LE TRIBUNAL PÉNAL INTERNATIONAL POUR L’EX-YOUGOSLAVIE

Affaire n° IT-97-25/1-PT

LE PROCUREUR DU TRIBUNAL

CONTRE

MITAR RASEVIC
SAVO TODOVIC

DEUXIÈME ACTE D’ACCUSATION CONJOINT MODIFIÉ

Le Procureur du Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie, en vertu des pouvoirs que lui confère l’article 18 du Statut du Tribunal, accuse :

MITAR RASEVIC
SAVO TODOVIC

de CRIMES CONTRE L’HUMANITÉ et de VIOLATIONS DES LOIS OU COUTUMES DE LA GUERRE, comme il est exposé ci-après :

LES ACCUSÉS

1. MITAR RASEVIC, fils de Đorđe, né le 15 novembre 1949 dans le village de Cagust (municipalité de Foca), était professeur de sociologie et résidait à Foca. Avant, pendant et aprcs le conflit, MITAR RASEVIC était le chef des gardiens de la prison (Kazneno-Popravni Dom ou « KP Dom ») de Foca.

2. SAVO TODOVIC, fils de Vladimir, né le 11 décembre 1952 dans le village de Rijeka, est un habitant de Foca. Il a travaillé au KP Dom du 4 janvier 1974 jusqu’en octobre 1994 au moins. Il a été le numéro deux dans la hiérarchie du KP Dom du 20 avril 1992 au 9 aoűt 1993. Entre le 10 août 1993 et le 31 octobre 1994, il occupait les fonctions de directeur adjoint de la prison.

RESPONSABILITÉ PÉNALE INDIVIDUELLE

Article 7 1) du Statut du Tribunal

3. MITAR RASEVIC et SAVO TODOVIC sont individuellement pénalement responsables de crimes tombant sous le coup des articles 3 et 5 du Statut du Tribunal et exposés dans le présent acte d’accusation. Les accusés ont planifié, incité à commettre, ordonné, commis ou de toute autre manière aidé et encouragé à planifier, préparer ou exécuter tout acte ou omission exposé ci-après. Par le terme « commettre », le Procureur n’entend pas suggérer que les accusés ont matériellement commis tous les crimes qui leur sont imputés personnellement. Les accusés n’ont à répondre que de l’exécution des crimes suivants : persécutions (chef 1) par emprisonnement et détention prolongés et systématiques [paragraphe 19 a) : Rasevic et Todovic], instauration et maintien de conditions de détention inhumaines [paragraphe 19 b) : Rasevic et Todovic], tortures et sévices corporels à répétition infligés à des détenus musulmans et à d’autres détenus non serbes [paragraphe 19 c) en ce qui concerne les faits rapportés aux paragraphes 30 et 31 : Todovic seulement], travaux forcés prolongés et fréquents [paragraphe 19 e) : Rasevic et Todovic] et expulsion et transfert forcé [paragraphe 19 f) : Rasevic et Todovic] ; tortures (chef 2) en ce qui concerne les faits rapportés aux paragraphes 30 et 31 (Todovic seulement) ; tortures (chef 3) en ce qui concerne les faits relatés aux paragraphes 30 et 31 (Todovic seulement) ; actes inhumains (chef 4) en ce qui concerne les faits exposés aux paragraphes 30 et 31 (Todovic seulement) ; traitement cruel (chef 5) en ce qui concerne les faits exposés aux paragraphes 30 et 31 (Todovic seulement) ; emprisonnement (chef 8) (Rasevic et Todovic), actes inhumains (chef 9) (Rasevic et Todovic), traitement cruel (chef 10) (Rasevic et Todovic) ; réduction en esclavage (chef 11) (Rasevic et Todovic) et esclavage (chef 12) (Rasevic et Todovic). Dans le présent acte d’accusation, le terme « commettre » recouvre la participation des accusés à une entreprise criminelle commune comme coauteurs.

4. MITAR RASEVIC et SAVO TODOVIC ont participé à une entreprise criminelle commune qui a vu le jour le 18 avril 1992 au plus tard et s’est poursuivie jusqu’au 31 octobre 1994. L’objectif de l’entreprise criminelle commune était d’emprisonner les civils, Musulmans et autres non-Serbes, originaires de Foca et de la région alentour dans des conditions inhumaines et de les soumettre à des sévices corporels, à la torture, à l’esclavage, à des expulsions et à des transferts forcés. Les méthodes et la conduite de l’entreprise criminelle commune ont évolué au fil du temps. La réduction en esclavage des détenus, exposée au paragraphe 51 ci-après, n’a commencé qu’en mai 1992. Les meurtres systématiques de détenus, exposés au paragraphe 43 ci-après, ne se sont produits que pendant la période allant de juin à août 1992.

5. Les crimes énumérés aux chefs 1 à 5 et 8 à 12 du présent acte d’accusation entraient dans le cadre de l’entreprise criminelle commune et MITAR RASEVIC et SAVO TODOVIC partageaient l’intention soit de perpétrer les crimes en question, soit de contribuer à un système commun concerté de mauvais traitements. Les faits reprochés aux chefs 6 et 7 étaient la conséquence naturelle et prévisible de la réalisation des objectifs de l’entreprise criminelle commune, et les accusés savaient que c’était là une conséquence possible de l’exécution de ladite entreprise.

6. À défaut, les crimes énumérés aux chefs 8 à 10 du présent acte d’accusation entraient dans le cadre de l’entreprise criminelle commune et MITAR RASEVIC et SAVO TODOVIC partageaient l’intention soit de perpétrer les crimes en question, soit de contribuer à un système commun concerté de mauvais traitements. Les faits reprochés aux chefs 1 à 7, 11 et 12 étaient la conséquence naturelle et prévisible de la réalisation des objectifs de l’entreprise criminelle commune, et les accusés savaient que c’était là une conséquence possible de l’exécution de ladite entreprise.

7. Un certain nombre de personnes ont participé pendant diverses périodes à cette entreprise criminelle commune, et chaque participant ou coauteur a joué en son sein un rôle qui a contribué de manière notable à la réalisation de son objectif global. Ont notamment participé à l’entreprise criminelle commune Milorad Krnojelac, Slavko Koroman, Milenko Burilo, Risto Ivanovic, Dragomir Obrenovic, Zoran Matovic, Milenko Elcic, Slobodan Pejic, Predrag Stevanovic, Vlatko Pljevaljcic, Jovo Savic, Radovan Vukovic, Milovan Vukovic, Milvoj Milic et d’autres membres inconnus du personnel pénitentiaire, de l’Armée populaire yougoslave (« JNA »), de la Défense territoriale serbe (« TO »), des forces armées de la Republika Srpska (« VRS »), des forces de police de la Republika Srpska (« RS »), et des formations paramilitaires serbes.

8. MITAR RASEVIC, agissant seul ou de concert avec d’autres membres de l’entreprise criminelle commune, a participé à celle-ci de la façon suivante :

a) En tant que chef des gardiens du KP Dom, MITAR RASEVIC avait pour tâche principale d’encadrer au moins 37 gardiens de la prison. Il exerçait un contrôle effectif sur les gardiens du KP Dom et il lui appartenait notamment d’établir les tableaux de service et de répartir les tâches.

b) En tant que membre du personnel de direction du KP Dom et en sa qualité de chef des gardiens, il a contribué pour une large part à instaurer et maintenir dans le centre de détention les conditions exposées aux paragraphes 48 et 49 ci-après. Il était en rapport avec les autorités militaires et politiques extérieures à la prison, en particulier pour les échanges de prisonniers.

c) Il était responsable des cellules d’isolement et avait le pouvoir d’en extraire les détenus, ce qu’il s’est abstenu de faire à quelques exceptions près.

d) Il a participé à l’établissement d’un régime de mauvais traitements généralisés qui étaient infligés le jour, notamment des tortures et des sévices corporels, comme il est exposé aux paragraphes 32 à 39 ci-après ; les gardiens placés sous ses ordres choisissaient des détenus dans leurs cellules et les emmenaient dans des salles d’interrogatoire où ils étaient gravement molestés alors qu’on les interrogeait.

e) Il a participé à l’établissement d’un régime de mauvais traitements généralisés qui étaient infligés le soir, comme il est exposé aux paragraphes 34 à 39 ci-après ; les gardiens placés sous ses ordres choisissaient des détenus dans leurs cellules et les emmenaient dans des salles spéciales du bâtiment administratif où des gardiens de la prison ainsi que des policiers et des militaires venus du dehors se livraient sur eux à des exactions, notamment des sévices corporels, des tortures et des homicides.

f) Il a participé à l’établissement et au maintien d’un régime de punitions, comme il est exposé aux paragraphes 27 à 31 ci-après, sous lequel les gardiens battaient les détenus pour toute violation, même mineure, du règlement interne de la prison, cependant que des punitions collectives étaient infligées pour les agissements de tel ou tel détenu.

g) Il a encouragé et légitimé les mauvais traitements infligés aux détenus en s’abstenant d’empêcher les sévices corporels et autres actes inhumains qui avaient lieu en sa présence.

h) Il a contribué à entretenir un climat de terreur au KP Dom en menaçant les détenus de coups et blessures graves s’ils tentaient de s’évader.

i) Il a participé à l’établissement d’un système de travail forcé, comme il est exposé aux paragraphes 51 à 56 ci-après, soit en choisissant lui-même des détenus pour les travaux et en contrôlant leurs affectations à l’intérieur et à l’extérieur du KP Dom, soit en en chargeant des gardiens. Pour faciliter le travail forcé à l’extérieur du KP Dom, il a coopéré avec les militaires, notamment en leur livrant des détenus.

j) Il a participé au transfert forcé et à l’expulsion de détenus de la prison à l’occasion de prétendus échanges, comme il est exposé au paragraphe 19 f) ci-après, en désignant ceux qui seraient transférés hors de la municipalité de Foca, notamment au Monténégro et en Serbie. Il a été impliqué dans la disparition de détenus qui devaient être échangés mais que l’on n’a jamais revus vivants.

9. SAVO TODOVIC, agissant seul ou de concert avec d’autres membres de l’entreprise criminelle commune, a participé à celle-ci de la façon suivante :

a) Du 20 avril 1992 au 9 août 1993, en tant que commandant adjoint du KP Dom, SAVO TODOVIC était le numéro deux dans la hiérarchie de la prison et ses pouvoirs et ses obligations étaient semblables à ceux du commandant. Il encadrait le personnel subalterne de la prison au quotidien.

b) Durant toute la période couverte par le présent acte d’accusation, en tant que membre du personnel de direction du KP Dom et en sa qualité de commandant adjoint, il a contribué à instaurer et maintenir dans le centre de détention les conditions exposées aux paragraphes 48 et 49 ci-après. Il était également en rapport avec les autorités militaires et politiques extérieures à la prison.

c) Durant toute la période couverte par le présent acte d’accusation, il était le responsable des détenus. Il était en contact avec les autorités extérieures à la prison pour ce qui touchait au sort des détenus. Selon les décisions prises par les autorités extérieures et avec l’accord d’autres cadres supérieurs, notamment de Milorad Krnojelac, SAVO TODOVIC était chargé de choisir les détenus qui allaient être l’objet d’homicides, de sévices corporels, d’interrogatoires, d’affectations au travail forcé, d’une détention au secret ou d’échanges. Il était également responsable de la punition des détenus.

d) Durant toute la période couverte par le présent acte d’accusation, il a participé à l’établissement d’un régime de mauvais traitements généralisés qui étaient infligés le jour, notamment des tortures et des sévices corporels, comme il est exposé aux paragraphes 32 à 39 ci-après ; selon des listes établies par les autorités pénitentiaires, et notamment par SAVO TODOVIC, les gardiens choisissaient des détenus dans leurs cellules et les emmenaient dans des salles d’interrogatoire où ils étaient gravement molestés alors qu’on les interrogeait.

e) Durant toute la période couverte par le présent acte d’accusation, il a participé à l’établissement d’un régime de mauvais traitements généralisés qui étaient infligés le soir, comme il est exposé aux paragraphes 34 à 39 ci-après ; selon des listes dressées par les autorités pénitentiaires, et notamment par SAVO TODOVIC, les gardiens choisissaient des détenus dans leurs cellules et les emmenaient dans des salles spéciales du bâtiment administratif où des gardiens de la prison ainsi que des policiers et des militaires venus du dehors se livraient sur eux à des exactions, notamment des sévices corporels, des tortures et des homicides.

f) Durant toute la période couverte par le présent acte d’accusation, il a participé à l’établissement et au maintien d’un régime de punitions, comme il est exposé aux paragraphes 27 à 31 ci-après, sous lequel les gardiens battaient les détenus pour toute violation, même mineure, du règlement interne de la prison, cependant que des punitions collectives étaient infligées pour les agissements de tel ou tel détenu. SAVO TODOVIC décidait lui-même quels détenus étaient envoyés en cellule d’isolement et pour combien de temps. Il a personnellement ordonné les mauvais traitements infligés aux détenus et, à deux reprises, il a lui-même battu des détenus et leur a administré des coups de pied, comme il est exposé aux paragraphes 30 et 31 ci-après.

g) Durant toute la période couverte par le présent acte d’accusation, il a encouragé et légitimé les mauvais traitements infligés aux détenus en s’abstenant d’empêcher les sévices corporels et autres actes inhumains qui avaient lieu en sa présence.

h) Durant toute la période couverte par le présent acte d’accusation, il a contribué à entretenir un climat de terreur au KP Dom en menaçant les détenus de coups et blessures graves s’ils violaient le règlement interne de la prison, tentaient de s’évader ou refusaient de travailler.

i) Durant toute la période couverte par le présent acte d’accusation, il a participé à l’établissement d’un système de travail forcé, comme il est exposé aux paragraphes 51 à 56 ci-après, en établissant des listes de détenus et de travaux à effectuer, en affectant lui-même des tâches aux détenus, en faisant l’appel dans les cellules du KP Dom pour former des équipes de travail, alors que ceux qui refusaient de travailler parce qu’ils étaient malades ou n’en avaient pas la force faisaient l’objet de menaces et de contraintes. Pour faciliter le travail forcé à l’extérieur du KP Dom, il a coopéré avec les autorités civiles et militaires, notamment en livrant des détenus aux militaires.

j) Durant toute la période couverte par le présent acte d’accusation, il a participé au transfert forcé et à l’expulsion de détenus de la prison à l’occasion de prétendus échanges, comme il est exposé au paragraphe 19 f) ci-après, en désignant ceux qui seraient transférés hors de la municipalité de Foca, notamment au Monténégro et en Serbie. Il a été impliqué dans la disparition de détenus qui devaient ętre échangés mais que l’on n’a jamais revus vivants.

10. MITAR RASEVIC et SAVO TODOVIC ont sciemment et délibérément participé à l’entreprise criminelle commune ainsi qu’il est dit plus haut. Ils partageaient l’intention et l’état d’esprit nécessaires pour commettre chacun des crimes visés aux chefs 1 à 5 et 8 à 12 du présent acte d’accusation (première catégorie d’entreprise criminelle commune) ou avaient connaissance du système concerté de mauvais traitements qui existait au KP Dom, système qu’ils ont sciemment et délibérément servi par leur comportement (deuxième catégorie d’entreprise criminelle commune : chefs 1 à 5 et 8 à 12) et, s’agissant des chefs 6 et 7, étaient conscients des conséquences prévisibles de leurs actes et de ceux des autres participants (troisième catégorie d’entreprise criminelle commune). À défaut, ils partageaient l’intention et l’état d’esprit nécessaires pour commettre les crimes visés aux chefs 8 à 10 (première catégorie d’entreprise criminelle commune) ou avaient connaissance du système concerté de mauvais traitements qui existait au KP Dom, système qu’ils ont sciemment et délibérément servi par leur comportement (deuxième catégorie d’entreprise criminelle commune : chefs 8 à 10) et, s’agissant des chefs 1 à 7, 11 et 12, étaient conscients des conséquences prévisibles de leurs actes et de ceux des autres participants (troisième catégorie d’entreprise criminelle commune). À ce titre, les accusés sont pénalement individuellement responsables de ces crimes au regard de l’article 7 1) du Statut du Tribunal, de même qu’ils en sont responsables, au regard de ce même article, pour les avoir planifiés, avoir incité à les commettre, les avoir ordonnés, commis matériellement ou pour avoir de toute autre manière aidé et encouragé à les planifier, préparer ou exécuter.

Article 7 3) du Statut du Tribunal

11. De surcroît ou subsidiairement, MITAR RASEVIC, lorsqu’il exerçait les fonctions de chef des gardiens de la prison, et SAVO TODOVIC, lorsqu’il exerçait les fonctions de commandant adjoint du KP Dom du 20 avril 1992 au 9 août 1993, se sont rendus pénalement responsables, en leur qualité de supérieurs hiérarchiques, des actes de leurs subordonnés aux termes de l’article 7 3) du Statut du Tribunal. Un supérieur est responsable des actes de ses subordonnés s’il savait ou avait des raisons de savoir que ces derniers s’apprêtaient à commettre ces actes ou les avaient commis, et s’il n’a pas pris les mesures nécessaires et raisonnables pour empêcher que lesdits actes ne soient commis, ou en punir les auteurs.

CHEFS D’ACCUSATION

CHEF 1

(Persécutions)

12. D’avril 1992 à octobre 1994, MITAR RASEVIC et SAVO TODOVIC, agissant seuls ou de concert avec d’autres membres connus ou inconnus de l’entreprise criminelle commune, comme il est indiqué au paragraphe 7 de l’acte d’accusation, ont planifié, incité à commettre, ordonné, commis ou de toute autre manière aidé et encouragé à planifier, préparer ou exécuter la persécution de détenus, Musulmans et autres non-Serbes de sexe masculin, au KP Dom. Les détails de ces persécutions sont exposés aux paragraphes suivants.

13. La ville et la municipalité de Foca se situent en Bosnie-Herzégovine, au sud-est de Sarajevo, prcs de la fronticre avec la Serbie-et-Monténégro. Selon le recensement de 1991, Foca comptait 40 513 habitants, dont 51,6 % de Musulmans, 45,3 % de Serbes et 3,1 % de personnes d’autres origines.

14. Le 7 avril 1992, les forces militaires serbes, constituées par la JNA, les unités locales de la TO serbe et des membres de formations paramilitaires serbes venus de Bosnie-Herzégovine et d’ailleurs, ont commencé à prendre le contrôle de la ville de Foca, opération qu’elles ont menée à bien le 16 ou le 17 avril 1992. Le sicge des villages voisins s’est poursuivi jusqu’à la mi-juillet 1992.

15. Dès que les forces serbes se sont rendues maîtresses de certains quartiers de Foca, la police militaire, accompagnée de soldats originaires ou non de la région, a commencé à arrêter des Musulmans et d’autres habitants non serbes. Jusqu’à la mi-juillet 1992, les autorités serbes ont continué à effectuer des rafles et à arrêter des villageois musulmans sur tout le territoire de la municipalité. Les autorités serbes ont séparé les hommes des femmes et illégalement détenu des milliers de Musulmans et autres non-Serbes.

16. À partir du 14 avril 1992 ou vers cette date, les autorités civiles et militaires serbes ont commencé à utiliser le KP Dom comme centre de détention principal pour les Musulmans et autres non-Serbes. Le complexe pénitentiaire était entouré d’un mur de trois mètres de haut, surmonté de fils de fer barbelés, avec des miradors équipés de mitrailleuses. Le périmètre interne était miné. Les soldats et les gardiens de la prison surveillaient les détenus depuis les miradors et effectuaient régulièrement des rondes. Les détenus étaient logés dans un bâtiment de quatre étages qui comprenait des cellules communes et des cellules d’isolement de trois mètres sur trois.

17. Les détenus étaient pour la plupart des hommes musulmans. Il se trouvait parmi eux des intellectuels, des médecins, des journalistes, des membres du SDA (Parti de l’action démocratique) et quelques Serbes qui avaient essayé de se soustraire au service militaire. Les détenus serbes étaient séparés des détenus non serbes, et leurs conditions de détention étaient nettement meilleures que celles de ces derniers. En raison des arrestations incessantes, la prison, surpeuplée durant les premiers mois, a regroupé un temps plus de 760 détenus. Pendant le reste de l’année 1992, le nombre de détenus dans le camp était approximativement de 600. La majorité des détenus ont été échangés, libérés ou ont disparu en 1992 et 1993. Le KP Dom a fonctionné comme centre de détention jusqu’au 5 octobre 1994.

18. La plupart, si ce n’est la totalité, des détenus étaient des civils qui n’étaient accusés d’aucun crime. Il s’agissait principalement d’hommes musulmans âgés de 16 à 80 ans, parmi lesquels se trouvaient des handicapés mentaux et physiques ainsi que de grands malades.

19. Les persécutions pour des raisons politiques, raciales ou religieuses auxquelles MITAR RASEVIC et SAVO TODOVIC ont pris part ont revêtu notamment les formes suivantes :

a) l’emprisonnement et la détention prolongés et systématiques, au KP Dom, de civils de sexe masculin, Musulmans et autres non-Serbes, habitant la municipalité de Foca et ses environs ;

b) l’instauration et le maintien de conditions de détention inhumaines pour les civils de sexe masculin, Musulmans et autres non-Serbes, emprisonnés au KP Dom, comme il est exposé aux paragraphes 48 et 49 ci-après ;

c) les tortures et sévices corporels répétés, infligés aux détenus de sexe masculin, Musulmans et autres non-Serbes, emprisonnés au KP Dom, comme il est exposé aux paragraphes 22 à 39 ci-après ;

d) les nombreux homicides dont ont été victimes des civils de sexe masculin, Musulmans et autres non-Serbes, emprisonnés au KP Dom, comme il est exposé aux paragraphes 43 à 45 ci-après ;

e) les travaux forcés prolongés et fréquents imposés aux civils de sexe masculin, Musulmans et autres non-Serbes, emprisonnés au KP Dom, comme il est exposé aux paragraphes 52 à 56 ci-après ;

f) l’expulsion et le transfert forcé de civils, Musulmans et autres non-Serbes, emprisonnés au KP Dom, vers le Monténégro et d’autres destinations connues ou inconnues.

i) De juillet 1993 au plus tard à octobre 1994, plusieurs groupes de détenus ont été transférés dans d’autres centres de détention à Kalinovik, Rudo et Kula. Avant la fin septembre 1994, plus de 85 détenus avaient été conduits dans ces centres de détention. À la suite du transfert d’au moins 187 détenus en octobre 1994, il ne restait plus personne en détention au KP Dom. SAVO TODOVIC fournissait les listes de détenus choisis pour les échanges, dont il donnait lecture alors que les détenus montaient à bord des autocars. Le 4 ou le 5 octobre 1994, MITAR RASEVIC a lui-même conduit 61 détenus au centre de détention de Kula. SAVO TODOVIC était présent lors du départ de ce dernier groupe de détenus à être échangés à Foca. Le car à bord duquel se trouvaient les détenus choisis pour l’échange a été arrêté à Kula et dirigé sur un motel à Miljevina. De concert avec Zoran Sekulovic, qui dirigeait alors le KP Dom, SAVO TODOVIC a participé à des pourparlers au motel de Miljevina, à l’issue desquels le car a été renvoyé à Kula.

ii) Fin août 1992, SAVO TODOVIC a lui-même supervisé le départ pour le Monténégro d’un groupe de 55 détenus à qui il a donné pour consigne de ne pas regarder par les fenêtres du car à peine de sanction. Toutefois, le car a été intercepté par les militaires et renvoyé au KP Dom. Le lendemain, 35 détenus âgés ou malades ont été emmenés en autocar et expulsés du KP Dom à Rozaj, au Monténégro. Le même jour, une vingtaine de prisonniers musulmans, qui devaient avec les 35 autres détenus être expulsés au Monténégro, ont été emmenés pour un prétendu échange à Gorazde. On ne les a jamais revus vivants.

iii) Le 17 septembre 1992 ou vers cette date, de 35 à 60 détenus ont été sortis de la prison prétendument pour cueillir des prunes. On ne les a jamais revus.

iv) Le 18 septembre 1992, SAVO TODOVIC a soustrait FWS-109 et G.K. à un groupe qui attendait d’être échangé devant le bâtiment administratif. Il leur a dit qu’il avait besoin d’eux pour une opération de déminage.

v) De juin 1992 à mars 1993, au moins 200 Musulmans et autres non-Serbes détenus au KP Dom ont été expulsés et transférés, à l’occasion de prétendus échanges, vers des destinations inconnues. On ne les a jamais revus vivants. La plupart de ces disparitions ont eu lieu entre août 1992 et octobre 1992.

20. Par ces actes et omissions, MITAR RASEVIC et SAVO TODOVIC ont commis les crimes suivants :

Chef 1 : persécutions pour des raisons politiques, raciales et religieuses, un CRIME CONTRE L’HUMANITÉ sanctionné par les articles 5 h), 7 1) et 7 3) du Statut du Tribunal.

CHEFS 2 à 5
(Tortures et sévices corporels)

21. D’avril 1992 à octobre 1994, MITAR RASEVIC et SAVO TODOVIC, agissant seuls ou de concert avec d’autres membres connus ou inconnus de l’entreprise criminelle commune, comme il est indiqué au paragraphe 7 du présent acte d’accusation, ont planifié, incité à commettre, ordonné, commis ou de toute autre manière aidé et encouragé à planifier, préparer ou exécuter les tortures et sévices corporels infligés aux Musulmans et autres non-Serbes de sexe masculin détenus au KP Dom. Les détails de ces tortures et sévices corporels sont exposés aux paragraphes suivants.

Sévices corporels à la cantine

22. En juin 1992, à une date indéterminée, le détenu E.G., handicapé d’un bras et d’une jambe et atteint d’épilepsie, s’est plaint des maigres rations de nourriture. En conséquence, trois gardiens non identifiés l’ont battu et l’ont roué de coups de pied.

23. À une date indéterminée, fin octobre ou début novembre 1992, en présence de gardiens non identifiés, des soldats non identifiés de Nevesinje ont agressé les détenus FWS-214 et FWS-113 alors que ces derniers quittaient la cantine.

Sévices arbitraires

24. Durant leur incarcération, les détenus ont été en butte à des sévices corporels arbitraires et inopinés de la part des gardiens ou de soldats étrangers au KP Dom, pour des raisons inconnues. Ces séances de sévices avaient lieu généralement le soir ou la nuit, lorsque des membres des unités militaires et paramilitaires locales pénétraient dans la prison. Les gardiens de la prison conduisaient alors les soldats dans les différentes cellules en vue de choisir les détenus appelés à subir les sévices. Ces sévices sont exposés aux paragraphes 25 et 26 et dans le Tableau A ci-joint.

25. Le 10 juin 1992, le détenu Z.B. a été violemment battu par un gardien du KP Dom. Z.B. a ensuite été placé dans une cellule d’isolement pendant un mois environ dans des conditions inhumaines. À la suite de ces sévices et mauvais traitements, Z.B. a perdu l’ouïe.

26. Le 11 juillet 1992, deux gardiens ont fait sortir le détenu FWS-71 de sa cellule, l’ont conduit dans une cellule d’isolement au quartier des détenus et l’ont battu avec différents objets pendant une vingtaine de minutes, jusqu’à ce qu’il s’évanouisse. Lorsqu’il a repris connaissance dans sa cellule, FWS-71 avait le corps couvert d’ecchymoses.

Tortures et sévices corporels infligés à titre de punition

27. Le détenu FWS-54 était chargé de distribuer la nourriture aux détenus. En lui confiant cette tâche, SAVO TODOVIC lui avait interdit de donner toute portion supplémentaire aux détenus. Le 8 août 1992, FWS-54 a donné à un détenu une tranche de pain en plus. En guise de punition, le témoin a été frappé à coups de pied et de matraque par un gardien, avant d’être placé dans une cellule d’isolement. MITAR RASEVIC a libéré FWS-54 quatre jours plus tard.

28. À une date indéterminée, pendant l’été 1992, un gardien, Dragomir Obrenovic (alias « Dragan » ou « Obren »), a battu les détenus A.M., F.M. et S. pour les punir d’avoir échangé des messages.

29. À une date indéterminée, en avril ou mai 1993, vers 6 heures, les gardiens Dragomir Obrenovic et Zoran Matovic ont fait sortir les détenus FWS-71, FWS-76, I.I. et D.C. des salles oů ils se trouvaient et les ont conduits dans les cellules d’isolement au quartier des détenus. Dans le couloir, ces gardiens ont battu les détenus pour les punir d’avoir volé du pain la veille à la cantine.

30. Le 8 juillet 1993, E.Z., un détenu musulman, a tenté de s’évader du KP Dom mais il a été repris le même jour. Ramené au KP Dom, il a été violemment battu par un gardien de la prison. Il a alors été placé dans une cellule d’isolement pendant 28 jours, au cours desquels SAVO TODOVIC l’a maltraité et battu à mains nues et à coups de chaîne. Il a également été battu par d’autres gardiens pendant ces 28 jours.

31. Le 8 juillet 1993, SAVO TODOVIC a informé tous les détenus que, à titre de punition collective pour l’évasion d’E.Z., toutes les rations alimentaires seraient réduites de moitié et que le travail et les soins médicaux seraient interdits. Ce régime a été appliqué pendant une période de 10 jours. FWS-73, FWS-110, FWS-144, FWS-210 et une dizaine d’autres détenus, tous compagnons de travail d’E.Z., ainsi que le détenu responsable de sa chambrée, ont été conduits au bâtiment administratif où ils ont été violemment battus par une dizaine de gardiens de la prison. FWS-73 a été battu par SAVO TODOVIC et d’autres et a reçu des coups de pied au bas-ventre pendant environ cinq minutes. FWS-110 a reçu des coups de pied si violents qu’il a perdu connaissance. En guise de punition supplémentaire, FWS-73, FWS-110, FWS-144, FWS-210 et d’autres détenus non identifiés ont été placés dans des cellules d’isolement pendant des périodes variables allant jusqu’à 15 jours.

Tortures et sévices corporels infligés au cours des interrogatoires

32. De concert avec les responsables de la prison, des membres de la police locale et de la police militaire interrogeaient les détenus après leur arrivée au KP Dom. Les interrogatoires portaient principalement sur la question de savoir si le détenu était membre du SDA, s’il possédait des armes ou s’il s’était battu contre les forces serbes. Pendant ou après les interrogatoires, les gardiens et policiers battaient souvent les détenus.

33. Le 24 mai 1992, la police militaire a arrêté et emmené au KP Dom FWS-03 et H.D., tous deux membres du SDA, ainsi que leur voisin H.S. Le même jour, cinq ou six membres de la police militaire les ont interrogés au KP Dom. Pour les forcer à passer aux aveux, les policiers les ont battus tous les trois pendant l’interrogatoire. Les coups étaient si violents que H.S. a perdu connaissance à deux reprises.

34. D’avril à juillet 1992, MITAR RASEVIC et SAVO TODOVIC, de concert avec d’autres responsables du KP Dom, ont institué une sorte de routine quotidienne pour les séances de sévices. Ils préparaient des listes de détenus appelés à être battus, surtout pendant les interrogatoires nocturnes. En règle générale, les détenus étaient choisis parmi les notables de Foca qui étaient soupçonnés de n’avoir pas dit la vérité lors des interrogatoires de jour.

35. À cette époque, les gardiens appelaient presque tous les soirs les détenus inscrits sur les listes et les conduisaient au bâtiment administratif pour de nouveaux interrogatoires et des séances de sévices.

36. Les gardiens et les soldats se livraient à des exactions sur les détenus au moyen d’armes de toutes sortes : matraques, crosses de fusil, couteaux et outils. Certains détenus retournaient dans leur cellule grièvement blessés. Certains ont connu ce sort à plusieurs reprises. De nombreux détenus ainsi désignés ne sont jamais revenus de ces séances et sont toujours portés disparus. Ces faits sont exposés plus en détail aux paragraphes 37 à 39 ci-après et dans le Tableau B ci-joint.

37. En juin ou en juillet 1992, à deux reprises au moins, des gardiens du KP Dom ont sauvagement torturé Zulfo Veiz, un ancien policier, et Nurko Nisic, ancien agent de l’administration municipale et membre du SDA. Par ailleurs, des gardiens du KP Dom ont violemment battu Salem Bico, un ancien policier. Ces trois détenus ont été ramenés dans leurs cellules contusionnés, couverts de sang et gricvement blessés.

38. En juin 1992, des gardiens du KP Dom ont torturé et battu le détenu S.M. qu’ils avaient confondu avec un autre dont le nom figurait sur la liste des détenus choisis pour subir des interrogatoires et des tortures. Ces gardiens ont battu S.M. et l’ont blessé avec un couteau. Ils ont menacé de lui enlever un œil. À ce moment, MITAR RASEVIC et SAVO TODOVIC sont entrés, ont constaté la méprise et ordonné aux gardiens de cesser de battre S.M. La victime a été reconduite dans sa cellule, grièvement blessée et couverte de sang.

39. Entre mai et juillet 1992, à deux reprises au moins, des gardiens du KP Dom et des membres de la police militaire ont torturé et battu le détenu A.S., qui a eu trois côtes cassées. En outre, des gardiens du KP Dom et des membres de la police militaire ont violemment battu Vahida Dzemal, un ancien policier, Enes Uzunovic, un membre du SDA, et E.C. Vahida Dzemal a reçu des coups si violents qu’il a eu la mâchoire cassée et a perdu plusieurs dents. E.C. a eu trois doigts cassés et le corps contusionné. Ensuite, les victimes ont été placées dans une cellule d’isolement pendant plusieurs jours, puis reconduites gricvement blessées dans leurs cellules. Enes Uzunovic et Vahida Dzemal ont été tués par la suite, comme il est exposé aux paragraphes 43 à 45 ci-aprcs.

40. Par les actes ou omissions énumérés aux paragraphes 27 à 39, MITAR RASEVIC et SAVO TODOVIC ont commis les crimes suivants :

Chef 2 : tortures, un CRIME CONTRE L’HUMANITÉ punissable aux termes des articles 5 f), 7 1) et 7 3) du Statut du Tribunal.

Chef 3 : tortures, une VIOLATION DES LOIS OU COUTUMES DE LA GUERRE reconnue par l’article 3 1) a) des Conventions de Genève de 1949 et punissable aux termes des articles 3, 7 1) et 7 3) du Statut du Tribunal.

41. Par les actes ou omissions exposés aux paragraphes 22 à 39, MITAR RASEVIC et SAVO TODOVIC ont commis les crimes suivants :

Chef 4 : actes inhumains, un CRIME CONTRE L’HUMANITÉ punissable aux termes des articles 5 i), 7 1) et 7 3) du Statut du Tribunal.

Chef 5 : traitement cruel, une VIOLATION DES LOIS OU COUTUMES DE LA GUERRE reconnue par l’article 3 1) a) des Conventions de Genève de 1949 et punissable aux termes des articles 3, 7 1) et 7 3) du Statut du Tribunal.

CHEFS 6 et 7
(Homicide intentionnel et assassinat)

42. D’avril 1992 à octobre 1994, MITAR RASEVIC et SAVO TODOVIC, agissant seuls ou de concert avec d’autres membres connus ou inconnus de l’entreprise criminelle commune, comme il est indiqué au paragraphe 7 du présent acte d’accusation, ont planifié, incité à commettre, ordonné, commis ou de toute autre manière aidé et encouragé à planifier, préparer ou exécuter les homicides intentionnels et assassinats dont ont été victimes des Musulmans et autres non-Serbes de sexe masculin détenus au KP Dom. Les détails de ces homicides intentionnels et assassinats sont exposés aux paragraphes suivants.

43. Entre juin et août 1992, les gardiens du KP Dom sélectionnaient des groupes de détenus d’après les listes établies par les responsables de la prison, MITAR RASEVIC et, en particulier, SAVO TODOVIC, et les emmenaient, un par un, dans une salle du bâtiment administratif. Là, il arrivait fréquemment que les gardiens et les soldats, y compris des membres de la police militaire, enchaînent le détenu, bras et jambes écartés, avant de le battre. Les gardiens et les soldats, y compris des membres de la police militaire, frappaient les détenus à coups de pied, de poing, de matraque en caoutchouc et de manche de hache. Durant ces séances, ils demandaient aux détenus où ceux-ci avaient caché leurs armes, ou encore ce qu’ils savaient au sujet de tiers.

44. Après certaines séances de sévices, les gardiens jetaient les détenus sur des couvertures, les enveloppaient dedans et les traînaient hors du bâtiment administratif.

45. Un nombre inconnu de détenus torturés et battus sont morts au cours de ces séances. Certains de ceux qui ont survécu à ces sévices ont été tués par balle ou ont succombé à leurs blessures dans les cellules d’isolement où ils étaient détenus. Les sévices et les tortures ont causé le décès des détenus énumérés dans le Tableau C ci-joint, ainsi que celui d’un nombre inconnu d’autres détenus non identifiés.

46. Par ces actes ou omissions, MITAR RASEVIC et SAVO TODOVIC ont commis les crimes suivants :

Chef 6 : assassinat, un CRIME CONTRE L’HUMANITÉ punissable aux termes des articles 5 a), 7 1) et 7 3) du Statut du Tribunal.

Chef 7 : meurtre, une VIOLATION DES LOIS OU COUTUMES DE LA GUERRE reconnue par l’article 3 1) a) des Conventions de Genève de 1949 et punissable aux termes des articles 3, 7 1) et 7 3) du Statut du Tribunal.

CHEFS 8 à 10

(Emprisonnement, actes inhumains et traitement cruel)

47. D’avril 1992 à octobre 1994, MITAR RASEVIC et SAVO TODOVIC, agissant seuls ou de concert avec d’autres membres connus ou inconnus de l’entreprise criminelle commune, comme il est indiqué au paragraphe 7 du présent acte d’accusation, ont planifié, incité à commettre, ordonné, commis ou de toute autre manière aidé et encouragé à planifier, préparer ou exécuter la détention de Musulmans et autres non-Serbes de sexe masculin au KP Dom dans des conditions inhumaines. Les détails de ces cas d’emprisonnement, d’actes inhumains et de traitement cruel sont exposés aux paragraphes suivants.

48. Les conditions de détention au KP Dom étaient atroces. Pendant leur détention, les prisonniers étaient enfermés dans leurs cellules, sauf lorsqu’ils devaient se mettre en rangs pour aller manger à la cantine ou effectuer les tâches qui leur étaient assignées. Après avril 1992, les cellules étaient surpeuplées et les équipements pour le couchage et l’hygiène insuffisants. Les détenus recevaient des rations de famine et ne disposaient pas de vêtements de rechange. La prison n’était pas chauffée pendant l’hiver. Les détenus ne recevaient pas les soins médicaux nécessaires. Les conditions de détention au KP Dom ont gravement altéré la santé de nombreux détenus. Faute de soins médicaux appropriés, Enes Hadzic, un détenu de 40 ans, est mort en avril ou mai 1992 d’un ulcère perforé. D’autres faits sont énumérés dans le Tableau D ci-joint.

49. Les prisonniers pouvaient entendre les détenus être torturés, frappés et exécutés, comme il est précisé aux paragraphes 22 à 39 et 43 du présent acte d’accusation. Les cellules d’isolement étaient utilisées comme instruments de terreur et de menace. De ce fait, les détenus vivaient dans la peur constante d’être la prochaine victime. En raison de ces pressions psychologiques, certains détenus devenaient suicidaires, alors que d’autres devenaient indifférents à leur propre sort. La plupart, si ce n’est la totalité, des détenus souffraient de dépression et gardent encore les séquelles physiques et psychologiques de leur détention au KP Dom. Ces faits sont exposés dans le Tableau D ci-joint.

50. Par ces actes et omissions, MITAR RASEVIC et SAVO TODOVIC ont commis les crimes suivants :

Chef 8 : emprisonnement, un CRIME CONTRE L’HUMANITÉ punissable aux termes des articles 5 e), 7 1) et 7 3) du Statut du Tribunal.

Chef 9 : actes inhumains, un CRIME CONTRE L’HUMANITÉ punissable aux termes des articles 5 i), 7 1) et 7 3) du Statut du Tribunal.

Chef 10 : traitement cruel, une VIOLATION DES LOIS OU COUTUMES DE LA GUERRE reconnue par l’article 3 1) a) des Conventions de Genève de 1949 et punissable aux termes des articles 3, 7 1) et 7 3) du Statut du Tribunal.

CHEFS 11 et 12
(Réduction en esclavage)

51. De mai 1992 à octobre 1994, MITAR RASEVIC et SAVO TODOVIC, agissant seuls ou de concert avec d’autres membres connus ou inconnus de l’entreprise criminelle commune, comme il est indiqué au paragraphe 7 du présent acte d’accusation, ont planifié, incité à commettre, ordonné, commis ou de toute autre manière aidé et encouragé à planifier, préparer ou exécuter la réduction en esclavage de Musulmans et autres non-Serbes de sexe masculin détenus au KP Dom. SAVO TODOVIC a joué un rôle essentiel dans les travaux effectués par les détenus. Il était chargé de répartir les tâches entre les détenus et les supervisait au quotidien. Les détails de ces cas de réduction en esclavage sont exposés aux paragraphes suivants.

52. De mai 1992 à octobre 1994, des détenus ayant des compétences particulières ont été astreints à travailler à l’intérieur et à l’extérieur de la prison. Pour faciliter le travail forcé en dehors du KP Dom, SAVO TODOVIC a coopéré avec les autorités civiles et militaires de l’extérieur, notamment en livrant des détenus aux militaires. Des responsables du KP Dom, y compris MITAR RASEVIC et, en particulier, SAVO TODOVIC, assignaient certaines tâches aux détenus. Les noms des détenus astreints à un travail forcé figurent dans le Tableau E ci-joint.

53. Les gardiens faisaient sortir certains détenus de leurs cellules et les emmenaient sur les lieux de travail ou bien les confiaient à des autorités indépendantes de la hiérarchie de la prison pour effectuer certains travaux. En règle générale, les détenus étaient contraints de travailler tous les jours de 7 heures à 15 ou 16 heures au moins. Le travail des détenus n’était ni rémunéré ni volontaire. Même les détenus malades ou blessés étaient contraints par SAVO TODOVIC de travailler. Ils travaillaient sous la surveillance armée des gardiens de la prison ou de soldats serbes.

54. À l’intérieur de la prison, les détenus devaient travailler dans la fabrique de meubles et dans l’atelier de serrurerie et de mécanique. À l’atelier, ils devaient réparer les véhicules de l’armée. Les travaux effectués par les détenus étaient ardus et physiquement épuisants.

55. À l’extérieur de la prison, les détenus étaient contraints d’effectuer des travaux agricoles à Brioni, une dépendance de la prison, de travailler dans des fabriques et à la mine de Miljevina, ou bien de dégager les gravats des bâtiments endommagés en divers endroits de Foca. MITAR RASEVIC était présent lorsque les détenus effectuaient un travail forcé à la ferme. Pendant l’hiver 1992-1993, les détenus ont été contraints de réparer la résidence privée de Milorad Krnojelac, directeur du KP Dom, d’installer un bar dans la maison d’un de ses fils et de meubler le magasin d’un autre de ses fils.

56. Le 18 septembre 1992, un gardien du KP Dom a fait sortir FWS-109 et G.K., prétendument pour un échange de prisonniers. SAVO TODOVIC a en fait remis les deux détenus à des représentants d’autorités militaires étrangères à la prison, qui les ont conduits au poste de police de Kalinovik afin de servir de chauffeurs et aider ainsi à la détection des mines terrestres. De septembre 1992 à mars 1993, au moins à cinq reprises, ils ont dû rouler en tête des convois serbes pour détecter les mines terrestres. Les détenus étaient soumis à une pression intense, conscients que chaque jour qu’ils passaient à travailler pouvait être le dernier.

57. Par ces actes ou omissions, MITAR RASEVIC et SAVO TODOVIC ont commis les crimes suivants :

Chef 11 : réduction en esclavage, un CRIME CONTRE L’HUMANITÉ punissable aux termes des articles 5 c), 7 1) et 7 3) du Statut du Tribunal.

Chef 12 : esclavage, une VIOLATION DES LOIS OU COUTUMES DE LA GUERRE reconnue par la Convention relative à l’esclavage et le droit international coutumier, et punissable aux termes des articles 3, 7 1) et 7 3) du Statut du Tribunal.

ALLÉGATIONS JURIDIQUES DE PORTÉE GÉNÉRALE

58. Durant toute la période couverte par le présent acte d’accusation, la République de Bosnie-Herzégovine, sur le territoire de l’ex-Yougoslavie, était le théâtre d’un conflit armé.

59. Durant toute la période couverte par le présent acte d’accusation, MITAR RASEVIC et SAVO TODOVIC étaient tenus de se conformer aux lois ou coutumes régissant la conduite de la guerre.

60. Pour chacun des chefs de crime contre l’humanité, les actes ou omissions faisaient partie d’une attaque généralisée ou systématique, dirigée contre une population civile et, plus particulièrement, contre la population musulmane et croate de la municipalité de Foca.

 

Le Procureur
_______________
Carla Del Ponte

Fait le 24 mars 2006
La Haye (Pays-Bas)

[Sceau du Bureau du Procureur]

TABLEAU A

LISTE DES VICTIMES DE SÉVICES ARBITRAIRES

DATE

VICTIME

HEURE

LIEU

AUTEUR

Nom

Fonction

Entre le 20 avril et juin 1992

C. M.

La nuit, à maintes reprises

Quartier des détenus, cellule 15

SAVIC, Jovo

Gardien

Vers le 22 ou 23 avril 1992

D. A.

La nuit

Cellule du quartier des détenus

Inconnu

Gardien

Entre mai et octobre 1992

FWS-198

Inconnu

Couloir du quartier des détenus

MARIC, prénom inconnu

Gardien

Entre avril et août 1992

K. K.

Le soir

Cellule de détenus, près de la cellule 13

Inconnu

Gardiens ou soldats

Entre avril et août 1992

K., prénom inconnu

Le soir

Cellule de détenus, près de la cellule 13

Inconnu

Gardiens ou soldats

À partir de mai 1992

FWS-82

Après le repas, à plusieurs reprises

De retour de la cuisine vers le quartier des détenus

VUKOVIC, Radovan

Gardien

DATE

VICTIME

HEURE

LIEU

AUTEUR

Nom

Fonction

28 juin 1992

B., prénom inconnu (fils de S.)

Le soir

Bâtiment administratif, rez-de-chaussée

Inconnu

Gardiens et/ou soldats, y compris police militaire

Entre le 24 juin 1992 et le début août 1992

D. (probablement) R.

Le soir

Bâtiment administratif, r.-de-c.

Inconnu

Police militaire, y compris les voisins de la victime

De juin 1992 à la mi-juillet 1992

D. N.

Après le repas de midi ou du soir

Bâtiment administratif, r.-de-c.

Inconnu

Gardiens et/ou soldats, y compris police militaire

Entre mai 1992 et août 1992

DZAMALIJA, Juso

Le soir

Bâtiment administratif, r.-de-c.

BURILO, Milenko,

OBRENOVIC, Dragomir, alias Dragan ou Obren,

et d’autres inconnus

Gardiens et soldats, y compris police militaire

De juin 1992 à la mi-juillet 1992

D. H.

Après le repas de midi ou du soir

Bâtiment administratif, r.-de-c

BURILO, Milenko

OBRENOVIC, Dragomir, alias Dragan ou Obren

et d’autres inconnus

Gardiens et soldats, y compris police militaire

Entre la fin mai 1992 et le début juillet 1992

DZELILOVIC, Kemo

Le soir

Bâtiment administratif,

r.-de-c.

BURILO, Milenko

MATOVIC, Zoran

OBRENOVIC, Dragomir, alias Dragan ou Obren

et d’autres inconnus

Gardiens et soldats, y compris police militaire

Entre mai 1992 et août 1992

DZENDUSIC, Ramo

Le soir

Bâtiment administratif,

r.-de-c.

BURILO, Milenko

OBRENOVIC, Dragomir, alias Dragan ou Obren

et d’autres inconnus

Gardiens et soldats, y compris police militaire

Entre le 24 mai 1992 et le 7 juillet 1992

F. E.

Le soir

Bâtiment administratif,

r.-de-c.

BURILO, Milenko

OBRENOVIC, Dragomir, alias Dragan ou Obren

et d’autres inconnus

Gardiens et soldats, y compris police militaire

Entre le 26 juin 1992 et le 14 juillet 1992

G. A.

Le soir

Bâtiment administratif,

r.-de-c.

Inconnu

Gardiens et/ou soldats, y compris police militaire

Avant juin/juillet 1992

H., prénom inconnu

Le soir

Bâtiment administratif,

r.-de-c.

Inconnu

Gardiens et/ou soldats, y compris police militaire

Avant juin/juillet 1992

H., prénom inconnu

Le soir

Bâtiment administratif,

r.-de-c.

Inconnu

Gardiens et/ou soldats, y compris police militaire

Entre mai 1992 et août 1992

HODZIC, Nail

Le soir

Bâtiment administratif,

r.-de-c.

BURILO, Milenko

OBRENOVIC, Dragomir, alias Dragan ou Obren

et d’autres inconnus

Gardiens et soldats, y compris police militaire

Entre le 26 juin 1992 et le 14 juillet 1992

I. K.

Le soir

Bâtiment administratif,

r.-de-c.

Inconnu

Gardiens et/ou soldats, y compris police militaire

Entre le 24 mai 1992 et le 7 juillet 1992

I. M.

Le soir

Bâtiment administratif,

r.-de-c.

Inconnu

Gardiens et/ou soldats, y compris police militaire

Juin 1992

K. I.

Après le repas de midi ou du soir

Bâtiment administratif,

r.-de-c.

Inconnu

Gardiens et/ou soldats, y compris police militaire

Entre mai 1992 et août 1992

KONJO, Halim

Le soir

Bâtiment administratif,

r.-de-c.

BURILO, Milenko

OBRENOVIC, Dragomir, alias Dragan ou Obren

et d’autres inconnus

Gardiens et soldats, y compris police militaire

Entre mai 1992 et octobre 1992

KULOGLIJA, Mustafa

Après 19 heures

Bâtiment administratif,

r.-de-c.

BURILO, Milenko

OBRENOVIC, Dragomir, alias Dragan ou Obren

et d’autres inconnus

Gardiens et soldats, y compris police militaire

De la mi-mai à juillet 1992

M. F.

Le soir

Bâtiment administratif,

r.-de-c.

Inconnu

Gardiens et/ou soldats, y compris police militaire

De juin 1992 à la mi-juillet 1992

M. E.

Après le repas de midi ou du soir

Bâtiment administratif,

r.-de-c.

Inconnu

Gardiens et/ou soldats, y compris police militaire

De juin 1992 à la mi-juillet 1992

R. H.

Après le repas de midi ou du soir

Bâtiment administratif,

r.-de-c.

Inconnu

Gardiens et/ou soldats, y compris police militaire

De mai 1992 à août 1992

RIKALO, Husko

Le soir

Bâtiment administratif,

r.-de-c.

BURILO, Milenko

OBRENOVIC, Dragomir, alias Dragan ou Obren

et d’autres inconnus

Gardiens et/ou soldats, y compris police militaire

De mai 1992 à la fin août 1992

RIKALO, les deux frères

De jour

Salles d’in-terrogatoire, bâtiment administratif

VLADICIC, prénom inconnu

Inspecteur de police

Fin juin 1992

S. H.

Le soir, à plusieurs reprises

Bâtiment administratif,

r.-de-c.

Drakul, alias Zliko

KRNOJELAC, prénom inconnu

MILETIC, prénom inconnu

« Pikolo »

Gardiens et soldats, y compris police militaire

Avant juin/juillet 1992

S. H.

Le soir

Bâtiment administratif,

r.-de-c.

Inconnu

Gardiens et/ou soldats, y compris police militaire

Entre mai 1992 et octobre 1992

S. M.

Le soir

Bâtiment administratif,

r.-de-c.

BURILO, Milenko

OBRENOVIC, Dragomir, alias Dragan ou Obren

et d’autres inconnus

Gardiens et/ou soldats, y compris police militaire

Entre février 1993

et mai 1993

FWS-159

Inconnue, à une dizaine de reprises

Quartier des détenus, cellule d’isolement

MATOVIC, Zoran

Gardien

Entre avril et août 1992

VEIZ, Munib

Après 18 heures,

à plusieurs reprises

Salles d’in-terrogatoire, bâtiment administratif

VLADICIC, Zoran

KOPRIVICA, Miso

GASOVIC, Petko

STAROVIC, Vojislav

et d’autres inconnus

Police et policiers militaires

VICTIME

1

ALTOKA, Alija

2

BICO, Salem

3

CANKUSIC, Abdurahman

4

CANKUSIC, Refik

5

CEDIC, Enko

6

DZELILOVIC Kemal

7

DZEMAL, Vahida

8

DZENDUSIC, Ramo

9

GRANOV, Adil

10

IVANCIC, Mate

11

KISELICA, Esad

12

KONJO, Halim

13

KRAJCIN, Adil

14

KULOGLIJA, Mustafa

15

MANDZO, Fuad

16

MARINOVIC, Krunoslav

17

NISIC, Nurko

18

RAMOVIC, Hamid

19

RIKALO, Husein

20

RIKALO, Mithat

21

RIKALO, Zaim

22

SORO, Seval

23

TULEK, Kemal

24

UZUNOVIC, Enes

25

VEIZ, Munib

26

VEIZ, Zulfo

DATES

VICTIME

EFFETS PHYSIQUES OU PSYCHOLOGIQUES

EFFETS DURABLES

De mai 1992 à août 1993

FWS-214

Symptômes physiques de malnutrition et syndrome de stress post-traumatique.

Oui

De mai 1992 à août 1993

B. E. (schizophrène)

Automutilation due à l’absence de traitement et au stress.

Oui

De mai 1992 à août 1993

FWS-66

Diabète, hypertension et stress, à peine capable de marcher – douleur aux jambes et effets psychologiques de traumatismes.

De mai 1992 à août 1993

FWS-109

Symptômes physiques de malnutrition entraînant notamment une hypertension.

De mai 1992 à août 1993

FWS-71

Symptômes physiques de malnutrition, exposition au froid extrême et effets psychologiques de traumatismes, troubles rénaux dus aux conditions de détention et aux sévices.

Oui

À partir de février 1993

D. E.

Conséquences physiques de blessures non soignées.

De mai 1992 à août 1993

FWS-78

Dépression due aux conditions de détention.

Oui

De mai 1992 à août 1993

FWS-139

Symptômes physiques de malnutrition et effets psychologiques des violences subies.

De mai 1992 à août 1993

FWS-162

Symptômes physiques de malnutrition.

D’avril 1992 à août 1993

FWS-182

Malnutrition, la victime souffrait de troubles gastriques qui ont empiré au cours de la détention.

Oui

De mai 1992 à août 1993

FWS-209

Symptômes physiques de malnutrition.

De mai 1992 à août 1993

FWS-111

Symptômes physiques de malnutrition et syndrome de stress post-traumatique.

Oui

À partir du 23 juin 1993

KUNOVAC, Omer

Mort consécutive à une séance de sévices faute d’intervention chirurgicale.

De mai 1992 à août 1993

FWS-144 et nombre d’autres détenus

Symptômes physiques de malnutrition et d’exposition au froid extrême et à des conditions insalubres ; cauchemars récurrents.

Oui

De mai 1992 à août 1993

FWS-85

et d’autres détenus

Symptômes physiques de malnutrition et d’exposition au froid extrême, notamment mains et genoux enflés.

De mai 1992 à août 1993

FWS-104

Symptômes physiques et psychologiques dus à la malnutrition et aux violences subies en détention.

Oui

D’octobre 1992 à décembre 1992

FWS-215

Est tombé malade à cause du froid qui régnait dans la cellule d’isolement.

De juin 1992 à août 1993

FWS-86

Effets physiques, notamment une crise cardiaque en juin 1992, et psychologiques.

Oui

D’avril 1992 à juin 1993

FWS-82

Est devenu dépressif, suicidaire ; troubles rénaux, douleurs à la hanche et au dos dus au froid et à la malnutrition.

Oui

DATE (début)

DATE (fin)

VICTIME

OBSERVATIONS

juillet 1992

octobre 1992

A. U.

mai 1992

octobre 1994

FWS-89

A travaillé notamment à la mine de Miljevina

juin ou juillet 1992

octobre 1994

FWS-65

juin ou juillet 1992

octobre 1994

B. M.

mai 1992

octobre 1994

B. O.

mai 1992

octobre 1994

B., prénom inconnu

A travaillé notamment à la propriété de Milorad Krnojelac

mai 1992

octobre 1994

FWS-66

septembre 1992

mars 1993

FWS-109

A notamment conduit des véhicules sur la ligne de front

mai 1993

octobre 1994

FWS-71

mai 1992

octobre 1994

D. M.

juillet 1992

octobre 1994

G. A.

juillet 1992

octobre 1994

FWS-138

octobre 1992

octobre 1994

H. A.

A travaillé notamment à la mine de Miljevina

juillet 1992

octobre 1994

FWS-78

A travaillé notamment à la mine de Miljevina

juillet 1992

octobre 1994

FWS-77

juillet 1992

octobre 1994

H. M.

début 1993

août 1994

FWS-182

juin 1992

novembre 1992

FWS-141

A notamment conduit des véhicules sur la ligne de front

juillet 1992

octobre 1994

I. S.

juillet 1992

hiver 1992/1993

J. A.

A travaillé notamment à la propriété de Milorad Krnojelac

juin ou juillet 1992

octobre 1994

K., prénom inconnu

juin ou juillet 1992

16 août 1994

FWS-142

A travaillé notamment à la mine de Miljevina

juillet 1992

octobre 1994

K. S.

juillet 1992

août 1992

FWS-48

juillet 1992

décembre 1993

KUBAT, Sefko

septembre 1992

mars 1993

K. G.

A notamment conduit des véhicules sur la ligne de front

juillet 1992

octobre 1994

FWS-144

A travaillé notamment à la propriété de Milorad Krnojelac

mai 1992

octobre 1994

FWS-210

A travaillé notamment à la propriété de Milorad Krnojelac

août 1993

octobre 1994

FWS-85

mai 1992

octobre 1994

M., prénom inconnu

A travaillé notamment à la propriété de Milorad Krnojelac

juillet 1992

octobre 1994

M. R. ou A.

juillet 1992

octobre 1994

M. S.

septembre 1992

octobre 1994

P. J.

A travaillé notamment à la mine de Miljevina

mai 1992

octobre 1994

FWS-73

juillet 1992

octobre 1994

R. T.

A travaillé notamment à la mine de Miljevina

juin ou juillet 1992

16 août 1994

S. D.

A travaillé notamment à la mine de Miljevina

mai 1992

juin 1993

FWS-82

mai 1992

octobre 1994

FWS-83

A travaillé notamment à la propriété de Milorad Krnojelac

mai 1992

octobre 1994

FWS-213

A travaillé notamment à la propriété de Milorad Krnojelac

juin ou juillet 1992

16 août 1994

Z. A.

A travaillé notamment à la mine de Miljevina

juillet 1992

octobre 1994

FWS-216

A travaillé notamment à la propriété de Milorad Krnojelac et à la mine de Miljevina