Affaire n° : IT-01-42-T

LA CHAMBRE DE PREMIÈRE INSTANCE II

Composée comme suit :
M. le Juge Kevin Parker
M. le Juge Krister Thelin
Mme le Juge Christine Van Den Wyngaert

Assistée de :
M. Hans Holthuis, Greffier

Décision rendue le :
9 septembre 2004

LE PROCUREUR

c/

Pavle STRUGAR

____________________________________

DEUXIÈME DÉCISION RELATIVE À L’ADMISSIBILITÉ DE CERTAINS DOCUMENTS

____________________________________

Le Bureau du Procureur :

Mme Susan Somers
M. Philip Weiner

Les Conseils de l’Accusé :

M. Goran Rodic
M. Vladimir Petrovic

I. LES REQUÊTES

1. La présente décision de la Chambre de première instance II (la « Chambre ») porte sur la Requête de la Défense du 22 juillet 20041 et sur les Écritures de la Défense du 26 juillet 20042. Dans sa Requête du 22 juillet 2004, déposée immédiatement après la clôture de la présentation des moyens à décharge, la Défense demande le versement au dossier des documents suivants, qui lui ont tous été initialement remis au cours de la mise en état de l’affaire, dans le cadre de la communication par l’Accusation des éléments prévus par l’article 65 ter du Règlement de procédure et de preuve (le «  Règlement ») :

2. L’Accusation s’est opposée au versement de chacun de ces documents, au motif qu’ils n’offraient pas soit la pertinence, soit la valeur probante requise, soit aucune de ces qualités3, à l’exception possible du Document 65 ter n° 7, dans la mesure où celui-ci peut présenter un intérêt pour statuer sur l’existence d’un conflit armé international entre la Croatie et la République fédérale de Yougoslavie à partir du 8 octobre 1991, une thèse avancée par l’Accusation4.

3. La Défense affirme se réserver le droit de compléter sa Requête du 22 juillet 2004 par un exposé oral5 ; or rien n’a été avancé qui soit de nature à persuader la Chambre de la nécessité d’entendre des arguments oralement. La Chambre se prononcera uniquement sur la base des arguments présentés par écrit.

4. Dans ses Écritures du 26 juillet 2004, la Défense demande l’admission des pièces à décharge suivantes, qui ont reçu une cote aux fins d’identification à l’audience, mais n’ont pas encore été versées au dossier :

5. L’Accusation s’est opposée au versement au dossier de chacun de ces documents, à l’exception de MFI D13, MFI D14, MFI D15 et du rapport d’expert de M. Miodrag Soc10.

II. LE DROIT APPLICABLE

6. L’admissibilité des éléments de preuve est essentiellement régie par l’article 89 C) du Règlement, qui dispose que la Chambre « peut recevoir tout élément de preuve pertinent qu’elle estime avoir valeur probante ».

7. Si l’article 89 C) du Règlement semble conférer un « large pouvoir discrétionnaire  » à la Chambre de première instance, la Chambre d’appel a conclu qu’« il convient d’interpréter l’article 89 C) de manière à garantir que la Chambre est convaincue de la fiabilité des éléments de preuve »11. Dans cet esprit, la Chambre d’appel a indiqué que la fiabilité d’une déclaration peut entrer en ligne de compte pour déterminer non seulement son poids, mais aussi son admissibilité. En effet, « [l]es indices de fiabilité d’un élément de preuve peuvent faire défaut au point que celui-ci n’a pas de “valeur probante” et ne saurait par conséquent être admis12 ». Cette considération a été communément exprimée dans la jurisprudence comme une exigence implicite de l’article 89 C), selon laquelle il doit exister « des indices suffisants de [la] fiabilité » des éléments de preuve13.

8. Bien qu’il n’existe pas d’interdiction générale d’admission de la preuve indirecte dans les affaires jugées par le Tribunal14, le fait que la preuve est indirecte et la question de savoir s’il s’agit ou non d’un témoignage de première main peuvent aussi être pris en compte dans l’appréciation de sa valeur probante15.

9. La possibilité d’admettre des éléments de preuve autrement que par l’intermédiaire d’un témoin est soulevée directement par la Défense dans sa Requête du 22 juillet 2004, où elle demande l’admission de nouveaux documents après la clôture de la présentation de ses moyens. Si ni le Statut, ni le Règlement n’exigent expressément qu’une pièce à conviction soit versée au dossier par l’intermédiaire d’un témoin, la jurisprudence montre qu’à l’exception de quelques catégories particulières de documents, c’est la démarche habituelle et en principe appropriée16. Le droit de l’Accusé à un procès équitable peut souvent nécessiter la possibilité d’éprouver la fiabilité des preuves apportées, par le biais d’un contre-interrogatoire à l’audience17. En conséquence, la Chambre doit faire preuve de prudence au moment de décider s’il convient de verser au dossier des éléments de preuve documentaires qui n’ont pas été produits à l’audience par l’intermédiaire d’un témoin.

10. Cette question a récemment été examinée dans l’affaire Hadzihasanovic 18. Tout en rappelant que le Règlement et le Statut du Tribunal étaient une combinaison de règles de procédure émanant de la common law et du droit romano-germanique, et qu’il n’y avait pas lieu de suivre les règles générales appliquées dans les systèmes de common law en matière d’exclusion d’éléments de preuve19, la Chambre a estimé que l’article 89 D) du Règlement envisageait la « possibilité  » d’exclure un élément de preuve dont la valeur probante est largement inférieure à l’exigence d’un procès équitable. Elle a estimé que l’article 89 D) n’imposait pas l’ « obligation inconditionnelle » d’exclure tout élément de preuve qui serait susceptible de causer un préjudice quelconque aux droits de l’Accusé20. Ceci étant, la Chambre a la responsabilité de veiller à ce que le procès soit équitable et rapide, que l’instance se déroule conformément au Statut et au Règlement du Tribunal, et que les droits de l’Accusé soient respectés. La Chambre a conclu dans Hadzihasanovic qu’il n’y avait pas de principe d’exclusion systématique du fait que l’auteur présumé du document n’est pas cité à la barre21. Cependant, à l’exception de certaines catégories de documents, la partie qui désire verser un document sans en citer l’auteur à la barre ne le fait pas sans risque : la valeur probante du document concerné pourra en particulier en être diminuée et, dans certains cas, il pourrait y avoir lieu d’exclure le document sur la base de l’article 89 D) du Règlement22. Dans Hadzihasanovic, la Chambre a estimé que la nécessité d’entendre un témoin avant de verser au dossier un document dépend de divers facteurs, dont les principaux sont la nature du document, son contenu et la question de savoir si le document relate les propos de personnes autres que l’auteur du document lui-même23.

11. En l’espèce, pour statuer sur l’admission de certains documents litigieux dont la Défense affirme qu’ils contredisent des témoignages substantiels, il convient également de tenir compte du fait qu’elle n’a pas confronté les témoins concernés auxdits documents24.

12. La Chambre tient à souligner que l’admission de tel ou tel élément de preuve n’est pas une indication du poids qui lui sera accordé au final.

III. EXAMEN

1. Documents figurant dans la Requête de la Défense du 22 juillet 2004

13. Le document 65 ter n° 90 semble être un rapport des services de renseignement du deuxième GO à l’intention de l’état-major général du Secrétariat à la défense nationale, en date du 9 décembre 1991. On y lit qu’il est basé sur des informations fournies au deuxième GO par le neuvième VPS. Aux dires de la Défense, ce rapport montre que le commandement du neuvième VPS a communiqué des informations très différentes au Vice-secrétaire fédéral à la défense nationale, d’une part, et au deuxième GO d’autre part, sur les dégâts subis par la vieille ville de Dubrovnik le 6 décembre 1991. La pertinence de la question des dégâts est apparue clairement tout au long des débats, tout comme l’affirmation de la Défense selon laquelle le neuvième VPS a laissé le deuxième GO « dans l’ignorance » ou l’a mal renseigné. Cependant, il aurait fallu confronter les témoins à charge concernés, et en particulier l’amiral Miodrag Jokic, à ce document, et demander son versement dans le cours normal du procès. De surcroît, le document semble, à première vue, rapporter des informations recueillies à l’origine par le neuvième VPS auprès de sources diverses, des informations qui seraient fidèlement reprises dans le rapport. Or les sources originales sont inconnues et n’ont pas été mises à l’épreuve, et il n’a pas été possible de vérifier si le document rendait effectivement fidèlement compte d’informations fournies au départ au deuxième GO par le neuvième VPS, si bien qu’il n’a pas été démontré que ces informations présentaient des indices de fiabilité suffisants pour justifier le versement au dossier du document.

14. Le document 65 ter n° 34 est un ordre adressé par le chef d’état-major de la JNA au deuxième GO, au sujet du rattachement hiérarchique temporaire de certaines unités. Pour la Défense, cela prouve que le deuxième GO était un simple « messager » du commandement suprême25. L’Accusation fait valoir que les parties ont convenu que le deuxième GO était soumis aux ordres du commandement suprême, qui pouvait modifier la composition du deuxième GO et de ses unités subordonnées. Le document porte la date du 2 octobre 1991 et ne traite pas de la zone de Dubrovnik, si bien qu’il n’a pas un rapport immédiat avec les faits de l’espèce. Les moyens de preuve produits montrent clairement que le deuxième GO était une structure de commandement temporaire mise sur pied par le commandement suprême, qui pouvait donc le modifier, tant pour sa composition que pour ses attributions. À première vue, le document ne démontre ni n’étaye l’argument selon lequel le deuxième GO fonctionnait uniquement sous la direction du commandement suprême, c’est -à-dire comme son « messager ». Étant donné que les témoins à charge concernés n’ont pas été confrontés à ce document sur ce point (comme cela aurait dû être le cas) et que cet aspect n’a pas non plus été établi par l’intermédiaire d’un témoin à décharge approprié, il n’existe pas, dans le dossier, d’élément à partir duquel ce document pourrait être utilisé pour établir ce que la Défense veut lui faire prouver. Le document ne sera pas admis car il n’a pas été démontré qu’il avait un rapport suffisant avec les questions centrales du procès.

15. Le document 65 ter n° 54 est apparemment une liste de munitions et d’armes reçues par le commandement de la défense croate de Dubrovnik le 3 décembre 1991. Si l’Accusation admet qu’il y avait des affrontements armés dans la zone de Dubrovnik à cette époque, de nombreux témoins à charge ont montré de la réticence à reconnaître l’existence de toute forme de capacité militaire du côté croate. Dans ce contexte, ce document présente une pertinence manifeste. Il peut aussi permettre d’en savoir davantage sur l’organisation et les méthodes d’approvisionnement de l’armée croate. Aucun des témoins à charge concernés ne s’est vu confronté à ce document comme cela aurait dû être le cas, mais la teneur générale de cet écrit recoupe celle de nombreux autres éléments de preuve, de sorte que, bien qu’il n’ait pas été possible d’en traiter pendant la présentation des moyens de preuve, l’Accusation ne subirait pas de préjudice significatif du fait de son admission. De plus, l’authenticité du document ne fait l’objet d’aucune contestation. La Chambre accepte son versement au dossier.

16. L’usage auquel était destiné le document 65 ter n° 55, en date du 7 décembre 1991, n’est pas tout à fait clair (« appartements dans lesquels se trouvent nos hommes sur les positions »), mais il semble logiquement s’agir d’une liste d’appartements situés à Dubrovnik, quoique apparemment pas dans la vieille ville, et qui abritaient du personnel militaire croate. Selon la Défense, cela démontre l’utilisation d’appartements civils « en tant que sites militaires » ; de plus elle pourrait vouloir en tirer la conclusion que ces sites faisaient office de positions de tir, par exemple. A priori, ce document ne révèle pas que les appartements énumérés avaient un autre usage que l’hébergement du personnel ; étant donné qu’aucun des témoins à charge concernés n’a été confronté à la possibilité d’un autre usage et que le document lui-même n’a été commenté par aucun témoin, il serait totalement injuste et injustifié d’interpréter cet écrit autrement. Dans ces conditions, le document ne sera pas versé au dossier étant donné que, si l’on s’en tient à cette lecture, il ne présente pas une pertinence suffisante au regard des questions centrales de l’espèce.

17. Le document 65 ter n° 57 est une note de protestation en date du 2 décembre 1991 émise par le VPS – BOKA à l’intention du Centre de surveillance de la République de Croatie à Dubrovnik, au sujet des attaques répétées des tireurs embusqués appartenant aux forces croates positionnées à Srdj contre les unités de la JNA. Sa pertinence est claire. La question des protestations a été évoquée lors de la présentation des moyens de preuve et abordée par plusieurs témoins. Le fait de ne pas avoir confronté certains témoins à ce document peut en diminuer la valeur probante, mais, vu les circonstances, cela ne nécessite pas le refus de son admission. Le document est versé au dossier.

18. Le document 65 ter n° 7 en date du 17 juin 1991 semble être un document émanant du Gouvernement croate à l’adresse de tous les commandements de la police, au sujet du transfert de certaines forces de la Garde nationale, et de leurs armes, du commandement de la police vers le commandement militaire. Si le document n’a pas un rapport direct avec les événements de décembre 1991 à Dubrovnik, il peut cependant révéler l’existence d’une relation entre la police et les forces de la défense croates, question qui a été examinée au cours de la présentation des moyens de preuve et qui s’inscrit dans le cadre de la thèse de la Défense. Le fait de ne pas avoir confronté des témoins à charge concernés à ce document peut en affecter la valeur probante, mais son authenticité n’est pas contestée. Le document est versé au dossier.

19. Le document 65 ter n° 9 semble être un ordre de défense émanant de la 116e brigade de la ZNG (Garde nationale croate) à Dubrovnik, en date du 20 juillet 1991. L’Accusation fait valoir que ce document n’a pas de rapport direct avec les activités des forces armées croates en décembre 1991, puisqu’il traite de leur localisation en juillet 1991. Cependant, la pertinence des activités militaires de la JNA et des forces croates dans les mois précédant le 6 décembre 1991 a été reconnue à l’audience et a fait l’objet d’un examen minutieux au cours de la présentation des moyens de preuve. De sorte que la nature et la répartition des forces croates présente, même pour le mois de juillet, une pertinence suffisante pour justifier l’admission du document en l’espèce. Le fait de ne pas avoir confronté des témoins concernés à ce document peut certes en diminuer la valeur probante, mais, vu les circonstances, cela n’implique pas que son admission doive être refusée. Le document est versé au dossier.

20. Le document 65 ter n° 21 est censé être une compilation ou une série d’informations recueillies par les services de renseignement croates ; peut-être élaboré en 1994, il a toutefois trait aux événements de la période d’octobre 1990 à octobre 1992. La Défense souhaite s’appuyer sur certaines des informations contenues dans le document, qu’elle estime en rapport avec les faits, ainsi que sur le document de manière générale, considérant qu’il révèle que le Centre de surveillance de Dubrovnik avait des activités de renseignement, et ce, peut-être dès juillet 1991. Le document ne permet pas de déterminer qui a rassemblé les informations, ni quelles en étaient la ou les sources immédiates. Il ne permet pas non plus de déterminer quelles informations ont éventuellement été supprimées dans le cadre du travail de compilation, ce qui pourrait être hautement pertinent pour en déterminer la fiabilité. Il n’est pas possible de déterminer la ou les sources originales du document, ce qui est particulièrement important, étant donné que son contenu laisse supposer que les informations originales ont pu être recueillies auprès de diverses sources indirectes, toutes inconnues, et dans divers objectifs, dont celui de la propagande, ce qui peut affecter fortement sa fiabilité. S’agissant du Centre de surveillance, la nature et la teneur de ce seul document ne fournissent pas de fondement satisfaisant pour parvenir aux conclusions factuelles avancées par la Défense, et aucun témoin n’a eu la possibilité de commenter ce document afin d’aider la Chambre à parvenir à une conclusion plus tranchée, dans un sens ou dans l’autre. Dans ces conditions, le document ne présente pas les indices suffisants de fiabilité lui conférant une valeur probante en l’espèce. Le document n’est pas versé au dossier.

2. Documents figurant dans les Écritures de la Défense du 26 juillet 2004

21. MFI D13, MFI D14 et MFI D15 ont été produits par la Défense au cours du contre -interrogatoire du témoin à charge Slavko Grubišic. Ces photographies montrent clairement les dégâts subis par certains bâtiments et constructions de la vieille ville de Dubrovnik. La Défense affirme que ces photographies sont d’une grande pertinence en l’espèce et qu’elles ont aussi une grande valeur probante quant à la crédibilité du témoignage de Grubišic26. L’Accusation ne s’oppose pas à leur versement au dossier27. Ces documents étant pertinents et ayant une valeur probante s’agissant des dégâts dans la vieille ville en décembre 1991, la Chambre accepte leur versement au dossier.

22. Le document MFI D16 semble être une photocopie de deux articles du journal «  Pobjeda » en date du 3 octobre 1991. La Défense affirme avoir demandé un exemplaire original du journal28. L’Accusation avance que le document ne doit pas être admis car son seul objectif est de récuser le témoin par l’intermédiaire duquel il a été produit29. Le témoin Nikola Samardzic a été confronté aux passages pertinents, qui sont donc suffisamment exposés dans le compte rendu d’audience30. La Chambre ne voit aucune raison d’accepter le versement au dossier des originaux de ces articles.

23. MFI D18 présente des extraits du compte rendu d’audience de l’affaire Miloševic . La Défense cherche à obtenir le versement de ces passages qui ont trait à la déposition de Nikola Samardzic dans ladite affaire, afin de souligner certaines incohérences dans son témoignage31. L’Accusation fait valoir qu’un document employé uniquement pour récuser un témoin, en l’espèce le compte rendu d’audience d’une autre affaire, n’est « pas recevable quant au fond32 ». Étant donné que M. Samardzic a été confronté aux passages pertinents du document au cours de sa déposition en l’espèce, et que ces passages sont donc présentés dans le compte rendu d’audience, la Chambre ne voit aucune raison d’accepter le versement au dossier du compte rendu lui-même.

24. MFI D30 est une annexe au Rapport final de la commission d’experts des Nations Unies, intitulée « The battle of Dubrovnik and the law of armed conflict ». L’un des quatre auteurs cités dans le rapport, Colin Kaiser, témoin à charge, a été confronté aux extraits pertinents de ce document pendant son contre-interrogatoire. La Défense affirme que les déclarations de M. Kaiser au procès s’éloignent, par certains aspects, des informations contenues dans le rapport33. La Défense a confronté M. Kaiser à chacun des passages pertinents, si bien qu’ils apparaissent au compte rendu d’audience. En conséquence, la Chambre ne voit aucune raison d’accepter le versement de ce document au dossier.

25. MFI D72, MFI D73 et MFI D74 sont une série de photographies montrant des soldats en uniforme occupés à divers exercices militaires qui auraient eu lieu à Lapad et à l’hôtel Belvedere ; d’après la Défense, ces photographies sont extraites du livre de Mladen Jurkovic intitulé Dubrovnik se (ne) brani pjesmom34. Si le témoin à charge Ivan Negodic s’est bien vu confronté à ses photographies, il n’a pas été en mesure de les reconnaître, ni de les dater. De plus, l’Accusation fait valoir qu’aucune explication n’a été donnée sur la pertinence que pourraient avoir ces photographies au regard des faits incriminés du 6 décembre 199135. En l’absence de preuves fiables sur la date des photographies, leur pertinence en l’espèce n’a pas été démontrée. La Chambre refuse le versement au dossier de ces documents.

26. S’agissant du rapport de Miodrag Soc, témoin expert à décharge, la Défense affirme que, suite à un oubli, elle a omis d’en demander le versement au dossier pendant le contre-interrogatoire du témoin36. L’Accusation ne s’oppose pas au versement au dossier du rapport37. Le rapport ayant fait l’objet d’un interrogatoire principal et d’un contre-interrogatoire, il ne semble pas y avoir lieu d’en refuser l’admission. En conséquence la Chambre accepte le versement au dossier de ce document.

IV. DISPOSITIF

27. Par ces motifs, la Chambre admet le versement au dossier des documents suivants  :

Les autres documents, ou toute partie de ces documents, ne sont pas admis.

28. La Chambre demande au Greffe

a) d’enregistrer en tant que pièces à conviction les documents D13, D14, D15 et D16,

b) d’attribuer des cotes aux documents maintenant versés au dossier et qui n’avaient pas précédemment reçu de cotes aux fins d’identification, et d’en informer par écrit, dès que possible, la Chambre et les parties.

 

Fait en anglais et en français, la version en anglais faisant foi.

Le 9 septembre 2004
La Haye (Pays-Bas)

Le Président de la Chambre de première instance
_____________
Kevin Parker

[Sceau du Tribunal]


1 - Defence Motion: Requesting Admission of Proposed Defence Exhibits into Evidence, 22 juillet 2004 (la « Requête de la Défense du 22 juillet 2004 »).
2 - Defence Submission: Requesting Admission of Outstanding Defence Exhibits Marked for Identification into Evidence, 26 juillet 2004 (les « Écritures de la Défense du 26 juillet 2004 »).
3 - Prosecution’s Response to “Defence Motion: Requesting Admission of Proposed Defence Exhibits into Evidence”, 29 juillet 2004 (la « Réponse de l’Accusation à la Requête de la Défense du 22 juillet 2004 »).
4 - Ibid., par. 10.
5 - Requête de la Défense du 22 juillet 2004.
6 - La Défense a annoncé à l’audience qu’elle fournirait à la Chambre l’original de ce journal, compte rendu d’audience (« CR »), p. 1248 et 1258.
7 - Le Procureur contre Slobodan Milosevic, affaire IT-02-54, CR p. 11185 et 11186.
8 - « The battle of Dubrovnik and the law of armed conflict » est une annexe au Rapport final de la commission d’experts des Nations Unies constituée conformément à la résolution 780 (1992) du Conseil de sécurité, Doc. ONU S/1994/674 / Add. 2 (Vol. V), 28 décembre 1994. [La lecture du document ne permet pas de déterminer s’il constitue l’« Annexe IX.A » ou l’« Annexe XI.A » ; cependant, étant donné qu’il est intitulé « The battle of Dubrovnik and the law of armed conflict », la Chambre est convaincue qu’aussi bien la Défense, dans ses Écritures, que l’Accusation, dans sa Réponse, se réfèrent au même document].
9 - Dans les Écritures du 26 juillet 2004 la traduction donnée par la Défense est « Dubrovnik (ne) se défend (pas) avec des chansons », note 5 du par. 8.
10 - Prosecution’s Response to the Defense’s Request for Admission of Outstanding Defense Exhibits Marked for Identification, 30 juillet 2004 (la « Réponse de l’Accusation aux Écritures de la Défense du 26 juillet 2004 »), par. 2 à 4 et 12.
11 - Le Procureur contre Dario Kordic et consorts, affaire IT-95-14/2-AR73.5, Décision relative à l’appel concernant la déclaration d’un témoin décédé, 21 juillet 2000, par. 20 et 22.
12 - Ibid., par. 24.
13 - Voir par exemple Le Procureur contre Zejnil Delalic et consorts, affaire IT-96-21-AR 73.2, Arrêt relatif à la requête de l’Accusé Zejnil Delalic aux fins d’autorisation d’interjeter appel de la décision de la Chambre de première instance en date du 19 janvier 1998 concernant la recevabilité d’éléments de preuve, 4 mars 1998, par. 19 et 20.
14 - Le Procureur contre Zlatko Aleksovski, affaire IT-95-14/1-AR73, Arrêt relatif à l'appel du Procureur concernant l'admissibilité d'éléments de preuve, 16 février 1999, par. 15.
15 - Ibid.
16 - Voir par exemple dans Le Procureur contre Mladen Naletilic, alias « Tuta », et Vinko Martinovic, alias Stela, affaire IT-98-34-T : Décision relative à l’admission des pièces à conviction produites par l’intermédiaire du témoin MV, 4 octobre 2002 ; Décision relative aux Écritures de la Défense concernant les pièces à conviction présentées à l’occasion des témoignages de MC, ME et MH, 4 octobre 2002 ; Décision relative à l’admission de pièces à conviction présentées par l’intermédiaire du témoin Mladen Ancic, 4 octobre 2002 ; Décision relative à l’admission de pièces à conviction produites par l’intermédiaire du témoin Davor Marijan, 3 octobre 2002.
17 - Voir notamment Le Procureur contre Stanislav Galic, affaire IT-98-29-T, Décision relative au versement au dossier de documents présentés directement par le Procureur, 11 septembre 2002.
18 - Le Procureur contre Enver Hadzihasanovic et Amir Kubura, affaire IT-01-47-T, Décision relative à l’admissibilité de certaines pièces contestées et des pièces aux fins d’identification, 2 août 2004.
19 - Ibid., par. 16 et 17.
20 - Ibid., par. 16 : « L’article 89 D) envisage une possibilité d’exclusion et non une obligation inconditionnelle pour tout cas où un élément de preuve serait susceptible de causer un préjudice quelconque à l’accusé » (souligné dans l’original) [voir note dans note de bas de page 19].
21 - Ibid., par. 18 [voir note dans note de bas de page 19].
22 - Ibid., par. 44.
23 - Ibid., par. 46.
24 - Article 90 H) ii) du Règlement
25 - Requête de la Défense du 22 juillet 2004, par. 6.
26 - Écritures de la Défense du 26 juillet 2004, par. 3.
27 - Réponse de l’Accusation aux Écritures de la Défense du 26 juillet 2004, par. 2 à 4.
28 - Écritures de la Défense du 26 juillet 2004, par. 4.
29 - Réponse de l’Accusation aux Écritures de la Défense du 26 juillet 2004, par. 5 à 7.
30 - CR. p. 1248 à 1258.
31 - Écritures de la Défense du 26 juillet 2004, par. 5.
32 - Réponse de l’Accusation aux Écritures de la Défense du 26 juillet 2004, par. 8.
33 - Écritures de la Défense du 26 juillet 2004, par. 6.
34 - Écritures de la Défense du 26 juillet 2004, par. 8.
35 - Réponse de l’Accusation aux Écritures de la Défense du 26 juillet 2004, par. 11.
36 - Écritures de la Défense du 26 juillet 2004, par. 9.
37 - Réponse de l’Accusation aux Écritures de la Défense du 26 juillet 2004, par. 12.