Tribunal Pénal International pour l'ex Yougoslavie

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1 Le lundi 28 juin 2004

2 [Audience publique]

3 [L'accusé est introduit dans le prétoire]

4 --- L'audience est ouverte à 14 heures 21.

5 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Bonjour. Cet après-midi commence la

6 présentation des moyens de preuve de la Défense. Ceci a été dit le

7 vendredi. On nous a dit que la Défense allait prononcer son discours

8 préalable. Est-ce que ce discours va être prononcé par M. Rodic ou M.

9 Petrovic ?

10 M. RODIC : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Madame et

11 Monsieur les Juges. Bonjour, à tous mes confrères du bureau du Procureur et

12 à toutes les personnes présentes dans ce prétoire. La Défense va commencer

13 sa présentation des moyens de preuve aujourd'hui et, au nom des conseils de

14 la Défense, je vais prononcer ce discours liminaire.

15 Par le biais de l'acte d'accusation émis par le Procureur du Tribunal pénal

16 international, le général Pavle Strugar est accusé des violations des lois

17 ou coutumes de la guerre, ceci à travers six charges figurant dans l'acte

18 d'accusation. Pendant cinq mois, le Procureur a présenté ses moyens de

19 preuve, s'efforçant de prouver, en ce qui concerne ces évènements qui se

20 sont produits à Dubrovnik et autour de Dubrovnik en automne 1991, qu'une

21 seule personne était responsable, à savoir, le général Pavle Strugar.

22 Le Procureur du Tribunal pénal international s'est efforcé d'isoler les

23 évènements qui sont au cœur de l'affaire et qui nous préoccupe, de les

24 isoler du contexte historique, social et militaire qui prévalait à

25 l'époque.

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1 Le Procureur a tenté de nous montrer ces éléments en dehors du cadre

2 temporel et spatial quant il s'agissait de détruire un pays par le biais

3 d'une insurrection armée dans les Républiques de Croatie et de Slovénie. Au

4 cours des années 1991 et 1992, ce qui représente la culmination d'un

5 rapport destructif vis-à-vis de cette communauté étatique qui réunissait

6 les peuples yougoslaves au cours du 20e siècle.

7 Il n'est possible de décrire le contexte des évènements dès l'année 1991

8 qu'en tenant compte de l'histoire de l'État yougoslave, à partir de sa

9 création en 1918. Il convient, aussi, de décrire les évènements qui se sont

10 produits au cours de la Deuxième guerre mondiale, la période communiste et,

11 pour terminer, il s'agit de décrire aussi cette sécession illégale, qui est

12 parfaitement contraire à la constitution de la République socialiste

13 fédérale d'Yougoslavie. L'État yougoslave a été créé après la Première

14 guerre mondiale, en 1918. Pour créer cet État, deux États, jusqu'alors

15 indépendants, se sont unis, à savoir, la Serbie et le Monténégro, ainsi que

16 les territoires de l'ex-monarchie austro-hongroise habités par le peuple

17 des slaves du sud : les Serbes, les Croates et les Slovènes.

18 Il s'agissait-là d'un État unitaire, basé sur une thèse étatique d'un seul

19 peuple, consistant en trois entités : les entités serbes, croates et

20 slovènes. Cet État était divisé en banovina, qui ne représentait pas une

21 division territoriale sur le principe ethnique, mais, au contraire, un

22 partage selon les principes administratifs et juridiques.

23 Le royaume des Serbes, des Croates et des Slovènes, plus tard, le royaume

24 yougoslave, depuis son début, souffrait des nombreux antagonismes. Ces

25 antagonismes provenaient des programmes différents adoptés par différents

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1 peuples yougoslaves, qui étaient parfaitement contraires. L'élite politique

2 croate voyait l'État yougoslave comme une période temporaire pour aboutir à

3 sa propre autonomie étatique et nationale.

4 La première tentative de créer un État croate indépendant, date de 1941,

5 sous la protection des Allemands, par la création de l'État indépendant

6 croate des Oustachi. Avec la victoire des alliés dans la Deuxième guerre

7 mondiale, à nouveau, un État yougoslave a été créé sur la base fédérale

8 composée de six républiques. Le pouvoir des communistes, qui commence en

9 1945, a, fortement, anéanti les zones nationales, les mythes et les

10 stéréotypes. Les concepts de fraternité et d'unité leur offraient une

11 formule universelle pour résoudre les problèmes de la question nationale

12 dans l'Yougoslavie socialiste; cependant, justement cette question

13 nationale non résolue est au cœur même de la dissolution du deuxième État

14 yougoslave. Le séparatisme croate sous-jacent, qui existe dans toutes ces

15 formes pendant toute l'existence de l'État yougoslave, a culminé par une

16 sécession illégale, contraire à la constitution de la RSFY.

17 Avec l'arrivée au pouvoir du HDZ au printemps 1990 est réalisée la dernière

18 étape permettant la destruction de la RSFY. En se préparant pour se séparer

19 de l'Yougoslavie, le HDZ de Tudjman a évalué que, pour réaliser un tel but,

20 il était indispensable de rentrer en conflit avec la JNA. C'est pour cela

21 qu'immédiatement après la prise du pouvoir du HDZ, le HDZ a commencé à

22 réaliser ses buts, tout d'abord en renforçant ses forces de police.

23 Ensuite, en créant des formations paramilitaires dépendantes du parti

24 politique, il s'agissait là du ZNG, la Garde nationale qui était au cœur de

25 la future armée croate. Il s'agissait, aussi, d'affaiblir le plus possible

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1 les troupes de la JNA qui se trouvaient sur le territoire de la Croatie.

2 Par la décision de Franjo Tudjman qui était le président de la République

3 croate et aussi le président du parti politique le plus puissant croate, la

4 Garde nationale croate ZNG a été proclamée, officiellement, en tant que

5 formation militaire croate lors du passage en revue des forces armées

6 croates, le 28 mai 1991. A ce moment-là, la Croatie dispose de 60 000

7 soldats et recrus et de

8 30 000 policiers. Evidemment, ces chiffres illustrent bien qu'elle était le

9 niveau de préparation de l'État de Croatie pour la sécession armée car, en

10 temps de paix, la Garde nationale croate n'est pas une formation légale. Le

11 ministère des Affaires intérieures disposait de bien moins de policiers

12 avant cette période-là, des chiffres qui ne correspondaient absolument pas

13 à ce chiffre de 30 000 policiers en 1990.

14 Cependant, avant cela, au cours du mois de novembre 1990, la présidence de

15 la RSFY a été informée de l'importation des armes et de l'équipement

16 militaire emmenés en grande quantité depuis la Hongrie pour armer les

17 unités paramilitaires de la République de Croatie. A cause de cela, le 9

18 janvier 1991, la présidence de la RSFY a décidé de désarmer toutes les

19 formations militaires qui ne faisaient pas partie des forces armées uniques

20 de la RSFY ou qui ne dépendaient pas des organes du ministère de

21 l'Intérieur et qui n'ont pas été créées en respectant les lois fédérales.

22 Cet ordre devait être réalisé en l'espace de dix jours; cependant, les

23 dirigeants croates, après avoir demandé des délais supplémentaires, à

24 savoir, 48 heures de plus, le 21 janvier 1991, ont augmenté l'aptitude aux

25 combats des tous les soldats du MUP et du ZNG. Vu la réponse des autorités

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1 de la République de Croatie, le fait est que les trois ordres qui ont suivi

2 émanant de la présidence de la RSFY, il n'y a pas eu de désarmement des

3 forces paramilitaires.

4 D'un autre côté, le monde entier a pu voir l'image où le soldat s'est

5 étranglé dans un transporteur des troupes, le 6 mai 1991, au moment où le

6 commandement de secteur maritime naval district a été bloqué. Un autre

7 soldat a été tué à l'époque, Sasa Gesovski. A l'époque, jusqu'au 25 juillet

8 1991, il y a eu 126 cas d'actions de force et de délits contre des

9 personnes, des bâtiments et des biens de la JNA. Six membres de la JNA se

10 sont fait tuer et 87 ont été blessés.

11 Après cela, le blocus des casernes sur tous les territoires de la

12 République de Croatie s'est est suivi, l'eau a été coupé, les lignes

13 téléphoniques ont été coupées, il n'y avait plus d'approvisionnement en

14 nourriture et, à l'aide des forces paramilitaires, toutes les entrées et

15 toutes les sorties des casernes ont été bloquées. Aussi, pendant un cessez-

16 le-feu parmi tant d'autres, car il y en a eu beaucoup qui ont été signés

17 pendant cette période-là, entre le 2 et le 11 septembre 1991, 115 attaques

18 armées ont été réalisées au cours desquelles 11 soldats de la JNA se sont

19 fait tuer et 40 soldats ont été blessés.

20 Dans ces conditions-là, après que de nombreux cessez-le-feu ont été

21 violés et que le côté croate avait, systématiquement, refusé de remplir ses

22 obligations ou de démobiliser ses forces paramilitaires, d'ailleurs, la

23 communauté internationale était le témoin pendant cette période-là. Le

24 quartier général principal de la JNA a décidé d'exercer des pressions sur

25 la république de Croatie pour lever le blocus des garnisons et des casernes

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1 dans lesquels se trouvaient les troupes de la JNA sur le territoire de

2 cette république.

3 Les dirigeants militaires devaient à la va-vite créer et former du conduit

4 opérationnel des forces armées qui devaient mener des opérations contre ces

5 formations paramilitaires. Ces dirigeants devaient aussi créer une

6 composante militaro-territoriale qui devait contrôler les arrières des

7 lignes de front. Aussi s'agissait-il d'assurer un sens de vie tout au

8 moins, sur ce territoire qui à l'époque était habité par une population

9 hostile, bien sur un territoire vidé par sa population qui s'est enfuie à

10 cause de la peur des opérations de guerre.

11 Parmi de telles formations provisoires se trouvait également le deuxième

12 groupe opérationnel créé vers la fin septembre 1991, dirigé par son

13 commandant à l'époque, le général Jevrem Cokic. De nombreux problèmes ont

14 accompagné la création de ce groupe militaire provisoire. Nous avons

15 d'ailleurs eu l'occasion d'entendre par le biais de la présentation des

16 moyens de preuve de l'Accusation que pendant la période qui nous concerne,

17 le 2e Groupe opérationnel a été dirigé par trois commandants; d'abord, le

18 général Jevrem Cokic qui était blessé; suite à cela, c'est le général

19 Ruzinovski qui a pris sa place; ensuite, pendant la nuit du 13 au 14

20 octobre, c'est le général Pavle Strugar qui prend la place du commandant du

21 2e Groupe opérationnel.

22 La pression du 2e Groupe opérationnel n'impliquait pas d'abord la création

23 du commandement qui devrait être ensuite placé au poste dont il serait

24 possible d'effectuer les activités de commandement, de renseignements, et

25 de la prise de connaissance de la zone de responsabilité pour pouvoir

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1 seulement ensuite déployer, d'abord faire venir et déployer les unités, ce

2 qui aurait été conforme aux règles militaires. Ce qui s'est passé ?

3 Justement l'inverse. Il s'agissait soit des unités qui étaient déjà dans

4 cette zone de responsabilité, soit dirigé vers cette zone, il était prévu

5 qu'elles y fassent leur apparition seulement suite à la mobilisation et à

6 la marche.

7 Le commandement du 2e Groupe opérationnel est arrivé seulement suite à

8 l'ordre donné par le quartier général principal. C'est seulement celui-ci

9 qui lui a fait comprendre, tout d'un coup, que certaines unités devaient

10 faire partie de sa zone de responsabilité. Tous les ordres émanant de la

11 direction personnelle du quartier général principal régulant la nomination

12 des officiers aux postes de commandement du 2e Groupe opérationnel

13 contenaient une clause indiquant qu'il s'agissait-là des nominations

14 provisoires et non pas prévues pour un temps indéfini. Il ne fait aucun

15 doute que le

16 2e Groupe opérationnel était une formation complètement nouvelle et

17 provisoire, autrement dit, une formation provisoire des forces armées de la

18 RSFY. On fait partie de cette formation, à l'époque, le 37e Corps dont le

19 siège était à Uzice qui appartenait, par ailleurs, à la 1ère Région

20 militaire. Ensuite, membre du 2e Corps d'armée dont le siège est à

21 Titograd, qui s'appelle aujourd'hui Podgorica, qui dépendait de la 3e

22 Région militaire dont le siège était en Slovénie. Ensuite, le 9e Secteur

23 militaire maritime dont le siège était à Kumbor et qui faisait partie de la

24 région militaire du Secteur militaire naval. Ensuite, les membres du 4e

25 Corps d'armée dont le siège était à Sarajevo et qui appartenait au 1er

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1 Secteur militaire.

2 Nous pouvons remarquer immédiatement que seules les forces du 9e Secteur

3 naval fonctionnaient dans leurs zones de responsabilités initiales, alors

4 que toutes les autres unités ont été amenées d'autres zones auxquelles

5 elles avaient été initialement affectées et ont été déployées dans des

6 zones de responsabilités qui leur étaient complètement étrangères et

7 inconnues. Lorsque l'on parle de la zone de responsabilité du 2e Groupe

8 opérationnel, il faut savoir qu'il s'agit là d'une grande région. C'est

9 allant de l'Herzégovine de l'est jusqu'à la frontière entre la Bosnie-

10 Herzégovine et Serbie, et puis, la Bosnie-Herzégovine et le Monténégro.

11 Cette frontière-là était également couverte par cette zone de

12 responsabilités. Au nord et au nord-ouest, les zones des responsabilités du

13 2e Groupe opérationnel allait jusqu'à la vallée de la rivière de Neretva,

14 alors qu'à l'ouest, elle s'étirait jusqu'à l'Adriatique, y compris la

15 région le long de la mer et les îles dans la région vaste de Dubrovnik et

16 la presqu'île de Peljesac.

17 Lorsque l'on parle de la composition du 2e Groupe opérationnel, il est

18 important de noter que la mobilisation a eu lieu sous l'appellation

19 d'exercices militaires puisque les dirigeants d'États de l'époque n'avaient

20 pas proclamé l'état de guerre. Dans un tel cas de figure, la mobilisation

21 des unités se résumait pratiquement au principe de volontariat, car, sans

22 état de guerre, il n'était pas possible d'appliquer les règles juridiques

23 sévères prévues pour des situations où quelqu'un refuse de répondre à

24 l'appel aux armes.

25 Le niveau de convergence collective de coopération et de solidarité entre

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1 les commandants et les combattants, ensuite, entre les commandants

2 mutuellement, et entre les commandements et les unités, était presque non

3 existant, avec tout ce que cela implique de négatif lorsqu'il s'agit de

4 l'aptitude au combat général des unités, et des formations.

5 Comme je l'ai déjà dit, il s'agissait-là des unités, des commandements

6 créant à la hâte, sans entraînement, et qui n'avaient jamais reçu un

7 entraînement pour faire face aux missions dont ils devaient s'acquitter, et

8 pour agir dans les régions dans lesquelles ces actions là allaient se

9 dérouler.

10 Les commandants, qui avaient reçu pour tâche de travailler au sein du

11 commandement du 2e Groupe opérationnel, jamais, jusqu'à ce moment-là,

12 n'avaient effectué ce genre de mission. Il s'agissait-là des officiers

13 émanant de l'inspection générale de la Défense nationale de Belgrade,

14 ensuite, des centres d'entraînement militaire de haut niveau à Belgrade et

15 des écoles militaires à Belgrade, de même que les écoles des officiers de

16 réserve de Bileca. Tout ceci se déroulait seulement une dizaine de jours

17 avant le début des opérations de combat.

18 Tout ceci a créé un gros problème pour permettre dans un laps de temps

19 extrêmement bref de convertir ces personnes qui avaient l'habitude

20 d'enseigner ou de travailler en tant qu'inspecteurs afin qu'ils puissent

21 s'acquitter des tâches de commandement, et des tâches opérationnelles sans

22 un seul jour de préparation psychologique et spécialiser et de cours de

23 conversion. Une situation aussi instable et le manque total de connaissance

24 de la nouvelle situation de la part du commandement nouvellement créé du 2e

25 Groupe opérationnel, provoquait de changement fréquent au sein de

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1 l'organisation interne de la formation, et les réaffectations quasiment

2 quotidiennes de nouvelles unités et formations, de même que le fait de

3 retirer d'autres formations et unités.

4 Tout ceci a eu pour résultat que certaines parties du 2e Groupe

5 opérationnel ne se sont pratiquement acquittées de leur tâche s'agissant

6 d'aucune phase de leur opération dans une même composition.

7 Pour ce qui est du rôle et des missions du 2e Groupe opérationnel, il est

8 important de les placer dans le contexte de la situation dans la vallée de

9 la Neretva, et dans la région basse de Dubrovnik, et de l'importance de ces

10 régions pour la défense et la préservation de l'état commun à l'époque, ce

11 qui était considéré à l'époque du point de vue des dirigeants politiques et

12 militaires de l'Yougoslavie comme un but qui était encore possible et tout

13 à fait réalisable.

14 La région de Dubrovnik, ville qui couvre avec ses alentours les régions des

15 deux côtés de l'autoroute de l'Adriatique, était placée à un endroit

16 central; à la frontière triple du Monténégro, de la Bosnie-Herzégovine, qui

17 à l'époque faisait encore partie de la RSFY d'un côté, et de la République

18 de Croatie, qui était déjà sur le chemin de la sécession en 1991. Le fait

19 de contrôler cette région était d'une importance géostratégique vitale pour

20 une autre raison d'ailleurs. Cette région-là, avec son secteur maritime,

21 était un axe important par le biais duquel, par voie terrestre et maritime,

22 il était possible de retirer et reloquer les forces et les ressources du

23 Secteur naval militaire, et surtout des unités et des moyens de la marine

24 de guerre dans le seul port et base maritime de l'Adriatique qui était

25 suffisamment sûr à l'époque, à savoir, la baie de Boka Kotorska et la

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1 région maritime monténégrine.

2 C'est pour cette raison qu'il était très important d'empêcher les forces

3 paramilitaires croates d'utiliser cette région pour leur propre besoin

4 militaire. La vallée de la Neretva constitue un axe qui sépare la partie

5 occidentale de la partie orientale de la Herzégovine. En aval de la

6 Neretva, se trouve des installations militaires très importantes

7 appartenant à la JNA de l'époque; tout d'abord, l'entrepôt de Gabela et de

8 Dretelj; ensuite, l'aérodrome de Mostar, et le centre d'enseignement à

9 Capljina. A l'époque, Mostar constituait l'unique base aérienne sur le

10 territoire de l'ensemble de la Bosnie-Herzégovine. Depuis cette base, il

11 était possible de fournir le soutien aérien aux opérations visant à retirer

12 la technologie de guerre de l'Adriatique du nord et centrale vers la baie

13 de Boka Kotorska.

14 Pour toutes ces raisons-là, la JNA ne pouvait absolument pas se permettre

15 de perdre le contrôle de l'aérodrome de Mostar et de la vallée de la

16 Neretva. Qui plus est, il est bien connu que la ville de Dubrovnik et ses

17 alentours étaient vidés sur le plan militaire. Autrement dit, dans cette

18 région aucune unité militaire n'était stationnée depuis la fin des années

19 1960 du 20e siècle, justement, la JNA et le gouvernement de l'époque. Dans

20 les années 1960, on tenait compte de l'importance culturelle et touristique

21 de Dubrovnik, lorsqu'ils ont décidé, au cours de ces années-là, de déplacer

22 la brigade navale d'attaque de Dubrovnik, du secteur maritime militaire de

23 Boka, pour la situer à Trebinje.

24 Contrairement à cette attitude de la JNA et, bien sûr, le comportement

25 pratique, la ville de Dubrovnik a, de nouveau, été armée. Sur la base des

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1 documents reçus, lesquels nous disposons, la Défense ainsi que

2 l'Accusation, il est possible d'établir que, déjà au début de 1991,

3 s'agissant de la police de Dubrovnik, le nombre de policiers de réserve a

4 été augmenté. Ils ont établis une organisation de guerre, ainsi que la

5 formation des policiers de réserve. La police de Dubrovnik envoyait des

6 rapports quotidiens concernant les préparatifs établis au secteur du

7 ministère de l'Intérieur de la République de Croatie. Nous parlons, ici, du

8 début de l'année 1991.

9 Il existe, également, des documents depuis lesquels nous pouvons voir que

10 le ministère de l'Intérieur de la République de Croatie impose, à toutes

11 les directions policières, s'agissant des policiers de réserve de la Garde

12 nationale croate, de transférer 70 pour cent des policiers de réserve ainsi

13 que 70 pour cent des armements nouvellement acquis, suivant à tout but et,

14 selon les documents, il s'agit des armements d'infanterie, ensuite, d'armes

15 servant à une défense antiaérienne, des armes servant à une défense

16 antichars et antimines.

17 De plus, s'agissant du processus d'aptitude à la guerre et des préparatifs

18 sur le territoire de Dubrovnik a été établi, bien avant, les opérations de

19 combat et le début des combats, je dois parler, particulièrement, de la

20 période qui précédait la préparation de la JNA, afin de mener les

21 opérations de combat sur les territoires de Dubrovnik-Herzégovina. Nous

22 pouvons voir ces faits depuis les documents qui proviennent du service

23 d'Observation et de Renseignement de la République de Croatie, le centre du

24 Renseignement Dubrovnik. Il s'agit d'un document que la Défense montrera à

25 la Chambre de première instance.

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1 De par ce document, nous pouvons voir que le travail de ce centre de

2 Renseignement a débuté le 1er mai 1991 et, déjà, jusqu'à cette date, tous

3 les postes d'observation avaient été établis sur le territoire de la

4 municipalité. La tâche était de procéder à l'observation et de procéder au

5 contrôle de tout mouvement des Unités de la JNA.

6 Nous pouvons conclure qu'il s'agissait d'une préparation de la République

7 de Croatie à une guerre menée contre l'Yougoslavie sur le territoire de la

8 ville de Dubrovnik, cette même ville qui, dans les années 1970 du siècle

9 dernier, une partie de cette ville était devenue un site protégé par

10 l'UNESCO comme étant un monument historique de grande importance.

11 L'une des tâches principales de ce centre était de suivre et d'observer les

12 mouvements de la JNA et de procéder au renseignement, un indicateur clair

13 attestant le fait qu'il y avait, effectivement, une militarisation faite

14 dans la ville de Dubrovnik est lié à la brigade de la Garde nationale

15 croate, dont le centre se trouvait à Dubrovnik, ainsi que ses forces

16 principales qui étaient déployées dans cette ville. En plus de ces

17 derniers, s'agissant de la ville de Dubrovnik, il y avait, également, des

18 unités paramilitaires croates dont l'unité principale s'appelait la légion

19 noire provenant de la République de Bosnie-Herzégovine. A plusieurs

20 reprises, cette dernière a été mentionnée devant la Chambre de première

21 instance, ou plutôt, on a mentionné les HOS, l'unité paramilitaire qui

22 appartenait à un parti politique de la République de Croatie.

23 S'agissant du patrimoine culturel, Dubrovnik a été utilisée par les

24 Croates, on s'en est servie dans les médias comme un but politique.

25 N'acceptant pas la démilitarisation, c'est-à-dire, n'acceptant pas le

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1 statut d'une ville ouverte qui n'ait pas de présence militaire, la ville de

2 Dubrovnik s'est trouvée, en 1991, dans la zone des activités de combat dont

3 le but était de regagner le contrôle du territoire de la Dalmatie du sud

4 jusqu'à une résolution politique de la crise yougoslave et d'établir une

5 sortie sur la mer depuis Dubrovnik et des ports aux alentours de Dubrovnik.

6 Le but de cette opération de combat voulait le blocus de la ville de

7 Dubrovnik de par la terre et de par la mer. La ville de Dubrovnik même n'a

8 jamais, s'agissant de la conception du commandement du 2e Groupe

9 opérationnel et s'agissant d'aucun autre commandement qui se trouvait au

10 dessus de cette dernière ou en dessous de cette dernière, été le but des

11 opérations de combat ni l'objectif des opérations de combat. Par contre, le

12 fait même de dire que Dubrovnik était une ville militarisée et une ville

13 dont la présence militaire se faisait voir depuis laquelle les forces

14 croates agissaient, menaient des opérations de combat et faisaient subir

15 des pertes aux forces de la JNA, qui était une force légitime du territoire

16 de la SFRY. Indépendamment du nombre de pertes, est-ce que cela aurait été

17 une raison suffisante pour prendre le contrôle de Dubrovnik et établir un

18 contrôle militaire complet.

19 Toutefois, pour éviter que les conséquences d'une telle opération

20 militaire ne se fasse voir, c'est-à-dire, une perte d'habitants et de

21 bâtiments de la ville de Dubrovnik, le commandement suprême s'agissant des

22 forces armées de la RSFY et le commandement du 2e Groupe opérationnel n'a,

23 jamais, eu pour but d'établir un contrôle total de la vieille ville de

24 Dubrovnik et la prise de la ville de Dubrovnik. Le but principal, vers

25 lequel tendait la JNA, était la démilitarisation de la ville, ce que nous

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1 avons pu voir, lors de la présentation des moyens à charge, de par les

2 documents divers qui parlent des propositions visant à une normalisation de

3 la vie, documents soumis par l'Accusation.

4 Toutefois, lorsque les autorités croates n'ont pas accepté cette

5 proposition volontairement, le but a été de procéder au blocus de Dubrovnik

6 de par la mer et par la terre.

7 Si l'on parle des éléments principaux de cet acte d'accusation et si nous

8 parlons de l'événement du 6 décembre 1991, cet événement doit être examiné

9 dans un contexte tel que je l'ai présenté. Il est, particulièrement,

10 important d'insister sur le fait que, ni à ce moment-là le 6 décembre 1991

11 et ni avant cette date non plus, le but d'une activité militaire concrète,

12 ainsi que d'autres activités militaires qui avaient été menées, n'avait,

13 jamais, été de prendre la possession de Dubrovnik, ni de faire subir des

14 pertes aux bâtiments culturels et aux monuments historiques, ni d'attaquer

15 la ville de Dubrovnik dans ce sens-là, de lui faire perdre des vies. C'est

16 ainsi que la Défense, lors de la présentation des ses moyens à charge, en

17 faisant entendre des témoins à la barre et en présentant des documents,

18 tentera de démontrer la chose suivante : la vieille ville, comme monument

19 historique et culturel protégé par l'UNESCO pendant la période pendant

20 laquelle les opérations ont eu lieu sur le théâtre des opérations

21 Dubrovnik-Herzégovine, a été utilisée à des buts et à des fins militaires.

22 Tout ceci a été fait dans le sens où les formations paramilitaires se sont

23 servies de la vieille ville et des positions se trouvant non loin de la

24 ville de Dubrovnik pour procéder à la provocation, pour attaquer les unités

25 et pour tirer sur les unités de la JNA qui se trouvaient sur des positions

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1 établissant le blocus de Dubrovnik.

2 Les provocations et les activités de combat depuis les positions des forces

3 croates sur Srdj, et sur les autres objectifs étaient intenses et

4 quotidiennes. Ce fait fera l'objet de la présentation de nos moyens à

5 décharge.

6 La Défense tentera de démontrer et prouvera que, en signant l'accord du

7 cessez-le-feu suite aux pourparlers qui ont eu lieu avec les membres du

8 gouvernement croate, a été prévu pour le 6 décembre à 12 heures, et c'est

9 ainsi que l'amiral Jokic a informé le commandement du 2e Groupe

10 opérationnel, son commandement supérieur.

11 De plus, la Défense, au cours de la présentation de ses moyens à décharge,

12 prouvera que l'attaque sur la côte Srdj, attaque qui a été menée par le 3e

13 Bataillon de la 472e Brigade de Trebinje, le 6 décembre, que cette attaque

14 a été une action planifiée qui était encouragée par le commandement du 2e

15 VPS qui en avait, pleinement, connaissance.

16 La Défense prouvera plus loin, que lors de la préparation de cette

17 activité, on a procédé à l'établissement du soutien du 3e Bataillon de la 5e

18 Brigade motorisée des partisans, qui était commandée, à l'époque, par le

19 lieutenant-colonel Jovanovic Miroslav, et de dire que, lors de la

20 préparation et le soutien, une batterie de canon de 130 millimètres avait

21 été déployée et positionnée à l'aéroport de Cilipi.

22 De plus, la Défense tentera de prouver, lors de la présentation de ses

23 moyens à décharge, que le commandement du 2e Groupe opérationnel n'avait

24 pas connaissance de l'activité militaire du 3e Bataillon de la 472e Brigade

25 motorisée qui a été faite contre Srdj, le 6 décembre 1991.

Page 6805

1 La Défense prouvera, également, que le 6 décembre 1991 lors de l'attaque

2 sur Srdj et pendant que cette activité militaire durait et ce jusqu'au

3 retrait des unités du 3e Bataillon de la Brigade de Trebinje, retrait sur

4 ses positions de départ, le commandement du 2e Secteur militaire naval n'a

5 jamais informé le commandement du 2e Groupe opérationnel de ce qui se

6 passait.

7 De plus, la Défense démontrera que le commandement du 2e Secteur militaire

8 naval, le vice-amiral Miodrag Jokic n'a pas arrêté l'attaque du 3e

9 Bataillon de la 472e Brigade sur Srdj, comme il l'a dit dans le cadre de

10 son témoignage fourni à cette Chambre de première instance.

11 La Défense prouvera, plus loin, que la JNA n'avait pas mené d'attaque sur

12 les positions de tir qui étaient déployées dans la ville de Dubrovnik,

13 jusqu'au moment où on n'a pas procédé à une contre-attaque depuis ces mêmes

14 positions lors de laquelle les pertes sérieuses ont été faites au groupe

15 militaire du 3e Bataillon, au moment où cela a eu lieu sur la forteresse de

16 Srdj.

17 La Défense démontrera, au cours de ses moyens à décharge, que, le 6

18 décembre 1991, la vieille ville a été utilisée -- ainsi que les alentours

19 de la ville de Dubrovnik ont été utilisés, de sorte à démontrer que c'est

20 depuis ces positions que l'on attaquait les positions de la JNA, s'agissant

21 de Zarkovica, de Srdj, et sur d'autres positions où se trouvaient les

22 Unités de la JNA. La Défense prouvera que ces forces, qui ont attaqué

23 depuis la vieille ville ou depuis les alentours de la ville, ont fait subir

24 d'énormes pertes aux unités de la JNA qui se trouvaient sur Srdj.

25 La Défense démontrera ensuite que le 6 décembre 1991, il existait une

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1 communication directe entre le commandement du

2 9e Secteur militaire naval, le vice-amiral Miodrag Jokic et le commandement

3 supérieur concernant l'attaque sur Srdj.

4 C'est ainsi que la Défense considère que par ces moyens à décharge qu'elle

5 présentera, elle pourra démontrer quel était le rôle que jouait le vice-

6 amiral Miodrag Jokic concernant l'événement du

7 6 décembre 1991, ainsi que pendant les jours qui ont suivi ces dates. Elle

8 démontrera également que le général Pavle Strugar était exclu de tous ces

9 événements, et ce, en passant par les communications des règles et les

10 ordres que les dirigeants supérieurs de la JNA donnaient pour ordre au

11 vice-amiral Miodrag Jokic.

12 En énumérant les sujets principaux, la Défense élaborera plus loin lors de

13 la présentation de ces moyens à charge. La Défense est convaincue qu'elle

14 pourra convaincre la Chambre de première instance que le général Pavle

15 Strugar n'est pas responsable des événements qui lui sont reprochés dans

16 l'acte d'accusation.

17 Monsieur le Président, je vous remercie. Cela met fin à ma présentation

18 liminaire.

19 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je vous remercie, Maître Petrovic --

20 Maître Rodic. Excusez-moi, je vous ai appelé Me Petrovic. Je crois que le

21 moment est propice pour prendre une pause. Nous reprendrons nos travaux

22 après la pause.

23 --- L'audience est suspendue à 15 heures 22.

24 --- L'audience est reprise à 15 heures 50.

25 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

Page 6807

1 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je vois que le premier témoin de la

2 Défense est arrivé.

3 Bonjour, Monsieur le Témoin. Pourriez-vous, s'il vous plaît, lire le texte

4 de la déclaration solennelle qui va vous être présenté par l'Huissier.

5 LE TÉMOIN : SLOBODAN NOVAKOVIC [Assermenté]

6 [Le témoin répond par l'interprète]

7 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

8 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

9 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Vous pouvez vous asseoir.

10 Maître Rodic, je vous donne la parole.

11 M. RODIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

12 Interrogatoire principal par M. Rodic :

13 Q. [interprétation] Monsieur le Témoin, je vous prie de bien vouloir vous

14 présenter pour les Juges de la Chambre.

15 R. Je m'appelle Slobodan Novakovic.

16 Q. Pourriez-vous nous donner votre date de naissance, s'il vous plaît ?

17 R. Je suis né le 17 mai 1952 à Dubrovnik, et je vis actuellement à Herceg-

18 Novi.

19 Q. Pourriez-vous nous dire ce que vous faites ?

20 R. Je suis un électronicien, et j'ai un service des réparations de radios

21 et de télévisions à Herceg-Novi. C'est là que je travaille.

22 Q. Pourriez-vous nous dire si vous avez jamais fait objet de poursuite ou

23 si vous avez été condamné au cours de votre vie ?

24 R. Non, jamais.

25 Q. Encore une chose, puisque nous parlons la même langue et tout ce que

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1 nous devons dire, aussi bien vous que moi, rien ne doit être traduit, je

2 vais vous demander de faire une brève pause après chaque question que je

3 vais vous poser, et de me répondre uniquement après cette pause justement

4 pour éviter tout chevauchement de nos propos.

5 Monsieur le Témoin, en 1991, pouvez-vous dire où

6 habitiez-vous ?

7 R. En 1991, j'ai habité et j'ai travaillé à Herceg-Novi. J'ai travaillé

8 justement dans mon service des réparations des radios et télévisions.

9 Q. Vers la fin de l'été 1991, pourriez-vous nous dire quelle était la

10 situation à Herceg-Novi, cette ville qui se trouve à la frontière même de

11 la République de Monténégro avec la République de Croatie ? Quelle était la

12 situation à cette zone frontalière pour ainsi dire ?

13 R. La situation était déjà un peu compliquée. En fait, elle se compliquait

14 avec l'arrivée de Tudjman au pouvoir en 1990, et les tensions se sont

15 accrues. Je vais vous donner un exemple. En 1991, au bon milieu de l'été,

16 peut-être au mois de juillet, avec mon épouse et mes deux filles, je me

17 suis rendu à Dubrovnik. A peu près à mi-chemin, en passant par Konavle à

18 peu près, j'ai été arrêté par deux policiers. Il y en a un qui s'est mis

19 devant mon véhicule en mettant sa jambe, son pied, sur le capot de ma

20 voiture. Il a dirigé son fusil automatique sur moi. Moi, j'ai été au volant

21 de la voiture, celle de mon épouse.

22 L'autre policier m'a demandé de sortir et d'ouvrir le coffre de la voiture.

23 Je l'ai fait. Il a commencé à fouiller le coffre arrière de ma voiture avec

24 justement le fusil automatique. C'est juste un exemple. Il y en a plein.

25 Mes concitoyens m'ont fait part des expériences semblables. On a parlé

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1 aussi dans les journaux.

2 Q. C'est ce que vous avez pu voir. C'est ce que vous avez pu vivre. Est-ce

3 que c'était semblable à ce que l'on racontait ?

4 R. Vous savez, par un hasard des circonstances, je suis né à Dubrovnik.

5 D'ailleurs, mes deux filles y sont nées aussi. Nous, les habitants de

6 Herceg-Novi, une fois par mois ou peut-être même plus souvent que cela,

7 nous nous rendions à Dubrovnik. On peut dire que pour nous, c'était notre

8 ville, comme Herceg-Novi. Dubrovnik était la ville qui m'était la plus

9 proche, à part ma ville natale, évidemment. Je me rendais aussi à Kotor, à

10 Podgorica, qui sont les villes de Monténégro, mais j'avais de liens

11 privilégiés avec Dubrovnik.

12 Q. Pendant cette période-là, en été 1991, vu les événements dans

13 l'Yougoslavie à l'époque et vu la situation politique de l'époque, pouviez-

14 vous nous dire quelle était l'ambiance dans la ville de Dubrovnik, ce que

15 ressentait les citoyens de Dubrovnik ?

16 R. Nous écoutions des informations de façon quotidienne, et nous

17 apprenions que, par exemple, toutes les casernes étaient sans eau, sans

18 électricité, encerclées par des forces des Zengas, de la garde nationale.

19 C'est comme cela que l'on a les appelés. C'était des forces paramilitaires.

20 La JNA s'est trouvée dans une situation bien difficile en Croatie.

21 Evidemment, ceci a eu un effet sur nous et sur notre état d'esprit. Je peux

22 dire que nous avons commencé à ressentir de plus en plus de peur et des

23 tensions qui se sont accrues au jour le jour.

24 Q. Saviez-vous quelles étaient ces unités militaires qui existaient à

25 l'époque ?

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1 R. Ces formations militaires, les Zengas, puisque nous nous trouvions dans

2 une zone frontalière à Herceg-Novi, tout près de Dubrovnik -- je ne sais

3 quel était le nombre, mais je sais qu'il s'agissait-là d'unités extrêmement

4 importantes, et je sais que cette unité avait pris la frontière du côté

5 croate, la frontière avec le Monténégro. Les tensions se sont accrues

6 chaque jour et l'accumulation de ces tensions s'est produite, un moment

7 donné, au mois de septembre, quand l'armée croate a tiré huit obus de canon

8 et de lance-mortier dans le village de Malta en Croatie. J'ai vu,

9 personnellement, des éclats d'obus dans des arbres venant de ces obus de

10 char.

11 Q. Apparemment, il y a une erreur au niveau du compte rendu d'audience.

12 Est-ce que cela s'est produit au mois de septembre, ou au mois de décembre

13 ?

14 R. Ces huit obus qui ont été tirés plutôt au nord.

15 Q. De quel mois parlons nous ? Pourriez-vous nous situer dans le temps ?

16 Moi, je vous ai entendu parler du mois de septembre, alors que dans le

17 compte rendu d'audience, on parle de décembre. Pourriez-vous préciser ?

18 R. Mais comment voulez-vous que je vous parle du mois de décembre ? Je ne

19 comprends pas la question.

20 Q. C'est une erreur au niveau du compte rendu d'audience. Il s'agit du

21 mois de septembre ?

22 R. Oui, oui, bien sûr. C'était peut-être même au mois d'octobre,

23 d'ailleurs.

24 Q. Pourriez-vous nous dire quelle était la force armée légitime de la RSFY

25 à l'époque ?

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1 R. La seule unité et formation légale, à l'époque, était la JNA, toutes

2 les autres unités étaient illégales, car la Croatie, à l'époque, n'était

3 pas encore reconnue en tant qu'état par la communauté internationale.

4 Q. Merci. En 1991, avez-vous reçu des convocations pour rejoindre l'armée

5 ? Si tel est le cas, pourriez-vous nous dire ce qui s'est passé exactement

6 ?

7 R. En août 1991, j'ai été convoqué pour participer à un entraînement, un

8 exercice militaire à Kamena, juste au dessus de Herceg-Novi. Cet exercice a

9 dû durer une dizaine de jours. C'était des manœuvres. Je pense que, au

10 cours de ces manœuvres, un incident s'est produit à Herceg-Novi. Je ne me

11 souviens plus exactement de qui il s'agissait. C'était un étranger. Je ne

12 sais pas vraiment quelle était sa nationalité. Toujours est-il qu'il avait

13 essayé de faire exploser un engin explosif, soit sur une plage ou soit

14 ailleurs. Dans la rue de Stjepo Sarena à Herceg-Novi, quand un véhicule est

15 arrivé jusqu'à la grille de la canalisation, la voiture était piégée et une

16 explosion s'en est suivie. C'était le premier incident qui s'est produit en

17 1991, à Herceg-Novi.

18 Q. Est-ce que vous avez reçu un appel à la mobilisation ? Est-ce qu'on

19 vous a convoqué pour faire partie des troupes de réserve, et cetera ?

20 R. Oui, oui. En 1991, à peu près le 21 septembre, j'ai reçu un appel, une

21 convocation militaire pour participer à un exercice militaire. Je me suis

22 présenté à Kamena, là où j'ai participé aux exercices un mois auparavant,

23 au mois d'août. C'était exactement au même endroit.

24 Q. Après cette convocation que vous avez reçue au mois d'août, est-ce que

25 vous êtes rentré chez vous et est-ce que vous avez été convoqué, à nouveau

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1 ? Ou est-ce que vous êtes resté pendant toute cette période-là, depuis le

2 mois d'août, sur le terrain en train de participer aux exercices militaires

3 ?

4 R. Au mois d'août, j'ai participé aux exercices pendant 10 jours, c'est

5 tout. Ensuite, je suis rentré chez moi et, à peu près le 21 septembre, j'ai

6 été convoqué à nouveau pour participer à un autre exercice militaire.

7 Q. Pourriez-vous nous dire quelle était votre fonction à l'époque, quelle

8 était votre mission ? Vous apparteniez à quelle unité, et cetera ?

9 R. Puisque j'ai eu une formation d'électronicien, je faisais partie de

10 l'unité du génie dans le JNA, en tant que mécanicien. A l'époque, j'étais

11 membre de la Défense territoriale de la municipalité de Herceg-Novi.

12 J'étais mécanicien, mécanicien radio. Je dépendais du poste radio principal

13 de la Défense territoriale. Nous avions un poste radio principal dans un

14 véhicule et nous avions plusieurs transmetteurs mobiles, des stations

15 radios, des RUP-12.

16 Q. Cette unité de Défense territoriale qui était la vôtre, d'Herceg-Novi

17 faisait-elle partie d'une formation militaire plus importante et, si oui,

18 de laquelle ?

19 R. Non. En tant que Défense territoriale de Herceg-Novi nous dépendions du

20 secteur naval de Kumbor. Martinovic Ilija qui était mon commandant au

21 niveau de la Défense territoriale, alors que le commandant de ce secteur

22 naval était un capitaine des canonnières. Je pense qu'il s'appelait Krsto

23 Djurovic. Malheureusement, au début même de la guerre, il est mort dans un

24 accident d'hélicoptère qui s'est écrasé.

25 Q. Après Krsto Djurovic, qui était le commandant de ce secteur naval ?

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1 R. C'est l'amiral Jokic, Miodrag Jokic, qui l'a remplacé à ce poste. Il a

2 été notre commandant à partir du moment où Djurovic s'est fait tué jusqu'à

3 la fin de la guerre.

4 Q. Pourriez-vous nous dire si votre unité de Défense territoriale avait

5 quitté le territoire du Monténégro ? Le cas échéant, quand, pourquoi et

6 dans quelle direction, et cetera ?

7 R. Pour la première fois, nous avons été mobilisé à Kamena. C'est un

8 village qui se trouve à peu près à cinq kilomètres de Herceg-Novi. De

9 Kamena, nous sommes passés dans le village de Porobici, du village de

10 Porobici dans le village de Konjevici et, depuis ce village, nous avons

11 traversé la frontière avec la Croatie. Le premier point de chute était le

12 village Mikulici, au-dessus de Cavtat dans la municipalité de Dubrovnik.

13 Q. Dites-moi, votre unité a-t-elle pris des positions en dehors du village

14 de Mikulici, s'est-elle rendue dans d'autres endroits ?

15 R. Notre Unité de la Défense territoriale de Herceg-Novi a été stationnée

16 pendant sept ou dix jours à Mikulici. Je ne sais pas exactement quel était

17 le déploiement --

18 Q. Je ne vous demande pas de date exacte. Pourriez-vous juste nous citer

19 quelques localités ?

20 R. Autour de Mikulici, nous avons été déployés. Nos unités étaient

21 déployées aux alentours de ce village-là, mais nous y sommes restés que

22 très peu de temps. Ensuite, nous sommes passés à Grude. Grude, c'est un

23 bourg un peu plus important dans la municipalité de Dubrovnik et, dans une

24 maison d'un particulier, nous avons établi le commandement de la TO de

25 Herceg-Novi. Tout près de nous, se trouvait aussi le commandement de

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1 l'armée.

2 Q. Pourriez-vous nous dire jusqu'à quel moment vous êtes resté sur le

3 théâtre des opérations de Dubrovnik-Herzégovine ?

4 R. J'ai été convoqué pour la première fois le 21 septembre. Nous sommes

5 restés, à peu près, une dizaine de jours à Kamena, Porobici, Konjevici, et

6 ensuite, je ne saurais vous donner la date exacte, nous avons passé la

7 frontière. Ceci s'est passé, il y a pas mal de temps, je ne me souviens pas

8 de la date exacte.

9 Q. Je vous demande jusqu'à quel moment vous êtes resté sur le terrain,

10 vous êtes rentré chez vous à quel moment ?

11 R. Je suis entré chez moi vers la fin du mois de novembre, peut-être même

12 le 1er ou le 2 décembre, à peu près jusqu'à cette date-là.

13 Q. Est-ce qu'à ce moment-là, vous avez rendu immédiatement votre

14 équipement militaire, vos armes ?

15 R. Non, puisque c'était moi qui étais au volant, c'est moi qui étais le

16 chauffeur de ce véhicule qui transportait les postes de radio. J'ai gardé

17 ce véhicule. Le véhicule était garé devant chez moi jusqu'à la fin du mois

18 de décembre, à peu près.

19 Q. Pendant que vous étiez sur le terrain avez votre unité, pouvez-vous

20 nous dire quelle était l'exacte nature de votre mission ?

21 R. En tant que mécanicien radio, j'étais chargé d'être, toujours, à

22 proximité du poste radio principal de la Défense territoriale d'Herceg-

23 Novi. Ensuite, j'ai été, également, chargé d'approvisionner, par des

24 groupes électrogènes, tous les postes de radio sur le terrain et de les

25 réparer, le cas échéant.

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1 Q. Avant de revenir du front, vous dites que ceci s'est passé fin

2 novembre, début décembre 1991, avant cela avez-vous passé encore quelque

3 temps chez vous ?

4 R. Pourriez-vous répéter votre question, je ne vous ai pas bien compris ?

5 Q. Vous étiez sur le front à partir du mois de septembre jusqu'à la fin

6 novembre, début décembre, pendant cette période-là vous est-il arrivé de

7 rentrer chez vous à Herceg-Novi ?

8 R. Oui, j'y suis allé assez souvent car, à chaque fois que je prenais un

9 groupe électrogène, ceux qui étaient usés, car je les prenais sur le

10 terrain, il fallait que je les apporte à Kumbor dans la caserne. Ensuite,

11 on les branchait pour les charger et, le lendemain, je ramenais les groupes

12 électrogènes pleins sur le terrain à nouveau, et je prenais ceux qui

13 étaient vides. J'en ai profité, à chaque fois, pour rentrer chez moi, pour

14 prendre une douche, et cetera.

15 Q. Dans votre unité de la Défense territoriale, pendant cette période-là,

16 la période qui nous intéresse, est-ce que vous avez subi des pertes ?

17 R. Oui, les pertes les plus importantes que nous avons subies et qui nous

18 ont touché plus particulièrement, nous les habitants de Herceg-Novi, ce

19 sont produites le 8 novembre 1991. Ce jour-là, la situation était,

20 extrêmement, calme. Même les quelques jours auparavant, il n'y avait pas eu

21 d'action, il n'y avait pas eu d'incident du tout. J'ai demandé au

22 commandant de la TO, Ilija Martinovic de me laisser rentrer chez moi pour

23 me reposer un peu, pour me rafraîchir.

24 Je suis rentré chez moi vers 5 heures de l'après-midi, donc 17

25 heures. A peine me suis-je couché, je me suis allongé toujours vêtu de mon

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1 uniforme, juste pour me reposer un petit peu, que j'ai reçu un coup de fil.

2 Le coup de fil venait d'un camarade qui était venu en permission avec moi.

3 Pendant ce coup de fil, il m'a dit que mon camarade, le camarade d'une

4 autre unité de la Défense territoriale, c'était une unité spéciale, un

5 peloton, qu'ils ont subi des pertes, qu'il y avait des blessés et des tués

6 à Bosanka et qu'il fallait que je me rende de toute urgence dans l'hôpital

7 militaire à Meljine pour voir ce que nous allions faire par la suite.

8 Q. Est-ce que vous y êtes allé ensuite dans cet hôpital militaire de

9 Meljine ?

10 R. Oui, j'y suis allé, je suis allé au département de chirurgie, j'y ai

11 trouvé quelques camarades qui étaient blessés, j'ai parlé avec eux quelques

12 instants.

13 Q. Pourriez-vous nous donner les noms de ces camarades si vous vous en

14 souvenez toujours ?

15 R. Marko Posnanovic. Il était blessé à la jambe. Ensuite, Savo Gojkovic.

16 Il était blessé au niveau de sa main gauche ou droite, à un des doigts

17 d'une de ses mains. Ensuite, un certain Mandic. Je ne me souviens pas de

18 son prénom, il a été touché à la clavicule et, ensuite, la balle est

19 descendue dans le corps. Ils étaient au nombre de trois.

20 Q. Est-ce que qui que ce soit s'est fait tuer à cette occasion-là ?

21 R. Il m'a dit que notre camarade Dusko Pusic était dans le bloc

22 opératoire, au dernier étage de l'hôpital. J'y suis allé et j'ai attendu

23 devant, dans la salle d'attente, pour voir comment allait se terminer

24 l'opération. Quelques instants plus tard le chirurgien Bato Lakicevic est

25 sorti du bloc. Je lui ai demandé si Dusko était toujours en vie, il est

Page 6817

1 resté silencieux. Je lui ai demandé s'il était mort et là il m'a fait un

2 signe de sa tête, un signe affirmatif. Après avoir appris cela, je suis

3 descendu devant le département de chirurgie, et il y avait déjà quelques

4 personnes là-bas, ils ont dit qu'ils s'attendaient à ce que l'on apporte le

5 corps d'un membre de la JNA mais, à l'époque, l'on ne savait même pas qui

6 c'était.

7 Je me suis retourné et, derrière moi, j'ai vu le commandant en second

8 de la Défense territoriale Djordje Radovic, et je lui dit : "Djoko, allons

9 à Belgrade pour voir ce qu'il en est avec nos hommes."

10 Il s'est mis à pleurer et il m'a dit : "Ici, c'est mon Baya, c'est le

11 corps de Baya qu'ils ont amené." En réalité, c'était son cousin, Obren

12 Radovic surnommé Baja, originaire de Niksic. Il s'est fait tuer en essayant

13 de faire sortir les gens de Bosanka.

14 Q. Après qu'on ait apporté le corps d'Obren Radovic, est-ce que vous êtes

15 resté à Meljine ou est-ce que vous êtes parti quelque part ? Pourriez-vous

16 raconter cela de façon plus succincte, plus brève ?

17 R. Puisque le véhicule de la TO de Herceg-Novi avait les pneus crevés

18 parce qu'ils avaient essayé de sortir les gens, ils m'ont demandé

19 d'utiliser le véhicule qui était le mien pour emmener l'oncle de Baja,

20 celui qui s'est fait tuer, l'amener à Niksic pour communiquer la nouvelle à

21 sa famille.

22 Q. Est-ce que vous l'avez fait ?

23 R. Je leur ai répondu que je n'avais pas de carburant justement pour

24 éviter cette tâche, pour ne pas le faire, pour ne pas avoir à le faire, car

25 je voulais aller à Belgrade voir ce qu'il en était de mes camarades. Ils

Page 6818

1 ont immédiatement apporté deux

2 dames-jeannes de carburant. Ils ont fait le plein et je n'avais pas d'autre

3 choix que de prendre mon véhicule et de me rendre à Niksic, nous sommes

4 passés par Risan et Grahovo. C'était une nuit extrêmement difficile.

5 J'ai frappé à la porte de la maison. Les voisins sont sortis ainsi que ses

6 parents et même le grand-père de Baja. Vous savez, c'était une des nuits

7 les plus difficiles de ma vie quand il s'agissait de leur communiquer la

8 nouvelle.

9 Q. Monsieur Novakovic, je vais vous demander d'être plus bref dans vos

10 réponses, car le temps nous est compté.

11 Qu'est-ce que vous avez fait après Niksic ? Vous est allé où ?

12 R. Pendant la nuit, nous avons pris la voiture. Il y en avait une autre

13 voiture qui est partie de Niksic également avec nous. Nous nous sommes

14 dirigés vers l'hôpital.

15 Je suis arrivé vers 6 heures, 7 heures du matin à l'hôpital de Meljine. Je

16 les ai amenés jusqu'à la porte de la morgue, et là je leur aurais dit au

17 revoir. Je ne me suis même pas entré. Je me suis dirigé immédiatement vers

18 Brgat voir ce qu'il en était de mes hommes.

19 Q. Pourquoi vouliez-vous vous rendre à Brgat? Est-ce que tous les

20 combattants qui étaient blessés ont été sortis ce jour-là ?

21 R. Non. Ceux dont je viens de vous donner les noms, on les a sortis ce

22 jour-là. Je vous ai donné le nom d'une personne blessée ainsi que Dusko

23 Pusic, qui est mort dans le bloc opératoire. Les autres personnes qui ont

24 été blessées ou se sont fait tuées, étaient encore à Bosanka. Brgat est

25 l'endroit le plus proche de Bosanka. C'est pour cela que je voulais aller

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1 le plus rapidement possible pour voir de quelle façon nous allions pouvoir

2 les sortir de là. C'était une situation très difficile.

3 Q. Ensuite, lorsque vous est arrivé à Brgat, qu'avez-vous fait pour aider

4 les blessés, vos co-combattants ?

5 R. En arrivant à Brgat, j'ai vu que la situation était extrêmement

6 difficile. Tout le monde était en deuil. Il y en avait même qui pleuraient.

7 A vrai dire, j'avais senti aussi la peur chez les gens. J'ai vu qu'ils

8 avaient peur, et je leur aurais dit : "Ecoutez, allez. On y va." J'ai vu

9 qu'ils ne voulaient pas y aller. Je leur avais demandé de me donner la clé

10 de la voiture. Le capitaine de la TO de Herceg-Novi m'a jeté les clés de la

11 voiture de la défense territoriale. C'était une Niva. Je me suis assis dans

12 ce véhicule. De Brgat, je me suis dirigé vers Zarkovica. De Zarkovica, j'ai

13 emprunté la route goudronnée pour me diriger vers Bosanka.

14 Sur la route, je suis tombé sur un véhicule de la JNA. Le corps de Bogdan

15 Popovic était à l'intérieur. Au volant de cette voiture, c'était un certain

16 Kruso, Slobodan Radovic. A côté de lui, était un certain Gasal, qui

17 travaillait pour le ministère des Affaires intérieures de Monténégro. A un

18 moment donné, il était aussi le chef du ministère des Affaires intérieures

19 à Herceg-Novi.

20 Q. Pourriez-vous, s'il vous plaît, essayer de raccourcir. On n'en a pas

21 besoin d'entendre tous ces détails.

22 Vous avez dit que dans ce camion était trouvé le corps de Bogdan Popovic.

23 Est-ce qu'on l'a transféré aussi à Meljine ?

24 R. Oui. On l'a transféré au bord de ce camion à l'hôpital de Meljine.

25 Q. Est-ce qu'il y en avait d'autres qui sont restés sur les positions et

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1 qu'on n'a pas réussi à faire sortir ?

2 R. Oui, il y en avait encore à Bosanka, aussi bien des tués que des

3 blessés. Il y avait deux groupes là-bas. Il y avait un groupe d'un peu plus

4 de huit personnes, puisqu'un détachement fait à peu près dix personnes. Ils

5 étaient près du répétiteur de Srdj. C'est là que Budo Zarubica a été

6 blessé, ainsi que Golub Mijovic. Le corps de Vojica Pejovic était encore là

7 aussi. Il y avait aussi un kinésithérapeute, Minjo Golub, qui est aussi un

8 combattant. Il a réussi à faire sortir ces deux blessés d'une zone menacée

9 par l'armée croate. Il est allé à deux reprises, et quand il est allé

10 chercher Pejovic, il est revenu voir ses camarades pour leur dire qu'il

11 était mort, qu'on ne pouvait plus le sauver.

12 Q. Pourriez-vous nous dire où était le problème ? Pourquoi était-il

13 difficile de faire sortir ces gens-là, les corps des tués ou faire sortir

14 les blessés ?

15 R. Bosanka c'est un terrain de chasse artificiel protégé par des arbres,

16 des mandariniers et des arbres gros. C'est un terrain extrêmement

17 difficile, et c'était très difficile à le faire.

18 Q. Est-ce que c'était dangereux ?

19 R. Oui, il y avait bien une route entre Bosanka et Srdj, mais nous

20 n'osions utiliser cette route puisque nous menacions de nous faire tirer

21 dessus par les soldats croates depuis le répétiteur de Srdj, et peut-être

22 même de Dubrovnik ou de Bosanka. Cela dépendait de la situation.

23 Q. A part ces soldats que vous avez mentionnés, est-ce qu'il y avait

24 d'autres personnes qui se sont tuées ou blessées ?

25 R. Pendant qu'on essayait de faire sortir Bogdan Popovic, Marko Komarica

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1 et Bajkovic, Obren Bajkovic, on l'appelait Baja, donc ils étaient deux en

2 train de soulever Vlado.

3 Il y avait un fusil qui était tout près de la tête de Vlado et Bajkovic lui

4 a dit de prendre le fusil. C'est à ce moment-là qu'une balle est partie et

5 l'a tuée directement dans la tête.

6 Q. Qui a tiré ?

7 R. C'était l'armée croate depuis Bosanka. Bogdan Popovic et Vlado Zarubica

8 ont été touchés justement par les soldats de cette unité de l'armée croate

9 à Bosanka. Il y en a un qui s'est fait tué, et l'autre qui a été blessé à

10 la jambe.

11 Q. Pourriez-vous nous dire si vous avez participé à cette action-là ? Est-

12 ce que vous avez tenté de se sauver ou de sortir un de ces soldats ?

13 R. En ce qui concerne Bogdan Popovic, nous sommes arrivés à la mi-chemin.

14 Nous l'avons apporté jusqu'à Brgat, enfin on l'a envoyé à l'hôpital de

15 Meljine. Ensuite, après cela, à nouveau je me suis dirigé vers Bosanka,

16 mais Gaso Mijatovic m'a dit : "Slobo, écoute, Savo Vidakovic avec une

17 camionnette se trouve dans la forêt." Ils sont venus pour essayer de

18 trouver Vojica Pejovic. Gaso est là-bas aussi.

19 Q. Qui est ce Gaso Mijatovic ?

20 R. Gaso Mijatovic travaille pour le MUP. Il habite à Herceg-Novi.

21 Q. Pourquoi est-il venu à Bosanka ?

22 R. Car il a été ami proche de Vojica Pejovic, et il est venu le faire

23 sortir de là. Quand il est arrivé dans la région de Zarkovica, il s'est

24 rendu au commandement et il est allé voir le colonel Gavro Kovacevic.

25 Q. Pourquoi est-il allé à Zarkovica ?

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1 R. Il y est allé pour faire sortir Vojica de là. Il s'est rendu auprès de

2 Gavro Kovacevic pour lui demander quelle était la situation sur le terrain

3 pour qu'il puisse essayer de sortir ses camarades de là. Le colonel

4 Kovacevic lui a dit qu'il y avait plus de 70 soldats armés à Bosanka. Il

5 lui a dit : "Regarde, j'ai un casque moi-même sous la tête, et la situation

6 ici est très difficile. Je suis exposé sans arrêt aux tirs de mortier. On

7 me tire dessus depuis Dubrovnik. Même un mortier mobile qui nous tire

8 dessus. On me tire depuis la vieille ville et ils changent sans arrêt de

9 position." De sorte, que Gavro Kovacevic se trouvait dans une situation

10 bien difficile. Quand Gaso Mijatovic, à la fin, lui a demandé où se

11 trouvait Vojica Pejovic, s'il était blessé ou tué, Gavro lui a tourné le

12 dos. Gaso a dit qu'il était tellement surpris qu'il est sorti de là.

13 Ensuite il est allé le chercher et c'est là qu'il a rencontré le soldat

14 lieutenant Sikimic, avec ces soldats. C'est eux qui ont trouvé Bogdan

15 Popovic. Ils l'ont placé sur un camion militaire et Slobodan Radovic, Kruso

16 et Gaso Mijatovic ont repris ces camions militaires et ils ont remis, comme

17 je vous l'ai dit tout à l'heure, le corps de Brgat et de là ils se sont

18 rendus à Meljine.

19 Q. Ce que vous venez de raconter concernant le colonel Gavro Kovacevic,

20 comment le savez-vous ? Est-ce que vous l'avez vu personnellement ou que

21 quelqu'un vous a raconté cela ?

22 R. Lorsque je suis parti pour la deuxième fois vers Zarkovica et Bosanka,

23 Gaso Mijatovic ne m'a pas permis d'y aller tout seul. Il est entré dans une

24 jeep, une Niva, avec moi, et lorsque nous sommes arrivés à Zarkovica, je

25 lui ai dit : "Comment cela se fait que tu sois ici sur le front, Gaso ?"

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1 Puisque d'après le règlement, et compte tenu de la formation à laquelle il

2 est appartenu, il ne devait pas y être avec nous. Il est venu en privé, de

3 son propre --

4 Q. Monsieur Novakovic, écoutez mes questions. Essayez de nous répondre de

5 manière aussi concise que possible. Ma question était très brève. Tout à

6 l'heure, vous nous avez dit que le colonel vous a expliqué qu'à Bosanka, il

7 y avait plus de 70 soldats croates, que lui était exposé au feu des

8 obusiers de Zarkovica, que l'on tirait sur eux depuis la vieille ville,

9 depuis des obusiers, et depuis un camion. Ma question est la suivante,

10 comment le savez-vous ? Est-ce que quelqu'un vous l'a dit ?

11 R. Gaso Mijetovic me l'a dit.

12 Q. Dites-moi, s'il vous plaît, brièvement, si vous avez participé et à

13 quoi ressemblait le retrait de la personne qui a été tuée, Vojica Pejovic ?

14 R. Gaso et moi, avec le lieutenant Sikimic, nous avons essayé de faire

15 quelque chose. Nous avons compris au bout d'un certain temps qu'il faisait

16 trop noir et que nous ne connaissions pas le terrain. Il fallait que l'on

17 laisse tomber l'idée d'avancer un corps ainsi. Nous nous sommes dit qu'il

18 fallait que l'on obtienne un transport de troupes et essayer avec un tel

19 véhicule. Nous sommes revenus à Brgat.

20 Q. Excusez-moi. Est-ce que la raison puisque vous avez demandé le véhicule

21 des transports de troupes, est-ce que c'était à cause des tirs que vous

22 avez essuyés ?

23 R. Oui, sans cesse depuis Dubrovnik. Lorsque je venais dans la Niva vers

24 la Bosanka, là où j'ai rencontré Krusa et Gaso, qui portaient le corps de

25 Bogdan, un peu plus haut par rapport à là où j'étais, les balles

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1 sifflaient. J'ai dû éteindre mes lumières, car si j'avais mes lumières

2 encore, j'aurais été tué.

3 Q. D'accord.Vous n'avez pas pu retirer le cadavre de votre camarade, et

4 puis vous avez mentionné un véhicule blindé. Est-ce que c'est ce que vous

5 avez vraiment fait ?

6 R. Nous sommes allés à Brgat, au commandant de notre Défense territoriale.

7 Martinovic et Gaso sont allés dans une maison de l'autre côté de la route

8 où se trouvait le lieutenant-colonel Licanin [phon], qui était chargé des

9 communications. Lui a appelé l'amiral Jokic afin d'obtenir un véhicule de

10 transport des troupes, mais celui-ci lui a dit qu'il n'y en avait pas et

11 que le Secteur militaire naval n'en possédait pas. Quelqu'un lui a dit

12 qu'il y en avait un certainement à Trebinje. Je suis allé dans le 128e

13 véhicule appartenant à la TO de Herceg-Novi, avec trois de mes collègues.

14 Nous sommes allés à Trebinje.

15 Q. A Trebinje, vous êtes allé dans une caserne --

16 R. Oui, et nous sommes allés à la caserne de Trebinje, et là il y avait

17 mon ami Zdravko Radakovic. Je ne sais pas comment, mais il a réussi à

18 trouver un véhicule de transport de troupes, et il a dit, "cela arrive

19 rapidement et vous serez rapidement là où vous souhaitez être." C'est ainsi

20 que les choses se sont placées. Le transporteur est arrivé à Brgat très

21 rapidement, et le colonel Jovanovic et sept ou huit personnes d'entre nous

22 sont entrés dans le transporteur et nous sommes allés à Zarkovica. Le

23 colonel Jovanovic --

24 Q. Qui était le colonel Jovanovic ?

25 R. Le colonel Jovanovic, il venait de la Serbie, d'un endroit en Serbie.

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1 Au moins, c'est ce qu'on m'avait dit.

2 Q. Est-ce que vous pouvez nous dire si vous avez réussi à utiliser le

3 transporteur pour retirer le cadavre du feu Pejovic ?

4 R. Oui, nous avons pu passer jusqu'à un endroit. Ensuite, Gaso Mijatovic

5 et Gojko Pejovic, qui travaillaient tous les deux pour la MUP, ont pu

6 établir une connexion vers un poste de radio. Ensuite, ils ont appelé le

7 colonel Jovanovic et j'ai écouté la conversation. Gojko Pejovic, il était

8 dans une forêt où Budo avait été blessé. Puis, il y avait un autre homme de

9 reconnaissance de Kotor qui ne perdait pas son sang-froid et il a dit :

10 "N'essaie pas d'arriver jusqu'à nous depuis Bosanka car Bosanka est rempli

11 des soldats croates. Vous n'aurez aucune chance. Venez plutôt dans la

12 matinée de l'autre côté en suivant la route au nord. Ensuite, essayez de

13 nous évacuer."

14 Q. Très bien. Est-ce que vous pourrez nous dire combien de temps a duré

15 cette opération d'évacuation ?

16 R. Vers 1 heure, 2 heures, nous sommes rentrés à Brgat et le transporteur

17 est rentré à Trebinje. A l'aube le lendemain matin, nous devions évacuer

18 ces personnes. Cependant, le transporteur n'est pas rentré, malgré les

19 promesses. Nous avons dû organiser deux routes différentes. Un groupe est

20 allé essayer d'évacuer les blessés, et Gojko Pejovic et Milic, et moi-même

21 sommes rentrés à Trebinje afin de chercher le transporteur.

22 Ensuite, nous sommes rentrés au bout d'une heure ou deux heures et nous

23 étions au nombre de neuf. Nous nous sommes placés dans le transporteur et

24 nous sommes allés à Zarkovica. Depuis Zarkovica, nous sommes allés à

25 Bosanka, car à ce moment-là, Bosanka avait chuté et nous avons reçu une

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1 information au sujet de cela d'un capitaine du navire de guerre. De toute

2 façon, il nous a informés que Bosanka était libre.

3 Q. Est-ce que vous vous souvenez de la date ?

4 R. Ils ont été tués le 8, donc c'était le 9.

5 Q. Dites-nous, s'il vous plaît, quand est-ce que l'opération de

6 l'évacuation des corps s'est terminée ?

7 R. Ce jour-là nous avons fait de notre mieux. Nous sommes allés vers Srdj

8 et nous avons pris une route à travers la forêt.

9 Q. Monsieur Novakovic, excusez-moi. N'allez pas dans tous les détails.

10 Nous n'avons pas beaucoup de temps. Répondez de manière brève. Est-ce que

11 vous vous souvenez à quel moment l'opération de l'évacuation de ces hommes

12 s'est-elle terminée ?

13 R. Ce jour-là, nous sommes arrivé à Vojica Pejovic, et nous avons vu que

14 Vojica Pejovic était tué. Nous avons essayé de le porter, mais l'équipe des

15 hommes ne pouvait pas terminer leur tâche. Nous avons dû couvrir le cadavre

16 avec des couvertures, et nous l'avons caché dans des buissons. Le

17 lendemain, dans la matinée, nous avons organisé qu'une autre équipe

18 d'hommes aille afin d'essayer d'évacuer cadavre. Ce jour-là, nous avons

19 réussi. Nous avons évacué le cadavre en question.

20 Q. Dites-moi, s'il vous plaît, ce premier jour, vous dites que c'était le

21 8 novembre lorsque vous avez appris la mort et la blessure de vos

22 collègues. Combien de jours se sont écoulés depuis jusqu'à ce que vous ayez

23 pu terminer l'opération de l'évacuation des cadavres et des personnes

24 blessées ?

25 R. L'opération a duré jusqu'au 11. Le 10, il y a eu un évènement bien

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1 connu à Herceg-Novi, à Kumbor, devant la caserne militaire. Il y a eu des

2 manifestations organisées par les habitants de Herceg-Novi et leurs

3 familles qui n'étaient pas contents de la situation. Ils se sont rassemblés

4 devant la caserne, ils critiquaient la manière dont les choses

5 progressaient très lentement et de manière mal organisée. Ils disaient que

6 tout ne devait pas se dérouler aussi lentement.

7 Q. Est-ce que vous-même, vous y étiez ?

8 R. Non, j'ai simplement entendu parlé de cela de la part de mes amis car,

9 la veille, j'étais à Bosanka, j'essayais d'évacuer les morts et les

10 blessés.

11 Q. Les hommes de votre unité, est-ce qu'ils ont participé à ces

12 protestations ?

13 R. Je ne sais pas. Je ne me souviens pas, je ne sais pas. Je me souviens

14 que ceci s'est déroulé, mais je ne sais pas qui a assisté.

15 Q. Est-ce que vous pourriez me dire, vous avez mentionné le nom de

16 Komarica, c'est le nom d'un soldat qui a assisté à l'opération de

17 l'évacuation des blessés de votre unité. Est-ce que vous pouvez me dire qui

18 c'est ?

19 R. Il s'appelle Marko Komarica. Il était soldat du, bien connu, 3e

20 Bataillon. C'était un jeune homme âgé de 18 ans. Au cours de l'opération de

21 l'évacuation de Vlado Zarubica, lorsque personne n'osait l'évacuer,

22 beaucoup de personnes ont refusé cela, il a fait preuve de beaucoup de

23 courage, et il a évacué le corps de Vlado Zarubica. Il est devenu très

24 populaire à Herceg-Novi. C'est à cause de cela que je l'ai rencontré.

25 Jusqu'à la fin de son service militaire, nous avons eu un très bon contact

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1 et nous étions de bons amis.

2 Q. Vous avez mentionné le 3e Bataillon. Quel 3e Bataillon ? Vous avez dit

3 que Komarica était membre du 3e Bataillon.

4 R. Il était soldat dans le 3e Bataillon.

5 Q. Oui, mais quel 3e Bataillon ? Qui était le commandant de ce bataillon ?

6 Est-ce que vous savez, sous le contrôle de qui était placé Komarica ?

7 R. C'était Vladimir Kovacevic qui commandait, surnommé "Rambo". Il était

8 le commandant de Komarica.

9 Q. Après ces évènements et après l'opération de l'évacuation des blessés

10 et des morts, est-ce que vous avez revu Komarica ?

11 R. Oui, j'ai vu Komarica plusieurs fois après cette opération, après cet

12 acte courageux de sa part. Je l'ai visité plusieurs fois. Il était à

13 Bosanka. C'est là que son unité était stationnée. Je suis allé le voir

14 plusieurs fois.

15 Q. Très bien. Dites-moi, s'il vous plaît, où étiez-vous exactement le 6

16 décembre 1991 ?

17 R. Le 6 décembre 1991, j'étais déjà chez moi, mais je n'avais pas encore

18 rendu la jeep, la quatre-quatre, ni mes armes personnelles. Ce jour-là,

19 j'étais à Herceg-Novi, j'écoutais les nouvelles, et j'ai entendu qu'il y

20 avait une bataille à Srdj, et que deux hommes avaient été tués. Dès que

21 j'ai entendu cela, j'ai pris ma quatre-quatre, et je suis allé à Brgat

22 aussi vite que possible.

23 Q. Excusez-moi, mais dites-nous pourquoi vous êtes allé aussi vite à Brgat

24 ? Quelle en était la raison ?

25 R. Mon unité s'était retirée quelques jours avant cet évènement de la

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1 région, mon meilleur ami c'était ce Komarica. C'est surtout à cause de lui

2 que je me suis rendu là-bas.

3 Q. Est-ce que vous étiez préoccupé pour lui ?

4 R. Oui, j'étais préoccupé. Lorsque je conduisais là où il y a l'enseigne

5 Cavtat, là où il y a un endroit de la route où on voit très bien Srdj, j'ai

6 pu remarquer qu'à chaque minute, ou deux minutes un obus tombait sur Srdj.

7 Ce jour-là, il y avait beaucoup de vent, je voyais que le vent dispersait

8 la fumée de l'obus. Moi, j'y suis allé très rapidement.

9 Q. Très bien. Je vais vous poser une question. Maintenant, vous parlez de

10 la route de Brgat. Lorsque vous y êtes arrivé, est-ce que vous y êtes resté

11 quelque temps ? Brièvement, s'il vous plaît.

12 R. Non, je suis allé directement à travers Brgat, à travers Zarkovica,

13 jusqu'à Bosanka. A Bosanka, j'ai remarqué une maison pas encore terminée.

14 J'ai remarqué quelques soldats autour de la maison. C'est là que je me suis

15 garé. Je suis sorti de mon véhicule, je suis entré dans cette maison. La

16 maison était pleine de nos soldats, et entre ces soldats-là, se trouvait,

17 je pense que c'était le capitaine de la frégate, Jovo Drla [phon].

18 Q. Que faisait-il là-bas ?

19 R. La situation était difficile puisque l'armée était vexée et en colère

20 après la mort de leurs camarades, et Jovo est venu leur transmettre l'ordre

21 du quartier général indiquant qu'il fallait laisser tomber l'attaque contre

22 Srdj.

23 Q. Excusez-moi. Vous dites que Jovo Drla expliquait aux soldats que le QG

24 ne permettait pas que l'on attaque Srdj. Quelle a été la réaction des

25 soldats à ces propos ?

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1 R. Je vais vous dire, ils juraient contre le général Jokic et l'amiral

2 Zec. Lorsque j'ai entendu cela, puisque ceci ne m'intéressait pas

3 particulièrement, je suis sorti en dehors de la maison, et je me suis

4 adressé aux soldats qui se trouvaient dehors, demandant où était Marko

5 Komarica ? Ils m'ont dit --

6 Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Excusez-moi, je vais interrompre. Un

7 nom manque après le nom Zec. Est-ce que le témoin pourrait répéter cela ?

8 C'est la page 40, ligne 16 : "Les soldats ont juré contre Zec et" une autre

9 personne.

10 LE TÉMOIN : [interprétation] L'amiral Jokic.

11 M. RODIC : [interprétation]

12 Q. S'agissant de ces corrections, je vais vous demander, en fait, de

13 répéter comment le 6 décembre les choses se sont déroulées, qu'est-ce qui

14 vous a poussé à prendre la route de Bosanka ? Qu'est-ce qui est arrivé ?

15 R. J'ai entendu à la radio Herceg-Novi que des opérations de combat

16 avaient éclaté à Bosanka, et qu'il y avait deux morts. C'est pour cela que

17 je suis parti.

18 Q. Excusez-moi. Quand est-ce que cela s'est passé exactement ?

19 R. C'était le 6 décembre, exactement à 15 heures. J'ai entendu cela à la

20 radio Herceg-Novi.

21 Q. Merci. Est-ce que lorsque vous étiez à Bosanka --

22 Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Je vais vous interrompre. Excusez-moi,

23 je pense que le témoin a, déjà, dit préalablement qu'il y avait eu une

24 bataille à Srdj, et mon éminent collègue a posé sa question de nouveau, et

25 il a amené le témoin à dire Bosanka. Je pense que ceci n'est pas approprié

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1 du tout.

2 M. RODIC : [interprétation] Peut-être que vous avez mal compris ce que je

3 souhaitais dire. Nous ne contestons pas, du tout, le fait qu'il y ait eu

4 des combats à Srdj.

5 J'ai demandé au témoin de répéter pourquoi il est allé de Herceg-Novi

6 vers Bosanka. Puisqu'il n'a pas été consigné, au compte rendu d'audience,

7 lorsque le témoin a dit qu'il écoutait la radio quand il a entendu que deux

8 soldats avaient été tués lors des combats à Srdj. Je ne souhaitais pas, du

9 tout, amener le témoin à dire quoi que ce soit, mais simplement qu'il est

10 allé vers Bosanka en raison des combats à Bosanka.

11 Q. Monsieur Novakovic, est-ce d'après ce que vous nous avez décrit par

12 rapport à ce que vous avez entendu ou vu à Bosanka, est-ce que vous avez

13 appris, à ce moment-là, où était le soldat Marko Komarica ?

14 R. Ils m'ont dit que les personnes blessées et les morts étaient à

15 Trebinje. Moi, j'ai démarré ma voiture et je suis allé vers Trebinje. A

16 Trebinje, je suis allé dans un dispensaire ou un hôpital, j'ai demandé où

17 était la morgue. Je suis entré dans la morgue, et j'ai vu cinq personnes

18 qui avaient été tuées ce jour-là au relais de Srdj à Bosanka, près de

19 Dubrovnik. C'étaient Mesaros, Iva Divjan, Tasovac et deux noms que j'oublie

20 momentanément puisque beaucoup de temps s'est écoulé depuis.

21 Q. Très bien. Dites-moi, s'il vous plaît, est-ce qu'à Trebinje dans cet

22 hôpital, vous avez trouvé Marko Komarica ?

23 R. Non, Marko Komarica, d'après ce qu'on m'a dit à l'hôpital, avait été,

24 légèrement, blessé et avait été transféré à l'hôpital de Meljine. Moi,

25 immédiatement, j'ai démarré ma voiture et je suis allé vers Meljine à

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1 l'hôpital. A Meljine –-

2 Q. Dites-moi, s'il vous plaît, est-ce que vous avez trouvé Marko Komarica

3 à l'hôpital militaire de Meljine ?

4 R. Oui, je l'ai trouvé à l'hôpital militaire de Meljine avec ses amis,

5 Svetislav Rakovic et Bodiroga dont je ne me souviens pas du nom de famille.

6 Ils ont été blessés tous les deux. Bodiroga dans le dos lorsqu'il

7 transportait un camarade mort, Marko Komarica avait été blessé dans le

8 visage et puis, le troisième, il a été blessé mais j'ai oublié où.

9 Q. Excusez-moi, brièvement, est-ce que les blessures de

10 Rakovic et de Komarica étaient de blessures graves ?

11 R. Non, il s'agissait de blessures légères dans le visage et je les ai

12 emmenés chez moi.

13 Q. Est-ce que Komarica et Rakovic devaient rester à l'hôpital ou est-ce

14 qu'ils devaient rentrer dans leur unité ?

15 R. Non, ils étaient légèrement blessés, donc ils devaient, simplement,

16 passer la nuit à l'hôpital, et ensuite retrouver leur unité. Le troisième

17 devait y rester quelques jours. Moi, j'ai pris en charge ces deux hommes,

18 je les ai emmenés chez-moi pour qu'ils dorment chez moi et pour que je

19 puisse les amener à Brgat le lendemain.

20 Q. Dites-moi, s'il vous plaît, lorsque vous avez conduit les soldats

21 Rakovic et Komarica chez vous le 6 décembre, est-ce que vous avez parlé

22 avec eux de cette action à Srdj, de comment les choses s'étaient déroulées

23 ? Est-ce que vous avez entendu, de la part de ces personnes, quoi que ce

24 soit au sujet de la manière dont ils ont été blessés, au sujet de

25 l'ensemble de cette action ?

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1 R. Oui, lorsque nous sommes arrivés chez nous, je leur ai posé des

2 questions, je leur ai demandé comment les choses s'étaient déroulées.

3 Komarica et Rakovic m'ont dit que, le 5 décembre, ils avaient été alignés

4 quelque part, je ne sais pas vraiment où et que le capitaine du navire de

5 guerre, Zec leur a demandé qui a, suffisamment, de courage pour chasser

6 l'ennemi de Srdj. Il y a eu un silence total et, au bout de quelques

7 secondes, Bodiroga a répondu en premier, il a dit : "Moi-même."

8 Q. Excusez-moi, c'est le même Bodiroga que celui qui avait été à l'hôpital

9 militaire de Meljine ?

10 R. Oui, c'est le Bodiroga qui a été blessé lorsqu'il portait le corps de

11 Mesaros de Srdj.

12 Q. D'accord. Est-ce que quelqu'un d'autre s'est porté volontaire mis à

13 part ce Bodiroga ?

14 R. Oui, immédiatement Marko Komarica a répondu, et puis cela a été

15 Svetislav Rakovic, et puis Mesaros, et puis quelques autres hommes que je

16 n'avais jamais vus.

17 Q. Est-ce qu'ils vous ont dit quoi que ce soit d'autre concernant ce 5

18 décembre ?

19 R. Ils m'ont dit que le 5 décembre, ils s'étaient mis d'accord sur une

20 attaque contre le relais de Srdj, le lendemain le 6. On leur aurait promis

21 des gilets pare-balles et des bombes chocs. Le lendemain, ils n'ont pas

22 reçu de gilets pare-balles mais seulement des bombes chocs. C'est le

23 commandant du peloton de l'unité de Bodiroga qui les a amenées là-bas.

24 Q. Au cours de l'opération à Srdj, est-ce que quelqu'un de ce groupe où se

25 trouvait Komarica et Rakovic a été tué ?

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1 R. Oui, tôt dans la matinée, ils sont allés attaquer Srdj et le premier

2 qui a été tué, je pense qu'il avait un grade de caporal, c'était Mesaros.

3 Q. Est-ce que c'était un soldat régulier ?

4 R. Oui, c'est exact. Lorsqu'ils sont venus chez moi par la suite, après

5 leur séjour à l'hôpital de Meljine, les deux m'ont dit que c'était le

6 dernier jour du service militaire de cette personne-là, de Mesaros. Si

7 Mesaros avait survécu ce jour-là, le lendemain il allait être relâché, il

8 allait regagner sa maison pour rejoindre ses parents.

9 Q. Merci, est-ce qu'ils vous ont dit quoi que ce soit concernant la

10 manière dont l'opération de Srdj s'était déroulée ?

11 R. Oui, ils m'ont dit que lorsqu'ils sont arrivés presque au sommet de

12 Srdj, au relais de Srdj qu'ils ont essuyé des tirs depuis Dubrovnik, des

13 tirs d'obusier. Il s'agissait de tirs d'obusier violents. Ils ont subi des

14 pertes. Cinq de leurs camarades ont succombé. Komarica a eu de la chance

15 car, à chaque fois qu'il passait quelque part, cinq secondes après, un obus

16 tombait par là. Il a eu beaucoup de chance et, à chaque fois il réussissait

17 à s'échapper. Finalement, il a eu des blessures seulement superficielles.

18 Q. Est-ce que Komarica et Rakovic vous ont dit combien de temps ils sont

19 restés à Srdj ce jour-là et ce qui s'est passé par la suite ?

20 R. Ils étaient à Srdj pendant la journée. C'était en décembre, donc les

21 journées étaient courtes. Lorsque je suis arrivé, moi j'avais quitté

22 Herceg-Novi à 15 heures, et j'y suis arrivé à 15 heures 40 dans l'après-

23 midi, tout était déjà terminé. Nous ne sommes pas entrés dans beaucoup de

24 détail, mais ils étaient déjà revenus de Srdj. Les blessés et les morts

25 avaient été amenés à l'hôpital.

Page 6835

1 Q. Puisque vous êtes allé à Bosanka le 6, est-ce que vous avez vu Srdj

2 aussi ? Est-ce que vous avez vu des soldats de la JNA à Srdj ce jour-là ?

3 R. Lorsque je suis arrivé, il n'y a pas eu de soldats à Srdj. Les soldats

4 étaient à Bosanka dans une maison qui n'était pas encore terminée, encore

5 en construction.

6 Q. Très bien. Dites-moi si Komarica vous a dit où il s'est retiré depuis

7 Srdj ?

8 R. Ils se sont retirés à des positions près de cette maison, et c'est là

9 que les infirmiers et les médecins les ont évacués jusqu'aux hôpitaux.

10 Q. Komarica et Rakovic ont passé la nuit du 6 et 7 chez vous, dans votre

11 maison ?

12 R. Oui, c'est exact.

13 Q. Est-ce que le 7 décembre, vous les avez emmenés en voiture jusqu'au

14 leur unité, ou est-ce qu'ils sont rentrés tout seul ?

15 R. Non. Je les ai placés dans ma voiture et je les ai transportés à Brgat,

16 chez leur commandant, Vladimir Kovacevic, surnommé Rambo, car ils voulaient

17 lui demander de les laisser partir aux obsèques de leur camarade, Mesaros.

18 Lorsque nous sommes arrivés au couloir de l'endroit où était stationné le

19 commandant Rambo, moi, j'étais prêt de la porte, et j'ai entendu lorsque le

20 capitaine du navire de guerre, Zec, a dit au commandant Rambo Kovacevic :

21 "Jeune homme, tu vas prendre de longues vacances, maintenant." Nous avons

22 attendu un peu, et ensuite Komarica et Rakovic sont allés voir le

23 commandant Rambo Kovacevic. Ils ont demandé d'obtenir la permission pour

24 aller à Subotica pour l'enterrement. Il a rendu cela possible. Pendant que

25 j'attendais dans le couloir, je suis allé à l'extérieur un peu.

Page 6836

1 Q. Je vais vous interrompre. Vous dites que vous avez entendu quelqu'un

2 dire "Jeune homme, tu vas prendre de longues vacances, maintenant."

3 R. C'était amiral Zec. C'était un bon ami que je connaissais très bien. Je

4 reconnaissais la manière dont il parlait.

5 Q. Qui était-il ?

6 R. C'était le capitaine du navire de guerre. Par la suite, il est devenu

7 amiral.

8 Q. Comment est-ce que vous savez que c'était le capitaine Zec qui disait

9 cela ?

10 R. J'avais parlé avec lui plusieurs fois, et je connaissais très bien sa

11 voix. J'ai entendu sa voix dire à Rambo Kovacevic : "Jeune homme, tu vas

12 prendre de longues vacances maintenant."

13 Q. Est-ce que vous êtes entré dans le bureau ?

14 R. Non. J'étais dans le couloir.

15 Q. Attendez, s'il vous plaît. Comment savez-vous à qui appartenait ce

16 bureau depuis lequel parvenait cette voix ?

17 R. C'est Rakovic et Komarica qui m'ont emmené devant cette porte. C'était

18 la porte de bureau du commandant Vladimir Kovacevic. Il était tout à fait

19 logique qu'il dit cela à Vladimir Kovacevic, et on savait qu'il y avait un

20 problème puisque j'ai vu des soldats de réserve de Trebinje, d'Herzégovine

21 qui étaient rassemblés autour de ce bâtiment. De par la conversation que

22 j'ai eue avec lui, j'ai vu qu'ils avaient entendu dire que l'armée

23 souhaitait changer Rambo Kovacevic, mais qui ne leur permettrait pas. Ils

24 ont empêché son remplacement.

25 Q. Est-ce que vous avez parlé avec ces soldats ?

Page 6837

1 R. Oui. J'ai mené quelques conversations informelles avec eux. J'ai vu

2 qu'ils étaient déterminés à soutenir leur capitaine Kovacevic.

3 Q. Ont-ils expliqué la raison pour cela ?

4 R. Nous savons très bien ce qui s'est passé ce jour-là. Ils allaient

5 soutenir leur capitaine, le commandant de l'unité.

6 Q. Qu'avait dit l'armée ? Qu'expliquaient-ils ? Que disaient-ils ?

7 R. L'armée disait qu'on savait qu'une attaque contre Srdj avait eu lieu,

8 et par la suite un deuxième ordre a été émis visant à arrêter cette

9 attaque. Comme il s'agit de l'armée, l'armée était très satisfaite. Ils ne

10 voulaient pas que les choses se déroulent de cette façon-là. Ils ne

11 voulaient pas que l'on remplace un homme qui n'est coupable de rien, qu'il

12 ne faisait que protéger son armée.

13 Q. Dites-moi : est-ce que Komarica et Rakovic ont reçu l'approbation du

14 commandant pour s'absenter de l'unité ?

15 R. Oui. Une minute ou deux plus tard, il a signé leurs permissions. Je les

16 ai conduits à bord de mon véhicule à l'arrêt de bus d'Herceg-Novi où ils se

17 sont dirigés en autobus vers Subotica pour assister aux obsèques de leur

18 camarade Mesaros.

19 M. RODIC : [interprétation] Monsieur le Président, j'ai terminé

20 l'interrogatoire principal. Je vous remercie. Je remercie le témoin

21 également.

22 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Madame Somers.

23 Mme SOMERS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. C'est Mme

24 Mahindaratne qui procèdera au contre-interrogatoire de ce témoin.

25 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je vous remercie.

Page 6838

1 Contre-interrogatoire par Mme Mahindaratne :

2 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur Novakovic. Je m'appelle Madame

3 Mahindaratne, et je vais vous poser des questions de la part de

4 l'Accusation. Dites-moi, quelle est votre origine ethnique ?

5 R. Je suis de nationalité serbe.

6 Q. Vous nous avez dit avoir été mobilisé autour du 20 septembre 1991. Est-

7 ce que c'est exact ?

8 R. Oui.

9 Q. Avez-vous été mobilisé pour participer ou prendre part à l'opération de

10 Dubrovnik ? Est-ce que vous avez été informé de ce fait, que vous alliez

11 participé à l'opération de Dubrovnik ?

12 R. Non. On m'a simplement appelé pour faire un exercice militaire qui

13 avait commencé à Kamena. C'est un village situé à cinq kilomètres d'Herceg-

14 Novi.

15 Q. Lorsque vous avez été mobilisé, quel genre d'entraînement aviez-vous

16 reçu avant votre mobilisation concernant les armes, par exemple, quelle

17 était la durée de votre formation militaire ? Vous pouvez nous fournir une

18 réponse brève.

19 R. J'ai été appelé à plusieurs reprises pour faire des exercices

20 militaires en tant que soldat de réserve. Cette formation-là a duré

21 quelques jours.

22 Q. Est-ce que vous aviez une expérience concernant l'usage des armes, ou

23 bien votre mission consistait à établir les contacts

24 radio ?

25 R. Ma mission principale était de m'occuper de la radio, mais j'étais mis

Page 6839

1 au courant, également, de savoir comment opérer les armes.

2 Q. En septembre 1991, vous dites que l'unité de la Défense territoriale

3 d'Herceg-Novi avait été subordonnée au commandement supérieur. Quel était

4 le nom de ce commandement supérieur ?

5 R. Ce commandement supérieur s'appelait Secteur militaire naval de Kumbor.

6 Je ne sais pas quelle est l'appellation officielle de ce secteur, mais

7 c'est ainsi que je le connaissais, sous ce nom-là.

8 Q. Où étiez-vous basé lorsque vous avez été déployé pour prendre part à

9 l'opération de Dubrovnik ? Où était basée votre unité, l'unité de Défense

10 territoriale ?

11 R. Nous avons été appelés à assister à un exercice militaire, et non à

12 prendre part à l'attaque de Dubrovnik. C'était sur Kamena. C'était vers le

13 21 septembre. C'est ainsi que nous avons passé à Kamena, sept à huit jours.

14 Ensuite, nous avons passé à --

15 Q. Je vais vous interrompre Monsieur Novakovic pour vous demander : une

16 fois que vous avez été déployé à prendre part à l'opération de Dubrovnik,

17 où avez-vous été basé ou déployé ? Vous n'êtes pas obligé d'entrer dans

18 plus de détails. Où était déployée votre unité une fois que vous avez été

19 assigné pour prendre part à cette attaque ?

20 R. Nous sommes d'abord arrivés au village de Mikulici. C'est là que nous

21 avons passé quelques jours. Depuis Mikulici, nous avons été transférés à

22 Grude. C'est là que, pendant une période prolongée, était stationnée

23 l'unité de la Défense territoriale. C'est l'unité d'Herceg-Novi, et c'est

24 là que le commandement se trouvait également. J'ai été toujours prêt du

25 commandement parce que je devais m'occuper de la station radio. Je devais

Page 6840

1 toujours être présent dans le cas où il y aurait mauvais fonctionnement de

2 cette radio afin que je puisse la réparer si jamais il y avait un problème.

3 Q. Pendant l'opération de Dubrovnik, vous avez été situé à Grude, n'est-ce

4 pas ? Est-ce que c'est exact ?

5 R. Oui.

6 Q. A quelle distance se trouve Grude de Dubrovnik ?

7 R. Grude se trouve à mi-chemin entre Herceg-Novi et Dubrovnik, environ à

8 20 kilomètres de là.

9 Q. A quelle distance se trouve Grude de Brgat ?

10 R. C'est environ de 22 à 23 kilomètres de Brgat.

11 Q. Comment se fait-il que vous avez été présent à Brgat et que vous avez

12 été stationné à Brgat ?

13 M. PETROVIC : [interprétation] Objection, Monsieur le Président. Le témoin

14 n'a pas indiqué qu'il avait passé l'ensemble du temps à Brgat. Ce n'est pas

15 ce qu'il a dit. Je demanderais à mon éminente consoeur de faire attention à

16 ce que le témoin a dit.

17 Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Ma question n'était pas cela. Je

18 voulais simplement savoir :

19 Q. Comment se fait-il que vous étiez présent constamment à Brgat, alors

20 que votre poste d'assignation était Grude. Mon éminent confrère pourrait

21 peut-être porter attention sur ma question.

22 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Maître Petrovic, veuillez-vous asseoir

23 ? Merci, Madame Mahindaratne, d'avoir apporter ces précisions. Monsieur le

24 Témoin, pouviez-vous fournir une réponse à cette question ?

25 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, certainement. Ma tâche en tant que

Page 6841

1 mécanicien chargé de la réparation de la radio était de fournir la station

2 radio avec les groupes électrogènes sur le terrain, et de faire en sorte

3 que le groupe électrogène soit toujours chargé, que les batteries soient

4 toujours chargées. C'est ainsi que chaque fois que les batteries étaient

5 vides, je devais les recharger. C'est ainsi que je voyais tous ces unités

6 tous les jours, puisque je devais leur approvisionner en batteries.

7 Q. Qui est cette brigade qui vous appelait sans cesse pour que vous

8 remplaciez leurs batteries ? Qui est cette unité ?

9 R. C'était l'unité de la Défense territoriale d'Herceg-Novi. J'appartenais

10 à cette unité de la Défense territoriale d'Herceg-Novi. Il s'agissait d'une

11 section de notre unité.

12 Q. Est-ce que vous êtes au courrant du fait que le poste du commandement

13 du 3e Bataillon de la 472e Brigade motorisée se trouvait également à Brgat ?

14 R. Je ne le savais pas.

15 Q. Lorsque vous vous êtes rendu au poste de l'unité de la Défense

16 territoriale qui se trouvait à Brgat, est-ce que vous étiez au courrant

17 qu'il y avait d'autres installations militaires ou d'autres postes de

18 commandement à Brgat ?

19 R. Je présumais que oui, mais je ne savais pas quelles étaient ces unités

20 et qui était le commandant de ces unités. Je connaissais mon unité, et ma

21 tâche était de changer les groupes électrogènes de masse sur radio, mais je

22 ne savais jamais qui appartenait à quelle autre unité. Je connaissais

23 Komarica, qui était mon ami. Je savais qu'il appartenait à l'unité de

24 Rambo. Pour ce qui est des autres personnes, je ne savais pas de qu'il

25 s'agissait.

Page 6842

1 Q. Vous savez que Rambo, ou que le capitaine Vladimir Kovacevic, était le

2 commandant du 3e Bataillon, n'est-ce pas ?

3 R. Pardon ? Pourrez-vous répéter votre question, je vous

4 prie ?

5 Q. Est-ce que vous savez si le capitaine Vladimir Kovacevic, ou Rambo,

6 était le commandant du 3e Bataillon de la 472e Brigade motorisée ?

7 R. Oui. Je ne savais pas tout de suite au début, mais j'ai su plus tard

8 après avoir fait connaissance avec Komarica. Il m'a informé qu'il était

9 soldat du 3e Bataillon, et que son commandant était Vladimir Kovacevic,

10 appelé Rambo.

11 Q. Votre ami Komarica appartenait au 3e Bataillon ?

12 R. Oui.

13 Q. Donc, ne lui avez-vous pas rendu visite ? N'êtes-vous pas allé à

14 l'endroit où il était cantonné à Brgat ?

15 R. Oui. Oui, je me suis rendu à plusieurs reprises. Chaque fois que

16 j'allais à Brgat, je profitais de l'occasion pour aller le voir.

17 Q. Donc, vous savez que l'unité du 3e Bataillon était en effet cantonné à

18 Brgat, contrairement à ce que vous nous avez dit un peu plutôt ? Vous avez

19 dit que vous ne saviez pas que le poste de commandement du 3e Bataillon

20 était situé à Brgat. Là, vous nous dites que vous avez rendu visite à votre

21 ami qui, lui, était au poste de Brgat.

22 R. C'était un peu plus compliqué. Vous savez, son commandement se trouvait

23 probablement à Brgat, alors que lui, il se trouvait à Bosanka, à mi-chemin

24 entre Bosanka et Srdj, sous un rempart. C'est là qu'il avait une tente

25 improvisée où ils montaient la garde. Je ne lui ai pas posé des questions,

Page 6843

1 à savoir, où se trouvait son commandant, et cetera. Cela ne m'intéressais

2 pas. Je voulais surtout savoir s'il allait bien, s'il était en bonne santé,

3 s'il n'a pas été blessé. Donc, je ne lui ai jamais posé plus de questions

4 concernant son commandant, le commandement, ou autre chose.

5 Q. Donc, vous ne saviez pas où se trouvait son poste de commandement ?

6 Vous ne le saviez pas du tout ?

7 R. Non. Je ne savais pas du tout où se trouvait son commandement. Ce n'est

8 que lorsque je les ai amené pour qu'ils aient à Subotica, c'est là que j'ai

9 appris que c'était leur poste de commandement.

10 Q. Monsieur Novakovic, quel était le nom du commandant de l'unité de la

11 Défense territoriale ?

12 R. Le commandant de la Défense territoriale d'Herceg-Novi s'appelait Ilija

13 Martinovic.

14 Q. Vous étiez directement subordonné à cette personne ?

15 R. Oui.

16 Q. Il avait donc le commandement sur ces unités subordonnées ? Vous et vos

17 collègues, est ce que vous vous pliez aux ordres reçus par lui ?

18 R. Je respectais les ordres que le commandement donnait.

19 Q. Dites-nous, lui-même, se pliait-il aux ordres reçus émanant de son

20 commandement ou supérieur ? Y a-t-il des allégations, à savoir qu'il ne

21 respectait pas les ordres reçus de ses supérieurs ?

22 R. En tant que simple soldat, je ne savais pas qui lui donnait des ordres.

23 Je ne savais pas s'il se pliait à ces ordres. Je savais simplement que je

24 remplissais les ordres que je recevais. Je savais quels étaient les ordres

25 qu'il me donnait, et que je devais obéir à ses ordres.

Page 6844

1 Q. Lors de l'interrogatoire principal, vous avez dit qu'il y a eu une

2 demande qu'on voulait remplacer le capitaine Kovacevic, et que ses soldats

3 subordonnés, l'ont supporté, afin qu'il ne soit pas remplacé. Est-ce que

4 vous n'avez jamais appris, peut-être, de votre ami Komarica, que le

5 capitaine Kovacevic avait le contrôle sur ses unités subordonnées et que

6 c'était eux, en fait, qui ont respecté les ordres émis par le capitaine

7 Kovacevic ?

8 R. Bien, je savais de Komarica et d'autres que Rambo Kovacevic exerçait un

9 contrôle total sur la situation et sur ses unités, et que pour ce qui est

10 de son unité, il était un officier exceptionnellement bon.

11 Q. Y a-t-il quelque chose que votre ami Komarica ait pu vous dire ou

12 quelqu'un d'autre insinuant que le capitaine Kovacevic ne respectait pas

13 les ordres de ses supérieurs, ou qu'il était contrevenu aux ordres reçus ?

14 R. Depuis les conversations que j'ai eues avec Komarica et d'autres, je

15 n'ai pas pu conclure que Kovacevic ne respectait pas les ordres qu'il

16 recevait de son commandant.

17 Q. Vous nous avez dit que votre unité de Défense territoriale était

18 subordonnée au 9e secteur maritime. Est-ce que pendant que vous et votre

19 unité étaient déployés dans le cadre de l'opération de Dubrovnik, saviez-

20 vous, puisque votre unité était rattachée à un commandement qui était

21 particulièrement établi pour cette mission, le deuxième groupe opérationnel

22 qui avait reçu pour mission de mener à bien l'opération de Dubrovnik. Est-

23 ce que vous saviez cela ?

24 R. Ce n'est pas un fait qui m'était connu. Je croyais et je pensais ou je

25 savais que j'étais subordonné au commandant de l'unité de la Défense

Page 6845

1 territoriale Martinovic et que nous faisions partie du Secteur militaire

2 naval Boka à Kumbor. Enfin, on l'appelait Boka, mais c'était à Kumbor. Je

3 ne savais rien d'autre. Je savais seulement que nous avions un commandant

4 d'armée, mais je ne savais qui il était exactement, je savais qu'il était à

5 Belgrade. Je ne me souviens pas. En général, fort probablement, mais je ne

6 me souviens pas de son nom.

7 Q. Est-ce que vous aviez entendu parler du "2e Groupe opérationnel" avant

8 ?

9 R. Non.

10 Q. Est-ce que vous avez jamais entendu du général Strugar, du général

11 Pavle Strugar qui est l'accusé en l'espèce ?

12 R. Je n'ai entendu parler du général Strugar que lorsque j'ai été député à

13 l'assemblée de la municipalité de Novi. Lorsque notre armée s'est retirée

14 sur les frontières, nous avons eu une réunion extraordinaire de

15 l'assemblée, et lors de cette réunion, le général Pavle Strugar était

16 présent. C'est là que je l'ai vu pour la première fois. Je n'ai pas fait sa

17 connaissance personnellement par contre.

18 Q. Est-ce que vous saviez que le général Strugar était, en fait, l'ancien

19 commandant de la Défense territoriale d'Herceg-Novi ? Ou plutôt, je me

20 reprends, le Procureur du Monténégro. Est-ce que vous le saviez, vous étiez

21 vous-même dans la Défense territoriale, et donc, c'était votre commandant,

22 le commandement de la Défense territoriale de Monténégro était le général

23 Pavle Strugar ?

24 R. Malheureusement, je ne le savais pas.

25 Q. Vous dites que vous ne saviez pas que le général Strugar était impliqué

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1 de quelque sorte que ce soit dans l'opération de Dubrovnik ? C'est ce que

2 vous nous dites aujourd'hui ?

3 R. Je ne l'ai jamais vu sur le théâtre des opérations du Dubrovnik.

4 Q. Je ne voulais pas savoir si vous l'aviez jamais vu à cet endroit-là,

5 mais je voulais savoir si vous saviez que le général Strugar était le

6 commandant de l'opération de Dubrovnik ?

7 R. Non, je ne le savais pas. Je croyais que s'agissant de l'opération de

8 Dubrovnik, que jusqu'à la mort de Krsto Djurovic, c'était lui qui était à

9 la tête de cette opération et que suite à la mort de Krsto Djurovic, que

10 c'était ensuite Miodrag Jokic. Je croyais même que Rambo Kovacevic et son

11 unité, je croyais qu'ils faisaient tous partie de la marine militaire de

12 Boka.

13 Q. Est-ce que vous saviez que l'un des objectifs de la guerre à laquelle

14 vous avez pris part était de maintenir le blocus naval et maritime autour

15 de Dubrovnik ?

16 R. Je ne suis qu'un simple soldat. Je ne connaissais pas les détails. Mais

17 je sais simplement que notre objectif n'a jamais été l'attaque contre

18 Dubrovnik. Si cela avait été notre but, nous aurions pu le bombarder à

19 n'importe quel jour ou tous les jours.

20 Q. Je vous demanderais de vous en tenir à mes questions.

21 Je joins, d'après ce que vous avez dit, vous nous avez dit que vous aviez

22 l'impression que l'opération de Dubrovnik devait être menée par le 9e

23 Secteur naval, et que vous ne saviez pas que le 2e Groupe opérationnel et

24 que son commandement jouaient quel que rôle que ce soit pour ce qui est de

25 ces opérations ? Est-ce que c'est ce que vous nous avez dit ? Est-ce que je

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1 vous ai bien compris ?

2 R. Je ne le savais pas. Je ne savais pas si cela est correct ou non, il

3 faudrait juger de cela. Mais je n'avais absolument pas l'impression que

4 nous étions subordonnés à qui que ce soit.

5 [Le conseil de l'Accusation se concerte]

6 Mme MAHINDARATNE : [interprétation]

7 Q. Excusez-moi, Monsieur le Président. Vous nous avez parlé d'avoir pris

8 part aux réunions de l'assemblée municipale. Etiez-vous membre de

9 l'assemblée municipale ?

10 R. Oui, j'ai été député en 1990, 1991, 1992 et peut-être même en 1993.

11 Q. Vous étiez affilié à quel parti politique ?

12 R. J'étais affilié à la Ligue de communiste de Yougoslavie qui, au cours

13 de cette période entre 1991 et 1992, s'était transformée en Parti

14 démocratique des socialistes du Monténégro. Je n'étais jamais devenu leur

15 membre, mais j'étais simplement un député. J'ai maintenu mon mandat jusqu'à

16 la fin. Je suis resté membre de la Ligue des communistes mais je n'ai

17 jamais pris mon livret de ce nouveau parti, le Parti socialiste

18 démocratique du Monténégro.

19 Q. C'est le parti connu sous le nom du SDS ?

20 R. Non, c'est le Parti démocratique des socialistes dont le président

21 était Momir Bulatovic et dont le président actuel est Milo Djukanovic.

22 Q. Monsieur, est-ce que vous connaissez Predrag Bulatovic ?

23 R. Je le connais personnellement, mais j'avais parlé de Momir Bulatovic.

24 Q. Oui, je sais très bien de quoi vous avez parlé. Mais je voulais

25 simplement savoir la chose suivante : le vice-président, M. Momir

Page 6848

1 Bulatovic, le vice-président Bulatovic, avait-il un lien de parenté avec

2 vous ? Effectivement, est-ce que vous avez un lien de parenté ? N'êtes-vous

3 pas son neveu ?

4 R. Moi-même et Predrag Bulotovic, nous n'avons aucun lien de parenté. Nous

5 ne sommes pas en lien de parenté. Mais puisque j'étais membre de la Ligue

6 des communistes de Yougoslavie, mon parti était en coalition avec son

7 parti, c'est-à-dire, que nous nous connaissons, car nous avons eu des

8 contacts entre les partis.

9 Q. Lorsque mon éminent confrère vous a demandé si vous aviez un casier

10 judiciaire, vous avez répondu par la négative. N'avez-vous pas été condamné

11 pour le meurtre d'une femme en 1992 ou 1991 ?

12 R. Je vais vous dire où se trouve le problème. Le neveu de Predrag

13 Bulatovic s'appelle Slobodan Novakovic, il porte le même nom que moi. Je ne

14 l'ai jamais vu de ma vie, et nous n'avons aucun lien de parenté. C'est

15 quelque chose que j'ai su par hasard de Nenad Vulevic qui se trouvait avec

16 lui en prison alors qu'il purgeait sa peine à Spuz, dans la prison de Spuz.

17 Je n'ai jamais été condamné, et ce Slobodan Novakovic, je ne l'ai jamais vu

18 auparavant. Tout ce que je peux vous dire, c'est que j'avais déjà entendu

19 parler de lui, de ce Nenad Vulevic.

20 Q. Vous dites que vous n'avez pas de casier judiciaire, n'avez-vous pas

21 été trouvé coupable de méfaits dans la cour d'Herceg-Novi pour un crime qui

22 a été commis en tant que membre de la Défense territoriale à Herceg-Novi ?

23 R. Non. A Tivat, j'ai été demandé de comparaître devant le tribunal. Un

24 réserviste, je ne me souviens pas de son nom présentement, il y avait

25 procès intenté contre lui, il m'a demandé de venir témoigner pour lui, et

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1 il voulait que je témoigne que je ne l'ai jamais vu prendre part à des

2 méfaits ou des vols. C'est ainsi que j'ai témoigné pour lui.

3 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Le temps est peut-être venu pour

4 prendre la pause, Madame Mahindaratne ? Qu'est-ce que vous en dites ?

5 Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

6 --- L'audience est suspendue à 17 heures 30.

7 --- L'audience est reprise à 17 heures 53.

8 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Oui, Madame Mahindaratne, vous pouvez

9 continuer.

10 Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

11 Q. Monsieur, juste avant la pause, je vous ai demandé si vous étiez accusé

12 et poursuivi pour vol aggravé devant le tribunal de première instance

13 d'Herceg-Novi. Là, je vous affirme qu'en réalité, vous avez été accusé de

14 vol aggravé, et ceci, le 12 février 1992. Est-ce exact ? Est-ce faux ?

15 Comment répondez-vous ?

16 R. C'est faux.

17 Q. Pourquoi ?

18 R. Parce que, j'ai été témoin d'un membre de la réserve, Zika

19 Milosavljevic. Je pense qu'il était, lui, accusé des choses semblables.

20 J'ai été convoqué en tant que témoin. C'était à Tivat, ce n'était pas à

21 Herceg-Novi. C'était auprès du tribunal militaire de Tivat que j'ai

22 témoigné. J'ai dit que je ne l'ai pas vu participer à un quelconque vol.

23 Q. Nous allons passer à un autre sujet. Vous deviez vous occupez

24 principalement des communications radio autour de Dubrovnik, et ceci dans

25 le cadre des opérations au Dubrovnik. Pourriez-vous nous dire quelle était

Page 6850

1 la situation en ce qui concerne les communications par la radio des forces

2 JNA à l'époque ? Est-ce que c'était un système efficace qui fonctionnait à

3 l'époque ?

4 R. Oui, c'était un système qui fonctionnait assez bien. Nous, au sein de

5 la TO d'Herceg-Novi, nous pouvions établir la connexion avec toutes nos

6 unités. C'est ce que je peux vous dire au sujet de mes unités. Cela étant

7 dit, je ne sais pas quelle était la situation dans d'autres unités.

8 Q. Au cours de l'interrogatoire principal, vous avez dit que votre base à

9 Grude était à côté du poste de commandement de l'armée. Quel était ce poste

10 de commandement ?

11 R. C'était le poste de commandement du secteur naval. C'est là que se

12 trouvaient les commandants de l'unité, si c'est comme cela qu'on dit. A

13 l'époque, il avait, je pense, le grade de capitaine de 1ère classe, et il

14 s'appelait, enfin, il s'appelle toujours -- justement, il est ici avec moi

15 en ce moment, à La Haye. Nous sommes dans le même hôtel. Il s'appelle Gojko

16 Djurasic. C'était Gojko Djurasic qui à l'époque, je pense, avait le grade

17 de capitaine de 1ère classe.

18 Q. Votre base était juste à côté de la base du capitaine Djurasic, à

19 l'époque, et à cause de cela, vous deviez le connaître, n'est ce pas ?

20 R. C'est vrai qu'il était tout près, mais vous savez, nous dépendions de

21 la Défense territoriale d'Herceg-Novi. Moi, je le connaissais

22 personnellement, tout à fait par hasard, parce que j'avais un service des

23 réparations, et je suis allé chez lui, à la maison, pour réparer sa

24 télévision. C'est comme cela que je le connaissais. Mais en ce qui concerne

25 le front, nous n'avions rien à faire en commun.

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1 Q. Vous avez dit que vous êtes retourné chez vous à Herceg-Novi fin

2 novembre, début décembre, ce qui veut dire que vous n'avez pas assisté aux

3 évènements qui se sont produits le 6 décembre, au matin à Dubrovnik, et

4 autours de Dubrovnik.

5 R. Oui, c'est exact.

6 Q. Vous avez entendu ce qui s'est passé par la radio, n'est-ce pas ?

7 R. C'est exact, je l'ai entendu à la radio. De mon propre gré, sur ma

8 propre initiative, j'ai démarré ma voiture, je me suis rendu à Bosanka.

9 Q. A quelle heure entendez-vous ce qui se passe à Dubrovnik ? A quel

10 moment l'entendez-vous à la radio ?

11 R. Je l'ai entendu à 15 heures sur les ondes de la radio Herceg-Novi.

12 C'était le journal, les informations.

13 Q. Excusez-moi, Monsieur le Président, je pense que j'ai un problème

14 d'interprétation, puisque je n'entends rien du tout, peut-être y a-t-il une

15 erreur dans le système.

16 R. Puis-je répéter.

17 M. PETROVIC : [interprétation] Monsieur le Président, excusez-moi Monsieur

18 le Président, sur le canal 6.

19 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Nous n'entendons pas la traduction

20 mais à présent, tout va bien, nous l'entendons à nouveau, à la différence

21 de tout à l'heure.

22 M. PETROVIC : [interprétation] Malheureusement, Monsieur le Président, je

23 dois dire que nous n'avons pas la traduction sur le canal numéro 6, la

24 traduction vers le B/C/S.

25 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je ne sais pas ce qui s'est passé,

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1 peut-être pourrait-on vérifier ce qui se passe. Apparemment, tout

2 fonctionne à nouveau. Merci.

3 Mme MAHINDARATNE : [interprétation]

4 Q. Pourriez-vous, à nouveau, répondre à ma question ? Encore une fois, je

5 vous ai demandé à quelle heure vous avez entendu la nouvelle de ce qui

6 s'est passé à Dubrovnik sur les ondes de la radio ? A quelle heure ?

7 R. Le 6 décembre 1991, à 15 heures, j'étais en train d'écouter les

8 informations sur la radio locale, et la speakerine a dit qu'il y avait des

9 batailles à Srdj, qu'il y avait de deux tués. Je suis sorti de chez moi, et

10 sur ma propre initiative, j'ai démarré la 4 X 4, que je n'avais pas encore

11 vendue, et je suis allé au plus vite à Bosanka.

12 Q. A 15 heures le 6 décembre 1991, d'après ce que vous avez entendu sur

13 les ondes de la radio, au moment des informations, vous avez entendu qu'il

14 y avait des combats à Dubrovnik en ce moment précis ? C'est ce que vous

15 avez entendu ?

16 R. Oui, oui.

17 Q. Vous partez de chez vous et où allez-vous ? Quel est le premier endroit

18 où vous vous rendez ?

19 R. Je suis allé directement à Bosanka. Je suis parti d'Herceg-Novi et je

20 suis allé à Bosanka.

21 Q. Cela vous a pris combien de temps ?

22 R. Entre 35 et 40 minutes.

23 Q. Au cours de l'interrogatoire principal, vous avez dit que vous êtes

24 passé par Brgat, Zarkovica, et qu'à la fin, vous êtes arrivé à Bosanka,

25 est-ce exact ?

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1 R. Oui.

2 Q. En passant par Zarkovica, maintenant, vous avez dû entrevoir les

3 activités de combat à Zarkovica, n'est-ce pas ?

4 R. Non. Quand je suis passé près de Cavtat, juste au moment où il y a les

5 tableaux indiquant Cavtat, on a une très belle vue sur le répétiteur Srdj.

6 C'est uniquement à ce moment-là que j'ai pu voir quelques obus tombés sur

7 le répétiteur de Srdj, entre trois et six. Mais comme il y avait les vents

8 du nord d'assez forte intensité, qui soufflait du nord vers le sud, j'ai vu

9 la fumée emportée par les vents, la fumée des obus, de Cavtat et pas de

10 Zarkovica.

11 Q. Quand vous êtes passé par Zarkovica, je vous ai demandé si vous avez pu

12 voir des activités de combat ou est-ce qu'à ce moment-là tout était fini ?

13 R. À ce moment-là, tout était fini.

14 Q. A quel moment ils sont passés par Zarkovica ?

15 R. Si je suis arrivé en l'espace de 40 minutes, et cela veut dire que

16 trois minutes plus tôt j'étais à Zarkovica, puisque entre Zarkovica et

17 Bosanka, vous avez besoin de trois minutes de conduite à peu près.

18 Q. Pourquoi avez-vous pris cette route-là ? Est-ce la route habituelle,

19 normale que vous prenez pour aller à Bosanka ou est-ce que vous avez décidé

20 de passer par Zarkovica ?

21 R. Non, je n'avais aucune raison de m'arrêter à Zarkovica, car Komarica --

22 Q. Monsieur Novakovic, je vous ai demandé pourquoi êtes-vous passé par là,

23 par Brgat, Zarkovica, pour aller à Bosanka ? Pour quelle raison êtes-vous

24 passé par là ? Etait-ce la route habituelle que vous empruntiez pour vous

25 rendre à Bosanka ou avez-vous une raison particulière de passer par

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1 Zarkovica ? Ceci est la question que je vous ai posée.

2 R. Entre Zarkovica et Bosanka, vous avez deux routes. Il y a une route

3 goudronnée, assez rapide. Ensuite, vous avez une route qui n'est pas

4 goudronnée, serpentée. C'était tout à fait logique d'emprunter la route

5 goudronnée puisque cela prenait moins de temps.

6 Q. Vous avez dit que le lendemain de cet événement, vous vous êtes rendu

7 au poste de commandement du 3e Bataillon de la 472e Brigade motorisée. Où se

8 trouvaient ces postes de commandement ?

9 R. A Brgat.

10 Q. Comment le saviez-vous ? Comment saviez-vous que le poste de

11 commandement du 3e Bataillon était là-bas ?

12 R. Je ne le savais pas, mais avec moi dans le véhicule, il y avait Marko

13 Komarica et Svetislav Rakovic, qui m'ont emmené jusqu'à leur poste de

14 commandement, et c'est ce jour-là que j'ai appris que le commandement se

15 trouvait là, et qu'ils ne dépendaient pas du secteur naval mais de l'autre

16 corps d'armée, celui du général Strugar.

17 Q. Comment avez-vous appris que ces personnes avec lesquelles vous parliez

18 n'étaient pas subordonnées au 9e Secteur naval, mais au contraire, au

19 général Strugar ? Qui vous a dit cela ? Comment l'avez-vous appris ?

20 R. Je viens de vous le dire, l'unité de Rambo Kovacevic se trouvait en

21 quelque sorte sur notre terrain. Moi, je n'étais pas du tout au courant du

22 fait qu'ils étaient subordonnés au général Strugar. C'est après coup, quand

23 tout cela s'est terminé, quand nous sommes allés demander la permission

24 pour ces deux soldats de se rendre à Subotica, ce n'est qu'à ce moment-là

25 que j'ai compris que l'unité de Marko Komarica était subordonnée à cette

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1 autre unité, l'unité du général Strugar, mais pas au secteur naval. Car

2 moi, j'étais un simple soldat et ces détails ne m'intéressaient pas. Je

3 n'étais pas intéressé par les questions de subordination.

4 Q. Comment avez-vous compris que cette unité-là dépendait du général

5 Strugar ?

6 R. Maintenant quand j'y pense, même à l'époque d'ailleurs ou peut-être

7 vraiment la fin de la journée, aurais-je compris que le capitaine du

8 vaisseau de guerre Zec avait dit à Kovacevic que maintenant il allait

9 partir en permission, une permission assez longue. C'est là que j'ai vu des

10 membres de la réserve qui ont dit : "Non, il ne faut pas remplacer Rambo,

11 ne le laissons pas se faire remplacer."

12 Ce n'est que là que j'ai compris que cette unité ne dépendait pas du même

13 commandement que le mien, mais qu'elle était placée sous le commandement du

14 général Strugar. Je ne l'ai appris que plus tard. Je ne l'ai réalisé que

15 plus tard, car je ne pouvais pas le savoir. Comment voulez-vous que je

16 sache qu'ils dépendaient de Strugar et pas de nous ou du secteur naval de

17 Boka.

18 Q. Ce que vous dites est que la façon dont ils se comportaient à l'époque

19 vous a fait comprendre que c'étaient les hommes de Strugar, comme vous

20 l'avez dit, et qu'ils ne répondaient pas du secteur naval ?

21 R. Oui. Je leur ai demandé d'où ils venaient, et ils m'ont dit qu'ils

22 étaient en partie de Trebinje, en partie de Bileca. Ce n'est que là que

23 j'ai compris, de la bouche de ces simples soldats, les membres de la

24 réserve, qu'ils ne dépendaient pas du secteur naval de l'amiral Jokic, mais

25 qu'ils étaient autre chose. Mais à l'époque, je ne savais même pas que

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1 c'était le général Strugar qui était le commandant. J'ai tout simplement

2 compris qu'ils dépendaient de quelqu'un d'autre.

3 A l'époque, je ne savais même pas qui était Strugar et je n'ai pas compris,

4 à l'époque, que c'était lui le commandant.

5 Q. Quand vous parlez de "eux," est-ce que vous parlez des membres du 3e

6 Bataillon motorisé de la 472e Brigade ?

7 R. Ce 3e Bataillon, son commandant était Rambo Kovacevic. Il y avait des

8 soldats, et puis, il y avait des soldats qui faisaient partie de la

9 réserve. A l'époque, j'étais en contact avec Rakovic Svetislav et Komarica.

10 Mais moi, au cours de cet entretien avec Komarica, c'est vrai que je ne lui

11 ai jamais demandé qui était son commandant. Moi, j'ai pensé tout bonnement

12 que ces unités d'Herceg-Novi et nous-mêmes, que nous relevions de la même

13 autorité et qu'ils ne nous étaient pas subordonnés et que, nous, on n'était

14 pas leur subordonné non plus, et que nous dépendions d'un même

15 commandement.

16 M. PETROVIC : [interprétation] Le témoin, à la ligne 20, page 65, a dit que

17 c'était une unité d'Herzégovine et pas d'Herceg-Novi.

18 Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Oui, j'ai compris qu'il s'agissait

19 d'unités d'Herceg-Novi. Est-ce que je peux reposer la question au témoin ?

20 Q. Monsieur le Témoin, qu'est-ce vous venez de dire ? Vous avez dit qu'il

21 s'agissait d'une unité d'Herceg-Novi ou d'une unité d'Herzégovine, et que

22 vous étiez au même niveau. Qu'est-ce que vous avez dit ?

23 R. Des unités d'Herzégovine. Vous comprenez-vous, que ces unités soient

24 d'Herceg-Novi, ce n'est pas logique; de l'Herzégovine. C'est ce que j'ai

25 dit, de l'Herzégovine.

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1 Q. Quand vous avez dit que le capitaine a dit quelque chose du genre :

2 "Jeune homme, tu vas prendre de longues vacances," qu'est-ce que vous avez

3 compris ? Est-ce que vous avez eu l'impression que le 9e Secteur naval

4 voulait le remplacer, l'éloigner ? C'est ce que vous avez compris ? Comment

5 avez-vous compris l'essence de cette déclaration ?

6 R. Je pensais à l'époque que Rambo Kovacevic dépendait du 9e Secteur

7 naval, car le capitaine du vaisseau de guerre, Zec, lui a dit : "qu'il

8 allait prendre de longues vacances." C'est pour cela que j'avais

9 l'impression qu'il était des nôtres et qu'il ne venait pas de

10 l'Herzégovine.

11 Q. Ensuite, vous avez changé d'avis à cause de quelque chose qui s'est

12 produit ?

13 R. Je ne pouvais pas changer d'avis. Je le sais parfaitement bien. Peut-

14 être que quelque chose a été mal traduit. Vous deviez peut-être relire le

15 compte rendu d'audience. Mais je suis tout à fait prêt à tout vous répéter.

16 Q. Je vous ai demandé si, au moment où le capitaine Zec a dit à ce jeune

17 homme : "Tu vas prendre de longues vacances," est-ce que vous avez eu

18 l'impression, à ce moment-là, qu'on essayait de le remplacer, qu'on

19 essayait de l'éloigner ? Comment avez-vous compris cela ?

20 R. J'ai compris que, d'après le capitaine Zec, il avait fait un certain

21 nombre de fautes et qu'il allait être éloigné de l'unité en quelque sorte.

22 A l'époque encore, je pensais que Rambo Kovacevic était subordonné à Zec et

23 que Zec était subordonné à Jokic. C'est l'impression que j'ai eue à

24 l'époque encore.

25 Q. Mais ensuite, après être entretenu avec d'autres membres du 3e

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1 Bataillon, vous avez compris, n'est-ce pas, que c'étaient les hommes de

2 Strugar, comme vous l'avez dit, n'est-ce pas ?

3 R. Oui, c'est exact. Après avoir vu les membres de la réserve qui étaient

4 venus pour encercler les bâtiments du commandement, pour justement empêcher

5 le remplacement de Rambo Kovacevic, et quand j'ai compris que personne

6 d'Herceg-Novi ou de Boka n'étaient là et qu'il n'y avait que des hommes de

7 l'Herzégovine qui étaient là, et c'est là que j'ai compris qu'il s'agissait

8 là des autres unités. Mais même à l'époque, je ne savais pas que Strugar

9 était leur commandant.

10 Q. A quel moment avez-vous appris que Strugar était leur commandant ? Le 7

11 décembre ? A quel moment l'avez-vous appris ? A quel moment l'avez-vous

12 compris ? C'est ce que vous venez de dire.

13 R. Oui, c'est vrai. Je ne l'ai compris qu'après avoir discuté avec les

14 membres de la réserve, quand j'ai vu à quel point ils étaient décidés de le

15 défendre. C'est là que j'ai compris que les choses ne se présentaient pas

16 comme je le pensais, que Rambo n'était pas subordonné au secteur naval de

17 Boka, mais à quelqu'un d'autre, à quelqu'un de l'Herzégovine. Maintenant,

18 je comprends que son unité, sa 3e Brigade, faisait partie des unités

19 commandées par Strugar. Peut-être que je l'ai compris à l'époque ou j'ai

20 commencé à regarder des émissions à la télévision où l'on parlait d'un

21 procès éventuel. Peut-être que je l'ai compris à l'époque. Je ne sais pas.

22 Q. Vous avez dit que vous aviez l'impression que les réservistes du 3e

23 Bataillon résistaient, en quelque sorte, aux officiers du secteur naval et

24 que, manifestement, ils dépendaient d'un autre commandement, n'est-ce pas ?

25 R. Non, ils n'ont pas reçu des ordres d'un autre commandement. Ils ont agi

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1 de leur propre gré. Ils voulaient défendre leur commandant Kovacevic. Ils

2 se sont opposés à la décision prise par le secteur naval de Boka donc à la

3 décision prise par l'amiral Jokic et le capitaine du vaisseau, Zec. Par

4 leur présence même, en ayant encerclé ce bâtiment, ils ont empêché sa

5 destitution, de sorte que Rambo Kovacevic est resté commandant de cette

6 unité. Ils ont réalisé leur -- ce qu'ils voulaient faire.

7 Q. Nous passons à un autre sujet. Vous avez dit que vous avez appris que

8 les troupes du 3e Bataillon sont arrivées en haut du mont de Srdj au moment

9 où, depuis la ville de Dubrovnik, on a tiré sur eux des mortiers. Quand je

10 parle de la "ville," de Dubrovnik, je parle de la région de la ville et pas

11 de la vieille ville forcément. A quel moment avez-vous appris que ces

12 unités sont arrivées en haut du mont Srdj ?

13 R. Je ne sais pas. Elles sont parties tôt dans la matinée et elles sont

14 arrivées au cours de la journée, mais je ne sais pas à quelle heure

15 exactement.

16 Q. Savez-vous à quelle heure les deux soldats se sont fait tués, puisque

17 vous avez dit que vous avez appris qu'ils sont arrivés en haut du mont et

18 qu'à ce moment-là on leur a tiré dessus depuis la ville de Dubrovnik et que

19 deux membres de cette unité se sont fait tués.

20 R. Sur la radio Herceg-Novi, ils ont dit qu'il y avait deux tués, mais en

21 arrivant à Bosanka, j'ai entendu dire -- et je les ai vus d'ailleurs dans

22 la morgue par la suite -- j'ai appris qu'ils étaient au nombre de cinq. Ils

23 sont presque tous morts à cause des obus tirés par des obusiers depuis

24 Dubrovnik.

25 Car ceux qui étaient sur le répétiteur ne pouvaient plus se défendre, et

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1 ils ont demandé de l'aide de Dubrovnik. On a commencé à tirer sur les

2 hommes de Rambo Kovacevic depuis différents points de la ville de

3 Dubrovnik. Cinq soldats se sont fait tués, et Rambo Kovacevic, pour

4 protéger ses soldats, a commencé à agir sur la ville de Dubrovnik, et ce

5 qui a dû arriver est arrivé.

6 Q. Quand vous parlez de "répétiteur," vous parlez des forces croates à

7 Srdj, et qu'elles demandaient de l'aide de leurs positions se trouvant sur

8 le territoire de Dubrovnik. C'est à ce moment-là qu'ils ont tirés sur les

9 soldats de la JNA qui ont réussi à s'approcher du mont de Srdj.

10 R. Non, ils n'étaient pas vraiment dans la région de Dubrovnik au sens

11 large du terme. Ils étaient dans la ville même de Dubrovnik, à l'intérieur

12 de la ville. Ils ont tiré à partir d'un certain nombre de points. Je me

13 souviens de ce que Komarica m'a raconté. Il m'a bien décrit quels étaient

14 ces points depuis lesquels ils avaient tiré. Ils étaient près des hôtels.

15 Ils ont tirés de Dubrovnik, de la ville, et c'est comme cela qu'ils ont

16 tués ces gars-là. Je ne sais pas quels étaient ces points, mais en tout

17 cas, c'était au centre-ville. Ils étaient dans le centre de Dubrovnik, et

18 c'est depuis le centre de la ville qu'ils ont tiré.

19 Q. Si je vous donne des noms comme Babin Kuk, Lapad, Dubravka, est-ce que

20 c'est bien cela les localités dont vous parlez ?

21 R. Dubravka, non. Lapad, peut-être. Babin Kuk, oui, pourquoi pas, oui. Là,

22 il y a aussi l'hôpital de Medarevo. C'est là que -- les obusiers étaient

23 justes derrière l'hôpital. Je ne sais pas si c'était le cas vraiment pour

24 cette opération-là, pour cette opération précise. Mais pendant que moi

25 j'étais sur le théâtre des opérations sur le front de Dubrovnik, les

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1 mortiers étaient positionnés justement derrière l'hôpital de Medarevo, la

2 maternité. Je ne sais pas si c'était le cas encore, mais je sais qu'ils

3 avaient -- s'ils étaient neutralisés à l'époque ou non. Mais je sais qu'à

4 l'époque, ils avaient ces armes près de Medarevo.

5 Q. Mais Medarevo se trouve en dehors de la vieille ville ?

6 R. Oui, oui, en effet.

7 Q. Vous avez dit que vous avez appris que, le 5, une réunion s'était tenue

8 et qu'on avait planifié d'attaquer Srdj. Excusez-moi. Je pense que vous

9 avez dit que le capitaine Zec a demandé à un certain nombre des officiers

10 de se porter volontaires pour attaquer Srdj le 6. Qui vous a dit cela ?

11 R. Marko Komarica, Svetislav Rakovic, dans ma maison, quand je les ai

12 amenés de l'hôpital Meljine. Ils sont venus chez moi pour passer la nuit.

13 Comme cela, je pouvais les conduire le lendemain matin.

14 Q. Qui était présent au moment où le capitaine Zec leur a demandé cela ?

15 Est-ce qu'il y avait d'autres soldats présents ?

16 R. Bodiroga, c'est sûr qu'il était là. Mesaros, c'est sûr qu'il était là.

17 Mais je ne les ai pas vus. Je me souviens seulement de ce que ces deux

18 soldats m'ont raconté. Ils m'ont dit que le capitaine Zec a demandé qui

19 avait suffisamment de courage pour chasser ces vieilles bonnes femmes de

20 Srdj. Bodiroga s'est porté volontaire, et Komarica Rakovic et Mesaros. Ils

21 faisaient partie de son peloton et donc ils ont participé à cela. Mais vous

22 savez, ce n'était pas la seule unité qui a participé à cela. L'attaque

23 était menée depuis plusieurs positions. Je ne sais que ce qui s'est passé

24 sur cette position-là.

25 Q. Les personnes dont vous avez parlé, les personnes qui se sont fait tués

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1 au cours de l'opération en novembre et vous avez participé à leur

2 évacuation, pouvez-vous nous dire quelle était l'unité à laquelle ils

3 appartenaient ?

4 R. C'était la Défense territoriale Herceg-Novi. Ceux qui se sont fait tués

5 appartenaient à la Défense territoriale de Herceg-Novi. Pendant leur

6 évacuation, Baja Bajkovic -- Baja s'est fait tué, ainsi que Baja Radovic de

7 Niksic. Ils ne faisaient pas partie de la Défense territoriale d'Herceg-

8 Novi, mais ils se sont fait tués en essayant d'évacuer nos hommes. Trois de

9 nos hommes se sont fait tués, et sept à dix personnes ont été blessées.

10 Q. Ils ont été blessés au cours de l'opération pendant la période entre le

11 8 et le 13 novembre, n'est-ce pas ? Ils ont été tués dans le cadre des

12 opérations de combat ?

13 R. Non. Les membres de l'unité spéciale d'Herceg-Novi, ce jour-là, ils

14 s'effectuaient une percée à Brgat depuis Dubac, et ils se sont arrivés à

15 Brgat dans l'après-midi et ils sont allés dans une maison. A ce moment-là,

16 le colonel Jovanovic, appelé Kurd, est arrivé vers eux et il leur a proposé

17 d'aller en reconnaissance avec eux, ce qu'ils ont accepté. Mais, en

18 réalité, il les a amenés dans des combats directs, le 8 novembre, à

19 Bosanka.

20 Q. Est-ce que vous savez que le 3e Bataillon a participé aux opérations

21 menées en novembre ? Est-ce que vous savez que, dans les opérations de

22 combats menés par la JNA, le 3e Bataillon de la 3e Brigade motorisée et la

23 472e Brigade motorisée ont participé également ? Est-ce que vous le savez ?

24 R. Je ne le savais pas. Vous savez, je ne connaissais que Marko Komarica,

25 en ce qui concerne les membres de cette unité. Je ne m'intéressais pas aux

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1 autres membres. Je l'ai accepté simplement comme un jeune soldat qui avait

2 participé à l'opération de sauvetage de mes amis d'Herceg-Novi, puisque

3 certains des membres d'Herceg-Novi n'avaient pas ce courage-là, et ce Marco

4 Komarica il l'a eu, le courage, et il l'a fait, ce qui nous a permis

5 d'établir le lien. Je ne lui ai jamais posé des questions concernant les

6 autres tâches militaires, et cetera.

7 Q. Mais il a participé dans cette évacuation également ? Cette personne a

8 été présente au cours des opérations, n'est-ce pas ?

9 R. Oui, il a été présent pendant l'opération. Mais moi-même, je n'étais

10 pas présent. Vous savez, je suis mécanicien radio, et j'ai un autre travail

11 mise à part ma TO de Herceg-Novi. Je ne m'inquiétais pas des questions de

12 savoir qui appartenait à quelles unités, et cetera. Parce que, moi, tout

13 simplement, si la radio dans une unité tombait en panne, je venais avec de

14 nouvelles batteries, et cetera donc je n'ai pas tellement d'information.

15 Q. Je ne souhaite pas être malpoli, mais veuillez vous limiter à mes

16 questions dans vos réponses.

17 Ma question est de savoir si votre ami qui appartenait au 3e Bataillon a

18 participé aux opérations de combat ? Est-ce que, sur la base de cela, vous,

19 en tant qu'un homme ayant une expérience militaire, pouvez conclure que le

20 3e Bataillon a participé dans ces opérations ?

21 R. Je sais simplement que le 3e Bataillon a participé à l'attaque qui a eu

22 lieu le 6 décembre contre Srdj. Mais en ce qui concerne Bosanka, je ne

23 savais pas du tout qu'une attaque allait avoir lieu contre Bosanka. Je

24 n'avais aucune idée quant à la question de savoir qui a attaqué et qui

25 était attaqué. Même ce jour-là, j'ai demandé au commandant de me laisser

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1 partir chez moi pour que je puisse prendre ma douche et tout cela. Je ne

2 savais même pas cela, ce jour-là. Lorsque je suis arrivé chez j'ai reçu un

3 coup de fil m'informant qu'il y a eu des personnes blessées et tuées. C'est

4 à ce moment-là que je suis allé à l'hôpital.

5 Q. S'agissant des blessés et des tués, est-ce que ceci a été provoqué par

6 des tirs depuis des positions croates dans des zones comme Lapad et Babin

7 Kuk, ceux dont on a parlé avant ? Est-ce qu'ils ont tiré depuis ces mêmes

8 positions ?

9 R. Vous savez, à l'époque, Bosanka était rempli de soldats croates. L'on a

10 tiré sur eux depuis Bosanka, mais peut-être que depuis d'autres points que

11 j'ignore, puisque je n'ai pas participé à ces combats.

12 Q. Monsieur Novakovic, vous avez mentionné un certain colonel Jovanovic.

13 Est-ce vous connaissez son prénom ?

14 R. Non, je sais simplement que c'était le colonel Jovanovic et que son

15 surnom était Kurd. Il y en avait trois. Lui, il est venu de l'extérieur car

16 des deux autres, j'en connais un , Tomislav Jovanovic, il était colonel

17 dans une autre partie de l'armée chargée de la construction des routes. Ce

18 n'était pas lui, je le sais avec certitude parce que j'ai eu un petit

19 conflit avec lui à Brgat. Celui-là, je le connais très, très bien.

20 Q. Vous aviez un conflit avec qui ? Le colonel Tomislav Jovanovic ou bien

21 l'autre colonel dont vous avez parlé ?

22 R. Non, non, j'avais un conflit avec le colonel Jovanovic surnommé Kurd,

23 pas Tomislav Jovanovic. Il y en avait un troisième, Tomislav Jovanovic qui

24 est ici à La Haye. Je lui ai mentionné souvent ce colonel Jovanovic et je

25 lui ai dit, il y en avait deux et lui il me dit, mais non, il y en avait

Page 6865

1 trois.

2 Q. Vous avez eu l'occasion de parler avec le colonel Tomislav Jovanovic

3 ici à La Haye ?

4 R. Oui, nous sommes logés dans le même hôtel. Je parlais de quelque chose,

5 j'ai mentionné le colonel Jovanovic, justement parce que c'était un homme

6 assez spécial.

7 Q. Avez-vous, également, parlé avec le colonel Djurasic, je crois que, lui

8 aussi, il a été à La Haye. Est-ce que vous lui avez parlé à lui aussi ?

9 Est-ce que vous pouvez répondre un peu plus fortement parce que je n'ai pas

10 entendu ?

11 R. Ce n'est pas Djurisic, mais Djurasic, lui est dans le même hôtel que

12 moi ici à La Haye. Le plus probablement, il va comparaître devant vous au

13 cours de la semaine.

14 Q. Oui, mais ma question était de savoir si vous avez parlé de ces

15 questions-là avec lui aussi ? Est-ce que vous avez eu l'occasion de parler

16 avec lui pendant que vous étiez ici à La Haye, à l'hôtel ?

17 R. Non, nous n'avons pas parlé de ce sujet-là. Car nous n'avons pas à

18 parler de ces sujets-là parce que, lui, il travaillait à Grude. Après, il

19 est parti ailleurs. Moi, j'ai pris un autre chemin. Je ne sais même pas

20 quel est le chemin que Gojko Djurasic a pris dans la vie. Simplement, je le

21 vois à l'hôtel, je le croise. En ce qui concerne le front de Dubrovnik,

22 nous n'en parlons pas parce que nous n'avons pas tellement de points en

23 commun. Nous n'avons pas participé ensemble à des opérations, des actions.

24 Q. Monsieur Novakovic, vous avez dit que vous êtes rentré chez vous le 2

25 ou le 3 décembre, mais est-ce qu'à un moment donné, on vous a informé du

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1 fait que le 5, il y a eu des négociations afin de conclure un cessez-le-feu

2 compréhensif le 6 ? Est-ce que vous avez été informé de cela à n'importe

3 quel moment avant ou après l'incident du 6 décembre ?

4 R. Je n'ai jamais entendu parler de cela. Aujourd'hui, j'entends cela pour

5 la première fois de votre bouche.

6 Q. Est-ce que vous vous attendiez à ce que l'on vous renvoie au front

7 lorsque vous êtes rentré chez vous le 2 ou le 3 ?

8 R. Non, nous nous attendions à rien. Tout simplement, on nous a renvoyé à

9 la maison, on attendait pour voir ce que le haut commandement allait

10 décider. Ils ont décidé de nous démanteler et c'est ce qui a été fait.

11 Q. Vous avez déposé en disant que le colonel Gavro Kovacevic avait

12 informé un de vos amis du fait qu'un mortier tirait, depuis un camion, dans

13 la vieille ville. Est-ce que vous avez entendu cela de la part d'un ami

14 avec qui vous avez parlé après l'incident du mois de novembre ?

15 R. Cette nuit-là, lorsque je suis rentré de Brgat à Zarkovica la deuxième

16 fois, lorsque l'on a essayé d'aller vers Bosanka afin d'essayer de trouver

17 Vidakovic et les autres personnes blessées ou mortes qui –-

18 Q. Excusez-moi de vous interrompre. Est-ce que c'est votre ami Gaso

19 Mijatovic, excusez-moi si je prononce mal son nom, est-ce que c'est lui qui

20 vous a informé du fait que le colonel Kovacevic a dit quelque chose au

21 sujet du fait qu'il y avait des tirs de mortier depuis un camion dans la

22 vieille ville, c'était en novembre. Ma question est de savoir si vous avez

23 entendu cela de la part de Gaso Mijatovic ?

24 R. Oui, Gaso Mijatovic m'a raconté cela. Il a entendu cela dans une

25 conversation lorsqu'il est venu à Zarkovica pour demander ce qu'il se

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1 faisait là-bas, pour essayer de s'approcher du feu Vojica Pejovic. Ensuite

2 Kovacevic lui a dit --

3 Q. Nous n'avons pas beaucoup de temps. Dites-moi simplement comment Gaso

4 Mijatovic a appris cela lui-même ? Qui avait dit cela à Gaso Mijatovic ?

5 R. Gaso Mijatovic a appris cela de la part du colonel Gavro Kovacevic. Sa

6 situation était très difficile car il essuyait des tirs d'obusier toute la

7 journée depuis la vieille ville. Il a dit : "Même un mortier appelé Charlie

8 qui se trouve à Dubrovnik sur un camion a été employé pour tirer contre

9 leur position."

10 Q. Gaso Mijatovic vous a relaté cela ?

11 R. Oui.

12 Q. Cela s'est passé en novembre ?

13 R. Oui.

14 Q. Pendant les opérations de novembre, et d'après ce que disait Gaso

15 Mijatovic où était le colonel Kovacevic au moment où il a parlait avec le

16 colonel Gatrilo Kovacevic ? Où était le colonel, à l'époque ?

17 R. Le colonel Kovacevic était à Zarkovica dans son poste de commandement,

18 dans une maison. Gaso Mijatovic est entré dans cette maison pour lui

19 demander quelle était la situation à Zarkovica, et où était son ami

20 Pejovic. Il a répondu de manière correcte, tout à fait. Lorsqu'il lui a

21 posé des questions concernant son ami, le colonel Kovacevic lui a tourné le

22 dos, ensuite, Gaso Mijatovic est sorti. Je vous ai raconté ce qui s'est

23 passé ensuite. Je l'ai, déjà, dit dans ma déposition.

24 Q. Cette déclaration du colonel Kovacevic avait pour but de demander un

25 service à Gaso Mijatovic. Lorsque Gaso Mijatovic lui a demandé de lui

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1 rendre un service, le colonel Kovacevic a dit : "Je ne peux pas vous aider

2 parce que, moi-même, j'essuie des tirs depuis la vieille ville." Est-ce que

3 c'était pour cela qu'il le disait afin de refuser sa demande ?

4 R. Oui, peut-être, c'est possible.

5 Q. Depuis Zarkovica, la vision est sans obstruction vers la vieille ville

6 ?

7 R. C'est exact.

8 Q. Evidemment, cela veut dire également que depuis la vieille ville, on

9 peut voir, sans problème, Zarkovica également ?

10 R. C'est exact.

11 Q. A ce moment-là, lorsque Gaso Mijatovic a parlé avec le colonel

12 Kovacevic, est-ce qu'ils étaient, à Zarkovica, à un endroit où on pouvait

13 les voir facilement depuis la vieille ville ?

14 R. Ils étaient dans la maison à Zarkovica. Ils ne pouvaient pas être vus,

15 puisque l'entrée est à l'est.

16 Q. Est-ce que votre ami Gaso Mijatovic vous a dit que, pendant qu'il était

17 à Zarkovica, ce soi-disant mortier monté sur le véhicule Charlie a tiré

18 sur Zarkovica, ou bien est-ce qu'il vous a, simplement, transmis ce

19 qu'avait dit le colonel Kovacevic.

20 R. Il m'a simplement dit ce que le colonel Kovacevic lui avait dit, c'est-

21 à-dire que pendant toute la journée à plusieurs reprises il a essuyé des

22 tirs de mortier depuis la vieille ville, depuis Dubrovnik.

23 Q. Monsieur Novakovic, avez-vous vu, vous-même, la vieille ville ?

24 R. Oui.

25 Q. Est-ce que vous seriez d'accord avec moi pour dire que le seul endroit

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1 dans la vieille ville où un camion pouvait se déplacer est le Stradun ?

2 Est-ce que vous seriez d'accord avec moi pour dire cela ?

3 R. C'est vrai.

4 Q. S'il y avait vraiment un véhicule sur le Stradun, on aurait pu voir

5 cela facilement depuis Zarkovica, n'est-ce pas ?

6 R. Stradun est long. Il m'est un peu difficile de reconstruire cela, mais

7 il existe certainement des points sur le Stradun, et certaines autres rues

8 où il pouvait se retirer sans être vu depuis Zarkovica.

9 Q. Monsieur Novakovic, les autres rues ce sont des ruelles à gauche et à

10 droite de Stradun, n'est-ce pas ? Le Stradun va de l'est à l'ouest de la

11 vieille ville et, des deux côtés vers le nord et vers le sud, vous avez de

12 toutes petites ruelles derrières de hauts murs, vous êtes d'accord avec moi

13 ?

14 R. C'est exact.

15 Q. Les ruelles qui se trouvent à côté, qui vont vers Srdj sont constituées

16 d'escaliers. Il y a des escaliers qui montent ces ruelles, n'est-ce pas ?

17 R. Oui, il existe des ruelles avec des escaliers, et puis il y des rues

18 pavées.

19 Q. Les rues pavées sont au sud du Stradun, alors que les ruelles avec les

20 escaliers sont au nord de Stradun, n'est-ce pas ?

21 R. Oui, c'est exact.

22 Q. Inutile de dire n'est-ce pas, qu'un camion ne pouvait pas être placé

23 dans une quelconque de ces petites rues perpendiculaires, n'est-ce pas ?

24 Ces rues qui étaient constituées d'escaliers, n'est-ce pas ?

25 R. C'est exact.

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1 Q. En ce qui concerne les ruelles au sud de Stradun, elles sont très

2 étroites, ne serait-il pas illogique d'essayer de placer un camion dans une

3 de ces ruelles étroites?

4 R. On ne peut pas dire que les choses sont logiques, ou illogiques. Moi,

5 je n'ai pas regardé, ni vu cela. Parce que, moi, quand j'étais entre

6 Bosanka et Zarkovica, lorsqu'il y a eu des morts vers 3 heures, le 6

7 décembre, personne n'était opérationnel à ce moment-là. J'ai, simplement,

8 vu de la fumée depuis des endroits différents de Dubrovnik. C'est tout.

9 Q. Non. Je ne dis pas que vous avez vu cela. Simplement, je voulais dire

10 que, compte tenu de votre expérience dans la région, vous connaissez

11 Dubrovnik et la vieille ville, ma question était la suivante, est-ce que

12 vous serez d'accord avec moi si je dis qu'il serait illogique de placer un

13 camion dans une de ces petites ruelles perpendiculaires, compte tenu de

14 leur caractère très étroit ?

15 R. Vous savez, je ne suis pas un expert militaire, il faut demander aux

16 experts militaires s'il existe des endroits, dans la vieille ville, où un

17 tel véhicule pouvait se déplacer et tirer sur Zarkovica, Srdj, et cetera.

18 Personnellement, je crois qu'il existe ce genre d'endroit, car un obus de

19 mortier, on sait très bien quelle est sa trajectoire, donc cela peut, très

20 bien, se faire.

21 Q. Monsieur Novakovic, pendant que vous étiez impliqué dans l'opération

22 Dubrovnik, est-ce que vous avez reçu des ordres ou des instructions

23 concernant l'état protégé de la vieille ville. Vous a-t-on dit, par

24 exemple, qu'il ne fallait pas tirer sur la vieille ville puisqu'il

25 s'agissait d'un site protégé et que c'était une partie de l'héritage

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1 mondial ?

2 R. Personne ne m'a dit cela mais cela va s'en dire. A chaque fois que

3 j'étais tout près, je n'ai jamais vu d'attaque menée contre la vieille

4 ville avec de l'artillerie.

5 Q. Non. En fait, ma question n'était pas cela. Je voulais, simplement,

6 savoir si l'on ne vous a jamais dit à quel que moment que ce soit de ne pas

7 tirer sur la vieille ville, que la vieille ville était un site protégé ?

8 R. Je ne suis qu'un simple soldat. Personne n'avait à me donner un tel

9 ordre. Je suis un mécanicien. Je fais mon travail et c'est tout.

10 Q. Bien. Pourriez-vous me dire si vous savez quelle est la distance entre

11 la vieille ville et Zarkovica ?

12 R. Je ne le sais pas avec précision.

13 Q. Est-il possible que, depuis Zarkovica, l'on puisse apercevoir un

14 véhicule et que l'on puisse identifier quel genre d'arme est monté sur ce

15 véhicule ? En fait, ma question est la suivante, est-il possible de voir un

16 véhicule depuis Zarkovica, un véhicule qui est situé dans la vieille ville

17 et peut-on, également, identifier le type d'arme monté sur ce véhicule ?

18 R. Vous savez on peut apercevoir cela depuis Zarkovica, on peut apercevoir

19 cela avec l'œil nu, mais les soldats disposent, certainement, de

20 dispositifs et de lunettes spécialisées permettant à observer ce qui se

21 trouve autour.

22 [Le Conseil de l'Accusation se concerte]

23 Mme MAHINDARATNE : [interprétation]

24 Q. Monsieur Novakovic, dites-nous est-ce que vous saviez si la vieille

25 ville avait fait l'objet d'une attaque le 6 décembre, et si vous l'avez

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1 appris, dites-nous quand ?

2 R. Je l'ai su lorsque je suis arrivé vers 15 heures 40, quand je suis

3 arrivé de Zarkovica à Bosanka. J'ai vu, depuis Zarkovica, que la ville de

4 Dubrovnik avait subi quelques dommages. J'ai aperçu de la fumée provenant

5 de quelques endroits de Dubrovnik.

6 Q. Je vous pose des questions relatives à la vieille ville, est-ce que

7 vous avez aperçu de la fumée provenant de la vieille

8 ville ?

9 R. Oui, j'ai vu de la fumée dans la vieille ville.

10 Q. Est-ce que vous avez demandé à vos collègues du 3e Bataillon, pour

11 savoir ce qui s'était passé, s'ils avaient tiré sur la vieille ville ? Est-

12 ce que vous avez eu de telles discussions avec eux ?

13 R. Non, je n'ai pas eu de telles discussions avec eux. Je n'étais venu que

14 pour voir ce qui se passait avec Komarica, je voulais savoir s'il était

15 vivant, s'il n'avait pas été blessé ou mort. C'est tout ce qui

16 m'intéressait. Personne ne me faisait aucun commentaire, ne me disait rien.

17 On pouvait bien apercevoir que quelque chose venait d'arriver.

18 Q. Est-ce que vous savez, effectivement, que c'était les unités du 3e

19 Bataillon qui bombardaient la vieille ville le 6 décembre ?

20 R. Voyez-vous de part les conversations que j'ai eues avec Komarica et

21 Rakovic, j'ai su que lorsque cinq confrères avaient été tués en essayant de

22 s'emparer le répéteur de Srdj, lorsqu'ils ont avisés leurs commandements

23 qu'ils avaient subi une grave perte, et que cinq hommes avaient été tués,

24 c'est à ce moment-là qu'ils ont commencé à tirer sur les points depuis

25 lesquels on leur a tiré dessus, et depuis lesquels on a tué leurs

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1 camarades. C'est l'information que j'ai reçue de Komarica et de Rakovic.

2 Q. Est-ce que Komarica vous a dit qu'ils avaient pilonnés la vieille ville

3 le 6 décembre, ou qu'ils avaient lancé une attaque contre la vieille ville

4 ?

5 R. Non, non. Komarica ne m'a pas dit qu'ils avaient attaqué la vieille

6 ville, puisque Komarica, voyez-vous, son département était chargé de

7 s'emparer du répéteur de Srdj, et il s'était porté volontaire, c'était son

8 rôle de Trebinje. Son travail s'était de s'emparer du répéteur de Srdj.

9 Pour ce qui est de sa tâche ce jour-là, il n'y avait rien d'autre à faire.

10 Il n'avait rien à voir avec la ville de Dubrovnik.

11 Q. Est-ce qu'il vous a dit que peut-être d'autres unités du 3e Bataillon

12 avaient procédé au pilonnage de la vieille ville ? Pas peut-être son unité

13 à lui, mais une autre unité appartenant à ce bataillon ?

14 R. Non. Nous n'avons pas parlé de cela. Il m'a simplement dit que cinq

15 hommes avaient été tués. Il m'a dit qu'à plusieurs reprises, il s'est

16 trouvé dans une situation assez difficile, parce qu'il avait l'impression

17 qu'on était en mesure de l'apercevoir depuis la vieille ville, car il avait

18 l'impression qu'on lui suivait partout où il se déplaçait. I lui est

19 arrivait souvent de passer d'un point à l'autre, et de voir que cinq

20 seconds après son déplacement du point A, que l'on ait envoyé un obus et

21 qu'on aurait pu le tuer. Il a échappé à la mort à plusieurs reprises, mais

22 de justesse.

23 [La Conseil de l'Accusation se concerte]

24 Mme MAHINDARATNE : [interprétation]

25 Q. Monsieur Novakovic, est-ce que vous savez si le capitaine Kovacevic

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1 était présent lors de la réunion du 5 décembre, réunion lors de laquelle le

2 capitaine Zec a demandé à vos amis de se porter volontaires ?

3 R. Je ne suis pas au courant de ce détail-là. Je sais que ces hommes

4 étaient présents et le capitaine du navire de guerre Zec. Il est tout à

5 fait logique que Kovacevic soit là, mais cela, je ne le sais pas avec

6 certitude, s'il y était ou non.

7 Q. Quelle heure était-il lorsque vous avez entendu, de votre ami Komarica,

8 que cinq soldats avaient été tués à Srdj pendant l'attaque du 6 décembre ?

9 R. L'attaque a eu lieu très tôt le matin, et eux, lorsque moi je suis

10 arrivé à 3 heures 40, tout était déjà terminé. Tous les morts avaient déjà

11 été transportés, les blessés étaient déjà transportés à l'hôpital. Lorsque

12 je suis arrivé à 3 heures 40 de l'après-midi, il n'y avait aucun blessé ni

13 aucun mort sur place.

14 Q. Ma question visait à savoir si vous savez à quelle heure ces cinq

15 hommes avaient été tués. Est-ce que votre ami Komarica vous l'a dit ?

16 R. Il ne m'a pas donné d'heure précise, mais il m'a simplement dit que

17 lorsqu'ils sont sortis sur le sommet de Srdj, sur le répéteur de Srdj,

18 qu'il y avait un plateau à cet endroit-là, et qu'il était impossible de

19 faire quoi que ce soit, puisqu'on leur tirait dessus avec des lance-

20 mortiers, et qu'en plus, il y avait un vent très fort qui soufflait, et qui

21 soufflait à 100 kilomètres à l'heure. Alors, ils sont revenus puisqu'ils ne

22 pouvaient plus rien faire.

23 Q. Après cet incident, le capitaine Kovacevic du 3e Bataillon, a-t-il été

24 promu ?

25 R. Je ne le sais pas. Je ne suis pas au courant de cela.

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1 Q. Comment décririez-vous la discipline de l'unité dans laquelle vous vous

2 trouviez vous-même ? Y avait-il beaucoup de pillage ? S'adonnait-on au vol,

3 aux méfaits ? Buvait-on énormément ? Ouvrait-on le feu non autorisé sur

4 d'autres soldats, et cetera ?

5 R. Pour ce qui est de mon unité à moi, jusqu'au 8 novembre, jusqu'à ce que

6 nos amis ne trouvent la mort, la discipline se trouvait à un niveau assez

7 élevé. Il n'y avait pas de problèmes plus importants. Il est peut-être vrai

8 que certaines personnes buvaient de temps en temps, et Konavle est un

9 endroit connu pour la production de vin et de brandy. Mais outre du fait

10 que certaines personnes buvaient, il n'y avait pas de problèmes plus

11 graves.

12 Mais après cela, après le 8, certains problèmes ont commencé à se faire

13 voir. Les soldats ne faisaient plus confiance aux officiers supérieurs. On

14 a commencé à protester à Kumbor et la situation s'est quelque peu dégradée.

15 Q. Est-ce que vous savez si la police militaire observait la façon dont

16 les choses se déroulaient au cours de l'opération de Dubrovnik ? Est-ce

17 qu'il vous a semblé qu'ils menaient des enquêtes, qu'ils condamnaient

18 certaines personnes, qu'ils faisaient leur travail ?

19 R. Je ne le sais pas. Je sais qu'ils travaillaient sur le terrain,

20 c'étaient des membres de la police militaire ?

21 Q. Est-ce que vous n'avez pas vu des membres de l'unité de la police

22 militaire vérifier des cartes d'identification, montant la garde sur les

23 points de contrôle et sur les routes ? Vous avez vu des unités de la police

24 militaire, n'est-ce pas ?

25 R. Sur Debeli Brijeg, c'est un droit qui se trouve à la frontière de la

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1 Croatie et du Monténégro, et d'Herceg-Novi et Dubrovnik, il y avait des

2 membres de la police militaire qui se trouvaient là, effectivement, et

3 fouillaient tous les véhicules qui passaient de part et d'autre. Il y avait

4 également un point de contrôle quelque part près de Cavtat, ou près de

5 Cilipi, peut-être, je ne le sais pas. Plusieurs années se sont écoulés

6 depuis, mais il faut dire qu'il y avait un point de contrôle à cet endroit-

7 là. S'agissant de ce point de contrôle sur la frontière, c'était un point

8 de contrôle assez sévère, alors que les autres ne l'étaient pas

9 particulièrement.

10 [Le Conseil de l'Accusation se concerte]

11 Mme MAHINDARATNE : [interprétation]

12 Q. Est-ce que vous savez combien de soldats de réserve étaient impliqués

13 dans les protestations, les démonstrations devant Kumbor ? Vous en avez

14 parlé, après les opérations de novembre, ils ont manifesté devant le 9e

15 Secteur naval, et leur poste de commandement ou devant le QG de Kumbor.

16 Est-ce que vous savez combien de personnes étaient impliquées ?

17 R. Je ne sais pas puisqu'à ce moment-là, je procédais à une opération qui

18 consistait à sortir des cadavres, des morts de l'opération qui se

19 trouvaient sur le répéteur. Je ne sais pas ce qui est arrivé, exactement.

20 Je ne sais pas combien il y en avait.

21 Q. Est-ce que vous savez si cette manifestation était faite afin de

22 demander au 9e Secteur naval pour poursuivre la guerre de façon plus

23 énergique ? N'est-ce pas la raison pour laquelle ils ont manifesté ?

24 N'avez-vous pas dit que vous considériez que le 9e Secteur naval était

25 faible, n'était pas aussi déterminé, quelque chose de ce genre-là; n'avez-

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1 vous pas dit cela ?

2 R. Non, ils ont simplement, ils se sont plaints parce que certains de

3 leurs soldats avaient été tués à Bosanka, et on ne s'est pas occupé d'eux

4 assez rapidement. Je n'étais pas là, donc je ne peux pas informer la

5 Chambre de première instance de tous les détails, mais je sais que cela

6 s'est déroulé à peu près de cette façon-là.

7 Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Cela met fin au contre-interrogatoire,

8 Monsieur le Président.

9 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci. Maître Rodic.

10 M. RODIC : [interprétation] Monsieur le Président, eu égard au temps, il

11 nous reste qu'une minute avant la fin de la journée. Je vous demande de

12 m'accorder environ 15 minutes pour poser les questions supplémentaires

13 demain.

14 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Très bien. Certainement, Maître Rodic.

15 Nous allons lever la séance pour la journée d'aujourd'hui.

16 Monsieur Novakovic, auriez-vous l'obligeance de revenir demain matin, car

17 nous reprendrons nos débats à 9 heures demain matin. Je vous remercie.

18 --- L'audience est levée à 19 heures 00 et reprendra le mardi 29 juin

19 2004, à 9 heures 00.

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