Tribunal Pénal International pour l'ex Yougoslavie

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1 Le vendredi 23 janvier 2004

2 [Audience publique]

3 [L'accusé est introduit dans le prétoire]

4 --- L'audience est ouverte à 9 heures 06.

5 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Bonjour à tous. Madame Somers, avant

6 de commencer, je souhaite attirer votre attention, deux décisions qui ont

7 été prises par la Chambre, qui ont été déposées hier. Il me semble que les

8 exemplaires ont été distribués ce matin et le conseil de la Défense en a

9 reçu une copie. Ceci concerne la demande en vertu de l'application 92 bis

10 ainsi que les objections de la Défense à la déclaration liminaire de

11 l'Accusation.

12 Madame Somers.

13 Mme SOMERS : [interprétation] Merci beaucoup, Monsieur le Président,

14 Madame, Messieurs les Juges. Je souhaite attirer l'attention de la Chambre

15 pour vous dire que le logiciel Sanction ne fonctionne pas ce matin. Donc,

16 nous aurons peut-être quelques difficultés pour présenter les éléments

17 visuellement ce matin, surtout eu égard à la vidéo. Nous allons voir si

18 nous pouvons améliorer la situation au cours de l'audience ce matin. Dans

19 ce cas-là, nous allons utiliser l'original et ensuite demander la

20 permission à la Chambre de fournir un exemplaire, ce que nous remettrons à

21 la Défense également. Nous avons, de toute façon, des exemplaires

22 disponibles. Nous sommes en regret de constater cela. Je pense que les

23 Chambres ont eu quelques difficultés à mettre à jour le système la semaine

24 dernière et ceci peut, évidemment, être un petit peu gênant.

25 L'Accusation va commencer ce matin par l'interrogatoire principal de M.

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1 Samardzic.

2 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Veuillez faire entrer M. Nikola

3 Samardzic dans le prétoire, s'il vous plaît.

4 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

5 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Veuillez vous asseoir, M. Samardzic.

6 Bonjour, Monsieur. Je souhaite vous rappeler que vous êtes toujours tenu

7 par la déclaration solennelle que vous avez faite au début de votre

8 témoignage.

9 Madame Somers, vous avez la parole.

10 Mme SOMERS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

11 LE TÉMOIN: NIKOLA SAMARDZIC [Reprise]

12 [Le témoin répond par l'interprète]

13 Interrogatoire principal par Mme Somers : [Suite]

14 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur Samardzic.

15 R. Bonjour.

16 Q. Lorsque nous nous sommes quittés la dernière fois, il y a quelques

17 jours, nous parlions de la distance entre Trebinje et Dubrovnik et vous

18 m'avez dit qu'il y avait 24 kilomètres. Nous avons précédemment parlé de

19 quelqu'un qui s'appelait Vucurevic et je souhaite que vous expliquiez

20 davantage une réponse à ma question. Je vous avais demandé : "Est-ce que M.

21 Vucurevic avait une attitude particulière à l'égard de Dubrovnik au cours

22 de cette période ?" Votre réponse, en partie, a été de dire : "Il

23 s'occupait du tourisme et il estimait qu'il était à même de savoir comment

24 il fallait gérer cette question-là. Cela dépendait de lui."

25 S'il vous plaît, est-ce que vous pouvez me dire si vous entendez par là,

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1 comment M. Vucurevic pourrait ainsi contrôler le tourisme et le gérer à sa

2 manière et quel lien existait entre l'industrie du tourisme et ce

3 monsieur ?

4 R. Il savait que Dubrovnik était un site touristique et avait été menacée.

5 Il s'agissait d'une ville dans le sud de l'Adriatique et alors que

6 Dubrovnik était attaquée et fortement endommagée, il souhaitait mettre en

7 place une nouvelle forme de tourisme et tout le monde savait qu'il avait

8 dit : "Nous allons reconstruire une nouvelle ancienne Dubrovnik," et tout

9 le monde savait qu'il souhaitait reconstruire la ville. Il avait fait ce

10 genre de plaisanteries afin de faire de Dubrovnik quelque chose qui allait

11 être ridiculisée. Il s'agissait de blagues dignes d'un agriculteur. Peut-

12 être que les gens de la rue trouvaient cela drôle mais je crois que ce type

13 d'humour était fondé sur le crime, la destruction de la ville, certains

14 hôtels avaient été pris pour cibles. Des gens sont morts. Par conséquent,

15 Vucurevic est en grande partie responsable des événements qui se sont

16 produits dans la ville de Dubrovnik et aux alentours à ce moment-là.

17 Q. N'a-t-il jamais évoqué son titre à l'égard de la ville de Dubrovnik, et

18 la manière dont il gérait le tourisme ?

19 R. Il se disait le ministre du tourisme de Dubrovnik. C'était une de ses

20 plaisanteries. C'était en partie vrai, car il est vrai par ses agissements,

21 il a attiré le mal. Il y a des choses fort dommageables qui ont été

22 commises, parce qu'il n'a pas véritablement attiré des touristes à ce

23 moment-là. Son titre était président de la ville de Trebinje, alors que

24 c'était un simple chauffeur de camion. Il est devenu de plus en plus

25 populaire à Trebinje et aux alentours, pour ses positions

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1 ultranationalistes et sa haine envers les Croates et les Musulmans. Il a

2 été au poste de maire, et a exercé une certaine influence auprès des gens

3 autour de lui, et a fortement milité en faveur de l'attaque contre

4 Dubrovnik.

5 Q. Monsieur Samardzic, connaissez-vous une formation militaire intitulée

6 la Brigade de Trebinje ?

7 R. Personnellement, je n'ai jamais vu cette brigade de mes propres yeux,

8 mais j'en ai beaucoup entendu parler à Boka Kotorska. Nous savions que

9 cette brigade existait. Cette brigade avait pris part au combat autour de

10 Dubrovnik. Cette brigade a pris part au pillage, et à la destruction. Cette

11 brigade était composée de gens d'Herzégovine, non seulement de Trebinje

12 mais d'autres endroits également, comme Bileca et d'autres endroits. Cette

13 brigade était extrêmement active, et avait réussi à mobiliser un nombre

14 assez important de personnes.

15 Q. Si vous le savez, pouvez-vous nous dire s'il vous plaît, où se trouvait

16 le quartier général du 2e groupe opérationnel auquel vous avez fait

17 référence, lorsque vous avez parlé du conflit qui a fait rage à Dubrovnik ?

18 Pouvez-vous nous dire où se trouvait le quartier général ?

19 R. Je ne peux pas vous dire exactement à quel endroit se trouvait le siège

20 lors de l'attaque contre Dubrovnik. Je sais simplement que le quartier

21 général a changé à plusieurs reprises. Il était à Trebinje au début, et

22 ensuite près du théâtre du conflit. Il me semble comme cela avait été

23 demandé. Je ne sais pas exactement où se trouvait le commandement du 2e

24 groupe opérationnel. Comme je vous l'ai dit la dernière fois, par

25 l'intermédiaire de Pavle Bulatovic, le ministre des affaires étrangères,

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1 j'étais en mesure d'obtenir certaines informations, mais l'endroit exact ne

2 m'a jamais été communiqué. J'ai entendu dire que c'était Trebinje et

3 d'autres endroits près de Dubrovnik. Je crois qu'il s'agissait de Kumbor ou

4 d'autres endroits. Je ne peux pas vous dire avec certitude, parce que

5 personne ne me l'a dit. Je ne faisais pas partie de l'armée. Par

6 conséquent, on ne m'a pas indiqué où se trouvait le commandement de ce 2e

7 groupe opérationnel.

8 Q. Pardonnez-moi, vous avez parlé de Pavle Bulatovic, et vous avez dit que

9 c'était le ministre des Affaires étrangères. Est-ce exact ? Est-ce que cela

10 que vous entendiez précisément ?

11 R. Non. Il doit s'agir d'une erreur. Pavle Bulatovic était ministre de

12 l'Intérieur. Le feu Pavle Bulatovic.

13 Q. Merci beaucoup, Monsieur Samardzic. Monsieur Samardzic, simplement je

14 souhaite éclaircir un point. Vous avez parlé d'Herzégovine. Est-ce que vous

15 entendez par là, quelle région vous décriviez, lorsque vous en avez parlé ?

16 Il s'agissait de quelque chose que vous avez évoqué lorsque vous avez parlé

17 du QG du 2e groupe opérationnel. Que représentait l'Herzégovine à ce

18 moment-là ?

19 R. L'Herzégovine faisait partie du territoire de Bosnie-Herzégovine. En

20 réalité, il s'agit de la partie sud-ouest de l'ex-Yougoslavie. C'est une

21 région qui s'étend entre le fleuve Neretva jusqu'à la frontière avec le

22 Monténégro. C'est la largeur de ce territoire. Du sud au nord, ce

23 territoire longeait la frontière croate. Autrement dit, très près de

24 Dubrovnik, jusqu'au fleuve Sutjeska, et l'endroit appelé Cemar. C'est en

25 général l'endroit qui se nomme l'Herzégovine. Il y a des endroits comme

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1 Gacko et d'autre endroits qui s'y trouvent.

2 Q. Pourriez-vous nous dire si Trebinje faisait partie de l'Herzégovine ?

3 R. Oui, tout à fait. Trebinje faisait partie de l'Herzégovine. C'est la

4 deuxième grande ville après Mostar. Néanmoins, il faudrait ajouter qu'une

5 partie du Monténégro faisait autrefois partie de la Bosnie-Herzégovine.

6 Après la libération du joug turc en 1878, cette partie de l'Herzégovine a

7 été rattachée au Monténégro. Par conséquent, cette région se trouve

8 maintenant dans le Monténégro, à l'est de Trebinje et Gacko.

9 Q. Monsieur Samardzic, vous étiez ministre des Affaires étrangères le 8

10 octobre 1991. Je voulais très brièvement vous demander de vous souvenir

11 d'un document qui a déjà été versé au dossier. Il s'agit du document qui

12 porte la cote P20, intercalaire numéro 6.

13 Nous avons des exemplaires à remettre à la Chambre.

14 Mme SOMERS : [interprétation] Nous avons un nombre d'exemplaires

15 suffisants. Nous pouvons en remettre au conseil de la Défense. Je crois que

16 nous avons devoir utiliser le rétroprojecteur, à cause du logiciel

17 Sanction. J'en suis désolée.

18 Monsieur Samardzic, veuillez regarder ces documents, s'il vous plaît. Il

19 s'agit d'un document intitulé -- envoyé par l'assemblée de la République du

20 Monténégro à Titograd le 8 octobre 1991. Il semble que ce document soit

21 signé par quelqu'un qui porte le nom du Dr Risto Vukcevic. Connaissez-vous

22 quelqu'un portant ce nom ?

23 R. Oui, tout à fait. M. Risto Vukcevic, c'était le président du parlement

24 du Monténégro. Il est décédé depuis, malheureusement. A l'époque, c'était

25 le porte-parole du parlement monténégrin.

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1 Q. Saviez-vous qu'il occupait ce poste, le 8 octobre 1991 ? Saviez-vous

2 qu'il avait un lien avec ce document ? Saviez-vous à ce moment-là, qu'il

3 avait participé à la rédaction ou à la mise en oeuvre ou l'application de

4 ce document "Initiatives" ?

5 R. En sa qualité de président du parlement monténégrin, c'est lui qui a

6 signé ce document mais c'est moi-même qui l'ai rédigé. Il s'agissait, à ce

7 moment-là, c'était une situation difficile. La guerre avait déjà éclaté. Il

8 s'agissait de trouver une solution pour essayer de mettre fin à la guerre.

9 C'étaient des tentatives en ce sens. Nous nous sommes tournés vers le

10 président du parlement croate, M. Domljan, pour essayer d'entamer des

11 négociations et nous disions qu'au Monténégro, nous n'avions aucun rôle à

12 jouer dans l'agression contre la Croatie alors, qu'en fait, dans la

13 réalité, nous avions joué un rôle puisque nos garçons étaient fortement

14 engagés dans l'armée. Mais nous, au gouvernement, nous voulions prendre nos

15 distances le 16 octobre 1991 de toute cette affaire, et nous souhaitions

16 lancer une procédure en vue de rétablir la paix.

17 C'est pour cela que j'ai rédigé cette initiative qui a été acceptée, à la

18 fois par Miro et Momir et signée par Risto Vukcevic. Nous avions une ligne

19 de communication directe avec le président croate parce que, par ailleurs,

20 il était très difficile de communiquer par téléphone. J'avais, moi-même, un

21 téléphone spécial en Italie et j'avais une borne en haut d'une colline. Par

22 conséquent, la transmission se faisait par l'intermédiaire de l'Italie et

23 j'ai pu converser directement avec Zagreb. C'est comme cela que nous avons

24 établi ce système de communication. Ce qui signifie que bon nombre de

25 personnes des services secrets étaient très étonnés parce qu'ils s'étaient

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1 rendu compte que nous pouvions communiquer mais ils ne savaient pas

2 comment.

3 Il ne s'agissait pas d'activités d'espionnage mais nous voulions simplement

4 entrer en contact avec la Croatie de façon à pouvoir entamer des

5 négociations.

6 Après la rédaction de cette initiative, la Croatie a répondu favorablement.

7 Nous avons été invité à Zagreb pour aller rencontrer M. Domljan et pour

8 pouvoir négocier avec lui. Néanmoins, à la dernière minute, Momir Bulatovic

9 a mis fin à ce processus et je n'ai m'y suis pas rendu.

10 Q. Monsieur Sarmardzic, je souhaite simplement que nous puissions corriger

11 quelque chose au niveau du compte rendu d'audience. A la page 7, ligne 9,

12 vous avez dit : "J'ai rédigé moi-même cette initiative qui a été acceptée

13 par les deux." Et le compte rendu d'audience précise Miro, Miro et Momir,

14 est-ce que vous entendiez, M-i-r-o, Miro et un autre nom ? Veuillez

15 préciser, s'il vous plaît.

16 R. J'ai rédigé ce document moi-même et je leur ai remis. Ils n'ont fait

17 aucune objection et ils ont estimé que ce document avait peu de chance

18 d'aboutir. Par voie de conséquences, il était ni très enthousiaste ni

19 farouchement contre parce qu'il savait que la guerre allait se poursuivre.

20 Risto et moi-même, cependant, nous souhaitions que quelque chose aboutisse.

21 C'est la seule correction que je puisse faire ici eu égard à la page 2 de

22 la déclaration. C'est les raisons que j'ai expliquées dans ma lettre un peu

23 plus tard, à savoir, le Monténégro ne devrait pas permettre à une base

24 militaire de s'établir à Boka Kotorska, même s'il s'agissait d'une armée

25 amie qui venait de Croatie. Cela était le seul changement. On m'avait

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1 prévenu que nous ne pouvions pas être frère car nous étions en guerre. Par

2 ailleurs, cette version a resté en l'état hormis cette différence, et cette

3 version a été envoyée à Zagreb.

4 Q. Merci beaucoup. Je souhaite éclaircir un point, s'il vous plaît.

5 Lorsque vous dites Miro, et Miro et Momir, de qui s'agit-il, s'il vous

6 plaît ?

7 R. Permettez-moi de répéter : Momir Bulatovic, c'est le premier à avoir

8 pris connaissance de ce document. Je l'ai ensuite montré à Milosevic

9 Djakanovic qui était premier ministre à l'époque.

10 Q. Merci beaucoup. Je voulais simplement en être sûr.

11 Au paragraphe 1 de ce document, je vais faire référence au texte anglais si

12 vous me le permettez. Compte tenu -- pardonnez-moi. Je vais reprendre.

13 L'initiative portant sur la définition de la frontière entre la République

14 du Monténégro et la République de Croatie par l'intermédiaire d'un accord,

15 frontière au niveau des mers et frontière territoriale.

16 Le sujet de ce document, je crois, porte sur la question de territoires,

17 n'est-ce pas ?

18 R. Oui.

19 Q. Il s'agit d'une ligne de communication directe entre le Monténégro et

20 la Croatie, n'est-ce pas, sans la participation de Belgrade ?

21 R. Oui.

22 Q. Très bien. Vous pouvez répondre dans votre propre langue. Je voulais

23 simplement que vous lisiez ce texte, si vous le voulez bien.

24 R. Le début de ces initiatives montre, à mon sens, que cette initiative a

25 effectivement été mise en place. Cela montre que la République de Croatie

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1 était décidée à devenir un état indépendant. L'assemblée du Monténégro

2 avait décidé qu'en sus de l'ouverture ou de la discussion de certaines

3 questions d'état entre les deux états, il était essentiel de changer les

4 frontières existantes entre la Croatie et le Monténégro. En disant cela, le

5 parlement du Monténégro reconnaît l'indépendance de la Croatie, ce que

6 personne n'avait reconnu jusqu'alors, hormis la Slovénie.

7 Nous reconnaissons l'indépendance de la République de Croatie, c'est-à-

8 dire, il s'agit d'une contradiction. Nous sommes en pleine guerre. Nous

9 nous battons les uns contre les autres alors que le parlement stipule que

10 l'indépendance de la Croatie est acceptée. Outre cette affirmation, il y a

11 la question de la mer, des frontières maritimes, ce qui est

12 particulièrement important d'établir puisque jusqu'à ce moment-là, il

13 existait qu'un état à ce moment-là. Alors qu'il y avait un changement, il

14 fallait établir une frontière sur la mer. Il y avait une frontière existant

15 déjà sur la terre mais il fallait établir une nouvelle frontière maritime

16 puisqu'il n'y avait pas de frontière entre la mer monténégrine et la mer

17 croate puisque la mer appartenait aux deux.

18 Selon ces initiatives, on stipule que la Croatie et le Monténégro doivent

19 établir des pourparlers pour établir exactement les frontières exactes qui

20 se trouvent dans la mer, sur la mer Adriatique à l'extérieur de Boka

21 Kotorska. Je crois que le tout était conforme avec le droit international

22 et la Croatie a accepté de mener des pourparlers avec nous concernant ces

23 questions. Malheureusement, cela a été interrompu de façon abrupte,

24 probablement selon un ordre émis par Belgrade et les pourparlers ont cessé

25 à ce moment-là.

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1 Q. Monsieur Samardzic, a-t-on pensé ou est-ce que ce document à la

2 rédaction de laquelle vous avez participée, ce document parle-t-il d'un

3 contact direct et continu entre le Monténégro et la Croatie concernant les

4 questions telles les frontières, par exemple ?

5 R. Ce document démontre effectivement qu'avec la Croatie, nous avions

6 établi des contacts directs afin de résoudre ces problèmes. Ces questions

7 ne sont toujours pas résolues même aujourd'hui, après 10 jours. La

8 frontière maritime n'a pas encore été établie entre Boka Kotorska au

9 Monténégro et la Croatie. Il y a eu un grand succès, puisque on a enfin

10 reconnu que la Prevlaka appartenait à la Croatie.

11 Pour ce qui est des frontières maritimes, cela demeure encore non résolu,

12 et c'est une commission spéciale qui doit déterminer cette frontière. A

13 l'époque, on disait que Prevlaka appartenait à la Croatie. Cela indiquait

14 une trahison pour la plupart des gens au Monténégro et à Boka Kotorska. Ce

15 sont des choses qui étaient écrites également dans les médias.

16 J'avais lu dans les médias, dans les journaux, que j'étais complètement

17 cinglé de dire que Prevlaka était croate, et que nous allions pouvoir mener

18 des pourparlers. Je ne croyais jamais que nous pouvions nous approprier de

19 Prevlaka par la force, je voulais toujours mener des pourparlers.

20 Je voulais d'abord reconnaître que Prevlaka appartenait à la Croatie, et

21 que par la suite nous pouvions mener des pourparlers afin de se

22 l'approprier. Selon certaines personnes, cela représentait presque une

23 folie. Un certain temps s'est écoulé, et toutes ces têtes intelligentes,

24 tous ces gens intelligents finalement reconnu que Prevlaka appartenait à la

25 Croatie.

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1 Q. Monsieur Samardzic, le dernier paragraphe de ce document intitulé

2 initiative, paragraphe qui a été signé par le Dr Vukcevic, établit une

3 personne contact, Il s'agit d'une personne contact au sein du parlement

4 croate, avec lequel on pouvait mener des pourparlers, qu'il avait également

5 une personne du côté monténégrin. Dites-nous qui est la personne contact ?

6 R. Où se trouve ce paragraphe ?

7 Q. Paragraphe 4.

8 R. S'agissant du point 4, ce point 4 stipule que les pourparlers devaient

9 se poursuivre avec la Croatie. J'ai été désigné à mener des pourparlers. A

10 mes côtés, il y avait également le Dr Asim Dizdarevic, qui était le

11 président adjoint de l'assemblée du Monténégro. Il y avait également une

12 autre personne, alors que du côté croate, il y avait le Dr Hrvoje Kacic, et

13 certainement les autres personnes qui étaient désignées par le Dr Zarko

14 Domljan.

15 Mais toujours est-il, lorsque j'examine un peu mieux ce document, puisque

16 j'ai déjà commencé à oublier un peu, ils s'attendaient à ce que nous

17 arrivions à Zagreb pour mener les pourparlers. Il fallait nous y rendre

18 vers le 25 octobre. Nous devions nous rendre à Zagreb pour entamer les

19 pourparlers concernant Prevlaka. Ensuite Momir a dit que, nous n'allons pas

20 nous déplacer vers Zagreb. Cela s'est arrêté ainsi.

21 Nous nous sommes trouvés dans une situation assez difficile. Nous sommes

22 arrivés à établir des contacts dans une situation assez difficile, où l'on

23 bombardait Dubrovnik. On entendait des coups de feu. Il nous était très

24 difficile d'établir des contacts, des pourparlers. Nous avions néanmoins

25 réussi. Il nous était impossible d'ordonner à l'amiral général Strugar

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1 d'arrêter les combats, mais nous pouvions néanmoins essayer d'établir la

2 paix. C'était l'initiative qui nous guidait, indépendamment du fait que

3 dans les premières phrases, tout indiquait que l'on parlait de Prevlaka.

4 Nous savions très bien que Prevlaka n'était qu'un prétexte, qu'il ne

5 s'agissait pas de ce qu'il y avait de plus important. Même si dans les

6 médias et même si dans les cœurs des gens, c'était quelque chose de très

7 important. Ce qui était plus important, c'est que les gens perdaient la

8 vie, qu'on était en train de détruire la ville, et qu'il fallait à tout

9 prix interrompre cette activité de combat.

10 Certaines personnes ont fait plus, d'autres moins, mais nous avions

11 néanmoins tenté d'établir la paix. Il y avait les dirigeants au sein du

12 Monténégro qui ont essayé. Je n'étais pas seul à vouloir la paix. Il y

13 avait d'autres personnes à mes côtés. Nous nous sommes trouvés dans une

14 situation fort délicate. Il nous a fallu réussir des pourparlers, mener des

15 pourparlers, réussir d'établir des contacts avec la Croatie, alors que la

16 ville était attaquée et que des gens en perdaient la vie.

17 Q. Monsieur Samardzic, cette initiative, selon vous, a-t-elle été

18 communiquée au parlement croate ? Effectivement, ont-ils reçu cette

19 initiative. Est-ce que vous le savez ?

20 R. Certainement. Ils ont reçu cette initiative. Ils y ont répondu, je

21 pourrais vous la montrer. J'ai la réponse à l'initiative. Ils étaient fort

22 contents de l'avoir reçue. Ils l'ont reçue de façon très positive, et nous

23 ont envoyé une réponse très positive.

24 Q. Monsieur Samardzic, je n'ai pas de plan ou de carte à ce moment-ci,

25 mais vous pourriez peut-être nous indiquer où se trouve Prevlaka, seulement

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1 pour pouvoir nous orienter. Je vous prie, si ce n'est pas trop difficile de

2 le faire par cœur, sans une carte.

3 R. Non, ce n'est pas trop difficile. Je vous explique. Prevlaka est une

4 ceinture étroite de terre qui entre tout près de la baie de Boka Kotorska,

5 et c'est tout petit. Il est même possible de passer de l'autre côté de la

6 baie à la mer ouverte. C'est la raison pour laquelle on l'appelle Prevlaka,

7 petite ceinture de terre. Elle s'enfonce dans la baie de Boka Kotorska.

8 Cela appartient à Konavle donc à Dubrovnik. Konavle a appartenu à Dubrovnik

9 depuis des siècles.

10 Il faut dire que l'armée austro-hongroise s'était emparée de cette région,

11 avait établi une base militaire. Tous les paysans qui s'y sont trouvés,

12 n'ont jamais osé demander qu'en est-il de cette terre. C'est une terre qui

13 ne produit pas, une terre pas très fertile. Il fallait dire qu'il y avait

14 des citoyens qui n'osaient même pas y aller. Les gens savaient que cela

15 appartenait au Monténégro. Tout le monde était assez surpris, lorsque dans

16 le croate, on avait écrit que Prevlaka appartient à la Croatie. Pendant les

17 années de Tito, personne n'a porté attention à qui appartenait Prevlaka,

18 jusqu'au moment où les nouvelles républiques ont vu le jour. C'est la

19 raison pour laquelle Prevlaka devenait de plus en plus importante, puisque

20 Prevlaka était considéré comme un point stratégique qui ferme l'entrée à la

21 baie de Boka Kotorska.

22 Il est tout à fait normal que, dans notre psychologie des Balkans, cela a

23 pris de l'ampleur et une importance particulière, car nous savions que

24 l'entrée à Boka Kotorska ne pouvait appartenir à aucun autre état sauf au

25 Monténégro, c'est-à-dire à la Serbie.

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1 Et si vous regardez la rivière Schelde qui se trouve entre la Belgique et

2 la Hollande, lorsque le bateau se trouve d'un côté, cela appartient à la

3 Belgique, et de l'autre côté, à la Hollande, mais il n'y a personne qui

4 porte attention. Chez nous malheureusement, cela était devenu un énorme

5 problème. Les pourparlers avaient commencé. Des demandes avaient été

6 faites. On avait même dit que la guerre était menée pour Prevlaka, puisque

7 Prevlaka pendant très longtemps représentait un problème, et est encore un

8 problème à ce jour, cette question de l'appartenance de Prevlaka.

9 Q. Monsieur Samardzic, vous nous avez dit qu'il semblait que Prevlaka

10 était devenu une question très importante. Pourrais-je vous demander de

11 nous préciser si oui, ou non, à la réunion du gouvernement que vous nous

12 avez décrite, la réunion lors de laquelle le général Strugar était présent,

13 le ou vers le 1er octobre 1991, c'est aussi la question de Prevlaka qui est

14 soulevée lors de cette réunion. Est-ce qu'elle a été soulevée en indiquant

15 s'il s'agissait d'une raison pour le conflit lors de cette réunion ?

16 R. Il se peut que quelqu'un ait pu en parler à ce moment-là mais je n'ai

17 pas entendu parler de cela. Je suis arrivé un peu tardivement. Je vous ai

18 dit que j'étais allé accompagner M. Wejnaendts. Je n'ai pas entendu ces

19 propos. On a d'abord dit qu'il nous fallait défendre le pays, libérer cette

20 région et nous défendre des Croates. Il y avait plusieurs personnes, bien

21 sûr, à cette réunion mais la discussion du 1er octobre ne tournait pas

22 autour de Prevlaka. Mais le 3, le 4 octobre, lorsqu'on a vu qu'il n'y avait

23 pas d'Oustachi, lorsque tout le monde a vu que les Oustacha ne pénétraient

24 pas dans Boka Kotorska, mais que plutôt c'était nous qui étaient en train

25 d'entrer dans la Croatie. C'est à ce moment-là qu'on a commencé à parler de

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1 Prevlaka et à dire, Prevlaka nous appartient mais les Croates veulent se

2 l'approprier. Ce soir-là, on a, plutôt, parlé de la libération de la zone,

3 de briser les forces croates qui essaient d'envahir Boka Kotorska. Mais ils

4 disaient que Boka Kotorska envahissait et essayait de conquérir Boka

5 Kotorska.

6 Mais plus tard, on a parlé de la défense de la République de Dubrovnik. On

7 a commencé à parler de cette région et d'établir une autre République de

8 Dubrovnik, même si dans ma première déclaration du 2 octobre 2002, j'ai dit

9 que le gouvernement du Monténégro n'a pas vraiment essayé, ou n'a pas

10 vraiment voulu établir une nouvelle République de Dubrovnik. C'était le

11 parti nationaliste du Monténégro. Ils rêvaient d'établir une nouvelle

12 République de Dubrovnik. C'était une question importante pour eux.

13 Q. Je veux simplement m'assurer de vous avoir bien compris. Lorsque vous

14 avez entendu le général Strugar prendre la parole au cours de cette

15 réunion, vous nous dites qu'il n'a pas parlé de Prevlaka ?

16 R. Je ne me souviens pas qu'il ait parlé de Prevlaka ce soir-là. Il a

17 peut-être mentionné cet endroit mais je ne me souviens pas. Je sais qu'il

18 nous fallait défendre le pays de 30 000 Oustachi, qu'il nous fallait briser

19 ces forces avec une perte minimale et que les choses allaient se passer

20 assez rapidement. C'est ce qu'a dit le général Strugar en utilisant un

21 langage militaire. Il était très calme et c'est lui qui donnait le ton

22 principal. C'était une discussion qui tournait autour de cela. Il était

23 appuyé particulièrement par Momir Bulatovic mais nous, les autres, qui nous

24 trouvions là, je dois dire que moi-même, j'ai dit, si nous sommes attaqués,

25 il nous faut nous défendre. Il faut dire que la question principale

Page 1138

1 débattue lors de cette réunion était de défendre le Monténégro car on nous

2 disait que le Monténégro était attaquée. Pour ce qui est de Prevlaka, de

3 son parti du territoire, et cetera. Tout cela a été discuté lors de

4 réunions subséquentes, les jours qui ont suivi, mais lors de cette réunion-

5 là, il n'a pas été question de Prevlaka. Le ton principal était, consistait

6 à dire que nous n'allions pas permettre aux Oustachi de nous envahir. Bozo

7 Babic nous a rappelé de quelle façon les Oustachi se sont comportés au

8 cours de la Deuxième Guerre mondiale, qu'il ne fallait leur permettre de se

9 comporter de nouveau de cette façon-là. C'était très tard dans la soirée du

10 1er octobre 1991.

11 En ayant ces idées-là en tête, je suis rentré à la maison, à Boka Kotorska

12 mais j'ai tout de suite compris lorsque j'ai ouvert la télé qu'il n'y avait

13 absolument aucune invasion des Oustachi. J'avais le câble. J'avais

14 l'antenne parabolique. Je pouvais très bien voir les canaux étrangers. Il

15 n'y avait aucune question de cela. On ne parlait pas du tout du fait que

16 les Oustachi essayaient de s'emparer de Boka Kotorska, mais c'était,

17 plutôt, nos unités qui entraient dans la Croatie.

18 Q. Monsieur Samardzic, je souhaiterais vous demander si en tant que membre

19 du cabinet, en tant que ministre, en tant que ministre des Affaires

20 étrangères, étiez-vous au courant du fait que les hauts dirigeants du

21 gouvernement du Monténégro, à l'époque, parlaient de conflits dans la

22 vieille ville de Dubrovnik ? Je parle des personnes au niveau du cabinet,

23 des personnes au niveau de l'assemblée. Je vous parle également des

24 représentants militaires, des représentants de la Défense territoriale et

25 de toutes autres formations militaires. Quelle était leur façon de

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1 percevoir les choses à ce moment-là ?

2 R. J'avais l'impression qu'à partir du 1er octobre, ils avaient

3 l'impression qu'ils allaient pouvoir s'emparer de Dubrovnik, de la région,

4 sans beaucoup de pertes et sans destruction massive. J'avais l'impression

5 qu'ils croyaient que cela se passerait facilement. Les hauts dirigeants

6 pensaient qu'ils n'auraient pas de destruction massive et que, quelques

7 jours plus tard, nous allons pouvoir prendre notre café tranquillement sur

8 Stradun [phon], comme nous le faisions auparavant. Tous les jours, nous

9 nous rendions compte que les choses n'allaient pas se dérouler de cette

10 façon-là. Nous étions étonnés, chaque jour un peu plus, et l'enthousiasme

11 n'était plus le même.

12 Lorsque le 17 octobre, Lord Carrington et son plan avait été présenté à

13 l'assemblée, nous avons procédé à une traduction rapide de ce plan. Nous

14 avions constaté que Dubrovnik allait être libérée. Ils ont commencé à

15 parler du fait qu'il ne fallait pas détruire Dubrovnik, et cetera. Vous

16 pouvez imaginer que toutes sortes d'histoires ont circulé dans ce

17 parlement. Il y avait des gens qui étaient des extrémistes, qui étaient des

18 nationalistes, qu'ils disaient qu'il fallait aller à Virovitica et à

19 Karlobag, qu'il fallait s'emparer de ce territoire, qu'il fallait établir

20 une Grande Serbie. Il y avait également des personnes qui demandaient à ce

21 que le Monténégro devienne indépendant. Il y avait des personnes qui

22 disaient que ce qu'on faisait à Dubrovnik était une honte. Alors, vous

23 pouvez comprendre que dans une telle situation, dans une telle atmosphère,

24 vous pouvez imaginer le ton qui y prévalait. Il y avait des insultes. On

25 disait toute sortes de choses. Il y avait des personnes qui m'insultaient.

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1 Il y avait certaines personnes qui m'ont même craché dessus. Il y avait des

2 personnes qui voulaient, enfin, je croyais qu'il s'agissait du député mais

3 ce n'était pas des députés mais certaines personnes, pendant la pause,

4 s'étaient dirigées vers moi pour me passer à tabac, même. Mais c'était des

5 nationalistes, d'ailleurs.

6 Q. Pour revenir à la question précédente, je vous demanderais de vous

7 concentrer, de me répondre si on avait conscience de ce qui se passait dans

8 la vieille ville ? Est-ce que les gens savaient très bien de la façon dont

9 on avait attaqué la vieille ville, la partie historique de la ville de

10 Dubrovnik ?

11 R. Les soldats qui venaient nous disaient ce qui se passait. Il y avait

12 plusieurs personnes qui venaient à Boka Kotorska. Je n'avais vu cela

13 auparavant. Ils pillaient, ils emportaient des choses. La plus grande

14 partie de ces derniers se rendaient en bateau jusqu'à Ucin [phon] et

15 Titograd. Ils parlaient ouvertement de ce qui se passait là-bas de sorte

16 que les personnes avaient compris de quoi il s'agissait sans même recevoir

17 des rapports officiels. Des rapports officiels disaient, par exemple, la

18 télé de Titograd disait que, et à la radio on entendait que les unités

19 étaient en train de briser les forces des Oustachi et que Libez [phon]

20 était en train de libérer les zones, mais il était certain que ces rapports

21 -- mais on ne parlait pas de pillages.

22 Ce qu'on entendait à la télévision, à la radio, disait que nos forces

23 étaient en train de libérer les territoires et qu'ils faisaient énormément

24 de progrès et que les pertes étaient minimes. Mais pour ne pas parler de

25 CNN, SkyNews, de BBC et de la Rete 1 et Rete 2, la télé italienne et leur

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1 reporter avait réussi à s'infiltrer de façon secrète dans le théâtre des

2 opérations. Ils ont pu prendre des photos. Ils ont pu tourner des scènes,

3 et nous montrer ce qui se passait, afin que l'on puisse arrêter cette

4 activité militaire, et montrer au monde ce qui se passait.

5 Je me souviens très bien qu'on avait fait une réunion de diplomates,

6 d'ambassadeurs européens et l'ambassadeur des Etats-Unis. Ils étaient venus

7 à Boka Kotorska, pour se rendre sur le front. Je devais aller, je devais

8 les accompagner, mais je ne suis pas allé les accompagner. On avait dit que

9 Jokic n'allait pas leur permettre de se rendre sur le théâtre des

10 opérations. Il est vrai que depuis Herceg-Novi jusqu'à Budve, sont allés

11 par bateau. Le Dr Kacic qui était également présent, a parlé de cela. D'une

12 part, il y avait l'armée qui avait permis au prêtre Père Anfilohije de se

13 promener sur le front et d'empoisonner l'esprit des soldats contre les

14 Croates et les Musulmans, alors que la Croatie -- qu'on n'a pas permis aux

15 ambassadeurs de venir sur le territoire. Le Père Anfilohije était une

16 personne qui était haut dirigeant de l'église, se trouvait en fait à la

17 tête de l'église orthodoxe, a comparé Drazo Mihajlovic qui était un

18 criminel de guerre avez un saint homme. La JNA s'est très mal montrée au

19 cours de cette période.

20 Q. Monsieur Samardzic, je doit vous interrompre, simplement pour gagner du

21 temps. Je voulais vous poser la question suivante. Personnellement, est-ce

22 que vous, en tant que ministre au sein du gouvernement, est-ce que vous

23 saviez qu'on avait bombardé la vielle ville de Dubrovnik, lors de ces

24 pilonnages on a causé des dégâts à la veille ville ?

25 R. En tant que ministre du ministère, je n'ai pas su que l'on bombardait

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1 la ville, mais j'ai vu à la télévision, même la télé Monténégro a montré

2 que l'on bombardait Dubrovnik. Ils affirmaient qu'il ne s'agissait pas

3 d'obus, mais que c'étaient les habitants de Dubrovnik qui incendiaient des

4 pneus, afin de pouvoir jeter le blâme sur les Croates, et d'exonérer la

5 JNA. C'est ce qu'on voyait à la télé de Titograd. La télé de Titograd

6 disait que c'étaient les Croates qui incendiaient des pneus afin de jeter

7 le blâme sur la JNA. Plus tard, lorsque j'ai regardé d'autres émissions

8 télévisées provenant d'autres chaînes de télévision, j'ai très bien vu que

9 l'on avait causé d'énormes dégâts aux monuments historiques

10 particulièrement, afin de pouvoir causer des dégâts sur les toits et la

11 ville. J'en ai été informé de cette façon-la. J'enregistrais sur vidéo tout

12 ce que je pouvais voir. Je me rappelle d'avoir apporté à Momir Bulatovic

13 des cassettes vidéo. Je lui ai dit : "Qu'est-ce qui se passe ?" Parce que

14 pendant un certain temps, il disait que non, on n'est pas en train de

15 détruire la ville, que c'étaient les Croates eux-mêmes qui incendiaient des

16 pneus.

17 Q. En parlant de l'armée, est-ce qu'ils se rapportaient aux dirigeants

18 politiques du Monténégro ? Disaient-ils ce qui se passait à Dubrovnik ?

19 Informaient-ils les dirigeants de Monténégro concernant ce qui se passait

20 dans la vielle ville ? Est-ce que vous le savez ?

21 R. L'armée s'agissant de nous, simples ministres, ne nous informait

22 absolument de rien. L'armée se réunissait. Ils avaient leur cabinet. Nous

23 ne faisions pas partie de leurs réunions. C'est eux qui se réunissaient

24 dans le bureau de Momir Bulatovic. Des fois, ils se réunissaient dans le

25 bureau de Milo Djukanovic. C'est là que l'on parlait de ce qui se passait,

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1 mais c'étaient certains généraux. Des fois, il y avait un général de

2 cabinet. Je crois que ce cabinet n'était pas composé de tous les généraux.

3 C'était simplement quelques généraux qui avaient droit à assister à ces

4 réunions. Pour ce qui est des autres, ils pouvaient lire les notes prises

5 au cours de ces réunions. Pour ce qui est de ce qui se passait vraiment, le

6 gouvernement n'a su que ce qui se passait lorsque le tout s'était terminé.

7 Je parle de l'ensemble du gouvernement, à savoir, si on avait entendu des

8 histoires, des bribes d'histoire par-ci par-là. On entendait parler, on

9 entendait dire toute sorte de choses. Les gens racontaient certains faits.

10 On disait que depuis Cilipi, on avait apporté des parties pour l'aéroport,

11 d'autres pour les Serbes de Titograd. On a parlé de pilonnage. On en a

12 beaucoup parlé entre nous, mais cela n'a pas été débattu lors de réunions

13 officielles. Certains ministres rendaient des décisions ad hoc, et ainsi de

14 suite.

15 Nous savions tous très bien ce qui se passait, mais il n'y a pas eu

16 d'opinion exprimée, d'opinion politique officielle concernant ces

17 questions.

18 Q. Une action, a-t-elle été prise par les dirigeants du Monténégro, afin

19 d'arrêter les attaques dirigées contre la vieille ville ?

20 R. Non. Autant que je le sache, il n'y a pas eu d'action par voie de

21 négociation. Nous avions tenté toutefois d'arriver à une paix. On voulait

22 inclure l'armée dans ce processus, pour qu'il n'y ait plus de conflit. Je

23 ne sais pas comment cela est arrivé. A d'autres reprises, il y a eu des

24 cessez-le-feu. Les négociations étaient en cours. Ces négociations ont

25 résulté par des

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1 cessez-le-feu. Jamais il n'y aurait pu avoir de cessez-le-feu, si l'armée

2 n'avait pas décidé de l'accepter. Elle l'a fait, parce qu'elle était sous

3 la pression de l'opinion publique internationale. En plus, l'armée s'était

4 rapprochée de Dubrovnik, mais sans grand sacrifice, victimes nombreuses.

5 Elle ne pourrait pas envahir la ville, même si elle entreprenait des

6 attaques bien plus importantes. C'est à cause de tout cela qu'il y a eu

7 des cessez-le-feu. Selon un accord, on a décidé que l'armée devrait se

8 retirer de Cilipi. Cet accord également, prévoyait la normalisation de la

9 vie des habitants de Dubrovnik. Je ne garde pas tous les détails à

10 l'esprit. Par exemple, la ville de Cavtat était occupée, mais n'était pas

11 détruite, comme le reste de la région de Dubrovnik. L'armée a permis aux

12 habitants de se rendre à Dubrovnik.

13 D'après moi, l'arrivée de Hrvoje Kacic, sa participation aux négociations à

14 Titograd le 24 octobre 1991, il est arrivé avec M. Turko, un des députés à

15 l'assemblée. Justement, c'est lui qui a participé à ces négociations, qui

16 ont pour but le retrait de l'armée à 16 kilomètres de la ville de

17 Dubrovnik. On a très bien entendu ce que Risto Vukcevic a dit, ce qu'il a

18 exigé, et ce qui a été accepté au bout de quelques jours. Pendant un

19 certain temps, l'armée a accepté cette ligne de retrait qui se trouvait à

20 16 kilomètre de Dubrovnik. A un certain degré, la ville s'était quelque peu

21 normalisée. Mais il n'y avait plus d'eau, il n'y avait plus d'électricité,

22 il n'y avait pas de vivres. C'était un cessez-le-feu qui n'a duré que peu

23 de temps. Après le 6 décembre, je crois, tout a repris de plus belle, les

24 bombardements, et cetera.

25 Il y a un journal où tout est consigné.

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1 Q. Excusez-moi, Monsieur Samardzic, vous avez avancé la date du 16

2 décembre ?

3 R. Non, j'ai dit le 6 décembre. C'était la date à laquelle un grand

4 bombardement a eu lieu.

5 Q. Quelle était la cible de ces bombardements ?

6 R. Le 6 décembre, le centre-ville a été bombardé depuis toutes les

7 positions et les grands dégâts ont été causés. Deux jours avant ou après,

8 un cessez-le-feu a été signé. Les combats se sont toutefois poursuivis de

9 plus belle.

10 Q. Je vous remercie, Monsieur Samardzic. Lorsque vous dites "centre-

11 ville", entendez-vous par là, la vieille ville ?

12 R. Oui. C'est toute la partie de la ville qui se trouve à l'intérieur des

13 remparts. Ce n'est pas uniquement la rue de Stradun mais toute la vieille

14 ville, la vieille ville dans son ensemble. C'est le centre-ville.

15 Q. Monsieur Samardzic, 20e siècle, vous souvenez-vous d'événements au

16 cours desquels il y aurait eu des dégâts apportés à la vieille au courant

17 des deux conflits mondiaux ?

18 R. Vous pensez à la vieille ville Dubrovnik ?

19 Q. Oui, à la vieille ville de Dubrovnik. Est-ce que vous le savez s'il y a

20 eu des bombardements de la vieille ville au courant du 20e siècle outre

21 ceux qui se sont produits lors des événements que vous nous avez décrits ?

22 R. Non, jamais au courant du 20e siècle durant 14 siècles, depuis que la

23 ville de Dubrovnik a été créée, la ville n'a jamais fait l'objet de

24 bombardements. Des armées puissantes se sont dirigées à plusieurs reprises

25 vers la ville et les combats, pourtant, cessaient dès qu'ils s'approchaient

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1 de la ville. En 1994, par exemple, lorsque les alliés sont arrivés, ont

2 occupé le sud de l'Italie et lorsque les avions américains et britanniques

3 survolaient l'Adriatique pour lancer des attaques en Roumanie sur les

4 champs d'exploitation de pétrole, ils survolaient, à ces occasions-là,

5 Dubrovnik qui leur servait de repères. Peko Dapcevic, le général de la JNA,

6 a envoyé un message aux commandants des alliés en Italie en lui demandant

7 de ne pas survoler Dubrovnik. Il ne faut absolument pas qu'une bombe tombe

8 sur la ville. Prenez un autre chemin, un autre itinéraire. Il ne faut pas

9 survoler Dubrovnik.

10 Voilà, c'était la manière de faire la guerre des partisans de Tito et de

11 l'autre côté, vous voyez, vous pouvez comparer avec la guerre qu'a mené le

12 général Strugar. Toutes les armées au courant de l'histoire ont fait tout

13 pour ne pas endommager la ville de Dubrovnik, qui n'a jamais été bombardée.

14 C'était impossible, impensable que l'on attaque Dubrovnik.

15 En 1800 et quelque, 1805, Napoléon est arrivé à Dubrovnik. Il était le

16 maître de Dubrovnik mais il n'y a pas eu de combats au préalable. Les

17 vaisseaux sont arrivés, se sont rapprochés de Dubrovnik et pourtant, il n'y

18 a pas eu un tir dirigé vers la ville. Pourtant, il y avait les Orthodoxes

19 d'un côté et Dubrovnik était une ville catholique de l'autre. Il s'agissait

20 d'un respect envers la ville de Dubrovnik. Ce que nous avons fait est une

21 honte et une des plus grande honte ce qui s'est produit en 1991.

22 Q. Connaissez-vous un certain Slavko Perovic au Monténégro ?

23 R. Oui. Il s'agit du président de l'alliance libérale du Monténégro.

24 Q. Savez-vous quelle était son attitude à l'égard du conflit à Dubrovnik,

25 à l'époque ?

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1 R. Il s'y opposait. Il s'opposait à l'attaque du Monténégro et de la JNA.

2 Ils organisaient des manifestations, lui et son parti. Les dirigeants les

3 accusaient de trahison. Ils les qualifiaient d'espion de Tudjman. Leurs

4 tristes positions politiques ont été modifiées par la suite mais pour ce

5 qui est de la guerre de Dubrovnik, je dis, chapeau, même si je ne les

6 respecte pas plus que cela, ces derniers temps. A l'époque, je crois qu'ils

7 se montrés très dignes.

8 Q. Savez-vous s'il y a eu des manifestations, des rassemblements dans la

9 zone de Cetinje pendant ce conflit ? Est-ce que M. Perovic y a pris part ?

10 R. Oui. Cela s'est produit assez souvent, des protestations contre la

11 guerre, contre l'attaque contre Dubrovnik à plusieurs endroits au

12 Monténégro, et surtout dans notre ancienne capitale de Cetinje, une vieille

13 ville, une ville ancienne, une ville de tradition. Cetinje est une ville de

14 résistance qui se situe en montagnes sous le sommet Lovce [phon]. Une fois,

15 de 15 000 à 20 000 personnes se sont rassemblées pour lancer un appel. Ils

16 ont demandé pardon à Dubrovnik. C'était un chant populaire qui venait du

17 cœur. C'est quelque chose dont Cetinje peut être fier.

18 Beaucoup de personnes ne voulaient pas participer à ce conflit, ils ont

19 déserté l'armée. Momir Bulatovic, par exemple, disait aux personnes

20 mobilisées : Ceux qui ne veulent pas participer au conflit, qu'il sortent

21 des rangs. Effectivement, lorsqu'il disait cela beaucoup de personnes le

22 faisait. Une compagnie, dans son intégralité, a été démantelée. Ils ont

23 chanté qu'ils ne voulaient pas tirer sur la Croatie.

24 Q. Je souhaiterais terminer avant la pause si c'est possible.

25 Vous avez cité un vers d'un chant populaire, une demande de pardon que les

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1 Monténégrins ont adressé à Dubrovnik, à la ville de Dubrovnik.

2 Je souhaiterais maintenant que l'Huissier distribue un document où l'on

3 retrouve ce verset. On pourrait peut-être le placer sur le rétroprojecteur.

4 Je vous prie, également, de fournir une copie à

5 M. Samardzic.

6 Monsieur Samardzic, connaissez-vous la personne dont le nom apparaît en bas

7 de cet article, Branko Vojicic, à la dernière page ?

8 R. Oui. Je le connais.

9 Q. Qui est-il ?

10 R. C'est un journaliste de Monitor, magazine Monitor. Je pense qu'il en

11 est éditeur, rédacteur en chef. C'est un homme honnête; la différence de

12 nombreux journalistes. Dès le départ, il a pris une position bien claire

13 contre la guerre à Dubrovnik. Il a exposé son point de vue sur l'attitude

14 telle qu'elle devrait être, l'attitude du Monténégro. Mais, il a fait

15 l'objet de critiques très violentes des dirigeants.

16 Q. Vous venez de mentionner Monitor. S'agit-il d'un magazine qui paraît au

17 Monténégro ? Répondez par oui ou par non.

18 R. Oui. Il s'agit d'un magazine.

19 Q. Bien, merci.

20 R. Il s'agit d'un hebdomadaire.

21 Q. La date à laquelle a été publié cet article est le 25 juin 2000. Etes-

22 vous au courant du contenu de cet article ? Il y est question d'une réunion

23 qui a eu lieu le 25 juin 2000 entre Stipe Mesic et le président croate et

24 Milo Djukanovic. Savez-vous ce qui s'y est passé ?

25 R. J'habite en Australie. J'ai suivi grâce à l'Internet ce qui s'est passé

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1 lors de cette réunion. Je connais les participants. Je connais Bulatovic,

2 le président Mesic et j'étais content de voir qu'ils se rencontraient. Milo

3 Djukanovic a demandé pardon à Dubrovnik. On voit le titre "Forgive us

4 Dubrovnik," en anglais. C'était un grand pas, un événement majeur après la

5 guerre. Le temps était arrivé d'adresser des excuses, de demander pardon.

6 Le journaliste, même s'il était critique, s'il adressait des critiques

7 auparavant à Milo Djukanovic, il a su apprécier ce geste. C'était une

8 nouvelle étape qui était entamée dans les relations existant entre la

9 Croatie et le Monténégro.

10 Q. S'agissant de certains sujets abordés lors de cette réunion et de ce

11 qu'a dit des propos tenus par M. Djukanovic, j'attire votre attention sur

12 ce qui figure en bas de la page. Je souhaite vous poser des questions sur

13 cet aspect particulier de la réunion. Je cite, Djukanovic a révélé le

14 scénario dans sa totalité. Il a admis que la "libération" de Dubrovnik

15 n'était pas entreprise puisque les Oustachi avaient attaqué le Monténégro

16 (l'interprétation qui a été fournie par Strugar et Djukanovic à l'époque),

17 ni pour des "raisons humanitaires" afin de protéger les Serbes en péril à

18 Dubrovnik (d'après Branko Kostic, le ministre de la Défense du Monténégro,

19 Babic) ni "à cause du fascisme." Et la guerre a été déclenchée afin de

20 réaliser l'idée de la Grande Serbie.

21 Cette explication concernant le fait que les Oustachi n'avaient pas attaqué

22 le Monténégro, est-ce que ceci est conforme à ce que vous pensez de la

23 situation telle qu'elle était en octobre 1991 ? Et là, j'ai à l'esprit les

24 propos de Strugar concernant l'attaque des Oustachi.

25 R. D'après ce qu'a dit M. Djukanovic, on voit cette politique de 1991

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1 complètement dévoilée. Les Oustachi ne nous ont jamais attaqués et

2 Djukanovic l'admet ici. La libération de Dubrovnik ne s'imposait pas. Il

3 n'y avait pas d'Oustachi qui allaient nous attaquer. Il n'y avait aucun

4 besoin de faire la guerre pour la paix. Il n'y a pas eu de guerre déclarée

5 avec Dubrovnik. Il n'y a pas eu de piège, comme Kadijevic le disait à

6 l'époque. C'est à Cavtat que Djukanovic a démasqué la politique de la JNA,

7 la vraie nature de cette politique criminelle.

8 Q. Merci. Monsieur Samardzic, je souhaiterais vous poser une autre

9 question : Milieu du deuxième paragraphe, la première page, je cite :

10 "S'agissant des crimes commis dans l'enceinte des remparts de Dubrovnik,

11 Djukanovic a dit que la responsabilité devait être personnalisée et que

12 c'était le seul et le meilleur moyen de lever l'hypothèque de la

13 responsabilité nationale qui a été imputée durant l'histoire ou, au moins,

14 il y a eu des tentatives de le faire au peuple croate, et, à présent, la

15 situation est la même avec le peuple du Monténégro."

16 Maintenant, lorsque vous pensez aux événements qui se sont produits en

17 1991, après tout ce que la vieille ville a subi comme dégâts, savez-vous si

18 qui que ce soit a été tenu pour responsable ? Une procédure a-t-elle été

19 engagée contre qui que ce soit parmi les participants à la campagne de

20 Dubrovnik ?

21 R. Non, pas autant que je le sache. Je ne pense pas qu'il y ai eu

22 d'officier qui ait jamais tenu pour responsable pour les actions à

23 Dubrovnik. Je pense que rien n'a été entrepris dans ce sens jusqu'à

24 présent. Je ne pense pas que quiconque a, jusqu'à présent, été inculpé de

25 quoi que ce soit lié à Dubrovnik.

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1 Q. Est-ce que l'on pourrait, à présent, visionner un enregistrement vidéo

2 et je souhaiterais que cette pièce soit versée au dossier.

3 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] La pièce est acceptée.

4 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agit de la pièce P32.

5 Mme SOMERS : [interprétation] Nous aimerions distribuer la transcription de

6 cette vidéo. Je souhaiterais que l'on visionne la première partie, et ceci

7 nous amènera à la fin de mon interrogatoire. Si vous le permettez --

8 [aucune interprétation]

9 [Diffusion de cassette vidéo]

10 L'INTERPRÈTE : [voix sur voix] Bonsoir, le président monténégrin Milo

11 Djukanovic, a exprimé ses regrets s'agissant de l'attaque dirigée contre

12 Dubrovnik. Ceci s'est produit à Cavtat aujourd'hui. Il s'agit de la

13 première réunion au niveau le plus élevé de l'état entre les représentants

14 de la Croatie et du Monténégro.

15 Mme SOMERS : [interprétation]

16 Q. Arrêtez, je vous prie. Pouvez-vous identifier les personnes que l'on

17 voit sur cette vidéo.

18 R. Le président Mesic, Stjepan Mesic, président de la République de

19 Croatie, Milo Djukanovic était à l'époque le président du Monténégro. A

20 présent il est premier ministre du Monténégro.

21 Q. La personne qui porte la barbe, qui est-ce que ?

22 R. C'est Mr le président Mesic, et le grand homme qui se trouve sur cet

23 enregistrement est Djukanovic.

24 Q. S'agit-il de la même réunion dont il est question dans l'article

25 intitulé "Pardon Dubrovnik."

Page 1152

1 R. Oui cette réunion qui --

2 [Diffusion de cassette vidéo]

3 L'INTERPRÈTE : [voix sur voix] M. Djukanovic, je souhaiterais profiter de

4 cette occasion pour adresser en mon nom personnel et au nom des citoyens du

5 Monténégro.

6 Mme SOMERS : [interprétation] Peut-on arrêter un instant. Je ne sais si

7 les interprètes disposent d'un exemplaire. Il s'agit du 3e paragraphe où M.

8 Djukanovic donne des explications.

9 [Diffusion de cassette vidéo]

10 L'INTERPRÈTE : [voix sur voix] Nous adressons notre pardon aux habitants de

11 Dubrovnik, de Konavle, de la région de Nereska [phon], pour toutes les

12 souffrances et tous les dommages qu'ils ont subis par quiconque des

13 Monténégrins.

14 Le journaliste, les deux parties ont affirmé qu'il s'agit là d'une réunion

15 de grande importance.

16 Mme SOMERS : [interprétation] On pourrait bien sûr regarder

17 l'enregistrement dans son intégralité. Afin de gagner du temps, nous

18 demanderons que l'enregistrement soit versé au dossier. Nous aimerions que

19 la transcription également soit versée. Nous pourrons verser une partie de

20 l'enregistrement ou l'intégralité. Nous souhaiterions vous fournir

21 l'original dont nous disposons. Je suis vraiment désolée que l'on ne puisse

22 pas recourir au logiciel Sanction.

23 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] La vidéo et la transcription seront

24 admises.

25 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] La vidéo portera désormais la cote P33,

Page 1153

1 la transcription P33.1

2 Mme SOMERS : [interprétation] Nous en avons terminé avec ce témoin pour le

3 moment. Je vous remercie de votre patience.

4 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci à vous. Madame Somers, je

5 propose que l'on fasse une pause de 20 minutes, et nous poursuivrons après.

6 Monsieur Samardzic, vous pourrez vous reposer un peu.

7 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.

8 --- L'audience est suspendue à 10 heures 31.

9 --- L'audience est reprise à 10 heures 56.

10 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Le contre-interrogatoire peut

11 maintenant commencer.

12 Monsieur Rodic, vous avez la parole.

13 M. RODIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Avant de

14 commencer mon contre-interrogatoire, je souhaiterais, en premier lieu,

15 attirer votre attention sur un point particulièrement important. Lorsque ce

16 témoin allait être présenté par le bureau du Procureur, l'estimation de

17 temps qui avait été faite à ce moment-là, était de deux à trois heures pour

18 entendre ce témoin. L'interrogatoire principal, les questions et les

19 réponses, a en réalité, duré 4 heures et 10 minutes. Ce qui est beaucoup

20 plus important que l'estimation qui avait été faite à l'origine.

21 Ce que je souhaite dire, eu égard au temps qu'il nous reste, eu égard au

22 temps de questions et de réponses, et au question de temps et de réponses

23 accordé à l'Accusation pour ce témoin et le bureau du Procureur, et ce

24 témoin est tout aussi important pour nous. Je souhaite attirer votre

25 attention sur le fait que je ne pourrai pas terminer mon contre-

Page 1154

1 interrogatoire aujourd'hui. A cause de l'importance de ce qui a été dit

2 dans ce prétoire par ce témoin, et dû aux points importants que je dois

3 soulever avec lui. Je sais que des observations ont été faites par l'équipe

4 de la Défense, par rapport à certains cas où le contre-interrogatoire était

5 plus long que l'interrogatoire principal. Quoiqu'il en soit, nous estimons

6 que ces principes ne peuvent pas toujours être appliqués à la lettre. Dans

7 certains cas, le bureau du Procureur a besoin de moins de temps pour

8 entendre un témoin, dans d'autres cas, c'est l'inverse.

9 Ce que je tiens à dire, c'est qu'il s'agit d'un témoin essentiel pour nous

10 dans le cadre de cette affaire. Je ne pense pas avoir le temps de finir mon

11 contre-interrogatoire aujourd'hui.

12 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je vous remercie pour cette précision,

13 Monsieur Rodic. Nous constatons que le temps imparti à l'interrogatoire

14 principal est plus long que ce qui avait été prévu, et nous en tiendrons

15 compte. Je vous prie de poursuivre et de commencer votre contre-

16 interrogatoire.

17 M. RODIC : [interprétation] Merci beaucoup, Monsieur le Président.

18 Contre-interrogatoire par M. Rodic :

19 Q. [interprétation] Monsieur Samardzic, bonjour, Monsieur. Je m'appelle

20 Goran Rodic. Je suis avocat. Je viens de Podgorica. Je défends le général

21 Strugar. En son nom, je vais vous poser un certain nombre de questions qui

22 vont porter sur votre témoignage, ce que nous avons entendu jusqu'à

23 présent.

24 Madame l'Huissière, je vous prie de bien vouloir enlever le

25 rétroprojecteur, pour que je puisse voir le témoin correctement.

Page 1155

1 Monsieur Samardzic, la première question que je souhaite vous poser est la

2 suivante. Avant de venir déposer votre témoignage devant ce Tribunal, avez-

3 vous fourni aux enquêteurs une déclaration au préalable écrite ?

4 R. Oui, absolument. Je crois qu'il devait s'agir de l'an 2000. Il y a

5 environ trois ans, j'ai fourni une déclaration écrite.

6 Q. Permettez-moi, je regarde votre déclaration. Est-il vrai qu'il

7 s'agissait du 17, du 18, du 19, du 20 et du 23 octobre de l'année 2000 ?

8 R. Oui, tout à fait.

9 Q. Dans les réponses que vous avez fournies au bureau du Procureur, nous

10 avons entendu un rappel historique de votre vie, un résumé de votre vie. Je

11 ne pense pas, cependant, que ce point ait été abordé, et je crois que vous

12 n'avez pas témoigné à cet égard. Pourriez-vous dire à la Chambre, s'il vous

13 plaît, si au cours de votre vie et pendant votre carrière professionnelle,

14 vous avez résidé et travaillé un certain temps au Monténégro ? Avez-vous

15 été l'objet de persécutions ? Si oui, pourriez-vous nous donner les raisons

16 de ces persécutions ?

17 R. J'étais encore assez jeune, parce que j'ai rencontré quelques

18 difficultés. Mon père avait reçu la médaille du courage de l'armée

19 partisane. Il avait combattu le fascisme depuis 1941. En 1948, on l'a

20 accusé d'avoir des liens avec le inform bureau, ce qui n'était pas vrai.

21 Mon père fut arrêté et envoyé au quartier pénitentiaire de Goli Otok. Le

22 fils de quelqu'un qui avait été interné à Goli Otok, ne pouvait pas avoir

23 une vie normale au Monténégro à ce moment-là. Cette personne aurait

24 forcément des difficultés. Il était très difficile d'avoir une vie normale.

25 Telle était la situation que je devais faire face pendant mes jeunes

Page 1156

1 années.

2 Q. Est-ce que cela signifie que pendant toute la durée de vos études et

3 lorsque vous avez trouvé un emploi par la suite, vous aviez des

4 difficultés, autrement dit, c'était compliqué pour vous ?

5 R. Oui. J'ai eu beaucoup de problèmes au début. Après, les gens se sont

6 rendus compte que je n'étais pas un ennemi, que j'étais un homme digne. Par

7 conséquent, j'ai eu beaucoup moins de problèmes par la suite. Les choses

8 ont évolué normalement, de façon beaucoup plus facile après. Il est vrai

9 qu'à l'origine, j'ai eu du mal. Une année, je n'ai pas pu faire partie de

10 l'école navale. Ils pensaient que si j'étais marin, je n'aurais pas le

11 droit de voyager à l'étranger étant donné que j'étais le fils de quelqu'un

12 qui avait appartenu au inform bureau. Par la suite, j'ai eu l'autorisation

13 de me rendre à l'étranger. Ce point était souvent abordé, on me disait

14 toutes les fois que je souhaitais partir à l'étranger. On pouvait longer la

15 côte adriatique sans quitter la région. Il y avait Jugolinija, le navire

16 sur lequel j'ai beaucoup voyagé. J'ai pu voyager à bord du Jugolinija, et

17 c'est ainsi que ma carrière s'est développée. J'ai ensuite été le plus

18 jeune président, le plus jeune directeur de toute entreprise. J'étais le

19 plus jeune commandant de bateau de toute la Yougoslavie à ce moment-là. A

20 l'origine j'ai eu beaucoup de difficultés, beaucoup de mal. Par la suite,

21 je crois que ceci s'est estompé et mes efforts et mon travail ont été

22 récompensés.

23 Q. Ces problèmes ont-ils fait que vous avez recherché un emploi à Croatie

24 après vos études parce que vous ne pouviez pas obtenir un emploi à

25 Monténégro ?

Page 1157

1 R. Je ne le dirais pas exactement comme cela; je n'ai pas pu trouver

2 d'emploi au Monténégro. J'ai, en fait, en réalité, trouvé un emploi à

3 Monténégro. Mon tout premier emploi était avec la Jugooceanija. J'étais un

4 apprenti à l'époque. Une fois que j'avais terminé mon stage, on m'a donné

5 un emploi fixe sur la Jugolinija, parce qu'il n'y avait pas de postes

6 vacants sur la Jugooceanija. J'étais promu à bord de la Jugolinija. J'avais

7 25 ans à l'époque. J'étais le premier officier et j'avais 27 ans. A 27 ans

8 j'étais commandant de navire.

9 Q. Ne perdons pas de temps. En 1974, vous avez travaillé à bord de la

10 Jugooceanija, à Kotor. A ce moment-là, le directeur de la Jugooceanija a

11 pris sa retraite. Pour autant que je sache, votre nom a été prononcé et on

12 souhaitait que vous deveniez le directeur de la Jugooceanija, n'est-ce pas

13 ?

14 R. Oui.

15 Q. Y a-t-il quelque chose qui vous a empêché de remplir cette fonction à

16 ce moment-là ?

17 R. Je n'ai eu aucune entrave au plan personnel mais des gens pensaient que

18 j'étais encore un peu trop jeune pour devenir le directeur de Jugooceanija

19 et j'ai été, à ce moment-là, nommé député du parlement yougoslave.

20 Q. Nous y reviendrons plus tard. Je souhaite maintenant parler de la toute

21 première période après que le directeur de la Jugooceanija a pris sa

22 retraite, et avant la nomination du nouveau directeur.

23 R. Très bien. Les gens disaient que je devrais être nommé directeur mais

24 il n'y avait pas que moi. Toutes les fois qu'un nouveau directeur était

25 nommé, Monsieur Rodic, il y avait évidemment plusieurs candidats, et

Page 1158

1 j'étais parmi ces candidats. J'ai, pour finir, je n'étais pas été nommé à

2 ce poste. Quelqu'un qui avait eu une position hiérarchique plus importante

3 que la mienne, Bockcevic a été nommé.

4 Q. Je souhaite vous rappeler qu'à la page 3 de votre déclaration, vous avez

5 dit : "Quoiqu'il en soit, le parti communiste du Monténégro s'est opposé à

6 ma nomination. Il considérait que j'étais le fils d'un traître et par

7 conséquent, je n'étais pas digne d'être promu à ce poste." C'est ce que

8 vous avez dit aux enquêteurs, n'est-ce pas ?

9 R. Je ne pense pas que ce soit précisément la déclaration que j'ai faite.

10 Cela ressemblait à cela. Les gens pensaient qu'il était encore trop tôt que

11 je devienne directeur. J'étais le fils d'un homme qui avait était considéré

12 comme un traître. Par conséquent, je ne suis pas nommé.

13 Q. Est-ce que vous avez relu votre déclaration avant de la signer ?

14 R. Oui, tout à fait. Je ne pense pas que ce que vous dites est

15 particulièrement pertinent.

16 Q. Je vous prie de simplement répondre à mes questions. Ceci nous

17 permettra de gagner du temps, parce que nous n'avons pas beaucoup de temps.

18 L'INTERPRÈTE : Est-ce que les orateurs peuvent ralentir s'il vous plaît,

19 parce qu'il y a chevauchement au niveau de la traduction.

20 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je demande à ce qu'on remette de

21 l'ordre ici, s'il vous plaît. Vous vous interrompez pour passer d'une

22 question à l'autre et vous oubliez complètement la traduction. Vous savez

23 que les interprètes ont besoin de pause entre les questions et les

24 réponses. De façon encore plus importante, lorsqu'une question est posée,

25 Monsieur Samardzic, si vous auriez l'amabilité de répondre à cette

Page 1159

1 question, puisque évidement vous la comprenez. Vous devriez pouvoir

2 répondre à cette question, ce qui permettra à M. Rodic de passer à la

3 question suivante. Il y a certaines des questions vous concernant qui

4 peuvent être abordées un peu plus tard au cours de cette audience au moment

5 des questions supplémentaires posées par Mme Somers.

6 Merci, Monsieur Rodic.

7 M. RODIC : [interprétation] Merci beaucoup, Monsieur le Président. Ce que

8 je souhaite, Monsieur, c'est que vous répondiez par des réponses courtes,

9 s'il vous plaît.

10 Q. Je viens de lire le premier passage à la page 3 de votre déclaration,

11 et c'est pour cela que je vous ai demandé si vous avez relu votre

12 déclaration avant de la signer.

13 R. Oui, j'ai lu cette déclaration avant de la signer, et c'est la raison

14 pour laquelle je l'ai signée.

15 Q. Vous avez donc imposé votre signature en bas de cette déclaration parce

16 que vous avez estimé que cette déclaration était conforme à vos propos.

17 R. Il y avait un certain nombre d'erreurs qui ont été corrigées à ce

18 moment-là. Mais si vous y insistez : En 1974 -- ou plutôt, ma nomination en

19 tant que directeur général, il y avait un certain nombre de facteurs

20 déterminants à cela à ce moment-là, y compris ce que vous avez évoqué.

21 J'étais le fils d'un traître et certaines personnes disaient que pouvais,

22 de ce fait, ne pas être nommé directeur. Cela je ne le mets pas en doute.

23 Q. Le point de vue que j'ai est quelque peu différent. Je vais vous dire

24 pourquoi.

25 R. Mais je vous en prie.

Page 1160

1 Q. Après avoir trouvé un emploi auprès de la Jugolinija, vous avez été

2 promu rapidement. Vous êtes devenu le directeur de cette institution en

3 1974, et autrefois vous étiez travaillé avec la Jugooceanija. En 1970, vous

4 avez suivi un stage sur le transport maritime et la gestion. Sous l'égide

5 de la conférence des Nations Unies sur le commerce et de développement à

6 Genève, alors que vous avez été toujours employé auprès de la Jugooceanija,

7 et lorsque vous avez terminé votre stage, on vous a demandé d'aller

8 travailler au Quartier général en tant qu'administrateur commercial ou du

9 service de comptabilité pour gérer les factures qui arrivaient du monde

10 entier. En 1974, vous avez été promu capitaine du port. Ensuite, vous êtes

11 devenu contrôleur maritime. En 1974, la ligue des Communistes, dont vous

12 étiez membre, vous a nommé député au sein de l'assemblée yougoslave. En

13 1978, votre mandat a expiré et on vous a nommé président de l'association

14 de l'autogestion, l'autogestion en matière de commerce extérieur. A la fin

15 de l'année 1982, on vous a nommé représentant de la Chambre de commerce

16 yougoslave en Australie. En chemin 1983, vous avez été envoyé à Sydney.

17 Cinq ans plus tard, ayant vécu cinq ans à Sydney, vous êtes rendu à

18 Brisbane, où vous avez contribué à l'organisation de l'exposition de 1988.

19 Au début de l'année 1990 [comme interprété], vous êtes revenu au

20 Monténégro, très précisément. Le 9 mai 1989, et peu de temps après votre

21 retour, on vous a nommé directeur de la Jugooceanija. Au mois de novembre,

22 vous avez été élu député auprès de l'assemblée monténégrine lors des

23 premières élections libres dans ce pays. Vous avez été nommé par la ligue

24 des Communistes qui a changé de nom et qui est devenu le parti de

25 socialiste démocrate. En juillet 1990, vous avez été nommé représentant du

Page 1161

1 Monténégro auprès de la Chambre fédérale des Républiques.

2 En février 1991, vous avez été élu ministre des affaires Etrangères dans le

3 gouvernement du Monténégro. Le premier ministre était Milo Djukanovic, et

4 vous étiez toujours député de l'assemblée, et vous étiez toujours le

5 directeur de Jugooceanija, ce qui signifie que vous occupiez trois postes

6 en même temps.

7 En 1992, si mes renseignements sont exacts, le 26 mai 1992, vous avez été

8 démissionné à votre poste de ministre des Affaires étrangères. Le 8 juin

9 1992, vous avez déplacé votre famille, et vous les avez emmenés à Malte, à

10 cause des sanctions qui avaient été déposées. Depuis Malte, vous avez

11 repris vos activités en tant que chef d'entreprise, Jugooceanija. D'après

12 tous les postes que j'ai énumérés, est-ce exact ? Est-ce que la liste que

13 je viens d'énumérer est exacte ?

14 Mme SOMERS : [interprétation] Pardonnez-moi, mais aucune question n'a été

15 posée au témoin. Il s'agit simplement d'un descriptif de votre déclaration.

16 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Une question vient d'être posée :

17 "Cette liste est-elle exacte ?"

18 Mme SOMERS : [interprétation] Très bien.

19 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Monsieur Rodic, votre question est-

20 elle : "Est-ce que tout ceci exact ?"

21 Monsieur Samardzic ?

22 LE TÉMOIN : [interprétation] La plupart de ce que vous avez dit est exact,

23 à quelques exceptions près que je souhaite préciser. Je n'ai pas été nommé,

24 comme vous l'avez dit, par le parti.

25 M. RODIC : [interprétation]

Page 1162

1 Q. Je dois vous interrompre. Veuillez écoutez ce que j'ai dit, s'il vous

2 plaît. Lorsque j'ai donné la liste des postes que vous avez occupés, je

3 n'ai pas parlé du parti. J'ai simplement dit que votre nom avait été avancé

4 par la Ligue des communistes. Votre nom avait été prononcé par la Ligue des

5 communistes, qui est devenu par la suite, le parti socialiste démocratique.

6 Je n'ai jamais parlé de parti communiste dans ce contexte-là. Ce que je

7 souhaite entendre de votre bouche, est l'élément suivant. Toutes ces

8 informations contenues dans votre curriculum vitae, sont-elles exactes ?

9 S'il y a une erreur, veuillez nous le préciser, s'il vous plaît.

10 R. En premier lieu, lorsque vous dites "nommé", chacun sait qui nomme les

11 gens. Lorsque vous parlez ainsi, on peut comprendre que les gens aient été

12 élus par le parti communiste, ce qui n'était mon cas. Certaines des dates

13 que vous avez évoquées sont incorrectes. Il est vrai qu'en 1974, j'ai

14 participé à un séminaire organisé par la conférence des Nations Unies sur

15 le commerce et le développement. Vous vous êtes trompé de quatre ans. La

16 différence, aussi, c'est qu'après 1970, j'ai travaillé à Kotor pour

17 Jugooceanija. Avant cette date-là, je naviguais sur des bateaux. Ce sont

18 des différences qui ne sont pas particulièrement importantes, mais comme

19 vous m'avez demandé de préciser, je souhaite vous dire que ces détails ne

20 sont pas exacts.

21 Q. J'ai peut-être cité une mauvaise date, mais dans votre déclaration,

22 vous dites que vous avez participé à ce séminaire à Genève en 1970.

23 R. Il s'agissait de l'année de 1974.

24 Q. Mais tous ces postes qui ont été décrits, sont contenus dans votre

25 curriculum vitae ?

Page 1163

1 R. Oui, tout à fait. Si vous regardez l'enchaînement des événements, ce

2 n'était pas généralement comme ceci que les choses se passaient en ex-

3 Yougoslavie. Je n'ai pas été nommé directeur par le parti, mais à la suite

4 d'un référendum organisé par les travailleurs. Ce qui était tout à fait

5 contraire au point de vue du comité du parti. Lorsque j'ai été nommé

6 directeur de Jugooceanija en 1989, le parti était contre cette nomination.

7 Ce que je tiens à dire, c'est que ce que vous avez pu lire, ici, représente

8 l'envers du décor, si vous voulez.

9 Q. Est-ce que d'autres personnes ont perdu leur emploi, ou on eu les mêmes

10 difficultés que vous, à cause de votre passé ?

11 R. Oui, tout à fait. C'était particulièrement difficile pour moi dans ma

12 jeunesse, car les gens ne savaient pas ce que j'allais faire. A deux

13 reprises, j'ai dû quitter l'école. A Cetinje, j'ai été renvoyé de l'école.

14 J'étais dans ma quatrième année, et j'ai été renvoyé d'autres écoles aussi.

15 Vous n'avez pas dû lire ce passage-là. C'était tout simplement parce que

16 mon père était allé à Goli Otok. J'ai livré qu'il fallait avoir une

17 certaine force de caractère pour pouvoir traverser tout cela.

18 Q. Oui, je comprends fort bien. Dites-moi, connaissez-vous d'autres

19 personnes qui ont été accusées de choses semblables et qui ont réussi

20 également, à avoir une carrière aussi brillante que la vôtre ? Pourriez-

21 vous nous donner d'autres exemples ?

22 R. Je ne peux pas vous donner de chiffre, mais il y avait de gens dans le

23 même cas, qui avaient eu beaucoup de difficultés pour commencer. La

24 situation en Yougoslavie était telle, que vous êtes de prime à bord puni,

25 mais vous êtes accepté par la suite. C'est ainsi que les choses

Page 1164

1 fonctionnaient en ex-Yougoslavie. Personne n'aurait pu m'accuser d'être en

2 faveur de l'inform bureau. Ils pouvaient simplement dire que j'étais le

3 fils d'un tel homme.

4 Q. Je crois que vous exagérez un petit peu les difficultés que vous avez

5 rencontrées lorsque vous étiez jeune, parce que vous avez occupé des postes

6 très importants au Monténégro et en ex-Yougoslavie.

7 Vous avez dit que vous avez été absent du Monténégro pendant environ cinq

8 ans et demi, jusqu'en 1989. Est-ce exact ?

9 R. Oui, absolument.

10 Q. Est-il exact qu'au mois de juillet 1992, vous avez à nouveau quitté le

11 Monténégro ?

12 R. Non, en juin 1992, je me suis rendu à Malte. Je suis revenu au

13 Monténégro au mois de juillet, pour rencontrer le secrétaire des Affaires

14 étrangères du Royaume Uni. J'ai passé deux jours à Belgrade sur

15 l'invitation de Milo Djukanovic. Je suis ensuite reparti à Malte.

16 Q. Depuis le mois de juillet 1992 et jusqu'au jour d'aujourd'hui, vous

17 n'avez pas vécu au Monténégro. Est-ce exact ?

18 R. Non. J'ai visité le Monténégro entre-temps.

19 Q. Avez-vous résidé et travaillé au Monténégro, ou avez-vous simplement

20 visité le Monténégro ?

21 R. Je ne sais pas comment le qualifier, mais jusqu'en 1994, j'étais le

22 directeur de Jugooceanija, et je me trouvais à Malte. Je me rendais souvent

23 à Kotor où se trouvait le quartier général de cette société. Le siège de la

24 société se trouvait à Kotor. Il ne s'agit pas de quartier général, mais de

25 siège de l'entreprise.

Page 1165

1 Q. Entre 1994 et 2004, avez-vous vécu au Monténégro ?

2 R. Oui.

3 Q. Pouvez-vous me dire ce que vous faites au Monténégro ?

4 R. Je suis retraité, en tout cas, aux yeux des autorités yougoslaves.

5 Mme SOMERS : [interprétation] Pardonnez-moi si je vous interromps, mais il

6 me semble que la traduction et ce que voyons à l'écran ne semble pas

7 correspondre. La question qui avait été posée à la ligne 17 : "Entre 1994

8 et 2000," je crois que la question que vous avez posée était, "Avez-vous

9 vécu en dehors du Monténégro ?" Le compte rendu d'audience indique "au

10 Monténégro."

11 M. RODIC : [interprétation] C'est exact. J'ai demandé au témoin si entre

12 l'année 1994 et l'année 2004, il a vécu en dehors du Monténégro.

13 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci, Monsieur Rodic.

14 M. RODIC : [interprétation]

15 Q. Puis-je entendre votre réponse à nouveau, s'il vous plaît ?

16 R. Après avoir été renvoyé de Jugooceanija en 1994, j'ai continué à

17 résider à Malte, et je me suis ensuite rendu en Australie qui est l'endroit

18 où j'habite actuellement.

19 Q. Est-ce que vous suivez les évènements en Yougoslavie, ce qui est appelé

20 maintenant la Serbie et le Monténégro, et SRFY ?

21 R. Oui, je reçois tous les journaux. Je suis tout à fait au courant. J'ai

22 Internet également. Je suis tout à fait au courant de ce qui s'y passe.

23 Q. Je suppose qu'après votre démission du poste de ministre des Affaires

24 étrangères, vous vous êtes tenu au courant des événements en Yougoslavie,

25 parce que vous lisiez les journaux. Vous vous êtes rendu de façon

Page 1166

1 occasionnelle en ex-Yougoslavie, vous rendiez à Kotor et vous travailliez

2 toujours pour la Jugooceanija.

3 R. Oui, tout à fait. J'ai suivi les événements. Je ne faisais partie de

4 l'équipe dirigeante, mais ce que tout un chacun pouvait recevoir comme

5 actualité, je la recevais.

6 Q. Etant donné les événements de 1991 et 1992, avez-vous constaté que vous

7 avez changé depuis la période de 1991, 1992, maintenant au niveau de votre

8 comportement, de votre façon de voir les choses, ou est-ce que vous estimez

9 que rien n'a changé ?

10 R. Pour ce qui est de mon point de vue et de mon approche des événements,

11 rien n'a changé. Je ne pouvais pas accepter ce qui s'est passé en ex-

12 Yougoslavie. Certains l'ont qualifié comme étant la défense de la

13 Yougoslavie. J'ai toujours estimé que c'était quelque chose d'épouvantable,

14 que le Monténégro avait commis des actes très graves, et que c'était une

15 honte pour notre pays. C'est ce que je pense toujours aujourd'hui.

16 Q. Merci beaucoup. Avez-vous été appelé à la barre en tant que témoin dans

17 le cas de l'affaire Milosevic ?

18 R. Oui, tout à fait.

19 Q. Pouvez-vous nous dire à quel moment c'était ?

20 R. En 2002. Il y a environ un an et demi.

21 Q. Etant donné que vous dites que vous suivez les événements en Serbie et

22 au Monténégro, y a-t-il eu des réactions au Monténégro après avoir donné

23 votre témoignage devant ce Tribunal ? Savez-vous quelles ont été ces

24 réactions ?

25 R. Oui, tout à fait.

Page 1167

1 Q. Avez-vous dénoncé certaines de ces réactions, ou avez-vous fait des

2 déclarations à ce moment-là ?

3 R. Oui, tout à fait. Il était difficile de dénoncer quoique ce soit.

4 C'était une attaque vraiment personnelle. J'aurais eu besoin de 20 jours

5 pour contester tout ce qui avait été dit dans la presse à mon sujet, hormis

6 quelques choses agréables. Une partie de la presse était de mon côté, mais

7 l'autre partie de la presse, en particulier la presse de Belgrade, a dit

8 des choses très désagréables, Il eut mieux valu ignorer tout cela.

9 Q. Avez-vous été attaqué par la presse monténégrine ?

10 R. Oui, tout à fait. Le quotidien chetnik Dan a lancé une attaque en règle

11 contre moi. Je crois que ce n'est même pas nécessaire d'en parler. Tout

12 ceci est un tissu de mensonge. C'est le journal Dan qui a rapporté tout

13 cela. C'est un journal bien connu qui invente beaucoup d'histoires. J'ai

14 essayé de leur envoyer des articles. Ils en ont publié un certain nombre,

15 mais ils ne les ont pas publié tous.

16 Q. De façon générale, rencontrez-vous des difficultés au Monténégro, ou

17 est-ce que vous avez décidé de ne pas vivre au Monténégro pour des raisons

18 professionnelles ?

19 R. Il n'y a absolument aucun problème particulier. Après l'entreprise

20 Jugooceanija, l'entreprise dont j'étais directeur, a été dissoute. J'étais

21 persuadé que j'étais un excellent directeur, et que j'aurais dû recevoir ce

22 qui m'est dû. Par contre, il y a d'autres personnes qui croyaient le

23 contraire. Jugooceanija était une entreprise qui avait plus de 22 navires

24 transocéaniques. Elle est passée par les sanctions et --

25 Q. Je vous interromps pour vous dire, si j'ai bien compris, votre problème

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1 avec le Monténégro est causé par cette ancienne entreprise Jugooceanija ?

2 R. J'ai un problème avec l'entreprise Jugooceanija, puisqu'elle se trouve

3 à Kotor Grad. Certaines personnes pensent encore une fois, c'est des

4 mensonges, que j'étais responsable du démantèlement de l'entreprise

5 Jugooceanija. Après mon départ, il y avait 17 navires qui étaient restés.

6 J'ai pris ma retraite il y a dix ans.

7 Q. Est-ce que vous avez été tenu responsable de la faillite de cette

8 entreprise ?

9 R. Non, pas du tout. Certains quotidiens tel Dan inventent des histoires,

10 trouvent des journalistes ou des marins qui écrivent n'importe quoi, ceux

11 qui s'exprimaient, qui écrivaient des articles dans ce genre de journal. Je

12 ne suis tenu responsable d'absolument rien. Ce n'est qu'une question de

13 médisance, des personnes qui sont payées pour dire des mensonges. Il est

14 tout à fait désagréable d'entendre ce genre de propos. Pour ce qui est du

15 gouvernement du Monténégro, du syndicat et de qui que ce soit, personne ne

16 peut me tenir responsable de la faillite de cette entreprise, puisque

17 j'étais un directeur exemplaire de cette entreprise.

18 Q. Bien. Si les organes officiels du gouvernement ne vous tient pas

19 responsable pour cela, pourquoi ne pouvez-vous plus revenir au Monténégro,

20 puisque vous avez néanmoins de la famille là-bas ?

21 R. Qui vous a dit que je ne pouvais plus jamais revenir au Monténégro ?

22 Q. Vous venez de dire que la raison pour laquelle vous séjourné à

23 l'étranger, c'est parce que vous avez un problème avec le Monténégro, et

24 avec l'ancienne entreprise Jugooceanija.

25 R. Non, mais cela ne veut pas dire que je n'ai pas le droit, que je ne

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1 peux pas me présenter là-bas. Je ne veux certainement pas avoir des

2 problèmes avec des types qui me disent : "Tu es responsable pour la

3 faillite de cette entreprise."

4 Q. Oui, je comprends. Je vais passer maintenant à autre chose. Je présume

5 qu'à l'époque, pendant laquelle vous avez séjourné, vécu et travaillé en

6 ex-Yougoslavie, pendant que vous occupiez le poste de ministre des Affaires

7 étrangères, je présume que vous connaissiez très bien la constitution de

8 l'ex-RSFY ?

9 R. Oui, bien sûr. Je dois dire et ajouter que j'ai même travaillé à la

10 rédaction de la constitution.

11 Q. De la RSFY ou de la SRJ.

12 R. Non. C'est pour la RSFY bien sûr, pas pour la SRJ.

13 Q. Simplement pour clarifier.

14 R. Oui, je veux clarifier aussi.

15 Q. Vous devez connaître sans doute les lois fédérales de cette période, de

16 la période de la RSFY ?

17 R. Oui, bien sûr.

18 Q. Est-ce que vous savez à quel moment on a publié la nouvelle

19 constitution de la République de Croatie, c'est-à-dire je crois, plutôt je

20 pense à la période qui a précédé la guerre ?

21 R. C'était en 1990, je présume. Je ne le sais pas tout à fait.

22 Q. Oui, c'est juste. Dites-nous si cette constitution était conforme à la

23 constitution de la RSFY ?

24 R. Je crois que non. Je ne le sais pas, je ne sais pas avec précision.

25 Q. Si vous ne savez pas, je vais vous confirmer que la constitution de la

Page 1170

1 Croatie n'était pas en conformité avec la constitution de la RSFY. Est-ce

2 que vous savez si elle a procédé à la formation de forces armées.

3 R. Oui, on avait procédé à la formation de forces armées.

4 Q. Pouvez-vous nous répondre quelles étaient les forces armées légales qui

5 étaient conformes à la constitution de la RSFY ?

6 R. C'étaient la JNA et la Défense territoriale.

7 Q. Toutes les autres forces armées, qui ne portaient pas les noms que vous

8 venez d'énumérer, peut-on les appeler forces paramilitaires à l'intérieur

9 d'un état gouverné par la loi ?

10 R. Oui, certainement, à moins que l'on ait procédé à la constitution ou la

11 formation d'un nouvel état. La Croatie avait procédé à la formation de son

12 propre état. Elle pouvait donc procéder à la création des ses propres

13 forces armées.

14 Q. A quel moment, selon vous, la Croatie a-t-elle procédé à la création

15 d'un état indépendant ?

16 R. Et bien, lorsqu'elle s'est proclamée indépendante de la Yougoslavie,

17 selon la constitution de la Yougoslavie.

18 Q. A quel moment ?

19 R. C'était le 13 mai 1990 ou peut-être le 25 juin, si je ne m'abuse. Le 30

20 juin, c'était d'abord une réunion et, ensuite, si je me souviens bien,

21 c'était le 30 mai.

22 Q. Si je vous parlais du 25 et du 26 juin 1991, on parle de l'indépendance

23 de la proclamation de l'indépendance de la part de l'assemblée croate. Est-

24 ce que vous pouvez nous dire si la Croatie, avant cette date, avait

25 commencé à créer des forces armées ? Est-ce que vous savez si elle avait

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1 travaillé là-dessus et est-ce que vous savez si ces formations

2 paramilitaires existaient déjà ?

3 R. Si je ne m'abuse, il y avait des unités policières de Croatie, telle

4 celle qu'on avait à Borovo Selo. Mais pour vous dire qu'il y avait une

5 armée croate, je n'avais pas connaissance de cela à l'époque.

6 Q. Est-ce que vous avez entendu parler de la Garde nationale ?

7 R. Oui, à l'époque, j'avais entendu parler de cela, mais je ne croyais pas

8 que c'était une nouvelle armée. Je considérais qu'il s'agissait d'une garde

9 nationale et telle qu'on avait à la Défense territoriale au Monténégro.

10 Q. Bien. S'agissant donc de la Garde nationale, est-ce que vous aviez

11 entendu dire qu'elle a été formée avant cette période et avant la

12 déclaration de l'indépendance, c'est-à-dire avant le mois de juin 1991 ?

13 R. Je ne me souviens pas, puisqu'à l'époque j'étais plutôt concentré sur

14 les rapports avec Dubrovnik. J'étais le directeur de Jugooceanija. Je

15 voulais établir des liens avec Belgrade. Et je n'ai pas pu remarquer, à

16 Dubrovnik, les membres du ZNJ, de la Garde nationale.

17 Q. Je souhaiterais vous rappelez que, néanmoins, dans la première partie

18 de l'année 1991, outre le fait d'avoir été directeur, vous êtes devenu

19 ministère des affaires Etrangères au sein du gouvernement de Monténégro.

20 Vous étiez également député au parlement. Je vous pose des questions, à

21 savoir, si vous aviez des renseignements, outre votre travail, que vous

22 faisiez à l'époque, c'est-à-dire qu'il s'agissait de choses qui étaient

23 contestées par le public général.

24 R. Excusez-moi, mais on ne peut pas parler de cette façon-là. Il est vrai

25 que j'ai participé aux sessions de l'assemblée nationale. J'ai été délégué

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1 de l'assemblée des républiques. Et il y avait certains problèmes, mais pas

2 au point où il fallait mener une guerre. Il y avait certaines unités qui

3 étaient formées, non seulement en Croatie, mais partout.

4 Q. Attendez, je vous interromps. Je n'essaie pas de vous faire mettre des

5 paroles dans la bouche, mais je vous pose une question concrète et vous

6 avez le droit de répondre à cette question. Je souhaiterais que l'on évite

7 des débats dans ce prétoire. Je vous pose des questions concrètes et je

8 vous demanderais de répondre de façon concrète, sans élaborer et débattre

9 de ces points. Je ne peux pas faire ou donner mon point de vue. Je ne veux

10 pas faire d'échanges ni de débats. Je vous pose des questions simples.

11 Dites-nous d'abord, est-ce que vous saviez que la Garde nationale avait été

12 formée avant le 25 juin 1991 ? Est-ce que vous aviez entendu parler de

13 cela ? Je vous prie, répondez par un oui ou par un non.

14 R. J'avais entendu dire que telles unités avaient commencé à se former,

15 mais je n'avais pas compris, à l'époque, que c'était au point où on avait

16 commencé à procéder à la création d'une armée croate.

17 Q. Bien, merci. Dans le cadre de votre travail, pendant cette période,

18 est-ce que vous avez entendu parler du parti croate Pravo [phon], à la tête

19 de laquelle se trouvait Anto Paraga.

20 R. Oui.

21 Q. Est-ce que vous avez parlé de leurs formations d'armées ?

22 R. Non. J'avais entendu parler du fait que c'est des Oustachi, qu'ils

23 étaient à la droite. Ils prenaient des idées d'Oustacha, mais je ne croyais

24 pas qu'ils représentaient un danger pour la Yougoslavie.

25 Mais bon, pour dire qu'ils existaient. Oui, effectivement, ils existaient.

Page 1173

1 Q. Pourriez-vous nous le dire, s'agissant de ce parti, quelle était la

2 propagande qu'elle faisait à l'époque ?

3 R. Elle suivait le parti d'Ante Starcevic. Elle prenait les idéologies de

4 ce dernier. C'est la raison pour laquelle il s'appelait le parti croate.

5 Elle parlait de la sécession des Serbes. C'était un parti qui épousait

6 certaines idées nationalistes également, qui ressemblait aux idées des

7 Oustachi de la Deuxième Guerre mondiale.

8 Q. S'agissant d'Ante Pavelic, de qui s'agissait-il ?

9 R. Ante Pavelic était du côté de Hitler, de l'Italie fasciste, de

10 l'Allemagne, les fascistes.

11 Q. Bien. Donc vous sommes d'accord avec nous pour dire qu'en 1990 et 1991,

12 Praga était de promouvoir son parti sur un plateforme en parlant des idoles

13 qui étaient des modèles pendant la Deuxième Guerre mondiale.

14 R. Oui, effectivement, c'est exact.

15 Q. Je voudrais savoir et vous demander de nous dire, sans encore une fois

16 parler de leurs forces, j'aimerais savoir si une telle formation armée

17 formée par leur parti, est-ce qu'une telle formation armée pouvait être

18 légale à l'époque sur le territoire de la RSFY avant en conformité avec la

19 constitution de la RSFY, en prenant pour acquis que la constitution de

20 l'époque était en vigueur et que la JNA représentait la seule armée légale

21 du pays ?

22 R. Non. A ce moment-là, ce n'était pas une armée légale.

23 Q. Pouvez-vous nous dire, si vous le savez, si le 11 décembre 1990, la

24 présidence du RSFY ait présenté, pour la première fois, une information

25 concernant l'organisation paramilitaire et une importation d'armes

Page 1174

1 illégales de la part des Croates lorsqu'on a commencé à la création de

2 devoir mobiliser plutôt les membres du MUP, du ministère de l'Intérieur,

3 que ces armes étaient transmises à la Garde nationale ?

4 R. J'avais entendu parler de cela mais je n'ai pas de particularités. Je

5 n'ai pas de détails.

6 Q. Est-ce que vous connaissez l'information donnée par le secrétariat

7 fédéral de la Défense nationale concernant la mise en place d'unités

8 paramilitaires de la RSFY qui existaient en Croatie avec le but de

9 s'approprier une munition et des armes au début de l'année 1990 ?

10 R. Je sais qu'à l'époque, on procédait à la création de la République de

11 la Krajina.

12 Q. Je ne vous pose pas cette question. Je veux savoir si vous aviez une

13 information concernant le SSNA ?

14 R. Non.

15 Q. Est-ce que vous suiviez les programmes à la télévision ? Est-ce que

16 vous lisiez les journaux et au cours de votre travail, dans le cadre de

17 votre travail au parlement, est-ce que vous aviez entendu parler de ce

18 genre de choses ?

19 R. A l'époque, effectivement, je travaillais au parlement et la façon dont

20 vous citez, dont vous parlez des choses, effectivement, au parlement on

21 n'en parlait pas.

22 Q. Est-ce que vous regardiez, est-ce que vous avez regardé une émission à

23 la télévision, il y avait un film qui parlait de l'importation illégale

24 d'armes de la Hongrie en destination de la Croatie en 1990 ?

25 R. Oui, effectivement. J'ai regardé un film. J'ai vu un film qui parlait

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1 de cela mais j'ai vu également d'autres films qui parlaient du contraire.

2 Q. Excusez-moi, je vous prie.

3 M. RODIC : [interprétation] Monsieur le Président --

4 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Monsieur Rodic, il y a un problème.

5 Continuez, Maître Rodic. Vous posez une question. Si vous obtenez une

6 réponse qu'il ne vous convient pas, ou la réponse dont vous ne vous

7 attendiez pas de recevoir, vous interrompez le témoin et vous reposez une

8 question. Vous devez d'abord attendre que le témoin vous réponde. Vous ne

9 pouvez pas interrompre le témoin. Vous ne pouvez pas parler, interrompre le

10 témoin de façon continue. Cela devient très ardu et difficile à écouter.

11 M. RODIC : [interprétation] Je suis vraiment désolé, Monsieur le Président.

12 Je souhaitais simplement obtenir des réponses concrètes aux questions

13 concrètes. Mais à chaque fois que je pose une question concrète, le témoin

14 élabore et donne des réponses qui ne sont pas liées à ma question.

15 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je comprends tout à fait bien Maître

16 Rodic, la question. Je comprends le problème mais si cela se poursuit, je

17 demanderai au témoin directement de s'en tenir à vos questions. Mais pour

18 l'instant, je vous demanderais de permettre au témoin de répondre et de ne

19 pas l'interrompre.

20 M. RODIC : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

21 Q. S'agissant de la présidence qui a envoyé un envoi le 9 janvier 1991,

22 parlant de formations paramilitaires qui dit que ces créations sont en

23 train de causer des conflits, qui prennent une proportion énorme, et qui

24 peuvent mettre en danger l'intégrité des citoyens de la RSFY ?

25 R. Oui, tout à fait. Mais cela ne se rapportait pas seulement à la

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1 formation des unités paramilitaires. Cela se rapportait à toutes les

2 formations semblables. Il s'agissait du démantèlement de la Yougoslavie et

3 tout le monde se préparait à détruire et à démanteler la Yougoslavie, pas

4 seulement la Croatie.

5 Q. La Croatie se préparait-elle à procéder au démantèlement de la

6 Yougoslavie ?

7 R. Probablement que oui.

8 Q. Est-ce que vous êtes certain pour les autres républiques, alors que

9 pour la Croatie vous ne faites que le supposer.

10 R. Ne me mettez pas des mots dans la bouche. Je suis tout à fait certain,

11 qu'à l'époque, pour ce qui est de l'ensemble de la Yougoslavie, il y avait

12 un sentiment nationaliste et chaque état voulait procéder au démantèlement

13 du pays.

14 Q. Est-ce que la Croatie voulait procéder à la formation d'un état

15 indépendant ? Etait-ce le programme du parti au pouvoir de l'époque ?

16 R. Oui. La Croatie souhaitait se séparer. Si vous pensez au HDZ, le

17 conseil croate démocrate voulait décidément se séparer de la Yougoslavie

18 puisque la constitution de la Yougoslavie permettait non seulement aux

19 Croates mais à toutes les nationalités et nations à l'autodétermination et

20 à la sécession. De façon pacifique, nous aurions pu nous séparer sans avoir

21 recours aux armes selon la constitution.

22 Q. Qui avait le droit à l'autodétermination et à la sécession selon la

23 constitution de la RSFY ?

24 R. Chaque république avait ce droit, non pas seulement la Croatie mais le

25 Monténégro, la Serbie, la Macédoine, la Croatie, la Slovénie.

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1 Q. Je vais essayer de vous rappeler : Il s'agit-il de république ou de

2 peuple ?

3 R. Les uns et les autres, donc la république et le peuple.

4 Q. Si nous avons déjà constaté, après avoir reçu vos réponses et surtout

5 après avoir entendu l'une de vos réponses à l'une de mes questions posées

6 précédemment, vous avez dit que la nouvelle constitution de la République

7 de Croatie n'était pas en conformité avec la constitution fédérale. Comment

8 se peut-il que l'on puisse parler d'une sécession légale qui ne peut donc

9 pas être en conformité avec les dispositions de la constitution de la RSFY

10 qui fait état de ces questions ?

11 R. Excusez-moi, mais si la constitution n'est pas en conformité avec

12 l'autre constitution, ne veut pas dire que c'est anticonstitutionnel ou

13 illégal. La constitution croate n'était pas en conformité avec la

14 constitution de la RSFY, ce qui ne veut pas dire que la constitution, à ce

15 moment-là, était complètement illégale et anticonstitutionnelle. Je ne

16 connais pas les détails par cœur, cela fait bien longtemps que je n'ai relu

17 les dispositions mais je sais que la Croatie, et non seulement la Croatie,

18 mais toutes les autres républiques avaient le droit d'entamer une procédure

19 visant à se séparer de la Yougoslavie.

20 Q. De quelle façon l'a-t-elle fait la Croatie ?

21 R. Au tout début, de façon pacifique, et par la suite, est devenu un

22 conflit armé parce que, justement, des comités autogestionnaires, des

23 régions autonomes étaient en train de se former. Le conflit a commencé. La

24 guerre a commencé. Dans une telle situation, il est tout à fait clair que

25 les normes juridiques n'étaient plus appliquées mais c'était les armes qui

Page 1178

1 parlaient.

2 Q. Pouvez-vous nous dire de quelle période s'agit-il ? De quelle façon la

3 Croatie a-t-elle entamé ce processus de sécession ? Comment a-t-elle

4 appliqué son droit à la sécession ?

5 R. Si je me souviens bien, un référendum a été fait, le référendum destiné

6 au peuple croate de s'exprimer sur la sécession et il y avait une certaine

7 partie du peuple serbe en Croatie, et les Croates d'ailleurs, en Croatie,

8 ont voté pour une indépendance, pour l'indépendance croate.

9 Q. Je ne vais pas maintenant commencer un débat. J'aimerais savoir, selon

10 la constitution de la RSFY, la constitution prévoit-elle une autre

11 procédure ?

12 R. Oui, au sein de l'assemblée de Yougoslavie, il y a une autre procédure

13 qui existerait.

14 Q. Est-ce qu'on a appliqué cette procédure ? A-t-on respecté cette

15 procédure ?

16 R. Dans la plus grande mesure, non.

17 Q. Est-ce que vous savez si le président de la RSFY a donné une ordonnance

18 le 9 janvier 1991, que toutes les unités armées qui ne faisaient pas partie

19 de l'unité armée unifiée de la RSFY et tous les organes du ministère de

20 l'Intérieur devaient se désarmer, car ils ne représenteraient plus de

21 formation légale. Ils n'étaient plus conformes à la loi fédérale, et de

22 remettre les armes à la JNA dans les jours qui suivent, dans les dix jours

23 qui suivent ?

24 R. Je ne me souviens pas de cela.

25 Q. Vous ne vous souvenez pas que la présidence avait entrepris des

Page 1179

1 activités de la sorte, et si vous ne vous souvenez pas du texte de la

2 disposition ?

3 R. Je ne me souviens pas de la date.

4 Q. C'était le 9 janvier 1991. Je parle de cette date-là.

5 R. Le 9 janvier 1991, je ne me souviens. Je me souviens, par contre, qu'il

6 y a eu des problèmes concernant cela, mais parlant de cette résolution, je

7 ne le sais pas. Je sais qu'il y a eu des problèmes, des problèmes

8 concernant les armes, l'armement. C'est la raison pour laquelle la

9 présidence n'était pas d'accord.

10 Q. Le 9 janvier 1991, pour vous rappelez, la Croatie a demandé une

11 prolongation des délais de 48 heures jusqu'au 1e janvier 1992. Est-ce que

12 vous connaissez -- est-ce que vous avez entendu parlé de cela ?

13 R. Non.

14 Q. Est-ce que vous savez -- lorsque le 21 janvier, la date butoir est

15 passée, est-ce que vous savez si la République de Croatie a demandé -- a

16 convoqué le MUP et les ZNG [comme interprété] et que le QG principal a

17 répondu de la même façon concernant ces unités qui étaient contournées sur

18 le territoire de la République de Croatie ?

19 R. Non, je n'ai pas eu connaissance de cela.

20 Q. Ne trouvez-vous pas cela étrange de ne pas vous rappelez de ces

21 événements ? Ce sont des événements d'une grande importance pour le

22 Monténégro ainsi que pour la RSFY ?

23 R. Pourquoi est-ce que c'est un événement important pour le Monténégro ?

24 Qu'est-ce qui s'est passé au Monténégro à ce moment-là ?

25 Q. Est-ce que le Monténégro est isolé et ne fait pas partie de la RSFY ?

Page 1180

1 R. Non, le Monténégro n'a jamais été isolé de la RSFY. Veuillez répéter

2 votre question, je ne l'ai peut-être pas bien saisie.

3 Q. Après cette date butoir de 48 heures concernant le désarmement de

4 toutes les unités armées illégalement sur le territoire de la RSFY, la

5 République Croate a commencé à se préparer au combat le 21 janvier et à

6 mobiliser toutes les forces du MUP de la Garde nationale. Et le

7 commandement suprême a réciproqué en prenant les mêmes mesures pour ce qui

8 est des unités de la JNA qui étaient stationnées dans la République de

9 Croatie. Est-ce que vous avez eu connaissance de cela ?

10 R. Je sais qu'il y a eu certains problèmes concernant ces questions, mais

11 je ne me souviens pas que les choses se sont déroulées de la façon dont

12 vous le dites.

13 Q. Fort bien, merci. Avez-vous connaissance du fait que, pendant cette

14 période en 1991, avant les événements au sujet desquels vous avez témoignés

15 ici, dans la région de Dubrovnik, avant ces événements donc, savez-vous

16 s'il y a eu des blocus visant les casernes de la JNA, des attaques dirigées

17 contre les membres de la JNA en Croatie ?

18 R. Oui.

19 Q. S'agissait-il d'un nombre important d'attaques ?

20 R. Je ne suis pas au courant du chiffre, mais je sais que cela s'est

21 produit. J'étais au courant de la situation à Varazdin, à Osijek. Il y a eu

22 plusieurs événements de blocus de casernes de la JNA dans certaines parties

23 de la Croatie.

24 Q. Et à Zagreb, la situation était-elle similaire ?

25 R. Non, au sujet de Zagreb, je ne suis pas sûr. Je ne le sais pas. Un

Page 1181

1 convoi de la JNA est passé par Zagreb en se retirant de la Slovénie. Ils

2 ont traversé, ils n'ont pas été bloqués. Je ne saurais vous en dire plus.

3 Mais pour les autres villes, en revanche, effectivement, je peux le

4 confirmer.

5 Q. Ces attaques ont-elles eu également pour résultat des dégâts

6 importants, des conséquences tragiques ?

7 R. Oui, des équipements ont été endommagés. Il y a eu effectivement des

8 événements tragiques.

9 Q. Pour ce qui est des convois qui ont -- qui se déplaçaient, y a-t-il eu

10 des attaques dont ils étaient -- dont ils faisaient l'objet et les armes

11 ont-elles été saisies ?

12 R. Je n'ai pas entendu parlé d'attaques de grande envergure. Je sais qu'il

13 y a eu d'obstruction sur les chemins de fer, mais que les trains ont

14 poursuivi leur chemin à travers la Bosnie-Herzégovine. Ensuite, la mer,

15 oui, il y a eu le bateau "Saint-Stephen", et l'armée s'est retirée de

16 Slovénie, de Kopir, notamment, pour rejoindre Boka Kotorska où il y a eu

17 des cas de ce type.

18 Q. Etes-vous au courant du fait que les unités paramilitaires croates et,

19 ultérieurement, les forces armées de cette république, ont participé ou

20 plutôt ont rejoint le territoire de la Bosnie-Herzégovine pour y lancer des

21 combats ?

22 R. Quelle période avez-vous à l'esprit ?

23 Q. 1992 et 1993.

24 R. Pour l'année 1992, je ne le sais pas. Mais effectivement, cela a eu

25 lieu en 1993. Ils sont entrés en Bosnie-Herzégovine, et la guerre faisait

Page 1182

1 rage à l'époque. Mais en 1992, l'armée croate n'a pas participé au conflit

2 en Bosnie-Herzégovine. Ils y ont pris part en 1993.

3 Q. La Croatie, en générale -- l'armée croate, a-t-elle participé aux

4 combats en Bosnie-Herzégovine contre l'armée de la BH ?

5 R. Oui, à partir de 1993.

6 Mme SOMERS : [interprétation] Objection. Ceci n'a aucune pertinence eu

7 égard les événements qui se sont déroulés en 1991. Et je souhaiterais que

8 mon confrère reste dans le champ de l'interrogatoire principal.

9 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Avez-vous une raison particulière pour

10 laquelle vous abordez ce sujet ? Auparavant, vous avez traité des sujets

11 qui étaient liés directement, mais à présent, vous vous éloignez, il me

12 semble.

13 M. RODIC : [interprétation] Je comprends le sens de l'intervention de ma

14 consoeur de l'Accusation et je vous comprends -- je comprends votre

15 intervention également. Il ne me revient pas de juger de la véracité des

16 réponses -- de la précision des réponses concernant certaines informations,

17 les dates, les formations, et cetera. Mais pour ce qui est des unités -- de

18 l'implication des unités sur les territoires et, compte tenu des questions

19 de l'Accusation, cela me semble très important. Au courant de ce

20 témoignage, la République de Croatie, la création des unités de forces

21 armées et des unités paramilitaires, donc tout ceci a été minimisé et --

22 c'est ce qu'a tenté de faire l'Accusation. Nous, en revanche, la Défense

23 estime que la situation était tout autre, et nous souhaitons le prouver.

24 Je voudrais poser juste encore une question liée à la question précédente

25 et, après, je passerai à autre chose.

Page 1183

1 Mme SOMERS : [interprétation] Je persiste, Monsieur le Président. Toute

2 référence à l'année 1993 n'a aucune pertinence. Il me semble que la période

3 devrait être limitée à la période couverte par l'acte d'accusation, à moins

4 qu'il n'y ait une raison particulière ou un impact particulier, mais pour

5 cela il faudrait le dire.

6 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Vous pouvez poser encore une question,

7 Maître Rodic, et ensuite je vous prie de passer à autre chose.

8 M. RODIC : [interprétation] Oui, je vais poser la question que j'avais à

9 l'esprit.

10 Q. S'agissant de cette période que vous avez mentionnée, période à

11 laquelle les Unités croates ont participé à la guerre en Bosnie-

12 Herzégovine, je souhaiterais vous poser une question brève : la Croatie, a-

13 t-elle été, de quelque manière que ce soit, menacée par la Bosnie-

14 Herzégovine pour y envoyer ses troupes ?

15 R. Je ne pense pas que la Croatie était menacée par la Bosnie-Herzégovine.

16 Il y a eu toutefois une raison qui a été invoquée. Ils disaient qu'ils

17 allaient en Bosnie-Herzégovine pour y protéger la population croate locale.

18 Q. Merci.

19 Avez-vous connaissance du fait que le président de la Croatie, à l'époque,

20 le président Tudjman - en 1994, le 24 mai, lors d'un rassemblement sur la

21 place Ban Jelacic, il s'agit du 24 mai 1992, à l'occasion du premier

22 anniversaire de l'indépendance - a dit la chose suivante : "Il n'y aurait

23 pas eu de guerre si la Croatie n'avait pas voulu la guerre, mais nous avons

24 estimé que c'était le seul moyen d'arriver à l'indépendance ? C'est pour

25 cela que nous avons participé aux négociations politiques, suite à quoi,

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1 nous avons procédé à la formation des unités militaires armées. Si nous

2 n'avions pas procédé de la sorte, nous n'aurions pas réalisé notre

3 objectif. La guerre aurait pu, effectivement, être évitée, si nous avions

4 renoncé à notre objectif, l'indépendance de l'état croate".

5 R. Je n'ai jamais entendu parler de ce discours. C'était un ton qui était

6 fréquemment présent à l'époque. Il est vrai, il me semble tout à fait vrai

7 que, sans guerre, la Croatie n'aurait pas réalisé son indépendance.

8 Q. Il me semble pourtant que le sens, de ce que je viens de vous dire, est

9 tout à fait différent, mais nous n'allons pas nous attarder là-dessus.

10 Pouvez-vous me dire qui est Hrvoje Sarinic, si vous le savez ?

11 R. Je sais qui il est.

12 Q. Quelle était sa fonction ?

13 R. Je pense qu'il était conseiller du président Tudjman, un des

14 fonctionnaires du gouvernement de la République de Croatie. C'était une

15 personnalité connue et il représentait le président Tudjman, lors des

16 négociations avec Milosevic, ainsi qu'avec le Parti serbe, en général. Il

17 était très actif à l'époque.

18 Q. Etes-vous au courant de ses déclarations concernant le partage de la

19 Bosnie-Herzégovine, notamment, de ce qui était convenu par les deux

20 présidents ?

21 R. J'en ai entendu parler. J'ai entendu parler du partage de la Bosnie-

22 Herzégovine, dont il a été question lors d'une réunion entre Tudjman et

23 Milosevic, mais, personnellement, je ne suis pas au courant des détails.

24 Q. Je vous remercie. Vous avez mentionné, à plusieurs reprises, Hrvoje

25 Kacic, qui était votre ami, d'après ce que j'ai cru comprendre. Pouvez-vous

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1 nous dire quelle était sa fonction ? Que faisait-il, à l'époque ?

2 R. Il était président de la commission pour les Affaires étrangères du

3 parlement croate. Il est également enseignant à l'université de Zagreb. Il

4 est d'origine de Dubrovnik. On faisait de la natation ensemble. En fait, il

5 faisait partie d'une équipe -- d'un club de Dubrovnik, et c'était quelqu'un

6 qui avait adopté une attitude très correcte. Il aimait bien le Monténégro.

7 Il n'était pas membre du Parti communiste. Depuis toujours, il a été un

8 fervent partisan de l'indépendance la République de Croatie, et ceci

9 n'était pas un secret.

10 Q. Connaissiez-vous Franjo Tudjman, le président croate ?

11 R. Je l'ai rencontré, à plusieurs reprises, lors de la conférence sur la

12 Yougoslavie à La Haye. Je l'ai rencontré également à Igalo, au Monténégro,

13 lorsque je les ai accueillis, lui et Milosevic, pour parler à la vielle du

14 conflit en septembre 1991. Je ne l'ai rencontré qu'à l'occasion des

15 négociations officielles. Il en est de même pour Slobodan Milosevic.

16 Q. Avez-vous eu des contacts privés avec le président Tudjman ?

17 R. C'est parce que, je dirais, on a eu des rencontres indépendamment, moi-

18 même et M. Bulatovic, ainsi que M. Separovic. On peut, effectivement, les

19 qualifier de privés puisque nous n'en avons pas informé Milosevic. Nous

20 avions discuté de Prevlaka lors de la pause et après les réunions de La

21 Haye.

22 Q. Lors de la dernière conférence à La Haye, le président Tudjman, n'est-

23 il pas venu vous voir pour vous saluer, vous personnellement ? Avez-vous

24 échangé quelques propos à cette occasion ?

25 R. On se saluait chaque fois et ceci, c'était particulièrement amical à

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1 cette occasion-là, si c'est ce que vous entendez par ce que vous venez de

2 dire. Oui, il était assez chaleureux puisqu'il venait d'apprendre que

3 j'étais le cousin de Jovan Baldani, professeur à l'université à Zagreb.

4 Jovan Baldani, en tant qu'étudiant, venait voir Tudjman lorsque celui-ci

5 était en prison. Baldani et moi, on est cousin germain.

6 Q. Savez-vous quelle était la raison pour laquelle Tudjman s'est retrouvé

7 en prison à l'époque ?

8 R. Probablement parce que il était en faveur de l'indépendance croate. Il

9 n'était pas d'accord avec la politique de l'époque. Je ne suis pas au

10 courant des détails, mais il était emprisonné parce qu'il avait adopté des

11 positions nationalistes.

12 Q. Savez-vous à quelle période cela s'est produit ?

13 R. Dans la fin des années 50, début des années 60, mais je ne saurais vous

14 le dire avec précision.

15 Q. A l'époque, nous parlons quand même d'une période qui a suivi la fin de

16 la Deuxième Guerre mondiale, et Tudjman était général de la JNA en quelque

17 sorte. Son activité était contraire à ce qui était les résultats de cette

18 guerre de libération.

19 R. Je ne pense pas que ses objectifs étaient contraires, puisque son père

20 et son frère avaient été tués, par les Oustachi. Il a participé à la guerre

21 de libération. S'il n'était pas forcément pour une solution comparable à

22 celle de l'état indépendant Croate pendant la seconde guerre mondiale, il

23 voulait faire une forme d'indépendance. Je ne dis qu'il était coupable et

24 qu'il a été accusé, mais je ne le qualifierais jamais d'Oustachi.

25 Q. Je ne l'ai pas accusé d'Oustachi, accusé d'être Oustachi.

Page 1187

1 R. Oui, mais vous le sous-entendiez. Il se battait pour un état

2 indépendant. Il avait une certaine idéologie.

3 Q. Vous êtes toujours sur vos gardes.

4 R. Je ne suis pas sur mes gardes. Je n'ai peur de rien. Je n'ai pas peur

5 de vous, non plus. Vous souhaitez me faire dire des choses que je ne

6 souhaite pas dire.

7 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Monsieur Rodic, nous allons interrompe

8 maintenant, faire une pause. Suite à quoi, vous pourrez poursuivre votre

9 contre-interrogatoire.

10 M. RODIC : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

11 --- L'audience est suspendue à 12 heures 18.

12 --- L'audience est reprise à 12 heures 40.

13 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je vous écoute. Monsieur Rodic,

14 veuillez poursuivre.

15 M. RODIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

16 Q. Monsieur Samardzic, avant la pause, je vous ai posé une question, et je

17 souhaiterais la reposer. Je voudrais savoir si M. Tudjman était le général

18 de la JNA ? Est-ce qu'il a voulu procéder à la création d'un état commun ?

19 Mme SOMERS : [interprétation] Objection, Monsieur le Président. Il n'y a

20 absolument aucune indication à savoir ce que veut dire une lutte de tous

21 les peuples, à savoir ce que cela veut dire. Je crois que la question n'est

22 pas définie assez clairement.

23 M. RODIC : [interprétation] Je vais reformuler ma question, Monsieur le

24 Président, Madame, Messieurs les Juges.

25 Q. La RSFY, a-t-elle été créée en tant que résultat d'une lutte commune du

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1 peuple yougoslave, basée sur la tradition de la lutte de la libération ?

2 R. Oui. La lutte commune des peuples et y compris leur droit à

3 l'autodétermination ou à la sécession. Il s'agissait de quelque chose qui a

4 été débattue lors de la 2e session de la AVNOJ, conformément à la

5 constitution de 1974.

6 Q. A ce moment-là, ce qu'a fait le général Tudjman pendant cette période,

7 est-ce que c'étaient des activités légales ?

8 R. Je ne sais pas ce que le président Tudjman a fait de façon concrète

9 pendant cette période en question, mais je crois qu'il avait le droit de

10 lutter, d'essayer d'établir l'indépendance de la Croatie de façon légale.

11 Si c'est ce qu'il a fait, il avait complètement le droit de le faire. Je ne

12 sais pas quel était son but ultime, mais ne sachant pas cela, je ne peux

13 pas vous dire si, effectivement, il a été jugé pour des raisons justes ou

14 pour des raisons injustes. La tradition de la libération dont il parle,

15 fait justement état de cela, c'est-à-dire que tous les peuples de l'ex-

16 Yougoslavie avaient le droit à l'autodétermination et à la sécession. C'est

17 une partie très importante de notre constitution. Il n'y a aucun doute

18 là-dessus.

19 Q. Est-ce que la tradition reflète l'effort du peuple yougoslave ? Est-ce

20 que cela fait partie de la tradition ?

21 R. Oui, c'est une tradition importante de nos peuples, mais je dois dire -

22 -

23 Q. Non, je ne vous pose pas cette question.

24 R. Pourquoi la répétez-vous à ce moment-là ?

25 Q. Non, je vous pose une autre question. Avec l'émergence du système

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1 multipartite, et avec ce qui est arrivé à la SFRY en 1990 et 1991, dans la

2 SRFY, l'émergence de système multipartite, l'iconographie utilisée par la

3 propagande du parti principal en Croatie, parti à la tête, et s'agissant de

4 la période immédiatement avant la guerre de 1991, y a-t-il eu des

5 références aux frontières austro-hongroises qui appartenaient à la

6 Croatie ? Est-ce qu'on a parlé de Boka comme ayant toujours appartenu à la

7 Croatie, et a-t-on dit qu'il fallait maintenant qu'elle fasse de nouveau

8 partie de la Croatie ?

9 R. Oui. Il y avait certaines histoires concernant cela. D'autre part, on

10 avait dit que la Serbie avait des frontières tout près de Virovitica, tout

11 près de Bella Krajina, de la Krajina Blanche les deux côtés avaient des

12 positions qui auraient pu endommagé la Yougoslavie en tant qu'était unifié,

13 pour les deux les Croates et les Serbes. Je souhaiterais simplement vous

14 rappeler que les politiciens serbes adoraient Ducic [phon] qui estimait que

15 la Serbie devrait aller jusqu'à la Slovénie où la Krajina Blanche.

16 N'allons pas plus loin, je vous prie dans cette ligne de questions.

17 Q. Ces formules utilisées par la propagande, est-ce que cela a suscité une

18 certaine réaction au Monténégro ?

19 R. Oui, pas seulement au Monténégro, mais partout ailleurs.

20 Q. Dites-moi, je vous prierais de répondre à mes questions et de ne pas

21 parler d'autre chose. Je vous parle de la propagande croate telle qu'elle a

22 été perçue au Monténégro. Je vous demande quelles étaient les réactions au

23 Monténégro concernant ces propagandes croates. Je vous demanderais de bien

24 vous concentrer et de répondre à ma question seulement.

25 R. Si, en parlant de propagande, vous voulez dire que Boka Kotorska et la

Page 1190

1 côte monténégrine devraient appartenir à la Croatie, je n'ai entendu que

2 Sime Djordan dire quelque chose là-dessus. C'est un politicien croate. Il a

3 écrit un article. Le président Tudjman l'a démis de ses fonctions. Mais je

4 n'avais jamais entendu parler de cela dans la presse croate, mais Sime

5 Djordan qui avait abordé cette question.

6 Q. C'était simplement à savoir concernant ce genre de propagande, y a-t-il

7 eu des réactions négatives au Monténégro ?

8 R. Oui, bien sûr. Les gens refusaient d'accepter ses positions. Ils

9 refusaient également d'accepter le fait que Boka Kotorska pourrait

10 appartenir à la Croatie. Nous ne parlons que de Sime Djordan qui est un

11 politicien particulier. Je n'ai jamais entendu quelqu'un d'autre parler de

12 chose semblable.

13 Q. Très bien. Lorsque vous avez parlé de la session, de l'assemblée au

14 sein du gouvernement qui a eu lieu supposément le

15 1er octobre 1991, vous avez dit que vous vous êtes rendu à cette réunion,

16 que vous y êtes arrivé vers 8 heures 30 ou 9 heures du soir.

17 R. Oui, c'est cela. Je ne peux pas dire si c'était 8 ou 9 heures, mais la

18 nuit était déjà tombée.

19 Q. Vous avez également dit que c'étaient des policiers qui vous ont

20 informé, des policiers qui vous ont interpellé alors que vous retourniez à

21 la maison à Kotor. Pourriez-vous nous dire plus spécifiquement de quels

22 policiers il s'agit, et de quelle façon vous ont-ils informé de cette

23 réunion ?

24 R. Je me rendais à la maison. Je rentrais de l'aéroport. Mon chauffeur

25 était là également. Nous passions au-dessus du pont de Morica [phon]. Le

Page 1191

1 policier nous a arrêté et il a dit : "Ministre, où vous rendez-vous ?" Il a

2 dit : "Vous ne pouvez pas rentrer à la maison maintenant, puisqu'il y a une

3 session du gouvernement qui a lieu. On demande votre présence. On demande

4 que vous soyez présent. On a besoin de vous à Podgorica."

5 Q. Vous souvenez-vous de la voiture, la voiture que vous conduisiez ? Est-

6 ce que c'était une voiture officielle ?

7 R. Oui, c'était la voiture officielle de Jugooceanija. C'était un Peugeot,

8 une nouvelle voiture, et j'avais un chauffeur qui s'appelait qui Zlatko

9 Jovanovic.

10 Q. Très bien. Est-ce que cette voiture était identifiée de façon

11 particulière ? Y avait-il des gyrophares bleus ou rouges, ou quelque chose

12 de ce genre qui identifiait cette voiture ?

13 R. Je ne sais pas si c'était identifié de quelque façon que ce soit. Je

14 sais que c'était une voiture officielle de la Jugooceanija. C'était la

15 voiture du directeur. Il était tard. Nous avons rebroussé chemin. En fait,

16 nous avons pris une autre route qui nous emmenait directement à la session

17 du gouvernement. J'y suis arrivé dans quelques minutes.

18 Q. Est-ce qu'il ne vous était jamais arrivé avant ou après que les

19 policiers vous indiquent qu'il y a eu une réunion du gouvernement ?

20 R. Je ne me souviens pas qu'une telle chose me soit arrivé ni avant, ni

21 après. Il se peut que l'on m'ait avisé de cette façon-là avant ou après. Je

22 ne me souviens vraiment pas. Je vous ai dit déjà que j'étais allé

23 accompagner M. Wejnaendts ce jour-là.

24 Q. Bien. Parlons maintenant de la session du gouvernement. Lorsque vous

25 êtes arrivé, parmi les personnes qui s'y trouvaient, vous avez vu des

Page 1192

1 généraux. Ils portaient des uniformes de cérémonie, pourriez-vous nous dire

2 à quoi ressemblaient ces uniformes ?

3 R. C'étaient des uniformes qu'on enfile lorsqu'on part en guerre. Ce n'est

4 pas le même genre d'uniforme que les généraux portent lorsqu'ils se

5 promènent dans la ville, par exemple. Ce n'était pas un pantalon, des

6 chaussures avec une ceinture. On pouvait voir que l'uniforme qu'ils

7 portaient était un uniforme qui différait de l'uniforme qu'ils portent de

8 façon régulière.

9 Q. Pourriez-vous me dire de nouveau, de quels représentants militaires que

10 vous connaissiez, quels étaient les représentants militaires qui étaient

11 présents à la réunion du gouvernement qui a eu lieue le 1er octobre 1991 ?

12 R. Il y avait le général Strugar, le général Jeremic s'y trouvait

13 également. Pour vous dire la vérité, je ne connaissais pas ces personnes

14 personnellement. On m'a simplement indiqué de qui il s'agissait, Babic s'y

15 trouvait également. Il était membre du cabinet. Le général Damjanovic s'y

16 trouvait, d'autres représentants militaires, d'autres officiers, que je ne

17 connaissais pas. J'étais assis dans une rangée derrière eux. Il y avait un

18 groupe d'officiers qui étaient présents à cette réunion. C'étaient des

19 personnes qui n'étaient jamais des membres de cabinet. L'atmosphère était

20 très tendue, la pièce était éclairée de façon assez sombre.

21 Q. Permettez-moi de vous poser la question suivante. Le général Strugar,

22 le général Damjanovic, le général Babic, qui d'autres y avait-il, je vous

23 prie ?

24 R. Je crois qu'il y avait également le général Jeremic, puisque c'est

25 ainsi que l'on m'a présenté cet homme. Je ne les connaissais pas

Page 1193

1 personnellement. C'était la première fois que je les voyais à l'exception

2 bien sûr du général Babic.

3 Q. Vous avez parlé du général Jeremic ?

4 R. Je crois que c'était son nom. Je ne suis pas tout à fait certain, mais

5 je vous prierais de ne pas insister là-dessus. J'ai déjà dit auparavant que

6 je ne connaissais pas ces personnes. Je vous ai simplement dit qu'on m'a

7 donné le nom de ces personnes. Je crois que c'était Jeremic. Moi j'étais

8 assis derrière. Enfin, il y avait quelques autres colonels qui étaient là.

9 Je crois, qui étaient assis dans une rangée derrière les généraux.

10 Q. L'amiral Jokic, était-il là ?

11 R. Non, non, il n'était pas là.

12 Q. Voulez-vous arrêter de m'interrompre et de me permettre de terminer ma

13 réponse et ma phrase.

14 L'amiral Jokic, était-il présent à la réunion du

15 1er octobre 1991 ?

16 R. Non, l'amiral Jokic n'était pas présent à cette réunion ?

17 Q. Est-ce que c'est une réponse catégorique de votre part ?

18 R. Oui, tout à fait.

19 Q. Vous vous souvenez très clairement qu'il n'était pas présent à cette

20 réunion ?

21 R. Oui, je me souviens très clairement. J'ai peut-être fait une erreur

22 lorsque j'ai dit --

23 Q. Je vous prie, un instant, donnez-moi quelques instants.

24 R. Ce n'est pas un interrogatoire policier. Vous êtes un avocat. Je peux

25 vous donner les réponses que je veux. Je ne suis pas obligé de vous donner

Page 1194

1 des réponses qui vous satisfont.

2 Q. Concernant le général Jeremic, est-ce que son nom aurait pu être

3 Jeremija ?

4 R. Oui, c'est peut-être. Comme je vous dis, je ne connaissais pas ces

5 personnes. On m'a simplement donné leurs noms.

6 Q. Pourriez-vous me dire, je vous prie, quelle était la position

7 qu'occupaient ces généraux, est-ce que vous le savez ?

8 R. Je ne le sais pas. Je sais que le général Strugar était le commandant

9 du 2e Groupe opérationnel et qu'avant cela et, sinon, à ce moment-là, il

10 était le commandant de la Défense territoriale au Monténégro. Le général

11 Strugar était la personne la plus importante du groupe. On pouvait le voir

12 de par la façon dont ils étaient assis et par la façon dont on s'adressait

13 à lui.

14 Q. Qui vous a dit cela ?

15 R. C'était mon voisin, la personne à côté de laquelle j'étais assis. La

16 réunion a duré très longtemps. C'était la nuit. Je lui ai demandé qui sont

17 ces personnes et il me l'a dit. Ensuite, j'ai vu la façon dont ces

18 personnes étaient vêtues.

19 Q. Est-ce que vous savez le nom de cette personne assise à côté de vous,

20 est-ce que vous connaissez son nom ?

21 R. Oui. C'est l'un des ministres. Il était assis à côté de moi.

22 Q. Qui s'appelait comment ?

23 R. Markovic, si je me souviens bien. C'était le secrétaire du ministère de

24 la Justice. Il était juste à côté de moi. Il était assis à côté de moi. Je

25 lui ai demandé qui sont ces personnes. Je crois qu'Abramovic, le ministre

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1 de l'Agriculture, me l'a dit également.

2 Q. Lorsque vous parlez de Markovic --

3 R. Oui, Markovic.

4 Q. Oui, mais pour éviter toute confusion, vous avez parlé du ministre de

5 la Justice. Momcilo Knezevic, c'était le ministre de la Justice, et vous

6 avez parlé de Markovic.

7 R. Non.

8 Q. [aucune interprétation]

9 R. Oui, c'est exact. Effectivement, Knezevic était assis juste derrière.

10 Je sais que l'autre s'y trouvait également.

11 Q. Très bien. Pour ce qui est des trois autres généraux, il y avait le

12 général Jeremija, le général Damjanovic et le général Babic. Vous dites que

13 le général Babic était le ministre de la Défense, il y avait Jeremija et

14 Damjanovic. Est-ce que vous savez quels étaient les postes qu'ils

15 occupaient ?

16 R. Non, je ne le sais pas. On ne m'a jamais informé de cela. Je n'ai pas

17 vraiment réfléchi. Ils n'ont pas beaucoup parlé lors de la réunion.

18 Q. Lorsque vous avez parlé de Strugar, est-ce que vous avez demandé aux

19 autres, qui étaient les autres généraux ?

20 R. Qu'est-ce que vous voulez dire ?

21 Q. Est-ce que vous avez demandé ce qu'ils faisaient ?

22 R. Non.

23 Q. Très bien. Dans votre déclaration, datant de l'an 2000, à la page 10,

24 vous avez dit quelque chose, et je vais vous citer vos propos : "J'ai

25 également remarqué qu'environ dix représentants très haut placés de la JNA

Page 1196

1 étaient sur place, étaient là, ils portaient des uniformes de camouflage.

2 Les seuls, que j'ai reconnus, étaient le général Pavle Strugar, le

3 commandant des Unités de la JNA, qui avait lancé l'attaque contre

4 Dubrovnik; le général Radomir Jeremija, le commandant du Corps d'Uzice;

5 ensuite Radomir Damjanovic, commandant du Corps de Podgorica; l'amiral

6 Miodrag Jokic, qui deviendra plus tard le commandant du secteur militaire

7 naval de Boka Kotorska; et Bozo Babic, le ministre de la Défense du

8 Monténégro."

9 C'est ce que vous avez dit dans votre déclaration en l'an 2000, vous avez

10 donné cette déclaration aux membres du bureau du Procureur, alors que ce

11 que vous nous dites aujourd'hui diffère énormément, il y a un écart assez

12 important entre ce que vous nous avez dit aujourd'hui et la déclaration.

13 R. Quel est cet écart ? Qu'est-ce qui ne concorde pas ? Je ne comprends

14 pas ce que vous voulez dire par là. Je vous prie de l'expliquer.

15 Q. Calmez-vous, je vous prie.

16 Mme SOMERS : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président, je

17 voudrais d'abord soulever une objection concernant le fait que Me Rodic ne

18 fait pas référence aux documents fournis par le bureau du Procureur. On a

19 apporté quelques corrections. La déclaration fournie par le témoin au

20 bureau du Procureur n'est pas la déclaration corrigée qu'il est en train de

21 citer.

22 M. RODIC : [interprétation] Monsieur le Président, Madame Somers a raison,

23 effectivement. Avant l'interrogatoire principal, j'ai reçu, de sa part, ce

24 document sans signature et sans indication particulière. Je crois que c'est

25 elle qui a rédigé ce document, mais pour ce qui est du Tribunal et pour ce

Page 1197

1 qui est du Règlement du Tribunal, il est stipulé très clairement de quelle

2 façon on procède à la correction des déclarations fournies par les témoins.

3 On procède de la même façon que lorsqu'on prend recueil, une déclaration.

4 Nous avons un bon nombre de déclarations corrigées, de déclarations

5 amendées, modifiées, mais ici nous n'avons absolument aucune signature de

6 M. Samardzic, et nous ne pouvons pas conclure qu'il s'agit d'une

7 modification de la déclaration de M. Samardzic. Je vais écouter mon

8 éminente consoeur pour voir ce qu'elle à nous dire.

9 Mme SOMERS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Il s'agit d'un

10 témoin qui fait l'objet de l'Article 92 bis qui ne vient pas donner un

11 témoignage en direct. Lorsque la déclaration est acceptée sur le terrain

12 par les représentants du Greffe ou quelqu'un qui joue le rôle d'un notaire

13 ou d'un représentant officiel, à ce moment-là, les corrections sont faites.

14 Il s'agit ici d'une question de format. Le témoignage en direct peut

15 toujours être corrigé lorsqu'une observation est faite par le témoin et

16 lorsque quelque chose ne va pas. Il ne s'agit pas ici d'un témoin qui

17 répond aux exigences de l'Article 92 bis, et le peu s'en faut.

18 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Puis-je vous demander, Madame Somers,

19 est-ce que vous dites que les corrections qui ont été faites jusqu'à

20 présent avant que le témoin ne vienne témoigner ou s'agit-il des

21 corrections qui ont été faites au moment où la déclaration d'origine en

22 l'an 2000 a été rédigée ? Je crois que c'est le cas.

23 Mme SOMERS : [interprétation] Non, Monsieur, en fait. Il ne s'agit pas des

24 corrections qui ont été apportées en l'an 2000. Elles ont été faites -- un

25 enquêteur, sur la base de certaines informations à procéder à certaines

Page 1198

1 corrections -- il s'agit d'une déclaration qui était très longue et qui a

2 été faite dans une langue qui était différente de la langue maternelle de

3 M. Samardzic, dans d'autres circonstances, comme nous l'avons dit, c'était

4 très difficile et il a été en mauvaise santé, et cela lui a été relu dans

5 une langue qui n'était pas la sienne. Il a également indiqué que certains

6 éléments devaient être corrigés. On nous a dit qu'un enquêteur devait s'en

7 entretenir avec lui et a présenté le contenu de cette conversation à la

8 Défense de façon à ce qu'il puisse avoir la possibilité de préparer leur

9 contre-interrogatoire.

10 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Maître Rodic, je pense que nous

11 pouvons accepter ici la déclaration de l'an 2000, si vous posez les

12 questions correctement au témoin, à savoir, les parties pertinentes de son

13 témoignage. On nous a dit qu'il y a deux pages de corrections qui ont été

14 faites à propos du témoignage de ce témoin, et vous pouvez sur ces bases-là

15 formuler vos questions.

16 M. RODIC : [interprétation] Certainement, Monsieur le Président. Pour ce

17 qui est de ces corrections, j'aimerais également noter que nous avons une

18 déclaration certifiée et officielle faite par le témoin. J'aimerais attirer

19 votre attention sur le fait que le témoin suivant, Djelo Jusic, a également

20 fait une déclaration qui a été authentifiée, déclaration officielle et

21 qu'après cette déclaration, il a apporté quelques modifications à cette

22 déclaration, qui ont été authentifiées et signées; néanmoins, cette

23 version-ci, je ne l'ai reçu que quelques minutes avant que le témoin ne

24 rentre dans le prétoire.

25 Mme SOMERS : [interprétation] Puis-je répondre, s'il vous plaît, Monsieur

Page 1199

1 le Président ?

2 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Maître Rodic, est-ce que c'est tout ce

3 que vous avez à dire pour l'instant ?

4 M. RODIC : [interprétation] J'aimerais également ajouter, eu égard au point

5 suivant : pour ce qui est de la déclaration de l'an 2000, la question que

6 j'ai posée a été répétée sept fois, ce qui justifie, tout à fait, le fait

7 que je pose cette question.

8 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Cela ne fait pas l'ombre d'un doute,

9 Maître Rodic. Je crois que vous avez clairement identifié les personnes

10 présentes, en tenant compte de la déclaration de l'an 2000, et tout ceci

11 est clair à l'esprit pour nous et a été consigné au compte rendu

12 d'audience. Ce qui nous préoccupe et ce qui préoccupe Mme Somers, c'est

13 que, dans votre contre-interrogatoire, vous n'avez pas tenu compte du fait

14 qu'une correction avait été faite par le témoin, ce qui, au jour

15 d'aujourd'hui, modifierait l'identité de quelques-unes des personnes qui

16 étaient présentes à la réunion en question. C'est ce dont il s'agit ici, à

17 savoir, ce qui nous préoccupe ici, au plan technique, si c'est la

18 déclaration signée et authentifiée, déclaration comportant les corrections

19 qui vous auraient été remises, revues et corrigées et signées. Je n'ai pas,

20 à ce propos, relu le règlement, mais, à cet égard, je crois que Mme Somers

21 a raison de dire que, conformément à la règle de procédure et de preuve,

22 l'Article 92 bis, est quelque chose de différent et ce n'est pas la

23 situation dans laquelle nous nous trouvons aujourd'hui.

24 Il me semble, néanmoins Madame Somers, que, si on peut simplement vous

25 remettre une feuille de papier sans signature, c'est un petit peu informel,

Page 1200

1 mais ceci permettrait peut-être de satisfaire tout le monde. S'il y a des

2 modifications importantes à apporter à la déclaration ou des corrections,

3 je crois que cette déclaration doit être datée et signée. Ceci, je crois,

4 permettrait de savoir quels changements ont été apportés et que l'autre

5 partie en soit informé.

6 Mme SOMERS : [interprétation] Je ne souhaite pas remettre en question la

7 position de la Chambre. Etant donné les circonstances, nous voulions

8 simplement nous assurer que la Défense avait clairement pris note de cela

9 et que cela ne pouvait pas nous porter préjudice.

10 Je ne souhaite pas apporter des commentaires pour ce qui est de la

11 correction de M. Jusic. Si la Défense le note correctement, l'entretien qui

12 a été fait en vertu de l'Article 92 bis sur le terrain, si je ne me trompe

13 pas, dans une autre affaire, une déclaration, je crois, cela aurait

14 simplement été dans le cadre de Milosevic, il me semble. En tout cas, je

15 peux vérifier. Je me souviens très bien avoir vu des certifications

16 conformes à l'Article 92 bis en rapport avec cela. S'il y a une différence,

17 bien sûr, avec les déclarations antérieures, en vertu de

18 l'Article 66(A)(ii).

19 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je crois, Maître Rodic, que nous avons

20 consacré suffisamment de temps aux questions techniques et de fonds. Je

21 crois que maintenant, par rapport à la situation actuelle, c'est

22 certainement la déclaration 2000, la liste des personnes présentes qui s'y

23 trouvent et une liste différente fait maintenant l'objet de ce témoignage.

24 Et vous savez, de façon tout à fait appropriée, attiré notre attention sur

25 les corrections qui ont été faites. Merci.

Page 1201

1 M. RODIC : [interprétation] En acceptant votre proposition, je souhaite

2 maintenant poser une question au témoin parce que je viens de recevoir une

3 correction.

4 Q. La question que je pose est la suivante : comment est-ce possible,

5 avant le commencement du procès de M. Strugar, comment se fait-il qu'il

6 puisse se rappeler maintenant que le général Jokic n'était pas présent lors

7 de cette réunion qu'il a évoquée ? Répondez rapidement, s'il vous plaît.

8 R. Je m'en souviens maintenant parce que cela m'a permis de me rafraîchir

9 la mémoire parce que, lorsque j'ai témoigné dans le cadre de l'affaire

10 Milosevic, j'ai dit que Jokic ne s'y trouvait pas. J'ai remarqué que j'ai

11 fait une erreur. Je ne suis pas en train de faire porter le blâme à qui que

12 ce soit, des personnes qui étaient à Sydney avec moi. Ce n'est pas quelque

13 chose que j'ai omis de mentionner. Je ne me souvenais pas de son nom. A

14 l'époque, je venais tout juste de sortir de l'hôpital et, lorsque j'ai

15 remarqué cette erreur, j'ai réagi tout de suite. Lorsque j'ai témoigné

16 devant le Tribunal, la dernière fois, j'ai dit que Jokic n'était pas

17 présent. Je ne prétends pas cela parce qu'il ne l'était pas. Il s'agit

18 simplement d'une erreur qui s'est glissée dans ce témoignage. Je pense que

19 ceci a été corrigé, non pas aujourd'hui, mais il y a plus d'un an, lorsque

20 j'ai témoigné contre Slobodan Milosevic.

21 Q. Monsieur Samardzic, je crois que, lorsque vous avez témoigné dans le

22 cadre de l'affaire Milosevic, vous n'étiez pas aussi sûr sur la présence du

23 général Jokic; néanmoins, je me permets d'émettre une réserve. Lors de la

24 prochaine pause, je vais vérifier le compte rendu d'audience et voir si

25 j'avais raison ou pas.

Page 1202

1 Vous avez fait votre déclaration en l'an 2000 et vous avez fait votre

2 déclaration aux enquêteurs. Vous avez dit que vous avez relu cette

3 déclaration et que vous l'avez signée vous-même. Vous avez précisé que vous

4 parlez plusieurs langues, vous maîtrisez particulièrement bien l'anglais.

5 Vous étiez ministre des Affaires étrangères et je suppose qu'à ce poste-là,

6 et dans vos échanges diplomatiques, que vous deviez converser en langue

7 anglaise. Cela fait longtemps maintenant que vous vivez en Australie. Il me

8 semble que la langue anglaise est également parlée dans ce pays. Par

9 conséquent, la version en B/C/S de votre déclaration, qui est votre langue

10 maternelle, ainsi que la déclaration qui a été rédigée en anglais en l'an

11 2000, ne devraient pas vous poser trop de problèmes. La lecture de ce

12 document ne devrait pas vous poser trop de problèmes, n'est-ce pas ?

13 R. Oui, tout à fait. Mais la déclaration qui a été faite en l'an 2000 est

14 une déclaration qui a été faite deux ou trois jours après ma sortie de

15 l'hôpital, lorsque j'ai été amputé de mes deux jambes. Par conséquent,

16 c'étaient des circonstances un petit peu exceptionnelles. De surcroît, je

17 ne pense pas qu'il s'agisse d'erreurs très importantes. J'ai vraiment fait

18 un effort pour corriger ces erreurs. Je sais qu'en tant qu'avocat, vous

19 insistez particulièrement sur ces éléments-là, mais je n'avais nullement

20 l'intention de vous fournir des informations erronées car, même à ce

21 moment-là, en l'an 2000, mon état de santé était vraiment très mauvais et

22 j'avais du mal à me souvenir de tous les détails, de tout ce qui s'était

23 produit neuf ans auparavant. Par conséquent, je n'étais motivé par aucune

24 mauvaise intention. Il y a quelques erreurs, autres erreurs moins

25 importantes que j'ai modifiées par la suite.

Page 1203

1 Q. Oui, je comprends fort bien qu'il n'y avait pas de mauvaises intentions

2 de votre part. Je souhaite attirer votre attention sur ce que vous avez

3 déclaré en l'an 2000. La manière dont ceci a été reproduit, je souhaite me

4 concentrer sur un seul et même fait pour corroborer ce que je dis. A la

5 page 10, vous dites : "Les seules que j'ai reconnues," autrement dit, vous

6 n'avez posé la question à personne. Vous dites avoir reconnu le général

7 Pavle Strugar, Jeremija, Damjanovic, Jokic et Bozo Babic.

8 Un peu plus loin dans le texte, à la page suivante, au paragraphe 2, on

9 peut lire, où vous faites référence au fait que général Strugar était

10 satisfait du fait que les Monténégrins allaient se battre. Vous dites que

11 Jeremija, Damjanovic et, en particulier, Babic et Jokic, Babic qui a

12 beaucoup parlé à cette occasion-là et que toutes ces personnes étaient tout

13 à fait en faveur de cela. Vous dites même que Jokic a pris la parole lors

14 de cette réunion.

15 Au paragraphe suivant, sur la même page, vous parlez de Kristo Djurovic, la

16 dernière phrase de la version en B/C/S, Kristo Djurovic, vous dites :

17 "Jokic était présent lors de la réunion et il soutenait à fond l'attaque et

18 il devait, par la suite, succéder à Djurovic."

19 Ensuite, au paragraphe 1 de la page suivante, vous dites : "Sur les

20 éléments qui étaient portés à ma connaissance, je ne peux pas dire ce qui

21 s'est passé exactement mais je peux dire qu'en l'espace d'une heure, Jokic

22 était prêt à assurer le commandement, à savoir, après la mort de Djurovic."

23 A la page 19, au paragraphe 3, à partir du haut, vous dites : "Au cours de

24 cette période, j'ai eu l'occasion de m'entretenir avec Strugar et Jokic.

25 C'est le seul contact que j'ai eu avec eux après la réunion du 1er octobre,"

Page 1204

1 ce qui signifie que Jokic était présent lors de cette réunion.

2 Egalement, nous sommes toujours au paragraphe 4 de la même page, vous avez

3 déclaré, lorsque vous avez appelé Strugar et Jokic à propos des Anglais,

4 vous dites qu'ils n'ont pas fait preuve d'insolences lors de la réunion du

5 1er octobre. Vous dites que quelqu'un avait mis à votre disposition le

6 numéro de téléphone de Strugar et de Jokic.

7 Je pense que vous avez déclaré sept fois, de façon très claire, que Jokic

8 était bel et bien présent lors de cette réunion, non seulement qu'il était

9 présent mais qu'il a pris la parole et qu'il a même communiqué avec

10 d'autres personnes lors de cette réunion du 1er octobre. Par conséquent, je

11 crois qu'on ne peut pas dire qu'il s'agit d'une erreur ou d'une petite

12 erreur ou d'une toute autre erreur que vous souhaitez évoquer aujourd'hui.

13 Est-ce exact ?

14 R. Non, ceci n'est pas exact. Je me suis entretenu avec Jokic au

15 téléphone. Cette conversation a eu lieu beaucoup plus tard, bien après le

16 1er octobre. Cette conversation a eu lieu au mois de novembre et celle-ci

17 n'a rien à avoir avec la date du 1er octobre. Permettez-moi de poursuivre,

18 s'il vous plaît. La première erreur qui s'est glissée dans la déclaration,

19 je n'ai pas réagi à temps, et elle a été répétée à plusieurs reprises par

20 la suite. Je ne l'avais pas remarqué tout de suite. Il s'agissait d'une

21 erreur parce que je n'avais aucune raison de dire que Jokic était présent

22 s'il ne l'était pas.

23 Q. Quelle raison pourriez-vous évoquer pour dire que ces propos ont été

24 repris par Strugar et Jokic ? Qui a dit que c'est vous qui avez rapporté

25 ces paroles ?

Page 1205

1 R. Quelque soit la personne qui a dit cela, ce n'était pas Jokic qui

2 aurait pu reprendre ces propos parce qu'il n'était pas présent.

3 Q. Pourquoi avez-vous dit à six reprises, pourquoi avez-vous dit cela six

4 fois dans votre déclaration ?

5 R. Je ne l'ai pas dit six fois. Vous dites des bêtises. Il est précisé

6 qu'une fois que Jokic a repris ceci. Une erreur a été faite à propos du nom

7 de Jokic. Cette erreur a été répétée par la suite. J'ai expliqué ceci au

8 cours de mon témoignage dans le cas de l'affaire Milosevic dès que j'ai

9 remarqué qu'il y avait une erreur. Je crois qu'il ne s'agissait pas de mon

10 erreur mais les gens ont inscrits ceci dans ma déclaration.

11 Q. Monsieur Samardzic, je vous ai lu différents passages de votre

12 déclaration où vous avez répété sept fois que le général Jokic était

13 présent lors de cette réunion.

14 R. Si vous dites que cela est répété 70 fois, Jokic n'était pas présent.

15 Simplement cela s'est glissé dans le texte. Parce qu'il y a 34 pages de

16 déclaration, on peut s'attendre à ce que ce genre d'erreur se glisse dans

17 un tel texte surtout lorsque la déclaration est faite par un homme qui est

18 extrêmement malade. Je venais de sortir de l'hôpital. Même si j'avais dit

19 cela, je ne pense pas parce qu'au début de mon témoignage, je ne me

20 souvenais pas, je ne me souvenais pas des noms. Il y avait cinq ou six

21 personnes avec moi à Sydney. Ils me posaient la question : Cette personne

22 était-elle là ou non ? Je confirmais et j'expliquais ce qui s'était passé.

23 Cependant, la conversation que j'ai eue, un peu plus tard, au mois

24 d'octobre, au début du mois de novembre avec Jokic, n'avait rien à voir

25 avec la date du 1er octobre ou de la réunion du 1er octobre.

Page 1206

1 Q. Nous y reviendrons plus tard. Très bien.

2 R. C'est vous qui avez posé ces questions.

3 Q. Nous y reviendrons. Après votre sortie de l'hôpital, quelqu'un vous a-

4 t-il exercé une certaine pression pour que vous fassiez cette déclaration

5 aux enquêteurs ?

6 R. Non, aucun élément de coercition. J'ai fait cela de mon plein gré, mais

7 je dois dire que je n'étais pas dans un très bon état de santé.

8 Q. Est-ce que des enquêteurs ont glissé sept déclarations incorrectes dans

9 votre déclaration après que vous l'ayez signé, après que vous l'ayez lu ?

10 R. Je ne le dirais pas comme cela.

11 Q. Oui, alors reformulez-le à votre manière, s'il vous plaît.

12 R. J'ai déjà dit qu'il y avait une erreur puisque j'ai parlé avec M.

13 Williamson, qui a un accent de Louisiane, qui est un peu différent. Il est

14 évident que certaines traductions d'erreurs ont pu se glisser dans le

15 texte, et que la traduction en B/C/S, peut-être, n'est pas tout à fait

16 conforme à mes déclarations en anglais. Je crois qu'on pourrait découvrir

17 bon nombre d'autres erreurs. Il y a des dates qui sont erronées, des choses

18 de la sorte et que je n'ai pas pu contrôler. Récemment, par exemple, je

19 viens de regarder cette déclaration, et il est dit que Lord Carrington et

20 son projet ont été débattu le 6 octobre et c'était le 7 octobre, en fait.

21 Il y a beaucoup d'autres erreurs de ce type mais si vous souhaitez utiliser

22 ceci contre lui, vous êtes libre à vous de le faire. La traduction est très

23 mauvaise. On ne peut pas traduire folklore, des poèmes folkloriques en

24 anglais étant donné qu'ils ont un sens tout à fait différent et ensuite me

25 dire que c'est moi qui dis cela.

Page 1207

1 Q. Oui, bien sûr, Monsieur Samardzic. Monsieur Samardzic, vous avez tout à

2 fait raison. Je ne parle d'accent. Je ne parle de date. Je parle d'une

3 personne, un homme important au sujet duquel on dit sept fois qu'il était

4 présent, qu'il a même pris la parole. Donc, je ne comparerais pas cela aux

5 erreurs de date. Je ne pense pas qu'il puisse y avoir d'erreurs de

6 traduction puisque tout ce que je viens de vous lire figure dans la version

7 anglaise, aussi.

8 R. Je vous ai cité des exemples. Il s'agit d'une erreur par omission et je

9 l'ai rectifié à temps. Vous pouvez essayer de prouver ce que vous voulez.

10 Il n'y a pas eu de mauvaise foi. Dès que j'ai remarqué qu'il y a une

11 erreur, surtout lors de mon témoignage dans l'affaire Milosevic, j'ai dit

12 que Jokic n'avait pas participé à cette réunion.

13 J'estime que cela devrait vous suffire. C'est moi-même qui me suis rendu

14 compte de cela. Je l'ai dit dans Milosevic. Il n'a pas été là. Quel serait

15 mon intérêt à dire qu'il était là alors qu'il n'y était pas. J'ai fait une

16 erreur, oui, mais il n'y avait pas de mauvaise foi. Il n'y avait pas de

17 mauvaise volonté. Je l'ai rectifié dès que j'ai pu. Vous pouvez insisté

18 tant que vous voulez mais il ne s'agit pas d'une grosse erreur.

19 Q. Monsieur Samardzic, je répète ce que je vous l'ai déjà dit. Dans votre

20 témoignage dans l'affaire Milosevic, compte rendu d'audience, page 11185,

21 points 25 et 26. Vous y évoquez cette réunion. Vous dites que : "Des

22 militaires y étaient présents, trois ou quatre généraux en une tenue de

23 combat." Vous n'avez pas démenti ce qui figure dans votre déclaration de

24 l'an 2000. Vous n'avez pas dit qu'il y était ou qu'il n'y a pas été. Si

25 vous ne faites pas confiance à moi, si vous ne croyez pas que la présence

Page 1208

1 de Jokic a été évoquée sept fois dans votre déclaration, voulez-vous le

2 vérifier vous-même dans la version anglaise ?

3 Mme SOMERS : [interprétation] Objection. Il ne s'agit pas de la déclaration

4 dans son intégralité. Si mon confrère continu à poser des questions de ce

5 type, il faudrait que l'on se concentre sur la question au sens propre et

6 la réponse sur la présence de ces personnes dans l'affaire Milosevic.

7 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Veuillez le faire.

8 M. PETROVIC : [interprétation] Il s'agit de la page 11185, à la ligne 13.

9 On dit :

10 "R. Le 1e octobre dans la soirée, une réunion a eu lieu, la session

11 extraordinaire, ou plutôt, la réunion élargie par rapport ?

12 Ensuite, cela fait partie de la réponse à la question précédente. Ensuite,

13 Q. De quoi est-il été question ?

14 R. Je suis arrivé en retard. Je n'ai pas participé depuis le début. Mais

15 vers la fin, puisque le président Bulatovic m'a envoyé avec M. Wejnaendts,

16 le représentant de Lord Carrington, lors de sa visite à Cetinje. Lorsque je

17 suis entré, j'ai été plutôt choqué. Je n'ai jamais vu de réunion de ce

18 type. Il y avait huit militaires, trois ou quatre généraux, au moins, qui

19 portaient des tenues de combat. Ils étaient assis autour des tables où on

20 s'asseyait d'habitude lorsqu'il y avait des réunions du gouvernement. Les

21 régions de Monténégro étaient toutes là, et cetera, et cetera."

22 Mme SOMERS : [interprétation] Je souhaiterais aux fins de discussions

23 supplémentaires que je voudrais poser avoir la copie de cette partie.

24 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Oui, nous aurons ce compte rendu

25 d'audience.

Page 1209

1 Merci, Monsieur Petrovic. Si vous voulez poursuivre les questions au sujet

2 du témoignage dans l'affaire Milosevic, je vous suggère de le faire la

3 prochaine fois, après la levée de l'audience lors de notre prochaine

4 audience.

5 M. RODIC : [interprétation] Je crois que je n'ai pas tout à fait compris.

6 [Le Conseil de la Défense se concerte]

7 M. RODIC : [interprétation] Ah, maintenant j'ai reçu la bonne

8 interprétation. Excusez-moi, nous poursuivrons à ce sujet ultérieurement.

9 Q. Monsieur Samardzic, lors de l'interrogatoire principal, vous avez

10 répondu aux questions concernant les propos tenus par les autres au cours

11 de cette réunion. A plusieurs reprises, vous avez dit que le général

12 Strugar a dit que 30 000 Oustachi étaient en train d'attaquer le

13 Monténégro. Vous avez dit qu'il a répété à plusieurs reprises. Il a dit que

14 nous devions nous défendre puisque 30 000 Oustachi se dirigeaient vers le

15 Monténégro. Nous devrions défendre la Yougoslavie en veillant à ce qu'il y

16 a de moins de victimes possible, et cetera, et cetera.

17 Donc, c'est ce que vous avez dit. Vous avez dit avoir entendu le général

18 Strugar faire des propos de ce genre.

19 Vous avez également dit que Momir Bulatovic, le président de la présidence

20 de Monténégro, ainsi que d'autres personnes ont tenu un discours similaire.

21 R. Ce que j'ai dit est tout à fait conforme à la réalité. Toute fois vous

22 changer quelque peu mes propos lorsque vous les citez. Le général Strugar a

23 dit que 30 000 Oustachi se dirigeaient vers Boka, et que nous devrions nous

24 défendre. Il a dit, tout d'abord, que nous étions attaqués. Nous devons

25 nous défendre. Momir Bulatovic a répété la même chose ainsi que d'autres

Page 1210

1 intervenants. Je l'ai dit aussi. J'ai dit que si nous étions attaqués, nous

2 devrions nous défendre. Il n'y a rien qui pourrait prêter à confusion. Cela

3 fait 12 ans que cela s'est produit. A présent, je tente de me remémorer les

4 paroles prononcées à cette occasion-là.

5 Q. Concernant cette information sur les 30 000 Oustachi, vous confirmez

6 donc --

7 M. LE JUGE PARKER : Mme Somers.

8 Mme SOMERS : [interprétation] Il y a eu une citation erronée du compte

9 rendu d'audience. J'ai la version non officielle, page 26, ligne 11 :

10 "C'est la première fois que vous avez entendu parlé des 30 000 Oustachi,"

11 et non pas la première chose que vous avez entendue.

12 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je ne pense pas qu'il s'agisse d'un

13 point d'importance cruciale.

14 Vous pouvez poursuivre, Maître Rodic.

15 M. RODIC : [interprétation] Je vais reformuler ma question.

16 Q. Quand avez-vous entendu pour la première fois parler de l'attaque dont

17 ferait l'objet le Monténégro. Quand avez-vous entendu parler pour la

18 première fois des 30 000 Oustachi ?

19 R. C'est le général Strugar qu'il a dit, ainsi que Jokic. Ils étaient

20 assis l'un face à l'autre. Ils n'ont pas dit que 30 000 Oustachi ont

21 attaqué Monténégro, mais qu'ils se dirigeaient vers le Monténégro.

22 Q. Peu m'importe s'il s'agit de l'attaque ou de ils se dirigent vers. Mais

23 ce qui m'intéresse en revanche, est la chose suivante : Qui a dit cela pour

24 la première fois ? Quand l'avez-vous entendu pour la première fois ?

25 R. C'est Strugar. C'est de la bouche de Strugar que je l'ai entendu la

Page 1211

1 première fois. Mais d'après mais informations, Momir Bulatovic, l'avait

2 déjà dit peut-être avant mon arrivée. Je ne peux pas dire de quoi il était

3 question avant que j'entre dans cette salle. Mais lorsque je suis entré,

4 général Strugar a dit, 30 000 Oustachi se dirigent. Ensuite Bulatovic qui a

5 pris la parole. Ensuite, les autres ministres ont tenu des discours. Je ne

6 me souviens plus qui a pris la parole tout de suite après Bulatovic. Je

7 pense que c'était Knezevic, Abramovic, et cetera, l'un après l'autre. Même

8 Obradovic a pris la parole et il s'est opposé à la guerre. C'était le

9 déroulement de la discussion.

10 Q. Vous avez dit qu'il s'agissait d'une réunion du gouvernement. D'après

11 vous, logiquement, qui prenait la parole dans des pareilles occasions ?

12 R. Il n'y avait pas beaucoup de logique là-dedans.

13 Q. Mais vous étiez membre du gouvernement ?

14 R. Il ne s'agissait pas d'une réunion ordinaire. Lorsque les ministres du

15 gouvernement se réunissaient, la moitié des sièges était vide, mais là tout

16 le monde était là. Il y avait des généraux, des membres du gouvernement,

17 leurs adjoints. Il s'agissait d'une situation extraordinaire qui venait de

18 se produire.

19 Q. Cela ne m'intéresse pas, le caractère de cette réunion ne m'intéresse

20 pas. Compte tenu de la composition de cette assemblée, il s'agissait des

21 ministres. Il peut y avoir également à cette occasion des visiteurs, le

22 président de la présidence, les militaires, et cetera. Logiquement parlant,

23 qui était la personne censée prendre la parole en premier ?

24 R. Le président de la présidence. Le général Strugar aurait pu également

25 prendre la parole, puisque il s'agit d'un début de guerre. Ni l'un ni

Page 1212

1 l'autre présidait cette réunion. Il s'agissait quand même des deux

2 principaux intervenants ce soir là, même s'ils ne présidaient pas la

3 réunion.

4 Q. Bien. C'est le général Strugar qui l'a dit en premier, et c'est Momir

5 Bulatovic qui l'a répété ?

6 R. Il se peut que Momir Bulatovic ait déjà dit avant que je n'arrive. Je

7 ne peux pas vous en parler, mais je ne peux vous dire que ce que j'ai

8 entendu.

9 Q. Vous avez entendu cela de la bouche de Strugar d'abord. Peut-être que

10 Bulatovic l'avait dit auparavant ?

11 R. Oui, puisque la réunion était déjà en cours. Cela fait déjà une demi-

12 heure qu'ils étaient là, avant que je ne vienne.

13 Q. A la page 10 --

14 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je vous prie de patienter, de faire

15 les pauses pour que l'interprétation puisse se faire.

16 M. RODIC : [interprétation] Excusez-moi.

17 Q. A la page 10 de votre déclaration que vous avez faite au représentant

18 du bureau du Procureur, la réunion était présidée par Djukanovic. Bulatovic

19 était présent aussi. Bulatovic a dit que 30 000 Oustachi ont attaqué le

20 Monténégro, et que nous devions nous défendre.

21 Dans votre déclaration, la première personne que vous mentionnez au sujet

22 des 30 000 Oustachi, est Bulatovic. Dans cette déclaration de 34 pages, on

23 voit apparaître à plusieurs reprises les 30 000 Oustachi. Pas une seule

24 fois, dans cette déclaration, on ne voit apparaître aucun lien entre le nom

25 du général Strugar et ce chiffre. Comment expliquez-vous cela ?

Page 1213

1 R. Je ne sais pas ce que vous voulez dire par là. Je vous ai dit que je

2 l'ai entendu pour la première fois de la bouche du général Strugar. Je n'ai

3 jamais dit que ce n'était pas le cas. Ce syntagme de 30 000 Oustachi a été

4 répété par d'autres personnes, c'est un grand nombre, et de nombreuses

5 personnes en parlaient. Vous êtes en train d'évoquer quelque chose qui ne

6 nie pas du tout le fait que le général Strugar l'a prononcé. D'autres

7 ministres aussi ont dit qu'il y avait 30 000 Oustachi. Ils l'ont déjà

8 entendu de la bouche du général Strugar, et de Momir Bulatovic avant mon

9 arrivée à cette réunion. Il n'y a pas de contradiction, absolument pas.

10 C'est la vérité tout simplement. Il est question de 30 000 Oustachi qui se

11 dirigent vers Monténégro. Je leur ai fait confiance. J'ai cru à leur

12 parole. Ce n'est que pendant un moment que je me suis rendu compte que ce

13 n'était pas vrai.

14 Q. Nous avons déjà eu l'occasion de débattre un autre sujet. A la fin,

15 nous avons réussi à nous mettre d'accord. En l'an 2000, lorsque vous avez

16 donné cette déclaration aux enquêteurs du bureau du Procureur, vous leur

17 avez décrit ce que vous avez vu lorsque vous êtes entré. Vous dites :

18 "Bulatovic a parlé de 30 000 Oustachi qui étaient sur le point d'attaquer

19 Monténégro. Nous devions nous défendre." Il n'y est nullement, à aucun

20 endroit, du général Strugar. Vous n'avez même pas dit que il avait répété

21 que 30 000 Oustachi étaient sur le point d'attaquer. Vous n'avez surtout

22 pas affirmé que c'était la première personne qui a parlé des 30 000

23 Oustachi.

24 R. Je ne vois pas où est vraiment la différence. Je vous répète, le

25 général Strugar qui a mentionné ces 30 000 Oustachi, ainsi que Bulatovic.

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1 C'était un élément-clé, là-dedans pour nous tous, professionnel. Il

2 jouissait d'une bonne réputation. Même si Bulatovic l'a dit le premier, il

3 a dû l'entendre de Strugar. Bulatovic et Djukanovic en ont parlé aussi.

4 Quelle que soit la situation, cette information provenait certainement d'un

5 militaire de métier.

6 Je ne pense pas que c'était nécessaire de le dire dans ma déclaration. Je

7 ne pense pas que qui que ce soit aurait pu mentionner les 30 000 Oustachi,

8 si le général Strugar n'était pas là à la réunion. C'était son rôle à la

9 réunion.

10 Q. Pourquoi vous ne l'avez pas dit ce que vous venez de me dire aux

11 enquêteurs, en 2000 ?

12 R. Comment cela. Les enquêteurs, vous dites que le premier enquêteur et le

13 deuxième ont parlé en même temps. Ils n'avaient pas besoin d'en reparler à

14 ce moment-là. Le général Strugar et les autres généraux qui étaient

15 présents à cette réunion, étaient en train de nous dire qu'une armée

16 étrangère était sur le point d'attaquer le Monténégro.

17 Q. Bien. Nous avons déjà entendu cela ?

18 R. Il n'y a rien à ajouter.

19 Q. Pourquoi vous ne l'avez pas dit aux enquêteurs, en l'an 2000 ?

20 R. Comment cela, je ne l'ai pas dit ? Bien sûr, que je l'ai dit. Peut-être

21 pas de la même manière. J'ai dit aux enquêteurs ce dont je me souvenais à

22 l'époque. J'étais sous le choc. J'étais persuadé, c'était ma profonde

23 conviction que l'armée n'attaquerait jamais Dubrovnik, en dépit de tout ce

24 qu'on entendait sur les Croates. C'était ma conviction profonde que la JNA

25 n'attaquerais jamais Dubrovnik, une ville pacifique.

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1 Q. Ce n'était pas ma question.

2 R. Vous me posez des questions pourtant sur ce qui s'est produit ce soir-

3 là. J'ai été profondément choqué par ce qui s'est passé.

4 M. RODIC : [interprétation] Je vous prie de rappeler au témoin qu'il doit

5 répondre brièvement à mes questions.

6 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je pense que le temps est venu pour

7 lever l'audience.

8 M. RODIC : [interprétation] Excusez-moi.

9 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je crois que nous pouvons apprécier ce

10 que vous voulez dire. Pour ce qui est des mesures de protection concernant

11 le témoin, vous avez des choses à nous dire, M. Petrovic, le témoin que

12 nous allons entendre ?

13 M. PETROVIC : [interprétation] Pour ce qui est de M. Samardzic, il peut

14 rester ici, mais je souhaiterais que l'on passe en audience à huis clos

15 partiel. Je serai très bref.

16 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Oui, nous sommes à huis clos partiel.

17 [Audience à huis clos partiel]

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1 --- L'audience est levée à 13 heures 54 et reprendra le lundi 26 janvier

2 2004, à 9 heures 00.

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