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1 Le lundi 6 juin 2011
2 [Audience publique]
3 [L'accusé est introduit dans le prétoire]
4 --- L'audience est ouverte à 14 heures 16.
5 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Bonjour à tous et toutes. Le témoin
6 suivant est-il prêt, Monsieur Vanderpuye ?
7 M. VANDERPUYE : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, tout à fait.
8 Bonjour, Madame, Messieurs les Juges.
9 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Faites entrer le témoin dans le
10 prétoire, s'il vous plaît.
11 [Le témoin est introduit dans le prétoire]
12 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Bienvenue dans le prétoire, Monsieur.
13 Veuillez lire la déclaration solennelle qui est sur le carton que l'on vous
14 présente maintenant.
15 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la
16 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.
17 LE TÉMOIN : SREDOJE SIMIC [Assermenté]
18 [Le témoin répond par l'interprète]
19 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Je vous remercie. Veuillez vous
20 asseoir et mettez-vous à l'aise.
21 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.
22 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Comme vous le savez, c'est
23 l'Accusation qui va mener son interrogatoire principal et qui va vous poser
24 des questions.
25 Monsieur Vanderpuye.
26 M. VANDERPUYE : [interprétation] Merci encore, Monsieur le Président.
27 Bonjour à tous et toutes dans le prétoire.
28 Interrogatoire principal par M. Vanderpuye :
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1 Q. [interprétation] Bonjour à vous, Monsieur Simic.
2 R. Bonjour à tous.
3 Q. Monsieur Simic, je sais que vous avez déjà témoigné auparavant et je
4 souhaitais simplement vous rappeler que s'il y a une question qui n'est pas
5 claire à vos yeux, faites-le-moi savoir de façon à ce que nous puissions
6 mieux nous comprendre, simplement pour essayer de parler lentement
7 également, que vous le feriez à l'accoutumée, de façon à ce que les
8 interprètes aient la possibilité de traduire vos propos de façon exacte, et
9 les parties également.
10 Alors, je vais commencer par vous demander si vous avez bien témoigné
11 dans l'affaire le Procureur contre Vujadin Popovic et consorts au mois de
12 juin 2007, le 1er juin 2007 ?
13 R. En 2007.
14 Q. Avez-vous eu l'occasion de revoir votre déposition avant de venir dans
15 le prétoire aujourd'hui ?
16 R. Oui.
17 Q. Et après avoir revu votre déposition, maintenez-vous celle-ci ?
18 R. Oui, bien sûr.
19 Q. Est-ce que cette déposition est le reflet fidèle et exact de ce que
20 vous diriez aujourd'hui si on vous posait les mêmes questions aujourd'hui ?
21 R. Oui. Il n'y a rien à ajouter ni à enlever à ce que j'ai déjà dit au
22 moment où j'ai répondu aux questions.
23 M. VANDERPUYE : [interprétation] Monsieur le Président, je demande le
24 versement au dossier, s'il vous plaît, la déclaration préalable de M.
25 Simic, le numéro 65 ter 6588.
26 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Ce document sera versé au dossier.
27 Un instant, s'il vous plaît.
28 M. LE GREFFIER : [interprétation] Le numéro 65 ter 6588 aura la cote P2266.
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1 M. VANDERPUYE : [interprétation] Je souhaite demander au versement au
2 dossier des pièces qui ont été versées au dossier par le truchement du
3 témoin dans les audiences précédentes. Il s'agit du numéro 65 ter 6588
4 [comme interprété] et 6650 [comme interprété] et 453 [comme interprété].
5 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Ces trois pièces à conviction
6 connexes seront versées au dossier.
7 M. LE GREFFIER : [interprétation] Le numéro 65 ter 6589 aura le numéro
8 P2267.
9 Le numéro 65 ter 6590 recevra la cote P2268.
10 Et le numéro 65 ter 454 recevra la cote P2269. Merci.
11 M. VANDERPUYE : [interprétation] Monsieur le Président, j'ai un bref résumé
12 de la déclaration préalable du témoin que je souhaite lire dans le compte
13 rendu d'audience.
14 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Allez-y, je vous en prie.
15 M. VANDERPUYE : [interprétation] Merci.
16 M. Simic est né en 1952 dans le village de Vrsac, en Vojvodine, dans la
17 République de Serbie. Il est allé à l'Université de Zagreb, il a obtenu son
18 diplôme de droit et a commencé sa carrière dans le journalisme au mois de
19 mars ou avril 1975. A l'exception de brèves exceptions, il a toujours
20 travaillé en tant que journaliste.
21 En 2002, M. Simic travaillait pour un journal appelé "Svedok", qui
22 était un hebdomadaire publié à Belgrade. Le 29 octobre de cette année, il a
23 publié un article dans "Svedok" dans lequel il reprenait une interview avec
24 le colonel de la VRS, Ljubisa Beara.
25 Quelques mois avant la publication de l'acte d'accusation du colonel
26 Beara, M. Simic avait envisagé une interview avec lui, en particulier eu
27 égard à son rôle et au poste qu'il occupait à l'époque de l'opération de
28 Srebrenica.
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1 M. Simic était alors rédacteur en chef de l'armée et des questions de
2 sécurité à "Svedok", et a utilisé ses contacts pour le mettre en contact
3 avec le colonel Beara, puisqu'il ne le connaissait pas avant. Au moment où
4 l'acte d'accusation de M. Simic a été rendu public, il a intensifié ses
5 efforts et a essayé d'organiser cette interview par le truchement de M.
6 Beara, qui était d'accord sur ce point sous trois conditions :
7 premièrement, que M. Simic vienne seul à l'endroit où devait se dérouler
8 l'interview; deuxièmement, qu'il n'y aurait pas de photographies; et
9 troisième point, que M. Simic devait promettre de ne pas divulguer
10 l'endroit où l'interview aurait lieu.
11 M. Simic a interviewé le colonel Beara pendant deux heures environ,
12 deux ou trois jours après que l'acte d'accusation ait été rendu public.
13 Quarante cinq à 50 % des éléments recueillis dans l'interview ont été
14 reproduits dans l'article, ce qui comprenait toutes les informations
15 fournies par Beara à propos des événements de Srebrenica, ce qui était,
16 bien sûr, ce sur quoi était concentré M. Simic.
17 M. Simic a dit dans sa déposition que l'article était le plus
18 authentique possible, que les réponses étaient les mêmes que celles données
19 par M. Simic et qu'il y avait même parfois quelques redites. Au moment d'en
20 terminer, M. Beara n'a pas accepté ou a refusé de revoir les propos qu'il
21 avait tenus lors de l'interview. M. Simic n'a plus jamais revu le colonel
22 Beara. Cependant, après la publication de l'article, l'intermédiaire qui
23 l'avait mis en contact avec Beara a informé M. Simic que Beara était
24 extrêmement satisfait de la teneur de l'article, et il n'a soulevé aucune
25 objection quant à sa teneur.
26 Même si pendant l'interview le colonel Beara a prétendu, entre
27 autres, qu'il n'était pas sur le lieu au moment des événements de
28 Srebrenica, que la VRS n'avait commis aucun meurtre en masse à Srebrenica,
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1 a déclaré qu'il s'agissait de quelque chose qui n'avait "aucun sens", et
2 que lui, Beara, était "convaincu" que Srebrenica a été l'œuvre des
3 Musulmans à des fins de propagande. M. Simic a dit dans sa déposition qu'il
4 avait l'impression que Beara avait dit la vérité pendant l'interview. M.
5 Simic a également remarqué que pendant qu'il enregistrait la totalité de
6 l'interview, il n'a pas pu remettre la main sur la bande qui avait peut-
7 être été mise de côté ou détruite.
8 J'en ai terminé avec mon résumé et j'ai quelques questions à poser à
9 M. Simic, s'il vous plaît.
10 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Je vous en prie, allez-y.
11 M. VANDERPUYE : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Je souhaite
12 avoir dans le prétoire électronique le P2669.
13 Q. Tout d'abord, Monsieur Simic, reconnaissez-vous ce que vous voyez sur
14 nos écrans dans le prétoire électronique ?
15 R. Oui, tout à fait, il s'agit du titre de l'article de l'hebdomadaire
16 dans lequel cet article a été publié. C'est la page de couverture.
17 M. VANDERPUYE : [interprétation] Je souhaite aller à la page 2 en B/C/S,
18 s'il vous plaît. Nous allons garder la même page en anglais.
19 Q. Qu'est-ce que nous avons ici à l'écran dans la deuxième page en B/C/S ?
20 R. Il s'agit d'une des deux pages où est publié l'interview avec Beara. Il
21 s'agissait en fait d'un article sur deux pages.
22 Q. Bien, merci.
23 M. VANDERPUYE : [interprétation] Je souhaite maintenant passer à la page 7
24 de l'anglais. Je crois que nous devrons passer à la page 3 en B/C/S.
25 Q. J'ai quelques questions à ce propos à vous poser.
26 Il faudrait que nous commencions par la page -- non, nous avons la bonne
27 page.
28 Vers le bas de la page, vous verrez, c'est une question que vous avez posée
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1 à M. Beara, question dans laquelle vous lui demandez :
2 "Est-ce que vous essayez de dire que la VRS n'a pas commis de crimes en
3 masse à Srebrenica ?"
4 Voyez-vous cette question ?
5 R. Oui.
6 Q. Et concernant cette question-là, M. Beara, le colonel Beara répond en
7 disant qu'ils ne l'ont pas fait, "ils", en entendant par-là la VRS, et
8 qu'ils disposaient d'une liste des endroits où se trouvaient les fosses
9 communes.
10 "Ils indiquent qu'il y avait 800 dans une des fosses et 2 000 dans une
11 autre, et 3 000 dans une autre."
12 Et il dit :
13 "Et ils avancent qu'il s'agit essentiellement de fosses primaires et
14 secondaires, en alléguant que nous avons déplacé les corps.
15 "Cela n'a aucun sens.
16 "Il n'est absolument pas possible de se livrer à ces meurtres à une
17 telle échelle en présence des représentants des Nations Unies, quand bien
18 même quelqu'un aurait eu une idée aussi insensée."
19 Ensuite, il dit :
20 "De toute façon pour tuer autant de gens en si peu de temps, il
21 faudrait engager une brigade."
22 Pour ce qui est de cette réponse, est-ce que par rapport à cette
23 réponse que vous avez consignée, s'agit-il pour l'essentiel des propos de
24 M. Beara ?
25 R. Oui, tout à fait. Parce que, comme vous pouvez le constater, c'est une
26 question très sensible, et je ne pense pas que M. Beara réagisse et se
27 serve de la Loi sur l'information au public en Serbie, et si j'avais mal
28 interprété ses propos il aurait réagi ou si j'avais dit quelque chose
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1 d'erroné.
2 Q. Mais vous savez, bien sûr, aujourd'hui, que le colonel Beara a été
3 condamné pour certains crimes qui étaient en rapport avec ces meurtres,
4 n'est-ce pas ?
5 R. Oui. Mais je ne sais pas si sa condamnation est définitive, et si sa
6 peine a été appliquée.
7 Q. Et vous saviez également que les membres de la Brigade de Zvornik ont
8 également été condamnés par rapport ou en ce qui concerne leurs rôles
9 respectifs dans les meurtres en masse de Musulmans dans le cadre des
10 événements à Srebrenica, n'est-ce pas ?
11 R. Oui.
12 Q. Alors, je vais vous demander de regarder la page 8 de cet article, s'il
13 vous plaît. Je vais vous demander maintenant de bien vouloir regarder, s'il
14 vous plaît, la réponse M. Beara à une de vos questions où vous lui demandez
15 :
16 "Est-ce que cela signifie que Srebrenica était, en réalité, l'œuvre des
17 Musulmans à des fins de propagande ?"
18 Est-ce que vous voyez ceci dans le texte en B/C/S ?
19 R. Oui, je le vois.
20 Q. Et en réponse à cette question, il dit, comme vous l'avez dit dans
21 votre article :
22 "Je suis convaincu que c'était le cas. Je n'en connais pas la raison, mais
23 il est monstrueux de tuer son propre peuple pour faire la guigne à
24 quelqu'un."
25 C'est exactement ce qui s'est passé à Markale. D'après vos articles, le
26 colonel Beara semble indiquer que les meurtres qui se sont produits étaient
27 en rapport avec les événements de Srebrenica et ont été perpétrés par les
28 Musulmans contre leur propre peuple ?
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1 R. D'après mes souvenirs, cette interview avec le colonel Beara s'est
2 déroulée en 2002, donc ça fait huit ou neuf ans, je comprends très bien,
3 mais je ne me souviens peut-être pas de tout. Mais ce dont je me souviens,
4 je me souviens de mes impressions, à savoir que M. Beara a prétendu qu'à
5 l'époque des faits au moment des événements de Srebrenica, il n'était pas à
6 cet endroit-là, mais il était plutôt dans la région de Bihac; et,
7 deuxièmement, il voulait dire ou prouver, même s'il ne pouvait pas, mais il
8 ne cessait d'insister, et c'est quelque chose que j'ai omis parce qu'il ne
9 cessait d'insister dessus, et il disait que tout avait été l'œuvre des
10 Musulmans, parce qu'il s'agissait d'une propagande. Et si je peux
11 interpréter ses propos librement maintenant, il a dit qu'il y a eu des
12 victimes mais que le nombre des victimes n'avait rien à voir avec le
13 chiffre diffusé par les médias musulmans et certains médias internationaux
14 en Europe et dans d'autres pays du monde.
15 Q. Lorsque vous parlez de "victimes", est-ce que vous parlez de victimes
16 de la VRS, ou lorsque vous parlez de "victimes", vous voulez parler de
17 victimes dans le sens qu'il s'agit de Musulmans qui auraient commis les
18 crimes contre des Musulmans ?
19 R. Non, non. A la manière dont j'ai compris ses propos, il a dit qu'il y
20 avait des victimes mais que leurs nombres étaient bien inférieurs aux
21 nombres avancés par les médias. Et il est vrai que c'est quelque chose que
22 l'on peut voir dans l'interview, parce que M. Beara avance cela à deux
23 reprises, il prétend que les Bosniens, ou les Musulmans, que leurs forces
24 armées sont entrées en conflit mutuellement, et pour autant que je m'en
25 souvienne, je crois qu'il a également apporté la preuve de cela. Cela
26 venait d'un officier français haut gradé. Il a donc apporté la preuve de
27 cela - et c'est ce que j'ai publié dans mon article - il a dit que les
28 Musulmans et les membres de leurs forces armées avaient commencé à avoir un
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1 différend entre eux, ils n'étaient pas d'accord, et donc il y a eu des
2 victimes à cause de cela.
3 Q. A l'époque où il vous a dit ça pendant l'interview, est-ce ainsi que
4 vous aviez compris les événements qui s'étaient déroulés en 1995 ?
5 R. Bien, je ne peux pas vous dire comment les événements avaient évolué,
6 étant donné que je n'étais pas dans la région à l'époque. Je disposais
7 d'informations sur des événements qui s'étaient déroulés à Srebrenica, Zepa
8 et Bratunac, et dans cette partie-là de la Bosnie-Herzégovine, mais les
9 informations dont je disposais venaient des médias et de la presse écrite.
10 Je n'avais aucune raison de ne pas faire confiance à M. Beara, d'autant
11 qu'il semblait assez convaincant. Je pouvais voir que les accusations
12 lancées contre lui par certaines personnes comme le général Krstic,
13 Vojislav Seselj, et certains médias musulmans, le touchaient vraiment. Et
14 je me souviens du moment où il a quitté son appartement, et à ce moment-là,
15 il souhaitait donner son point de vue et il souhaitait dire la vérité sur
16 tout ce qui s'y était passé.
17 Q. Très bien. Alors, page 6 en anglais. Et bas de la page 6 en anglais.
18 "Vous avez participé à l'opération des forces serbes qui sont entrées à
19 Srebrenica ?"
20 C'était une des questions qui a été posée. Et nous trouverons la
21 réponse en haut de la page 7, et donc, dans ma question, vous trouverez la
22 réponse en page 7 et vous faites référence à la réponse du colonel Beara
23 qui dit :
24 "Non."
25 Et vous dites que vous ne saviez pas qu'il y avait des préparatifs de
26 la part des forces serbes et qu'ils préparaient cette opération pour entrer
27 à Srebrenica. "Ma mission ne consistait pas à participer aux opérations et
28 aux préparatifs de l'opération militaire. Les opérations de l'état-major
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1 s'occupaient de cela. Moi, je m'occupais du renseignement et du contre-
2 renseignement. J'étais un officier de contre-renseignement. Lorsque
3 l'opération a commencé, je me trouvais sur le front de Bihac."
4 Est-ce que ce que j'ai cité est exact ?
5 R. Oui, oui, tout à fait.
6 Q. Ensuite, il poursuit en disant :
7 "Je suis revenu une fois que tout était terminé", et vous dites, "un jour,
8 lorsque j'ai emmené du courrier au général Mladic, j'ai vu un nombre
9 important d'autobus sur la route qui allait de Bratunac à Zepa et
10 Srebrenica."
11 Et il dit que :
12 "Les véhicules étaient parvenus de toutes les régions de Bosnie pour
13 transférer les Musulmans de Tuzla en passant par Kalesija."
14 Il dit que :
15 "La FORPRONU garantissait la sécurité des convois."
16 Et ensuite, il dit que :
17 "Des récits commençaient à être disséminés dans la presse. On a
18 commencé à parler des crimes et de meurtres en masse des Musulmans."
19 Je souhaite vous poser une question par rapport à cela : lui avez-vous posé
20 une question sur la connaissance qu'il avait du transfert en masse de ces
21 Musulmans depuis Srebrenica ? Lui avez-vous posé cette question pendant
22 l'interview avec lui ?
23 R. Non, je ne lui ai pas posé une telle question.
24 Q. Est-ce que c'est parce que vous estimiez que le transfert de ces
25 individus, de ces personnes, que ce transfert en masse depuis Srebrenica,
26 après que l'armée soit entrée dans l'enclave, vous estimiez qu'il
27 s'agissait de quelque chose qui était à part, qui était distinct de
28 l'opération de Srebrenica, ou y a-t-il une autre raison pour laquelle vous
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1 ne lui avez pas posé la question ?
2 R. Non, ce n'était pas pour cette raison-là. Si je regarde la question et
3 la réponse fournies par M. Beara aujourd'hui, et cela m'était apparu
4 clairement également lorsque j'ai déposé dans l'affaire Popovic, je n'ai
5 pas travaillé de façon professionnelle et j'aurais dû lui poser une autre
6 question lorsqu'il m'a dit "un jour." Et il n'a pas précisé le jour où il a
7 vu entrer ces autobus ou ces camions.
8 Alors, pour ce qui est du transfert de ces personnes et des convois,
9 c'est quelque chose que j'ai vu à la télévision. Je sais que ceci est
10 arrivé. M. Mladic était là également, d'après mon souvenir. Et il avait
11 offert des garanties à la population, les femmes et les enfants. Je me
12 souviens encore de ces images parce qu'elles sont gravées dans mon esprit,
13 et parce que ces images ont été diffusées dans les médias à l'époque. Quoi
14 qu'il en soit, il est clair que M. Beara, d'une manière ou d'une autre,
15 avait détourné mon attention, parce que je lui avais demandé où il se
16 trouvait à l'époque, et il a répondu très brièvement pour dire qu'il était
17 sur le front de Bihac, et il a répondu en disant qu'il avait vu les autobus
18 et les camions. Je n'ai pas insisté là-dessus pour qu'il précise cela. Et
19 lorsqu'il a apporté du courrier, j'aurais dû lui demandé à quelle date il a
20 apporté du courrier. Donc, ceci n'a pas été éclairci.
21 Q. Alors, est-ce qu'il vous a fait part de ce qu'il savait à ce sujet, à
22 savoir le transfert de ces personnes de l'enclave ? Vous a-t-il dit comment
23 ceci s'est passé, qui a participé à cela, indépendamment des questions que
24 vous lui avez demandées ? Est-ce qu'il a de son plein gré proposé une
25 réponse ?
26 R. Non. Dans mon souvenir, il n'a pas essayé d'expliquer dans le moindre
27 détail pourquoi ces personnes avaient été transférées. Ces personnes âgées,
28 ces femmes et ces enfants de Srebrenica, vers d'autres endroits. Il ne l'a
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1 pas expliqué.
2 Q. A-t-il dit quoi que ce soit à propos des hommes qui n'ont pas été
3 emmenés avec ces femmes, ces enfants et certains vieillards ? Vous a-t-il
4 dit ce qui était arrivé aux hommes qui se trouvaient aussi dans l'enclave,
5 et pourquoi ils ne sont pas partis avec les femmes, les enfants et certains
6 vieillards ? En a-t-il dit le moindre mot ?
7 R. Non. Il n'en a pas parlé comme cela. Je pense que cette partie de
8 l'entretien a été publiée, dans laquelle M. Beara affirme que les unités de
9 Naser Oric se sont, pour ainsi dire, retirées de Srebrenica et ont pris un
10 Praga avec les personnes qui se trouvaient à bord. Il a dit que les
11 officiers musulmans de Bosnie avaient demandé à ce qu'on les laisse passer
12 de façon à ce que l'équipage ne soit pas mis en péril, et ils étaient
13 Serbes.
14 Je crois qu'il fait état d'un corps en disant que l'unité en question
15 a réussi à quitter la zone encerclée. Et il a dit également que le général
16 Delic en personne a procédé à une inspection de cette unité à Tuzla après
17 le repli. Je crois l'avoir dit dans l'entretien. Ce qui signifie que la
18 plupart des hommes en âge de combattre et armés auraient réussi à quitter
19 les lieux. En tout cas, c'est son affirmation.
20 Q. Bien.
21 Vous voyez dans votre article que vous y avez écrit que le colonel
22 Beara avait dit que :
23 "Des histoires ont commencé à circuler dans la presse, même dans nos
24 propres journaux, faisant état de crimes et de tueries de masse des
25 Musulmans."
26 Vous-même, donc, avez fait état il y a un instant du fait que vous
27 étiez informé que de telles histoires circulaient ?
28 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Pouvez-vous nous préciser de quelle
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1 partie vous parlez.
2 M. VANDERPUYE : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. C'est sur
3 l'écran. En fait, c'est la dernière phrase --
4 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Oui, ça y est. Ça y est, je le vois.
5 M. VANDERPUYE : [interprétation] -- du premier paragraphe.
6 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Oui, merci beaucoup. Je le vois.
7 M. VANDERPUYE : [interprétation]
8 Q. J'aimerais que l'on examine un certain nombre d'articles avec vous.
9 Nous allons commencer par le document 7418 de la liste 65 ter.
10 Il s'agit d'un article, Monsieur le Président, qui ne fait pas partie
11 de la liste d'origine 65 ter de l'Accusation, mais qui a un rapport évident
12 avec les questions qui sont abordées dans l'article et avec la déposition
13 du témoin, puisque ce document concerne les événements qui ont fait l'objet
14 de publication relative aux événements survenus à Srebrenica.
15 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Maître Gajic.
16 M. GAJIC : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, comme vous l'avez
17 sans doute remarqué, pour le contre-interrogatoire de ce témoin, nous avons
18 estimé devoir nous réserver la possibilité de faire objection à la demande
19 de l'Accusation consistant à inclure des documents de la liste 65 ter, à
20 savoir les documents 7416, 7418 et 7419 de cette liste.
21 Un certain nombre de raisons expliqueront notre objection. Je voulais
22 simplement vous rappeler la pratique de la Défense qui consiste à éviter,
23 dans toute la mesure du possible, de faire objection à l'introduction de
24 nouveaux documents, en dépit du fait que certains ne figurent pas sur la
25 liste 65 ter de départ. Toutefois, ce sont des articles de journal de M.
26 Block, et nous ne voyons pas pourquoi ces documents devraient être
27 présentés à ce témoin-ci. D'abord, il n'en est pas fait mention dans le
28 résumé 65 ter de l'Accusation, il n'est pas dit que l'Accusation souhaitait
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1 utiliser ces articles. La déposition du témoin doit se limiter aux
2 circonstances dans lesquelles est survenu l'entretien avec M. Beara, et
3 rien d'autre.
4 La déposition de ce témoin dans l'affaire Popovic --
5 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur Gajic, je dois vous
6 interrompre. J'aimerais demander à l'accusé, à M. Tolimir, s'il a une
7 objection à faire, auquel cas il pourra vous demander d'intervenir devant
8 la Chambre. Mais je crois qu'ici nous dépassons le cadre normal de cette
9 procédure.
10 Monsieur Tolimir, je me tourne donc vers vous. Faites-vous objection à ce
11 que l'on ajoute à la liste 65 ter ces trois pièces, la liste 65 ter de
12 l'Accusation ?
13 Vous êtes libre de le faire. Vous avez tout loisir de le faire. C'est
14 un droit qui vous appartient. Vous pouvez demander à la Chambre, ce
15 faisant, d'entendre Me Gajic sur ce point.
16 Quelle est votre position ?
17 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Je tiens à saluer
18 toutes les personnes présentes dans ce prétoire, et que la volonté de Dieu
19 soit faite dans le cadre de cette procédure. Je voudrais saluer M. Simic.
20 Et je demanderais également à ce que l'on n'accepte aucune propagande ici.
21 Le témoin s'est exprimé sur la question.
22 L'Accusation tente maintenant à ce que l'on présente ces documents.
23 Si ces documents étaient reçus, l'on pourrait aussi présenter un grand
24 nombre d'ouvrages musulmans qui parlent également des événements de
25 Srebrenica, et nous pourrions demander à ce qu'ils soient versés au dossier
26 de même. Je pense que mon assistant juridique doit être autorisé à exposer
27 la position de la Défense.
28 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Pour préciser les choses, nous ne
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1 sommes pas en train de nous demander si ces documents doivent être versés
2 au dossier. Pour l'instant, nous parlons de la requête formulée par le
3 Procureur et consistant à ajouter ces documents à la liste 65 ter, ce qui
4 est autre chose.
5 Je comprends votre dernière phrase. Il s'agit, me semble-t-il, d'une
6 requête consistant à ce que Me Gajic soit autorisé à plaider sur cette
7 question devant la Chambre. Ai-je bien compris ?
8 L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Merci.
9 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur Vanderpuye, avez-vous une
10 position sur la question ?
11 L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui. Permettez-lui de bien vouloir achever ses
12 remarques.
13 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur Vanderpuye, s'agissant de la
14 position de Me Gajic, qui souhaite s'adresser à la Chambre, avez-vous
15 quelque chose à dire à ce sujet ?
16 M. VANDERPUYE : [interprétation] Oui. Je pense qu'il est tout à fait
17 approprié que ces documents soient ajoutés à la liste 65 ter.
18 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Non, je voudrais savoir si vous avez
19 un avis sur la requête de M. Tolimir consistant à autoriser Me Gajic à
20 prendre la parole et à s'exprimer devant la Chambre.
21 M. VANDERPUYE : [interprétation] Non. Ça ne pose aucune difficulté. Si
22 c'est effectivement le souhait et le vœu de l'accusé, je ne m'y oppose pas.
23 [La Chambre de première instance se concerte]
24 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] La raison pour laquelle je vous
25 posais la question, Monsieur Tolimir, c'est précisément la décision du 28
26 avril 2010 de cette Chambre. La Chambre avait alors décidé que le droit
27 d'intervention, le droit d'audience de M. Gajic, se limitait à des
28 questions juridiques soulevées dans le cadre de la procédure, après demande
Page 15100
1 explicite de l'Accusation et autorisation de la Chambre.
2 C'est la raison pour laquelle j'ai interrompu Me Gajic. La Chambre
3 estime désormais que Me Gajic peut être entendu.
4 Je donnerai donc d'abord la parole à Me Gajic, afin qu'il poursuive
5 l'exposé de son objection. Suite à quoi M. Vanderpuye sera autorisé à
6 répondre.
7 Maître Gajic.
8 M. GAJIC : [interprétation] Monsieur le Président, je tiens à vous
9 présenter mes excuses pour ne pas avoir suivi la procédure prescrite par la
10 Chambre dans son intégralité.
11 Outre ce que j'ai déjà dit tout à l'heure à propos du résumé 65 ter
12 concernant ce témoin, ce résumé ne précisait pas véritablement que ce
13 témoin allait déposer sur les événements en question.
14 Par ailleurs, M. Robert Block ne fait pas partie de la liste des témoins,
15 et ce témoin-ci, en tout cas d'après les informations dont nous disposons,
16 ce témoin n'est pas en mesure de nous dire quoi que ce soit sur M. Robert
17 Block, qui est l'auteur des trois articles que le bureau du Procureur
18 souhaite voir ajouter à sa liste 65 ter. A notre avis, ces articles sont
19 dépourvus de valeur probante car ils font souvent référence à des sources
20 non identifiées, et il s'agit ni plus ni moins d'articles de presse publiés
21 en tant que tels d'ailleurs.
22 Par conséquent, leur valeur probante est nulle.
23 Je conclurais ainsi mes arguments, et j'espère avoir expliqué de
24 manière suffisante pourquoi ces documents ne devraient pas être ajoutés à
25 la liste 65 ter de l'Accusation à ce stade.
26 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Merci beaucoup, Maître Gajic.
27 Monsieur Vanderpuye.
28 M. VANDERPUYE : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
Page 15101
1 Première chose, ces documents sont pertinents et ont valeur probante à
2 propos d'éléments évoqués dans l'acte d'accusation. Ils sont pertinents et
3 ont une valeur probante de par leur publication. Je crois qu'il est
4 important de présenter une publication d'un journaliste sur des événements
5 relatifs à Srebrenica, un journaliste qui lui-même est l'auteur de
6 publications de cette nature, même si elles sont intervenues plusieurs
7 années après les faits, mais qui, pendant toute la période pertinente, a
8 travaillé en tant que journaliste et jusqu'au jour d'aujourd'hui. Et je
9 crois qu'il est tout à fait pertinent de présenter ces publications à ce
10 témoin.
11 Deuxième chose, les informations qui étaient disponibles au moment des
12 événements ou aux alentours de leur date, disponibles au travers des
13 médias, sont évoquées dans son article. Dans le paragraphe dont j'ai donné
14 lecture afin qu'il figure au compte rendu, au cours de son entretien, le
15 colonel Beara lui-même a parlé de nouvelles diffusées par les médias
16 concernant un certain nombre de crimes et d'autres événements relatifs à
17 l'opération de Srebrenica.
18 Par ailleurs, le témoin lui-même a dit au cours de sa déposition
19 qu'il avait eu connaissance de certains faits relayés par les médias et
20 relatifs aux événements de Srebrenica à l'époque. Je pense donc qu'il est
21 tout à fait approprié dans de telles circonstances de présenter ces
22 documents au témoin : d'abord, pour voir si ce témoin était, oui ou non,
23 informé du fait que ces récits ont été publiés; et puis d'en vérifier sa
24 connaissance de la teneur. Ce qui a été publié n'est pas toujours une
25 manifestation de la vérité, mais il se trouve que ce peut être intéressant
26 du fait même que cela a été publié à propos de Srebrenica, que ce soit des
27 faits avérés ou non, que ce soit la vérité ou non. Ceci est pertinent à
28 l'égard de la déposition du témoin et également à l'égard de la
Page 15102
1 connaissance des faits qu'avait l'accusé, de la connaissance générale au
2 sein de la VRS des faits qui étaient relatés à l'époque. Nous avons des
3 témoins qui ont témoigné ici, des personnes haut placées, notamment des
4 agents du renseignement au sein de la VRS, qui n'ont dit n'avoir eu aucune
5 connaissance de ces événements à l'époque. D'où la pertinence de ces
6 articles dans le cadre de ces procédures, et nous pensons qu'il est donc
7 tout à fait approprié de présenter ces articles au témoin.
8 Me Gajic dit que ceci ne figure pas dans le résumé 65 ter. Mais en
9 fait, ce qui est dit dans le résumé de l'article 65 ter, et c'est certain,
10 c'est que cet article qu'il a écrit lui-même allait être utilisé. Et dans
11 une partie de cet article, il dit bien que le colonel Beara fait état d'un
12 certain nombre d'articles de presse ou de publications concernant les
13 événements de Srebrenica. Il me semble que c'est une voie qu'il est tout à
14 fait possible de suivre.
15 C'est la raison pour laquelle je demande à ce que soient ajoutés ces
16 trois documents à la liste 65 ter. Et c'est à la Chambre qu'il appartiendra
17 d'en déterminer le poids si elle décide de faire droit à notre requête.
18 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Très bien. Ces trois articles ont été
19 publiés dans "The Independent", n'est-ce pas ?
20 M. VANDERPUYE : [interprétation] En effet.
21 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Et ces trois articles ont été publiés
22 en juin [comme interprété] 1995 ?
23 M. VANDERPUYE : [interprétation] C'est exact.
24 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Et vous dites qu'en utilisant ces
25 documents, vous souhaitez montrer que certains articles de presse ont été
26 publiés au cours de la période considérée sur les événements de Srebrenica
27 ?
28 M. VANDERPUYE : [interprétation] En effet.
Page 15103
1 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Maître Gajic.
2 M. GAJIC : [interprétation] Monsieur le Président, j'aimerais brièvement
3 revenir sur une chose qui a été dite par le représentant de l'Accusation.
4 A savoir que l'article qui est au cœur de la déposition de ce témoin
5 est un entretien, un entretien qui est censé refléter les propos tenus par
6 une autre personne, en l'occurrence, M. Beara. Dans l'article, le témoin ne
7 fait aucun commentaire. Il ne livre pas sa propre analyse des événements ou
8 de quoi que ce soit qui soit en rapport avec Srebrenica. Il se contente de
9 relayer une information communiquée par quelqu'un d'autre.
10 Lorsque vous trancherez sur notre objection, j'aimerais que vous
11 gardiez ceci à l'esprit.
12 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Madame le Juge Nyambe.
13 Mme LE JUGE NYAMBE : [interprétation] Une précision de votre part, Monsieur
14 Vanderpuye. Où se trouve le journaliste Robert Block; le savez-vous ?
15 M. VANDERPUYE : [interprétation] Spontanément, comme cela, non. Je pense
16 qu'il est aux Etats-Unis.
17 Mme LE JUGE NYAMBE : [interprétation] Je vous remercie.
18 M. VANDERPUYE : [interprétation] Je vous en prie, Madame le Juge.
19 [La Chambre de première instance se concerte]
20 M. VANDERPUYE : [interprétation] Monsieur le Président, je souhaitais
21 ajouter une chose, mais peut-être que --
22 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Allez-y.
23 M. VANDERPUYE : [interprétation] Oui. La première chose -- je l'ai appris
24 depuis tout à l'heure, votre question, M. Block se trouve en Floride, aux
25 Etats-Unis.
26 Deuxième chose, ce sont des documents publics, et je crois que c'est un
27 fait important. En d'autres termes, si vous saisissez son nom sur
28 l'internet, vous tombez sur ces articles. Un certain nombre de ces
Page 15104
1 documents ont déjà été communiqués à la Défense, en dépit du fait que ce
2 sont des documents publics, en avril déjà, avril 2010. Par conséquent, il
3 ne s'agit pas d'une surprise pour la Défense. Il ne s'agit pas non plus de
4 documents inaccessibles pour cette dernière. Lorsque j'ai préparé le
5 classeur pour ce témoin-ci, j'ai retrouvé ces articles sur internet, il y a
6 encore quelques jours de cela, jeudi ou mercredi de la semaine dernière. Il
7 me semble donc que ce n'est pas là quelque chose qui était imprévisible
8 pour la Défense, et notamment au regard du fait que l'article proprement
9 dit fait état de publications sorties peu après les événements survenus à
10 Srebrenica.
11 Par conséquent, il me semble que la Défense a eu large préavis de
12 l'utilisation de cet article. Si elle ne l'a pas eu dans le cadre précis de
13 ce témoignage, elle l'a eu dans le cadre plus général de l'affaire. Et je
14 le répète, d'autres témoins dans le cadre de cette affaire ont déposé à ce
15 sujet, notamment des agents du renseignement, des agents de sécurité, ainsi
16 que des personnes qui se trouvaient sur le terrain. Et je pourrais vous
17 donner les références correspondantes du compte rendu, particulièrement
18 s'agissant d'un témoin, si la Chambre de première instance souhaite obtenir
19 cette information.
20 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Pour préciser les choses, j'aimerais
21 me tourner vers le témoin afin de vérifier le compte rendu et certaines des
22 réponses que vous avez pu donner à l'Accusation. Vous souvenez-vous avoir
23 vu à la télévision ou dans la presse des rapports faisant état des
24 événements de Srebrenica en juillet 1995 en Serbie ?
25 Avez-vous dit quoi que ce soit à ce sujet au cours de votre
26 interrogatoire aujourd'hui ?
27 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, je dois tirer quelque
28 chose au clair à propos de 1995.
Page 15105
1 J'ai commencé à travailler en tant que journaliste en Serbie en avril
2 ou en mai 1995, soit un mois et demi avant l'opération Eclair en Croatie.
3 J'étais à Vrsac avec mon oncle avant cela pour des raisons personnelles, et
4 ce, pendant plus de deux ans et demi au cours desquels je n'ai donc pas
5 travaillé, mais ceci n'a pas de rapport avec l'objet de mon témoignage.
6 Alors, au cours de quel mois en 1995 j'ai lu ou entendu dire quoi que
7 ce soit à propos de Srebrenica, j'ai du mal à le préciser aujourd'hui. Mais
8 je dois vous dire ceci : au fil du temps, de plus en plus d'informations
9 ont été diffusées par le biais d'articles de presse, d'émissions de
10 télévision et par le biais de médias électroniques, en fonction de la
11 source, bien sûr. Et le cas de Srebrenica était extrêmement intéressant
12 pour nous tous qui vivions dans la partie occidentale des Balkans, soit
13 dans les Etats successeurs de la RSFY. Des textes, bien sûr, ont été
14 publiés par des rédactions en chef de Zagreb. Les Musulmans avaient leur
15 propre point de vue. Les médias serbes de Bosnie-Herzégovine avaient le
16 leur également. Alors que pour la Serbie, les médias étaient divisés. Un
17 groupe de médias parlait de Srebrenica d'une certaine manière, tandis que
18 d'autres en parlaient de manière différente.
19 La confusion était grande. J'ai vu beaucoup d'émissions sur
20 Srebrenica et j'ai lu de nombreux articles à son sujet, mais je ne peux pas
21 vous dire qui a écrit quoi et dans quel journal ces textes ont été publiés.
22 Ce serait très difficile.
23 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Merci beaucoup de cette explication.
24 Monsieur Vanderpuye, Monsieur Tolimir, Maître Gajic, la Chambre a étudié
25 votre requête consistant à ajouter ces trois documents à la liste des
26 documents 65 ter. Toutefois, la Chambre n'est pas convaincue que vous ayez
27 présenté des arguments convaincants à ce sujet. Par le passé, vous avez
28 demandé à plusieurs reprises que des ajouts soient faits à la liste 65 ter.
Page 15106
1 La Défense n'y a pas fait objection et, dans la plupart des cas, nous avons
2 donc fait droit à votre requête. Aujourd'hui, la Défense a élevé une
3 objection et l'a présentée à la Chambre, et la Chambre estime ne pas
4 apercevoir de lien avec le témoin qui se trouve actuellement dans le
5 prétoire.
6 Il se peut qu'il y ait eu un grand nombre d'articles publiés dans le monde.
7 Ces trois articles ont été publiés dans "The Independent", dans un autre
8 Etat que les Etats de la région. Le témoin n'est donc pas à même de déposer
9 sur ces articles. Il vient, en outre, de préciser ce qu'il a dit en page 8,
10 lignes 10 à 12 du compte rendu d'audience d'aujourd'hui, à savoir que
11 plusieurs médias à l'époque se sont exprimés, même des médias de la région,
12 mais en s'appuyant sur des sources différentes et en relayant des
13 informations différentes.
14 La Chambre n'est pas d'avis que ce témoin se prête à des questions
15 relatives à des articles de presse autres que le sien publiés dans une
16 autre région du monde et à témoigner à propos de l'existence de ces
17 articles ou de la teneur de ces textes.
18 C'est la raison pour laquelle, en l'occurrence, nous avons décidé de
19 rejeter votre requête.
20 Veuillez poursuivre.
21 M. VANDERPUYE : [interprétation] Très bien, Monsieur le Président. Je
22 comprends le point de vue présenté par la Cour. Toutefois, j'ai un article
23 qui a déjà été versé au dossier de cette affaire par le même auteur, et il
24 me semble que sur cette pièce il serait bon de poser un certain nombre de
25 questions à ce témoin.
26 Pourquoi ? Eh bien, d'abord, pour établir si oui ou non --
27 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] De quel article parlez-vous, s'il
28 vous plaît.
Page 15107
1 M. VANDERPUYE : [interprétation] J'ai la pièce P1254 sous les yeux.
2 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Et par l'intermédiaire de quel témoin
3 avez-vous demandé le versement au dossier de cette pièce, demande acceptée
4 par la Chambre ?
5 M. VANDERPUYE : [interprétation] Un instant, je vais vérifier.
6 [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]
7 [Le conseil de l'Accusation se concerte]
8 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] On me dit que c'était un témoin
9 protégé.
10 M. VANDERPUYE : [interprétation] En effet. PW-63, pour le compte rendu
11 d'audience.
12 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Cet article à l'écran est la pièce
13 P1254. Je vous invite à le présenter au témoin.
14 [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]
15 [Le conseil de l'Accusation se concerte]
16 M. VANDERPUYE : [interprétation]
17 Q. Monsieur Simic, comme nous avons vu -- ou plutôt, excusez-moi.
18 M. VANDERPUYE : [interprétation] Monsieur le Président ?
19 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Veuillez poursuivre, je vous prie.
20 M. VANDERPUYE : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
21 Q. Ce que nous avons ici, Monsieur Simic, c'est un article qui porte la
22 date du 25 juillet 1995. Il est intitulé : "Les meurtres commis près de la
23 rivière jettent une lumière sur l'étendue de l'horreur après la chute de
24 Srebrenica." Et on dit que c'est "Robert Block, de Loznica, Serbie" qui l'a
25 rédigé.
26 Donc, au premier paragraphe de cet article, on voit quelque
27 discussion concernant une personne pour laquelle M. Block écrit s'agissant
28 d'une personne qui est appelée Halilovic. Il parle de cette personne dans
Page 15108
1 son article.
2 Au deuxième paragraphe, on peut lire que :
3 "Le 15 juillet, quatre jours après que les Serbes de Bosnie s'étaient
4 emparés de Srebrenica, M. Halilovic a été découvert dans les eaux de la
5 rivière de Bosnie, la rivière Drina", et il était très grièvement blessé.
6 Il appelait à l'aide et il saignait profusément.
7 D'abord, j'aimerais vous demander alors, est-ce que vous pouvez nous
8 dire si vous aviez entendu parler de cet incident qui s'est déroulé en
9 juillet 1995 ?
10 R. Je dois vous dire que ce nom ne me dit pas réellement grand-chose. Je
11 sais que ce nom de famille me pourrait éventuellement se trouver dans mon
12 subconscient, j'imagine, mais je ne peux pas vraiment lui attribuer un
13 visage.
14 Q. Dans cet article, nous pouvons voir que cette personne avait
15 apparemment été -- enfin, qu'on lui avait prodigué des soins en Serbie.
16 M. VANDERPUYE : [interprétation] Et si nous passons à la page suivante. Et
17 je crois qu'il nous faudra passer à la page 2 en B/C/S également. Il s'agit
18 peut-être de l'avant-dernier paragraphe en B/C/S. On peut lire ici que :
19 "Les représentants des Nations Unies du HCR à Belgrade disent qu'ils ont
20 connaissance de plusieurs cas de Musulmans de Srebrenica qui s'étaient
21 enfuis en passant par la Drina en Serbie pour, par la suite, être remis
22 entre les mains des Serbes de Bosnie et dont le sort était incertain. Des
23 milliers d'hommes de Srebrenica ont été faits prisonniers par les Serbes de
24 Bosnie après la 'libération' de l'enclave musulmane le 11 juillet. Certains
25 prisonniers avaient été exécutés, et certaines personnes estiment qu'il
26 s'agit d'environ 4 000 personnes."
27 Q. Vous pouvez voir que c'est une information qui provient de Loznica, en
28 Serbie. Elle fait référence également aux représentants du HCR de Belgrade
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1 comme étant à l'origine de cette déclaration.
2 J'aimerais donc savoir, est-ce que vous êtes au courant des faits et des
3 circonstances dont on fait état dans cet article s'étant déroulés en
4 juillet de 1995 ?
5 R. Non. En juillet 1995, non. C'est tout à fait sûr, parce que je vous ai
6 déjà dit que j'ai commencé à travailler en 1995, en mars ou avril, et j'ai
7 commencé à travailler à Belgrade. Trois ans avant cela, je ne travaillais
8 pas en tant que journaliste. Par la suite, pendant des années, j'ai lu des
9 articles dans les médias de Sarajevo dont les extraits étaient publiés dans
10 des articles dans les médias de Belgrade. J'ai vu que cette personne avait
11 été blessée et qu'on lui avait prodigué des soins dans les hôpitaux de
12 Belgrade, mais je dois vous dire que je ne m'étais pas penché sur cette
13 question particulièrement. Je n'ai pas fait de recherches là-dessus. Donc
14 je ne peux pas vous parler de cela plus concrètement.
15 Q. J'aimerais maintenant vous demander la chose suivante, une autre
16 question.
17 M. VANDERPUYE : [interprétation] Pourrait-on passer pour ce faire à la page
18 1, s'il vous plaît, de ce document. Quatrième paragraphe de la page 1 de ce
19 document.
20 Q. Il se lit comme suit :
21 "Dans les jours qui ont suivi la chute de Srebrenica, les résidents
22 ont dit avoir vu des 'camions bondés' d'hommes, dont les hommes qui avaient
23 été emmenés de l'autre côté de la berge et qui avaient été tués par les
24 soldats serbes de Bosnie. Des milliers de personnes regardaient ceci alors
25 qu'ils étaient debout sur cette colline. L'un des Serbes qui n'a pas voulu
26 être identifié a dit : 'La semaine dernière, j'ai vu de mes propres yeux 50
27 hommes tués alors qu'ils étaient contraints de sauter d'un camion dans une
28 fosse.'"
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1 J'aimerais donc savoir, est-ce que vous savez quelque chose, ou que pouvez-
2 vous nous dire concernant les circonstances et ce qui est écrit dans cet
3 article en juillet 1995 ? Pouvez-vous nous dire si ce récit fait partie des
4 récits dont vous aviez entendu parler à l'époque ?
5 R. Oui, effectivement, cela ressemble à un récit que j'ai entendu et lu
6 dans des médias bosniens et en partie dans des médias croates. Mais que
7 s'est-il réellement passé, entre la fiction et la réalité, je ne sais pas
8 réellement où la vérité se trouve. Je n'ai pas été témoin de ces
9 événements.
10 Q. Très bien. Mais je voulais simplement savoir si - et corrigez-moi si je
11 ne m'abuse - mais vous nous avez dit que ces événements représentent
12 certains événements dont vous aviez entendu parler en juillet 1995 ?
13 R. S'agissant des événements s'étant déroulés à Srebrenica, à Zepa et aux
14 abords de la Drina en Bosnie-Herzégovine, dans les médias serbes en 1995,
15 on n'en parlait pas beaucoup. On n'avait pas beaucoup écrit sur ces
16 événements. Ce que l'on pouvait lire n'était pas très exhaustif. Avec le
17 passage du temps, et après l'arrivée de diverses organisations non
18 gouvernementales, et après que certains médias se soient penchés un peu
19 plus sur la réalité qui s'était déroulée à Srebrenica, on pouvait retrouver
20 beaucoup plus d'articles dans les médias à ce moment-là.
21 Je parle ici des médias serbes, croates, et macédoniens mêmes, monténégrins
22 également, et il y avait plusieurs textes qui parlaient de crimes commis
23 contre les Serbes dans cette même Bosnie, c'est-à-dire non loin de
24 Srebrenica et de Zepa. Donc il arrivait souvent que dans les médias vous
25 aviez un article faisant la moitié d'une page en parlant des Bosniens en
26 Srebrenica; par exemple, provenant de sources reportées par les médias de
27 Zagreb. Et vous pouviez avoir un article qui faisait la page de droite et
28 qui parlait des exactions commises contre les Serbes ou des récits d'un
Page 15111
1 Serbe qui a perdu la vie et dont la famille a également été tuée. Donc il y
2 avait des textes publiés concernant les uns et les autres.
3 Je ne me suis pas particulièrement penché sur les crimes commis en Bosnie-
4 Herzégovine. Certaines histoires m'ont intéressé pour ce qui s'est passé en
5 Croatie puisque j'y vivais avant la guerre. Mais s'agissant de Srebrenica,
6 et plus particulièrement s'agissant de cette période sur laquelle vous
7 insistez, Monsieur le Procureur, puisque vous parlez de l'année 1995, je
8 dois vous dire qu'un très grand nombre d'années se sont écoulées depuis, 15
9 ans se sont découlés depuis, et je ne faisais que revenir au journalisme à
10 cette époque, mais je dois vous dire que j'avais également d'autres
11 problèmes dans ma vie. Je devrais peut-être vous dire qu'au début, dès
12 1995, 1996, 1997, je ne portais pas particulièrement attention sur
13 Srebrenica et sur ce qui était écrit sur Srebrenica puisqu'il y avait
14 énormément d'information qui parvenait. On disait, par exemple, tel et tel
15 événement est survenu, et 15 ou 20 jours plus tard on voyait que ce n'était
16 pas du tout la vérité, puisque soudainement l'homme se présentait vivant
17 alors qu'on avait écrit sur lui qu'il avait été tué, donc c'est l'une des
18 raisons.
19 Et la deuxième raison étant que j'étais plutôt concentré sur les événements
20 en Croatie puisque plusieurs membres de ma famille y étaient restés. Mon
21 frère était et se trouve encore en Slovénie. Il était blessé, c'est
22 pourquoi j'ai dû quitter la Croatie. Et donc, j'étais préoccupé par
23 plusieurs autres problèmes d'ordre personnel, et donc je n'ai pas
24 particulièrement examiné la question.
25 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur Vanderpuye, le témoin nous a
26 dit à maintes reprises et il nous a expliqué quel était le type
27 d'information qu'il avait. Je crois que vous avez posé plusieurs questions
28 et approfondi ce sujet, et donc je pense que vous devriez passer à un autre
Page 15112
1 sujet.
2 M. VANDERPUYE : [interprétation] Justement, c'est ce que j'allais faire,
3 Monsieur le Président.
4 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Très bien. Alors, veuillez
5 poursuivre, je vous prie.
6 M. VANDERPUYE : [interprétation]
7 Q. Monsieur Simic, dans votre réponse, vous avez dit que vous estimiez ou
8 que vous aviez regardé, plutôt, les médias serbes concernant les questions
9 que je vous ai posées. J'aimerais vous demander si vous avez également
10 consulté d'autres sources concernant les événements de Srebrenica outre les
11 médias serbes ? Vous pouvez répondre par un oui ou par un non, et je crois
12 qu'à ce moment-là nous allons pouvoir passer à un autre sujet.
13 R. Oui, bien sûr.
14 Q. Est-ce que vous vous êtes penché ou avez-vous examiné ces médias
15 lorsque vous avez mené votre entretien avec M. Beara en 2002 ? Par exemple,
16 avez-vous consulté tous ces médias pour préparer votre entretien et vous
17 préparer ?
18 R. Oui.
19 Q. Et donc, lorsque M. Beara a fait référence aux récits que l'on
20 entendait après l'opération de Srebrenica, est-ce que vous savez à quoi il
21 faisait référence, de quel type de récits parlait-il et quelles étaient ces
22 sources ?
23 R. Je ne sais pas si je n'ai peut-être pas très bien compris M. Beara ou
24 si c'est vous qui ne m'avez pas bien compris.
25 M. Beara avait dit qu'il était surpris lorsque le général Krstic a fait un
26 lien entre lui et Srebrenica, et non pas seulement lui, mais également
27 d'autres officiers de la VRS. Il a donc dit --
28 Q. Je fais plutôt référence à ce que le colonel Beara vous a dit
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1 concernant des crimes et des meurtres de masse commis à l'encontre des
2 Musulmans dont vous faites référence dans votre article en anglais aux
3 pages 6 et 7, où vous dites que M. Beara a dit que "les histoires ont
4 commencé à circuler dans la presse immédiatement après et même dans nos
5 propres journaux," et j'imagine que par là il voulait parler des journaux
6 serbes, "de crimes et de meurtres de masse commis à l'encontre des
7 Musulmans."
8 Qu'est-ce que cela voulait dire pour vous ? Comment avez-vous
9 interprété ses propos ? De quels types de journaux parlait-il, quelle est
10 la presse à laquelle il faisait référence et de quelles sources s'agissait-
11 il ?
12 R. A l'époque, dans les années 1990, le 5 octobre, certains journaux
13 appartenaient au gouvernement et ils s'étaient placés sous le contrôle du
14 régime. Lorsqu'il s'agissait de crimes et d'incidents, ils étaient
15 prudents, ils faisaient attention pour donner des informations plutôt
16 neutres ou de ne pas trop exagérer les informations qu'ils donnaient. Mais
17 je dois vous dire qu'il y avait d'autres médias qui se servaient de plus de
18 sources, qui étaient moins indépendants, si vous voulez, et qui faisaient
19 également écho d'autres médias dans la région. De sorte que lorsque M.
20 Beara a parlé du chiffre de 14 à 16 000 hommes et garçons, je pense que
21 c'est un chiffre qui était avancé par les journaux serbes. Mais il est un
22 fait, et c'est vrai ce qu'il a dit, que l'on disposait d'un très grand
23 nombre de données, qu'on rencontrait plusieurs données différentes. Et avec
24 le temps, on avait diminué ce nombre, et le chiffre, finalement, au fil des
25 années, était celui de 7 000 personnes.
26 Q. Donc les informations au sujet des crimes et des rapports qui
27 circulaient immédiatement après l'opération qui s'est déroulée à
28 Srebrenica, c'étaient des informations dont vous étiez au courant à
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1 l'époque; est-ce exact ?
2 R. Oui, en 1995, 1996, 1997, je le savais, et au fur et à mesure que le
3 temps passait, il y a de plus en plus d'informations qui étaient
4 disponibles au public général, et surtout à nous, les journalistes.
5 Mais je dois dire qu'à l'époque il y avait une confusion qui régnait. Pour
6 deux ou trois mois, l'on avançait un type d'information, et puis après on
7 parlait d'autre type d'information en fonction de sources, et ceci créait
8 une confusion chez les gens. Les gens ne savaient tout simplement pas ce
9 qui se passait. Même nous, les journalistes, parfois on ne savait pas ce
10 qui était la vérité.
11 Q. Je suppose que vous savez que le colonel Beara a été condamné pour sa
12 participation aux meurtres des milliers de prisonniers musulmans en juillet
13 1995 suite au procès Popovic dans lequel vous avez déposé. Oui ?
14 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] La réponse à cette question a déjà
15 été donnée, si je ne me trompe, Monsieur Vanderpuye.
16 M. Simic a également ajouté qu'il n'était pas sûr si c'était la
17 condamnation définitive.
18 Oui, Maître Gajic.
19 M. GAJIC : [interprétation] Monsieur le Président, je ne sais pas s'il
20 s'agit d'une erreur du compte rendu d'audience, mais d'après ce que je vois
21 dans le compte rendu d'audience, il est écrit que M. Vanderpuye aurait dit
22 que le jugement contre M. Beara était définitif. Cependant, je pense que M.
23 Vanderpuye ne l'a pas dit ainsi car nous savons que la procédure en appel
24 est en cours dans cette affaire en ce moment.
25 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Je ne vois pas le mot "définitif"
26 dans le compte rendu d'audience.
27 M. GAJIC : [interprétation] Monsieur le Président, c'est ainsi que la
28 question a été interprétée en serbe, et c'est pour ça que je suis
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1 intervenu, car le témoin a dit qu'il ne savait pas si le jugement était
2 définitif ou pas, et j'ai simplement souhaité clarifier cela pour que les
3 choses soient claires en serbe également.
4 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Merci.
5 Monsieur Vanderpuye.
6 M. VANDERPUYE : [interprétation]
7 Q. Avec les connaissances que vous avez aujourd'hui, Monsieur Simic,
8 compte tenu de la condamnation de M. Beara, est-ce que vous croyez encore
9 qu'il vous a dit la vérité au cours de votre interview avec lui en 2002 ?
10 R. Ce que je considérais à l'époque je le considère encore aujourd'hui. Il
11 m'a laissé l'impression d'un homme qui dit la vérité, surtout au sujet de
12 plusieurs circonstances, notamment qu'au moment critique il n'était pas
13 dans la région de Srebrenica, mais qu'il était dans la région de Bihac;
14 qu'il a rencontré de grands problèmes seulement suite à l'attaque publique
15 lancée contre lui par M. Vojislav Seselj dans les médias; il a dit qu'il a
16 beaucoup de problèmes et qu'il s'inquiète beaucoup pour sa famille, et que
17 c'est très difficile pour lui, car il avait une carrière de 35 ou de 36 ans
18 d'officier honorable. Et compte tenu de tout cela, j'ai conclu qu'il disait
19 la vérité.
20 Q. Merci, Monsieur Simic. Je n'ai plus de questions à vous poser. Je
21 termine mon interrogatoire.
22 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Merci beaucoup, Monsieur Vanderpuye.
23 Maintenant, Monsieur Tolimir, vous pouvez commencer votre contre-
24 interrogatoire. Est-ce que vous préférez commencer immédiatement, ou bien
25 est-ce que vous préférez que l'on procède à une pause maintenant et que
26 l'on commence l'interrogatoire, votre interrogatoire après la pause ?
27 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci. Nous pouvons faire une pause maintenant,
28 pour ne pas interrompre la continuité. Merci.
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1 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Très bien.
2 Nous allons maintenant faire notre première pause, et nous allons reprendre
3 après une demi-heure. Donc, je pense que nous pouvons nous réunir ici à 4
4 heures 05.
5 --- L'audience est suspendue à 15 heures 39.
6 --- L'audience est reprise à 16 heures 09.
7 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Oui, Monsieur Tolimir. Maintenant
8 vous pouvez commencer votre contre-interrogatoire. Vous avez la parole.
9 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Encore une fois,
10 je salue toutes les personnes présentes et j'espère que le procès se
11 déroulera conformément à la volonté de Dieu et non pas de la mienne.
12 Contre-interrogatoire par M. Tolimir :
13 Q. [interprétation] Je souhaite un séjour agréable au témoin et bon voyage
14 de retour.
15 R. Merci, Général.
16 Q. Au cours du contre-interrogatoire, vous avez été interrogé à la page
17 71, et par la suite à la page 31, et la question suivante vous a été posée
18 : Savez-vous que Beara a été condamné pour les crimes qui concernent ces
19 meurtres ? A la page 31, ligne 12, vous dites :
20 "Sachant que Beara a été condamné," et cetera, "est-ce que vous
21 croyez encore qu'il dit la vérité," et ainsi de suite ?
22 Voici ma question : est-ce que vous savez que Beara a été condamné
23 seulement sur la base des médias ou sur la base d'autres sources ? Merci.
24 R. Je sais que M. Beara a été condamné et, comme je l'ai dit, je ne savais
25 pas si c'était une condamnation ayant la force de la loi. Je le sais des
26 médias, et ceci a été repris par deux agences en Serbie, l'agence "Beta" et
27 "Tanjug", et non seulement au sujet de Beara, mais toutes les personnes
28 impliquées dans cette procédure.
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1 Q. Merci.
2 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur Tolimir, vous avez fait
3 référence à la page 71 du compte rendu d'audience d'aujourd'hui, mais nous
4 sommes allés seulement jusqu'à la page 33. Donc, il y avait certainement
5 une erreur. Vous vous êtes peut-être trompé. A mon avis, vous avez parlé de
6 la page 31; est-ce exact ?
7 Maître Gajic.
8 M. GAJIC : [interprétation] Monsieur le Président, la première référence
9 mentionnée par M. Tolimir était la page 7, et la ligne était 1 ou 2. Et
10 après, je pense que ceci a été bien consigné au compte rendu d'audience.
11 Après, il a parlé de la page 31. Donc, il y avait deux références séparées.
12 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Merci beaucoup. Poursuivez,
13 Monsieur Tolimir.
14 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
15 M. TOLIMIR : [interprétation]
16 Q. A la page 7, ligne 19 également, il est écrit : Est-ce que cela veut
17 dire que vous savez que Srebrenica est de la propagande musulmane ?
18 Et vous avez dit à la page 7, 24, vous avez dit Beara était celui qui
19 disait que tout ceci était de la propagande musulmane, qu'il y a eu des
20 victimes, et que le nombre était loin de ceux dont parlaient les Musulmans
21 dans leurs médias, plus ou moins.
22 Voici ma question : est-ce que pendant longtemps dans les médias
23 c'est l'image qui était représentée, celle que M. Beara relate dans les
24 deux communautés ethniques ?
25 R. C'était plus ou moins conforme à ce que disait M. Beara. Les médias
26 serbes, dans une grande partie, je ne peux pas dire que c'était le cas de
27 tous les médias, mais dans une grande partie, les médias serbes affirmaient
28 -- ou, plutôt, faisaient comprendre qu'il s'agissait là de la propagande
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1 musulmane, alors que les médias musulmans et, dans une grande partie les
2 médias croates, traitaient du sujet comme d'un crime sans précédent.
3 Q. Merci. A la page 8, ligne 12, vous avez dit :
4 "Il a dit qu'il y avait des victimes, mais bien moins que ce qui
5 avait été publié dans les médias. Il disait que les Musulmans s'étaient
6 disputés entre eux, qu'ils s'étaient battus entre eux et qu'il y a eu des
7 victimes, et il a dit également qu'il proposait de fournir les données aux
8 officiers français."
9 Est-ce exact ?
10 R. Oui, c'est ce que M. Beara avait dit.
11 Q. Voici ma question -- et je m'excuse auprès des interprètes.
12 Ma question est la suivante : est-ce que les médias musulmans ont contribué
13 à une telle opinion et compréhension des choses, à la fois du côté serbe et
14 musulman, en présentant les rapports concernant le nombre de victimes et la
15 manière dont les médias, donc, musulmans, en parlaient ? Est-ce que vous
16 avez eu ce genre d'information ?
17 R. Les Musulmans, c'est-à-dire les médias bosniens, insistaient sur
18 l'histoire concernant le génocide, le crime, et un énorme nombre de
19 victimes. Et de nombreuses organisations non gouvernementales, y compris en
20 Serbie, ont accepté cela, de même que la plus grande partie du public
21 international qui parlait de Srebrenica comme d'un fait accompli, comme
22 s'il s'était avéré avec certitude qu'un crime y avait eu lieu.
23 Q. Merci. Peut-on examiner maintenant la pièce 1D53, pour que l'on voie,
24 premièrement, ce qui était écrit au sujet de Srebrenica en juin 1998 dans
25 les médias musulmans, puis je vais vous poser ma question. Merci.
26 C'est une interview avec Hakija Meholjic, qui était le président de SDP de
27 Srebrenica, deuxième parti politique, et il était membre de la présidence
28 de Guerre de Srebrenica. Il a dit qu'il y avait 500 vies de Musulmans
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1 données pour une intervention militaire. Ceci a été publié dans un journal
2 de Sarajevo, en Bosnie, appelé "Dani", le 22 juin 1998. Et le journaliste
3 dit :
4 "Il y a eu les accusations de la direction d'Etat, et notamment
5 lancées pour le président Izetbegovic, concernant la culpabilité bosnienne
6 pour la tragédie de Srebrenica, le départ des gens de Srebrenica à Sarajevo
7 en septembre 1993, et au sujet du sort réservé à l'enclave et au sujet du
8 fait que ceci ne pouvait pas être évité ?"
9 Je vous ai lu l'introduction faite par le journaliste. Maintenant,
10 nous allons voir ce qu'a dit M. Meholjic.
11 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur Tolimir, peut-on clarifier
12 cela pour le compte rendu d'audience. A la page 35, ligne 14, il est écrit
13 que vous avez dit que "500 vies musulmanes ont été données pour une
14 intervention militaire." Or, si l'on regarde le document figurant à
15 l'écran, nous voyons le chiffre de 5 000 Musulmans, "5 000 vies musulmanes
16 données pour une intervention militaire."
17 Si vous êtes d'accord là-dessus, nous pouvons continuer.
18 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. C'est
19 effectivement ce que vous venez de dire. Ensuite, M. Meholjic dit, et je
20 vais lire juste la partie qui est entre guillemets. Je cite :
21 "Que pensez-vous si l'on échangeait Srebrenica contre Vogosca ? Pendant un
22 certain temps c'était la vérité. Ensuite, j'ai pris la parole et j'ai dit,
23 Monsieur le Président, si vous nous avez appelés suite à un fait accompli,
24 vous n'auriez pas dû le faire, car il faut retourner devant le peuple et
25 accepter la charge de cette décision qui repose sur nous."
26 M. TOLIMIR : [interprétation]
27 Q. Voici ma question : est-ce qu'il y a eu des informations qui
28 circulaient dans le public, que ce soit le public serbe ou musulman, selon
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1 laquelle Srebrenica devait être échangée contre Vogosca, et est-ce que ceci
2 avait été annoncé depuis 1993, conformément à ce qui est écrit ici ? Est-ce
3 que vous le savez ?
4 R. C'étaient des rumeurs qui circulaient et qui étaient avancées par
5 certains cercles d'opposition en Serbie et également par une partie des
6 officiers de l'armée yougoslave. La première fois que j'ai entendu parler
7 de cela, eh bien, c'était le cas plusieurs fois, il y avait plusieurs
8 versions, y compris celle que vous venez de mentionner. Je ne saurais vous
9 dire exactement quand, mais je sais, je suis au courant de cette histoire
10 et de cette option, et je ne sais pas à quel point ceci est exact. Moi, je
11 ne disais pas cela, donc je ne sais pas qui est M. Hakija et je ne connais
12 pas les gens de la rédaction de "Dani".
13 Q. Merci. Voici, "Dani" lui pose la question : Donc, vous avez refusé la
14 proposition de Izetbegovic.
15 Et il répond, je cite :
16 "Nous avons refusé cela sans discuter. Ensuite, il a dit, vous savez,
17 Clinton m'offrait en avril 1993, suite à la chute de Cerska et Konjevic
18 Polje, que les forces chetniks entrent à Srebrenica, commettent le massacre
19 de 5 000 Musulmans, et ensuite il y aurait une intervention militaire."
20 Voici ma question : s'agissant de ce récit-là dans les médias, est-ce que
21 vous l'avez entendu des deux côtés et est-ce que vous savez que ce M.
22 Meholjic avait donné une interview qui a pris toute la place de cette revue
23 "Dani" une fois donc de la première à la dernière page ? Le savez-vous ?
24 Merci.
25 R. Je ne savais pas que les médias musulmans, bosniens, écrivaient là-
26 dessus. C'est la première fois que je vois cela. Ou bien, peut-être je ne
27 me souviens pas. Je ne me souviens pas que les médias serbes, la presse
28 serbe aurait repris des extraits de cette interview. Peut-être que c'était
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1 le cas et que je l'ai oublié, mais je ne me souviens pas de cela.
2 Q. Merci. Passons maintenant à la deuxième page. Nous n'allons pas entrer
3 dans le contenu, mais voici ce que dit Meholjic concernant Srebrenica de
4 1995. Il était membre de la présidence de Guerre. Il dit :
5 "Suite à la chute de Srebrenica, aussi en 1995, vous avez eu l'occasion de
6 vous adresser à M. Izetbegovic ?"
7 C'était la question du journaliste de "Dani". C'était avant le deuxième
8 paragraphe.
9 Et voici ce qu'il dit, Meholjic, dans le deuxième paragraphe :
10 "A ce moment-là, j'ai insisté pour qu'une commission d'Etat soit créée qui
11 se pencherait sur la responsabilité de la communauté internationale, du
12 président, du 2e Corps d'armée, et notre responsabilité aussi. Il n'y a pas
13 de peuple, lui (le président Izetbegovic) m'a demandé ce que je gagnais là-
14 dedans. Rasim Delic a essayé de dire quelque chose. Mais personne ne lui a
15 permis de prendre la parole", ainsi de suite.
16 Voici ma question : est-ce que vous avez entendu dire, est-ce que vous
17 saviez que les Musulmans insistaient pour que la direction politique et
18 militaire soit appelée à la responsabilité pour ce qui est des événements
19 de Srebrenica ? Est-ce que vous saviez quelque chose sur la base des médias
20 ?
21 R. Les médias serbes écrivaient là-dessus, ils citaient certaines
22 déclarations publiées dans un Etat germanophone, je ne sais plus lequel,
23 mais il est écrit qu'il y a eu de telles exigences, que certains individus
24 l'exigeaient en Bosnie-Herzégovine. Mais le problème, c'est que de telles
25 informations n'ont pas toujours été prises sérieusement; au moins d'après
26 ce que j'ai pu conclure et voir à Belgrade.
27 Q. Merci. Après cela, lorsque vous avez dit que Beara parlait de ce
28 conflit entre les Serbes et les Musulmans, on vous a demandé, le Procureur
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1 vous a dit si les événements se sont déroulés ainsi, et vous avez répondu :
2 "Je n'avais pas de raison de ne pas croire Beara et de considérer que les
3 accusations portées contre lui l'avaient poussé à vous accorder cette
4 interview."
5 Voici ma question : est-ce qu'aujourd'hui encore lorsqu'on lit ces
6 déclarations publiées dans la presse des deux côtés, est-ce que l'on peut
7 avoir la même opinion que vous ? C'est-à-dire qu'il s'était décidé à cela
8 en raison des attaques personnelles contre lui et compte tenu également du
9 fait que les médias musulmans accusaient les Musulmans, ce qui était relaté
10 par les médias serbes ?
11 R. Dans ma déposition précédente devant l'autre Chambre de première
12 instance, j'ai dit la même chose, et c'est ce que je redis aujourd'hui. En
13 tant qu'être humain, non pas en tant que journaliste, mais en tant que être
14 humain, j'avais l'impression que M. Beara était amer face à tout ce qui lui
15 arrivait. Je ne sais pas à quel point ça peut être important ici, mais je
16 dirais que lorsque la Loi portant sur la coopération avec le Tribunal en
17 Serbie a été adoptée, il y avait la liste de toutes les personnes accusées
18 pour Srebrenica, eh bien, M. Beara ne figurait pas sur cette liste-là. Il a
19 été ajouté à la liste par la suite, et il insistait en disant que la raison
20 en était le conflit qu'il avait eu avec les membres des unités
21 paramilitaires de M. Vojislav Seselj au sujet d'une caserne au Monténégro
22 qui relevait de la zone de responsabilité de M. Beara. Et il s'agissait
23 d'un incident grave qui a eu lieu là-bas, mais l'essentiel est qu'il
24 n'avait pas permis à ces membres d'unités paramilitaires d'enlever et
25 d'emmener avec eux sur un front un véhicule de combat.
26 Et suite à cela, d'après les dires de M. Beara, M. Seselj l'a attaqué
27 dans la presse et disait que Beara disait des mensonges odieux, et il a été
28 très affecté en raison de cela. Je l'ai vu au cours de l'entretien qu'il
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1 était très affecté par le fait que les médias musulmans disaient qu'il
2 était pratiquement l'idéologue de tout ce qui s'était déroulé à Srebrenica.
3 Q. Merci.
4 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demanderais de bien vouloir verser cela au
5 dossier et de passer au document suivant ici.
6 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Ce document comporte combien de pages
7 ?
8 Monsieur Tolimir ?
9 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
10 Ce document a au total quatre pages. Même pas quatre. Mais à la page
11 4, il comporte la moitié de la page.
12 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Merci. Il sera admis en tant que
13 pièce à conviction.
14 M. LE GREFFIER : [interprétation] Le document 65 ter 1D53 aura la cote
15 D277. Merci.
16 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci. Veuillez maintenant présenter la pièce
17 D268.
18 M. TOLIMIR : [interprétation]
19 Q. Maintenant, nous verrons que même les organes officiels de la Bosnie-
20 Herzégovine publiaient des documents dans lesquels il était question d'un
21 grand nombre de victimes. Par exemple, examinons la déclaration du
22 ministère de l'Intérieur de la République de Bosnie-Herzégovine, secteur SB
23 de Tuzla. Maintenant, je vous demanderais d'examiner le paragraphe 7 de
24 cette déclaration, où on lit comme suit :
25 "Enver m'a dit que lors de la sortie de la 285e Brigade vers 10
26 heures ce même jour, une formation paramilitaire des Chetniks a ouvert un
27 feu très nourri par moyens d'artillerie sur les autres brigades et sur les
28 civils qui s'étaient trouvés à Buljim. D'après son évaluation, on a tué
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1 près de 1 000 soldats et civils."
2 [hors micro]
3 L'INTERPRÈTE : Inaudible. C'était hors micro.
4 M. TOLIMIR : [interprétation]
5 Q. Et où il dit donc que : "…selon sa propre évaluation, on a tué environ
6 1 000 soldats et civils."
7 Pour ne pas vous citer d'autres sources selon lesquelles on peut lire
8 qu'il y avait également des suicides, et cetera, je ne vais pas vous donner
9 lecture de l'ensemble de cette déclaration, mais effectivement il y a eu
10 également des blessés et des morts à la suite des opérations de combat.
11 Donc j'aimerais savoir, et d'ailleurs il y a cinq autres déclarations qui
12 en parlent et qui font référence à ce même endroit là où ceci a eu lieu,
13 donc ne pensez-vous pas qu'il s'agissait d'une tentative d'effectuer une
14 percée ?
15 R. Eh bien, j'ai répondu partiellement à cette question en répondant
16 à l'une des questions posées par le Procureur.
17 M. Beara m'avait dit de toute façon qu'il y avait un membre de
18 l'armée musulmane qui avait trouvé la mort lors d'un conflit. Et ce n'était
19 pas la première fois que j'en ai entendu parler de ceci. C'est une
20 information qui circulait même avant qu'il m'en parle.
21 Q. Très bien. Prenons maintenant la pièce D269, qui porte sur ce
22 même événement.
23 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Donc j'imagine que ce dernier
24 document -- [hors micro]
25 Le dernier document ainsi que celui-ci ne sont pas encore traduits. Donc le
26 document précédent et celui-ci seront versés au dossier, mais en attendant
27 leur traduction.
28 Veuillez poursuivre, je vous prie.
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1 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je vous remercie.
2 M. TOLIMIR : [interprétation]
3 Q. Voilà. Nous pouvons maintenant prendre le document des autorités de
4 Bosnie-Herzégovine. Il y a eu donc une déclaration qui a été prise par la
5 personne dont nous n'allons pas mentionner le nom. Vous pouvez voir par
6 vous-même. Donc c'était un document qui a été envoyé en tant que document
7 portant indication "secret d'Etat" et c'est un document qui a été envoyé à
8 la direction de ce dernier.
9 Je demanderais à l'instant que l'on prenne la page 2 du document.
10 Voyons ensemble la ligne 12, où l'on peut lire, je cite :
11 "La source nous dit que lors de cet événement on a tué plus de 1 000
12 soldats et civils se trouvant dans cette colonne. A la suite de ce crime,
13 les Chetniks ont été appelés à se rendre ou à négocier. Golic, Ejub
14 essayait d'obtenir des Chetniks en parlant très fort, en criant, qu'ils
15 arrêtent. Les Chetniks ont arrêté le pilonnage sur la colonne. Ils ont
16 arrêté de pilonner les soldats et les civils. A la suite de la fin du
17 pilonnage, les effectifs de la 284e Brigade sont sortis des forêts et se
18 sont rendus avec la garantie qu'il n'y aura plus de pilonnage."
19 J'aimerais savoir si ces documents, tous les deux, si ces deux
20 déclarations qui font référence à cet endroit où l'on dit que 1 000 soldats
21 et civils ont été tués lors des opérations de combat, et si vous savez si
22 des victimes ont trouvé la mort lors d'autres opérations de combat ?
23 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur Vanderpuye.
24 M. VANDERPUYE : [interprétation] Monsieur le Président, je pense que la
25 dernière partie de la question de M. Tolimir ne représente pas fidèlement
26 les propos avancés lors de ce procès. Il n'y a absolument aucun élément de
27 preuve présenté dans cette affaire en l'espèce portant sur ces 1 000
28 personnes dont on fait référence dans ce document-ci ou dans d'autres
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1 documents et qui auraient été considérées comme étant des victimes de
2 meurtres de masse dans cette affaire-ci. En fait, il n'y a absolument aucun
3 élément de preuve le prouvant. En réalité, nous avons entendu d'ailleurs le
4 contraire par M. Janc, qui nous a expliqué très consciencieusement de
5 quelle façon on a procédé au décompte des victimes pour évaluer combien de
6 personnes sont considérées comme des victimes à la suite des opérations de
7 Srebrenica.
8 Mais je crois que ceci induit en erreur le témoin, déforme les propos
9 du Procureur et ne présente pas la preuve comme elle se doit.
10 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Pourriez-vous, je vous prie, Monsieur
11 Tolimir, nous donner la référence de la déclaration de la phrase que vous
12 avez prononcée tout à l'heure. Vous dites :
13 "Est-ce que vous savez si toutes ces victimes ont perdu la vie lors
14 des opérations de combat ?"
15 A qui faisiez-vous référence ? Qui on comptait parmi les victimes
16 d'exécution ? Qui en parlait en tant que victimes d'exécution ? Que voulez-
17 vous dire par là ?
18 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
19 J'essaie de trouver le passage, justement, dans lequel M. Janc a dit
20 qu'il estimait que toutes ces victimes étaient des victimes de génocide.
21 Si vous me le permettez, je vais trouver ce passage dans quelques
22 instants. Si vous voulez, nous pouvons nous arrêter maintenant. Je vais
23 passer en revue mon cahier et je pourrais vous donner la référence exacte,
24 mais je pourrais également vous la transmettre plus tard.
25 Je me souviens très bien que M. Janc a dit lors de son témoignage
26 dans le cadre de ce procès que toutes ces personnes étaient des victimes de
27 génocide.
28 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur Tolimir, mais dans votre
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1 question, vous n'avez pas du tout fait référence aux fosses communes.
2 Maintenant, vous faites référence aux personnes et aux corps retrouvés dans
3 les fosses communes. C'est tout à fait différent.
4 Je propose que vous reformuliez votre question afin que nous
5 puissions surmonter cette difficulté.
6 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
7 [Le conseil de la Défense se concerte]
8 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci bien.
9 M. TOLIMIR : [interprétation]
10 Q. Monsieur, dites-nous, si vous le savez, si 7 000 personnes avaient été
11 considérées comme étant des victimes de génocide, et c'est quelque chose
12 dont vous avez parlé lors de votre interrogatoire principal ?
13 R. [aucune interprétation]
14 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur Tolimir, il ne s'agit pas de
15 M. Babic, mais de M. Simic. Vous avez appelé le témoin M. Babic.
16 Monsieur le Témoin, donnez-nous votre réponse, je vous prie.
17 LE TÉMOIN : [interprétation] Ce n'est pas un problème du tout. Il n'y a pas
18 de problème pour ce qui est du nom, je veux dire.
19 Dans les informations dans les médias, il y avait plusieurs informations.
20 Je ne sais pas quelle est l'information qui soit exacte. Je peux vous dire
21 ceci, toutefois s'agissant de la Serbie et dans les alentours aussi, mais
22 surtout en Serbie, les organisations internationales - et c'est quelque
23 chose qu'ont rapporté un très grand nombre de médias serbes - on avance le
24 chiffre environ de 7 000 civils en tant que victimes de génocide.
25 M. TOLIMIR : [interprétation]
26 Q. Merci. Je suis réellement désolé de vous avoir appelé M. Babic.
27 Alors, Monsieur Simic -- très bien. C'était simplement pour illustrer un
28 exemple.
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1 Je voudrais pour l'instant que l'on passe à une autre page et un
2 autre document. Il s'agira du document D176.
3 Il s'agit d'un document de l'ABiH, leur 2e Corps d'armée de Tuzla --
4 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Y a-t-il une traduction en anglais ?
5 On devrait pouvoir voir une traduction en anglais.
6 L'ACCUSÉ : [interprétation] Vous avez raison, Monsieur le Président.
7 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Voilà, la traduction apparaît
8 maintenant à l'écran.
9 Veuillez poursuivre, je vous prie.
10 M. TOLIMIR : [interprétation]
11 Q. Il s'agit d'un document de l'ABiH, commandement du 2e Corps d'armée,
12 document qui a été rédigé le 27 juillet 1995. Alors, c'est un document qui
13 a été rédigé immédiatement après les événements et qui portent le titre :
14 "Chronologie des événements entourant la percée de la 28e Division." Et
15 puis par la suite, on peut voir à qui le document est destiné. Le document
16 a été signé par le commandant Sead Delic, commandant de la brigade de ce
17 même corps d'armée.
18 Or, à la page 12, ligne 2, vous avez dit, et je vais citer vos propos :
19 "Beara affirmait que l'unité de Naser Oric était passée, avait réussi à
20 sortir, qu'ils avaient pris une Praga, et que cette unité a réussi à
21 acquitter la zone."
22 Voyons ce que disent les sources musulmanes. Donc c'est ce que vous avez
23 dit à la page 12, ligne 2. Permettez-moi maintenant à passer à la page 7 du
24 document anglais.
25 L'INTERPRÈTE : Les interprètes demandent à M. Tolimir de répéter le numéro
26 de la page.
27 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Pourriez-vous, je vous prie, de
28 nouveau nous donner la page en B/C/S. Vous avez dit qu'il s'agissait de la
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1 page 7 en anglais.
2 L'ACCUSÉ : [interprétation] C'est la page 5 en B/C/S. Merci. M. TOLIMIR :
3 [interprétation]
4 Q. Deuxième paragraphe à partir du haut, paragraphe où on peut lire :
5 "A 4 heures 30, le 16 juillet," eh bien, passons maintenant au paragraphe
6 suivant, "le premier groupe est passé vers 13 heures."
7 Il s'agit du quatrième paragraphe du texte en anglais. Donc je cite :
8 "Le premier groupe est passé vers 13 heures et le passage s'est poursuivi
9 pendant les heures de l'après-midi" --
10 Mais j'ai perdu le texte maintenant. Je ne sais pas qui en est le
11 responsable. Bien.
12 Merci beaucoup.
13 "Le passage s'est poursuivi dans l'après-midi et dans le courant de la nuit
14 du 16 au 17 juillet 1995, tout comme au cours du mois de juillet, Les 16 et
15 17 juillet 1995, d'autres petits groupes ont continué d'y passer. Par
16 exemple, 33 membres de la 28e Division sont passés par le corridor au
17 courant de la nuit du 19 au 20 juillet 1995.
18 "Le nombre total des personnes ayant emprunté le corridor pour y
19 passer de l'autre côté est de," et je manque maintenant de texte. Passons
20 maintenant à la page suivante car le texte est effacé.
21 Maintenant, je vais d'abord vous poser une question : est-ce que c'est dont
22 a parlé M. Beara, à savoir que l'unité avait réussi à effectuer une percée
23 et qu'elle était arrivée jusqu'à la ligne de défense de la Republika
24 Srpska, c'est-à-dire Kladanj et Tuzla ?
25 R. Il avait dit que l'unité de Naser Oric s'était retirée. Il n'a pas dit
26 tout ceci en détail, comme il est indiqué ici dans ce rapport. Il a sans
27 doute pensé aux membres de cette unité. Mais je ne me souviens plus de
28 quelle unité il s'agissait réellement. Je ne sais plus si c'étaient les
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1 unités de Naser Oric ou s'il s'agissait d'autres unités.
2 Q. Merci. Je voudrais revenir à la page précédente. Vous allez voir que
3 c'était Naser Oric, effectivement, qui en était le commandant. Je vais
4 maintenant donner lecture du premier paragraphe que l'on trouve à l'écran.
5 On peut lire, je cite :
6 "Dans le cadre des opérations de combat, les unités de la 28e Division,
7 ainsi que les unités de la 28e Division KoV, ont causé des pertes à
8 l'agresseur. Nous avons retrouvé 20 cadavres de soldats des agresseurs sur
9 notre territoire. D'après les informations de l'agresseur, on a procédé à
10 la capture de près de PEB," ça veut dire lutte contre-électronique, "on a
11 apporté à l'hôpital de Zvornik 30 corps. On a réussi à capturer six
12 personnes, un char qu'ils ont utilisé directement pour poursuivre les
13 opérations contre l'agresseur. Il y avait également un dépôt de munitions,
14 ainsi qu'un canon autopropulsé. Ils ont tous tiré sur le village de
15 Baljkovica."
16 J'aimerais savoir si vous pensez réellement que les opérations de combat se
17 sont déroulées de cette façon-ci.
18 R. Je n'ai fait que citer les commandants. Ils ont dit que, si je me
19 souviens bien, ils se sont retirés, mais dans le cadre des opérations de
20 combat, mais je ne sais pas ce qu'ils entendaient par opérations de combat.
21 Je ne peux pas vous parler de ce que je n'ai pas vu de mes propres yeux,
22 alors que je ne me trouvais même pas dans la région.
23 Q. Très bien. Merci, Monsieur Simic. C'est donc pourquoi je ne vous
24 poserai plus de questions sur le sujet. Je voulais simplement vous monter
25 ce document pour vous montrer que Naser Oric a pris part à tout ceci avec
26 son unité qui partait de Tuzla. Je n'arrive pas à retrouver le passage. Mon
27 assistant nous aidera. De toute façon, vous nous avez dit que ce n'était
28 pas pertinent, puisque vous n'étiez pas témoin oculaire de tous ces
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1 événements.
2 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je voudrais, pour l'instant, que l'on affiche
3 la pièce 1D55. Merci.
4 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur Tolimir, est-ce que vous
5 faites référence à la pièce D155, ou faites-vous référence à la pièce 1D55
6 ?
7 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je parle de la pièce D155.
8 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Très bien. Oui, effectivement, c'est
9 exact, ce document figure sur votre liste des documents présentés.
10 L'ACCUSÉ : [interprétation] Bien. Merci. Voici de nouveau un document de la
11 République de Bosnie-Herzégovine du 16 juillet 1995, intitulé "Information
12 sur la situation à Srebrenica." C'est un document qui a été envoyé ou qui
13 était présenté après la chute de Srebrenica au président Alija Izetbegovic.
14 Pouvons-nous voir la page 4 en anglais et la page 3 en serbe, le
15 passage qui suit. En fait, c'est le dernier paragraphe qui m'intéresse,
16 paragraphe 3 donc. On peut lire comme suit, je cite :
17 "Les unités de la 28e Division des KoV se sont retirées de Srebrenica alors
18 qu'ils étaient en train d'avoir des opérations de combat. Ils sont restés
19 compacts et entiers. Ils ont compté des succès sur le territoire occupé.
20 Ils ont causé de grandes pertes sur l'agresseur. Jusqu'à maintenant, ils
21 ont huit Chetniks (en vie) en captivité, et les unités de la 28e Division
22 des KoV ont réussi à établir un lien avec les unités qui s'étaient
23 infiltrées auprès du 2e Corps. Leurs forces conjointes ont continué les
24 opérations de combat dans la zone temporairement occupée."
25 Et j'aimerais maintenant que l'on se penche sur la dernière page afin
26 de voir la signature.
27 Nous voyons qu'il est indiqué ici en anglais et en B/C/S, commandant
28 général d'armée Rasim Delic.
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1 M. TOLIMIR : [interprétation]
2 Q. Alors, dites-moi, s'il vous plaît, est-ce que Beara vous a dit la
3 vérité lorsqu'il vous a dit que la majorité avait réussi à effectuer la
4 percée ?
5 R. Je n'ai absolument aucune raison de ne pas croire les documents
6 officiels, mais surtout lorsqu'ils sont signés par les généraux des corps
7 d'armée.
8 Q. Très bien. Merci.
9 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demanderais que l'on montre la pièce D38.
10 Merci.
11 Nous voyons le document affiché à l'écran.
12 M. TOLIMIR : [interprétation]
13 Q. Page 10, ou 11 plutôt, ligne 22, le Procureur vous a demandé s'il vous
14 a parlé du sort qui avait été réservé aux hommes et pourquoi ces derniers
15 n'avaient-ils pas été transférés en même temps avec les femmes et les
16 enfants.
17 M. Tokaca dit ici : "Nous avons trouvé 500 habitants de Srebrenica vivants
18 qui étaient considérés comme étant portés disparus."
19 J'aimerais savoir si dans les médias l'année dernière et cette année
20 on a souvent parlé de ce qu'a déclaré M. Tokaca sur le territoire de la
21 Republika Srpska et de ces entretiens accordés aux médias ?
22 R. Oui. Certaines agences, et je pense que c'était surtout l'agence
23 "Beta" qui a transmis les informations que Tokaca leur a données concernant
24 une conférence de presse. Et pour ce qui est de l'heureux hasard des
25 personnes qui ont été retrouvées vivantes, il a été question de listes
26 électorales, parce que je ne me souviens plus de quelle année il
27 s'agissait, mais lors des élections dans la Fédération de Bosnie-
28 Herzégovine, supposément que dans les médias on a vu des noms de personnes
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1 qui avaient été proclamées comme ayant été tuées lors de l'opération
2 Srebrenica, et c'était, je dois vous dire, particulièrement pénible de voir
3 les sentiments que cela a causé chez certaines personnes.
4 M. Beara en a également parlé dans un entretien que j'ai mené avec
5 lui, enfin brièvement.
6 Q. Très bien. Maintenant, prenons le troisième paragraphe de ce
7 document que nous voyons ici, qui se lit comme suit :
8 "Le plus grand problème en Bosnie-Herzégovine est le monopole perfide
9 sur les informations, comme l'a déclaré Tokaca, en insistant sur le fait
10 que lorsqu'on a procédé à la création de l'atlas bosnien des crimes, le
11 centre de documentation et d'information a souhaité briser les monopoles."
12 Donc, j'aimerais savoir, est-ce que Tokaca, avec cette information
13 s'agissant du fait que 500 habitants de Srebrenica retrouvés en vie et qui
14 avaient été considérés comme ayant été disparus, est-ce que ceci est une
15 réalité, à savoir qu'il y avait un monopole des informations en Bosnie-
16 Herzégovine, puisque vous nous avez dit tout à l'heure que plusieurs médias
17 faisaient des rapports différents ?
18 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur Vanderpuye.
19 M. VANDERPUYE : [interprétation] Monsieur le Président, je pense que les
20 éléments de preuve dans cette affaire démontrent que s'agissant de cet
21 article, soit qu'il y a eu une rétractation ou une correction de cet
22 article, mais M. Tolimir ne l'a pas mentionné au témoin. Donc, M. Tolimir
23 présente ce document comme étant des propos attribués à M. Tokaca, sachant
24 très bien qu'une telle information figure au dossier, à savoir qu'il y a eu
25 rétractation. Donc, je pense que ce type d'information induit le témoin en
26 erreur et je pense que M. Tolimir -- il s'agit de la pièce P1370. Et si M.
27 Tolimir souhaite poser ces questions sur cet article, je pense qu'il serait
28 juste de montrer au témoin ce que dit le compte rendu d'audience concernant
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1 ce qu'a dit M. Tokaca concernant ces personnes portées disparues.
2 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Ce document qui se trouve à l'écran
3 en ce moment, si je ne m'abuse, était encore une fois un document qui
4 provient de l'internet et qui a été publié le 31 mars 2010. Donc, il ne
5 s'agit pas de très longtemps. Ce n'est pas un document qui a été publié il
6 y a très longtemps.
7 Donc, Monsieur Simic, j'aimerais savoir si vous avez jamais vu cet article,
8 soit sur internet ou ailleurs ? Est-ce que vous en avez pris connaissance ?
9 LE TÉMOIN : [interprétation] Non. Je sais seulement que des vétérans de la
10 Republika Srpska, puisqu'il existe une organisation sur les personnes
11 portées disparues, ces derniers ont à plusieurs reprises parlé de personnes
12 pour lesquelles ils estimaient qu'elles avaient péri, qu'elles étaient
13 mortes. Donc, je ne sais pas de qui il s'agit, mais je n'ai jamais pris
14 connaissance de cet article. Je ne l'ai pas lu jusqu'à maintenant.
15 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur Tolimir, vous devriez tenir
16 compte du fait que le fait déposé sur cet article est assez compliqué,
17 puisque le témoin n'a aucune connaissance de cet article.
18 Veuillez poursuivre, je vous prie.
19 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
20 J'ai demandé au témoin ceci : je voulais savoir si lui, en tant que
21 journaliste, il estimait qu'il avait un monopole sur l'information et si ce
22 monopole existe encore sur les territoires sur lesquels une guerre a eu
23 lieu.
24 LE TÉMOIN : [interprétation] Je peux seulement vous parler de la Serbie, si
25 vous voulez. Je peux vous parler de la Serbie-et-Monténégro puisqu'à un
26 certain moment, pendant une certaine époque, nous vivions tous ensemble
27 dans un même Etat.
28 Oui, effectivement, il existait un monopole, et dans certaines situations
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1 et dans certains cas, le monopole était terrifiant. Mais ce monopole,
2 heureusement, est beaucoup moins important maintenant et les choses sont
3 beaucoup plus faciles. Il est beaucoup plus facile de découvrir certains
4 éléments maintenant, certaines histoires. Je pense que le monopole n'est
5 plus aussi fort qu'il l'a été avant, si vous pensez, bien sûr, au monopole
6 de certaines structures politiques exerçant sur les médias, le fait de
7 pouvoir dissimuler des faits sur un événement qui s'est déroulé ou de
8 dissimuler des détails ou quelque chose de semblable.
9 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Nous avons un problème technique de
10 nouveau. Le transcript, le e-court ne fonctionne plus. Il s'est arrêté à la
11 page 51, ligne 5. Le "LiveNote" fonctionne encore. Je voulais simplement
12 l'ajouter pour le compte rendu d'audience.
13 Vous pouvez poursuivre, Monsieur Tolimir. Nous n'allons rien perdre sur le
14 compte rendu d'audience, mais il est peut-être difficile de regarder un
15 document à l'écran tout en regardant le compte rendu d'audience.
16 Veuillez poursuivre.
17 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
18 M. TOLIMIR : [interprétation]
19 Q. A la page 29, vous avez dit :
20 "Cela est vrai, ce qu'il a dit, que ce chiffre a été progressivement
21 diminué, et le chiffre équivalait à 7 000 personnes environ, parce que le
22 chiffre de départ était le chiffre de 14 000."
23 C'est la raison pour laquelle je vous pose la question encore aujourd'hui.
24 Il existe une forme de monopole. Le public à Srebrenica n'a pas
25 connaissance des chiffres exacts du nombre de victimes ?
26 R. Je ne peux pas dire qu'il y a un monopole et que cela a un effet sur ce
27 chiffre de 7 000 personnes qui ont été tuées à cet endroit-là. Mais c'est
28 un fait qu'il y a des personnes qui mettent en doute ce chiffre. Bien
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1 évidemment, je n'ai pas vu de preuve qui permettrait d'indiquer qu'il y
2 avait moins de 7 000 victimes. Il y a de nombreux documents qui ne sont
3 toujours pas dans le domaine public.
4 [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]
5 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] J'ai été informé par le greffier que
6 nous rencontrons des problèmes techniques au niveau du prétoire
7 électronique. Si cela ne vous pose pas de problème, Monsieur Tolimir, nous
8 pourrons remettre en route l'ensemble du système après la pause, mais ceci
9 ne peut être fait comme il faut que pendant la pause.
10 Donc, nous pourrions avoir la pause maintenant, si cela convient aux
11 deux parties. Mais vous pouvez poursuivre également, si vous le souhaitez.
12 C'est à vous de prendre la décision. Bien sûr, nous avons l'intégralité du
13 compte rendu d'audience sur "LiveNote."
14 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
15 Il ne me reste plus qu'une question, donc c'est comme vous
16 l'entendez. Après cette question, j'en aurai terminé avec le contre-
17 interrogatoire de ce témoin.
18 M. TOLIMIR : [interprétation]
19 Q. Monsieur Simic, vous nous avez dit que vous n'avez vu aucune preuve de
20 ce chiffre qui a été avancé de 7 000, voire moins. Avez-vous vu une
21 quelconque preuve des autres chiffres ? Ou s'agit-il d'un chiffre
22 approximatif qui a été diffusé dans les médias ?
23 R. Eh bien, ce qui correspondrait à une preuve ? Si mon avis est pertinent
24 d'une manière ou d'une autre ici, je pense que ces éléments de preuve
25 devraient être présentés par une commission compétente, voire peut-être
26 même une commission internationale qui fournirait la liste de toutes les
27 personnes qui ont été tuées.
28 C'est un fait que différents chiffres ont été diffusés. Les médias de
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1 Sarajevo ont parfois indiqué que certaines personnes avaient resurgi; elles
2 avaient été déclarées mortes ou ensevelies ou inhumées dans des fosses
3 communes, ou bien portées disparues, et ces personnes se sont présentées et
4 ont voté. Je me souviens qu'il existait de tels reportages et des articles
5 que l'on voyait dans la presse de Belgrade.
6 Peut-être qu'il existe une telle liste quelque part, mais je ne sais pas si
7 elle existe.
8 Q. Merci, Monsieur Simic, d'être venu au Tribunal de La Haye pour déposer.
9 Je vous remercie, et je vous souhaite un bon voyage de retour. Soyez
10 heureux et vivez longtemps.
11 R. Merci.
12 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Président, j'en ai terminé avec le
13 contre-interrogatoire de ce témoin, et nous n'avons plus de questions à
14 poser à ce témoin.
15 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Je vous remercie beaucoup, Monsieur
16 Tolimir.
17 Monsieur Vanderpuye, questions supplémentaires.
18 M. VANDERPUYE : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Je demande à
19 ce que nous fassions la pause maintenant. Je souhaite revoir quelque chose
20 qui figure dans le compte rendu d'audience, et si le prétoire électronique
21 ne marche pas, il se peut que je ne puisse pas le faire.
22 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Soit. Nous allons lever l'audience et
23 avoir notre deuxième pause, et reprendre à 18 heures moins 20.
24 --- L'audience est suspendue à 17 heures 08.
25 --- L'audience est reprise à 17 heures 42.
26 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur Vanderpuye, les questions
27 supplémentaires.
28 M. VANDERPUYE : [interprétation] Je n'ai qu'une question.
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1 Nouvel interrogatoire par M. Vanderpuye :
2 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur Simic.
3 R. Bonjour.
4 Q. Vous avez répondu à la dernière question posée par le général Tolimir.
5 Il vous a dit que vous avez entendu différents chiffres quand au nombre de
6 personnes qui ont été tuées, qui ont été retrouvées dans des fosses
7 communes, de différentes sources. Et vous avez dit :
8 "Eh bien, la preuve, pour moi, cette preuve, si vous l'avez, il faudrait la
9 présenter à une commission compétente, peut-être une commission
10 internationale qui présenterait la liste des personnes tuées. C'est à eux
11 qu'il faut poser la question."
12 Voici la question que j'ai à vous poser : est-ce que vous avez entendu
13 parler de ce chiffre de 5 777 personnes dont les restes ont été retrouvés
14 dans des fosses communes, dont les corps ont été identifiés par la
15 commission internationale chargée de la recherche de personnes portées
16 disparues par le biais des analyses ADN ? Est-ce que vous avez entendu
17 parler de cela ?
18 R. Oui, j'ai entendu et évoqué ce chiffre, justement, et c'est pour cela
19 qu'on a dit qu'il fallait faire une liste. Parce qu'en dépit du fait que
20 cette liste avait été publiée à un moment donné dans différents cercles,
21 dans différentes émissions à la télévision, et cetera, surtout quand il
22 s'agit des organisations non gouvernementales, personne ne va vous donner
23 un chiffre exact. Par exemple, le chiffre 5 717, non, on va vous parler de
24 7 000 personnes ou davantage. C'est de l'à peu près. Ces informations-là ne
25 sont pas des informations précises. C'est pour cela que j'ai répondu comme
26 cela. Je sais qu'il y a eu des listes, qu'il y a eu des exhumations, qu'on
27 a fait des analyses, et cetera. Mais en dépit de cela, même si l'on a ce
28 chiffre exact, 5 700, vous avez quand même des chiffres fantaisistes qu'on
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1 vous présente, et je ne pense pas qu'il faut jouer avec ces chiffres-là. Il
2 faut respecter chaque victime. Par respect pour les victimes, justement, il
3 faudrait donner un chiffre définitif et l'utiliser strictement.
4 Q. Mais vous comprendrez que cette identification par les prélèvements de
5 l'ADN, c'est un processus qui dure, et le chiffre que je vous ai fourni,
6 c'est un chiffre qui date du mois de février 2010. Peut-être que ce chiffre
7 va encore accroître.
8 R. Oui, bien sûr.
9 Q. Merci.
10 M. VANDERPUYE : [interprétation] Je n'ai pas d'autre question.
11 [La Chambre de première instance se concerte]
12 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur Simic, avec ceci se termine
13 votre déposition ici. Nous souhaitons vous remercier d'être venu ici,
14 d'être venu à La Haye pour répondre aux questions que l'on vous a posées.
15 Vous pouvez revenir à vos activités habituelles.
16 A présent, je vous remercie donc à nouveau.
17 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci à vous aussi.
18 [Le témoin se retire]
19 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Bonjour, Monsieur Thayer. Pendant que
20 vous vous préparez pour le témoin suivant, on va le faire entrer dans ce
21 prétoire.
22 [Le témoin est introduit dans le prétoire]
23 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Bonjour, Monsieur.
24 LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour.
25 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur Mitrovic, bienvenue devant
26 ce Tribunal. Je vous prie de bien vouloir lire le texte de la déclaration
27 solennelle qui va vous être montré par l'huissier.
28 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la
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1 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.
2 LE TÉMOIN : LJUBOMIR MITROVIC [Assermenté]
3 [Le témoin répond par l'interprète]
4 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Merci. Veuillez vous asseoir et
5 mettez-vous à l'aise.
6 Le Procureur, M. Thayer, va commencer son interrogatoire principal.
7 Monsieur Thayer, vous avez la parole.
8 M. THAYER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
9 Bonjour, Monsieur, Madame les Juges. Bonjour à tout le monde ici.
10 Interrogatoire principal par M. Thayer :
11 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur le Témoin.
12 R. Bonjour.
13 Q. Veuillez vous présenter pour le compte rendu d'audience.
14 R. Je m'appelle Ljubomir Mitrovic.
15 Q. Pouvez-vous nous donner votre date de naissance.
16 R. Je suis né le 27 septembre 1939.
17 Q. Et vous êtes né où et où est-ce que vous avez grandi ?
18 R. Dans le village de Malesevci, dans la municipalité d'Ugljevik. En
19 revanche, j'ai grandi dans la municipalité de Bijeljina, dans le village de
20 Brodac, ainsi qu'à Sremska Raca, dans la municipalité de Sremska Mitrovica.
21 Q. Monsieur, où habitez-vous à présent ?
22 R. A Bijeljina.
23 Q. Vous avez déposé ici au mois de juillet 2008, où vous avez été le
24 témoin de la Défense de M. Beara. Est-ce que vous avez eu l'occasion
25 d'écouter à nouveau cette déposition ?
26 R. Oui, en effet.
27 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur Gajic.
28 M. GAJIC : [interprétation] Monsieur le Président, je vois que la réponse
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1 du témoin quand on lui a demandé où il vivait à présent, cette réponse ne
2 se trouve pas consignée au compte rendu d'audience. Il s'agit de la page
3 37. C'est quelque chose qui devait figurer au niveau de la ligne 10, mais
4 on ne voit pas de réponse.
5 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Exact.
6 Monsieur Thayer.
7 M. THAYER : [interprétation] J'avais entendu. J'espérais qu'on allait le
8 voir par la suite dans le compte rendu d'audience, mais je peux reposer la
9 question.
10 Q. Monsieur, le compte rendu d'audience, pour des raisons techniques, ne
11 reflète pas votre réponse à la question que je vous ai posée tout à
12 l'heure, à savoir où habitez-vous à présent ?
13 R. A présent, j'habite à Bijeljina.
14 Q. Merci. On va revenir sur votre déposition de 2008. Est-ce que vous
15 souhaitiez ajouter ou corriger ou enlever quoi que ce soit de cette
16 déposition avant de passer à votre déposition en l'espèce ?
17 R. Là où on peut lire la 38e Brigade, il ne s'agit pas de la 38e Brigade,
18 mais la 38e Division de Partisans. Il faut corriger cela.
19 Ensuite, il est nécessaire d'expliquer quelque chose, expliquer
20 comment avait fonctionné la commission jusqu'au moment où j'en assume la
21 fonction de président. Où se trouve la différence ? Le président de la
22 Commission chargée des échanges était responsable devant le commandant du
23 corps d'armée, et ensuite on envoyait ses propositions à l'état-major
24 principal.
25 Mais au moment où je suis arrivé, le commandant du corps avait
26 transmis une partie de ses autorités au chef de sécurité, de sorte que je
27 n'étais plus dans l'obligation de communiquer directement avec le
28 commandant du corps d'armée, mais avec le chef de sécurité, qui ensuite
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1 communiquait avec le commandant du corps d'armée et les autres supérieurs
2 au niveau de l'état-major principal.
3 Et puis autre chose. Je demanderais que les événements de Batkovici,
4 ce qui s'y est produit jusqu'à mon arrivée le 15 mars, et ensuite ce qui
5 s'est produit par la suite, à partir du moment où je suis arrivé, écoutez,
6 je peux parler de cette partie-là, à partir du moment où je suis arrivé.
7 Mais je ne peux pas vous parler de la partie qui a précédé mon arrivée. Je
8 n'étais pas présent tout simplement. Sans doute que la situation au début
9 n'était pas la même qu'elle ne l'est devenue par la suite. Voilà.
10 Et puis je pourrais ajouter autre chose, mais je peux le faire par la
11 suite quand on va parler des personnes qui sont entrées en contact, et
12 cetera, quand je me suis rendu là-bas. Et on peut parler de cette partie-là
13 précise au moment où --
14 Q. Merci. Merci. On va parler de cela et très bientôt.
15 Ce que je voudrais faire à présent, c'est de voir avec les Juges de
16 la Chambre votre passé professionnel. Donc on va passer en revue votre
17 éducation, ce que vous avez fait dans votre vie.
18 Pourriez-vous donner quelques éléments aux Juges quant à votre curriculum
19 vitae, ce que vous avez fait dans la vie, ce que vous avez suivi comme
20 formation, et cetera, et cetera. Et ensuite, on va continuer à partir du
21 moment où les hostilités éclatent.
22 R. Moi, j'ai fait l'école secondaire à Bijeljina, ensuite j'ai fait
23 l'école normale à Bijeljina, et les études de pédagogie à Belgrade.
24 J'habitais Bijeljina à partir de 1953. J'ai travaillé pendant deux années
25 en tant qu'instituteur, pendant huit années en tant que professeur de
26 secondaire, deux années en tant que directeur d'une école. Ensuite, j'ai
27 quitté le monde d'éducation, pour rejoindre la Sûreté de l'Etat.
28 Au niveau de la Sûreté de l'Etat, j'ai travaillé comme opérationnel.
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1 Et j'y suis resté plusieurs années. Ensuite, je suis devenu inspecteur
2 autonome au niveau de la sécurité publique. Et en 1986, j'ai été affecté
3 dans la Défense territoriale, où j'ai assumé le rôle de commandant à cause
4 de certains problèmes qui prévalaient là-bas. Vu que j'avais acquis mes
5 droits pour la retraite au niveau des organes des affaires intérieures, eh
6 bien, j'ai préféré rester. J'ai préféré rester. J'ai accepté cette
7 affectation pour quatre années, donc l'affectation au niveau de la Défense
8 territoriale, au poste de commandant, avec la possibilité de retourner dans
9 le ministère des Affaires intérieures. Un accord avait été passé dans ce
10 sens. Nous avons signé, d'ailleurs, un accord, et voilà comment les choses
11 se sont passées jusqu'en 1991. A ce moment-là, mon mandat avait expiré. On
12 m'a envoyé à Sarajevo pour que je subisse des examens. J'ai fait ces
13 examens, et donc conformément à cet accord écrit, je devais regagner le
14 ministère. Cependant, les autorités musulmanes et serbes, le SDA et le SDS,
15 les deux partis, s'étaient mises d'accord sur un point. Ils voulaient se
16 partager les postes de direction de sorte que ces postes soient partagés
17 entre le SDS et le SDA. Et vu que je ne faisais partie d'aucun parti
18 politique, vu qu'avec l'extinction de la Ligue des Communistes, je ne
19 voulais pas rester dans la politique, parce que je préférais ne pas avoir
20 d'affiliation politique que de mal choisir. Et ils m'avaient très bien
21 compris à l'époque. A l'époque, il y avait aussi un autre parti, c'était le
22 mouvement pour la Yougoslavie. Et on m'a proposé, au niveau du QG, de
23 rejoindre ce parti-là.
24 Mais il était trop tard de faire quoi que ce soit. On ne pouvait plus
25 rien faire. Même ce parti-là ne pouvait plus rien faire. Et la seule chose
26 qui a résulté de l'existence de ce parti, ce sont de gros problèmes pour
27 les officiers de la JNA, parce que de nombreux villages et de nombreuses
28 villes favorisaient le mouvement pour la Yougoslavie, et moi, on m'a
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1 proposé une retraite. J'ai accepté, et je suis parti à la retraite en 1991.
2 Q. Simplement pour que nous nous comprenions, Monsieur, vous, en tant
3 qu'agent de renseignement travaillant pour les services de Sûreté de l'Etat
4 et les services de sécurité publique, vous étiez où, Monsieur ? A quel
5 endroit avez-vous rempli cette fonction ? Etait-ce à Bijeljina ou ailleurs
6 ?
7 R. Lorsque j'ai travaillé au sein des services de Sûreté de l'Etat dans le
8 centre de Tuzla, je travaillais dans le service de Bijeljina. Pour ce qui
9 est des services de sécurité publique, je travaillais à Bijeljina.
10 Q. Encore une fois, vous avez évoqué la TO. Vous voulez parler de quelle
11 TO, s'il vous plaît ?
12 R. Alors, c'était le personnel municipal de la Défense territoriale, qui
13 est dirigé par le commandant. Il y a également du personnel au niveau de la
14 république et du district, mais lorsqu'il y a des opérations de guerre, à
15 ce moment-là il s'agit d'une unité militaire. La JNA était une unité
16 militaire, et l'unité de la TO est alors resubordonnée à cette unité de la
17 JNA.
18 Q. Ecoutez, ma question n'est peut-être pas aussi claire qu'elle aurait dû
19 l'être. En fait, c'est beaucoup plus simple que ça. La TO que vous avez
20 citée se trouvait où exactement ?
21 R. A Bijeljina. Et le siège de cet état-major municipal et des unités
22 avait été rattaché au plan territorial à Bijeljina. Il y avait plusieurs
23 unités qui représentaient environ 10 000 membres, qui étaient le personnel
24 dans les districts, dans les zones, les différents détachements, les
25 brigades, et cetera.
26 Q. Donc je crois que ceci nous amène à l'année 1991, Monsieur. Pourriez-
27 vous, en fait, maintenant nous parler du début des hostilités, de l'endroit
28 où vous étiez et dans quelle unité vous avez servi après cela ?
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1 R. Oui. En 1991, au moment où une réception avait été organisée à
2 l'occasion de mon départ en retraite, le représentant de l'état-major du
3 district, le commandant adjoint, était là parce que le commandant était
4 absent. Il y avait également le commandant du Régiment des Transmissions de
5 Bijeljina et le commandant de la 38e Brigade de Roquettes des Partisans. Et
6 je coopérais très bien avec ces officiers de Bijeljina lorsque je
7 commandais. Nous nous connaissions bien. Le commandant de la 38e Division,
8 lors d'échanges, parce qu'il y avait d'autres invités, a laissé entendre
9 que la division devait être dirigée par les officiers qui commandaient. Il
10 y avait des officiers d'appartenance ethnique musulmane et croate qui
11 avaient quitté le commandement, donc il ne restait que plusieurs officiers.
12 Cependant, je leur ai dit que je n'avais même pas pris de repos et je
13 savais que je serais engagé ailleurs parce que la guerre était imminente,
14 mais je ne souhaitais pas être un membre de la sécurité.
15 Plusieurs jours ont passé et il m'a appelé pour un entretien. Il m'a
16 proposé d'être commandant adjoint chargé des questions de moral, ce que
17 j'ai accepté, au sein de la 38e Division légère des Partisans. Cependant,
18 étant donné qu'il n'y avait pas de chef de la sécurité, je devais m'occuper
19 de ces deux fonctions à la fois, et j'ai demandé à ce que ces deux postes
20 soient remplis de façon à ce que je puisse remplir une seule des deux
21 fonctions. Comme il eut été plus facile de trouver un commandant adjoint
22 chargé des questions de moral, j'ai pris la décision moi-même et j'ai
23 choisi un agent de la TO municipale qui était un professeur chargé des
24 questions de défense, Ivanic. Je l'ai nommé à ce poste et il l'a accepté. A
25 l'époque, au moment où je suis arrivé là-bas, les opérations n'avaient pas
26 encore commencé sur le territoire de Bosnie-Herzégovine. Le corps se
27 trouvait à Tuzla en 1991. En février 1991, j'étais à Tuzla et j'ai emmené
28 une section de soldats pour qu'ils soient entraînés pour devenir policiers
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1 militaires. Je les ai ramenés, et ce n'est que le 1er avril que les
2 opérations de combat ont commencé à Bijeljina.
3 Et pour avoir une image plus claire, je dois dire ce qui suit : dans cette
4 zone, pendant la Deuxième Guerre mondiale, il y a eu une résistance
5 farouche au fascisme. Quasiment tout le monde était du côté de l'Armée de
6 libération du peuple. Mais en temps de paix, les officiers qui étaient
7 respectés de tous, les officiers de la JNA, quelle que soit leur
8 appartenance ethnique, eh bien, dans certains villages qui étaient
9 économiquement plus forts, et lorsqu'une des parties a perdu les élections,
10 les gens avaient une attitude négative vis-à-vis de la JNA. Et certains
11 officiers ont perdu leurs postes. Différents hommes politiques ont été
12 nommés. Et ensuite, au début de la guerre, certains d'entre eux sont
13 revenus. Ceci avait un effet sur ces officiers, parce que dans certains
14 cercles politiques on les appelait des traîtres, et c'était très difficile
15 pour le personnel d'active. Le commandant d'une division m'accompagnait
16 partout, et je disais : Attendez un instant. Moi, je ne suis que
17 réserviste. Je suis un officier. Je suis exactement comme vous. Et je
18 souhaitais dire qu'il n'était pas vrai que quelqu'un avait trahi son
19 peuple, et cetera.
20 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Maître Gajic, j'attendais la
21 conclusion de cette longue réponse.
22 Maître Gajic.
23 M. GAJIC : [interprétation] Monsieur le Président, à la page 62, ligne 1,
24 la 38e Brigade de roquettes des Partisans est évoquée. Et à la même page, à
25 la ligne 12, on parle de la 38e Division légère des Partisans.
26 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, division d'infanterie. Il n'y a pas de
27 brigade. Il n'y a pas de roquette. Il s'agit simplement d'une division.
28 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Je vous demande, s'il vous plaît, de
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1 bien vouloir attendre avant de prendre la parole, parce que sinon, c'est
2 difficile au niveau du compte rendu d'audience si tout le monde parle en
3 même temps.
4 Maître Gajic.
5 LE TÉMOIN : [interprétation] Pardonnez-moi.
6 M. GAJIC : [interprétation] Je demande au Procureur de bien vouloir
7 éclaircir ce point, parce qu'il me semble que l'interprétation n'était pas
8 bonne. Il s'agit de la 38e Brigade légère des Partisans.
9 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur Thayer.
10 M. THAYER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Maintenant que
11 nous avons entendu la fin de la réponse, je vais poser quelques questions
12 de suivi.
13 Q. Monsieur, dans les premières réponses que vous nous avez fournies,
14 lorsque je vous ai demandé si vous aviez une quelconque correction ou
15 modification à apporter à votre déclaration préalable, vous avez indiqué
16 qu'il y avait une brigade qui avait été citée qui, en réalité, correspond à
17 une division. Alors, vous avez parlé d'une unité 38e, ou d'une 38e des
18 Partisans dans laquelle vous avez servi. Pourriez-vous nous dire exactement
19 de quoi il s'agissait ? Ceci a été traduit ou interprété de différentes
20 manières. Veuillez nous le dire, s'il vous plaît.
21 R. La 38e Division d'infanterie légère des Partisans.
22 Q. Alors, avant de poursuivre, encore une fois, je ne sais pas si vous
23 avez terminé sur la question du rôle qui était le vôtre au sein de la 38e
24 Division d'infanterie légère des Partisans. Mais pourriez-vous nous dire
25 exactement quel était votre poste, et si la division a changé de noms à un
26 moment donné, et est-ce que vous êtes resté au sein de cette division ?
27 R. Dans la 38e Division, j'étais à l'origine assistant du commandant
28 chargé des questions de moral, et j'avais les mêmes fonctions qu'un chef de
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1 la sécurité. Après peut-être deux mois, j'ai été nommé chef de la sécurité,
2 parce que j'avais trouvé une autre personne adéquate qui avait été nommée à
3 mon ancien poste, assistant du commandant chargé des questions de moral.
4 Etant donné que le commandement de l'armée yougoslave avait envoyé une
5 dépêche au mois d'avril - je ne suis pas sûr de la date exacte - cette
6 dépêche avait été envoyée à tous les commandants subordonnés en Bosnie-
7 Herzégovine, et indiquait que tous les officiers d'active qui souhaitaient
8 quitter la Bosnie-Herzégovine devaient le faire. Je crois que la date était
9 celle du 20 mai 1992.
10 Le commandant de la division m'a montré la dépêche, mais les officiers n'en
11 ont pas été informés tout de suite. Ce n'est que quelques jours avant
12 l'expiration du délai, de façon à ce que les quelques officiers d'active
13 qui restaient ont quitté la division. Il n'y avait qu'un adjudant qui est
14 resté. Les autres sont partis en direction de la Serbie, et la division
15 n'existait plus à partir de ce moment-là, et donc le corps l'a
16 officiellement démantelée, et j'ai été transféré à la 17e Brigade des
17 Partisans. Après deux ou trois mois, cette brigade a été rebaptisée 1ère
18 Brigade de Semberija. J'étais également chef de la sécurité de cette
19 brigade.
20 La brigade est allée sur le mont Majevica, où était sa zone de
21 responsabilité. A l'époque, les relations entre la Brigade de Tuzla et
22 notre 1ère Brigade de Semberija étaient très bonnes. Les opérations de
23 combat étaient rares. Il y avait quelques provocations par-ci par-là. Quand
24 je dis que les relations étaient bonnes, je veux dire que les soldats de la
25 Fédération, les unités musulmanes et les soldats se rencontraient. Les
26 soldats serbes -- et les soldats serbes se rencontraient sur le front et,
27 parfois avec une bouteille d'alcool, parlaient d'une ère nouvelle. Il y
28 avait également les commandants de deux bataillons de notre armée, de
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1 l'armée serbe et de l'armée musulmane. Ils se rencontraient sur la ligne de
2 front.
3 A plusieurs reprises, des unités spéciales sont venues dans la région
4 et ont provoqué nos forces, donc au fil du temps, cette amitié a disparu,
5 et cette situation n'existait plus. J'ai donc rempli cette fonction au sein
6 de la brigade jusqu'au 15 mars 1993. A cette date-là, j'ai été transféré au
7 corps, à savoir j'ai été transféré et j'ai intégré le Corps de Bosnie
8 orientale. Et j'ai été transféré au service de Sécurité, parce que j'étais
9 employé dans ce cas-là, travaillant dans les services de la Sécurité.
10 Lorsqu'on m'a envoyé dans ces services, on m'a expliqué que ma principale
11 mission consistait à m'occuper de l'échange de prisonniers de guerre dans
12 le cadre d'une commission, et j'étais censé garantir la bonne marche de
13 tout cela. Il ne devait y avoir aucun commerce, aucune tromperie, et rien
14 de la sorte. Je devais vérifier comment les hommes chargés de la sécurité
15 se comportent, qu'il n'y ait pas de commerce quel qu'il soit. Ils étaient
16 plutôt disposés dans ce sens, et je devais garantir la bonne marche de tout
17 ceci.
18 Au tout début, on m'a dit que je devais aller à Batkovici, là où se
19 trouvait le centre de rassemblement, et j'étais censé voir quelle était la
20 situation à Batkovici, d'examiner les documents, les dossiers, et de
21 préparer un croquis des installations où les personnes étaient hébergées,
22 et tout le secteur. J'ai fait cela. J'ai examiné les différents documents
23 et les différents dossiers pendant plusieurs jours. J'ai fait une note
24 officielle et j'ai noté quelques failles ou lacunes qui avaient existé
25 avant mon arrivée, à savoir, par exemple, certaines personnes avaient le
26 droit de partir pour aller rendre visite aux membres de leur famille, mais
27 tout n'était pas précisé, ni les membres de la famille, ni leurs adresses.
28 Quelquefois, certains groupes emmenaient un autre groupe de personnes et
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1 les échangeaient, mais c'était un échange privé et ils n'étaient pas
2 soldats. Donc, tout ce qui est arrivé était attribué à l'armée. Même si des
3 personnes civiles agissaient de façon inconvenante, ils portaient toujours
4 l'uniforme, mais l'armée n'a pas participé à de tels incidents au cours
5 desquels certaines personnes ont été tuées.
6 Q. Alors, je vais vous arrêter, Monsieur. Et nous allons parler du centre
7 de rassemblement de Batkovici dans quelques instants.
8 Alors, je souhaite revenir un petit peu en arrière. Vous nous avez
9 dit qu'au mois de mars 1993, vous avez été transféré au service de sécurité
10 du Corps de Bosnie orientale. En réalité, aviez-vous un bureau au sein du
11 commandement de Corps de Bosnie orientale lorsque vous avez commencé à
12 servir dans ce corps ?
13 R. Dans le service de sécurité, je ne disposais pas d'un bureau
14 individuel. Il y avait une pièce dans laquelle se trouvait le centre des
15 transmissions de ce service. Des gens qui devaient rencontrer le chef le
16 rencontraient dans cette pièce-là. Moi, je n'avais pas de pièce à moi, mais
17 j'avais un coffre-fort dans lequel je pouvais conserver certains documents.
18 Q. Et pendant ces années de service au sein des services de sécurité du
19 Corps de Bosnie orientale, vous avez parlé de ce centre de transmission des
20 services de sécurité.
21 Où deviez-vous vous présenter lorsque vous travailliez dans ce
22 service ?
23 R. Je me présentais où je devais rendre compte à ce service. C'était un
24 service distinct parce que le corps ne se trouvait pas dans un seul et même
25 bâtiment mais était dispersé dans différents bâtiments. Il y avait un
26 bâtiment qui était un bâtiment privé où étaient hébergés les services de
27 sécurité. Cela s'appelait le centre de transmission. Le centre de
28 transmission se trouvait à cet endroit-là, mais c'était une pièce dans
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1 laquelle se trouvait l'officier de permanence, et en général, il
2 remplissait certaines fonctions par le truchement de ce centre de
3 transmission principal.
4 Q. Et vous rendiez compte à qui, Monsieur ?
5 R. Le matin, à 7 heures, je me présentais à mon travail et étant donné que
6 le bureau du chef se trouvait de l'autre côté, juste avant 7 heures, le
7 chef nous conviait dans son bureau et nous briefait s'il y avait des
8 éléments d'information communs, et chacun individuellement, le cas échéant.
9 Et très souvent, nous prenions un café pendant cette séance d'information,
10 et nous nous mettions d'accord sur les documents qui devaient être
11 utilisés.
12 Q. Lorsque vous parlez du chef, il s'agissait de qui, Monsieur, s'il vous
13 plaît ?
14 R. Lorsque je suis arrivé, c'était le lieutenant-colonel Pero Jakovljevic.
15 Il a pris sa retraite avec le grade de lieutenant-colonel. Une fois que la
16 guerre a éclaté, il a repris du service. Il avait servi dans les services
17 de la sécurité de l'armée avant cela.
18 Q. Et est-ce qu'à aucun moment le lieutenant-colonel Jakovljevic a quitté
19 le Corps de Bosnie orientale et a-t-il été remplacé par quelqu'un d'autre ?
20 R. Oui. Je ne sais pas exactement à quel moment cela est arrivé. Je crois
21 que c'était à la fin de l'année 1993. Il est parti, ou, plutôt, il est
22 reparti à la retraite, et un officier d'active l'a remplacé à ce moment-là.
23 C'était également un lieutenant-colonel, Milenko Todorovic. Il avait
24 travaillé pour les services de sécurité avant cette date. Nous avions une
25 excellente coopération avec lui, par opposition à ce Jakovljevic, qui était
26 un peu rigide et comprenait peu les choses.
27 A un moment donné, lorsque j'ai dit que si quelqu'un était frappé à
28 Batkovici, que je ne présiderais pas la Commission des échanges, et je lui
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1 ai dit que je me rendrais dans ce cas à Majevica, on m'a dit que j'étais
2 fou, que des personnes y perdaient la vie. Mais j'avais vraiment
3 l'intention de partir. Mais à partir du moment où je suis arrivé et pendant
4 toute la durée où il était chef de la sécurité, personne n'a été maltraité
5 là. Cela n'est pas arrivé. Je m'y rendais de temps en temps lorsque j'étais
6 chef. Je parlais avec certains individus pour voir comment ils étaient
7 traités, pour vérifier que l'on n'enlève pas l'argent des prisonniers,
8 qu'ils ne devaient pas payer un prix élevé et qui soit plus élevé pour les
9 prisonniers, parce que quelquefois ils achetaient des cigarettes pour les
10 prisonniers s'ils avaient de l'argent, et je voulais voir comment ces
11 prisonniers étaient traités.
12 Ces gardes ne traitaient pas ces prisonniers correctement. Et j'ai
13 fait des rapports là-dessus, et je ne savais pas pourquoi ils agissaient
14 ainsi, car certaines personnes étaient cachées à cet endroit-là. C'étaient
15 des favoris du parti. Ils étaient là, planqués, pour ne pas aller à la
16 guerre. Ils se présentaient comme étant des grands Serbes et des patriotes,
17 mais lorsque ces problèmes ont été signalés, je crois que c'était lorsque
18 Todorovic a été nommé, la police a pris le contrôle de Batkovici, et à ce
19 moment-là le traitement a été bien différent, parce qu'à ce moment-là, les
20 différentes fonctions ont été données à chacun de façon militaire.
21 Q. Et lorsque vous parlez de la police, vous voulez parler de la police
22 militaire qui a pris le contrôle de Batkovica, ou est-ce que vous voulez
23 parler de la police civile ? De façon à ce que ce soit bien clair.
24 R. Oui, oui, c'était la police militaire.
25 Q. Et simplement, deux dernières questions sur ce sujet avant que nous ne
26 passions à ce que vous avez fait au niveau de la Commission des échanges de
27 prisonniers de guerre.
28 Première question : lorsque le colonel Todorovic est arrivé pour remplacer
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1 le colonel - et pardonnez-moi la prononciation - Jakovljevic, rendiez-vous
2 compte à Todorovic comme vous l'aviez fait à son prédécesseur ?
3 R. Les choses étaient ainsi : je les informais toujours des échanges.
4 Lorsque je devais procéder à un échange, j'expliquais comment cela se
5 passait, ce sur quoi nous étions tombés d'accord, et le président de la
6 commission - moi, je n'en étais que membre - devait informer l'état-major
7 principal et le président de la commission d'Etat par dépêche sur l'issue
8 des pourparlers et de l'objet des pourparlers.
9 Q. Bien. Merci. Nous allons y revenir dans quelques instants.
10 Alors dernière question que j'ai à vous poser, qui sont des questions qui
11 sont coulées de source, mais entre 1993 et 1995, à la fin de la guerre,
12 portiez-vous un uniforme, un uniforme de travail tous les jours ?
13 R. Depuis la fin de l'année 1991 -- non, entre la fin de l'année 1991 et
14 le 30 avril 1997, toutes les fois que je me rendais là-bas, et j'y allais
15 souvent, quelques fois j'avais une journée de permission, mais toutes les
16 fois je m'y suis rendu en uniforme. C'était M77, c'état l'uniforme de la
17 JNA. Et d'autres portaient l'uniforme de camouflage, mais ils n'en avaient
18 pas un pour moi. De toute façon, ça m'était égal, et j'ai procédé aux
19 échanges et aux négociations en l'uniforme qui indiquait quel grade
20 j'avais, et lorsque j'étais membre de la commission, lorsque j'étais
21 président, c'était le cas. Pour ce qui est de mon prédécesseur, il se
22 rendait parfois à ces réunions en habits civils.
23 Q. Et en juillet 1995, quel était votre grade, si vous en souvenez ?
24 R. En juillet de quelle année ?
25 Q. 1995.
26 R. Je crois que j'étais lieutenant-colonel.
27 Q. Bien. Vous avez déjà parlé de votre fonction au sein de la Commission
28 chargée de l'échange de prisonniers de guerre. Pourriez-vous dire aux Juges
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1 de la Chambre comment ces commissions ont été créées, et comment vous avez
2 été nommé membre de cette commission et par la suite président de cette
3 commission, comment cette commission était-elle organisée, et cetera ? Et
4 je vous interromprai peut-être de temps en temps pour avoir des éléments
5 détaillés, mais veuillez expliquer ceci aux Juges de la Chambre pour que
6 l'on comprenne le fonctionnement de ces commissions.
7 R. Au début des opérations de combat, le Corps de Bosnie orientale avait
8 un officier d'active qui avait le grade de commandant et qui s'occupait de
9 cela. Il n'y avait pas de commission. Il avait pour responsabilité de
10 contacter l'autre camp de façon à pouvoir régler la question des
11 prisonniers de guerre et de ceux qui avaient perdu la vie. Je ne sais pas
12 exactement à quel moment en 1991 cette commission a été créée.
13 Lorsque j'en ai fait partie en 1993, cela avait été créé par le commandant
14 du corps qui avait donné un ordre à cet effet. Le président de la
15 commission n'avait pas d'autres responsabilités. En vertu de la création de
16 cette commission, il était le président et il rendait compte direction au
17 commandant du corps. Il y avait comme membre de la commission, il y avait
18 une secrétaire qui n'avait pas d'autre emploi, c'était son poste en temps
19 de guerre. Et nous, trois autres, trois membres, nous faisions partie
20 d'unités. Si vous souhaitez entendre les noms, je peux vous les fournir.
21 Q. Très bien. Merci beaucoup, Monsieur. Cela ne sera pas nécessaire. Vous
22 nous avez dit que le commandant du corps d'armée a donné un ordre pour
23 établir une commission du Corps de Bosnie orientale. Pourriez-vous nous
24 dire qui a proposé les membres de cette commission, qui étaient les membres
25 de la sélection ?
26 R. Je ne sais pas qui étaient les membres de la sélection de la
27 commission. J'étais moi-même représentant du secteur chargé de la sécurité;
28 il y avait également une personne du Corps du génie; il y avait une autre
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1 personne civile de Brcko, qui était un civil au sein des forces armées de
2 la JNA qui, à l'époque, avait commencé à travailler avant la guerre, et qui
3 y était.
4 Mais pour savoir qui proposait les nominations, je l'ignore. Je ne sais pas
5 si c'était quelqu'un qui provenait du secteur chargé du moral des troupes,
6 ou peut-être du secteur chargé de la sécurité. Je ne sais pas. Peut-être
7 conjointement, c'était peut-être la section chargée du moral qui a procédé
8 à la proposition. Mais de toute façon, c'était toujours représenté au nom
9 du commandant, et c'était ainsi que l'on procédait à la nomination des
10 membres de cette commission.
11 Q. Très bien. Juste pour que l'on ait une image tout à fait claire et que
12 le compte rendu soit tout à fait limpide, il semblerait que votre réponse
13 porte sur l'armée, plutôt comme étant ceux qui procédaient à la nomination
14 et non pas une entité civile. Si c'était une entité civile, dites-nous,
15 est-ce que c'était eux ou bien était-ce réellement -- qui prenait la
16 décision finale concernant qui allait servir ou pas ?
17 R. Il s'agissait d'une commission militaire. Mais il arrivait que des
18 structures civils puissent avoir une influence à l'époque où les civils
19 changeaient, puisque la commission de Tuzla était une commission mixte qui
20 comptait environ 15 membres de chaque municipalité, et ces derniers étaient
21 chargés de l'échange de civils, de soldats, également de corps de personnes
22 décédées. Lorsque je suis arrivé à ce poste, mon prédécesseur connaissait
23 les gens de Tuzla effectivement, et c'est eux qui procédaient à l'échange
24 des civils de façon légale, contrairement aux échanges qui avaient eu lieu
25 précédemment et qui se faisaient par des individus des deux camps, et donc
26 il y avait des réactions des deux côtés par rapport à cela.
27 Q. Lorsque vous faites référence à la commission de Tuzla, est-il juste de
28 dire que la commission de Tuzla était une commission du côté musulman, ou
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1 du côté bosnien, ou de l'autre côté, pour ainsi dire du côté opposé, de
2 votre côté, qui était en lien avec la VRS ?
3 R. Oui. La commission de Tuzla était une commission militaire du canton de
4 Tuzla, comme elle était appelée. Elle était composée de Musulmans et d'un
5 Croate, étant donné que sur ce territoire il y avait également des
6 ressortissants croates. Alors, il s'agissait donc d'une commission de la
7 Fédération pour le canton de Tuzla.
8 Q. Pourriez-vous expliquer aux Juges de la Chambre si au sein de la VRS
9 d'autres corps d'armée avaient également ou étaient dotés de commissions
10 d'échange de prisonniers de guerre analogues à la commission chargée de
11 l'échange du Corps de Bosnie orientale ?
12 R. Oui. Le 1er Corps de Krajina, le 2e Corps de Krajina, le Corps de Drina,
13 le Corps de l'Herzégovine et le Corps de Sarajevo-Romanija étaient dotés
14 tous d'une commission.
15 Je ne sais pas à quel moment cette commission avait été créée. Je ne sais
16 pas à partir de quel moment non plus, mais lorsque j'étais le président de
17 ma commission et lorsque j'allais pour des pourparlers, ces commissions
18 existaient déjà.
19 Q. En plus de cette commission au niveau du corps d'armée, y avait-il une
20 commission au niveau d'Etat également du côté des Serbes ou du côté
21 musulman ou bosnien ?
22 R. Oui, il existait une commission d'Etat des deux côtés. Les compétences
23 de ces commissions étaient du ressort civil et militaire.
24 Q. S'agissant de votre camp à vous, pour ainsi dire, y avait-il quelqu'un
25 qui était à la tête de la commission d'Etat ? Et si c'était le cas, dites-
26 nous, je vous prie, quel était le nom de cette personne ?
27 R. A la tête de la commission de la Republika Srpska se trouvait Bulajic.
28 J'ignore son prénom. A la tête de la commission musulmane-croate s'appelait
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1 Amir Basevic qui, encore à ce jour, se trouve à la tête de cette
2 commission, et cette commission maintenant s'appelle l'Institut des
3 personnes portées disparues.
4 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur Gajic.
5 M. GAJIC : [interprétation] Monsieur le Président, à la page 73, ligne 22,
6 il faudrait lire le nom d'Amor Masovic. Le nom n'est pas consigné
7 correctement.
8 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Oui, effectivement. C'est ce que j'ai
9 entendu par l'interprétation. Merci bien. Ce n'était pas la ligne 73 mais
10 bien la page 73. Oui, bien. Merci.
11 Veuillez poursuivre, Monsieur Thayer.
12 M. THAYER : [interprétation] Merci.
13 Q. S'agissant de M. Bulajic, était-il un civil ou un militaire ?
14 R. C'était un civil. C'était un civil, mais c'était un mauvais président.
15 Il portait des vêtements civils, et c'était donc un mauvais président
16 également.
17 Q. A un certain moment donné dans le cadre de votre service dans la
18 commission, est-ce que vous êtes devenu président de la Commission
19 d'échange du Corps de Bosnie orientale ? Et si oui, dites-nous à quel
20 moment est-ce que cela a eu lieu ?
21 R. Le 20 avril 1994.
22 Q. Bien. Je dois dire que je suis devenu quelque peu curieux à la suite de
23 ce que vous venez de nous dire. Vous avez mentionné que M. Bulajic était un
24 mauvais président. Je ne veux pas m'étaler trop longuement là-dessus, à
25 moins que vous ne pensiez que c'est quelque chose qui pourrait être
26 pertinent. Mais pourriez-vous expliquer aux Juges de la Chambre ce qui vous
27 a motivé à dire ce que vous avez dit, à savoir que c'était un mauvais
28 président ? Qu'est-ce que vous pouvez nous dire là-dessus ?
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1 R. Je m'étais forgé une opinion, et je me suis rendu compte plus tard que
2 je n'avais pas fait d'erreur, j'avais plutôt eu l'impression qu'il
3 s'agissait d'un homme qui se préoccupait des questions privées que de ce
4 qui était important pour le peuple serbe. Cela a pu se voir plus tard lors
5 de certains échanges. Et lorsqu'il a été démis de ses fonctions, le côté
6 serbe avait émis un mandat d'arrêt, en fait, contre lui, et il avait fui le
7 territoire. Lorsque j'ai été nommé au poste de président, je n'ai plus
8 envoyé mes propositions au président de la commission d'Etat. Je faisais
9 plutôt parvenir mes propositions au commandement de l'état-major principal.
10 Mais avant cela, mes propositions étaient d'abord passées en revue par le
11 chef de la sécurité et, par la suite, on demandait au commandant du corps
12 d'armée de donner son approbation, et par la suite, c'était envoyé le long
13 de la chaîne de la sécurité. Et si j'ai bien compris, il y a toujours un
14 exemplaire qui était envoyé également au président de la commission d'Etat.
15 Il n'a jamais assisté à aucun des échanges. Et lorsqu'il y a eu un
16 important échange, moi je lui ai dit de ne pas venir. Nous avions essayé de
17 faire de notre mieux étant donné les circonstances pour atténuer la
18 souffrance des parties ayant perdu les membres de leur famille et leurs
19 êtres chers, et c'était très difficile. Au début, ce n'était pas toujours
20 facile, les échanges n'étaient pas toujours faciles. Il arrivait, par
21 exemple, qu'on écrive un terme très négatif, par exemple, ils disaient que
22 nous étions des Chetniks et Serbes. Alors, moi, je les avertissais que nous
23 avions également des termes négatifs pour les Musulmans. Je leur disais
24 cela.
25 Et il arrivait également que d'autres membres de la commission avaient
26 attaqué leur président pour avoir procédé comme il l'avait fait, ou aussi
27 parce qu'à un moment donné, il y a eu une liste qui avait été compilée des
28 soldats de l'agresseur. Alors moi, j'ai dit que l'on ne pouvait pas dire
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1 que c'était un agresseur sur son propre territoire. J'ai dit que s'ils
2 avaient attaqué votre territoire, j'aurais compris ce que vous voulez dire,
3 mais il s'agit d'un territoire serbe, alors on ne peut pas appeler ceci une
4 attaque menée par un agresseur. Alors, les choses se sont arrêtées à ce
5 moment-là. Il n'y a plus eu d'insultes. Les commentaires étaient toujours
6 très positifs. Personne n'a essayé de duper quelqu'un. Et en fait, les
7 relations étaient vraiment excellentes, et le peuple de la Bosnie-
8 Herzégovine aurait été très content si les autorités pouvaient également se
9 mettre d'accord. Comme à l'époque il n'y avait pas -- on ne cédait pas,
10 mais on essayait de faire en sorte que les choses soient vraiment très
11 justes.
12 Je préparais toujours trois variantes pour l'échange, une liste où je
13 disais : Voilà, on peut faire des modifications. Et si le camp adverse
14 n'acceptait pas ma première proposition, j'avais toujours une deuxième
15 proposition à leur présenter afin qu'il y ait moins de pertes de temps, et
16 nous arrivions toujours à bien réussir notre travail. Nous pouvions
17 vraiment procéder à l'échange. C'est ce qui nous intéressait.
18 Il y avait également des échanges entre les lignes de contact. On arrêtait
19 le feu des deux côtés, du côté de la Republika Srpska et du côté de la
20 Fédération. Nous nous trouvions alors à ce moment-là, nous nous rendions
21 sur le "no man's land" et très souvent nous étions accompagnés des membres
22 de la Croix-Rouge internationale qui étaient intéressés pour Batkovic et
23 pour les échanges. La coopération était particulièrement bonne des deux
24 côtés, de sorte à ce que ces derniers venaient en aide au centre de
25 rassemblement s'agissant des premiers soins qui devaient être prodigués,
26 des questions d'hygiène également, ils s'en occupaient, et ils venaient
27 presque une fois par semaine. Il n'y a jamais eu d'interdiction, seulement
28 s'il y avait quelques personnes qui n'étaient pas présentes. S'il y avait
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1 des absents, nous nous disions des fois qu'il fallait venir un peu plus
2 tard si les personnes en question, les représentants n'étaient pas là, on
3 disait : Vous pouvez revenir dans un jour ou deux. Nous rendions visite,
4 d'une certaine façon.
5 Puisque lorsque j'ai été nommé au poste de président de la commission,
6 j'avais un bureau au centre-ville. En fait, mon prédécesseur avait son
7 bureau au centre-ville, plutôt, pour faire en sorte qu'on ne procède pas à
8 une attaque, qu'on ne l'attaque pas lorsque l'on le voyait, par exemple, à
9 savoir quels étaient les enfants qui étaient disparus. Alors, c'est pour
10 cela qu'il avait un bureau au centre-ville, pour que les représentants
11 puissent aller le voir.
12 Indépendamment du fait que les autorités civiles ne m'appréciaient
13 pas énormément puisque j'étais communiste, mais je dois vous dire que parmi
14 eux il y avait également des Communistes, pour les appeler Communistes,
15 mais en fait ce n'était pas de vrais Communistes, ils n'étaient que membres
16 du Parti communiste, à un moment donné, il s'est avéré que le vice-
17 président de l'assemblée de la Republika Srpska, le feu Branko Simic,
18 s'était présenté dans la municipalité et avait demandé pour que moi je
19 m'occupe également de l'échange des civils, parce que certaines choses qui
20 se produisaient n'étaient pas réellement des échanges. Il y avait également
21 des activités qui n'étaient pas tout à fait correctes. Alors, lui ainsi que
22 le président de la municipalité étaient allés voir le commandant du corps
23 d'armée. Ils m'ont dit en m'appelant que le commandant de corps d'armée
24 avait donné son aval. Moi, je leur ai dit que non, j'allais refuser cela,
25 je n'étais pas d'accord. Je suis soldat et je ne vais procéder qu'à
26 l'échange de soldats, je vais procéder à l'échange des combattants, et si
27 je prenais cette tâche supplémentaire, je n'allais pas pouvoir faire mon
28 travail correctement. Je leur ai dit : vous avez la personne qui s'occupait
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1 des échanges de civils jusqu'à maintenant et il faudrait que cette personne
2 demeure à son poste.
3 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Le Juge Mindua a une question pour le
4 témoin.
5 M. LE JUGE MINDUA : Oui, Monsieur le Président, j'ai juste une question de
6 clarification pour ma propre religion.
7 Vous avez dit que les échanges -- ou plutôt, l'échange de prisonniers se
8 faisait sur la ligne -- non, dans le "no man's land", entre les lignes de
9 front à l'issue d'un cessez-le-feu.
10 La procédure me paraît un peu curieuse, parce qu'enfin, généralement,
11 l'échange des prisonniers se fait après la bataille, à l'issue des combats.
12 Alors, dans votre situation, lorsqu'on procédait à l'échange de
13 prisonniers, est-ce qu'il y avait une clause dans les -- dans vos accords
14 qui interdisait aux prisonniers échangés de se battre à nouveau, ou bien
15 ils étaient libres une fois retournés dans leur camp de prendre à nouveau
16 les armes et de revenir sur la ligne de front ?
17 LE TÉMOIN : [interprétation] Vous savez, c'était connu qu'ils ne pouvaient
18 plus se battre, mais je ne suis pas tout à fait certain que l'on respectait
19 toujours ce type de chose. Il y avait certainement des exceptions des deux
20 côtés, j'en suis persuadé. Il s'agissait d'individus, bien sûr. Donc, il y
21 avait certainement certaines exceptions des deux côtés.
22 M. LE JUGE MINDUA : Oui. Oui, parce que vous avez dit que vous étiez
23 intéressé seulement par l'échange des soldats. Alors, donc, vos soldats,
24 ils revenaient après se battre sur la ligne de front de nouveau; c'est bien
25 ça ?
26 LE TÉMOIN : [interprétation] Ce n'était pas une obligation. Non, au
27 contraire, après les échanges, en fait, ils pouvaient rentrer chez eux.
28 Mais il y avait des individus, certaines personnes, qui voulaient quand
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1 même continuer à se battre et qui voulaient rejoindre leurs unités.
2 M. LE JUGE MINDUA : Je vous remercie beaucoup.
3 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Le Juge Nyambe aussi souhaiterait
4 poser une question.
5 Mme LE JUGE NYAMBE : [interprétation] Je vous remercie. C'est simplement
6 une question de précision.
7 A la page 74 du compte rendu d'audience d'aujourd'hui, à la ligne 23, vous
8 avez dit, et je cite :
9 "J'avais l'impression, et je crois que c'était exact, que c'était un homme
10 politique qui était plutôt intéressé aux échanges de personnes
11 individuelles que ce que les gens disaient avoir besoin.
12 "Et lorsqu'il avait été démis, cette personne, il était devenu une personne
13 contre laquelle il y avait un mandat d'arrêt, mais il avait fui."
14 Pouvez-vous nous expliquer pourquoi est-ce que le côté serbe avait émis un
15 mandat d'arrêt à son encontre ? Pourquoi était-il recherché par ces
16 derniers ?
17 LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai été présent à deux reprises lorsqu'il y a
18 eu des réunions de la commission d'Etat à l'aéroport de Sarajevo. Nous
19 n'avions pas du tout convenu aucun échange. Mais après une dispute entre
20 lui et Masovic, il aurait fallu qu'eux se mettent d'accord. Par exemple :
21 quand est-ce que tu vas me donner les quatre gars que tu voulais me donner
22 ? Et toi, quand est-ce que tu vas me donner tes cinq gars ? Donc, moi
23 j'avais l'impression que ça n'avait rien à voir avec l'armée. C'était
24 plutôt des questions personnelles. Leurs motivations étaient personnelles.
25 Plus tard, après avoir eu des conversations avec eux, je pense que j'avais
26 raison de dire que cette personne n'était pas réellement une personne qui
27 pouvait justifier ce poste, cette fonction qu'il occupait. Lorsqu'il est
28 parti, lorsqu'il a été démis de ses fonctions, lorsqu'il a été remplacé et
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1 remplacé par une personne très honnête qui malheureusement n'a pas pu
2 occuper ce poste très longuement, il est décédé peu de temps après.
3 Et lors d'une réunion - c'était un ancien juge, d'ailleurs - et lors
4 d'une réunion, il nous a dit : Je sais tout, mais ne me mentionnez rien, je
5 sais très bien ce qui s'est passé. Il nous a raconté quelques histoires. Il
6 a dit : Je sais tout. Nul besoin d'en parler.
7 Mme LE JUGE NYAMBE : [interprétation] Merci.
8 LE TÉMOIN : [interprétation] Il n'y a pas de quoi.
9 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur Thayer, vous pouvez
10 continuer.
11 M. THAYER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
12 Q. Ce juge qui a remplacé M. Bulajic, quel était son nom ?
13 R. Est-ce que je pourrais vous le dire demain, s'il vous plaît. Je ne me
14 souviens plus. C'était le président de la cour constitutionnelle.
15 Il a été président de la cour constitutionnelle de la Republika Srpska
16 pendant un certain temps, je pense. Ah oui, le nom me revient. Il
17 s'appelait Rosic. Excusez-moi.
18 Q. J'ai encore quelques questions de suivi dans les quelques minutes que
19 nous avons à notre disposition ce soir.
20 S'agissant des prisonniers de l'ABiH, qui étaient dans la zone de
21 responsabilité qui était la vôtre, mais qui était gardée par la VRS, où
22 étaient-ils gardés ? A quel endroit ?
23 R. Les détenus ou les prisonniers que les unités du Corps de Bosnie
24 orientale avaient capturés étaient détenus au centre de rassemblement de
25 Batkovici. Mais il n'y en avait pas beaucoup. Il y avait peu de personnes
26 qui avaient été capturées.
27 Q. Et de nouveau, nous allons en parler un petit peu plus en détail
28 demain.
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1 Mais j'aimerais vous demander d'expliquer aux Juges de la Chambre,
2 s'agissant des soldats de la VRS qui venaient de la zone de responsabilité
3 du Corps de Bosnie orientale et qui étaient capturés par l'ABiH, où
4 étaient-ils normalement détenus avant de faire l'objet de ces échanges dont
5 vous nous avez parlé.
6 R. Dans la prison de Tuzla. Une unité qui capturait, par exemple, notre
7 soldat, un de nos combattants, gardait ce soldat ou ce combattant auprès de
8 leur bureau pour procéder à certains interrogatoires, et par la suite il le
9 remettait entre les mains des personnes chargées de la prison du district
10 que l'on appelait à l'époque l'ancienne prison de district.
11 Q. Très bien. Merci. Vous avez dit que Branko Simic vous a demandé de
12 prendre part à l'échange de civils. Pourriez-vous nous dire à quel moment
13 vous a-t-il fait cette demande ?
14 R. C'était en 1994, c'est à ce moment-là que j'ai été nommé au poste de
15 président chargé de l'échange des prisonniers.
16 Q. Dernière question pour ce soir. Vous nous avez dit que vous rendiez
17 compte au secteur chargé de la sécurité dans votre corps d'armée, et
18 d'abord vous disiez que la personne à qui vous deviez rendre compte était
19 le colonel Jakovljevic, et par la suite c'était le colonel Todorovic.
20 J'aimerais savoir si vous aussi vous aviez un bureau concernant vos tâches
21 en tant que président chargé de la Commission de l'échange des prisonniers
22 de guerre ? Et si oui, où était situé votre bureau ?
23 R. Non.
24 Je voudrais simplement vous apporter une précision. Je ne voudrais pas que
25 vous pensiez que le fait que j'ai été déployé au sein de la sécurité, je
26 voudrais que vous sachiez que je n'étais pas espion en tant que membre de
27 la commission. Pour être bien franc avec vous, ma tâche n'était pas du tout
28 d'agir en tant qu'espion. Je devais m'occuper de ma partie à moi des
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1 personnes qui négociaient, et les autres personnes qui étaient là, il
2 fallait nous assurer qu'il n'y ait pas de violation d'accord ou d'entente
3 entre nous et la violation d'accord militaire. Donc, ma participation
4 n'avait absolument rien à voir avec des questions relatives aux
5 renseignements.
6 Q. Je suis vraiment désolé. C'est moi qui aie mal posé ma question.
7 Ma question était simplement celle-ci : dans le cadre de votre
8 travail en tant que d'abord membre et par la suite président de la
9 Commission d'échange du Corps de Bosnie orientale, aviez-vous un bureau
10 quelque part dans lequel vous pouviez recevoir des parents ou des membres
11 de la famille de prisonniers de la VRS ?
12 R. Oui. Mon bureau se trouvait au centre-ville, même avant mon arrivée au
13 poste de président. C'était en ville donc, dans la rue Philippe Visnjic à
14 Bijeljina. Je crois que le numéro civique était le numéro 14. Trois ou
15 quatre bâtiments plus loin du bâtiment de la Croix-Rouge internationale. Le
16 bâtiment était propice à cela puisque autrefois il s'agissait d'un
17 restaurant ou d'un café. Il y avait donc une entrée qui donnait directement
18 dans la rue, sur la rue, et les gens pouvaient entrer, les personnes qui
19 étaient intéressées. Il y avait une secrétaire à l'entrée. Il y avait
20 également des civils, des Musulmans qui souhaitaient passer de l'autre
21 côté. Donc, mon bureau était toujours ouvert pour tous.
22 Q. Merci beaucoup, Monsieur. Je crois que l'heure de la fin de nos travaux
23 d'aujourd'hui est arrivée.
24 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Très bien.
25 Alors, nous allons devoir lever la séance. Monsieur, je dois vous
26 informer que vous ne pouvez pas avoir de contacts avec aucune des parties
27 concernant la teneur de votre déposition.
28 La séance est levée, et nous reprendrons nos travaux à 14 heures 15
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1 demain dans cette même salle d'audience, la salle d'audience numéro III.
2 [Le témoin quitte la barre]
3 --- L'audience est levée à 19 heures 02 et reprendra le mardi 7 juin
4 2011, à 14 heures 15.
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