Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 (Vendredi 12 juillet 2002.)

2 (Comparution initiale de Radovan Stankovic.)

3 (L'audience est ouverte à 9 heures, sous la présidence de M. le Juge

4 Schomburg.)

5 (Audience publique.)

6 M. le Président (interprétation): Bonjour.

7 Mme Dahuron (interprétation): Bonjour. Affaire IT-96-23/2-I, le Procureur

8 contre Radovan Stankovic.

9 M. le Président (interprétation): Je vous remercie.

10 Les parties sont représentées, pour le Bureau de l'accusation…

11 Mme Kuo (interprétation): Peggy Kuo, au nom du Bureau du Procureur et

12 Diana Dicklich qui nous assiste.

13 M. le Président (interprétation): Et pour la défense?

14 Mme Dubois: Maître Valérie Dubois, du Bureau de Paris.

15 L'interprète de la cabine anglaise: Micro, s'il vous plaît, Maître. On ne

16 vous a pas entendue, votre micro n'était pas branché.

17 Mme Dubois: Excusez-moi.

18 Monsieur le Président, je suis Valérie Dubois, avocate à Paris, et

19 j'assiste M. Radovan Stankovic.

20 M. le Président (interprétation): Je vous remercie.

21 Alors, assurons-nous que tout le monde peut nous comprendre.

22 Monsieur Stankovic, est-ce que vous pouvez m'entendre dans une langue que

23 vous comprenez?

24 M. Stankovic (interprétation): Oui.

25 M. le Président (interprétation): Je vous remercie.

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1 Pourrais-je demander à la défense si vous avez reçu les documents

2 nécessaires en préparation de cette comparution initiale?

3 Mme Dubois: Oui. Je vous remercie, Monsieur le Président.

4 M. le Président (interprétation): Est-ce que vous avez eu l'occasion de

5 vous en entretenir avec l'accusé?

6 Mme Dubois: Je me permets de parler en français, car mon anglais ne sera

7 pas suffisant.

8 M. le Président: Naturellement.

9 Mme Dubois: Monsieur Stankovic –je l'ai vu il y a une demi-heure de cela-

10 ne souhaite pas, en effet, que je le représente à cette audience. Je l'ai

11 informé qu'il s'agissait d'une régularité de procédure. Il entend désigner

12 un avocat ultérieurement pour préparer sa défense.

13 M. le Président (interprétation): Nous avons reçu le document dans lequel

14 il est dit que M. Stankovic a déclaré qu'il ne voulait pas d'avocat pour

15 le représenter lors de la comparution initiale, et qu'il désignerait un

16 avocat de son choix par la suite. Néanmoins, au titre de l'Article 11 de

17 la directive sur les avocats commis, dans l'intérêt de la justice et de ce

18 procès, la Chambre vous a commise d'office aujourd'hui pour la

19 représentation de l'accusé.

20 Je voudrais maintenant m'adresser à M. Stankovic qui comparait sur la base

21 de l'Acte d'accusation modifié du 5 octobre 1999, pour autant que je

22 sache. Et -le Bureau du Procureur me dira si je me trompe- il a été arrêté

23 le 9 juillet. La base de l'arrestation a été datée… avec un mandat d'arrêt

24 daté du 5 juillet 2002.

25 Monsieur Stankovic a été conduit à La Haye et se trouve, depuis mercredi,

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1 à Scheveningen dans le quartier pénitentiaire des Nations Unies.

2 Le Président du Tribunal a confié cette affaire à la Chambre de première

3 instance n°2 et, dans ce contexte, je dois déjà informer les parties du

4 fait que la Chambre de première instance n°2 est composé du Juge Agius, du

5 Juge Mumba et de moi-même.

6 Nous avons vérifié le point de savoir s'il pourrait y avoir ou non un

7 obstacle pour ce qui était de siéger comme Juge en l'espèce, du fait que

8 le Juge Mumba avait été juge présidant la Chambre chargée de l'affaire de

9 MM. Kunarac et consorts, et moi-même ayant siégé dans l'affaire portée en

10 appel contre MM. Kunarac et consorts. Néanmoins, nous sommes parvenus à la

11 conclusion, tout particulièrement au titre de l'Article 15 du Règlement,

12 que ceci ne suscitait pas d'obstacle, en tous cas, pas aux fins d'une

13 comparution initiale. Néanmoins, il se pourrait que le fait que l'affaire

14 ait été confiée à cette Chambre de première instance n°2 ait un caractère

15 seulement provisoire.

16 Monsieur Stankovic, je voudrais vous poser plusieurs questions. Les

17 premières questions sont uniquement aux fins d'identification et n'ont

18 rien à voir avec l'affaire en tant que telle.

19 Pourriez-vous, s'il vous plaît, décliner votre identité, y compris tous

20 les prénoms et nom de famille, pour le compte rendu?

21 M. Stankovic (interprétation): Radovan Stankovic.

22 M. le Président (interprétation): Je vous remercie. Et, s'il vous plaît,

23 le nom de votre père et de votre mère?

24 M. Stankovic (interprétation): Mon père s'appelle Todor et ma mère, Petra.

25 M. le Président (interprétation): Votre date et votre lieu de naissance?

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1 M. Stankovic (interprétation): 10 mars 1969, dans le village de Trebica,

2 municipalité de Foca.

3 M. le Président (interprétation): Et quelle était votre profession avant

4 d'être conduit au Tribunal?

5 M. Stankovic (interprétation): J'étais policier; c'était ma dernière

6 profession.

7 M. le Président (interprétation): Quel était votre dernier lieu de

8 résidence?

9 M. Stankovic (interprétation): Srbinje, municipalité de Foca.

10 M. le Président (interprétation): Pour finir, êtes-vous marié, avez-vous

11 des enfants?

12 M. Stankovic (interprétation): Oui, j'ai deux fils.

13 M. le Président (interprétation): Je vous remercie, Monsieur Stankovic.

14 La procédure aujourd'hui comporte votre comparution initiale aujourd'hui

15 devant cette Chambre. Il semble que ce soit seulement une formalité mais,

16 en fait, c'est très important, notamment pour ce qui est du calendrier

17 pour l'ensemble du procès.

18 Les raisons fondamentales de cette procédure sont les suivantes.

19 L'accusation a demandé à la Chambre de confirmer une accusation contre

20 vous sur une base prima facie. En outre, une demande a été faite pour un

21 mandat d'arrêt étant à la base de votre privation de liberté. Normalement,

22 l'autre partie en l'espèce, vous, Monsieur Stankovic, auriez le droit

23 d'être entendu avant qu'une décision fut prise, mais il est dans la nature

24 de la décision mentionnée qu'il n'a pas été possible de vous entendre

25 précédemment. Ceci va être fait maintenant, et vous aurez la possibilité

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1 de contester à la fois l'Acte d'accusation et le fait que vous êtes privé

2 de liberté.

3 Pour mieux comprendre ce qui se passera, je vais vous donner les

4 renseignements suivants avant qu'il soit donné lecture de l'Acte

5 d'accusation.

6 Monsieur Stankovic, vous avez le droit de garder le silence. Aucune

7 déduction à votre préjudice ne sera tirée si vous restez totalement

8 silencieux. La seule déduction qui pourrait être tirée de votre silence

9 figure à l'Article 62 du Règlement de procédure et de preuve, où il est

10 dit que lorsque l'accusé ne plaide ni dans un sens ni dans l'autre lors de

11 la comparution initiale ou lors d'une comparution ultérieure, on prend

12 note en son nom du plaidoyer de non-culpabilité.

13 Je voudrais vous prévenir en même temps que tout ce que vous pourrez dire

14 dans ce prétoire pourra être utilisé contre vous à titre de preuve, comme

15 élément de preuve.

16 Monsieur Stankovic, avez-vous compris cet avertissement?

17 M. Stankovic (interprétation): Oui.

18 M. le Président (interprétation): Nous allons maintenant entendre les

19 parties de l'Acte d'accusation, mais seulement les parties qui concernent

20 M. Stankovic.

21 Mme Dahuron (interprétation): "Le Procureur du Tribunal pénal

22 international pour l'ex-Yougoslavie, en vertu des pouvoirs que lui confère

23 l'Article 18 du Statut du Tribunal, accuse Radovan Stankovic de crimes

24 contre l'humanité et de violations des lois ou coutumes de la guerre comme

25 décrits ci-après.

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1 -Contexte.

2 La ville et la municipalité de Foca sont situées au sud-est de Sarajevo,

3 en République de Bosnie-Herzégovine, près de la frontière avec la Serbie

4 et le Monténégro. Selon le recensement de 1991, Foca comptait 40.513

5 habitants, dont 51,6% de Musulmans, 45,3% de Serbes et 3,1% d'origines

6 diverses. La prise du pouvoir politique et militaire dans la municipalité

7 de Foca a débuté le 7 avril 1992 avec les premières actions militaires

8 dans la ville de Foca proprement dite. Les forces serbes, appuyées par de

9 l'artillerie et des armes lourdes, ont investi Foca, quartier par

10 quartier. Le 16 ou 17 avril 1992, la ville était entièrement occupée. Le

11 siège des villages environnants s'est poursuivi jusqu'à la mi-juillet

12 1992.

13 Dès que les forces serbes se sont emparées de certaines parties de la

14 ville de Foca, la police militaire, accompagnée de soldats de la région et

15 d'ailleurs, a commencé à arrêter des habitants musulmans et croates.

16 Jusqu'à la mi-juillet 1992, ils ont continué à rassembler et à arrêter des

17 villageois musulmans des villages environnants de la municipalité. Les

18 forces serbes ont séparé les hommes et les femmes et ont illégalement

19 enfermé des milliers de Musulmans et de Croates dans divers centres de

20 détention à court ou à long terme ou les ont assignés de fait à domicile.

21 Lors des arrestations, de nombreux civils ont été tués, battus ou ont subi

22 des violences sexuelles.

23 Les hommes étaient principalement détenus au Kazneno-popravni Dom de Foca

24 ("KP Dom"), l'une des plus grandes prisons de l'ancienne République de

25 Yougoslavie. Les femmes, les enfants et les vieillards musulmans étaient

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1 détenus dans des maisons, des appartements et des motels de la ville de

2 Foca ou des villages environnants ou dans des centres de détention à court

3 ou à long terme tels que, respectivement, Buk Bijela, le lycée de Foca et

4 le centre sportif Partizan. Bon nombre de femmes détenues ont connu des

5 conditions de vie humiliantes et dégradantes, ont été gravement battues et

6 ont été victimes de violences sexuelles, notamment de viols.

7 Outre les lieux de détention précités, plusieurs femmes ont été détenues

8 dans des maisons et des appartements faisant office de bordels gérés par

9 des groupes de soldats, essentiellement des paramilitaires. Le CICR et

10 d'autres organisations, qui ignoraient l'existence de ces lieux de

11 détention, ne sont pas intervenus. Ces détenues n'ont donc pas pu être

12 libérées ou échangées.

13 -L'accusé.

14 Radovan Stankovic, alias "Rasa", fils de Todor, né le 10 mars 1969 dans le

15 village de Trebica, dans la municipalité de Foca, était domicilié à

16 Miljevina. Il faisait partie de l'unité d'élite paramilitaire serbe

17 commandée par Pero Elez. Radovan Stankovic était également un subordonné

18 de Pero Elez. Radovan Stankovic était responsable de la maison de Karaman

19 à Miljevina, où des femmes musulmanes ont été enfermées et ont été

20 victimes de violences sexuelles, notamment de viols.

21 -Allégations Générales.

22 A toutes les époques visées dans le présent Acte d'accusation, la

23 République de Bosnie-Herzégovine, sur le territoire de l'ex-Yougoslavie,

24 était le théâtre d'un conflit armé.

25 A toutes les époques visées dans le présent Acte d'accusation, les accusés

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1 étaient tenus de respecter les lois ou coutumes régissant la conduite de

2 la guerre.

3 Sauf indication contraire ci-après, tous les actes et omissions décrits

4 dans le présent Acte d'accusation se sont déroulés entre avril 1992 et

5 février 1993.

6 Dans chacun des chefs d'accusation relatifs aux crimes contre l'humanité

7 sanctionnés par l'Article 5 du Statut du Tribunal, les actes et omissions

8 faisaient partie d'une offensive généralisée, à grande échelle ou

9 systématique, contre une population civile, à savoir la population

10 musulmane de la municipalité de Foca. Dans le présent Acte d'accusation,

11 les témoins et les victimes sont désignés par des noms de code ou des

12 pseudonymes tels que FWS-95, par exemple, ou des initiales, comme D.B.

13 Chacun des accusés est individuellement responsable des crimes mis à sa

14 charge dans le présent Acte d'accusation en vertu de l'Article 7.1 du

15 Statut du Tribunal. La responsabilité pénale individuelle d'une personne

16 est engagée dès lors que celle-ci a commis, planifié, incité à commettre,

17 ordonné ou aidé et encouragé à planifier, préparer ou exécuter tout acte

18 ou omission décrit ci-après.

19 -Chefs d'accusation 45 à 48: Réduction en esclavage et viols de FWS-75, de

20 FWS-87 et de sept autres femmes dans la maison de Karaman.

21 Pero Elez, un dirigeant paramilitaire serbe en position d'autorité à

22 l'échelon régional, commandait une unité d'élite de combattants de Vukovar.

23 Le quartier général de Pero Elez se trouvait dans l'hôtel de Miljevina. Le 2

24 août 1992, Dragoljub Kunarac, de concert avec Pero Elez, a fait sortir FWS-

25 75, FWS-87 et D.B du quartier général des Monténégrins à Foca pour les

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1 conduire à l'hôtel de Miljevina parce que la veille, ces femmes avaient parlé

2 à des journalistes de leurs conditions de vie dans le centre sportif

3 Partizan. Pero Elez a donné l'ordre de placer ces trois femmes en détention

4 dans une maison située près de l'hôtel, appartenant à Nusret Karaman, un

5 Musulman vivant en Allemagne. Par la suite, d'autres femmes et jeunes filles

6 ont été détenues dans la maison de Karaman. Certaines n'avaient pas plus de

7 douze ou quatorze ans. Du 2 août 1992 au 30 octobre 1992 au moins, neuf

8 femmes et jeunes filles au total ont été détenues dans la maison de Karaman.

9 Radovan Stankovic, un soldat de l'unité d'élite commandée par Pero Elez,

10 était responsable de la maison de Karaman après la mort de Pero Elez. Radovan

11 Stankovic gérait la maison de Karaman comme un bordel.

12 Contrairement à ce qui se passait au centre sportif Partizan, les détenues de

13 la maison de Karaman étaient suffisamment nourries. Elles n'étaient ni

14 surveillées ni enfermées à l'intérieur de la maison. Elles avaient même une

15 clé qu'elles pouvaient utiliser pour verrouiller la porte et empêcher les

16 soldats qui n'appartenaient pas à l'Unité de Pero Elez d'entrer. Les détenues

17 disposaient également du numéro de téléphone de l'hôtel de Miljevina qu'elles

18 devaient appeler chaque fois qu'un soldat essayait d'entrer dans la maison

19 sans autorisation. Lorsque les femmes appelaient ce numéro, Radovan Stankovic

20 ou Pero Elez venait pour empêcher les personnes extérieures d'entrer dans la

21 maison. Même si ces détenues n'étaient pas sous surveillance, elles ne

22 pouvaient pas s'enfuir. Elles n'avaient nulle part où aller car elles étaient

23 entourées de soldats et de civils serbes.

24 FWS-75 et FWS-87 ont été détenues avec sept autres femmes dans la maison de

25 Karaman du 3 août environ au 30 octobre 1992 environ. Pero Elez traitait ces

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1 femmes comme si elles lui appartenaient.

2 Pendant toute la durée de leur détention dans la maison de Karaman, la nuit,

3 FWS-75, FWS-87 et d'autres détenues ont été victimes de viols et de violences

4 sexuelles répétées. Tous les violeurs étaient des soldats serbes appartenant

5 à l'Unité de Pero Elez. Radovan Stankovic se trouvait parmi les soldats qui

6 ont violé, à plusieurs reprises, FWS-75 et FWS-87 (pénétration vaginale et

7 anale).

8 Les deux femmes ont été violées pour la première fois dans la maison de

9 Karaman vers le 3 août 1992, peu de temps après leur arrivée. Ce jour-là, un

10 soldat non identifié a violé FWS-75 (pénétration vaginale) tandis que Radovan

11 Stankovic violait FWS-87.

12 Outre les viols et autres violences sexuelles, toutes les détenues devaient

13 travailler pour les soldats serbes, laver leurs uniformes, faire la cuisine

14 et nettoyer la maison. A trois reprises, FWS-87 a été emmenée hors de la

15 maison de Karaman dans d'autres immeubles de Miljevina. Elle a dû nettoyer

16 certaines pièces des bâtiments, faire la cuisine pour les soldats et peindre

17 des châssis de fenêtre. En une occasion, alors qu'elle avait été emmenée avec

18 une autre femme, deux soldats monténégrins leur ont fait subir des violences

19 sexuelles.

20 Dans la maison de Karaman, les détenues craignaient constamment pour leur

21 vie. Lorsqu'une femme refusait d'obéir aux ordres, on la battait. Des soldats

22 disaient souvent à ces femmes qu'elles seraient tuées lorsqu'ils en auraient

23 fini avec elles parce qu'elles en savaient trop. FWS-87 a eu envie de se

24 suicider pendant toute la durée de sa détention dans la maison de Karaman.

25 Par les actes et omissions susmentionnés, Radovan Stankovic s'est rendu

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1 responsable de:

2 -Chef d'accusation 45 (Réduction en esclavage)

3 Chef d'accusation 45: réduction en esclavage, un crime contre l'humanité

4 sanctionné par l'Article 5c) du Statut du Tribunal;

5 -Chef d'accusation 46 (viol)

6 Chef d'accusation 46: viol, un crime contre l'humanité sanctionné par

7 l'Article 5g) du Statut du Tribunal;

8 -Chef d'accusation 47 (viol)

9 Chef d'accusation 47: viol, une violation des lois ou coutumes de la guerre

10 sanctionnée par l'Article 3 du Statut du Tribunal;

11 -Chef d'accusation 48 (atteintes à la dignité des personnes)

12 Chef d'accusation 48: atteintes à la dignité des personnes, une violation des

13 lois ou coutumes de la guerre sanctionnée par l'Article 3 du Statut du

14 Tribunal.

15 Signé: le Procureur Carla Del Ponte.

16 Fait ce 5 octobre 1999, à La Haye, aux Pays-Bas."

17 M. le Président (interprétation): Je vous remercie beaucoup.

18 Monsieur Stankovic, pourrais-je vous demander si vous avez compris cet

19 Acte d'accusation?

20 M. Stankovic (interprétation): Oui.

21 M. le Président (interprétation): Je suis tenu de vous informer que, en

22 application de l'Article 62 du Règlement de procédure et de preuve de ce

23 Tribunal, dans un délai de 30 jours à partir de la présente comparution

24 initiale, il vous sera demandé de dire si vous plaidez coupable ou non

25 coupable par rapport à chacun des Chefs d'accusation. Mais, si vous le

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1 demandez, vous pouvez immédiatement déclarer quelle sera votre façon de

2 plaider sur l'un ou l'autre des Chefs d'accusation en question.

3 Monsieur Stankovic, êtes-vous prêt à déclarer quelle sera votre façon de

4 plaider aujourd'hui même? Pouvez-vous nous le dire?

5 M. Stankovic (interprétation): Dois-je me lever ou…?

6 M. le Président (interprétation): Ce n'est pas nécessaire.

7 M. Stankovic (interprétation): Je n'ai aucune intention de déclarer quelle

8 sera ma façon de plaider vis-à-vis de cet Acte d'accusation. Je suis

9 coupable parce que je suis serbe et que j'ai défendu mon peuple.

10 M. le Président (interprétation): Je vous en prie. Attendez un instant.

11 Vous pourrez faire ces remarques un peu plus tard. Mais avant cela, je

12 suis tenu de vous poser la question officiellement, et je répète: êtes-

13 vous prêt à déclarer ce que vous plaiderez par rapport aux Chefs

14 d'accusation retenus contre vous ou voulez-vous le faire dans un délai de

15 30 jours?

16 M. Stankovic (interprétation): Je ne veux pas me prononcer sur ce point.

17 M. le Président (interprétation): Avez-vous discuté de cela avec votre

18 conseil?

19 M. Stankovic (interprétation): Non.

20 M. le Président (interprétation): Madame Dubois, avez-vous un commentaire?

21 Mme Dubois: Monsieur Stankovic n'a pas entendu, comme je vous l'ai indiqué

22 tout à l'heure, … s'entretenir avec moi concernant les termes de sa

23 défense, donc je n'ai rien d'autre à ajouter.

24 M. le Président (interprétation): Merci, Maître.

25 Monsieur Stankovic, le Règlement de procédure et de preuve stipule de la

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1 façon la plus claire qui soit que c'est seulement à votre demande qu'il

2 vous est permis de vous prononcer sur votre façon de plaider vis-à-vis des

3 différents chefs d'accusation retenus contre vous.

4 Donc, vous ai-je bien compris en comprenant que vous demandez à vous

5 prononcer ou à ne pas vous prononcer aujourd'hui?

6 M. Stankovic (interprétation): J'ai déjà répondu à cette question. Je le

7 répète: je n'ai aucune intention de déclarer ce que je plaiderai vis-à-vis

8 de cet Acte d'accusation.

9 M. le Président (interprétation): Donc, si je vous comprends bien, vous ne

10 souhaitez dire de quelle façon vous plaiderez, ni aujourd'hui ni dans un

11 délai de 30 jours?

12 M. Stankovic (interprétation): En effet.

13 M. le Président (interprétation): Dans ce cas, je suis tenu de vous

14 informer qu'en application de l'Article 62 du Règlement, "si l'accusé ne

15 plaide ni dans un sens ni dans l'autre lors de la comparution initiale ou

16 lors d'une comparution ultérieure, le Juge est tenu de prendre note en son

17 nom d'un plaidoyer de non-culpabilité". (Fin de citation de l'Article.)

18 Avez-vous compris les conséquences qu'aura votre silence, s'agissant de ce

19 plaidoyer de non-culpabilité?

20 M. Stankovic (interprétation): Oui.

21 M. le Président (interprétation): J'ai le sentiment que l'accusé a compris

22 l'avertissement qui lui a été lancé et que c'est de son propre gré qu'il a

23 décidé de pas se prononcer, s'agissant de la façon dont il va plaider et

24 ce, ni aujourd'hui ni dans un délai de 30 jours. Par conséquent, l'Article

25 62 du Règlement s'applique et un plaidoyer de non-culpabilité est pris en

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1 note au nom de l'accusé. Cette remarque s'applique à tous les Chefs

2 d'accusation dont il vient d'être donné lecture.

3 Par conséquent, l'accusé plaide non coupable vis-à-vis du Chef

4 d'accusation 45-réduction en esclavage, crime contre l'humanité sanctionné

5 par l'Article 5c) du Statut de Tribunal-, vis-à-vis du Chef d'accusation

6 46 –viol, crime contre l'humanité sanctionné par l'Article 5g) du Statut

7 du Tribunal-, vis-à-vis du Chef d'accusation 47 -viol, violation des lois

8 aux coutumes de la guerre sanctionnée par l'Article 3 du Statut du

9 Tribunal- et enfin, vis-à-vis du Chef d'accusation 48 –atteintes à la

10 dignité des personnes, violation des lois ou coutumes de la guerre

11 sanctionnée par l'Article 3 du Statut du Tribunal.

12 Nous pouvons maintenant aborder la question de votre privation de liberté.

13 Il m'appartient de décider aujourd'hui si votre privation de liberté va se

14 poursuivre.

15 Bien sûr, Monsieur Stankovic, vous êtes en droit de contester la légalité

16 de votre arrestation. Souhaitez-vous élever quelque objection que ce soit

17 aujourd'hui, à moins que –comme cela est courant au sein de ce Tribunal-

18 vous ne souhaitiez déposer une requête avec l'aide d'un conseil de la

19 défense?

20 M. Stankovic (interprétation): Je déposerai une requête avec l'aide d'un

21 conseil de la défense.

22 M. le Président (interprétation): Merci. En conséquence, je dois ordonner

23 la poursuite de votre détention aujourd'hui et ce, jusqu'à nouvel ordre,

24 en attendant le dépôt de cette requête de votre part.

25 Est-il nécessaire d'informer qui que ce soit, Monsieur Stankovic, du fait

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1 que vous avez été privé de votre liberté; par exemple, votre épouse ou des

2 membres de votre famille qui, dans ce cas, pourraient savoir où vous

3 joindre?

4 M. Stankovic (interprétation): Ma famille est déjà informée, donc il ne

5 sera pas nécessaire que vous l'informiez une nouvelle fois.

6 M. le Président (interprétation): Merci.

7 Dans ce cas, je vous pose la deuxième question que j'ai à vous poser:

8 souhaitez-vous que le Tribunal informe votre consulat ou votre ambassade

9 de votre privation de liberté?

10 M. Stankovic (interprétation): Oui.

11 M. le Président (interprétation): Quel est donc le consulat ou l'ambassade

12 qu'il convient d'informer? Pouvez-vous me le dire?

13 M. Stankovic (interprétation): De la Republika Srpska.

14 M. le Président (interprétation): Je crois comprendre que vous parlez de

15 l'entité Republika Srpska qui fait partie de l'Etat dont le nom est

16 Bosnie-Herzégovine, c'est bien cela?

17 M. Stankovic (interprétation): Oui.

18 M. le Président (interprétation): Merci. Dans ce cas, l'Etat de Bosnie-

19 Herzégovine sera informé.

20 Je suis à présent tenu de vous demander si vous avez quelque chose à

21 ajouter, notamment au sujet de vos conditions de détention au sein du

22 quartier pénitentiaire. Avez-vous des remarques à formuler à ce sujet?

23 M. Stankovic (interprétation): Bien, bien. Très bien, parfait; je n'ai

24 aucune remarque à ce sujet.

25 M. le Président (interprétation): Très bien, merci.

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1 Eh bien, je m'adresse à présent aux représentants du Bureau du Procureur.

2 Je suppose que, se fondant sur le reste de l'Acte d'accusation que nous

3 avons sous les yeux, le Bureau du Procureur devrait être appelé à revoir

4 la question de la compétence en l'espèce.

5 Il ne fait aucun doute que les crimes allégués sont des crimes graves. Ce

6 sont des crimes de guerre graves, s'ils sont commis dans les conditions

7 décrites dans l'Acte d'accusation. Cependant, le critère à appliquer,

8 s'agissant de notre compétence, continue à devoir correspondre à

9 l'intégralité du nom de notre Tribunal, donc il doit s'agir de violations

10 graves du droit humanitaire international.

11 Par ailleurs, nous devons vérifier, en tenant compte notamment de la

12 situation régnant au sein du quartier pénitentiaire et de la durée longue

13 de la détention, y compris si l'on tient compte du procès qui va s'ouvrir

14 et de l'expérience acquise au fil des procès qui ont déjà été jugés au

15 sein de ce Tribunal, donc il convient de se poser la question de savoir

16 s'il existe une juridiction concurrente qui pourrait être chargée de cette

17 affaire. Et donc, à ce sujet, il convient de se pencher sur l'Article

18 11bis de notre Règlement de procédure et de preuve pour voir si celui-ci

19 s'applique.

20 Des remarques du côté du Bureau du Procureur?

21 Mme Kuo (interprétation): Monsieur le Président, au nom de l'accusation,

22 je dois dire que nous considérons les allégations retenues contre cet

23 accusé comme des violations graves. Elles sont décrites dans l'Acte

24 d'accusation rédigé précédemment, dans lequel le nom de l'accusé présent

25 devant vous aujourd'hui était cité. Et un autre accusé a été déclaré

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1 coupable, ce qui a été confirmé en appel.

2 Cependant, nous tiendrons compte des commentaires faits par vous, Monsieur

3 le Président. Et je souhaite appeler l'attention de ceux qui peuvent

4 prendre une décision sur la nécessité de repenser cette affaire. Merci.

5 M. le Président (interprétation): Je vous remercie.

6 D'autres observations par les parties? Non, cela ne semble pas le cas. Je

7 vous remercie.

8 Nous sommes au terme de cette comparution initiale.

9 (L'audience est levée à 9 heures 35.)

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