Tribunal Pénal International pour l'ex Yougoslavie

Page 5578

1 Le mercredi 28 avril 2004

2 [Audience sur requêtes]

3 [Audience publique]

4 [L'accusé est introduit dans le prétoire]

5 --- L'audience est ouverte à 10 heures 05.

6 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Bonjour, je vous souhaite la

7 bienvenue, Monsieur l'Ambassadeur, à vous et à votre secrétaire. Nous vous

8 savons gré de votre obligeance à venir participer à cette audience. Nous

9 avons reçu de l'ambassade une note contenant les vues de votre gouvernement

10 et nous voudrions vous inviter, si vous souhaitez le faire, à présenter des

11 observations complémentaires, si vous le souhaitez, concernant la matière

12 dont nous sommes saisis.

13 M. KRNIC : [interprétation] Monsieur le Président, Madame, Monsieur les

14 Juges, je vous remercie de vos aimables paroles. Comme vous l'avez dit, le

15 gouvernement croate a fait connaître sa position par écrit à la Chambre et,

16 pour ma part, je n'ai rien de nouveau à ajouter à cela si ce n'est pour

17 exprimer mon intention de réaffirmer très brièvement la position de notre

18 gouvernement, point par point.

19 A notre avis, jusqu'à ce jour, la requête de la Défense n'a pas été

20 accueillie et il n'a pas été fait droit à cause d'omissions à caractère

21 procédural. La Défense n'a pas présenté une procuration en bonne et due

22 forme, comme ceci est expliqué au paragraphe 2 de la lettre de notre

23 gouvernement adressée au Tribunal.

24 En plus, la requête de la Défense n'était pas suffisamment précise comme on

25 l'explique au paragraphe 3.

Page 5579

1 En outre, comme il est dit au paragraphe 4 de ladite note, les documents

2 demandés, et là je parle de cette documentation en terme général, parce que

3 nous ne savons pas de quels documents on veut parler, de façon plus

4 précise, mais ces documents, du point de vue de leur catégorie, sont encore

5 des documents classés, classifiés, centralisés à différents niveaux de

6 confidentialité et il n'a pas été envisagé de pouvoir les communiquer à des

7 personnes non habiletés ou à des ressortissants étrangers.

8 D'autre part, comme il est dit également aux paragraphes 5 et 6 de la note,

9 la République de Croatie, conformément à sa politique de pleine coopération

10 avec le Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie, est disposée et

11 prête à mettre à la disposition du Tribunal tous les documents nécessaires,

12 pourvu qu'il soit bien entendu et précisé de quels documents il s'agit et

13 que ces documents seront mis à la disposition des représentants de la

14 Défense et ils seront mis à sa disposition, au ministère de la Justice de

15 Croatie à partir du 3 mai prochain.

16 A notre avis, la Défense aurait dû être prête pour la possibilité que la

17 partie croate demanderait et aurait besoin, conformément aux dispositions

18 des Articles 54 et 54 bis du Règlement, la lettre F et G de l'Article 54

19 bis du Règlement, le fait de satisfaire à certaines conditions qui sont

20 envisagées par ces dispositions.

21 Puisqu'une partie de cette documentation a déjà été mise à la disposition

22 du bureau du Procureur, la partie croate ne lève pas d'objection à ce que

23 ces documents soient communiqués à la Défense avec l'approbation des

24 membres de la Chambre.

25 C'est tout ce que la partie croate est en mesure de faire ou de dire à ce

Page 5580

1 stade en ce qui concerne ce procès. Je vous remercie.

2 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur

3 l'Ambassadeur. Nous comprenons que nous pouvons compter sur la pleine

4 coopération et la pleine assistance de votre gouvernement à partir du 3 mai

5 et que ces fonctionnaires et institutions pourront coopérer en ce sens.

6 M. KRNIC : [interprétation] C'est absolument exact avec la mise en

7 garde, bien entendu, que nous nous attendons à ce que la Défense précise

8 quels sont les documents, soit sur votre indication, soit à leur propre

9 initiative dans toute la mesure où ils seraient en mesure de le faire.

10 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Vous comprenez bien, Monsieur

11 l'Ambassadeur, que la nature des documents visés a, d'une façon générale,

12 été précisée dans la requête présentée, la demande présentée par la

13 Défense. Je suppose que ce qui devra maintenant intervenir serait un

14 processus de prise en considération et d'inspection par le représentant de

15 la Défense afin qu'il puisse examiner ces documents et voir quels sont ceux

16 qui sont de nature à être fournis sous la responsabilité des institutions

17 de votre gouvernement et qu'à ce moment-là, il sera possible à la Défense

18 d'identifier quels sont les documents précis qu'ils souhaiteraient

19 présenter devant la Chambre.

20 Bien entendu, je ne parle que des documents qui ne sont pas déjà en

21 possession du bureau du Procureur car ceux-là seront mis à la disposition

22 de la Défense, conformément aux règles de procédure du Tribunal. Il semble

23 bien que d'autres documents encore sont en la possession de votre

24 gouvernement, ce que croit la Défense, documents qui pourraient avoir

25 certaines pertinences pour la présentation de ses moyens de défense et

Page 5581

1 qu'ils souhaiteraient pouvoir examiner afin de déterminer quels sont ceux

2 qui seraient pertinents et qu'ils souhaiteraient présenter devant la

3 Chambre.

4 Il est possible qu'il y ait des documents qui, dans le cadre de la

5 description qui est faite pour ceux qui ont été identifiés par la Défense

6 et que votre gouvernement pense qu'ils ne devraient pas être mis à sa

7 disposition. Si une telle situation devait se présenter, comme vous le

8 savez, en vertu du Règlement un Juge du Tribunal pourrait à ce moment-là

9 examiner les documents en question et une décision pourrait être alors

10 prise sur le point de savoir s'ils sont d'une importance suffisante en

11 l'espèce pour que leur production soit demandée par le Tribunal.

12 Ceci, évidemment, c'est uniquement une possibilité à l'avenir et ce que je

13 voudrais demander maintenant au conseil de la Défense, c'est de voir s'il y

14 voit une difficulté particulière dans la procédure qui est suivie,

15 notamment pour ce qui est de faire le nécessaire pour que ces documents

16 puissent être examinés, et cetera, comme nous venons de le dire.

17 Maître Petrovic.

18 M. PETROVIC : [interprétation] Monsieur le Président, j'aimerais saisir

19 l'occasion qui m'est donnée pour saluer l'organisation de cette audience

20 qui nous permet de discuter de cette question. Je tiens également à

21 remercier M. l'ambassadeur pour le fait qu'il a accepté de comparaître

22 devant ce Tribunal pour discuter de cette question.

23 S'agissant de la question précise, Monsieur le Président, sur le principe,

24 nous tenons à dire la chose suivante : nous avons le sentiment qu'il

25 convient de procéder à divers arrangements pratiques de façon à réaliser ce

Page 5582

1 que vous venez de décrire, Monsieur le Président. Qu'en est-il exactement ?

2 Au paragraphe 6 -- ou plutôt paragraphe 5 de la réponse du gouvernement

3 croate à la requête de la Défense, il est dit, d'une façon assez précise,

4 que des pièces seront mises à la disposition de ceux qui, du côté des

5 conseils de la Défense, pourraient vouloir examiner les documents détenus

6 au ministère de la Justice croate. La question qui demeure est celle de

7 savoir de quelle façon les choses se passeront. Est-ce que des numéros de

8 référence dans les archives seront fournis à la Défense uniquement ? Est-ce

9 qu'il s'agira d'une liste de titres ou est-ce que les documents en tant que

10 tels seront mis à la disposition de la Défense ?

11 Monsieur le Président et Monsieur le Représentant du gouvernement croate,

12 j'aimerais à tous deux vous demander --

13 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Maître Petrovic, je vois, au texte du

14 paragraphe 5, la note du gouvernement croate. Ce qui est proposé de la part

15 du gouvernement croate, c'est, premièrement, d'autoriser les représentants

16 de la Défense d'examiner des documents. Il ne s'agit pas uniquement d'une

17 liste. Si je comprends bien, la position du gouvernement croate, celle-ci

18 consiste à dire que des documents seront, effectivement, mis à votre

19 disposition pour que vous puissiez les lire, à moins qu'il ne s'agisse pas

20 de représentants des conseils de la Défense. Je vois que son Excellence

21 opine du chef pour démontrer qu'il est d'accord avec mes dires.

22 M. PETROVIC : [interprétation] Monsieur le Président, s'il en est ainsi,

23 nous pourrons nous exprimer dès que l'occasion nous en sera donnée, c'est-

24 à-dire, à la fin de la présentation des éléments de preuve de l'Accusation.

25 Dès ce moment-là, nous prendrons contact avec les responsables du

Page 5583

1 gouvernement croate et nous nous rendrons en Croatie, plus précisément à

2 Zagreb, pour voir ce qu'il en est des documents qui nous intéressent.

3 S'agissant de toutes les procédures qu'il conviendra de mettre en place,

4 nous prendrons la liberté de nous adresser à vous, Monsieur le Président,

5 ainsi qu'aux représentants du gouvernement croate pour vous faire part des

6 besoins éventuels que nous pourrions avoir.

7 Par ailleurs, il y a un problème lié, au paragraphe 6 de la réponse du

8 gouvernement croate. Malheureusement, nous ne sommes pas en mesure de

9 savoir précisément quels sont les documents qui ont déjà été remis au

10 bureau du Procureur de ce Tribunal. Nous ne pouvons pas nous exprimer avec

11 une précision totale. Si nous étions au courant des documents qui ont été

12 remis, nous pourrions nous prononcer de façon plus précise. La Défense,

13 dans ces conditions, ne peut dire qu'une chose, à savoir que certains

14 documents ont été communiqués, de façon très ponctuelle, à la Défense, mais

15 savoir si tout ce qui nous intéresse compte au nombre de ces documents,

16 nous ne sommes pas en mesure de le dire aujourd'hui devant vous. Nous

17 aimerions beaucoup obtenir un éclaircissement ou des explications de la

18 part du Procureur à ce sujet, ainsi que de la part de l'éminent

19 représentant de la République de Croatie. Merci.

20 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci, Maître Petrovic.

21 Mme Somers ou Monsieur Re ?

22 Mme SOMERS : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

23 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Madame Somers, pourriez-vous nous dire

24 quelle est exactement la situation, eu égard à ces documents que

25 l'Accusation a reçus du gouvernement croate ?

Page 5584

1 Mme SOMERS : [interprétation] Nous ne savons pas exactement de quels

2 documents il est question, Monsieur le Président. Nous aimerions que nous

3 soit indiquée la catégorie à laquelle appartiennent ces documents. En tout

4 cas, une recherche a été effectuée et nous pouvons indiquer que tous les

5 documents relatifs au MUP, de façon générale, dans le cas où ils relèvent

6 de l'Article 68 du Règlement, et en l'absence de toutes dispositions liées

7 à l'obligation de communication réciproque, ont été examinés et fournis à

8 la Défense au cas où ils ont été retrouvés.

9 Mais l'Accusation, comme vous le savez, Monsieur le Président, reçoit

10 de très nombreux documents dont un grand nombre ne tombent pas

11 nécessairement sous le coup de l'obligation de communication au titre du

12 Règlement à moins qu'ils appartiennent à une catégorie stipulée

13 précisément. Lorsqu'il y a obligation, elle relève de l'Article 68 du

14 Règlement. Nous aimerions que le représentant de la République de Croatie

15 nous confirme que nous parlons bien des mêmes documents, le cas échéant, et

16 nous confirme qu'il s'agit bien des documents dont je parle. Ces recherches

17 effectuées nous ont permis de constater que le plus grand nombre des

18 documents mentionnés correspond à la description que je viens d'en faire à

19 moins que cette description ne soit pas complète.

20 En tout cas, nous aimerions savoir de la part du représentant du

21 gouvernement croate s'il pourrait nous apporter des explications

22 complémentaires à ce sujet.

23 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je vous remercie beaucoup, Madame

24 Somers. Je pense que, manifestement, vous venez d'inviter le représentant

25 du bureau du Procureur à discuter avec M. l'Ambassadeur ou avec son

Page 5585

1 représentant, afin de tirer au clair les documents dont le gouvernement

2 croate estime qu'ils ont déjà été mis à votre disposition. Il serait bon

3 également de vérifier si ces documents ont bien été mis à la disposition de

4 la Défense et le cas échéant, si cela n'a pas été fait, il serait bon de le

5 faire dans les trois semaines à venir.

6 Mme SOMERS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Je parle

7 simplement des documents qui relèvent de l'Article 68 du Règlement en

8 l'absence d'interventions des obligations liées à la communication

9 réciproque.

10 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Oui. S'il y a d'autres documents dont

11 vous pensez qu'ils ne relèvent pas de l'Article 68, il serait bon de le

12 faire savoir à la Défense et aux Juges de façon à ce que la Défense sache

13 que le gouvernement croate vous a fourni certains documents que vous n'êtes

14 pas, pour le moment, dans l'obligation de lui communiquer. De cette façon,

15 le processus pourra se poursuivre comme il a commencé. En tout cas, le

16 gouvernement croate saura que ces documents vous ont bel et bien été

17 transmis et, même si lui estime qu'ils ont une pertinence, par rapport à la

18 requête de la Défense, il appartiendra de déterminer, par la suite, s'ils

19 ont, oui ou non, été communiqués à la Défense, ou s'il faut que le Tribunal

20 intervienne pour les identifier, de façon plus précise. Ensuite, le

21 gouvernement de Croatie aura à traiter le reste des documents concernés par

22 la requête de la Défense.

23 Comme vous venez de l'entendre, Monsieur l'Ambassadeur, au cours des

24 trois semaines à venir, l'Accusation parviendra à la fin de la présentation

25 de ces éléments de preuve et, à ce moment-là, et non le 3 mai, je pense que

Page 5586

1 les représentants de la Défense pourront envisager une visite à Zagreb en

2 vue d'examiner les propositions de votre gouvernement. Dans trois semaines,

3 en tout cas, votre secrétaire aura sans doute eu des discussions avec les

4 représentants de la Défense et les premières dispositions auront été prises

5 pour organiser le voyage à Zagreb et l'examen de ces documents, car je suis

6 sûr que la Défense souhaitera une interruption des audiences après la fin

7 de la présentation des éléments de preuve de l'Accusation.

8 Est-ce que vous pensez que cela vous convient ou y a-t-il autre chose à

9 faire en la matière ?

10 M. KRNIC : [interprétation] Monsieur le Président, nous voyons les

11 choses d'une façon tout à fait identique à la vôtre. J'aimerais simplement

12 ajouter quelques mots au sujet d'un détail particulier.

13 Le paragraphe 6 de notre note a été rédigé avec en-tête par un souci

14 d'économie, si je puis m'exprimer ainsi. Nous souhaitions que la mise à

15 disposition des documents s'accélère. Le gouvernement croate, qui tient à

16 coopérer avec le Tribunal et dans les rapports entre la Défense et

17 l'Accusation, avait ce souci à l'esprit. Ce qui demeure, c'est l'engagement

18 pris par le gouvernement croate de permettre tout examen nécessaire des

19 documents pertinents. Cela étant dit, il s'agit d'un processus. La Défense

20 aura accès aux archives et aux documents, et elle verra si elle y trouve

21 les documents qui l'intéressent ou pas, et elle pourra, ensuite, indiquer

22 quels sont les documents qui sont pertinents à ses yeux. Elle n'aura, en

23 tout état de cause, aucun problème.

24 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci. Du point de vue du Tribunal et

25 de cette Chambre plus précisément, nous ne devrions pas nous trouver dans

Page 5587

1 la situation d'avoir à imposer une production dupliquée des documents. Si

2 vous avez déjà transmis un certain nombre de documents à l'Accusation, dès

3 lors que l'Accusation les aura identifiés, le Tribunal pourra se pencher

4 sur ces documents. Votre gouvernement ne devrait plus s'inquiéter

5 exagérément des documents évoqués au paragraphe 6 de la note. Ils ont déjà

6 été transmis et toutes les dispositions administratives, que nous avons

7 mises en place, permettront - en tout cas, nous l'espérons - à la Défense

8 de pouvoir examiner, dans les délais les plus brefs, d'autres documents

9 émanant de votre gouvernement qui correspondent à la description faite dans

10 la requête de la Défense.

11 Ceci est, en fait, je pense, que nous pouvons conclure cette audience. Nous

12 attendons avec impatience que tous les problèmes en suspens soient réglés

13 avec la coopération de toutes les parties. Si des difficultés surgissent,

14 bien entendu, elles peuvent nous être présentées en temps opportun.

15 Je vous remercie, encore une fois, Monsieur l'Ambassadeur et Monsieur

16 le Secrétaire, d'avoir participé à l'audience de ce matin. Nous attendons,

17 avec impatience, la suite de l'assistance que vous fournissez au Tribunal

18 et de la coopération dont vous faites preuve en la matière sur le plan

19 gouvernemental.

20 Nous suspendons l'audience. Nous reprendrons dans quelques minutes à 11

21 heures précises car nous avons encore un point à discuter avant la

22 suspension définitive. Merci.

23 --- L'audience sur requêtes est suspendue à 10 heures 28.

24

25