Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le lundi 8 novembre 2010

  2   [Audience publique]

  3   [L'accusé est introduit dans le prétoire]

  4   --- L'audience est ouverte à 14 heures 29.

  5   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Bonjour à tous dans le prétoire. Nous

  6   allons commencer en retard cet après-midi, parce que cette salle d'audience

  7   a été occupée pendant plus longtemps que prévu ce matin. Je souhaiterais

  8   souhaiter la bienvenue à Mme Hasan, qui est présente dans ce prétoire et

  9   qui officie dans ce procès pour la première fois. J'espère que votre

 10   coopération sera excellente entre les parties.

 11   Je pense que l'on peut faire entrer le témoin suivant dans le prétoire, à

 12   moins qu'il y ait quelque chose d'autre à aborder en son absence. Merci.

 13   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

 14   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Témoin. Est-ce

 15   que vous pourriez lire la déclaration solennelle.

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

 17   vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

 18   LE TÉMOIN : CHRISTOPHER LAWRENCE [Assermenté]

 19   [Le témoin répond par l'interprète]

 20   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Merci beaucoup. Veuillez vous

 21   asseoir.

 22    Mme HASAN : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Madame,

 23   Monsieur les Juges.

 24   Interrogatoire principal par Mme Hasan : 

 25   Q.  [interprétation] Bonjour à vous, Monsieur le Témoin.

 26   Monsieur le Docteur Lawrence, est-ce que vous pourriez décliner votre

 27   identité pour les fins du compte rendu d'audience.

 28   R.  Christopher Hamilton Lawrence, L-a-w-r-e-n-c-e.

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  1   Q.  Et quelle est votre profession ?

  2   R.  Je suis pathologiste légiste.

  3   Q.  Vous souvenez-vous avoir déposé dans l'affaire Popovic en février 2007

  4   ?

  5   R.  Oui.

  6   Q.  Est-ce que vous avez eu récemment la possibilité de repasser en revue

  7   cette déposition dans le cadre de l'affaire susmentionnée ?

  8   R.  Oui.

  9   Q.  Et est-ce que le compte rendu d'audience de cette déposition reflète,

 10   compte tenu de ce que vous savez, la réalité ?

 11   R.  Oui.

 12   Q.  Et le compte rendu d'audience dans votre déposition dans l'affaire

 13   Popovic reflète-t-il fidèlement les réponses que vous donneriez aux

 14   questions que l'on vous poserait aujourd'hui si on vous les reposait ?

 15   R.  Plus ou moins. Mais je vous dirais que j'apporterais des réponses peut-

 16   être légèrement différentes, mais de manière générale, oui, elles seraient

 17   similaires.

 18   Q.  Très bien.

 19   Mme HASAN : [interprétation] Je voudrais à ce stade demander le versement

 20   de la déposition de ce témoin dans l'affaire Popovic. Il s'agit de la pièce

 21   P920.

 22   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Nous allons admettre cette pièce au

 23   dossier.

 24   Mme HASAN : [interprétation] Et j'aimerais également verser à ce stade les

 25   pièces qui ont été versées par le truchement de ce témoin dans l'affaire

 26   Popovic. Il s'agit des pièces P921 à P932.

 27   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Nous les admettons avec les mêmes

 28   cotes. Veuillez continuer.

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  1   Mme HASAN : [interprétation] Monsieur le Président, avec votre

  2   autorisation, je voudrais lire un bref résumé de la déposition du témoin.

  3   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Allez-y.

  4   Mme HASAN : [interprétation] Le Dr Christopher Lawrence est un pathologiste

  5   légiste d'Australie. A l'époque où il a déposé dans l'affaire Popovic, le

  6   Dr Lawrence était pathologiste légiste pour le gouvernement australien en

  7   Tasmanie, responsable de la réalisation d'autopsies. De mai à octobre 1998,

  8   le Dr Lawrence était le pathologiste légiste en chef au bureau du Procureur

  9   du TPIY. Il a remplacé à ce poste le Dr John Clark qui a également déposé

 10   dans cette affaire. En tant que pathologiste légiste en chef, le Dr

 11   Lawrence a mené une équipe qui a réalisé des autopsies sur des restes

 12   humains exhumés dans les charniers qui étaient liés à la chute de

 13   Srebrenica et dans d'autres affaires du bureau du Procureur.

 14   Les restes humains que lui et son équipe ont examinés ont été

 15   récupérés du site que l'on appelle le site du barrage à proximité de

 16   Petkovci et à partir de sept fosses secondaires qu'on a retrouvées le long

 17   de la route de Cancari, la route de Hodzici, à proximité de Zeleni Jadar et

 18   de Liplje. Les autopsies ont été réalisées à la morgue de Visoko en Bosnie.

 19   Les restes humains exhumés de ces charniers ont été livrés dans des

 20   housses mortuaires à la morgue pour que le Dr Lawrence et son équipe

 21   puissent les examiner. Certaines de ces housses contenaient des corps

 22   complets, mais également des parties de corps. Après avoir recherché des

 23   effets personnels et après avoir retiré également les habits que ces corps

 24   portaient encore, le Dr Lawrence et son équipe ont examiné les corps ainsi

 25   que les os et ont photographié les différentes preuves de blessures.

 26   Tous les os endommagés ont été remis à des anthropologues pour

 27   procéder à une reconstruction. Après avoir reçu ces os qui avaient été

 28   reconstruits, les pathologistes ont examiné les os pour savoir s'il y avait

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  1   eu des blessures, des blessures par balles, et ont essayé également de

  2   déterminer la trajectoire de ces balles.

  3   Dans la plupart de ces exemples, les pathologistes ont essayé de

  4   déterminer en observant les habits si ce qu'ils découvraient pouvait

  5   corroborer les blessures qu'ils avaient identifiées.

  6    Le Dr Lawrence a préparé un rapport pour chacune des fosses

  7   contenant ses conclusions et son opinion quant à la cause du décès de ces

  8   victimes. La cause du décès de la majorité des victimes dont les corps

  9   étaient complets était des blessures par balles.

 10   Certaines victimes ont essuyé des blessures par balles ainsi que des

 11   blessures liées à des éclats. La plupart des blessures liées à des éclats

 12   ont été remarquées sur des victimes qui avaient été retrouvées dans la

 13   fosse secondaire de Zeleni Jadar.

 14   Dans le cadre de ces autopsies, le Dr Lawrence et son équipe ont

 15   également retrouvé des liens ainsi que des bandeaux issus de restes

 16   humains. La majorité des liens avaient été attachés au niveau des poignets

 17   et des bras de la victime. Dans certains cas, les bras étaient encore

 18   disposés derrière le corps.

 19   Certains de ces bandeaux qui ont été retrouvés ne se trouvaient plus

 20   attachés au corps, mais étaient à l'intérieur de ces housses mortuaires.

 21   D'autres étaient encore positionnés autour de la tête, couvrant les yeux

 22   des victimes.

 23   Ceci conclut mon résumé. Est-ce que je peux poursuivre avec des

 24   questions ?

 25   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Oui, allez-y.

 26   Mme HASAN : [interprétation]

 27   Q.  Docteur Lawrence, avant de commencer mes questions, je vois que vous

 28   avez des documents. J'aimerais savoir, de quoi il s'agit ?

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  1   R.  Il s'agit de copies de rapports que j'ai préparés pour les différents

  2   charniers et une synthèse de ces rapports.

  3   Q.  Fort bien. Vous pouvez, bien sûr, faire référence à ces notes, mais de

  4   façon à ce que tout le monde soit au courant dans ce prétoire, veuillez

  5   nous le faire savoir si vous faites référence à ces notes durant le cadre

  6   de votre déposition.

  7   R.  Oui.

  8   Q.  Docteur Lawrence, j'aimerais savoir, quand est-ce que vous avez obtenu

  9   votre diplôme en tant que pathologiste légiste ?

 10   R.  En 1989.

 11   Q.  Et pourriez-vous nous dire quel est le poste que vous occupez à l'heure

 12   actuelle ?

 13   R.  Je suis pathologiste légiste pour l'Etat de Tasmanie.

 14   Q.  Et depuis quand occupez-vous ce poste ?

 15   R.  Depuis février 2002.

 16   Q.  Est-ce que vous pourriez, très rapidement, décrire vos responsabilités

 17   en tant que pathologiste légiste pour l'Etat de Tasmanie ?

 18   R.  Mon rôle est de réaliser des examens médicaux sur des morts violentes,

 19   ou inexpliquées, ou qui sont survenues dans des conditions non naturelles

 20   et de décrire les circonstances de ces décès.

 21   Q.  Si l'on revient maintenant à 1998, quel était votre rôle principal en

 22   tant que pathologiste légiste en chef du bureau du Procureur de mai à

 23   octobre 1998 ?

 24   R.  En tant que pathologiste légiste en chef au bureau du Procureur, mon

 25   rôle était d'examiner les restes humains qui avaient été exhumés afin de

 26   déterminer la cause des décès et de préciser également les détails qui

 27   étaient liés aux circonstances de ce décès.

 28   Q.  Et est-ce que vous pourriez nous décrire l'état de conservation des

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  1   restes humains qu'on vous avait demandé d'examiner ?

  2   R.  Les restes humains étaient dans un état avancé de décomposition. Il

  3   s'agissait de personnes qui étaient décédées depuis trois ans. Leur état de

  4   décomposition était variable. Sur certains corps, il y avait encore des

  5   chairs qui étaient visibles. Alors que dans le cas d'autres corps, ils

  6   étaient totalement réduits à l'état de squelette. De plus, il y avait des

  7   corps qui étaient relativement complets, c'est-à-dire qu'on pouvait voir le

  8   tronc, la tête, l'abdomen ainsi que les membres. Dans d'autres cas, on

  9   voyait que les différentes parties du corps n'étaient plus logiquement

 10   disposées.

 11   Q.  Est-ce que vous pourriez expliquer ceci plus en détail.

 12   R.  Lorsqu'un corps est en décomposition, vous avez les tissus, les

 13   ligaments et les chairs qui permettent de tenir un corps humain qui se

 14   détache. Par conséquent, dans certaines des fosses, et plus

 15   particulièrement dans le site du barrage et le site de Liplje, les corps

 16   étaient désarticulés dans une grande mesure, c'est-à-dire qu'ils n'étaient

 17   plus reliés, que les parties du corps n'étaient plus reliées les unes aux

 18   autres.

 19   Q.  Et est-ce que vous avez examiné les différentes formes de restes

 20   humains que vous avez reçus ?

 21   R.  Oui, nous avons examiné tous les corps qui étaient restés intacts ainsi

 22   que tous les grands restes humains que nous avions retrouvés. Durant la

 23   première partie de l'année, nous nous sommes concentrés sur le site du

 24   barrage ainsi que sur les sites de la route Cancari 12 et 13 [comme

 25   interprété]. Toute housse mortuaire a été examinée par les pathologistes.

 26   Dans le cas des sites de la route Hodzici 3, 4 et 5, de Liplje et de Zeleni

 27   Jadar, certaines des parties limitées en taille des restes humains ont été

 28   examinées par des anthropologues et n'ont été ensuite référées à des

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  1   pathologistes que s'il y avait des dégâts importants ou s'il s'agissait de

  2   parties de restes humains importants. La raison pour laquelle ceci a changé

  3   c'est parce que nous devions gérer un volume important de restes humains.

  4   Q.  En ce qui concerne les parties de corps humains que vous avez reçues,

  5   est-ce que vous avez essayé de reconstituer le corps humain dans son

  6   ensemble lorsque vous avez réalisé vos autopsies ?

  7   R.  Lorsque nous avons examiné les différentes parties de corps humains que

  8   nous avons retrouvées, je disposais d'informations émanant du Pr Wright en

  9   ce qui concerne le site où l'on avait retrouvé ces restes humains et ces

 10   parties de restes humains, et dans la mesure du possible, nous avons fait

 11   de notre mieux pour recomposer les différentes parties de corps humains.

 12   Mais il était très difficile en réalité de recomposer des corps humains

 13   complets. Par conséquent, nous nous sommes retrouvés avec beaucoup de

 14   restes partiels pour lesquels il était difficile de reconstituer un corps

 15   entier. Et la seule solution a été de procéder par analyse ADN.

 16   Q.  Et est-ce que l'analyse ou la technologie ADN était disponible à

 17   l'époque ?

 18   R.  Des échantillons d'ADN ont été prélevés dans le cas où il y avait des

 19   documents qui permettaient déjà d'avoir une identification provisoire. Mais

 20   nous n'avons pas beaucoup pris de prélèvements ADN, puisqu'à l'époque il

 21   n'y avait pas de laboratoire dans le pays qui était en mesure de procéder à

 22   des analyses d'ADN.

 23   Q.  Et pour ce qui est des parties de corps humains que vous n'avez pas pu

 24   reconstituer, est-ce que vous êtes arrivé à formuler une opinion quant aux

 25   causes du décès de ces personnes et à qui appartenaient ces restes humains

 26   ?

 27   R.  Nous avons examiné ces parties de restes humains pour voir s'ils

 28   avaient des blessures par balles qui auraient pu être la cause du décès de

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  1   la personne. Bien sûr, nous avons rencontré le problème que nous avions

  2   beaucoup plus de parties de corps humains que de corps humains, et d'une

  3   certaine manière, arriver à déterminer la cause d'un décès sur une partie

  4   de corps humain ne semblait pas très logique. Dans mon rapport, je me suis

  5   efforcé de donner mon opinion sur les causes des décès de corps humains qui

  6   étaient dans une grande mesure restés intacts parce que ceci avait plus de

  7   sens. Cependant, nous avons décidé également d'examiner certaines parties

  8   de corps humains de façon à déterminer s'il y avait des blessures par

  9   balles sur ces parties de corps humains.

 10   Q.  Est-ce qu'il y a eu des cas où lorsque vous avez examiné une partie

 11   donnée d'un corps humain, vous avez pu déterminer la cause du décès ?

 12   R.  Oui, tout à fait. Si vous aviez, par exemple, une tête que nous avions

 13   retrouvée où il y avait une blessure par balle, nous pouvions déterminer

 14   que dans ce cas précis ceci avait été clairement la cause du décès.

 15   Q.  Docteur Lawrence, quelle a été la cause des décès des corps humains que

 16   vous avez examinés ?

 17   R.  Je me réfère à mes notes ici. Parmi les 254 corps qui étaient plus ou

 18   moins intacts, 203 de ces corps présentaient des blessures par balles qui

 19   ont constitué la cause du décès. L'un d'entre eux avait des blessures par

 20   balles, mais également par éclats. Et pour 50 d'entre eux, la cause du

 21   décès n'a pas pu être déterminée.

 22   Q.  Comment avez-vous été en mesure d'identifier s'il y avait des blessures

 23   par balles ou quels critères avez-vous utilisés ?

 24   R.  Nous avons utilisé plusieurs critères. Tout d'abord, il fallait trouver

 25   une balle qui se trouvait dans le tissu ou dans un os suite à des radios

 26   qui avaient été effectuées. La deuxième possibilité était de déterminer la

 27   trajectoire, une trace de trajectoire dans les tissus d'une partie du corps

 28   que nous avions retrouvée. Puis nous pouvions également retrouver des

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  1   fragments de balles où des fractures dans les os à proximité de ces

  2   fragments nous permettaient d'identifier qu'il s'agissait de blessures par

  3   balle.

  4   Q.  Et lorsque j'ai examiné votre rapport, j'ai remarqué que vous faisiez

  5   référence à des blessures par balles probables et des blessures par balles

  6   éventuelles ou possibles. Est-ce que vous pourriez définir cela ?

  7   R.  Dans les cas où nous avons déterminé qu'il s'agissait de blessures par

  8   balle, nous pensions que nous étions suffisamment confiants pour penser que

  9   compte tenu de l'information que nous avions à notre disposition, il

 10   s'agissait vraiment de blessures par balle qui avaient causé le décès. Dans

 11   certains cas, lorsque nous avons retrouvé de petits fragments de métal qui

 12   laissaient penser qu'il s'agissait d'une blessure par balle, mais qui en

 13   même temps n'était pas une certitude, nous avons considéré qu'il s'agissait

 14   de blessures par balle possibles. Dans d'autres cas, nous avons trouvé

 15   également des anomalies, comme par exemple au niveau du crâne, qui

 16   correspondaient à des signes d'une blessure par balle, même si nous n'avons

 17   pas pu trouver le projectile, dans ce cas-là nous avons déterminé qu'il

 18   s'agissait d'une blessure par balle probable.

 19   Q.  Pourquoi pensez-vous qu'il est important de faire état de ces

 20   conclusions ?

 21   R.  Je crois que nous essayons de donner au Tribunal autant d'information

 22   que possible. Il s'agissait de corps pour lesquels il était difficile de

 23   procéder à un examen. Ils étaient dans un état avancé de décomposition

 24   étant donné qu'ils avaient été transférés de la fosse initiale, il y avait

 25   des parties de corps qui avaient été séparées les unes des autres. Dans des

 26   cas tels que, par exemple, le site au niveau du barrage ou de Liplje, où

 27   les parties du corps avaient été séparées les unes des autres, même si nous

 28   n'avions pas beaucoup de corps complets, il y avait beaucoup de blessures

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  1   par balle dans ces corps en question.

  2   Q.  Je vais passer à un sujet légèrement différent, et je vais vous

  3   demander si les os que vous avez examinés étaient endommagés ou étaient

  4   fracturés ?

  5   R.  Oui, c'était le cas pour une grande partie de ces os. Certains avaient

  6   été endommagés suite aux blessures par balle, d'autres par des événements

  7   qui s'étaient produits après la mort des personnes, c'est-à-dire après le

  8   transfert des cadavres qui avaient été exhumés.

  9   Q.  Et comment avez-vous pu identifier les blessures dans ces os qui

 10   étaient endommagés ou fracturés ?

 11   R.  Nous nous intéressons à différentes blessures. Tout d'abord, le premier

 12   type, c'est des blessures qui se produisent au moment du décès. Dans ce cas

 13   nous recherchions des blessures par balle ou la présence ou l'absence

 14   d'hémorragie. Encore une fois, étant donné que les corps étaient en état

 15   avancé de décomposition, il était difficile d'identifier les hémorragies.

 16   Cependant, dans des cas limités, nous avons pu déterminer qu'il y avait eu

 17   hémorragie, et que par conséquent cette blessure s'était produite au moment

 18   du décès. Il y a une photo d'un de ces exemples, et je pense que ceci

 19   refléterait bien ce que je viens de dire.

 20   Q.  Est-ce que vous pourriez nous dire où cela se trouve ?

 21   R.  Cela se trouve dans le rapport concernant le site Cancari Road 12.

 22   Mme HASAN : [interprétation] Il s'agit de la pièce P924.

 23   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Est-ce que l'on pourrait afficher ce

 24   document à l'écran, s'il vous plaît ?

 25   Mme HASAN : [interprétation]

 26   Q.  Est-ce que vous pourriez également nous donner le numéro de page

 27   ?

 28   R.  Oui. Le numéro de page -- je crois que c'est après la page 16.

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  1   Q.  Je ne crois pas que vous ayez ceci dans votre exemplaire. Est-ce que

  2   vous avez un numéro de cachet ?

  3   R.  Non, je ne crois pas.

  4   Q.  Est-ce que c'était à la page 18, Docteur Lawrence ?

  5   R.  C'est la photo qui arrive immédiatement après la page 16.

  6   Mme HASAN : [interprétation] Il s'agit de la page 41 sur le prétoire

  7   électronique.

  8   Q.  Sur cette photo, Docteur Lawrence -- désolé, ce n'est pas encore

  9   à l'écran.

 10   Je crois que maintenant c'est à l'écran.

 11   R.  Oui.

 12   Q.  Et que voyons-nous sur cette photo ?

 13   R.  Nous voyons le haut de la tête, vous voyez que le crâne a été ouvert,

 14   et vous voyez le cerveau. Vous avez autour du cerveau beaucoup de zones où

 15   il y a une hémorragie, et où vous voyez la flèche, il s'agit de la balle.

 16   Nous essayons donc de déterminer s'il y a eu hémorragie qui a causé le

 17   décès. Dans beaucoup de corps qui étaient en état avancé de décomposition,

 18   on ne pouvait pas le déterminer, mais là il s'agit d'un exemple où on le

 19   voit. Il est clair qu'il s'agit d'une blessure qui a eu lieu au moment du

 20   décès, et il s'agit indubitablement de la cause du décès.

 21   Q.  Il semble qu'il s'agit d'un crâne qui est plus ou moins intact, mis à

 22   part la partie qui a été retirée.

 23   R.  Oui.

 24   Q.  Et dans le cas où vous receviez des os qui avaient été complètement

 25   fracturés, comment vous identifiez les blessures ?

 26   R.  Dans ce cas-là, l'anthropologue essaie de reconstituer le crâne en

 27   utilisant une colle très puissante pour montrer quelles avaient été les

 28   anomalies.

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  1   Mme HASAN : [interprétation] Est-ce que l'on pourrait maintenant afficher

  2   sur les écrans la pièce P924, qui est la page 18 dans le système de

  3   prétoire électronique. C'est également la page 18 pour la version en B/C/S.

  4   Peut-être que l'on pourrait tourner ce document à 90 degrés vers la droite.

  5   Q.  Il s'agit d'une photo qui figure dans votre rapport qui est liée

  6   au site de Cancari Road 12 ?

  7   R.  Oui.

  8   Q.  Est-ce que vous pourriez nous dire ce qui est représenté sur cette

  9   photo ?

 10   R.  On voit l'arrière du crâne, et on voit qu'il y a beaucoup de fractures.

 11   Vous voyez également une substance blanche, qui est la colle que nous avons

 12   utilisée pour reconstituer le crâne. Ce que vous voyez ici, vous voyez la

 13   flèche et vous voyez ce petit bâton en bois, il s'agit donc de l'orifice

 14   d'entrée et l'orifice de sortie d'une balle, et donc de cette blessure par

 15   balle. Ceci n'aurait pas été évident au moment où nous avons reçu ce crâne,

 16   mais une fois que nous avions fait cette reconstruction, nous pouvions le

 17   déterminer.

 18   Q.  Et qui était responsable de cette reconstruction ?

 19   R.  C'était un anthropologue.

 20   Q.  Donc dans un cas comme celui-ci, est-ce que vous étiez en mesure de

 21   déterminer la cause du décès ?

 22   R.  Oui. Je pourrais avec une grande certitude dire que la cause du décès

 23   était une blessure par balle.

 24   Q.  Et vous avez mentionné un peu plus tôt que vous n'avez pas été en

 25   mesure de déterminer la cause du décès dans certains cas. Est-ce que vous

 26   pourriez nous expliquer pourquoi ceci était impossible ?

 27   R.  Dans certains des corps que nous devions examiner, nous ne pouvions pas

 28   identifier suffisamment de blessures qui permettraient d'amener à un décès.

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  1   Je suppose que la raison pour laquelle nous n'étions pas en mesure de

  2   déterminer cela, c'est parce que nous n'avions pas pu retrouver des

  3   blessures par balle qui étaient présentes sur ce corps. Par exemple, si une

  4   balle avait traversé l'abdomen sans toucher à un os, il était impossible de

  5   déterminer si cette personne avait fait l'objet d'une blessure par balle.

  6   Nous avons réalisé également des études sur les habits, et en

  7   déterminant également s'il y avait plus de trous sur les habits que sur le

  8   corps, ceci nous permettait également de déterminer ce qui s'était passé.

  9   Cependant, nous n'utilisons jamais les habits pour déterminer la cause d'un

 10   décès parce qu'on ne pouvait pas être certain de l'emplacement de ces

 11   habits sur le corps lorsque les dégâts avaient été causés. Par conséquent,

 12   je dirais pour résumer qu'il est fort probable que dans la plupart des cas

 13   où nous n'avons pas pu déterminer la cause du décès, il est fort probable

 14   qu'ils soient également morts suite à des blessures par balle, mais nous

 15   n'avons pas pu les détecter.

 16   Q.  Nous avons parlé beaucoup de causes du décès, donc je voudrais passer à

 17   un autre concept. Est-ce que vous connaissez ce qu'on appelle "manière dont

 18   la personne est décédée" ?

 19   R.  Oui.

 20   Q.  Est-ce que vous pourriez nous définir ce concept ?

 21   R.  Eh bien, dans les activités des pathologistes légistes, on parle en

 22   général de la cause d'un décès comme étant les blessures ou les maladies

 23   qui ont amené à la mort. Nous avons un concept de circonstances du décès,

 24   et nous essayons de déterminer s'il s'agissait d'un homicide, d'un suicide,

 25   d'un accident ou s'il s'agissait d'une mort naturelle. C'est ceci qu'on

 26   entend par, en anglais, le concept de "manner of death" et en français,

 27   "circonstances du décès".

 28   Q.  Et est-ce qu'il y a un lien entre les circonstances du décès et la

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  1   cause du décès, et si tel est le cas, est-ce que vous pourriez nous

  2   expliquer quels sont les liens entre ces deux concepts ?

  3   R.  Les circonstances de la mort sont quelque chose sur quoi l'on

  4   s'interroge toujours lorsque l'on s'interroge sur la cause du décès. Mais

  5   dans le système où je travaille moi-même ainsi que le Dr Clark, en

  6   principe, le rôle joué par le pathologiste est de déterminer la cause du

  7   décès, et normalement, c'est le coroner qui, lui, détermine les

  8   circonstances de la mort. Donc, le pathologiste pourrait fournir son avis

  9   au coroner comme lorsqu'on s'interroge sur la cause du décès, on est obligé

 10   de s'interroger sur les circonstances de la mort. Dans d'autres systèmes

 11   judiciaires, et je dois dire que j'ai travaillé pendant deux années aux

 12   Etats-Unis d'Amérique, eh bien là, en principe, celui qui procède à

 13   l'examen médical est celui qui doit à la fois déterminer la cause et les

 14   circonstances de la mort. Donc, par exemple, si vous avez une blessure par

 15   balle, bien, on arriverait à la détermination de la cause du décès comme

 16   étant les blessures par balle et les circonstances de la mort relèveraient

 17   d'un homicide.

 18   Q.  Et d'après ce que vous avez pu rencontrer dans votre pratique, est-ce

 19   que l'on peut déterminer les circonstances de la mort lorsque la cause du

 20   décès n'est pas connue ?

 21   R.  Dans certains cas, cela est possible, mais souvent, cela n'est pas

 22   possible. A titre d'exemple, cela m'est arrivé aux Etats-Unis, vous aviez

 23   un individu qui a été inhumé dans une fosse cachée et le corps était

 24   décomposé de manière assez avancée. Il n'était pas clair quelle a été la

 25   cause du décès, mais compte tenu de la manière dont le corps avait été

 26   caché, je suis arrivé à la conclusion que les circonstances de la mort nous

 27   ramenaient à un homicide. Donc, il est possible d'avoir d'une part la cause

 28   du décès comme étant non déterminée et, en revanche, de pouvoir déterminer

Page 7384

  1   les circonstances de la mort.

  2   Q.  Mis à part la cause du décès, est-ce que vous avez trouvé quoi que ce

  3   soit d'autre qui vous a permis d'arriver à la conclusion sur les

  4   circonstances de la mort ?

  5   R.  Il y avait toute une série d'éléments indirects et donc, là, je parle

  6   de ligatures, je parle d'attaches aux poignets, je parle de bandeaux pour

  7   les yeux. Dans certains cas, par exemple Cancari Road 12, nous avions trois

  8   cas où il semblait qu'on avait pris pour cible de manière intentionnelle

  9   les articulations du corps pour causer la douleur. On a tiré sur les

 10   épaules, les coudes, les poignets, les genoux, et il semblait que c'était

 11   une approche intentionnelle.

 12   Q.  Vous venez de mentionner des ligatures et les bandeaux pour les yeux --

 13   Mme HASAN : [interprétation] Je voudrais maintenant vous renvoyer à la

 14   pièce P928, page 16 dans la version anglaise, et ce sera également la page

 15   16 en B/C/S.

 16   Est-ce que vous pouvez la tourner, s'il vous plaît, vers la droite. Merci.

 17   Q.  Dr Lawrence, pourriez-vous nous décrire ce que nous voyons ici sur

 18   cette photographie ?

 19   R.  Oui. Nous avons ici un corps. L'individu est allongé à plat ventre. En

 20   bas, vous voyez une ceinture en bas par rapport au texte. Puis vous voyez,

 21   derrière le dos, le bracelet d'une montre et vous voyez que les poignets

 22   étaient attachés par une ligature. C'est l'exemple des cadavres où les

 23   mains avaient été attachées derrière le dos de la personne.

 24   Mme HASAN : [interprétation] P927, à présent, s'il vous plaît, c'est une

 25   autre photographie. Page 18 dans la version anglaise, page 20 en B/C/S.

 26   Merci.

 27   Q.  Dr Lawrence, sur cette photographie qui s'affiche à présent, pourriez-

 28   vous nous dire ce que nous sommes en train de regarder ?

Page 7385

  1   R.  Oui. C'est le haut d'un crâne. Vous voyez les résultats d'une

  2   reconstruction. Vous voyez le bandeau, en fait, qui enveloppe la tête, et

  3   vous voyez une déchirure dans le bandeau. Sur le crâne lui-même, au-

  4   dessous, il y a une blessure par balle, ce qui nous permet de savoir que le

  5   bandeau se situait à l'endroit où la balle a touché le crâne, et ce qui

  6   nous permet de savoir qu'il s'agit effectivement d'un bandeau.

  7   Q.  Pourriez-vous nous parler maintenant de ces bandeaux pour les yeux et

  8   des ligatures, c'est quelque chose qui vous indique les circonstances de la

  9   mort. Est-ce que vous avez pu obtenir d'autres éléments d'information au

 10   sujet des circonstances de la mort des victimes en vous fondant sur

 11   d'autres sources que celles-là ?

 12   R.  Je ne vois pas exactement où vous voulez en venir.

 13   Q.  Je vous pose mes questions sur la base de votre rapport, et vous parlez

 14   de quelques éléments d'information qui vous ont été fournis par les

 15   enquêteurs du bureau du Procureur.

 16   R.  Oui, cela est vrai. Ils m'ont indiqué les circonstances alléguées de

 17   l'événement.

 18   Q.  Et dans quelle mesure est-ce que vous avez pris en compte ces éléments

 19   d'information que vous avez reçus de cette source-là pendant votre travail

 20   ?

 21   R.  Dans le cadre de chacune de mes missions, j'essaie de rassembler un

 22   maximum d'informations sur les circonstances avant même de commencer mon

 23   travail. Et je ne m'attelle à mes examens que par la suite. Bien entendu,

 24   les éléments qu'on vous fournis peuvent être erronés, et en règle générale

 25   j'essaie de vérifier si ce qu'on m'avait raconté précédemment est exact ou

 26   non, si je compare cela aux éléments que je trouve. Si on vous fournit un

 27   texte ou des informations, vous, vous comparez cela aux éléments que vous

 28   trouvez.

Page 7386

  1   Donc on peut chercher soit à confirmer, soit à infirmer l'histoire

  2   qui vous a été présentée précédemment.

  3   Q.  Je vous remercie, Docteur Lawrence. Je n'aurai plus de questions pour

  4   vous dans l'immédiat.

  5   Mme HASAN : [interprétation] Monsieur le Président, j'en ai terminé avec

  6   mon interrogatoire principal.

  7   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Je vous remercie, Madame Hasan.

  8   Monsieur Tolimir, vous pouvez commencer votre contre-interrogatoire. Avant

  9   cela, Mme la Juge Nyambe souhaite poser une question au témoin.

 10   Mme LE JUGE NYAMBE : [interprétation] Oui. Un point de précision, s'il vous

 11   plaît. Page 13, lignes 4 à 7, vous auriez dit :

 12   "Je suppose que dans la plupart des cas où nous n'avons pas pu déterminer

 13   la cause de la mort, il est probable que la cause était une blessure par

 14   balle; tout simplement, nous ne pouvions pas l'identifier."

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 16   Mme LE JUGE NYAMBE : [interprétation] Donc vous nous dites que votre

 17   conclusion est néanmoins que la cause de la mort était une blessure par

 18   balle ?

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] De la manière dont je travaille en Australie,

 20   je distinguerais entre ce dont je suis certain et ce qui est, à mes yeux,

 21   hautement probable.

 22   Ici, en l'occurrence, j'indique la cause de la mort dans les cas où

 23   j'en suis certain. Pour le reste, cela est soit une possibilité, soit une

 24   probabilité, mais je n'en suis pas certain. Par conséquent, je vous fournis

 25   les deux éléments d'information. J'explique simplement que je pense que

 26   cela est probable qu'il s'agit de blessures par balle, mais que je ne pense

 27   pas pouvoir le démontrer en me fondant sur les critères qui sont

 28   normalement requis devant les tribunaux.

Page 7387

  1   Mme LE JUGE NYAMBE : [interprétation] Je vous remercie.

  2   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur Tolimir.

  3   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Bonjour à tous et

  4   à toutes. Bonjour, Monsieur Lawrence. Que la paix règne en la demeure. Et

  5   j'espère que ce procès se terminera selon la volonté du Seigneur, et non

  6   pas selon la mienne.

  7   Contre-interrogatoire par M. Tolimir : 

  8   Q.  [interprétation] Monsieur Lawrence, je vais vous poser des

  9   questions sur des points qui m'échappent dans votre rapport, et j'aimerais

 10   que vous puissiez me répondre, parce que je souhaite comparer cela au reste

 11   des travaux des experts que nous avons reçus.

 12   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je souhaite qu'on affiche la pièce P923, s'il

 13   vous plaît. Il s'agit de l'autopsie des restes humains du site de Brana

 14   menée en 1998. C'est la page 2, le paragraphe 4 de ce rapport de juin 1998

 15   qui m'intéresse.

 16   Tournez, s'il vous plaît. Merci.

 17   Page 2, paragraphe 4, s'il vous plaît. Merci. Page 2, s'il vous

 18   plaît. Merci.

 19   M. TOLIMIR : [interprétation]

 20   Q.  En attendant, je suppose que vous serez en mesure de me répondre,

 21   puisque vous avez sous les yeux votre exemplaire de ce rapport d'autopsie.

 22   Sur la base de l'examen anthropologique militant dans ce paragraphe,

 23   il est possible d'en conclure qu'une personne était âgée de 13 à 18 ans;

 24   trois de 18 à 25 ans; ainsi que 42 plus âgées que 25 ans.

 25   Je vous demande à présent : auriez-vous ---

 26   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur Tolimir, nous devrions

 27   vérifier si c'est bien la bonne page qui s'affiche en B/C/S. Je n'en suis

 28   pas certain.

Page 7388

  1   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci. Oui, tout à fait. C'est la première page

  2   qu'il nous faut. Nous n'avons pas cela en serbe. C'est la raison pour

  3   laquelle j'en ai donné lecture en serbe. Mais si, c'est la première page en

  4   anglais, c'est le paragraphe 4.

  5   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Et ce serait quelle page en B/C/S,

  6   Maître Gajic ?

  7   M. GAJIC : [interprétation] Monsieur le Président, il me semble que sur la

  8   droite, en serbe, ce n'est pas le bon rapport qui s'affiche, puisque nous

  9   parlons maintenant du rapport relatif aux exhumations du site de Brana. Or,

 10   sur la droite, je vois qu'il est question de Hodzici Road.

 11   M. TOLIMIR : [interprétation]

 12   Q.  Merci. En attendant que la régie nous aide -- voilà. Merci. Excusez-

 13   nous. Donc auriez-vous mené ces appréciations vous-même, les évaluations de

 14   l'âge des individus au moment de leur décès, en l'occurrence ? Donc je vous

 15   interroge sur cet exemple très spécifique que je viens de citer. Merci.

 16   R.  Non. Ce ne sont pas des conclusions qui viennent de moi. Ces

 17   informations ont été fournies par M. Baraybar, et ces évaluations, quant à

 18   elles, se fondent sur l'épiphyse des os, sur la symphyse pubienne et sur la

 19   quatrième côte. J'ai intégré cela à mon rapport, tout simplement parce que

 20   je souhaitais fournir le contexte, donc l'information sur l'âge de

 21   certaines victimes.

 22   Q.  Merci. Récemment, nous avons entendu M. Baraybar qui a expliqué

 23   précisément ce que vous venez de dire. Il nous a expliqué sur quoi il s'est

 24   fondé pour déterminer l'âge.

 25   Maintenant, j'aimerais que vous examiniez le paragraphe 7 dans la

 26   version anglaise, qui correspond au paragraphe 7 dans la version serbe.

 27   Sous la localité Brana, aucun corps n'était complet. Comme vous le dites au

 28   paragraphe 7, en fait, il s'agissait de parties de corps. Voyons cela :

Page 7389

  1   "Dans la fosse, il y avait des morceaux de corps de 46 personnes. Vu que

  2   ces parties de corps étaient séparées, on les a ramassées pour les placer

  3   dans 91 housses mortuaires. Je vous renvoie au rapport du Pr Wright. Aucun

  4   de ces corps n'était complet. Par conséquent, de toute évidence, on ne peut

  5   pas garantir que dans certaines housses il n'y ait pas de restes de plus

  6   d'une personne. Compte tenu du fait que certains corps n'ont pas pu être

  7   reconstruits, j'ai cité la cause de la mort relative à chacune des parties

  8   ce corps se trouvant dans chacune des housses, et non pas pour chacun des

  9   individus. Il est possible que lorsqu'il y a un corps disloqué, par

 10   exemple, séparation entre le corps et la tête, il est possible qu'on ait

 11   cité plus d'une cause de la mort."

 12   Nous avons précédemment vu que le nombre de personnes ainsi que leur

 13   cause de la mort ont été déterminés, mais si j'ai bien compris, vous avez

 14   procédé à la détermination de la cause de la mort en vous fondant sur des

 15   parties de corps et non pas sur des corps. Est-ce que vous pouvez nous

 16   expliquer quel est le lien finalement entre le nombre d'individus et le

 17   fait que la cause de la mort, vous l'avez identifiée pour des parties de

 18   corps ? Donc vous arrivez à un nombre total d'individus concernés, mais on

 19   ne comprend pas très bien comment.

 20   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Pour l'instant, nous n'entendons plus

 21   l'interprétation. La dernière phrase n'a pas été entendue par les

 22   interprètes. Le compte rendu d'audience s'est interrompu lorsqu'il est dit

 23   que :

 24   "…la cause de la mort a été déterminée pour les parties de corps et

 25   non pas pour les individus. Pourriez-vous, s'il vous plaît, expliquer le

 26   nombre de --" Donc, Monsieur Tolimir, veuillez répéter votre dernière

 27   question.

 28   M. TOLIMIR : [interprétation]

Page 7390

  1   Q.  Je répète : d'où vient ce chiffre correspondant au nombre total de

  2   personnes et à la cause de leur décès ? Merci.

  3   R.  Le site de Brana constitue l'un des sites les plus difficiles que nous

  4   ayons eu à examiner. Les os étaient en très mauvais état. La dislocation

  5   était très prononcée et les corps avaient atteint un degré de décomposition

  6   très avancé. Je pense que je l'ai remarqué, pour ce site en particulier,

  7   nous avions constaté la présence d'à peu près 46 individus que

  8   véritablement la cause du décès comme étant une blessure par balles n'a pu

  9   être identifiée que pour quatre d'entre eux, et que pour 81 housses

 10   mortuaires, la cause du décès était indéterminée. Et cela parce qu'il y

 11   avait cette fragmentation très, très importante des restes.

 12   Q.  Je vous remercie d'avoir expliqué cela.

 13   L'ACCUSÉ : [interprétation] Le paragraphe 5, page 2, s'il vous plaît.

 14   M. TOLIMIR : [interprétation]

 15   Q.  Dans ce paragraphe il est dit :

 16   "On a trouvé dans la fosse des ligatures faits de bouts de corde qui

 17   correspondaient à ceux que nous avions constaté sur les sites LPO 2 et

 18   CROATE 3, ainsi qu'un objet qui constituait peut-être un bandeau pour les

 19   yeux. Ces objets ont été envoyés à La Haye, et non pas été examinés à la

 20   morgue."

 21   Alors, dites-nous quelle en est la raison, s'il vous plaît ? Ces

 22   objets, pourquoi n'ont-ils pas été examinés à la morgue  et pourquoi a-t-on

 23   plutôt voulu les envoyer à La Haye ? Ont-ils été renvoyés par la suite et

 24   sont-ils revenus accompagnés de ce rapport ? Merci.

 25   R.  [aucune interprétation]

 26   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Il s'agit du paragraphe 6. Je précise

 27   pour le compte rendu d'audience.

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] En fait, vous vous référez au paragraphe 6, et

Page 7391

  1   non pas au paragraphe 5.

  2   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Oui, cela était une erreur au départ.

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, il y avait un certain nombre de ligatures

  4   qui ont été trouvées dans la fosse, mais qui n'étaient pas associées aux

  5   corps. Il y avait donc un certain nombre de ligatures qui ont été trouvées

  6   dans la fosse, mais qui n'étaient pas associées aux corps et qui ont été

  7   envoyées à La Haye, et non pas à la morgue. A un stade ultérieur, lorsque

  8   je suis revenu à La Haye, je les ai examinés pour déterminer si oui ou non

  9   ils correspondaient à ceux que nous avions examinés à Liplje et également à

 10   Cancari Road 3, CR 3. A mon sens, lorsque je les ai examinés, j'ai pu

 11   constater qu'effectivement, ils correspondaient aux autres.

 12   M. TOLIMIR : [interprétation]

 13   Q.  Est-ce que vous pouvez nous dire sur quelle base vous êtes arrivé à

 14   cette conclusion ?

 15   R.  D'après l'aspect de la corde qui a été utilisée, et aussi d'après la

 16   manière dont la ficelle était attachée.

 17   Q.  Vous ne nous avez pas tout à fait répondu pourquoi, dans un premier

 18   temps, on avait envoyé cela à La Haye avant de le soumettre à un examen à

 19   la morgue. Est-ce que cela n'aurait pas dû normalement être examiné par des

 20   experts tout d'abord à la morgue sur les lieux ?

 21   R.  Oui, j'aurais préféré cela. Mais cette décision a été prise par les

 22   personnes qui se trouvaient sur les lieux. Ils ont décidé de les envoyer à

 23   La Haye et de ne pas les examiner sur place, et c'est la raison pour

 24   laquelle j'ai fait cet examen ultérieurement à La Haye moi-même.

 25   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Alors, pouvez-vous nous dire, s'il

 26   vous plaît, qui a pris cette décision d'envoyer cela à La Haye ?

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne le sais pas. Je n'en suis pas certain.

 28   Ce n'est pas moi. 

Page 7392

  1   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Je vous remercie. M. le Juge

  2   Mindua souhaite poser une question.

  3   M. LE JUGE MINDUA : Oui. Justement, Monsieur le Témoin.

  4   Que signifie amener les corps à La Haye ? C'est quoi ça ? Au bureau

  5   du Procureur ou bien à la morgue de La Haye ?

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, excusez-moi, nous ne parlons pas de corps

  7   actuellement. Nous parlons de ligatures qui ont été trouvées dans la fosse.

  8   Ce sont les ligatures qui ont été effectivement envoyées à La Haye.

  9   Personnellement, j'aurais préféré qu'on les examine à la morgue, mais cela

 10   n'a pas été le cas. Au moment de l'exhumation au site Brana, moi-même,

 11   j'étais encore à La Haye.

 12   M. LE JUGE MINDUA : Merci beaucoup. J'ai mal lu le transcript. Merci.

 13   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Veuillez poursuivre, Monsieur

 14   Tolimir.

 15   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je vous remercie.

 16   M. TOLIMIR : [interprétation]

 17   Q.  Est-ce que la décision a été prise par des pathologistes, par des

 18   anthropologues, par des experts d'envoyer ces ligatures à La Haye, puisque

 19   vous nous dites que vous auriez préféré les examiner sur le site ? Ou bien

 20   est-ce que c'est quelqu'un qui n'a pas la qualité d'expert qui a pris cette

 21   décision ? Puisque vous n'étiez pas en mesure de dire exactement qui avait

 22   pris cette décision lorsque le président vous a posé la question. Merci.

 23   R.  Comme je viens de le dire, à ce moment-là je n'étais pas encore en

 24   Bosnie; j'étais encore à La Haye. Je ne suis pas certain. Je ne sais pas

 25   qui a pris cette décision. Toutefois, à ce stade, face à ceux qui géraient

 26   le site où les exhumations ont été menées, je leur ai fait comprendre que

 27   j'aurais préféré examiner ce type d'objets.

 28   Q.  Je vous remercie. Alors, pouvez-vous nous dire, qui était à la tête de

Page 7393

  1   cette exhumation ? Merci.

  2   R.  A la tête de l'équipe d'exhumation, il y avait le Pr Richard Wright.

  3   Toutefois, je ne sais pas si c'est lui qui a pris cette décision. Ce sont

  4   peut-être les enquêteurs, en l'occurrence, qui l'ont prise.

  5   Q.  Merci. Richard Wright, quant à lui, était-il entouré d'experts à même

  6   d'examiner ces objets à la morgue sur place, là où ils ont fait le reste

  7   des examens, à côté du site ?

  8   R.  Le Pr Wright travaillait sur place, sur le lieu de l'exhumation. Lui-

  9   même ne travaillait pas à la morgue. De mémoire, je vous dirais qu'il me

 10   semble qu'il avait des agents de la police scientifique avec lui sur les

 11   lieux, qui auraient pu mener à bien certains éléments d'examen de ces

 12   ligatures, mais je n'étais pas sur place moi-même et, par conséquent, je ne

 13   saurais pas vous en dire plus.

 14   Q.  Je vous remercie.

 15   Merci. Pardonnez-moi. Je m'excuse auprès des interprètes. Est-ce que

 16   vous pouvez nous dire si à aucun moment, vous avez vu les conclusions des

 17   experts, que les experts de La Haye étaient censés consulter pour ce qui

 18   est de ces ligatures qui avaient été envoyées par l'équipe de M. Wright ?

 19   R.  Vous voulez parler de quelles conclusions d'expert ?

 20   Q.  Merci. Ces éléments ont-ils été envoyés à La Haye ? Ont-ils été

 21   analysés ? Quel en était le but ? Pourriez-vous nous expliquer cela ?

 22   R.  Je ne sais pas pourquoi ces éléments ont été envoyés à La Haye. Je les

 23   ai analysés par la suite à La Haye, mais j'aurais préféré les analyser au

 24   dépôt mortuaire.

 25   Q.  Merci, Monsieur le Professeur. Pouvez-vous nous dire si oui ou non le

 26   Pr Wright était en droit d'envoyer des éléments directement à La Haye ?

 27   R.  Je n'étais pas responsable du site de l'exhumation. Il faudrait que

 28   vous posiez la question à quelqu'un d'autre.

Page 7394

  1   Q.  Merci. Monsieur, je vous posais simplement la question de savoir quelle

  2   était l'attitude à ce moment-là pour savoir comment cette décision avait

  3   été prise, mais j'ai compris votre réponse et vous avez dit que vous auriez

  4   préféré analyser ces éléments sur les lieux en question.

  5   Est-ce que nous pouvons maintenant voir la pièce où chacun de vos

  6   rapports décrit la procédure d'autopsie. Page 5 en serbe et page 4 de la

  7   version anglaise. Donc chaque rapport écrit par vous décrit la procédure

  8   utilisée pour l'autopsie, ou plutôt, le protocole.

  9   Et y avait-il des différences au niveau des procédures d'autopsie

 10   lorsqu'il s'agissait d'analyser des parties de corps provenant de

 11   différentes fosses, ou est-ce que les mêmes procédures étaient utilisées

 12   dans tous les cas ? Merci.

 13   R.  En règle générale, les procédures, étaient identiques. Cependant, à

 14   Cancari 12, Cancari 3, et sur le site du barrage, toutes les housses

 15   mortuaires ont été analysées par un pathologiste ou médecin légiste. Après,

 16   vu ces sites, où lorsque nous avons commencé à traiter la rue Liplje, la

 17   rue Hodzici, et Zeleni Jadar, nous avons eu à examiner un nombre beaucoup

 18   plus important de housses mortuaires. Les équipes étaient renforcées pour

 19   ce travail-là et nous étions inquiets, parce que nous ne savions pas si

 20   nous pouvions compléter les procédures à temps. En conséquence, une

 21   décision a été prise, suggestion faite par M. Baraybar, pour dire que des

 22   parties de corps plus petites devaient être analysées par un anthropologue

 23   plutôt que par un pathologiste légiste. Nous avons donc estimé qu'il était

 24   préférable de dire que les corps dans leur totalité nous fournissaient

 25   énormément d'informations, et le pathologiste légiste devait se concentrer

 26   sur les corps entiers alors que les parties de corps plus petites pouvaient

 27   être analysées par l'anthropologue.

 28   Lorsque l'anthropologue estimait qu'il y avait une blessure importante ou

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  1   notable, ou qu'une partie du corps était constituée par une tête, dans ce

  2   cas, les restes humains étaient également analysés par un pathologiste

  3   légiste pour savoir quelles étaient les blessures en présence. Donc cela

  4   signifie pour l'essentiel que la rue Hadzici, Liplje et Zeleni Jadar, sur

  5   ces sites-là, les housses mortuaires comportant des parties de corps plus

  6   petites n'ont pas été analysées par un pathologiste légiste mais par un

  7   anthropologue, à moins que ce dernier ne constate qu'il y ait une blessure

  8   importante qui devait être notifiée.

  9   Q.  Merci. Veuillez maintenant regarder le point 11, s'il vous plaît. Et

 10   dans l'exemplaire que j'ai sous les yeux, on déclare que :

 11   "Une liste des vêtements a été établie, on a mis des étiquettes ainsi

 12   qu'un petit numéro en métal avec un numéro, et ceci a été placé dans un

 13   conteneur avant de procéder à leur lavage."

 14   Voici ma question : Monsieur Lawrence, êtes-vous en mesure de nous dire si

 15   oui ou non les vêtements, avant que ceux-ci ne soient lavés, si ces

 16   vêtements ont été analysés d'une manière ou d'une

 17   autre ? Par exemple, est-ce qu'on a recherché des traces de poudre ou a-t-

 18   on procédé à des vérifications analogues ?

 19   R.  Oui. Le corps a été radiographié entièrement habillé, ensuite tous les

 20   habits ont été radiographiés avant que ces derniers ne soient enlevés pour

 21   être lavés. Malheureusement, en raison de la présence des fluides et d'un

 22   état de décomposition avancé, il était quasiment impossible de retrouver

 23   des résidus de poudre. Il y a eu un seul cas sur les 883 où j'ai pu

 24   constater quelque chose qui ressemblait, de près ou de loin, à des résidus

 25   de poudre. Mais même dans ce cas-là, nous n'étions absolument pas sûrs.

 26   Nous ne savions pas s'il s'agissait de traces de poudre.

 27   Q.  Merci. Est-ce que vous pourriez nous dire, s'il vous plaît, pourquoi

 28   les vêtements n'ont pas été soumis à d'autres examens ?

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  1   R.  A l'époque où nous analysions ces éléments, nous avons estimé que les

  2   vêtements nous fourniraient peut-être un moyen d'identifier de nombreux

  3   corps. Compte tenu des circonstances, nous avons estimé qu'il était plus

  4   utile de nettoyer les vêtements afin de permettre aux familles d'identifier

  5   les vêtements plutôt que de retrouver des traces de poudre.

  6   Q.  Merci. Ceci a-t-il eu une quelconque incidence sur la qualité de vos

  7   travaux et des procédures en place ?

  8   R.  Il est difficile de répondre à cette question-là. Je ne le pense pas.

  9   Je pense qu'il est peu probable qu'une analyse des vêtements, la recherche

 10   de traces de poudre ait changé quoi que ce soit. Néanmoins, j'admets que

 11   dans un cas normal, dans le cas d'un corps bien préservé, lorsqu'il n'y a

 12   pas de décomposition, qu'il faudrait procéder à cette analyse.

 13   Q.  Merci. Monsieur, veuillez maintenant regarder le paragraphe 12, s'il

 14   vous plaît.

 15   L'ACCUSÉ : [interprétation] Et je vais demander l'affichage de la page

 16   suivante, s'il vous plaît, en langue serbe, dans le prétoire électronique.

 17   M. TOLIMIR : [interprétation]

 18   Q.  Le paragraphe 12 dit comme suit :

 19   "Une fois que le corps a été déshabillé, il était lavé à nouveau et

 20   photographié à nouveau. Lorsque cela s'avérait nécessaire, les tissus mous

 21   étaient enlevés du corps ou les os, et une analyse détaillée était faite

 22   pour constater s'il y avait oui ou non des blessures."

 23   Voici donc ma question : pourquoi était-il nécessaire d'enlever les tissus

 24   mous des corps ou des os ? Merci.

 25   R.  Dans un corps qui est intact, où la peau est encore entièrement sur le

 26   corps, on peut en général déterminer où se trouve la blessure par balle

 27   sans aucune difficulté. La plupart de ces corps n'étaient pas entièrement

 28   recouverts de peau à cause de la décomposition. Par conséquent, il était

Page 7398

  1   nécessaire de procéder à une dissection des tissus pour voir si oui ou non

  2   il y avait une trajectoire de balle à l'intérieur des tissus mous, parce

  3   que la perte de peau rendait l'identification des blessures par balles au

  4   niveau de la peau difficile.

  5   Q.  Est-ce que je vous ai bien compris. Vous avez établi si oui ou non il y

  6   avait des blessures sur la base des os uniquement et c'est ce que vous avez

  7   utilisé uniquement pour déterminer les causes du décès ? Vous ai-je bien

  8   compris ?

  9   R.  Non. Les blessures étaient établies sur la base d'une analyse de la

 10   peau, des tissus mous, des os, et des radiographies du corps.

 11   Q.  Merci. Une radiographie vous permettait-elle alors d'établir ou de

 12   comprendre quelle était la trajectoire de la balle qui aurait traversé la

 13   peau, les tissus mous, la chair ? Pourquoi fallait-il procéder à cela ? Je

 14   n'ai pas tout à fait compris. Merci.

 15   R.  Encore une fois, avec un corps qui est dans un état normal, ce que je

 16   ferais en premier lieu, je ferais une radio pour établir la trajectoire de

 17   la balle, ensuite j'analyserais la peau pour savoir à quel endroit la balle

 18   était entrée et sortie du corps, ensuite je ferais une analyse des organes

 19   internes pour comprendre si ceci correspondait. En général, je procède à un

 20   examen externe et interne dans le cas de blessures par balles. Il est

 21   également nécessaire de procéder à un examen interne afin de récupérer le

 22   projectile.

 23   Q.  Merci. Docteur Lawrence, pour cette explication complémentaire, je

 24   souhaitais que ceci soit tout à fait clair.

 25   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demande maintenant à voir la page 12 en

 26   serbe et la page 9 en anglais, s'il vous plaît.

 27   Nous avons besoin de voir avec "blessures peri-mortem," à savoir blessures

 28   qui se sont produites environ au moment du décès.

Page 7399

  1   M. TOLIMIR : [interprétation]

  2   Q.  Dans votre rapport, vous divisez ces blessures en blessures dues à des

  3   tirs, et ce, tout à fait indiscutable, ensuite blessures par balle

  4   probable, et en troisième catégorie, vous dites blessures par balle

  5   éventuelles.

  6   Sur quoi vous fondez-vous pour diviser ces types de blessures en

  7   trois catégories ?

  8   R.  J'essaie de voir quel est le passage en question en anglais. Pardonnez-

  9   moi, oui.

 10   Q.  Pardonnez-moi, je n'avais pas ouvert mon microphone. Alors, au-dessus

 11   du tableau ici, les numéros 1, 2, et 3, ces pages ici contiennent les

 12   informations que je viens de vous communiquer.

 13   R.  Oui.

 14   Q.  Alors, voici ma question : sur quoi vous fondiez-vous pour déterminer

 15   ces éléments, à savoir si une blessure était très certainement une blessure

 16   par balles, une blessure par balle probable ou éventuelle ?

 17   R.  Encore une fois, sur ce site en particulier, nous avions en présence

 18   des ossements très fragmentés. Dans le cas de certaines blessures, j'étais

 19   convaincu de par la forme de la blessure qu'il y avait un biseautage en

 20   dessous de la blessure, et qu'il y avait des dégâts adjacents qui avaient

 21   été provoqués, et je disais à ce moment-là que c'était certainement une

 22   blessure par balles.

 23   Dans d'autres cas, soit j'étais en présence de petits fragments de

 24   métaux au milieu de la radiographie et qui étaient adjacents à des

 25   fractures de type circulaire. J'en ai conclu à ce moment-là que je ne

 26   pouvais pas dire de façon déterminée qu'il s'agissait de blessures par

 27   balles, mais compte tenu de la présence de fragments de métaux, je disais

 28   qu'il s'agissait probablement de blessures par balles.

Page 7400

  1   Et dans d'autres cas, je n'étais pas sûr, et dans ce cas j'ai dit que

  2   c'était possible. Parce qu'il y avait des fractures qui pouvaient

  3   correspondre à des fragments de métaux qui avaient été retrouvés juste à

  4   côté, mais je ne pouvais pas dire qu'il s'agissait véritablement de

  5   blessures par balles. Et c'est la raison pour laquelle je disais blessures

  6   par balles éventuelles.

  7   Q.  Merci. Veuillez me dire ceci, s'il vous plaît : pour vous, des armes à

  8   feu, c'est tout objet capable de tirer ou est-ce que vous pensiez

  9   simplement à des balles de fusil ? Vous avez pensé à des obus, à des

 10   mortiers et à d'autres types d'armes ?

 11   R.  En général, dans ces rapports, j'évoquais des blessures par balles, des

 12   éclats et des blessures dues à un fusil à pompe. Dans ce cas-ci, je parlais

 13   de blessures par balles, ce qui ne comprenait pas les pièces telles que des

 14   mortiers ou des pièces d'artillerie.

 15   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur Tolimir, je crois que nous

 16   pourrions maintenant faire notre première pause. Nous allons reprendre à 16

 17   heures 15.

 18   --- L'audience est suspendue à 15 heures 50.

 19   [Le témoin quitte la barre]

 20   [Le témoin vient à la barre] 

 21   --- L'audience est reprise à 16 heures 18.

 22   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur Lawrence, avant la pause,

 23   vous avez utilisé deux termes, "gun-shot" et "shot-gun," en anglais. Est-ce

 24   que vous pourriez expliquer la différence ?

 25   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. En général, quand je parle de "gun-shot,"

 26   c'est-à-dire "tir par balles," je fais référence à des revolvers. Et quand

 27   je parle de "shot-guns," je parle d'armes qui ont un barillet. C'est donc

 28   les deux termes que j'utilise. Et c'est la raison pour laquelle j'ai fait

Page 7401

  1   un distinguo entre les deux.

  2   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Merci pour cette précision.

  3   Monsieur Tolimir, veuillez poursuivre.

  4   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

  5   Est-ce que je pourrais demander qu'on affiche sur le prétoire

  6   électronique le document P942 ? Pardon, 924.

  7   Il s'agit d'un rapport d'enquête concernant des restes humains --

  8   L'INTERPRÈTE : L'interprète n'a pas saisi l'endroit.

  9   L'ACCUSÉ : [interprétation] Il s'agit de la localité qui s'appelle

 10   Cancarski Put. Ceci a été réalisé en août 1998. C'est à la page 10 en

 11   version serbe et en anglais.

 12   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Pour les besoins du compte rendu

 13   d'audience, le titre du rapport est lié au site Cancari Road 12.

 14   L'ACCUSÉ : [interprétation] On ne peut pas voir la version en anglais à

 15   l'écran, donc le témoin aura du mal à suivre. Les deux sont en serbe. Est-

 16   ce que l'on pourrait montrer au témoin la version anglaise, s'il vous

 17   plaît. Voilà, nous y sommes. Il s'agit du paragraphe 2, et je vais donc en

 18   donner lecture :

 19   M. TOLIMIR : [interprétation]

 20   Q.  "Chaque autopsie relève de la responsabilité unique du pathologiste qui

 21   réalise l'autopsie. Il y a des discussions entre des pathologistes et des

 22   anthropologues dans chacun des cas. J'étais présent dans la salle où les

 23   autopsies ont été réalisées, et je pouvais, par conséquent, être consulté

 24   dans les discussions. Les opinions exprimées dans ce rapport ne sont

 25   partagées que par le pathologiste responsable de l'affaire en question, et

 26   ceci explique les variations visibles dans la formulation des conclusions

 27   ou d'une opinion.

 28   "L'équipe d'anthropologues a établi des rapports concernant la

Page 7402

  1   position des corps, ainsi que le sexe, l'âge, et cetera. Les données sur

  2   lesquelles sont basées ces opinions figurent dans les notes originales de

  3   l'anthropologue en question."

  4   Maintenant, lorsque vous mentionnez un rapport d'autopsie, est-ce que ce

  5   terme inclut les conclusions d'un pathologiste et d'un anthropologue et

  6   est-ce qu'elles sont toutes les deux intégrées dans un rapport ?

  7   R.  Le rapport d'autopsie est le résultat des travaux d'un pathologiste.

  8   Les anthropologues préparent un rapport distinct. Cependant, les

  9   anthropologues fournissent des conseils aux pathologistes concernant leur

 10   opinion au sujet des blessures, et ceci aurait été incorporé dans le

 11   rapport d'autopsie qui a été rédigé par le pathologiste.

 12   Q.  Merci. J'aimerais savoir si le pathologiste était en mesure de faire

 13   part de ses conclusions si celles-ci étaient en contradiction avec celles

 14   d'un anthropologue ? Et que se passait-il si les opinions de ces deux

 15   spécialistes étaient divergentes ?

 16   R.  Le pathologiste donnait le dernier mot concernant l'évaluation des

 17   blessures. S'il y avait un désaccord entre l'anthropologue et le

 18   pathologiste, en général, ils me consultaient et nous arrivions à un

 19   consensus concernant la formulation. Si on ne pouvait pas arriver à un

 20   accord, l'opinion qui prévalait était celle du pathologiste responsable du

 21   dossier.

 22   Q.  Merci, Monsieur Lawrence.

 23   Etant donné que vous avez dit que les conclusions du pathologiste

 24   prévalaient, est-ce que vous pourriez m'expliquer quelle aurait été la

 25   cause d'un désaccord de ce type ? Est-ce que vous avez un exemple ? Est-ce

 26   qu'il y avait un modèle type de rapport ? Ou était-il possible que des

 27   blessures soient décrites différemment d'un rapport à l'autre ?

 28   R.  Il s'agit d'une question à tiroirs. Les pathologistes n'avaient pas

Page 7403

  1   tous la même expérience dans l'examen de blessures au niveau des os et, par

  2   conséquent, la plupart des pathologistes étaient à l'écoute de l'opinion

  3   des anthropologues dans ce type de dossiers. Je me souviens avoir eu des

  4   discussions avec M. Baraybar au sujet de certaines des blessures qui

  5   seraient recensées dans la catégorie de blessures par balles éventuelles ou

  6   probables. Par exemple, lorsque vous avez une altération qui ne présentait

  7   pas toutes les caractéristiques de blessures par balles, mais qui

  8   présentaient certains fragments de métal. Il s'agissait du type d'exemple

  9   qui survenait. On pouvait également de temps en temps avoir des questions

 10   concernant le fait de savoir s'il s'agissait d'une blessure suite à des

 11   coups violents et, par conséquent, on pouvait se demander quel était

 12   l'ordre des événements, si la blessure avait lieu suite à un coup violent

 13   ou suite à une blessure par balles, mais il n'y avait pas de modèle type.

 14   Le rapport qui était rempli à la main était un document déjà préparé

 15   et vous aviez des cases qu'il fallait remplir. Les pathologistes, dans la

 16   plupart des cas, travaillaient sur le dossier pendant deux semaines.

 17   Lorsqu'ils arrivaient sur le site, je les rencontrais et j'expliquais

 18   comment nous procédions à l'interprétation des blessures, quelles étaient

 19   les définitions de blessure par balles éventuelle et blessure par balles

 20   probable, et d'autres éléments de ce type. Par conséquent, il y avait une

 21   certaine uniformité. Cependant, les responsables des dossiers et les

 22   pathologistes avaient également une marge de manœuvre pour procéder à la

 23   description de ce qu'ils observaient, et je les encourageais à faire part

 24   de leurs réflexions.

 25   Q.  Merci, Monsieur Lawrence.

 26   Est-ce que l'on pourrait maintenant demander l'affichage sur les

 27   écrans de la page 22 en serbe et en anglais. Il s'agit de la partie qui

 28   suit le titre de la rubrique, "shrapnel" en anglais, "éclats."

Page 7404

  1   Nous voyons déjà la partie en question en anglais. C'est le deuxième

  2   paragraphe en partant du bas de la page. Et il en va de même pour la

  3   version serbe.

  4   M. TOLIMIR : [interprétation]

  5   Q.  Et vous mentionnez :

  6   "Les fragments ressemblaient à des éclats d'obus ou de pièces de mortier

  7   que l'on retrouvait dans les environs de Sarajevo, et ces fragments, par

  8   conséquent, ne ressemblaient pas à des fragments de balles."

  9   On mentionne ici des mortiers et des obus que l'on retrouvait dans les

 10   environs de Sarajevo. Pourquoi est-ce que ceci est mentionné ici ? Est-ce

 11   que c'est une erreur ou est-ce que l'on fait référence à des expériences

 12   antérieures que vous auriez eues ou que les pathologistes auraient eues ?

 13   R.  Non. La plupart des pathologistes qui géraient ces dossiers n'auraient

 14   pas vu un nombre important de blessures liées à des éclats. Un nombre

 15   important des balles dans les blessures par balles étaient fragmentées. Par

 16   conséquent, je pensais qu'il était important de faire une distinction entre

 17   les fragments de balles et les fragments d'obus. En raison de l'absence

 18   d'expérience au sein des pathologistes, je me suis procuré des exemples

 19   d'éclats d'obus et de mortiers provenant des environs de Sarajevo de façon

 20   à leur montrer à quoi ressemblait. Ce que nous faisions, c'est que nous

 21   testions également de manière régulière le matériel avec un aimant, de

 22   façon à déterminer s'il s'agissait de substances ferrugineuses ou pas, et

 23   nous pouvions faire une comparaison également avec les fragments que nous

 24   nous étions procurés émanant des environs de Sarajevo. Nous n'avions pas

 25   d'expert en balistique présent sur les lieux et qui serait venu des forces

 26   de police et, par conséquent, j'ai utilisé des fragments qui venaient des

 27   environs de Sarajevo comme échantillon, si l'on peut dire.

 28   Q.  Merci. Dans la première partie de votre réponse, vous avez dit que des

Page 7405

  1   pathologistes ou, plus ou moins, certains pathologistes n'avaient pas

  2   suffisamment d'expérience. Est-ce que vous pourriez donner plus de détails,

  3   parce que peut-être que je n'ai pas tout compris.

  4   R.  Oui. Les pathologistes venaient d'Angleterre, d'Ecosse, d'Irlande, de

  5   France, d'Allemagne. La plupart de ces experts n'avaient pas été en

  6   présence d'un nombre important de personnes qui auraient été blessées par

  7   des éclats d'obus ou de mortier. Compte tenu de leur expérience, ils

  8   savaient à quoi ressemblaient des blessures par balles, mais ils n'avaient

  9   pas l'habitude de voir des blessures par éclats d'objets explosifs. La

 10   seule exception aurait probablement été les pathologistes d'Irlande du

 11   Nord, qui avaient l'habitude d'observer des blessures causées par des

 12   éclats de bombe.

 13   Q.  Merci. Ceci m'amène à nouveau à aborder la question et le problème lié

 14   à la distance du lieu de tir. S'il s'agissait d'éclats d'obus ou de mortier

 15   et si l'on peut, par conséquent, conclure facilement que l'arme était assez

 16   loin, c'est une chose, mais si les tirs avaient été effectués à 500 mètres,

 17   à 50 mètres ou à 1 000 mètres, est-ce que les pathologistes auraient eu

 18   suffisamment d'expérience et de compétence pour déterminer la distance à

 19   partir de laquelle le feu avait été ouvert ?

 20   R.  Je crois que dans mon rapport, j'ai mentionné que l'évaluation de la

 21   portée potentielle des tirs était une cause perdue dans ces dossiers.

 22   Compte tenu de l'état de ces corps, je ne pense pas que l'on était en

 23   mesure de vraiment pouvoir déterminer de quelle distance provenaient ces

 24   tirs.

 25   Q.  Merci. Pourriez-vous nous faire part de votre opinion sur le point

 26   suivant : dans les dossiers que vous avez traités, j'aimerais savoir s'il y

 27   avait des cas où l'on ne pouvait pas déterminer à quelle distance les tirs

 28   avaient été effectués. Je parle ici de 183 cas, parce qu'il est important

Page 7406

  1   de savoir si ces personnes ont été tuées durant des combats et si d'autres

  2   personnes ont été tuées sans avoir participé à ces combats. Comment faire

  3   une distinction entre ces deux groupes ?

  4   R.  Encore une fois, il s'agit d'une série de questions que vous me posez.

  5   Je vais y répondre par ordre. Je dirais que la seule chose que peuvent dire

  6   les pathologistes en ce qui concerne la distance, c'est de savoir si l'arme

  7   avait été en contact avec le corps et si la crosse avait été à une certaine

  8   distance du corps, mais c'est tout ce que peut dire le pathologiste pour ce

  9   qui est de la distance par rapport au canon de l'arme.

 10   Par conséquent, je pense qu'il est exact de dire que pour ce qui est

 11   de la distance, on pourrait dire dans ces cas qu'elle était indéterminée.

 12   J'essaie de relire votre question.

 13   Pour ce qui est de savoir si l'on pourrait faire une distinction

 14   entre les personnes qui auraient été tuées alors qu'elles participaient à

 15   des combats et celles qui ont été tuées sans y participer, j'ai différents

 16   éléments à vous soumettre. Tout d'abord, si ces personnes avaient été tuées

 17   au combat, pourquoi avait-on pris tant de soin pour cacher ces corps et

 18   pourquoi les avoir transportés aussi loin des sites où ils auraient été

 19   tués, où ils seraient tombés. S'il s'agissait de combattants, comment

 20   expliquez-vous la présence de bandeaux et de liens ou de ligatures ? S'il

 21   s'agissait de combattants, comment expliquez-vous la présence de très

 22   jeunes enfants et de vieillards de sexe masculin ? S'il s'agissait de

 23   combattants, comment expliquez-vous la présence de personnes à qui on avait

 24   remplacé le col du fémur ou qui avaient des colonnes vertébrales tellement

 25   endommagées qu'ils étaient incapables de se mouvoir correctement ou

 26   facilement, ou des personnes qui avaient eu des opérations où on leur avait

 27   fait l'ablation du larynx, ce qui signifie qu'ils avaient une trachéotomie

 28   dans l'œsophage ? Tout cela, pour moi, ne constitue pas une définition de

Page 7407

  1   personnes qui avaient de fortes chances d'être des combattants.

  2   Et je dirais que dans les combats modernes, de manière générale, on

  3   s'attend à ce que la plupart des pertes soit liées à des blessures d'éclats

  4   d'obus, et non à des blessures par balles. En l'occurrence, le pourcentage

  5   de blessures par balles dans ces décès est inhabituellement élevé pour une

  6   situation de combat moderne. De plus, sur le cite de Cancari Road 12, j'ai

  7   vu un certain nombre de personnes qui étaient visiblement blessées et qui

  8   avait déjà des pansements. Comme, par exemple, un homme qui avait des

  9   blessures liées à des éclats d'obus au niveau du foie et au niveau de la

 10   main droite, et qui avait donc des bandages ou des pansements. Ensuite, il

 11   avait en plus des ligatures autour des poignets, et il avait ensuite été

 12   tué. Par conséquent, je pense qu'il s'agissait d'une personne qui avait été

 13   prise en charge, qui était blessée, qui avait reçu un traitement médical et

 14   qui, ensuite, avait été tuée. Encore une fois, je ne pense pas que ceci

 15   corresponde à la description de combattant.

 16   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur Tolimir, est-ce que je peux

 17   vous interrompre ? Dans votre dernière question, vous avez dit : "Est-ce

 18   que l'on pourrait dire que dans les cas en question, il s'agissait de

 19   distance de tirs non déterminée, et cela porte sur 183 dossiers." Je parle

 20   de la page 36, des lignes 1 à 3. J'aimerais savoir où vous avez obtenu ce

 21   chiffre de 183 dossiers. Quelle est la référence que vous avez utilisée ?

 22   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. M. Lawrence a dit

 23   qu'il s'était penché sur 883 corps, et vous avait dit que dans la question

 24   précédente, qu'il n'avait pas pu déterminer la distance qui séparait la

 25   victime de l'endroit où le tir avait été effectué. Et j'ai parlé donc de

 26   883 cas, mais j'ai demandé à M. Lawrence, en tant qu'expert, comment il

 27   pouvait prendre en charge l'examen de corps qui avaient été rassemblés

 28   durant les opérations de nettoyage. Il s'agissait de personnes qui avaient

Page 7408

  1   été tuées au combat, il s'agissait de personnes qui avaient également été

  2   tuées à bout portant et qui avaient été placées dans le même charnier.

  3   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Je suis désolé de devoir vous

  4   interrompre à nouveau, mais on avait consigné votre question au compte

  5   rendu d'audience comme disant 183, et non 883. Et je voulais préciser la

  6   chose. Je voulais m'assurer que vous aviez parlé de 183, mais en fait je

  7   pense qu'il s'agissait d'une erreur. Vous faisiez référence à 883 cas,

  8   n'est-ce pas ?

  9   L'ACCUSÉ : [interprétation] C'est exact, Monsieur le Président. J'avais

 10   formulé ma question de cette manière, et M. Lawrence a répondu à ma

 11   question.

 12   M. TOLIMIR : [interprétation]

 13   Q.  Ma question suivante aurait dû porter sur 883, et non 183. Donc

 14   ma question suivante serait de savoir si les arguments avancés par M.

 15   Lawrence sont des théories qui sont incluses dans les descriptions des

 16   localités dans lesquelles il a travaillé, et comment est-ce que ces

 17   théories pourraient nous aider à déterminer le nombre de corps dans les

 18   fosses communes qui auraient été les corps de victimes tuées au combat à

 19   une distance de 300 ou 400 mètres, par rapport à des victimes qui auraient

 20   été tuées à bout plus portant, comme, par exemple, à 2 mètres, parce qu'il

 21   a dit que des petites différences ne pouvaient pas vraiment être

 22   déterminées. Comme, par exemple, dans la gamme de 1 centimètre à 1 mètre.

 23   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Oui, Madame Hasan.

 24   Mme HASAN : [interprétation] Je voulais obtenir une précision, mais en fait

 25   je crois que ceci a été résolu.

 26   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Merci beaucoup.

 27   Monsieur Lawrence.

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] Je crois que j'ai déjà dit que dans la plupart

Page 7409

  1   de ces cas, les pathologistes n'étaient pas en mesure de déterminer à

  2   quelle distance les coups ont été tirés. Ils n'ont pas pu le déterminer

  3   avec un minimum de certitude.

  4   M. TOLIMIR : [interprétation]

  5   Q.  Je vous remercie. Alors si cela correspond bien à vos affirmations, je

  6   souhaiterais rebondir là-dessus. Premièrement, quelle est la distance entre

  7   la fosse et l'endroit où les coups ont été tirés. Par exemple, est-ce que

  8   des corps ont été apportés d'une zone plus éloignée et placés dans une même

  9   fosse indépendamment de l'endroit où les coups ont été touchés, et cela,

 10   dans le cadre de l'assainissement ?

 11   R.  Je ne comprends pas ce que vous dites lorsque vous dites

 12   "assainissement."

 13   Q.  Je veux dire, lorsqu'on évacue les corps après les combats, et

 14   lorsqu'on les ensevelit dans une fosse commune pour éviter la propagation

 15   de maladies contagieuses, et cetera. Merci.

 16   R.  Oui, je vois. Vous m'avez posé là une question ?

 17   Q.  La question serait la suivante : est-ce qu'on pourrait ensevelir dans

 18   une fosse quelqu'un qui a été tué juste à côté de la fosse ou quelqu'un qui

 19   aurait été apporté de 500 ou de 1 000 mètres de distance du champ de

 20   bataille pour être inhumé dans cette fosse ? Est-ce que cela est une

 21   hypothèse vraisemblable, à savoir que ces deux corps soient inhumés

 22   ensemble ? C'est par cette question que je réagis face à votre première

 23   thèse, comme vous l'avez dit. Merci.

 24   R.  Oui, oui, si je vous réponds à cette question hypothétique, oui, cela

 25   est possible. Les fosses pourraient comporter à la fois les corps apportés

 26   de plus loin. Je pense que souvent lorsqu'il y a eu déplacement des corps

 27   des fosses primaires vers les fosses secondaires, il semblerait

 28   qu'effectivement, cela ait concerné des distances assez importantes. Par

Page 7410

  1   exemple, les cadavres qui ont été apportés de l'entrepôt de Kravica, qui

  2   ont été transférés à Glogova, puis à Zeleni Jadar. Mais je serais étonné

  3   d'apprendre que des victimes de combat aient fait l'objet de tels

  4   déplacements sur de telles distances.

  5   Q.  Oui, Monsieur. Moi aussi, je trouve beaucoup de choses étonnantes.

  6   C'est la raison pour laquelle je vous pose mes questions, pour que vous

  7   m'apportiez des explications pour pouvoir mieux comprendre moi aussi, pour

  8   pouvoir apprendre ce que je ne comprends pas.

  9   Donc votre deuxième thèse, voyons maintenant -- comment expliquer la

 10   présence des ligatures. Est-ce qu'on ne peut pas imaginer que dans une

 11   fosse primaire ou dans une fosse secondaire, on puisse trouver les restes

 12   de quelqu'un qui portent un bandeau ou qui porte les ligatures et qui

 13   aurait été apporté d'un autre lieu ? Je veux dire, si on évacue les corps

 14   sur le champ de bataille, cela peut s'imaginer ? Merci.

 15   R.  Je ne suis pas tout à fait certain de vous avoir compris. Est-ce que

 16   vous pourriez répéter votre question, s'il vous plaît ?

 17   Q.  Merci. Votre deuxième thèse : comment expliquer la présence des

 18   bandeaux pour les yeux. Alors, j'aimerais savoir, est-il possible qu'on ait

 19   fusillé quelqu'un, qu'on ait tué quelqu'un à une distance considérable de

 20   la fosse commune, qu'elle soit primaire ou secondaire, que ce soit à une

 21   distance de 500 mètres, de 1 000 mètres, et que par la suite on apporte le

 22   corps de cet individu au moment où on aura procédé à l'évacuation de

 23   l'ensemble des corps dans un secteur où il y a eu des combats ?

 24   R.  Oui, cela est possible.

 25   Q.  Merci. En fait, tout est possible. Par conséquent, serait-il possible

 26   de mélanger des corps de personnes jeunes, âgées, malades, blessées dans

 27   une même fosse commune si on avait procédé avant cela à l'évacuation des

 28   corps du champ de bataille ? Merci.

Page 7411

  1   R.  Oui. Mais ce que je veux dire par là, c'est qu'on a du mal à imaginer

  2   que ces jeunes, ces personnes âgées, ces malades, ces blessées aient été

  3   des combattants. Parce que la question qui se pose est de savoir comment

  4   ont-ils été tués ? S'ils n'étaient pas des combattants, ce n'est pas au

  5   combat qu'ils ont été tués alors.

  6   Q.  Je vous remercie, Monsieur Lawrence. Mais vous êtes un expert, c'est en

  7   cette qualité-là que je vous interroge. On ramasse des restes sur

  8   l'ensemble du champ de bataille, et dans le cadre d'un combat, il y a eu

  9   deux parties qui se sont opposées. Il est envisageable que les corps

 10   mélangés des victimes des deux parties soient ensevelis ensemble. Comment

 11   peut-on opérer une distinction si quelqu'un a été tué à distance dans le

 12   cadre d'un combat ? Merci de me donner votre opinion, s'il vous plaît.

 13   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Madame Hasan.

 14   Mme HASAN : [interprétation] La question semble se fonder sur un fait

 15   auquel il faudrait renvoyer le témoin pour qu'il puisse répondre à cette

 16   question.

 17   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur Tolimir --

 18   Mme HASAN : [interprétation] En particulier lorsqu'il s'agit des

 19   fosses au front sur le champ de bataille.

 20   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Oui. Monsieur Tolimir, pourriez-vous,

 21   s'il vous plaît, nous renvoyer à une référence précise ?

 22   L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais c'est une question hypothétique que j'ai

 23   posée, Monsieur le Président. Je m'adresse à ce témoin qui est un expert,

 24   c'est en cette qualité-là qu'il peut nous répondre, parce que nous avons ce

 25   cas de figure. Plus concrètement, nous avons dans le secteur de Zvornik, au

 26   moment de la percée de la colonne de Musulmans, des cas où il y a eu des

 27   victimes qui ont été évacuées et ensevelies ensemble avec d'autres

 28   individus. Donc je n'ai pas posé juste une question purement théorique.

Page 7412

  1   J'ai demandé pour que cet expert puisse nous éclairer là-dessus. Merci.

  2   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Madame Hasan.

  3   Mme HASAN : [interprétation] Pour que ce soit tout à fait clair, je précise

  4   aux fins du compte rendu d'audience que rien ne semble prouver ces

  5   affirmations, et s'il s'agit d'une question purement hypothétique, alors je

  6   pense qu'il faudrait qu'on nous le dise clairement.

  7   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur Tolimir, vous venez de citer

  8   le secteur de Zvornik. Vous affirmez, semble-t-il, qu'il y a eu des

  9   personnes qui ont été tuées pendant la percée de la colonne musulmane dans

 10   ce secteur, mais si vous dites cela, alors votre question n'est pas

 11   hypothétique. Donc je ne comprends plus très bien. Vous devriez nous

 12   indiquer clairement si votre question est hypothétique ou non. Si vous vous

 13   référez à des fosses spécifiques, une ou plusieurs, à ce moment-là il

 14   faudrait nous dire précisément desquelles il s'agit.

 15   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci. La donnée que j'ai citée vient du

 16   témoignage qui a porté sur la percée de la colonne de Zvornik, près de

 17   Nezuk, et l'on voit à l'image qu'environ 2 000 personnes ont été tuées, et

 18   les restes de ces individus ont été inhumés dans les mêmes fosses. Mais

 19   maintenant, pour l'ensemble des victimes, on nous dit qu'il s'agit de

 20   personnes qui ont été exécutées, abattues. C'est la raison pour laquelle je

 21   pose ma question à M. Lawrence, parce qu'il se peut qu'il s'agisse des gens

 22   qui ont été tués au combat. Les Juges de la Chambre ont entendu parler de

 23   cela. Peut-être que Mme Hasan n'était pas présente ou n'en a pas souvenir,

 24   mais les Juges de la Chambre ont entendu ce témoignage.

 25   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Mais, Monsieur Tolimir, moi non plus,

 26   je n'ai pas entendu le nom de ce témoin. Peut-être que vous pourriez nous

 27   le citer, et comme ça nous le saurions.

 28   L'ACCUSÉ : [interprétation] J'ai dit que Mlle Hasan ne s'est pas présentée,

Page 7413

  1   mais je pense que nous savons nous, qui sommes, présents dans le prétoire,

  2   très bien de quelle manière il y a eu des victimes, et je cherche de l'aide

  3   auprès de ce témoin qui est qualifié pour nous aider. Or, cela provient, en

  4   fait, de la déposition de M. Janc. Je lui ai posé des questions là-dessus.

  5   Pour l'ensemble des victimes trouvées dans une même fosse, il estimait que

  6   c'étaient des gens relevant d'une seule et même catégorie. Je l'ai

  7   interrogé là-dessus.

  8   Mais, Monsieur le Président, si le Procureur ne souhaite pas qu'on me

  9   réponde à cette question, très bien, cela n'est pas indispensable.

 10   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Ne prenez pas ce chemin-là, Monsieur

 11   Tolimir.

 12   Monsieur Lawrence, vous avez entendu cet échange. Vous pourriez peut-être

 13   nous aider compte tenu du fait qu'il s'agit d'une question hypothétique.

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] Reprenons la question à partir du début. De la

 15   manière dont j'ai compris la question, il s'agissait de savoir la chose

 16   suivante : il est important de savoir à quelle distance les coups ont été

 17   tirés pour pouvoir repérer une distinction entre les combattants et les

 18   non-combattants. Mais je vous ai répondu que je ne pouvais pas déterminer

 19   la distance des coups de feu. Donc je n'ai pas d'éléments d'information qui

 20   vous permettraient de faire cette distinction entre les combattants et les

 21   non-combattants sur la base de la distance de laquelle les coups ont été

 22   tirés.

 23   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Est-il possible de retrouver dans un

 24   même charnier les combattants tués au combat et les non-combattants ?

 25   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, cela est possible. S'il s'agit de

 26   combattants, cependant, on se demande pourquoi chercherait-on à cacher les

 27   restes.

 28   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur le Juge Mindua.

Page 7414

  1   M. LE JUGE MINDUA : Oui, Monsieur le Président.

  2   Monsieur le Témoin, dans la foulée de la question du Président, j'ai deux

  3   petites questions. La première : est-ce qu'il est possible pour vous, en

  4   tant que pathologiste, de dire si les personnes enterrées dans une même

  5   fosse proviennent de camps opposés, les personnes enterrées, bien entendu,

  6   soit au cours de la bataille ou exécutées, mais qui proviendraient de camps

  7   opposés ? Peut-être que ce ne serait pas possible avec les blessures, mais

  8   avec d'autres moyens comme vous avez évoqués, les costumes, les ligaments,

  9   et cetera. Ça, c'est la première question.

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] Premièrement, je voudrais que ce soit tout à

 11   fait clair : j'ai travaillé au dépôt mortuaire et j'ai été présent à

 12   certains moments de l'exhumation. Je me suis rendu à Cancari Road 12, 3 --

 13   excusez-moi, Liplje ainsi que Zeleni Jadar, mais uniquement pour une

 14   journée, et je ne suis pas resté présent la plupart du temps.

 15   Sur certains points, s'agissant de savoir si les corps auraient pu

 16   provenir de différents sites, je pense qu'il faudrait poser cette question

 17   à ceux qui ont travaillé sur les lieux, parce qu'ils sont, je pense, mieux

 18   placés que moi pour formuler des commentaires là-dessus. Cependant, il est

 19   possible qu'on retrouve dans une fosse des combattants et des personnes qui

 20   ont été exécutées.

 21   M. LE JUGE MINDUA : Je pense que vous ne m'avez pas très bien compris,

 22   parce que vous parlez de -- quand je parle de camps opposés, je voudrais

 23   parler de groupes armés opposés.

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] Excusez-moi, je comprends. Le seul commentaire

 25   que je pourrais vous apporter sur la distinction entre les Serbes de Bosnie

 26   ou les Musulmans de Bosnie, ce serait grâce aux objets que nous avons

 27   trouvés près des corps. L'ensemble des objets qui pourrait indiquer un

 28   contexte confessionnel nous permettait de penser que les corps des victimes

Page 7415

  1   que nous avons retrouvés étaient des Musulmans. Je suppose qu'il est

  2   possible qu'il y en ait eu d'autres. Et aussi, par la suite, je pense que

  3   la plupart de ces corps ont été identifiés comme appartenant aux personnes

  4   musulmanes de Srebrenica. Mais là-dessus, je n'ai pas suffisamment

  5   d'informations. Il s'agit de choses qui ont été faites par le TPIY après

  6   que je sois parti.

  7   M. LE JUGE MINDUA : Merci beaucoup, Monsieur le Témoin. Alors, la dernière

  8   question, parce que j'avais parlé de deux. Et là dans votre réponse, vous

  9   abordez déjà la deuxième question. Elle est au transcript, page 36, lignes

 10   2 à 4, où vous avez parlé de 193 cas. Est-ce que dans les 193 -- 183 cas,

 11   vous avez pu constater que c'est des personnes du même groupe armé ou il y

 12   avait aussi des personnes provenant du camp opposé ?

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Excusez-moi, vous voulez dire 883 ?

 14   M. LE JUGE MINDUA : Oui, exactement, Professeur Lawrence.

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Si vous vous reportez à la fin de chacun

 16   des rapports, j'y donne plusieurs éléments supplémentaires permettant

 17   l'identification là où nous avons trouvé d'autres objets qui pourraient

 18   nous indiquer que quelqu'un était un Musulman, donc de confession

 19   musulmane. Il y avait peu d'éléments. Mais ceux que nous avons trouvés,

 20   effectivement, nous permettaient de penser qu'il s'agissait de victimes

 21   musulmanes.

 22   M. LE JUGE MINDUA : D'accord. Pour l'instant, j'accepte la réponse. Merci

 23   beaucoup, Docteur Lawrence.

 24   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] La Juge Nyambe souhaite poser une

 25   question.

 26   Mme LE JUGE NYAMBE : [interprétation] Oui, je voudrais rebondir suite à la

 27   question posée par le Juge Mindua. Page 45, lignes 6 à 8, vous auriez dit :

 28   "Et l'ensemble des objets qui permettaient de tirer des conclusions sur

Page 7416

  1   l'appartenance confessionnelle tendait à montrer qu'il s'agissait de

  2   Musulmans."

  3   Alors, de quels objets voulez-vous parler ?

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] Je voudrais me reporter à mes notes, si je

  5   peux. Je souhaite vous citer le rapport où il est question de Hodzici Road

  6   3, page 20.

  7   Mme HASAN : [interprétation] Il s'agit de la page P926.

  8   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Merci.

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] Et ce, à titre d'exemple, page 20, je crois.

 10   Mme HASAN : [interprétation] Nous retrouverons la page correspondante dans

 11   le prétoire électronique si vous nous citez la page dans votre rapport.

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est la page 20.

 13   Mme HASAN : [interprétation] Page 24 serait la page correspondante dans le

 14   prétoire électronique.

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] Vous avez la pièce B11, par exemple, les

 16   versets du Coran. Voilà, c'est à cela que je pensais lorsque j'ai évoqué

 17   les quelques éléments que nous avons trouvés qui pouvaient indiquer la

 18   confession de l'individu concerné.

 19   Mme LE JUGE NYAMBE : [interprétation] Je vous remercie.

 20   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur Tolimir.

 21   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

 22   M. TOLIMIR : [interprétation]

 23   Q.  Monsieur Lawrence, avec cette dernière question, je ne voulais pas du

 24   tout entrer en polémique avec vous. Je ne conteste pas que dans leur

 25   ensemble, ces victimes étaient des Musulmans. La seule chose que je

 26   voulais, c'était de parler de la manière de déterminer la distance des

 27   coups lorsqu'on parle d'éclats, lorsque j'en ai parlé dans la deuxième

 28   partie, 5 924, page 22 --

Page 7417

  1   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que l'on peut afficher cela, s'il vous

  2   plaît.

  3   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] A quoi vous référez-vous là encore ?

  4   L'ACCUSÉ : [interprétation] A la pièce P924.

  5   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Je vous remercie. C'est bien le

  6   document que nous avons à l'écran. Non, non, excusez-moi. Je me trompe. Il

  7   s'agit de la pièce P924 qu'il nous faut.

  8   L'ACCUSÉ : [interprétation] Page 22.

  9   M. TOLIMIR : [interprétation]

 10   Q.  Nous voyons le dernier paragraphe de la page, page 22, où vous dites :

 11   "La distance peut parfois être déterminée grâce à la présence ou à

 12   l'absence des abrasions dues à la proximité des tirs, parfois il s'agit de

 13   suie ou de traces de poudre non explosée sur les corps. Vu la

 14   squelettisation des restes et vu l'enterrement des objets vestimentaires,

 15   il n'a pas été possible d'estimer la distance de laquelle on a tiré."

 16   Je vous en parle parce que vous affirmez catégoriquement qu'on ne

 17   saurait pas déterminer la distance des coups de feu, or, nous avons déjà vu

 18   certaines estimations. Donc c'est la raison pour laquelle je vous pose la

 19   question : lorsque nous avons des traces de poudre, cela est facile, mais

 20   vous nous dites que seul un cas où vous avez eu la présence de ces traces,

 21   mais qu'en est-il des cas où il n'y a pas de traces ? Merci.

 22   R.  Mais je vous ai répondu plusieurs fois en vous apportant la même

 23   réponse. L'on ne peut pas faire cette estimation.

 24   Q.  Je vous remercie. Je vous présente mes excuses d'avoir amorcé cette

 25   polémique. Mon objectif était uniquement d'apprendre un maximum de choses

 26   par le truchement de votre déposition, et je tiens à vous remercier de

 27   m'avoir expliqué beaucoup d'éléments que je ne comprenais pas précédemment.

 28   Et vous êtes un expert. Donc je vous remercie au nom de la Défense d'être

Page 7418

  1   venu déposer et d'avoir répondu à nos questions aujourd'hui. Et ma partie

  2   du contre-interrogatoire en est terminée.

  3   L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Président, je remercie tous de leur

  4   patience, et je remercie tout particulièrement les Juges de la Chambre de

  5   première instance. Je remercie encore une fois les interprètes et tout le

  6   monde. Merci.

  7   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur Tolimir,

  8   vous êtes très aimable.

  9   Y a-t-il des questions supplémentaires de la part de l'Accusation ?

 10   Mme HASAN : [interprétation] Non, je n'aurai pas de questions

 11   supplémentaires.

 12   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur Lawrence, j'ai le plaisir de

 13   vous annoncer que votre déposition est terminée. Les Juges de la Chambre

 14   souhaitent vous remercier d'être venu. Vous pouvez rentrer. Vous êtes

 15   libre, vous pouvez disposer. Je vous remercie encore une fois d'être venu à

 16   La Haye.

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est moi qui vous remercie, Monsieur le

 18   Président.

 19   [Le témoin se retire]

 20   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur McCloskey.

 21   M. McCLOSKEY : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Bonjour à

 22   tous. Peut-être que je pourrais utiliser ce temps et gagner du temps. Je

 23   vois qu'à la page 47, ligne 4, le général Tolimir a dit, je cite : "Je ne

 24   conteste pas que toutes les victimes étaient musulmanes." Puis-je donc

 25   proposer à M. Tolimir un fait admis sur la base de sa déclaration qu'il ne

 26   conteste pas que toutes les personnes dans les fosses communes pour

 27   lesquelles nous avons trouvé des éléments de preuve sont musulmanes ?

 28   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur Tolimir.

Page 7419

  1   L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Président, je parlais de ce témoin,

  2   de ces cas qu'il a analysés, et il a dit à deux reprises qu'il s'agissait

  3   de 883 cas, et M. le Juge Mindua et moi-même lui avons posé des questions

  4   là-dessus. Je n'ai pas parlé d'autre chose dans sa déposition

  5   d'aujourd'hui. Je ne sais pas pourquoi cette question est posée alors

  6   qu'elle ne comprenait pas d'autre chose. J'ai insisté à deux reprises et

  7   vous m'avez également demandé si j'ai pensé à 183, et j'ai dit que je

  8   voulais parler de 883. M. le Juge Mindua a fait la même chose, et le témoin

  9   a également répondu en parlant de 883 cas également. Merci.

 10   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur McCloskey.

 11   M. McCLOSKEY : [interprétation] Bien sûr, ceci n'a pas répondu à ma

 12   question, mais comme il assure sa propre Défense, je pense que l'Accusation

 13   et les Juges de la Chambre ont le droit de le prendre au mot lorsqu'il dit

 14   quelque chose comme ça, qu'il ne conteste pas que toutes les victimes

 15   étaient musulmanes, à moins qu'il ne souhaite retirer ce qu'il a dit. C'est

 16   maintenant un représentant du greffe et s'il souhaite le retirer, soit,

 17   mais c'est quelque chose qu'il a dit dans son contre-interrogatoire. Nous

 18   devrions savoir s'il maintient ce qu'il a dit ou pas. Il sait qu'il y a eu

 19   très peu de Serbes tués à cette époque-là, et nous avons leurs dossiers des

 20   hôpitaux de Zvornik, qu'ils n'auraient pas placé un Serbe dans une fosse

 21   aussi horrible que celle-ci. Il le sait, et c'est la raison pour laquelle

 22   il a dit cela. Ce qui est tout à fait juste.

 23   La question que je pose est : est-ce qu'il va s'en tenir à ce qu'il a

 24   dit ? Est-ce qu'il va retirer ce qu'il a dit ou est-ce qu'il va maintenir

 25   ses convictions ? En tant que personne se représentant ici devant la

 26   Chambre.

 27   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur Tolimir.

 28   L'ACCUSÉ : [interprétation] Tout est clair au compte rendu d'audience. Je

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  1   souhaite que M. McCloskey ne minimise pas les victimes serbes dont j'ai

  2   parlé à plusieurs reprises pendant ce procès. Je ne souhaite pas maintenant

  3   parler d'un autre point contesté entre moi-même et M. McCloskey. Mais je

  4   souhaite que nous nous en tenions au compte rendu d'audience. Je n'ai pas

  5   parlé de questions générales que soulève maintenant M. McCloskey. Et si

  6   nous empruntons cette voie-là, je peux dire que je retire chaque

  7   déclaration qui ne parle pas de victimes serbes à Srebrenica et autour de

  8   Srebrenica.

  9   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur McCloskey.

 10   M. McCLOSKEY : [interprétation] Merci. Je crois que nous ne pouvons pas

 11   aller plus loin sur cette question-là, me semble-t-il. J'accepte cette

 12   réponse pour ce qu'elle est. Le témoin suivant sera M. Egbers, et la

 13   poursuite de sa déposition, nous devons avoir un interprète néerlandais.

 14   Les interprètes ne le sont pas aujourd'hui. Nous avons terminé un petit

 15   plus tôt que prévu, et je suis désolé de dire que nous n'avons pas de

 16   témoin maintenant.

 17   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur McCloskey, qu'en est-il des

 18   deux autres témoins, M. Blaszczyk et Mme Gallagher, les deux autres témoins

 19   pour cette semaine ?

 20   M. McCLOSKEY : [interprétation] Je sais que M. Thayer est avec M. Blaszczyk

 21   en ce moment. Ils se sont penchés sur la déposition pour vérifier qu'il n'y

 22   ait pas de doublons avec ce qu'a dit Mme Gallagher. Parce qu'il y a cette

 23   vidéo que Mme Gallagher vous a montrée, et c'est un expert, lui, sur cette

 24   question, il peut identifier les différents éléments sur ce trajet. Et je

 25   sais que M. Thayer travaille là-dessus et qu'il dit travailler encore lors

 26   de la dernière pause, et Mme Gallagher, en ce moment-là, travaille sur sa

 27   déposition pour le livre d'identification des Musulmans. Je n'ai pas encore

 28   fixé de date pour elle à cet égard, mais je crois que cela la prendrait de

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  1   court, me semble-t-il, si elle devait venir cet après-midi. Je ne

  2   m'apprêtais pas à faire cela. Quelquefois, je le fais lorsque j'anticipe

  3   sur une pause comme celle-ci, mais dans ce cas-ci je ne l'ai pas fait,

  4   Monsieur le Président.

  5   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur McCloskey, la situation

  6   n'est pas du tout satisfaisante. Si nous devions lever l'audience

  7   aujourd'hui, nous perdrions une heure et demie de temps d'audience, voire

  8   plus d'une heure. Je crois que l'Accusation devait avoir une heure pour

  9   l'interrogatoire principal, vous avez utilisé 40 minutes, et la même chose

 10   au niveau de la Défense. Et au nom des Juges de la Chambre, je souhaite

 11   vous exprimer ma reconnaissance, et je me tourne vers les deux parties pour

 12   leur dire que dans l'éventualité d'un interrogatoire ou contre-

 13   interrogatoire qui se termine plus tôt, vous devriez toujours avoir un

 14   témoin prêt dans l'antichambre.

 15   M. McCLOSKEY : [interprétation] En général, ceci correspond aux consignes

 16   que je donne à mon équipe, mais nous avons tenu compte, alors je ne sais

 17   pas. Le général nous a parlé de trois heures mais il a sous-estimé son

 18   temps. Et je suis heureux de constater qu'il n'a pas consacré autant de

 19   temps en présence de ce pathologiste, mais nous nous étions fondés sur ces

 20   calculs-là. C'est la raison pour laquelle je n'ai pas préparé quelqu'un

 21   d'autre.

 22   Il faut prendre les gens au mot, mais je n'en veux absolument pas au

 23   général Tolimir d'avoir utilisé moins de temps. Bien sûr, il s'agit de

 24   quelque chose que je connais fort bien et je sais que c'est très important

 25   pour les Juges de la Chambre, et je vais signaler ceci à mon équipe.

 26   M. Thayer prépare ces témoins qui ont reçu des injonctions de comparaître.

 27   Il faut des dates évidemment pour ces témoins-là. Et comme vous le savez,

 28   nous ne sommes pas dans un système où nous pouvons rapidement passer de

Page 7422

  1   l'un à l'autre. Et pour ce qui est d'un des témoins, nous ne savons pas si

  2   cette personne est disposée à coopérer ou pas, et plus nous nous

  3   rapprochons de ces personnes, plus ceci semble plus clair. C'est quelqu'un

  4   qui est lié ou qui a un lien avec les Skorpions. La dernière personne vient

  5   de recevoir sa notification, et actuellement nous sommes en train d'établir

  6   des visas et des passeports. Nous allons les faire venir en temps, en

  7   heure, nous l'espérons, mais pour l'instant, c'est assez difficile encore

  8   de les faire venir aux dates prévues, et je vous tiendrai informés heure

  9   après heure. Parce qu'il s'agit un peu de contraintes de temps qui sont en

 10   train de devenir très importantes pour nous.

 11   Moi-même, je dois prendre la route demain pour aller rencontrer

 12   personnellement des témoins qui vivent en Europe pour les convaincre de

 13   venir ici, certains témoins survivants, et des témoins du Bataillon

 14   néerlandais, et qui m'ont dit qu'"ils y sont allés déjà plusieurs fois,

 15   trois, quatre fois. Je ne peux plus revenir." Et c'est la première fois que

 16   j'entends parler de cela. Ça fait douze ans que je remplis ces fonctions,

 17   donc je vais prendre la route pour essayer de combler ces fossés, et

 18   j'espère revenir avec de bonnes nouvelles. Mais au bureau du Procureur,

 19   nous n'avons pas encore dû envoyer des injonctions de comparaître à des

 20   survivants d'exécutions en masse. J'espérais ne pas pouvoir le faire, mais

 21   il y a des témoins victimes du Bataillon néerlandais qui souffrent du

 22   syndrome post-traumatique.

 23   Et j'espère que ce n'est pas quelque chose que je devrai faire, mais

 24   avec M. Thayer, nous allons vous tenir informés heure par heure. La

 25   situation a empiré pour M. Thayer et moi-même. Je ne souhaite absolument

 26   pas qu'il y ait de temps perdu dans cette affaire.

 27   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur McCloskey, je n'avais pas

 28   l'intention de vous critiquer, mais nous avons entendu votre argument sur

Page 7423

  1   votre estimation de l'ensemble du procès, il y a 15 jours, me semble-t-il,

  2   et nous devons utiliser le temps d'audience au mieux. Par conséquent, je

  3   crois que les Juges de la Chambre sont tout à fait au courant des problèmes

  4   qui sont les vôtres, et je comprends très bien, je comprends tout ce que

  5   vous venez de nous dire. Si, par exemple, une victime, un survivant n'est

  6   pas disposé à venir témoigner dans le prétoire, nous devrions à ce moment-

  7   là envisager une visioconférence et un témoignage par ce biais-là. Mais

  8   vous connaissez toutes ces possibilités qui s'offrent à nous.

  9   Mais vous avez encore ces témoins qui comblent le fossé, si je puis

 10   dire. Et c'est ainsi qu'on peut l'appeler, un témoin qui remplit le fossé

 11   ou le trou lorsqu'il y en a un dans le calendrier, et ceux qui ont été

 12   prévus pour cette semaine, bien, c'est malheureux, mais s'il n'est pas

 13   possible de citer un de ces témoins à la barre maintenant, je le regrette,

 14   nous ne pouvons rien y faire. Mais nous serions heureux qu'à l'avenir vous

 15   puissiez éviter la situation qui est celle d'aujourd'hui.

 16   Les Juges de la Chambre apprécient toujours quand les parties

 17   terminent leur interrogatoire et contre-interrogatoire plus tôt que prévu,

 18   comme cela est arrivé aujourd'hui. Ceci est toujours très utile, eu égard à

 19   la rapidité du procès, mais nous devrions toujours avoir un témoin prêt à

 20   intervenir si vous avez, comme aujourd'hui, un trou dans votre calendrier.

 21   M. McCLOSKEY : [interprétation] Oui, je comprends fort bien, Monsieur le

 22   Président. Nous allons faire de notre mieux.

 23   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Très bien. Je vous remercie.

 24   Y a-t-il d'autres questions que vous souhaitez aborder ?

 25   Si cela n'est pas le cas, nous devons lever l'audience pour aujourd'hui,

 26   nous reprendrons demain matin à 9 heures dans ce même prétoire.

 27   L'audience est levée.

 28   --- L'audience est levée à 17 heures 28 et reprendra le mardi 9 novembre

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  1   2010, à 9 heures 00.

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