Page 109
1 Le mardi 11 décembre 2007
2 [Conférence de mise en état]
3 [Audience publique]
4 [L'accusé est introduit dans le prétoire]
5 --- L'audience est ouverte à 14 heures 19.
6 Mme LE JUGE PROST : [interprétation] Bonjour à toutes et à tous.
7 Madame la Greffière, veuillez citer l'affaire inscrite au rôle.
8 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Bonjour, Madame le Juge, affaire IT-05-
9 88/2-PT, le Procureur contre Zdravko Tolimir.
10 Mme LE JUGE PROST : [interprétation] Merci.
11 Monsieur Tolimir, j'aimerais avoir votre confirmation. Vous recevez bien
12 l'interprétation. Vous me comprenez; est-ce exact ?
13 L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui. Merci. Je vous entends très bien. Je vous
14 remercie. Je vous souhaite une bonne journée aussi.
15 Mme LE JUGE PROST : [interprétation] Si à un moment donné vous avez des
16 difficultés, signalez-le-moi sans tarder.
17 Je vais demander aux parties de se présenter.
18 L'Accusation.
19 M. McCLOSKEY : [interprétation] Bonjour, Madame le Juge, Peter McCloskey
20 avec Rupert Elderkin et Mme Stewart, notre commis.
21 Mme LE JUGE PROST : [interprétation] Oui. Je constate que
22 M. Tolimir se défend lui-même.
23 Avant de commencer, une question liminaire. A la dernière Conférence de
24 mise en état, il s'agissait à ce moment-là de votre première comparution en
25 tant qu'accusé qui assure sa propre défense, on vous avait donné une
26 certaine marge de manœuvre vous permettant d'exprimer vos convictions
27 religieuses par la prière au début de l'audience. Mais vous avez décidé de
28 vous défendre vous-même dans le cadre d'une procédure, vous devez donc vous
Page 110
1 confirmer aux règles qui s'appliquent.
2 Nous respectons tout à fait votre conviction religieuse, mais il faut
3 aussi respecter l'étiquette judiciaire de ce Tribunal. Désormais, je vous
4 demanderais de vous abstenir de ce genre d'intervention et de vous limiter
5 aux questions relevant de la procédure.
6 Si vous voulez faire des prières dans le cadre de cette procédure,
7 faites-le en dehors du prétoire ou de façon silencieuse. Je suis sûr que
8 vous me comprenez et que vous ferez preuve de coopération à cet égard.
9 Maintenant, passons au fond de la réunion de cet après-midi. C'est la
10 deuxième Conférence de mise en état en l'espèce. En vertu du Règlement,
11 l'objet d'une telle réunion est clair, il est de prévoir des échanges en
12 vue de la préparation du procès, de faire la mise en état de l'affaire,
13 faire le point, et de vous permettre de soulever toute question que vous
14 voulez abordez, par exemple, votre étant de santé, mental ou autre, et les
15 conditions de détention.
16 La coutume veut que j'aborde tout d'abord quelques points peu
17 nombreux cet après-midi prévus à l'ordre du jour; ensuite, vous pourrez,
18 Monsieur Tolimir, nous faire part d'éventuelles questions.
19 Commençons par une question peu importante. C'est simplement une
20 confirmation pour que ce soit acté au dossier s'agissant de la pratique en
21 matière de délai de versement ou de dépôt. Etant donné que l'accusé se
22 défend lui-même, ça pose quelques difficultés, il faut aussi faire la
23 traduction.
24 Tout délai de dépôt qui s'applique à l'Accusation court à part du
25 moment où on a la traduction qui est versée de requêtes éventuelles faites
26 par l'accusé.
27 Dans la même veine, les délais qui s'appliquent à vous, Monsieur
28 Tolimir, courent à partir de la notification réussie ou pas de traduction
Page 111
1 de documents. La Chambre, le greffe ou l'Accusation, la date de
2 notification, de signification réussie ou pas sera celle précisée dans les
3 procès-verbaux qui sont versés de façon périodique indiquant la date à
4 laquelle on a essayé de faire cette signification.
5 Je ne voulais pas vous demander votre avis. Je voulais simplement que
6 ceci soit acté au dossier. Fort bien.
7 Passons maintenant au point le plus important de cet après-midi. Ce sont
8 les requêtes pendantes en l'espèce. Avant de parler des deux requêtes dont
9 je voulais discuter au départ, j'aimerais dire ceci : je comprends,
10 Monsieur Tolimir, que vous avez déposé de nouveaux arguments hier, je
11 pense. Mais moi, je n'en ai pas reçu la traduction officielle.
12 Manifestement l'Accusation non plus ni le greffe. Je ne pense pas que le
13 greffe a eu l'occasion de recevoir une traduction et de l'examiner.
14 Ce qui veut dire que je ne vais pas parler aujourd'hui de ces
15 arguments et vous aurez des délais habituels, en tant que de besoins nous
16 en traiterons par voie de décision après les vacations judiciaires.
17 Cependant, j'ai été avisée du fait que ceci porte une fois de plus sur la
18 question de la langue, question que nous allons aborder une fois de plus
19 cet après-midi. Donc s'il n'y a pas d'autres éléments, vous pouvez vous
20 attendre à une décision qui ira dans le même sens que le point que nous
21 allons aborder sous peu.
22 Il y a deux requêtes en souffrance surtout. Il y a d'abord les exceptions
23 judicielles [phon] en application de l'article 72 que vous avez déposées
24 dans les délais, que vous avez déposées le 30 octobre, la traduction ayant
25 été versée le 7 novembre. Nous avons une réponse de l'Accusation qui a été
26 déposée le 21 novembre.
27 Je peux vous indiquer que la décision portant sur cette exception et les
28 objections tombera sous peu, elle sera en tout cas rendue avant les
Page 112
1 vacations judiciaires, la Chambre la rendra en temps utile.
2 Passons à la question de la Chambre de la mise en état et de l'aide
3 nécessaire pour désigner un conseiller juridique et aussi la question de la
4 communication dans une langue qui est une requête déposée par M. Tolimir le
5 16 novembre, la traduction déposée le
6 20 novembre. Nous avons une réponse de l'Accusation, elle a répondu le
7 4 décembre et nous avons eu aussi des arguments présentés par le greffe le
8 7 décembre.
9 Je voulais en fait aborder cette requête oralement aujourd'hui.
10 Au fond, vous soulevez deux grandes questions dans cette requête; il y a
11 celle de la désignation d'un conseiller juridique, il y aussi la question
12 de la signification du document dans la langue et dans l'écriture de
13 signification.
14 Pour le premier point, je vous rappelle que c'est le greffe qui est en
15 premier lieu responsable de cette question. La participation de la Chambre
16 n'intervient que si une décision précise est prise, par exemple, si vous
17 voulez que nous, nous l'examinions. Mais j'ai bien examiné vos écritures
18 déposées et celles du greffe, et je suis convaincue que ce n'est pas encore
19 le cas.
20 Il m'apparaît clairement que la discussion se poursuit entre vous et le
21 greffe sur cette question très importante. Je vous exhorte à poursuivre ce
22 dialogue avec le greffe. Et je demanderais au greffe de faire de son mieux
23 pour essayer de régler cette question de la désignation d'un conseiller
24 juridique dans les meilleurs délais. Manifestement, il s'agit là d'une
25 question capitale pour préparer le procès.
26 Cependant, à part cela, il n'y a rien dans cette requête dont doit se
27 saisir le Chambre; par conséquent, inutile de rendre une décision sur ce
28 premier point. Mais je vous encourage, Monsieur Tolimir, à poursuivre le
Page 113
1 dialogue avec le greffe, je comprends que cela est une question importante
2 pour vous.
3 Passons à la deuxième question que vous soulevez dans cette requête, la
4 question de la langue et de l'écriture de l'alphabet utilisé.
5 Nous allons clore ce chapitre aujourd'hui, Monsieur Tolimir. A la dernière
6 Conférence de mise en état, j'avais laissé la porte entrouverte. Nous en
7 avions longuement discuté et je vous avais permis d'en reparler avec moi,
8 mais je l'avais fait en espérant que vous alliez réfléchir à cette question
9 pour changer d'avis; c'est ce que je vous avais encouragé de faire.
10 J'espérais aussi, à titre subsidiaire, que vous nous fourniriez une
11 explication claire, une motivation claire à votre position. Mais ni l'un ni
12 l'autre n'a été fait par vous, malheureusement.
13 J'ai des écritures déposées par le greffe qui attestent de votre refus
14 persistant d'accepter des documents qui ne sont pas, comme vous dites, en
15 serbe ou en cyrillique; et vous ne donnez dans votre requête aucune
16 explication, si ce n'est que l'affirmation disant que vous ne comprenez pas
17 l'alphabet latin.
18 Vous avez raison, Monsieur Tolimir, quand vous dites que vous avez le droit
19 de recevoir des documents importants dans une langue que vous comprenez,
20 mais ça ne veut pas dire pour autant que vous avez qu'en tant qu'accusé, le
21 droit quels que soient sa formation, son contexte, son expérience, de venir
22 ici au Tribunal pour exiger que soit produit dans n'importe quelle langue,
23 en n'importe quel alphabet que choisirait l'accusé. Je vous l'ai expliqué
24 la dernière fois, avec force de détails, il est important ici, le mot ici
25 porteur c'est comprendre, pas préférence.
26 Pour que nous acceptions d'examiner cette requête, il faut qu'il y ait dans
27 le dossier autre chose qu'une simple affirmation, lorsque vous dites pour
28 qu'on vous croie lorsque vous dites que vous n'êtes pas capable de
Page 114
1 comprendre les documents pertinents. Car ici, le dossier n'offre aucun
2 doute; au contraire, il pousse à tirer la conclusion contraire.
3 Ici, je vais simplement résumer les choses, être synthétique pour mettre en
4 exergue certains des points.
5 Vous avez fait votre formation en ex-Yougoslavie, d'après ce que dit le
6 greffe, le 18 juillet, et vous l'avez reconnu la dernière fois devant moi,
7 ici, à la dernière Conférence de mise en état; on enseignait l'alphabet
8 latin dans les écoles de votre temps. La première fois que vous avez
9 comparu ici, vous avez reçu l'acte d'accusation en B/C/S, en alphabet
10 latin, et le 4 juin, vous avez reconnu - et là je vous cite : "Reçu une
11 copie dans une langue, vous avez dit que je comprends il y a deux jours,
12 j'ai eu le temps de le lire et de l'examiner."
13 Partant de ces mêmes documents, vous avez été à même dans les délais prévus
14 de préparer, de soumettre des objections préjudiciaires [phon] concernant
15 l'acte d'accusation, et les arguments que vous soumettez indiquent que vous
16 comprenez manifestement la teneur dudit acte d'accusation.
17 Lorsque je vous pose des questions directement, vos réponses ont été
18 contradictoires pour ce qui est de la compréhension que vous avez de
19 l'alphabet latin. Parfois, vous dites "je ne comprends pas," "je ne
20 comprends pas assez," vous dites encore que c'est une langue dans laquelle
21 vous n'avez pas de réaction rapide, que vous comprenez moins bien. Vous
22 avez même fait allusion à des conditions ou des circonstances médicales de
23 1983, qui avaient exigé de votre part que vous réappreniez une partie de la
24 langue, mais vous n'avez rien soumis pour étayer votre propos.
25 J'ai aussi remarqué que l'acte d'accusation, le 10 octobre, avait déposé
26 une réponse à votre demande de délai supplémentaire, et dans cette réponse
27 il y a des exemples de documents qui remontent à la période allant de 1992
28 à 1995, en serbe, en alphabet latin, documents que vous avez soit signés,
Page 115
1 soit reçus en raison des fonctions officielles que vous exerciez dans
2 l'armée à l'époque. Et je le précise pour le dossier, ces documents ont été
3 déposés et j'ai vu d'autres documents analogues en tant que Juge dans le
4 procès Popovic.
5 Vous dites que vous ne comprenez pas. Alors, pour vous croire il faudrait
6 que je croie que vous qui êtes intelligent, haut gradé de l'armée à
7 l'époque, en plein milieu d'une guerre, que vous communiquiez, que vous
8 envoyiez et receviez des documents dans une langue que vous ne compreniez
9 pas. Il faudrait que je le croie. Bien, non.
10 Par conséquent, en raison de tous les éléments du dossier dont j'ai donné
11 des exemples, je n'ai pas de doute, je suis convaincue plutôt que vous êtes
12 capable de lire et de comprendre les documents qu'ils vous ont été soumis
13 en B/C/S en alphabet latin.
14 Je suis aussi convaincue que la seule raison qui vous pousse à faire
15 objection, c'est que les documents ne correspondent pas parfaitement à
16 langue officiellement utilisée en Serbie. Mais je vous l'ai dit la dernière
17 fois, ce n'est pas une raison qui me permettrait de décider d'utiliser les
18 ressources, pourtant précieuses en matière de traduction ici, pour les
19 charger de traduire ce document pour vous en cyrillique.
20 Par conséquent, la requête que vous avez déposée le
21 20 novembre, c'est à ce moment-là que la traduction était déposée, cette
22 requête est rejetée pour ce qui est du volet dans lequel vous demandiez des
23 services de traduction.
24 Je vous l'ai dit, Monsieur Tolimir, nous allons clore ce chapitre
25 aujourd'hui, mais je veux que tout soit clair pour vous sur un point. Les
26 chefs d'accusation retenus contre vous sont très graves. Il s'agit d'une
27 affaire très complexe. Nous avons donné du temps, nous avons longuement
28 examiné la question de ces documents. Bien sûr, vous pourrez contester la
Page 116
1 compétence de l'acte d'accusation, vous pourrez déposer des exceptions
2 préjudicielles, mais il faudra du temps pour préparer le procès. Et vous
3 n'avez même pas commencé à y penser.
4 Cette situation est donc intolérable, et c'est une situation que la
5 Chambre ne saurait laisser perdurer. Sine die, vous aurez une brève période
6 pour faire le point pour voir si vous allez changer d'avis, une semaine ou
7 à peu près, et pour veiller à accepter la signification des documents la
8 prochaine fois.
9 Sachez aussi que vous allez placer la Chambre dans une situation où
10 elle sera forcée de prendre des mesures, et peut-être de se demander si
11 elle vous laisse le droit de vous défendre étant donné que votre
12 comportement actuel empêche, entrave la bonne mise en état du procès.
13 Ce qui veut dire que c'est vous qui allez décider, c'est vous qui
14 avez ce choix.
15 Passons maintenant au troisième sujet que j'avais prévu à l'ordre du
16 jour. Il vous concerne, Monsieur McCloskey. La dernière fois, nous avons
17 parlé de la question de la communication visée par l'article 66(A)(ii).
18 Manifestement nous n'allons pas aborder la question de l'acceptation de la
19 signification des documents, mais est-ce que vous pourriez me dire ce qu'il
20 en est en matière de communication en vertu de l'article 66(A)(ii).
21 M. McCLOSKEY : [interprétation] Nous étions préparés pour fournir ces
22 documents. Un petit moment, je vous prie.
23 [Le conseil de l'Accusation se concerte]
24 Nous avons ces documents. Ils nous sont revenus, donc nous pourrons
25 les renvoyez tout à fait.
26 Mme LE JUGE PROST : [interprétation] Donc pour ce qui de tous les
27 documents dont nous avons parlé hier, vous avez essayé d'envoyer ces
28 documents; c'est cela ? Ce que j'aimerais savoir, en fait, c'est s'il y en
Page 117
1 a d'autres. Si les documents ont été acceptés, est-ce que cela signifie que
2 vous avez respecté toutes les exigences en matière de communication ?
3 M. McCLOSKEY : [interprétation] Je voudrais vérifier une nouvelle
4 fois, Madame le Juge. Mais je pense que nous y sommes presque. Il va y
5 avoir -- nous aurons besoin de déclarations audio, il faudra que je vérifie
6 tout cela. Le problème, en fait, c'est qu'il y en a qui revienne.
7 Mme LE JUGE PROST : [interprétation] Merci, Monsieur McCloskey.
8 Je vous demanderais de bien vouloir procéder à cette vérification
9 aussi rapidement que possible, et ainsi vous serez à même de confirmer à
10 notre intention si ces documents sont sur le point d'être communiqués,
11 peuvent être communiqués.
12 M. McCLOSKEY : [interprétation] Tous les documents se trouvent dans
13 le système électronique et nous pouvons donc fournir le sommaire. Il s'agit
14 tout simplement de pouvoir le faire. Je me suis présenté au général
15 aujourd'hui, et peut-être que nous pourrions voir s'il souhaiterait
16 utiliser cette option ou cette possibilité offerte par le système
17 électronique pour la communication.
18 Mme LE JUGE PROST : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur
19 McCloskey, et je vous encourage vivement à poursuivre le cours de ces
20 discussions. Peut-être que la prochaine fois nous pourrons ainsi régler,
21 une fois pour toutes, cette question pour ce qui est du dossier de
22 l'affaire.
23 Monsieur Tolimir, avez-vous des questions que vous souhaiteriez
24 soulever ? Avez-vous quoi que ce soit à dire à propos de la communication
25 de pièces, avez-vous quoi que ce soit à dire à propos de l'article
26 66(A)(ii).
27 L'ACCUSÉ : [interprétation] J'ai plusieurs éléments à soulever à
28 propos de ce que vous venez de dire.
Page 118
1
2
3
4
5
6
7
8
9
10
11
12
13
14 Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des
15 versions anglaise et française
16
17
18
19
20
21
22
23
24
25
26
27
28
Page 119
1 Premièrement, je souhaiterais souhaiter la bienvenue à toutes les
2 personnes présentes dans le prétoire, et j'aimerais revenir sur tout ce que
3 vous avez dit, non seulement sur ce que vient de dire le Procureur. Je vous
4 remercie.
5 Mme LE JUGE PROST : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur Tolimir. Je
6 suis tout à fait disposée à vous entendre à propos de l'article 66(A)(ii),
7 je suis tout à fait disposée à vous entendre si vous avez quoi que ce soit
8 à dire à propos de la date butoir ou des dates butoir que j'ai parlé.
9 Pour ce qui est de la question linguistique, Monsieur Tolimir, j'ai déjà
10 entendu de votre part de nombreux arguments. Certains arguments ont été
11 présentés par écrit, d'autres par voie orale. J'ai même rendu une décision
12 à ce sujet et je ne souhaite absolument pas que l'on réaborde ce sujet.
13 Si vous souhaitez soulever quoi que ce soit à propos de la communication de
14 pièces au titre de l'article 66(A)(ii), à savoir ce que dont nous avons
15 parlé avec le représentant du Procureur, je suis toute ouïe.
16 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je vous remercie.
17 Mais tous les problèmes convergent vers le problème linguistique, et le
18 problème linguistique doit être discuté avant que nous n'envisagions de
19 résoudre les autres choses.
20 Mme LE JUGE PROST : [interprétation] Vous avez entendu, Monsieur Tolimir,
21 ma décision à ce sujet, étayée de mes observations, donc je vous
22 demanderais de bien vouloir passer au point suivant. En fait, je souhaite
23 encore soulever une question cet après-midi, il s'agit de votre état de
24 santé, Monsieur Tolimir. Comme toujours, si vous le préférez, je suis tout
25 à fait disposée à ce que nous ne parlions à huis clos partiel ou nous
26 pouvons parler en audience publique. Il vous appartient d'en décider.
27 Souhaiteriez-vous passer à huis clos partiel pour aborder votre état de
28 santé ou pour apporter d'autres questions générales relatives à votre
Page 120
1 détention au quartier pénitentiaire ?
2 Est-ce que vous souhaitez que nous passions à huis clos
3 partiel ?
4 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je vous remercie.
5 Ce n'est pas la peine de passer à huis clos partiel, parce que le greffe a
6 manipulé les détails relatifs à mon état de santé. Je souhaiterais que l'on
7 en parle publiquement. Mais dans un premier temps, il faut que nous
8 parlions du premier problème que la Chambre de première instance semble
9 vouloir éviter coûte que coûte, et nous ne pourrons rien régler tant que
10 nous n'abordons pas cette première question.
11 Mme LE JUGE PROST : [interprétation] Monsieur Tolimir, je pense avoir été
12 très claire, et je ne pense pas que mes remarques, cet après-midi, peuvent
13 être considérées comme une tentative d'éviter de discuter la question. Nous
14 n'allons pas parler de cette question, nous n'allons pas reparler de la
15 question linguistique. Toutefois, j'aimerais véritablement vous donner la
16 possibilité de soulever tout autre question telle que des questions
17 relatives à votre état de santé. J'aimerais, par exemple, savoir si vous
18 avez quoi que ce soit à dire à propos de votre situation ou de vos
19 conditions de détention au quartier pénitentiaire. Donc si vous souhaitez
20 soulever ce genre de questions, c'est le moment de le faire, nous vous
21 écouterons.
22 Je m'excuse, il faut que vous branchiez votre microphone.
23 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je souhaiterais que la discussion relative à
24 mon état de santé ait lieu en audience publique et non pas à huis clos
25 partiel.
26 Mme LE JUGE PROST : [interprétation] Très bien.Nous sommes de toute façon
27 en audience publique. Donc j'aimerais savoir si vous avez quelque chose de
28 particulier que vous souhaiteriez soulever à propos de votre état de santé,
Page 121
1 de votre traitement. Avez-vous quoi que ce soit à soulever à l'intention de
2 la Chambre de première instance ?
3 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je vous remercie.
4 Je souhaiterais indiquer que vous, en tant Chambre de première instance,
5 n'avez jamais répondu aux écritures que j'ai déposées. Depuis mon arrivée
6 ici, aucune de mes requêtes n'a été entendue, notamment j'inclus là-dedans
7 la requête que je vous ai adressée ainsi qu'au greffier à plusieurs
8 reprises. D'ailleurs, j'ai parlé du fait que mes droits discrétionnaires
9 avaient été enfreints, et j'ai parlé en fait de tous les sévices que j'ai
10 subis en détention à partir où je suis arrivé.
11 Je jouis d'un état de santé parfait. D'ailleurs, tous les contrôles
12 médicaux que j'ai faits peuvent le prouver, ma pression sanguine est très
13 bonne. D'ailleurs elle est de 130 ou de 13 à 9, 13,5 ou 9. Voilà pour ce
14 qui est de l'état de santé de mes artères et de mes veines, et ceci, sans
15 que je ne prenne aucun médicament et sans que je n'aie un régime d'exercice
16 physique et compte tenu de mon âge, je pense que j'ai une pression sanguine
17 qui est excellente.
18 Toutefois, le greffier a absolument insisté pour informer le public de
19 l'annonce de mon décès et le greffier a indiqué que mon état de santé était
20 particulièrement désastreux. Il n'y a absolument aucune raison de divulguer
21 ou de communiquer ce genre d'information. J'ai écrit dans mes documents
22 qu'il s'agissait de manœuvre, de calcul, et ce, afin de me priver du droit
23 à représenter mes droits et mes intérêts, et ce, afin de ne pas me donner
24 les documents dans ma langue et dans un alphabet que je comprends. Car tout
25 cela fait partie, tout cela s'inscrit dans le cadre visant à ne pas
26 m'autoriser à assurer ma propre défense.
27 Le quartier pénitentiaire des Nations Unies est censé s'occuper de mon état
28 de santé, et ce, dans l'intérêt du public, alors qu'en réalité ils font
Page 122
1 absolument tout ce qu'ils peuvent faire pour faire en sorte que mon état de
2 santé se détériore.
3 Ma cellule est placée sous surveillance, 24 heures sur 24, du fait de
4 caméras. Il y a une lumière dans ma cellule même pendant la nuit, et les
5 gardiens insistent pour me réveiller toutes les
6 demi-heures pour vérifier mon état de santé et pour vérifier quelle est ma
7 situation dans cette cellule.
8 Tous les jours, à partir du moment où j'ai été arrêté jusqu'au jour
9 d'aujourd'hui, cela couvre une période de six mois, donc tous les jours
10 ouvrables qui correspondent à cette période me font passer par une
11 expérience qui est un peu comme si je m'endormais dans un wagon de train.
12 Tout le monde me réveille, alors lorsqu'on parle au public de ma situation
13 le public sait que ma santé est parfaite.
14 Mon épouse a voulu m'amener trois différents types de thé, étant donné que
15 je ne prends aucun médicament, ou de tisanes, et maintenant ils m'empêchent
16 même de boire la camomille ou d'autres tisanes, tisanes qui d'ailleurs
17 amélioreraient les troubles urinaires dont je souffre depuis plusieurs
18 années. Cela va à l'encontre de toutes les règles qui régissent les droits
19 de l'homme. Et je pense notamment au sort des personnes qui sont placées en
20 détention et qui n'ont pas encore été jugées et condamnées. Ils veulent me
21 forcer à prendre des médicaments dont je ne connais absolument pas
22 l'origine, alors qu'ils m'empêchent de boire mes tisanes alors que ces
23 tisanes je les connais très, très bien.
24 Qui plus est, je dois dire que je suis en parfaite santé, mon état de santé
25 est absolument excellent. Je n'ai pas besoin de ces médicaments mais ce
26 dont j'ai besoin, par contre, c'est de pouvoir préparer ma défense et c'est
27 de pouvoir bénéficier de toutes les conditions préalables qui me
28 permettraient de préparer ma défense hors de ma cellule, hors du quartier
Page 123
1 pénitentiaire.
2 Car tous les droits dont vous avez parlé émanent du droit de
3 l'accusé. J'en ai pour preuve le Statut de ce Tribunal. L'article 20 et 21,
4 par exemple, stipulent que tous les droits sont avant tout les droits de
5 l'accusé. L'accusé est la personne qui doit pouvoir jouir des droits que
6 tout le monde doit respecter. Toutefois, vous en tant que Présidente de la
7 Chambre de première instance, vous ne respectez pas mes droits.
8 L'Accusation ne respectait pas mes droits, puisqu'elle m'envoie des
9 documents dans une langue que je ne comprends absolument pas et le greffier
10 ne respecte pas non plus mes droits.
11 Ils considèrent que j'ai préparé ma défense au cours des six dernières
12 années, alors que je n'ai pas reçu un seul document hormis le document qui
13 correspond à l'acte d'accusation. Au cours des six derniers mois, je n'ai
14 reçu aucune aide et aucune assistance juridique quelle qu'elle soit et un
15 accusé qui se défend, qui représente ses droits, qui ne se trouve pas en
16 détention et qui se trouve en détention et qui donc ne peut pas bénéficier
17 de toutes les autres conditions qui lui permettraient d'obtenir ce qu'il
18 doit obtenir doit pouvoir bénéficier d'une assistance juridique.
19 Je ne sais pas, je ne comprends pas comment vous vous attendez à ce que je
20 prépare ma défense tout seul entre les quatre murs de ma cellule et avec
21 les quelques documents que j'ai.
22 Vous avez dit ici que je vous avais dit que j'avais compris l'acte
23 d'accusation. Je me suis contenté de vous dire qu'on m'avait donné l'acte
24 d'accusation, que je l'avais parcouru, que je l'avais feuilleté, et que
25 j'avais plaidé au vu de l'acte d'accusation.
26 Mme LE JUGE PROST : [interprétation] Monsieur Tolimir, je vais vous
27 interrompre.Je vais vous interrompre. Monsieur Tolimir, s'il vous plaît.
28 J'aimerais vous demander de vous arrêter. Comme je vous l'ai déjà
Page 124
1 indiqué, j'ai étudié la question linguistique et je veux revenir à ce dont
2 nous parlions, à savoir vous avez parlé de votre état de santé, vous avez
3 parlé du traitement que vous aviez, que vous receviez au quartier
4 pénitentiaire. Je ne veux surtout pas revenir sur les éléments que vous
5 aviez soulevés dans votre requête et à propos desquels il y a une décision
6 qui a été rendue.
7 J'aimerais reprendre ce que vous venez de dire. Vous avez parlé
8 d'assistance juridique. Comme je vous l'ai déjà dit, je comprends
9 parfaitement l'importance de la nomination d'un conseil juridique. J'ai
10 étudié de façon méticuleuse votre demande d'assistance juridique. Il ne
11 s'agit pas de conseil juridique, je suppose que vous connaissez la
12 différence entre un conseil et une assistance juridique.
13 Mais comme je l'ai indiqué un peu plus tôt, il s'agit d'une question qui va
14 falloir analyser dans un premier temps avec le greffier. J'ai exhorté le
15 greffier - je continue d'ailleurs à le faire - j'ai exhorté le greffier
16 pour faire en sorte qu'une solution soit trouvée à ce problème. Je
17 comprends l'importance dudit problème et je vous encourage vivement à
18 poursuivre ces discussions avec le greffe et ses représentants, mais c'est
19 une question qu'il va falloir que vous traitiez dans un premier temps avec
20 le greffe et ses représentants.
21 J'aimerais maintenant que nous revenions sur ce que vous avez dit à propos
22 du traitement que vous receviez au sein du quartier pénitentiaire. Je peux
23 absolument vous assurer, Monsieur Tolimir, que j'ai --
24 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je ne comprends pas, j'entends le français.
25 C'est une langue que je ne comprends pas.
26 Mme LE JUGE PROST : [interprétation] Est-ce que vous pourriez, je vous
27 prie, vérifier le canal.
28 Je m'excuse, vous entendez l'interprétation maintenant, Monsieur Tolimir,
Page 125
1 et de préférence l'interprétation en B/C/S et non en français ? Est-ce que
2 vous m'entendez maintenant ?
3 L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, oui, maintenant j'entends. J'entends
4 l'interprétation en serbo-croate. Je vous remercie.
5 Mme LE JUGE PROST : [interprétation] Je vous remercie.
6 Monsieur Tolimir, je peux vous assurer que la Chambre de première instance
7 a pris en considération toutes les requêtes que vous avez présentées. Nous
8 avons relu une décision écrite. En fait, le 10 octobre, par exemple, nous
9 avons rendu une décision par voix écrite à propos de votre requête relative
10 à l'infraction ou à la violation de vos droits. Je ne sais pas si vous avez
11 accepté la signification de cette décision, Monsieur Tolimir, mais je peux
12 vous assurer que nous étudions avec beaucoup d'intérêt et d'attention tout
13 ce que vous envoyez, tout ce que vous préparez et nous réagissons, nous
14 prenons une décision, par exemple.
15 Il y a, par exemple, une décision du 10 octobre qui nous a permis de rendre
16 une décision à propos de votre requête relative à l'infraction et à la
17 violation de vos droits. Donc nous sommes tout à fait préparés à faire
18 cela, Monsieur Tolimir.
19 Comme je l'ai déjà mentionné préalablement, pour ce qui est de vos
20 conditions de détention et de votre surveillance 24 heures sur 24, je vous
21 ai déjà dit qu'il s'agissait d'autant d'éléments qui sont du ressort du
22 greffe et des personnes qui travaillent au Centre de Détention. La Chambre
23 de première instance n'intervient pas dans l'administration quotidienne,
24 qui est la responsabilité de ces organes.
25 Toutefois, je remarque qu'aujourd'hui vous avez soulevé la question de
26 toutes ces interruptions de sommeil qui vous sont imposées pendant la nuit,
27 et je prends bonne note des mesures qui sont prises par le greffe pour
28 superviser votre situation. Sans pour autant m'immiscer dans leur
Page 126
1 responsabilité à ce sujet, je vais leur demander d'envisager la question et
2 d'envisager des mesures qui pourraient être suivies et qui pourraient vous
3 permettre de ne pas avoir votre sommeil interrompu.
4 Donc je prends bonne note de ce que vous avez dit, Monsieur Tolimir, et par
5 le truchement de notre juriste, je prendrai langue avec le greffe à ce
6 sujet, parce que vous avez expliqué de façon très, très claire quelles
7 étaient vos préoccupations.
8 Je vais dans la mesure du possible et du mieux que je peux au vu du rôle
9 imparti à chacun pour ce qui est de l'administration essayer de suivre
10 cette affaire. Vous avez également indiqué de façon très, très claire,
11 comme vous l'avez fait d'ailleurs par le passé, quel était votre point de
12 vue à propos de votre état de santé. Le greffe est responsable de cette
13 question. Le greffe a indiqué de façon très, très claire quel était son
14 point de vue, et la Chambre ou moi-même ne pouvons faire grand-chose en la
15 matière.
16 Une fois de plus, je vous exhorterais vivement à suivre les conseils
17 médicaux qui vous sont fournis et assurer le suivi de cela, Monsieur
18 Tolimir. Je vais, quant à moi, ne pas oublier ce que vous nous avez dit.
19 Pour ce qui est de votre toute dernière intervention, nous n'allons
20 pas revenir sur des questions d'ordre général, Monsieur Tolimir, pour le
21 moment.
22 J'aimerais savoir si avez d'autres questions à soulever, car je pense
23 que pour ma part j'en ai terminé avec ce que je voulais dire.
24 Monsieur Tolimir, avez-vous autre chose à dire ? Je vous le répète, nous
25 n'allons pas revenir sur la question linguistique, sur la notification des
26 documents, mais j'aimerais savoir si vous avez autre chose à soulever cet
27 après-midi.
28 L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, oui. J'aimerais aborder d'autres questions
Page 127
1 et je vous remercie de me donner la possibilité de dire que vous éviter de
2 parler de toutes les questions qui ont à voir avec la procédure. Vous
3 m'avez demandé quel était mon état de santé, ce qui est excellent, mais ce
4 que je peux dire c'est qu'on m'empêche en fait de bénéficier d'une
5 assistance à laquelle j'ai droit au titre de l'article 14 du droit
6 international ou de la convention internationale sur les droits de l'homme.
7 J'ai écrit en l'espèce cinq requêtes, et je dois pouvoir au moins avoir un
8 assistant juridique, ce qui est le droit de toute personne qui se défend
9 elle-même et qui est placée en détention. Car le greffe n'a pas souhaité
10 nommer des conseillers juridiques, il n'a pas souhaité nommer les
11 conseillers juridiques que j'avais recommandés. Je n'ai pas attendu la fin
12 des dates butoir. J'ai réagi le plus rapidement possible. Mais le greffe ne
13 veut pas nommer mes conseils et mes avocats, parce que le greffe ne
14 souhaite pas que je me représente moi-même. C'est un droit fondamental que
15 le droit de me représenter moi-même, et c'est un droit que je ne souhaite
16 déléguer à personne d'autre. Bien entendu que cela vous concerne, parce que
17 vous êtes la Présidente de la Chambre de première instance. Dans tous les
18 milieux juridiques - et je pense également aux différentes législations,
19 droits et conventions et au Statut de la Cour pénale internationale - il
20 est évident qu'un accusé a le droit de se représenter dans sa langue
21 maternelle et dans une langue qu'il comprend et qu'il peut lire. Vous ne
22 pouvez pas revenir sur cette question, car c'est la question qui est la
23 plus fondamentale des questions.
24 On ne peut pas me refuser le droit d'assurer ma propre défense. On ne
25 peut pas octroyer ce droit à quelqu'un d'autre. Aucun avocat ne pourra
26 recevoir des documents à moins que je ne les reçoive d'abord et lorsque je
27 les recevrai dans une langue que je comprends, c'est à partir de ce moment-
28 là que je les communiquerai à mon avocat.
Page 128
1
2
3
4
5
6
7
8
9
10
11
12
13
14 Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des
15 versions anglaise et française
16
17
18
19
20
21
22
23
24
25
26
27
28
Page 129
1 Ces documents ne peuvent pas être communiqués à d'autres personnes,
2 d'autres personnes qui me seraient imposées, parce qu'à l'article 21 il
3 n'a pas été écrit qu'on pouvait m'imposer des conseils juridiques. Je ne
4 souhaite pas être représenté. Je demande tout simplement une assistance
5 juridique. Et je souhaiterais que les personnes qui assureront mon
6 assistance juridique soient financées. Je les ai trouvées, je souhaiterais
7 - il faut savoir d'ailleurs que le greffe fournit une assistance juridique
8 à des personnes qui n'ont pas suffisamment de fonds, qui sont considérées
9 comme indigentes. Et la communauté internationale peut payer ce genre de
10 coûts si l'accusé n'est pas en mesure de les payer lui-même.
11 Je n'ai pas besoin d'assistants juridiques. J'ai choisi une
12 assistance juridique, il faut tout simplement que vous financiez cette
13 assistance juridique. Je ne peux mener aucune activité à partir du quartier
14 pénitentiaire. Je ne peux pas avoir de documents, je ne peux pas avoir des
15 documents qui viennent d'autres affaires pour comprendre la juridiction et
16 la compétence de ce Tribunal, et vous faites constamment référence à la
17 compétence de ce Tribunal. Il faut que je puisse disposer de ces documents,
18 et seuls mes assistants juridiques pourront préparer cela. Au cours des six
19 derniers mois on ne m'a même pas autorisé à avoir un minimum d'assistance
20 juridique à laquelle j'ai droit conformément au Statut et conformément à la
21 convention internationale régissant les droits civiques.
22 Je ne sais pas pourquoi vous évitez cette question, car elle est au
23 cœur de tout, elle est au centre de tout. Pourquoi est-ce que mes avocats
24 n'ont pas été nommés conseillers juridiques, les avocats dont j'ai donné
25 les noms le 10 octobre. Cela fait deux mois maintenant. Parce qu'il faut
26 savoir que deux mois ont passé puisqu'on est le 11 décembre. Ils ont
27 représenté Milan Martic pendant cinq ans. Ils ont cinq ans d'expérience ici
28 au sein du Tribunal. Peut-être que certains Juges qui composent la Chambre
Page 130
1 de première instance -- ils n'ont peut-être plus d'expérience que certains
2 Juges qui forment la Chambre de première instance, et apparemment la
3 juridiction n'est pas valable pour eux parce qu'ils ne peuvent pas être
4 élus.
5 Mme LE JUGE PROST : [interprétation] Je vais vous interrompre, Monsieur
6 Tolimir.
7 Ça ne fait pas l'ombre d'un doute, et peut-être n'avez-vous pas prêté
8 attention à ce que je disais auparavant. J'accepte ce que vous avez dit, ce
9 que vous avez dit aussi bien oralement que par écrit, lorsque vous avez
10 demandé de l'aide juridique, une assistance juridique, que vous estimez
11 nécessaire. Nous avons déjà parlé auparavant de la question du fait que
12 vous vous défendez vous-même.
13 Le greffe a déposé les conclusions détaillant les discussions qui se
14 poursuivent entre vous, le greffe et les personnes que vous avez choisies;
15 en tout cas, les personnes que vous avez indiqué nommément au greffe. Le
16 greffe explique les difficultés qu'il a rencontrées pour terminer cette
17 désignation. Il se peut que vous ne le sachiez pas, parce que vous n'avez
18 pas accepté que vous soient signifiées les communications du greffe. Or, il
19 l'explique dans certains documents. Personne ne doute - quand je dis
20 personne, je pense au greffe et aux Juges de la Chambre - personne ne doute
21 de la nécessité que vous ayez de l'aide juridique, d'assistants juridiques,
22 que vous avez donné des noms, mais il y a certains facteurs qui
23 interviennent. Est-ce que ces personnes sont prêtes à vous représenter, ou
24 à vous aider.
25 Je ne veux pas entrer dans les détails, parce que là c'est là une
26 prérogative du greffe. Mais je ne cherche pas à éviter la question. D'après
27 ce que j'ai compris des arguments du greffe, lui non plus ne souhaite pas
28 éviter cette question, mais il faudra régler certains points avant de
Page 131
1 procéder à la désignation finale.
2 Si le greffe décide de ne pas choisir quelqu'un que vous vouliez, vous
3 pourrez nous le dire, mais ça n'a pas encore eu d'effet. Aucune décision
4 n'a encore été prise par le greffe de ne pas choisir telle ou telle
5 personne. C'est ce que je crois comprendre des écritures déposées jusqu'à
6 ce jour. Je pense que vous avez été très clair, vous avez bien exprimé
7 votre avis. Nous allons réétudier la question et s'il y a une décision qui
8 va être prise, vous pourrez, bien sûr, si vous le souhaitez, nous en faire
9 part. Ce qui compte pour le moment, c'est que vous examiniez les documents
10 que vous a fournis le greffe. Il est important que vous discutiez avec le
11 greffe pour que puisse se résoudre la question du choix d'une assistance
12 juridique pour vous.
13 Je crois que nous allons en rester là pour le moment. Vous avez très bien
14 exprimé votre avis. Il est acté au dossier. Moi aussi, je veux être claire.
15 J'ai fait auparavant des remarques concernant le fait que vous vous
16 défendez, et c'était en rapport avec la question de la langue. Je n'irai
17 pas plus loin. Je veux en rester là.
18 Vous avez peut-être d'autres sujets que vous souhaitez évoquer, mais si ce
19 n'est pas le cas je suis maintenant au courant de votre situation et
20 j'encourage le greffe à agir au plus vite pour désigner un assistant
21 juridique de votre choix.
22 L'ACCUSÉ : [interprétation] Excusez-moi, excusez-moi, mais une question
23 cruciale que je veux acter au dossier comme vous le dites.
24 A plusieurs reprises, j'ai demandé que soient choisis les assistants
25 juridiques que j'avais sélectionnés qui doivent m'aider à préparer ma
26 défense. Je l'ai demandé ces six derniers mois. Mais le greffe n'a de cesse
27 de refuser. C'est par ça que je me tourne à vous, vous, Chambre de première
28 instance, qui est une instance de contrôle, qui peut voir pourquoi le
Page 132
1 greffe est en train de me faire perdre mon temps depuis six mois. Je n'ai
2 pas reçu un seul document ou le minimum d'assistance juridique que
3 m'accorde l'article 21 du statut.
4 J'aimerais que vous voyiez pourquoi on refuse de m'accorder cette
5 assistance juridique, quand on voit toutes les options depuis ma venue à ce
6 Tribunal jusqu'à ce jour. Vous êtes un organe de contrôle et vous devez
7 savoir pourquoi on fait obstruction, pourquoi on me fait perdre un temps
8 précieux pour ma préparation, parce que six mois se sont déjà écoulés, or
9 je n'ai pas reçu un seul document. Je n'ai pu analyser aucun document avec
10 mes assistants juridiques qui doivent me donner cette aide minimale à
11 laquelle j'ai droit.
12 Donc je voudrais que vous étudiiez ce problème sous cet angle-là, dans
13 cette optique. Il ne faut pas dire que c'est un problème qui se pose au
14 greffe. La Chambre vient de parler de mon état de santé. Je ne comprends
15 pas maintenant, vous parlez de mon état de santé, vous n'avez pas parlé de
16 communication. Ce n'est pas que je ne veux pas recevoir de documents, mais
17 je ne peux pas les recevoir, parce que si j'accepte ces documents, les
18 délais commencent à courir, la procédure s'enclenche, et moi, je ne peux
19 pas recevoir quelque chose dans une langue que vous estimez connue de moi
20 et que je ne connais pas tout ceci, une langue que vous avez créée, une
21 langue qui a été créée après ce qui s'est passé en Bosnie-Herzégovine. Je
22 ne veux pas apprendre cette nouvelle langue.
23 Il faudrait donner des cours en bosniaque, en croate ou en serbe. Le
24 B/C/S est une nouvelle langue. Moi ici, je n'apprends que l'anglais. Je
25 n'apprends pas le B/C/S qui a été créé après la guerre. Ne n'oubliez pas. A
26 mon avis, je ne peux pas recevoir les documents, parce que je ne comprends
27 pas la langue. Ce n'est pas que je ne peux pas les recevoir, mais je
28 voulais que ceci soit acté au dossier. Je ne veux pas ici entamer des
Page 133
1 procédures avec des documents que je ne peux ni lire ni interpréter.
2 Mme LE JUGE PROST : [interprétation] Vous avez fort clairement acté votre
3 point de vue sur la question de la langue au dossier, et il y a une
4 décision, nous n'allons pas revenir là-dessus.
5 Pour ce qui est de l'assistance juridique, nous allons clore ce chapitre-là
6 aussi cet après-midi et, je vous le rappelle, le greffe a fourni des
7 arguments qui font état de discussions qu'il a menées avec vous.
8 Pour ce qui est de la question de vos assistants juridiques, en date
9 du 16 novembre, ceci vous a été signifié, mais je suppose que ça faisait
10 partie des documents que vous avez décidé de ne pas accepter.
11 Je vous reçois cinq sur cinq. Et ce que vous avez dit est maintenant
12 indiqué au dossier. Vous dites avoir besoin d'assistance juridique. Je suis
13 sûr que le greffe suit la procédure, suit les débats et tiendra compte de
14 vos commentaires, et de ma demande veuillez à ce que la question soit
15 réglée au plus vite.
16 Si à un moment donné il y a une décision - ce qui n'est pas encore le
17 cas - s'il y a une décision qui dit que vous n'avez pas le droit d'avoir
18 cette assistance juridique - pour le moment on n'a pas encore de décision -
19 donc si une décision de ce genre est prise, vous pouvez nous en parler,
20 bien entendu.
21 Pour le moment, veuillez examiner ce que vous a dit le greffe dans
22 ses arguments du 16 novembre, dans ce document-là. Et je demande au greffe,
23 comme à vous, d'œuvrer ensemble pour résoudre la question de l'assistance
24 juridique le plus vite possible.
25 Mais nous allons, comme je le disais, en rester là.
26 Oui, Monsieur Tolimir. Mais je le répète, je ne veux pas qu'on revienne sur
27 la question de la langue, s'il vous plaît.
28 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci. Vous ne voulez pas parler de chose que
Page 134
1 vous n'êtes pas autorisée à aborder. Je voulais simplement dire que vous
2 devez comprendre que le greffe ne veut pas résoudre la question de mes
3 assistants juridiques. Ça fait un mois que le greffe ne me parle pas. En
4 fait, nous n'avons eu qu'une conversation.
5 Maintenant, vous dites que je dois communiquer avec le greffe, mais
6 je veux ici qu'il soit dit au dossier que je ne communique pas avec le
7 greffe, que je ne lui parle pas, que je ne sais pas ce que veut le greffe.
8 Vous êtes le Juge de la mise en état, et vous devez garder à l'esprit cela.
9 Vous êtes l'organe de contrôle et c'est vous qui devez voir s'il y a
10 préjudice porté à l'une des parties au procès. Vous ne voulez pas accepter
11 que je sois lésé ici, parce que le procès se conduit dans une langue et
12 dans un alphabet que je ne comprends pas.
13 Le problème c'est que je ne peux pas étudier un million de pages dans une
14 langue que je ne comprends pas. Je parle le serbe. Je l'ai appris le serbe.
15 En cyrillique, j'écris en cyrillique. Maintenant, j'écris comme si j'étais
16 en classe de quatrième année, comme si j'étais un gamin.
17 Mme LE JUGE PROST : [interprétation] Je ne veux pas revenir sur la question
18 de la langue. J'ai dit, une fois pour toutes. J'ai bien entendu ce que vous
19 disiez à propos de vos discussions avec le greffe. Je lui demande au greffe
20 de reprendre ce dialogue avec vous, et si le greffe ne vous a pas parlé, je
21 lui demande de le faire. Et à vous, je vous demande de lire les documents
22 fournis par le greffe indiquant les mesures prises par ce dernier pour ce
23 qui est de désigner les assistants juridiques ou un assistant juridique.
24 Nous allons en rester là.
25 Je vous invite, vous et le greffe, à reprendre le dialogue pour résoudre au
26 plus vite la question de votre assistant juridique, mais je refuse de
27 réaborder le dossier linguistique. Je pense que votre position est très
28 claire. Je la comprends.
Page 135
1 L'ACCUSÉ : [aucune interprétation]
2 Mme LE JUGE PROST : [interprétation] Oui, Monsieur Tolimir.
3 L'ACCUSÉ : [interprétation] Quelle est la date de ce document ? Puis, je
4 vous le dis, je ne sais pas dans quelle langue est ce document, je ne
5 comprends pas cette langue. Est-ce que vous pourrez me donner quelqu'un qui
6 pourrait le lire pour moi ? Si quelqu'un peut me lire ce qui est écrit, ce
7 que je ne comprends pas, ce serait bien. Vous pourriez envoyer des
8 centaines de documents, mais je ne sais pas comment lire. C'est pour ça que
9 je ne peux pas accepter ces documents, parce que vous savez qu'il y a des
10 délais qui commencent à courir quand je les ai reçus, or je ne peux pas
11 lire ce document dans une langue qui n'est pas ma langue maternelle, langue
12 que je n'ai pas apprise.
13 Mme LE JUGE PROST : [interprétation] Je vais inviter le greffe à discuter
14 avec vous de la teneur de ce document et des efforts déployés de façon
15 continue par le greffe pour désigner votre assistant juridique. Nous allons
16 en rester là.
17 J'espère que d'ici à la prochaine réunion, l'audience de mise en
18 état, la question de votre assistant juridique sera résolue. Je vais
19 demander au greffe de poursuivre l'examen de la question.
20 Je pense que nous n'avons pas d'autres questions.
21 Monsieur McCloskey, est-ce que l'Accusation souhaiterait aborder une autre
22 question cet après-midi ?
23 M. McCLOSKEY : [interprétation] Non. Merci, Madame la Présidente.
24 Mme LE JUGE PROST : [interprétation] Merci. A moins que vous n'ayez
25 d'autres questions, pas celles dont nous venons de parler, s'il n'y a pas
26 d'autres questions, je pense que nous avons terminé l'examen de l'ordre du
27 jour de cette Conférence de mise en état. La prochaine conférence se
28 tiendra à une date qui vous sera communiquée.
Page 136
1 Oui, Monsieur Tolimir.
2 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je voudrais qu'il soit indiqué au compte rendu
3 d'audience que vous et l'Accusation, vous avez des documents qui sont à
4 l'origine des charges retenues contre moi. Moi, je n'avais rien dit pendant
5 que j'étais encore en liberté. Je sais qu'on m'avait mis en accusation,
6 parce que j'étais l'adjoint du Grand état-major de l'armée de la Republika
7 Srpska chargé du renseignement. C'est simplement parce que j'étais
8 l'adjoint de Ratko Mladic. Je n'ai pas honte, j'étais fier d'avoir été dans
9 l'armée sous son commandement à Ratko Mladic.
10 J'aimerais que vous me disiez pourquoi on me détient depuis six mois, pour
11 ce que je sache sur quoi je dois me préparer pour me défendre. Hormis cela,
12 il n'y a pas d'autres chefs d'accusation si ce n'est que j'ai été soldat de
13 l'armée Republika Srpska, l'acte d'accusation étant rendu public et étant
14 affiché sur le site internet du Tribunal. C'est tout ce que j'ai lu. Je
15 n'ai même pas lu les mémoires préalables au procès. Je voudrais savoir de
16 quoi on m'accuse, pourquoi je suis ici.
17 Si on m'accuse uniquement d'être adjoint du commandant de l'armée de
18 Republika Srpska, s'il n'y a que ça, je demande qu'on me remette en liberté
19 provisoire et qu'en cet état de liberté qu'on entame mon procès. En effet,
20 on ne m'accuse de rien d'autre que d'être l'adjoint du commandant de
21 l'armée de la Republika Srpska, Ratko Mladic.
22 Mme LE JUGE PROST : [interprétation] Merci. Manifestement, la Conférence de
23 mise en état n'est pas le lieu indiqué pour procéder à un examen des
24 charges retenues dans l'acte d'accusation en matière de liberté provisoire.
25 Vous avez décidé de vous défendre, ce qui veut dire qu'il faudrait
26 suivre la procédure idoine pour soulever ce genre de questions, à savoir
27 par voie de requête pour examen. Je vous rappelle qu'une Conférence de mise
28 en état n'est pas le lieu approprié pour être saisie de telles questions.
Page 137
1 Tout ceci est maintenant acté au dossier, mais puisque vous avez décidé de
2 vous défendre, si vous voulez aborder ces questions, il faudra respecter la
3 procédure prévue dans ce Tribunal.
4 En absence d'autres questions, l'audience est levée.
5 Merci à tous et à toutes.
6 --- La Conférence de mise en état est levée à 15 heures 18.
7
8
9
10
11
12
13
14
15
16
17
18
19
20
21
22
23
24
25
26
27
28