Affaire n° : IT-01-42-PT

LA CHAMBRE DE PREMIÈRE INSTANCE I

Composée comme suit :
M. le Juge Alphons Orie, Président
M. le Juge Amin El Mahdi
M. le Juge Joaquín Martín Canivell

Assistée de :
M. Hans Holthuis, Greffier

Décision rendue le :
26 novembre 2003

LE PROCUREUR

c/

PAVLE STRUGAR

et

VLADIMIR KOVACEVIC

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DÉCISION RELATIVE À LA REQUÊTE DU PROCUREUR AUX FINS DE LA DISJONCTION DE L’INSTANCE ET ORDONNANCE FIXANT LA DATE D’UNE CONFÉRENCE PRÉALABLE AU PROCÈS ET CELLE DE L’OUVERTURE DU PROCÈS DE PAVLE STRUGAR

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Le Bureau du Procureur :

Mme Susan Somers

Les Conseils des Accusés :

MM. Goran Rodic et Vladimir Petrovic pour Pavle Strugar
M. Howard Morisson pour Vladimir Kovacevic

 

LA CHAMBRE DE PREMIÈRE INSTANCE I du Tribunal international chargé de poursuivre les personnes présumées responsables de violations graves du droit international humanitaire commises sur le territoire de l’ex-Yougoslavie depuis 1991 (le « Tribunal »),

VU la requête du Procureur aux fins de la disjonction de l’instance (Prosecutor’s Motion for Separate Trial), déposée le 18 novembre 2003 (la « Requête »), demandant la disjonction de l’instance engagée contre M. Pavle Strugar et M. Vladimir Kovacevic au motif que le procès de ces deux accusés pourrait être reporté à une date indéterminée en raison de questions en suspens concernant la santé de M. Vladimir Kovacevic,

VU la réponse de la Défense à la Requête (Defence Response to Prosecution’s Motion for Separate Trial), déposée le 19 novembre 2003 par les conseils de la Défense de M. Pavle Strugar (la « Réponse »), par laquelle ceux-ci s’opposent à la disjonction de l’instance engagée contre les deux accusés aux motifs que i) la Requête n’établit pas que M. Vladimir Kovacevic n’est pas en état d’être jugé, ii) la disjonction de l’instance portera préjudice à la défense de M. Pavle Strugar, lequel a tout intérêt à être jugé avec M. Kovacevic, dès lors que la détermination du rôle joué par ce dernier aura une incidence directe sur la responsabilité imputée à M. Pavle Strugar, et iii) la disjonction de l’instance engagée contre les deux accusés est contraire à la stratégie d’achèvement des travaux du Tribunal et causera aux témoins des désagréments inutiles,

ATTENDU que le conseil de la Défense de M. Vladimir Kovacevic a fait savoir oralement à la Chambre qu’il ne s’opposait pas à la disjonction de l’instance,

ATTENDU que les examens médicaux de M. Vladimir Kovacevic ne seront probablement pas terminés dans un délai raisonnablement bref,

ATTENDU que l’ouverture du procès de M. Pavle Strugar aurait pu avoir lieu dès le 1er octobre 2003, date du dépôt de son mémoire préalable au procès, mais qu’elle sera probablement reportée à une date indéterminée si son procès n’est pas disjoint maintenant de celui de M. Vladimir Kovacevic, ce qui porterait atteinte au droit de M. Pavle Strugar à un procès rapide,

ATTENDU que la Défense de M. Pavle Strugar n’a invoqué aucun article du Règlement ni aucun principe de droit s’opposant à la disjonction de l’instance,

ATTENDU que l’article 82 B) du Règlement permet à la Chambre de première instance d’ordonner la disjonction d’une instance si elle estime que l’intérêt de la justice le commande,

ATTENDU, en outre, qu’en application de l’article 48 du Règlement, la décision de juger ensemble ou séparément plusieurs accusés appartient au premier chef au Procureur, et que la Défense de M. Pavle Strugar n’a donné aucune indication que sa position changerait à un stade ultérieur de la procédure,

ATTENDU, de plus, que la Chambre de première instance dispose d’un large pouvoir d’appréciation en ce qui concerne la jonction et la disjonction d’instances,

ATTENDU que les articles 72 A) iii) et 82 B) du Règlement, en particulier, donnent à penser qu’une disjonction d’instance présente plus d’avantages qu’une jonction d’instances pour des coaccusés ayant des intérêts divergents,

ATTENDU que la Chambre de première instance n’est pas convaincue par les arguments de la Défense de M. Pavle Strugar, puisque la séparation des procès pourrait éviter toute influence injustifiée de M. Vladimir Kovacevic sur les décisions qui doivent être rendues au procès de M. Pavle Strugar,

ATTENDU, enfin, que l’article 82 A) souligne qu’un accusé, qu’il soit jugé seul ou avec un autre accusé, jouit des mêmes droits, et que dès lors, la disjonction de l’instance n’est nullement préjudiciable à la défense de M. Pavle Strugar,

VU l’ordonnance de mise en liberté provisoire de M. Pavle Strugar, datée du 30 novembre 2003,

EN APPLICATION de l’article 54 du Règlement de procédure et de preuve,

FAIT DROIT à la Requête,

ENJOINT au Greffier de disjoindre immédiatement la procédure engagée contre M. Pavle Strugar et M. Kovacevic sur la base de l’acte d’accusation du 17 octobre 2003 et d’enregistrer toutes les écritures déposées ultérieurement concernant ces accusés sous deux numéros d’affaire différents,

FIXE la date d’une conférence préalable au procès dans l’affaire Le Procureur c/ Pavle Strugar au lundi 8 décembre 2003 à 9 heures, dans la salle d’audience III,

FIXE la date de l’ouverture du procès de M. Pavle Strugar au mardi 9 décembre 2003 à 9 heures, dans une salle d’audience qui sera indiquée par le Greffier,

PRIE le Gouvernement de la Serbie-et-Monténégro de désigner un représentant officiel qui sera chargé d’accompagner directement M. Pavle Strugar jusqu’à un aéroport néerlandais mardi 2 décembre 2003 et de le remettre aux autorités néerlandaises dans cet aéroport afin qu’il soit transféré au Quartier pénitentiaire des Nations Unies à La Haye, et enfin

ANNULE l’ordonnance de mise en liberté provisoire de M. Pavle Strugar datée du 30 novembre 2003.

 

Fait en anglais et en français, la version en anglais faisant foi.

Le 26 novembre 2003
La Haye (Pays-Bas)

Le Juge de la mise en état
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Alphons Orie

[Sceau du Tribunal]