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1 Le lundi, 6 juillet 2015
2 [Audience publique]
3 [Audience d'appel]
4 [Les intimés sont absents]
5 --- L'audience est ouverte à 10 heures 03.
6 M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Bonjour à toutes et à tous.
7 Madame la Greffière, veuillez citer l'affaire, s'il vous plaît.
8 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Bonjour, Messieurs les Juges. Affaire
9 numéro IT-03-69-A, le Procureur contre Jovica Stanisic et Franko Simatovic.
10 M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Je vous remercie.
11 Puis-je avoir la présentation des parties, s'il vous plaît, à commencer par
12 l'Accusation.
13 Mme JARVIS : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président et Messieurs
14 les Juges. Michelle Jarvis, comparaissant aujourd'hui pour l'Accusation,
15 ainsi que M. Mathias Marcussen, Mme Goy et Mme Harbour, et Colin Nawrot,
16 notre commis à l'affaire. Merci.
17 M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Je vous remercie.
18 Avant de demander la présentation de la Défense, je note aux fins du compte
19 rendu d'audience que, conformément aux conditions de l'ordonnance portant
20 calendrier pour l'audience en appel rendue par la Chambre d'appel le 12
21 juin 2015, M. Simatovic a déposé une notification le 19 juin 2015,
22 précisant qu'il ne va pas exercer son droit d'assister à l'audience
23 aujourd'hui.
24 M. Stanisic a également informé de façon informelle les Juges de cette
25 Chambre par l'intermédiaire d'un courriel le 1er juillet 2015 qu'il
26 n'assistera pas à cette audience.
27 Puis-je avoir la présentation de la Défense représentant les intérêts de M.
28 Stanisic.
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1 M. JORDASH : [interprétation] Je m'appelle Wayne Jordash, accompagné de M.
2 Scott Martin, Mme Bracq, M. Parker et M. Crowe.
3 M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Je vous remercie.
4 Le conseil de M. Simatovic maintenant, je vous prie.
5 M. PETROVIC : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Je m'appelle
6 Vladimir Petrovic, avocat, et je représente les intérêts de Franko
7 Simatovic aujourd'hui.
8 M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Je vous remercie.
9 Cette affaire porte sur les événements qui se sont déroulés entre le mois
10 d'avril 1991 et le 31 décembre 1991 [comme interprété] dans la Région
11 autonome serbe de Krajina, la SOA de Krajina, la Région autonome serbe de
12 Slavonie, de la Baranja, et du Srem occidental en Croatie, ainsi que dans
13 les municipalités de Bijeljina, Bosanski Samac, Doboj, Sanski Most, Trnovo,
14 et Zvornik en Bosnie-Herzégovine.
15 M. Stanisic et M. Simatovic ont été accusés de meurtres en tant que
16 violation de lois ou coutumes de la guerre, et de meurtres, expulsions et
17 autres actes inhumains (transfert forcé), ainsi que de persécutions en tant
18 que crimes contre l'humanité dans le contexte de ces événements.
19 L'Accusation a accusé les accusés d'avoir commis ces crimes en vertu de
20 l'article 7(1) du Statut du Tribunal par le biais de leur participation à
21 une entreprise criminelle commune, l'objectif commun allégué de cet
22 objectif était le déplacement forcé et permanent d'une majorité de non-
23 Serbes de régions importantes de Croatie et de Bosnie-Herzégovine.
24 En outre, M. Stanisic et M. Simatovic ont été accusés en vertu de l'article
25 7(1) du Statut du Tribunal d'avoir planifié, ordonné, et/ou d'avoir aidé et
26 encouragé la planification, la préparation et/ou l'exécution des crimes
27 allégués dans l'acte d'accusation.
28 Le 30 mai 2013, la première Chambre d'appel [comme interprété] du Tribunal
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1 a rendu son jugement. La Chambre de première instance a constaté que de
2 nombreux crimes allégués dans l'acte d'accusation avaient été commis par
3 différentes forces serbes dans les localités mentionnées en Croatie et
4 Bosnie-Herzégovine. Cependant, la Chambre de première instance, Mme le Juge
5 Picard étant en désaccord, ont constaté que ni Stanisic ni Simatovic
6 n'était responsable pour la commission de ces crimes en vertu de la
7 responsabilité dans le cadre de l'entreprise criminelle commune, puisqu'il
8 n'a pas été établi au-delà de tout doute raisonnable qu'ils possédaient
9 l'élément moral nécessaire pour être jugés responsables dans le cadre de
10 l'entreprise criminelle commune.
11 La Chambre de première instance a constaté qu'il n'a pas été prouvé au-delà
12 de tout doute raisonnable que M. Stanisic et M. Simatovic ont planifié ou
13 ordonné ces crimes. En outre, la Chambre de première instance, Mme le Juge
14 Picard étant en désaccord, ont constaté que ni M. Stanisic ni M. Simatovic
15 n'était responsable de complicité par aide et encouragement de ces crimes
16 en tant qu'élément constitutif de l'actus reus de l'aide et
17 l'encouragement, qui n'ont pas été établis au-delà de tout doute
18 raisonnable.
19 En conséquence, la Chambre de première instance, Mme la Juge Picard
20 étant en désaccord, ont constaté que M. Stanisic et M. Simatovic n'étaient
21 déclarés coupables d'aucun chef dans l'acte d'accusation.
22 L'Accusation conteste le jugement rendu par la Chambre de première
23 instance en présentant trois moyens d'appels.
24 Dans son premier moyen d'appel, l'Accusation fait valoir que la
25 Chambre de première instance a commis une erreur de droit et de fait en
26 constatant que l'élément moral de M. Stanisic et M. Simatovic pour établir
27 leur responsabilité en vertu de l'entreprise criminelle commune n'a pas été
28 établi. L'Accusation a demandé à ce que la Chambre d'appel : infirme les
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1 acquittements de M. Stanisic et de M. Simatovic; applique les critères
2 juridiques corrects aux éléments de preuve et constate que tous les
3 éléments constitutifs de la responsabilité en vertu de l'entreprise
4 criminelle commune soient établis en tenant compte des actes et omissions
5 tels que constatés par la Chambre de première instance et exposés dans son
6 troisième moyen d'appel; troisièmement, condamne M. Stanisic et M.
7 Simatovic en vertu de l'article 7(1) du Statut en se fondant sur leur
8 participation dans l'entreprise criminelle commune alléguée dans l'acte
9 d'accusation pour les crimes énumérés aux chefs 1 à 5; et prononce une
10 peine en conséquence.
11 Dans son deuxième moyen d'appel, l'Accusation fait valoir que la
12 Chambre de première instance a commis une erreur de droit et de fait en
13 constatant que l'actus reus de complicité par aide et encouragement n'a pas
14 été établi concernant le comportement soit de M. Stanisic ou de M.
15 Simatovic par rapport aux crimes commis dans les municipalités de Bosanski
16 Samac, à Doboj, ainsi que dans la SAO de Krajina.
17 L'Accusation demande à ce que la Chambre d'appel : premièrement,
18 infirme les acquittements de M. Stanisic et de M. Simatovic; deuxièmement,
19 applique les critères corrects aux éléments de preuve et constate que tous
20 les éléments constitutifs de la complicité par aide ou encouragement soient
21 établis en tenant compte de leurs actes et omissions tels que constatés par
22 la Chambre de première instance et exposés dans leur troisième moyen
23 d'appel; troisièmement, elle condamne M. Stanisic et M. Simatovic en vertu
24 de l'article 7(1) du Statut pour avoir aidé et encouragé les crimes
25 énumérés aux chefs 1 à 5; et les condamne en conséquence.
26 A titre subsidiaire, pour ce qui est des premier et deuxième moyens
27 d'appel, l'Accusation demande à la Chambre d'appel de constater que les
28 erreurs alléguées soient établies et demande à ce qu'elle, je cite,
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1 "renvoie l'affaire devant des Juges du Tribunal" pour que soient appliqués
2 les critères juridiques corrects au dossier pour déterminer la
3 responsabilité de M. Stanisic et de M. Simatovic telle qu'alléguée dans
4 l'acte d'accusation.
5 Dans son troisième moyen d'appel, en partie, l'Accusation fait valoir
6 que la Chambre de première instance a commis une erreur de fait en ne
7 constatant pas que M. Stanisic a contribué de façon importante à la mise en
8 œuvre de l'entreprise criminelle commune dans la SBSO de la SAO et dans les
9 municipalités de Bijeljina et de Zvornik, et que M. Stanisic et M.
10 Simatovic ont contribué de façon importante à la mise en œuvre de
11 l'entreprise criminelle commune dans la municipalité de Sanski Most.
12 L'Accusation demande à la Chambre d'appel : premièrement, d'appliquer
13 le critère juridique correct aux éléments de preuve et qu'on constate que
14 M. Stanisic et M. Simatovic ont contribué de façon importante respective
15 aux crimes tels qu'allégués et tienne compte de ces constatations lorsque
16 la Chambre condamne M. Stanisic et M. Simatovic pour leur participation à
17 l'entreprise criminelle commune telle qu'alléguée dans le premier moyen
18 d'appel; et les condamne en conséquence.
19 Ensuite, pour ce qui est du restant du moyen d'appel, l'Accusation
20 fait valoir qu'à titre subsidiaire, la Chambre de première instance a
21 commis une erreur de fait en ne constatant pas que M. Stanisic a contribué
22 de façon importante à un ou plusieurs des crimes commis dans la SBSO de la
23 SAO et dans les municipalités de Bijeljina et de Zvornik, que M. Stanisic
24 et M. Simatovic ont contribué de façon importante à un ou plusieurs crimes
25 commis dans la municipalité de Sanski Most et que, par conséquent, ils ont
26 aidé et encouragé ces crimes. L'Accusation demande à ce que la Chambre
27 d'appel : premièrement, applique les critères juridiques corrects aux
28 éléments de preuve et constate que M. Stanisic et M. Simatovic ont
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1 contribué de façon importante respectivement tels qu'allégués; tienne
2 compte de ces constatations lors du prononcé de l'appel contre M. Stanisic
3 et M. Simatovic en qualité de personnes ayant aidé et encouragé les crimes
4 dans le deuxième moyen d'appel; et les condamne en conséquence.
5 M. Stanisic et M. Simatovic répliquent que l'appel de l'Accusation
6 doit être renvoyé dans sa totalité et que toute condamnation en appel
7 violerait leur droit à un procès équitable d'avoir un examen de leur
8 condamnation.
9 En outre, M. Simatovic fait valoir que dans le cas où la Chambre
10 d'appel fait droit à l'appel de l'Accusation, elle devrait renvoyer
11 l'affaire devant les Juges du Tribunal.
12 Alors, je vais vous expliquer comment nous allons procéder
13 aujourd'hui.
14 Je souhaite vous rappeler qu'un appel n'est pas un procès de novo et
15 que les parties doivent s'abstenir de répéter les éléments de leur thèse
16 tels que présentés lors du procès. Les arguments doivent être circonscrits
17 à des erreurs de droit alléguées qui invalident le jugement de première
18 instance ou des erreurs alléguées de fait qui donnent lieu à un déni de
19 justice.
20 Pendant toute la durée de cette audience, les conseils peuvent faire
21 valoir des moyens d'appel qu'ils jugent utiles; cependant, j'enjoins les
22 conseils de ne pas répéter littéralement ou de nous présenter un argument
23 important des arguments déjà présentés dans leurs mémoires. La Chambre
24 d'appel connaît ces mémoires déjà présentés.
25 En outre, nous avons demandé aux parties de fournir des références
26 précises aux documents étayant leurs arguments oraux. Les Juges, bien
27 évidemment, peuvent interrompre les parties à tout moment pour poser des
28 questions ou peuvent poser des questions suite aux arguments présentés par
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1 les parties ou à la fin de l'audience.
2 Je souhaite rappeler aux parties de faire particulièrement attention
3 de ne pas révéler des éléments d'information qui permettraient d'identifier
4 un témoin protégé ou des informations confidentielles.
5 Et finalement, je souhaite porter à votre attention le calendrier qui
6 figure dans l'ordonnance modifiant l'ordonnance portant calendrier pour
7 cette audience en appel rendue le 30 juin 2015.
8 L'audience se déroulera comme suit : nous allons entendre les
9 arguments de l'Accusation pendant une heure et 30 minutes; nous aurons
10 ensuite une pause de déjeuner pendant une heure et 20 minutes; ensuite,
11 nous entendrons le conseil de M. Stanisic qui répondra pendant une heure;
12 ensuite, une pause de 20 minutes; et nous reprendrons avec la réponse du
13 conseil de M. Simatovic pendant une heure; nous aurons ensuite une pause de
14 20 minutes; et l'Accusation aura 30 minutes pour répliquer.
15 J'invite maintenant l'Accusation à présenter ses arguments. Vous avez
16 une heure et 30 minutes.
17 C'est à vous.
18 Mme JARVIS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président, Messieurs les
19 Juges.
20 L'Accusation a pris une mesure importante, à savoir d'appeler les
21 acquittements des accusés parce que le jugement de première instance
22 contient des erreurs graves. Ces erreurs entravent la justice et la
23 responsabilité en l'espèce et, à l'avenir, pourraient faire dérailler le
24 droit pénal international de façon très inquiétante.
25 Au cœur du problème se trouve un manquement très important de la part
26 de la majorité des Juges de prononcer un jugement sur les points essentiels
27 de l'espèce. Les accusés étaient des membres présumés d'une entreprise
28 criminelle commune dont l'objectif commun était de déplacer la majorité de
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1 la population non-serbe de régions importantes de Croatie et de Bosnie-
2 Herzégovine entre 1991 et 1995. En d'autres termes, une entreprise
3 criminelle commune sous la forme d'un nettoyage ethnique. Mais les éléments
4 de preuve concernant cet objectif criminel commun présenté par l'Accusation
5 lors du procès ne figurent pas dans l'analyse faite dans la majorité et, en
6 particulier, s'agissant de l'évaluation de l'intention partagée des
7 accusés. Dans cette affaire qui porte sur l'entreprise criminelle commune,
8 le jugement ne contient aucune constatation sur un quelconque objectif
9 commun, sa nature, sa durée, qui étaient les membres de l'entreprise
10 criminelle commune, quelles étaient les unités ou structures utilisées pour
11 mettre en œuvre leur objectif criminel.
12 Sans analyser l'intention des accusés à travers le prisme de cet
13 objectif criminel commun et, ce qui est encore plus important, à travers le
14 prisme de ce que les accusés connaissaient de cet objectif criminel, la
15 majorité s'est privée du compas dont elle avait besoin pour la guider dans
16 ses conclusions.
17 Je vais commencer nos arguments aujourd'hui en expliquant la gravité du
18 problème concernant la méthodologie de la Chambre de première instance et
19 l'issue à laquelle elle est parvenue et pourquoi il est tellement
20 important, Madame, Messieurs les Juges, de corriger cela.
21 M. Marcussen abordera ensuite plus en détail notre premier moyen d'appel
22 concernant l'entreprise criminelle commune. Il expliquera comment,
23 nonobstant quelques références en passant à l'objectif criminel commun de
24 façon abstraite, la majorité a omis d'appliquer comme il se doit l'objectif
25 criminel commun et d'analyser l'intention partagée des accusés. C'est la
26 raison pour laquelle la majorité a commis une erreur. Il va démontrer
27 comment, s'ils ne s'étaient pas trompés, ils auraient tenu compte du
28 caractère systématique des crimes, l'intention des autres membres de
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1 l'entreprise criminelle commune et, ce qui est plus important, la
2 connaissance des accusés de l'objectif criminel commun.
3 Il va montrer comment la majorité a évalué les contributions soutenues des
4 accusés à cela à la lumière de leurs connaissances de cet objectif criminel
5 commun, et la déduction de leur intention partagée était donc inévitable.
6 S'agissant du moyen d'appel numéro 2, un argument alternatif sur la
7 complicité par aide et encouragement, nous allons nous reposer sur des
8 arguments qui figurent dans notre mémoire en appel. Je souhaite ajouter que
9 nous savons aujourd'hui que la complicité par aide et encouragement, les
10 acquittements sur ce point en l'espèce sont viciés par la condition de la
11 visée spécifique qui a été rejetée.
12 Comme l'a déterminé la Chambre d'appel dans l'affaire Sainovic,
13 paragraphe 1 649 de l'arrêt, et confirmé dans l'affaire Popovic, arrêt
14 paragraphe 1 758, la visée spécifique ne constitue pas un élément
15 constitutif de la complicité par aide et encouragement en vertu du droit
16 international coutumier.
17 S'agissant du chef 1 [comme interprété] de notre appel, nous allons
18 présenter d'autres arguments aujourd'hui, mais nous allons nous reposer
19 essentiellement sur les arguments qui figurent dans notre mémoire sur ce
20 point.
21 Après les arguments présentés sur les moyens d'appel numéro 1 par M.
22 Marcussen, je vais conclure nos arguments en parlant de la question du
23 recours.
24 Et si vous êtes d'accord, Madame, Messieurs les Juges, pour dire que
25 les problèmes dans ce jugement doivent être réglés, puisque cela doit être
26 fait de façon équitable et convenable, pourquoi le jugement est-il erroné ?
27 Nous allons commencer, Madame, Messieurs les Juges, par vous expliquer ce
28 qui ne va pas concernant le jugement rendu par la majorité. L'Accusation a
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1 pris de sérieuses mesures pour faire appel de ces acquittements.
2 Mais, Madame, Messieurs les Juges, cette affaire porte sur une
3 compagne ethnique qui a été lancée contre la population non-serbe de
4 Croatie et de Bosnie-Herzégovine entre 1991 et 1995. La Chambre avait à se
5 prononcer sur les questions fondamentales de savoir comment le nettoyage
6 ethnique a été mené, qui était derrière cela et, ce qui est encore plus
7 important, le rôle joué par M. Stanisic et M. Simatovic et les unités
8 spéciales qu'ils dirigeaient et qu'ils soutenaient. Des réponses
9 satisfaisantes à ces questions ne figurent pas dans le jugement.
10 Les éléments de preuve ont montré que ces deux individus fort
11 influents et très informés - Stanisic, à la tête du service de Sûreté de
12 l'Etat, et Simatovic, qui était son bras droit et son homme de confiance -
13 étaient très impliqués dans ce mécanisme par lequel la campagne de
14 nettoyage ethnique a été réalisée. Ils étaient partout. Ils ont créé,
15 formé, financé, armé, étayé, assisté et étaient liés d'une manière ou d'une
16 autre à toutes ces formations qui faisaient partie intégrante du processus
17 de nettoyage ethnique, ce qui comprenait notamment des groupes tristement
18 célèbres tels que les Tigres d'Arkan, également connus sous le nom de la
19 SDG, et effectivement leur propre unité, les Bérets rouges.
20 Les éléments de preuve montrent que les accusés étaient impliqués
21 dans les formations qui commettaient les crimes, tout d'abord en Croatie -
22 dans la Région autonome serbe de Krajina, la Région autonome en Croatie
23 orientale, également la SBSO de la SAO - et ensuite en Bosnie-Herzégovine.
24 Leur participation suivait de près ces hauts lieux du nettoyage ethnique au
25 fur et à mesure que la compagne se déroulait pendant plus de quatre ans.
26 En Krajina, ils ont formé du personnel qu'ils ont ensuite engagé dans
27 ce nettoyage ethnique. Etant au courant de ces crimes, ils ont appliqué ce
28 même modèle de formation à la SBSO de la SAO en Bosnie-Herzégovine où un
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1 nettoyage ethnique analogue s'est déroulé. Ils étaient au courant du
2 nettoyage ethnique et de ce programme de personnes avec lequel ils
3 travaillaient étroitement : Martic, Babic, Hadzic, Karadzic, Mladic,
4 Milosevic, Arkan. Ils étaient au courant des crimes qui étaient
5 systématiquement commis dans ces trois régions à la recherche de cet
6 objectif et ont continué à fournir leur aide encore, encore et encore.
7 Pourquoi la majorité a-t-elle estimé que les accusés n'étaient pas
8 responsables en tant que membres de l'entreprise criminelle commune ?
9 Dans notre mémoire en appel, nous avons identifié de multiples
10 erreurs juridiques et factuelles. Celles-ci comprennent l'analyse
11 parcellaire de la Chambre de première instance qui n'a pas permis de
12 comprendre la cohérence des éléments de preuve indirects fournis par
13 l'Accusation. Nous maintenons nos arguments sur toutes les erreurs que nous
14 évoquons dans notre mémoire en appel.
15 Mais aujourd'hui, je souhaite me consacrer sur le manquement de la
16 majorité des Juges à appliquer l'objectif criminel commun s'agissant de
17 l'analyse à travers le prisme de l'intention partagée des accusés.
18 Le verdict rendu dans cette affaire portant sur l'entreprise
19 criminelle commune repose sur une déduction faite par une majorité de
20 Juges, que les accusés avaient peut-être simplement l'intention de mener
21 des actions militaires légales et qu'il était possible de façon raisonnable
22 de considérer qu'ils n'ont cherché à aider à établir un contrôle
23 territorial serbe juridique. Confer les paragraphes du jugement en première
24 instance 2 326, 2 330, 2 332 et 2 334. C'est une conclusion à laquelle la
25 majorité n'aurait pas pu parvenir si elle avait analysé les contributions
26 et les déclarations des accusés à travers le prisme de cet objectif
27 criminel commun.
28 Elle s'est penchée sur les événements de façon abstraite. La Chambre
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1 a présenté une situation par le biais de laquelle l'objectif du contrôle
2 territorial pouvait être distinct des crimes commis. Mais l'objectif des
3 forces serbes, leur objectif commun, n'était jamais limité à la prise de
4 contrôle du territoire par des moyens militaires légaux. Il s'agissait de
5 prendre et de maintenir le contrôle sur un territoire que revendiquaient
6 les Serbes en procédant à un nettoyage ethnique de la population non-serbe
7 qui y vivait.
8 Les dirigeants serbes avaient l'intention de prendre et de maintenir
9 le contrôle du territoire qu'ils convoitaient pour leur Etat serbe habité,
10 comme c'était le cas, par un nombre important de non-Serbes en changeant de
11 façon permanente la répartition démographique. Les membres de l'entreprise
12 criminelle commune avaient l'intention de recomposer sur un plan ethnique
13 l'ensemble de la population pour garantir une majorité écrasante des Serbes
14 dont ils avaient besoin pour continuer à asseoir leur contrôle. Et pour ce
15 faire, toute personne impliquée devait être au courant des crimes de
16 transfert forcé, d'expulsion et d'autres crimes violents nécessaires pour
17 terroriser ou sinon contraindre la population non-serbe à partir. Personne
18 d'impliqué dans ces opérations de contrôle territorial qui ont donné lieu à
19 des expulsions massives et autres crimes violents n'aurait pu avoir pour
20 intention une simple activité militaire légale. Ceci est divorcé de la
21 réalité.
22 Effectivement, si c'était vraiment le cas, que les accusés avaient
23 simplement à l'esprit une activité militaire légale et n'avaient pas
24 l'intention de procéder à un nettoyage ethnique, cela reviendrait à un
25 contrôle territorial. Nous nous attendrions dans ce cas à ce que l'accusé
26 réfute les crimes et le déplacement de la population non-serbe. En lieu et
27 place de cela, ils ont continué à soutenir la mise en oeuvre de
28 l'entreprise criminelle commune pendant un certain nombre d'années par le
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1 biais de leur contribution aux forces serbes qui commettaient ces crimes.
2 Leur manquement à l'application d'un objectif criminel commun par le
3 prisme qui aurait dû être le cas révèle que la majorité n'était au courant
4 que d'un risque -- qu'il y avait risque de crimes qui auraient pu se
5 produire.
6 Mais qu'il y avait un véritable contrôle territorial et que les
7 crimes étaient raisonnablement prévisibles aux accusés. Confer le jugement
8 en première instance, paragraphes 2 323, 2 332, 2 333. Madame, Messieurs
9 les Juges, c'est le caractère même de cet objectif criminel commun qui rend
10 les crimes tels qu'ils sont; c'est pas le risque qui est pris en compte.
11 Pour illustrer l'incidence de ce manquement à l'analyse d'un objectif
12 criminel commun, je vais vous citer un exemple hypothétique assez simple.
13 Les accusés conduisent deux hommes armés à une banque et ensuite les
14 déposent. Un des accusés conduit le véhicule, bien sûr, ceci n'a rien
15 d'illégal. Mais si vous appliquez l'analyse qui est celle de la majorité,
16 vous concluez que l'accusé était au courant du risque que des crimes qui
17 auraient pu être commis, un risque que ces hommes armés allaient cambrioler
18 la banque, mais la majorité fait valoir qu'il existe cette possibilité que
19 c'est tout à fait raisonnable que les accusés avaient peut-être intention
20 de commettre quelque chose qui était légal en les transportant jusqu'à la
21 banque et ne partageaient pas donc l'intention de commettre ce cambriolage
22 de la banque.
23 Si nous ajoutons que les accusés étaient au courant de cet objectif
24 et qu'il fallait se rendre à la banque et qu'il y avait un cambriolage qui
25 allait se dérouler, la déduction de l'intention des accusés était tout à
26 fait différente. Certainement, Madame, Messieurs les Juges, si les accusés
27 ont conduit ces hommes armés dans différentes banques pendant l'année
28 suivante en sachant qu'ils allaient commettre un cambriolage, et comme ça
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1 avait été le cas dans les occasions précédentes, les conclusions sont
2 inévitables que l'accusé agissait conjointement et avait l'intention de
3 commettre ces crimes.
4 Et seulement si on ne regarde pas la situation par l'optique de
5 l'objectif criminel commun que nous pouvons arriver à la conclusion que les
6 accusés ne pouvaient avoir que l'intention d'un objectif légal.
7 Ce qui m'amène au problème-clé pour ce qui est de l'analyse de
8 l'intention partagée par la majorité dans cette affaire. Non seulement la
9 majorité des Juges ne s'est pas prononcée sur l'existence de l'objectif
10 criminel commun mais elle n'a pas également considéré dans son analyse de
11 l'intention partagée si les accusés étaient au courant ou savaient qu'il
12 existait l'objectif criminel commun, si les accusés savaient que la prise
13 du contrôle et le maintien du contrôle sur le territoire serbe en Croatie
14 et en Bosnie-Herzégovine allait provoquer inévitablement la commission des
15 crimes qui nécessitaient l'expulsion de la population non-serbe.
16 C'est la question fondamentale qui n'a pas été décidée lors du
17 processus de la détermination de la responsabilité pénale des accusés pour
18 les crimes qui lui sont imputés. Les accusés qui savaient que le contrôle
19 du territoire entraînerait inévitablement la commission des crimes, ensuite
20 contribuer de façon répétée à la réalisation de l'objectif criminel commun
21 nous fournissent une base convaincante pour arriver à la conclusion qu'ils
22 partageaient l'intention pour ce qui est de la réalisation de l'objectif
23 criminel commun, ce qui a été ignoré dans l'analyse dans la majorité.
24 Pour résumer, Madame, Messieurs les Juges, les questions essentielles
25 liées dans cette affaire concernant l'objectif criminel commun, ensuite la
26 connaissance des accusés pour ce qui est de cet objectif, et l'incidence de
27 cela sur leur intention partagée n'avait pas été considérée ou résolue.
28 C'est pour cela que nous avançons qu'une erreur de droit a été commise
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1 puisqu'il n'y avait pas de l'opinion motivée et que cela n'a pas été décidé
2 par rapport à cela.
3 Donc je fais référence, Madame, Messieurs les Juges, par exemple, à l'arrêt
4 Kvocka, paragraphe 23, où il est souligné qu'il est demandé à une Chambre
5 de première instance d'arriver à des conclusions sur "les faits qui sont
6 essentiels pour déterminer la culpabilité pour ce qui est d'un chef
7 d'accusation concret," et si cela n'est pas fait, cela représente une
8 erreur de droit. Ensuite dans l'arrêt Gotovina, paragraphe 12, où il est
9 confirmé que s'il y a une absence d'opinion motivée, on peut arriver à la
10 conclusion que "des questions pertinentes, conclusions pour ce qui est des
11 faits ou des arguments n'avaient pas été abordés."
12 Donc la majorité ne s'est pas posée de questions essentielles concernant
13 l'objectif criminel commun, la majorité n'a pas examinée des pièces à
14 conviction cruciales, ce qui aggrave l'erreur de droit et la Chambre n'a
15 pas donné l'opinion motivée. Par exemple, comme M. Marcussen va expliquer
16 plus tard, la majorité ne fait pas de référence au scénario des crimes
17 commis en Croatie et en Bosnie-Herzégovine dans son analyse de l'intention
18 partagée ou comment les actions des accusés et les formations qu'ils
19 dirigeaient rentrent dans ce contexte et dans le contexte du soutien de ce
20 scénario des crimes. Donc la Chambre de première instance n'a pas abordé
21 des moyens de preuve principaux concernant l'intention des membres de
22 l'entreprise criminelle commune pour montrer leur objectif qui était de
23 maintenir le contrôle sur le territoire saisi par le nettoyage ethnique.
24 Pourquoi c'est important de réparer cela, d'abord il y a deux raisons pour
25 cela, et ces erreurs commises par la majorité des Juges dans le jugement
26 doivent être corrigées. D'abord, pour sauvegarder la direction du
27 développement future du droit pénal international. Dans cette affaire, il y
28 a beaucoup des décisions précédentes qui posent problèmes mais je vais
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1 souligner seulement deux.
2 Pour ce qui est de la responsabilité des membres de l'entreprise criminelle
3 commune, si l'approche de la majorité reste le même à l'avenir, cela peut
4 saper le cadre de la doctrine de cette entreprise criminelle commune, parce
5 que l'une des caractéristiques essentielles de cette entreprise criminelle
6 commune est que si l'on regarde la conduite qui a l'air seulement d'être
7 légale, lorsqu'on l'observe séparément, on se rend compte que cette
8 conduite devient criminelle lorsque l'on observe dans le contexte et dans
9 le contexte des plans criminels qui sont révélés. Dans mon exemple de hold-
10 up hypothétique de la banque, il s'agit apparemment d'un acte légal de
11 conduire jusqu'à la banque, mais si on observe cela dans le contexte il
12 s'agit de la contribution à l'exécution du plan de commettre le hold-up de
13 la banque.
14 La doctrine de l'entreprise criminelle commune est importante vu la nature
15 des crimes commis la plupart du temps dans des situations de guerre, où
16 souvent il y a des plans criminels à grande échelle avec des participants
17 multiples, dont beaucoup contribuent à la commission des crimes, de façon
18 perçue séparément, n'apparaissent pas comme étant criminels. Mais
19 l'approche de la majorité dans cette affaire, donc, met en question la
20 raison de l'existence de la responsabilité pour la participation à
21 l'entreprise criminelle commune.
22 Au lieu de regarder comment les contributions des accusés ont facilité la
23 mise en œuvre de l'objectif criminel commun dans sa totalité, la majorité
24 s'est seulement concentrée sur le fait de savoir s'il y avait un lien
25 direct entre les agissements des accusés et des crimes précis. Et au lieu
26 d'évaluer le rôle de l'unité des accusés et le rôle joué dans la
27 réalisation de l'objectif criminel commun, la majorité s'est concentrée de
28 façon très stricte et étroite sur des occasions où les membres de l'unité
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1 ont commis directement des crimes.
2 Et en adoptant cette approche, la majorité donc a fait transposer une sorte
3 de zone protectrice importante pour ce qui est des responsables hauts
4 placés. Et plus la position était élevée, plus leur conduite s'éloignait de
5 la commission directe des crimes. Et c'est seulement si on regarde que
6 souvent des actes neutres pris dans le contexte semblent avoir le rôle pour
7 ce qui est de l'objectif criminel est révélé.
8 Et le Juge Picard a dit dans son opinion dissidente dans cette affaire en
9 citant le Juge Jackson que : L'approche dans la majorité mène à la place de
10 cela dans le domaine où "le droit s'applique seulement sur peu d'hommes et
11 --"
12 Bon, pour ce qui est des cas impliquant les actions militaires, l'approche
13 de la majorité également pose des problèmes pour ce qui est du droit pénal
14 international puisque pour ce qui est des répercussions de cela sur les
15 activités de combat ou militaire, un scénario fréquent apparaît dans les
16 affaires pour ce qui est du droit pénal international.
17 Nous acceptons, bien sûr, que les activités militaires qui sont tout à fait
18 légales, en conformité avec le droit pénal humanitaire international, ne
19 peuvent pas être rendues illégales dans le cadre du droit pénal
20 international. Pas toutes les activités militaires ne sont légales pour ce
21 qui est du droit de international humanitaire. Dans cette affaire,
22 lorsqu'on analyse cela dans le contexte de tous les moyens de preuve
23 concernant leur objectif criminel commun, il est clair que les opérations
24 concernant la prise du pouvoir et le contrôle du pouvoir étaient menées
25 dans le processus de nettoyage ethnique. Et ces opérations étaient dirigées
26 contre les civils non-serbes.
27 La majorité ne s'est pas penchée sur les liens entre les questions
28 militaires ou les actions de combat comme étant des actions possiblement
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1 légales. Paragraphes 2 327 jusqu'à 2 330. Dans le contexte de scénario de
2 crimes répétés et systématiques par rapport aux opérations militaires,
3 cette conclusion n'est pas raisonnable. Si cela n'est pas corrigé, cette
4 approche pourrait avoir des conséquences dévastatrices pour ce qui est du
5 droit pénal international. Mais encore, le plus important pour ce qui est
6 de la justice rendue aux victimes et pour ce qui est de la responsabilité
7 de ces deux accusés, Madame, Messieurs les Juges, la raison la plus
8 importante pour prendre des mesures pour corriger ces erreurs dans cette
9 affaire est d'assurer qu'un processus de justice soit assuré pour les
10 victimes. Et là, je parle des manquements sérieux pour ce qui est des
11 questions essentielles qui sont les questions-clés dans cette affaire. La
12 décision n'a pas été rendue par rapport à ces questions-clés. Cela, donc,
13 n'a pas permis aux victimes de voir quel était le rôle que ces deux accusés
14 ont joué dans les crimes qui leur sont imputés.
15 La tragédie provoquée par les membres de l'entreprise criminelle
16 commune dans la Région autonome serbe de Krajina, en Slavonie, Baranja et
17 Srem occidental, ainsi qu'en Bosnie-Herzégovine entre 1991 et 1995 était
18 immense. Plus de 100 000 gens ont été terrorisés, déracinés de leurs
19 domiciles et de leurs communautés et expulsés de façon violente. Les
20 événements ont dévasté des dizaines de villes et de villages partout dans
21 la zone des républiques serbes autoproclamées en Croatie et en Bosnie-
22 Herzégovine pendant une période de plus de quatre ans. La Chambre de
23 première instance avait versé des documents concernant plus de 270 meurtres
24 commis par les forces serbes concernant les incidents qui sont retenus dans
25 l'acte d'accusation.
26 M. LE JUGE POCAR : [aucune interprétation]
27 Mme JARVIS : [aucune interprétation]
28 M. LE JUGE AFANDE : Oui, bonjour, Madame le Procureur. -- à une banque sans
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1 que ces personnes commettent -- je ne vois pas très bien le parallèle entre
2 cet exemple et puis le cas d'espèce.
3 Si vous pouvez clarifier ça. Merci.
4 Mme JARVIS : [interprétation] Merci, Monsieur le Juge.
5 En effet, théoriquement parlant, cela serait possible de voir que des gens
6 soient conduits de façon légale jusqu'à la banque et qu'ils ne commettent
7 pas le hold-up de la banque. Bien sûr, le fait que deux hommes, dans un
8 exemple hypothétique, soient armés est un fait suffisant pour savoir qu'il
9 y a un risque ou une possibilité que dans de telles circonstances on puisse
10 penser qu'ils se rendent à la banque pour commettre un hold-up, mais cela
11 n'est pas certain. Mais je pense que cet exemple nous amène à la conclusion
12 que dans ce contexte on ne peut pas considérer comme certain que ces deux
13 hommes vont commettre le hold-up; mais il y a des indices dans de telles
14 circonstances qui nous suggèrent que c'est une possibilité, que c'est un
15 risque, et qu'on peut prévoir cela de façon raisonnable, et c'est
16 exactement le cadre d'analyse qu'on voit dans le jugement de première
17 instance.
18 Nous voyons que la majorité de la Chambre regarde s'il y a des
19 indices qui suggèrent qu'un risque existe, un risque de commission des
20 crimes, et ensuite ils examinent les faits concernant certaines opérations
21 - Doboj est un bon exemple - où les accusés étaient au courant du fait que
22 des crimes avaient été commis, et donc il y avait un risque que des crimes
23 allaient être commis puisque juste avant cette opération des crimes avaient
24 été commis.
25 Nous voyons là l'incidence de l'analyse erronée de l'objectif
26 criminel commun. Puisque si la Chambre de première instance avait considéré
27 que l'objectif criminel commun existait, si la Chambre était partie de
28 cette thèse, à savoir que l'objectif des opérations était le contrôle et le
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1 maintien du territoire par le nettoyage ethnique, alors il n'y aurait peut-
2 être pas de risque de commission de crimes. Il s'agirait plutôt d'une
3 certitude que des crimes allaient être commis. Et c'était l'objectif de
4 l'envoi des unités sur ce territoire, l'objectif des opérations pour
5 prendre contrôle du territoire pour changer la composition ethnique de ce
6 territoire.
7 Mais peut-être que nous pouvons développer encore davantage cet
8 exemple pour ce qui est du hold-up de la banque pour que cela soit utile à
9 vous. Supposons qu'au lieu de conduire les accusés à la banque -- à savoir,
10 les accusés qui conduisent en voiture deux hommes armés à la banque, les
11 accusés ont entraîné les deux hommes armés à comment utiliser les armes à
12 feu et comment mettre l'argent dans des sacs. Donc, entraîner quelqu'un à
13 comment utiliser une arme à feu, ce n'est pas en soi illégal. Mais si on
14 considère cela séparément, vous pouvez arriver à la conclusion que les
15 accusés avaient l'intention de commettre le hold-up de la banque. Et si
16 vous ajoutez le moyen de preuve concernant l'objectif criminel commun,
17 concernant le plan de commettre le hold-up de la banque, évidemment, cette
18 conduite et cet entraînement de ces deux hommes pour utiliser des armes à
19 feu représentent une contribution à la réalisation de ce hold-up. Et
20 certainement, si cela se reproduit encore une fois et encore une fois, les
21 accusés, dans ce cas-là, savent que ce résultat est inévitable, à savoir
22 leur objectif criminel commun.
23 Et c'est pour cela que nous savons que dans cette situation les
24 accusés auraient dû savoir que leur objectif criminel commun existait. M.
25 Marcussen va développer cela plus plus tard, que parmi les gens bien
26 informés dans ces trois localités où la campagne de nettoyage ethnique
27 s'est déroulée, ils continuent à contribuer à la réalisation de cet
28 objectif, de les équiper pour pouvoir prendre le contrôle du territoire en
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1 procédant à des opérations. Ils savaient que des crimes étaient commis et
2 ils savaient que leur objectif était de mener les opérations pour contrôler
3 le territoire. Et dans ce contexte, on arrive à la conclusion inévitable, à
4 savoir qu'ils avaient l'intention de commettre ces crimes.
5 J'espère que je vous ai été utile, Monsieur le Juge.
6 M. LE JUGE AFANDE : [hors micro]
7 M. MARCUSSEN : [interprétation] Madame, Messieurs les Juges, comme Mme
8 Jarvis l'a expliqué, les Juges de la Chambre de première instance ont
9 commis une erreur de droit en ne se prononçant pas sur un aspect central de
10 la thèse de l'Accusation, c'est-à-dire l'existence et la nature de
11 l'objectif criminel commun, et plus important encore, les Juges de la
12 Chambre ne se sont pas prononcés sur la connaissance qu'avaient les accusés
13 de cet objectif criminel commun.
14 Alors, pourquoi était-ce nécessaire que la Chambre de première instance en
15 l'espèce détermine si un objectif criminel commun avait existé et si les
16 accusés étaient au courant des actions qui y contribuaient ? Eh bien, cela
17 était nécessaire parce que si l'accusé avait été au courant de l'existence
18 de l'objectif criminel commun et avait contribué de façon répétée à son
19 exécution, la seule déduction possible raisonnable était de dire que
20 l'accusé avait partagé l'intention que ces crimes soient commis, crimes de
21 l'objectif criminel commun. Mais au lieu de se pencher sur les actes de
22 l'accusé à la lumière de l'objectif criminel commun, les Juges de la
23 Chambre se sont penchés sur différents morceaux des éléments de preuve
24 séparément et isolément. Ils se sont penchés sur les déclarations de
25 l'accusé sans tenir compte du contexte dans lequel elles ont été
26 prononcées. Elle s'est penchée sur la formation de l'accusé des forces
27 serbes séparément et elle s'est penchée sur le soutien apporté à Milan
28 Martic et, en SAO de Krajina, à la police qui avait commis les crimes de
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1 masse en Krajina, et ce, séparément. Et elle s'est penchée sur les crimes
2 de l'unité de l'accusé séparément. Mais la majorité des Juges ne s'est
3 jamais penchée sur les déclarations de l'accusé et sur les actes ensemble
4 et n'a pas mis tout cela dans le contexte de l'objectif criminel commun.
5 Les Juges de la Chambre de première instance ne se sont pas également
6 penchés sur les éléments de preuve significatifs qui auraient exigé une
7 analyse des conclusions pour bien comprendre les déclarations de l'accusé
8 et ses actes dans ce contexte. Par exemple, les Juges de la Chambre n'ont
9 pas tenu compte d'éléments de preuve au dossier prouvant les objectifs
10 stratégiques des dirigeants serbes de Bosnie, notamment le nettoyage
11 ethnique du territoire proclamé serbe. Nulle part dans le jugement ces
12 éléments de preuve ne sont repris.
13 En conséquence, les Juges de la Chambre de première instance n'ont
14 pas apporté de conclusions sur des questions qui étaient essentielles pour
15 déterminer que l'accusé était coupable, et son analyse a été manifestement
16 inadéquate.
17 Dans son analyse sur l'intention partagée, par exemple, la majorité a fait
18 référence à "un objectif criminel commun allégué." Est-ce que cela voulait
19 dire que la majorité, dans le but de son analyse, était partie du fait que
20 l'on pouvait arguer de l'existence de cet objectif criminel commun ?
21 Eh bien, si cela était le cas, cela voudrait dire que la majorité a accepté
22 que le plan des dirigeants serbes consistait à prendre le contrôle et à
23 maintenir le contrôle du territoire serbe proclamé en Croatie et en Bosnie-
24 Herzégovine et du nettoyage ethnique de la population non-serbe; en
25 conséquence, toutes les opérations de prise dans l'acte d'accusation
26 impliquaient de façon inhérente un nettoyage ethnique de la population non-
27 serbe. Cela étant, les Juges de la Chambre ont conclu que l'accusé n'était
28 au courant que d'un risque de crime, pas d'une certitude de crime ayant
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1 lieu, et que l'accusé aurait pu avoir l'intention uniquement d'une activité
2 militaire légitime.
3 Alors, il y a deux façons uniquement pour les Juges de la Chambre d'arriver
4 à ces conclusions. La première hypothèse c'est que la majorité n'a pas
5 donné un crédit plein et entier à l'objectif criminel commun, parce que si
6 elle l'avait fait, elle aurait dû partir du principe que le crime faisait
7 partie inhérente des prises et qu'en conséquence, il était sûr que les
8 crimes allaient être commis et que ce n'était pas uniquement un risque.
9 La seule autre façon pour les Juges d'arriver à une telle conclusion est
10 d'arriver à la conclusion que l'accusé n'était pas au courant du fait que
11 le nettoyage ethnique faisait partie intégrante des opérations de prise de
12 contrôle; autrement dit, les Juges de la Chambre de première instance
13 auraient conclu que les accusés n'étaient pas au courant de l'existence de
14 l'objectif criminel commun.
15 Les deux possibilités sont erronées. La majorité a omis de décider sur deux
16 points essentiels en l'espèce. Si la majorité n'a pas conclu qu'il y a eu
17 l'existence de l'objectif criminel commun, elle aurait dû faire des
18 conclusions au sujet de son existence. Cependant, il n'y a pas de
19 conclusions au sujet de l'existence de l'objectif criminel commun dans le
20 jugement.
21 Si la majorité était arrivée à la conclusion que les accusés n'étaient pas
22 au courant de l'existence de l'objectif criminel commun, la majorité aurait
23 dû faire des conclusions à cet effet. Cependant, ceci n'existe pas dans le
24 jugement, il n'y a pas de conclusions au sujet de leur connaissance de
25 l'existence de l'objectif criminel commun. Donc la Chambre n'a pas donné de
26 jugement raisonnable.
27 Si la Chambre de première instance n'avait pas fait d'erreur, elle serait
28 arrivée à la conclusion que Stanisic et Simatovic avaient l'intention de
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1 commettre les crimes qui font partie de l'entreprise criminelle commune, à
2 savoir : un modèle cohérent de la commission des crimes contre la
3 population non-serbe dans chacune des zones; la connaissance des accusés du
4 modèle des crimes et de l'intention des autres membres de l'entreprise
5 criminelle commune; et ensuite, leur contribution continue sur plusieurs
6 années à mettre en œuvre leur région dominée par les Serbes en commettant
7 des crimes.
8 La seule conclusion logique à laquelle ils auraient dû arriver, c'est que
9 les accusés avaient l'intention d'utiliser les crimes pour aboutir au
10 contrôle territorial. Tout d'abord, on peut examiner les crimes et leur
11 modèle.
12 La Chambre est arrivée à la conclusion qu'il y a eu une attaque à grande
13 échelle de caractère discriminatoire sur la population civile habitant
14 toutes les zones couvertes par l'acte d'accusation; jugement, 971 et 1251.
15 Les conclusions de la Chambre dans le volume I trouvent que ces attaques
16 ont suivi un modèle de commission qui a été répété dans chacune des zones
17 cibles. Dans la SAO Krajina, la population non-serbe a fui à cause des
18 attaques sur les villages et sur les villes qui avaient une population
19 croate complète ou importante. Les meurtres, l'utilisation en tant que
20 bouclier humain, la détention, passages à tabac, travaux forcés, abus
21 sexuels et autres formes de harcèlement, la destruction et pillage des
22 biens, tous ces crimes ont été commis par la JNA, par la TO de la SAO
23 Krajina, par la police de la SAO Krajina, y compris Milan Martic, par les
24 unités paramilitaires serbes, mais aussi par les autorités serbes du cru;
25 paragraphes 401 et 404 [comme interprété].
26 Ces crimes ont suivi le même modèle dans la SAO SBSO. Des milliers de non-
27 Serbes ont fui la région à cause des transferts par la force des autres, la
28 détention, pillage, restriction de la circulation et de la liberté, travaux
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1 forcés, passages à tabac, meurtres, menace et harcèlement perpétrés par la
2 JNA, par les volontaires serbes, par les autorités locales, les
3 paramilitaires, la SNB, la police, la TO et la Garde volontaire d'Arkan.
4 Vous allez trouve cela au paragraphe 578.
5 Et puis, ce même modèle de la commission de crimes a été suivi dans les
6 municipalités qui se trouvent couvertes par l'acte d'accusation, les
7 municipalité de Bosnie-Herzégovine, en commençant par Bijeljina. A Bosanski
8 Samac, de nombreuses personnes ont quitté la ville, et c'était le résultat
9 de l'attaque menée par différentes forces serbes, y compris la JNA,
10 l'unité, la police serbe et la TO. L'attaque et la prise de contrôle ont
11 compris différents crimes, à savoir les gens étaient chassés de chez eux.
12 Les non-Serbes ont été arrêtés de façon arbitraire, placés en détention,
13 passés à tabac, ont subi du harcèlement sexuel et ils ont été menacés, y
14 compris par l'unité et par les autorités serbes du cru. Et là, je fais
15 référence au fait 254 [comme interprété] qui se trouve dans le volume IV et
16 dans le jugement au paragraphe 584, note de bas de page 1207, ainsi que les
17 paragraphes du jugement 654, 684, 685 et 1 081.
18 La Chambre de première instance a accepté le fait jugé suivant :
19 "Un modèle clairement reconnaissable de l'activité criminelle qui nous
20 permet d'arriver à une seule conclusion raisonnable, à savoir que ces
21 crimes ont été commis avec l'objectif de mettre en œuvre le plan
22 stratégique des dirigeants des Serbes de Bosnie visant à prendre le
23 contrôle du territoire réclamé par les Serbes de Bosnie à l'intérieur de la
24 Bosnie-Herzégovine avec l'objectif de chasser de façon permanente la
25 plupart de la population non-serbe de ce territoire", c'est quelque chose
26 que vous aller trouver dans le fait jugé numéro 231 [comme interprété].
27 Donc la conclusion à laquelle ils auraient dû arriver sur la base de ce
28 modèle de conduite répété dans toute la zone couverte par un acte
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1 d'accusation et que les crimes faisaient partie intégrante de la mise en
2 œuvre et du maintien du contrôle serbe, les accusés savaient que ces crimes
3 qui étaient en train d'être commis faisaient partie intégrante de
4 l'objectif commun de créer ces territoires serbes. L'échelle de ces crimes,
5 des crimes commis et le modèle clair des crimes commis en Croatie et en
6 Bosnie-Herzégovine rend inconcevable la possibilité que les accusés
7 n'étaient pas au courant de cela.
8 Stanisic et Simatovic avaient les fonctions qui exigeaient qu'ils
9 soient très bien informés, la Chambre est arrivé aux conversations
10 suivantes. L'accusé savait à partir du mois d'avril 1991 que Milan Martic
11 avait l'intention de déporter la population non-serbe de Krajina. Ils
12 savaient que la police de la SAO Krajina a commis de nombreux meurtres et a
13 persécuté, a expulsé entre 80 et 100 000 Croates et autres civils non-
14 serbes. C'est quelque chose que vous allez trouver dans le jugement aux
15 paragraphes 2 331 et 2 332.
16 Ensuite, les accusés savaient que leur unité avait commis des crimes
17 à Bosanski Samac au mois d'avril 1992, ils ont envoyé cette même unité à
18 Doboj au début du mois de mai 1992 où cette unité a également commis des
19 crimes. Jugement, au paragraphe 2 323. Ensuite, les accusés étaient au
20 courant des crimes commis par Arkan et par la Garde volontaire serbe dans
21 la SBSO entre le mois de septembre 1991 et le mois d'avril 1992 et à
22 Bijeljina et à Zvornik entre le mois d'avril et le mois de septembre 1992.
23 Le paragraphe du jugement 2 333.
24 Simatovic et les autres opérationnels de la DB étaient présents
25 partout dans la zone couverte par l'acte d'accusation, c'est quelque chose
26 qui est illustré dans le mémoire d'appel de l'Accusation annexe A. Les
27 accusés étaient parmi les personnes les mieux informées des événements sur
28 le terrain.
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1 Les accusés étaient "en contact direct et fréquent" avec les membres
2 de l'entreprise criminelle commune, tels que Hadzic, Karadzic, Martic, et
3 Babic, qui étaient les dirigeants serbes en Croatie et en Bosnie-
4 Herzégovine; c'est quelque chose qui figure au paragraphe 2 302. Vous allez
5 vous rappeler, Messieurs et Madame les Juges, que la Chambre a accepté le
6 fait jugé qui dit que l'objectif des dirigeants serbes était "de créer un
7 Etat dans lequel il n'y aurait pas de place pour les non-Serbes", fait jugé
8 142, dans le volume 1.
9 Par rapport aux positions et contacts des accusés, ils auraient été
10 au courant du discours emblématique prononcé par Karadzic dans l'assemblée
11 de la Republika Srpska le 14 octobre 1991 où il a menacé d'extermination
12 les Musulmans de Bosnie s'ils choisissaient l'indépendance; paragraphe
13 [comme interprété] 940.
14 Stanisic a encore regardé Karadzic prévoir la mort de plusieurs
15 centaines de plusieurs milliers des personnes, la destruction totale de
16 plusieurs centaines de villes, et les déplacements massifs de la
17 population. Stanisic était d'accord avec ce que Karadzic a dit. Et là, je
18 vous demande de vous référer au mémoire en appel du Procureur paragraphe 26
19 ainsi qu'à la pièce à conviction P1483.
20 Stanisic a fait preuve de la même intention quand, quelques semaines
21 plus tard, il a dit à Karadzic qu'ils pourraient "les exterminer
22 complètement", il s'agissait d'une conversation qui portait sur les
23 Croates; pièce à conviction P690.
24 Il ne peut pas y avoir de doute aussi que les accusés étaient au
25 courant des six objectifs stratégiques des dirigeants serbes de Bosnie, qui
26 comprenait aussi le nettoyage ethnique. Stanisic a pris part à la réunion
27 qui a eu lieu à Belgrade le 13 et le 14 décembre 1993 et, parmi d'autres,
28 Milosevic, Mrksic, Karadzic, Krajisnik, et Mladic ont été présents, et ils
Page 29
1 ont discuté de la mise en œuvre de six objectifs stratégiques; pièce à
2 conviction P2532 pages 1 et 2, et jugement paragraphe 2 310.
3 Pour conclure, il ne peut pas y avoir de doute que l'accusé savait
4 que la création et le maintien des régions dominées par les Serbes
5 comprenaient ou présupposaient le nettoyage ethnique de la population non-
6 serbe de ces régions-là.
7 En sachant que le nettoyage ethnique de la population non-serbe
8 faisait partie intégrante de la création des régions serbes en Croatie et
9 en Bosnie-Herzégovine, les accusés ont continué à contribuer à cet
10 objectif. Par exemple, bien que déjà au mois d'avril 1991 ils savaient que
11 Martic avait l'intention de déporter la population non-serbe, les accusés
12 ont continué à aider Martic, appuyer Martic ainsi que la police de la SAO
13 Krajina et de la TO Krajina au cours de l'année suivante. Ils ont aidé
14 Martic de façon importante à mettre en œuvre la police de la Krajina,
15 Simatovic a pris part dans l'opération de Lovinac au mois de juin 1991, en
16 sachant quel était l'objectif criminel de l'attaque. Les accusés ont
17 organisé la participation de l'unité dans les opérations de Glina et de
18 Struga, et au cours de ces opérations la population non-serbe a été
19 expulsée.
20 Les accusés ont continué à organiser l'entraînement pour la police et
21 la TO de la SAO Krajina, et les accusés ont continué à armer et à fournir
22 en équipement et en hommes la TO de la Krajina jusqu'en avril 1992. En
23 sachant que les unités qu'ils ont entraînées dans la SAO Krajina ont commis
24 des crimes, ils ont continué à entraîner des unités de la SBSO et aussi le
25 long des frontières de la SBSO avec la Serbie, et ceci au mois de septembre
26 1991. Et tout en étant au courant des crimes commis en Krajina depuis le
27 mois d'avril 1991, ils ont aussi déployé l'unité pour participer aux
28 opérations de la SBSO au mois de septembre 1991.
Page 30
1 Les accusés ont aussi financé Arkan et sa Garde volontaire en 1994 et 1995,
2 y compris pendant la période où il y a eu des meurtres en masse de la
3 population non-serbe à Sanski Most en 1995. Ils savaient aussi qu'Arkan et
4 ses hommes ont commis des crimes dans la SBSO en 1991 à Bijeljina et à
5 Zvornik en 1992.
6 Ils ont déployé leur unité à Bosanski Samac au mois d'avril 1992 et à
7 nouveau à Doboj quelques semaines plus tard. Dans les deux villes, les
8 membres de l'unité étaient les bourreaux les plus redoutables de la
9 population non-serbe, la population civile. Ils ont aussi déployé l'unité à
10 Bratunac et à Skelani, cela faisait partie de l'opération Udar, attaques,
11 frappes au mois d'avril 1993, et "selon toute probabilité" ils savaient que
12 Mladic et Mrksic avaient l'intention d'y commettre le nettoyage ethnique et
13 ils savaient quel était l'historique des crimes commis par cette même unité
14 à Bosanski Samac et à Doboj.
15 Il découle clairement des conclusions de la Chambre de première instance
16 que les accusés ont contribué à répétition de la mise en place de la
17 population serbe sur des grandes parties de la Croatie et de Bosnie-
18 Herzégovine en sachant qu'en le faisant ils contribuaient au nettoyage
19 ethnique de ces zones. La seule conclusion qui découle d'une telle
20 connaissance et participation et que les accusés étaient au courant et
21 partageaient l'intention de l'objectif criminel commun.
22 Je voudrais ajouter que nous allons montrer un transparent quand nous
23 parlons de contributions où on fait des références nombreuses au jugement
24 et vous allez trouver cela -- j'aurais dû peut-être le dire depuis le
25 début. Je ne l'ai pas fait clairement, mais je vais vous fournir, après ma
26 présentation orale, des exemplaires de ces transparents, et comme ça vous
27 allez avoir tous les transparents. Et Mme Jarvis va utiliser ces
28 transparents plus tard.
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1 Madame, Messieurs les Juges, les Juges de la première Chambre sont arrivés
2 à la conclusion que les accusés ont pris part, et de façon volontaire, à la
3 perpétration de l'intention criminelle commune. Si vous accordez le moyen 3
4 de notre appel, d'autres contributions importantes doivent être ajoutées, à
5 savoir : l'aide importante que les accusés ont fournie pour créer et armer
6 les forces serbes dans la SBSO, l'armement de la TO de Zvornik, le
7 déploiement des volontaires d'Arkan dans la SBSO, à Bijeljina, Zvornik et à
8 Sanski Most où ils ont commis de nombreux crimes.
9 Madame, Messieurs les Juges, si les Juges de première instance avaient
10 réfléchi aux connaissances des accusés de l'existence de l'objectif
11 criminel commun, ils seraient arrivés à la conclusion que les accusés ont
12 partagé l'intention criminelle commune. Si vous n'êtes pas d'accord avec
13 cette erreur juridique, il s'agit certainement à ce moment-là d'une erreur
14 de fait. Aucun juge de fait raisonnable n'aurait pu conclure que les
15 accusés ne partageaient pas l'intention de l'objectif criminel commun au vu
16 des éléments de preuve du dossier en l'espèce.
17 Un exemple très clair de cette erreur de fait est la constatation de
18 la majorité qui précise que l'accusé savait qu'il y avait un risque de
19 commission de crimes par la police de Martic dans la Krajina et la police
20 de Krajina dans la SAO. Confer cette erreur au paragraphe 2 333 [comme
21 interprété]. La Chambre de première instance a conclu :
22 "En continuant à soutenir la police de Krajina de la SAO et à
23 coopérer avec Milan Martic à partir du mois d'avril 1991, l'accusé a pris
24 le risque que la police de Krajina de la SAO pouvait commettre des crimes
25 lors de l'établissement et du maintien du contrôle serbe dans de grandes
26 régions de Croatie."
27 La majorité a constaté que ceci ne suffirait pas à réunir les
28 conditions du critère de l'intention en vertu de l'entreprise criminelle
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1 commune numéro I. La Chambre a donc conclu qu'il y avait une autre
2 déduction raisonnable, à savoir que les accusés avaient l'intention
3 seulement d'aider les autorités de la Région autonome de Krajina pour
4 établir et maintenir le contrôle territorial. Mais la Chambre de première
5 instance a rendu ses conclusions, à savoir que les accusés connaissaient
6 les intentions de Martic qui visaient à expulser la population et savaient
7 également que Milan Martic et la police dans la Région autonome de la
8 Krajina étaient en train d'expulser et de maltraiter un nombre important de
9 non-Serbes. Les accusés n'ont pas pris le risque à savoir que des crimes
10 seraient commis. Ils étaient sûrs que des crimes seraient commis.
11 La conclusion de la majorité à savoir qu'il y avait seulement un
12 risque de crimes était manifestement déraisonnable. Compte tenu de l'appui
13 répété et important apporté à Milan Martic et à la police de la Krajina, la
14 seule conclusion possible était que les accusés avaient l'intention de
15 commettre ces crimes.
16 Madame, Messieurs les Juges, pour conclure, la Chambre de première
17 instance a déduit l'intention des accusés sans tenir compte de la question
18 pertinente, à savoir si les accusés étaient au courant de l'objectif
19 criminel commun, savaient que des crimes faisaient partie intégrante de la
20 réalisation du contrôle territorial en Croatie et en Bosnie-Herzégovine, ce
21 qui constitue le cœur de cette affaire. Ne pas aborder cette question a
22 également conduit à ce manquement à l'analyse des éléments de preuve
23 manifestement pertinents s'agissant de l'existence de cette entreprise
24 criminelle commune et, ainsi, de tenir compte de l'intention des accusés.
25 En ne rendant pas des conclusions sur ces faits qui sont essentiels à
26 la déclaration de culpabilité et en ne présentant pas une analyse
27 suffisante sur les éléments de preuve, la Chambre de première instance n'a
28 pas fourni d'opinion motivée. La Chambre de première instance a, par
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1 conséquent, commis une erreur de droit.
2 Comme je l'ai dit, Madame, Messieurs les Juges, si vous n'êtes pas
3 d'accord avec cette erreur de droit, l'Accusation a certainement démontré
4 que la Chambre de première instance a commis une erreur de fait et de
5 droit. Quoi qu'il en soit, l'analyse sur l'intention en l'espèce est bien
6 évidemment erronée, et ceci doit être corrigé.
7 Mme Jarvis va maintenant, Madame, Messieurs les Juges, aborder la
8 question du recours qui convient en l'espèce.
9 Mme JARVIS : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges,
10 comme on a déjà démontré dans nos arguments, dans le jugement il y a
11 beaucoup d'erreurs de fait qu'il faut corriger. Donc cela nous amène à la
12 question quelle est la solution et ce qui devrait être fait.
13 Si le résultat de la réparation des erreurs de fait et de droit est donc
14 l'annulation des jugements d'acquittement puisqu'ils sont invalides, la
15 Chambre d'appel a le pouvoir de prononcer des jugements de condamnation à
16 leur place. Ce pouvoir a été, de façon répétée, confirmé et exercé par la
17 Chambre d'appel, le plus récemment dans l'affaire Popovic et consorts,
18 concernant les crimes commis par M. Pandurevic.
19 Nous acceptons que dans cette affaire la situation est différente, à savoir
20 que la Chambre d'appel devrait donc remplacer les jugements d'acquittement
21 par des jugements de condamnation. Mais le principe n'est pas différent par
22 rapport au principe appliqué lorsqu'on remplace les convictions par des
23 acquittements partiels.
24 La Chambre d'appel a conclu qu'elle ne viole pas les droits des
25 accusés lorsqu'elle prononce des condamnations sans que les accusés aient
26 le droit d'interjeter appel. Les accusés n'ont pas présenté des nouveaux
27 arguments par rapport à cela.
28 Donc, il n'y a aucun doute que la Chambre d'appel a le droit dans
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1 cette affaire pour corriger les erreurs et pour faire des conclusions
2 nécessaires à ce qu'elle puisse prononcer des condamnations.
3 Il y a deux raisons pour lesquelles l'exercice de ce pouvoir doit
4 être fait.
5 Comme je l'ai déjà dit, d'abord la Chambre d'appel veut en fait se
6 pencher sur des conclusions concernant des corrections des erreurs dans
7 d'autres affaires. En particulier, dans l'affaire Bizimungu, où la Chambre
8 d'appel du Tribunal pour le Rwanda a conclu qu'il n'y avait pas d'opinion
9 motivée concernant certaines conclusions juridiques concernant certaines
10 parties de la base de crime, parce qu'elle n'a pas abordé "les questions
11 les plus fondamentales dans cette affaire."
12 C'est l'arrêt Bizimungu, paragraphe 19.
13 La Chambre d'appel a analysé, donc, le dossier pour voir si les
14 convictions peuvent être confirmées en appel.
15 Deuxièmement, nous ne devrions pas nécessairement supposer que la
16 nature des conclusions factuelles dans cette affaire serait
17 inacceptablement [phon] compliquée. Dans l'affaire Bizimungu, la Chambre
18 d'appel était en mesure d'arriver à des conclusions pour ce qui est de
19 l'élément moral qui manquait, incluant l'élément moral pour le crime du
20 génocide, parce qu'elle nie les actes criminels sous-jacents dans le
21 contexte de la campagne systématique de crimes au Rwanda à l'époque, ce qui
22 a --
23 Et essentiellement, il faut faire la même chose dans cette affaire.
24 Dans cette affaire, il faut regarder les actes et les déclarations des
25 accusés dans le contexte approprié, dans le contexte de la campagne
26 criminelle à grande échelle de nettoyage ethnique dans les trois parties
27 ciblées en Croatie et en Bosnie-Herzégovine.
28 Ensuite, il faut se pencher sur le scénario des crimes commis dans
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1 ces trois régions, ce que les accusés savaient par rapport à cela, avec qui
2 ils ont coopéré pendant ces quatre ans, ce qu'ils ont fait et ce qu'ils
3 n'ont pas fait.
4 Le monde entier suivait ce qui se passait et a compris, évidemment,
5 ce qui se passait en Croatie et en Bosnie-Herzégovine pendant la période
6 couverte par l'acte d'accusation au point que le terme "nettoyage ethnique"
7 soit devenu un terme du vocabulaire contemporain. Les victimes dans les
8 villages qui étaient systématiquement attaqués, nettoyés et rasés, ils
9 savaient ce qui se passait dans ces villages. Il est inconcevable que les
10 deux accusés dans cette affaire n'aient pas compris ce qui se passait à
11 l'époque.
12 De plus, comme M. Marcussen et moi-même avons expliqué en exposant
13 nos arguments aujourd'hui, les problèmes dans l'analyse de la majorité des
14 Juges pour ce qui est de l'intention partagée ont leur origine dans deux
15 omissions-clés : d'abord, la majorité n'a pas rendu de conclusions
16 concernant l'existence de objectif criminel commun pour ce qui est du
17 nettoyage ethnique; et, deuxièmement, la majorité n'a pas considéré les
18 contributions des accusés répétées pour ce qui est de leurs connaissances
19 de l'objectif criminel commun.
20 Donc, pour corriger ces deux omissions, il est nécessaire de se
21 pencher sur ces faits. Et bien que la Chambre de première instance ait omis
22 de considérer ces deux facteurs cruciaux dans son analyse pour ce qui est
23 de l'intention partagée, la Chambre de première instance est arrivée à des
24 conclusions sous-jacentes à un autre endroit dans le jugement que c'est
25 pertinent pour ce qui est de ces questions.
26 Pour vous donner une idée par rapport à cela, nous avons un
27 transparent contenant les références de mon explication. La Chambre de
28 première instance a accepté qu'il y ait eu une compagne d'expulsion massive
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1 en Krajina d'avril 1991 à avril 1992. Elle a accepté que Milan Martic, le
2 dirigeant politique serbo-croate en Krajina, avait eu l'intention
3 d'expulser les non-Serbes et a utilisé des instruments sous son contrôle,
4 la police de Krajina et la Défense territoriale, pour commettre ces crimes
5 afin d'atteindre son objectif. Elle a accepté que Stanisic et Simatovic
6 avaient soutenu et aidé ces instruments de façon cohérente et répétée
7 pendant plus d'un an en sachant que Milan Martic avait l'intention de
8 commettre les crimes.
9 La Chambre de première instance a également accepté de façon expresse que
10 les attaques sur des villes particulières en SAO de Krajina et en SAO SBSO
11 avaient "l'objectif de forcer la population locale de partir afin d'établir
12 un territoire purement serbe." La Chambre de première instance a conclu en
13 outre qu'il y avait une attaque discriminatoire et de grande échelle contre
14 la population civile non-serbe dans les trois zones géographiques, la SAO
15 de Krajina, la SAO SBSO et les municipalités visées dans l'acte
16 d'accusation en Bosnie-Herzégovine.
17 Madame, Messieurs les Juges, étant donné que les accusés savaient que ces
18 crimes faisaient partie intégrante du processus de prise de contrôle et de
19 maintien du contrôle territorial et qu'ils savaient que des crimes en masse
20 étaient en train d'être commis afin de poursuivre l'objectif criminel
21 commun, la seule déduction raisonnable possible que l'on puisse tirer de
22 cela de leur aide continue pendant plusieurs années c'est qu'ils
23 partageaient l'intention qui sous-tendait l'objectif criminel commun.
24 De même, les preuves nécessaires pour fournir une réparation au moyen
25 d'appel alternatif de l'Accusation sur l'aide et l'encouragement ne doivent
26 pas être très larges; en particulier, le critère de visée spécifique, si on
27 le retire de l'équation, les Juges de la Chambre de première instance, dans
28 leurs conclusions, fournissent un fondement important pour la condamnation
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1 pour aide et encouragement.
2 Dans l'affaire Bizimungu, la Chambre d'appel du TPIR, suite aux
3 plaidoiries, a demandé un argument supplémentaire par écrit. Elle a donné
4 l'occasion aux parties de donner davantage d'informations pour aider la
5 Chambre à apporter ses conclusions. Je vous renvoie là au paragraphe 24 de
6 l'arrêt. Vous devriez envisager la même possibilité pour les parties en
7 l'espèce.
8 Mais au bout du compte, Madame, Messieurs les Juges, c'est à vous de
9 vous prononcer. Si vous estimez que cette affaire ne doit pas faire l'objet
10 d'une révision de la part de la Chambre d'appel, vous devriez renvoyer
11 l'affaire à une autre Chambre. Il ne s'agirait pas d'un nouveau procès mais
12 d'un renvoi pour se prononcer à nouveau sur les accusations qui ont été
13 portées contre les deux accusés à partir des éléments de preuve qui
14 existent déjà.
15 Donc, c'est à vous de déterminer ces paramètres de renvoi, mais il
16 serait important de tenir compte du fait que ces instructions de renvoi
17 contiennent des informations précises sur la nature des erreurs commises
18 par la Chambre de première instance et la procédure idoine à suivre. En
19 particulier, ces instructions devraient inclure des éléments à prendre en
20 considération comme, par exemple : les pièces du puzzle manquantes pour
21 l'analyse de l'entreprise criminelle commune de la Chambre de première
22 instance - à savoir si l'objectif criminel commun allégué existait, sa
23 nature, son ampleur; les membres-clés de l'entreprise criminelle commune;
24 les instruments utilisés par l'entreprise criminelle commune pour commettre
25 ces crimes; et plus important encore, ce que l'accusé savait sur l'objectif
26 criminel commun, les crimes impliqués, les instruments utilisés et les
27 crimes commis pour le poursuivre.
28 Alors, si les Juges de la Chambre décident de ne pas se plier à ces
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1 options proposées, eh bien, il faudrait un nouveau procès. Mais il ne
2 s'agirait pas de la voie de recours la plus appropriée d'après nous. Le
3 problème, en fait, n'est pas le dossier en l'espèce. C'est de ne pas s'être
4 prononcé de façon adéquate sur les éléments de preuve qui ont déjà été
5 portés au dossier. Les intérêts de la justice ne penchent pas en faveur
6 d'un nouveau procès.
7 En conclusion, les erreurs fatales dans l'analyse de la majorité des
8 Juges de la Chambre de première instance doivent être remédiées. Ne rien
9 faire n'est pas une option en l'espèce, car il y a eu un manquement
10 fondamental de se prononcer sur des questions pertinentes de la part de la
11 Chambre de première instance, ce qui veut dire que la communauté des
12 victimes et la communauté internationale ne voient pas leur promesse de
13 justice remplie. Alors, il s'agit d'une affaire d'entreprise criminelle
14 commune, et pour refléter de façon adéquate la culpabilité des accusés, il
15 faudrait les condamner dans ce cadre-là.
16 La Chambre d'appel doit trouver une façon pour que la justice soit
17 rendue de façon définitive.
18 Je vous remercie, Madame, Messieurs les Juges.
19 M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Merci.
20 Juge Agius.
21 [La Chambre d'appel se concerte]
22 M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Le Juge Agius voudrait vous poser une
23 question. Allez-y, je vous en prie.
24 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Oui, Madame Jarvis. Bonjour.
25 Après avoir suivi attentivement vos derniers arguments à propos des voies
26 de recours que vous demandez, et plus particulièrement s'agissant de votre
27 dernier argument, j'ai l'impression que vous exprimez un certain
28 scepticisme quant à un nouveau procès pour les raisons que vous avez
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1 évoquées il y a quelques instants. Vous avez également parlé d'autres voies
2 de recours. Et s'agissant d'un nouveau procès, vous avez déclaré qu'à vos
3 yeux il ne s'agissait pas de la meilleure solution.
4 Alors, ma question est la suivante : quelle serait la meilleure
5 solution pour vous ?
6 Mme JARVIS : [interprétation] Madame, Messieurs les Juges, d'après nous, la
7 Chambre d'appel devrait corriger les erreurs par elle-même et prononcé les
8 condamnations idoines. Voilà notre point de vue.
9 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Merci.
10 M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Est-ce qu'il y a d'autres questions de
11 la part de nos collègues ?
12 Si ce n'est pas le cas, nous allons faire une pause, et nous reprendrons à
13 13 heures. Nous allons commencer par le conseil de la Défense de M.
14 Stanisic, et puis nous suivrons avec le conseil de la Défense de M.
15 Simatovic.
16 Donc, nous allons faire une pause d'une heure 30.
17 --- L'audience est suspendue à 11 heures 30.
18 --- L'audience est reprise à 13 heures.
19 M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Nous reprenons notre audience. Je vais
20 inviter le conseil de M. Stanisic à répondre pendant une heure.
21 M. JORDASH : [interprétation] Merci, Madame, Messieurs les Juges. Bonjour à
22 vous.
23 Le 30 mai 2013, plus de dix ans après son arrestation, Jovica Stanisic a
24 été acquitté de tous les chefs retenus contre lui. Même s'il a toujours nié
25 toute implication dans les crimes, il a compris et comprend aujourd'hui que
26 le fait d'occuper un poste haut placé au sein du gouvernement de Serbie à
27 l'époque, à la lumière de terribles crimes, signifiait que des questions
28 devaient être posées et qu'il fallait y trouver les réponses, la justice
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1 doit être rendue et doit être perçue comme avoir été rendu.
2 Cependant, la justice est souvent lente et pesante et qui a un prix,
3 en particulier lorsque c'est long et pesant et que cela est lourd pour
4 l'Accusation qui surcharge les actes d'accusation d'allégations qui font
5 valoir des allégations éclatantes qu'un seul individu est aux commandes et
6 qu'il est aux commandes de chaque structure politique et militaire et, par
7 conséquent, responsable de tous les crimes sur des milliers de kilomètres
8 carrés et en lien avec cela, il y a des allégations sans discernement, à
9 savoir que chaque membre des forces serbes est un criminel agissant pour
10 réaliser une campagne de violence contre les civils.
11 Pendant plus de dix ans, M. Stanisic a dû faire face à ces
12 allégations et sur lui a pesé la menace d'une peine d'emprisonnement à vie.
13 Ce procès lui a coûté cher, cela a sapé son droit à la liberté, sa vie de
14 famille et sa santé. Il a été déclaré inapte à être jugé. Il a fallu
15 modifier les procès pour tenir compte de son mauvais état de santé, le
16 procès étant limité à deux, trois jours par semaine, avec des pauses de 75
17 minutes. D'aucuns diraient tel est le prix à payer pour faire établir sa
18 responsabilité. Soyons clairs, il occupait un poste élevé, la Chambre de
19 première instance a constaté qu'il aurait pu être impliqué dans des crimes,
20 et peut-être qu'il a eu de la chance. Pourquoi devrait-il se plaindre ?
21 Cependant, la Chambre de première instance a tenu compte
22 d'allégations qui couvraient l'ensemble de la Croatie et de la Bosnie-
23 Herzégovine sur plus de cinq ans. La majorité de la Chambre n'a cessé de
24 constater qu'il y avait un doute raisonnable concernant sa culpabilité.
25 Dans le cas où cela a un quelconque sens, alors cela signifie également que
26 nous reconnaissons que M. Stanisic a payé un prix lourd suite au procès qui
27 a mené à son acquittement.
28 Cette administration de la justice, ainsi que le prix sous toutes ces
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1 formes, qui devrait peser lourdement sur l'Accusation au moment où elle
2 définit les paramètres de son appel. La juridiction d'appel est limitée, et
3 ce, à dessein. Son but n'est pas de permettre à l'une des parties
4 mécontente de croquer encore dans la pomme. Il ne s'agit pas de pouvoir
5 plaider à nouveau ni de régurgiter les arguments présentés lors du procès
6 dans l'espoir qu'il sera possible de convaincre d'autres Juges du
7 contraire.
8 Comme nous l'avons fait valoir dans notre réponse et nous continuons
9 à faire valoir au cours de cette heure, cet appelant a adopté une autre
10 approche. Plutôt que de présenter un appel prudent qui est conforme aux
11 critères d'examen en appel, les arguments de l'appelant s'écartent des
12 axiomes principaux d'arguments présentés en appel et tiennent suffisamment
13 compte du respect de la procédure qui, finalement -- mais ne respectent pas
14 la procédure interne, ne soutient pas l'administration de la justice.
15 Quand bien même les arguments de l'appelant seraient fondés, cette
16 approche soulève le doute et est controversée.
17 Son droit fondamental humain doit lui permettre de revoir sa
18 condamnation, ainsi que la peine imposée, et ce, devant une juridiction ou
19 une instance supérieure. Ce principe s'inscrit, entre autres, à l'article
20 14(5) du Pacte international relatif aux droits civils et politiques.
21 Néanmoins, l'Accusation demande à la Chambre de prononcer une déclaration
22 de culpabilité en appel pour la première fois, bien qu'il n'y a aucun
23 examen des faits par une instance supérieure des intimés condamnés devant
24 ce Tribunal, que l'appelant vous demande avec insistance d'avaliser sur la
25 première fois et la dernière fois qu'une déclaration de culpabilité serait
26 prononcée de la sorte.
27 Compte tenu du fait que cela signifierait également que l'Accusation
28 pourrait ainsi croquer à deux fois dans la pomme, ceci constituerait le
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1 comble de l'ironie.
2 Nous faisons valoir que la Chambre d'appel est tenue d'appliquer les
3 pouvoirs qui lui sont conférés en vertu de l'article 25(2), et ce,
4 conformément aux droits fondamentaux de l'homme, notamment le droit d'avoir
5 toute condamnation faire l'objet d'un examen par une instance supérieure.
6 Comme le Comité des droits de l'homme des Nations Unies a clairement
7 indiqué, c'est un commentaire général sur le sujet, et je cite :
8 L'INTERPRÈTE : Note de la cabine française, il s'agit d'une
9 traduction libre.
10 M. JORDASH : [interprétation] "Article 14, paragraphe 5, est violé, non
11 seulement si la décision par la chambre de première instance est
12 définitive, mais également lorsqu'une condamnation est imposée par une
13 chambre d'appel, un tribunal d'appel ou une chambre en dernière instance
14 suite à un acquittement d'un tribunal d'instance en vertu du droit national
15 lorsque ceci ne peut pas faire l'objet d'un examen par une instance
16 supérieure, le cas --"
17 L'INTERPRÈTE : Inaudible.
18 M. JORDASH : [interprétation] "…contre l'Espagne."
19 Rien dans cet article 25 ne ressemble de près ou de loin au respect
20 des droits fondamentaux de l'homme. Ceci n'a pas été aboli, à supposer même
21 que le Conseil de sécurité aurait été compétent pour abolir une telle
22 protection fondamentale. Effectivement, c'est tout à fait le contraire.
23 L'article 25 précise clairement que l'Accusation en appel doit démontrer
24 deux choses pour pouvoir obtenir des mesures. En appel en vertu de
25 l'article 25(1)(A), le Procureur doit montrer que la Chambre de première
26 instance n'a pas commis d'erreurs de droit, mais a commis des erreurs qui
27 invalident le jugement. Au terme de l'article 25(1)(B), il existe un seuil
28 supérieur, et l'Accusation doit démontrer qu'il y a eu erreurs de fait de
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1 la part de la Chambre de première instance et que cette erreur est d'une
2 telle importance qu'elle a conduite à un déni de justice.
3 Il s'agit donc d'un seuil extrêmement élevé. Et malgré cela, comme
4 chaque élément en l'espèce, l'Accusation adopte la position qui, d'après
5 nous, est incroyablement ambitieuse, à savoir que les mesures sollicitées
6 dans le cadre de cet appel constituent le remplacement d'un acquittement
7 par une condamnation sans aucune perspective d'examen et l'imposition d'une
8 peine d'emprisonnement à vie, encore une fois, sans examen.
9 Aucune explication n'est fournie quant à savoir comment l'article
10 25(2), associé à l'article 25(1) dans le contexte du Statut dans son
11 ensemble, serait susceptible de produire un résultat qui, d'après le Comité
12 des droits de l'homme, est en des termes très peu ambigus, considéré comme
13 illégal. Cent soixante huit Etats de par le monde ont l'obligation
14 d'adhérer à ce critère minimum. L'appelant ne fournit aucune raison, une
15 institution du TPIY, pourquoi elle n'a pas de protection, et l'avancement
16 en matières des droits de l'homme qui s'inscrit dans les travaux du Comité
17 des droits de l'homme des Nations Unies.
18 Cet argument est un argument de compétence. L'article 25 peut être
19 considéré ou interprété à la lumière du respect d'un droit fondamental, et
20 cela doit être le cas ici.
21 La Chambre de première instance [comme interprété] ne peut pas simplement
22 le dire et appliquer le contraire. Mais nous ne tournons pas le dos à ce
23 point essentiel : si la Chambre de première instance constate qu'il y a
24 quelque part un bien-fondé prima facie dans les motifs en appel présentés
25 par l'Accusation éparpillés aux quatre vents, la Chambre ne peut pas en
26 même temps, en tant qu'institution judiciaire, imposée une condamnation et
27 une peine sans que l'Accusation ait même expliqué pourquoi elle a la
28 compétence pour le faire.
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1 En outre, les intimés ont eu une heure pour s'adresser à la Chambre.
2 Si vous trouvez qu'il y a quelque chose d'intéressant au niveau du
3 réchauffé présenté par l'Accusation, nous faisons valoir au nom de
4 Stanisic, que nous n'avons pas suffisamment de temps et nous n'avons pas
5 été notifiés suffisamment pour pouvoir présenter notre appel - ce qui
6 pourrait au vu des Juges de la Chambre éventuellement conduire à une
7 condamnation et à une peine.
8 Outre ces questions d'ordre juridique, nous allons maintenant aborder
9 la question de discussion plus détaillée et de défendre une tentative
10 visant à envoyer l'appelant en prison à vie, l'Accusation ayant le dernier
11 mot aujourd'hui.
12 Nous allons laisser de côté ces questions juridiques, et maintenant
13 avoir une discussion sur l'approche qui convient concernant les critères en
14 appel.
15 Cet appel, conformément aux arguments présentés par l'appelant aux
16 moyens 1 et 2, invoque des erreurs de droit. Nous n'allons pas plus avant
17 aborder la question du moyen d'appel numéro 3 et des erreurs alléguées de
18 fait, à moins que vous le souhaitiez. Ils sont tellement sans fondement que
19 nous n'allons pas y consacrer davantage de temps.
20 Cependant, les moyens 1 et 2 risquent d'obscurcir les vrais
21 problèmes, et nous devons aider les Juges de la Chambre d'appel à révéler
22 la stratégie inhérente à cela.
23 Comme le sait sans doute l'appelant, lorsque la Chambre d'appel
24 constate qu'il y a erreur de droit, la Chambre l'applique aux constatations
25 factuelles. Ce n'est que dans le cas où il n'y a pas de constatation
26 factuelle pertinente que la Chambre d'appel examine le dossier. Il ne
27 suffit pas à l'appelant de démontrer qu'il y a eu erreur de droit.
28 L'appelant doit démontrer qu'il y a eu des constatations factuelles
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1 pertinentes qu'elles souhaitent éviter que les conclusions ne permettent
2 pas de dire qu'un juge de fait raisonnable aurait pu parvenir à ces
3 constatations qui ont donné lieu à un déni de justice.
4 Ceci est essentiel au niveau de cet appel. Dans la branche du moyen
5 d'appel (1)(A), l'appelant fait valoir que l'erreur manifeste juridique de
6 la majorité consiste à ne pas avoir prononcé un jugement sur ou n'avoir pas
7 fourni une opinion motivée sur l'existence objective de l'objectif criminel
8 commun et la contribution des accusés à cet objectif commun, il s'agit
9 d'une erreur qui invalide le jugement. Il fait également valoir que la
10 Chambre de première instance n'a pas abordé la question de l'objectif
11 criminel commun comme il se doit, illustrer par son évaluation des actions
12 de l'accusé et sa contribution à certains crimes mais pas en tant que
13 contributions à l'objectif criminel commun.
14 Il doit être clair aux yeux des Juges de la Chambre et de l'appelant, que
15 même si ceci est sans fondement, cette erreur juridique ne peut pas rendre
16 chaque constatation factuelle favorable à l'accusé. Dans le meilleur des
17 cas, cela n'aurait pu avoir une incidence que sur certaines constatations,
18 comme certaines évaluations de l'intention partagée, mais ne peut pas
19 donner lieu à des constatations factuelles qui aborderaient la question du
20 comportement des membres de l'entreprise criminelle commune ou de leurs
21 instruments et, de ce, agissant légalement, y compris M. Stanisic, et leur
22 interaction entre eux.
23 Par exemple, l'appelant accepte au paragraphe 23 de l'appel que la Chambre
24 de première instance a conclu que les accusés avaient contribué à certains
25 crimes. L'appelant ne souhaite pas admettre que la Chambre, qui faisait ces
26 évaluations, a abordé la question des moyens criminels de l'entreprise
27 criminelle commune et non pas seulement d'événements criminels
28 particuliers. Mais acceptent que de telles constatations ont été faites. Il
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1 s'agit d'un aveu essentiel. Cela signifie que la Chambre de première
2 instance avait les cubes qu'il convenait de mettre en avant pour fournir
3 une opinion motivée sur la responsabilité dans le cadre de l'entreprise
4 criminelle commune; ceci ne peut pas simplement être mis de côté.
5 Ce qui signifie que si la Chambre de première instance n'a pas prononcé de
6 jugement sur l'objectif criminel commun, il y a une multitude de
7 conclusions qui n'ont pas été abordées.
8 Comme la Chambre d'appel a clairement indiqué dans l'affaire Krajisnik,
9 c'est l'objectif commun qui fait qu'une pluralité de personnes devient un
10 groupe ou une entreprise, et c'est cette pluralité qui a quelque chose de
11 commun avec l'objectif. Ces personnes dans le cadre d'une entreprise
12 criminelle commune dont il faut prouver que ces personnes ont agi ensemble
13 de concert à la mise en œuvre d'un objectif criminel commun si ces
14 personnes doivent partager la responsabilité des crimes commis dans le
15 cadre de l'entreprise criminelle commune.
16 Vous le comprendrez certainement, Madame, Messieurs les Juges, que
17 l'évaluation de l'importance de la contribution des accusés est
18 essentielle. Tout d'abord, la contribution essentielle d'un accusé lorsque
19 l'accusé commet ces crimes dans le cadre de l'objectif commun, ceci est
20 assimilable à l'actus reus individuel de chaque accusé. La contribution est
21 importante. Et un juge du fait peut en déduire que l'accusé disposait de le
22 mens rea requis pour les crimes en question.
23 Ceci ne doit pas être confondu avec le fait que l'appelant a dû commettre
24 un crime eu égard à l'objectif commun. Nous acceptons qu'il peut y avoir un
25 individu qui a contribué à l'objectif commun même s'il ne s'agit pas d'un
26 comportement criminel. Cependant, cette contribution doit avoir été
27 favorisée par des moyens criminels.
28 En l'espèce, la Chambre de première instance a suivi précisément ces
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1 exigences. Elle a évalué la contribution de Stanisic à chacun des moyens
2 criminels et pas, comme le suggère l'appelant, à des crimes spécifiques, et
3 a utilisé ces constatations de fait lorsque cela a été nécessaire pour
4 déduire qu'il n'avait pas partagé d'intention criminelle en vue de réaliser
5 l'objectif criminel commun ou toute responsabilité pour entreprise
6 criminelle commune de catégorie une.
7 Ayant conclu qu'une déduction raisonnable existait selon laquelle pendant
8 la période couverte par l'acte d'accusation, cinq ans, il avait agi de
9 façon systématique pour atteindre des objectifs militaires, et pas les
10 moyens criminels, la majorité des Juges de la Chambre avait pour devoir de
11 l'acquitter.
12 Dans ces circonstances, les constatations factuelles que l'appelant accepte
13 ont été portées sur la contribution de l'intimé à des crimes et cela doit
14 rester le cas, et plusieurs constatations liées telle que la contribution
15 des hommes de la DB, les contributions aux membres de l'entreprise
16 criminelle commune à des crimes, l'occurrence et le schéma des crimes, les
17 interactions avec plusieurs auteurs, les interactions avec ceux qui ont
18 participé à une activité légitime, et cetera, et cetera doivent également
19 être maintenues.
20 Si l'appelant veut contester ces faits, il peut le faire, mais il doit
21 démontrer un manque d'éléments raisonnables et un déni de justice qui en
22 découle.
23 Si l'appelant est capable d'identifier des erreurs de fait dans ces
24 calculs, alors il doit les argumenter. Et pas les écarter.
25 Bien sûr, l'appelant se rend compte, étant donné la façon systématique et
26 tout à fait raisonnable du raisonnement de la majorité des Juges de la
27 Chambre de première instance dans l'évaluation de l'entreprise criminelle
28 commune et la faiblesse des constatations factuelles suggérant que Stanisic
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1 interagissait avec les auteurs allégués de l'entreprise criminelle commune
2 pour commettre les crimes, leur argument ne tient pas la route.
3 De même dans le moyen 1(B), l'appelant essaie de faire valoir que la
4 Chambre de première instance avait commis une erreur en n'appliquant pas de
5 critère juridique aux éléments de preuve. Tout d'abord, envisager des
6 morceaux d'éléments de preuve, et deuxièmement, appliquer le critère au-
7 delà de tout doute raisonnable à des parties séparées d'éléments de preuve.
8 Nous allons les examiner l'un après l'autre. Dans les paragraphes 3, 4, et
9 6, le jugement reprend en détail les crimes de meurtre, de persécution,
10 d'expulsion, de transfert forcé. Les auteurs, leurs interactions pour
11 commettre le crime, l'activité militaire et l'interaction avec l'activité
12 militaire légitime, et le rôle de Stanisic et l'interaction dans tous ces
13 événements.
14 Si le moyen 1(B) est fondé, il revient à la Chambre d'appel de renvoyer
15 l'affaire à la Chambre de première instance pour qu'elle examine toutes ces
16 constatations factuelles à la lumière du critère juridique adéquat et
17 appliquer le critère correct de la charge de la preuve aux constatations
18 factuelles qui ont déjà été constatées.
19 De même, s'agissant du moyen numéro 2, l'appelant affirme une erreur
20 de droit alléguée s'agissant de l'exigence de la visée spécifique. Bon, à
21 la lumière de cela, il n'y a rien qui permette de supposer que cette
22 erreur, si elle a eu lieu, était une erreur qui a eu une incidence sur les
23 constatations factuelles portant sur le comportement de l'accusé, l'aide et
24 l'éloignement et la proximité dans leur évaluation. Là encore, la Chambre
25 de première instance n'aurait qu'à appliquer l'approche nécessaire aux
26 critères de preuve s'agissant des constatations factuelles qui ont déjà été
27 tirées.
28 Après avoir apprécié la nature détaillée du jugement et ces culs-de-
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1 sac juridiques, même si l'appelant peut démontrer ces erreurs de droit, la
2 constatation factuelle qui sous-tend tout cela -- les conclusions sont
3 multiples et raisonnables, mais l'appelant change son fusil d'épaule.
4 Alors, il faudrait montrer un transparent à ce stade-ci, et là vous
5 aurez un résumé de l'approche que l'appelant a adoptée pour interjeter
6 appel. Nous allons donner deux, trois exemples de cette approche en quatre
7 temps.
8 Alors, première étape, l'appelant prend quelques constatations
9 factuelles triées sur le volet qui servent son objectif pour recommencer
10 l'examen. Et comme nous allons le voir dans quelques instants, l'appelant
11 se concentre sur la détermination de la présence de Stanisic ou de ses
12 associés dans les zones de guerre.
13 Deuxième étape, l'appelant écarte certaines constatations factuelles
14 gênantes sans essayer de démontrer que la Chambre de première instance
15 avait commis une erreur de fait ou de droit. Cela lui permet de faire en
16 sorte que ses faits favoris soient sortis du contexte et puissent être
17 remontés dans la troisième étape.
18 Et c'est cette troisième étape qui vient à présent. A la place de ces
19 constatations factuelles gênantes qui ne lui seyent guère, l'appelant, en
20 utilisant les conclusions de sa première étape, reconstruit le tout pour
21 reproduire de nouvelles constatations factuelles qu'il voudrait que la
22 Chambre de première instance tire. Et, bien sûr, il n'y a pas de tentative
23 d'équilibre ou d'explication. Ces éléments sont choisis simplement parce
24 que l'intimé pourrait paraître coupable et qu'un doute pourrait être jeté
25 sur les décisions raisonnées prises à la majorité des juges.
26 Alors, un appelant a beaucoup de choses à expliquer pour pouvoir
27 parachuter 260 éléments de preuve du dossier d'instance dans un appel, et
28 c'est ce qu'il essaye de faire.
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1 L'exigence selon laquelle il faut établir une priorité dans les
2 constatations en fonction des preuves concorde avec la notion d'une Chambre
3 de première instance ayant comme fonction essentielle de constater les
4 faits. Bien sûr, la Chambre d'appel est bien au courant de cela et ne va
5 pas commencer à perturber ces constatations de fait qui avaient été tirées
6 par la Chambre de première instance.
7 Etape numéro 4. Dans cette étape, l'appelant décore sa demande de
8 nouvelle considération avec une garniture de culpabilité. Il a reconstruit
9 toutes ces constatations factuelles, les éléments de preuve. Sa dernière
10 étape, dans sa méthodologie, est d'encourager la Chambre de premier appel
11 d'attribuer cette culpabilité par association de plusieurs façons en
12 utilisant une présomption de culpabilité fourre-tout qui commence par la
13 critère absurde suggérant que toute action de n'importe quel membre du
14 corps politique ou militaire serbe a dû avoir lieu pour commettre le crime
15 et qu'il y avait une campagne de violence contre les civils.
16 Ce matin, nous avons entendu dire à plusieurs occasions de la part de
17 l'appelant que nous devrions partir du postulat que ces opérations visaient
18 à prendre le contrôle territorial et qu'il s'agissait en fait de nettoyage
19 ethnique. L'appelant a déclaré également ce matin que la Chambre devait
20 partir du principe que les crimes faisaient partie inhérente de l'opération
21 de prise. Et c'est la seule façon de faire tenir la route à son
22 argumentation pour l'appelant, une présomption de culpabilité. Conclure que
23 les crimes étaient une composante inhérente de toutes les opérations est
24 des constatations ou des conclusions que la Chambre de première instance
25 n'a pas tirées. En fait, la Chambre de première instance a fait le
26 contraire dans l'intégralité du jugement.
27 L'exemple du hold-up d'une banque est totalement contraire et ne
28 démontre qu'une seule chose : la présomption de culpabilité de
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1 l'Accusation. Le conducteur conduit la voiture à la banque pour qu'il y ait
2 hold-up, alors qu'en espèce la majorité des Juges de la Chambre avait
3 conclu que le conducteur avait conduit les hommes à la banque pour retirer
4 de l'argent de façon tout à fait légale et que ce sont d'autres personnes
5 qui ont volé la banque par la suite. Là, il y a un distinguo à effectuer,
6 qui est reflété dans les constatations factuelles, mais qui ne se fonde pas
7 sur une présomption de culpabilité. Le seul fait était le vol de la banque.
8 Et cette allégation a été rejetée à juste titre par la majorité après
9 soumission d'éléments de preuve détaillés. La Défense de M. Stanisic s'est
10 exprimée et a avancé que Stanisic participait dans une activité de guerre
11 légitime. Il y a eu des témoins et on a conclu que la présomption de
12 l'Accusation était erronée.
13 Maintenant, passons à certains détails de cette révision de novo
14 demandée par l'appelant. Cette révision de novo place cette Chambre ou
15 tente de placer cette Chambre dans la position peu envieuse de se prononcer
16 sur des questions essentielles de culpabilité, si l'approche est acceptée,
17 sans donner le bénéfice d'un point de vue équilibré sur 4 843 éléments de
18 preuve et plusieurs années de procès. La majorité des Juges a conclu qu'une
19 campagne de violence contre des civils était la seule chose qui avait eu
20 lieu. Le jugement parle de lui-même. Des opérations de défense, des
21 opérations pour saisir un territoire sans crimes sont décrites.
22 Un examen de la stratégie en quatre étapes de l'appelant nous apprend
23 beaucoup de choses.
24 Aux paragraphes 51 et 52 - c'est le transparent numéro 2 - du mémoire
25 en appel, nous voyons dans quelle mesure cette révision de novo essaye
26 d'attendre son objectif. L'appelant veut revoir toute l'affaire. Mais vu
27 l'autorité de l'accusé sur la SDB, aucune Chambre, aucun juge raisonnable
28 ne pourrait conclure que le déploiement systématique d'avoirs de la SDB
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1 pour mettre en œuvre l'objectif criminel commun a eu lieu sans que l'accusé
2 n'en ait eu connaissance ou sans sa volonté.
3 Alors, ce n'est pas ce que la majorité des Juges a conclu. Il n'y a
4 pas eu d'emploi systématique afin de mettre en œuvre un objectif criminel
5 commun.
6 Pour détricoter l'étape numéro 1 de l'Accusation, regardons Golubic.
7 Golubic était le premier camp d'entraînement que l'Accusation a suggéré
8 comme étant le début ou une partie du début de l'entreprise criminelle
9 commune.
10 Alors, ce remaniement en quatre étapes de l'Accusation, qu'implique-
11 t-il ? Eh bien, aux paragraphes 51 et 52 de l'appel, justement, la Chambre
12 d'appel est encouragée à se pencher sur l'annexe A qui contient des
13 conclusions d'après l'appelant prouvant que la Sûreté d'Etat serbe avait
14 des avoirs de la DB dans toutes les zones de guerre. Alors dire "avoirs",
15 c'est utiliser un terme qui a bien plus mauvaise réputation que employés ou
16 associés de la DB. Mais ce n'est qu'une tentative de la part de l'appelant
17 de transformer ce qui existe pour pouvoir revoir les faits, et c'est sur
18 ces fondements, c'est sur cette pierre angulaire que l'appelant veut
19 construire sa nouvelle thèse.
20 Alors, par exemple, l'annexe A contient des constations factuelles portant
21 sur le camp d'entraînement en Croatie, à Golubic. L'annexe A énumère
22 plusieurs paragraphes du jugement qui reprennent les constatations de la
23 Chambre selon lesquelles les employés ou des associés de la Sûreté de
24 l'Etat avaient créé, financé, et géré Golubic.
25 L'appelant se fonde sur des constatations - aux paragraphes 1 366, 1 367 et
26 1 421 du jugement - qui nous montrent que les interactions de l'accusé avec
27 les auteurs des crimes, tels que Martic et le capitaine Dragan, ainsi que
28 l'établissement de l'unité.
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1 Mais l'appelant n'essaie pas d'aborder ces constatations. Au
2 contraire, nous passerons à l'étape numéro 2 de la stratégie de l'appelant,
3 et l'annexe A ne fait que répéter les constatations factuelles qui
4 établissent la présence des avoirs de la DB, rien de plus.
5 Bien sûr, au point 2, si on ne tient pas des constatations factuelles, et
6 de cette poursuite collective de l'objectif commun avec l'intention
7 criminelle qui définit le fait d'appartenir à une pluralité de membres à
8 l'appartenance criminelle commune, après avoir établi que les agents de la
9 DB étaient physiquement présents à Golubic, autour de Golubic, l'appelant
10 demande à ce que soient rejetées les constatations factuelles de la Chambre
11 de première instance et de fournir des éléments de preuve irréfutables. Ils
12 ne portent pas à l'attention de la Chambre d'appel à une série de
13 constatations au paragraphe 2 197 qui montrent que la formation avait un
14 caractère militaire et comprenait des armes et la formation aux embuscades
15 ainsi que le traitement des prisonniers de guerre, le traitement de civils
16 dans le cadre de conflit armé.
17 Bien sûr que ces constatations ont posé lourdement sur les
18 délibérations de la majorité, et ont pesé lourdement sur les constations
19 rendues par la majorité, à savoir que ce camp et que l'interaction de
20 Stanisic avec celui-ci ne lui permettait pas de déduire qu'il contribuait à
21 la réalisation de l'objectif criminel commun. Bien sûr, si un camp
22 d'entraînement est établi et qu'il faut obéir aux lois de la guerre, c'est
23 une constatation qui est fort importante, mais pas d'après la stratégique
24 qui consiste à re-plaider sa thèse.
25 Au point 3, il s'agit de rassembler ces constatations étroites et
26 limitées. Et comme ils commencent à reconstruire ces constatations
27 factuelles, et trient sur le volet des éléments de preuve pris au dossier,
28 et cela fait ressembler la participation de Stanisic à une contribution à
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1 un objectif criminel commun. Au paragraphe 61 de l'appel, l'appelant fait
2 valoir que Stanisic et Martic s'étaient mis d'accord sur la création d'un
3 camp d'entraînement, que Martic avait mis en place, que le QG de Martic
4 était à Golubic, et que l'accusé a également servi d'intermédiaire "pour le
5 déploiement de l'entreprise criminelle commune et du capitaine Dragan."
6 Au paragraphe 62, l'appelant réitère la création de l'unité à Golubic
7 tel qu'il est allégué, "appuyait les structures de sécurité parallèles et
8 d'autres forces serbes", qui, comme il est allégué, faisaient partie de
9 l'objectif criminel commun. On nous rappelle ensuite que les membres de
10 l'unité ont été formés à Golubic et ont de surcroît formé d'autres unités
11 qui ont participé aux attaques contre les non-Serbes dans la Krajina, en
12 faisant valoir que Stanisic était responsable des crimes commis au cours de
13 ces attaques, et cetera.
14 Donc, l'appelant souhaite construire une nouvelle maison en utilisant
15 les structures qui leur plaisent, en ne tenant pas compte du reste, sans
16 démontrer pourquoi certaines de ces structures et pourquoi les fenêtres et
17 les portes ne peuvent pas être utilisées à nouveau, parce que cela ne sert
18 pas les intérêts de l'Accusation. Donc, nous passons au point 4, le coup de
19 grâce.
20 Après avoir reconstitué les constatations factuelles et les éléments
21 de preuve au dossier, l'appelant semble maintenant avoir agi et contribué à
22 la réalisation de l'objectif criminel commun. L'appelant ensuite est
23 parachuté dans cette présomption de culpabilité qui englobe tous les
24 éléments et toutes les actions menées par les forces serbes dans le but de
25 contribuer à la réalisation de ces crimes. Comme nous l'avons clairement
26 indiqué dans notre réponse et notre mémoire en clôture, il n'y a pas un
27 seul témoin à charge ou à décharge qui a fourni des éléments de preuve qui
28 auraient permis à un juge de fait raisonnable de conclure que Golubic a été
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1 créé pour contribuer à la réalisation d'un objectif criminel commun.
2 Ensuite au point III, nous passons de Golubic, comme l'a constaté la
3 Chambre de première instance, nous passons à des membres de l'entreprise
4 criminelle commune, notamment les accusés qui ont créé, utilisé des groupes
5 armés en Croatie pour contribuer à la réalisation d'un objectif criminel
6 commun, des structures parallèles qui contribuaient les événements associés
7 aux forces serbes, lançant ainsi une campagne systématique de nettoyage
8 ethnique sur l'ensemble du territoire croate, et donc c'est la quadrature
9 du cercle.
10 J'enjoins les Juges de la Chambre de bien vouloir regarder le
11 transparent numéro 4, une autre illustration de ce point 4, l'opération
12 Udar à Skelani. Je ne vais pas y consacrer du temps maintenant, mais il
13 s'agit exactement de la même chose, si nous avions le temps nécessaire,
14 nous aurions pu analyser chaque affirmation faite par l'appelant pour
15 démontrer ce processus en quatre étapes.
16 Pourquoi y a-t-il eu une telle approche ? Pourquoi avoir tellement
17 contesté ces contestations factuelles ? Parce que la majorité ne s'est pas
18 trompée, qu'inversement à l'acte d'accusation trop généralisé de
19 l'appelant, tente de marquer une distinction juridique et factuelle qui
20 sont requises. Peut-être que cela ne leur plait pas, ne plait pas à
21 l'Accusation, mais ceux-ci ont été faits de façon détaillée et concise.
22 Les points 3 et 4 du jugement vont bien au-delà, et par rapport à la
23 définition des crimes et des moyens criminels, les auteurs et le caractère
24 de leur interaction dans le but de favoriser la guerre et les crimes, et
25 les activités légales. Ceci a permis aux Juges de la Chambre d'analyser le
26 fait de savoir si oui non il existait un plan criminel qui était
27 assimilable ou impliquait la commission des crimes allégués et d'analyser
28 avec beaucoup de précision si une pluralité de personnes ont agi de concert
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1 dans le but de la réalisation d'un objectif criminel commun.
2 Le paragraphe 6 du jugement adopte la même approche difficile, le
3 troisième objectif est l'entreprise criminelle commune, la participation
4 des accusés au plan criminel commun ou alternativement à la poursuite
5 d'activité légale. Ces constatations factuelles ont permis à la Chambre
6 d'apprécier si oui ou non l'intention des accusés était identique à ceux
7 qui commettaient ces crimes, et si une intention partagée de commettre les
8 crimes englobait l'ensemble de l'objectif criminel commun allégué.
9 A la lumière de ces détails analysés de près, dans le paragraphe que
10 je viens de citer, la proposition de l'appelant, à savoir que la majorité
11 ne disposait pas des documents nécessaires pour leur permettre d'apprécier
12 l'intention des accusés est tout à fait sans fondement, et leur tentative
13 consistant à écarter les constatations factuelles sont une démonstration
14 manifeste de cela.
15 Les constations factuelles de la majorité sont énumérées au paragraphe 2
16 335 du jugement, et sont les illustrations de cette appréciation détaillée
17 des crimes et des interactions entre les auteurs et du caractère
18 systématique des crimes, et cetera.
19 Le paragraphe 2 335 résume :
20 "Le manque de participation de Stanisic au moyen criminel; deuxièmement,
21 contribution permanente aux activités militaires contre les forces croates,
22 non pas des civils; les forces de Bosnie et les forces musulmanes de
23 Bosnie, et non pas des civils; et son activité au cours des cinq années
24 couvertes par l'acte d'accusation pour contribuer à la réalisation de la
25 prise de contrôle du territoire, et non pas le déplacement forcé ou
26 l'expulsion de civils."
27 Nous faisons valoir que non seulement il y avait suffisamment de doute
28 raisonnable concernant l'intention de partager qu'aucun juge du fait
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1 raisonnable n'aurait pu conclure différemment. Après avoir élaboré ces
2 constatations détaillées qui, bien sûr, évoquent la notion de la
3 contribution, les moyens criminels, la Chambre de première instance ne
4 devaient pas revenir sur ces constatations factuelles que j'ai décrites
5 dans le détail parce qu'il s'agissait de rédiger l'objectif criminel qui
6 était celui des appelants, et nous faisons valoir que c'était important
7 pour un dossier historique, mais non pas parce qu'il s'agissait d'une
8 condition requise en l'espèce.
9 Comme le montre le transparent numéro 5, la position adéquate sur la
10 position de la majorité est comme suit. Le bureau du Procureur a allégué
11 que Stanisic avait une intention partagée qui devait être analysée de la
12 façon suivante. Si l'on renvoie au mémoire en appel de l'Accusation,
13 l'Accusation a dit à la Chambre de première instance que : Vous pouvez
14 déduire l'intention partagée à partir de l'armement et de la formation
15 complexe et massive et du déploiement répété des unités spéciales; ainsi
16 que de ces différents programmes, et d'exemples distincts des actions aux
17 propos prononcés qui démontrent de façon irréfutable qu'il disposait de
18 cette intention.
19 Paragraphes 2 306 et 2 317 du jugement et paragraphes 3 à 4 et 6.9 du
20 jugement, plutôt que d'adopter une approche parcellaire aux éléments de
21 preuve, la Chambre de première instance a fait précisément ce que
22 l'Accusation lui a demandé de faire au cours du procès. Et d'alléguer
23 maintenant des erreurs de fait et de droit alors qu'eux-mêmes ont imposé
24 cette approche aux Juges de la Chambre est plus que curieux. Une stratégie
25 en quatre étapes qui ne fait fi des constatations factuelles de la Chambre
26 de première instance ne peut que conduire à un seul résultat : le renvoi
27 sans appel du moyen 1 et du rejet des éléments infondés.
28 Je vais maintenant passer au moyen 2, qui constitue la complicité par aide
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1 et encouragement. Nous souhaitons maintenant prendre un petit peu de recul
2 et assumer pendant quelques instants que les conclusions dans l'affaire
3 Sainovic, à savoir que la visée spécifique ne constitue pas un élément
4 constitutif de l'actus reus de la complicité par aide et encouragement.
5 Alors la question qui se pose, c'est de savoir comment les erreurs de droit
6 de la Chambre de première instance a une quelconque incidence sur
7 l'acquittement de Stanisic.
8 Comme le montrent les conclusions et constatations factuelles de cette
9 Chambre, cela porte sur une erreur de droit. Cela ne permet certainement
10 d'invalider les acquittements, et ne permet pas, en tout cas, à l'appelant
11 d'être engagé dans un processus à quatre étapes pour replaider à nouveau et
12 d'avoir un procès à nouveau. Ceci est clair.
13 L'appelant accepte que la Chambre de première instance a adopté l'approche
14 suivante au paragraphe 1 264 du jugement : premièrement, il définit la loi
15 comme elle le comprenait d'après l'affaire Perisic, et ensuite a adopté
16 l'attitude suivante. La Chambre de première instance a considéré que la
17 visée spécifique était une étape en direction permettant de comprendre les
18 agissements de l'intimé qui avait contribué de façon importante aux crimes;
19 conclusions, la Chambre de première instance l'exprime au paragraphe 6, "La
20 responsabilité de l'accusé", à savoir que les faits importants sur les
21 crimes n'ont pas été établis.
22 Pour pouvoir comprendre ou apprécier ce moyen d'appel, l'Accusation doit
23 démontrer que la Chambre de première instance aurait pu, au vu des
24 constatations factuelles, parvenir qu'à une seule conclusion, et ce,
25 raisonnablement, que les agissement des accusés avaient sciemment eu un
26 effet important sur les crimes. Si nous lisons le jugement en première
27 instance de façon juste, il s'agit d'une charge beaucoup trop lourde que
28 l'appelant doit rejeter.
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1 Les paragraphes 2 359 à 2 361 du jugement clairement indiquent que
2 l'analyse menée à la lumière de la visée spécifique était précisément
3 l'analyse requise pour comprendre les faits importants et la mens rea de la
4 complicité par aide et encouragement. Par exemple, au paragraphe 2 360, la
5 Chambre énumère les facteurs dont elle a pris compte lorsqu'elle a parvenu
6 à la conclusion que les agissements de Stanisic ne visaient pas précisément
7 les crimes.
8 L'analyse de la Chambre englobe tous les facteurs qui auraient pu être
9 examinés comme faisant partie de la visée spécifique, mais sans l'ombre
10 d'un doute, en vertu de la jurisprudence de ce Tribunal, aurait dû être
11 pris en compte par tout juge du fait raisonnable lorsqu'il s'agit de rendre
12 une décision sur l'effet important, à savoir si oui ou non il était
13 important d'aborder la visée spécifique comme un élément analytique
14 distinct.
15 L'appelant continue de rejeter ce facteur essentiel dans son appel.
16 Plus précisément eu égard aux crimes commis à Bosanski Samac, Doboj, et
17 dans la SAO de Krajina, ceci comprenait des questions qui portaient sur le
18 fait d'établir des liens entre l'accusé et les crimes, y compris toute une
19 série de questions portant sur la proximité et la distance. Le type et la
20 portée de l'aide, le fait que l'accusé avait toujours agi en respectant la
21 loi, le commandement et le contrôle de l'unité, la formation des unités, le
22 droit de la guerre, le manque de présence physique sur les lieux du crime
23 lors de la commission des crimes, le fait de donner des commandements
24 légaux aux unités, et cetera.
25 Ayant adopté cette approche analytique holistique en béton, d'après nous,
26 la Chambre de première instance est arrivée à deux constatations au
27 paragraphe 2 361 qui sont fatales à la majorité de l'appel interjeté par
28 l'Accusation, moyen numéro 2 : "La majorité rappelle ses conclusions sur
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1 l'élément moral dont était animé l'accusé, voir chapitres 6.9 et 6.10", et
2 c'est le point le plus important que l'Accusation ne peut surmonter : "Sa
3 conclusion selon laquelle le type d'assistance apportée à l'unité, le
4 groupe le plus étroitement lié à l'accusé, est insuffisante pour déduire
5 une responsabilité pénale pour aide et encouragement."
6 Alors, nous mettons l'accent sur "le type d'assistance". La Chambre de
7 première instance ne disait rien d'autre ici sur la visée spécifique. Elle
8 a conclu dans les termes les plus clairs possibles que les actes commis par
9 l'accusé étaient simplement insuffisants, trop éloignés dans le temps, dans
10 l'espace, et pour l'effet causal pour avoir nécessité les exigences d'une
11 commission de crimes; c'est-à-dire non seulement les actes n'étaient pas
12 dirigés en particulier sur le fautif, mais le lien entre ces actes et
13 l'élément criminel n'étaient pas suffisamment forts pour arriver à un effet
14 substantiel de ces actes criminels.
15 L'analyse de la majorité portant sur les faits pertinents et l'élément
16 moral est tout à fait raisonnable. Malheureusement, au lieu de confronter
17 les constatations factuelles dans leur totalité, l'appelant essaie d'éluder
18 ces questions grâce à cette approche en quatre étapes.
19 Dans le moyen 2(B), au paragraphe 158, l'appelant énumère les facteurs qui,
20 d'après lui, auraient dû être décisifs pour établir un effet substantiel à
21 Bosanski Samac et à Doboj. D'après l'appelant, étant donné qu'il y a eu
22 formation de l'unité, prestation à d'autres et financement pendant la
23 commission des crimes, aucun juge du fait raisonnable n'aurait pu conclure
24 que ces contributions n'avaient pas eu d'effet substantiel sur la
25 commission des crimes. Et d'après l'appelant, inutile de se pencher sur
26 autre chose.
27 Alors, comme nous le faisons remarquer dans notre réponse aux
28 paragraphes 124 à 128, la jurisprudence qui prévaut, bien avant la décision
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1 Perisic, est celle de Furundzija, Aleksovski également, Blagojevic et
2 Simic. Toute cette jurisprudence suggère qu'afin d'évaluer de façon
3 adéquate l'élément matériel et l'élément moral pour aide et encouragement,
4 plusieurs facteurs sont importants et qui ramènent à la proximité et à
5 l'éloignement. La jurisprudence ne permet à l'évidence pas à l'appelant
6 d'ignorer et de balayer de la main tout facteur à l'exception du simple
7 fait d'avoir créé et prêté une unité.
8 Etape numéro 2 à présent. Est-ce que certaines constatations
9 factuelles ont été écartées ? Eh bien, l'Accusation a laissé de côté la
10 plupart des constatations factuelles, y compris les ordres légitimes; le
11 manque de commandement et de contrôle sur l'unité pendant la commission des
12 crimes, par exemple, au paragraphe 2 335 du jugement; aussi les paragraphes
13 1 369, 2 197 [comme interprété] et 2 329; le manque de connaissance des
14 crimes, paragraphe 2 323 du jugement; le manque de présence sur les lieux
15 du crime, paragraphe 2 360. Et ce que nous avons souligné dans la réponse,
16 c'était que l'appelant avait ignoré toutes ces conclusions. Et nous avons
17 reçu une réponse pour le moins étrange :
18 "Les constatations de la Chambre prouvent que Stanisic et Simatovic
19 avaient fourni à l'unité une structure, une aptitude, des ressources et un
20 équipement pour participer aux prises de Bosanski Samac et de Doboj et
21 qu'en conséquence, ils ont aidé et encouragé et que cela a été établi."
22 L'appelant semble croire que l'argument est plus fort si on le
23 martèle, mais pas du tout.
24 Comme le décrit le paragraphe 2 323, la Chambre de première instance
25 a conclu que :
26 "Etant donné le rôle vis-à-vis de l'unité repris ci-dessus et
27 l'étendue des crimes, la Chambre de première instance conclut que l'accusé
28 doit avoir eu connaissance du fait que des membres de l'unité avaient
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1 commis des crimes à Bosanski Samac."
2 En conséquence, étant donné qu'il savait que les membres de l'unité
3 avaient commis les crimes à Bosanski Samac, l'accusé a organisé
4 l'implication de l'unité aux opérations de Doboj. Même si la composition de
5 l'unité avait différé entre Bosanski Samac et les opérations de Doboj, la
6 Chambre de première instance estime qu'après les crimes de Bosanski Samac,
7 il aurait pu être raisonnablement prévisible à l'accusé que les membres de
8 l'unité commettraient les crimes à Doboj."
9 En d'autres mots, la majorité a conclu que Stanisic n'avait pas
10 connaissance des crimes qui avaient lieu à Bosanski Samac jusqu'à leur
11 commission et qu'ils ne lui étaient pas prévisibles.
12 S'agissant de Doboj, on aurait pu raisonnablement prévoir à Doboj que
13 des crimes pouvaient être commis. En d'autres mots, Stanisic n'avait pas
14 connaissance que ses actions, lorsqu'il a prêté l'unité, aideraient à la
15 commission des crimes et il n'était pas non plus au courant des éléments
16 essentiels des crimes, notamment l'intention des auteurs principaux. Alors,
17 si on applique la charge de la preuve et le critère de la preuve, la
18 majorité n'a pas pu être convaincue au-delà de tout doute raisonnable.
19 Et, bien sûr, si vous regardez ces conclusions, ces conclusions sont
20 plus que raisonnables. Sur cinq ans, les conclusions montrent clairement
21 que l'unité avait agi de façon légitime à l'exception de deux opérations :
22 Bosanski Samac et Doboj. Après la commission des crimes et leur
23 identification à Bosanski Samac, différents membres de l'unité, c'est-à-
24 dire ceux qui n'avaient pas commis de crimes, ont été déployés à Doboj.
25 Pour nous, la majorité a été en fait trop généreuse vis-à-vis de la
26 thèse de l'Accusation. Si des hommes différents ont été envoyés à une
27 opération ultérieure à Doboj, pourquoi la Chambre a-t-elle conclu qu'il
28 aurait pu être raisonnablement prévisible que ces hommes différents
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1 agiraient comme les premiers ?
2 Les Juges de la Chambre n'ont pas pu voir une déduction raisonnable,
3 qui n'a pas été exclue à la place, c'est-à-dire que Stanisic avait refusé
4 d'envoyer le même groupe d'hommes à Doboj à cause de leurs crimes
5 précédemment commis à Bosanski Samac. Nous ne le saurons jamais, mais
6 l'Accusation n'a pas envisagé cette thèse-là lors du procès.
7 Et cela m'amène à la troisième stratégie, la troisième étape dans le
8 remaniement du procès, la mise en commun. S'agissant de Bosanski Samac et
9 de la conclusion reprise au paragraphe 2 326 du jugement, il est dit que
10 Stanisic n'a eu connaissance des crimes de l'unité que par la suite, mais
11 l'appelant essaie de reconstruire une nouvelle conclusion portant sur
12 l'élément moral.
13 Aux paragraphes 164 et 165 [comme interprété] du mémoire, l'appelant
14 affirme que Stanisic savait que l'unité allait commettre les crimes à
15 Bosanski Samac, pas parce que cela avait eu lieu auparavant, pas parce
16 qu'il y avait eu une propension à commettre ces crimes, pas parce qu'elle
17 avait reçu des ordres de commettre ces crimes et pas parce que Stanisic
18 agissait de façon criminelle d'un point général, mais "à cause de la
19 participation de l'unité à des opérations préalables en Croatie où des
20 crimes similaires avaient été commis" et parce que les opérations en
21 Croatie étaient semblables aux opérations de Bosnie.
22 Concernant Doboj, étant donné que la Chambre a conclu que l'accusé doit
23 avoir eu connaissance du fait que les membres de l'unité avaient commis des
24 crimes à Bosanski Samac et que, sachant cela, il a organisé la
25 participation de l'unité aux opérations de Doboj, et que Stanisic était en
26 contact avec Karadzic avant les prises de Bosanski Samac et de Doboj et
27 qu'il aurait dû être au courant des plaidoyers répétés et publics de
28 Karadzic pour la séparation ethnique des Musulmans de Bosnie et des Serbes
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1 de Bosnie par l'utilisation de la violence, il aurait dû savoir que la mise
2 en place, le financement et le prêt de l'unité aux opérations à Doboj
3 résulteraient dans la commission de crimes et que cela aiderait à ces
4 crimes.
5 Là, les appelants sont en train d'établir un lien de culpabilité avec
6 les crimes de Bosanski Samac. Mais les premiers crimes qui ont été commis
7 ont eu lieu à des milliers de kilomètres, pas par des membres de l'unité,
8 mais par d'autres personnes. Donc il y a vraiment un lien très ténu, encore
9 moins que ténu d'ailleurs, qui existe, et la Chambre de première instance
10 aurait dû se fonder là-dessus.
11 Alors, s'agissant de Doboj, d'après la logique de l'appelant, si on
12 crée une unité pendant la guerre et que certains membres de cette unité
13 commettent des crimes, l'unité doit être démantelée après le premier
14 événement. Ou autrement, si d'autres membres de l'unité commettent des
15 crimes, cela revient automatiquement à un effet substantiel et à une
16 connaissance obligatoire. Sérieusement ? Quelques membres de l'unité ont
17 commis des crimes, et l'unité, d'après leur logique, ne peut plus opérer
18 sans déduction automatique d'un effet substantiel.
19 Passons à l'étape numéro 4 dans cette nouvelle méthodologie de
20 l'appelant. Ayant choisi les constatations qui lui plaisaient, ayant écarté
21 le reste et reconstruit le tout de la façon qui lui convenait le mieux,
22 l'appelant conclut en cherchant à éviter la plupart des éléments de preuve
23 des arguments de la Défense. La stratégie des appelants, là encore, revient
24 à leur présomption qui prévalait, présomption de culpabilité reprise au
25 paragraphe 107 de l'appel. Stanisic et Simatovic "ont créé, déployé,
26 entraîné, financé, fourni et soutenu plusieurs groupes armés et ont
27 continué à les soutenir sachant qu'ils avaient participé à une campagne
28 systématique massive de violence contre les non-Serbes." C'est cette
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1 présomption qui mène les appelants à affirmer aux paragraphes 83 et 84 de
2 la réplique que :
3 "Si les Juges de la Chambre avaient étudié les interactions de
4 Stanisic et Simatovic avec les groupes d'auteurs, ils auraient conclu
5 qu'ils étaient proches des crimes."
6 Malgré le fait que ces interactions ont toujours eu lieu dans la poursuite
7 d'objectifs légitimes.
8 Donc, pour conclure, aucun juge du fait raisonnable n'aurait tiré ces
9 conclusions, conclusions que l'appelant demande de tirer à présent. Comme
10 les Juges de la Chambre de première instance l'ont conclu et malgré l'écart
11 systématique de la part des appelants de ce fait, plusieurs opérations ont
12 été totalement légitimes. Malheureusement, d'autres opérations ont été
13 criminelles. Et plusieurs opérations étaient un mélange des deux. Mais on
14 ne peut pas laver tous ces détails tout simplement parce que l'appelant
15 veut établir un lien entre l'accusé et une entreprise criminelle commune.
16 Alors, si vous me le permettez, j'aimerais encore une minute, Madame,
17 Messieurs les Juges.
18 En d'autres mots, les constatations de la majorité selon lesquelles
19 le crime n'était pas une composante inhérente des opérations mais était une
20 caractéristique malheureuse de certains d'entre eux devraient être mises de
21 côté. Le fait que l'unité s'est conduite dans le but de poursuivre des
22 objectifs militaires n'a pas été remis en question mais devrait être
23 ignoré. La logique que les interactions systématiques de l'unité avec les
24 forces qui commettaient des crimes ne les aient pas entachés ni persuadés à
25 adopter le même comportement devrait être ignorée. Leur propension à agir
26 de façon légitime d'après le comportement criminel d'autres devrait être
27 utilisé contre eux. Si cela n'est pas une culpabilité par rapprochement, je
28 ne vois vraiment pas ce que cela peut être.
Page 68
1 Et, en fait, dans quelle mesure est-ce que les Juges de la Chambre de
2 première instance ont agi différemment que dans d'autres affaires qui ont
3 traité du schéma des crimes dans ces trois régions ? L'appel de
4 l'Accusation ne tient la route que si l'on adopte l'approche suivante :
5 d'abord, il y a eu un objectif criminel, rien d'autre ne se passait;
6 deuxièmement, l'accusé savait que l'entreprise criminelle commune avait
7 lieu et que l'objectif commun était poursuivi; et (3), qu'il avait
8 contribué de façon systématique à cet objectif commun. Et qu'il faut
9 ignorer, balayer de la main, deux années de plaidoirie et des centaines de
10 décisions prises à la majorité.
11 Et nous estimons, Messieurs les Juges, que l'appel devrait être
12 rejeté.
13 Merci.
14 M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Merci.
15 Nous allons faire une pause de 20 minutes et nous reprendrons avec la
16 réponse du conseil de M. Simatovic.
17 --- L'audience est suspendue à 14 heures 03.
18 --- L'audience est reprise à 14 heures 24.
19 M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Nous allons reprendre nos travaux.
20 Avant de donner la parole au conseil de Défense de M. Simatovic, est-ce que
21 je peux poser une question à l'Accusation, pour savoir si l'Accusation a
22 besoin de faire une pause avant sa réplique ou si nous pouvons continuer
23 après la réponse du conseil de Défense de M. Simatovic pour passer
24 directement à la réplique de l'Accusation ?
25 Mme JARVIS : [interprétation] Monsieur le Président, nous préférons faire
26 la pause après la réponse de M. Simatovic, si cela vous convient.
27 M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Merci.
28 Maintenant, je donne la parole à M. le conseil de Défense de M. Simatovic.
Page 69
1 Vous avez la parole et vous avez une heure à votre disposition.
2 M. PETROVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
3 Tout d'abord, il faut que je dise que la Défense de Franko Simatovic
4 considère l'appel du Procureur tout à fait non fondé. La Défense estime que
5 la conclusion de la Chambre de première instance selon laquelle Simatovic a
6 été acquitté sur tous les chefs d'accusation énumérés dans l'acte
7 d'accusation est fondée et légale. Tout autre opinion et point de vue
8 concernant le rôle, la position, et la responsabilité de Franko Simatovic
9 concernant les événements qui lui sont imputés serait non fondé et non
10 légal.
11 La Défense ici souligne en particulier qu'elle maintient sa réponse à
12 l'appel ou sa réplique à l'appel déposée le 5 novembre 2013, pour ce qui
13 est de toutes les allégations factuelles et juridiques énoncées lors de ce
14 procès.
15 D'abord, je souhaite donner quelques remarques d'introduction pour ce qui
16 est des explications en détail pourquoi ce jugement doit être retenu. Avant
17 tout, d'abord des remarques d'introduction. Bien que Simatovic ait été
18 acquitté sur tous les moyens, acquitté de tous les chefs d'accusation, il y
19 a une série de conclusions de la Chambre de première instance portant sur
20 des éléments concrets de la responsabilité pénale des inculpés avec
21 lesquels la Défense n'est pas d'accord et qui auraient été l'objet de
22 contestation de la Défense dans le cas où Franko Simatovic ait été
23 condamné.
24 Puisque la Chambre de première instance dans sa conclusion finale a
25 rendu un jugement correct et équitable, la Défense n'avait pas l'occasion
26 de contester certaines conclusions juridiques et factuelles avec lesquelles
27 elle n'est pas d'accord. Par prudence, la Défense veut souligner que si la
28 Chambre d'appel fait droit à n'importe quelle partie de l'appel du
Page 70
1 Procureur, Simatovic pourrait se trouver dans la situation dans laquelle
2 son droit à bénéficier d'un procès équitable et son droit d'interjeter
3 appel serait considérablement limité et dans certains aspects même
4 complètement exclus.
5 Si la Chambre d'appel considère que l'appel du Procureur est fondé en
6 partie ou dans sa totalité, et nous croyons que cette Chambre d'appel ne
7 trouvera pas que cet appel soit fondé, la seule conclusion que la Chambre
8 d'appel pourrait tirer est de renvoyer l'affaire à une autre Chambre de
9 première instance du Tribunal pour la révision du procès en appliquant des
10 critères juridiques appropriés puisque c'est la seule façon de protéger les
11 droits de l'inculpé, Simatovic, pour bénéficier d'un procès équitable, et
12 pour bénéficier du droit d'interjeter appel puisque, dans ce cas-là, si un
13 nouveau jugement est un jugement de condamnation, Simatovic aura la
14 possibilité d'interjeter appel et de contester les conclusions qu'il
15 considère comme non fondées.
16 L'Accusation, dans son premier moyen d'appel, requiert l'intervention
17 de la Chambre d'appel pour modifier ou corriger le critère juridique
18 appliqué concernant la participation à l'entreprise criminelle commune.
19 Dans le deuxième moyen d'appel, même si cela n'est pas explicitement
20 écrit dans le mémoire d'appel de l'appelant, le Procureur demande que la
21 Chambre d'appel applique la loi complètement différente -- ou la
22 jurisprudence concernant la visée spécifique, que cela soit modifié par une
23 nouvelle loi ou une nouvelle jurisprudence qui a été établie après que le
24 jugement d'acquittement ait été prononcé concernant Simatovic.
25 Le Procureur demande tout cela en s'appuyant sur les faits établis
26 dans certaines parties du jugement de première instance. Cette situation
27 est particulièrement délicate et essentiellement différente par rapport à
28 toutes les autres situations où devant la Chambre d'appel du Tribunal pour
Page 71
1 l'ex-Yougoslavie on discutait sur le fait s'il y a ou s'il n'y a pas de
2 limite pour ce qui est du droit de la Chambre d'appel de modifier un
3 jugement d'acquittement et de rendre un jugement de condamnation.
4 Il y a au moins deux circonstances qui sont particulièrement
5 importantes. Il n'y a aucun cas où un inculpé est acquitté de la part d'une
6 Chambre de première instance sur tous chefs d'accusation et ensuite
7 condamné de la part de la Chambre d'appel pour ce qui est de tous les
8 moyens d'appel ou certains moyens d'appel du Procureur.
9 Ensuite, il n'y a aucun cas où un inculpé qui a été acquitté de la
10 part de la Chambre de première instance de tous les chefs d'accusation
11 énumérés dans l'acte d'accusation a été condamné seulement parce qu'entre-
12 temps le droit applicable a été modifié ou la jurisprudence qui est
13 appliquée devant ce Tribunal a été modifiée.
14 Si la Chambre d'appel modifie la jurisprudence qui est énoncée dans la
15 décision concernant l'appel Sainovic et consorts pour ce qui est la visée
16 spécifique, ce serait un cas unique de voir que quelqu'un qui est acquitté
17 sur la base du point de vue d'une Chambre d'appel d'une certaine
18 composition soit acquitté [comme interprété] sur la base du point de vue de
19 la même Chambre d'appel mais dans une autre composition.
20 Dans ce cas-là, il ne s'agit pas de la discussion pour savoir si la Chambre
21 d'appel peut augmenter la peine prononcée à une personne condamnée ni du
22 cas pour savoir si une Chambre d'appel, sur la base des mêmes faits, peut
23 prononcer une condamnation sur la base d'un autre chef d'accusation avec
24 une incidence de tout cela sur la peine prononcée ou une incidence moindre.
25 Il s'agirait d'un précédent où les inculpés seraient, pour ainsi dire,
26 victimes d'une discussion du point de vue théorique et juridique. Cette
27 discussion ou ce traité est important pour ce qui est du domaine théorique
28 et juridique et pour ce qui est de l'avenir du droit pénal international.
Page 72
1 Mais Franko Simatovic ne doit pas être victime de cette discussion.
2 Dans cette situation particulière, qui diffère considérablement de toutes
3 les situations où la Chambre d'appel a traité de ce dilemme dans d'autres
4 procès précédents, la Défense considère que si la Chambre d'appel ne
5 confirme pas le jugement de la Chambre de première instance - mais elle
6 devrait le faire - ou qu'à titre de solution finale ne décide pas de
7 renvoyer l'affaire à une autre Chambre de première instance pour une
8 révision du procès, il est certain qu'il s'agirait de violation grave du
9 principe fondamental d'équité qui est reconnu dans le droit international
10 et dans de nombreux droits nationaux.
11 La convention internationale relative aux droits civils et politiques
12 en tant que source fondamentale du droit international, dans l'article 14,
13 alinéa 5, dispose que toute personne condamnée d'avoir commis un crime a le
14 droit que sa condamnation soit réexaminée par une instance judiciaire
15 supérieure conformément à la loi. Dans le rapport du secrétaire général des
16 Nations Unies à l'occasion de la création du Tribunal international, dans
17 le paragraphe 116, il est dit que le droit d'interjeter appel représente un
18 élément fondamental des droits civils et politiques établis par la
19 conversation internationale relative aux droits civils et politiques.
20 Si la Chambre d'appel fait droit à l'un des moyens d'appel du
21 Procureur, et la Défense est persuadée qu'il n'y a aucune raison pour
22 qu'elle procède ainsi, donc la seule solution est de renvoyer l'affaire à
23 une nouvelle Chambre de première instance, et dans le cas d'une
24 condamnation éventuelle, que l'appel soit considéré par la Chambre d'appel.
25 Si la Chambre d'appel fait droit à l'un des moyens d'appel du Procureur et
26 s'il y a un dilemme comment procéder, ce dilemme doit être résolu au profit
27 de l'inculpé. Et si la Chambre d'appel a un dilemme dans le contexte des
28 intérêts juridiques légitimes différents qui peuvent exister dans cette
Page 73
1 affaire, ce dilemme doit être résolu au profit des inculpés, Stanisic et
2 Simatovic.
3 Comme il a été déjà dit, le Procureur, même à titre subsidiaire, pour ce
4 qui est des moyens d'appel 1 et 2, demande que la Chambre d'appel désigne
5 une Chambre d'appel du Tribunal, une Chambre nouvelle qui appliquerait le
6 critère juridique pour lequel le Procureur considère qu'il soit correct.
7 Cette Défense, d'ailleurs, considère que pour ce qui est de la notion de
8 visée spécifique, comme cela a été indiqué dans le jugement et dans l'arrêt
9 dans l'affaire Perisic, c'est tout à fait correct. Elle s'appuie sur la
10 pratique la meilleure des tribunaux internationaux dont on a parlé plus
11 tard, et nous avons déjà parlé de cela en détail dans notre réplique.
12 Pour ce qui est du premier moyen d'appel du Procureur, le Procureur affirme
13 que la Chambre de première instance a commis une erreur puisqu'elle n'a pas
14 constaté que Simatovic avait partagé l'intention pour ce qui est de la
15 réalisation de l'objectif criminel commun de l'entreprise criminelle
16 commune. C'est parce que la Chambre de première instance n'a pas fourni une
17 opinion motivée pour ce qui est des éléments de l'entreprise criminelle
18 commune parce que le critère juridique erroné a été impliqué et qu'une
19 erreur a été également faite pour ce qui est des faits selon lesquels
20 Simatovic ne partageait pas l'intention commune.
21 Le Procureur, dans son appel, fait valoir que la Chambre de première
22 instance a acquitté Simatovic de sa responsabilité en tant que membre de
23 l'entreprise criminelle commune puisqu'il ne partageait pas l'intention de
24 réaliser l'objectif criminel commun, et la Chambre de première instance n'a
25 pas constaté si cet objectif criminel existait ou pas. Le Procureur
26 considère que, d'abord, il faudrait établir si l'élément matériel de
27 l'entreprise criminelle commune existait et, seulement après cela, si
28 l'élément moral ou mental du côté de l'inculpé existait.
Page 74
1 La Défense souligne qu'il n'y a aucune règle concernant l'ordre de
2 détermination des éléments de l'entreprise criminelle commune. La Défense
3 fait remarquer que la Chambre de première instance a procédé à une analyse
4 détaillée pour constater qu'il n'y avait pas d'élément mental de
5 l'entreprise criminelle commune concernant Simatovic. Si la Chambre de
6 première instance a conclu qu'il n'y avait que la préméditation comme
7 élément nécessaire pour l'existence de l'entreprise criminelle commune, il
8 n'y a aucune raison juridique pour que la Chambre de première instance
9 continue à déterminer s'il y a ou s'il n'y a pas d'élément matériel de
10 l'entreprise criminelle commune.
11 Il est clair que la seule solution dans une telle situation où il n'y a pas
12 d'élément mental est de rendre le jugement d'acquittement.
13 La Défense, également, fait remarquer que la Chambre de première instance a
14 considéré tous les éléments de l'entreprise criminelle commune qui sont
15 énumérés dans l'acte d'accusation. La Chambre de première instance a
16 considéré la base de crimes, toutes les formations armées ainsi que les
17 relations des inculpés envers ces formations. L'analyse faite par la
18 Chambre de première instance n'a pas amené à la conclusion disant que
19 l'entreprise criminelle commune existait et que Simatovic y participait.
20 Par rapport à la situation factuelle identique ou similaire où il y a
21 une entreprise criminelle commune et où il y a d'autres personnes qui y
22 participent, la Chambre de première instance n'avait pas pour obligation de
23 se prononcer là-dessus. Aussi, il importe de mentionner le point de vue du
24 Procureur selon lequel la Chambre de première instance a commis une erreur
25 parce qu'elle n'a pas analysé un aspect important pour ce qui est de
26 l'entreprise criminelle commune, à savoir la question concernant la
27 création de la Grande-Serbie. Discuter cette question par rapport à
28 Simatovic qui, à l'époque qui est couverte par l'acte d'accusation, était
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1 fonctionnaire de la Sûreté de l'Etat de la Serbie ayant un rang inférieur
2 et n'ayant disposé d'aucune possibilité d'influencer sur les objectifs
3 historiques et politiques des responsables politiques ou militaires, n'a
4 aucun sens.
5 L'Accusation, donc, fait savoir que la Chambre de première instance n'a pas
6 pris en considération toutes les preuves que l'Accusation considère comme
7 importantes, bien qu'il n'y ait aucune contestation concernant le point de
8 vue selon lequel la Chambre de première instance n'a pas pour obligation de
9 se prononcer sur toutes les preuves qui sont versées dans le dossier de
10 l'affaire. L'Accusation se plaint notamment du fait que pour ce qui est de
11 45 preuves énumérées à l'annexe B, ces preuves ne sont pas citées de la
12 part de la Chambre de première instance, et il est évident que ces preuves
13 sont importantes. Donc cette approche n'est pas fondée. Et par rapport à
14 ces 45 preuves extrêmement importantes, même 13 que le Procureur ne
15 mentionne pas du tout dans son mémoire en clôture.
16 La Défense conclut que la Chambre de première instance est arrivée à
17 la conclusion correcte selon laquelle il n'y avait pas l'élément mental
18 chez Simatovic qui est nécessaire pour la participation à l'entreprise
19 criminelle commune, a analysé tous les autres éléments d'importance pour ce
20 qui est de l'existence de l'entreprise criminelle commune et a développé
21 ses arguments. Par conséquent, cette branche du moyen d'appel 1(A) est tout
22 à fait non fondée et la Chambre d'appel doit la rejeter.
23 Dans la branche du moyen d'appel 1(B), le Procureur se plaint que la
24 Chambre de première instance a appliqué le critère juridique erroné pour ce
25 qui est de l'évaluation des preuves, en particulier pour ce qui est de
26 l'élément moral des accusés, et elle s'est appuyée sur des fragments des
27 pièces à conviction et non pas à la totalité de ces convictions [comme
28 interprété].
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1 Comme cela a été déjà dit, la Chambre de première instance n'a pas
2 pour obligation de se prononcer sur toutes les 3 226 pièces à conviction
3 versées au dossier, vu que c'est impossible du point de vue technique et
4 juridique et bien que la Chambre de première instance n'ait pas pour
5 obligation et ne puisse pas se prononcer sur toutes les allégations et
6 toutes les preuves.
7 Quand il s'agit de mens rea de Simatovic, toutes les allégations du
8 Procureur dans son mémoire en clôture ont été examinées, et la Chambre
9 d'appel s'est prononcée là-dessus.
10 Le Procureur, dans son mémoire en clôture, essaie de prouver la
11 préméditation de Simatovic en présentant des allégations concernant les
12 événements à Lovinac, sa participation dans l'opération à Vukovar et Udar.
13 Chacune de ces assertions que le Procureur a proposées comme étant des
14 pièces à conviction a été examinée et considérée, ainsi que d'autres pièces
15 à conviction présentées par le Procureur dans son mémoire en clôture. Mais
16 pour ce qui est de Simatovic et de la conclusion finale de la Chambre de
17 première instance, c'est qu'il n'y a pas d'élément moral pour ce qui est de
18 l'entreprise criminelle commune.
19 La Chambre de première instance a analysé et utilisé cette approche
20 méthodologique et logique pour ce qui est de toutes les activités de
21 Simatovic et elle constate qu'aucune de ces activités, ni prise
22 individuellement ni dans leur totalité, ne remplit le critère juridique
23 requis pour le jugement de condamnation.
24 La Défense fait remarquer ici que bien que la branche du moyen
25 d'appel 1(B) concerne les deux accusés, aucun argument présenté par le
26 Procureur ne concerne Simatovic, et donc il faut le rejeter dans sa
27 totalité. Tout ce que le Procureur indique dans cette branche de moyen
28 d'appel est la tentative d'imposer une interprétation différente des
Page 77
1 preuves, mais il ne dit pas où gît l'erreur pour ce qui est de la
2 conclusion de la Chambre d'appel.
3 Dans la section (D) de son mémoire en appel, le Procureur souhaite
4 aider les Juges de la Chambre en récapitulant les moyens de preuve
5 présentés devant la Chambre de première instance. Ce qui est dit dans la
6 section (D) dépasse l'acte d'appel du Procureur. Dans son premier moyen
7 d'appel, le Procureur se plaint des conclusions de la Chambre de première
8 instance quand il s'agit d'établir l'intention de l'entreprise criminelle
9 commune comme l'élément moral de l'accusé. Dans la section (D), cependant,
10 le Procureur expose les faits sans dire clairement où a erré la Chambre de
11 première instance. La section (D) du premier moyen d'appel est un mélange
12 des conclusions de la Chambre de première instance, de citations de
13 différents moyens de preuve et puis aussi les conclusions du Procureur qui
14 ont pour but, comme il dit, d'aider les Juges de la Chambre d'appel pour
15 corriger l'erreur de droit commise, comme il dit, par la Chambre de
16 première instance.
17 Dans cette partie - dans la section (D) - nous trouvons toute une
18 série des conclusions de la Chambre de première instance que la Défense
19 aurait contestées si la Chambre avait prononcé un jugement portant
20 condamnation. La Défense considère que cela ne représente rien d'autre
21 qu'une réouverture des moyens de preuve du Procureur.
22 Le premier moyen d'appel du Procureur dit que le Procureur s'est
23 trompé en commettant une erreur de droit et de fait quand il a dit que
24 l'accusé avait disposé de l'élément moral en ce qui concerne sa
25 responsabilité dans l'entreprise criminelle commune. Donc il s'agit de
26 l'élément moral.
27 Cependant, dans la section (D), ce que fait le Procureur, c'est de
28 nous présenter son interprétation des conclusions de la Chambre de première
Page 78
1 instance plus une explication supplémentaire des moyens de preuve
2 présentés.
3 C'est pour cela que la Défense considère qu'il faut rejeter
4 absolument tout ce qui se trouve dans la section (D) du mémoire de
5 l'appelant. La section (D) doit être rejetée en bloc. Pourquoi ? Parce
6 qu'ici, ce que fait le Procureur, c'est de rouvrir sa présentation des
7 moyens de preuve sans pour autant dire où exactement aurait erré la Chambre
8 de première instance. La Défense considère qu'ici, le Procureur souhaite
9 remplacer les conclusions de la Chambre de première instance par ses
10 propres conclusions, et c'est quelque chose qui suffit pour rejeter en bloc
11 la section (D) du mémoire de l'appelant selon la jurisprudence de ce
12 Tribunal.
13 La Défense accentue que dans sa réplique au mémoire de l'appelant,
14 elle ne peut pas présenter à nouveau ses moyens de preuve et elle ne peut
15 pas non plus analyser les conclusions de la Chambre de première instance
16 parce que cela ne rentre pas tout simplement dans le cadre de réplique. La
17 Défense a donné ses positions dans sa réplique et ne peut pas à présent les
18 répéter.
19 En ce qui concerne le sous-moyen (C), la Défense considère que la
20 Chambre de première instance n'a pas erré quand elle a établi qu'il n'y
21 avait pas de préméditation de Simatovic en ce qui concerne l'entreprise
22 criminelle commune.
23 Le Procureur suggère que la Chambre de première instance a commis une
24 erreur de fait quand elle a conclu que Stanisic et Simatovic n'ont pas
25 partagé l'objectif criminel commun quand il s'agissait de déplacer de façon
26 permanente la population non-serbe de grandes parties de Croatie et de
27 Bosnie. Le Procureur dit que Stanisic et Simatovic ont créé, ont déplacé,
28 ont entraîné, ont financé, ont appuyé et aidé un grand nombre de groupes
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1 armés et ont continué à le faire en sachant que ces groupes participent
2 dans le déplacement de la population.
3 Il est clair que cette position généralisée du bureau du Procureur
4 n'a pas finalement de base et d'appui dans les moyens de preuve. Et le
5 Procureur demande à la Chambre d'appel d'examiner la totalité des moyens de
6 preuve en considérant que la Chambre de première instance a omis de le
7 faire. Cependant, c'est justement le mémoire de l'appelant, quand on
8 regarde dans son ensemble et surtout quand il s'agit de Simatovic, eh bien,
9 c'est justement de là que donc découlent les liens entre l'accusé et les
10 événements qui se sont déroulés en 1991 à Lovinac, en 1992 à Bosanski Samac
11 et à Doboj, et en 1995 à Sanski Most. De plus, le Procureur dit que
12 Simatovic n'a eu qu'un seul contact avec un seul membre de l'entreprise
13 criminelle commune, prétendu membre, Milan Martic, et ceci en 1991.
14 Donc, il est clair que le Procureur est conscient du fait qu'il n'y a
15 pas eu suffisamment de preuve qui prouve ces activités criminelles
16 prétendues de Simatovic, alors même que le Procureur dit que la Chambre de
17 première instance n'a pas examiné la totalité des moyens de preuve.
18 Justement, ceci prouve que la thèse de la responsabilité de Simatovic ne
19 tient pas debout.
20 De plus, le Procureur énumère des activités de Simatovic où il aurait
21 participé dans la campagne d'extermination massive de la population non-
22 serbe. Donc, le Procureur va dire que Simatovic a créé de nombreux groupes
23 armés sans dire pour autant quels sont exactement ce groupe et quels sont
24 les moyens de preuve qui prouvent justement sa participation à la création
25 de ce groupe. Le Procureur dit ensuite que Simatovic a déployé de nombreux
26 groupes armés, sans pour autant dire quels sont ces groupes et où est-ce
27 qu'il les a déployés et quand.
28 Donc, le Procureur, en même temps, n'isole pas les preuves concrètes
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1 qui corroborent cela. De plus, le Procureur dit que Simatovic a entraîné
2 des groupes armés, mais en oubliant que la Chambre de première instance, se
3 basant sur des moyens de preuve matériels, a établi que Simatovic, pendant
4 toute la période pertinente pour l'acte d'accusation, était un homme
5 travaillant dans le 2e Groupe d'information dans la DB et que ce n'était
6 pas un instructeur militaire ou de police.
7 De plus, le Procureur dit que Simatovic a financé de nombreux groupes
8 armés. En même temps, le Procureur n'a pas vraiment montré, mis le doigt
9 sur la preuve qui prouverait que Simatovic pouvait financer qui que ce
10 soit. Ce qui est vraiment pas clair, c'est de savoir si le Procureur dit
11 que Simatovic a financé lui-même ce groupe, ou bien est-ce qu'il a utilisé
12 les moyens financiers de la SDB pour les financer. Il est clair que pour
13 les deux, Simatovic n'avait pas de capacité de position pour le faire. Et
14 donc, cette position du Procureur n'a aucun sens.
15 Simatovic, de par sa position, de par sa fonction au sein de
16 l'hiérarchie de la SDB ne pouvait financer personne. Tout ce que nous avons
17 dit concernant le financement en vaut aussi pour les autres appuis
18 prétendument fournis par Simatovic aux groupes armés.
19 En ce qui concerne le lien entre Simatovic et Milan Martic,
20 participant à l'entreprise criminelle commune, l'entreprise ici ne souhaite
21 pas discuter de l'éventuelle existence de mens rea chez Martic, mais la
22 Défense est convaincue que le Procureur n'a présenté aucun moyen de preuve
23 ou n'a montré aucun moyen de preuve qui montrerait que Simatovic avait
24 partagé la même intention que Martic.
25 Simatovic a été à Knin pendant une période très brève en 1991 à
26 l'époque où les crimes n'avaient pas encore été commis, surtout pas les
27 crimes qui figurent dans l'acte d'accusation, où il y a eu des activités
28 sporadiques, des actions sporadiques et ceci pour contrôler ce territoire
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1 et pour se défendre par rapport aux attaques des forces croates. Donc, il
2 n'est absolument pas clair quel est l'élément de preuve qui a été présenté
3 qui démontre que Simatovic a partagé avec Martic cette intention criminelle
4 de déporter la population non-serbe de la SAO Krajina, surtout quand on
5 sait que de telles opérations criminelles n'ont pas existé à l'époque. A
6 l'époque où vous avez une fluctuation naturelle de la population et qui
7 quitte les zones de combat pour aller vers des zones paisibles, eh bien, il
8 faut faire une différence claire entre les preuves qui démontreraient que
9 Simatovic était au courant de l'intention de chasser la population non-
10 serbe et qu'il la partageait avec Martic. Et nous n'avons pas trouvé de
11 tels éléments de preuve.
12 Les raisons que le Procureur a essayé de présenter dans son mémoire
13 de l'appelant, eh bien, ce sont des raisons qui ne sont pas logiques, qui
14 ne sont pas fondées dans les éléments de preuve en l'espèce.
15 Le Procureur, par exemple, dit que Simatovic était un collaborateur
16 proche de Martic et il se fonde sur le jugement de première instance.
17 Cependant, le Procureur oublie que le jugement montre clairement qu'il
18 n'existait pas d'éléments de preuve indiquant que Martic avait discuté de
19 son intention de déporter les non-Serbes. De plus, dans les paragraphes que
20 cite le Procureur, on ne parle que de Stanisic, pas de Simatovic. Donc, on
21 a à aucun moment mis le doigt sur cette prétendue collaboration étroite
22 entre Martic et Simatovic. Il est clair qu'il n'existe pas d'éléments de
23 preuve qui témoigneraient de cela.
24 Le seul élément de preuve portant sur une éventuelle participation de
25 Simatovic dans des opérations de Krajina, le Procureur trouve, et il se
26 trompe dans la déposition de Babic, il s'agit de sa déposition sur son
27 plaidoyer de culpabilité quand la Défense n'a pas pu le contre-interroger.
28 M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Veuillez ralentir, s'il vous plaît.
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1 Veuillez ralentir. Parce que nous n'avons pas entendu l'interprétation.
2 L'INTERPRÈTE : L'interprète s'excuse. Elle a oublié d'allumer le micro.
3 Oui. Le problème a été résolu, Monsieur le Président. Le micro n'a pas été
4 allumé.
5 M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Vous pouvez continuer.
6 M. PETROVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
7 C'est que surtout ou pas fondé, c'est l'affirmation du Procureur qui
8 affirme qu'il existe un rapport en continu entre les accusés et Arkan et
9 ses gardes de volontaires serbes, et ce, c'est depuis le début de l'année
10 1991 jusqu'en 1995. Il n'y a pas de preuve et il semble que le Procureur
11 lui-même n'est pas sûr de l'existence d'un quelconque lien entre Simatovic
12 et Arkan, pas avant 1995.
13 Nous avons déjà dit que nous ne sommes pas d'accord avec certaines
14 conclusions de la Chambre de première instance. Une des conclusions porte
15 sur la prétendue participation de Simatovic dans le déploiement d'Arkan de
16 sa Garde de volontaires serbes en 1995 à Treskavica. Dans la réplique de la
17 Défense, nous avons parlé de cela en détail, et nous avons attiré
18 l'attention des Juges sur la preuve qui montre clairement qu'à l'époque de
19 cette opération Simatovic n'était absolument pas présent sur le territoire
20 de l'ex-Yougoslavie; au contraire, il se trouvait en Grèce.
21 Il n'existe pas de preuve qui prouverait au-delà de tout doute
22 raisonnable que Simatovic ait participé ou qu'il ait eu un rôle quelconque
23 quand il s'agissait d'envoyer Arkan et ses volontaires à Sanski Most en
24 1995, et nous avons parlé de cela en détail aussi.
25 Pour ce qui est du deuxième moyen d'appel du Procureur, il s'agit en fait
26 de l'affirmation selon laquelle la Chambre de première instance a commis
27 une erreur pour ce qui est du droit applicable en considérant qu'il était
28 nécessaire d'établir que les actes de la personne qui aide et encourage
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1 visent spécifiquement à faciliter la commission des crimes; et dans ce cas
2 concret, lorsqu'il s'agit des crimes commis à Bosanska Samac, à Doboj et
3 dans la Région autonome serbe de Krajina.
4 Pour ce qui est du sous-moyen d'appel 2(A), la Défense a exposé ses points
5 de vue en détail dans son mémoire en réplique. La Défense a dit pourquoi
6 elle considère que la condition concernant la visée spécifique, comme
7 présentée dans ce jugement, est établie dans la jurisprudence de ce
8 Tribunal et d'autres tribunaux internationaux, ainsi que dans le droit
9 international coutumier. La Défense considère qu'il n'y a aucune raison
10 pour que la Chambre d'appel confirme le point de vue énoncé par la même
11 Chambre d'appel dans l'arrêt Perisic. La Défense, pourtant, veut développer
12 son point de vue dans le cas où cette Chambre d'appel arrive à la
13 conclusion que le point de vue énoncé dans l'arrêt Perisic ne soit pas
14 adéquat.
15 La Défense fait remarquer, et c'est très lié à une question de
16 principe, que quand il s'agit de ce deuxième moyen d'appel concernant la
17 visée spécifique, dans la décision de la Chambre d'appel pour ce qui est du
18 jugement concernant la peine prononcée dans l'affaire Dragan Nikolic, il
19 est dit que le principe de l'application de lex mitior, d'une loi moins
20 sévère, peut être appliqué concernant d'éventuelles modifications du Statut
21 du Tribunal international, ce qui dans ce cas concret concernerait les
22 modifications concernant le type de sanctions et la durée des peines
23 d'emprisonnement qui peuvent être prononcées.
24 La loi pénale matérielle qui est appliquée devant ce Tribunal
25 international est le Statut du Tribunal international. Etant donné que dans
26 le Statut il n'y a que quelques éléments constitutifs des infractions
27 pénales qui sont énumérées dans seulement quatre articles, et seulement
28 dans un article sont définies les formes de responsabilité, dans la
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1 jurisprudence de ce Tribunal international sont définies les infractions
2 pénales, les formes de responsabilité, et cela représente la loi pénale
3 matérielle comme cela est compris dans les pays où existe le système de
4 droit civil.
5 Si la jurisprudence est modifiée, et je me permets de dire si la loi pénale
6 a changé lors du procès, selon le principe lex mitior, concernant
7 Simatovic, il faut appliquer la règle juridique qui est la plus favorable
8 pour Simatovic. Si lors du procès concernant Simatovic il y a deux notions
9 de la visée spécifique et si ces deux notions ont le même poids juridique -
10 et dans ce cas-là c'est vrai puisque ces deux notions ont été présentées
11 par la même Chambre d'appel - alors, concernant Simatovic, il faut
12 appliquer la notion plus favorable de visée spécifique comme énoncée dans
13 le jugement de première instance.
14 Ici, la Défense fait référence brièvement à l'opinion de la Grande Chambre
15 de la Cour européenne des droits de l'homme dans l'affaire Scoppola contre
16 Italie, c'est la deuxième affaire, où dans le paragraphe 109, la cour
17 confirme le principe selon lequel dans les cas où il y a des différences
18 entre les lois pénales à l'époque où le crime est commis par rapport aux
19 lois adoptées ultérieurement mais qui étaient adoptées avant le prononcé du
20 jugement définitif, les tribunaux sont obligés d'appliquer la loi dont les
21 dispositions sont les plus favorables pour l'inculpé.
22 Et pour ce qui est du Statut de Rome de la Cour pénale internationale,
23 l'article 24(2) dit qu'il faut appliquer la loi qui est plus favorable pour
24 l'inculpé, pour l'accusé, si cela est modifié avant le prononcé du
25 jugement.
26 La Défense, pour ce qui est du deuxième moyen d'appel (B) et le troisième
27 moyen d'appel, veut donc souligner la chose suivante. L'Accusation affirme
28 que la Chambre d'appel, à titre complémentaire ou subsidiaire, pour ce qui
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1 est des raisons énoncées dans le moyen d'appel 2(A), a commis une erreur
2 pour ce qui est des faits, que selon le Procureur aucune Chambre de
3 première instance raisonnable n'aurait conclu que Stanisic et Simatovic
4 auraient été des personnes qui ont aidé et encouragé la commission des
5 crimes perpétrés dans les municipalités de Bosanski Samac et Doboj et sur
6 le territoire de la Région autonome de serbe de Krajina, même dans la
7 situation où l'élément de visée spécifique aurait été adopté comme élément
8 constitutif de l'élément matériel pour ce qui est de l'aide et de
9 l'encouragement.
10 De plus, le Procureur dit qu'aucune Chambre de première instance
11 raisonnable n'aurait conclu qu'il y ait eu la contribution des accusés pour
12 ce qui est de la commission des crimes à Bosanski Samac et à Doboj et sur
13 le territoire de la Région autonome serbe de Krajina, qui n'était pas
14 spécifiquement visée à faciliter la commission des crimes. La Défense, dans
15 son exposé oral, affirme que les points de vue du Procureur concernant
16 cette question sont absolument inacceptables et non fondés et que la
17 Chambre de première instance a conclu de façon correcte que Simatovic
18 n'était pas responsable pour ce qui est de l'aide et de l'encouragement de
19 la commission des crimes à Bosanski Samac, Doboj et dans la Krajina.
20 La Défense réitère que dans les cas où, sur la base des preuves
21 circonstancielles, on arrive à la conclusion pour établir un fait sur
22 lequel s'appuie un jugement de condamnation, cette conclusion devrait être
23 la seule conclusion raisonnable à tirer.
24 Pour ce qui est des événements survenus à Bosanski Samac, la Défense
25 a fait valoir qu'il est évident et non ambigu que dans la municipalité de
26 Bosanski Samac une nouvelle municipalité était organisée pour organiser le
27 peuple serbe pour la défense sur ce territoire. Et sur ce territoire,
28 c'était le 17e Groupe tactique de la JNA qui avait le rôle dominant, qui
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1 était très bien armé, qui avait des pièces d'armes lourdes et légères.
2 Et les responsables de Bosanski Samac ont établi des contacts directs
3 avec le commandement de l'armée de l'air yougoslave à Belgrade, plus
4 précisément avec le général Bajic. Il est évident, donc, que mis à part
5 cette organisation d'une nouvelle municipalité de Bosanski Samac, un simple
6 agent de l'administration du renseignement du département de la Sûreté de
7 l'Etat, qui en plus se trouve dans son bureau à Belgrade, ne peut avoir
8 aucune incidence importante sur les événements survenus à Bosanski Samac,
9 et encore moins avoir une incidence sur la direction prise par ces
10 événements.
11 La seule conclusion raisonnable qu'on puisse tirer de cela est que
12 Franko Simatovic ne pouvait pas et n'avait pas de pouvoir pour aider et
13 encourager à la commission des crimes à Bosanski Samac pendant la période
14 couverte par l'acte d'accusation puisqu'il n'y était pas physiquement
15 présent.
16 Pour ce qui est de Doboj, il est évident que l'intention du Procureur
17 est d'établir un lien entre les événements survenus à Doboj et les unités
18 de la Sûreté de l'Etat de la République de Serbie par l'intermédiaire de
19 Radojica Raja Bozovic. De nombreuses preuves présentées lors du procès
20 montrent sans aucun doute que Radojica Raja Bozovic était membre du MUP de
21 la Republika Srpska de Bosnie-Herzégovine pendant la période couverte par
22 l'acte d'accusation. Dans les documents du MUP de la Republika Srpska de
23 Bosnie-Herzégovine pour les mois d'avril et mai 1992, Bozovic est indiqué
24 comme étant membre de ce ministère et qu'il touchait le salaire de ce
25 ministère. Il y a également d'autres preuves nombreuses qui démontrent cela
26 de façon directe.
27 Pour ce qui est de l'entraînement des unités spéciales à Ozren, au-
28 dessus de Doboj, c'est un certain Slobodan Katanic qui commandait cet
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1 entraînement, membre du MUP BiH. Le crime commis à Doboj, comme retenu
2 contre les inculpés dans l'acte d'accusation, est lié à la date du 12
3 juillet 1992, et il est évident d'après les preuves versées au dossier que
4 Bozovic n'a pas pu y participer. A savoir, Bozovic, pendant la période du
5 26 juin 1992 au 23 juillet 1992, était hospitalisé à l'hôpital général à
6 Doboj puisqu'il était blessé. Et après être sorti de l'hôpital, il a été
7 affecté à d'autres tâches.
8 Etant donné que Radojica Bozovic est le seul lien avec l'accusé et
9 étant donné que le Procureur s'appuie sur ce lien pour conclure qu'il était
10 impliqué à la commission des crimes à Doboj, et vu toutes ces preuves
11 directes, la seule conclusion raisonnable serait la conclusion qui a été
12 tirée par la Chambre de première instance, à savoir que Franko Simatovic
13 n'avait rien à voir avec les événements et crimes perpétrés à Doboj.
14 Ensuite, le Procureur fait savoir à la Chambre d'appel que la TO et
15 la police de la Région autonome serbe de Krajina avaient commis des
16 meurtres, déportations et persécutions de civils non-serbes dans la Région
17 autonome serbe de Krajina entre avril 1991 et fin 1994. Bien que la Chambre
18 de première instance ait établi qu'il y avait des liens entre l'accusé et
19 certains groupes, comme la police de la Région autonome serbe de Krajina et
20 la TO de Krajina, la Chambre de première instance a constaté de façon
21 correcte que ces liens, à savoir ces preuves, ne sont pas suffisants pour
22 en tirer la conclusion que Franko Simatovic et l'autre accusé ont aidé et
23 encouragé la commission des crimes perpétrés de la part de la police de la
24 Région autonome serbe de Krajina et TO Krajina.
25 La Chambre de première instance a constaté de façon explicite que des
26 liens entre Franko Simatovic et certains groupes dans la Krajina ne sont
27 pas suffisants pour tirer la seule conclusion raisonnable selon laquelle
28 Simatovic a aidé et encouragé les crimes perpétrés par ces groupes. Même si
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1 toutes les conclusions de la Chambre de première instance avec lesquelles
2 la Défense n'est pas tout à fait d'accord soient absolument exactes, la
3 seule explication raisonnable alternative des agissements de Simatovic
4 serait qu'il s'agissait des liens qui avaient pour but de soutenir des
5 efforts de guerre des Serbes dans la Krajina, à savoir des efforts pour
6 prendre le contrôle du territoire, et non pas pour aider à la commission
7 des crimes.
8 Pour que les choses soient encore plus claires. Même si nous ne
9 sommes pas d'accord avec certaines des conclusions sur les faits faites par
10 les Juges de la Chambre de première instance, même si ces conclusions
11 n'étaient pas erronées, on ne pouvait pas en arriver à la conclusion que
12 ces liens étaient établis pour commettre un crime et pas dans un autre but.
13 Le Procureur devait proposer des éléments de preuve démontrant que
14 les activités de Simatovic dans la Krajina dans la période très limitée
15 entre le mois d'avril 1991 et jusqu'en août 1991 avaient pour seul but
16 d'aider et d'appuyer la commission des crimes qui sont imputés dans l'acte
17 d'accusation. Puisqu'il n'y a pas de telles preuves, il est clair que le
18 Procureur va appliquer le test de responsabilité de la façon la plus large
19 possible.
20 Il est clair que Simatovic a séjourné à Knin pendant une période de
21 deux mois et demi entre le mois de mai 1991 et le mois d'août 1991, mais
22 son activité ne représentait pas une aide directe à la commission des
23 crimes. C'est très important de le dire. Il est aussi important de dire que
24 pendant la période où Simatovic a séjourné à Knin, il n'y a pas eu de
25 crimes de commis, et Simatovic ne pouvait pas être au courant, donc, de la
26 commission de tels crimes.
27 Les preuves montrent clairement que Milan Martic, en 1990, avait déjà
28 organisé la milice de la SAO Krajina et il avait pris la décision de
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1 comment la financer et comment l'entraîner. Nous ne devons pas oublier que
2 cette milice a été payée jusqu'en décembre 1990 depuis Zagreb, et par la
3 suite par les entreprises actives dans la SAO Krajina. C'est Martic qui a
4 décidé de la répartition des moyens trouvés. C'est Martic qui a aussi
5 décidé du financement venu de l'étranger. Il existe aussi des éléments de
6 preuve qui indiquent que le ministère de la Défense de la République de
7 Serbie a financé la TO de la SAO Krajina en passant par différentes
8 administrations à Knin et banques commerciales. Donc, tous ces accords
9 portant sur le financement se sont faits entre le gouvernement de la SAO
10 Krajina et Slobodan Milosevic et le ministre des Affaires intérieures,
11 Zoran Sokolovic. Simatovic n'avait rien à voir avec tout cela. Parce que,
12 d'après son rôle, il est bien au-dessous dans la hiérarchie de l'Etat.
13 Simatovic ne fait pas partie du cercle des gens qui prennent des
14 décisions concernant la politique de l'Etat, quel que soit son aspect, dont
15 le financement. Il n'avait tout simplement pas de pouvoir dans le cadre de
16 la DB de Serbie ou à un autre niveau pour prendre de telles décisions.
17 La position de Simatovic était telle qu'il ne pouvait absolument pas
18 disposer des moyens financiers qui permettraient de financer les forces des
19 Serbes dans la SAO Krajina.
20 Le Procureur dit que Simatovic a pris part personnellement dans
21 certaines activités dans lesquelles Martic a agi avec l'intention de
22 commettre des crimes. On met en exergue tout particulièrement Lovinac. La
23 Défense affirme que Simatovic n'avait rien à voir avec l'attaque sur
24 Lovinac. A l'époque, il se trouvait à Lika, à côté du plus grand dépôt de
25 la JNA. Ce dépôt a été bloqué par les forces croates, et il n'y avait que
26 la JNA qui pouvait décider de casser ce blocus. Les forces du Corps de Knin
27 ont cassé ce blocus, ils ont débloqué le dépôt, et Mladic a écrit en détail
28 sur cette action dans ses cahiers. Suite à ces activités de combat, la
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1 population de Lovinac a quitté Lovinac. Dans les cahiers de Mladic, qui
2 représentent un élément de preuve en l'espèce, on ne mentionne nulle part
3 Simatovic. La seule conclusion à laquelle on peut arriver à la lecture de
4 ces cahiers, c'est que cette attaque a été faite et est l'œuvre de la JNA
5 intégralement pour des raisons tout à fait légitimes.
6 La Défense dit aussi que Simatovic n'avait rien à voir avec les
7 activités à Glina et à Struga en été 1991, et nous en avons parlé dans
8 notre réplique.
9 Eh bien, il nous reste à aborder la question de l'aide de Simatovic à
10 Sanski Most et sa participation éventuelle dans l'entreprise criminelle
11 commune.
12 Le Procureur dit que la seule conclusion raisonnable tient à dire que
13 les accusés ont financé et déployé Arkan à Sanski Most en 1991. Les membres
14 de l'entreprise commune ont utilisé Arkan et la SDG pour nettoyer Sanski
15 Most de la population non-serbe. Le Procureur dit aussi que la SDG a commis
16 de nombreux crimes contre la population civile non-serbe dans la SBSO,
17 Bijeljina et Zvornik, avec l'aide de la SDB de Serbie. Et les accusés
18 devaient, d'après le Procureur, être au courant de cela.
19 Nous devons dire que le Procureur n'a pas fait appel de la conclusion
20 de la Chambre disant que Simatovic n'a pas été responsable des crimes
21 commis par la SDG avant 1995 dans la SBSO, Bijeljina et Zvornik, mais
22 demande que la Chambre d'appel proclame Simatovic responsable d'avoir aidé
23 et soutenu les crimes commis à Sanski Most. Pourquoi ? Parce qu'il devait
24 être au courant de la possibilité que la Garde des volontaires serbe
25 commette les crimes de meurtres et d'expulsions.
26 La Défense, au jour d'aujourd'hui, n'a pas compris d'où Simatovic
27 tient ses connaissances préalables. Il n'existe aucun moyen de preuve,
28 aucun élément de preuve qui ferait le lien entre Simatovic et les
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1 événements de Sanski Most.
2 Il a été en revanche prouvé que Arkan et la Garde des volontaires
3 serbe a été envoyé à Banja Luka comme membre de la RSK sous le commandement
4 direct du 11e Corps d'armée. Le témoin Pejlovic, qui était le premier
5 remplaçant d'Arkan au niveau de sa Garde de volontaires, dans sa déposition
6 devant la Chambre de première instance, a prouvé cela dans sa déposition.
7 De plus, Arkan, sur le territoire de Sanski Most, est venu, appelé par le
8 sommet de la Republika Srpska et avec un accord avec les officiers de haut
9 rang de la RSK, et il s'est placé sous le commandement direct du général
10 Talic qui était à l'époque le commandant du 1er Corps d'armée de la VRS et
11 qui était le commandant de la Défense de Banja Luka et de Sanski Most.
12 Donc, dans ce contexte, quand la Défense, d'un côté, met tous les
13 éléments de preuve et de l'autre côté, la position, les niveaux de
14 responsabilité de Simatovic au niveau de la SDB, il n'est absolument pas
15 clair sur quelle base se fonde le Procureur pour dire que Simatovic avait
16 la possibilité et le pouvoir d'organiser et de payer les soins médicaux
17 pour les membres des volontaires serbes.
18 Il en va de même pour l'opération Araignée, où on dit que Simatovic,
19 avec Stanisic, a fait en sorte que les volontaires serbes puissent prendre
20 part à l'opération. Et là, le Procureur parle de Simatovic, alors qu'il
21 n'est pas clair de quelle façon il ait pu prendre part à cette opération.
22 Il n'existe aucun moyen de preuve qui montrerait que Simatovic a
23 fourni des munitions et des uniformes, et tout ceci par rapport à la
24 position de Simatovic à l'époque dans la DB.
25 Donc, la Défense arrive à la conclusion que des nombreux moyens de
26 preuve montrent que Simatovic, de par sa position, de par sa profession, de
27 par la portée de ses activités, ne pouvait même pas proposer l'aide
28 financière et ne parlons pas de fournir l'aide financière à personne, et
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1 surtout pas à la SDG.
2 Donc, la Défense arrive à la conclusion que la Chambre d'appel doit
3 rejeter les trois moyens d'appel du Procureur et demande à la Chambre
4 d'appel de confirmer le jugement d'acquittement, car c'est le seul jugement
5 possible compte tenu la situation de droit et de faits en l'espèce.
6 Je vous remercie, Madame le Juge, Messieurs les Juges.
7 M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Je vous remercie, Maître Petrovic.
8 Nous allons à présent prendre la pause. C'est une pause qui va durer 20
9 minutes, et nous allons reprendre nos travaux à 4 heures moins quart.
10 --- L'audience est suspendue à 15 heures 23.
11 --- L'audience est reprise à 15 heures 44.
12 M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Nous allons reprendre l'audience et
13 donner parole à l'Accusation pour quelle puisse répondre.
14 Mme JARVIS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président, Madame,
15 Monsieur les Juges. J'ai quatre points en guise de réponse, et je vais
16 tenter d'être brève.
17 Le premier point concerne les arguments présentés par le conseil de M.
18 Stanisic, à savoir que l'Accusation, dans son appel, cherche à échafauder
19 une nouvelle maison sans regarder si les portes et fenêtres existantes
20 peuvent être utilisées.
21 Nous acceptons que les portes et les fenêtres de la maison échafaudée par
22 la Chambre de première instance sont bien construites. Mais la Chambre de
23 première instance a construit sa maison, échafaudé sa maison sans
24 fondation, et c'est le problème qu'il nous cause, à savoir l'objectif
25 criminel commun, l'analyse portant là-dessus et l'analyse de la
26 connaissance de l'accusé dudit objectif criminel commun. Et sans ces
27 fondations, la maison échafaudée par la Chambre de première instance ne
28 peut pas être une maison construite de façon solide.
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1 La Défense a tenté d'aborder ces deux problèmes lors de leurs
2 arguments, mais rien dans ce qu'ils ont dit ne nous permet de comprendre à
3 quel endroit se trouve l'analyse manquante dans le jugement, l'analyse
4 manquante sur l'objectif criminel commun et la connaissance des accusés
5 concernant cet objectif commun. Les fondations de la maison ne sont
6 toujours pas là.
7 Madame, Messieurs les Juges, nous admettons que la Chambre de
8 première instance a fait de nombreuses constatations au niveau du jugement
9 qui sont fondées. Outre ce que nous mettons en cause au moyen d'appel
10 numéro 3 et le manque d'objectif criminel commun, nous acceptons les
11 constatations factuelles déterminées par la Chambre, comme nous l'avons dit
12 dans notre appel et présentés aujourd'hui lors de nos arguments. Mais nous
13 souhaitons, Madame, Messieurs les Juges, que vous puissiez trouver une
14 solution aux problèmes des fondations manquantes et que vous les ajoutiez
15 pour que la maison puisse être construite correctement. Cela étaye notre
16 position, à savoir cette affaire n'est pas si difficile que cela à
17 résoudre.
18 Le conseil de M. Stanisic a conclu ses arguments en disant que le
19 bureau du Procureur ne peut présenter son appel si elle peut établir trois
20 éléments, à savoir qu'il y avait un objectif commun lorsque les crimes sont
21 inhérents au contrôle territorial, si nous admettons que l'accusé était au
22 courant de cela et que les accusés y ont contribué de façon constante.
23 Nous sommes d'accord avec ces trois propositions-là. Mais le problème
24 qui se pose, c'est que malgré tous les éléments présentés par l'Accusation
25 lors du procès au sujet de l'objectif commun, de la connaissance de
26 l'accusé et des contributions des accusés, la Chambre de première instance
27 n'a pas tenu compte de cela lorsqu'elle a procédé à son analyse, son
28 intention partagée.
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1 Le conseil de M. Stanisic fait valoir que l'Accusation demande à
2 vous, Madame, Messieurs les Juges, de présupposer sa culpabilité. Pour ce
3 qui est de notre exemple théorique du hold-up de la banque, le conseil a
4 démontré qu'il y a une présomption de culpabilité inhérente dans nos
5 arguments et nous vous demandons de dire qu'un chauffeur qui s'est rendu à
6 la banque de façon légale et que les personnes qui ont contribué au
7 cambriolage sont coupables. Mais ceci ne permet pas de comprendre la
8 pertinence de cet exemple hypothétique, la pertinence de l'objectif
9 criminel commun et de l'analyse qui est déterminante sur l'intention, chose
10 que la Chambre de première instance n'a pas faite lorsqu'elle a analysé les
11 éléments dans leur ensemble.
12 Vous ne devez pas assumer qu'il y a objectif criminel commun ou que
13 l'accusé avait connaissance de cet objectif. M. Marcussen, dans ses
14 arguments, a levé un argument de la Défense cité dans le mémoire, à savoir
15 la Chambre de première instance a peut-être présupposé qu'il y avait
16 objectif criminel commun. Là où nous vous voulons en venir, c'est que si
17 vous vous penchez là-dessus comme étant quelque chose de possible et si
18 vous analysez ceci en profondeur, vous constaterez ceci n'étayait pas
19 l'objectif criminel commun. Et dans le cas où c'eut été le cas, ce n'aurait
20 pas été la bonne façon de procéder dans le cadre d'une entreprise
21 criminelle commune.
22 La Chambre de première instance devait analyser les éléments de
23 preuve présentés par l'Accusation sur l'objectif criminel commun, parce que
24 ces éléments de preuve ont un lien entre l'accusé et l'objectif criminel
25 commun. Par exemple, les preuves sur le type de crime, le caractère
26 systématique des crimes sur les déclarations faites par les membres de
27 l'entreprise criminelle commune, Karadzic et autres, qui ont clairement
28 déclaré leur intention de nettoyer de façon ethnique la région, ceci devait
Page 96
1 être inclus dans les éléments de preuve pour comprendre quels étaient les
2 liens entre les accusés et cette coordination, et la coopération avec les
3 membres de l'entreprise criminelle commune dont ils avaient connaissance
4 effectivement.
5 Madame, Messieurs les Juges, le troisième point porte sur les tentatives de
6 la Défense qui tentent de minimiser les événements. Le conseil de M.
7 Stanisic a laissé entendre que la position de l'Accusation est si éloignée
8 --
9 M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Le Juge Afande souhaite poser une
10 question. Pardonnez-moi, si je vous interromps.
11 M. LE JUGE AFANDE : Re-bonjour, Madame.
12 Quand vous parliez tout à l'heure de fondation de la maison, je crois que
13 vous faisiez allusion à votre premier moyen d'appel qui, selon vous, je
14 peux me tromper - vous me corrigez si c'est le cas - que la Chambre aurait
15 dû faire ses conclusions sur l'existence de l'objectif commun avant de
16 procéder à l'analyse de l'élément moral.
17 C'est bien ça ? C'est bien ça ?
18 Mme JARVIS : [interprétation] Oui, oui, Monsieur le Juge. Nous disons que
19 cela faisait partie intégrante de l'analyse. Que la Chambre ait constaté en
20 premier lieu ou qu'elle ait intégré dans son analyse sur l'intention, une
21 analyse aurait dû être faite lorsqu'il s'agissait de statuer sur cette
22 affaire.
23 M. LE JUGE AFANDE : Et vous le présentez comme étant une erreur de droit.
24 Sur quelle disposition juridique vous fondez cet argument qu'il y a eu la
25 non-conformité à un texte de droit, ou bien y a-t-il eu jurisprudence qui,
26 selon vous, détermine cette séquence de l'analyse, et qui n'aurait pas été
27 suivie par la Chambre de première instance ?
28 Mme JARVIS : [interprétation] Nous faisons valoir qu'il s'agit d'une erreur
Page 97
1 de droit, Monsieur le Juge, parce qu'il n'y a pas eu d'opinion motivée, il
2 s'agit d'une catégorie d'erreurs juridiques reconnues par la jurisprudence
3 de ce Tribunal.
4 Donc, toutes les fois qu'il y a manquement à ce niveau-là, à l'analyse d'un
5 point donné, à chaque fois qu'il y a un manquement d'analyse des éléments
6 de preuve, ceci peut constituer un manquement à une opinion motivée, il n'y
7 a pas d'opinion motivée, et ceci constitue une erreur juridique.
8 M. LE JUGE AFANDE : Je peux continuer ? Vous semblez avoir donné deux
9 références ce matin, dans, je crois Kvocka 23, paragraphe 23, et Gotovina,
10 paragraphe 12, pour illustrer la même position qui semble un être en
11 décalage avec ce qui est dans votre mémoire d'appel original. Comment
12 expliquez-vous cette différence entre la position de "reasoned opinion"
13 aujourd'hui qui manque et la position initiale dans votre mémoire d'appel
14 qui ne parle pas de l'absence de raisonnement détaillé ou bien de
15 motivation détaillée ?
16 Mme JARVIS : [interprétation] Monsieur le Juge, au moyen d'appel numéro 1,
17 effectivement nous avons allégué que la Chambre de première instance n'a
18 pas fourni une opinion motivée. Donc, les arguments présentés aujourd'hui
19 sont cohérents avec les arguments que nous avons présentés dans mémoire en
20 appel. Dans notre mémoire en appel, nous avons inclus différentes citations
21 pour étayer notre argument, mais il est vrai que ce que nous faisons valoir
22 aujourd'hui, c'est une explication de ce que nous avons déjà inclus dans
23 notre mémoire en appel.
24 M. LE JUGE AFANDE : Merci.
25 Mme JARVIS : [interprétation] Madame, Messieurs les Juges, le troisième
26 point en guise de réponse concerne la situation faite par la Défense, à
27 savoir que la position de l'Accusation est tellement éloignée, lorsqu'il y
28 a une infraction même mineure qui est commise pendant un conflit, une unité
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1 doit être dûment démantelée.
2 Ce n'est pas le lieu de notre argument aujourd'hui. N'oublions pas ce
3 qui s'est passé à Bosanski Samac et à Doboj. A Bosanski Samac et à Doboj,
4 l'unité de l'accusé, que les accusés contrôlaient ont détenu et tué des
5 détenus après la prise de contrôle, et pendant tout le mois d'avril et mai
6 1992. Les Juges de la Chambre ont abordé des éléments de preuve portant sur
7 les unités qui frappaient les détenus à la tête avec des matraques en
8 caoutchouc, les frappant à mort, même un homme âgé de 60 ans, et en
9 traînant un homme par la jambe dans la cour, "et l'emmenant dans la Sava",
10 paragraphe 666, en frappant les Musulmans à l'aine, et en déclarant que les
11 Musulmans ne devaient pas procréer. Paragraphes 665, 666, 673, 676.
12 La Chambre a admis que les membres de l'unité ont commis ces passages
13 à tabac et ces meurtres, paragraphe 685.
14 En outre, la Chambre a constaté que le 7 mai 1992, des membres de
15 l'unité ont massacré 16 civils qui étaient détenus dans un entrepôt,
16 paragraphes 608 à 615, et 685. A Doboj, en connaissance des crimes qui
17 étaient commis à Bosanski Samac, les accusés ont déployé une autre unité,
18 d'autres membres de l'unité qui terrorisaient la population civile à
19 Bosanski Samac et à Doboj. Après la prise de contrôle, le 3 mai 1992,
20 paragraphe 718 du jugement.
21 A la date du 7 mai 1994, ceci avait provoqué le départ de milliers de
22 Musulmans et de Croates de la ville de Doboj. Le 24 mai 1992, les membres
23 de l'unité ont pris dix détenus de la prison que l'on n'a jamais revus.
24 Paragraphe 777. Au mois de juin 1992, des membres de l'unité ont tué au
25 moins 30 civils détenus dans un entrepôt, et les ont ensevelis dans des
26 fosses communes. Paragraphe 776. Au mois de mai ou mois de juin 1992, des
27 membres de l'unité ont attaqué les villages de la municipalité de Doboj,
28 ils ont capturé, torturé, ont tué des membres des armées croates et
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1 musulmanes, et ont tué l'ensemble de la population de Johovac, paragraphe
2 747.
3 Donc, Madame, Messieurs les Juges, il s'agit d'une déformation des
4 éléments au dossier que de suggérer que l'accusé n'avait pas connaissance
5 du caractère épouvantable et massif des crimes commis, et du rôle qu'ils
6 ont joué dans la campagne de nettoyage ethnique.
7 Madame, Messieurs les Juges, mon quatrième point, et j'hésite à dire
8 que j'ai en réalité cinq points que je souhaite aborder. Le quatrième point
9 porte sur la complicité par aide et encouragement.
10 Le conseil de M. Stanisic a fait valoir aujourd'hui que peu s'est
11 porté sur l'erreur juridique commise par la Chambre de première instance
12 concernant la visée spécifique en tant qu'élément constitutif de la
13 complicité par aide et encouragement. Regardons l'erreur de la majorité a
14 donné lieu à une mauvaise interprétation du rôle de l'accusé dans la
15 complicité par aide et encouragement des crimes de l'unité de Bosanski
16 Samac et Doboj, ce qui comprend les meurtres, les déplacements forcés, la
17 persécution.
18 Comment cette condition erronée n'est pas conforme au droit
19 international coutumier et a conduit à un déni de justice.
20 Au paragraphe 2359, la Chambre de première instance a conclu que "des
21 contributions de l'accusé ont aidé à la commission des crimes commis par
22 les accusés."
23 Autrement dit, la Chambre de première instance a constaté que la
24 condition juridique de la contribution avait été réunie.
25 Dans les paragraphes suivants, cependant, la majorité a admis que
26 cette aide n'a pas eu un effet important parce que leurs actes ne visaient
27 pas précisément les crimes. Donc, les accusés ont été acquittés de
28 complicité par aide et encouragement concernant les crimes commis à
Page 100
1 Bosanski Samac et Doboj.
2 Donc, le fait que cette condition de visée spécifique n'a eu aucune
3 incidence sur l'issue de cette affaire n'est pas exact au vu de la lecture
4 des conclusions des Juges de la Chambre.
5 Et enfin, Madame, Messieurs les Juges, les conseils des deux accusés ont
6 abordé la question de l'équité des condamnations en appel. Nous sommes
7 d'accord qu'il s'agit là d'une question qui préoccupera les Juges de la
8 Chambre et qu'il faut minutieusement y réfléchir. Mais, Madame, Messieurs
9 les Juges, c'est une question qui a déjà été abordée et qui a été tranchée
10 par cette Chambre d'appel. Au fil des ans, l'argument a été avancé à
11 plusieurs reprises selon lequel la Chambre d'appel ne devrait pas prononcer
12 des condamnations en appel lorsqu'il n'y a plus d'autre droit d'appel, mais
13 la Chambre d'appel a systématiquement pris position, la position étant
14 qu'elle avait ce pouvoir et qu'il était correct de le faire.
15 Madame, Messieurs les Juges, j'aimerais également vous rappeler que ce
16 pouvoir découle de l'article 25 du Statut, et le pouvoir de la Chambre
17 consiste à confirmer, renverser ou revoir des décisions de la Chambre de
18 première instance. Par exemple, la Chambre d'appel a prononcé des
19 déclarations de culpabilité par le passé : arrêt Djordjevic, paragraphe
20 928; arrêt Popovic, paragraphe 539. Le TPIR également s'est prononcé sur la
21 question. Et il y a beaucoup d'autres exemples qui peuvent être repris dans
22 l'histoire du Tribunal.
23 Il a déjà été déterminé que cela n'était pas incohérent avec les droits à
24 un procès équitable de l'accusé. En particulier, la Convention européenne
25 des droits de l'homme reconnaît qu'il ne s'agit pas d'un droit absolu que
26 d'interjeter appel d'une condamnation si la condamnation se fait au plus
27 haut niveau de l'instance, et c'est le cas en l'espèce.
28 Donc nous avançons, Madame, Messieurs les Juges, que cette question a déjà
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1 été décidée, tranchée, et qu'il vous revient de prononcer des déclarations
2 de culpabilité si vous l'estimez nécessaire. Cela est incontestable. C'est
3 à vous de déterminer si vous voulez exercer ce pouvoir. Pour toutes ces
4 raisons, celles que j'ai avancées ce matin dans mes plaidoiries, nous
5 pensons qu'il s'agit là de la voie la plus appropriée dans les
6 circonstances de l'espèce.
7 Je vous remercie.
8 Et je voudrais également mentionner que j'ai des copies des transparents
9 sur lesquels je me suis appuyée aujourd'hui pour vous et pour la Défense.
10 M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Merci, Madame le Procureur. Est-ce que
11 vous concluez par cela vos arguments ?
12 Mme JARVIS : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Ceci conclut nos
13 arguments.
14 M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Merci beaucoup.
15 Ceci conclut l'audience de l'appel d'aujourd'hui. Mais avant de lever
16 l'audience, j'aimerais prendre quelques instants pour remercier les parties
17 de leur travail sur cette affaire et de nous avoir présenté leurs arguments
18 aujourd'hui. J'aimerais également exprimer ma reconnaissance envers le
19 personnel du Greffe qui est présent ici dans le prétoire qui a permis
20 l'organisation de l'audience d'aujourd'hui, et remercier en particulier les
21 interprètes de leur travail excellent. Quelquefois, nous avons maltraité
22 les interprètes de par la rapidité des conseils lors de leurs arguments, et
23 je tenais à remercier les interprètes particulièrement.
24 L'INTERPRÈTE : Les interprètes vous remercient.
25 M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Et, bien sûr, nous remercions également
26 les commis à l'affaire et les juristes de la Chambre d'appel.
27 La Chambre d'appel rendra sa décision en temps voulu et les parties en
28 seront notifiées.
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1 L'audience est levée.
2 --- L'audience est levée à 16 heures 04.
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