Affaire n° : IT-97-25/1-PT

LE PRÉSIDENT DU TRIBUNAL

Devant  :
M. le Juge Theodor Meron, Président

Assisté de :
M. Hans Holthuis, Greffier

Décision rendue le :
16 octobre 2003

LE PROCUREUR

c/

Mitar RASEVIC

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DÉCISION RELATIVE À LA COMMISSION D’UN CONSEIL DE LA DÉFENSE

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L’Accusé :

M. Mitar Rasevic

Autres parties :

M. Slavisa Prodanovic

 

  1. M. Slavisa Prodanovic a formé un recours contre la décision du Greffier par laquelle celui-ci refusait de le commettre à la défense de Mitar Rasevic. Pour les motifs exposés ci-dessous, je confirme la décision du Greffier.
  2. Mitar Rasevic a été transféré au Tribunal le 15 août 2003, et a demandé que M. Prodanović soit commis à sa défense. Le 18 août 2003, le Greffier a déposé une plainte à l’encontre de M. Prodanovic devant le Conseil de discipline établi conformément au Code de déontologie pour les avocats exerçant devant le Tribunal international (IT/125 Rev.1) (le « Code de déontologie »). Le 26 août 2003, le Greffier a refusé de commettre M. Prodanovic à la défense de Mitar Rasevic. Cette décision a été rendue oralement. Le 1er septembre 2003, M. Prodanovic a demandé au Président du Tribunal de réexaminer la décision du Greffier. Ce dernier a renoncé à son droit de réponse.
  3. L’article 14 D) de la Directive relative à la commission d’office de conseils de la défense (IT/73/Rev. 9) (la « Directive ») dispose, dans la partie qui nous intéresse, que le Greffier « peut refuser de commettre d’office un conseil qui fait l’objet […] d’une procédure disciplinaire [en vertu de l’article 45] du troisième chapitre du Code de déontologie. » Cet article dispose également que « [l]e conseil peut former auprès du Président un recours contre la décision du Greffier dans les deux semaines de sa notification. »
  4. Bien que le Greffier ait rendu sa décision oralement, le procès-verbal de la réunion qui a eu lieu, le 26 août 2003, entre des membres du Greffe et Mitar Rasević, aussi bien que la lettre de M. Prodanovic, datée du 1er septembre 2003, adressée au Président, indiquent que le Greffier a refusé de commettre M. Rasević parce que celui-ci faisait l’objet d’une procédure disciplinaire. Selon l’article 14 D) de la Directive, M. Prodanović peut former auprès du Président du Tribunal un recours contre la décision du Greffier.
  5. M. Prodanović soulève plusieurs arguments. Son argument principal semble être que le Greffier a commis un abus en lui interdisant temporairement d’exercer devant le Tribunal, puisque l’article 45 du Code de déontologie confère ce pouvoir au seul Conseil de discipline. Bien que M. Prodanovic soutienne, à juste titre, qu’il appartient uniquement au Conseil de discipline d’interdire temporairement, en application de l’article 45 du Code de déontologie, à un conseil de la défense d’exercer devant le Tribunal, il a tort d’affirmer que le Greffier a rendu une telle ordonnance. Dans sa décision, le Greffier s’est fondé sur l’article 14 D) de la Directive pour refuser de commettre M. Prodanovic comme conseil dans une affaire particulière ; il ne lui a pas interdit d’exercer dans toutes les affaires portées devant le Tribunal, en conformité avec l’article 45 du Code de déontologie.
  6. L’article 14 D) de la Directive autorise le Greffier à refuser la commission d’office d’un conseil « qui fait l’objet » d’une procédure disciplinaire en vertu de l’article 45 du Code de déontologie. Même si l’argument de M. Prodanovic n’est pas entièrement clair, il semble que celui-ci soutient que le Greffier ne peut refuser de commettre un conseil d’office, en application de l’article 14 D) de la Directive, que lorsqu’une ordonnance d’interdiction temporaire d’exercer a été rendue conformément à l’article 45 du Code de déontologie. Si c’est le cas, il se trompe. Le fait qu’une telle procédure ait été engagée suffit. Il n’existe aucune condition supplémentaire exigeant que la procédure soit close avant que le Greffier puisse refuser de commettre un conseil d’office en vertu de l’article 14 D) de la Directive. Quoi qu’il en soit, le Conseil de discipline a depuis lors rendu, le 6 octobre 2003, une décision suspendant le défendeur avec effet immédiat.

 

Fait en anglais et en français, la version en anglais faisant foi.

Le 16 octobre 2003
La Haye (Pays-Bas)

Le Président du Tribunal
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Theodor Meron

[Sceau du Tribunal]