expulsées de Croatie, d'après les chiffres de

6 Serbie ou de l'ex-RSFY, aujourd'hui communauté des Etats de Serbie-et-

7 Monténégro, ne mettent pas confiance à ces chiffres, parce que tous ceux

8 qui entre-temps ont reçu la citoyenneté de la Serbie-et-Monténégro qui sont

9 partis dans les pays tiers sont immédiatement rayés des registres des

10 personnes expulsées.

11 L'année dernière en mai, le gouvernement de la République serbe en exile a

12 remis au président Kostunica et à Tadic, le président du parlement, une

13 lettre demandant que l'on mette fin à cette pratique; sinon, les

14 informations montrant que qui que ce soit ait été expulsé de Croatie

15 n'existaient plus.

16 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Est-ce que vous pouvez nous rappeler

17 quel est ce document de Boutros Boutros-Ghali pour lequel vous dites qu'il

18 apporte la preuve que vos chiffres sont bons ?

19 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est un rapport fait par Boutros Boutros-

20 Ghali lors d'une réunion du Conseil de sécurité qui s'est tenue le 15 mai

21 1993, et il parle des expulsions qui ont eu lieu de 1990 au début de

22 l'année 1993. C'est au début de la page 4, en anglais.

23 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] J'aimerais avoir votre opinion Me

24 Kay pour ce qui convient de faire, comment convient-il de traiter ce

25 document de M. Boutros Boutros-Ghali ?

26 Nous devrions le verser au dossier.

27 M. LE JUGE KWON : [interprétation] C'est l'intercalaire 18.

28 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] De quel paragraphe de ce document

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1 parlez-vous ?

2 LE TÉMOIN : [interprétation] Il me semble que c'est la page 4 du texte en

3 anglais, mais M. Milosevic a présenté ce texte en langue serbe.

4 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Il se peut que je me trompe, mais je

5 ne vois pas ce genre de chiffres dans ce rapport.

6 LE TÉMOIN : [interprétation] Page 4, première ligne.

7 M. KAY : [interprétation] C'est la pièce 338, page 16, je pense. D'après

8 mes notes, c'est de cela qu'il s'agit, le témoin a déposé en disant que les

9 Serbes ont commencé à partir en 1990 et que 271 000 Serbes ont quitté la

10 Krajina, comme ceci figure au rapport du secrétaire général des Nations

11 Unies, le rapport datant du mois de mai 193. Il s'agit de la pièce 338,

12 intercalaire 16.

13 LE TÉMOIN : [interprétation] 251.

14 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Page 1.

15 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] C'est l'intercalaire 16 ?

16 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, l'intercalaire 16.

17 Mme UERTZ-RETZLAFF : [aucune interprétation]

18 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Il semblerait qu'il s'agisse là de

19 l'intercalaire 16.

20 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Je viens de le trouver à

21 l'intercalaire 18. C'est le paragraphe 10, et ici nous avons aussi les

22 chiffres pour les personnes qui fuient vers la Serbie, et il est dit 251

23 000.

24 Q. Mais, Monsieur Jarcevic, les chiffres que l'on trouve dans ce rapport,

25 ils correspondent aux constatations tels qu'on les voit dans la publication

26 de l'Institut de statistiques yougoslaves qui parlent également de 250 000

27 Serbes expulsés d'autres parties et de 284 000 des ZPNU. Puis, la page

28 suivante, au tableau VI de cette publication, vous verrez la ventilation

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1 par les années et pour les années 1991, 1992 et 1993, ainsi que pour

2 l'année 1995. Vous verrez que les chiffres sont considérablement inférieurs

3 à ce que vous citez.

4 Est-ce que vous pouvez nous répondre à ce sujet ? Cette fois-ci, il s'agit

5 d'un institut yougoslave qui est contrôlé par l'Etat yougoslave. Ceci n'a

6 rien à voir avec les Croates.

7 R. Madame, je vous ai déjà dit comment on agit dans la pratique. Celui qui

8 reçoit la citoyenneté de la Serbie-et-Monténégro n'est plus considéré comme

9 personne déplacée ou réfugiée. Vous avez des dizaines et des dizaines de

10 milliers de personnes qui, au moment de ce recensement, était là et sont

11 partis déjà dans les pays tiers, le Canada, ou autres. Je vous ai dit

12 qu'aucun de ces pays de destination n'a voulu nous communiquer des chiffres

13 que nous avons demandés en 1993. Le nombre des personnes, qui sont parties

14 vers ces pays-là, n'est pas moins important que celui des personnes parties

15 vers la Serbie. Vous n'avez pas ces chiffres, comme je ne les ai jamais

16 eus.

17 Q. Mais Monsieur Jarcevic, il ne s'agit pas ici de réfugiés dans ces

18 tableaux. Il s'agit de personnes touchées par la guerre par rapport à leurs

19 anciens lieux de résidence. Il ne s'agit pas seulement de réfugiés, du

20 moins c'est comme cela que j'interprète ce rapport.

21 R. Madame, je ne suis en train d'affirmer rien et je n'ai rien inventé. Je

22 vous ai cité deux chiffres; le chiffre de l'ambassadeur de Croatie de

23 Nobilo. Je n'ai pas de document parce qu'il a été emporté par la police

24 croate et le document de Boutros Boutros-Ghali. Si 251 000 Serbes ont été

25 chassés de deux régions qui ont été les moins accueillantes pour les

26 réfugiés, à savoir, placées sous l'embargo sans moyen pour refaire sa vie,

27 alors, quel doit être le chiffre du nombre qui sont partis dans les pays

28 qui leur offraient de meilleures conditions, et qui dans ces années-là

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1 accordaient généreusement leurs visas à ces personnes ? Mais vous pouvez

2 imaginer quelles ont été les proportions, l'étendue du crime commis contre

3 les Serbes de Croatie si vous avez tout cela en plus de ce qui figure dans

4 le document qui est sous nos yeux.

5 Q. Mais, Monsieur Jarcevic, est-ce que vous êtes prêt à admettre que les

6 données qui figurent ici dans cette publication yougoslave sont des données

7 officielles de l'Etat yougoslave, recueillies par des organes officielles

8 de l'Etat, et qu'un certain nombre de lignes directrices sont données

9 lorsqu'ils préparent ces statistiques ? Vous êtes prêt à admettre cela ?

10 R. Madame, mais je n'accepte pas que ces chiffres, même si leur auteur est

11 bien connu, sont vrais, que ces chiffres contiennent toutes les données sur

12 le peuple serbe expulsé de Croatie. Mais vous avez tous ces Serbes qui se

13 sont enfuis au Canada. J'attire votre attention là-dessus, par exemple.

14 Donc, ces tableaux n'englobent pas tous les éléments du problème du peuple

15 serbe de Croatie. L'Australie, le Canada, les Etats-Unis d'Amérique,

16 l'Allemagne, il faut leur demander des chiffres. Je vous ai dit que les

17 Allemands nous ont fait savoir verbalement qu'ils n'allaient pas rapatrier

18 ces Serbes en Croatie de force, mais qu'ils regrettaient de devoir assumer

19 la plus grande partie des frais parmi tous les pays européens; donc, ce

20 sont eux qui ont accueilli le plus grand nombre de Serbes. Or ces chiffres-

21 là, vous ne les retrouvez pas dans ces tableaux.

22 Q. Monsieur Jarcevic, savez-vous que la Commission d'Etat, qui organise le

23 recensement et qui vérifie les résultats, bien que cette Commission qui est

24 basée à Belgrade, assure un suivi des recensements partout en Yougoslavie ?

25 Vous le savez ?

26 R. Bien sûr que je le sais, Madame. Mais je vous ai dit quelle a été la

27 méthode appliquées. Les gens qui avaient reçu la citoyenneté et nombreux

28 d'entre eux ont été forcés d'accepter cette citoyenneté, bien ces gens-là

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1 ne figurent plus dans les chiffres que vous êtes en train de citer. Puis,

2 en plus, vous avez des pays tiers. Je sais que je n'ai pas le droit de vous

3 poser des questions mais --

4 Q. Monsieur Jarcevic, de toute évidence vous ne m'avez pas bien comprise.

5 Maintenant, je me réfère aux résultats des recensements, en général. Pour

6 ce qui est du recensement de 1991, savez-vous que la Commission d'Etat

7 basée à Belgrade a suivi le déroulement du recensement partout en

8 Yougoslavie et savez-vous que les responsables croates chargés du

9 recensement ont dû se conformer à des lignes directrices qui leur ont été

10 données et appliquer certaines règles ?

11 R. Oui, Madame, cela je le sais. Mais les organes yougoslaves ne

12 surveillaient pas ce qui se passait dans les autres républiques. Ils

13 prenaient au pied de la lettre ce que les agences statistiques des

14 différentes républiques leur fournissaient.

15 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Monsieur le Président, je voudrais

16 demander le versement au dossier de ces trois documents, le témoin connaît

17 ces documents et nous les avons examinés pendant l'interrogatoire.

18 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, ces documents seront versés au

19 dossier.

20 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation]

21 Q. Monsieur Jarcevic, vous avez également parlé du document qui se situe à

22 l'intercalaire 13 des pièces à conviction de la Défense.

23 Je voudrais que l'on le replace sur le rétroprojecteur.

24 C'est un document qui concerne Marica Varicak.

25 R. Varicak.

26 Q. Oui.

27 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Est-ce qu'on peut avoir les cotes

28 pour les documents que l'on vient d'admettre au dossier ?

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1 M. LE GREFFIER : [interprétation] L'extrait de l'Institut de statistiques

2 croates de l'année 1991 sera la pièce 956. L'extrait des études yougoslaves

3 pour 1992 sera la pièce 957, et l'extrait pour 1997 sera la pièce 958.

4 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation]

5 Q. Monsieur Jarcevic, si vous examinez maintenant la pièce 338,

6 intercalaire 13, la pièce que nous avons à présent sur le rétroprojecteur,

7 et qui n'a pour autant encore de traduction, êtes-vous en mesure de nous

8 dire s'il n'est pas exact que nulle part dans ce document on ne parle de 21

9 cas de plasticage ou de 381 incidents de 1991 qui étaient des explosions,

10 673 incidents de 1992. Donc, nulle part dans ce document, il n'est dit que

11 les victimes de ces incidents étaient des Serbes, n'est-ce pas, ou qu'ils

12 étaient des propriétaires des biens endommagés ?

13 R. Mais, Madame, je vous ai fait part de mon avis hier. Je tiens à

14 préciser que Marica Varicak est une Serbe de Lika. C'est une région qui se

15 situe dans la région serbe de Krajina et elle était à Zadar et elle faisait

16 partie d'une des 28 000 Serbes qui ont expulsés de cette ville. On a

17 témoigné ici que -- ce document est utilisé dans le cadre d'une procédure

18 devant les tribunaux pour prouver que les maisons serbes ont été démolies.

19 Marisa Varicak --

20 Q. Vous n'avez pas à nous répéter ce que vous nous avez dit au sujet de

21 l'affaire de Marisa Varicak. Mais nulle part, mis à part du fait qu'il est

22 question de Marica, que dans ce document, il n'est question de

23 l'appartenance ethnique du propriétaire des biens touchés dans l'un

24 quelconque de ces incidents, n'est-ce pas, dans les paragraphes que l'on

25 voit ici ? Il n'est pas question de l'appartenance ethnique des

26 propriétaires ?

27 R. Mais, cela se comprend bien. C'était une région placée sous le contrôle

28 des autorités croates et bien entendu qu'ils allaient démolir des maisons

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1 croates. Seules des maisons serbes ont été détruites.

2 Q. Dans la municipalité de Zadar se situent également les villages

3 Skabrnja et de Nadin, qui pourraient être dans cette liste, dans ces

4 chiffres, n'est-ce pas ?

5 R. Oui. Je ne peux pas vous répondre à cette question, mais je suppose que

6 l'organe qui a établi ce document pourrait vous en parler. Il est possible

7 que, parmi ces incidents, il y ait eu des biens croates, des bâtiments

8 croates. Mais peut-être à Zadar parce que Zadar c'est une ville de Croatie

9 qui a été en partie détruite, principalement parce que les maisons serbes

10 et leurs commerces prédominaient un centre de la ville. Là, vous n'aviez

11 plus que de l'herbe à la place des anciens bâtiments. C'était un peu comme

12 un parc nouvellement créé. J'ai un ami qui avait une maison à Zadar et il

13 dit qu'il a un gazon très anglais à l'endroit de la maison. Donc, je ne

14 peux pas vous parler des régions qui étaient partiellement dans la RSK.

15 Vous savez que le 22 janvier 1993, les Croates ont lancé une agression. Ils

16 se sont mis à incendier --

17 Q. Encore une fois, c'est une digression par rapport à la question qui

18 nous intéresse. Cela, c'est un document qui a à voir avec des explosions,

19 les dégâts dans la municipalité de Zadar et je vous ai demandé si Skabrnja

20 et Nadin devaient être normalement figurées ici. Vous m'avez répondu par

21 l'affirmative si je vous ai bien compris, que vous ne le sauriez pas.

22 R. Ecoutez, je ne peux pas vous répondre à cette question, Madame. C'est

23 un document qui a été fourni lors de plusieurs procès devant les tribunaux

24 et je n'ai pas suivi ces procès et je n'ai pas été partie prenante de ces

25 procès.

26 Q. Mais Zadar a été pilonné par la JNA, également, n'est-ce pas ? Donc,

27 ces dégâts auraient pu être provoqués par le pilonnage, n'est-ce pas ?

28 R. C'est possible. Mais ici, il n'est pas question de pilonnages. Il est

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1 dit, incendies et explosions. Donc, c'est plasticage, dynamitage. Aussi, ce

2 sont des incendies criminels. Je ne pense que ces incendies auraient peut-

3 être dû aux pilonnages.

4 Q. Mais le pilonnage peut provoquer l'incendie ?

5 R. Oui. Mais pas les explosions. Enfin, c'est un cas de dynamitage. On

6 place un dispositif explosif. Enfin, je ne suis pas un militaire mais

7 logiquement d'après tout ce que je sais, j'arrive à cette conclusion-là.

8 Q. Monsieur Jarcevic, à un moment donné, vous avez appris qu'environ 260

9 000 personnes qui s'étaient trouvées à l'hôpital de Vukovar ont été tuées ?

10 R. C'est exact, Madame. J'aimerais beaucoup qu'on en parle.

11 Q. Vous-même, vous êtes l'auteur d'une lettre à l'organisation, "Mères de

12 Vukovar." Je voudrais vous soumettre cette lettre pour que vous puissiez la

13 voir, vous, ainsi que toutes les personnes présentes.

14 Monsieur Jarcevic, est-ce bien la lettre que vous avez adressée à

15 l'Association des Mères de Vukovar au sujet des personnes portées disparu ?

16 R. Pour ce qui est des personnes portées disparu, c'est une lettre que

17 nous avons envoyée de Zagreb au moment des négociations avant la signature

18 de l'accord du 29 mars 1994. J'ai pris à la rédaction de cette lettre. Même

19 si cette lettre porte une autre signature. Je ne l'ai pas signé. Je peux

20 vous montrer comment se présente ma signature mais les Mères ont demandé

21 s'il y avait encore en Serbie des soldats croates faits prisonniers. Par

22 cette lettre, nous les assurons du fait qu'il n'y a ni en Slavonie, en

23 Yougoslavie de prisonniers et s'il y en avait, nous serions disposés à les

24 aider à les libérer. Ici, il n'est pas question de personnes qui ont été

25 tuées et qui ont été enterrées dans la fameuse fosse commune d'Ovcara mais

26 je suis, tout à fait, ouvert et prêt à parler de cette fosse commune

27 également.

28 Q. Monsieur Jarcevic, vous savez que les Mères de Vukovar recherchaient en

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1 fait les personnes portées disparu. Dans cette lettre, en 1994, évoqué

2 l'existence d'une fosse commune. Donc, vous le saviez bien, en 1994 ?

3 R. C'est une excellente, Madame. Oui, le gouvernement croate et le Conseil

4 de sécurité, en 1993, ont refusé notre proposition d'exhumer la fosse

5 commune d'Ovcara et de procéder à l'identification des corps. Cette

6 proposition a été donc rejetée et vous verrez cela dans une lettre de

7 William Fenrick, un haut fonctionnaire du Canada au Conseil de sécurité. Je

8 peux vous montrer la correspondance que nous avons eue avec lui pendant six

9 mois. En 1993, vers le mois de mai, je crois, personnellement, j'ai proposé

10 l'exhumation d'Ovcara.

11 Q. Monsieur Jarcevic, avançons dans l'ordre. Le professeur,

12 Dr Strinovic, pages du compte rendu d'audience 17 938 et 17 038, est venu

13 déposer ici et il a dit : "Que le premier site où il y a eu fosse a été

14 découvert à Ovcara en 1992." Par la suite, il nous a

15 dit : "Que les exhumations ont commencé en 1993, mais qu'elles ont été

16 arrêtées par la partie serbe, et que les exhumations n'ont pu reprendre

17 qu'en 1996."

18 A-t-il raison de dire cela ?

19 R. Non. Il n'a pas absolument raison. Une lettre existe, lettre du Conseil

20 de sécurité au premier ministre Bjegovic, où il a dit : "Il n'aura pas

21 d'exhumations comme prévues, ni à Ovcara, ni à Marino Selo, où se trouvent

22 des tombes, parce que le Conseil de sécurité n'a pas de moyens, pas

23 d'argent." C'est ce qui a été dit très clairement.

24 Q. Je vais d'abord vous demander ceci. Est-il exact de dire qu'on a

25 découvert les premiers éléments de cette fosse commune en 1992. Êtes-vous

26 au courant de cela ?

27 R. Etant donné que j'ai eu une réunion avec William Fenrick à l'hôtel

28 Yougoslavia à Belgrade, avant 1993, Fenrick avait des informations à propos

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1 de cette fosse commune et il a été abasourdi lorsque je lui ai dit que sans

2 consulter le chef d'Etat de la région, sans consulter le premier ministre,

3 j'avais garanti qu'on allait procéder à l'exhumation de cette fosse

4 commune, et il était incrédule, à l'époque. Je le lui ai confirmé par

5 écrit.

6 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Je dois maintenant revenir à la pièce

7 771, le rapport du Conseil de sécurité, en date du 7 novembre 1992. Je vais

8 demander à M. l'Huissier de placer sur le rétroprojecteur le paragraphe 86.

9 Q. Monsieur le Témoin, regardez ce texte. Il est dit qu'un expert en

10 médecine légale accompagnant le rapporteur spécial avait examiné, lors de

11 sa deuxième mission, une fosse commune éventuelle à peu près à deux

12 kilomètres au sud-est par rapport à la ferme d'Ovcara. On décrit un peu

13 plus cette fosse commune, et on dit qu'il se pourrait que ce soit les

14 personnes portées disparues de l'hôpital de Vukovar. Il est mentionné

15 également que l'envoyé spécial avait demandé une surveillance 24 heures sur

16 24 par la FORPRONU de ce lieu, et que le rapporteur spécial avait informé

17 récemment de la chose la commission d'experts.

18 Cela veut dire que les Nations Unies ont découvert cette fosse commune et

19 l'ont surveillé, tout en informant M. Fenrick de la commission d'experts.

20 R. M. Fenrick est venu me voir et il l'a fait pour demander au

21 gouvernement de la RSK la permission de procéder à l'exhumation. Je lui ai

22 donné aussitôt, cette autorisation. Je croyais avoir été clair. Mais je le

23 répète une troisième fois : en tant que geste de réciprocité, j'avais

24 demandé aussi qu'à Marino Selo, en Slavonie, on procède aussi à

25 l'exhumation des tombes où se trouvaient des Serbes, et il n'a pas tenu sa

26 promesse, et je vous expliquerai pourquoi.

27 Q. Nous allons voir ce que M. Fenrick vous a dit publiquement. C'est une

28 pièce qui n'a pas encore été versée au dossier. C'est un nouveau document.

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1 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] On me rappelle que la lettre des

2 Mères de Vukovar devrait être versée au dossier.

3 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Ce sera fait.

4 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce 959.

5 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Je dis ceci à l'attention de M.

6 l'Huissier, la page qui nous intéresse --

7 Q. Auparavant, je vais vous expliquer ceci, Monsieur Jarcevic, c'est un

8 câble avec une annexe des Nations Unies, ceci concerne le site de la fosse

9 commune d'Ovcara, la date est celle du 25 février 1995. On trouve dans cet

10 envoi un mémo interservice qui dit comment ces négociations ont été menées,

11 et je vous disais que la page qui nous intéressait, c'était la page 2 de ce

12 mémo. Il y a ici mention des discussions qu'il y a eu avec vous en 1993. Je

13 regarde tout d'abord ce mémo interservice, dernière ligne de la première

14 page plus exactement, il est dit que cette enquête fait partie de l'ordre

15 du jour de la commission d'experts depuis la fin de l'année 1992. Puis, on

16 dit que des préparatifs approfondis ont été faits pour procéder à

17 l'excavation du site, de décembre 1992 à septembre 1993. Notamment, on a

18 essayé d'obtenir de M. Jarcevic toutes les garanties voulues le 23 avril

19 1993; Monsieur Jarcevic, c'était bien vous le ministre des Affaires

20 étrangères.

21 Est-ce le souvenir que vous en avez ?

22 R. Oui. Cela s'est passé à l'hôtel Yougoslavia.

23 Q. Dans ce même paragraphe, il est dit ceci : "Après réception de

24 l'autorisation écrite, la commission a envoyé une équipe de 60 personnes

25 pour procéder à l'excavation en ex-Yougoslavie. Par la suite, en octobre

26 1993, les autorités locales ont nié qu'une autorisation avait été donnée et

27 ont commencé à dresser des obstacles de plus en plus nombreux…"

28 Ce n'est pas de l'argent qui n'aurait pas existé, qui n'aurait pas été

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1 donné par les Nations Unies. Ce sont en fait les autorités locales qui ont

2 essayé d'empêcher l'activité de la commission. Pourriez-vous nous dire

3 pourquoi vous vous opposiez à ce travail ?

4 R. Madame, c'est la première fois que j'entends parler de ceci. Jamais je

5 n'ai entendu parler de ce genre de chose, il est impossible que ce soit

6 exact. Même si quelqu'un avait fait de l'obstruction - je parle ici des

7 autorités locales - il aurait fallu que le gouvernement de la RSK en soit

8 informé, parce que ce que je peux vous dire, c'est que ce qu'avait promis

9 Fenrick n'a jamais été réalisé. Il y a plusieurs lettres que nous avons

10 gardées en RSK, et je pense que les associés de M. Milosevic disposent

11 notamment d'une lettre qui dit ceci : étant donné qu'il n'y avait pas de

12 fonds, on allait interrompre l'exhumation sur les deux sites. Nous avons

13 proposé nos propres médecins légistes, notamment une personne qui

14 s'appelait Zeljko Karan de Banja Luka, mais on n'a jamais accepté qu'il

15 rejoigne l'équipe, on n'a jamais pris son nom. Si vous voulez je peux vous

16 en dire plus.

17 Q. Nous allons d'abord parcourir ce mémo qui parle du déroulement de cette

18 procédure d'exhumation. On dit ceci, notamment : "Les 15 et 16 octobre

19 1993, la commission a reçu des 'décrets' de Knin qui autorisaient

20 l'excavation, pourvu que les examens médicaux-légaux ne se fassent pas en

21 Croatie," et les Nations Unies ont marqué leur accord. Puis, on dit : "Le

22 colonel Milanovic a dit, le 22 octobre 1993, à la commission, qu'en dépit

23 de toutes les garanties écrites données précédemment, l'excavation devrait

24 être interrompue tant qu'une solution globale politique ne serait pas

25 trouvée pour ce qui est de la situation prévalant en ex-Yougoslavie."

26 Pourquoi, est-ce qu'il fallait parvenir d'abord à cette solution politique

27 globale ?

28 R. Croyez-moi, je vous dis que c'est la première fois que j'en entends

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1 parler. Pourquoi une telle lettre envoyée par Fenrick au gouvernement de la

2 RSK ne contenait-elle pas ce fait ? Si cela avait été le cas, nous aurions

3 sûrement réagi.

4 Dans sa lettre, il dit qu'il n'y avait pas suffisamment de fonds, et que

5 c'était la raison pour laquelle on n'allait pas procéder à l'excavation de

6 ces deux sites. Je pense que ce Tribunal recevra cette lettre. Je vais

7 essayer de la trouver.

8 Il y avait l'adjoint de M. Fenrick qui ne voulait pas aller à Belgrade pour

9 interroger une personne qui était le seul survivant de l'exécution à Marino

10 Selo. Ce monsieur n'était pas intéressé.

11 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Jarcevic, qui dispose de

12 cette lettre ?

13 LE TÉMOIN : [interprétation] J'en ai une copie chez moi, et je vais vous

14 l'envoyer dès que je peux. C'est une lettre envoyée par Fenrick au premier

15 ministre Bjegovic.

16 Mme UERTZ-RETZLAFF : [aucune interprétation]

17 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Non, ne me l'envoyez pas. Envoyez-la

18 à l'accusé ou à ses associés.

19 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation]

20 Q. Parmi ces documents concernant Ovcara que j'ai ici, je ne trouve pas

21 cette lettre, mais il y a un communiqué de presse du 2 novembre, c'est

22 l'annexe numéro 3.

23 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Monsieur l'Huissier, veuillez placer

24 ce document sur le rétroprojecteur.

25 Q. D'après ce document - apparemment il émane de M. Fenrick - il explique

26 comment il s'est préparé à l'exhumation et comment il a d'abord obtenu le

27 permis, l'autorisation nécessaire pour le faire. Vous avez la deuxième page

28 de ce communiqué de presse. Il dit ceci : "Cependant, en octobre 1993,

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1 après l'arrivée en ex-Yougoslavie des personnes mentionnées ci-dessous,

2 certains représentants locaux de l'administration de Knin dans la région

3 d'Ovcara ont commencé à dresser des obstacles, empêchant ainsi l'exécution

4 du projet de la commission et, notamment ou en particulier, le colonel

5 Milanovic."

6 Page suivante, il poursuit en disant ceci : "Cependant, la commission est

7 convaincue qu'il est impossible de dissimuler la vérité de la fosse commune

8 d'Ovcara, quels que soient les obstacles dressés en ce moment, empêchant la

9 conduite de l'enquête.

10 "La commission déplore ceci, car l'identification des personnes permettrait

11 peut-être de soulager l'anxiété des familles des personnes disparues."

12 Il dit aussi : "…l'attitude du gouvernement croate est positive et utile."

13 Il ne parle pas de problèmes d'argent, ou d'une question de réciprocité,

14 pour ce qui est de l'exhumation à Ovcara ou ailleurs.

15 R. Ceci me surprend, parce qu'en plus du fait qu'il n'y avait pas assez

16 d'argent, il m'a dit que la commission allait être démantelée, et je pense

17 que c'est bien ce qui s'est passé, début 1994. Il m'a dit verbalement que

18 le Tribunal de La Haye allait poursuivre le travail qu'eux auraient dû

19 exécuter.

20 Q. Prenons l'annexe numéro 4. C'est une lettre que vous écrivez le 6

21 novembre 1993. Manifestement, elle est en rapport avec le communiqué de

22 presse de M. Fenrick. Paragraphe 2, voici ce que vous dites : "La RSK a

23 autorisé l'utilisation du site d'Ovcara, à condition qu'il y ait aussi

24 exhumation des fosses communes à Marino Selo et à Pakrakca Poljana en

25 Slavonie occidentale, et que ceci se fasse en présence d'une équipe de

26 médecins légistes ou d'experts légistes de la Krajina."

27 Ici, vous parlez d'une question de réciprocité pour qu'il y ait exhumation

28 d'un côté, mais aussi exhumation de ces deux fosses communes que vous

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1 mentionnez. Mais ceci n'est pas du tout mentionné dans les documents des

2 Nations Unies; pourquoi ?

3 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, vous voulez

4 intervenir ?

5 L'ACCUSÉ : [interprétation] Ce que Mme Uertz-Retzlaff dit n'est pas exact.

6 Elle dit que ce n'est mentionné dans aucun document des Nations Unies. Elle

7 ne pose pas la bonne question au témoin, parce qu'elle a, il y a un

8 instant, cité un mémo interservice de la FORPRONU, et à peine un paragraphe

9 plus loin que celui qu'elle a cité, elle a cité à la page d'un paragraphe

10 qui commence par les mots suivants : "Le 15 et le 16 octobre 1993, la

11 commission…," et cetera. Dans le paragraphe qui suit, on le dit déjà, donc

12 dans ce document des Nations Unies, on le mentionne précisément. On dit que

13 Jarcevic a envoyé une lettre de réfutation à Fenrick dans laquelle il dit -

14 puis vous pourrez en prendre connaissance vous-même - il cite les propos de

15 Jarcevic : "Je dois vous rappeler de façon tout à fait catégorique que le

16 gouvernement de la RSK avait autorisé Ovcara, à condition qu'il y ait le

17 même genre d'exhumation de fosses communes à Marino Selo et à Pakrakca

18 Poljana [phon] en Slavonie occidentale, où 2 500 corps serbes se trouvent.

19 Il a été convenu qu'il y aurait une équipe d'experts en médecine légale."

20 On voit donc ici mention, dans un document des Nations Unies; or, Mme

21 Uertz-Retzlaff dit au témoin que ce n'est mentionné dans aucun document.

22 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Monsieur le Président, je --

23 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur

24 Milosevic.

25 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] M. Milosevic vient de citer un

26 document qui est le résumé des événements. Ce n'est pas ce que je faisais.

27 J'ai pris les lettres qui sont en annexe. Ici, dans ce résumé, on fait

28 uniquement référence à la lettre, et je viens de demander à M. Jarcevic

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1 pourquoi en novembre 1993, il mentionne pour la première fois qu'il y a eu

2 un accord préalable. Or, c'est précisément ce qui est dit dans ce rapport,

3 à savoir, comme c'est dit ici, que le 6 novembre, il a écrit cette lettre.

4 Dans le rapport de synthèse des événements, le commentaire de l'auteur de

5 ce rapport dit qu'il n'a pas les moyens de vérifier de l'exactitude des

6 déclarations de M. Jarcevic, déclarations qu'il fait dans cette lettre.

7 C'est précisément ce que je soumettais au témoin. Je lui ai demandé

8 pourquoi le 6 novembre, il mentionne cette chose.

9 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Répondez, s'il vous plaît, Monsieur

10 Jarcevic.

11 LE TÉMOIN : [interprétation] Madame, ces conditions, elles ont été évoquées

12 lors de ma première rencontre avec M. Fenrick à l'hôtel Yougoslavia. Il m'a

13 dit verbalement, oralement, qu'il acceptait ces conditions, et vous savez

14 qu'il y a des accords verbaux qui ont autant de poids que des accords

15 écrits. Ici, il manque des documents dans lesquels ceci serait dit

16 expressis verbis [phon].

17 Avant cette date que vous avez mentionnée, je peux vous rappeler que nos

18 archives ont été saisies par la police croate. Mais je suis sûr qu'il est

19 possible de trouver ce document à New York.

20 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation]

21 Q. Dans son communiqué de presse du 2 novembre, M. Fenrick ne mentionne

22 pas ce fait, mais je vais vous demander ceci : pourquoi insistez-vous pour

23 qu'il y ait réciprocité, s'agissant d'enquêtes menées à propos de fosses

24 communes ? Pourquoi est-ce qu'il devrait y avoir un lien entre ces fosses

25 communes ?

26 R. Merci de me poser cette question. Nous avons informé M. Fenrick de

27 l'existence d'environ 70 fosses communes de Serbes à Knin. Excusez-moi, je

28 veux dire en Croatie. Il est tout à fait logique de dire que les Nations

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1 Unies ne peuvent pas uniquement s'intéresser à des crimes commis par une

2 partie à un conflit. Les Nations Unies doivent s'intéresser à toutes les

3 parties. Donc, Fenrick m'a dit : "D'accord, nous allons maintenant, pour le

4 moment, nous occuper de ce qui se fait, de celles-ci, en Slavonie

5 occidentale," et je peux vous dire aussi ce que Fenrick a expliqué par la

6 suite, ce qu'il nous a dit plus tard. Il a dit qu'il avait trouvé des

7 fosses vides dans lesquelles il n'y avait pas de corps, et un certain temps

8 s'est écoulé, et c'est à ce moment-là que la commission devait cesser ses

9 fonctions.

10 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Je demande le versement --

11 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Auparavant, une question.

12 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Oui.

13 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je vois qu'il y a une recommandation

14 qui dit que le TPIY devrait envisager de contacter le gouvernement croate

15 et les autorités de Knin, afin de veiller à ces deux exhumations. Est-ce

16 qu'il y a eu un suivi de la part du bureau du Procureur ?

17 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Je ne sais pas.

18 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Vous devriez quand même comprendre ce

19 que dit le témoin. Il dit qu'il faut quand même une question d'égalité; si

20 on fait une chose, il faut aussi faire l'autre.

21 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Le bureau du Procureur n'a pas en

22 règle générale demandé à d'autres autorités de faire ce genre de chose, et

23 je ne sais pas si la commission s'est intéressée à ces autres fosses

24 communes. Je vais essayer de m'enquérir pour savoir si ce genre de chose a

25 été fait, mais pour le moment, comme cela à brûle-pourpoint, je ne peux pas

26 vous répondre.

27 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Ce document est versé.

28 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce 960.

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1 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation]

2 Q. Monsieur Jarcevic, vous avez parlé de votre participation à des

3 négociations avec les autorités croates et vous avez surtout parlé de ces

4 questions politiques globales. Mais vous avez aussi négocié. Hier, j'ai ici

5 un communiqué de presse du 15 décembre 1992, qui fait uniquement mention du

6 fait que, par le truchement de la FORPRONU, le gouvernement croate a

7 proposé la normalisation des relations avec la RSK, s'agissant de

8 l'ouverture de routes, de l'établissement de transports ferroviaires, de la

9 réparation de centrales électriques, hydro-électriques, ce genre de chose.

10 Là, ce sont des négociations qui portent sur des données plus pratiques. Il

11 y a eu aussi ce genre de négociations pratiques, économiques. Ici, nous

12 avons une proposition croate, n'est-ce pas ?

13 R. Madame, dans toutes les réunions, que ce soit des réunions en directe

14 avec la délégation croate ou avec les médiateurs comme Thornberry, nous

15 avons toujours parlé de ce genre de chose. Nous voulions l'ouverture des

16 routes en Slavonie vers la Hongrie. Nous voulions pouvoir accès au monde.

17 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Peut-on verser ceci au dossier ?

18 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui.

19 M. LE GREFFIER : [interprétation] Pièce 961.

20 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation]

21 Q. Nous allons maintenant parler de questions plus précises s'agissant de

22 certaines négociations mais je voudrais vous soumettre ce que vous avez dit

23 à propos de votre interlocuteur croate. C'est un extrait de Glas Srpski. La

24 date est celle du 14 et du 15 janvier 1993.

25 R. Je vais regarder.

26 Q. Le titre est celui-ci : "Réactions de Slobodan Jarcevic, ministre des

27 Affaires étrangères de la RSK." Le titre est : "Dangers pour la RSK."

28 Premier point en sous-titre : "J'espère que le monde va comprendre que tous

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1 les maux qui affligent aujourd'hui l'ex-Yougoslavie émanent de la Croatie

2 et de cette création artificielle musulmane. Deux éléments qui ont

3 déclenché la guerre pour essayer de détruire le peuple serbe."

4 C'est bien l'avis que vous aviez à l'époque ?

5 R. J'ai toujours cet avis aujourd'hui, Madame.

6 Q. Un peu plus loin, vous dites : "Jarcevic a répété qu'un Etat monstrueux

7 qui existait auparavant ou qui avait déjà existé était en train d'être

8 recréé sur le territoire de l'ex-Bosnie-Herzégovine…"

9 Vous parlez d'un Etat monstrueux qui avait déjà existé auparavant ?

10 R. La réponse est enfantine, Madame. Il n'est pas possible d'avoir un même

11 blason, d'avoir une même langue, un même drapeau. Que voulez-vous

12 d'autres ? Je ne sais pas.

13 Q. Un peu plus loin, vous dites ceci : "A en juger par tout ce qui se

14 fait, on envisage par la RSK, une forme de Fédération ou de Confédération

15 avec la Croatie. Chose inacceptable à nos yeux."

16 Vous avez toujours voulu que la RSK soit un Etat et que la RS aussi, la

17 Republika Srpska soit un Etat, n'est-ce pas ?

18 R. Oui. C'était notre objectif ultime vu l'expérience que nous avait

19 donnée l'histoire. Pour ce qui est de la proposition croate, je le répète,

20 cela ne concernait que deux villes et leurs environs. Je le répète, nous

21 avons toujours rejeté cette proposition.

22 Q. [aucune interprétation]

23 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Je demande le versement de ce

24 document.

25 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Il est versé Madame.

26 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce 962.

27 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation]

28 (06:23)Q. J'ai oublié de vous poser une question. Vous dites ici que la

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1 nation musulmane c'est une création artificielle. Vous maintenez vos dires

2 aujourd'hui ?

3 R. Tout à fait. Tout à fait. Tous les Musulmans de Bosnie-Herzégovine, en

4 fait, sont des Serbes de souche.

5 Q. J'ai un autre article qui émane de ce même journal, Glas Srpski. La

6 date est celle de 1993. Le titre est le suivant : "Les mots bannis : la

7 coexistence et l'autonomie." "En fait, là, vous reprenez le terme 'croate'

8 qui veut dire 'coexistence'" ?

9 R. Vous vous trompez, Madame. C'est un terme serbe. Cela fait 100 ans

10 qu'on n'utilise le Croate. C'était le dialecte kajkavien dans le milieu

11 universitaire, mais c'était une erreur que d'employer ce terme. On a repris

12 ici pour être utilisé par l'Etat, en langage pur -- une langue pure, la

13 langue serbe qu'on a un peu gâtée. Le Croate, c'est la seule langue qui

14 n'est pas protégée par l'UNESCO, même si l'UNESCO s'occupe de 6 000 langues

15 qui sont menacées d'extinction dans le monde.

16 Q. Monsieur Jarcevic, ici, vous avez, en fait, l'opinion d'une délégation

17 de la RSK. Vous y êtes mentionné. Je vois votre nom. Dernière colonne, en

18 serbe. En anglais, c'est à la deuxième page, premier paragraphe de la page.

19 On dit ici : "Récemment, nous avons réfuté la déclaration de M. Owen qui

20 avait dit que, si nous participions à ces négociations, c'était pour

21 établir une espèce de coexistence et d'autonomie en République de Croatie.

22 Ce n'est pas là notre raison. Ce sont précisément pour que ces deux termes,

23 'coexistence' et 'autonomie' soient bannis de façon permanente au cours de

24 ces pourparlers."

25 Est-ce que cela veut dire qu'on vous a proposé cela, qu'on vous a proposé

26 la coexistence et l'autonomie, et que vous avez refusé cette proposition ?

27 R. Pour la cinquième fois, je vous dis, Madame : Coexistence et

28 l'autonomie ne s'appliquaient qu'à deux seules villes. Il va y avoir une

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1 escalade invraisemblable en 1993. Puis, sous forme de plan Z-4 lorsque

2 l'argent, le drapeau, l'armée, le blason, le parlement et la participation

3 aux organes de pouvoirs croates ont été prévus pour ce plan, donc, vous

4 avez les deux tiers de la RSK qui en sont exclus et probablement devaient

5 devenir partie intégrante de la Croatie, alors que tous les habitants de

6 ces régions allaient être expulsés. Les habitants de Dubrovnik et de Sisak

7 avaient droit de redouter cela.

8 Q. Maintenant, nous avons une lettre que vous avez rédigée à Aleksa Buha

9 de la République serbe.

10 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Monsieur le Président, est-ce qu'on

11 peut verser au dossier l'article précédent ?

12 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, la pièce est versée au dossier.

13 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce 963, Monsieur le

14 Président.

15 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation]

16 Q. Monsieur Jarcevic, c'est une lettre que vous avez rédigée. Vous l'avez

17 destiné à M. Buha. Nous avons une traduction de cette lettre, mais on en a

18 donné lecture, le 11 septembre 1993, lors d'une session de l'assemblée de

19 la RSK. Est-ce que vous vous souvenez avoir adressé ce genre de lettre à M.

20 Buha ou cette lettre-ci ? Est-ce que vous savez que cette lettre a été lue

21 et qu'on a applaudi en l'entendant ?

22 R. Oui.

23 Q. je vais vous citer juste un petit paragraphe.

24 R. Courage, n'ayez crainte.

25 Q. c'est vers le milieu de votre lettre. C'est en bas de la première page,

26 Monsieur le Président, de la traduction : "Nous ne devons pas refaire

27 l'erreur que nous avons déjà faite tant de fois, de par le passé. Les

28 chevaliers serbes doivent être déployés le long des frontières serbes. Le

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1 mal intentionné ou le vilain qui a été instruit depuis son enfance qu'il

2 fallait qu'il extermine le peuple serbe ne doit pas poser son pied sur les

3 terres serbes. Trop de nos terres nous ont été enlevés pendant ce siècle

4 pour qu'on puisse en céder, ne serait-ce qu'un pousse ?"

5 On pourrait dire qu'il s'agit-là d'une propagande qui est vraiment mal

6 intentionnée, Monsieur Jarcevic, parce qu'il s'agit de diaboliser les

7 Croates ici, n'est-ce pas, et à glorifier les Serbes ?

8 R. Madame, après le génocide contre les Serbes dans les camps de la mort,

9 comment devrait-on s'exprimer ? Dites-moi. Peut-être que vous le savez. 700

10 000 Serbes ont été tués dans le camp de Jasenovac. C'est à cela que je

11 faisais référence.

12 Q. Mais, Monsieur Jarcevic, vous dites cela au sujet des personnes avec

13 qui vous étiez censé négocier un accord. Vous êtes un ministre des Affaires

14 étrangères; comment pouvez-vous utiliser ce terme-là ? Ce n'est pas quelque

15 chose qui peut apporter des résultats dans les négociations ?

16 R. Ce que j'ai dit n'est pas du tout un discours de la haine. Cela n'y

17 ressemble pas du tout. Si vous voulez, je peux vous paraphraser des propos

18 tenus par des Croates voire même des choses publiées dans des journaux

19 destinés aux enfants et vous allez être choquée. Ecoutez, je parle des

20 terres serbes qui doivent être comprises dans un Etat serbe. Je le

21 maintiens encore aujourd'hui, Madame.

22 Q. Vous parlez des frontières serbes, où se situeraient-elles ?

23 R. Madame, je suis pleinement conscient du fait que votre est

24 provocatrice. Je n'accepterais pas de me faire piéger. Je ne vais pas dire

25 que les frontières serbes doivent être là où la langue serbe est parlée et

26 là où vivent les peuples serbes. Là, en 1941 et 1945, le peuple serbe a été

27 exterminé. Donc, au Kordun, pas un seul Etat n'a le droit de s'emparer du

28 territoire où il a commis un génocide. La Croatie est la dernière qui y

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1 aurait droit alors que c'est elle qui contrôle ces terres encore

2 aujourd'hui.

3 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je vais vous poser une question

4 Monsieur Jarcevic.

5 Madame Uertz-Retzlaff, vous en avez terminé avec la question.

6 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Oui.

7 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Vers le début du texte, à peu près dix

8 lignes à partir du début dans la version anglaise. Vous dites : "Personne

9 ne remet en question l'intention noble de l'armée serbe qui souhaite

10 arrêter les pilleurs qui agissent en tant de guerre." Puis, plus bas, vous

11 parlez de l'affaiblissement, du courage et de la foi qu'on a dans les armes

12 serbe et l'Etat serbe." Puis, encore, dix lignes plus bas : "Les hommes

13 d'Etat, les journalistes à l'étranger ne parlent que de la rébellion de

14 l'armée serbe de Banja Luka."

15 Lorsque vous parlez de l'armée serbe, qu'entendez-vous par là, et lorsque

16 vous parlez des armes serbes ?

17 LE TÉMOIN : [interprétation] L'armée serbe s'appelle encore aujourd'hui

18 ainsi en République serbe. C'était un événement que j'ai failli de

19 comprendre à l'époque également. Il y a eu un conflit entre les dirigeants

20 de la République serbe et même des officiers militaires ont été impliqués

21 et j'ai demandé qu'on calme le jeu, qu'on trouve un terrain d'entente parce

22 que le monde entier n'avait que cela à la bouche. A l'époque ce que je

23 pensais, c'était qu'on négligeait, ce faisant, la question des Serbes

24 expulsés. Personne ne s'y intéressait. Personne ne tenait compte de ce qui

25 leur arrivait et nous sommes surpris qu'il a fallu attendre aujourd'hui

26 qu'on en parle.

27 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Lorsque vous revoyez le texte vers le

28 début, vous parlez du peuple serbe de Krajina qui a besoin d'aide : "Tout

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1 Serbe doit fournir cette aide. Si je vous écris cette lettre, c'est pour

2 que vous vous mettiez en contact avec les officiers, les soldats de Banja

3 Luka, leur disant que le peuple serbe se trouve confronter à une défaite

4 possible."

5 Alors, lorsque vous parlez des officiers, des soldats de Banja Luka, à qui

6 pensez-vous ?

7 LE TÉMOIN : [interprétation] Mais je vous ai dis à l'instant, un conflit a

8 éclaté au plus haut niveau militaire. Donc, au sein du Corps d'armée qui

9 était stationné à Banja Luka. Je n'en connais pas les détails. Je ne sais

10 pas quelles ont été les raisons. Mais je trouvais cela très désagréable de

11 voir que les médias à l'étranger en parlaient alors que le peuple serbe

12 connaissait de tout autre problème. Il fallait s'occuper d'autres choses

13 que de perdre son temps en des querelles intestines.

14 M. LE JUGE BONOMY : [aucune interprétation]

15 LE TÉMOIN : [interprétation] Excusez-moi, lorsque je parlais du danger de

16 la Krajina, que la Krajina était en danger. Ecoutez, je ne vois pas quel

17 peuple sur la planète aurait réagi de cette manière-là, à savoir : "Que le

18 nord soit attaqué et que le sud dise, ceci ne nous regarde pas ?" Donc,

19 c'est à cela qu'on attendait de notre part, je suppose.

20 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Je voudrais demander le versement de

21 ce document, de cette lettre au dossier.

22 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] La lettre est versée au dossier.

23 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce 964.

24 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation]

25 Q. Pour ce qui est des négociations, très brièvement, je voudrais que l'on

26 parle des négociations qui se sont déroulées en Norvège et je vais citer ce

27 que M. Vollebaek a dit à la Chambre, le 8 juillet 2002, devant cette

28 Chambre. Il s'agit des pages suivantes du compte rendu d'audience, 78 636

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1 jusqu'à 78 638 [comme interprété]. Vous avez reconnu qu'il a pu être en

2 contact avec M. Milosevic et, en fait, il nous a parlé d'une réunion qu'il

3 a eu, une réunion préparatoire avant les négociations de Norvège. En effet,

4 il a rencontré M. Milosevic et il a dit la chose suivante : "Je lui ai

5 demandé de l'aide et il m'a dit qu'il allait m'aider parce qu'il avait la

6 sensation que les Croates allaient avoir du mal à combattre sur deux fronts

7 en même temps. D'après lui, il était plus important de se battre contre les

8 Musulmans que contre les Serbes. Les Croates devraient avoir la possibilité

9 de se battre contre les Musulmans, et pour que ceci soit possible les

10 Serbes devraient d'une certaine façon se retirer un petit peu et laisser

11 les Croates se battre contre les Musulmans."

12 M. Milosevic est-ce qu'il a exprimé cet avis non seulement à Vollebaek,

13 mais aussi aux membres de la délégation de la RSK ? Le savez-vous ?

14 R. A chaque fois que je me suis trouvé en compagnie de

15 M. Milosevic, jamais M. Milosevic n'a parlé du rôle de la partie serbe dans

16 le conflit entre les Croates et les Musulmans, et je suis très étonné que

17 M. Vollebaek en parle ici.

18 Q. Page 7 638, M. Vollebaek dit la chose suivante : "Afin de permettre aux

19 Croates de se concentrer sur les Musulmans, il allait demander au

20 gouvernement de Knin de prendre part aux négociations qui allaient se

21 dérouler en Norvège et de ne pas poursuivre leurs activités militaires

22 pendant quelques temps."

23 C'est de cela que nous a parlé, M. Lazarevic, quand il est venu déposé ici,

24 et quand il a parlé de la réunion que Hadzic et Rakic ont eue avec

25 Milosevic. Est-ce que vous le niez toujours ?

26 L'INTERPRÈTE : L'interprète dit que c'est Milosevic qui allait demander au

27 gouvernement de Knin de participer, et cetera.

28 LE TÉMOIN : [interprétation] Madame, cette déclaration de Vollebaek est

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1 plus que naïve. Si ces négociations avaient eu une telle importance aux

2 yeux des Croates ils auraient signé cet accord. Mais ils l'ont refusé.

3 Pendant deux jours, vous avez une dizaine d'hommes de part et d'autre en

4 Norvège. Ecoutez, est-ce que cela leur aurait permis de remporter une

5 bataille contre les Musulmans par ce départ en Norvège ? Non, rien de tout,

6 cela n'a rien à voir -- ces négociations n'avaient rien à voir avec le

7 conflit entre les Croates et les Musulmans.

8 Q. Monsieur Jarcevic, admettez-vous que M. Milosevic ait pu dire ce genre

9 de chose à M. Vollebaek à l'époque ?

10 R. Je ne veux pas me lancer dans des spéculations, ne m'y invitez pas.

11 Pour ce qui est de M. Vollebaek, la seule chose que je puisse dire c'est

12 que c'est quelqu'un qui n'est pas digne de foi. Je vais vous citer un

13 exemple qui vous permettra de me faire confiance lorsque je m'exprime au

14 sujet du caractère de cet homme. Si vous voulez, je vais vous raconter cet

15 exemple.

16 Il m'a volé ma mallette ou mon sac à l'aéroport, et dix jours après notre

17 retour, un magazine en a parlé. J'ai menacé de porter plainte devant les

18 tribunaux et il est revenu de Zagreb, il m'a laissé mon sac, et il ne m'a

19 même pas rencontré à cette occasion-là.

20 Q. C'est toujours la même page que je souhaite citer, c'est quelque chose

21 que M. Vollebaek a dit à la Chambre à l'époque et il s'agit de quelque

22 chose qui est venu confirmer ce qu'avait dit

23 M. Lazarevic : "Nous avions l'impression que le gouvernement de Knin

24 recevait un très fort soutien de la part du gouvernement de Belgrade et de

25 la part du président Milosevic. Nous savions que les membres du

26 gouvernement de Knin se rendaient fréquemment à Belgrade, et nous pensions

27 que le président Milosevic a exercé une influence très forte sur le

28 gouvernement de Knin. Puisque les représentants du gouvernement sont partis

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1 en Norvège pour participer à ces négociations par la suite, j'étais

2 convaincu que Belgrade avait influencé le gouvernement de Knin."

3 Est-ce que vous niez qu'il y ait eu une influence ?

4 R. Il y a eu une influence pour qu'on œuvre pour la paix. Tout un chacun

5 nous a conseillé cela, paix, et non pas la guerre. Quant à ces entretiens,

6 encore une fois, je ne suis pas au courant de leur existence. Personne ne

7 m'en a parlé.

8 Q. Je --

9 M. KAY : [interprétation] Est-ce que je peux intervenir sur un point ? Il

10 serait utile pour la Défense si ce genre de question pourrait être replacée

11 dans le contexte de la période couverte par l'acte d'accusation, à savoir,

12 entre le mois d'août 1991 et le mois de juin 1992. Dans le contexte de la

13 déposition de M. Vollebaek et de M. Lazarevic, de toute évidence, il s'agit

14 des témoignages très importants, mais il faut opérer une distinction pour

15 ce qui est des différentes périodes et différents chefs d'accusation, et

16 c'est d'une importance majeure pour la Défense de savoir sur quel élément

17 on s'appuie dans le contre-interrogatoire.

18 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Madame Uertz-Retzlaff, de quelle

19 période parlez-vous ?

20 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Je parle de la période de 1993. C'est

21 clair. Je dois dire que cette observation m'étonne un petit peu puisque

22 nous avons ici les trois actes d'accusation qui couvrent toute la période;

23 bien entendu, nous n'allons pas faire revenir le témoin par trois fois. Il

24 est ici maintenant, et nous allons lui poser des questions qui concernent

25 les trois actes d'accusation. Ce que nous affirmons, c'est que M. Milosevic

26 a contrôlé étroitement les dirigeants de la République serbe de Krajina à

27 partir de 1990; il est très important de savoir que cela s'est poursuivi

28 pendant toute la période jusqu'en 1995.

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1 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Précisez simplement dans quel cadre

2 chronologique se situe votre question.

3 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Mais il a parlé des négociations de

4 Norvège de 1993. C'est pourquoi nous lui posons ces questions maintenant.

5 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je ne suis pas tout à fait sûr de voir

6 quel est le lien entre ces trois actes d'accusation, puisque -- lorsque

7 vous dites que les trois actes d'accusation sont

8 -- ils couvrent toute la période puisque l'acte d'accusation qui concerne

9 la Bosnie ne concerne pas directement ce témoin.

10 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Oui.

11 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] C'est la partie qui concerne

12 l'entreprise criminelle commune ?

13 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Oui, puisque ce sont les mêmes

14 participants à l'entreprise criminelle commune, mis à part quelques figures

15 supplémentaires, à savoir, le général Mladic, Karadzic et Krajisnik. C'est

16 toujours la même entreprise criminelle qui évolue.

17 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] C'est le temps pour la pause. Nous

18 allons ajourner.

19 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais, dans l'acte d'accusation qui

20 couvre la Bosnie, il ne mentionne pas M. Babic.

21 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Tout à fait, puisqu'en 1991, M. Babic

22 a été évincé parce qu'il ne suivait pas la ligne imposée à présent M.

23 Milosevic d'après les éléments que nous avons.

24 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Il n'est pas fait mention de

25 Bulatovic, non plus.

26 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Il faudrait que je vérifie cela.

27 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Il n'est pas fait référence à Seselj

28 aussi.

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1 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Monsieur le Juge, nous estimons qu'il

2 s'agit d'une seule et même entreprise criminelle commune qui évolue dans le

3 temps et il y a des personnes qui sont évincées ou qui la quittent pour

4 d'autres raisons.

5 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Très bien. Nous allons suspendre

6 l'audience pendant 20 minutes.

7 --- L'audience est suspendue à 12 heures 25.

8 --- L'audience est reprise à 12 heures 45.

9 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Veuillez poursuivre, Madame Uertz-

10 Retzlaff.

11 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

12 Q. Monsieur Jarcevic, avez-vous également participé à des négociations en

13 1995 avec l'ambassadeur Galbraith ?

14 R. Madame, à quel moment en 1995 ?

15 Q. Je parle des négociations qui ont trait au plan Z-4 et qui ont eu lieu

16 jusqu'en mai 1995.

17 R. Non. J'ai dit que je n'y avais pas participé. J'ai également expliqué

18 dans quelles circonstances et à quel moment ce plan a été présenté.

19 Q. Inutile que je pose cette série de questions. Vous avez été relevé de

20 vos fonctions en tant que ministre des Affaires étrangères de la RSK, à

21 quel moment exactement et pour quelles raisons ?

22 R. Je ne sais pas exactement à quelle date, mais c'était au cours du mois

23 d'avril 1994, lorsque le Dr Milan Babic avait remporté la majorité au

24 parlement. Il a été nommé ministre des Affaires étrangères et je lui ai

25 laissé la place à Knin.

26 Q. Je vous remercie. Monsieur Jarcevic, j'ai ici un document

27 --

28 R. Oui.

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1 Q. -- par lequel vous êtes nommé à un poste. Aux termes d'une décision du

2 2 mai 1994, M. Milan Martic vous nomme au poste de conseiller en matière de

3 politique étrangère.

4 R. Il m'a demandé d'assumer ces fonctions et il m'a expliqué qu'il

5 connaissait le Dr Babic et qu'il ne ferait rien au ministère des Affaires

6 étrangères. Donc, il m'a demandé de faire une partie du travail, de

7 m'occuper des questions, des relations avec les pays étrangers dans le

8 cadre de son propre cabinet. Comme vous le voyez, j'ai accepté.

9 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Est-ce que ce document peut être

10 versé au dossier ?

11 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui.

12 M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agira de la pièce 965.

13 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation]

14 Q. Monsieur Jarcevic, quand vous êtes entré en fonction à ce poste, est-ce

15 que vous êtes allé à Knin, ou est-ce que vous avez continué à résider à

16 Belgrade dans le bureau de la RSK à Belgrade ?

17 R. Je suis resté à Belgrade, mais j'ai changé de bureau parce que le

18 président Martic avait son propre -- ses propres bureaux, à environ six

19 kilomètres du bâtiment du ministère des Affaires étrangères. Tout ceci

20 c'était à Belgrade. C'est à peu près la distance qui séparait ces deux

21 lieux.

22 Q. Nous avons par le passé mentionné le fait qu'il y a eu des négociations

23 avec les Croates, à partir de 1992, ces négociations portaient également

24 sur des accords économiques et ces négociations ont permis d'enregistrer

25 des améliorations de la situation, n'est-ce pas ?

26 R. Dans une très faible mesure, Madame, parce que les Croates ne voulaient

27 pas emprunter le pont de Maslenica, comme nous leur avions proposé avant

28 mon arrivée. Je parle du gouvernement de la Republika Srpska Krajina de

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1 1992. Il est intéressant de noter que le 22 janvier 1993, ces négociations

2 devaient se poursuivre et deux commissions devaient se rencontrer. Je ne

3 sais pas exactement dans quel village, Ravni Kotori, et comme d'habitude ce

4 jour-là la Croatie a commis une agression.

5 Q. Monsieur Jarcevic, suite à ces négociations, on a ouvert, au cours de

6 l'été 1994, l'autoroute -- ou la route principale Belgrade-Zagreb, n'est-ce

7 pas ?

8 R. Oui. C'est un des résultats enregistrés qui semblait indiquer qu'on

9 pouvait espérer trouver un accord dans d'autres domaines, aussi. La Krajina

10 était tout à fait en faveur de cette décision. Le premier ministre, à

11 l'époque, M. Nikolic, et Rade Tanga, ministre de la Défense, aussi, étaient

12 d'accord. Il a été le premier à emprunter cette autoroute pour aller à

13 Vukovar en passant par le territoire croate à partir de la Slavonie

14 occidentale.

15 Q. En 1995, M. Milan Martic a fermé cette route à trois reprises, n'est-ce

16 pas ?

17 R. Madame, je ne connais pas tous les détails. S'agissant de ces

18 fermetures temporaires, on ne peut pas parler de fermetures de la route. On

19 ne peut pas dire que la République de la Krajina serbe soit revenue sur

20 l'accord qu'il avait conclu. Mais il s'agissait de fermetures temporaires

21 qui ne dépassaient pas 24 à 48 heures. Il y a eu une sorte de malentendu,

22 mais je ne peux pas vous en dire plus.

23 Q. Pourquoi ? Vous ne connaissez les tenants et les aboutissants ?

24 R. Non, je ne connais pas les détails, veuillez me croire.

25 Q. Reconnaissez-vous que l'attaque menée contre les Croates en mai 1995 en

26 Slavonie occidentale a été déclenchée par les actions de Milan Martic et en

27 rapport avec cette autoroute ?

28 R. Non, je ne peux accepter cela. En mars, il y a eu un document au sujet

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1 de l'attaque croate qui devait avoir lieu le 1er mai. C'est le QG de l'OTAN

2 à Bruxelles qui nous l'a transmis de manière confidentielle. Nous ignorons

3 même qui est à l'origine de cet envoi. Cela, c'était bien longtemps avant

4 la fermeture de l'autoroute.

5 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] J'aimerais que le témoin écoute

6 maintenant une conversation interceptée. Je signale à la cabine technique

7 que ceci est diffusé avec le logiciel Sanction.

8 L'INTERPRÈTE : L'interprète demande une référence.

9 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Il s'agit de la cassette numéro 15,

10 face A, conversation entre Milosevic et Goran Hadzic.

11 [Diffusion de la cassette audio]

12 L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

13 "Je vais te dire quelque chose. J'ai eu des contacts téléphoniques

14 aussi bien avec les Russes que les Américains, et avec Akashi. Ils ont

15 interrompu toutes les activités de combat. Celeketic a même confirmé à

16 Perisic que toutes les activités de combat avaient été interrompues et que

17 les Croates ne se battent plus. Mais ils ont commis des crimes atroces, là-

18 bas. Ils ont bombardé Zagreb. Ils ont bombardé Sisak, Karlovac. Ils ont

19 touché l'hôpital des enfants de Zagreb, il y a 15 enfants qui ont été

20 massacrés, et de manière générale, tout ce qui est en train de se produire,

21 c'est le résultat de comportements entêtés de Martic. Il a fermé

22 l'autoroute de son propre chef à trois reprises sans avoir le consentement

23 du gouvernement croate, et même quand nous avons tout organisé pour que

24 l'autoroute soit rouverte, il a dit non, donc l'autre a décidé de le

25 chasser.

26 Goran : Il est fou. Il ne s'entend avec personne. --

27 Interlocuteur suivant : "Je crois qu'il faut le remplacer, parce qu'avec

28 son comportement entêté, il a causé beaucoup trop de victimes.

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1 Interlocuteur suivant : Je ne sais pas comment cela peut marcher. Je ne

2 sais pas. Est-ce que vous êtes au travail demain ?

3 Réponse : Je ne vais pas travailler.

4 Premier interlocuteur : Bon, est-ce que vous avez prévu quelque chose ?

5 Réponse : Oui, j'aurai certainement quelque chose, mais appelle quand même.

6 Premier interlocuteur : J'appellerai vers 10 heures ou 10 heures 30.

7 Réponse : Oui, appelle, je veux avoir des nouvelles.

8 Premier interlocuteur : Au revoir."

9 [Fin de la diffusion de cassette audio]

10 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation]

11 Q. Monsieur Jarcevic, nous avons ici une conversation entre Milosevic et

12 Goran Hadzic. Ils parlent du bombardement de Zagreb, il dit que Martic a

13 fermé l'autoroute à trois reprises et que c'est ce qui a provoqué ou

14 déclenché les interventions des Croates. Est-ce que vous pouvez faire des

15 observations sur ce point ?

16 R. Oui. Les Croates nous auraient attaqué même si l'autoroute n'avait pas

17 été fermée. Comme je vous l'ai dit, on avait reçu de la part de l'OTAN à

18 Bruxelles un document indiquant que les Croates allaient attaquer le 1er

19 mai. Je ne sais même pas qui nous a envoyé ce rapport. On savait très bien

20 que les dirigeants serbes n'arrivaient pas à se mettre d'accord. Quelles

21 que soient les conversations que vous aurez interceptées, vous entendrez le

22 même genre de choses, même si vous enregistré les conversations d'autres

23 personnes. Pour ce qui est de cette conversation-là, celle dont vous voulez

24 que je vous parle, elle nous montre simplement que les Serbes n'avaient pas

25 de plan unifié, de plan commun, en rapport avec la République de la Krajina

26 serbe. Or, l'Accusation affirme que c'est le cas et que ce plan avait pour

27 objectif de créer une Grande-Serbie. Cette conversation interceptée nous

28 prouve le contraire.

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1 Q. Monsieur Jarcevic, M. Milosevic dit ici : "Nous avons tout organisé

2 pour rouvrir l'autoroute." Quand il dit "nous," cela implique qu'il a

3 participé à cette opération. Est-ce que vous savez qu'il le faisait, qu'il

4 participait aux négociations, qu'il faisait tous ces préparatifs ?

5 R. Je ne peux pas interpréter ce que disait M. Milosevic. M. Milosevic est

6 ici. Mais j'imagine que quand il a tenu ces propos, il pensait à la nation

7 serbe dans son ensemble, et nous tous, nous occupions un poste ou un autre

8 à la tête de cette nation, et j'imagine -- enfin, si vous me permettez de

9 vous faire part de ma pensée, j'imagine qu'il n'était pas au courant de

10 tous les détails, de tout ce qui entourait le conflit de l'autoroute, en

11 particulier s'il a été informé par M. Hadzic, parce que M. Hadzic avait les

12 plus grandes difficultés à s'entendre avec Milan Martic, le chef d'Etat de

13 l'époque.

14 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Madame Uertz-Retzlaff, on parle de

15 bombardements de Zagreb; qui en serait apparemment responsable ?

16 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Milan Martic, Monsieur le Juge.

17 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.

18 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Il parle du comportement entêté de

19 Milan Martic, et le témoin va probablement confirmer que M. Martic a

20 ordonné le bombardement de Zagreb, Sisak et Karlovac.

21 Q. Pouvez-vous le confirmer ?

22 R. Madame, c'est péché que de mentionner ces quelques roquettes, alors que

23 des milliers de roquettes ont été tirées sur les villes serbes. J'ai ici

24 les documents, je crois, qui montrent que si la Croatie attaquait la

25 République de la Krajina serbe, toutes les armes militaires devaient être

26 utilisées contre les installations militaires en Croatie. A Bosanska

27 Gradiska, par exemple, le 1er mai, les Croates ont bombardé la ville ainsi

28 que la campagne avoisinante et ils ont tué un grand nombre de réfugiés qui

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1 avaient fui la Croatie.

2 Q. Monsieur Jarcevic, nous n'avons pas le temps d'aborder les questions

3 que vous venez d'évoquer.

4 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] J'imagine, Monsieur Jarcevic, je

5 suppose que vous venez de confirmer que Milan Martic a ordonné le

6 bombardement de Zagreb, Sisak et Karlovac, n'est-ce pas ?

7 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président de la Chambre, je vous

8 garantis que c'était la stratégie de l'état-major général. Que faire

9 d'autre face à un ennemi que de riposter en utilisant les mêmes moyens ? Je

10 ne dis pas que quiconque, y compris Martic, ait donné l'ordre de tirer sur

11 des cibles civiles. Mais est-ce qu'on était censé riposter en leur lançant

12 des carreaux de chocolat à la tête ?

13 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] A ce sujet, j'aimerais que nous

14 écoutions une autre conversation interceptée du 3 mai 1995. On va encore

15 une fois l'écouter grâce au logiciel Sanction. C'est la conversation numéro

16 68, entre Perisic et Milosevic, donc une conversation assez longue.

17 [Diffusion de la cassette audio]

18 L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

19 "Je viens de recevoir confirmation du fait que Clinton ait parlé à Tudjman

20 au téléphone. Il a dit qu'il le ferait payer s'il continuait à attiser

21 l'animosité. Ceci a donc été confirmé. Il a reçu une menace, mais Tihomir

22 Dinic vient de me dire que Stankov -- notre Stankov est avec lui au comité

23 exécutif et qu'il a parlé à Martic. Martic lui a dit qu'on avait encore une

24 fois agi contre les Serbes au mont Psunj, et c'est la raison pour laquelle

25 Akashi s'y est rendu. Il n'a pas d'autre possibilité que de pilonner une

26 fois encore Zagreb. Il a appelé l'autre pour attirer son attention sur ce

27 point, et jamais -- Celeketic a attiré l'attention sur ce point. Tu as

28 entendu Tudjman, hier. Il a dit que si Zagreb était pilonné, il

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1 n'autoriserait aucune retraite. Il y a 6 000 personnes qui encerclent la

2 ville, et il est en train d'exiger que l'on bombarde Zagreb, que l'on tue

3 des civils et que l'on entraîne une riposte. Cela, c'est la première chose.

4 Deuxièmement --"

5 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Oui, et ceci continue --

6 [Diffusion de la cassette audio]

7 L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

8 "-- il faut appeler Celeketic et lui interdire de parler de tout cela.

9 Akashi s'y est rendu. Tout sera résolu et il ne doit absolument pas faire

10 d'ânerie. A cause du pilonnage de Zagreb, Martic n'était pas à Zagreb

11 avant-hier. Il était à Zagreb hier, seulement. Donc, il est hors de

12 question que cela se passe comme cela, il ne doit pas le faire. En deuxième

13 lieu, Martic a déclaré à Pankov qu'hier, il avait parlé à Karadzic, avec

14 Banja Luka, et qu'ils s'étaient organisés pour que ces gens de la Republika

15 Srpska attaquent quelque part, prennent quelque chose. Enfin, il veut dire

16 qu'il faut qu'ils attaquent les Croates. Mais cela, ce serait vraiment une

17 mauvaise chose, parce que je viens déjà de recevoir un rapport des Grecs.

18 Je vais te le lire. Un instant."

19 [Fin de la diffusion de cassette audio]

20 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation]

21 Q. Monsieur Jarcevic, conversation du 3 mai entre Peresic et Milosevic, et

22 Milosevic demande au général Perisic de demander à Celeketic de ne pas

23 pilonner Zagreb. Ma question sur ce point est la suivante : est-ce qu'à ce

24 moment-là, le pilonnage de Zagreb s'est interrompu ?

25 R. Je ne sais pas ce que vous voulez que je vous dise. Cette conversation

26 nous montre à quel point tout le monde travaillait pour la paix, et pas

27 pour la guerre. C'est la Croatie qui faisait la guerre.

28 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] La question qui vous a été posée est

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1 la suivante : est-ce que vous savez si le pilonnage de Zagreb s'est ensuite

2 interrompu ?

3 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne sais pas à quel moment il s'est arrêté.

4 Je ne sais pas si c'est après ou avant cette conversation, mais en tout

5 cas, le pilonnage s'est interrompu.

6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Madame Uertz-Retzlaff.

7 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation]

8 Q. Aviez-vous connaissance, Monsieur, des relations étroites qui

9 existaient entre le commandant de la RSK et les chefs de la VJ ? Est-ce que

10 vous aviez connaissance de cela ? Est-ce que vous savez que les uns

11 pouvaient donner des ordres aux autres ?

12 R. Non, je ne crois pas qu'ils étaient en mesure de donner des ordres. Ils

13 pouvaient se consulter, prendre en compte leurs opinions mutuelles, pour

14 deux raisons : d'abord, ce sont des gens qui avaient étudié ensemble, qui

15 se connaissaient bien, et ensuite, c'étaient les membres d'une même nation.

16 Q. Monsieur Jarcevic, j'aimerais vous présenter maintenant --

17 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Mais auparavant, j'ai oublié de

18 demander une cote pour ces deux documents. J'aimerais qu'on les verse au

19 dossier.

20 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui.

21 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ces pièces n'avaient pas encore été

22 versées au dossier ?

23 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Non.

24 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Ces pièces sont versées au dossier.

25 M. LE GREFFIER : [interprétation] Première conversation interceptée entre

26 Milosevic et Goran Hadzic, pièce 966. Deuxième conversation entre Perisic

27 et Milosevic, pièce 967.

28 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation]

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1 Q. Monsieur Jarcevic --

2 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Un instant, Madame Uertz-Retzlaff.

3 [La Chambre de première instance se concerte]

4 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Madame Uertz-Retzlaff.

5 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Bien.

6 Q. Monsieur Jarcevic, avez-vous connaissance des détails de la coopération

7 entre la SVK et la VJ ? Est-ce que c'est un sujet qui vous est familier ?

8 R. Non. Je n'y connais pas grand-chose, mais je peux malgré tout vous

9 faire part de mes conclusions. Dans toutes les branches du gouvernement,

10 nous avions des relations avec la République fédérale de Yougoslavie.

11 Q. Non, non. Un instant. Ce ne sont pas vos conclusions qui m'intéressent.

12 Je m'apprêtais à vous présenter un certain nombre de documents, mais je

13 voulais savoir si dans le cadre de votre fonction à Belgrade, en tant que

14 ministre des Affaires étrangères ou conseiller en matière d'affaires

15 étrangères, vous aviez connaissance de ces demandes émanant des organes de

16 la RSK à l'intention de la VJ ou des ministères de Belgrade. Est-ce que

17 cela passait sur votre bureau ?

18 R. Montrez-moi les documents. Je vous répondrai tout à fait franchement.

19 Q. Je voulais éviter de vous présenter des documents dont vous n'auriez

20 jamais eu connaissance.

21 R. Si vous savez pertinemment que je n'ai jamais vu ces documents, à ce

22 moment-là, ne me les montrez pas.

23 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Il s'agit là d'une pièce qui n'a pas

24 encore été versée au dossier.

25 Q. C'est une demande qui vient du président de la RSK et qui est en date

26 du 21 juillet 1994. C'est une demande qui est adressée au président de la

27 Yougoslavie, au président de la République de Serbie ainsi qu'aux chefs

28 d'état-major de l'armée yougoslave. C'est une demande qui a trait au

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1 recrutement et à des équipements destinés à la SVK, armée de la Krajina

2 serbe.

3 C'est une demande qui émane de M. Milan Martic. Vous étiez son conseiller,

4 à l'époque. Avez-vous connaissance de cette demande qu'il a adressée à ces

5 trois institutions ?

6 R. Permettez-moi d'apporter une correction.

7 Q. Oui. Merci.

8 R. J'étais conseiller en matière d'affaires étrangères. Donc, je n'ai

9 jamais vu de document de ce type. Je peux même vous dire par matière de

10 boutade que je m'informais auprès du personnel militaire des préparatifs de

11 la Krajina en matière de défense, mais on me répondait toujours la même

12 chose : C'est plus le communisme maintenant. Chacun s'occupe de ses

13 affaires, donc, toi, tu t'occupes de la diplomatie, voilà ce qu'on me

14 disait.

15 Q. Il est dit ici : "Que le développement et le renforcement planifié de

16 la SVK est en relation directe avec la fourniture d'équipement technique et

17 de matériel technique par la VJ, conformément à ce qui avait été conclu;"

18 pouvez-vous nous dire ce qui avait été convenu avec qui et quand ?

19 R. Je ne sais pas qui avait convenu de cela, mais il y avait coopération

20 dans tous les domaines, qu'on le veuille ou non la République de la Krajina

21 serbe était à l'époque un véritable Etat.

22 Q. Reportons-nous maintenant à la page 10 en anglais, il est fait

23 référence ici à une demande de roquettes à fragmentation pour un système de

24 lancement multiple de roquette auto propulsée. Est-ce que vous savez si la

25 RSK a reçu ces équipements, ces lance-roquettes multiples de la part de la

26 VJ ?

27 R. Madame, vraiment je n'en sais rien, mais les officiers m'ont toujours

28 assuré du fait que la Krajina était suffisamment armée, était bien armée.

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1 C'était tout ce que je savais. C'était très général.

2 Q. Savez-vous que ces roquettes à fragmentation on les a employées lors du

3 pilonnage de Zagreb ? Est-ce que vous le savez ?

4 R. Madame, franchement je ne sais rien de ces roquettes, et à ce jour

5 encore je dois vous dire que je ne sais même pas ce que sait qu'une bombe à

6 fragmentation.

7 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je ne sais pas si ce type de

8 question nous fait vraiment avancer, Madame Uertz-Retzlaff.

9 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] C'est exact. Je ne demande pas le

10 versement au dossier de ce document d'ailleurs.

11 Q. Passons maintenant au bureau de la RSK à Belgrade et au

12 ministère des Affaires étrangères en premier lieu. Qui était le

13 propriétaire des locaux dans lesquels vous étiez installés ?

14 R. Les propriétaires c'était la ville de Belgrade, je le crois mais je

15 n'en suis pas sûr.

16 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] J'aimerais vous présenter la pièce

17 352, intercalaire 152.

18 Q. Monsieur Jarcevic, c'est un ordre qui provient du chef du Grand état-

19 major de la VJ, du général Zivoto Panic. Il s'agit là d'un point militaire,

20 mais, si je vous pose la question c'est parce que le bureau de la

21 République serbe de Krajina basé à Belgrade est mentionné ici au point 4,

22 de la première page de ce document.

23 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Est-ce que vous pouvez placer, s'il

24 vous plaît, cela sur le rétroprojecteur ?

25 Q. C'est un ordre demandant d'accepter, de former des conscrits dans

26 l'armée de la République serbe de Krajina et il est dit au sujet du bureau

27 de la RSK : "Que l'affectation des conscrits sera prise en charge par le

28 bureau du gouvernement de la RSK à Belgrade et qu'il convient d'établir une

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1 coopération avec eux."

2 Alors, est-ce que lorsqu'ils disent avec "eux," c'est avec vous ?

3 R. Oui. Maintenant, il s'agit de moi, et il s'agit bien du 27 janvier, je

4 précise. C'est cinq jours après l'agression lancée par la Croatie contre la

5 République serbe de Krajina. C'est la raison par laquelle j'ai cédé un

6 bureau du ministère des Affaires étrangères pour que le colonel Rade Tanga,

7 qui allait devenir le ministre de la défense ultérieurement et directeur de

8 l'université, bien qu'il dresse la liste des volontaires qui se

9 présentaient de toute part, même de l'étranger. Nous nous sommes adressés

10 au gouvernement fédéral pour qu'il nous aide pour mobiliser les citoyens de

11 la République serbe de Krajina qui souhaitaient se porter volontaires pour

12 se rendre aux frontières de leur patrie.

13 Q. Très précisément, qui ont été les signataires ou les auteurs de cet

14 accord, vous et qui d'autres ?

15 R. J'ai envoyé une demande au gouvernement de la République fédérale de

16 Yougoslavie et je ne me souviens plus de la réponse. On a téléphoné pour

17 nous dire qu'on pouvait envoyer nos recrues. Les inscriptions, les

18 enregistrements se faisaient dans ce bureau, mais on a jamais forcé

19 personne à le faire et aucun organe fédéral yougoslave n'est allé ramasser

20 les gens, rassembler les gens pour nous les emmener indépendamment de ce

21 qui figure dans le texte de ma demande.

22 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Nous avons ici un autre document qui

23 lui aussi concerne ce point. Il s'agit de la pièce 327, intercalaire 9.

24 Q. Monsieur Jarcevic, il s'agit d'une réunion dont l'hôte est le président

25 de la République de Serbie. Cela se passe le 12 novembre 1992. Je vois que

26 vous n'avez pas participé à cette réunion. Mais j'aimerais savoir si vous

27 avez su qu'elle a eu lieu, en votre qualité de ministre des Affaires

28 étrangères à l'époque, vous auriez peut-être appris qu'il y a eu une

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1 réunion qui portait sur le financement de la police et l'armée de la RSK ?

2 R. Je n'étais pas au courant de cette réunion. Mais encore une fois, les

3 deux états entretenaient des relations dans tous domaines. Il ne faudrait

4 pas que vous ayez l'impression qu'il s'agit là du financement fourni par la

5 Yougoslavie à l'armée de la République serbe de Krajina. Les finances

6 étaient traitées exactement comme dans le cadre des relations entre

7 n'importe quels états.

8 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Je voudrais maintenant que l'on

9 examine l'intercalaire 14 de la pièce 327. C'est une lettre qui vient de

10 Milan Martic et qui est adressée à M. Milosevic,

11 M. Sainovic et Zoran Sokolovic, et encore une fois, il s'agit de

12 financement ou de fonds adressé réservée au MUP de la RSK. C'est un texte

13 du 28 avril 1993.

14 Q. Est-ce que vous saviez qu'il y a eu cette demande et que l'argent a

15 effectivement été fourni, donc c'est pour les salaires des policiers ?

16 R. C'est la première fois que je vois ce mémo. Mais dans ce genre de

17 documents on ne trouve pas tous les éléments qui concernent les relations

18 commerciales entre deux états. La Serbie devait des sommes considérables à

19 la Krajina, et ces sommes-là, et ces informations-là ne figurent pas dans

20 ce genre de documents.

21 Q. Vous saviez que la police de la RSK était financée par la Serbie ?

22 R. Madame, ceci n'est absolument pas exact. Cela a été financé grâce au

23 budget de la République serbe de Krajina.

24 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Nous avons ici une lettre qui

25 s'adresse, entre autres, M. Milosevic à des fonctionnaires de la République

26 de Serbie et on demande le versement des salaires ou l'aide dans le

27 versement des salaires.

28 Q. Je suppose que c'est le genre de chose qui se faisait ?

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1 R. Madame, la seule chose que je tiens à dire c'est que la République de

2 Serbie ou la République fédérale de Yougoslavie dans d'autres domaines

3 devaient de l'argent à la République serbe de Krajina qui peut-être a été

4 utilisé pour verser ces salaires. Si vous voulez je peux vous parler de la

5 situation économique et de la nature des échanges entre ces deux états, et

6 vous comprendrez que je suis en train de dire la vérité.

7 Q. Nous n'avons pas beaucoup de temps, Monsieur Jarcevic, donc, vraiment,

8 je ne voudrais pas que l'on rentre dans ce genre de détail. Je voudrais

9 vous soumettre une autre lettre. C'est quelque chose que vous avez rédigé

10 vous-même.

11 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Vous connaîtrez peut-être mieux cette

12 lettre-là donc qui n'a pas encore été versée au dossier. Je vous prie de la

13 placer sur le rétroprojecteur.

14 LE TÉMOIN : [interprétation] Cette lettre ne vient de moi, Madame.

15 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation]

16 Q. Il est dit ici : "Jarcevic, conseiller du président --"

17 R. J'ai reçu ici un mémo qui s'adresse à M. Milosevic.

18 Q. Oui, je vois. Ecoutez, on ne vous a pas donné la bonne lettre. J'ai

19 sauté plusieurs lettres et je n'ai pas donné de bonnes indications à Mme

20 Dicklich.

21 Est-ce une demande ou, dans tous les cas, une lettre que vous avez adressée

22 à M. Jovica Stanisic le 24 juillet 1994 ? Il est dit

23 ici : "Président Martic m'a donné des instructions afin d'organiser

24 l'arrivée de la Commission de l'Union des armées cosaques de Russie et de

25 l'étranger, avec vous."

26 Vous écrivez ici à M. Stanisic. Pouvez-vous nous dire pourquoi et de quelle

27 nature était l'accord entre M. Martic et M. Stanisic ?

28 R. Madame, à qui voulez-vous que je m'adresse si ce n'est aux organes de

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1 l'Etat sur le territoire duquel agit le ministère des Affaires étrangères

2 ainsi que le bureau de la République serbe de Krajina ? Comment voulez-vous

3 que nous on organise l'arrivée des étrangers à l'aéroport de la République

4 fédérale de Yougoslavie ? Nous n'avons aucune compétence pour donner des

5 ordres aux fonctionnaires qui travaillent à cet aéroport ni à ceux qui sont

6 en charge de la sécurité. Nous nous sommes adressés au représentant de la

7 République de Serbie du ministère de l'Intérieur pour nous aider et pour

8 que cette délégation cosaque de Russie puisse se rendre à Belgrade, qu'on

9 puisse les accueillir, et les accompagner en Krajina. Si nous avions été à

10 Paris, cette lettre aurait été adressée au ministère français des Affaires

11 étrangères.

12 Q. Il est dit ici : "Que des entretiens doivent avoir lieu avec eux et

13 qu'il faut signer un contrat sur la coopération entre la RSK et la

14 République serbe avec cette organisation." C'est une action conjointe de la

15 RSK et la RS, qui bénéficie de l'aide, du soutien du MUP serbe.

16 R. Ils n'ont pas fourni de soutien. Vous voyez que ma lettre l'étonne,

17 mais ils ne sont pas immiscés dans nos affaires étrangères. Ils ne nous ont

18 répondu, ni par l'affirmative, ni par la négative.

19 Je m'y suis rendu personnellement à Moscou pour rendre visite à

20 l'organisation cosaque et j'étais accompagné par personne représentant la

21 République fédérale de Yougoslavie.

22 Q. Nous parlons du MUP de la Serbie maintenant et non pas de la

23 Yougoslavie. Stanisic normalement aiderait M. Martic dans tous les

24 domaines, n'est-ce pas ?

25 R. Je vous dis que le MUP de Serbie est compétent à l'aéroport de

26 Belgrade. Il faut que je respecte cela. Comment voulez-vous que je me rende

27 à l'aéroport d'Orly en France et que je ne pose la question à personne et

28 que j'invite là-bas des invités qui peut-être n'auront pas de visa, mais

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1 c'est une démarche diplomatique très simple ici. Je ne vois pas ce qui pose

2 problème.

3 Q. Monsieur Jarcevic --

4 R. [aucune interprétation]

5 Q. -- pendant combien de temps a existé le bureau de la RSK à Belgrade ?

6 R. Le bureau du président Martic a existé jusqu'au 26 février 1996.

7 Actuellement, le gouvernement de la République serbe de Krajina dispose

8 d'un bureau et le gouvernement en exile ainsi que le parlement en exile

9 agisse, fonctionne, je vous ai montré hier le soutien de 28 parlementaires

10 du Conseil de l'Europe qui ont signé une demande afin que la Croatie

11 rétablisse l'égalité entre ces nations, donc elle revienne un Etat

12 binationale. Donc, c'est un succès remporté par le gouvernement en exile de

13 la RSK. Je dois dire que, d'autre part, le monde commence à montrer qu'il

14 comprend les souffrances qui jusqu'à présent n'ont pas été prises en

15 compte.

16 Q. Ma dernière question, Monsieur Jarcevic : est-ce que vous êtes membre

17 de ce gouvernement de la RSK en exile ?

18 R. Oui, je suis conseiller auprès du gouvernement de la RSK, je n'en suis

19 plus ministre.

20 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Monsieur le Président, je n'ai pas

21 d'autre question à poser.

22 Oui. Ce dernier document, la lettre de M. Jarcevic, je demande son

23 versement au dossier.

24 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, la lettre sera versée au

25 dossier.

26 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce 968.

27 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, vous avez des

28 questions supplémentaires ?

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1 L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, Monsieur Robinson.

2 Nouvel interrogatoire par M. Milosevic :

3 Q. [interprétation] Suivons le bon ordre. Au début, Monsieur Jarcevic, Mme

4 Uertz-Retzlaff vous a posé une question concernant les activités que vous

5 aviez eues, activités liées aux souffrances subies par la population dans

6 la partie occidentale de ce qui a été à une certaine époque la Yougoslavie,

7 et vous avez expliqué que vous étiez membre de l'association des Serbes de

8 Bosnie.

9 R. De Bosnie-Herzégovine.

10 Q. Qu'est-ce que vous avez dit ?

11 R. Oui, de Bosnie-Herzégovine.

12 Q. De Bosnie-Herzégovine. C'est bien ce que vous avez dit ?

13 R. Oui.

14 Q. Depuis le début de votre déposition, depuis la présentation que vous

15 avez faite vous avez dit que vous avez été un des rares bébés à survivre au

16 massacre par les Oustachi, et que la Bosnie-Herzégovine faisait partie de

17 l'Etat indépendant de Croatie.

18 R. Oui, et les Serbes musulmans étaient proclamés le fleuron de la nation

19 croate -- exactement de la nation musulmane.

20 Q. Est-ce qu'il y a une différence en Bosnie-Herzégovine ?

21 R. Non, pas du tout. C'est le même traitement. Récemment, j'ai vu un ordre

22 de l'Etat de Croatie qui disait qu'il fallait tuer ceux qui avaient entre

23 30 et 50 ans et puis les enfants allant jusqu'à l'âge de dix ans. J'étais

24 dans la dernière catégorie, et c'est par pure chance que j'ai survécu.

25 Certains de mes amis disent que c'est dommage d'ailleurs.

26 Q. A l'époque, en 1991, 92, en 93, vous êtes devenu ministre, est-ce que

27 vous avez fait une différence entre les souffrances des Serbes en Bosnie,

28 et en Croatie ?

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1 R. Non. C'était la même chose que ce qu'on faisait comprendre en 1941.

2 Q. Merci.

3 R. Pas de quoi.

4 Q. Le Procureur vous a montré certaines résolutions du Conseil de sécurité

5 et on parlait de la persécution des Croates en Serbie. Vous avez dit à

6 juste titre d'ailleurs que ce genre de chose n'avait pas eu lieu parce

7 qu'il y a eu un incident à Hrtkovci qu'on ne cesse de rappeler ici, me

8 semble-t-il. A cet égard, on vous a posé une question à propos d'un

9 document qu'on vous a montré au début.

10 Que ce document qui porte la date du 17 novembre 1992 est très long, je me

11 contenterai d'en reprendre certains extraits. Document du 17 novembre, est-

12 ce que vous avez sous les yeux ? "Situation en matière des droits de

13 l'homme, rapport de l'envoyé spécial."

14 Vous l'avez ?

15 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] C'est la pièce 771, Monsieur le

16 Président.

17 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci, Madame Uertz-Retzlaff.

18 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne sais pas de quoi vous parlez. Est-ce que

19 vous parlez du rapport des Nations Unies sur la question des droits de

20 l'homme ?

21 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation]

22 Q. Oui. Je vous l'ai dit. Tout au début. C'est le document le plus

23 volumineux qu'on vous a fourni et que vous avez reçu au départ.

24 R. Oui. Qu'est-ce que vous posez comme question6

25 Q. Regardez le paragraphe 94, qui n'a pas été cité. Vous avez fourni une

26 explication. Vous avez dit qu'il portait sur des incidents provoqués par

27 l'arrivée des réfugiés de Croatie. Vous parlez réfugiés de Croatie. C'est

28 ce que vous avez dit ?

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1 R. Oui.

2 Q. Prenez ce paragraphe 94, s'il vous plaît. Est-ce que vous l'avez sous

3 les yeux ?

4 R. Non, je ne l'ai pas trouvé.

5 Q. Les paragraphes sont numérotés. Il ne doit pas être trop difficile de

6 retrouver celui-là. Vous l'avez trouvé maintenant ?

7 R. Oui, cela y est. La Serbie et le Monténégro ont reçu ou accueilli 500

8 000 réfugiés.

9 Q. On dit : "La Serbie-et-Monténégro a accueilli quelques

10 500 000 réfugiés venant de Croatie et de Bosnie-Herzégovine."

11 Puis, il y a une autre phrase qui dit ceci : "Conformément à la charte,

12 ceci a une incidence sur la vie quotidienne de tout un chacun."

13 Les Nations Unies présentent ici un rapport. Est-ce qu'elles mentionnent

14 déjà à ce moment-là le chiffre de 500 000 réfugiés ? Chiffre qu'on retrouve

15 dans le rapport de novembre.

16 R. Permettez-moi d'ajouter ceci à ce moment-là, les Nations Unies imposent

17 les sanctions les plus terribles sur la Yougoslavie et la RSK. Si je peux

18 vous livrer mon avis personnel, je dirais que c'est en fait là la zone

19 d'ombre, le revers pour ainsi dire de notre civilisation.

20 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous avez répondu à la question ?

21 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Le président m'a demandé quelle était la

22 situation vu la présence de ces 500 000 réfugiés.

23 M. MILOSEVIC : [interprétation]

24 Q. Prenez le paragraphe 123, il parle de la chose suivante ou plutôt cela

25 concerne plus les questions que vous a posées, Mme Uertz-Retzlaff. Vous

26 avez dit que c'étaient les réfugiés qui avaient provoqué certains

27 incidents. Est-ce que c'était quelque chose de notoriété publique ? C'est

28 la question que je vous pose. Est-ce que les organisations internationales

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1 et les Nations Unies le savaient à l'époque ? Voici ce qu'il dit :

2 "L'éruption d'hostilités dans les régions voisines de la Croatie et

3 l'afflux de réfugiés serbes ont coïncidé avec une augmentation des

4 incidents de harcèlement et de violence à l'encontre de personnes non-

5 serbes résidant en Vojvodine."

6 Puis, je saute quelques lignes; maintenant, c'est notre gouvernement qui

7 est cité, je cite : "Dans un rapport spécial présenté récemment au comité

8 chargé des questions des Droits de l'homme, le gouvernement fédéral - c'est

9 notre gouvernement - dit ceci : "Certaines de ces personnes qui essayaient

10 d'échapper aux conflits pour sauver leur peau, dans cet espoir-là pour

11 sauver aussi leurs familles sont arrivés en RFY, et ils ont amené ce

12 faisant leurs armes. Ils ont essayé de fonder un nouveau foyer, même si

13 c'était au prix de la force pour y parvenir au détriment de personnes qui

14 n'appartenaient pas à la population ou à la nation serbe, (qu'ils

15 considèrent comme des ennemis tout simplement parce qu'ils n'appartenaient

16 pas à la nation serbe)."

17 Ici on cite un rapport de notre gouvernement puis nous avons ici Hrtkovci

18 qui est mentionné.

19 Quatre lignes plus loin, on dit ceci, je cite : "Le gouvernement indique

20 que le ministère serbe de l'Intérieur a diligenté et commencé une enquête

21 pour déterminer s'il y a eu complicité des autorités locales à la

22 commission ou de ces événements de grande quantité d'armes et d'explosifs

23 ont été saisis et plusieurs individus ont été accusés d'infractions pénales

24 dont l'homicide."

25 Est-ce que vous savez que c'est la seule fois où il y a eu des tués ?

26 R. Je ne sais pas combien de fois des gens ont été tués. En tout cas, ce

27 rapport je ne l'avais jamais vu auparavant et je suis heureux d'y voir une

28 confirmation.

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1 Q. Les auteurs de ces meurtres à Hrtkovci, savez-vous que ces personnes

2 ont été arrêtées et traduites en justice et c'était la seule fois qu'il y

3 avait eu des tués, n'est-ce pas ?

4 R. Ce n'est pas de ma faute si je n'en ai pas entendu parler.

5 Q. Fort bien. Passons à autre chose. Dans des réponses que vous avez

6 données aux questions de Mme Uertz-Retzlaff, vous avez cité un document qui

7 nous montre qu'en République de Krajina serbe. Il y a aussi eu des cas de

8 persécution d'individus ou poursuites engagées contre des personnes qui

9 avaient commis des crimes à l'encontre de Croates. Vous avez fait cette

10 citation, n'est-ce pas ?

11 R. Oui.

12 Q. Dans ce document, est-ce qu'on a dit -- je ne l'ai pas sous les yeux --

13 mais est-ce qu'on a dit que cinq Croates avaient été tués ? Ce document

14 donne aussi le nom du suspect qui a été arrêté ?

15 R. Oui, et on dit qu'il a été appréhendé ?

16 Q. On dit que c'est un Serbe ?

17 R. [aucune interprétation]

18 Q. Qu'il a été appréhendé par les autorités de Krajina ?

19 R. Oui.

20 Q. Puis, on a eu d'autres exemples ?

21 R. Oui.

22 Q. Alors qu'est-ce que vous en savez ? Est-ce que la RSK a fonctionné

23 comme un état de droit ? Est-ce que cet Etat a poursuivi en justice sans

24 faire de discrimination, et on voit ici que des poursuites sont engagées

25 contre des personnes ayant commis des crimes sur des Croates ?

26 R. Mais il y a eu beaucoup d'autres cas du même genre. Je ne vais pas tous

27 les citer parce que je vous ai rappelé qu'aujourd'hui, nos archives se

28 trouvent à Zagreb et je ne peux plus les consulter.

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1 Q. Je suppose qu'il y a des faits qu'on peut trouver, mais quoi qu'il en

2 soit, merci d'avoir répondu à cette question. Mais le Procureur a contesté

3 ce que vous aviez affirmé à propos de l'attitude que vous aviez eue en

4 Krajina à l'encontre de la structure -- à propos de la structure

5 démographique. Je ne veux pas utiliser trois documents. Je vais utiliser --

6 techniquement, reprendre le recensement des foyers publiés par l'Institut

7 statistique de Croatie pour l'année 1992. Veuillez consulter ce document.

8 Mme Uertz-Retzlaff vous en a montré la troisième page. Ce document ne fait

9 que trois pages, d'ailleurs. Nous avons des chiffres qui figurent à cette

10 page. Vous l'avez ?

11 R. Oui.

12 Q. Continuez.

13 R. Nous avons, 1948, 1953, 1961, 1971, 1981 et 1991. Ce sont les années où

14 il a eu des recensements.

15 R. Oui.

16 Q. Vous voyez qu'en 1971, il y a 626 789 Serbes et 20 ans plus tard, 580

17 663.

18 R. Oui.

19 Q. Donc, prenez le recensement de 1991 et celui de 1981.

20 R. Attendez que je trouve ces chiffres.

21 Q. Prenez la colonne du recensement de 1981. Cette année-là, il y avait

22 combien de Yougoslaves, 379 000, alors que, dans le recensement précédent,

23 il n'y en avait que 84 000. Pourquoi ?

24 R. Beaucoup de Serbes se sont déclarés comme étant Yougoslave. Je vous

25 l'ai déjà dit. Quelque 80 % des Serbes l'ont fait, en fait.

26 Q. Donc, vous avez dit 80 % des Serbes qui se sont déclaré Yougoslaves

27 parce qu'ils étaient Serbes. C'est cela que vous dites ?

28 R. Oui. Ce sont-là des estimations. Beaucoup de chercheurs belgradois sont

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1 d'accord avec ces estimations.

2 Q. Maintenant, si on fait la soustraction, 531 000 ou moins

3 20 %, cela donne à peu près 831 000 Serbes en Croatie.

4 R. Oui. Je veux dire près d'un million.

5 Q. Est-ce que ces chiffres le prouvent ?

6 R. Oui. Je suis navré qu'on ne m'ait pas cru quand je l'ai dit. Je ne

7 pensais pas qu'il aurait fallu faire ces sommes ou ces soustractions comme

8 vous venez de le faire.

9 Q. Mais ce sont des chiffres, rien d'autre.

10 R. Oui. J'ai dit plus ou moins un million de Yougoslaves, de façon

11 générale.

12 Q. Le Procureur a placé sur le rétroprojecteur le document qui était le

13 rapport de la police de Zadar précisant le nombre d'explosions et

14 d'incendies. Vous vous en souvenez, n'est-ce pas ? Inutile de le replacer

15 sur le rétroprojecteur car nous avons déjà examiné ce document deux fois.

16 J'ai posé mes questions impliquant à Mme Uertz-Retzlaff, vous a posé les

17 siennes.

18 R. Oui.

19 Q. On a parlé de la nuit de cristal à Zadar. Avez-vous connaissance ?

20 R. Oui. Cela a été un programme des Serbes, celui à qui ressemble, à ce

21 qui s'est passé à Zagreb. Désolé de revenir à l'histoire mais cela s'était

22 passé en 1902.

23 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Dernière question, Monsieur

24 Milosevic.

25 M. MILOSEVIC : [interprétation]

26 Q. Monsieur Jarcevic, ces centaines d'explosions, ces centaines

27 d'incendies de maisons, est-ce qu'il aurait été possible que ce soit des

28 Serbes qui détruisent des maisons croates ou est-ce que c'étaient des

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1 Serbes qui détruisaient des maisons serbes ?

2 R. Puisqu'il n'y a que les Serbes qui ont porté plaintes, peut-être qu'il

3 y a eu l'un ou l'autre cas dirigé contre les Croates en République de

4 Krajina serbe, mais, pour l'essentiel, c'étaient des maisons, des commerces

5 serbes, d'autres installations serbes ou des installations de pêches.

6 L'INTERPRÈTE : Ralentissez, s'il vous plaît. Merci.

7 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vous interromps parce que les

8 interprètes vous demandent de ralentir, Monsieur Milosevic. De toute façon,

9 nous allons lever l'audience, elle reprendra demain.

10 M. NICE : [interprétation] Une seule remarque.

11 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui.

12 M. NICE : [interprétation] Mme Mahon est notre prochain témoin. Aucune

13 pièce n'a été fournie la concernant et le résumé 65 ter ne dit pratiquement

14 rien. Est-ce qu'elle va parler en anglais ? Donc, ces notes sont surtout en

15 anglais; est-ce qu'on peut avoir des notes pour savoir sur quoi va porter

16 sa déposition ? Ce sera plus facile à ce moment-là de terminer sa

17 déposition demain pour qu'elle ne doive revenir la semaine prochaine.

18 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Fort bien. L'audience reprendre

19 demain à 9 heures.

20 --- L'audience est levée à 13 heures 45 et reprendra le mercredi 1 mars

21 2005, à 9 heures 00.

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