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1 (Comparution initiale dans l'affaire IT-97-24-T)
2 (Audience publique.)
3 (L'audience est ouverte à 16 heures 05.)
4 M. le Président: Vous pouvez vous asseoir s'il vous plaît.
5 Madame la Greffière, s'il vous plaît, pouvez-vous vous annoncer l'affaire?
6 Mme Thomson (interprétation): Bonjour, c'est l'affaire IT-97-24-T, le
7 Procureur contre Milomir Stakic et les autres.
8 M. le Président: Je salue le personnel de l'audiovisuel, les interprètes
9 et je m'assure qu'ils m'entendent?
10 Je voulais également saluer le public qui participe à nos débats. Et nous
11 sommes vraiment dans les procédures préliminaires, plus précisément à la
12 comparution initiale de l'accusé qui est réglé par l'Article 62 de notre
13 Règlement. Je me tourne vers le banc du Procureur, Madame Somers, pouvez-
14 vous vous présenter, s'il vous plaît?
15 Mme Somers (interprétation): Merci, Monsieur le Président.
16 (Hors micro.) Je m'excuse.
17 Donc l'accusation est représentée par Suzanne Somers, par M. Daniel Saxon,
18 M. Waidyaratne et Mme Denise Gustin.
19 M. le Président: Merci beaucoup. Je me tourne vers la défense maintenant.
20 Bien qu'on se connaisse déjà Maître Lukic, pouvez-vous vous présenter,
21 dire de quel barreau vous êtes et quelles sont vos qualifications
22 d'agrément au Tribunal, en tout cas telles que vous les avez présentées à
23 Monsieur le Greffier.
24 M. Lukic (interprétation): Merci. Bonjour, Monsieur le Président. Je
25 m'appelle Branko Lukic, je viens de Doboj, bois je représente M. Milomir
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1 Stakic ici seulement lors de cette comparution initiale.
2 J'ai suggéré à M. Stakic de choisir, de trouver un avocat permanent le
3 plus vite possible.
4 M. le Président: Très bien, Maître Lukic. Vous pouvez vous asseoir.
5 M. Lukic (interprétation): Merci.
6 M. le Président: A présent, je vais me tourner vers M. Milomir Stakic qui
7 comparait aujourd'hui pour la première fois suite à un acte d'accusation
8 qui a été dressé contre lui. Monsieur Stakic, pouvez-vous vous lever, s'il
9 vous plaît, et énoncer clairement vos noms et prénoms.
10 (L'accusé se lève.)
11 M. Stakic (interprétation): Milomir Stakic.
12 M. le Président: Vos dates et lieu de naissance?
13 M. Stakic (interprétation): Le 19 janvier 1962, à Maricka, dans la
14 municipalité de Prijedor.
15 M. le Président: Votre profession ou occupations et lieu de résidence
16 avant de venir ici?
17 M. Stakic (interprétation): Je suis médecin généraliste. Je faisais une
18 spécialisation dans le domaine de la réhabilitation jusqu'à mon arrivée à
19 La Haye. Je faisais donc ma spécialisation à Belgrade en République
20 fédérale de Yougoslavie.
21 M. le Président: Etes-vous marié?
22 M. Stakic (interprétation): Oui.
23 M. le Président: Avez-vous des enfants?
24 M. Stakic (interprétation): Oui. J'ai deux enfants.
25 M. le Président: Très bien.
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1 Docteur Stakic, aujourd'hui il s'agit de votre comparution initiale devant
2 le Tribunal. C'est une formalité bien sûr substantielle dans laquelle il
3 faut que vous soyez présent et conscient, avec votre avocat, car c'est le
4 moment après votre arrestation où il vous est donné encore une fois la
5 possibilité de prendre conscience de toutes les charges que le Procureur a
6 énoncées contre vous et qu'un Juge a confirmé en attendant qu'évidemment
7 les preuves soient échangées dans un débat contradictoire.
8 Pour que les choses soient claires, Docteur Stakic, je vais demander
9 d'abord à Madame la Greffière de rappeler les textes constitutifs qui sont
10 ceux qui vous donnent un certain nombre de droits et vont vous permettre
11 ensuite de procéder à la formalité majeure de la présente comparution qui
12 est de savoir si vous souhaitez plaider coupable ou non coupable et de
13 savoir si vous plaidez coupable où éventuellement non coupable.
14 Pour l'instant vous pouvez vous asseoir, Docteur Stakic.
15 Et donc je demande je vous demande, Docteur Stakic, d'être très attentif à
16 la lecture de ces textes, ainsi que votre avocat, mais votre avocat
17 connaît certainement très bien c'est texte.
18 Donc Madame la Greffière, pouvez-vous lire les textes des articles 20 et
19 21 du Statut, et 62 du Règlement?
20 M. Fourmy: Monsieur le Président, avec votre autorisation peut-être
21 pourrais-je essayer de donner lecture en langue française.
22 M. le Président: Oui c'est mieux. Allez-y, s'il vous plaît.
23 M. Fourmy: Article 20 du Statut du Tribunal, ouverture et conduite du
24 procès: "La Chambre de première instance veille à ce que le procès soit
25 équitable et rapide, et à ce que l'instance se déroule conformément aux
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1 règles de procédure et de preuve, les droits de l'accusé étant pleinement
2 respectés et la protection des victimes et des témoins dûment assurés.
3 Toute personne contre laquelle un acte d'accusation a été confirmé et
4 conformément à une ordonnance ou un mandat d'arrêt décerné par le Tribunal
5 international, placé en état d'arrestation, immédiatement informé mais des
6 chefs d'accusation portés contre elle est déférée au Tribunal pénal
7 international. La Chambre de première instance donne lecture de l'acte
8 d'accusation, s'assure que les droits de l'accusé sont respectés, confirme
9 que l'accusé a compris le contenu de l'acte d'accusation et lui ordonne de
10 plaider coupable, ou non coupable. La Chambre de première instance fixe
11 alors la date du procès.
12 Les audiences sont publiques à moins que la Chambre de première instance
13 décide de les tenir à huis clos, conformément à ses règles de procédure et
14 de preuve.
15 Article 21: Les droits de l'accusé.
16 Tous sont égaux devant le Tribunal international.
17 Toute personne contre laquelle des accusations sont portées a droit à ce
18 que sa cause soit entendue équitablement et publiquement, sous réserve des
19 dispositions de l'Article 22 du Statut.
20 3. Toute personne accusée est présumée innocente jusqu'à ce que sa
21 culpabilité ait été établie conformément aux dispositions du présent
22 Statut.
23 4. Toute personne contre laquelle une accusation est portée en vertu du
24 présent Statut a droit, en pleine égalité, au moins aux garanties
25 suivantes.
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1 a) A être informée dans le plus court délai, dans une langue qu'elle
2 comprend et de façon détaillée, de la nature et des motifs de l'accusation
3 portés contre elle;
4 b) A disposer du temps et des facilités nécessaires à la préparation de sa
5 défense, et à communiquer avec le conseil de ce son choix;
6 c) A être jugée sans retard excessif;
7 d) A être présente au procès et à se défendre elle-même ou à avoir
8 l'assistance d'un défenseur de son choix; si elle n'a pas de défenseur, a
9 être informée de son droit d'en avoir un, et chaque fois que l'intérêt de
10 la justice l'exige, à se voir attribuer d'office un défenseur, sans frais,
11 si elle n'a pas les moyens de le rémunérer;
12 e) A interroger ou faire interroger les témoins à charge et à obtenir la
13 comparution et l'interrogatoire des témoins à décharge dans les mêmes
14 conditions que les témoins à charge;
15 f) A se faire assister gratuitement d'un interprète si elle ne comprend ou
16 si elle ne parle pas la langue employée à l'audience;
17 g) A ne pas être forcée de témoigner contre elle-même ou de s'avouer
18 coupable.
19 Article 62 du Règlement de procédure et de preuve du Tribunal.
20 Comparution initiale de l'accusé.
21 Après le transfert d'un accusé au siège du Tribunal, le Président attribue
22 immédiatement l'affaire à une Chambre de première instance. L'accusé
23 comparait sans délai devant la Chambre où un Juge de celle-ci, et y est
24 mis formellement en accusation. La Chambre de première instance ou le
25 Juge:
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1 i) s'assure que le droit de l'accusé est respecté;
2 ii) donne lecture ou fait donner lecture de l'acte d'accusation à l'accusé
3 dans une langue qu'il parle et comprend, et s'assure que l'intéressé
4 comprend l'acte d'accusation.
5 iii) informe l'accusé que, dans les trente jours suivant sa comparution
6 initiale, il lui sera demandé de plaider coupable ou non coupable pour
7 chaque chef d'accusation, mais qu'il peut, s'il le demande, plaider
8 immédiatement coupable ou non coupable pour un plusieurs chefs
9 d'accusation;
10 iv) si l'accusé ne plaide ni dans un sens, ni dans l'autre lors de la
11 comparution initiale ou lors d'une comparution ultérieure, prend note en
12 son nom d'un plaidoyer de non culpabilité.
13 v) si l'accusé plaide non coupable donne instruction au Greffier de fixer
14 la date du procès.
15 vi) Si l'accusé plaide coupable
16 a) devant la Chambre de première instance agit conformément à l'article 62
17 bis ou
18 b) devant un Juge, renvoie le plaidoyer à la Chambre de première instance
19 pour qu'elle agisse en conformité avec l'article 62 bis.
20 vii) donne instruction au Greffier de fixer toutes autres dates
21 appropriée.
22 M. le Président: Merci beaucoup, Monsieur Olivier Fourmy, de votre
23 lecture.
24 Je me tourne maintenant vers Maître Branko Lukic.
25 Est-ce que le Dr Stakic a bien reçu une copie de l'acte d'accusation dans
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1 sa langue et a-t-il bien compris la teneur, Maître Lukic?
2 M. Lukic (interprétation): Oui Monsieur le Président, il a reçu l'acte
3 d'accusation dans la langue qu'il comprend et il a lu entièrement l'acte
4 d'accusation.
5 M. le Président: Avez-vous pu en discuter avec le Dr Stakic?
6 M. Lukic (interprétation): Monsieur, oui, nous avons eu une discussion
7 très longue et nous avons discuté de l'acte d'accusation en détail.
8 M. le Président: Merci beaucoup, Maître Lukic. Vous pouvez vous asseoir,
9 s'il vous plaît.
10 M. Lukic (interprétation): Merci.
11 Docteur Stakic, vous pouvez vous lever, s'il vous plaît?
12 (L'accusé se lève.)
13 Avez-vous bien reçu l'acte d'accusation dans votre propre langue?
14 M. Stakic (interprétation): Oui.
15 M. le Président: Avez-vous bien compris la teneur de l'acte d'accusation?
16 M. Stakic (interprétation): Oui.
17 M. le Président: Etes-vous prêt aujourd'hui à nous dire si vous plaidez
18 coupable ou non coupable sur le chef d'accusation?
19 M. Stakic (interprétation): Oui, je suis prêt à plaider dès aujourd'hui,
20 Monsieur le Président.
21 M. le Président: Pour que toutes les choses soient claires, Docteur
22 Stakic, nous allons procéder de cette façon-ci: Madame la Greffière va
23 lire l'acte d'accusation. Vous allez rester assis pendant cette lecture et
24 lorsque l'on arrive aux chefs d'accusation, je vais vous demander de vous
25 lever et je vais vous poser la question de savoir si vous plaidez coupable
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1 ou non coupable.
2 Avez-vous compris et êtes-vous d'accord avec cela, Docteur Stakic?
3 M. Stakic (interprétation): Oui, je suis d'accord, Monsieur le Président.
4 M. le Président: Maître Lukic, je voudrais savoir si vous êtes d'accord
5 pour qu'on puisse lire seulement une partie de l'acte d'accusation, c'est-
6 à-dire les paragraphes 3, 10 à 12, et 19 à 26.
7 Etes-vous d'accord?
8 M. Lukic (interprétation): Monsieur le Président, nous sommes prêts à
9 renoncer à notre droit d'avoir la lecture complète de l'acte d'accusation,
10 mais c'est à la Chambre bien sûr de prendre une décision à ce sujet.
11 M. le Président: Vous pouvez vous asseoir. Un moment, s'il vous plaît.
12 (Maître Lukic s'assoit.)
13 (Les Juges se consultent sur le siège.)
14 M. le Président: Merci beaucoup, Maître Lukic, d'avoir coopéré avec nous
15 mais la Chambre, néanmoins, pense que du point de vue du public, il faut
16 avoir au moins quelque information et donc la Chambre ordonne la lecture
17 des paragraphes que nous avions mentionnés, c'est-à-dire les paragraphes
18 3, 10 à 12, et après 19 à 26.
19 Madame la Greffière, s'il vous plaît?
20 Mme Thomson (interprétation): Oui, Monsieur le Président.
21 "Paragraphe n° 3.
22 Milomir Stakic est né le 19 février 1962 dans la municipalité de Prijedor,
23 République de Bosnie-Herzégovine. En 1992, il occupait le poste de
24 président de l'assemblée municipale de la municipalité de Prijedor et il
25 était membre de la cellule de crise de cette municipalité. Il exerce la
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1 profession de médecin, et il est actuellement président de la municipalité
2 de Prijedor.
3 Paragraphe n° 10.
4 Durant la période allant du 29 avril 1992 au 31 décembre 1992, Milomir
5 Stakic était membre de la cellule de crise de la municipalité de Prijedor
6 et président de l'assemblée municipale de Prijedor.
7 Paragraphe n° 11.
8 Dans son rôle de membre de la cellule de crise, Milomir Stakic faisait
9 partie de l'organe qui exerçait le pouvoir exécutif dans la municipalité
10 de Prijedor durant toute la période couverte par le présent acte
11 d'accusation et de l'organe décrit au paragraphe 5 ci-dessus.
12 Paragraphe n° 12.
13 En tant que président de l'assemblée municipale de Prijedor, Milomir
14 Stakic occupait le poste le plus élevé au sein de la cellule de crise. Au
15 plan du pouvoir de jure, il avait le dernier mot et le pouvoir de trancher
16 toutes les questions au sein de la municipalité."
17 M. le Président: Pourriez-vous vous lever maintenant, s'il vous plaît.
18 (M. Stakic se lève.)
19 Vous pouvez continuer, Madame Thomson?
20 Mme Thomson (interprétation): Oui, Monsieur le Président, je continue.
21 "Paragraphe n° 19.
22 Entre avril 1992 et janvier 1993, les autres et Milomir Stakic ont, sur le
23 territoire de la Bosnie-Herzégovine, par leurs actes et omissions, commis
24 un génocide.
25 Paragraphe n° 20.
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1 A compter du printemps de 1992, la cellule de crise de la municipalité de
2 Prijedor, y compris les autres et Milomir Stakic a planifié, organisé et
3 exécuté la création d'un certain nombre de centres ou camps de détention,
4 y compris les camps d'Omarska, de Keraterm et de Trnopolje. Ces camps
5 étaient pourvus en personnel et administrés par le personnel militaire et
6 policier et leurs agents sous le contrôle des membres militaires et civils
7 serbes de Bosnie de la cellule de crise. De plus, d'autres membres de la
8 police et de l'armée, ainsi que des civils qui n'étaient pas affectés
9 directement au personnel chargé de la garde des camps bénéficiaient d'un
10 accès sans réserve à tous les centres de détention et opéraient en
11 conjonction avec le personnel contrôlant ces centres.
12 Paragraphe n° 21.
13 Dans aucun des camps les détenus n'ont bénéficié de protection juridique
14 ordinaire et leur incarcération n'était pas justifiée par les impératifs
15 militaires. Ils étaient incarcérés principalement du fait de leur identité
16 religieuse et ethnique. Les conditions d'existence dans les camps
17 d'Omarska, de Keraterm et de Trnopolje étaient abjects et exécrables. Le
18 personnel militaire et policier serbe de Bosnie, chargé de ces centres,
19 leur personnels et d'autres personnes qui circulaient dans les camps, tous
20 relevant du pouvoir et du contrôle de la cellule de crise ont tué, infligé
21 des violences sexuelles, torturé et porté des atteintes physiques et
22 psychologiques grâce aux détenus des camps.
23 Paragraphe n° 22.
24 A Omarska et à Keraterm, les camps étaient intentionnellement administrés
25 d'une façon visant à soumettre les détenus à des conditions d'existence
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1 devant entraîner leur destruction physique dans l'intention d'éliminer en
2 partie les Musulmans et les Croates de Bosnie en tant que groupes
3 nationaux ethniques ou religieux. Des violations graves du droit
4 international humanitaire d'une même nature ont été commises au camp
5 d'Omarska et de Keraterm. Les détenus ont été constamment soumis ou forcés
6 à assister à des actes inhumains, y compris le meurtre le viol et des
7 sévices sexuels, la torture des violences et des viols, ainsi que d'autres
8 formes de violence mentale et physique. Les rations alimentaires
9 quotidiennes fournies aux détenus n'étaient rien d'autre que des rations
10 de famine. Les soins médicaux dispensés aux détenus étaient insuffisants
11 ou inexistants. Les conditions sanitaires générales prévalant dans ces
12 camps était extrêmement inadéquate.
13 Paragraphe n° 23.
14 A Omarska, les prisonniers étaient entassés avec peu ou pas d'installation
15 pour leur hygiène personnelle. Ils recevaient des rations alimentaires de
16 famine une fois par jour, et n'avaient que quelques minutes pour se rendre
17 à la cantine manger et repartir. Le peu d'eau qui leur était fournie était
18 souvent polluée. Les prisonniers ne disposaient ni de vêtements, ni de
19 rechange, ni de literie. Ils ne recevaient aucun soin médical. Les
20 meurtres et sévices graves infligés aux prisonniers étaient monnaie
21 courante. Les gardes du camp qui appartenaient au personnel policier et
22 militaire, et d'autres personnes qui venaient au camp et infligeaient des
23 sévices corporels aux prisonniers, utilisaient pour ce faire toute sorte
24 d'arme, y compris des matraques en bois, des barres métalliques et outils,
25 des bouts de câbles industriels épais, des crosses de fusils et des
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1 couteaux. Des détenus hommes et femmes ont été battus, violés, victimes
2 de sévices sexuels, torturés et humiliés. Des centaines de détenus, dont
3 pour certains l'identité est connue, et dont elle reste inconnue pour
4 d'autres n'ont pas survécu à leur séjour au camp.
5 Paragraphe n° 24.
6 Le camp de Keraterm était situé dans une ancienne usine de céramique à
7 Prijedor. Les conditions d'existence des prisonniers étaient semblables à
8 celles régnant au camp d'Omarska. Les détenus étaient si entassés dans les
9 quatre salles qu'en de nombreuses occasions ils ne pouvaient pas
10 s'allonger. Ils n'étaient pas autorisés à se déplacer librement dans le
11 camp. Qu'ils aient été incarcérés dans les salles ou dans la partie en
12 plein air à l'extérieur, ils ne pouvaient se déplacer que lorsqu'ils y
13 étaient spécifiquement autorisés, généralement seulement pour recevoir
14 leurs rations de famine. Sur une base quotidienne, les responsables
15 hiérarchiques du camp, les gardes du camp, qui appartenaient au personnel
16 policier et militaire, et d'autres personnes qui venaient au camp et
17 infligeaient des sévices corporels aux détenus, ont soumis les détenus à
18 des conditions inhumaines, des violences corporelles, une humiliation
19 constante, des dégradations et la peur de la mort. De nombreux détenus ont
20 été exécutés au camp. En une seule nuit de juillet 1992, plus de 150
21 hommes en âge de porter les armes de la région de "Brdo" ont été exécutés.
22 Les sévices corporels graves étaient monnaie courante. Toutes sortes
23 d'armes étaient utilisées durant ces sévices, y compris des matraques en
24 bois, des barres métalliques, des battes de base-ball, des bouts de câble
25 industriel épais, des crosses de fusils et des couteaux. Les sévices
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1 corporels, violences sexuelles, tortures et autres actions cruelles et
2 humiliantes étaient généralement infligés devant d'autres détenus et
3 étaient accompagnés par des commentaires désobligeants et humiliants
4 adressés aux victimes ou à leurs familles et par des menaces générales aux
5 autres détenus. Après avoir été battus, torturés ou victimes de sévices
6 sexuels, les détenus étaient transportés, tirés, ou contraints de ramper
7 jusqu'à leur salle, sans recevoir aucune forme de soins pour leurs
8 blessures. Des centaines de détenus dont, pour certains, l'identité est
9 connue et dont elle reste inconnue pour d'autres, n'ont pas survécu à leur
10 séjour au camp.
11 Paragraphe n° 25.
12 Le camp de Trnopolje a été établi sur le site d'une ancienne école et des
13 bâtiments voisins. C'était le camp le plus important et l'endroit où les
14 femmes, enfants et personnes âgées musulmans et croates de Bosnie ont été
15 internés. Certains hommes en âge de porter les armes ont également réussi
16 à aller directement au camp de Trnopolje. Les bâtiments du camp ont été
17 rapidement remplis et les détenus en surnombre ont dû s'abriter dans des
18 tentes de fortune, faites de feuilles de plastique ou de matériaux mis au
19 rebut, ou restaient en plein air dans les champs. Les installations
20 sanitaires étaient extrêmement insuffisantes. Des rations alimentaires
21 minimales étaient fournies de façon sporadique; les femmes détenues ont
22 fini par être autorisées à quitter le camp pour chercher de la nourriture
23 dans le village voisin. Le camp a servi de point de départ pour la
24 déportation en masse de toutes les personnes qui ont survécu aux attaques
25 initiales et au régime du camp. Il a aussi servi un but beaucoup plus
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1 sinistre: les sévices sexuels, le viol et la torture infligés à bon nombre
2 de femmes détenues par le personnel du camp, qui appartenait au personnel
3 policier et militaire, et par d'autres membres des unités militaires de la
4 région qui venaient au camp dans ce but précis. Dans de nombreux cas, les
5 femmes et les filles ont été emmenées à l'extérieur du camp et elles ont
6 été violées et torturées ou ont subi des violences sexuelles en d'autres
7 endroits. De plus, de nombreux prisonniers, hommes et femmes, ont été
8 tués, battus et victimes de mauvais traitements physiques et
9 psychologiques par le personnel du camp et d'autres Serbes et Serbes de
10 Bosnie qui étaient autorisés à entrer dans le camp.
11 Paragraphe n° 26.
12 Entre le 30 avril 1992 et le 31 décembre 1992, les autres et Milomir
13 Stakic, de concert avec d'autres, ont organisé, incité à créer et ordonné
14 l'établissement des camps à Omarska, Keraterm et Trnopolje, ainsi que
15 l'incarcération dans ces camps de Musulmans et de Croates de Bosnie de la
16 municipalité de Prijedor dans des conditions d'existence calculées pour
17 entraîner la destruction physique des détenus, dans l'intention de
18 détruire en partie les groupes des Musulmans de Bosnie et des Croates de
19 Bosnie comme tels. De surcroît, entre le 30 avril 1992 et le 31 décembre
20 1992, les autres et Milomir Stakic savaient ou avaient des raisons de
21 savoir que leurs subordonnés, qui constituaient le personnel des camps de
22 détention, tuaient ou infligeaient des atteintes graves à l'intégrité
23 physique ou mentale de Musulmans et de Croates de Bosnie dans l'intention
24 de les détruire, en partie, en tant que groupe national, ethnique ou
25 religieux, ou l'avaient fait, et qu'ils n'ont pas pris les mesures
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1 nécessaires et raisonnables pour empêcher que ***lesdits actes ne soient
2 commis ou en punir les auteurs.
3 Par ces actes et omissions, les autres et Milomir Stakic se sont faits les
4 complices de la perpétration d'un génocide punissable en vertu des
5 Articles 4 3) e) et 7 1) et 3) du Statut du Tribunal."
6 M. le Président: Merci beaucoup, Madame la Greffière.
7 Docteur Stakic, vous plaidez coupable ou vous plaidez non coupable pour le
8 chef unique d'accusation de génocide?
9 M. Stakic (interprétation): Je plaide non coupable.
10 M. le Président: Bien. Nous avons noté que le Docteur Stakic a plaidé non
11 coupable pour le chef d'accusation de génocide, donc, Madame la Greffière,
12 vous prenez acte que le Docteur Stakic a plaidé non coupable pour
13 l'ensemble des chefs d'accusation.
14 Je voudrais, Maître Branko Lukic et pour le Procureur, vous donner une
15 petite explication. La Chambre a décidé de remplacer les noms de Simo
16 Drljaca et Milan Kovacevic par d'autres, parce que, comme vous le savez,
17 ces personnes sont déjà mortes, donc nous les avons remplacés par la
18 désignation "autres", ceci pour que les choses soient claires.
19 Docteur Stakic, vous pouvez vous asseoir, s'il vous plaît.
20 M. Stakic (interprétation): Merci, Monsieur le Président.
21 (M. Stakic s'assoit.)
22 M. le Président: Maintenant, on doit prévoir l'organisation de cette
23 affaire. Mais il y a deux questions préliminaires que j'aimerais poser au
24 Procureur. Pour que nous soyons bien conscients de cette question. Je ne
25 sais pas si vous êtes en condition Madame Somers de répondre à cette
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1 question. Est-ce que le Procureur a envie de modifier cet acte
2 d'accusation, oui ou non?
3 Mme Somers (interprétation): Monsieur le Président, le Procureur
4 effectivement va modifier l'acte d'accusation et a pris des mesures afin
5 de le faire déjà.
6 M. le Président: Une autre question, Madame Somers. Etes-vous en condition
7 de dire pourquoi le Procureur n'a pas fait cela notamment quand l'acte
8 d'accusation a été modifié par rapport à l'autre personne, Milan
9 Kovacevic?
10 Mme Somers (interprétation): Monsieur le Président, je me suis renseignée
11 en ce qui concerne les modifications précédentes faites par rapport aux
12 coaccusés.
13 Apparemment, les décisions n'ont pas été faites plus tôt puisque le
14 Procureur, au moment de l'arrestation, a dû passer en revue tous les
15 moyens de preuve, et d'habitude, suite à un tel passage en revue, on
16 procède à une modification, et d'ailleurs il a été nécessaire de le faire
17 compte tenu du fait que les moyens de preuve ont pour la plupart été
18 recueillis au cours de l'année 1997. C'est pour cela que nous avons pris
19 des mesures aux fins de procéder aux modifications et conformément à
20 l'article 50.
21 M. le Président: Très bien. Avez-vous une idée de la date ou quand vous
22 vous allez présenter un acte d'accusation modifié?
23 Mme Somers (interprétation): Il m'est difficile de vous donner une date
24 exacte, mais ce que je peux indiquer, c'est que nous travaillons déjà là-
25 dessus et compte tenu des délais différents que nous sommes obligés de
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1 respecter en vertu d'autres articles, nous allons essayer de le faire au
2 plus vite et nous attendons qu'un avocat soit commis d'office dans cette
3 affaire.
4 J'ai également discuté avec Me Lukic des documents qui constituent les
5 pièces jointes au moment de la comparution initiale, mais comme nous
6 l'avons constaté, Me Lukic se présente en tant qu'avocat uniquement lors
7 de cette comparution initiale, et je pense qu'il dira aux Juges de la
8 Chambre qu'en ce moment il préfère ne pas recevoir les documents qui
9 accompagnaient l'acte d'accusation en tant que pièces jointes au cours de
10 l'année 1997, mais il préfère que le conseil de la défense permanent se
11 prononce à ce sujet-là. De plus, si d'autres documents vont constituer les
12 pièces jointes au nouvel acte d'accusation et si cet acte d'accusation est
13 confirmé, nous pourrons les remettre aussi.
14 M. le Président: Par rapport à l'Article 66 A) du Règlement, c'est cela
15 que vous venez de mentionner d'une certaine façon, est-ce que le Procureur
16 est prêt pour rendre les documents qui ont accompagné la confirmation à un
17 conseil dès qu'il sera nommé?
18 Mme Somers (interprétation): Oui, Monsieur le Président. En effet le
19 Procureur aujourd'hui possède les documents qui constituaient les pièces
20 jointes à cet acte d'accusation, et tous les documents, sauf 19 pages, ont
21 été traduites en anglais, donc dès que le conseil de la défense le
22 souhaitera, nous pourrons remettre tous ces documents.
23 M. le Président: Nous allons donc attendre que le Greffe nomme un avocat
24 au Docteur Stakic et nous aimerions bien que le Greffe nous rende compte
25 de la date de cette nomination pour qu'on puisse marquer une date d'une
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1 conférence de mise en état pour faire l'évaluation de la situation. Je
2 vous dis encore que la Chambre va désigner un Juge de la mise en état et a
3 donc l'opportunité de communiquer qui est le Juge de la mise en état entre
4 les Juges de la Chambre. Je ne crois pas qu'il y ait d'autres questions à
5 traiter. De votre côté, Maître Lukic, y a-t-il d'autres questions pour le
6 moment?
7 M. Lukic (interprétation): Monsieur le Président, non. Nous n'avons plus
8 de questions à soulever.
9 M. le Président: Merci beaucoup. Du côté du Procureur?
10 Mme Somers (interprétation): Non, Monsieur le Président.
11 M. le Président: Donc je me tourne vers le Docteur Stakic, vous pouvez
12 vous lever, s'il vous plaît.
13 (Le Docteur Stakic se lève.)
14 M. le Président: Je vais vous donner la parole pour que vous puissiez vous
15 prononcer sur les conditions de détention et de santé et vous demander
16 aussi s'il y a quelque autre déclaration que vous voudriez faire
17 maintenant? Vous avez la parole donc.
18 M. Stakic (interprétation): En ce moment, Monsieur le Président, je n'ai
19 pas de déclaration à faire.
20 M. le Président: D'accord. Vous pouvez vous asseoir.
21 M. Stakic (interprétation): Merci, Monsieur le Président.
22 M. le Président: Donc, comme je vous l'ai dit, nous allons nous
23 communiquer pour savoir la date de la conférence de mise en état, et donc,
24 nous attendons que le Greffe nous indique la date de nomination de
25 l'avocat.
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1 Pour aujourd'hui, il n'y a pas d'autre chose à traiter.
2 Je lève la séance et vous souhaite un bon après-midi.
3 (L'audience est levée à 16 heures 35.)
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