Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le vendredi 10 septembre 2010

  2   [Audience publique]

  3   [L'accusé est introduit dans le prétoire]

  4   --- L'audience est ouverte à 14 heures 20.

  5   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Bonjour à tout le monde. Tout

  6   d'abord, je dois dire que nous sommes ici à deux puisque que le Juge Mindua

  7   n'était pas disponible car il avait un rendez-vous urgent, et nous avons

  8   décidé donc de continuer nos travaux en vertu de l'article 15 bis du

  9   Règlement de procédure et de preuve.

 10   Avant que le témoin ne pénètre dans ce prétoire, les Juges veulent

 11   communiquer une décision orale suite à la demande du Procureur par laquelle

 12   il demande des mesures de protection pour le Témoin 65 ter 200, il s'agit

 13   donc de la requête communiquée oralement le 30 août 2010. Nous devons

 14   passer à huis clos pour cela.

 15   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Nous sommes à huis clos.

 16   [Audience à huis clos partiel]

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  9   [Audience publique]

 10   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Merci. Les Juges considèrent que l'on

 11   a respecté l'article 75(J) du Règlement de procédure et de preuve, et donc

 12   font droit à la demande du Procureur.

 13   Cela étant dit, nous souhaitons tout de même ajouter une remarque. Les

 14   parties doivent savoir que le Témoin 200 est un témoin en vertu de

 15   l'article 92 ter, alors que la déposition dans l'affaire Krstic a été

 16   versée de façon provisoire au dossier par la décision de cette Chambre du

 17   30 mars cette année. Puisque le témoin a déposé avec un pseudonyme et en

 18   huis clos dans cette affaire-là, les transcripts restent sous pli scellé,

 19   et c'est justement ce transcript-là qui constitue la déposition en vertu de

 20   l'article 92 ter de ce témoin.

 21   Les deux parties devraient tenir compte de la situation et savoir que cette

 22   Chambre-là n'est pas en mesure de lever le sceau de confidentialité de ces

 23   documents.

 24   Est-ce que quelqu'un veut intervenir ?

 25   Monsieur McCloskey.

 26   M. McCLOSKEY : [interprétation] Oui, effectivement, Monsieur le Président,

 27   c'est mon témoin. Je vais interroger ce témoin et nous allons essayer de

 28   faire lever le sceau de confidentialité de ces documents. Je ne pense pas

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  1   qu'il y aura d'objection, je ne pense pas que le témoin va avoir des

  2   objections à ce sujet. Je ne me souviens pas qu'il y ait eu de problème à

  3   ce sujet, mais en tout cas, on va s'en occuper, si vous êtes d'accord, bien

  4   sûr.

  5   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Nous souhaitons attirer votre

  6   attention sur la différence qui existe entre les mesures de protection et

  7   la confidentialité d'un document, donc vous devez prendre des mesures

  8   appropriées dans ce sens.

  9   Il nous reste encore de décider au sujet de la demande du Procureur

 10   concernant les documents versés au dossier. Nous allons le faire après la

 11   première pause.

 12   On peut faire entrer le témoin.

 13   [Le témoin vient à la barre]

 14   LE TÉMOIN : STEFANIE FREASE [Reprise]

 15   [Le témoin répond par l'interprète]

 16   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Bonjour, Madame.

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour.

 18   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Je voudrais vous rappeler que votre

 19   engagement à dire la vérité est toujours de vigueur. M. Tolimir a encore

 20   des questions pour vous.

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.

 22   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur Tolimir.

 23   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Je souhaite

 24   bonjour à tout le monde ici et à Mme Frease. Je souhaite que ce procès se

 25   déroule selon la volonté de Dieu et pas la mienne et que tout cela se

 26   termine en paix.

 27   Pour commencer, je voudrais présenter mes excuses aux interprètes, puisque

 28   nous avons travaillé plus longtemps hier, mais je vous présente mes excuses

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  1   aussi, Messieurs les Juges, puisque je n'étais pas très précis quand je

  2   demandais des documents. Je n'ai toujours pas été correct avec les cotes,

  3   et c'est pour cela que je présente mes excuses. Je présente mes excuses

  4   aussi à M. Vanderpuye, puisque je l'ai comparé à un autre Procureur du

  5   bureau du Procureur, et je me suis trompé, je n'aurais pas dû le faire,

  6   parce qu'il a toujours été correct dans son comportement, voilà. Je

  7   présente mes excuses aussi à la Défense, parce que je ne leur ai pas dit en

  8   temps voulu quels sont les documents que j'allais utiliser et la façon dont

  9   j'allais les utiliser, voilà.

 10   Donc, je voudrais remercier par avance tout le monde de la compréhension et

 11   peut-être que nous devrions, pour cela, travailler un petit peu moins

 12   longtemps aujourd'hui. Voilà. Je suis prêt à sacrifier le temps qui m'est

 13   alloué pour que cela bénéficie à tout le monde.

 14   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur Tolimir, je vous remercie.

 15   Je pense que tout le monde va apprécier la gentillesse de vos propos. De

 16   l'autre côté, nous sommes dans le cadre d'une procédure normale, et je

 17   pense que vous n'avez pas à vous inquiéter des interprètes. Ils sont

 18   patients et ils vont continuer à collaborer professionnellement et faire

 19   leur travail.

 20   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

 21   Contre-interrogatoire par M. Tolimir : [Suite]

 22   Q.  [interprétation] Madame Frease, je voudrais vous présenter mes excuses,

 23   à vous aussi, parce que j'ai cité quelque chose. Pour moi, cela

 24   correspondait à la vérité, mais vous ne l'avez pas dit. Je me suis trompé.

 25   Je retire ce que j'ai dit, parce que mes notes n'étaient pas à jour. Mais

 26   je pense que nous allons bien nous comprendre aujourd'hui, et nous allons

 27   donc aborder les questions, les questions que je souhaite vous poser dans

 28   le cadre de mon contre-interrogatoire. Merci à nouveau, et je vous présente

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  1   mes excuses.

  2   La première question : nous avons pu voir que vous avez fait une maîtrise

  3   en relations internationales. C'est une réponse qui découle des questions

  4   qui vous ont été posées au cours de l'interrogatoire principal, et voici la

  5   question que je vais vous poser : est-ce que, par la suite, est-ce que vous

  6   avez été formée pour être capable d'analyser des documents ? Est-ce que

  7   vous avez été formée, tout particulièrement, à analyser les documents que

  8   vous avez analysés ici ? Merci.

  9   R.  Oui, c'est vrai que j'ai une maîtrise en relations internationales. Je

 10   n'ai pas suivi de formation particulière quant à l'analyse des

 11   conversations interceptées. Je dois dire, en revanche, que dans mon travail

 12   je suis très rigoureuse et je suis très pointilleuse. Donc, le détail

 13   m'importe beaucoup.

 14   Q.  Merci. Vous avez dit que vous avez travaillé dans le bureau du

 15   Procureur de ce Tribunal entre le mois d'avril 1995 et le mois de juillet

 16   de l'an 2000, et vous avez été conseillère spéciale du Procureur du

 17   Tribunal, et ceci, jusqu'à la fin de l'année 2006, 2007. Si je me trompe,

 18   veuillez me corriger.

 19   Donc, vous avez analysé des documents concernant les conversations

 20   interceptées. Est-ce que vous avez fait cela jusqu'en 1998, ou est-ce que

 21   vous avez continué à faire cela même pendant la période où vous avez exercé

 22   la fonction de conseillère ?

 23   R.  J'ai travaillé avec ces documents entre le mois d'avril 1998 et

 24   jusqu'au moment où j'ai quitté le Tribunal au mois de juillet 2000, et

 25   ensuite j'ai travaillé à nouveau sur ces documents entre la fin de l'année

 26   2006 et le début de l'année 2007, comme vous l'avez dit.

 27   Q.  Merci. Excusez-moi, la question était bien longue. C'est surtout la

 28   deuxième partie de la question qui m'intéressait, quand vous avez analysé

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  1   ces documents. En fait, cette analyse, l'avez-vous faite entre 1998 et

  2   2000, pendant que vous étiez employée au Tribunal en tant que permanent, ou

  3   est-ce que vous avez continué votre travail d'analyse par la suite alors

  4   que vous étiez employée comme conseillère spéciale du bureau du Procureur ?

  5   R.  J'ai continué à travailler sur ces documents, à effectuer des analyses

  6   pendant la période allant entre la fin de l'année 2006 et le début de

  7   l'année 2007.

  8   Q.  Merci. Mais dites-moi, s'il vous plaît, est-ce que pendant cette

  9   période-là vous avez analysé justement les documents qui font l'objet de

 10   votre déposition ici ? Est-ce que ce sont ces documents-là que vous avez

 11   analysés justement pendant cette période-là, les documents de l'espèce ?

 12   R.  Oui.

 13   Q.  L'avez-vous fait parce qu'avant vous n'aviez pas ces documents et vous

 14   ne les avez reçus que par la suite, ou est-ce que vous l'avez fait pour une

 15   autre raison ?

 16   R.  A l'époque, je ne travaillais pas pour le Tribunal, donc je n'avais pas

 17   accès aux documents.

 18   Q.  Excusez-moi, je ne vous ai pas très bien comprise. Donc, depuis l'année

 19   2000 vous n'avez pas du tout travaillé sur les documents qui font l'objet

 20   de votre déposition aujourd'hui ?

 21   R.  Entre l'an 2000 et l'an 2006, je n'ai pas travaillé pour le Tribunal. A

 22   partir de la fin de l'année 2006 et jusqu'au début de l'année 2007, j'ai à

 23   nouveau travaillé pour le Tribunal, donc j'ai pu revoir les documents qui

 24   sont arrivés entre-temps et j'ai pu travailler sur ces documents.

 25   Q.  Merci. Je vous prie de nous dire si au cours de ce travail, aussi bien

 26   pendant la période où vous avez été permanente et la deuxième période, la

 27   période où vous exerciez le rôle de conseillère spéciale, est-ce qu'il vous

 28   est arrivé d'analyser d'autres documents appartenant à d'autres armées, par

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  1   exemple l'armée croate, musulmane, et cetera, donc d'autres participants à

  2   la guerre ?

  3   R.  J'ai fait l'analyse des documents relatifs à l'enquête dans l'affaire

  4   Srebrenica qui venaient de l'ABiH, mais aussi du SDB de Tuzla. Nous avons

  5   parlé de ces sources. A cette époque-là, je n'ai pas examiné de documents

  6   croates ou autres sources, procès-verbaux, et cetera.

  7   Q.  Merci. Veuillez nous dire s'il ne vous appartenait que d'analyser des

  8   documents venant des services de Sécurité, des écoutes, et cetera, au cours

  9   de votre travail ici ?

 10   R.  Quelle est la période qui vous intéresse ? Est-ce que vous parlez de

 11   toute la période pendant laquelle j'ai travaillé au Tribunal, ou juste de

 12   la dernière période, en fait, de mon dernier emploi ?

 13   Q.  Je vais répéter ma question. Pendant la période entre 1998 et l'an

 14   2000, pendant que vous avez été employée en tant que permanent par le

 15   Tribunal, est-ce que vous n'avez analysé que les documents du service de

 16   Sécurité, donc le service secret qui ont recueilli les documents concernant

 17   les écoutes ?

 18   R.  Oui, c'est les documents que j'ai analysés, mais j'ai participé dans

 19   l'équipe qui travaillait à Srebrenica. Et plus tôt au début de ma carrière,

 20   j'ai fait beaucoup d'enquêtes sur le terrain. Par la suite, en revanche, au

 21   cours de la dernière période, j'ai travaillé surtout sur le document que

 22   vous venez de mentionner, mais cela étant dit, j'ai continué à collaborer

 23   avec l'équipe des enquêteurs.

 24   Q.  Merci. Est-ce qu'il y avait qui que ce soit d'autre qui était

 25   responsable de l'analyse et du traitement des informations qui venaient des

 26   services de sécurité militaire au cours de la guerre qui a eu lieu en

 27   Bosnie-Herzégovine, mis à part vos collaborateurs directs qui faisaient

 28   partie de votre équipe ?

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  1   R.  A l'époque, nous étions la seule équipe du Tribunal qui pouvait obtenir

  2   et examiner ces documents.

  3   Q.  Merci. Vous avez parlé de votre première arrivée au commandement de la

  4   2e Armée de Bosnie-Herzégovine, quand vous avez pu donc accéder aux bandes

  5   d'enregistrement contenant des entretiens et communications interceptées.

  6   Est-ce que vous avez eu le droit de les examiner proprement dit, vraiment,

  7   de voir ce qui se trouve dans ces bandes, ou bien est-ce que vous avez pu

  8   tout simplement les voir et rien d'autre ?

  9   R.  On nous a permis de voir les bandes sans avoir la possibilité de

 10   prendre connaissance de leur contenu à l'époque, à ce moment-là.

 11   Q.  Merci. Pourriez-vous nous dire à quel moment vous avez pu pour la

 12   première fois prendre connaissance du contenu de ces documents ?

 13   R.  Est-ce que vous faites référence à des documents particuliers, à savoir

 14   des documents écrits, ou bien des cahiers, ou bien des cassettes audio ?

 15   Q.  Tous les documents, tout ce que vous avez reçu du service du

 16   Renseignement militaire de l'ABiH. A quel moment avez-vous pu, pour la

 17   première fois, prendre connaissance du contenu de ces documents ?

 18   R.  Au mois d'avril, j'ai eu la possibilité -- enfin, déjà au mois de mars,

 19   je dirais, quand on a reçu le classeur pour la première fois, j'ai eu la

 20   possibilité de le parcourir. Il en va de même pour les cahiers au mois

 21   d'avril, donc, mais la première fois que nous avons vraiment commencé à

 22   parcourir ces documents, parce qu'il a fallu tout d'abord comprendre

 23   comment on allait procéder, parce qu'il s'agissait de beaucoup de documents

 24   et il n'était pas clair dès le début que j'allais m'en occuper ou si c'est

 25   quelqu'un d'autre de mon équipe qui allait s'en occuper.

 26   Si ma mémoire est bonne, je crois que c'est en mai qu'une mission a eu lieu

 27   en Bosnie et qu'un petit groupe d'interprètes et moi-même avons commencé à

 28   examiner les photocopies des documents et à les classer sous forme d'un

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  1   tableau Excel pour pouvoir en analyser le contenu. Ensuite, nous avons mis

  2   en place l'autre base de données et nous avons commencé à examiner les

  3   cahiers par dates, puisqu'il n'y avait que peu de temps et que certaines

  4   dates revêtaient un caractère plus prioritaire que d'autres. Nous avons

  5   donc progressivement examiné les documents de manière méthodique.

  6   Q.  Je vous remercie. Je précise ceci aux fins du compte rendu. Je vous ai

  7   demandé quand vous avez commencé, mais vous avez dit mai sans pour autant

  8   préciser l'année. Pourriez-vous le faire.

  9   R.  1998. Enfin, j'ai jeté un œil, disons, préliminaire aux documents avant

 10   cela, mais je crois que nous avons véritablement commencé à travailler sur

 11   les documents proprement dits en mai, mai 1998.

 12   Q.  Merci. D'autres membres de l'équipe ont-ils eu accès à ces documents où

 13   étiez-vous la seule ?

 14   R.  D'autres membres de l'équipe également.

 15   Q.  Merci. Pourriez-vous nous donner l'identité des membres en question, si

 16   toutefois vous vous souvenez de leurs noms.

 17   R.  L'analyste militaire Rick Butler; Peter Nicholson, qui n'était pas

 18   officiellement membre de l'équipe Srebrenica mais qui a aidé dans

 19   différentes missions réalisées sur le terrain; les interprètes; Jean-René

 20   Ruez, le chef d'équipe; Peter McCloskey, le Procureur. Pour ceux qui ne

 21   parlaient pas la langue, bien sûr, leur capacité de travail était limitée.

 22   En fait, ils n'étaient pas en mesure de le faire véritablement mais, en

 23   tout cas, ils y avaient accès.

 24   Q.  Merci. Pourriez-vous nous dire s'il existe des notes sur les documents

 25   examinés par vos soins à l'époque, y a-t-il des notes sur le programme que

 26   vous avez créé à l'époque, comme vous nous l'avez expliqué ?

 27   R.  Je pense qu'il a dû y avoir un ou deux rapports de mission sur la

 28   traduction que nous avons faite sur site, mais je n'ai pas à l'esprit

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  1   d'autres notes -- et puis, je ne sais pas très bien de quoi vous parlez

  2   lorsque vous parlez de "programme".

  3   Q.  Merci. Il me semble que dans l'une de vos réponses, vous avez dit avoir

  4   mis sur pied un projet ou quelque chose qui aurait défini la manière dont

  5   vous alliez procéder à l'analyse des documents. Je voulais savoir s'il y

  6   avait des notes qui existaient toujours sur ces recherches ou sur les

  7   documents communiqués par le service militaire.

  8   R.  En fait, c'était un produit, c'est-à-dire un tableau Excel reprenant

  9   les résultats de l'analyse, et une base de données également. Il y a une

 10   coquille au compte rendu. J'ai dit "product", alors qu'apparaît "protect."

 11   En ligne 21 du compte rendu. Merci.

 12   Q.  Merci de cette correction. Dites-nous, après 2000, date à laquelle vous

 13   avez quitté le Tribunal, avez-vous eu la possibilité d'analyser d'autres

 14   conversations interceptées jusqu'à votre retour ici en 2006 en tant que

 15   conseillère spéciale ?

 16   R.  Non.

 17   Q.  Merci. Veuillez nous expliquer la nature du travail que vous avez fait

 18   après votre départ du Tribunal. J'entends par là, le travail que vous avez

 19   fait pour le bureau du Procureur de la CPI.

 20   R.  A la CPI j'étais chargée d'aider au lancement des enquêtes sur le

 21   terrain dans le cadre de la situation au Darfour.

 22   Q.  Merci. Pourriez-vous expliquer aux Juges de la Chambre comment vous

 23   avez été amenée à accomplir ce travail, et comment ce travail s'est

 24   articulé concrètement.

 25   R.  J'ai été recrutée par le Procureur du fait de mon expérience passée

 26   dans la partie orientale du Tchad. Le Procureur de la CPI m'a demandé de

 27   rejoindre son équipe pour l'aider à lancer des enquêtes.

 28   Q.  Merci. Pouvez-vous préciser la période dont il s'agit, le début et la

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  1   fin de votre contrat, si vous vous en souvenez, le mois et l'année.

  2   R.  De juin 2005 à juin 2006.

  3   Q.  Merci. Dites-nous, s'il vous plaît, si à l'époque vous avez travaillé

  4   pour des ONG, et, si oui, lesquels. Et durant quelle période ?

  5   R.  Dans mon témoignage précédent j'ai dit que j'avais travaillé pour la

  6   Coalition pour la justice internationale, une organisation à but non

  7   lucratif, basée à Washington DC, de 2000 jusqu'en 2005.

  8   Q.  Merci. Cette ONG dans laquelle vous avez apporté votre contribution

  9   était-elle présente dans certaines zones de crise entre 2000 et 2005 dans

 10   certaines zones de conflit ?

 11   R.  Elle était basée à Washington DC, mais parfois effectivement j'ai dû me

 12   déplacer dans certaines régions, par exemple, je suis allée à plusieurs

 13   reprises au Timor leste.

 14   Q.  Merci. Vos déplacements à Timor leste avaient-ils un rapport avec le

 15   conflit qui s'est déroulé et exclusivement avec ce conflit ?

 16   R.  C'était au cours de la période qui a suivi le conflit, mais, oui,

 17   effectivement, mes déplacements avaient à voir avec le conflit.

 18   Q.  Merci. Quel était le lien entre vos ONG et le processus de

 19   mondialisation ? Ou, plutôt, excusez-moi, quelle était leur position par

 20   rapport au processus de mondialisation ?

 21   R.  Je ne comprends pas la question.

 22   Q.  Les ONG pour lesquelles vous avez travaillé, pour lesquelles vous vous

 23   êtes rendue en zones de crise, de conflit, au cours des phases de conflit

 24   et des phases ultérieures au conflit en Bosnie, par exemple, au Tchad et au

 25   Timor leste, ces ONG donc vous ont-elles envoyée sur place dans le cadre

 26   des projets qu'elles déployaient et qui ciblaient des secteurs touchés par

 27   des conflits, et ceci avait-il quoi que ce soit à voir avec la

 28   mondialisation et la mise en place d'un nouvel ordre mondial ?

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  1   R.  Mon rôle était extrêmement circonscrit, au Timor leste, par exemple,

  2   j'étais là pour aider les Nations Unies à mettre sur pied un tribunal

  3   spéciale chargé de juger les crimes qui avaient été commis au moment où

  4   l'armée indonésienne s'était retirée du Timor oriental.

  5   Je ne suis pas en mesure de répondre à votre question. Je ne sais pas

  6   comment y répondre, votre question sur la mondialisation et l'instauration

  7   d'un nouvel ordre mondial.

  8   Q.  Merci. Puisque nous semblons ne pas nous comprendre sur ces thèmes,

  9   j'aimerais passer au point suivant. Dans le cadre de témoignages,

 10   d'analyses que vous avez livrés à ce Tribunal dans le cadre de différentes

 11   affaires, avez-vous également soumis un rapport, parce qu'en général la

 12   plupart des experts présentent des déclarations ou des rapports écrits, or

 13   je n'en ai vu aucun de vous. Alors, dans le cadre des analyses que vous

 14   avez réalisées, avez-vous rédigé un ou plusieurs rapports ? Ou bien

 15   s'agissait-il véritablement d'un exercice ponctuel sans rédaction de

 16   rapport ?

 17   R.  Je n'ai pas rédigé de rapport. Le produit de mon travail a été

 18   l'information qui a été synthétisée dans le tableau Excel.

 19   Q.  Merci. Y a-t-il une raison qui expliquerait pourquoi vous n'avez pas

 20   produit de rapport ou de déclaration suite à vos analyses ? Y a-t-il

 21   d'autre raison que celle que vous avez indiquée ?

 22   R.  Mon travail et celui de ceux avec qui je travaillais consistait à

 23   analyser les documents et à décider si nous estimions que les documents en

 24   question étaient authentiques, véridiques et fiables. C'est l'analyste

 25   militaire qui incorporait les résultats de l'analyse de ces documents dans

 26   le dossier général.

 27   Q.  Merci. Pouvez-vous nous dire si, en tant qu'enquêtrice ou ancienne

 28   enquêtrice du bureau du Procureur, vous aviez pour obligation de protéger

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  1   les intérêts du Procureur lorsque vous présentiez les résultats de vos

  2   recherches publiquement ?

  3   R.  Les obligations qui sont les miennes me lient à ce Tribunal. Elles

  4   consistent à dire la vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

  5   Q.  Très bien. C'est votre obligation vis-à-vis de ce Tribunal, tout comme

  6   tout autre citoyen d'ailleurs, qui partage ces mêmes obligations, mais plus

  7   concrètement, deviez-vous protéger les intérêts du bureau du Procureur,

  8   puisque vous faisiez partie de ce même bureau, vous en avez été l'employée

  9   ou la conseillère ?

 10   R.  Je crois qu'à ma prise de fonctions j'ai dû signer un document où il

 11   était question de la confidentialité des documents et de la nécessité de

 12   préserver cette confidentialité, les documents sur lesquels nous

 13   travaillions, mais je crois que ce n'est pas exactement cela que vous

 14   demandez, puisque votre question porte sur la protection des intérêts du

 15   Procureur, et d'ailleurs je ne suis pas sûre de bien comprendre ce que vous

 16   entendez par là.

 17   Q.  Merci. Merci de me faire comprendre que ma question n'était pas

 18   suffisamment claire. Je vais tâcher de la préciser.

 19   Aviez-vous pour obligation, disons, de protéger ou de sauvegarder les

 20   intérêts du bureau du Procureur, comme le précisent l'acte d'accusation et

 21   d'autres documents émanant du bureau du Procureur et présentés à la Cour

 22   pendant que vous y étiez ?

 23   R.  C'est peut-être le terme d'"intérêt" qui me pose problème. Si vous

 24   étiez en mesure de me présenter le document où ce terme est employé, je

 25   pourrais peut-être y jeter un œil, mais j'ai toujours ressenti l'obligation

 26   de préserver la confidentialité, de faire preuve d'intégrité et de faire

 27   preuve d'honnêteté dans le cadre de mon travail.

 28   Q.  Merci. Je vais tâcher d'attaquer la question sous un autre angle.

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  1   Pourriez-vous nous expliquer en quoi consistaient vos obligations en termes

  2   de loyauté vis-à-vis du bureau du Procureur pendant que vous y avez

  3   travaillé et, si oui, êtes-vous encore tenue par ces mêmes obligations ?

  4   Veuillez m'excuser. Je vais répéter ma question, parce que je

  5   souhaite qu'elle figure précisément au compte rendu d'audience.

  6   A quelles obligations étiez-vous tenue en termes de loyauté et de

  7   protection du bureau du Procureur de la concurrence à l'époque où vous

  8   travailliez pour ce dernier, et êtes-vous encore tenue par de telles

  9   obligations ?

 10   R.  Mais de quelle concurrence parlez-vous ?

 11   Q.  J'ai dit "interdire la concurrence", peut-être que ce n'est pas ce que

 12   l'on vous a interprété, mais c'est ce dont je parlais. Peut-être que vous

 13   comprendrez cela dans la mesure où, dans l'intervalle, vous avez travaillé

 14   pour les ONG.

 15   L'INTERPRÈTE : Il se peut que l'accusé ait en tête la notion de "conflit

 16   d'intérêt." Toutefois, il n'utilise pas les termes correspondants.

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne sais pas comment répondre à cette

 18   question.

 19   M. TOLIMIR : [interprétation]

 20   Q.  Merci. Nous allons essayer par voie d'exemple. Lorsque vous avez

 21   travaillé par la suite pour ces ONG, pouviez-vous utiliser comme exemples

 22   des informations que vous aviez amassées au Tribunal et au sein du bureau

 23   du Procureur ? Compte tenu du fait que vous aviez travaillé pour d'autres

 24   tribunaux internationaux ayant engagé des poursuites contre des parties à

 25   d'autres conflits, étiez-vous dans la position qui vous aurait permise

 26   d'utiliser les données et la connaissance que vous aviez accumulées au

 27   travers de votre analyse des documents au sein du bureau du Procureur, ou

 28   étiez-vous tenue de maintenir la confidentialité de cette information à

Page 5167

  1   l'époque et continuez-vous à être tenue de le faire aujourd'hui ?

  2   R.  Si l'information en question n'était pas de caractère public, eh bien,

  3   oui.

  4   Q.  Merci. Puisqu'il s'agit d'informations émanant des services du

  5   Renseignement militaire et que vous avez dit qu'il s'agissait là

  6   d'informations précieuses, toutes ces informations étaient secrètes,

  7   confidentielles. Etes-vous encore tenue de préserver le secret de ces

  8   informations ? Cette obligation continue-t-elle d'exister par rapport à ce

  9   bureau du Procureur ?

 10   R.  Il s'agit d'une audience publique.

 11   Q.  Merci. Il semblerait que ce terme que j'utilise et qui est traduit par

 12   "competition" pose problème, ou "concurrence" en français. Alors je vous

 13   donne un exemple : seriez-vous habilitée à être experte pour la Défense,

 14   alors que vous avez été experte pour l'Accusation ? Peut-être que ceci vous

 15   permettra de mieux comprendre ce terme, "konkurencija", que j'utilise en

 16   B/C/S.

 17   R.  Je ne suis pas ici en qualité de témoin expert, d'abord. Par ailleurs,

 18   je sais que cette Cour a prononcé une décision selon laquelle d'anciens

 19   membres du bureau du Procureur ont été autorisés à travailler tant pour la

 20   Défense que pour les Chambres. Les décisions prises par ce Tribunal sont

 21   les siennes. Je ne me vois pas prendre une décision telle que celle-ci. Je

 22   ne pense pas que ceci me concerne.

 23   Q.  Merci. Y a-t-il la moindre décision prise par ce Tribunal ou par le

 24   bureau du Procureur qui pourrait corroborer ce que vous venez de dire ?

 25   R.  Certainement. Mais je ne pense pas être tenue de donner des exemples.

 26   Q.  Merci. Aux fins du compte rendu, pourriez-vous préciser si vous êtes en

 27   possession de toute décision de ce Tribunal qui vous donnerait toute

 28   liberté de participer à d'autres affaires, même pour la Défense, puisque

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  1   par le passé vous avez travaillé pour le bureau du Procureur ? Existe-t-il

  2   un document tel que celui-ci du bureau du Procureur qui vous interdirait de

  3   travailler pour une future équipe de la Défense ?

  4   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur Vanderpuye.

  5   M. VANDERPUYE : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Je fais

  6   objection à la question. Le témoin y a déjà répondu. A sa connaissance,

  7   rien ne l'empêcherait de travailler à la Défense, nous dit-elle, et je

  8   crois que ceci répond à la question.

  9   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Mais la dernière question contenait

 10   un élément supplémentaire. On lui a demandé si elle avait à l'esprit ou si

 11   elle avait connaissance d'un document quelconque. Je pense que le témoin

 12   pourra répondre à cette question.

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, je ne suis pas en mesure d'identifier un

 14   document particulier.

 15   M. TOLIMIR : [interprétation]

 16   Q.  Merci. La dernière phrase du témoin ne m'a pas été interprétée.

 17   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] La dernière phrase a été, je cite :

 18   "Je ne suis pas en mesure d'identifier un document particulier."

 19   Vous avez entendu maintenant l'interprétation ?

 20   L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui. Merci, Monsieur le Président. Même avant,

 21   d'ailleurs, que vous la répétiez, parce que les interprètes m'ont entendu

 22   et avaient pris un petit peu de retard, ils ont donc interprété avec

 23   quelques secondes de décalage. Merci.

 24   M. TOLIMIR : [interprétation]

 25   Q.  Dans votre témoignage dans le cadre de l'affaire Blagojevic, Krstic et

 26   Popovic, avez-vous procédé à une sélection de documents appelés à être

 27   versés au dossier par votre entremise, ou bien cette sélection a-t-elle été

 28   réalisée par un représentant du bureau du Procureur, M. Thayer ou bien M.

Page 5169

  1   Vanderpuye ?

  2   R.  Pour corriger le compte rendu, je n'ai pas témoigné dans l'affaire

  3   Blagojevic, pour commencer. Alors, s'agissant des affaires Krstic et

  4   Popovic, ce sont des substituts du Procureur qui ont eu le dernier mot

  5   quant aux conversations interceptées qui devaient figurer dans les

  6   documents présentés dans le cadre du procès.

  7   Q.  Bien. Pourriez-vous nous dire si parmi les membres de l'équipe qui ont

  8   travaillé sur les conversations interceptées par l'ABiH, il y avait

  9   d'autres citoyens que des citoyens américains, comme vous, mis à part bien

 10   sûr le chef d'équipe, M. Ruez, parce qu'il n'était pas directement impliqué

 11   dans ce travail ?

 12   R.  Il y en avait, oui.

 13   Q.  Merci. Je n'ai pas compris votre réponse affirmative. Oui, quoi ? Il y

 14   en avait ou il n'y en avait pas ? Y avait-il des membres de l'équipe qui

 15   n'étaient pas américains; oui ou non ? Je n'ai pas envie de revoir en

 16   détail les membres de l'équipe qui ont analysé des intercepts.

 17   R.  Oui, il y avait d'autres personnes de l'équipe qui n'étaient pas des

 18   citoyens des Etats-Unis, ils étaient citoyens de Bosnie-Herzégovine.

 19   C'étaient les interprètes ou les traducteurs.

 20   Q.  Merci. Donc, mis à part les interprètes ou traducteurs, bien sûr qu'il

 21   faut avoir des traducteurs pour toutes les pièces qui sont en serbe, mais y

 22   avait-il d'autres personnes d'une autre nationalité qu'américaine à part

 23   les traducteurs ?

 24   R.  Lorsque j'ai travaillé sur les conversations téléphoniques

 25   interceptées, il n'y avait pas d'autres enquêteurs ou membres de l'équipe

 26   qui aient travaillé aussi étroitement que moi avec les interprètes. Mais

 27   nous communiquions énormément entre nous, entre les enquêteurs, moi-même,

 28   les interprètes, les substituts du Procureur, non seulement à propos des

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  1   conversations interceptées, mais aussi à propos de toutes les nouvelles

  2   informations qui étaient apportées au dossier dans le cours de l'enquête,

  3   et c'était moi le contact principal des interprètes qui travaillaient sur

  4   les pièces.

  5   Q.  Merci. Au cours des débats dans l'affaire qui nous intéresse, il

  6   semblerait que M. Ruez ait reçu des éléments. Donc, il a obtenu des

  7   éléments pendant la période où vous aussi étiez en train de recevoir

  8   différentes pièces, mais a-t-il seulement reçu ces éléments, ces pièces, ou

  9   est-ce qu'il a aussi analysé ces éléments ? Et si oui, y a-t-il des traces

 10   de ces analyses qu'il aurait menées sur ces éléments ?

 11   R.  Non. Il s'est contenté de les réceptionner.

 12   Q.  Très bien. Donc, il a juste un document, un reçu indiquant qu'il avait

 13   bel et bien obtenu des éléments pour les besoins du bureau du Procureur;

 14   c'est cela ?

 15   R.  Oui.

 16   Q.  Donc, il semble que Ruez avait établi les contacts avec l'ABiH, mais

 17   j'aimerais savoir comment vous-même avez établi un contact avec les

 18   autorités de Bosnie-Herzégovine pour obtenir tous les éléments portant sur

 19   ces conversations interceptées ?

 20   R.  Je faisais partie de l'équipe d'enquête sur Srebrenica, donc c'est dans

 21   le contexte de cette mission que j'ai établi le contact avec les autres

 22   membres de l'équipe et avec les personnes concernées.

 23   Q.  Très bien. Au cours de l'interrogatoire principal, vous avez dit que

 24   juste après les événements de Srebrenica, vous êtes entrée en contact avec

 25   les autorités de Bosnie-Herzégovine. J'aimerais que vous nous expliquiez

 26   exactement comment vous vous y êtes pris. Faisiez-vous partie de l'équipe

 27   juste après le conflit, ou est-ce que ce j'ai cru comprendre par le biais

 28   de l'interprétation serait erroné ?

Page 5171

  1   R.  J'ai travaillé avec Jean-René Ruez et deux autres personnes. C'est en

  2   juillet 1995 que nous nous sommes rendus à quatre à Tuzla, car il y avait

  3   des rumeurs qui couraient, des documents diffusés à la télévision sur CNN

  4   selon lesquels il semblerait que quelque chose se soit passé à Srebrenica.

  5   Donc, le Tribunal a pris l'initiative d'envoyer une petite équipe à Tuzla

  6   pour aller au fond des choses. Donc, nous sommes restés à Tuzla, nous avons

  7   établi le contact. C'est Jean-René Ruez, bien sûr, qui a pris les premiers

  8   contacts avec le SDB à Tuzla, puisque c'était lui le chef de la mission, et

  9   nous avons commencé à étudier les déclarations que la police avait

 10   recueillies auprès des personnes qui avaient réussi à s'échapper de

 11   l'enclave. La plupart d'entre eux avaient réussi à s'échapper à pied,

 12   d'ailleurs.

 13   Si je me souviens bien, nous y sommes restés à peu près un mois, sur place.

 14   Ensuite, je suis revenue, et une autre équipe d'enquêteurs est allée en

 15   avion à Tuzla et a commencé à recueillir des entretiens auprès des

 16   survivants des exécutions en masse.

 17   Q.  Merci. Est-ce que cela signifie qu'en 1995 vous n'avez pas établi de

 18   contact en vue d'obtenir les conversations interceptées ? Je vous ai

 19   demandé quand est-ce que vous avez établi un premier contact pour obtenir

 20   les conversations interceptées. Vous avez parlé d'autres actions menées

 21   dans le biais de l'enquête.

 22   R.  A l'époque, en juillet 1995, Jean-René Ruez a demandé au SDB si des

 23   conversations téléphoniques avaient été interceptées, puisque les rumeurs

 24   couraient selon lesquelles il y en aurait. Comme nous l'avons dit, nous

 25   n'avons pas pu avoir accès à ces éléments avant le mois de mars de l'année

 26   1998. Donc, dans l'intervalle, Jean-René Ruez a fait plusieurs demandes, la

 27   plupart du temps c'étaient des demandes orales auprès du SDB, puisqu'il

 28   avait une bonne relation avec eux. Moi aussi, je connaissais des gens au

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  1   SDB dans le contexte de l'enquête qui était en cours, mais ce n'est qu'au

  2   printemps 1998 qu'on a commencé à obtenir ces pièces portant sur les

  3   communications interceptées.

  4   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] J'ai une question à poser au témoin.

  5   Aidez-moi, Madame Frease. Au début du contre-interrogatoire par M. Tolimir

  6   cet après-midi, vous avez dit au bureau du Procureur que vous avez

  7   travaillé pour le bureau du Procureur en 1998 et 2000. Et maintenant, vous

  8   êtes en train de nous dire que vous étiez dans la région en 1995, vous y

  9   étiez déjà sur place. Pourriez-vous nous expliquer un peu à quel moment

 10   vous avez commencé à travailler pour le bureau du Procureur, pouvez-vous

 11   nous donner le déroulement exact de votre implication avec le bureau du

 12   Procureur pour que nous comprenions bien quel a été votre parcours.

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai commencé à travailler pour le Tribunal en

 14   avril 1995, et j'ai continué à travailler pour le Tribunal jusqu'en juillet

 15   2000. Mais la confusion vient du fait qu'on m'a posé une question à propos

 16   du moment auquel j'ai commencé à travailler sur les conversations

 17   interceptées, et ça, c'était bien sûr en 1998. Mais avant cela j'avais déjà

 18   travaillé pour le bureau du Procureur sans interruption et principalement

 19   sur l'enquête de Srebrenica.

 20   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Je vous remercie. Cela clarifie bien

 21   les choses.

 22   Monsieur Tolimir, reprenez, s'il vous plaît.

 23   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

 24   M. TOLIMIR : [interprétation]

 25   Q.  En ce qui concerne la période dont vous a parlé le Président de cette

 26   Chambre, avez-vous été en contact avec des personnes qui aient un lien

 27   quelconque avec les conversations interceptées, personnes travaillant pour

 28   l'armée de la Fédération de Bosnie-Herzégovine ?

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  1   R.  J'imagine que vous me parlez de la période allant de 1995 au printemps

  2   1998. Et je ne peux vous répondre que par la négative, donc je n'ai eu

  3   aucun lien avec ce type de personne.

  4   Q.  Merci. A l'époque, avez-vous apporté quoi que ce soit à l'ABiH pouvant

  5   lui servir, des équipements techniques, des consommables ?

  6   R.  Non, non. Je n'avais aucun contact avec les membres de l'ABiH jusqu'à

  7   ce qu'on les contacte précisément à propos des conversations téléphoniques

  8   interceptées.

  9   Q.  Merci. Etant donné que vous étiez la responsable principale de ce

 10   travail, pourriez-vous nous dire qui vous avait contactée en premier au

 11   sein de l'ABiH et à quel moment ?

 12   R.  Je tiens à préciser les choses, c'est Jean-René Ruez qui a fait une

 13   demande auprès du gouvernement de Bosnie-Herzégovine. Je ne me souviens pas

 14   s'il a fait la demande auprès de l'ABiH ou du SDB demandant à avoir accès

 15   aux conversations interceptées. Et à l'époque, je n'étais pas encore

 16   impliquée à l'analyse de ces conversations téléphoniques interceptées.

 17   D'ailleurs, lorsque nous avons reçu les premières 500 pages, le classeur

 18   turquoise que nous avons vu en photo mercredi dernier, je ne savais même

 19   pas encore si j'allais travailler sur ce projet. Donc, votre question n'est

 20   pas tout à fait posée correctement. En effet, j'ai commencé à participer au

 21   projet alors qu'il était déjà en cours. En avril, on m'a présenté les

 22   personnes que l'équipe précédente avait rencontrées et avec lesquelles le

 23   contact avait été établi.

 24   Q.  Merci. Pourriez-vous nous dire quel a été votre premier contact au sein

 25   du commandement de l'armée de la BiH afin d'obtenir ces conversations

 26   interceptées ? De qui il s'agissait et à quel moment vous avez établi le

 27   contact, et il s'agissait d'un contact officiel ou privé ?

 28   R.  Dans le cadre de mon travail au Tribunal, j'ai toujours établi des

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  1   contacts officiels, et là, c'était le 2e Corps. Nous avons rencontré le

  2   commandant du 2e Corps, un commandant de l'époque, bien sûr, et ensuite, la

  3   personne qui était responsable du renseignement à l'époque. Je peux vous

  4   donner des noms si vous voulez. Je ne sais pas si c'est très utile.

  5   Q.  Merci. Ce sont des personnes dont le poste était d'une notoriété

  6   publique à l'époque au sein de l'armée de la Fédération de Bosnie-

  7   Herzégovine, donc je pense que vous avez le droit de donner leurs noms.

  8   R.  Je vais peut-être me tromper de grade, donc je ne vais pas le

  9   mentionner. Budakovic, et le colonel Sevko Tihic. Donc, une fois le contact

 10   établi au niveau approprié, nous avons eu accès aux subalternes, donc les

 11   commandants et les autres personnes qui étaient véritablement impliquées

 12   dans l'interception de conversations téléphoniques, donc nous avons été mis

 13   en contact avec ceux qui avaient véritablement fait le travail.

 14   Q.  Merci. Pour le compte rendu, sans faire référence à aucuns noms, bien

 15   sûr, pourriez-vous nous dire quel genre de contact vous avez réussi à

 16   établir entre le service du Renseignement du 2e Corps et l'équipe du bureau

 17   du Procureur, quelle était la nature de ces contacts ?

 18   R.  C'étaient des contacts de nature professionnelle. On nous a emmenés sur

 19   les deux sites. Ils nous ont expliqué ce qu'ils faisaient sur place sur ces

 20   deux sites, et ils nous ont expliqué de façon générale quelle était la

 21   procédure employée.

 22   Q.  Merci. Nous pouvons peut-être mettre de côté la situation à Tuzla et au

 23   2e Corps, mais pourriez-vous nous dire si à l'époque où vous traitiez et

 24   analysiez les conversations interceptées, le bureau du Procureur a demandé

 25   à s'entretenir avec le service des Renseignements qui traitait des

 26   conversations téléphoniques interceptées, mais je parle ici des services

 27   des Renseignements américains, britanniques, français, enfin, qui étaient

 28   aussi présents sur le théâtre à l'époque.

Page 5175

  1   R.  Je ne sais pas si ces informations sont confidentielles ou non. Nous

  2   avons essayé de rentrer en contact avec les Etats-Unis sur ce sujet mais

  3   nous n'avons pas pu aller très loin. Si je me souviens bien, ils ont pu

  4   nous confirmer un certain nombre de noms de code, Panorama, Badem, Palma,

  5   ce type d'information, mais rien de plus. Disons qu'ils n'étaient pas très

  6   coopératifs.

  7   Q.  Merci. Avez-vous cru nécessaire de vérifier la fiabilité de ces

  8   documents en les croisant peut-être avec des informations venant des

  9   services de Renseignements étrangers qui, eux-mêmes, avaient leur propre

 10   système de surveillance électronique aérienne, par exemple, ou avaient même

 11   des troupes dans la région à l'époque ?

 12   R.  Nous n'avons pas pu vérifier la fiabilité des pièces par les biais dont

 13   vous avez parlé, mais nous avions d'autres moyens pour vérifier la

 14   fiabilité de ces documents. Et depuis le début de la semaine, nous avons

 15   parlé longuement de ces moyens. Je tiens à dire que toute information

 16   supplémentaire reçue, par exemple, de Croatie n'a fait que corroborer de

 17   façon supplémentaire les éléments que nous analysions et que nous avions

 18   analysés depuis des années.

 19   Q.  Merci. Pourriez-vous nous dire si vous vérifiiez des éléments qui vous

 20   semblaient incomplets ou pas très vérifiables, si vous pensez qu'il

 21   n'aurait pas été utile d'obtenir des éléments similaires de la part des

 22   autres services de Renseignements qui se trouvaient sur la région et qui,

 23   eux aussi, balayaient les ondes avec leurs propres systèmes d'écoute ?

 24   R.  Oui, c'aurait été très bien, c'aurait été idéal, mais comme nous

 25   l'avons déjà dit, les communications interceptées par radio sont des

 26   informations qui sont très sensibles et qui sont très protégées, quand

 27   elles sont obtenues par des services de Renseignements, donc à l'époque

 28   nous n'avons pas pu croiser ce que nous avions avec ce dont disposaient les

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  1   autres services de Renseignements. Cela dit, nous avons pu authentifier les

  2   éléments que nous avions reçus en leur faisant passer un certain nombre de

  3   tests, et des tests tout à fait fiables, d'ailleurs.

  4   Q.  Merci. Nous avons parlé de l'authenticité et de la fiabilité, et nous

  5   avons aussi parlé de l'exhaustivité des pièces et nous en prendrons des

  6   exemples pour aller plus avant sur ce sujet, mais j'aimerais savoir si vous

  7   ne pensez pas qu'il serait bon quand même de pouvoir croiser vos

  8   informations avec les informations collectées auprès d'autres services.

  9   L'OTAN, par exemple, surveillait les communications par le biais d'une

 10   surveillance électronique, si qui que ce soit établissait une

 11   communication, l'OTAN surveillait tout de suite la communication et pouvait

 12   imposer une interdiction de survol, ils enregistraient tout. Donc,

 13   n'aurait-il pas été utile quand même de vérifier et de corroborer les

 14   pièces que vous aviez en main avec d'autres sources d'informations d'autres

 15   services, vous n'avez pas essayé de contacter qui que ce soit, soit vous,

 16   soit quelqu'un au bureau du Procureur, pour essayer d'obtenir des sources

 17   auprès de toutes les personnes qui surveillaient les ondes ?

 18   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] J'aimerais entendre la réponse

 19   d'abord et ensuite, j'écouterai M. McCloskey.

 20   M. McCLOSKEY : [interprétation] Je suis désolé, Monsieur le Président, mais

 21   nous entrons dans un domaine qui relève de l'article 70.

 22   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Très bien. Très bien, c'est

 23   différent, alors. Poursuivez.

 24   M. McCLOSKEY : [interprétation] Il se peut que -- vous savez que nous avons

 25   fait des demandes en vertu de l'article 70 auprès de nombreux gouvernements

 26   sur ces sujets, entre autres. Nous sommes déjà rentrés dans les grands

 27   principes, et vous avez obtenu des réponses de la part du témoin, mais

 28   maintenant, je pense que si nous voulons plus -- si la Chambre veut plus de

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  1   détails, cela ne va pas être possible. Il faut que je fasse très attention

  2   à ce qui va être dit parce que nous devons suivre absolument les

  3   dispositions de l'article 70.

  4   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] La Défense est-elle au courant de

  5   tout cela ?

  6   M. McCLOSKEY : [interprétation] Certes -- malheureusement, nous ne

  7   communiquons pas avec la Défense aussi bien que ne le voudrions. Je pense

  8   que la Défense comprend quand même les limitations qui sont imposées par

  9   l'article 70, surtout en ce qui concerne, par exemple, les images

 10   aériennes. Bon, ça, je m'en excuse auprès de la Juge Nyambe, mais ça a déjà

 11   été discuté depuis longtemps et il y a eu des objections à ce propos,

 12   d'ailleurs.

 13   Pour ce qui est des conversations interceptées, en revanche, donc pas de

 14   l'imagerie mais les conversations interceptées, là, il n'y a pas

 15   d'historique. Et je ne me suis pas vraiment entretenue avec Me Gajic. Je ne

 16   me souviens même pas s'il y avait précédent, en fait, mais c'est sensible,

 17   il faut que nous fassions attention en tout cas.

 18   Mme LE JUGE NYAMBE : [interprétation] J'ai une question pour M. McCloskey.

 19   Pourquoi m'avez-vous présenté des excuses ? Je n'ai pas bien compris.

 20   M. McCLOSKEY : [interprétation] Mais c'est parce que je ne vous voyais pas,

 21   uniquement parce que vous êtes cachée par le pilier. J'en suis désolé.

 22   Malheureusement, je négligeais de vous parler parce que je ne vous voyais

 23   pas.

 24   Mme LE JUGE NYAMBE : [interprétation] Bien. Je vous remercie. Bienvenu de

 25   l'autre côté du pilier. Vous voyez à quoi ça ressemble maintenant.

 26   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Moi, j'ai vu à quoi vous faisiez

 27   référence, parce que j'ai vu que vous aviez bougé la tête pour voir Mme la

 28   Juge Nyambe. Mais je pense qu'elle, elle n'arrivait pas à comprendre à quoi

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  1   vous faisiez référence.

  2   Monsieur Tolimir, je vois que la position de l'Accusation est assez claire.

  3   Vous devez prendre en compte qu'en posant ce type de question, vous

  4   pourriez très bien outrepasser les dispositions prévues au titre de

  5   l'article 70; l'article 70 porte sur les éléments qui sont fournis par un

  6   autre Etat. Donc, essayez d'obtenir vos informations, mais tout en gardant

  7   à l'esprit les dispositions de l'article 70.

  8   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Mais la réponse

  9   du substitut du Procureur nous suffit. C'est au compte rendu. Si nous

 10   posons une question au témoin et que le témoin ne puisse pas y répondre

 11   alors qu'il connaisse la réponse, je vais tout simplement demander un huis

 12   clos pour qu'il puisse répondre. Donc, je vais vous demander un huis clos

 13   partiel, ou un huis clos total d'ailleurs, afin que le témoin puisse

 14   répondre à ces questions, puisqu'il semble qu'ils aient les réponses mais

 15   ne veulent pas les donner.

 16   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Mais ça ne va pas servir à grand-

 17   chose parce que si un Etat ou un organe d'un Etat a donné des informations,

 18   mais uniquement en application de l'article 70, en utilisant que les

 19   dispositions de l'article 70 pour que l'information ne soit pas donnée à

 20   qui que ce soit, dans ce cas-là la Chambre ne peut pas se servir de ces

 21   informations. C'est le problème. Le fait que nous soyons à huis clos ou en

 22   audience publique ne règle aucunement le problème. Nous n'avons pas le

 23   droit de nous servir de cette information si elle a été fournie au titre de

 24   l'article 70.

 25   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Mais le témoin

 26   n'a qu'à me dire qu'elle connaît les limites de l'article 70, et donc

 27   qu'elle ne peut pas répondre à la question, du fait de l'article 70

 28   justement. Ce qui est important pour moi, c'est de savoir si elle a bel et

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  1   bien utilisé des sources provenant d'autres services de renseignement pour

  2   croiser les conversations interceptées qui lui avaient été données par la

  3   Bosnie-Herzégovine. C'est tout ce que je veux savoir.

  4   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Je suis convaincu que Mme Frease est

  5   tout à fait consciente et informée de la ligne qu'elle ne doit pas

  6   traverser. Poursuivez.

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] En 1998, je crois que c'était à la fin de

  8   cette année-là, nous avons essayé d'obtenir des informations

  9   complémentaires, comme je l'ai dit plus tôt, de la part des Etats-Unis.

 10   Toutefois, nous n'avons pas reçu grand-chose en réponse à notre demande.

 11   Dans l'intervalle et au cours de mon actuelle déposition, nous avons évoqué

 12   des conversations interceptées provenant de la Croatie et également d'une

 13   autre source, et nous avons entendu des enregistrements audio et examiné

 14   des retranscriptions correspondant à ces conversations. Tout ceci renforce

 15   encore davantage la foi que j'ai dans les documents que nous avons reçus en

 16   1998.

 17   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Je n'ai pas

 18   l'intention de demander quoi que ce soit dont je n'aurai pas besoin pour

 19   présenter ma thèse.

 20   M. TOLIMIR : [interprétation]

 21   Q.  J'aimerais maintenant que l'on examine la pièce P787, s'il vous plaît,

 22   sur l'écran. Nous connaissons déjà ce document, document déjà versé au

 23   dossier. Il porte la date du 24 juillet 1995, envoyé par le chef du secteur

 24   SDB au département du service de Sécurité militaire du 2e Corps. Donc, ils

 25   en sont les destinataires.

 26   Au compte rendu, page 5 000, lignes 5 à 20, en réponse à l'une des

 27   questions qui vous a été posées, c'était une question du Juge Nyambe. Je

 28   cite :

Page 5180

  1   "Dans votre déclaration préalable, vous avez dit que la Bosnie-Herzégovine

  2   avait certaines réserves ou avait essayé de ne pas remettre un certain

  3   nombre de documents." C'était la question, vous avez répondu par

  4   l'affirmative.

  5   Ensuite, la Juge Nyambe vous a demandé pourquoi, selon vous, ils avaient

  6   réagi de la sorte, et vous avez répondu que :

  7   "En 1995, la guerre était toujours en cours et que les conversations

  8   radio interceptées étaient un sujet sensible. Ce type d'information, de

  9   renseignement, continuait d'être considéré comme l'un des joyaux de la

 10   couronne. Ils utilisaient ces renseignements pour les communiquer en temps

 11   réel à leur postes de commandement, ou bien pour protéger leurs hommes, ou

 12   encore, ils communiquaient les informations qu'ils jugeaient pertinentes. A

 13   l'époque," je vous cite, "nous n'avions pas encore établi de rapport avec

 14   eux. Et parce que la guerre se poursuivait, je crois qu'il était tout à

 15   fait compréhensible qu'ils se réservent l'information et qu'ils rechignent

 16   à communiquer des informations aussi sensibles que celles-ci à des gens

 17   qu'ils ne connaissaient pas, à des gens qui pouvaient être à l'origine de

 18   fuites et qui pourraient éventuellement compromettre leurs intérêts

 19   fondamentaux et les mettre en danger."

 20   C'était à la page 5 000. Vous souvenez-vous avoir dit quelque chose

 21   comme cela ?

 22   R.  Oui.

 23   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur Tolimir, la première séance

 24   de travail touche à sa fin. Nous allons, je pense, devoir faire une pause,

 25   et nous reprendrons à 16 heures 20.

 26   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

 27   --- L'audience est suspendue à 15 heures 50.

 28   --- L'audience est reprise à 16 heures 20.

Page 5181

  1   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur Tolimir, c'est à vous.

  2   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  3   M. TOLIMIR : [interprétation]

  4   Q.  Madame, vous avez pu lire le document. La citation faite par moi

  5   correspond-elle à ce que vous avez dit pendant l'interrogatoire que vous

  6   avez subi ces derniers jours ?

  7   R.  Oui.

  8   Q.  Le document que vous avez à l'écran est rédigé le 24 juillet 1995, et

  9   indique que les besoins matériels doivent être satisfaits immédiatement.

 10   C'est un document qui a été établi par les services de sécurité de l'Etat,

 11   qui ont été autorisés à prendre contact avec les organisations et instances

 12   internationales au sein de la Fédération de Bosnie-Herzégovine. Les

 13   représentants de ce service déclarent que les équipements doivent vous être

 14   envoyés immédiatement pour satisfaire à vos besoins et pour qu'un dossier

 15   soit créé.

 16   Alors, est-ce que ce qu'on peut lire dans ce texte rend bien compte de ce

 17   que vous avez dit devant la Chambre de première instance, ou est-ce qu'il

 18   concerne autre chose ? Merci.

 19   R.  Je n'avais pas vu ces documents avant le procès Popovic. Ce document

 20   est une demande qui est présentée par le ministère de l'Intérieur, par le

 21   service de la sécurité d'Etat, qui est celui avec lequel nous avons eu nos

 22   premiers contacts. C'est donc une demande adressée au commandement de 2e

 23   Corps d'armée et qui concerne des conversations interceptées. Il est

 24   demandé au commandement de ce 2e Corps d'armée de remettre ces écoutes. En

 25   d'autres termes, ce qui est écrit ici confirme ce que j'ai déjà dit, à

 26   savoir que nous avons entendu parler de l'existence d'interceptions radio.

 27   Nous les avons demandées à la police, mais nous ne les avons jamais reçues,

 28   et je n'ai pas su jusqu'au procès Popovic que ces demandes avaient été

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  1   présentées par la police aux militaires. Les militaires ont pris la

  2   décision de ne pas remettre ces écoutes, de rien nous donner jusqu'en 1998.

  3   Q.  Merci. Veuillez, pour le compte rendu d'audience, nous dire si

  4   immédiatement après les événements de Srebrenica, c'est-à-dire dès le mois

  5   de juillet, disons, dès la date du 24 juillet, qui est celle de

  6   l'élaboration de ce document, alors que j'étais moi-même à Zepa, un ordre a

  7   été émis qui demandait que le texte des conversations interceptées soit

  8   remis au bureau du Procureur par les autorités bosniaques. Est-ce que de

  9   tels ordres ont été émis à cette époque-là ?

 10   R.  Nous avons cette requête sous les yeux en ce moment, mais comme je l'ai

 11   déjà dit, je n'avais pas connaissance du fait qu'une demande officielle,

 12   voire un ordre, comme selon le mot que vous venez d'utiliser, ait été

 13   présenté à l'époque.

 14   Q.  Merci. Vous ne le saviez pas, mais veuillez nous dire, pour

 15   consignation au compte rendu d'audience, s'ils ont vraiment reçu un ordre

 16   émanant des instances compétentes, ordre portant sur la nécessité de vous

 17   remettre ces documents ?

 18   R.  Si les militaires ont reçu une demande ? Je ne sais pas. Je ne faisais

 19   pas partie de l'armée. Mais à la lecture de ce document, il ressort que les

 20   militaires ne l'ont pas reçue.

 21   Q.  Donc l'ordre leur a été donné de vous remettre ces documents. Merci.

 22   R.  Oui.

 23   Q.  Merci. Est-ce l'officier le plus ancien des services de sécurité de

 24   l'Etat qui a été à l'origine de cet ordre ?

 25   R.  Pour autant que je le sache, l'homme qui a signé cet ordre était

 26   l'autorité la plus importante au sein des services de sécurité de l'Etat à

 27   Tuzla, autrement dit, l'homme le plus important au sein de la police.

 28   Q.  Merci. Veuillez nous dire si cela signifie que ce représentant du SDB

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  1   avait déjà les mains libres pour vous remettre ces documents ? Avait-il

  2   donc une certaine liberté, ou est-ce qu'il devait s'adresser à l'armée pour

  3   pouvoir le faire ? Merci.

  4   R.  Ces documents montrent qu'il s'est adressé à l'armée à cette fin.

  5   Q.  Merci. Mais dès qu'il s'est adressé à l'armée, il est probable qu'il

  6   était en possession de certains documents, donc est-il logique qu'il vous

  7   remette les documents dont il disposait en tant que service de Sécurité de

  8   l'Etat, parce qu'ici vous avez usage de documents qui émanent de ce

  9   service. Merci.

 10   R.  Oui. En fait, nous n'avons pas reçu de documents du SDB avant mai 1999.

 11   Nous ne savions pas que le SDB avait son siège au même endroit que le 2e

 12   Corps d'armée jusqu'à mai 1999. Nous l'avons appris lorsque nous avons

 13   commencé à interroger les opérateurs chargés des écoutes. Dans mon

 14   souvenir, les explications fournies à l'époque ont consisté à dire que le

 15   SDB interceptait des communications sur la fréquence radio 836, et que

 16   cette fréquence était une fréquence élevée pour les écoutes, et que les

 17   documents dont ils estimaient qu'ils étaient les plus précieux étaient des

 18   conversations interceptées sur d'autres fréquences, fréquences utilisées

 19   par l'armée.

 20   Q.  Merci. Veuillez examiner la dernière phrase de ce document. Je cite :

 21   "Nous avons besoin de ces documents audio pour créer un fichier qui sera

 22   remis au Tribunal international de La Haye."

 23   Alors, qu'est-ce que nous dit cette phrase ? Les services de sécurité de

 24   l'Etat demandent un certain nombre de documents dans le but de créer un

 25   dossier qui, ensuite, devrait vous être remis. Oui ou non ? Merci.

 26   R.  Oui.

 27   Q.  Merci. Vous-même, en tant que représentants du Tribunal, voire un autre

 28   membre de votre équipe, a-t-il ou elle déjà adressé à ce moment-là une

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  1   demande aux autorités de Bosnie-Herzégovine aux fins que ces autorités vous

  2   remettent ces documents ?

  3   R.  Je pense que ceci aurait dû être fait sur accord de leur part, car nous

  4   sommes arrivés à Tuzla quelques jours avant.

  5   Q.  Merci. A quel moment M. Ruez a-t-il demandé ces documents, et à quel

  6   moment avez-vous entendu parler de l'existence de ces documents ? Merci.

  7   R.  Je ne me rappelle pas à quel moment M. Ruez a présenté officiellement

  8   sa demande, demande d'entraide judiciaire s'agissant des écoutes radio. Une

  9   référence a été faite à une demande qui aurait été présentée à la fin de

 10   1997 -- j'ai un petit problème de syntaxe. Je vous demande un instant.

 11   Demande à la suite de laquelle nous avons pu consulter ces documents en

 12   mars 1998.

 13   Q.  Merci. Mais dites-nous, je vous prie, au sein du bureau du

 14   Procureur, puisque vous avez examiné tous les documents que possède le

 15   bureau du Procureur, existe-t-il un document qui aurait été envoyé aux

 16   autorités de Bosnie-Herzégovine et qui comporterait une demande de remise

 17   de l'ensemble des documents relatifs aux crimes de guerre qui pouvait

 18   servir de base pour la suite des discussions ? Merci.

 19   R.  Le bureau du Procureur n'a cessé de présenter des demandes d'obtention

 20   d'éléments d'information, donc je serais incapable de vous indiquer une

 21   demande en particulier. Puis il faut ajouter que nous parlons d'une

 22   procédure qui était en train de se créer, cette idée de présenter des

 23   demandes portant sur la remise de documents ou des demandes d'aide, car à

 24   cette époque-là, bien sûr, le Tribunal international était encore une

 25   institution très nouvelle et elle était en train de mettre en place ses

 26   propres procédures internes quant à la façon de demander des éléments

 27   d'information aux gouvernements.

 28   Q.  Merci. Vous nous avez dit que vous étiez chef de l'équipe chargée de

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  1   ces écoutes et de leur traitement, et que vous avez pris vos fonctions en

  2   1995. Est-ce que cela signifie que quelque part dans vos archives on

  3   devrait trouver une demande envoyée aux autorités de Bosnie-Herzégovine, et

  4   est-ce que vous avez jamais fait état de cette demande à un moment

  5   ultérieur dans le temps ?

  6    Nous voyons à la lecture de ce document qu'il a été envoyé en

  7   juillet 1995, et vous dites que vous avez reçu les documents du SDB en 1999

  8   seulement, au mois de mai, et qu'en 1998 vous avez reçu des documents de

  9   l'ABiH. Pouvez-vous nous expliquer pourquoi il y a eu un tel décalage dans

 10   le temps entre la demande et la réception ?

 11   R.  Je pense qu'il importe de signaler que c'est Jean-René Ruez qui était

 12   le chef d'équipe. Il importe également d'indiquer que les demandes

 13   d'information étaient, pour la plupart, lancées par lui et qu'elles

 14   passaient par lui et que c'est lui qui était le récipiendaire des

 15   informations envoyées suite à ces requêtes.

 16   J'ai commencé à travailler sur les écoutes, comme nous l'avons déjà

 17   dit à plusieurs reprises, au printemps de 1998, mais c'est seulement en

 18   juillet 1995 que j'ai participé pour la première fois au travail d'enquête.

 19   Je crois me rappeler que nous avons eu sous les yeux un document

 20   rédigé par Jean-René Ruez, document qui revient sur la chronologie, c'est-

 21   à-dire sur les moments où les demandes ont été faites oralement et par

 22   écrit en vue d'obtenir les écoutes en question, et ce travail, c'était un

 23   travail qui était réalisé par lui et que je n'avais pas la responsabilité

 24   de mener à bien.

 25   Q.  Merci. Cela est clair à mes yeux, mais je vous demande si dans le

 26   dossier vous avez un document qui présente la demande de documents que vous

 27   avez ensuite analysés, et je vous prie de nous dire si vous avez essayé de

 28   déterminer pour quelle raison ces documents n'étaient pas en train de vous

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  1   parvenir, alors que dans le même temps le monde entier parlait de

  2   Srebrenica et de ce qui s'y était passé ? Merci.

  3   R.  Un tel document aurait dû se trouver dans les dossiers de l'équipe. Je

  4   ne me rappelle pas avoir eu sous les yeux un document de ce genre bien

  5   précis.

  6   Q.  Merci. S'il vous plaît, j'aimerais maintenant que nous examinions un

  7   document du prétoire électronique, dont le numéro de pièce à conviction est

  8   P788. Merci. Voilà, le document apparaît en serbe et en anglais sur les

  9   écrans. C'est un document relativement court.

 10   Il importe au plus haut point de prêter attention à son contenu. Ce

 11   document, qui date de 1995, se lit comme suit, je cite :

 12   "Fourniture de documents destinés au Tribunal international, instruction."

 13   Ce document est signé par le général de brigade, Jusuf Jasarevic, qui était

 14   chef de l'état-major principal de l'ABiH. Il envoie ce texte au

 15   commandement du 2e Corps. Que dit-il dans ce document ? Je cite :

 16   "Nous avons été informés par le ministère de l'Intérieur de Sarajevo, plus

 17   précisément par les services de Sécurité de l'Etat, que dans leur document

 18   7-1022 du 24 juillet 1995, le SDB de Tuzla a demandé les enregistrements

 19   audio que vous détenez et qui concernent les incidents liés à Srebrenica.

 20   Puisque les enregistrements demandés sont très importants pour le dossier

 21   qui est en cours de constitution dans l'intérêt du Tribunal international

 22   chargé des crimes de guerre, il est essentiel que ces documents soient

 23   fournis au secteur du SDB de Tuzla."

 24   Signé par le général de brigade, Jusuf Jasarevic.

 25   Alors, nous voyons qu'ici le service de Sécurité de l'Etat s'adresse à

 26   l'administration de l'ABiH.

 27   Ma question est la suivante : est-ce que ce n'est pas encore un

 28   document qui établit clairement qu'en juillet et août, toutes les instances

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  1   de Bosnie-Herzégovine, y compris l'armée, l'état-major, les services de

  2   Sûreté de l'Etat travaillaient activement à l'élaboration de ce dossier et

  3   recherchaient des documents auprès du 2e Corps d'armée, et que par

  4   conséquent ils n'ont pas reçu ces documents audio qu'ils avaient demandés ?

  5   Très précisément, oui ou non ?

  6   R.  Je ne sais pas s'ils ont travaillé à l'élaboration de ce dossier en

  7   particulier. C'est un document qui a été élaboré, comme vous l'avez dit et

  8   comme vous le savez, par l'ABiH. Je pense qu'il faudrait poser la question

  9   aux responsables de l'armée.

 10   La première fois que j'ai vu ce document c'est également pendant le

 11   procès Popovic. Je ne connaissais absolument pas la documentation

 12   précédente, et tant qu'elle n'a pas été présentée au procès au cours du

 13   contre-interrogatoire, si je ne m'abuse, pendant l'affaire Popovic.

 14   Q.  Je vous remercie. En tant qu'analyste, est-il clair à vos yeux que ces

 15   documents indiquent que les instances de Bosnie-Herzégovine ont commencé à

 16   travailler dès les mois de juillet et d'août 1995 à l'élaboration d'un

 17   fichier, et qu'elles ont demandé les documents audio au 2e Corps d'armée;

 18   oui ou non ?

 19   R.  L'expression "travailler à l'élaboration du dossier" me gêne un peu.

 20   D'après ce que je sais, vous tirez cette expression de la dernière phrase

 21   contenue dans le document précédent que nous avons examiné. Ce que je veux

 22   dire c'est que la façon dont je comprends les choses et la façon dont

 23   j'interprète le document précédent consiste à penser que le SDB à l'époque

 24   s'efforçait d'apporter son aide au Tribunal en fournissant des éléments

 25   d'information susceptibles d'être utiles par conséquent au Tribunal qui

 26   enquêtait sur les crimes présumés qui auraient été commis à Srebrenica

 27   pendant la chute de cette enclave. Donc ce document, -- je reformule, ce

 28   document est manifestement une réponse qui est faite au premier document

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  1   que vous avez montré dans lequel l'ABiH, autrement dit l'état-major

  2   principal demande au 2e Corps de remettre des documents au SDB afin que le

  3   SDB transmette ces documents au bureau du Procureur.

  4   Q.  Merci. Est-ce que dans ce document on fait état du premier document,

  5   est-ce que Jusuf Jasarevic évoque le document du 24 juillet 1995; oui ou

  6   non ? Merci.

  7   R.  On pourrait revenir sur le premier document pour vérifier les numéros,

  8   mais il est certain qu'il fait référence au document du 24 juillet. Je ne

  9   me rappelle pas de tête si le numéro du document en question était 7-1022,

 10   qui est le numéro qu'on trouve dans ce document-ci. Mais je pense que c'est

 11   sans doute le cas.

 12   L'INTERPRÈTE : Remplacer les deux corps d'armée chaque fois que cela a été

 13   dit par l'interprète par le 2e Corps d'armée.

 14   M. TOLIMIR : [interprétation]

 15   Q.  Je vous remercie. Si cela vous semble nécessaire nous pouvons demander

 16   un nouvel affichage de ces documents dans le prétoire électronique. Il

 17   faudrait donc que nous revenions sur la pièce P787 en même temps que nous

 18   examinons le document qui est actuellement à l'écran il faudrait que les

 19   deux soient affichés en même temps. Alors, voilà, il apparaît, voyons ce

 20   qui est écrit dans ce document, je cite :

 21   "Avec le document 7-1022, du 24 juillet 1995."

 22   Et puis en haut au niveau de l'en-tête nous trouvons le même numéro, 7-

 23   1022, la même date 24 juillet, n'est-ce pas ?

 24   R.  Il semble qu'il y ait un J derrière le numéro, non ? Dans le document

 25   original le numéro est 7-1022 J. Enfin, bon, d'accord c'est le même numéro.

 26   Q.  Bien. Ce n'est pas un élément qu'il est capital d'établir en tout état

 27   de cause. Mais ce que j'aimerais que vous disiez c'est s'il existait la

 28   volonté, parce que vous n'avez pas pu dire si vous le connaissiez ou pas,

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  1   mais est-ce qu'il existait la volonté au sein des instances, des organes de

  2   Sûreté de l'Etat et des organes de sécurité de l'armée de fournir ces

  3   documents au Tribunal ? Oui ou non ? Je vous remercie.

  4   R.  Oui.

  5   Q.  Merci. Puisque cette volonté existait aussi bien de la part des organes

  6   de Sûreté de l'Etat qui vous ont remis les documents en question que du

  7   côté des instances chargées de la sécurité au sein de l'armée, pourriez-

  8   vous nous dire pour quelle raison ces documents ne vous ont pas été

  9   transmis jusqu'en 1998 pour l'armée et en mai 1999 pour les instances de

 10   Sûreté de l'Etat, comme vous l'avez dit il y a à peine un instant ? Je vous

 11   remercie.

 12   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur Vanderpuye.

 13   M. VANDERPUYE : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Je pense que

 14   cette question a déjà été posée à plusieurs reprises au témoin. Elle y a

 15   déjà répondue, et je ne crois pas que nous puissions gagner qrand-chose à

 16   voir cette question reposée au témoin sur la base de ce document

 17   particulier ou de quelque autre document. Le témoin a précisément dit que

 18   la note avait été préparée par M. Ruez en rapport aux demandes qui avaient

 19   été présentées et que des réponses ont été apportées par rapport à ces

 20   documents, et je ne vois pas comment le fait de reposer la question encore

 21   et encore pourrait donner lieu de la part du témoin à une réponse

 22   différente.

 23   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] J'aimerais entendre la réponse, même

 24   brève peut-être, mais sans répétition inutile.

 25   LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne sais pas pour quelle raison ces

 26   documents n'ont pas été transmis plus tôt.

 27   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Merci. Veuillez poursuivre, Monsieur

 28   Tolimir.

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  1   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  2   M. TOLIMIR : [interprétation]

  3   Q.  Madame le Témoin, il importe au plus haut point que vous disiez

  4   clairement pour consignation au compte rendu d'audience si vous savez

  5   pourquoi, autrement dit est-ce que dans le cadre de votre analyse vous avez

  6   établie les raisons pour lesquelles vous n'avez pas reçu ces documents au

  7   moment où l'initiative a été lancée par les organes officiels auxquels vous

  8   les aviez demandés, pourquoi a-t-il fallu trois ans pour les obtenir ? Je

  9   vous remercie.

 10   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur Tolimir, je crois vraiment

 11   que nous sommes en présence d'une répétition. Le témoin a déclaré à

 12   plusieurs reprises qu'elle avait participé à l'analyse de ces documents en

 13   1998 et pas avant et qu'elle n'était pas chargée de ce travail, et elle a

 14   évoqué précisément les raisons pour lesquelles l'armée et le MUP de Bosnie

 15   n'avaient pas répondu plus tôt; interrogée à ce sujet elle a dit très

 16   clairement qu'elle ne le savait pas, par conséquent je pense qu'il est

 17   inopportun de continuer à interroger le témoin sur ces aspects de la

 18   question. Vous pourriez peut-être attendre que soit entendu un autre témoin

 19   qui pourrait vous aider en vous fournissant cette information. Ne reposez

 20   pas, je vous prie, la même question, mais passez à autre chose.

 21   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Je pensais que ce

 22   témoin savait pourquoi elle n'avait pas reçu quelque chose qui avait été

 23   demandé alors que l'initiative de fournir ce document avait démarré, donc

 24   au début j'ai demandé au témoin pourquoi selon elle ces documents n'avaient

 25   pas été remis, mais le témoin a dit que la volonté de les remettre

 26   existait. Il y avait une volonté de leur part de remettre ces documents.

 27   C'est la raison pour laquelle j'essaie d'obtenir des éléments plus précis.

 28   Quand on possède quelque chose, on peut le remettre. Si on ne le possède

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  1   pas, alors on n'a pas la capacité de le remettre. Merci.

  2   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Ce témoin ne travaillait pas pour

  3   l'ABiH mais pour le bureau du Procureur, et elle a dit très clairement à

  4   plusieurs reprises qu'elle ne le savait pas. Je pense que vous devriez

  5   passer à un autre sujet.

  6   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. J'aimerais

  7   maintenant que l'on examine la pièce P789, et si possible. A l'écran, grâce

  8   au système de prétoire électronique.

  9   Je ne vais pas essayer de contraindre le témoin à dire quoi que ce soit. Il

 10   me suffit d'entendre un oui ou un non de sa part. Ce genre de réponse est

 11   tout à fait recevable en ce qui me concerne.

 12   Merci.

 13   M. TOLIMIR : [interprétation]

 14   Q.  Nous voyons un document à l'écran du commandement du 2e Corps, services

 15   de Sécurité qui disposaient de ces conversations interceptées. Le document

 16   porte sur tous les premiers documents demandés, donc les enregistrements

 17   audio. Et si vous regardez le deuxième paragraphe du document, vous lirez

 18   ce qui suit :

 19   "Conformément à ce qui précède, nous demandons à ce que vous fassiez une

 20   sélection dans vos enregistrements audio relatifs à la chute de Srebrenica

 21   contenant des données se rapportant aux crimes de guerre et aux crimes de

 22   génocide commis par l'agresseur contre les habitants de la 'zone' dite 'de

 23   sécurité.' Nous vous prions de bien vouloir nous les communiquer de sorte à

 24   ce que nous puissions les transmettre au CSB - SDB de Tuzla, conformément

 25   aux demandes ci-dessus."

 26   Nous voyons que ce document porte la date du début août, et à la dernière

 27   phrase, on lit :

 28   "Nous demandons à ce que vous donniez suite à ce document le plus

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  1   rapidement possible de façon à ce que nous puissions accomplir les tâches

  2   susmentionnées ou dans les délais prescrits."

  3   Ma question est la suivante : en tant qu'analyste, vous êtes-vous penchée

  4   sur ce deuxième paragraphe où l'on demande une sélection de ces

  5   enregistrements audio ? Selon vous, qu'entend-on par ce terme "sélection" ?

  6   Merci.

  7   R.  C'est au cours du procès Popovic que j'ai vu ce document également pour

  8   la première fois, et en partie ma réponse sera la même, je ne suis pas sûre

  9   d'être la bonne personne pour répondre à cette question. En 1998, il est

 10   vrai que nous avons reçu une sélection de documents dans ce classeur bleu,

 11   550 pages. C'est peut-être cela dont il parle lorsqu'il parle de sélection

 12   ici, mais là encore, je n'ai jamais été membre de l'ABiH. Je ne suis donc

 13   pas tout à fait certaine de savoir ce que cela veut dire, mais ça pourrait

 14   être une explication.

 15   Q.  Merci. Vous étiez enquêtrice chargée d'examiner les documents qui vous

 16   ont été remis. En tant qu'enquêtrice, vous êtes-vous demandée si cette

 17   sélection communiquée au bureau du Procureur par l'ABiH ne dépendait pas de

 18   ce que l'armée souhaitait voir tomber entre les mains du Procureur, et

 19   n'avez-vous pas jugé que ceci pouvait avoir une influence sur la fiabilité

 20   de cette collection de documents, au vu du fait qu'une sélection avait été

 21   réalisée quant à ce qui devrait figurer ou ne devrait pas figurer dans le

 22   dossier qui avait été remis au bureau du Procureur ? Merci.

 23   R.  Effectivement, nous l'avons pris très au sérieux, et c'est la raison

 24   pour laquelle il était très important de recevoir les cahiers, tous les

 25   cahiers, de façon à ce que nous puissions les examiner minutieusement, de

 26   la première à la dernière page, conversation par conversation. C'est aussi

 27   la raison pour laquelle nous souhaitions également obtenir toutes les

 28   versions électroniques de ces conversations, de façon à avoir le sentiment

Page 5194

  1   que nous obtenions, disons, un dossier complet de ce qui avait été

  2   retranscrit.

  3   Q.  Merci. La dernière fois, à la fin, nous avons également constaté que

  4   ces versions électroniques ou ces retranscriptions électroniques étaient

  5   incomplètes. Ceci a-t-il suscité des doutes dans votre esprit quant à la

  6   méthode suivie pour rassembler et communiquer ces documents, une méthode

  7   qui aurait pu davantage convenir à l'ABiH qu'au bureau du Procureur, avant

  8   donc de vous les présenter conformément à votre demande ? Merci.

  9   R.  Les cahiers étaient complets, je peux le dire, puisque j'ai longtemps

 10   étudié ces cahiers. Les documents électroniques me sont parvenus plus tard.

 11   Je ne peux pas affirmer avec une certitude absolue que nous les avons tous

 12   reçus. Je pense que c'est le cas, mais il me faudrait examiner les dossiers

 13   dans leur intégralité pour être en mesure de vous répondre de manière

 14   absolument sûre.

 15   Q.  Merci. Vous avez examiné ces trois documents de l'ABiH que j'ai demandé

 16   que l'on affiche à l'écran, des documents que vous aviez déjà vus dans le

 17   cadre d'un autre procès, et vous avez constaté qu'il y avait une véritable

 18   volonté au sein de tous les organes, volonté de communiquer les documents

 19   en question, mais qu'en dépit de cela, vous ne les avez pas reçus ?

 20   Voici ma question : avez-vous tenté de vous renseigner sur les

 21   ressources techniques et humaines dont disposait le SDB ? Par exemple,

 22   avaient-ils un laboratoire audio et combien de temps avaient-ils besoin

 23   pour préparer cette sélection de documents ? Merci.

 24   R.  Je vais vous demander de préciser votre question, parce qu'il y a

 25   différents éléments dans celle-ci. D'abord, vous avez évoqué les documents

 26   communiqués par l'armée, puis il y a un autre aspect qui renvoie

 27   précisément au SDB, alors je vous demanderais de bien vouloir ventiler

 28   votre question.

Page 5195

  1   Q.  Bien. L'armée vous a communiqué des documents en 1998, comme vous

  2   l'avez dit vous-même dans le cadre de votre déposition, et le MUP vous a

  3   fourni des documents en mai 1999; c'est bien exact ? Merci.

  4   R.  Oui.

  5   Q.  Et vous voyez dans les documents que nous venons d'examiner que le MUP

  6   était censé vous remettre ces documents, documents obtenus de l'armée,

  7   puisqu'ils avaient pour tâche de rassembler, de compiler ces documents

  8   audio, puisque c'est ce dont il s'agit. Donc, voilà ma question :

  9   j'aimerais savoir si vous savez vous-même quels étaient le matériel et les

 10   effectifs disponibles au service de la Sûreté de l'Etat à ce moment-là,

 11   s'ils avaient un laboratoire audio à cette époque lorsque la demande de

 12   communication de documents leur a été communiquée et lorsque les documents

 13   ont été remis à vous en 1998 et en 1999 ? Merci.

 14   R.  Tout ce que je sais c'est que le SDB à ce moment-là travaillait à

 15   partir du site nord au cours de la période en question. Je ne sais pas

 16   s'ils disposaient d'un laboratoire.

 17   Q.  Merci. Le cas échéant, je peux subdiviser encore davantage ma question,

 18   mais voici une question subsidiaire : savez-vous quelles sont les

 19   prérogatives du service de Sûreté de l'Etat et quel type de missions ce

 20   service est appelé à effectuer ? Merci.

 21   R.  Pas dans le détail, non.

 22   Q.  Merci. A la lecture de ces trois documents, vous constatez que l'armée

 23   était censée remettre au service de Sûreté de l'Etat les documents dont il

 24   est question ici, sous l'intitulé d'enregistrements audio ou de

 25   conversations radio interceptées, n'est-ce pas ?

 26   R.  Oui.

 27   Q.  Merci. Et à l'évidence, au vu de ces trois documents, l'armée s'est

 28   exécutée, elle a donc répondu à la demande formulée et a remis les

Page 5196

  1   documents au MUP ? Est-ce que ceci ressort clairement de ces trois

  2   documents ?

  3   R.  Non.

  4   Q.  Avez-vous remarqué que les commandants militaires ont demandé au

  5   commandement du corps de remettre ces documents au service de Sûreté de

  6   l'Etat ?

  7   R.  Oui.

  8   Q.  Merci. Et avez-vous remarqué également en lisant ces documents que le

  9   service de Sûreté de l'Etat demande la même chose, de façon à ce qu'un

 10   dossier puisse être constitué ? Je crois vous avoir donné lecture de cette

 11   phrase tout à l'heure. Merci.

 12   R.  Oui.

 13   Q.  Merci. Avez-vous essayé de déterminer la quantité de documents se

 14   trouvant en possession du service de Sûreté de l'Etat, utilisés pour

 15   constituer ce dossier, et pourquoi ils l'ont rendu à l'armée, et pourquoi

 16   est-ce l'armée qui vous a communiqué ce document et non pas le service de

 17   la Sûreté de l'Etat, qui était censé vous le remettre ?

 18   Ma question étant de savoir pourquoi le service de la Sûreté de

 19   l'Etat n'a pas fait ce qui est précisé dans la dernière phrase et a remis

 20   les documents à l'ABiH, et que les Serbes de Bosnie ont ensuite remis ce

 21   matériel à vous, personnellement, plutôt que le SDB ? Je vous remercie.

 22   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Je vous vois debout, Monsieur

 23   Vanderpuye, mais je demanderais au témoin de bien vouloir répondre. Je suis

 24   certain qu'elle est en mesure de le faire.

 25   LE TÉMOIN : [interprétation] Je souhaitais attirer votre attention sur

 26   quelque chose que nous avons vu dans les documents examinés hier, et c'est

 27   en rapport avec la question qui vient de m'être posée. Sur le premier site,

 28   le site nord, le SDB et l'armée partageaient les informations. Le SDB

Page 5197

  1   transmettait ses informations à l'armée, et l'armée faisait ensuite

  2   remonter cette information au commandement. Le SDB communiquait également

  3   ses propres informations à son commandement.

  4   Alors, j'ai quelques peines à me souvenir des informations qui -- en

  5   tout cas, je pense qu'il y avait échange total d'information entre ces deux

  6   organes. Alors, ce que vous verrez, par exemple, à l'intercalaire 4 ou 5 de

  7   ce classeur que nous avons examiné mercredi après-midi, c'est que l'en-tête

  8   dit : "Armée de Bosnie-Herzégovine 2e Corps," mais que l'organe qui a

  9   enregistré la conversation en question, c'est le SDB de Tuzla.

 10   Je pense que la réponse obtenue lorsque nous avons posé cette

 11   question a été que le SDB a pensé que parce que nombre de ces documents

 12   n'étaient pas les leurs ils n'avaient pas le droit de remettre des

 13   conversations interceptées par l'armée au bureau du Procureur sans l'aval

 14   de l'armée.

 15   M. TOLIMIR : [interprétation]

 16   Q.  Merci. Nous avons vu dans le document P788 que le général de

 17   brigade, Jusuf Jasarevic, le chef donc, a donné son aval, qu'il a autorisé

 18   la transmission au service de Sûreté de l'Etat de documents de l'armée. On

 19   l'a vu dans le document. Et dans le premier document, on a également

 20   constaté que la Sûreté de l'Etat avait été à l'origine du dossier qui était

 21   censé être remis. Je vous ai lu la dernière phrase, une phrase assez

 22   importante. Et en écoutant votre réponse, on apprend que le SDB avait ce

 23   document, quelque chose donc dont ils disposaient déjà. La demande portait

 24   sur quelque chose dont ils disposaient déjà.

 25   Alors, pourquoi la Sûreté de l'Etat vous a-t-elle remis ces documents

 26   en mai 1999, et pourquoi l'armée vous a-t-elle remis les siens en 1998, et

 27   entre ces trois années, de 1995 à 1998, est-ce que les documents ont été

 28   traités par la Sûreté de l'Etat, s'ils disposaient d'un laboratoire ou de

Page 5198

  1   quelque chose de ce genre ? Vous êtes-vous penchée sur ces questions ?

  2   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur Vanderpuye.

  3   M. VANDERPUYE : [interprétation] Je me lève encore une fois parce que dans

  4   cette dernière question se trouvent quasiment cinq questions. Pourquoi la

  5   Sûreté de l'Etat a agi de telle sorte, pourquoi l'armée a agi de telle

  6   sorte, pourquoi n'ont-ils pas remis l'information immédiatement. Il me

  7   semble qu'il serait plus utile et plus efficace que M. Tolimir pose ses

  8   questions les unes après les autres au témoin, de façon à ce que celle-ci

  9   puisse les comprendre et y répondre.

 10   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Effectivement, le témoin déjà a

 11   demandé à ce que des questions plus courtes lui soient posées.

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] Mais s'agissant de cette dernière série de

 13   questions, je dois dire que je ne me sens pas à même d'y répondre parce que

 14   je ne faisais pas partie de ce processus, et je n'ai pas les réponses à ces

 15   questions. Je ne sais pas pourquoi les choses ne se sont pas produites

 16   comme elles auraient dû le faire.

 17   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur Tolimir.

 18   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 19   M. TOLIMIR : [interprétation]

 20   Q.  Je ne vous demande pas de nous dire pourquoi les choses ne se sont pas

 21   produites comme elles auraient dû. Je vous demande si vous vous êtes

 22   penchée sur cette question, la question de savoir pourquoi ces documents ne

 23   vous ont pas été remis pendant trois ans, et je vous demande si ceci aurait

 24   pu éventuellement avoir une influence sur la fiabilité et l'authenticité

 25   des documents ? Si vous vous êtes penchée là-dessus ? Je ne vous demande

 26   pas autre chose.

 27   R.  Ce n'est qu'au cours du procès Popovic que j'ai eu accès à ces

 28   documents pour la première fois dans le cadre de mon contre-interrogatoire.

Page 5199

  1   Alors, ma réponse est non, je ne me suis pas penchée là-dessus parce que je

  2   n'avais même pas connaissance de l'existence de ces documents.

  3   Q.  Merci. En tant qu'enquêtrice, avec à l'esprit la nécessité d'examiner

  4   des documents authentiques et fiables, pouvez-vous me dire si les actions

  5   entreprises par les autorités de Bosnie-Herzégovine, s'agissant de ces

  6   enregistrements, ont suscité le moindre doute concernant le fait que ces

  7   documents auraient peut-être fait l'objet d'un traitement particulier

  8   pendant toute la période au cours de laquelle ils ne vous ont pas été

  9   remis, c'est-à-dire les trois années en question ? Merci.

 10   R.  Je vois où vous voulez en venir. Ayant examiné ces documents dans la

 11   mesure où je l'ai fait, je n'ai pas le moindre doute sur l'authenticité et

 12   la fiabilité de ces derniers. Il pourrait être utile de connaître les

 13   raisons de ce retard, mais ayant travaillé en profondeur sur ces documents

 14   et ayant également examiné d'autres documents d'autres sources qui

 15   corroborent ces premiers documents, je n'ai toujours pas le moindre doute

 16   quant à leur authenticité et à leur fiabilité.

 17   Q.  Merci. Nous avons vu un enregistrement audio hier accompagnant sa

 18   retranscription, et l'on constate que la retranscription est incomplète,

 19   que certaines phrases y manquent. Mme le Juge Nyambe vous a posé une

 20   question après cela. Vous souvenez-vous de cet épisode ?

 21   R.  J'aimerais être tout à fait certaine que nous parlons de la même chose.

 22   Vous faites référence à l'intercalaire 4 du classeur, et Mme le Juge Nyambe

 23   s'est tournée vers le Procureur en disant qu'elle avait du mal à suivre la

 24   retranscription et l'enregistrement audio; c'est bien cela ?

 25   Q.  Oui. Merci. C'est cela.

 26   R.  C'est là un exemple d'une situation dans laquelle le SDB de Tuzla - et

 27   je vous renvoie à l'intercalaire 4, que j'ai sous les yeux - où le SDB de

 28   Tuzla appose une annotation au début de la conversation qui précise qu'ils

Page 5200

  1   ne sont en mesure d'entendre qu'un interlocuteur. Ils ont donc enregistré

  2   la conversation de la personne appelée X, un officier de la VRS. Cette

  3   retranscription ne reprend que les propos de X.

  4   Lorsque nous avons examiné les notes consignées par le lieutenant-

  5   colonel De Ruiter des Nations Unies, ses notes contenaient cinq points

  6   distincts évoqués dans cinq paragraphes différents. Dans la conversation

  7   enregistrée par le SDB, étant donné qu'ils n'entendaient qu'un

  8   interlocuteur, c'est-à-dire l'officier de la VRS, seuls les points 2 et 5

  9   sont repris dans la retranscription de la conversation. Toutefois, si vous

 10   examinez la retranscription finale, où sont reflétés les propos des deux

 11   interlocuteurs, dans cette conversation, vous trouverez les points 1 à 5

 12   conformément à la teneur des notes du lieutenant-colonel De Ruiter.

 13   Je ne sais pas si ceci vous permet de mieux comprendre comment il se

 14   fait que certaines parties puissent manquer.

 15   Q.  Je comprends parfaitement pourquoi certaines parties manquent, les

 16   parties correspondantes aux propos des interlocuteurs qui n'étaient pas

 17   membres de la VRS. Chaque fois que des représentants de la FORPRONU sont

 18   enregistrés, une partie de la conversation manque. Par exemple, les

 19   officiers de la VRS qui y ont participé. Toutefois, par la suite, en

 20   écoutant l'enregistrement audio, on entend ce que dit M. Y et non pas

 21   seulement ce que dit M. X, mais ceci ne se retrouve pas dans le rapport de

 22   la Sûreté de l'Etat.

 23   Ceci ne vous indique donc pas que la Sûreté de l'Etat a bien opéré

 24   une sélection parmi ce qui vous a été transmis ou pas, et ceci n'a-t-il pas

 25   une influence sur ce que vous pouvez considérer comme étant authentique ou

 26   fiable ?

 27   R.  Je pense que nous devrions choisir un exemple précis pour pouvoir

 28   vraiment traiter de ce point concrètement. Il est tout à fait possible,

Page 5201

  1   bien sûr, qu'il manque certains mots ou certains membres de phrases. Cela

  2   dépend bien sûr aussi du nombre de fois que vous écoutez un enregistrement

  3   audio. J'ai eu la possibilité d'écouter des cassettes et d'essayer de les

  4   retranscrire, et c'est extrêmement difficile, et cela exige de grandes

  5   compétences. Par ailleurs, il est arrivé que les services de Sûreté de

  6   l'Etat ne procèdent qu'à un résumé de la conversation.

  7   Dans toutes les analyses que j'ai effectuées, je ne me suis pas

  8   retrouvée devant une situation où il existait de très grandes différences

  9   entre les différents enregistrements et retranscriptions de conversations.

 10   Que l'ABiH ou le SDB de Tuzla ou les Croates aient été à l'origine de ce

 11   travail, je n'ai pas constaté de différences significatives, ni par rapport

 12   aux nouvelles cassettes que nous avons écoutées.

 13   Q.  Merci. Hier au cours de votre interrogatoire principal, le Procureur

 14   nous a fait entendre un enregistrement audio, et jusqu'à un certain point,

 15   nous avons été en mesure de suivre. Et par la suite, nous avons constaté

 16   qu'un certain nombre de phrases manquaient dans le texte. Puis, après ces

 17   quelques phrases manquantes, la retranscription s'est poursuivie et le

 18   service de Sûreté de l'Etat vous a communiqué ce document comme étant

 19   authentique et fiable alors que nous avons tous été en mesure de constater

 20   que la retranscription n'était pas complète et que deux ou trois phrases

 21   importantes manquaient, rendant ce document dépourvu de fiabilité et

 22   d'authenticité. Voilà l'exemple que j'avais à l'esprit.

 23   Ma question est donc la suivante : est-il possible que les services

 24   de Sûreté de l'Etat aient procédé à une sélection de sorte à ne vous

 25   communiquer que certains éléments ?

 26   M. LE JUGE FLUEGGE : [aucune interprétation]

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] Pourriez-vous, s'il vous plaît, faire

 28   référence à une bande audio bien précise, celle dont vous parlez dans votre

Page 5202

  1   question, pour que nous soyons bien sûrs de parler de la même chose.

  2   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur Vanderpuye.

  3   M. VANDERPUYE : [interprétation] Je vous remercie de me donner la parole,

  4   Monsieur le Président. Je suis debout parce que je pense que la situation

  5   ici est un peu confuse. On le voit d'ailleurs dans la question posée par M.

  6   Tolimir. Les choses sont un peu confuses. Avant-hier, mercredi, lorsque

  7   nous avons entendu la bande, on a entendu une bande, c'est-à-dire un

  8   enregistrement audio, et il y avait la transcription de cette bande audio,

  9   une transcription qui n'avait rien à voir de l'enregistrement de la même

 10   conversation mais faite, cette fois-ci, par le SDB. Donc, on avait deux

 11   transcriptions et une seule bande audio. En ce qui concerne ce qui manque

 12   dans une des transcriptions, ça, ce n'est pas très clair dans la question

 13   de M. Tolimir, puisqu'il n'a pas expliqué au témoin qu'il y avait deux

 14   transcriptions et que, pour ce qui est d'une transcription, elle a été

 15   faite par un camp qui ne pouvait entendre qu'un côté de la conversation,

 16   donc sur une bande audio qui est différente de la bande audio que le SDB,

 17   lui, a utilisée pour sa propre transcription.

 18   Donc, la question n'est pas du tout claire. Il faudrait que M.

 19   Tolimir la repose afin que nous sachions exactement de quoi nous parlons.

 20   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur Tolimir, qu'avez-vous à dire

 21   ?

 22   L'ACCUSÉ : [interprétation] Le témoin veut voir la transcription papier.

 23   Elle trouvera cela à l'intercalaire 4. C'est en date du 9 juillet. C'est un

 24   document qui vient de la DB, de la Sûreté de l'Etat. Nous avons pu entendre

 25   la totalité de l'enregistrement audio jusqu'à la quinzième ligne. C'était

 26   parfaitement identique jusqu'à la quinzième ligne, de la première à la

 27   quinzième ligne. Mais à partir de la quinzième ligne, il manque un

 28   paragraphe entier, alors que l'on entendait très bien ce paragraphe sur la

Page 5203

  1   bande audio et on entendait la personne de l'autre côté de la ligne alors

  2   que le SDB déclare qu'il ne pouvait pas l'entendre.

  3   M. TOLIMIR : [interprétation]

  4   Q.  Alors, comment cela se fait-il ? Le SDB dit qu'ils ne peuvent pas

  5   entendre l'interlocuteur et on ne peut pas vérifier qu'ils n'entendent pas.

  6   Ce n'est pas possible d'utiliser cet exemple lorsque l'on juge de

  7   l'authenticité et de la fiabilité d'un document.

  8   R.  Nous ne parlons pas de la même chose. D'un côté, on a entendu une bande

  9   audio qui était à l'intercalaire 4, hier, et on pouvait entendre les deux

 10   côtés de la conversation. C'est vrai, mais ce n'était pas l'enregistrement

 11   que possédait le SDB, à l'époque. Dans l'enregistrement du SDB de l'époque,

 12   on n'entendait qu'un seul côté de la conversation. On ne l'a pas entendue.

 13   On a vu la transcription, rien de plus.

 14   Mais pour répondre à votre question, lorsque vous dites que le SDB

 15   aurait peut-être pu tout simplement couper délibérément des passages des

 16   bandes qu'ils nous ont données et des éléments qu'ils nous ont donnés,

 17   voici ce que je pourrais répondre. Ma réponse est négative, c'est

 18   impossible. Je vais m'expliquer. Il n'y a pas que le SDB mais il y a aussi

 19   les militaires, et pas uniquement l'ABiH mais aussi les Croates, et tous

 20   les autres documents dont nous disposons, sachez que ce sont tous des

 21   personnes qui font exactement la même chose qu'un sténotypiste. Ils ont

 22   l'habitude de faire ce travail, le même travail que font les sténotypistes

 23   ou les interprètes. Donc, ce sont des gens qui sont extrêmement compétents,

 24   bien formés et qui sont formés à noter exactement ce qu'ils entendent,

 25   qu'ils soient ou non d'accord avec ce qu'ils entendent, qu'ils puissent

 26   penser aussi qu'on pourrait l'exprimer différemment ou de bien meilleure

 27   façon. Mais ils sont là pour enregistrer ce qu'ils entendent, rien de plus.

 28   J'ai travaillé avec ces pièces, toutes ces pièces, et je sais, du fait

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  1   d'avoir travaillé avec toutes ces pièces, que c'est ainsi que les gens

  2   procédaient.

  3   Alors, il peut très bien y avoir une faute dans la transcription,

  4   tout comme parfois nous avons des erreurs au compte rendu de l'audience, ça

  5   peut arriver, l'erreur est humaine, mais ce n'est pas systématique, c'est

  6   impossible.

  7   Q.  Je vous remercie de votre réponse. Donc, je vois que vous connaissez

  8   bien la question et j'aimerais que vous nous disiez où ces personnes ont

  9   été formées, par qui et comment.

 10   R.  Je n'en sais rien. Je sais que certains ont été formés en interne au

 11   cours de la guerre, au cours du conflit en Bosnie-Herzégovine. Quant à

 12   savoir à quelle école ils ont été envoyés, je ne sais pas. Il faudrait leur

 13   demander.

 14   Q.  Merci. J'ai posé la question, d'ailleurs, et les réponses sont dans le

 15   compte rendu. Revenons-en à cette fameuse transcription que nous avons à la

 16   page 4, intercalaire 4. Vous dites que la Sûreté de l'Etat ne pouvait pas

 17   entendre un côté de la conversation, mais à la ligne 16, on voit bien

 18   qu'ils sont parfaitement capables de l'entendre. Alors, la DB semble

 19   pouvoir être capable d'entendre ce qu'elle veut bien entendre et rien

 20   d'autre. Comment se fait-il qu'ils entendent une personne sur une ligne et

 21   on n'entend pas la personne qui parle sur la ligne suivante alors que sur

 22   l'enregistrement audio, on pouvait entendre les deux interlocuteurs ? Est-

 23   ce que cela signifie que tous les mots prononcés par les représentants des

 24   Nations Unies étaient omis et qu'ils ne transmettaient ce que disait une

 25   personne que parce qu'ils l'avaient entendue ? Mais il était impossible

 26   qu'ils ne puissent pas entendre l'un des interlocuteurs du tout. A la ligne

 27   16, par exemple, on voit une personne qui semble dire "O.K.". Vous le voyez

 28   ?

Page 5205

  1   R.  Oui. C'est après le "Hello, hello. O.K.".

  2   Q.  Oui. Et la personne X dit : "Répétez, s'il vous plaît," "Please

  3   repeat." Et la réponse est "O.K.". Ou bien, regardez la ligne 1, si pour

  4   vous c'est plus simple. Lorsqu'ils établissent la communication, quelqu'un

  5   dit "Hello", "Bonjour." L'autre personne dit "Bonjour," et cetera, et

  6   cetera.

  7   Vous avez analysé toutes les transcriptions écrites et j'aimerais

  8   savoir si vous avez remarqué qu'en ce qui concerne les transcriptions de la

  9   DB, ils n'ont jamais relayé les propos des représentants de la FORPRONU ou

 10   de toute personne autre qui soit en train de parler avec les membres de

 11   l'armée. L'avez-vous remarqué ? Et si vous ne l'avez pas remarqué, pourquoi

 12   ?

 13   R.  Passons à l'intercalaire 5 --

 14   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Oui, si nous passons à l'intercalaire

 15   5. Pour le compte rendu, il nous faut une citation bien précise de la

 16   transcription. Dans votre question, Monsieur Tolimir, vous dites qu'il y

 17   avait une réponse qui était : "Ok." Mais dans la transcription, on voit X

 18   qui dit :

 19   "Allo. Bonjour. Je n'entends rien. Vous devez tout répéter, je n'ai rien

 20   compris. Veuillez tout répéter."

 21   Et la réponse est :

 22   "Ok."

 23   Mais moi, je ne le vois pas du tout dans la transcription écrite. Je ne

 24   vois pas où X aurait répété "Ok." Donc, je voulais juste que ceci soit noté

 25   au compte rendu de l'audience. On ne sait pas dans ce document écrit où est

 26   la question et où est la réponse.

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] Ce n'est pas vraiment précis. Il n'est pas

 28   vrai de dire qu'il ne consignait que ce que disaient les membres de la VRS,

Page 5206

  1   puisqu'il y a des exemples où, en effet, cela s'avère, mais d'autres - et

  2   nous en avons parlé d'ailleurs et je suis sûre que vous en avez parlé aussi

  3   avec d'autres témoins qui sont déjà venus ici. Souvent, ils ne pouvaient

  4   entendre qu'un côté de la conversation. Passez à l'intercalaire 10 par

  5   exemple. Là dans cette conversation, ils entendent l'interprète et le

  6   général Tolimir. Donc, tout dépend de ce qu'ils arrivaient à entendre, de

  7   la force du signal qu'ils arrivaient à intercepter. Je ne vois vraiment pas

  8   quels auraient été leurs motifs pour éliminer les propos des représentants

  9   des Nations Unies. Et lorsque j'ai analysé ces informations, je n'ai jamais

 10   trouvé cette tendance dont parle M. Tolimir.

 11   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur Vanderpuye, vous étiez prêt

 12   à vous lever.

 13   M. VANDERPUYE : [interprétation] Oui. En ce qui concerne le premier point,

 14   donc le passage auquel faisait référence le général Tolimir, sachez qu'il

 15   s'agit de la transcription effectuée par le MUP, 9 juillet 1995. Deuxième

 16   page derrière l'intercalaire, quatre lignes à partir du haut, on voit X

 17   dire :

 18   "Bonjour. Je n'entends rien. Vous allez devoir tout répéter, je n'ai rien

 19   compris. Veuillez s'il vous plaît tout répéter."

 20   Et ensuite, X dit :

 21   "Ok."

 22   Ça, c'est dans la transcription du MUP. Ensuite, on trouve la transcription

 23   complète, qui vient d'une bande qui a été obtenue dans le cadre d'une

 24   saisie. Ce n'est pas du tout la même chose que la bande obtenue, donnée par

 25   le MUP avec la transcription du MUP dont on vient juste de donner lecture.

 26   Je peux vous donner une référence exacte.

 27   Donc, vous le trouverez en fait sur la première page de la transcription

 28   complète, c'est-à-dire la transcription qui vient d'un matériel qui a été

Page 5207

  1   saisi. Et ce n'est pas du tout les bandes que détenait le MUP. A la

  2   dernière ligne, on voit bien qu'il y a un "Ok" qui est attribué au général

  3   Tolimir, qui serait le X dans l'autre transcription. Et si vous allez

  4   jusqu'à la ligne où le général Tolimir parle avant ce "Ok," vous voyez

  5   qu'il est écrit :

  6   "Je n'ai rien compris. Veuillez s'il vous plaît répéter."

  7   Cela correspond parfaitement avec les propos qui sont attribués à X dans la

  8   transcription du MUP.

  9   Autre chose que je voulais dire, le fait que le MUP n'entende qu'un côté et

 10   jamais le côté de la FORPRONU. Nous avons déjà un témoin qui est venu

 11   parler, et vous savez que pour ce qui est par exemple de l'intercalaire 10,

 12   11 et 12, dans ces conversations, on entend très bien les deux participants

 13   à la conversation et ils sont tous les deux retranscrits par le MUP. Je

 14   voulais que ce soit clair.

 15   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] J'ai un petit problème avec ce que

 16   vous venez de nous affirmer. Vous n'êtes pas là pour témoigner,

 17   malheureusement.

 18   M. VANDERPUYE : [interprétation] Vous avez tout à fait.

 19   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Mais tout est au compte rendu

 20   maintenant. Nous avons le dossier, nous avons les intercalaires. Hier, nous

 21   avons reçu les documents et nous pouvons lire tout aussi bien que vous.

 22   Sachez-le. Donc, je pense que M. Tolimir devrait poursuivre son contre-

 23   interrogatoire.

 24   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 25   M. TOLIMIR : [interprétation]

 26   Q.  Question suivante : si dans une transcription 50 % de la conversation

 27   manque, s'il y a un des interlocuteurs qu'on n'entend pas du tout, peut-on

 28   considérer néanmoins que la conversation est fiable ?

Page 5208

  1   R.  Les 50 % que l'on entend, de mon avis, peuvent être considérés comme

  2   étant fiables.

  3   Q.  Merci. Et comment avez-vous évalué la fiabilité de ces 50 % en tant

  4   qu'analyste, et comment savez-vous ce que peut bien dire l'autre personne,

  5   puisque s'il répond par exemple et qu'on n'entend pas la question, comment

  6   pouvez-vous vous y retrouver ? On a des exemples de ce type, un grand

  7   nombre d'entre eux d'ailleurs.

  8   R.  Oui. Nous avons parlé du concept de fiabilité, enfin, de ma définition

  9   du terme de fiabilité. Et comme je l'ai dit, cela a à voir avec la

 10   procédure interne employée pour enregistrer les conversations, la formation

 11   reçue par les agents chargés d'effectuer ces écoutes, les pratiques

 12   utilisées, le fait aussi d'analyser la totalité des matériels et les

 13   lacunes et les parties manquantes aussi. Donc, si on ne peut entendre que

 14   50 % d'une conversation, ces 50 % peuvent être considérés comme étant

 15   fiables.

 16   Q.  Bien. En ce qui concerne la conversation que nous avons vue à

 17   l'intercalaire 4, qui a été utilisé en présence d'un autre témoin, pour

 18   indiquer à quel point j'étais responsable de tout ce qui s'était passé à

 19   Srebrenica, et pour expliquer à quel point je n'avais pas fait ce que mon

 20   interlocuteur m'avait demandé, or, hier, dans le compte rendu, on a vu que

 21   ce n'était pas le cas. Alors, c'est fiable ou ce n'est pas fiable ?

 22   R.  Il est difficile pour moi de faire des commentaires à propos de la

 23   déposition d'un autre témoin. Je ne sais pas ce qu'ils ont dit. Je ne sais

 24   pas dans quel contexte ils l'ont dit.

 25   Je ne suis venue ici que pour parler des conversations interceptées, mais

 26   en tant qu'ensemble. Je ne suis pas venue ici pour parler de

 27   responsabilités qui incomberaient à l'un ou à l'autre.

 28   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] J'ai une petite question pour essayer

Page 5209

  1   d'aller au fond des choses.

  2   Avez-vous essayé de savoir pourquoi parfois, enfin à plusieurs reprises

  3   d'ailleurs, une seule partie de la conversation était entendue, y avait-il

  4   une explication technique qui pourrait expliquer pourquoi parfois on entend

  5   les deux locuteurs et parfois on entend qu'un ? Avez-vous enquêté sur le

  6   sujet, en tant que membre du bureau du Procureur, pour essayer de savoir ce

  7   qui s'était passé ?

  8   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Surtout lorsque nous avons rencontré

  9   différentes versions d'une même conversation pour essayer de comprendre

 10   pourquoi parfois dans un enregistrement on entend les deux participants, et

 11   parfois dans un autre enregistrement d'une même conversation on n'entend

 12   pas les deux, on en entend qu'un. Pourquoi parfois une conversation débute

 13   à un certain moment et dans un autre enregistrement de cette même

 14   conversation elle commence à un autre moment.

 15   Donc du point de vue technique, en ce qui concerne le SDB, il est

 16   vrai que parfois ils pouvaient entendre les deux locuteurs et parfois ils

 17   n'entendaient qu'un seul locuteur. Mais ça je ne leur ai  pas posé la

 18   question. Je ne sais pas techniquement pourquoi parfois ils pouvaient

 19   entendre les deux côtés de la conversation et pourquoi parfois ils ne

 20   pouvaient pas.

 21   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Madame le Juge Nyambe a une question.

 22   Mme LE JUGE NYAMBE : [interprétation] A la page 57, ligne 23, --

 23   M. LE JUGE FLUEGGE : [aucune interprétation]

 24   Mme LE JUGE NYAMBE : [interprétation] Il s'agit de la page 55, en fait,

 25   page 55, ligne 23.

 26   Général Tolimir vous parle de la conversation et voici ce qu'il dit :

 27   "La conversation que nous avons vue à l'intercalaire 4 a été présentée à un

 28   autre témoin pour illustrer que tout était de ma faute," et cetera, et

Page 5210

  1   cetera.

  2   Bon, j'ai quelques clarifications, on parle toujours de cette intercalaire

  3   4 qui est au dossier dont nous disposons; c'est bien cela ?

  4   M. VANDERPUYE : [interprétation] Vous me posez la question à moi ?

  5   Mme LE JUGE NYAMBE : [interprétation] Je la pose à quelqu'un en tout cas.

  6   M. VANDERPUYE : [interprétation] Très bien. Je vais donc répondre.

  7   Je pense, en effet, que nous faisons référence à cette intercalaire 4 du

  8   classeur que vous avez sous les yeux.

  9   Mme LE JUGE NYAMBE : [interprétation] Oui. Vous avez répondu en disant :

 10   "Je ne veux pas me lancer dans des commentaires à propos de la déposition

 11   de quelqu'un d'autre," et cetera, et cetera, mais dans l'intercalaire

 12   numéro 4 ici, on a un document qui nous a été présenté hier et qui fait

 13   référence au rapport 521; vous ne pouvez pas faire de commentaire là-dessus

 14   ?

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne sais pas quelle a été la déposition d'un

 16   autre témoin à propos de ces pièces.

 17   Mme LE JUGE NYAMBE : [interprétation] Bien. Bien.

 18   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Vous pouvez poursuivre, Monsieur

 19   Tolimir.

 20   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

 21   M. TOLIMIR : [interprétation]

 22   Q.  J'ai une question pour terminer ce point. Avez-vous essayé de savoir si

 23   le SDB n'aurait pas opéré des coupes délibérées dans ces documents qu'ils

 24   souhaitaient présenter au Tribunal et aux enquêteurs, et avez-vous essayé

 25   de savoir si le SDB avait ensuite restitué ces documents à l'armée qui

 26   avait au départ donné les documents au SDB ?

 27   R.  Je vais répondre à la première partie de votre question, à savoir si

 28   nous avons essayé de savoir si le SDB opérait des sélections dans les

Page 5211

  1   éléments qu'il souhaitait présenter au Tribunal. Eh bien, oui, nous nous

  2   sommes penchés là-dessus.

  3   Nous avons demandé que tous les enregistrements de la SDB soient

  4   donnés au Tribunal. Nous leur avons bien fait savoir cela en juillet 1999

  5   lorsque nous avons obtenu le premier lot de documents. Vous verrez qu'il y

  6   a des documents qui manquent parce que c'est une numérotation séquentielle

  7   et il manque des numéros.

  8   Nous avons bien fait savoir au SDB que nous voulions recevoir la

  9   totalité des documents et non pas une sélection de documents.

 10   Ce que nous avions reçu au départ était en effet une sélection de

 11   documents.

 12   Pour ce qui est de la deuxième partie de la question, je dois dire que je

 13   ne la comprends pas.

 14   Q.  Bien. La deuxième partie de la question était la suivante : j'aimerais

 15   savoir si après avoir sélectionné, donc opéré des coupes, si le SDB après

 16   avoir sélectionné ce qu'ils voulaient donner au Tribunal, s'ils avaient

 17   restitué à l'armée tous les documents, le reste des documents donc et

 18   ensuite c'est l'armée qui vous a donné les documents qui n'avaient pas été

 19   sélectionnés par le SDB ?

 20   R.  Mais ce n'est pas comme ça que cela s'est passé.

 21   Q.  Je vous ai demandé si la Sûreté de l'Etat avait fait une sélection

 22   parmi les éléments. Et ensuite après la sélection, ont-ils rendu la

 23   totalité des éléments à l'armée et c'est ensuite l'armée qui vous a tout

 24   donné en 1998 ? Vous pouvez répondre à la question.

 25   R.  Je crois qu'il faut faire une différence entre les trois documents dont

 26   vous avez parlé, le P788, P789, et peut-être le P787, faire une différence

 27   entre ce qui a été demandé et ce qui est véritablement arrivé. Je

 28   m'explique, nous étions en contact direct avec les militaires. Nous avons

Page 5212

  1   conservé tout ce que les militaires nous avaient donné. Nous leur avons

  2   restitué des photocopies, enfin des copies des bandes audio qu'ils nous

  3   avaient données, mais nous avons conservé tout ce que les militaires nous

  4   ont donné. En ce qui concerne ce que nous a donné le SDB, nous avons aussi

  5   tout conservé.

  6   Donc nous avions deux relations bien précises, bien distinctes, une avec

  7   les militaires et une avec la Sûreté de l'Etat, le SDB. Ils ont partagé des

  8   informations en 1995, informations qui ont été entrées dans leurs rapports,

  9   dans les rapports que faisaient les militaires d'un côté et le SDB de

 10   l'autre. Donc on a obtenu des informations redondantes, on obtenait la même

 11   information des militaires et de la police.

 12   Q.  [aucune interprétation]

 13   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur Tolimir --

 14   M. TOLIMIR : [interprétation]

 15   Q.  J'ai une question à vous poser pour le compte rendu.

 16   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur Tolimir, vous avez dit que

 17   vous aviez une dernière question pour conclure, et votre conclusion n'est

 18   toujours en vue. Il va falloir que nous fassions la pause, et nous

 19   reprendrons donc à 6 heures 20.

 20   --- L'audience est suspendue à 17 heures 51.

 21   --- L'audience est reprise à 18 heures 21.

 22   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur Tolimir, veuillez

 23   poursuivre.

 24   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 25   M. TOLIMIR : [interprétation]

 26   Q.  Pour ne pas reposer ma question, même si je pourrais le faire, puisque

 27   vous n'y avez pas encore répondu, je vous redemande en quelle année vous

 28   avez reçu ces documents. Vous avez dit que vous avez commencé par les

Page 5213

  1   recevoir de l'armée et ensuite de la Sûreté de l'Etat, mais il est

  2   important de préciser aux fins du compte rendu, de préciser donc l'année au

  3   cours de laquelle vous les avez reçus.

  4   R.  Nous avons reçu les documents de l'armée à partir de mars 1998, et nous

  5   avons reçu les documents du service de la Sûreté de l'Etat en juillet 1999.

  6   Q.  Merci. Ma question est la suivante : vous êtes-vous demandée pourquoi

  7   ces documents vous ont été remis à un stade aussi tardif ?

  8   R.  Je crois que le mémo de Jean-René Ruez serait la meilleure source pour

  9   trouver réponse à cette question. Il avait demandé à plusieurs reprises que

 10   ces documents soient remis au fil des années, et à la fin de l'année 1997

 11   il a renouvelé sa demande. Elle a été accueillie favorablement, et une

 12   mission a été prévue pour mars 1998, mission au cours de laquelle les

 13   premiers documents ont été remis par le 2e Corps de l'armée de Tuzla,

 14   l'ABiH.

 15   Q.  Merci. Bien entendu, nous allons l'examiner puisque vous l'avez

 16   demandé, je parle du mémo de M. Ruez, mais nous pourrons le faire plus

 17   tard. Nous n'avons pas le temps pour l'instant. Nous avons examiné ces

 18   trois autres documents il y a quelques instants, dans lesquels on a vu que

 19   tous les enregistrements audio étaient censés être remis au service de

 20   Sûreté de l'Etat. Pourquoi, donc, toutes les décisions des instances

 21   compétentes n'ont-elles pas été respectées ? Pourquoi les documents ont-ils

 22   été ensuite remis à l'armée et l'armée vous a-t-elle remis les documents en

 23   question en 1998, et ensuite d'autres documents vous ont été remis par la

 24   Sûreté de l'Etat en 1999, plus tard donc ?

 25   R.  Non, je crois que votre description est erronée. J'ai également établi

 26   une forte distinction entre les trois documents que vous avez montrés et la

 27   chronologie de la réception par le bureau du Procureur des conversations

 28   interceptées.

Page 5214

  1   Je ne parviens pas à établir un lien entre votre déclaration, ces

  2   lettres, et l'évolution des liens établis entre le bureau du Procureur et

  3   l'armée et la Sûreté de l'Etat eu égard à la remise des conversations

  4   interceptées. Je pense que j'ai déjà passé en revue avec vous la

  5   chronologie des événements, la chronologie des différentes réceptions des

  6   documents, j'ai dit de qui nous les avions reçus, ce que nous avions reçu

  7   et à quel moment nous les avions reçus. Je peux bien sûr recommencer, mais

  8   je ne peux tracer ce lien entre les trois documents de 1995, juillet et

  9   août 1995, et la réalité des choses, la situation que nous avons vécue au

 10   printemps 1998.

 11   Q.  Merci. Je ne vous demande pas votre avis sur la question. Je vous

 12   demande simplement si vous vous êtes penchée sur la question ou pas. Le

 13   premier document, je vous ai lu la dernière phrase où il est dit la Sûreté

 14   de l'Etat dit à l'armée le 24 septembre :

 15   "Nous avons besoin des enregistrements audio afin de constituer un

 16   dossier, qui sera ensuite remis au Tribunal international de La Haye."

 17   Vous vous souvenez de cela, j'en suis sûr. C'est le premier document.

 18   Puis dans le deuxième document, le document du général chargé de la

 19   sécurité de l'ABiH, en tout cas l'état-major principal de l'ABiH, Jusuf

 20   Jasarevic, où il dit que les enregistrements audio doivent être remis au

 21   MUP de façon à ce que le dossier puisse être constitué pour le Tribunal

 22   international. Donc, il sait, lui aussi, qu'on est en train de constituer

 23   un dossier.

 24   Puis le troisième document --

 25   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Je pense que le témoin est tout à

 26   fait au fait de la teneur de ces trois documents. Nous les avons examinés.

 27   Chacun a eu le loisir d'en prendre connaissance, et vous avez déjà posé de

 28   nombreuses questions au témoin sur ce point. Alors, pour gagner du temps,

Page 5215

  1   je vous invite véritablement à adresser une question au témoin, qui connaît

  2   tout à fait ces documents maintenant.

  3   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Mais je n'ai pas

  4   obtenu de réponse à la question de savoir si le témoin a cherché à savoir -

  5   -

  6   M. TOLIMIR : [interprétation]

  7   Q.  Qui a véritablement constitué le dossier censé être remis à ce

  8   Tribunal, et pourquoi les instructions de Jasarevic n'ont pas été suivies ?

  9   R.  Je pense avoir déjà dit plusieurs fois que la première fois que j'ai vu

 10   ces documents c'était en mars 2007 au cours de mon contre-interrogatoire

 11   dans le procès Popovic. J'achevais à ce moment-là mon travail au sein de

 12   l'équipe de Srebrenica, et je n'ai plus travaillé sur ces documents sur

 13   cette affaire après la fin de mon contre-interrogatoire dans cette affaire.

 14   Par conséquent, ma réponse est la suivante : non, je n'ai pas cherché à le

 15   savoir, et ma réponse est donc, je ne sais pas.

 16   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur Tolimir, passez à votre

 17   question suivante, s'il vous plaît.

 18   M. TOLIMIR : [interprétation]

 19   Q.  Merci. Voilà, vous venez de dire ce que j'attendais de vous.

 20   L'ACCUSÉ : [interprétation] Peut-on examiner, s'il vous plaît, par

 21   l'intermédiaire du prétoire électronique, le document D48, page 251 de

 22   l'étude des services du Renseignement sur la guerre en Bosnie-Herzégovine.

 23   Troisième paragraphe. Merci.

 24   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Micro, s'il vous plaît.

 25   M. TOLIMIR : [interprétation]

 26   Q.  Merci. Alors, on voit la page à droite, page 251, celle que j'ai

 27   demandée, et on y lit ce qui suit, paragraphe 3 :

 28   "D'après des officiers canadiens, la NSA a été en mesure d'intercepter, de

Page 5216

  1   décoder et de lire les transmissions militaires encodées des Musulmans de

  2   Bosnie, des Serbes, et des Serbes de Bosnie.

  3   "A partir de 1994, un groupe spécial de Bosnie intervenait à la NSA.

  4   Après interception, un signal a été traduit, traité et analysé, et en

  5   l'espace de quatre heures, se trouvaient sur le bureau du chargé du

  6   renseignement ou de l'organe du renseignement équivalent à la CIA ou au

  7   département d'Etat. D'après un officier du renseignement américain, au

  8   cours de cette période, cette équipe de la NSA a mené à bien l'une des

  9   meilleures opérations de son histoire."

 10   Ma question est la suivante : n'avez-vous jamais entendu parler de cela, et

 11   si oui, pouvez-vous nous faire part de vos commentaires ?

 12   R.  Non, je n'en ai jamais entendu parler.

 13   Q.  Merci. En tant qu'enquêtrice, n'avez-vous jamais cherché à savoir ce

 14   que pensaient ces services du renseignement étrangers qui avaient bien sûr

 15   les plus grandes capacités, ce que ces services du renseignement étrangers

 16   pensaient de l'objet de vos enquêtes ?

 17   R.  Mais c'était totalement dénué de pertinence vis-à-vis de notre enquête.

 18   Nous tâchions d'obtenir des informations, comme je l'ai dit plus tôt. Nous

 19   ne l'avons pas obtenue, cette information, et on avait l'impression d'être

 20   dans l'impasse.

 21   Q.  Merci. Et c'est précisément pour cela que je vous pose la question,

 22   puisque vous ne saviez pas si la Bosnie allait vous remettre ce que vous

 23   demandiez, même si la promesse vous avait été faite que ce serait fait,

 24   avez-vous, en tout cas le bureau du Procureur ou votre équipe d'enquête,

 25   avez-vous demandé des informations de la part de ces grands pays qui

 26   étaient signataires des accords de paix de Dayton et qui avaient leurs

 27   propres hommes, leurs propres forces, et l'on voit bien d'ailleurs ce que

 28   faisaient les Américains ici. Merci.

Page 5217

  1   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Bien. Je vous demanderais, Monsieur

  2   Vanderpuye, à ce que la réponse soit entendue, et ensuite votre objection

  3   seulement.

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] Nous avons demandé et nous n'avons rien reçu.

  5   Comme je l'ai déjà dit plus tôt dans l'après-midi, nous avons reçu une très

  6   petite quantité d'information des Etats-Unis, des noms de code surtout.

  7   Alors, peut-être une toute petite chose d'autres pays, mais c'est tout. La

  8   porte nous était fermée, et il nous fut impossible d'obtenir des

  9   informations utiles de la part de ces instances.

 10   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur Vanderpuye.

 11   M. VANDERPUYE : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Je voulais

 12   simplement vous rappeler la préoccupation déjà évoquée par le bureau du

 13   Procureur s'agissant de ces aspects liés à l'article 70 du Règlement. Je

 14   sais que vous en avez déjà parlé, mais il me semble que cette question

 15   pourrait amener à l'évocation d'information répondant à cette description.

 16   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Mais je crois que le témoin est tout

 17   à fait conscient de cette ligne rouge à ne pas franchir, et on le constate

 18   tout à fait, d'ailleurs, à la réponse que nous venons d'entendre. Merci

 19   beaucoup.

 20   Monsieur Tolimir.

 21   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci beaucoup.

 22   M. TOLIMIR : [interprétation]

 23   Q.  J'aimerais que vous examiniez ce dernier paragraphe, encore une fois,

 24   où il est dit qu'en 1994, un groupe spécial de Bosnie existait de l'organe

 25   de la Sûreté de l'Etat. Et j'ai lu pourquoi dans le paragraphe précédent.

 26   Ma question est donc la suivante : cette période où ils auraient été

 27   présents en Bosnie et leurs activités consistant donc à recueillir des

 28   données électroniques, ceci coïncide-t-il avec la période couverte par ces

Page 5218

  1   conversations interceptées que vous avez analysées en votre qualité

  2   d'enquêtrice pour le bureau du Procureur ? Merci.

  3   R.  Je n'ai absolument pas connaissance de l'existence de ce groupe spécial

  4   de Bosnie, et je ne connais pas non plus le document dont nous parlons.

  5   Q.  Merci. Eh bien, j'ai cité le document et vous demandais simplement si

  6   en 1994 ou en 1995, l'activité de ce groupe a coïncidé -- enfin c'est une

  7   pièce à conviction, n'est-ce pas. Je me demandais donc si ce travail qu'il

  8   semble réaliser coïncidait avec la période à propos de laquelle vous avez

  9   analysé des documents. Mais enfin, j'ai pris en compte votre réponse.

 10   L'ACCUSÉ : [interprétation] J'aimerais qu'on examine maintenant la page 47

 11   dans le prétoire électronique de cette même pièce D48. C'est une étude sur

 12   la Bosnie-Herzégovine et les activités de renseignement dans le cadre de

 13   cette guerre.

 14   M. TOLIMIR : [interprétation]

 15   Q.  Nous aimerions examiner le premier paragraphe à droite. Vous le voyez à

 16   l'écran ? On lit :

 17   "Néanmoins, un général de l'ABiH a prétendu que les messages avaient

 18   été effectivement interceptés et analysés en temps réel. Cette affirmation

 19   doit toutefois être prise avec des pincettes. Si les Musulmans de Bosnie,

 20   effectivement, ont procédé à des interceptions de communication en temps

 21   réel, pourquoi ne pas les avoir utilisées. D'après un officier du

 22   renseignement américain, ça aurait été 'la meilleure campagne de relations

 23   publiques jamais réalisée', et les Musulmans de Bosnie auraient pu crier au

 24   meurtre, s'ils avaient eu la moindre influence sur les mesures prises dans

 25   le domaine militaire ou politique, ils auraient dû être disponibles le soir

 26   du 10 juillet au plus tard."

 27   C'est donc l'avis de cette instance qui enquête ici et qui est à l'origine

 28   de cette étude sur la guerre du renseignement menée à l'époque en Bosnie-

Page 5219

  1   Herzégovine. Merci.

  2   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Je suis désolé de vous interrompre,

  3   Monsieur Tolimir.

  4    Monsieur Vanderpuye, y a-t-il un problème posé par la présentation au

  5   public de ce document ?

  6   On m'a fait savoir que ce document n'apparaîtrait pas hors du prétoire

  7   puisque c'est un document confidentiel.

  8   Maître Gajic.

  9   M. GAJIC : [interprétation] Monsieur le Président, il s'agit d'une étude de

 10   Cees Wiebes. Et je vois document public, je ne comprends donc pas pourquoi

 11   ce document n'est pas montré au public. C'est un document qui est public et

 12   qui forme partie intégrante de l'enquête menée par l'Institut néerlandais

 13   sur les documents de guerre.

 14   M. VANDERPUYE : [interprétation] Monsieur le Président.

 15   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur Vanderpuye.

 16   M. VANDERPUYE : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. J'aimerais

 17   que nous passions à huis clos partiel un instant.

 18   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Nous sommes maintenant en audience à

 19   huis clos partiel.

 20   [Audience à huis clos partiel]

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 13  Pages 5220-5221 expurgées. Audience à huis clos partiel.

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  5   [Audience publique]

  6   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur Tolimir, poursuivez.

  7   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

  8   M. TOLIMIR : [interprétation]

  9   Q.  Saviez-vous que ce livre qui vient de l'Institut néerlandais a été

 10   publié dès 2003, avant votre témoignage dans les affaires auxquelles nous

 11   avons fait référence, en tout cas avant votre déposition dans l'affaire

 12   Popovic. Avez-vous pu relire les passages pertinents de cette étude qui ont

 13   trait aux analyses que vous avez menées ?

 14   M. VANDERPUYE : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

 15   Ce document n'a pas été publié par l'Institut néerlandais. L'année de

 16   publication est correcte, c'est bien 2003, mais ça n'a pas été publié par

 17   cet institut. Il faudrait donc que M. Tolimir reformule sa question, parce

 18   que s'il déclare que ce document provient de l'Institut néerlandais de la

 19   documentation de guerre, cela pourrait induire le témoin en erreur dans sa

 20   réponse.

 21   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Maître Gajic, avez-vous la source

 22   exacte de ce document ?

 23   M. GAJIC : [interprétation] Pour clarifier les choses, pourrions-nous tout

 24   simplement avoir la page 5 de ce document à l'écran. La page 5, s'il vous

 25   plaît. Ce qui nous intéresse, c'est la page de droite.

 26   Dernier paragraphe, s'il vous plaît : "Cette étude est une annexe au

 27   rapport de Srebrenica."

 28   Le témoin pourrait-il prendre connaissance de ce paragraphe ainsi que tout

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  1   le monde dans le prétoire, d'ailleurs, et je pense qu'ainsi nous pourrions

  2   savoir d'où provient exactement ce document.

  3   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Pourrions-nous avoir le bas de la

  4   page à l'écran, y compris les notes de bas de page.

  5   Madame le Témoin, vous souvenez-vous de la question ?

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] Je me souviens juste de la réponse à la

  7   question. J'avais dit "Non," mais je ne m'en souviens plus très bien. Je

  8   vais la relire.

  9   M. Tolimir s'est corrigé lorsqu'il a dit que c'était avant que je ne

 10   témoigne dans l'affaire Popovic, donc après ma déposition dans l'affaire

 11   Krstic. Donc 2003, c'était avant que je témoigne dans l'affaire Popovic,

 12   mais après que j'ai témoigné dans l'affaire Krstic, et ma réponse est, non,

 13   je ne connais pas ce document.

 14   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Bien. Monsieur Tolimir, c'est à vous.

 15   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci. Je m'excuse si je me suis trompé, mais

 16   je pense que c'est avant 2006 et 2007, lorsqu'elle a témoigné dans

 17   l'affaire Popovic et consorts. Enfin, peut-être que je me trompe. Je ne

 18   peux pas vérifier les choses en temps réel, malheureusement. Il me semble

 19   que j'avais posé la question uniquement à propos de Popovic et consorts, et

 20   cette affaire n'a pas été jugée avant 2003.

 21   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Oui, le témoin vient justement de

 22   dire ce que vous dites. Vous répétez ses propos. Elle a confirmé cela.

 23   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président. Il est

 24   presque 19 heures.

 25   M. TOLIMIR : [interprétation]

 26   Q.  Voici ma question : à quel moment êtes-vous arrivée à une conclusion à

 27   propos du fait que ce matériel aurait été transmis en 1998, et non pas bien

 28   avant lorsque vous étiez déjà en contact avec tous ces gens dès 1995,

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  1   puisque vous l'avez dit lors de votre interrogatoire et de votre contre-

  2   interrogatoire, que vous étiez en contact avec ces personnes 1995. Pourquoi

  3   n'ont-ils donné ces documents qu'en 1998 ? A quel moment êtes-vous arrivée

  4   à une conclusion à propos de cela ?

  5   R.  Je ne peux pas dire que je sois arrivée à la moindre conclusion à

  6   propos de la raison qui expliquerait pourquoi nous n'avons obtenu ces

  7   documents qu'en 1998. J'ai donné mon avis sur une des raisons éventuelles,

  8   et au vu de l'enquête et de l'avancement de l'enquête, je n'ai pas été

  9   étonnée par le fait que ces documents nous arrivent avec un peu de retard.

 10   Comme je l'ai dit, en 1995, la guerre était encore en cours et les

 11   communications téléphoniques interceptées par radio sont des informations

 12   extrêmement sensibles. Les agences de renseignement nous en rendaient bien

 13   compte. Ils ne voulaient absolument pas révéler leurs sources et leurs

 14   méthodes de travail. En 1996, au cours de l'enquête, nous avons eu accès à

 15   la Republika Srpska et nous avons pu commencer à identifier les endroits où

 16   les personnes avaient été détenues et exécutées. En 1997, ces travaux se

 17   sont poursuivis, et en 1998, nous étions en mesure de procéder à des

 18   perquisitions. Et aux alentours de 1998, nous avons enfin eu accès aux

 19   conversations téléphoniques interceptées par radio. En 1998, les travaux se

 20   sont poursuivis avec les exhumations, de nouvelles enquêtes,

 21   l'identification d'éventuels participants aux crimes commis, et j'avais

 22   l'impression que le déroulement des événements était parfaitement normal.

 23   Lorsque j'ai commencé à travailler sur les documents reçus, nous avions des

 24   doutes importants sur leur fiabilité et leur authenticité. Nous ne savions

 25   pas si nous pouvions nous servir de ces documents pour poursuivre l'enquête

 26   ou si cela pourrait servir à autre chose. Donc, j'ai continué à travailler

 27   sur ces documents avec les équipes, non seulement avec les traducteurs mais

 28   aussi en croisant cela avec des informations qui venaient d'autres parties

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  1   de l'enquête, et nous avons réussi à corroborer les conversations de façon

  2   indépendante avec des documents saisis auprès de la VRS, aussi avec des

  3   notes que nous ont transmis les officiels des Nations Unies, au travers

  4   d'annuaires obtenus en Republika Srpska, nous avons aussi croisé cela avec

  5   les images aériennes obtenues depuis différents services de différents

  6   gouvernements et en combinant tous ces éléments, nous avons vu qu'ils se

  7   corroboraient les uns les autres.

  8   L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Président, je vois que l'heure

  9   tourne, et je pense donc qu'il serait bon de poursuivre ce contre-

 10   interrogatoire la semaine prochaine. J'ai un grand nombre de questions à

 11   poser au témoin suite à sa réponse. Mais je tiens à vous remercier, et je

 12   pense que nous devrons reprendre nos travaux ultérieurement. Je vous

 13   remercie.

 14   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur Tolimir.

 15   Avant la pause, je tiens à soulever le problème des documents utilisés par

 16   l'Accusation. Il y avait une longue liste - on en a déjà parlé mercredi

 17   dernier, d'ailleurs - il y avait une longue liste divisée en quatre

 18   catégories. Donc, nous avons admis les documents qui se trouvent dans les

 19   chapitres 2 et 3, mais nous n'avons pas encore pris de décision en ce qui

 20   concerne les documents qui sont aux chapitres 1 et 4, mais je tiens à dire

 21   que si j'ai bien compris, la Défense a des doutes à propos d'une source, la

 22   pièce P774. Cela dit, M. Vanderpuye nous a dit qu'il n'a aucune intention

 23   de demander le versement de ce document, mais il veut demander le versement

 24   de tous les autres. Donc, je demanderais à la Défense si elle a des

 25   objections au versement au dossier de ces documents par l'Accusation.

 26   L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Président, la Défense ne soulève

 27   aucune objection quant au versement de quelque document que ce soit qui

 28   porterait sur ma culpabilité. Nous ne soulevons aucune objection, quelle

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  1   que soit la nature du document, qu'il soit incriminatoire ou exonératoire,

  2   mais nous voulons en revanche que l'on nous communique absolument tous les

  3   documents qui existent.

  4   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Bien. Tous les documents sur la liste

  5   seront versés au dossier, mis à part le P774, et ils recevront les cotes

  6   données. Certains de ces documents sont sous pli scellé et cela se trouve

  7   sur la liste, d'ailleurs, c'est mentionné. D'autres n'ont pas encore de

  8   traduction anglaise. Cela est aussi inscrit sur la liste. Et ces pièces

  9   recevront une cote MFI en attendant qu'elles soient traduites.

 10   J'espère que tout est clair en ce qui concerne le compte rendu.

 11   [La Chambre de première instance et la Greffière se concertent]

 12   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Pour le compte rendu, nous avons

 13   besoin d'une petite clarification, qui nous sera apportée par notre

 14   greffière.

 15   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] La pièce P773A et la pièce P773C

 16   recevront une cote MFI en attendant une traduction, et je rajoute que la

 17   pièce P773C sera versée au dossier sous pli scellé, donc MFI sous pli

 18   scellé.

 19   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] C'était utile car ce n'était pas au

 20   compte rendu.

 21   Je vous remercie pour votre patience, Madame Frease. Malheureusement,

 22   nous n'avons pas encore terminé avec votre contre-interrogatoire. Nous

 23   allons lever la séance, et nous reprendrons dès lundi matin, dans ce même

 24   prétoire. Et je tiens à vous rappeler que vous ne devez parler à quiconque

 25   de la déposition que vous avez faite et vous allez faire.

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Je le sais.

 27   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Donc je vous souhaite un bon week-

 28   end, et nous levons la séance.

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  1   --- L'audience est levée à 19 heures 02 et reprendra le lundi 13 septembre

  2   2010, à 9 heures 00.

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