LE TRIBUNAL PÉNAL INTERNATIONAL POUR L’EX-YOUGOSLAVIE

Affaire n° IT-97-25/1-PT

 

LE PROCUREUR DU TRIBUNAL

CONTRE

MITAR RASEVIC

ACTE D’ACCUSATION MODIFIÉ

Le Procureur du Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie, en vertu des pouvoirs que lui confère l’article 18 du Statut du Tribunal accuse :

MITAR RASEVIC

de CRIMES CONTRE L’HUMANITÉ et de VIOLATIONS DES LOIS OU COUTUMES DE LA GUERRE, comme il est exposé ci-après :

L’ACCUSÉ

1. MITAR RASEVIC, fils de Djordje, né le 15 novembre 1949 dans le village de Cagust (municipalité de Foca) était professeur de sociologie et résidait à Foca. Avant, pendant et après le conflit, MITAR RASEVIC commandait les gardiens du Kazneno-Popravni Dom de Foca (« KP Dom »).

RESPONSABILITÉ PÉNALE INDIVIDUELLE

Article 7 1) du Statut du Tribunal

2. MITAR RASEVIC est individuellement pénalement responsable de crimes tombant sous le coup des articles 3 et 5 du Statut du Tribunal et décrits dans le présent acte d’accusation. L’accusé a planifié, incité à commettre, ordonné, commis ou de toute autre manière aidé et encouragé à planifier, préparer ou exécuter tout acte ou omission exposé ci-après. Par le terme « commettre », le Procureur n’entend pas suggérer que l’accusé a matériellement commis tous les crimes qui lui sont imputés personnellement. L’accusé n’a à répondre que de l’exécution des crimes suivants : persécutions (chef 1) par emprisonnement et détention prolongés et systématiques Sparagraphe 17 a)C, instauration et maintien de conditions de détention inhumaines Sparagraphe 17 b)C, travaux forcés prolongés et fréquents Sparagraphe 17 e)C et expulsion et transfert forcé Sparagraphe 17 f)C ; emprisonnement (chef 8), actes inhumains (chef 9), traitement cruel (chef 10), réduction en esclavage (chef 11) et esclavage (chef 12). Dans le présent acte d’accusation, le terme « commettre » recouvre la participation de l’accusé à une entreprise criminelle commune comme coauteur ou, à défaut, comme complice.

3. MITAR RASEVIC a participé à une entreprise criminelle commune qui a vu le jour en avril 1992 au plus tard et s’est poursuivie au moins jusqu’en octobre 1994. L’objectif de l’entreprise criminelle commune était de soumettre les civils, Musulmans et autres non-Serbes, originaires de Foca et de la région alentour à des conditions de détention inhumaines, à des sévices corporels, à la torture, à l’esclavage, à des expulsions et à des transferts forcés. Les méthodes et la conduite de l’entreprise criminelle commune ont évolué au fil du temps. La réduction en esclavage des détenus, décrite au paragraphe 49 ci-après, n’a commencé qu’en mai 1992. Les meurtres systématiques de détenus, décrits au paragraphe 41 ci-après, ne se sont produits que pendant la période de juin à août 1992.

4. Les crimes énumérés aux chefs 1 à 5 et 8 à 12 du présent acte d’accusation entraient dans le cadre de l’entreprise criminelle commune et MITAR RASEVIC partageait l’intention soit de perpétrer les crimes considérés, soit de servir de concert avec d’autres personnes un système commun de mauvais traitements. Les faits reprochés aux chefs 6 et 7 étaient la conséquence naturelle et prévisible de la réalisation des objectifs de l’entreprise criminelle commune, et l’accusé savait que c’était là une conséquence possible de l’exécution de ladite entreprise.

5. À défaut, les crimes énumérés aux chefs 8 à 10 du présent acte d’accusation entraient dans le cadre de l’entreprise criminelle commune et MITAR RASEVIC partageait l’intention soit de perpétrer les crimes considérés, soit de servir de concert avec d’autres personnes un système commun de mauvais traitements. Les faits reprochés aux chefs 1 à 7, 11 et 12 étaient la conséquence naturelle et prévisible de la réalisation des objectifs de l’entreprise criminelle commune, et l’accusé savait que c’était là une conséquence possible de l’exécution de ladite entreprise.

6. Un certain nombre de personnes ont participé à diverses époques à cette entreprise criminelle commune, et chaque participant ou coauteur a joué en son sein un rôle qui a contribué de manière notable à la réalisation de son objectif global. Ont notamment participé à l’entreprise criminelle commune Milorad Krnojelac, Savo Todovic et d’autres membres connus ou inconnus du personnel pénitentiaire, de l’Armée populaire yougoslave (« JNA »), de la Défense territoriale serbe (« TO »), des forces armées de la Republika Srpska (« VRS »), des forces de police de la Republika Srpska (« RS »), et des formations paramilitaires serbes.

7. MITAR RASEVIC, agissant seul ou de concert avec d’autres membres de l’entreprise criminelle commune, a participé à celle-ci de la façon suivante :

a) En tant que chef des gardiens du KP Dom, il avait pour tâche principale de superviser au moins 37 gardiens de la prison. Il exerçait un contrôle effectif sur les gardiens du KP Dom et il lui appartenait notamment d’établir les tableaux de service et de répartir les tâches.

b) En tant que membre du personnel d’encadrement de la prison du KP Dom et en sa qualité de chef des gardiens, il a contribué à instaurer et maintenir dans le centre de détention les conditions décrites aux paragraphes 46 et 47 ci-après. Il était en rapport avec les autorités militaires et politiques extérieures à la prison, en particulier pour les échanges de prisonniers.

c) Il était responsable des cellules d’isolement et avait le pouvoir d’en extraire les détenus, ce qu’il s’est gardé de faire à quelques exceptions près.

d) Il est pour une part à l’origine de mauvais traitements généralisés systématiques le jour, notamment de tortures et de sévices corporels ; les gardiens placés sous ses ordres choisissaient alors des détenus dans leurs cellules et les emmenaient dans des salles d’interrogatoire où ils étaient sévèrement molestés alors qu’on les interrogeait.

e) Il est pour une part à l’origine de mauvais traitements généralisés systématiques le soir ; les gardiens placés sous ses ordres choisissaient alors des détenus dans leurs cellules et les emmenaient dans des salles spéciales du bâtiment administratif où des gardiens de la prison ainsi que des policiers et des militaires venus du dehors se livraient sur eux à des exactions et notamment à des sévices corporels et à des tortures, dont l’issue était parfois fatale.

f) Il a participé à l’instauration et au maintien d’un système dans lequel les gardiens battaient les détenus pour toute violation, même mineure, du règlement interne de la prison, cependant que des punitions collectives étaient infligées pour les agissements de tel ou tel détenu.

g) Il a encouragé et légitimé les mauvais traitements infligés aux détenus en s’abstenant d’empêcher les sévices corporels et autres actes inhumains qui avaient lieu en sa présence.

h) Il a contribué à entretenir un climat de terreur au KP Dom en menaçant les détenus de coups et blessures graves s’ils tentaient de s’évader.

i) Il a participé à l’instauration d’un système de travail forcé soit en choisissant lui-même des détenus pour les travaux dont il assurait la surveillance à l’intérieur ou à l’extérieur du KP Dom, soit en en chargeant des gardiens. Pour faciliter le travail forcé en dehors du KP Dom, il a coopéré avec les autorités militaires, notamment en leur envoyant des détenus.

j) Il a participé au transfert forcé et à l’expulsion de détenus de la prison à l’occasion de prétendus échanges en désignant ceux qui seraient transférés hors de la municipalité de Foca, notamment au Monténégro et en Serbie. Il a été impliqué dans la disparition de détenus qui devaient être échangés mais que l’on n’a jamais revus vivants.

8. MITAR RASEVIC a sciemment et délibérément participé à l’entreprise criminelle commune ainsi qu’il est dit plus haut. Il partageait l’intention et l’état d’esprit nécessaires pour commettre chacun des crimes visés aux chefs 1 à 5 et 8 à 12 du présent acte d’accusation (première catégorie d’entreprise criminelle commune) ou avait connaissance du système concerté de mauvais traitements existant à la prison du KP Dom, système qu’il a sciemment et délibérément servi par son comportement (deuxième catégorie d’entreprise criminelle commune : chefs 1 à 5 et 8 à 12) et, s’agissant des chefs 6 et 7, était conscient des conséquences prévisibles de ses actes et de ceux des autres participants (troisième catégorie d’entreprise criminelle commune). À défaut, il partageait l’intention et l’état d’esprit nécessaires pour commettre les crimes visés aux chefs 8 à 10 (première catégorie d’entreprise criminelle commune) ou avait connaissance du système concerté de mauvais traitements opérant à la prison du KP Dom, système qu’il a sciemment et délibérément servi par son comportement (deuxième catégorie d’entreprise criminelle commune : chefs 8 à 10) et, s’agissant des chefs 1 à 7, 11 et 12, était conscient des conséquences prévisibles de ses actes et de ceux des autres participants (troisième catégorie d’entreprise criminelle commune). À ce titre, l’accusé est pénalement individuellement responsable de ces crimes au regard de l’article 7 1) du Statut du Tribunal, de même qu’il en est responsable au regard de ce même article, pour les avoir planifiés, avoir incité à les commettre, les avoir ordonnés, commis matériellement ou pour avoir de toute autre manière aidé et encouragé à les planifier, préparer ou exécuter.

Article 7 3) du Statut du Tribunal

9. Lorsqu’il exerçait les fonctions de chef des gardiens de la prison, MITAR RASEVIC était également — ou à défaut — pénalement responsable, en sa qualité de supérieur hiérarchique, des actes de ses subordonnés aux termes de l’article 7 3) du Statut du Tribunal. Un supérieur est responsable des actes de ses subordonnés s’il savait ou avait des raisons de savoir que ces derniers s’apprêtaient à commettre ces actes ou l’avaient fait, et s’il n’a pas pris les mesures nécessaires et raisonnables pour empêcher que lesdits actes ne soient commis, ou en punir les auteurs.

CHEFS D’ACCUSATION

CHEF 1
(Persécutions)

10. D’avril 1992 à octobre 1994, MITAR RASEVIC, agissant seul ou de concert avec d’autres membres connus ou inconnus de l’entreprise criminelle commune, comme il est indiqué au paragraphe 6 de l’acte d’accusation, a planifié, incité à commettre, ordonné, commis ou de toute autre manière aidé et encouragé à planifier, préparer ou exécuter la persécution de détenus, Musulmans et autres non-Serbes de sexe masculin, au KP Dom. Les détails de ces persécutions sont exposés aux paragraphes suivants.

11. La ville et la municipalité de Foca se situent en Bosnie-Herzégovine, au sud-est de Sarajevo, près de la frontière séparant la Serbie du Monténégro. Selon le recensement de 1991, Foca comptait 40 513 habitants, dont 51,6 % de Musulmans, 45,3 % de Serbes et 3,1 % d’autres origines.

12. Le 7 avril 1992, les forces militaires serbes, constituées par la JNA, les unités locales de la TO serbe et les paramilitaires serbes venus de Bosnie-Herzégovine et d’ailleurs, ont commencé à prendre le contrôle de la ville de Foca, opération qu’elles ont mené à bien le 16 ou le 17 avril 1992. Le siège des villages voisins s’est poursuivi jusqu’à la mi-juillet 1992.

13. Dès que les forces serbes se sont rendues maîtresses de certains quartiers de Foca, la police militaire, accompagnée de soldats originaires ou non de la région, a commencé à arrêter des Musulmans et d’autres habitants non serbes. Jusqu’à la mi-juillet 1992, les autorités serbes ont continué à effectuer des rafles et à arrêter des villageois musulmans sur tout le territoire de la municipalité. Les autorités serbes ont séparé les hommes des femmes et illégalement détenu des milliers de Musulmans et autres non-Serbes.

14. À partir du 14 avril 1992 ou vers cette date, les autorités civiles et militaires serbes ont commencé à utiliser le KP Dom comme centre de détention principal pour les Musulmans et autres non-Serbes. Le complexe pénitentiaire était entouré d’un mur de trois mètres de haut, surmonté de fils de fer barbelés et de miradors équipés de mitrailleuses. Le périmètre interne était miné. Les soldats et les gardiens de la prison surveillaient les détenus depuis les miradors et effectuaient régulièrement des rondes. Les détenus étaient logés dans un bâtiment de quatre étages qui comprenait des cellules communes et des cellules d’isolement de trois mètres sur trois.

15. Les détenus étaient pour la plupart des hommes musulmans. Il se trouvait parmi eux des intellectuels, des médecins, des journalistes, des membres du SDA (Parti de l’action démocratique) et quelques Serbes qui avaient essayé de se soustraire au service militaire. Les détenus serbes étaient séparés des détenus non serbes, et leurs conditions de détention étaient nettement meilleures que celles de ces derniers. En raison des arrestations incessantes, la prison, surpeuplée durant les premiers mois, a regroupé un temps plus de 760 détenus. Pendant le reste de l’année 1992, le nombre de détenus dans le camp était approximativement de 600. La majorité des détenus a été échangée, libérée ou a disparu en 1992 et 1993. Le KP Dom a fonctionné comme centre de détention jusqu’au 5 octobre 1994.

 

16. La plupart, si ce n’est la totalité, des détenus étaient des civils qui n’étaient accusés d’aucun crime. Il s’agissait principalement d’hommes musulmans âgés de 16 à 80 ans, parmi lesquels se trouvaient des handicapés mentaux et physiques ainsi que de grands malades.

17. Les persécutions pour des raisons politiques, raciales ou religieuses auxquelles MITAR RASEVIC a pris part ont revêtu notamment les formes suivantes :

a) l’emprisonnement et la détention prolongés et systématiques, au KP Dom, de civils de sexe masculin, Musulmans et autres non-Serbes, habitant la municipalité de Foca et ses environs ;

b) l’instauration et le maintien de conditions de détention inhumaines pour les civils de sexe masculin, Musulmans et autres non-Serbes, emprisonnés au centre de détention du KP Dom, comme il est exposé aux paragraphes 46 et 47 ci-après ;

c) les tortures et sévices corporels répétés, infligés aux détenus de sexe masculin, Musulmans et autres non-Serbes, emprisonnés au KP Dom, comme il est exposé aux paragraphes 20 à 37 ci-après ;

d) les nombreux meurtres de civils de sexe masculin, Musulmans et autres non-Serbes, emprisonnés au KP Dom, comme il est exposé aux paragraphes 41 à 43 ci-après ;

e) les travaux forcés prolongés et fréquents imposés aux civils de sexe masculin, Musulmans et autres non-Serbes, emprisonnés au KP Dom, comme il est exposé aux paragraphes 50 à 54 ci-après ;

f) l’expulsion et le transfert forcé de civils, Musulmans et autres non-Serbes, emprisonnés au KP Dom, vers le Monténégro et d’autres destinations connues ou inconnues.

i) De juillet 1993 au plus tard à octobre 1994, plusieurs groupes de détenus ont été transférés dans d’autres centres de détention à Kalinovik, Rudo et Kula. Avant la fin septembre 1994, plus de 85 détenus avaient été conduits dans ces centres de détention. À la suite du transfert d’au moins 187 détenus en octobre 1994, il ne restait plus personne en détention au KP Dom. Le 4 octobre 1994, MITAR RASEVIC a lui-même amené 61 détenus au centre de détention de Kula.

ii) Fin août 1992, 35 détenus âgés ou malades ont été emmenés en autocar et expulsés du KP Dom vers Rozaj, au Monténégro. Le même jour, une vingtaine de prisonniers musulmans, qui devaient avec 35 autres détenus être expulsés au Monténégro, ont été emmenés pour un prétendu échange à Gorazde. On ne les a jamais revus vivants.

iii) Le 17 septembre 1992 ou vers cette date, de 35 à 60 détenus ont été sortis de la prison prétendument pour cueillir des prunes. On ne les a jamais revus.

iv) De juin 1992 à mars 1993, au moins 200 Musulmans et autres non-Serbes détenus au KP Dom ont été expulsés et transférés, à l’occasion de prétendus échanges, vers des destinations inconnues. On ne les a jamais revus vivants. La plupart de ces disparitions ont eu lieu entre août 1992 et octobre 1992.

18. Par ces actes et omissions, MITAR RASEVIC a commis les crimes suivants :

Chef 1 : persécutions pour des raisons politiques, raciales et religieuses, un CRIME CONTRE L’HUMANITÉ sanctionné par les articles 5 h), 7 1) et 7 3) du Statut du Tribunal.

CHEFS 2 à 5
(Tortures et sévices corporels)

19. D’avril 1992 à octobre 1994, MITAR RASEVIC, agissant seul ou de concert avec d’autres membres connus ou inconnus de l’entreprise criminelle commune, comme il est indiqué au paragraphe 6 du présent acte d’accusation, a planifié, incité à commettre, ordonné, commis ou de toute autre manière aidé et encouragé à planifier, préparer ou exécuter les tortures et sévices corporels infligés aux Musulmans et autres non-Serbes de sexe masculin détenus à la prison du KP Dom. Les détails de ces tortures et sévices corporels sont exposés aux paragraphes suivants.

Sévices corporels liés à la cantine

20. En juin 1992, à une date indéterminée, le détenu E.G., handicapé d’un bras et d’une jambe et atteint d’épilepsie, s’est plaint des maigres rations de nourriture. En conséquence, trois gardiens non identifiés l’ont battu et lui ont donné des coups de pied.

21. À une date indéterminée, fin octobre ou début novembre 1992, en présence de gardiens non identifiés, des soldats non identifiés de Nevisenje ont agressé les détenus FWS-214 et FWS-113 alors que ces derniers quittaient la cantine.

Sévices corporels arbitraires

22. Durant leur incarcération, les détenus ont été en butte à des sévices corporels arbitraires et inopinés de la part des gardiens ou de soldats étrangers au KP Dom, pour des raisons inconnues. Ces séances de sévices avaient lieu généralement le soir ou la nuit, lorsque des membres des unités militaires et paramilitaires locales pénétraient dans la prison. Les gardiens de la prison conduisaient alors les soldats dans les différentes cellules en vue de choisir les détenus appelés à subir les sévices. Ces sévices sont décrits aux paragraphes 23 et 24 et dans le Tableau A ci-joint.

23. Le 10 juin 1992, le détenu Z.B. a été violemment battu par un gardien du KP Dom. Z.B. a ensuite été placé dans une cellule d’isolement pendant un mois environ dans des conditions inhumaines. À la suite de ces sévices et mauvais traitements, Z.B. a perdu l’ouïe.

24. Le 11 juillet 1992, deux gardiens ont fait sortir le détenu FWS-71 de sa cellule, l’ont conduit dans une cellule d’isolement au quartier des détenus et l’ont battu avec différents objets pendant une vingtaine de minutes, jusqu’à ce qu’il s’évanouisse. Lorsqu’il a repris connaissance dans sa cellule, FWS-71 avait le corps couvert d’ecchymoses.

Tortures et sévices corporels infligés à titre de punition

25. Le détenu FWS-54 était chargé de distribuer la nourriture aux détenus. En lui confiant cette tâche, Savo Todovic lui avait interdit de donner toute portion supplémentaire aux détenus. Le 8 août 1992, FWS-54 a donné à un détenu une tranche de pain en plus. En guise de punition, le témoin a été frappé à coups de pied et de matraque par un gardien, avant d’être envoyé dans une cellule d’isolement. MITAR RASEVIC a libéré FWS-54 quatre jours plus tard.

26. À une date indéterminée, pendant l’été 1992, un gardien, Dragomir Obrenovic (alias « Dragan » ou « Obren ») a battu les détenus A.M., F.M. et S. pour les punir d’avoir échangé des messages.

27. À une date indéterminée, en avril ou mai 1993, vers 6 heures, les gardiens Dragomir Obrenovic et Zoran Matovic ont fait sortir les détenus FWS-71, FWS-76, I.I. et D.C. des salles oů ils se trouvaient et les ont conduits dans les cellules d’isolement au quartier des détenus. Dans le couloir, ces gardiens ont battu les détenus pour les punir d’avoir volé du pain la veille à la cantine.

28. Le 8 juillet 1993, E.Z., un détenu musulman, a tenté de s’évader du KP Dom mais il a été repris le même jour. Ramené au KP Dom, il a été violemment battu par un gardien de la prison. Il a alors été placé dans une cellule d’isolement pendant 28 jours, au cours desquels il a été maltraité et battu par Savo Todovic, le directeur adjoint, et par d’autres gardiens.

29. Le 8 juillet 1993, FWS-73, FWS-110, FWS-144, FWS-210 et une dizaine d’autres détenus, tous compagnons de travail d’E.Z., ainsi que le détenu responsable de sa chambrée, ont été conduits au bâtiment administratif où ils ont été violemment battus par une dizaine de gardiens de la prison. FWS-73 a été battu et a reçu des coups de pied au bas-ventre pendant environ cinq minutes. FWS-110 a reçu des coups de pieds si violents qu’il a perdu connaissance. En guise de punition supplémentaire, FWS-73, FWS-110, FWS-144, FWS-210 et d’autres détenus non identifiés ont été placés dans des cellules d’isolement pendant des périodes variables allant jusqu’à 15 jours.

Tortures et sévices corporels infligés au cours des interrogatoires

30. De concert avec les responsables de la prison, des membres de la police locale et de la police militaire interrogeaient les détenus après leur arrivée au KP Dom. Les interrogatoires portaient principalement sur la question de savoir si le détenu était membre du SDA, s’il possédait des armes ou s’il s’était battu contre les forces serbes. Pendant ou après les interrogatoires, les gardiens et policiers battaient souvent les détenus.

31. Le 24 mai 1992, la police militaire a arrêté et emmené au KP Dom FWS-03 et H.D., tous deux membres du SDA, ainsi que leur voisin H.S. Le même jour, cinq ou six membres de la police militaire les ont interrogés au KP Dom. Pour les forcer à passer aux aveux, les policiers les ont battus tous les trois pendant l’interrogatoire. Les coups étaient si violents que H.S. a perdu connaissance à deux reprises.

32. D’avril à juillet 1992, MITAR RASEVIC, de concert avec d’autres responsables de la prison du KP Dom, a institué une sorte de routine quotidienne pour les séances de sévices. Ils préparaient des listes de détenus appelés à être battus, surtout pendant les interrogatoires nocturnes. En règle générale, les détenus étaient choisis parmi les notables de Foca qui étaient soupçonnés de n’avoir pas dit la vérité lors des interrogatoires de jour.

33. À cette époque, les gardiens appelaient presque tous les soirs les détenus inscrits sur les listes et les conduisaient au bâtiment administratif pour de nouveaux interrogatoires et des sévices.

34. Les gardiens et les soldats se livraient à des exactions sur les détenus au moyen d’armes de toutes sortes : matraques, crosses de fusil, couteaux et outils. Certains détenus retournaient dans leur cellule gravement blessés. Certains ont connu ce sort à plusieurs reprises. De nombreux détenus ainsi désignés ne sont jamais revenus de ces séances et sont toujours portés disparus. Ces faits sont décrits plus en détail aux paragraphes 35 à 37 ci-après et dans le Tableau B ci-joint.

35. En juin ou en juillet 1992, à deux reprises au moins, des gardiens du KP Dom ont sauvagement torturé Zulfo Veiz, un ancien policier, et Nurko Nisic, ancien agent de l’administration municipale et membre du SDA. Par ailleurs, des gardiens du KP Dom ont violemment battu Salem Bico, un ancien policier. Ces trois détenus ont été ramenés dans leurs cellules contusionnés, couverts de sang et gravement blessés.

36. En juin 1992, des gardiens du KP Dom ont torturé et battu le détenu S.M. qu’ils avaient confondu avec un autre dont le nom figurait sur la liste des détenus choisis pour subir des interrogatoires et des tortures. Ces gardiens ont battu S.M. et l’ont blessé avec un couteau. Ils ont menacé de lui enlever un œil. À ce moment, MITAR RASEVIC est entré, a constaté la méprise et ordonné aux gardiens de cesser de battre S.M. La victime a été reconduite dans sa cellule, gravement blessée et couverte de sang.

37. Entre mai et juillet 1992, à deux reprises au moins, des gardiens du KP Dom et des membres de la police militaire ont torturé et battu le détenu A.S., qui a eu trois côtes cassées. En outre, des gardiens du KP Dom et des membres de la police militaire ont violemment battu Vahida Dzemal, un ancien policier, Enes Uzunovic, un membre du SDA, et E.C. Vahida Dzemal a reçu des coups si violents qu’il a eu la mâchoire cassée et a perdu plusieurs dents. E.C. a eu trois doigts cassés et le corps contusionné. Ensuite, les victimes ont été placées dans une cellule d’isolement pendant plusieurs jours, puis reconduites dans leurs cellules gravement blessées. Enes Uzunovic et Vahida Dzemal ont été tués par la suite, comme il est exposé aux paragraphes 41 à 43 ci-après.

38. Par les actes ou omissions décrits aux paragraphes 25 à 37, MITAR RASEVIC a commis les crimes suivants :

Chef 2 : tortures, un CRIME CONTRE L’HUMANITÉ sanctionné par les articles 5 h), 7 1) et 7 3) du Statut du Tribunal.

Chef 3 : tortures, une VIOLATION DES LOIS OU COUTUMES DE LA GUERRE reconnue par l’article 3 1) a) des Conventions de Genève de 1949 et sanctionnée par les articles 3, 7 1) et 7 3) du Statut du Tribunal.

39. Par les actes ou omissions décrits aux paragraphes 20 à 37, MITAR RASEVIC a commis :

Chef 4 : actes inhumains, un CRIME CONTRE L’HUMANITÉ sanctionné par les articles 5 i), 7 1) et 7 3) du Statut du Tribunal.

Chef 5 : traitement cruel, une VIOLATION DES LOIS OU COUTUMES DE LA GUERRE reconnue par l’article 3 1) a) des Conventions de Genève de 1949 et sanctionnée par les articles 3, 7 1) et 7 3) du Statut du Tribunal.

CHEFS 6 et 7
(Homicides intentionnels et assassinats)

40. D’avril 1992 à octobre 1994, MITAR RASEVIC, agissant seul ou de concert avec d’autres membres connus ou inconnus de l’entreprise criminelle commune, comme il est indiqué au paragraphe 6 du présent acte d’accusation, a planifié, incité à commettre, ordonné, commis ou de toute autre manière aidé et encouragé à planifier, préparer ou exécuter les meurtres et assassinats de Musulmans et autres non-Serbes de sexe masculin détenus à la prison du KP Dom. Les détails de ces meurtres et assassinats sont exposés aux paragraphes suivants.

41. Entre juin et août 1992, les gardiens du KP Dom sélectionnaient des groupes de détenus d’après les listes établies par les responsables de la prison, dont MITAR RASEVIC, et les emmenaient, un par un, dans une salle du bâtiment administratif. Là, il arrivait fréquemment que les gardiens et les soldats, y compris des membres de la police militaire, enchaînent le détenu, bras et jambes écartés, avant de le battre. Les gardiens et les soldats, y compris des membres de la police militaire, frappaient les détenus à coups de pied, de poing, de matraque en caoutchouc et de manche de hache. Durant ces séances, ils demandaient aux détenus où ceux-ci avaient caché leurs armes, ou encore ce qu’ils savaient au sujet de tiers.

42. Après certaines séances de sévices, les gardiens jetaient les détenus sur des couvertures, les enveloppaient dedans et les traînaient hors du bâtiment administratif.

43. Un nombre inconnu de détenus torturés et battus sont morts au cours de ces séances. Certains de ceux qui ont survécu à ces sévices ont été tués par balle ou ont succombé à leurs blessures dans les cellules d’isolement où ils étaient détenus. Les sévices et les tortures ont causé le décès des détenus énumérés dans le Tableau C ci-joint, ainsi que celui d’un nombre inconnu d’autres détenus non identifiés.

44. Par ces actes ou omissions, MITAR RASEVIC a commis les crimes suivants :

Chef 6 : assassinats, un CRIME CONTRE L’HUMANITÉ sanctionné par les articles 5 a), 7 1) et 7 3) du Statut du Tribunal.

Chef 7 : assassinats, une VIOLATION DES LOIS OU COUTUMES DE LA GUERRE reconnue par l’article 3 1) a) des Conventions de Genève de 1949 et sanctionnée par les articles 3, 7 1) et 7 3) du Statut du Tribunal.

CHEFS 8 à 10
(Emprisonnement, actes inhumains et traitement cruel)

45. D’avril 1992 à octobre 1994, MITAR RASEVIC, agissant seul ou de concert avec d’autres membres connus ou inconnus de l’entreprise criminelle commune, comme il est indiqué au paragraphe 6 du présent acte d’accusation, a planifié, incité à commettre, ordonné, commis ou de toute autre manière aidé et encouragé à planifier, préparer ou exécuter la détention de Musulmans et autres non-Serbes de sexe masculin au KP Dom dans des conditions inhumaines. Les détails de ces cas d’emprisonnement, d’actes inhumains et de traitement cruel sont exposés aux paragraphes suivants.

46. Les conditions de détention au KP Dom étaient atroces. Pendant leur détention, les prisonniers étaient enfermés dans leurs cellules, sauf lorsqu’ils devaient se mettre en rangs pour aller manger à la cantine ou effectuer les tâches qui leur étaient assignées. Après avril 1992, les cellules étaient surpeuplées et les équipements pour le couchage et l’hygiène insuffisants. Les détenus recevaient des rations de famine et ne disposaient pas de vêtements de rechange. La prison n’était pas chauffée pendant l’hiver. Les détenus ne recevaient pas les soins médicaux nécessaires. Les conditions de détention au KP Dom ont gravement altéré la santé de nombreux détenus. En raison de l’absence de soins médicaux appropriés, Enes Hadzic, un détenu de 40 ans, est mort en avril ou mai 1992 d’un ulcère perforé. D’autres faits sont énumérés dans le Tableau D ci-joint.

47. Les prisonniers pouvaient entendre les détenus torturés, frappés et exécutés, comme il est précisé aux paragraphes 20 à 43 du présent acte d’accusation. Les cellules d’isolement étaient utilisées comme instruments de terreur et de menace. De ce fait, les détenus vivaient dans la peur constante d’être la prochaine victime. En raison de ces pressions psychologiques, certains détenus devenaient suicidaires, alors que d’autres devenaient indifférents à leur propre sort. La plupart, si ce n’est la totalité, des détenus souffraient de dépression et gardent encore les séquelles physiques et psychologiques de leur détention au KP Dom. Ces faits sont décrits dans le Tableau D ci-joint.

48. Par ces actes et omissions, MITAR RASEVIC a commis les crimes suivants :

Chef 8 : emprisonnement, un CRIME CONTRE L’HUMANITÉ sanctionné par les articles 5 e), 7 1) et 7 3) du Statut du Tribunal.

Chef 9 : actes inhumains, un CRIME CONTRE L’HUMANITÉ sanctionné par les articles 5 i), 7 1) et 7 3) du Statut du Tribunal.

Chef 10 : traitement cruel, une VIOLATION DES LOIS OU COUTUMES DE LA GUERRE reconnue par l’article 3 1) a) des Conventions de Genève de 1949 et sanctionnée par les articles 3, 7 1) et 7 3) du Statut du Tribunal.

CHEFS 11 et 12
(Réduction en esclavage)

49. De mai 1992 à octobre 1994, MITAR RASEVIC, agissant seul ou de concert avec d’autres membres connus ou inconnus de l’entreprise criminelle commune, comme il est indiqué au paragraphe 6 du présent acte d’accusation, a planifié, incité à commettre, ordonné, commis ou de toute autre manière aidé et encouragé à planifier, préparer ou exécuter la réduction en esclavage de Musulmans et autres non-Serbes de sexe masculin détenus à la prison du KP Dom. Les détails de ces cas de réduction en esclavage sont exposés aux paragraphes suivants.

50. De mai 1992 à octobre 1994, un groupe d’environ 20 à 45 détenus ayant des compétences particulières a été astreint à travailler à l’intérieur et à l’extérieur de la prison. Des responsables du KP Dom, parmi lesquels MITAR RASEVIC, leur assignaient certaines tâches. Les noms des détenus soumis à un travail forcé figurent dans le Tableau E ci-joint.

51. Les gardiens faisaient sortir certains détenus de leurs cellules et les emmenaient sur les lieux de travail ou bien les confiaient à des autorités indépendantes de la hiérarchie de la prison pour effectuer certains travaux. En règle générale, les détenus étaient contraints de travailler tous les jours de 7 heures à 15 ou 16 heures au moins. Le travail des détenus n’était ni rémunéré ni volontaire. Même les détenus malades ou blessés étaient contraints de travailler. Ils travaillaient sous la surveillance armée des gardiens de la prison ou de soldats serbes.

52. À l’intérieur de la prison, les détenus devaient travailler dans la fabrique de meubles et dans l’atelier de serrurerie et de mécanique. À l’atelier, ils devaient réparer les véhicules de l’armée. Les travaux effectués par les détenus étaient ardus et physiquement épuisants.

53. À l’extérieur de la prison, les détenus étaient contraints d’effectuer des travaux agricoles à Brioni, une dépendance de la prison, de travailler dans des fabriques et à la mine de Miljevina, ou bien de dégager les gravats des bâtiments endommagés en divers endroits de Foca. MITAR RASEVIC était présent lorsque les détenus effectuaient un travail forcé à la ferme. Pendant l’hiver 1992-1993, les détenus ont été

contraints de réparer la résidence privée de Milorad Krnojelac, directeur du KP Dom, d’installer un bar dans la maison d’un de ses fils et de meubler le magasin d’un autre de ses fils.

54. Le 18 septembre 1992, un gardien du KP Dom a fait sortir FWS-109 et G.K., prétendument pour un échange de prisonniers. Savo Todovic a en fait remis les deux détenus à des représentants d’autorités militaires étrangères à la prison, qui les ont conduits au poste de police de Kalinovik afin de servir de chauffeurs et aider ainsi à la détection des mines terrestres. De septembre 1992 à mars 1993, au moins à cinq reprises, ils ont dû rouler en tête des convois serbes pour détecter les mines terrestres. Les détenus étaient soumis à une pression intense, conscients que chaque jour qu’ils passaient à travailler pouvait être le dernier.

55. Par ces actes ou omissions, MITAR RASEVIC a commis les crimes suivants :

Chef 11 : réduction en esclavage, un CRIME CONTRE L’HUMANITÉ sanctionné par les articles 5 c), 7 1) et 7 3) du Statut du Tribunal.

Chef 12 : esclavage, une VIOLATION DES LOIS OU COUTUMES DE LA GUERRE reconnue par la Convention relative à l’esclavage et le droit international coutumier, et sanctionnée par les articles 3, 7 1) et 7 3) du Statut du Tribunal.

ALLÉGATIONS JURIDIQUES DE PORTÉE GÉNÉRALE

56. Durant toute la période couverte par le présent acte d’accusation, la République de Bosnie-Herzégovine, sur le territoire de l’ex-Yougoslavie, était le théâtre d’un conflit armé.

57. Durant toute la période couverte par le présent acte d’accusation, MITAR RASEVIC était tenu de se conformer aux lois ou coutumes régissant la conduite de la guerre.

58. Pour chacun des chefs de crime contre l’humanité, les actes ou omissions faisaient partie d’une attaque généralisée ou systématique, dirigée contre une population civile et, plus particulièrement, contre la population musulmane et croate de la municipalité de Foca.

 

Le Procureur
__________
Carla Del Ponte

[Sceau du Tribunal]

Fait le 12 mai 2004
La Haye (Pays-Bas)


TABLEAU A
LISTE DES VICTIMES DE SÉVICES ARBITRAIRES

DATE

VICTIME

HEURE1

LIEU

AUTEUR

Nom

Fonction

1.

Entre le 20 avril et juin 1992

C. M.

La nuit, à maintes reprises

Quartier des détenus, cellule 15

SAVIC, Jovo

Gardien

2.

Vers le 22 ou 23 avril 1992

D. A.

La nuit

Cellule du quartier des détenus

Inconnu

Gardien

3.

Entre mai et octobre 1992

FWS-198

Inconnu

Couloir du quartier des détenus

MARIC, prénom inconnu

Gardien

4.

Entre avril et août 1992

K.K.

Le soir

Cellule de détenus, près de la cellule 13

Inconnu

Gardiens ou soldats

5.

Entre avril et août 1992

K., prénom inconnu

Le soir

Cellule de détenus, près de la cellule 13

Inconnu

Gardiens ou soldats

6.

À partir de mai 1992

FWS-82

Après le repas, à plusieurs reprises

De retour de la cuisine vers le quartier des détenus

VUKOVIC, Radovan

Gardien


TABLEAU B
LISTE DES DÉTENUS BATTUS LORS D'INTERROGATOIRES AU KP DOM

DATE

VICTIME

HEURE1

LIEU

AUTEUR

Nom

Fonction

1.

28 juin 1992

B., prénom inconnu

(fils de S.)

Le soir

Bâtiment administratif, rez-de-chaussée

Inconnu

Gardiens et/ou soldats, y compris police militaire

2.

Entre le 24 juin 1992 et le début août 1992

D. (probablement) R.

Le soir

Bâtiment administratif, r.-de-c.

Inconnu

Police militaire, y compris les voisins de la victime

3.

De juin 1992 à la mi-juillet 1992

D. N.

Après le repas de midi ou du soir

Bâtiment administratif, r.-de-c

Inconnu

Gardiens et/ou soldats, y compris police militaire

4.

Entre mai 1992 et août 1992

DZAMALIJA, Juso

Le soir

Bâtiment administratif, r.-de-c

BURILO, Milenko,
OBRENOVIC, Dragomir, alias Dragan ou Obren
et d’autres inconnus

Gardiens et soldats, y compris police militaire

5.

De juin 1992 à la mi-juillet 1992

D. H.

Après le repas de midi ou du soir

Bâtiment administratif, r.-de-c

BURILO, Milenko
OBRENOVIC, Dragomir, alias Dragan ou Obren
et d’autres inconnus

Gardiens et soldats, y compris police militaire

6.

Entre la fin mai 1992 et le début juillet 1992

DZELILOVIC, Kemo

Le soir

Bâtiment administratif,

r.-de-c.

BURILO, Milenko
MATOVIC, Zoran
OBRENOVIC, Dragomir, alias Dragan ou Obren
et d’autres inconnus

Gardiens et soldats, y compris police militaire

7.

Entre mai 1992 et août 1992

DZENDUSIC, Ramo

Le soir

Bâtiment administratif,

r.-de-c.

BURILO, Milenko
OBRENOVIC, Dragomir, alias Dragan ou Obren
et d’autres inconnus

Gardiens et soldats, y compris police militaire

8.

Entre le 24 mai 1992 et le 7 juillet 1992

F. E.

Le soir

Bâtiment administratif,

r.-de-c.

BURILO, Milenko
OBRENOVIC, Dragomir, alias Dragan ou Obren
et d’autres inconnus

Gardiens et soldats, y compris police militaire

9.

Entre le 26 juin 1992 et le 14 juillet 1992

G. A.

Le soir

Bâtiment administratif,

r.-de-c.

Inconnu

Gardiens et/ou soldats, y compris police militaire

10.

Avant juin/juillet 1992

H., prénom inconnu.

Le soir

Bâtiment administratif,

r.-de-c.

Inconnu

Gardiens et/ou soldats, y compris police militaire

11.

Avant juin/juillet 1992

H., prénom inconnu.

Le soir

Bâtiment administratif,

r.-de-c.

Inconnu

Gardiens et/ou soldats, y compris police militaire

12.

Entre mai 1992 et août 1992

HODZIC, Nail

Le soir

Bâtiment administratif,

r.-de-c.

BURILO, Milenko
OBRENOVIC, Dragomir, alias Dragan ou Obren
et d’autres inconnus

Gardiens et soldats, y compris police militaire

13.

Entre le 26 juin 1992 et le

14 juillet 1992

I. K.

Le soir

Bâtiment administratif,

r.-de-c.

Inconnu

Gardiens et/ou soldats, y compris police militaire

14.

Entre le 24 mai 1992 et le 7 juillet 1992

I. M.

Le soir

Bâtiment administratif,

r.-de-c.

Inconnu

Gardiens et soldats, y compris police militaire

15

Juin 1992

K.I.

Après le repas de midi ou du soir

Bâtiment administratif,

r.-de-c.

Inconnu

Gardiens et/ou soldats, y compris police militaire

16.

Entre mai 1992 et août 1992

KONJO, Halim

Le soir

Bâtiment administratif,

r.-de-c.

BURILO, Milenko
OBRENOVIC, Dragomir, alias Dragan ou Obren
et d’autres inconnus

Gardiens et soldats, y compris police militaire

17.

Entre mai 1992 et octobre 1992

KULOGLIJA, Mustafa

Après 19 heures

Bâtiment administratif,

r.-de-c.

BURILO, Milenko OBRENOVIC, Dragomir, alias Dragan ou Obren
et d’autres inconnus

Gardiens et soldats, y compris police militaire

18.

De la mi-mai à juillet 1992

M. F.

Le soir

Bâtiment administratif,

r.-de-c.

Inconnu

Gardiens et/ou soldats, y compris police militaire

19.

De juin 1992 à la mi-juillet 1992

M. E.

Après le repas de midi ou du soir

Bâtiment administratif,

r.-de-c.

Inconnu

Gardiens et/ou soldats, y compris police militaire

20.

De juin 1992 à la mi-juillet 1992

R. H.

Après le repas de midi ou du soir

Bâtiment administratif,

r.-de-c.

Inconnu

Gardiens et/ou soldats, y compris police militaire

21.

Entre mai 1992 et août 1992

RIKALO, Husko

Le soir

Bâtiment administratif,

r.-de-c.

BURILO, Milenko
OBRENOVIC, Dragomir, alias Dragan ou Obren
et d’autres inconnus

Gardiens et/ou soldats, y compris police militaire

22.

De mai 1992 à la fin août 1992

RIKALO, les deux frères

De jour

Salles d’in-terrogatoire, bâtiment administratif

VLADICIC, prénom inconnu

Inspecteur de police

23.

Fin juin 1992

S. H.

La nuit, à plusieurs reprises

Bâtiment administratif,

r.-de-c.

Drakul, alias Zliko
KRNOJELAC, prénom inconnu
MILETIC, prénom inconnu
'Pikolo’

Gardiens et soldats, y compris police militaire

24.

Avant juin/juillet 1992

S. H.

Le soir

Bâtiment administratif,

r.-de-c.

Inconnu

Gardiens et/ou soldats, y compris police militaire

25.

Entre mai 1992 et octobre 1992

S. M.

Le soir

Bâtiment administratif,

r.-de-c.

BURILO, Milenko
OBRENOVIC, Dragomir, alias Dragan ou Obren
et d’autres inconnus

Gardiens et/ou soldats, y compris police militaire

26.

Entre février 1993

et mai 1993

FWS-159

Inconnue, à une dizaine de reprises

Quartier des détenus, cellule d’isolement

MATOVIC, Zoran

Gardien

27.

Entre avril et août 1992

VEIZ, Munib

Après 18 heures,

à plusieurs reprises

Salles d’in-terrogatoire, bâtiment administratif

VLADICIC, Zoran
KOPRIVICA, Miso
GASOVIC, Petko
STAROVIC, Vojislav
et d’autres inconnus

Police et policiers militaires

1. Une seule occurence, sauf indication contraire.


TABLEAU C
LISTE DES DÉTENUS QUI SONT SUCCOMBÉ À DES SÉVICES CORPORELS AT À LA TORTURE AU KP DOM

VICTIME

1.

Altoka, Alija

2.

BICO, Salem

3.

CANKUSIC, Abdurahman

4.

CANKUSIC, Refik

5.

CEDIC, Enko

6.

DZELILOVIC Kemal

7.

DZEMAL, Vahida

8.

DZENDUSIC, Ramo

9.

GRANOV, Adil

10.

IVANCIC , Mate

11.

KISELICA, Esad

12.

KONJO, Halim

13.

KRAJCIN, Adil

14.

KULOGLIJA, Mustafa

15.

MANDZO, Fuad

16.

MARINOVIC, Krunoslav

17.

NISIC, Nurko

18.

RAMOVIC, Hamid

19.

RIKALO, Husein

20.

RIKALO, Mithat

21.

RIKALO, Zaim

22

SORO, Seval

23.

TULEK, Kemal

24.

UZUNOVIC, Enes

25.

VEIZ, Munib

26.

VEIZ, Zulfo


TABLEAU D
LISTE DES DÉTENUS QUI SONT MORTS DES SUITES DES CONDITIONS DE DÉTENTION AU KP DOM OU QUI EN ONT SOUFFERT PHYSIQUEMENT ET PSYCHOLOGIQUEMENT

DATES

VICTIME

EFFETS PHYSIQUES OU PSYCHOLOGIQUES

EFFETS DURABLES

1.

De mai 1992 à août 1993

FWS-214

Symptômes physiques de malnutrition et syndrome de stress post-traumatique.

Oui

2.

De mai 1992 à août 1993

B. E. (schizophrène)

Automutilation due à l’absence de traitement et au stress.

Oui

3.

De mai 1992 à août 1993

FWS-66

Diabète, hypertension et stress, à peine capable de marcher – douleur aux jambes et effets psychologiques de traumatismes.

4.

De mai 1992 à août 1993

FWS-109

Symptômes physiques de malnutrition entraînant notamment une hypertension.

5.

De mai 1992 à août 1993

FWS-71

Symptômes physiques de malnutrition, exposition au froid extrême et effets psychologiques de traumatismes, troubles rénaux dus aux conditions de détention et aux sévices.

Oui

6.

À partir de février 1993

D. E.

Conséquences physiques de blessures non soignées.

7.

De mai 1992 à août 1993

FWS-78

Dépression due aux conditions de détention.

Oui

8.

De mai 1992 à août 1993

FWS-139

Symptômes physiques de malnutrition et effets psychologiques des violences subies.

9.

De mai 1992 à août 1993

FWS-162

Symptômes physiques de malnutrition.

10

D’avril 1992 à août 1993

FWS-182

Malnutrition, la victime souffrait de troubles gastriques qui ont empiré au cours de la détention.

Oui

11.

De mai 1992 à

août 1993

FWS-209

Symptômes physiques de malnutrition.

12.

De mai 1992 à

août 1993

FWS-111

Symptômes physiques de malnutrition et syndrome de stress post-traumatique.

Oui

13.

À partir du 23 juin 1993

KUNOVAC, Omer

Mort consécutive à une séance de sévices faute d’intervention chirurgicale.

14.

De mai 1992 à

août 1993

FWS-144

et nombre d’autres détenus

Symptômes physiques de malnutrition et d’exposition au froid extrême et à des conditions insalubres ; cauchemars récurrents.

Oui

15

De mai 1992 à

août 1993

FWS-85

et d’autres détenus

Symptômes physiques de malnutrition et d’exposition au froid extrême, notamment mains et genoux enflés.

16.

De mai 1992 à

août 1993

FWS-104

Symptômes physiques et psychologiques dus à la malnutrition et aux violences subies en détention.

Oui

17.

D’octobre 1992 à

décembre 1992

FWS-215

Est tombé malade à cause du froid qui régnait dans la cellule d’isolement.

18

De juin 1992 à août 1993

FWS-86

Effets physiques, notamment une crise cardiaque en juin 1992, et psychologiques.

Oui

19

D’avril 1992 à juin 1993

FWS-82

Est devenu dépressif, suicidaire ; troubles rénaux, douleurs à la hanche et au dos dus au froid et à la malnutrition.

Oui


TABLEAU E
LISTE DES DÉTENUS QUI ONT ÉTÉ ATREINTS AU TRAVAIL

DATE (début)

DATE (fin)

VICTIME

OBSERVATIONS

1.

juillet 1992

octobre 1992

A. U.

2.

mai 1992

octobre 1994

FWS-89

A travaillé notamment à la mine de Miljevina

3.

juin ou juillet 1992

octobre 1994

FWS-65

4.

juin ou juillet 1992

octobre 1994

B. M.

5.

mai 1992

octobre 1994

B. O.

6.

mai 1992

octobre 1994

B., prénom inconnu

A travaillé notamment à la propriété de Milorad Krnojelac

7.

mai 1992

octobre 1994

FWS-66

8.

septembre 1992

mars 1993

FWS-109

A notamment conduit des véhicules sur la ligne de front

9.

mai 1993

octobre 1994

FWS-71

10.

mai 1992

octobre 1994

D. M.

11.

juillet 1992

octobre 1994

G. A.

12.

juillet 1992

octobre 1994

FWS-138

13.

octobre 1992

octobre 1994

H. A.

A travaillé notamment à la mine de Miljevina

14.

juillet 1992

octobre 1994

FWS-78

A travaillé notamment à la mine de Miljevina

15.

juillet 1992

octobre 1994

FWS-77

16.

juillet 1992

octobre 1994

H. M.

17.

début 1993

août 1994

FWS-182

18.

juin 1992

novembre 1992

FWS-141

A notamment conduit des véhicules sur la ligne de front

19.

juillet 1992

octobre 1994

I. S.

20.

juillet 1992

hiver 1992/1993

J.A.

A travaillé notamment à la propriété de Milorad Krnojelac

21.

juin ou juillet 1992

octobre 1994

K., prénom inconnu

22.

juin ou juillet 1992

16 août 1994

FWS-142

A travaillé notamment à la mine de Miljevina

23.

juillet 1992

octobre 1994

K. S.

24.

juillet 1992

août 1992

FWS-48

25.

juillet 1992

décembre 1993

KUBAT, Sefko

26.

septembre 1992

mars 1993

K. G.

A notamment conduit des véhicules sur la ligne de front

27.

juillet 1992

octobre 1994

FWS-144

A travaillé notamment à la propriété de Milorad Krnojelac

28.

mai 1992

octobre 1994

FWS-210

A travaillé notamment à la propriété de Milorad Krnojelac

29.

août 1993

octobre 1994

FWS-85

30

mai 1992

octobre 1994

M., prénom inconnu

A travaillé notamment à la propriété de Milorad Krnojelac

31.

juillet 1992

octobre 1994

M. R. ou A.

32.

juillet 1992

octobre 1994

M. S.

33

septembre 1992

octobre 1994

P. J.

A travaillé notamment à la mine de Miljevina

34

mai 1992

octobre 1994

FWS-73

35

juillet 1992

octobre 1994

R. T.

A travaillé notamment à la mine de Miljevina

36

juin ou juillet 1992

16 août 1994

S. D.

A travaillé notamment à la mine de Miljevina

37

mai 1992

juin 1993

FWS-82

38

mai 1992

octobre 1994

FWS-83

A travaillé notamment à la propriété de Milorad Krnojelac

39

mai 1992

octobre 1994

FWS-213

A travaillé notamment à la propriété de Milorad Krnojelac

40

juin ou juillet 1992

16 août 1994

Z. A.

A travaillé notamment à la mine de Miljevina

41

juillet 1992

octobre 1994

FWS-216

A travaillé notamment à la propriété de Milorad Krnojelac et à la mine de Miljevina