Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 LE TRIBUNAL PÉNAL INTERNATIONAL Affaire IT-94-1-T

2 POUR L’EX-YOUGOSLAVIE

3 vendredi, le 26 juillet 1996

4 (10h00)

5 PRÉSIDENT DE LA CHAMBRE : Bonjour. Un Conseil est debout, Monsieur

6 Wladimiroff ?

7 M. WLADIMIROFF : J’aimerais soulever un petit point pratique, Madame la

8 Présidente : aujourd’hui nous devions déposer une requête aux fins

9 d’assurer une protection supplémentaire ou différente de nos

10 témoins. Je pense qu’il nous faudra une autre semaine, peut-être

11 moins. Toujous est-il que nous ne sommes pas en mesure de la déposer

12 aujourd’hui comme nous l’avions dit. Donc nous demandons un report

13 jusqu’à jeudi prochain, puisqu’il n’y aura pas d’audience vendredi.

14 PRÉSIDENT DE LA CHAMBRE : Oui, ce sera le 2 août, je pense. Comme le temps

15 passe. Pour certains d’entre nous, il passe très vite. Pour moi. Le

16 Procureur s’y oppose-t-il ?

17 M. KEEGAN : Non, Madame la Présidente.

18 PRÉSIDENT DE LA CHAMBRE : Très bien. Nous vous accordons ce report, M.

19 Wladimiroff. M. Keegan, vous étiez en train d’interroger M. Mujcic ?

20 PRÉSIDENT DE LA CHAMBRE : Concernant la décision sur le ouï-dire dont

21 j’avais mentionné qu’elle serait prête aujourd’hui. Elle est presque

22 prête, mais doit passer chez les traducteurs. Ce qui veut dire

23 qu’elle sera probablement prête, Madame Featherstone, mardi, avec un

24 peu de chance.

25 MADAME FEATHERSTONE : Mardi, avec un peu de chance.

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1 PRÉSIDENT DE LA CHAMBRE : D’accord, mardi, avec un peu de chance, mardi

2 peut-être. Encore une fois, si les conseils pouvaient fournir leurs

3 commentaires concernant le témoin dont nous avons parlé hier à la

4 fin de cette journée, alors nous pourrons traiter ce point.

5 M. KEEGAN : Nous avons déjà remis nos commentaires à Madame Featherstone,

6 Madame la Présidente.

7 PRÉSIDENT DE LA CHAMBRE : Très bien. Merci.

8 M. ARMIN MUJCIC, rappelé à la barre.

9 Suite de l’interrogatoire mené par M. KEEGAN.

10 PRÉSIDENT DE LA CHAMBRE : Monsieur Mujcic, vous êtes toujours sous

11 serment. Le comprenez-vous ?

12 TÉMOIN ?Interprétation? : Oui.

13 PRÉSIDENT DE LA CHAMBRE : Monsieur Keegan, vous pouvez poursuivre.

14 M. KEEGAN : Merci, Madame la Présidente. (Au témoin) : Monsieur Mujcic,

15 quand nous avons arrêté hier, vous étiez en train de décrire

16 l’accusé Dusko Tadic sur un char dans le village de Kozarac durant

17 l’attaque. Si l’on pouvait montrer à la Défense la pièce 202 qui est

18 une carte de Kozarac ?

19 M. BOS : N’est-ce pas plutôt 221 ?

20 M. KEEGAN : C’est possible. Je me suis trompé de numéro. 221, excusez-moi.

21 (Au témoin) : Monsieur Mujcic, reconnaissez-vous ce que représente

22 la pièce 221 ?

23 R. : Oui.

24 Q. : Que représente-t-elle, s’il vous plaît ?

25 R. : Elle montre la rue Marsala Tita qui va de Kozarac vers la route

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1 principale Banja Luka/Prijedor.

2 Q. : Merci. Peut-on la mettre sur le rétroprojecteur, s’il vous plaît ?

3 Merci. Monsieur Mujcic, en employant le pointeur, pourriez-vous,

4 s’il vous plaît, indiquer la zone où vous vous trouviez quand vous

5 avez aperçu le char ?

6 R. : À droite, ici, où se trouvaient la pharmacie et le magasin de tissus,

7 entre le parc de l’école et ce bâtiment, ici.

8 Q. : Où vous trouviez-vous par rapport au bâtiment qui abritait la

9 pharmacie et le magasin de tissus ? Devant, derrière, sur le côté ?

10 R. : Derrière celui-ci, au coin.

11 Q. : Où se trouvait le char quand vous l’avez aperçu ?

12 R. : Le char se trouvait ici, en face d’ici. Il était soit sur la route,

13 soit à côté, sur le trottoir, où était le restaurant, ici.

14 Q. : Vous dites "soit sur la route", de quelle route parlez-vous ?

15 R. : Cette route qui mène au croisement, vers la route principale.

16 Q. : D’accord. Vous faites allusion à la rue Marsala Tita?

17 R. : Oui, c’est cela.

18 Q. : Devant quel bâtiment se trouvait le char ?

19 R. : Devant le restaurant.

20 Q. : Pourrait-on passer la pièce 195 qui est le film sur Kozarac, s’il

21 vous plaît ? M. Mujcic, en regardant ce film, je vous demande

22 d’indiquer l’endroit ou vous avez vu le char garé ?

23 R. : Arrêtez.

24 Q. : D’accord. Quel est le bâtiment que nous voyons sur cette image, le

25 grand bâtiment sur la droite ?

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1 R. : C’est le bâtiment où se trouvaient le restaurant, un autre magasin et

2 un magasin de chaussures.

3 Q. : Pouvez-vous avancer le film de quelques images, s’il vous plaît ?

4 Merci. Est-ce l’endroit où vous avez vu le char garé ?

5 R. : Oui.

6 Q. : Pouvez-vous nous décrire à nouveau de quelle façon il était garé,

7 s’il vous plaît ?

8 R. : Il était tourné vers Kozarac. Je ne sais pas s’il était arrivé à

9 l’instant ou s’il était déjà arrêté là, le moteur tournait encore.

10 Quand j’ai levé les yeux, il était à l’arrêt.

11 Q. : Merci. Peut-on faire défiler la bande rapidement jusqu’à l’endroit ou

12 la caméra revient et balaye l’autre côté ? Pouvez-vous ralentir s’il

13 vous plaît ? Si vous pouviez arrêter, continuez, s’il vous plaît. Si

14 vous pouviez nous indiquer le bâtiment derrière lequel vous étiez

15 quand vous le verrez ?

16 R. : C’est celui-ci.

17 Q. : Pourriez vous revenir quelques images en arrière, s’il vous plaît,

18 jusque là ou vous êtes entre les deux ? Ici, merci. C’est le

19 bâtiment derrière lequel vous vous trouviez ?

20 R. : Oui.

21 Q. : A quelle extrémité du bâtiment vous trouviez-vous, celle-ci ou celle-

22 là ?

23 R. : Je me tenais de l’autre côté, juste après le coin.

24 Q. : Pourriez-vous avancer jusqu’à l’autre extrémité du bâtiment, s’il

25 vous plaît ? Arrêt, quelques images de plus, s’il vous plaît, ici.

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1 Merci.

2 R. : C’est ici.

3 Q. : Où vous trouviez-vous, Monsieur ?

4 R. : Juste au coin, derrière le bâtiment.

5 Q. : De cet endroit que nous voyons où se trouvait le char ?

6 R. : En face.

7 Q. : Exactement en face ?

8 R. : Peut-être un peu plus haut ou un peu plus bas, je ne me souviens pas

9 exactement mais je pouvais le voir.

10 Q. : Aucun obstacle ne vous empêchait de voir le char et ceux qui se

11 trouvaient dessus ?

12 R. : Non.

13 Q. : Merci. Vous pouvez arrêter la bande maintenant.

14 JUGE STEPHEN : Le témoin a dit que le char était tourné vers Kozarac ce

15 qui ne me dit rien.

16 M. KEEGAN : Je vais éclairer ce point.

17 JUGE STEPHEN : Merci.

18 M. KEEGAN (Au témoin) : Monsieur, vous avez dit que le char était tourné

19 vers Kozarac. Vouliez-vous dire par là qu’il était tourné vers ce

20 croisement en triangle ou au contraire vers la mosquée et Mrakovica

21 ?

22 R. : Il était sur le bord de la route, en direction de Mrakovica.

23 Q. : Le canon était-il aussi pointé dans cette direction ?

24 R. : Je ne me souviens pas précisément s’il était dans cette direction ou

25 un peu sur la droite.

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1 Q. : Merci. Quand vous avez vu ce char, où se trouvait Dusko Tadic ?

2 R. : A ce moment-là je l’ai vu sauter du char.

3 Q. : Que se passait-il autour du char à cet instant-là ?

4 R. : Un groupe de personnes arrivait de la direction de Mrakovica, un

5 groupe, vous savez, une colonne. Je ne peux pas dire exactement,

6 mais il y avait beaucoup de personnes à cet endroit-là au niveau du

7 char. Il y avait aussi des militaires, des militaires serbes.

8 Q. : Que faisaient les autres militaires serbes à ce moment-là ?

9 R. : Ils escortaient les gens qui descendaient vers la route de Banja

10 Luka/Prijedor. Ils juraient : "mères balija", "mères ustachas", et

11 toutes ces choses dont je ne me souviens pas, des menaces et autres.

12 Q. : Quels types de personnes se trouvaient dans cette colonne ? N’y

13 avait-il que des hommes ou bien des femmes et des enfants s’y

14 trouvaient-ils aussi ?

15 R. : Il y avait des femmes âgées, des enfants, tous les âges.

16 Q. : Vous avez mentionné hier qu’un jeune garçon s’est approché de Dusko

17 Tadic. Savez-vous qui il était ?

18 R. : Non.

19 Q. : Que s’est-il passé ?

20 R. : J’ai vu Dule le gifler. Il l’a en quelque sorte poussé contre le

21 char.

22 Q. : Après avoir vu cela, vous et votre groupe vous êtes-vous livrés à

23 cette colonne ?

24 R. : Non, nous n’avons pas osé nous livrer quand nous avons vu qu’ils

25 battaient les gens.

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1 Q. : Vous souvenez-vous de ce que portait Dusko Tadic à cette occasion ?

2 R. : Je me souviens qu’il portait un uniforme camouflé.

3 Q. : Vous rappelez-vous s’il portait ou non une barbe à ce moment-là ?

4 R. : Non.

5 Q. : Hier vous avez également dit que vous aviez reconnu une ou deux des

6 personnes qui se trouvaient avec Dusko Tadic. De qui s’agissait-il ?

7 R. : Oui. J’ai reconnu Goran Borovnica.

8 Q. : Pouvez-vous décrire Goran Borovnica, s’il vous plaît ?

9 R. : Oui, il était petit, mince, il louchait, il n’avait pas le regard

10 droit, il louchait.

11 Q. : Vous souvenez-vous de ce qu’il portait à cette occasion ?

12 R. : Je ne me souviens pas exactement s’il s’agissait d’un uniforme

13 camouflé ou d’un uniforme de la JNA. Mais c’était un uniforme.

14 Q. : Qu’a fait votre groupe après avoir vu cet événement ?

15 R. : Nous sommes repartis parce que nous avons rencontré des gens qui

16 disaient qu’il y avait une sorte de centre de regroupement à

17 Trnopolje, alors nous avons décidé de nous diriger vers Trnopolje.

18 Q. : Êtes-vous arrivés à Trnopolje ou avez-vous été capturés ?

19 R. : J’ai été capturé avant.

20 Q. : Qui vous a capturé ?

21 R. : J’ai été capturé par des gens armés dans le village de Causevici.

22 Q. : Avez-vous reconnu certaines des personnes qui vous ont capturé ?

23 R. : Oui, j’en ai reconnu une, un homme en uniforme camouflé. Il avait un

24 filet sur le visage, du filet de camouflage. Je savais qu’il

25 travaillait pour Elektro Prijedor, il était électricien et il jouait

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1 au football dans un club. Je jouais aussi au football, c’est comme

2 çà que je l’ai connu.

3 Q. : Vous rappelez-vous son nom ?

4 R. : Non.

5 Q. : Connaissez-vous son origine ethnique ?

6 R. : Serbe.

7 Q. : Après votre capture, vous a-t-on détenu pendant un temps dans cette

8 zone ?

9 R. : Non, là ils nous ont seulement contrôlés. Ils ont demandé pourquoi

10 nous tirions sur eux de Kozarac pourquoi nous avions rejoint Tudjman

11 et des trucs comme ça et ils ont parlé d’Alija Izetbegovic aussi. Je

12 ne me souviens pas très bien de tout çà.

13 Q. : Où ce groupe vous a-t-il emmenés ?

14 R. : Ils nous ont emmenés dans une école de Donji Orlovci.

15 Q. : Combien de temps avez-vous été retenus à l’école ?

16 R. : Je ne me souviens pas de la durée exacte mais il faisait nuit. Ils

17 nous ont dits... Ils nous ont enfermés dans une pièce de l’école et

18 ils ont dit que nous allions passer la nuit là et que le lendemain

19 nous irions à Trnopolje en autocar pour rejoindre nos femmes et nos

20 enfants et qu’ils tireraient sur quiconque essaierait de s’échapper.

21 Q. : On vous a emmené à Trnopolje le lendemain ?

22 R. : Non, cette nuit, je ne sais pas quelle heure il était, soudain on a

23 entendu du bruit. La porte s’est ouverte et on a entendu des

24 injures. "Où sont ces balijas ?" "Sortez rapidement un par un, les

25 mains sur la nuque". Donc tous ceux de mon groupe sont sortis.

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1 J’étais le dernier. Quand je suis arrivé à la porte j’ai reconnu un

2 jeune homme, de mon âge, que je connaissais. Je pense qu’il

3 s’appelait "Dragan". Il a juré sur ma mère "balija" et tout ça. Il a

4 dit, "Les mains sur la nuque". J’ai demandé : "Pourquoi ? On se

5 connaît." Il a de nouveau juré et dit "Vous avez tué mon frère a

6 Kozarac ou vous l’avez blessé" ou quelque chose comme ça, je ne sais

7 plus.

8 Q. : Que s’est-il passé ensuite ?

9 R. : Alors, comme je n’avais pas levé les mains, il m’a saisi au collet.

10 Il en a appelé d’autres, un ou deux d’entre eux et ils se sont mis à

11 me battre. Il m’a frappé avec une crosse de fusil derrière la tête

12 et m’a dit "Viens par là maintenant". Dehors, il faisait noir. Il

13 m’a emmené au coin de cette école ou je ne sais quoi et il a mis une

14 balle dans le... Je pensais que c’était la fin. Je pensais en moi,

15 Dieu, aidez-moi.

16 Q. : D’accord. Que s’est-il passé ensuite ?

17 R. : Ensuite on a entendu une voix qui disait de me laisser tranquille,

18 qu’ils m’interrogeraient d’abord et qu’ils verraient ensuite que

19 faire de moi. Les autres étaient déjà dans la camionnette. J’étais

20 couvert de sang. Alors il a appelé un jeune homme dans la

21 camionnette qu’il connaissait aussi et lui a dit de me dire de ne

22 pas faire d’éclats, de ne pas essayer de m’échapper sinon ils me

23 couperaient la gorge, ils me tueraient.

24 Alors on nous a mis dans cette camionnette et des personnes en

25 uniformes camouflés avec les insignes "Milicija", milice, "Krajina"

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1 nous ont emmenés. Dans cette camionnette, ils nous ont battu, nous

2 ont infligé de mauvais traitements, nous ont menacé pendant le

3 trajet vers Keraterm.

4 Q. : Votre réponse précédente indiquait que "l’homme avait mis la balle

5 dans..." puis la traduction n’a pas suivi. Vouliez-vous dire qu’il

6 avez mis la balle dans le canon et que vous l’aviez entendu ?

7 R. : Non c’était une arme automatique et il a mis la balle dans le canon

8 comme pour tirer, c’est-à-dire il a désarmé le fusil.

9 Q. : Donc le groupe qui est venu vous prendre pour vous emmener à Keraterm

10 était différent de celui qui vous a arrêtés ?

11 R. : Non, c’était un autre groupe.

12 Q. : Que s’est-il passé quand vous êtes arrivés à Keraterm ?

13 R. : Quand nous sommes arrivés à Keraterm nous avons vu de nombreux

14 autocars qui attendaient là, tous pleins. Nous avons vu des femmes,

15 des enfants et des hommes adultes. De là il nous ont menés à la

16 pista près de ce bâtiment rouge.

17 Q. : Combien de temps êtes-vous resté à Keraterm ?

18 R. : Nous avons été interrogés et ils nous ont transférés dans l’un de ces

19 halls, dans l’une de ces zones. J’y ai passé un jour, peut-être une

20 nuit et je suis peut-être parti la nuit suivante, je ne m’en

21 souviens pas exactement.

22 Q. : De Keraterm, où vous a-t-on emmené ?

23 R. : Tard dans la soirée, les autocars sont arrivés et on nous a dit d’y

24 monter. Des gens ont demandé aux gardes serbes "Où allons-nous ?" et

25 ils ont ri et répondu "Vous allez à Trnopolje, rejoindre vos femmes

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1 et vos enfants". Bien sûr les gens se sont bousculés pour monter

2 dans ces autocars et prendre leur place aussi vite que possible. Ils

3 étaient bondés, il y avait des centaines de personnes dans ces

4 autocars.

5 Q. : Ces gens pensaient-ils qu’ils allaient rejoindre leur famille à

6 Trnopolje ?

7 R. : C’est exact.

8 Q. : Où les autocars sont-ils réellement allés ?

9 R. : Après un long trajet, ils sont arrivés à Omarska.

10 Q. : Durant le trajet vers Omarska, les autocars se sont-ils arrêtés dans

11 l’un des villages ?

12 R. : Oui, les arrêts étaient fréquents.

13 Q. : Que se passait-il lors de ces arrêts ?

14 R. : Généralement, ils faisaient descendre les gens de l’autocar. Dans

15 chaque autocar il y avait deux, parfois trois soldats serbes. Ils

16 avaient des barres en métal et des bâtons de bois. Ils battaient,

17 maltraitaient, injuriaient. J’ai reconnu un certain nombre de ces

18 gardes, mais je ne me souviens pas de leurs noms.

19 Q. : Quand on faisait descendre les gens des autocars dans les villages,

20 savez-vous si ces gens remontaient dans les autocars ?

21 R. : Certains revenaient battus, couverts de sang. D’autres ne revenaient

22 pas. De mon autocar, j’ai vu emmener un jeune homme de Kozarac. Je

23 ne le connais pas. Je ne connais pas son nom. Il était... Il

24 semblait craquer et il s’est mis à crier, à hurler "Frères, qu’est-

25 ce que vous nous faites ? Ouvrez les fenêtres."

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1 A ce moment un garde est arrivé. Il se trouvait quelque part au

2 milieu de l’autocar et le garde venait de l’avant. Il a écrasé les

3 gens et l’a frappé avec un fusil qu’il tenait par le canon. Il l’a

4 frappé à la tête. J’ai vu l’homme tomber, saigner ; il a recommencé

5 à les implorer d’ouvrir les fenêtres et pourquoi nous gardaient-ils

6 ici. Alors ils l’ont emmené, ils l’ont fait sortir du autocar et

7 tout ce que j’ai entendu étaient des cris de douleur et il n’est pas

8 revenu.

9 Q. : Que s’est-il passé quand vous êtes arrivés à Omarska ?

10 R. : Quand nous sommes arrivés, ils ont déchargé les autocars un à un.

11 C’était lent parce qu’on sortait un par un les mains derrière la

12 tête. Des deux côtés des soldats serbes et des policiers étaient

13 alignés, ils avaient des tuyaux en métal, des bâtons, des battes en

14 bois, des fusils et chacun devait se courber pour passer entre eux

15 vers cette pièce.

16 Q. : Avez-vous été battu en passant entre ces cordons de gardes ?

17 R. : Il était impossible de passer devant tous ces gens sans recevoir un

18 coup de crosse de fusil, de batte, de bâton ou de pied.

19 Q. : Dans quel bâtiment vous a-t-on mis lors de votre arrivée ?

20 R. : On nous a mis dans ce hall rouge, cette pièce avec un escalier. Elle

21 était appelée pièce 15.

22 Q. : S’il vous plaît, Monsieur, pourriez-vous faire le tour et indiquer

23 sur la maquette où se trouve la pièce 15 à l’aide du pointeur ?

24 Monsieur Mujcic, si vous pouviez vous approcher de la maquette et

25 indiquer sur la maquette la pièce que vous appelez la pièce 15 ?

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1 R. : Oui, c’est ici, près de cette entrée...

2 INTERPRÈTE : Nous entendons à peine le témoin. Pourriez-vous diriger le

3 micro vers lui, s’il vous plaît ?

4 M. KEEGAN : Monsieur Mujcic, quand vous faites une description il faut que

5 vous vous penchiez vers les micros sur la table pour que le

6 traducteur puisse vous entendre.

7 R. : Nous sommes entrés par la cage d’escalier. Là aussi, il y avait des

8 soldats qui nous battaient. Puis nous sommes entrés par cette porte-

9 ci. La pièce était déjà surpeuplée. Ils nous entassaient, nous

10 empilaient, presque les uns sur les autres.

11 Q. : Pourriez-vous indiquer cette pièce à nouveau ?

12 R. : (Le témoin indique l’endroit sur la maquette).

13 Q. : Pourriez-vous identifier cette pièce par le quadrillage lettré et

14 chiffré qui se trouve ici ?

15 R. : B7, B8, B7, B23.

16 Q. : Vous avez indiqué ici le nombre B23 qui sur le diagramme semble être

17 une zone séparée dans la pièce B7. Vous souvenez-vous de ce qui se

18 trouvait dans cette zone, celle marquée B23 ?

19 R. : C’étaient des toilettes et des lavabos.

20 Q. : Dans la petite zone en face ?

21 R. : Il y avait des robinets pour se laver les mains et des lavabos.

22 Q. : Est-ce que l’ensemble de cette zone, B7 et B23 dans l’autre pièce

23 était considéré comme une seule pièce par les prisonniers ?

24 R. : Oui.

25 Q. : Merci. Vous pouvez vous rasseoir. Combien de temps êtes-vous resté

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1 dans cette pièce ?

2 R. : J’y suis resté jusqu’au moment de l’interrogatoire, entre 15 et 20

3 jours.

4 Q. : Pouvez-vous décrire les conditions dans cette pièce ? Était-elle

5 surpeuplée ?

6 R. : Oh oui, elle était surpeuplée. Les gens étaient allongés dans les

7 toilettes, dans les lavabos et dessous.

8 Q. : Y avait-il assez de place dans cette pièce pour permettre aux gens de

9 se coucher et de s’étendre ?

10 R. : Non, il était pour ainsi dire à peine possible de s’asseoir

11 correctement.

12 Q. : Avec quelle fréquence vous permettait-on de sortir ?

13 R. : Après trois ou quatre jours on nous a donné de la nourriture pour la

14 première fois. C’était la première fois que nous sortions, nous

15 sortions seulement quand il y avait des repas. Cela dépendait aussi

16 du garde de vous laisser aller aux toilettes.

17 Q. : Donc on ne vous permettait pas toujours d’aller aux toilettes quand

18 vous en aviez besoin ?

19 R. : Non. C’était dangereux parce qu’il arrivait que les gens soient

20 battus parce qu’ils y étaient restés une minute ou...

21 Q. : Restés où ?

22 R. : Aux toilettes.

23 Q. : Quand les gens n’avaient pas la permission d’utiliser les toilettes

24 que faisaient-ils ?

25 R. : Eh bien, ils se soulageaient dans les toilettes de la pièce où ils

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1 étaient, où nous étions.

2 Q. : Ces toilettes fonctionnaient-elles suffisamment bien pour que les

3 conditions sanitaires restent convenables ?

4 R. : Non, elles étaient toutes bouchées. Nous avions l’habitude de nous

5 soulager dans des sacs plastiques ou dans de vieilles chaussures.

6 Q. : Vous donnait-on souvent de l’eau ?

7 R. : Cela aussi dépendait du garde. Si certains ... Si certaines personnes

8 avaient de l’argent, des marks ou quelque chose d’autre à monnayer,

9 alors ils apportaient une boîte, une boîte d’eau ce qui bien sûr ne

10 suffisait pas à étancher la soif de la moitié des personnes qui se

11 trouvaient là.

12 Q. : Les gens tombaient-ils malades ?

13 R. : Oui.

14 Q. : Êtes-vous vous-même tombé malade au camp ?

15 R. : Oui.

16 Q. : Qu’aviez-vous ?

17 R. : La dysenterie. Nous en étions tous atteints.

18 Q. : Où vous a-t-on emmené pour vous interroger ?

19 R. : Des policiers ou des soldats nous emmenaient au bâtiment ou se

20 trouvait le restaurant au rez-de-chaussée, la cuisine, et à l’étage

21 des bureaux où ils menaient les interrogatoires.

22 Q. : Vous a-t-on battu en vous menant à l’interrogatoire ?

23 R. : Oui, même à l’entrée, en haut du premier escalier il y avait un

24 soldat, cet escalier est sous une sorte de dôme ou de voûte, une

25 plaque et je suis passé devant lui et il m’a frappé à plusieurs

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1 reprises.

2 Q. : Dans quel bâtiment se trouve la cage d’escalier dont vous parlez ?

3 R. : Il est dans le bâtiment où se trouve le restaurant et où avaient lieu

4 les interrogatoires.

5 Q. : En regardant la maquette devant vous, voyez-vous l’escalier dans ce

6 bâtiment ?

7 R. : Oui, je vois l’endroit où il m’a frappé, pas celui qui m’escortait,

8 un autre.

9 Q. : S’agit-il de la zone circulaire sur la façade de ce bâtiment, face au

10 hangar ?

11 R. : Oui. (Le témoin indique l’endroit sur la maquette). C’est à l’endroit

12 que je viens d’indiquer.

13 Q. : Quand on vous a amené à l’étage, on vous a interrogé dans l’un des

14 bureaux ?

15 R. : Oui.

16 Q. : Avez-vous été battu durant l’interrogatoire ?

17 R. : Sur le seuil, alors que j’allais entrer dans ce bureau, celui qui

18 m’escortait m’a frappé par derrière avec une matraque de police. Il

19 m’a frappé à la tête et il a dit : "Attention à ce que vous dites.

20 Si vous ne dites pas tout, vous savez ce qui vous attend".

21 Q. : Saviez-vous qui était la personne qui vous interrogeait ?

22 R. : Le monsieur m’a dit son nom.

23 Q. : Quel nom vous a-t-il donné ?

24 R. : C’était Rade Kovic.

25 Q. : Après s’être présenté, l’avez-vous reconnu, savez-vous ce qu’il

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1 faisait avant la guerre ?

2 R. : Oui, je l’ai reconnu. Il était directeur du Parc national de Kozarac

3 ou l’un des dirigeants.

4 Q. : Savez-vous pourquoi il s’est présenté, pourquoi il vous a dit son nom

5 ?

6 R. : Il m’a dit son nom parce qu’il savait où j’habitais et il connaissait

7 mon grand-père. Ce n’était pas loin parce que ma maison était proche

8 des maisons serbes où habitait sa tante, Vida.

9 Q. : Quel genre de questions vous a-t-il posées ?

10 R. : Il m’a posé des questions générales sur le fusil, sur la formation à

11 laquelle j’appartenais et il m’a dit qu’il connaissait mon grand-

12 père qui était un combattant de la résistance, un partisan et

13 pourquoi est-ce que j’étais ici en tant qu’Ustacha ? Pourquoi est-ce

14 j’avais pris leur parti, pourquoi je n’étais pas pro-Yougoslave.

15 Q. : Possédiez-vous un fusil ?

16 R. : Non.

17 Q. : Le groupe avec lequel vous étiez lors de votre capture, est-ce que

18 certains d’entre eux avaient des armes ?

19 R. : Je ne m’en souviens pas, non.

20 Q. : Comment les gens de votre groupe étaient-ils habillés lors de votre

21 capture ?

22 R. : Pourriez-vous répéter la question? Je ne l’ai pas comprise.

23 Q. : Comment les gens de votre groupe étaient-ils habillés lors de votre

24 capture ?

25 R. : Nous étions tous en civil. Il y avait des enfants et des personnes

Page 4539

1 âgées mais nous étions tous trempés parce que nous avions essayé de

2 nous cacher dans l’eau et dans les canaux.

3 Q. : Où vous a-t-on mené après l’interrogatoire ?

4 R. : On m’a emmené dans un bâtiment qui abritait un atelier. C’est ce

5 grand bâtiment rouge-là.

6 Q. : Le même bâtiment que celui où vous étiez auparavant ?

7 R. : Oui, une autre partie de celui-ci.

8 Q. : Pourriez-vous à nouveau vous approcher de la maquette et désigner la

9 zone où l’on vous a reconduit après l’interrogatoire ?

10 R. : Oui. (Le témoin désigne un endroit sur la maquette). C’était cette

11 pièce.

12 Q. : Juste un instant nous devons attendre le moniteur.

13 R. : Oui. (Le témoin désigne un endroit sur la maquette). C’était là, près

14 de cette porte.

15 Q. : Un instant s’il vous plaît nous avons perdu l’image. Pouvez-vous

16 indiquer la pièce dans laquelle vous étiez par sa lettre et son

17 chiffre ?

18 R. : B14.

19 Q. : Je remarque qu’à l’extérieur de cette pièce se trouvent un couloir et

20 un escalier.

21 R. : Oui, c’est par là que nous sommes entrés.

22 Q. : Ce couloir et cet escalier, est-ce que toute cette zone était

23 considérée comme une seule pièce, la pièce B14 ?

24 R. : Oui.

25 Q. : Merci.

Page 4540

1 PRÉSIDENT DE LA CHAMBRE : Excusez-moi, une Q. : de quel couloir et de quel

2 escalier s’agit-il ? J’essaie de regarder la maquette en même temps

3 que cette vue.

4 M. KEEGAN : Pouvez-vous désigner le couloir et l’escalier, s’il vous plaît

5 ?

6 R. : Oui. (Le témoin les indique sur la maquette).

7 PRÉSIDENT DE LA CHAMBRE : Merci.

8 M. KEEGAN : Quelle lettre et quel chiffre désignaient le couloir, s’il

9 vous plaît ?

10 R. : Le couloir, B16.

11 Q. : Merci. Vous pouvez reprendre votre place. Y avait-il beaucoup de

12 monde dans cette pièce ?

13 R. : Elle était bourrée de monde. Une fois, quelqu’un a fait le compte, a

14 calculé en fait le nombre par mètre carré, cela faisait environ un

15 demi-mètre par personne.

16 Q. : Est-ce que des gardes étaient postés dans cette zone, à l’étage ?

17 R. : Non.

18 Q. : Où se tenait normalement le garde de faction?

19 R. : Ils se trouvaient dans la grande salle, près des camions-bennes. Il

20 en avait une pour eux.

21 Q. : Quand vous dites la "grande salle", voulez-vous dire le grand garage,

22 le garage principal du bâtiment ?

23 R. : Oui.

24 Q. : Avez-vous vu Dusko Tadic à Omarska ?

25 R. : Oui.

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1 Q. : Où l’avez-vous vu dans le camp ?

2 R. : Je n’ai pas entendu la question.

3 Q. : Où l’avez-vous vu dans le camp ?

4 R. : Je l’ai vu quand il est venu dans le garage.

5 Q. : Que faisiez-vous dans le garage ?

6 R. : J’avais la dysenterie et dans ce cas il faut aller tout le temps aux

7 toilettes et j’étais à l’étage, je ne pouvais pas descendre en

8 passant par-dessus les gens tout le temps, certains ne voulaient pas

9 parce qu’il fallait qu’ils se lèvent pour qu’on puisse passer. Donc

10 j’ai demandé, avec deux autres jeunes hommes qui en souffraient

11 également, nous avons demandé au garde de rester dehors près des

12 toilettes.

13 Q. : Où se trouvaient les toilettes ?

14 R. : Elles se trouvaient dans le garage, près de l’entrée.

15 Q. : Vous dites "entrée", c’est-à-dire la porte par laquelle les

16 prisonniers entraient et sortaient du garage ?

17 R. : Oui.

18 Q. : Au rez-de-chaussée ?

19 R. : Oui, au rez-de-chaussée.

20 Q. : Quelle était la situation quand vous avez vu Dusko Tadic ? Que se

21 passait-il ?

22 JUGE STEPHEN : Je me demande s’il serait possible au témoin d’indiquer

23 l’endroit exact où se trouvent les toilettes ?

24 M. KEEGAN : J’allais le faire, Monsieur le Juge. J’envisageais de le

25 décrire dans un premier temps, puis de le désigner. (Au témoin) :

Page 4542

1 Pourriez-vous décrire la situation quand vous avez vu Dusko Tadic ?

2 R. : Oui. Nous étions assis sur une boîte en bois ou une caisse près de

3 cette pièce dans laquelle nous étions sinon lorsque nous étions au

4 rez-de-chaussée. Je revenais des toilettes et j’allais en quelque

5 sorte... Je tenais mes mains sur mon estomac. A ce moment les gardes

6 qui se trouvaient dans cette zone, autrement c’était un jour calme,

7 une équipe calme, je ne peux pas dire qu’ils étaient gentils mais

8 ils étaient corrects. Ils ont dit "les multicolores arrivent". Nous

9 savions ce que cela signifiait. Nous devions disparaître

10 immédiatement.

11 Q. : Quel terme ont employé les gardes ?

12 R. : "Sarenci" ce qui veut dire "ceux en couleur".

13 Q. : Que veux dire ce terme pour vous ?

14 R. : Beaucoup de visiteurs portaient des uniformes camouflés qui étaient

15 colorés, souvent... Ils venaient souvent pour nous battre, pour

16 faire sortir la personne qu’ils souhaitaient.

17 Q. : Donc "sarenci" signifiait "les multicolores", c’est-à-dire les gens

18 en uniformes de camouflage ?

19 R. : Oui.

20 Q. : Quand vous avez entendu ça, qu’avez-vous fait ?

21 R. : Que pouvions-nous faire d’autre ? Juste disparaître aussi vite que

22 possible. Donc nous nous sommes mis à courir vers la porte de notre

23 pièce.

24 Q. : Que s’est-il passé quand vous êtes arrivés à la porte ?

25 R. : Il s’y passait déjà quelque chose, comme si les gens avaient entendu,

Page 4543

1 comme s’ils avaient aussi entendu, donc il y avait beaucoup de monde

2 devant la porte. J’étais près de la porte, je ne pouvais pas entrer.

3 Les gens qui se trouvaient dans les armoires en sautaient. A ce

4 moment-là je me suis retourné pour voir si le groupe qui arrivait

5 allait me rattraper et j’ai vu...

6 Q. : Qu’avez-vous vu ?

7 R. : Un groupe de personnes venait depuis la direction des toilettes.

8 Q. : Avez-vous reconnu quelqu’un dans ce groupe ?

9 R. : Oui. A ce moment j’ai reconnu Dusan Tadic, Miso Radulovic, un

10 enseignant de Kozarac et Vujcic. Je pense que son prénom était

11 Rajko. Il était chauffeur d’autocar de la Autotransport Company de

12 Prijedor.

13 Q. : Comment était habillé Dusko Tadic ?

14 R. : Il portait un uniforme de camouflage. Pour autant que je m’en

15 souvienne, il portait cette fois-là un ceinturon blanc de policier,

16 des lunettes noires et un calot sur la tête qui arborait une cocarde

17 ou un aigle blanc.

18 Q. : Qu’avez-vous fait après avoir vu ce groupe ?

19 R. : A ce moment-là l’endroit était déjà vide et les gens courraient vers

20 la pièce où j’étais, parce que chaque fois que quelque chose se

21 produisait, tous ils... Ceux qui étaient le plus près de la porte

22 étaient le plus en danger.

23 Q. : Jusqu’où avez-vous pu aller dans la pièce ?

24 R. : Elle était surpeuplée en haut des escaliers, donc je suis arrivé au

25 premier palier et je n’ai pas pu aller plus loin. Je disais aux gens

Page 4544

1 de bouger pour que je puisse aller à ma place mais il y avait tant

2 de monde que je ne pouvais pas.

3 Q. : Monsieur, pourriez-vous, encore une fois, indiquer sur la maquette

4 l’endroit où vous étiez assis ? Un instant, monsieur. Nous devons

5 attendre que le moniteur soit allumé. Bien. Si vous pouviez indiquer

6 d’abord où vous étiez assis, s’il vous plaît ?

7 R. : (Le témoin indique l’endroit sur la maquette). J’étais assis ici sur

8 une caisse en bois près de laquelle se trouvait un banc de bois bas.

9 Q. : Pourriez-vous indiquer où se trouvait la porte de votre pièce ?

10 R. : Ici.

11 Q. : Pourriez-vous indiquer où se trouvait Dusko Tadic quand vous l’avez

12 vu ?

13 R. : Je ne m’en souviens pas exactement. Je sais qu’il avait dépassé les

14 toilettes.

15 Q. : D’accord. Dans ce cas pourriez-vous indiquer où se trouvent les

16 toilettes ?

17 R. : (Le témoin désigne l’endroit sur la maquette). Je pense qu’elles

18 étaient ici.

19 Q. : Les juges ont-ils pu voir ?

20 PRÉSIDENT DE LA CHAMBRE : Oui.

21 M. KEEGAN : Merci. Merci, Monsieur. Vous pouvez reprendre votre place.

22 Monsieur, une fois dans la pièce, sur le palier, que s’est-il passé

23 ?

24 R. : Juste après, ils ont fait l’appel, Hrnic Jasmin, dit "Jasko" a été

25 appelé, Emir Karabasic, un policier et Eno Alic.

Page 4545

1 Q. : Avez-vous vu ce qui s’est passé après que ces gens ont été appelés ?

2 R. : Ce que j’ai pu voir, Jasmin Hrnic et Karabasic étaient descendus

3 avant, étaient sortis avant. Ils ont commencé à les battre. Je pense

4 qu’il s’agissait du groupe qui venait d’arriver.

5 Q. : Vous voulez dire le groupe dans lequel se trouvait Dusko Tadic ?

6 R. : Oui.

7 Q. : Pouvez-vous décrire le chauffeur d’autocar Vujcic ?

8 R. : Oui. Il avait environ 30 ans, une trentaine d’années, grand et il

9 commençait à devenir chauve. Je le connaissais parce qu’il

10 conduisait l’autocar sur le trajet Prijedor/Omarska et c’était un

11 car avec cette extension et il faisait aussi l’itinéraire de

12 Mrakovica.

13 Q. : Ses cheveux étaient-ils clairs ou foncés ?

14 R. : Je ne me souviens pas.

15 Q. : Pouvez-vous vous souvenir s’il avait une barbe ?

16 R. : Une barbe ?

17 Q. : Oui, à ce moment-là ?

18 R. : Non.

19 Q. : Non, il n’avait pas de barbe ou non, vous ne vous souvenez pas ?

20 R. : Je ne m’en souviens pas. Je ne m’en souviens pas... Il n’avait pas de

21 barbe.

22 PRÉSIDENT DE LA CHAMBRE : Excusez-moi. S’agit-il du chauffeur d’autocar

23 dont vous parlez ?

24 M. KEEGAN : Oui, Madame la Présidente. (Au témoin) : Qu’avez-vous entendu

25 dans le garage ?

Page 4546

1 R. : J’ai entendu des coups et puis des pleurs.

2 Q. : Avez-vous entendu de la musique ce jour-là ?

3 R. : On entendait souvent de la musique, mais je ne me souviens pas si on

4 en a entendu ce jour-là, je ne me souviens même pas si j’ai mangé ce

5 jour-là.

6 Q. : Avez-vous continué à regarder tant que vous le pouviez ?

7 R. : Jusqu’à ce qu’ils les emmènent vers le canal.

8 Q. : Que pensiez-vous pendant ce temps ?

9 R. : Je pensais que nous allions tous être torturés comme ça, que je

10 souhaitais qu’ils me tuent tout simplement avec une balle...ce

11 serait plus facile.

12 Q. : Vous souvenez-vous si on a fait sortir quelqu’un d’autre après ça ?

13 R. : Oui, ils appelaient, en plus de ceux-ci ils ont appelé Eno Alic, mais

14 à ce moment il ne voulait pas descendre.

15 Q. : Comment l’a-t-on appelé exactement ? Qui lui a demandé de sortir ?

16 R. : Quand ils lui ont demandé de sortir à ce moment-là il n’est pas

17 descendu. Il a dit "Il allait me tuer, il allait me tuer" comme s’il

18 savait qui se trouvait en bas. J’ai supposé que c’était quelqu’un de

19 la pièce 15, parce qu’il y avait une porte et on faisait passer des

20 messages sur des morceaux de papier-que quelqu’un avait déjà dit

21 quelque chose. Mais quand le père de Eno Alic est arrivé ....

22 Q. : Après que ces trois ont été appelés, après les passages à tabac, est-

23 ce que d’autres ont été appelés ?

24 R. : Je savais pour Jasmin et Karabasic. Ils ont été appelés et Eno plus

25 tard, quand son père l’a appelé.

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1 Q. : Après ce groupe est-ce qu’on a fait sortir des gens pour déplacer les

2 corps ?

3 R. : Oui, mais ça a pris du temps.

4 Q. : Oui. Avez-vous vu qui avait été appelé pour déplacer les corps ?

5 R. : J’ai entendu qu’ils demandaient des volontaires pour ramasser les

6 morts.

7 Q. : Saviez-vous ou pouvez-vous dire si quelqu’un a répondu à cet appel de

8 volontaires ?

9 R. : De volontaires, non. A ce moment-là je pense que j’ai vu que les gens

10 près de la porte, là, à l’entrée, qu’ils les ont emmenés, mais je ne

11 me souviens pas de qui il s’agissait.

12 Q. : Plus tard, après que ces personnes ont quitté la pièce, avez-vous

13 réussi à monter à l’étage ?

14 R. : Oui, quand on a entendu ces cris, tout le monde se taisait. On

15 pouvait entendre tout ce qui se passait à l’extérieur, ils

16 suppliaient d’être tués, de ne plus être torturés. Les coups

17 résonnaient. Il y avait des objets lourds et à un moment on a

18 entendu de tels cris que tout le monde se bousculait pour monter

19 dans les pièces à l’étage quand les gens rentraient de l’extérieur.

20 Q. : Avez-vous vu des gens qui venaient de l’extérieur ?

21 R. : Oui.

22 Q. : Avez-vous vu ...

23 R. : Je ne me souviens pas.

24 Q. : ... deux personnes que nous appelons ici G et H ?

25 R. : Oui.

Page 4548

1 Q. : De quoi vous souvenez-vous concernant Monsieur G. ?

2 R. : La personne G...

3 Q. : Décrivez ce que vous avez vu des deux personnes qui sont montées.

4 Décrivez leur apparence sans donner leurs noms.

5 R. : Oui. Je ne sais pas dans quel ordre elles sont entrées, mais je sais

6 que H était nu jusqu’à la taille à ce que j’ai pu voir. Je ne

7 pourrais dire pour le reste. Il était couvert de pétrole. Il avait

8 la main à la bouche. Il vomissait. J est venu également et il

9 vomissait aussi, la main sur la bouche, et sa bouche était

10 ensanglantée et il y avait des cheveux et aussi du pétrole. Puis un

11 autre est venu, je pense que son nom était Mujkanovic. Il était pâle

12 aussi. Il avait l’air effrayé et il tenait la main sur sa bouche et

13 il vomissait.

14 Q. : Vous souvenez-vous si Monsieur Mujkanovic avait du pétrole sur lui

15 comme les deux autres ?

16 R. : Je ne m’en souviens pas exactement. Je n’ai pas fait attention.

17 Q. : Où vous trouviez-vous quand vous avez vu ces personnes ?

18 PRÉSIDENT DE LA CHAMBRE : Excusez-moi, M. Keegan, la traduction donne

19 Monsieur "J" comme dans...

20 M. KEEGAN : Oui, Madame la Présidente. C’est un problème d’interprétation,

21 il est évident qu’ils n’ont pas compris la lettre. Vouliez-vous dire

22 Monsieur "J" ou Monsieur "G" ?

23 R. : "J".

24 PRÉSIDENT DE LA CHAMBRE : Il a dit "G" avant.

25 M. KEEGAN : Oui, Madame la Présidente. Bien sûr, il suit les lettres que

Page 4549

1 je lui ai données et...

2 PRÉSIDENT DE LA CHAMBRE : Hier, je pense que c’était Monsieur Wladimiroff

3 qui a donné...

4 M. KEEGAN : Nous pouvons faire passer les noms, si vous le souhaitez,

5 Madame la Présidente, si cela est nécessaire.

6 PRÉSIDENT DE LA CHAMBRE : Vous avez changé quelque chose. Excusez-moi, une

7 minute, s’il vous plaît. Ne le donnez pas encore au témoin.

8 M. KEEGAN : J’ai barré les lettres, Madame la Présidente.

9 PRÉSIDENT DE LA CHAMBRE : Laissez la Défense voir ce que vous avez barré,

10 à moins que vous ne soyez pas inquiet ?

11 M. KAY : Je ne suis pas inquiet, Madame la Présidente.

12 PRÉSIDENT DE LA CHAMBRE : Bien. Je suis sûre qu’il n’a pas écrit une note

13 au témoin. Il n’a pas écrit longtemps. D’accord, très bien.

14 (Au témoin) : Ouvrez ce papier et mettez-le à plat sur la table.

15 TÉMOIN : Oui, ce sont eux.

16 PRÉSIDENT DE LA CHAMBRE : Qui, Monsieur ?

17 M. KEEGAN : S’agit-il des deux personnes que vous avez vu monter les

18 escaliers ?

19 R. : Oui.

20 Q. : Bien. Où vous trouviez-vous quand vous les avez vues monter

21 l’escalier ?

22 R. : Quand ils se sont précipités à l’intérieur, ils allaient si vite

23 qu’ils nous ont tous repoussés. Nous étions comprimés contre le mur,

24 vers le haut des escaliers et contre le mur, alors je suis monté.

25 J’étais en haut.

Page 4550

1 Q. : Où en haut ?

2 R. : Dans le couloir.

3 PRÉSIDENT DE LA CHAMBRE : M. Mujcic, le Juge Vohrah a juste posé une

4 question concernant les noms qui vous ont été communiqués, on vous a

5 reposé la question "Qui étaient-ils ?" et vous avez répondu "Ceux

6 qui ont monté l’escalier." S’agissait-il de G et H ?

7 TÉMOIN : Oui.

8 PRÉSiDENT DE LA CHAMBRE : L’audience est suspendue pendant 20 minutes.

9 Merci.

10 (11h30)

11 (Brève suspension d’audience)

12 (12h00)

13 PRÉSIDENT DE LA CHAMBRE : M. Keegan, voudriez-vous commencer ?

14 M. KEEGAN : Merci, Madame la Présidente. (Au témoin) : M. Mujcic,

15 connaissez-vous quelqu’un du nom de Duca Knezevic ?

16 R. : Oui.

17 Q. : Comment l’avez-vous rencontré ?

18 R. : Sa maison était à deux ou trois kilomètres de la mienne. Je le

19 connais. Il travaillait comme serveur au bar d’un restaurant à

20 Kozarusa. Ce restaurant appartenait au club de football dans lequel

21 je jouais.

22 Q. : Prenait-il également part aux matches de football dans lesquels vous

23 jouiez ?

24 R. : Oui. Il était défenseur. Il était gardien de but.

25 Q. : Pouvez-vous décrire son apparence physique, s’il vous plaît ?

Page 4551

1 R. : Oui, il était grand, costaud.

2 Q. : Était-il fort ?

3 R. : Oui, très fort.

4 Q. : De quelle couleur étaient ses cheveux ?

5 R. : Je ne me souviens pas bien. Je sais qu’il les peignait vers

6 l’arrière.

7 Q. : Pouvez-vous vous souvenir s’ils étaient clairs ou foncés ?

8 R. : Plutôt clairs.

9 Q. : L’avez-vous vu au camp d’Omarska ?

10 R. : Oui.

11 Q. : Auriez-vous pu le confondre avec Dusko Tadic, physiquement ?

12 R. : Non, parce que je les connaissais tous les deux.

13 Q. : A votre avis, est-ce qu’une personne qui les connaissait tout les

14 deux ou qui aurait connu l’un d’entre eux auraient pu les confondre

15 ?

16 R. : Non, je ne pense pas. Tadic est plus petit.

17 Q. : A votre connaissance, est-ce qu’un habitant de la région de Kozarac

18 ressemblait exactement à Dusko Tadic ?

19 R. : Je ne sais pas.

20 Q. : Avez-vous jamais pris quelqu’un d’autre pour Dusko Tadic ?

21 R. : Non.

22 Q. : Avez-vous jamais entendu dire que quelqu’un dans la région de Kozarac

23 ressemblait exactement à Dusko Tadic ?

24 R. : Je ne m’en souviens pas.

25 Q. : Avez-vous entendu dire qu’il y avait eu une confusion, qu’on avait

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1 pris quelqu’un pour Dusko Tadic parce qu’il lui ressemblait ?

2 R. : Non, je ne pense pas. Je pense qu’à Kozarac beaucoup de gens

3 connaissaient Dusko Tadic et ne pouvaient pas le confondre avec

4 quelqu’un d’autre parce que c’était une personne connue.

5 Q. : Connaissez-vous un certain Mico ou Miso Danicic ?

6 R. : Non, c’est la première fois que j’entends ce nom.

7 M. KEEGAN : Rien de plus, Madame la Présidente.

8 PRÉSIDENT DE LA CHAMBRE : Contre-interrogatoire, M. Kay ?

9 Contre-interrogatoire par M. KAY

10 Q. : M. Mujcic, avez-vous vu des émissions télévisées sur les accusations

11 portées contre Dusko Tadic ?

12 R. : Oui, j’en ai vu des fragments. Je pense, Monika Gras, un film.

13 Q. : Ce film traitait-il d’Omarska ?

14 R. : Oui, aussi.

15 Q. : Il contenait des entretiens avec G sur les événements d’Omarska ?

16 R. : Oui, je me souviens un peu.

17 Q. : Et avec H, toujours au sujet d’Omarska ?

18 Q. : Non, ça je ne m’en souviens pas.

19 Q. : Avez-vous vu l’arrestation de Dusko Tadic à la télévision nationale ?

20 R. : Non, pas l’arrestation, je ne l’ai pas regardée. Je l’ai seulement

21 entendu en (expurgé), dans des journaux (expurgé), qu’il avait été

22 arrêté mais rien d’autre, ni les circonstances ni quoi que ce soit.

23 Q. :Avez-vous vu sa photographie dans les journaux ?

24 R. : Non.

25 Q. : Alors vous n’avez pas entendu les nouvelles de l’arrestation de Tadic

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1 au journal télévisé ?

2 R. : Oui, j’ai entendu, mais c’était en (expurgé) et comme je ne comprends

3 pas, je n’ai presque rien compris, juste le prénom et le nom.

4 Q. : Je suppose que les émissions télévisées concernant les événements

5 d’Omarska vous intéressaient ?

6 R. : Pas vraiment. Ils ne m’intéressaient pas vraiment parce que je savais

7 plus ou moins tout ce qui s’y était passé.

8 Q. : Des journalistes ont-ils demandé à vous interroger ?

9 R. : Oui, Madame Monika Gras est venue où je me trouvais. D’autres ont

10 donné des interviews. Je ne voulais pas.

11 Q. : Au moment des événements de cet après-midi-là dans le grand garage à

12 Omarska, en avez-vous parlé avec les autres ? D’autres personnes

13 vous ont-elles donné des informations ?

14 R. : Bien sûr. J’ai entendu. Tout le monde en parlait.

15 Q. : Avez-vous parlé avec G de ce qui s’était passé ?

16 R. : Oui, j’ai entendu quelque chose.

17 Q. : De la part de G ?

18 R. : Oui, je veux dire, je ne me souviens pas, je pense.

19 Q. :Mais celui que nous appelons H, vous n’avez pas parlé avec lui ?

20 R. : Non.

21 Q. : Pensiez-vous que quatre détenus avaient dû se porter volontaires pour

22 aller dans le hangar ?

23 R. : Oui, je le pensais.

24 Q. : Pensiez-vous que ces quatre personnes avaient été choisies dans

25 l’entrée au bas des escaliers ?

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1 R. : Bon, il était logique pour moi de penser cela, parce que ces gens s’y

2 trouvaient déjà. C’était leur place, l’endroit où ils se tenaient et

3 ils ne montaient pas à l’étage pour chercher les gens.

4 Q. : Pensiez-vous que G avait mordu les testicules de Jasko Hrnic ?

5 R. : Oui.

6 Q. : Cet après-midi-là vous nous avez dit que vous n’étiez pas dans la

7 pièce 15 en raison de votre maladie. Vous vous trouviez près des

8 lavabos à cause de la dysenterie dont vous soufriez ?

9 R. : Non, ce n’était pas dans la pièce 15. Je me trouvais dans une autre

10 pièce. J’avais été dans la pièce 15 avant l’interrogatoire.

11 Q. : Oui, la grande pièce de l’autre côté au rez-de-chaussé. Vous

12 souvenez-vous du numéro de cette pièce au bout du couloir où l’on

13 vous a mis après votre interrogatoire ?

14 R. : Après l’interrogatoire, j’étais dans une pièce à l’étage supérieur,

15 pas au rez-de-chaussée.

16 Q. : Toutes les pièces de ce secteur ont des portes numérotées, n’est-ce

17 pas ?

18 R. : Je ne me souviens pas.

19 Q. : Vous étiez assis sur une caisse de bois contre le mur du garage ?

20 R. : Oui.

21 Q. : Y étiez-vous seul ou avec les deux autres personnes qui étaient

22 également malades ?

23 R. : Oui, il y avait deux hommes.

24 Q. : Étiez-vous tous assis sur la caisse ?

25 R. : Je sais que j’étais assis sur la caisse. Il y avait aussi un banc

Page 4555

1 bas. Il était difficile pour moi de m’asseoir sur le banc parce que

2 j’étais déjà si malade et il était difficile de me lever, mais de la

3 caisse, comme elle était un peu plus haute, c’était plus facile.

4 Q. : Les gardes de service, étaient-ils postés en bas dans le garage ?

5 R. : Non, ils... Certains étaient en face à une table, je ne peux pas

6 être plus précis, peut-être en face ou un peu sur le côté.

7 M. KEEGAN : Je suis désolé, Madame la Présidente. Je suis désolé

8 d’interrompre mais il s’agit d’expurger des noms de lieux donnés,

9 les heures étant 12.07.02 et 12.07.30. Je pense que le nom de

10 l’endroit a été mentionné trois fois. Ce doit être la page 27,

11 lignes 12 et 18.

12 PRÉSIDENT DE LA CHAMBRE : J’attendais de le voir apparaître à l’écran. Y

13 a-t-il une objection ?

14 M. KAY : Aucune objection, Madame la Présidente.

15 M. KEEGAN : Veuillez excuser mon interruption.

16 PRÉSIDENT DE LA CHAMBRE : Nous vous l’accordons. Voilà. Nous vous

17 l’accordons. Je suppose que les heures sont correctes ? Voyons. M.

18 Kay, vous pouvez continuer.

19 M. KAY : Merci, Madame la Présidente. (Au témoin) : Je vous demandais,

20 Monsieur Mujcic, où se trouvaient les gardes qui surveillaient le

21 hangar, où étaient-ils placés cette après-midi là avant que les

22 hommes en tenues camouflées viennent dans le hangar. J’avais suggéré

23 qu’ils se trouvaient dans la zone du garage. Vous nous avez dit

24 qu’ils étaient assis à une table. Pouvez-vous nous dire où se

25 trouvait cette table ?

Page 4556

1 R. : Je ne me souviens pas de l’emplacement exact parce qu’il y avait des

2 camions-bennes et ils avaient une table. Je ne me souviens pas s’ils

3 étaient assis à la table ou debout.

4 Q. : Donc cette table se trouvait dans la zone dont nous avons établi

5 ensemble qu’il s’agissait du garage ?

6 R. : Oui.

7 Q. : Merci. Était-ce près de la porte d’entrée principale à l’arrière du

8 bâtiment ?

9 R. : Je ne comprends pas la question.

10 Q. : Je voudrais juste savoir où était posté le garde qui vous a dit que

11 les hommes en uniformes camouflés arrivaient. Je veux que vous

12 identifiez dans la mesure du possible l’endroit où se tenait ce

13 garde.

14 R. : Je suis désolé, je ne peux pas vous aider parce que j’étais penché.

15 J’avais... très mal, donc je m’étais courbé en deux. Ma tête était

16 baissée. A ce moment-là nous avons entendu le mot "sarenci", "les

17 tâchetés", je ne pensais pas à l’endroit où se trouvaient les gardes

18 mais seulement à celui où se trouvait la porte pour la franchir

19 avant qu’ils n’arrivent.

20 Q. : Qu’est-ce que vous avez fait ? Vous lever et quitter la caisse en

21 courant ?

22 R. : C’est exact. C’est exact.

23 Q. : Quand vous êtes parti en courant, vous vous êtes éloigné de la porte

24 d’entrée du garage ?

25 R. : Je courais vers l’entrée de ma pièce.

Page 4557

1 Q. : Oui, c’est à dire dans la direction opposée à celle de l’entrée au

2 fond du garage, est-ce exact ?

3 R. : Je courrais vers la pièce où on m’avait mis, elle n’est pas loin et

4 la colonne venait de la direction des WC qui se trouvent sur la

5 gauche ou de la direction de la pièce 15, je ne sais pas.

6 Q. : Est-ce que le garde a crié que les hommes en uniformes camouflés

7 arrivaient ?

8 R. : Oui, ils ont dit "Sarenci", les "tâchetés". L’équipe de ce jour-là

9 était, comment dire, décente. Ils ne nous ont pas maltraités.

10 Q. : Donc vous avez couru vers la porte qui donne sur l’entrée au bas des

11 escaliers qui mènent au premier étage ?

12 R. : C’est exact.

13 Q. : Vous avez essayé de vous éloigner le plus possible de cette porte

14 afin d’éviter tout contact avec ces hommes, est-ce exact ?

15 R. : La porte était pratiquement bouchée, les gens sautaient des armoires

16 et tout le monde se trouvait devant la porte, donc ces deux étaient

17 arrivés à la porte avant moi donc je suis resté à l’extérieur et à

18 ce moment-là j’avais peur, peur que la colonne soit déjà arrivée et

19 peur d’être pris. J’ai jeté un coup d’oeil dans cette direction. La

20 colonne était déjà passée, c’est-à-dire je crois qu’elle était déjà

21 passée devant les toilettes et j’ai levé les yeux et je vous ai dit

22 ce que j’ai vu.

23 Q. : Oui, vous avez dit avoir reconnu trois personnes dans cette colonne,

24 est-ce exact ? Quel était approximativement le nombre d’hommes qui

25 entraient dans le garage ?

Page 4558

1 R. : Il y en avait plus de trois.

2 Q. : Après avoir levé les yeux vous avez probablement essayé de rentrer

3 dans la pièce par la porte ?

4 R. : Oui, bien sûr, j’essayais d’entrer dans la pièce.

5 Q. : Y êtes-vous parvenu ?

6 R. : Oui, j’y suis parvenu. Certaines personnes étaient restées en haut.

7 Des gens étaient restés près des armoires, mais la majorité avait

8 monté les escaliers, je les bousculais pour qu’ils n’atteignent pas

9 ma place. J’ai atteint le premier palier de l’escalier.

10 Q. : Après avoir levé les yeux et vu la colonne d’hommes près des

11 toilettes vous vous êtes concentré sur le fait d’entrer dans cette

12 pièce derrière la porte ?

13 R. : Non, non. J’ai regardé pour voir s’ils n’étaient pas trop près de

14 moi. Comme je l’ai dit, ils avaient déjà dépassé le niveau des

15 toilettes mais ils n’étaient pas près de moi, donc je ne me sentais

16 pas absolument obligé de passer la porte.

17 Q. : Mais vous avez essayé d’entrer dans cette pièce dès que possible,

18 n’est-ce pas ?

19 R. : Oui, mais j’avais suffisamment de temps pour voir où ils se

20 trouvaient.

21 Q. : Vous cherchiez à voir s’il y avait une place dans cette pièce où vous

22 essayiez d’entrer afin de pouvoir vous échapper ?

23 R. : Il n’y avait pas de place. J’étais devant la porte. Ces gens étaient

24 déjà à la porte et j’étais là.

25 Q. : Vous essayiez de forcer votre chemin entre ces gens qui étaient à la

Page 4559

1 porte afin de ne pas rester seul dans le garage ?

2 R. : Je devais d’abord attendre que les gens se déplacent pour faire de la

3 place.

4 Q. : Guettiez-vous la place qu’ils allaient vous donner ?

5 R. : Je ne pouvais pas demander de place alors que tout était surpeuplé,

6 quand on ne peut pas passer. Je les poussais simplement des mains

7 afin de pouvoir entrer le plus vite possible et c’était tout.

8 Q. : Oui. Vous ne pouvez demander qu’on vous fasse de la place, vous

9 essayiez d’en trouver ?

10 R. : Que pouvais-je faire d’autre que dire "excusez-moi, s’il vous plaît,

11 est-ce que je peux passer, est-ce que je peux entrer ?"

12 Q. : Vous dites avoir regardé les hommes en tenues camouflées qui

13 arrivaient dans la pièce et vous décrivez l’homme dont vous dites

14 qu’il s’agissait de Dusko Tadic comme portant des lunettes de soleil

15 ?

16 R. : Oui.

17 Q. : Et un képi avec un badge en forme de cocarde (Kokarda) ?

18 R. : Ou des aigles, des aigles blancs, je pensais.

19 Q. : Vous souvenez-vous de la couleur du képi ?

20 R. : Je n’avais pas beaucoup de temps.

21 Q. : Quelle sorte de vêtements portait cet homme ?

22 R. : Un uniforme camouflé.

23 Q. : Vous souvenez-vous de la couleur de la ceinture qu’il aurait pu

24 porter sur cet uniforme ?

25 R. : Je ne peux pas vraiment l’affirmer, mais je pense qu’il s’agissait du

Page 4560

1 blanc de la police militaire ou d’une nouvelle ceinture d’une

2 couleur claire sans doute.

3 Q. : Est-ce que la réponse est que vous ne savez pas ?

4 R. : L’une des deux possibilités, soit elle était blanche ou il s’agissait

5 d’une nouvelle ceinture qui n’était pas encore usée.

6 Q. : L’homme portait-il une barbe ?

7 R. : Il est possible qu’il ait eu une barbe d’un ou deux jours, mais je ne

8 peux l’affirmer avec certitude.

9 Q. : Vous souvenez-vous de l’avoir décrit en 1994 en disant qu’il avait

10 des lunettes de soleil et une barbe ?

11 R. : Il est possible qu’il ait eu une barbe, mais pas longue parce que

12 quand on ne se rase pas pendant un ou deux jours on a déjà une

13 barbe.

14 Q. : Ma question était : vous souvenez-vous avoir décrit cet homme en 1994

15 en disant qu’il avait des lunettes de soleil et une barbe ?

16 R. : C’était comme je viens de le dire devant cette cour.

17 Q. : Je vous demande simplement si vous avez fait cette description il y a

18 environ deux ans, qu’il avait une barbe ?

19 R. : Je ne peux pas dire qu’il avait une barbe. J’ai dit, peut-être, qu’il

20 avait une barbe mais pas une vraie barbe. Il n’était simplement pas

21 rasé. Il ne s’était pas rasé depuis un ou deux jours. Je ne pouvais

22 pas vraiment le voir.

23 Q. : Avez-vous vous relu cette déclaration récemment, avant de comparaître

24 devant cette cour pour témoigner ?

25 R. : Non.

Page 4561

1 Q. : Peut-être voudriez-vous en voir une copie dans votre propre langue ?

2 Madame la Présidente, je présente la pièce D25. Je crois que

3 l’Accusation en possède un exemplaire en serbo-croate. M. Keegan me

4 dit que c’est le cas.

5 (Au témoin) : À la page 4, Monsieur Mujcic, vous verrez, lisez-le

6 pour vous-même, au deux tiers de la page la liste de noms Jasmin

7 Hrnic, Emir Karabasic et Eno Alic, mais il y a un paragraphe au-

8 dessus dans lequel vous donnez la description avec les lunettes de

9 soleil. Le voyez-vous ?

10 R. : Oui.

11 Q. : C’est cette déclaration qui me pousse à vous demander si l’homme

12 avait une barbe, parce que c’est ce qui est dit ici, n’est-ce pas ?

13 R. : Si c’est écrit, je l’ai peut-être dit, mais maintenant je vous décris

14 le type de barbe dont il aurait pu s’agir. Pour moi, il s’agissait

15 d’une barbe d’un ou deux jours, elle n’était pas longue comme ça.

16 Q. : Essayez-vous de modifier votre description parce que vous avez

17 entendu d’autres témoignages dans cette affaire ?

18 R. : Ce n’est pas ce que j’essaie de faire.

19 Q. : Parce que je vous suggère la chose suivante : à savoir que cet homme

20 n’était pas Dusko Tadic, que vous avez fait erreur sur son identité

21 ?

22 R. : Si je ne l’avais pas connu j’aurais pu me méprendre mais puisque je

23 le connaissais, avec et sans barbe et puisqu’il a une barbe noire

24 s’il ne se rase pas tous les jours, je pense pouvoir le décrire

25 comme un homme barbu.

Page 4562

1 Q. : Mais quand vous avez monté l’escalier est-ce que d’autres personnes

2 vous ont dit "C’est Dule, c’est Dule" ?

3 R. : Non, ils ne disaient pas que c’était Dule, mais quand je suis entré

4 dans la pièce les gens avaient déjà peur comme s’ils savaient qui

5 était là et ce qui allait se passer.

6 Q. : Des gens qui ne savaient pas faisaient-il courir la rumeur qu’il

7 s’agissait de Dule ?

8 R. : A ce que j’ai entendu dans la pièce 15, Dule était déjà là et seule

9 une porte nous séparait de cette pièce, donc les gens savaient déjà.

10 Q. : Donc dans la pièce à l’étage, les gens qui venaient de monter, qui

11 n’avaient pas été à l’extérieur disaient qu’il s’agissait de Dule ?

12 R. : Nous ne pouvions pas parler et nous n’en avions pas envie. Nous

13 avions tous peur. A mon avis quelqu’un l’avait entendu de gens et je

14 tire cette conclusion des événements lorsqu’on a appelé Eno Alic

15 dehors, il semblait savoir qui le cherchait. Il avait peur et il

16 disait "Il va me tuer".

17 Q. : Vous et d’autres avez parlé de cet homme pendant que vous étiez dans

18 la pièce à l’étage ?

19 R. : Non.

20 Q. : Vous nous avez dit...

21 R. : Non, pas de conversation.

22 Q. : Vous nous avez dit avoir parlé à G ?

23 R. : C’est possible, après qu’il soit revenu, après les événements.

24 Q. : Un autre point sur lequel je souhaite vous poser des questions

25 concerne le fait que vous ayez vu Dusko Tadic à Kozarac après le

Page 4563

1 bombardement de la ville. Vous souvenez-vous de ce que vous avez dit

2 aujourd’hui à la Cour ?

3 R. : Oui.

4 Q. : Vous nous avez dit qu’il était sur un char arrêté devant le bâtiment

5 du restaurant que vous avez identifié dans la rue Marsala Tita, oui

6 ?

7 R. : Oui.

8 Q. : Vous souvenez-vous aussi d’avoir dit dans cet interrogatoire que

9 Dusko Tadic portait un masque et avait traversé Kozarac debout sur

10 un char.

11 R. : Non, j’ai dit qu’il portait un uniforme de camouflage. Je ne me

12 souviens d’aucun masque. Je ne me souviens pas d’avoir dit quoi que

13 ce soit concernant un masque.

14 Q. : Oublions cela, vous souvenez-vous avoir dit qu’il avait traversé la

15 ville debout sur un char ?

16 R. : J’ai dit ici qu’au moment où je l’ai vu je ne me souvenais pas si le

17 char était en mouvement ou venait juste de s’arrêter. Je sais qu’il

18 était immobile. Peut-être venait-il juste d’arriver. On entendait le

19 moteur tourner.

20 Q. : Oui. Vous avez dit qu’il était immobile et qu’il avait sauté et

21 frappé un jeune garçon et, comme vous nous l’avez dit, vous n’avez

22 pas lu cette déclaration avant d’être appelé à la barre ?

23 R. : Non.

24 Q. : Pourriez-vous vous reporter à la page 6 de cette déclaration et y

25 jeter un coup d’oeil. Vous verrez que le troisième paragraphe à

Page 4564

1 partir du haut commence par "Réponse". Est-il exact que vous avez

2 dit alors, en 94 qu’il traversait la ville debout sur un char ?

3 Était-ce exact ou non ?

4 R. : Je ne me souviens pas de l’avoir dit ainsi.

5 Q. : Bien, est-ce qu’après tout ce qui vous est arrivé vous êtes prêt à

6 inventer des choses pour incriminer Dusko Tadic parce que vous

7 souhaitez vous venger de lui ou du peuple serbe ?

8 R. : Premièrement, ce n’est pas moi qui accuse Dusko Tadic. C’est le

9 Tribunal qui l’accuse et si je voulais me venger du peuple serbe je

10 serais allé dans l’armée bosniaque et je ne serais pas resté où je

11 suis.

12 M. KAY : Je n’ai plus de questions.

13 PRÉSIDENT DE LA CHAMBRE : M. Keegan, de nouvelles questions ?

14 M. KEEGAN : Brièvement, Madame la Présidente.

15 Nouvel interrogatoire par M. Keegan

16 Q. : La déclaration, Monsieur Mujcic, à laquelle se réfère M. Kay,

17 premièrement, la traduction que vous lisez n’est pas la version

18 originale en bosniaque que vous avez faite et signée, il s’agit de

19 la traduction d’une traduction, est-ce exact ?

20 R. : Oui.

21 Q. : Quand vous avez été interrogé, vous avez répondu à des représentants

22 officiels et ce que vous avez dit a été traduit par quelqu’un

23 d’autre dans une autre langue, est-ce exact ?

24 R. : Oui.

25 Q. : Vous-même n’avez pas fait votre déclaration dans votre propre langue

Page 4565

1 ?

2 R. : Non.

3 Q. : Quel terme employez-vous pour décrire un uniforme de camouflage ?

4 R. : "Maskirna".

5 Q. : Cet interrogatoire a-t-il duré longtemps ?

6 R. : Je ne me souviens pas de la durée exacte, de l’après-midi à la

7 soirée.

8 Q. : S’agit-il d’événements dont vous aimez parler ?

9 R. : Non.

10 Q. : Avez-vous répondu de votre mieux aux questions qui vous ont été

11 posées ?

12 R. : Ils m’ont posé des questions sur ce que j’ai vu et sur la manière

13 dont les choses se passaient dans ces situations en général, tout ce

14 qui s’est produit, donc j’ai fait une déclaration concernant ce que

15 j’ai entendu dire par d’autres et ma propre expérience de ce que

16 j’ai vu.

17 M. KEEGAN : Merci. Rien d’autre, Madame la Présidente.

18 PRÉSIDENT DE LA CHAMBRE : M. Kay ?

19 Reprise du contre-interrogatoire par M. KAY

20 M. KAY : Voudriez-vous regarder le (expurgé), M. Mujcic et identifier votre

21 signature sur chaque page ainsi que les corrections faites par vous

22 dans le texte et votre signature confirmant que l’interrogatoire

23 avait été traduit, lu et approuvé par vous en serbo-croate et que

24 vous étiez satisfait de l’interprète ? Merci, monsieur l’Huissier.

25 Regardez à la page qui est ouverte, laissez-la ouverte, s’il vous

Page 4566

1 plaît. S’agit-il de votre signature à la fin de l’interrogatoire,

2 est-ce exact, la signature de l’homme que vous étiez satisfait

3 d’avoir comme interprète ? Si vous voulez parcourir les pages

4 précédentes vous verrez votre signature sur toutes les pages ainsi

5 que certaines corrections que vous avez apportées au texte, est-ce

6 exact ?

7 R. : Je ne me souviens pas de tous ces changements ici en (expurgé). Ils

8 ont dit "Signez ici" et je l’ai fait. Le Monsieur qui traduisait

9 était Serbe. Je l’ai accepté. Je ne savais pas si j’avais le choix

10 ou non.

11 M. KAY : Très bien.

12 PRÉSIDENT DE LA CHAMBRE : M. Keegan ? J’ai une question. M. Kay vous a

13 posé une question, M. Mujcic, concernant le fait de savoir si oui ou

14 non vous aviez dit dans votre déclaration que M. Tadic portait un

15 masque. Voudriez-vous regarder cette déclaration ou, peut-être, le

16 conseil de la Défense peut me renseigner. A-t-il dit dans la

17 déclaration qu’il portait un masque ?

18 M. KAY : J’accepte son explication disant que "masque" et camouflage sont

19 des expressions similaires, l’argument de M. Keegan est tout à fait

20 juste.

21 PRÉSIDENT DE LA CHAMBRE : Bien. C’était le mot que le témoin avait employé

22 pour "camouflage" ?

23 M. KEEGAN : Oui, Madame la Présidente. La question était de savoir si l’un

24 des auteurs .....

25 INTERPRETE : Micro, M. Keegan, s’il vous plaît.

Page 4567

1 M. KEEGAN : La question était de savoir si l’un des auteurs portait un

2 masque. La réponse était en décrivant Tadic que le terme a été

3 traduit par "masque" ce qui est l’endroit de la déclaration qui

4 comporte des inexactitudes.

5 PRÉSIDENT DE LA CHAMBRE : Ce terme signifie "camouflage" en serbo-croate ?

6 M. KEEGAN : Exact.

7 PRÉSIDENT DE LA CHAMBRE : Bien. Merci. Avez-vous des questions, M. Keegan

8 ?

9 M. KEEGAN : Non, Madame la Présidente.

10 PRÉSIDENT DE LA CHAMBRE : M. Kay ?

11 M. KAY : Non, Madame la Présidente.

12 PRÉSIDENT DE LA CHAMBRE : M. Mujcic, vous êtes définitivement libéré. Vous

13 pouvez partir. Merci beaucoup d’être venu.

14 TÉMOIN : Merci à vous aussi.

15 JUGE STEPHEN : M. Keegan, je me demandais si vous pouviez demander à un

16 témoin d’expliquer, de m’expliquer au moins, ce qu’est une "Kokarda"

17 ?

18 M. KEEGAN : Oui, Monsieur le Juge.

19 JUGE STEPHEN : C’est un terme fréquemment employé et que je ne comprends

20 pas.

21 M. KEEGAN : Oui.

22 PRÉSIDENT DE LA CHAMBRE : Je ne vais pas poser de question sur les

23 uniformes, mais je voulais demander à l’un des témoins hier, qui

24 travaillait à Omarska et je crois qu’il vivait à Kozarac et nous

25 avons entendu son témoignage concernant la distance entre Prijedor

Page 4568

1 et Kozarac. Je ne suis pas sûre que nous ayons entendu un témoignage

2 sur la distance entre Kozarac et Omarska. Je voulais demander au

3 témoin combien de kilomètres y a-t-il de Prijedor à Omarska et le

4 temps que prendrait ce trajet dans des

5 conditions normales. Je ne pense pas que nous ayons déjà entendu

6 cela, j’en suis sûre pour la distance entre Kozarac et Omarska, mais

7 peut-être l’avons-nous entendu.

8 M. KEEGAN : Oui, Madame la Présidente.

9 PRÉSIDENT DE LA CHAMBRE : Les deux questions, la mienne et celle du Juge

10 Stephen n’ont rien à voir l’une avec l’autre mais c’était une

11 lacune.

12 Madame Hollis, pourriez-vous appeler le témoin suivant ?

13 MELLE HOLLIS : Oui, Madame la Présidente. Madame la Présidente,

14 l’Accusation cite Elvir Grozdanic.

15 PRÉSIDENT DE LA CHAMBRE : Merci.

16 M. ELVIR GROZDANIC, appelé à la barre

17 PRÉSIDENT DE LA CHAMBRE : Monsieur, voudriez-vous prononcer le serment qui

18 vous est présenté ?

19 TÉMOIN ?En interprétation? : Je déclare solennellement dire la vérité,

20 toute la vérité et rien que la vérité.

21 (Prestation de serment du témoin)

22 PRÉSIDENT DE LA CHAMBRE : Merci, Monsieur. Vous pouvez vous asseoir.

23 Interrogatoire par MADAME HOLLIS

24 Q. : Pourriez-vous donner votre nom ?

25 R. : Elvir Grozdanic.

Page 4569

1 Q. : Quelle est votre date de naissance ?

2 R. : Gornji Garevci dans la municipalité de Prijedor.

3 Q. : Quelle est votre date de naissance ?

4 R. : Le 17 mars 1972.

5 Q. : Lorsque vous indiquez que vous êtes né à Gornji Garevci dans

6 l’opština de Prijedor, est-ce à dire que vous êtes né dans un

7 village dans la zone qui est généralement appelée Gornji Garevci ?

8 R. : Oui.

9 Q. : Dans quel village êtes-vous né ?

10 R. : Grozdanici.

11 Q. : Pourrait-on maintenant présenter la pièce 79 de l’Accusation au

12 témoin ? M. Grozdanic, prenez quelques instants pour regarder la

13 carte et vous orienter afin de repérer Grozdanici. Pourrait-on

14 placer cette carte sur le rétroprojecteur, s’il vous plaît. Si vous

15 pouviez l’indiquer, s’il vous plaît. Juste un instant pendant que

16 l’on allume le rétroprojecteur. Merci. Donc, voilà Grozdanici ?

17 R. : Oui.

18 Q. : Pourriez-vous nous dire, s’il vous plaît, de quelle nationalité ou de

19 quel groupe ethnique étaient les habitants de cette zone ?

20 R. : Musulmans, Serbes.

21 Q. : Quel était le groupe ethnique ou la nationalité des habitants du

22 village de Grozdanici ?

23 R. : Musulmans.

24 Q. : Monsieur, de quelle nationalité ou de quel groupe ethnique êtes-vous

25 ?

Page 4570

1 R. : Musulman.

2 Q. : Quelle distance sépare Grozdanici de la ville de Prijedor ?

3 R. : Environ 8 kilomètres.

4 Q. : Quelle distance sépare le village de Grozdanici de la ville de

5 Kozarac ?

6 R. : Également 8 kilomètres environ.

7 Q. : Êtes-vous allé à l’école primaire à Gornji Garevci et dans la ville

8 de Kozarac ?

9 R. : Oui.

10 Q. : Avez-vous effectué votre service militaire de mars 1990 à mars 1991 ?

11 R. : Oui.

12 Q. : Durant votre service militaire avez-vous servi comme policier

13 militaire à Stip, en Macédoine ?

14 R. : Oui.

15 Q. : Êtes-vous retourné à Grozdanici après votre service militaire ?

16 R. : Oui.

17 Q. : Avez-vous travaillé comme policier à plein temps de septembre 1991

18 jusqu’à l’attaque contre Kozarac en mai 1992 ?

19 R. : Oui.

20 Q. : Où travailliez-vous ?

21 R. : A Kozarac.

22 Q. : C’est-à-dire la ville de Kozarac ?

23 R. : Parfois dans la ville même et dans différents endroits.

24 Q. : Quels autres endroits ?

25 R. : Gornji Garevci, Kozarusa et Jaruge.

Page 4571

1 Q. : Vous travailliez comme policier à temps plein, mais à cette époque

2 vous étiez policier de réserve ?

3 R. : Oui.

4 Q. : Quelles étaient vos tâches ?

5 R. : Mes fonctions étaient de faire la circulation à Kozarac et des

6 patrouilles à Gornji Garevci, Kozarusa et Jaruge.

7 Q. : Vous a-t-on remis des armes dans l’exercice de vos fonctions de

8 policier ?

9 R. : Oui.

10 Q. : De quel type d’armes s’agissait-il ?

11 R. : Fusil automatique.

12 Q. : Avant de commencer à travailler dans la police à Kozarac, étiez-vous

13 déjà allé à Kozarac ?

14 R. : Oui.

15 Q. : Y alliez-vous souvent ?

16 R. : Oui.

17 Q. : Quelle était la fréquence de vos visites en ville ?

18 R. : J’allais à l’école tous les jours et pendant les vacances trois fois

19 par semaine.

20 Q. : Après avoir fini l’école, tous les combien y alliez-vous ?

21 R. : Nous y allions trois fois parce que je jouais au football à Kozarac,

22 alors nous allions nous entraîner et jouer des matches.

23 Q. : C’est-à-dire, trois fois pas semaine, par mois ?

24 R. : Par semaine.

25 Q. : Connaissiez-vous la principale rue commerçante de Kozarac ?

Page 4572

1 R. : Oui.

2 Q. : Connaissiez-vous le nombre des commerçants et des résidents de la rue

3 principale ?

4 R. : Oui.

5 Q. : Connaissiez-vous Dule Tadic ?

6 R. : Oui.

7 Q. : Depuis combien d’années le connaissiez-vous ?

8 R. : Environ dix ans.

9 Q. : Comment l’aviez-vous rencontré ?

10 R. : Je l’avais rencontré quand il était mon professeur de karaté au club

11 de Kozarac.

12 Q. : Quand il était votre professeur de karaté, quelle était la fréquence

13 des cours avec lui ?

14 R. : Je pense que c’était deux fois par semaine.

15 Q. : Hormis ces contacts avec lui en tant que professeur de karaté, quels

16 autres types de contacts aviez-vous avec lui ?

17 R. : On se croisait.

18 Q. : Combien de fois par mois voyiez-vous Dule Tadic en moyenne ?

19 R. : Environ deux ou trois fois par mois avant que je prenne des cours de

20 karaté, peut-être plus.

21 Q. : Après avoir arrêté les cours de karaté, combien de fois en moyenne le

22 voyiez-vous ?

23 R. : Pendant que je faisais du karaté ou après ?

24 Q. : Après.

25 R. : J’ai dit deux ou trois fois, parfois plus, parfois moins, mais c’est

Page 4573

1 une moyenne.

2 Q. : Connaissiez-vous d’autres membres de sa famille ?

3 R. : Oui.

4 Q. : Qui connaissiez-vous ?

5 R. : Je connaissais sa femme.

6 Q. : Comment s’appelait-elle ?

7 R. : Mira.

8 Q. : Savez-vous où elle travaillait ?

9 R. : Elle travaillait comme infirmière au centre médical de Kozarusa, si

10 je me souviens bien, puis à Trnopolje et à Kozarac.

11 Q. :Savez-vous si Dule Tadic avait des affaires dans la ville de Kozarac ?

12 Q. : Pendant un moment il a eu un café.

13 Q. : Savez-vous où il était situé ?

14 R. : Oui.

15 Q. : Où ?

16 R. : Je suis désolé, je n’entends pas bien l’interprétation. Dans la rue

17 principale de Kozarac.

18 Q. : Peut-être pourrait-on monter le volume. Quand vous dites dans la rue

19 principale de Kozarac, si nous parlons de la rue principale et que

20 l’école Rade Kondic est d’un côté et la mosquée Mutnik de l’autre,

21 de quel côté de la rue de M. Tadic se trouvaient-ils ?

22 R. : Du côté de la mosquée, juste sur la droite de la rue principale quand

23 on vient de Kozarac.

24 Q. : Quand vous dites "quand on vient" vous voulez dire en se dirigeant

25 vers la mosquée ?

Page 4574

1 R. : Vers la mosquée.

2 Q. : Vous souvenez-vous des bâtiments et des commerces qui se trouvait de

3 l’autre côté de la rue face au café de M. Tadic ?

4 R. : Oui.

5 Q. : De quels commerces vous souvenez-vous ?

6 R. : Un peu plus bas, il y avait une pharmacie, puis, en remontant, un

7 salon de coiffure et juste en face du café de Tadic il y avait un

8 immeuble, un immeuble d’habitation.

9 Q. : Vous souvenez-vous du nom du café de M. Tadic ?

10 R. : Oui.

11 Q. : Qui était ?

12 R. : Nipon.

13 Q. : Êtes-vous allé dans ce café ?

14 R. : Non.

15 Q. : Avez-vous déjà vu M. Tadic, à l’époque où vous le connaissiez,

16 l’avez-vous vu avec une barbe ?

17 R. : Souvent.

18 Q. : L’avez-vous vu rasé ?

19 R. : Je ne crois pas.

20 Q. : Avez-vous remarqué quelque chose de particulier dans la démarche de

21 Dusko Tadic ?

22 R. : Oui.

23 Q. : Quoi ?

24 R. : Il ne marchait pas comme tout le monde.

25 Q. : Pourriez-vous préciser quelle était cette différence ?

Page 4575

1 R. : Ses épaules étaient un peu plus larges et il était un peu petit et

2 pour le dire familièrement, il marchait comme un apprenti.

3 Q. : Je ne sais pas ce que vous voulez dire par "apprenti" ?

4 R. : C’est, je ne sais pas comment dire, c’est comme une personne imbue

5 d’elle même parce que les gens de Kozarac lui ont tout donné pour

6 qu’il puisse être à Kozarac.

7 Q. : Avant l’attaque contre...

8 PRÉSIDENT DE LA CHAMBRE : Excusez-moi, Madame Hollis, avant d’aborder un

9 autre domaine, nous allons faire une pause jusqu’à 14h30.

10 (13h00)

11 (Pause déjeuner)

12 (14h30)

13 PRÉSIDENT DE LA CHAMBRE : Madame Hollis, voulez-vous continuer

14 l’interrogatoire de M. Grozdanic ?

15 MADAME HOLLIS : Merci, Madame la Présidente. Madame la Présidente, en

16 réponse aux questions que vous avez posées plus tôt, nous avons

17 trouvé soit un témoignage soit un témoin qui y répondra.

18 PRÉSIDENT DE LA CHAMBRE : Merci, Madame Hollis.

19 MADAME HOLLIS : Madame la Présidente, avant que nous commencions

20 l’interrogatoire de ce témoin, il nous reste un point à régler.

21 L’Accusation a également demandé des expurgations supplémentaires de

22 points sensibles. Ils se trouvaient à 12.41.38, ligne 3, page 38,

23 12.43.46, page 38, ligne 16. Nous avons demandé le même type

24 d’expurgation.

25 PRÉSIDENT DE LA CHAMBRE : Je suppose que la Défense a été consultée

Page 4576

1 concernant ces expurgations supplémentaires et ne s’y oppose pas.

2 Nous donnons notre approbation. Cela sera fait.

3 MADAME HOLLIS : Merci, Madame la Présidente.

4 (Au témoin) : M.Grozdanic, avant la pause, nous disions que vous

5 connaissiez Dusko Tadic et nous parlions de vos relations avec lui.

6 Sur ce point, j’aimerais vous demander si vous vous souvenez d’un

7 incident dans lequel il était impliqué qui s’est déroulé un jour de

8 marché à Kozarac avant l’attaque contre la ville ?

9 R. : Oui.

10 Q. : Pourriez-vous nous raconter le souvenir que vous gardez de cet

11 incident ?

12 R. : Je me souviens que c’était un jeudi et, avec Saban Jaskic, je faisais

13 la circulation dans le centre de Kozarac. Dusko Tadic est arrivé

14 avec une autre personne dans une voiture blanche, une petite Fiat et

15 s’est garé sur la voie. En tant que membre de la Police de réserve

16 je me suis approché et je lui ai demandé de se garer sur la droite

17 devant une cordonnerie afin de ne pas obstruer la circulation.

18 Q. : Est-ce que Dule Tadic vous a répondu ?

19 R. : Oui, il m’a répondu comme si je n’étais rien, qu’il n’avait pas à

20 recevoir d’ordres de moi et des trucs comme ça.

21 Q. : Vous souvenez-vous s’il a dit autre chose à cette occasion ?

22 R. : Oui, je lui ai dit "Je suis désolé mais je porte un uniforme et

23 j’aimerais que vous fassiez ce que je viens de vous demander" alors

24 il m’a répondu "Un jour viendra quand vous aussi vous disparaîtrez

25 d’ici".

Page 4577

1 Q. : Vous souvenez-vous combien de temps avant l’attaque cela se passait ?

2 R. : Je ne peux pas préciser la date, je ne me souviens pas vraiment.

3 Q. : Où étiez-vous quand Kozarac a été attaquée ?

4 R. : J’étais à un point de contrôle à Koncari.

5 Q. : Pendant que vous y étiez, cette zone a-t-elle également été attaquée

6 ?

7 R. : Oui.

8 Q. : De quel type d’attaque s’agissait-il ?

9 R. : Tous les types : des chars, des mortiers, des obusiers, des canons

10 antiaériens.

11 Q. : De quel groupe ethnique étaient les habitants de la zone de Koncari

12 attaquée ce jour-là ?

13 R. : Musulmans.

14 Q. : Votre village, Grozdanici a-t-il été attaqué le même jour ?

15 R. : Oui.

16 Q. : Quels dommages a-t-il subi ?

17 R. : Le village a été détruit. Tout a été brûlé et les gens emmenés dans

18 des camps.

19 Q. : Vous êtes-vous rendus aux Serbes le 29 mai ?

20 R. : Oui.

21 Q. : Qu’avez-vous fait de vos armes de fonction ?

22 R. : Je les ai rendues.

23 Q. : Le même jour, le 29 mai, on vous a emmené au camp d’Omarska ?

24 R. : Oui.

25 Q. : Étiez-vous escorté durant ce voyage ?

Page 4578

1 R. : Oui.

2 Q. : Connaissiez-vous votre escorte ?

3 R. : Brane Balte.

4 Q. : Quelle était sa profession ?

5 R. : Policier du service d’active.

6 Q. : Savez-vous où il travaillait ?

7 R. : Avant la guerre, un mois avant environ, il travaillait à Kozarac,

8 puis il est allé à Prijedor.

9 Q. : De quel groupe ethnique était-il ?

10 R. : Serbe.

11 Q. : Combien de temps avez-vous été détenu au camp d’Omarska ?

12 R. : 72 jours.

13 Q. : Aviez-vous rencontré des gardes ou d’autres membres du personnel du

14 camp avant d’arriver au camp d’Omarska ?

15 R. : Oui.

16 Q. : Quels membres du personnel du camp connaissiez-vous ?

17 R. : Je connaissais Zeljko Meakic, le Commandant du camp.

18 Q. : Comment l’aviez-vous rencontré ?

19 R. : Il était policier d’active.

20 Q. : Qui d’autre connaissiez-vous ?

21 R. : Je connaissais Drazenko, je connaissais Mima et de nombreux autres.

22 Q. : Ceux que vous connaissiez, à quel groupe ethnique appartenaient-ils ?

23 R. : Serbe.

24 Q. : Comment aviez-vous rencontré Mima ?

25 R. : Je connaissais Mima parce que nous étions des amis proches. Nous nous

Page 4579

1 rendions visite. Il venait chez moi et j’allais chez lui. Nous nous

2 connaissions personnellement à Kozarac parce qu’il venait souvent à

3 Kozarac.

4 Q. : Pendant que vous étiez à Omarska dans quel bâtiment étiez-vous détenu

5 ?

6 R. : J’étais détenu dans les grands garages.

7 Q. : Si vous pouviez prendre le pointeur qui se trouve sur la table près

8 de la console et indiquer la location de ce bâtiment pour la Cour ?

9 R. : (Le témoin indique l’endroit sur la maquette).

10 Q. : Donc vous parlez du grand bâtiment rouge ?

11 R. : Oui.

12 Q. : Merci. Pouvez-vous reprendre votre place, s’il vous plaît ? Étiez-

13 vous détenu au rez-de-chaussée ou au premier étage du garage ?

14 R. : Rez-de-chaussée.

15 Q. : Nous avons demandé de faire des copies de la pièce à conviction 130A

16 de l’Accusation qui montre le plan du rez-de-chaussée du garage.

17 J’aimerais que l’une de ces copies du rez-de-chaussée soit

18 enregistrée à la suite comme pièce à conviction de l’Accusation,

19 sans doute le numéro 271. Pourrait-on le présenter à M.Grozdanic,

20 s’il vous plaît ? Pourrait-on rapprocher le rétroprojecteur de lui ?

21 M. Grozdanic, si vous pouviez regarder ce plan du sol du rez-de-

22 chaussée du garage et pourriez-vous indiquer la pièce où vous étiez

23 détenu ?

24 R. : (Le témoin indique l’endroit sur la maquette).

25 Q. : Quel est le numéro de la pièce que vous désignez ? Il y a une lettre

Page 4580

1 et un chiffre, lesquels ?

2 R. : A17.

3 Q. : Merci. Cette pièce pourrait-elle m’être rendue pour l’instant ? Si la

4 pièce 248 de l’Accusation, c’est-à-dire le document 19-31 pouvait

5 être présenté sur l’écran, s’il vous plaît ? M. Grozdanic, pourriez-

6 vous regarder votre écran et voir si vous avez une photo sur l’écran

7 devant vous, la reconnaissez-vous ?

8 R. : Oui, je la reconnais.

9 Q. : Que représente-t-elle ?

10 R. : Elle représente la porte de mon dortoir.

11 Q. : Pour entrer dans cette pièce, utilisiez-vous la petite porte sombre

12 que l’on voit sur la photo ?

13 R. : Oui.

14 Q. : M. Grozdanic, combien de temps êtes-vous resté dans cette pièce

15 numérotée A17 sur le plan ?

16 R. : Presque tout le temps.

17 Q. : Pendant presque toute la durée de votre séjour à Omarska ?

18 R. : Pardon, je n’ai pas compris la question.

19 Q. : Combien de temps avez-vous été détenu dans la pièce numérotée A17 sur

20 le plan ?

21 R. : J’y suis resté environ 65 jours.

22 Q. : Sortiez vous souvent de cette pièce ?

23 R. : A peu près chaque jour.

24 Q. : Pendant que vous étiez à Omarska, avez-vous dû effectuer des tâches

25 dans le camp ?

Page 4581

1 R. : Oui.

2 Q. : Lesquelles ?

3 R. : Nous devions nettoyer à l’extérieur et abattre les vaches ramenées

4 de Kozarac pour l’armée serbe.

5 Q. : Que deviez-vous faire d’autre ?

6 R. : Nous devions nettoyer la maison rouge.

7 Q. : Outre la maison rouge vous fallait-il nettoyer d’autres bâtiments ?

8 R. : Nous devions nettoyer l’abattoir où nous travaillions.

9 Q. : Tous les combien deviez vous nettoyer cette pièce que vous appelez

10 l’abattoir ?

11 R. : Tous les jours, tous les matins nous y allions.

12 Q. : Que trouviez-vous quand vous alliez la nettoyer ?

13 R. : On trouvait des vêtements, du sang, des chaussures et des cartouches

14 de pistolet vides.

15 Q. : Tous les combien nettoyiez-vous la maison rouge ?

16 R. : Environ trois ou quatre fois.

17 Q. : Qu’y avez-vous trouvé les trois ou quatre fois où vous avez nettoyé

18 la maison rouge ?

19 R. : Nous avons surtout trouvé des corps, battus, des cadavres, à

20 l’intérieur, beaucoup d’instruments avec lesquels ils torturaient

21 les gens.

22 Q. : Avez-vous dû charger certains de ces corps sur quelque chose ?

23 R. : Oui.

24 Q. : Combien de fois avez-vous dû faire ça ?

25 R. : Je me souviens d’une occasion où j’ai dû le faire de nuit.

Page 4582

1 Q. : Sur quel type de véhicule, sur quoi avez-vous chargé les corps ?

2 R. : Un petit camion TAM jaune qui était utilisé auparavant à la mine

3 d’Omarska.

4 Q. : Ces corps que vous avez vus dans la maison rouge, avez-vous remarqué

5 s’ils portaient des traces de coups ou des blessures ?

6 R. : La plupart portaient des vêtements, mais on pouvait voir qu’ils

7 avaient le crâne fracassé, les bras cassés.

8 Q. : Connaissiez-vous ou avez-vous reconnu l’un de ces corps, l’une des

9 personnes dont vous chargiez les corps ?

10 R. : Oui.

11 Q. : Qui ?

12 R. : Pardon, pourrait-on, pourriez vous parler un peu plus fort ?

13 Q. : Oui, si l’interprète pouvait parler un peu plus fort ou peut-être

14 pouvons augmenter encore le volume. Monsieur, ma question était

15 avez-vous reconnu des gens dont vous avez trouvé les corps dans la

16 maison rouge ?

17 R. : Oui.

18 Q. : Qui avez-vous reconnu ?

19 R. : Une fois j’ai reconnu Vasfo Kejmanovic.

20 Q. : A votre connaissance, de quel groupe ethnique était-il ?

21 R. : Musulman.

22 Q. : Monsieur, j’aimerais une fois encore que vous vous leviez et que vous

23 veniez devant la maquette. Je vais vous demander de désigner la

24 structure que vous appelez la "maison rouge" puis celle que vous

25 appelez "l’abattoir". Pouvez-vous d’abord indiquer la maison rouge ?

Page 4583

1 R. : (Le témoin désigne l’endroit sur la maquette).

2 Q. : C’est un petit bâtiment rouge du même côté que la maison blanche et

3 face à l’extrémité du grand garage ?

4 R. : Oui.

5 Q. : Pourriez-vous maintenant indiquer l’abattoir ?

6 R. : (Le témoin désigne l’endroit sur la maquette).

7 Q. : Les juges peuvent-ils voir le bâtiment désigné ? S’agit-il de ce long

8 bâtiment rectangulaire derrière l’extrémité du garage ?

9 R. : Oui.

10 Q. : Merci. Voulez-vous reprendre votre siège ? M. Grozdanic, avez-vous vu

11 Dule Tadic quand vous étiez au camp d’Omarska ?

12 R. : Oui.

13 Q. : Combien de fois l’avez-vous vu là-bas ?

14 R. : Deux fois.

15 Q. : Vous souvenez-vous de la date de ces événements ?

16 R. : Je me souviens d’une des deux.

17 Q. : Quand était-ce ?

18 R. : Le 18 juin.

19 Q. : Je voudrais maintenant évoquer la fois où vous l’avez vu le 18 juin.

20 A cette date dans quel bâtiment vous trouviez-vous quand vous avez

21 vu Dusko Tadic ?

22 R. : Dans le garage.

23 Q. : Décrivez-nous ce qui s’est passé à cette occasion ?

24 R. : C’était le matin. Je sortais des toilettes et au moment où je

25 sortais il allait du dortoir vers les toilettes. J’ai été surpris.

Page 4584

1 J’avais peur. Je pense que je me suis arrêté dès que je l’ai vu. Il

2 est venu vers moi, m’a pris au visage et m’a demandé si j’avais fait

3 partie de la police de réserve à Kozarac. J’ai dit "Non". J’avais la

4 tonte militaire. Je n’avais pas du tout de cheveux et j’étais sale,

5 j’ai donc rassemblé mon courage pour dire que non. Alors, il m’a dit

6 que j’étais de Hambarine et que je m’appelais Jamin Celic et il est

7 parti.

8 Q. : Il vous a dit que vous étiez de Hambarine et que vous vous appeliez

9 Jasmin Celic ?

10 R. : Oui, je lui ai dit que j’étais de Hambarine et que je m’appelais

11 Jasmin Celic.

12 Q. : M. Grozdanic, j’aimerais vous montrer la pièce à conviction 271.

13 Pourrait-on tourner le rétroprojecteur vers le témoin, s’il vous

14 plaît ? M. Grozdanic, je voudrais que vous regardiez ceci encore une

15 fois. Puis je vais vous demander de poser des repères sur cette

16 pièce à conviction. Pouvez-vous poser cette pièce sur le

17 rétroprojecteur, s’il vous plaît ?

18 PRÉSIDENT DE LA CHAMBRE : Le rétroprojecteur est-il allumé ?

19 MADAME HOLLIS : Nous y voici. (Au témoin) : M. Grozdanic, vous nous avez

20 dit que vous sortiez des W-C, des toilettes. Pourriez-vous indiquer

21 la pièce dont vous sortiez, s’il vous plaît ?

22 R. : (Le témoin indique la pièce sur le plan).

23 Q. : Quel est le numéro donné à cette pièce ?

24 R. : A11.

25 Q. : Pourriez-vous, s’il vous plaît, prendre l’un des crayons rouges et

Page 4585

1 inscrire un "W" pour indiquer l’endroit où vous vous trouviez quand

2 vous avez vu Dule Tadic ?

3 R. : (Le témoin indique l’endroit sur le plan).

4 Q. : Pourriez-vous inscrire un "T" pour indiquer l’endroit où se trouvait

5 Dule ?

6 R. : (Le témoin indique l’endroit sur le plan).

7 Q. : A quelle distance de vous se trouvait Dule Tadic quand vous l’avez

8 remarqué ?

9 R. : Oh, c’était une petit distance, je ne sais pas, environ un mètre, un

10 mètre cinquante.

11 Q. : Durant cet incident combien de temps avez-vous vu Dule Tadic ?

12 R. : Ce jour-là, deux fois.

13 Q. : Mais à cette occasion-là seulement, combien de temps a duré cet

14 incident précis ?

15 R. : Peut-être une minute.

16 Q. : Que portait-il à ce moment-là ?

17 R. : Un uniforme de camouflage.

18 Q. : Vous souvenez-vous s’il portait des armes ?

19 R. : Je ne me souviens pas.

20 Q. : Avait-il de la barbe ou était-il rasé ?

21 R. : Il avait une barbe.

22 Q. : Vous souvenez-vous si cet incident s’est produit le matin ou l’après-

23 midi ?

24 R. : Le matin.

25 MADAME HOLLIS : J’aimerais maintenant verser la pièce 271 de l’Accusation.

Page 4586

1 PRÉSIDENT DE LA CHAMBRE : Des objections ?

2 M.KAY : Non, Madame la Présidente.

3 PRÉSIDENT DE LA CHAMBRE : La pièce 271 est admise.

4 MADAME HOLLIS (Au témoin) : M. Grozdanic, plus tard dans la journée, vous

5 souvenez-vous que votre ami, Mima, vous a donné de la nourriture et

6 que vous êtes allé avec lui à un endroit où vous avez mangé et parlé

7 avec lui ?

8 R. : Oui.

9 Q. : Était-ce le matin ou l’après-midi ?

10 R. : L’après-midi.

11 Q. : Mima portait-il un uniforme ce jour-là ?

12 R. : Oui.

13 Q. : Quel type d’uniforme portait-il ?

14 R. : C’était un uniforme de couleur olive, terne.

15 Q. : Où êtes-vous allé avec Mima pour manger et parler ?

16 R. : Non loin des toilettes, il y avait un camion-benne.

17 Q. : Les mêmes toilettes que vous mentionniez antérieurement ?

18 R. : Oui.

19 Q. : Que s’est-il passé alors que vous étiez assis et parliez avec votre

20 ami et mangiez ?

21 R. : Pendant que nous étions assis là, un policier militaire est venu et a

22 amené un jeune homme de Prijedor et en suivant leur conversation

23 j’ai pensé qu’il s’agissait d’un mécanicien.

24 Q. : Que s’est-il passé alors ?

25 R. : Alors ce policier militaire a demandé à Mima de lui prêter sa

Page 4587

1 matraque.

2 Q. : Que s’est-il passé ?

3 R. : Alors Mima a demandé si je n’étais pas là ou je ne devrais pas être

4 et s'il ne faudrait pas m’emmener. Le policier militaire a répondu

5 que non, que je pouvais rester ici. Alors Mima m’a dit de rester

6 encore un moment et qu’il verrait s’il pouvait me ramener dans la

7 pièce où nous dormions. Puis il est revenu et il a dit "Allons

8 doucement", et lui et moi nous sommes partis et comme nous nous

9 dirigions vers les toilettes, j’ai vu un homme sur la droite, à

10 droite de la pièce ou j’étais, il y avait une table et je l’ai vu

11 battre les prisonniers. C’était Dule Tadic. Puis je suis entré dans

12 les toilettes. Il m’a laissé sur le côté droit dans les toilettes où

13 il est allé.

14 Q. : Revenons un instant à ce policier militaire et son détenu. Avez-vous

15 reconnu ou connaissiez-vous ce policier militaire ?

16 R. : Non.

17 Q. : Connaissiez-vous son détenu ?

18 R. : Non, je ne le connaissais pas non plus.

19 Q. : Donc votre ami est parti un moment et quand il est revenu il vous a

20 emmené aux toilettes. Ce sont les mêmes que celles dont vous avez

21 parlé précédemment ?

22 R. : Oui.

23 Q. : Puis il vous a fait aller dans un certain endroit de ces toilettes,

24 est-ce exact ?

25 R. : Oui.

Page 4588

1 Q. : Où vous a-t-il dit de vous mettre ?

2 R. : Il m’a dit sur la droite, de rester là, de ne pas bouger, quelle que

3 soit la personne qui m’appelle, de rester là jusqu’à ce qu’il

4 revienne.

5 Q. : Je voudrais vous montrer deux photographies. Je demande que ces

6 photographies soient enregistrées à la cote 272A et 272B. Nous avons

7 fourni des copies en noir et blanc à la Défense, mais pourrait-on

8 leur montrer une copie en couleur, s’il vous plaît ?

9 JUGE VOHRAH : Madame Hollis, pourriez-vous nous dire si la pièce A12 sont

10 également des toilettes, près de la pièce A11 qu’il a identifiée ?

11 MADAME HOLLIS : Oui, Monsieur le Juge. Madame la Présidente, puis-je

12 fournir une nouvelle copie du plan du rez-de-chaussée ou récupérer

13 la pièce à conviction de l’Accusation 271, s’il vous plaît ? (Au

14 témoin) : M. Grozdanic, avant que vous regardiez ces photographies,

15 je veux vous montrer à nouveau la pièce à conviction 271 de

16 l’Accusation qui est un plan du rez-de-chaussée. J’aimerais que vous

17 le regardiez avant qu’on ne le mette sur le rétroprojecteur. Vous

18 nous avez dit que A11 étaient des toilettes. Savez-vous ce qu’était

19 la pièce A12 ? Voulez-vous regarder la situation de A12 sur le plan,

20 s’il vous plaît ?

21 R. : Je pense qu’A12 était une sorte d’atelier. Je n’y suis jamais entré.

22 JUGE VOHRAH : Je vois, merci.

23 MADAME HOLLIS : Merci, M. Grozdanic. Si 272A pouvait être placé sur le

24 rétroprojecteur ? Pourrions-nous le déplacer pour obtenir l’ensemble

25 de la photo ? Reconnaissez-vous le sujet de la photo, M. Grozdanic ?

Page 4589

1 R. : Oui.

2 Q. : Que montre-t-elle ?

3 R. : C’est la vue quand on entre dans les toilettes et ici c’est

4 l’emplacement des lavabos.

5 Q. : Peut-on maintenant placer 272B sur le rétroprojecteur aux fins

6 d’identification ? Reconnaissez-vous cela ?

7 R. : Oui.

8 Q. : Qu’est-ce que c’est ?

9 R. : L’endroit pour aller à la selle.

10 Q. : Est-ce l’endroit où votre ami vous a conduit quand il vous a emmené

11 dans les toilettes ?

12 R. : Oui.

13 Q. : Pourriez-vous indiquer la petite portion des toilettes où vous vous

14 teniez ?

15 R. : Oui.

16 Q. : Désignez-la s’il vous plaît.

17 R. : (Le témoin la désigne sur le plan).

18 Q. : Donc, si nous regardons la photographie, vous êtes allé dans la

19 dernière pièce à l’extrême droite du cliché ?

20 R. : Oui.

21 Q. : Merci. Je souhaiterais verser au dossier les pièces à conviction 272A

22 et B de l’Accusation.

23 PRÉSIDENT DE LA CHAMBRE : Des objections ?

24 M. KAY : Pas d’objections, Madame la Présidente.

25 PRÉSIDENT DE LA CHAMBRE : Les pièces à conviction 272A et B sont admises.

Page 4590

1 MADAME HOLLIS : Merci, Madame la Présidente. (Au témoin) : M. Grozdanic,

2 que s’est-il passé après que vous soyez entré dans ces W-C ?

3 R. : Quand j’y suis rentré, cet ami m’a dit de rester là et de ne pas

4 bouger avant qu’il ne revienne. Après un court moment, j’ai entendu

5 des coups dans la zone des lavabos et les gémissements de douleur

6 des gens qui recevaient les coups.

7 Q. : Que s’est-il passé ensuite ?

8 R. : Ensuite, il y a eu une sorte d’accalmie et il m’a semblé que ça

9 durait une éternité. Cet ami, Mima est venu et m’a dit que nous

10 pouvions aller lentement vers la pièce où j’étais avant qu’il ne

11 m’emmène.

12 Q. : Qu’avez-vous fait alors ?

13 R. : Je suis parti avec lui et quand nous sommes passés devant les

14 lavabos, Mima est passé sur la gauche et moi sur la droite. Du côté

15 droit, il y avait un corps sous le lavabo. Il ne donnait aucun signe

16 de vie. Sur la gauche, il y avait un autre corps dans le lavabo, un

17 cadavre, aucun signe de vie. Il y avait du sang tout autour de lui.

18 Q. : Avez-vous effectivement vérifié si ces personnes étaient vivantes ou

19 non ?

20 R. : Non, je n’ai pas vérifié, je ne faisais que passer pour rejoindre la

21 pièce.

22 Q. : Avez-vous reconnu l’un de ces hommes ?

23 R. : Il n’était pas possible de les reconnaître parce qu’ils étaient sur

24 le carrelage, le visage vers le sol.

25 MADAME HOLLIS : Je voudrais maintenant que cette pièce à conviction soit

Page 4591

1 enregistrée à la cote 273A et B aux fins d’identification. Il s’agit

2 d’une photocopie couleur et d’une en noir et blanc. Pourrait-on les

3 montrer à la Défense, puis les donner au témoin ?

4 (Au témoin) : M. Grozdanic, savez-vous ce que représente ce cliché ?

5 R. : Oui.

6 Q. : Est-ce une photo de la zone des toilettes lorqu’on regarde des

7 toilettes vers la porte ?

8 R. : Oui.

9 Q. : Pourriez-vous s’il vous plaît placer la copie en noir et blanc sur le

10 rétroprojecteur ? Pourriez-vous utiliser encore une fois le crayon

11 rouge pour inscrire le chiffre 1 à l’endroit où se trouvait le corps

12 qui était dans le lavabo ?

13 R. : (Le témoin l’indique sur la photo).

14 Q. : Pourriez-vous mettre un "2" à l’endroit où se trouvait l’autre corps

15 ?

16 R. : (Le témoin l’indique sur la photo).

17 MADAME HOLLIS : Je voudrais présenter les pièces à conviction 273A et B

18 pour identification.

19 PRÉSIDENT DE LA CHAMBRE : Des objections ?

20 M. KAY : Non, Madame la Présidente.

21 PRÉSIDENT DE LA CHAMBRE : 273A et B sont admis.

22 MADAME HOLLIS (Au témoin) : M. Grozdanic, avez-vous alors quitté la zone

23 des toilettes avec votre ami ?

24 R. : Je suis passé devant les deux corps et j’allais passer la porte quand

25 l’homme qui battait les prisonniers, les détenus, près de la table

Page 4592

1 est sorti par la porte qui se trouvait là, une barre de métal

2 ensanglantée à la main.

3 Q. : Avez-vous reconnu cet homme ?

4 R. : Oui, c’était Tadic.

5 Q. : Dans quel état d’esprit étiez-vous quand vous avez vu Dule Tadic en

6 quittant les toilettes ?

7 R. : A ce moment-là, j’avais peur.

8 Q. : Qu’avez-vous fait ensuite ?

9 R. : Je suis allé sur la droite vers la pièce et je me suis mis à courir.

10 Mon ami, Mima, m’a attrapé par le bras et m’a dit "Doucement, ou il

11 va nous tuer tous les deux". Alors nous avons marché lentement. J’ai

12 regardé vers ma pièce, il y avait un policier militaire qui appelait

13 Jasmin Hrnic, "Jasko", pour qu’il sorte.

14 Q. : En vous dirigeant vers votre pièce sur quoi concentriez-vous votre

15 attention ?

16 R. : A ce moment je rêvais d’être un oiseau, de rejoindre la pièce le plus

17 vite possible et d’être parmi les gens qui s’y trouvaient avec moi.

18 Q. : En vous dirigeant vers cette pièce, est-ce que vous avez regardé

19 autour de vous ?

20 R. : Non, je regardais seulement le policier à la porte d’entrée et je me

21 demandais s’il me dirait quelque chose, si je parviendrais à entrer

22 dans la pièce.

23 Q. : Qu’avez-vous fait en arrivant près de votre pièce ?

24 R. : Quand nous sommes arrivé devant la pièce, Jasmin est sorti, son

25 surnom était "Jasko". Le policier militaire lui a demandé, "Pourquoi

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1 n’avez-vous pas répondu tout de suite ?" et il a dit "Je ne savais

2 pas que vous m’appeliez", et au moment où je suis passé il l’a giflé

3 et je suis entré et j’ai pris la place de Jasko.

4 Q. : Quand vous êtes passé devant qui, devant qui passiez-vous quand on a

5 giflé Jasko ?

6 R. : Je passais devant le policier militaire et Jasmin Hrnic.

7 Q. : Au moment où vous avez vu le policier militaire appeler Jasmin et où

8 vous avez vu celui-ci sortir, regardiez-vous autour de vous pour

9 voir qui d’autre se trouvait là, s’il y avait quelqu’un, avec le

10 policier militaire ?

11 R. : Non, j’ai déjà dit que je ne pensais qu’à entrer dans le dortoir,

12 dans la pièce, être avec mes amis.

13 Q. : M. Grozdanic, je vais vous fournir une autre copie du plan du rez-de-

14 chaussée. Je souhaiterais que cette pièce à conviction de

15 l’Accusation soit enregistrée à la cote 274 aux fins

16 d’identification. Pourrait-on la placer sur le rétroprojecteur, s’il

17 vous plaît ? M. Grozdanic, vous avez mentionné tout à l’heure que

18 vous et votre ami étiez allés derrière un camion-benne ou un camion

19 qui se trouvait près de la pièce A11 et qu’après un moment vous êtes

20 allés dans la pièce A11 et qu’en vous y rendant vous avez vu un

21 homme que vous avez identifié comme Dule Tadic en train de battre

22 des prisonniers.

23 Ce que j’aimerais faire dans un premier temps, s’il vous plaît,

24 pourriez-vous prendre ce crayon rouge à nouveau et inscrire "W1" à

25 l’endroit où vous vous trouviez avec votre ami derrière le camion-

Page 4594

1 benne.

2 R. : (Le témoin l’indique sur le plan).

3 Q. : Maintenant, pourriez-vous tracer une ligne indiquant votre trajet de

4 cet endroit vers les toilettes, A11 ?

5 R. : (Le témoin trace une ligne sur le plan).

6 Q. : Pourriez-vous inscrire "T1" à l’endroit d’où vous avez vu Tadic en

7 vous dirigeant vers les toilettes ?

8 R. : (Le témoin l’inscrit sur le plan).

9 Q. : Pourriez-vous inscrire "T1" s’il vous plaît ? Merci. Maintenant, je

10 demande à verser la pièce 274 de l’Accusation aux fins

11 d’identification.

12 PRÉSIDENT DE LA CHAMBRE : Des objections ?

13 M. WLADIMIROFF : Non, Madame la Présidente.

14 PRÉSIDENT DE LA CHAMBRE : 274 est admis.

15 MADAME HOLLIS : M. Grozdanic, je vais encore vous fournir une copie de ce

16 plan dont je souhaiterais qu’il soit enregistré à la cote 275 aux

17 fins d’identification. M. Grozdanic, avant que je ne vous questionne

18 sur ce plan, je veux vous poser quelques questions sur les

19 circonstances entourant le moment où vous avez vu Dule Tadic alors

20 que vous vous dirigiez vers les toilettes. Quelle distance vous

21 séparait de lui, à votre avis, quand vous vous dirigiez vers les

22 toilettes et que vous l’avez vu à l’endroit que vous avez désigné

23 sur la pièce précédente, à quelle distance ?

24 R. : Entre 20 et 30 mètres.

25 Q. : Quand vous l’avez vu à cette occasion, l’avez vous vu de face, de

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1 profil, de dos, que pouviez-vous voir de lui ?

2 R. : Le profil, le profil droit.

3 Q. : Avez-vous aussi vu son corps ou seulement son visage ?

4 R. : Le visage et tout le côté droit.

5 Q. : Pendant combien de temps l’avez-vous vu en vous rendant du camion aux

6 toilettes ?

7 R. : Entre 30 secondes et une minute.

8 Q. : Que portait-il à ce moment-là ?

9 R. : Un uniforme de camouflage.

10 Q. : Qu’avez-vous vu dans sa main ou ses mains, si vous avez vu quelque

11 chose ?

12 R. : Il avait une barre de fer.

13 Q. : Je crois que vous avez dit l’avoir vu battre des prisonniers. L’avez-

14 vous vraiment vu frapper des gens ?

15 R. : Oui.

16 Q. : Pouviez-vous reconnaître la personne qu’il frappait ?

17 R. : Non, je n’ai pas pu reconnaître parce que la personne qu’il battait

18 était à terre.

19 Q. : Ce Dule Tadic que vous avez vu avait-il des poils sur le visage ?

20 R. : Non, il avait une barbe.

21 Q. : Prenez la pièce que l’on vient de vous donner, peut-on la mettre sur

22 le rétroprojecteur, s’il vous plaît ? M. Grozdanic, en sortant des

23 toilettes avec votre ami, Mima, vous avez dit avoir vu Dule Tadic.

24 Pourriez-vous s’il vous plaît indiquer l’endroit d’où vous l’avez vu

25 ? Veuillez inscrire "W2", s’il vous plaît.

Page 4596

1 R. : (Le témoin l’inscrit sur le plan).

2 Q. : Pourriez-vous inscrire "T2" à l’endroit où se trouvait Tadic quand

3 vous l’avez vu ?

4 R. : (Le témoin l’inscrit sur le plan).

5 Q. : Dans quelle direction allait-il ?

6 R. : En direction de la grande porte.

7 Q. : Pourriez-vous tracer une flèche indiquant la direction dans laquelle

8 il marchait ?

9 R. : (Le témoin la trace sur le plan).

10 Q. : A quelle distance de vous se trouvait Dule Tadic à ce moment-là ?

11 R. : Environ 20 mètres.

12 Q. : Le voyiez-vous de face, de profil ou de dos ?

13 R. : Seulement de dos.

14 Q. : Comment avez-vous pu l’identifier si vous ne le voyiez que de dos ?

15 R. : Parce que c’était la troisième fois que je le voyais ce jour-là.

16 Q. : Quelque chose d’autre vous a-t-il aidé à l’identifier ?

17 R. : Oui.

18 Q. : Quoi ?

19 R. : Sa manière de marcher.

20 Q. : Pourriez-vous tracer une flèche pour indiquer la direction que vous

21 avez prise avec votre ami après avoir vu Dule Tadic ?

22 R. : (Le témoin la trace sur le plan).

23 MADAME HOLLIS : Madame la Présidente, je voudrais maintenant que l’on

24 enregistre la pièce à conviction de l’accusation à la cote 275 aux

25 fins d’identification.

Page 4597

1 PRÉSIDENT DE LA CHAMBRE : Des objections ?

2 M. WLADIMIROFF : Non, Madame la Présidente.

3 PRÉSIDENT DE LA CHAMBRE : La pièce 275 est admise.

4 MADAME HOLLIS : Je voudrais maintenant que la copie en noir et blanc de la

5 photo de la porte donnant sur la pièce A17 soit enregistrée comme

6 pièce à conviction de l’Accusation à la cote 276 aux fins

7 d’identification. Il s’agit d’une copie en noir et blanc de la pièce

8 248 déjà admise.

9 (Au témoin) : M. Grozdanic, pourriez-vous poser cette copie en noir

10 et blanc de la photographie de la porte donnant sur la pièce où vous

11 séjourniez sur le rétroprojecteur, s’il vous plaît ? Pourriez-vous

12 encore une fois prendre ce crayon et indiquer par la lettre "P"

13 l’endroit où se trouvait le policier quand vous êtes revenu dans

14 votre pièce ?

15 R. : (Le témoin l’indique sur le cliché).

16 Q. : Pourriez-vous indiquer par la lettre "J" où se trouvait Jasko quand

17 il a quitté la pièce ?

18 R. : (Le témoin s’exécute).

19 Q. : Pourriez-vous inscrire "W3" à l’endroit où vous vous trouviez avec

20 votre ami au moment de cet incident ?

21 R. : (Le témoin l’indique sur la photo).

22 Q. : Quand vous êtes passé devant pour entrer dans la pièce, les avez-vous

23 contournés par l’extérieur ou par l’intérieur, derrière eux ?

24 R. : Derrière Jasmin et face au policier militaire.

25 Q. : Pourriez-vous tracer une flèche pour indiquer le chemin que vous avez

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1 suivi jusqu’à la porte ?

2 R. : (Le témoin l’indique sur la photo).

3 MADAME HOLLIS : Madame la Présidente, j’aimerais que la pièce de

4 l’Accusation 276 soit versée au dossier.

5 PRÉSIDENT DE LA CHAMBRE : Des objections ?

6 M.WLADIMIROFF : Non, Madame la Présidente.

7 PRÉSIDENT DE LA CHAMBRE : La pièce 276 est admise.

8 MADAME HOLLIS (Au témoin) : M.Grozdanic, une fois de retour dans la pièce

9 où êtes-vous allé ?

10 R. : Je suis allé à l’endroit où Jasko Hrnic était assis.

11 Q. : A cet endroit avez-vous vu des graffitis sur le mur ?

12 R. : Oui, j’ai vu écrit Jasko sur le mur "18.6".

13 Q. : Avant de revenir dans la pièce aviez-vous déjà vu cette inscription

14 avec la date 18.6 sur le mur ?

15 R. : Non.

16 Q. : Avez-vous revu Jasko Hrnic après cet incident ?

17 R. : Non.

18 Q. : Vous avez dit avoir vu Dule Tadic deux fois à Omarska. J’aimerais

19 maintenant que nous parlions de l’autre rencontre. Vous rappelez-

20 vous de la date ?

21 R. : Je ne me souviens pas de la date.

22 Q. : Que s’est-il passé lorsque vous avez vu Dusko Tadic à Omarska cette

23 fois-ci ?

24 R. : Nous avions reçu l’ordre de nettoyer la grande pièce, le garage et

25 j’ai fait ça avec un autre détenu. Nous devions jeter les déchets

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1 dans des conteneurs. Au moment où nous sortions de notre grand

2 bâtiment à la porte près de la maison blanche, tous les détenus

3 étaient devant et on versait de l’eau et ils sautaient sur eux et

4 les forçaient à grogner comme des cochons. Alors au moment où je

5 sortais, j’ai reconnu Dusko Knezevic et Jovic. Il y en avait

6 d’autres mais je ne les ai pas reconnus et j’ai reconnu Dusko

7 Knezevic et Jovic.

8 Nous nous sommes dirigés vers le conteneur. Non loin de nous, un

9 garçon de Prijedor, un Musulman, avait une brouette dans laquelle il

10 transportait un homme qui avait été battu devant la maison blanche

11 et qui ne pouvait plus faire ce qu’ils leur demandaient de faire, ce

12 qu’ils lui demandaient de faire et derrière lui Dule Tadic portait

13 un extincteur dans la main gauche et le tuyau de l’extincteur dans

14 la main droite.

15 Alors, comme nous atteignions le conteneur pour jeter les détritus,

16 Dule Tadic a poussé le tuyau dans la bouche de l’homme qui était

17 dans la brouette.

18 Q. : Vous voulez dire le tuyau de l’extincteur ?

19 R. : Oui.

20 Q. : Qu’avez-vous vu après ?

21 R. : Après nous sommes retournés vers le dortoir et Dusko Tadic... Dusko

22 Knezevic et Jovic continuaient à harceler, à battre et à maltraiter

23 les détenus qui devaient grogner comme des cochons et ramasser de

24 l’herbe avec leurs dents.

25 Q. : Donc en arrivant du garage, en sortant du garage, le premier groupe

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1 de personnes que vous avez vu maltraitaient des détenus de la maison

2 blanche ?

3 R. : Oui.

4 Q. : Était-ce le groupe dans lequel se trouvaient Dusko Knezevic et Jovic

5 ?

6 R. : Oui.

7 Q. : Que faisaient-ils aux détenus quand vous êtes sorti ?

8 R. : Ils sautaient sur eux, ils les battaient et ils les maltraitaient et

9 tout ce qu’on peut faire d’autre. Nous n’osions pas regarder parce

10 que nous avions peur, parce que nous étions saisis d’une peur

11 panique.

12 Q. :Vous avez dit que quand vous êtes revenus ils les faisaient se

13 conduire comme des cochons. Que voulez-vous dire par là ? Que

14 faisaient-ils ?

15 R. : Ils avaient versé de l’eau sur l’herbe et ils les forçaient à

16 arracher l’herbe avec leurs dents, à la mâcher et à grogner comme

17 les cochons. Bien sûr, dans leurs vergers de pruniers c’est ce que

18 faisaient les cochons et ils ont forcé notre peuple, des Musulmans à

19 faire cela devant la maison blanche.

20 Q. : Dans quelle zone se trouvaient-ils quand vous les avez vus, Dusko

21 Knezevic, Jovic et les autres et les détenus ?

22 R. : Ils se trouvaient en direction de notre bâtiment, de notre garage,

23 sur le côté droit au coin de la maison blanche en face de notre

24 bâtiment.

25 Q. : Vous avez vu cela en vous dirigeant vers les conteneurs, n’est-ce pas

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1 ?

2 R. : Oui, quand nous avons vu cela pour la première fois, nous allions

3 vers les conteneurs.

4 Q. : Dans quelle zone étaient-ils situés ?

5 R. : Le conteneur n’était pas loin de la cuisine, dans le coin.

6 Q. : C’est en vous dirigeant vers les conteneurs que vous avez vu Dusko

7 Tadic, est-ce exact ?

8 R. : Nous avons d’abord vu Dusko Knezevic et Jovic là-bas et non loin de

9 là en nous dirigeant vers le conteneur, nous avons vu ce Musulman et

10 cet homme conduit dans une brouette, un détenu qui avait été battu

11 et Dule Tadic qui les suivait.

12 Q. : Dans quelle zone se trouvait Tadic quand vous l’avez vu ?

13 R. : Il se trouvait dans la zone de la maison blanche, peut-être à 50

14 mètres de nous.

15 Q. : Puis vous êtes arrivés aux conteneurs ; où se trouvait Dule Tadic à

16 ce moment là ?

17 R. : A ce moment-là Dule Tadic était à côté des conteneurs et nous

18 pouvions voir une bonne partie de son corps.

19 Q. : Connaissez-vous le nom de l’homme qui poussait la brouette ?

20 R. : Oui, son nom était Amir et il venait de Prijedor.

21 Q. : Aviez-vous rencontré cet homme avant dans le camp ?

22 R. : Je le connaissais de vue.

23 Q. : De quel groupe ethnique était-il à votre connaissance ?

24 R. : Musulman.

25 Q. : Il y avait un homme dans la brouette que poussait Amir ?

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1 R. : Désolé, je n’ai pas compris votre question.

2 Q. : Il y avait un homme dans la brouette que poussait Amir ?

3 R. : Oui. Je pense qu’il s’agissait d’un Musulman. Je ne le connaissais

4 pas. Je ne connaissais pas l’homme dans la brouette.

5 Q. : Pourriez-vous nous dire si l’homme dans la brouette était mort ou

6 vivant ?

7 R. : Non , je ne pouvais pas le voir.

8 Q. :Quand vous êtes sortis du garage et que vous avez vu Dusko Knezevic et

9 Jovic, quelle distance vous séparait d’eux ?

10 R. : Je dirais 30 à 40 mètres environ.

11 Q. : Je crois que vous avez dit que quand vous avez aperçu Dule Tadic il

12 se trouvait à environ 50 mètres de vous ?

13 R. : Oui.

14 Q. : Quand vous étiez près des conteneurs et que vous avez vu Dusko Tadic

15 mettre le bout du tuyau dans la bouche de l’homme , à quelle

16 distance vous trouviez-vous ?

17 R. : A cette distance là ou à peu près, environ 50 mètres.

18 Q. :Avez-vous vu Dusko Tadic de profil seulement, de face ou de dos ?

19 R. : Nous l’avons vu de face.

20 Q. :Quand vous avez vu Dusko Tadic pour la première fois, l’avez-vous vu

21 de face, de profil ou de dos ?

22 R. : La première fois nous avons vu son profil droit, sur le côté.

23 Q. : Quand vous l’avez-vu combien de temps l’avez-vous regardé ?

24 R. : Je pouvais, après le conteneur, mais de manière intermittente.

25 Q. : Alors quand vous étiez près du conteneur et que vous avez vu Dusko

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1 Tadic, combien de temps l’avez-vous regardé, pourriez-vous en donner

2 une estimation ?

3 R. : Environ une minute.

4 Q. : A ce moment là est-ce que vous le voyiez entièrement, de face, de

5 profil ou seulement de dos ?

6 R. : Je pouvais voir son corps et son visage.

7 Q. : Que portait Dusko Tadic ce jour là ?

8 R. : Je pense qu’il portait aussi un uniforme de camouflage.

9 Q. : Avez-vous vu s’il portait des armes ou s’il en avait sur lui ?

10 R. : Je ne saurais dire, je n’ai pas remarqué d’armes.

11 Q. : Vous souvenez-vous s’il était rasé où s’il avait une barbe à ce

12 moment-là ?

13 R. : Il avait une barbe.

14 Q. : Vous dites avoir identifié Dusko Knezevic et Jovic. Connaissiez-vous

15 Dusko Knezevic avant d’aller à Omarska ?

16 R. : Oui.

17 Q. : Depuis combien de temps le connaissiez-vous ?

18 R. : Depuis longtemps.

19 Q. : Comment l’aviez-vous connu ?

20 R. : Je le connaissais parce qu’il vivait dans une localité du nom

21 d’Orlovci et que je vivais à Gornji Garevci, le village voisin.

22 Q. : Avez-vous fait du sport avec lui ou joué des matches contre lui ?

23 R. : Oui, nous travaillions ensemble, nous allions aux tournois à Malo

24 Palanciste et Orlovci.

25 Q. : Saviez-vous quels métiers faisait M. Knezevic ?

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1 R. : Pour autant que je sache, il était agriculteur parce qu’il avait

2 l’habitude de venir chez mon père en tracteur pour tondre l’herbe et

3 pendant que j’étais à l’armée, il était à Kozarusa au club, il

4 travaillait comme serveur.

5 Q. : Pourriez-vous nous décrire M. Knezevic ?

6 R. : M. Knezevic était assez grand, fort avec un visage rond, des cheveux

7 châtains, des cheveux bruns.

8 Q. : Aviez-vous des difficultés à le distinguer de Dule Tadic ?

9 R. : Non.

10 MADAME HOLLIS : Madame la Présidente, je vais maintenant demander au

11 témoin de s’approcher de la maquette et d’utiliser des gommettes

12 jaunes pour indiquer l’endroit où il se trouvait et où ces personnes

13 se trouvaient aux différentes étapes de cet incident. J’aimerais

14 donc que nous utilisions la caméra.

15 M. Grozdanic, pourriez-vous vous éloigner un peu de votre micro ?

16 Merci. M. Grozdanic, je vais vous demander de vous approcher encore

17 une fois de la maquette et de prendre ces écouteurs. Puis je vais

18 vous demander d’indiquer différents endroits. M. Grozdanic,

19 premièrement je vais demander à Madame Sutherland de vous passer la

20 lettre "W" pour marquer l’endroit ou vous vous trouviez quand vous

21 avez vu Dusko Tadic lorsque vous êtes sorti du garage ?

22 R. : (le témoin indique l’endroit sur la maquette).

23 Q. : Pourriez-vous prendre la lettre "K" et la placer à l’endroit où se

24 trouvait Dusko Knezevic ?

25 R. : (le témoin l’indique sur la maquette).

Page 4605

1 Q. : Pourriez-vous prendre la lettre "W1" et la placer à l’endroit où vous

2 vous trouviez quand vous avez vu Dusko Tadic ?

3 R. : (le témoin l’indique sur la maquette).

4 Q. : Pourriez-vous prendre la lettre "T" et la placer à l’endroit où se

5 trouvait Dusko Tadic quand vous l’avez vu?

6 R. : (le témoin l’indique sur la maquette).

7 Q. : Pourriez-vous maintenant prendre la lettre "W2" et la placer à

8 l’endroit ou vous vous trouviez près des conteneurs quand vous avez

9 vu Dule Tadic mettre le bout du tuyau dans la bouche de l’homme ?

10 R. : (le témoin l’indique sur la maquette).

11 Q. : Pourriez-vous maintenant prendre la lettre "T1" et la placer à

12 l’endroit où Dule Tadic se trouvait quand vous l’avez vu mettre le

13 bout du tuyau dans la bouche de l’homme ?

14 R. : (le témoin l’indique sur la maquette).

15 Q. : Merci, M. Grozdanic. Vous pouvez vous rasseoir. Madame, Messieurs de

16 la Cour, nous allons encore une fois essayer de faire une

17 photographie montrant ces positions.

18 M. Grozdanic, avez-vous été interrogé pendant que vous étiez au camp

19 d’Omarska ?

20 R. : Oui.

21 Q. : Combien de fois avez-vous été interrogé ?

22 R. : Le jour de mon arrivée, immédiatemment, et une fois un policier de

23 Banja Luka est venu et m’a emmené pour un interrogatoire et une

24 dernière fois quand ils m’ont emmené à la maison blanche.

25 Q. : Vous a-t-on battu durant ces interrogatoires ?

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1 R. : La seconde fois j’ai été emmené par ces "tâchetés" de Banja Luka, les

2 "sarenci" comme nous les appelions et ils m’ont provoqué toute la

3 nuit, ils m’ont battu ils m’ont mis leurs couteaux dans la bouche,

4 un pistolet dans mon oreille et tout le reste.

5 Q. : Vous dites les "tâchetés", "sarenci", que voulez-vous dire par là ?

6 R. : Nous les appelions ainsi par qu’ils portaient des uniformes camouflés

7 verts et qu’ils se désignaient eux-mêmes ainsi. Quand ils venaient

8 aux camp, ils disaient ça "les Sarenci arrivent", les "tâchetés

9 arrivent", les "bigarés arrivent". Ce devait être une unité spéciale

10 de Banja Luka parce chaque fois qu’ils venaient au camp ils

11 arrivaient en véhicules blindés.

12 Q. : Cette troisième fois à la maison blanche, vous a-t-on également battu

13 lors de votre interrogatoire ?

14 R. : Oui.

15 Q. : Connaissiez-vous certaines des personnes qui vons ont battu à cette

16 occasion ?

17 R. : Oui.

18 Q. : Qui avez-vous reconnu ?

19 R. : Drazenko, qui m’avait emmené à la maison blanche.

20 Q. : Vous a-t-on battu gravement à cette occasion ?

21 R. : La première fois qu’ils m’ont pris ils m’ont battu. Juste en entrant

22 dans la maison blanche, il y avait une petite pièce dans laquelle un

23 câble était suspendu au plafond et ils me l’ont attaché autour du

24 cou et ils m’ont battu pendant deux ou trois minutes.

25 Q. : Vous a-t-on également battu après cela ?

Page 4607

1 R. : Oui, ensuite, il m’ont emmené à la maison blanche dans la dernière

2 pièce sur la droite et ils m’ont ordonné de me mettre debout contre

3 le mur, dans le coin à droite et de m’appuyer contre le mur des deux

4 mains ou plutôt avec trois doigts de chaque main. Je l’ai fait et

5 Drazenko s’est mis à me frapper le dos, la tête, les bras et si

6 jamais je mettais mes cinq doigts contre le mur, alors il me

7 frappait les mains.

8 Après un court instant, environ une ou deux minutes, un autre garde

9 qui était toujours assis près de la cuisine, dans le coin est

10 arrivé. Je ne connais pas son nom. Il devait peser entre 70 et 80

11 kilogrammes, un type jeune et il est entré dans le dortoir. Il est

12 venu derrière mon dos vers l’autre mur et en prenant appui sur le

13 mur de ses deux mains il a sauté avec ses pieds dans mon dos pendant

14 que Drazenko continuait à m’asséner des coups de bâton.

15 Pendant qu’il me battait, après sept ou huit coups contre mon dos je

16 n’ai pas pu en supporter plus, la douleur était atroce et je suis

17 tombé au sol. Drazenko et l’autre m’ont traîné jusqu’au milieu du

18 dortoir et Drazenko a tiré un couteau et tracé une croix sur mon

19 épaule gauche.

20 Puis un type est entré, un autre garde et m’a dit qu’il baisait ma

21 mère "balija", pourquoi disions-nous qu’il nous battait alors qu’il

22 ne le faisait pas, et il m’a donné un coup de pied à la tête. Ma

23 bouche et mon nez se sont mis à saigner. Sa tennis aussi était

24 ensanglantée. Il a dit "Pourquoi est-ce que je dois le frapper comme

25 ça si je peux le faire autrement ?" Alors il est sorti et il est

Page 4608

1 revenu une minute et demie après avec un bâton à la main et il m’a

2 frappé à la tête. Quand il m’a frappé à la tête le sang a giclé.

3 J’avais l’impression que toute ma tête gonflait, qu’elle allait

4 exploser.

5 Alors un autre garde est venu et il m’ont traîné sur le sol dans la

6 pièce. Il ont recommencé à me battre. Celui qui m’avait donné des

7 coups de pieds dans le dos me frappait à la tête avec un bâton et

8 Drazenko me frappait et éteignait ses cigarettes sur mon dos. Celui

9 qui avait un bâton me frappait les chevilles et les poignets, ils me

10 battaient. Ils parlaient tout le temps. Drazenko a dit il peut

11 vraiment en supporter beaucoup et que soit il me tuerait ou voyons

12 combien de temps il peut me supporter. Je pensais que c’était leur

13 but et puis, je pense, Dieu m’a donné du courage et j’ai réussi à

14 avoir de la salive dans ma bouche et j’ai fait semblant de

15 m’évanouir. Alors l’un d’eux a dit, "On a réussi à le rendre

16 inconscient".

17 Quand il a dit ça, ils ont abandonné et les endroits où j’avais été,

18 ce que j’avais traversé et comment je m’étais rendu tout cela a

19 traversé mon esprit. J’ai vu ma mère, mon père. Ils ont tous défilé

20 devant moi. Je me suis souvenu de ma femme, je savais qu’elle était

21 enceinte et qu’elle était restée et j’ai dit "oh, Dieu, qu’est-ce

22 que je vous ai fait ? Je ne vivrai pas assez longtemps pour voir mon

23 enfant."

24 Q. : M. Grozdanic, quelles ont été les séquelles des sévices qu’on vous a

25 infligés ce jour-là ?

Page 4609

1 R. : J’en souffre encore. J’ai mal à la tête, mon dos me fait souffrir,

2 mes articulations sont douloureuses mais le pire est la souffrance

3 du coeur. Je suis Bosniaque, Musulman et je vis pour porter une

4 croix que je n’ai pas souhaitée mais que je dois porter. Je peux

5 vous prouver que j’ai cette croix sur moi. Elle est sur mon épaule

6 droite, si la caméra peut la montrer, elle est là.

7 Q. : M. Grozdanic, vous a-t-on déplacé d’Omarska à Manjaca en même temps

8 que les autres prisonniers du camp ?

9 R. : Oui.

10 Q. :Vous a-t-on ensuite emmené de Manjaca à Trnopolje en raison de votre

11 mauvais état de santé ?

12 R. : Oui.

13 Q. : Avez-vous vu Dule Tadic quand vous étiez à Trnopolje ?

14 R. : Oui.

15 Q. : Combien de fois l’avez-vous vu à cet endroit.

16 R. : Une fois.

17 Q. : Vous souvenez-vous de la date ?

18 R. : Le jour où 1 600 personnes sont allées à Karlovac avec l’UNICEF et la

19 Croix rouge internationale.

20 Q. : Où étiez-vous ce jour-là quand vous avez vu Dule Tadic ?

21 R. : Je me trouvais devant l’école à Trnopolje quand je l’ai vu.

22 Q. : Où était Dule Tadic ?

23 R. : Dule Tadic était au coin de la clôture de l’école, non loin du

24 magasin.

25 Q. : Que faisait-il quand vous l’avez vu ce jour-là ?

Page 4610

1 R. : Il se tenait là et il regardait, comment se peut-il que tant de gens

2 sortent, que je n’en ai pas tué davantage ?

3 Q. : Que portait-il ce jour-là ?

4 R. : Un uniforme camouflé.

5 Q. : Avait-il des armes ?

6 R. : Il avait un "PAP", un fusil.

7 Q. : De quel type de fusil s’agissait-il ?

8 R. : Un fusil semi-automatique.

9 Q. : Vous souvenez-vous s’il était rasé ou s’il avait une barbe cette

10 fois-là ?

11 R. : Il avait une barbe.

12 MADAME HOLLIS : Je voudrais maintenant demander que cette photographie et

13 sa copie en noir et blanc soient enregistrées comme pièces à

14 conviction à la cote 277 A et B de l’Accusation aux fins

15 d’identification ; la photo couleur étant le A et celle en noir et

16 blanc le B. Pourrait-on montrer la photo couleur à la Défense s’il

17 vous plaît, et le technicien pourrait-t-il brancher le

18 rétroprojecteur ?

19 PRÉSIDENT DE LA CHAMBRE : Madame Hollis, avant que vous ne passiez au

20 sujet suivant, nous suspendons l’audience vingt minutes.

21 (16h00)

22 (L’audience est brièvement suspendue)

23 (16h20)

24 PRÉSIDENT DE LA CHAMBRE : Madame Hollis, pourriez-vous reprendre s’il vous

25 plaît ?

Page 4611

1 MADAME HOLLIS : Merci, Madame la Présidente. (Au témoin) : M. Grozdanic,

2 avant la suspension je vous demandais de regarder la photographie

3 couleur et la copie en noir et blanc qui se trouvent devant vous,

4 les pièces à conviction 277A et B. Savez-vous ce qu’elles

5 représentent ?

6 R. : Oui.

7 Q. : Qu’est-ce que c’est ?

8 R. : L’école de Trnopolje.

9 Q. : Pourrait-on placer la copie noir et blanc sur le rétroprojecteur ?

10 Reprenez le crayon rouge, s’il vous plaît, et inscrivez la lettre

11 "W" à l’endroit où vous vous trouviez ce jour-là quand vous avez vu

12 Dule Tadic au camp de Trnopolje.

13 R. : (Le témoin inscrit la lettre sur le cliché).

14 Q. : Pourriez-vous inscrire la lettre "T" à l’endroit où Dule Tadic se

15 trouvait le jour où vous l’avez vu ?

16 R. : (Le témoin inscrit la lettre sur le cliché).

17 Q. : Le jour où vous l’avez vu au camp de Trnopolje, les bûches qui sont

18 sur la photo ne s’y trouvaient pas, est-ce exact ?

19 R. : Non.

20 Q. : Elles n’y étaient pas ?

21 R. : Non, elles n’y étaient pas.

22 MADAME HOLLIS : Je souhaiterais maintenant que les pièces à conviction 277

23 A et B de l’Accusation soient versées au dossier.

24 PRÉSIDENT DE LA CHAMBRE : Des objections ?

25 M. WLADIMIROFF : Non, Madame la Présidente.

Page 4612

1 PRÉSIDENT DE LA CHAMBRE : Les pièces 277 A et B sont admises.

2 MADAME HOLLIS (Au témoin) : M. Grozdanic, voudriez-vous regarder autour de

3 vous dans la salle et nous dire si vous voyez le Dule Tadic que vous

4 connaissiez à Kozarac et que vous avez vu aux camps d’Omarska et de

5 Trnopolje.

6 R. : Oui.

7 Q. : Pourriez-vous désigner l’endroit où il est assis et nous dire où il

8 se trouve ?

9 R. : Entre les deux policiers, en chemise blanche.

10 Q. : Madame la Présidente, puis-je demander une identification en règle de

11 l’accusé ?

12 PRÉSIDENT DE LA CHAMBRE : Oui, le procès verbal mentionnera que le témoin

13 a identifié l’accusé.

14 MADAME HOLLIS (Au témoin) : M. Grozdanic, où êtes-vous allé après le camp

15 de Trnopolje ?

16 R. : A Karlovac.

17 Q. : Avant le début des attaques dans l’opstina de Prijedor en 1992 étiez-

18 vous membre d’une milice ou d’une organisation paramilitaire anti-

19 serbe ?

20 R. : Non.

21 Q. : Etiez-vous membre d’un groupe de résistance serbe armée ?

22 R. : Non.

23 Q. : Après le début des attaques êtes-vous devenu membre d’un tel groupe ?

24 R. : Non.

25 MADAME HOLLIS : Madame la Présidente, j’ai fini mon interrogatoire. Je

Page 4613

1 voudrais maintenant que les deux photographies qui ont été prises

2 des marques que M. Grozdanic a faites sur la maquette soient versées

3 au dossier. Je demande à ce qu’elles soient enregistrées à la cote

4 278A et B. A sera la partie montrant les inscriptions concernant le

5 hangar du garage dans la maison blanche et B reprend une partie de

6 la maison blanche et les indications d’emplacement pour le bâtiment

7 du restaurant. Elles ont été montrées à la Défense, Madame la

8 Présidente.

9 PRÉSIDENT DE LA CHAMBRE : Y a-t-il des objections aux pièces 278 A et B ?

10 M. WLADIMIROFF : Non, Madame la Présidente.

11 PRÉSIDENT DE LA CHAMBRE : Elles sont admises.

12 MADAME HOLLIS : Aucune autre question.

13 PRÉSIDENT DE LA CHAMBRE : Contre-interrogatoire ?

14 MADAME DE BERTODANO : Oui, Madame la Présidente.

15 Contre-interrogatoire par Madame de BERTODANO.

16 Q. : M. Grozdanic, les événements que vous avez évoqué aujourd’hui datent

17 d’y il a quatre ans, n’est-ce pas ?

18 R. : Oui.

19 Q. : Depuis cette époque, vous avez dû voir de nombreux reportages

20 concernant les événements du camp d’Omarska, est-ce exact ?

21 R. : Je ne m’intéresse pas aux médias. Ma tête est pleine de ce que j’ai

22 vu.

23 Q. : Êtes-vous en train de me dire que vous n’avez jamais vu de reportage

24 sur les événements du camp d’Omarska ?

25 R. : J’ai dit une fois que je ne veux pas voir quelque chose que j’ai déjà

Page 4614

1 vécu. Je serais plus heureux si je pouvais oublier et je ne pourrais

2 jamais oublier.

3 Q. : Mais, M. Grozdanic, il est exact que vous avez vu un film fait par

4 Monika Gras sur le camp d’Omarska, est-ce exact ?

5 R. : Non, ce n’est pas comme ça, parce que je travaille de 4h30 à 9h30 et

6 je n’ai pas le temps de regarder des films parce que je veux faire

7 du sport pendant le week-end.

8 Q. : M. Grozdanic, vous souvenez-vous d’avoir fait une déclaration à la

9 police (expurgé) en juin 1994 ?

10 R. : Oui, j’ai fait cette déclaration mais je ne me souviens ni de la date

11 ni de l’année.

12 Q. : Peut-être pourrait-on enregistrer cette pièce de la Défense à la cote

13 26 et la passer au témoin ? Puis-je vous demander d’ouvrir cette

14 déclaration à la page quatre, le troisième paragraphe entier qui

15 commence par "Jedan od", le voyez-vous ?

16 R. : Oui.

17 Q. : Peut-être pourriez vous lire cette phrase aux Juges ?

18 R. : Je ne crois pas avoir dit cela.

19 Q. : Peut-être M. Grozdanic, pourriez-vous d’abord lire la phrase afin que

20 les Juges sachent ce que vous ne croyez pas avoir dit ?

21 R. : "L’un des deux que j’ai reconnu plus tard dans le film de Mme Gras

22 sous le pseudonyme de G".

23 Q. : Cela suppose, n’est-ce pas, M. Grozdanic, que vous avez vu le film de

24 Mme Gras ?

25 R. : Non je n’ai pas vu le film de Mme Gras.

Page 4615

1 Q. : Très bien. Savez-vous qui cette cour désigne sous la lettre G ?

2 PRÉSIDENT DE LA CHAMBRE : Ne donnez pas de nom, Monsieur.

3 TÉMOIN : Non.

4 MADAME DE BERTODANO : Peut-être dans ce cas pourrais-je écrire le nom pour

5 que vous le lisiez, sans le prononcer à haute voix ? Si on pouvait

6 le montrer d’abord à l’Accusation puis au témoin ?

7 (Au témoin) : Connaissez-vous cette personne, M. Grozdanic ?

8 R. : Oui.

9 Q. : Avez-vous déjà parlé avec lui après avoir été détenu à Omarska ?

10 R. : A Manjaca.

11 Q. : Lui avez-vous parlé de l’incident du 18 juillet dont vous nous avez

12 parlé aujourd’hui ?

13 R. : Ce que j’ai dit de cet événement, personne ne pouvait me le dire

14 parce que je l’ai vu de mes propres yeux.

15 Q. : Très bien, M. Grozdanic. Je vous demande simplement de me dire si

16 vous avez parlé au témoin G de cet événement.

17 R. : Non, je ne lui en ai pas parlé parce que cette personne est très

18 abattue psychologiquement par ce qui lui est arrivé au camp.

19 Q. : Donc quand vous dites dans le même paragraphe de cette déclaration

20 "Il nous a dit plus tard au camp de Manjaca qu’il avait été forcé de

21 le faire", il n’est en fait absolument pas vrai qu’il vous l’ai dit

22 ?

23 R. : Ecoutez, j’ai dit dans ma déclaration que je ne souhaitais pas

24 qu’elle porte sur autre chose que ce que j’avais vu de mes propres

25 yeux et c’est ce que je maintiens, seulement ce que j’ai vu.

Page 4616

1 Q. : Très bien. Vous avez dit dans votre témoignage que vous connaissiez

2 bien l’accusé Dusko Tadic, est-ce exact ?

3 R. : Oui, je le connaissais, pas aussi bien qu’un ami mais suffisamment

4 pour être capable de l’identifier à tout moment.

5 Q. : Vous alliez à ses cours de karaté, il était votre professeur de

6 karaté, n’est-ce pas ?

7 R. : Oui.

8 Q. : Vous aviez des contacts superficiels avec lui? Probablement si vous

9 le rencontriez dans la rue ou dans un café vous le saluiez, est-ce

10 exact ?

11 R. : Naturellement, à Kozarac nous le respections tous beaucoup en tant

12 qu’athlète.

13 Q. : Avant le conflit vous le voyiez en moyenne deux ou trois fois par

14 semaine, est-ce exact ?

15 R. : Oui.

16 Q. : Si je pouvais maintenant en venir à ce que vous nous avez dit au

17 sujet des événements du 18 juillet. Vous avez dit aux Juges de cette

18 cour que vous avez vu Dusko Tadic dans la matinée ce jour-là ?

19 R. : Oui.

20 Q. : Au moment où vous sortiez des toilettes du camp ?

21 R. : Oui.

22 Q. : Vous l’avez vu et il vous a arrêté ?

23 R. : Oui, il ne m’a pas arrêté mais, par crainte, je me suis en quelque

24 sorte arrêté de moi-même.

25 Q. : Il vous a ensuite posé des questions. Il vous a demandé si vous aviez

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1 été dans les forces de réserve de la police à Kozarac, est-ce exact

2 ?

3 R. : Oui.

4 Q. : Est-ce qu’il ne vous a pas, en fait, demandé quelque chose d’autre ?

5 Est-ce qu’il vous a demandé si vous connaissiez quelqu’un du nom

6 d’Emir Grozdanic ?

7 R. : Je ne me souviens pas de ça.

8 Q. : Peut-être pourrions nous revenir à votre déclaration, à la page trois

9 de celle-ci et regarder le dernier paragraphe de cette page. La

10 quatrième phrase de ce paragraphe commence par "Uhvatio me je",

11 pouvez-vous lire cette phrase aux Juges ?

12 R. : "Il m’a pris par le menton et m’a demandé si je savais qui était

13 Elvir Grozdanic. J’ai dit que"...

14 Q. : Cela suffit, M. Grozdanic. Vous vous appelez Elvir Grozdanic, n’est-

15 ce pas ?

16 R. : Oui.

17 Q. : Donc je vais vous demander à nouveau s’il vous a demandé si vous

18 étiez policier de réserve ou s’il vous a demandé si vous saviez qui

19 était Elvir Grozdanic ?

20 R. : Il m’a demandé si j’étais policier de réserve à Kozarac.

21 MADAME HOLLIS : Madame la Présidente, j’élève une objection. Ceci est

22 quelque peu trompeur. Si nous regardons la traduction en anglais de

23 ce texte, elle indique, je crois, qu’il lui a demandé...

24 PRÉSIDENT DE LA CHAMBRE : Vous employez la traduction en anglais ?

25 MADAME HOLLIS : Je crois que c’est également ici, Madame le Président.

Page 4618

1 Selon cette déclaration, je crois que cette déclaration indique qu’à

2 ce moment-là le témoin aurait dit que Dule Tadic lui a demandé s’il

3 connaissait Elvir Grozdanic. Puis il lui a demandé s’il avait été

4 policier de réserve. Donc si nous le questionnons à ce sujet, peut-

5 être faudrait-il prendre la phrase dans son entier.

6 MADAME DE BERTODANO : Madame la Présidente, je n’ai pas d’objection à ce

7 que la phrase soit lue dans son entier.

8 PRÉSIDENT DE LA CHAMBRE : Bien. Donc il ne s’agit pas d’une traduction

9 différente de son interprétation dans cette langue et d’interprètes

10 traduisant d’une manière puis d’une traduction anglaise qui je pense

11 a été faite à un autre moment ? Ce n’est pas le problème. Le

12 problème est simplement que la phrase n’est pas complète, est-ce

13 bien ce que vous dites ?

14 MADAME HOLLIS : Oui, Madame la Présidente, parce que la question, Madame

15 la Présidente, était s’il lui avait demandé ceci ou cela...

16 PRÉSIDENT DE LA CHAMBRE : Bien. Ça va. Continuez avec la phrase entière

17 Madame de Bertodano. Vous n’avez pas d’objection.

18 MADAME DE BERTODANO : La phrase complète en traduction anglaise est "Il

19 m’a pris par le menton et m’a demandé si je savais qui était Elvir

20 Grozdanic ; il a dit que celui-ci était un policier de réserve".

21 Est-ce bien ce que dit le serbo-croate, M. Grozdanic ?

22 R. : Si c’était le policier de réserve nommé ci-desssus.

23 Q. : Je pense que le sens était le même.

24 PRÉSIDENT DE LA CHAMBRE : En tout cas le témoin a répondu. Bien.

25 MADAME DE BERTODANO : Êtes-vous en train de me dire qu’il ne vous a pas

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1 demandé si vous connaissiez Elvir Grozdanic ?

2 R. : Je ne me souviens plus s’il me l’a demandé. Pour autant que je sache,

3 il m’a demandé si j’étais policier de réserve.

4 Q. : Auriez-vous été surpris s’il vous avait posé des questions sur Elvir

5 Grozdanic étant donné que vous le connaissiez bien et que c’était

6 votre nom ?

7 R. : Excusez-moi. J’ai dit que nous n’étions pas des amis assez proches

8 pour qu’il connaisse mon nom.

9 Q. : M. Grozdanic, il devait vous connaître parce que vous assistiez aux

10 cours de karaté, n’est-ce pas ?

11 R. : Pensez-vous vraiment que seul Elvir Grozdanic assistait aux cours de

12 karaté, qu’il ne connaissait que moi ?

13 Q. : Peut-être en resterons-nous là. Vous nous avez dit ensuite ce qui

14 s’était passé plus tard dans l’après-midi. Vous avez dit que votre

15 ami, un garde du nom de Mima, vous a donné à manger, est-ce exact ?

16 R. : Oui.

17 Q. : Il y avait différentes équipes de gardes à Omarska, n’est-ce pas ?

18 R. : Oui.

19 Q. : Savez-vous dans quelle équipe était Mima ?

20 R. : Je ne veux pas le dire pour sa propre sécurité.

21 Q. : Peut-être puis-je vous demander si Mima était dans l’équipe de Krkan

22 ?

23 R. : Peut-être.

24 Q. : Je préférerais que vous me répondiez par oui ou par non.

25 R. : J’ai déjà dit que pour sa sécurité je ne souhaitais pas répondre à

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1 cette question.

2 Q. : Très bien. Il vous a apporté de la nourriture et vous a emmmené près

3 d’un camion-benne pour la manger, est-ce exact ?

4 R. : Oui.

5 Q. : Vous nous avez dessiné l’endroit où se trouvait le camion, c’était

6 très proche de la porte principale du garage, est-ce exact ?

7 R. : Je ne sais pas de quel point de vue vous regardez.

8 Q. : Le camion était-il proche de la porte principale ?

9 R. : Pardon. Avez-vous compris ce que je vous ai demandé. Parlez-vous de

10 la porte principale par laquelle nous entrions et sortions ou de la

11 grande porte ?

12 Q. : De la porte principale, face à la maison blanche par laquelle vous

13 entriez et sortiez.

14 R. : Face à la maison blanche il y avait la petite porte et près de là et

15 plus près de la grande porte par laquelle les camions-bennes

16 entraient et sortaient.

17 Q. : Pouviez vous voir la porte par laquelle vous entriez et sortiez du

18 hangar de l’endroit où vous étiez assis près des camions, je veux

19 dire la petite porte ?

20 R. : A ce moment là j’étais assis derrière une roue.

21 Q. : Donc vous ne pouviez pas voir ?

22 MADAME HOLLIS : Excusez-moi, Madame la Présidente. Je suis désolée

23 d’interrompre mais je demande une expurgation. Il s’agit de

24 16.33.06, page 78, ligne 22. Il y a un mot sensible dans cette

25 phrase. Je suis désolée d’intervenir au beau milieu. C’est 16.33.06,

Page 4621

1 ligne 22, page 78, un mot. Peut-être pourrions nous fournir ceci à

2 Madame Featherstone pour l’informer de quel mot il s’agit.

3 PRÉSIDENT DE LA CHAMBRE : Y a-t-il des objections ?

4 MADAME DE BERTODANO : Aucune, Madame la Présidente.

5 PRÉSIDENT DE LA CHAMBRE : Très bien. Il sera expurgé.

6 MADAME HOLLIS : Merci, Madame le Président.

7 MADAME DE BERTODANO : La question précédente que je vous posais, M.

8 Grozdanic (et à laquelle vous n’avez pas répondu) était la suivante

9 : est-ce que votre vue de la porte était obstruée de l’endroit où

10 vous mangiez ?

11 R. : Excusez-moi encore une fois. J’ai déjà dit que j’étais assis derrière

12 une roue et je ne pouvais pas voir la porte.

13 Q. : Merci. A un moment donné un policier militaire vous a rejoints et

14 Mima est allé vérifier s’il était sûr de vous ramener dans votre

15 pièce, est-ce exact ?

16 R. : Oui.

17 Q. : Il est revenu et vous a mené dans les toilettes ?

18 R. : Oui.

19 Q. : En chemin vers les toilettes vous avez regardé sur le côté et vous

20 avez vu un homme dont vous dites que c’était Dusko Tadic en train de

21 battre un prisonnier près d’une table, est-ce exact ?

22 R. : A la table, pas avec un câble mais une barre de fer.

23 Q. : Oui. Pendant que vous étiez assis derrière la roue aviez-vous entendu

24 des sons rappelant quelqu’un qui se fait battre ?

25 R. : Je regardais le policier militaire qui battait devant moi le jeune

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1 homme qu’il avait amené avec lui.

2 Q. : Entendiez vous des bruits de coups ailleurs dans le garage ?

3 R. : A ce moment-là non, parce que celui-ci était plus proche.

4 Q. : Aviez vous vu Dusko Tadic venir dans le garage ?

5 R. : Non.

6 Q. : Donc vous n’avez découvert cet incident qu’en allant vers les

7 toilettes, vous avez regardé sur le côté et à 20 ou 30 mètres vous

8 avez vu Dusko Tadic battre un prisonnier, est-ce exact ?

9 R. : Oui.

10 Q. : Était-il seul ou en compagnie d’autres soldats ?

11 R. : Il était seul pour autant que je me souvienne.

12 Q. : Vous avez dit dans votre témoignage que vous l’avez vu pendant 30

13 secondes à 1 minute, est-ce exact ?

14 R. : Oui.

15 Q. : M. Grozdanic, combien de temps fallait-il pour aller de la roue près

16 de laquelle vous étiez jusqu’aux toilettes ?

17 R. : Je ne saurais dire.

18 Q. : Mais c’était très près des toilettes, n’est-ce pas ?

19 R. : Oui, c’était près mais tout dépend de votre vitesse de déplacement et

20 de la peur que vous avez.

21 Q. : Si vous avez peur, regardez-vous par terre ou regardez-vous autour de

22 vous pour voir se qui se passe ?

23 R. : J’ai toujours regardé droit devant moi et cela se passait droit

24 devant moi.

25 Q. : Etait -il courant à Omarska de regarder pendant qu’on battait des

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1 prisonniers ?

2 R. : En règle générale, c’était interdit mais nous avons découvert qu’il y

3 avait toujours quelqu’un qui avait vu les prisonniers que l’on

4 battait.

5 Q. : Mais c’était risqué, n’est-ce pas de regarder un garde battre un

6 prisonnier ?

7 R. : Bien sûr que c’était risqué.

8 Q. : Et vous, cette fois là, vous étiez prêt à courir ce risque et à

9 regarder pendant entre trente secondes et une minute.

10 R. : Oui, parce qu’à ce moment-là, j’étais dans une position telle que je

11 ne pouvait manquer de le voir.

12 Q. : Pendant que vous regardiez avez-vous vu Dusko Tadic faire autre chose

13 à part battre un prisonnier ?

14 R. : Non.

15 Q. : Vous ne l’avez pas vu debout devant l’une des pièces en train

16 d’appeler des noms ?

17 R. : Non.

18 Q. : Pourriez-vous examiner de nouveau la déclaration que vous avez sous

19 les yeux ? A la page 4 de celle-ci, le deuxième paragraphe. Nous

20 gagnerons sans doute du temps si je vous lis le début. "Vers 17

21 heures on a appelé les noms des personnes suivantes : Emir

22 Karabasic, Fikret Harambasic, Eno Alic et Jasmin Hrnic". Puis une

23 phrase plus loin : "En allant vers les toilettes j’ai vu que Dusko

24 Tadic se tenait devant le dortoir et qu’il avait appelé les trois

25 premiers noms". Aucune mention de Tadic battant quelqu’un, seulement

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1 en train d’appeler les trois noms mentionnés. Est-ce ce qu’il a

2 fait, M. Grozdanic ?

3 R. : Excusez-moi. Cette déclaration en (expurgé), elle a été traduite de

4 manière entièrement erronée et deuxièment je n’ai jamais

5 mentionné... J’ai fait plusieurs déclarations et je ne pense pas que

6 l’on puisse trouver dans aucune que Dusko Tadic faisait l’appel.

7 Q. : M. Grozdanic, cela se trouve dans cette déclaration et c’est une

8 déclaration dont vous avez signé chaque page et dont vous avez

9 garanti l’exactitude en la signant. Voulez-vous voir la déclaration

10 originale en (expurgé) et vérifier que vous avez bien signé ces pages

11 ? Monsieur l’huissier, peut-on donner cette déclaration au témoin ?

12 Est-ce bien votre signature sur la page de garde de la déclaration

13 et bas de celle-ci ?

14 R. : Oui.

15 Q. : En feuilletant les pages suivantes, vous voyez votre signature au bas

16 de chacune d’elle ?

17 R. : Oui, je la vois. Mais, je suis désolé, je vous ai déjà dit que ce

18 jour-là l’interprète ne parlait pas très bien le (expurgé) et en plus

19 c’était une déclaration générale sur le camp d’Omarska, sur tout ce

20 qui s’y était produit. Elle ne portait pas sur quelqu’un en

21 particulier et je sais bien ce que j’ai dit, qui a appelé qui. Tout

22 ce que je sais c’est que Jasko Hrnic a été appelé par un policier

23 militaire.

24 Q. : Très bien. Ensuite vous êtes entré dans les toilettes et vous y êtes

25 resté un moment, est-ce exact ?

Page 4625

1 R. : Oui.

2 Q. : A un moment donné votre ami, Mima, vous a dit que vous pouviez sortir

3 sans danger ?

4 R. : Oui.

5 Q. : Durant ce temps, vous aviez entendu des bruits que vous avez pris

6 pour des bruits de coups dans la salle des lavabos à l’extérieur ?

7 R. : Avant qu’il vienne me chercher et qu’il me dise de sortir, ces coups,

8 ces bruits de coups se passaient avant.

9 Q. : Malgré le fait que vous avez écouté ces coups, vous pensiez que vous

10 ne courriez aucun danger en allant dans la zone où ils s’étaient

11 produits, est-ce exact ?

12 R. : Je faisais confiance à ce garçon.

13 Q. : En traversant la salle des lavabos, vous avez vu deux hommes allongés

14 face contre terre avec du sang tout autour d’eux ?

15 R. : Oui.

16 Q. : Lors de votre témoignage vous nous avez dit que vous ne pouviez pas

17 identifier ces deux hommes ?

18 R. : Oui.

19 Q. : Mais, M. Grozdanic, vous avez été capable de le faire lorsque vous

20 avez fait la déclaration qui est devant vous, n’est-ce pas ?

21 R. : Non, j’ai fait une déclaration. Je sais ce qui est dit dans celle-ci.

22 En (expurgé), j’ai seulement donné mon avis, mon opinion. Ils m’ont

23 demandé de leur dire qui cela pourrait être approximativement et

24 j’ai dit, eh bien, ça aurait pu être ceux-ci, mais je n’en n’était

25 pas sûr à 100%.

Page 4626

1 Q. : Donc vous pensiez qu’il aurait pu s’agir d’Emir Karabasic et de

2 Fikret Harambasic, c’est bien cela ?

3 R. : Oui.

4 Q. : Qu’est qui vous à fait penser ça ?

5 R. : J’ai pensé que la taille des personnes allongées correspondaient.

6 Q. : Avez-vous pensé cela au moment où vous êtes passés devant eux ou

7 l’avez vous pensé après que vous en avez appris un peu plus sur cet

8 incident ?

9 R. : Quand je suis retourné au dortoir, je me demandais qui ça pouvait

10 être et quoi et puis plus tard j’ai entendu dire qu’Emir Harambasic

11 (sic) et tous les autres avaient été emmenés et puis il m’est venu à

12 l’esprit que ça aurait pu être eux.

13 Q. : Donc d’autres personnes vous ont suggéré que les deux corps que vous

14 aviez vus étaient Emir Karabasic et Fikret Harambasic, c’est cela ?

15 MADAME HOLLIS : Objection, Madame la Présidente. Il vient de dire qu’il y

16 avait pensé et qu’il en avait conclu que, peut-être, il s’agissait

17 d’eux. Il n’a pas dit que d’autres lui avaient dit cela. Je crois

18 que la question est trompeuse, Madame la Présidente.

19 MADAME DE BERTODANO : Madame la Présidente, j’ai le compte rendu sous les

20 yeux. Il est écrit : "puis plus tard j’ai entendu dire qu’Emir", je

21 pense qu’il veut dire Karabasic, "et tous les autres avaient été

22 emmenés". Je vérifiais si quand il avait dit "j’ai entendu dire", il

23 voulait dire que quelqu’un le lui avait dit.

24 PRÉSIDENT DE LA CHAMBRE : Je rejette l’objection.

25 TÉMOIN : Je suis désolé, ce n’est pas Emir Harambasic mais Fikret

Page 4627

1 Harambasic. Est-ce que vous voyez clair ?

2 MADAME DE BERTODANO : Oui, je pense qu’une erreur a pu se glisser dans le

3 compte rendu.

4 TÉMOIN : Encore une fois désolé. Mais combien d’erreurs y a-t-il encore et

5 pourtant vous ne me croyez pas, et je n’arrête pas de dire qu’il y a

6 des erreurs. Vous avez des erreurs et il y en a ici. Je répète que

7 ma déclaration n’a pas été traduite comme il faut en (expurgé) et je

8 ne connais pas bien le (expurgé).

9 Q. : M. Grozdanic, il est important pour les Juges de cette cour que nous

10 vérifions en détail ce que vous nous avez dit aujourd’hui et s’il y

11 a des différences avec votre déclaration que nous vous donnions

12 l’occasion de vous expliquer sur celles-ci. Je vais maintenant

13 passer au moment où l’on vous a fait sortir des toilettes. Vous nous

14 avez dit aujourd’hui qu’au moment où vous franchissiez le seuil vous

15 avez vu un homme à 20 mètres de là qui venait dans votre direction,

16 c’est exact ?

17 R. : Oui.

18 Q. : Vous avez conclu que cet homme était Dusko Tadic ?

19 R. : Conclu ? C’était Dusko Tadic.

20 Q. : Il avait un bâton à la main ?

21 R. : Une barre de fer.

22 Q. : Une barre de fer et vous avez eu si peur que vous vous êtes mis à

23 courir, c’est bien cela ?

24 R. : Oui.

25 Q. : Depuis combien de temps cet homme était-il dans votre champ de vision

Page 4628

1 quand vous vous êtes mis à courir ?

2 R. : Je ne serais pas capable de vous dire combien de temps mais cet homme

3 que j’ai vu était Dusko Tadic, c’était la troisième fois que je le

4 voyais ce jour-là.

5 Q. : Vous vous êtes lentement dirigé vers votre pièce après que Mima vous

6 a dit qu’il était risqué de courir, n’est-ce pas ?

7 R. : Mima m’a pris par la main et m’a dit de ne pas courir que ça pouvait

8 être dangereux pour nous deux.

9 Q. : Donc vous vous êtes dirigés vers votre pièce et près de celle-ci vous

10 avez vu un policier militaire à l’entrée ?

11 R. : Oui, nous marchions vers le dortoir et nous avons vu un policier

12 militaire debout devant l’entrée.

13 Q. : Outre cet homme, avez-vous vu d’autres gardes, soldats ou policiers

14 en revenant des toilettes ?

15 R. : Non, je ne me souviens pas, sauf ces deux personnes que j’ai vu et

16 que vous avez mentionnées, et je regardais vers le dortoir en me

17 demandant comment entrer.

18 Q. : Vous avez vu et entendu le policier militaire appeler Jasko Hrnic ?

19 R. : Oui.

20 Q. : La porte de cette pièce était-elle ouverte ou fermée quand il a

21 appelé Jasko Hrnic ?

22 R. : Je crois qu’elle était ouverte.

23 Q. : Donc il se tenait devant la porte ouverte et appelait.

24 R. : Oui.

25 Q. : Avez-vous vu Jasko Hrnic sortir de cette pièce ?

Page 4629

1 R. : Oui.

2 Q. : Vous avez vu le policier militaire le gifler ?

3 R. : J’ai vu le policier militaire le gifler au visage.

4 Q. : Avez-vous eu peur en voyant le policier militaire près de la porte de

5 la pièce vers laquelle vous vous dirigiez ?

6 R. : Pourquoi ne pas essayer de vous imaginer dans cette situation et nous

7 verrons si vous auriez eu peur ou pas ?

8 Q. : M. Grozdanic, pourriez-vous répondre simplement, aviez-vous peur ou

9 pas ?

10 R. : Toute personne normale aurait peur.

11 Q. : Vous avez poursuivi votre chemin et vous êtes passé très près d’eux

12 et êtes entré dans la pièce ?

13 R. : Oui.

14 Q. : Est-ce que le policier militaire à fait attention à vous quand vous

15 êtes passé près de lui ?

16 R. : Non, il savait déjà qui battre, peut-être que oui mais il ne m’a pas

17 interpelé.

18 Q. : Était-il encore dans l’entrée quand vous êtes passé devant lui ?

19 R. : Quand je suis arrivé près de la porte, Jasmin Hrnic était déjà sorti

20 et quand je suis passé devant eux il avait frappé Jasko Hrnic et je

21 suis entré dans la pièce.

22 Q. : Quand vous êtes entré dans la pièce avez-vous fermé la porte derrière

23 vous ?

24 R. : Non, je ne me souviens pas de l’avoir fait.

25 Q. : Vous vous êtes directement dirigé vers la place où se trouvait Jasmin

Page 4630

1 Hrnic auparavant ?

2 R. : Oui.

3 Q. : Et sur le mur vous avez vu son nom et la date du 18/6 près du nom ?

4 R. : Oui.

5 Q. : Quand vous avez-vu Dusko Tadic ce jour-là portait-il quelque chose

6 sur la tête ?

7 R. : Non, je ne pense pas.

8 Q. : Est-ce qu’il portait des lunettes ?

9 R. : Non, je ne pense pas non plus.

10 Q. : M. Grozdanic, soyons clairs, ce que je suis en train de vous suggérer

11 c’est que vous n’avez pas vu Dusko Tadic ce jour-là.

12 R. : C’est ce que vous pensez.

13 Q. : Que vous avez entendu dire par d’autres prisonniers et ensuite dans

14 les médias ce qui s’était passé au camp ce jour-là et que vous avez

15 inventé cette histoire selon laquelle vous aviez vu vous-même Dusko

16 Tadic?

17 R. : Merci beaucoup pour tout cela et pour toute la confiance que vous me

18 témoignez. Après toutes ces atrocités je suis prêt à échanger ma

19 place avec celle de Dusko Tadic si j’ai dit un seul mensonge.

20 Q. : Pourrions nous passer à la deuxième occasion à laquelle vous avez dit

21 avoir vu Dusko Tadic à Omarska. Cela c’est passé après le 18 juin,

22 n’est-ce pas ?

23 R. : Je ne sais plus si c’était avant ou après.

24 Q. : Vous nettoyiez le garage avec une autre personne et en sortant, à la

25 porte, vous avez vu que l’on battait des détenus, c’est bien cela ?

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1 R. : Oui.

2 Q. : Vous avez vu Dusko Knezevic et un homme appelé Jovic les battre,

3 n’est-ce pas ?

4 R. : Oui.

5 Q. : Si nous regardons la maquette nous pouvons voir que de la porte à

6 laquelle vous vous teniez jusqu’à l’endroit ou vous portiez les

7 déchets, vous deviez passer juste devant l’endroit où se déroulait

8 cette scène ?

9 R. : Oui.

10 Q. : Avez-vous pensé, en sortant et en voyant cela qu’il serait dangereux

11 pour vous de passer devant cet endroit ?

12 R. : Mais nous devions le faire.

13 Q. : Bien, est-ce qu’un garde ou un soldat vous escortaient quand vous

14 êtes allés déposer les poubelles ?

15 R. : Je pense que oui.

16 Q. : Vous ne l’avez pas dit auparavant. Pourquoi ?

17 R. : Personne ne me l’a demandé.

18 Q. : Vous souvenez-vous qui était le garde qui vous escortait ?

19 R. : Non.

20 Q. : Donc vous êtes allés vers les conteneurs des poubelles et en marchant

21 vous avez vu un Musulman avec une brouette accompagné par Dusko

22 Tadic portant un extincteur et un tuyau, c’est exact ?

23 R. : Oui.

24 Q. : Dans la brouette il y avait une personne dont vous dites qu’elle

25 était encore vivante ?

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1 R. : Non, je n’ai pas dit qu’elle était encore vivante. Je ne sais pas.

2 J’ai dit que je ne savais pas si elle était vivante ou non.

3 Q. : Très bien. Vous avez vu Dusko Tadic mettre l’extrémité de

4 l’extincteur dans sa bouche ?

5 R. : Oui.

6 Q. : La brouette avançait-elle à ce moment là ou était-elle arrêtée ?

7 R. : Elle était arrêtée non loin du conteneur.

8 Q. : Que faisait l’homme qui avait poussé la brouette ?

9 R. : Je ne me souviens pas de ce qu’il faisait à ce moment-là.

10 Q. : Vous dites que vous avez regardé Dusko Tadic environ une minute ?

11 R. : Environ.

12 Q. : Aviez-vous peur qu’il ne vous voit en train de le regarder ?

13 R. : Bien sûr que j’avais peur.

14 Q. : Alors pourquoi n’avez vous pas fait ce que la plupart des gens

15 feraient dans cette situation, baisser la tête ?

16 R. : Peut-être mes yeux se sont-ils automatiquement dirigés dans cette

17 direction pour voir.

18 Q. : Pendant toute une minute, vos yeux ne se sont pas détournés.

19 R. : Je n’ai pas dit que c’était exactement une minute. J’ai dit environ

20 une minute.

21 Q. : C’était un homme que vous connaissiez et qui vous cherchait, n’est-ce

22 pas ?

23 R. : Oui.

24 Q. : Et cependant vous avez pris ce risque ?

25 R. : J’étais déjà là, sur le chemin, qu’est-ce que je pouvais faire

Page 4633

1 d’autre ?

2 Q. : M. Grozdanic, vous n’aimiez pas beaucoup Dusko Tadic, n’est-ce pas ?

3 R. : Comment pouvez vous savoir que je ne l’aimais pas ?

4 Q. : Vous êtes venu ici aujourd’hui et vous nous avez raconté un incident

5 de stationnement que vous pensez être suffisamment important pour le

6 présenter comme élément de preuve aux Juges de cette cour et pendant

7 lequel vous vous êtes querellé avec M. Tadic ?

8 R. : Ce jour-là on ne m’a pas envoyé me quereller avec qui que ce soit,

9 mais pour faire la circulation dans la rue principale et j’ai

10 demandé à M. Tadic de ne pas laisser sa voiture sur la voie.

11 MADAME DE BERTODANO : Rien de plus, Madame la Présidente.

12 PRÉSIDENT DE LA CHAMBRE : Madame Hollis, vous pouvez reprendre

13 l’interogatoire principal.

14 MADAME HOLLIS : Avant cela, Madame la Présidente, j’aimerais qu’un terme

15 sensible soit expugé en plusieurs endroits.

16 PRÉSIDENT DE LA CHAMBRE : Oui.

17 MADAME HOLLIS : Le premier se trouve à 16h59, Madame la Présidente, page

18 87, ligne 8, un mot, 16h59.00. Le second se trouve à 16h58.18, page

19 87, première ligne, un mot. Après cela 16h59.00, page 87, ligne 8,

20 un mot, puis 17h03.16, page 88, ligne 17, un mot. A 17h05.54 il y a

21 un mot dans la ligne et je vais le trouver dans un instant. Le

22 suivant est à 17h05.56, page 89, lignes 23/24, un mot. Page 89,

23 ligne 23, c’est à 17h05.54.

24 PRÉSIDENT DE LA CHAMBRE : Des objections concernant ceux-ci ?

25 MADAME DE BERTODANO : Pas d’objection, Madame la Présidente. Veuillez

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1 m’excuser de les avoir laissé échapper.

2 PRÉSIDENT DE LA CHAMBRE : Aucun problème. Nous accordons ces expurgations.

3 MADAME HOLLIS : Merci, Madame la Présidente.

4 MADAME FEATHERSTONE : Nous pensons qu’il pourrait y en avoir un autre à

5 17h00.40, page 87, ligne 19.

6 PRÉSIDENT DE LA CHAMBRE : Même cas de figure ?

7 MADAME FEATHERSTONE : Même cas de figure.

8 PRÉSIDENT DE LA CHAMBRE : Des objections ? Pas d’objections. Ces passages

9 seront expurgés. Si possible nous voudrions en finir aujourd’hui

10 avec ce témoin.

11 MADAME HOLLIS : Oui, Madame la Présidente, j’ai très peu de questions.

12 PRÉSIDENT DE LA CHAMBRE : Allez-y.

13 Nouvel interrogatoire par MADAME HOLLIS

14 MADAME HOLLIS : M. Grozdanic, quel âge aviez-vous quand vous preniez des

15 cours de karaté avec Dusko Tadic ?

16 R. : Environ 10 ou 12 ans. Je ne sais pas exactement.

17 Q. : Êtes-vous de la même génération que Dule Tadic où d’une génération

18 suivante ?

19 R. : D’une génération suivante.

20 Q. :Quand vous avez vu Dule Tadic à Omarska le 18 juin votre apparence

21 physique était-elle semblable à celle que vous aviez avant les

22 attaques contre Kozarac ?

23 R. : Non.

24 Q. : En quoi étiez-vous différent ce jour-là ?

25 R. : Je ressemblais... J’avais les cheveux rasés. Mes vêtements étaient

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1 déchirés. J’étais sale.

2 Q. : Vous dites que vous aviez les cheveux rasés. Vous restait-il des

3 cheveux sur la tête ou aviez-vous été rasé ?

4 R. : Rasé.

5 Q. : A ce moment savez-vous si vous aviez perdu du poids depuis votre

6 arrivée à Omarska ?

7 R. : Peut-être un kilo ou deux.

8 Q. : L’après-midi de ce jour-là, est-il exact que votre ami serbe Mima est

9 venu vous chercher dans les toilettes et vous a reconduit dans votre

10 pièce ?

11 R. : Oui.

12 Q. : Mima vous a accompagné quand vous vous êtes dirigé vers votre pièce ?

13 R. : Oui.

14 Q. : Dans l’après-midi au moment où vous avez vu Tadic pour la deuxième et

15 la troisième fois vous avez dit à la Défense que vous n’avez pas vu

16 Dule Tadic revenir dans le garage, est-ce exact ?

17 R. : Je ne l’ai pas vu.

18 Q. : En réponse à une question de la Défense vous parlez de cette autre

19 fois où vous avez vu Dule Tadic en sortant les déchets. Pourquoi

20 deviez-vous porter ces déchets au conteneur ?

21 R. : Parce qu’on nous avait ordonné de le nettoyer. Nous l’avons fait et

22 nous avons du sortir pour jeter ces déchets dans le conteneur, et

23 que ce serait-il passé si nous avions refusé de le faire ? Il nous

24 auraient tués.

25 Q. : Maintenant, vous avez fait allusion à des problèmes d’interprétation

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1 de votre déclaration, la déclaration antérieure à laquelle la

2 Défense s’est référée. Je veux évoquer une partie de cette

3 déclaration à la page 3 et vous lire un passage et vous demander si

4 vous savez comment ce mot s’est glissé dans la déclaration. A la

5 troisième ligne il y a une phrase qui commence par "Ces gens qui

6 devaient boire l’eau dans le pré comme du bétail étaient battus et

7 quand ils ne pouvaient plus marcher on les mettait dans quelque

8 chose qui ressemblait à une chaise roulante et on les emmenait".

9 R. : Oui. C’est vrai. Quand ils ont interprété pour moi cette déclaration

10 en (expurgé) l’interprète ne connaissait pas le mot "brouette" et

11 c’est pourquoi il a dit "chaise roulante".

12 Q. : Donc vous avez dit "brouette" et l’interprète ne connaissait pas ce

13 mot, c’est comme ça qu’il y a "chaise roulante" dans la déclaration.

14 R. : Oui.

15 Q. : Mais vous avez signé cette déclaration ?

16 R. : A la fin cette déclaration m’a été lue, mais l’interprète m’a redit

17 ce que je lui avais dit. Donc elle ne m’a pas dit "chaise roulante,

18 elle m’a dit "brouette".

19 Q. : Dans cette déclaration préalable vous dites bien avoir vu l’accusé à

20 deux reprises à Omarska ?

21 R. : Oui.

22 Q. : Vous dites aussi que l’une des occasions était le 18 juin 1992 ?

23 R. : Oui.

24 Q. : Vous avez dit également qu’à cette date vous l’aviez d’abord vu le

25 matin ?

Page 4637

1 R. : Oui.

2 Q. : Vous avez dit que vous l’aviez ensuite revu l’après-midi ?

3 R. : Oui.

4 Q. : Dans cette déclaration vous dites également que vous avez vu l’accusé

5 une fois au camp de Tnopolje ?

6 R. : Oui.

7 Q. : Certains passages de cette déclaration indiquent que quand vous avez

8 vu l’accusé dans la matinée du 18 juin, que l’accusé est venu vers

9 vous, vous a pris par le menton et a demandé si vous connaissiez

10 Elvir Grozdanic puis a dit que ce dernier était policier de réserve.

11 Vous déposez aujourd’hui devant la cour de ce tribunal, dites à la

12 Cour, dites-leur fidèlement et honnêtement ce que Dule Tadic vous a

13 dit quand vous l’avez vu le matin du 18 juin ?

14 R. : Il m’a demandé si j’avais été policier de réserve à Kozarac et je lui

15 ai dit que non, que j’étais de Hambarine et que je m’appelais Jasmin

16 Celic il m’a tourné le dos et il est parti.

17 MADAME HOLLIS : Merci. Madame la Présidente, je n’ai plus de questions.

18 PRÉSIDENT DE LA CHAMBRE : Reprise du contre-interrogatoire ?

19 MADAME DE BERTODANO : Rien de plus, Madame la Présidente.

20 JUGE STEPHEN : Monsieur, au début de votre témoignage vous avez dit qu’au

21 moment de l’attaque vous vous trouviez au point de contrôle de

22 Koncari. c’est cela, n’est-ce pas ?

23 R. : Oui.

24 Q. : Nous avons beaucoup entendu parler de ce point de contrôle au fil des

25 témoignages. Quelles étaient vos tâches à ce point de contrôle ?

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1 Arrêter les voitures ?

2 R. : Oui, principalement, nous arrêtions des voitures.

3 Q. : Dans quel but ? Quel type de questions posiez-vous aux véhicules que

4 vous arrêtiez ?

5 R. : Naturellement quand nous les arrêtions nous leur demandions leur

6 permis de conduire et nous vérifions si le véhicule était en bon

7 état.

8 Q. : Est-ce simplement une vérification de sécurité routière ou aviez-vous

9 des ordres concernant les personnes à arrêter ou à ne pas arrêter ?

10 R. : Non, nous arrêtions tous ceux qui passaient sur la route.

11 Q. : Aviez-vous des directives si vous découvriez que les gens étaient

12 Serbes par exemple ou Musulmans ?

13 R. : Non, c’était la même chose pour tous. S’ils avaient des fusils on les

14 emmenait au poste de police. Que ce soient des Musulmans, des Serbes

15 ou des Croates, c’était la même chose pour tous.

16 Q. : Donc le but réel du point de contrôle était la recherche d’armes,

17 n’est-ce pas ?

18 R. : Principalement mais aussi bien sûr de contrôler ceux qui utilisaient

19 des voitures sans papiers.

20 JUGE STEPHEN : Je vois, merci.

21 TÉMOIN : Je vous en prie.

22 PRÉSIDENT DE LA CHAMBRE : Madame Hollis ?

23 MADAME HOLLIS : Non, Madame la Présidente, rien de plus.

24 PRÉSIDENT DE LA CHAMBRE : Madame de Bertodano ?

25 MADAME DE BERTODANO : Rien, Madame la Présidente.

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1 PRÉSIDENT DE LA CHAMBRE : Juste un commentaire avant de libérer le témoin

2 définitivement, sur la liste de témoins à charge, le témoin 75, nous

3 nous demandions simplement, ce témoin, avez-vous l’intention de le

4 citer plus tard, bien sûr vous pouvez appeler vos témoins dans

5 l’ordre que vous choisissez mais y a-t-il une raison pour le faire

6 passer avant ? M. Niemann, voulez-vous examiner cela ?

7 MADAME HOLLIS : Le N° 75, Madame la Présidente ?

8 PRÉSIDENT DE LA CHAMBRE : Le numéro 75, je pense sur votre dernière liste

9 à cette date. Si vous n’en êtes pas certaine, c’était juste une

10 question de notre part. Vous pourrez nous répondre mardi. Y a-t-il

11 une objection à ce que ce témoin soit définitivement libéré ?

12 MADAME DE BERTODANO : Non, Madame la Présidente.

13 PRÉSIDENT DE LA CHAMBRE : Très bien. Monsieur, vous êtes définitivement

14 libéré. Vous êtes libre de partir. Merci d’être venu. La Cour est

15 ajournée jusqu’à mardi 10h00.

16 (17h30)

17 (Ajournement de la Cour jusqu’au mardi 30 juillet 1996).

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