Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le mardi 6 octobre 2009

  2   [Audience publique]

  3   [Les accusés sont introduits dans le prétoire]

  4   --- L'audience est ouverte à 14 heures 18.

  5   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Bonjour

  6   à toutes les personnes présentes dans ce prétoire. Il s'agit de l'affaire

  7   IT-08-91-T, le Procureur contre Mico Stanisic et Stojan Zupljanin.

  8   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Bonjour à tout le monde. Je vais

  9   demander que les parties se présentent.

 10   M. HANNIS : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Je m'appelle

 11   Tom Hannis. Je suis ici pour représenter les intérêts du Procureur. Je suis

 12   ici avec Mme Belinda Pidwell, avec M. Di Fazio et notre commise à

 13   l'affaire, Mme Jasmina Bosnjakovic.

 14   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Je vous remercie.

 15   M. CVIJETIC : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Je m'appelle

 16   Slobodan Cvijetic, et je suis ici en tant que co-conseil de M. Stanisic. Je

 17   suis ici avec M. O'Sullivan et notre assistante, Tatjana Savic.

 18   M. PANTELIC : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Pour la

 19   Défense de M. Zupljanin, nous avons ici Dragan Krvogic, moi-même, Igor

 20   Pantelic, Brent Hicks, et Eric Tully. Merci.

 21   [La Chambre de première instance et la Greffière se concertent]

 22   [Le témoin vient à la barre]

 23   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Bonjour, Monsieur. Je voudrais vous

 24   rappeler que vous êtes toujours tenu par la déclaration solennelle.

 25   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 26   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Monsieur Pantelic, je vous rends la

 27   parole.

 28   M. PANTELIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

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  1   LE TÉMOIN : MIRZET KARABEG [Reprise]

  2   [Le témoin répond par l'interprète]

  3   Contre-interrogatoire par M. Pantelic : [Suite]

  4   Q.  [interprétation] Bonjour.

  5   R.  Bonjour.

  6   Q.  Nous allons poursuivre aujourd'hui.

  7   M. PANTELIC : [interprétation] Je voudrais citer la pièce 1D10.

  8   Q.  Avant de voir cela, hier en répondant à une question posée par

  9   mon collègue, M. Cvijetic, vous avez parlé de la décision prise par la

 10   présidence de la République de Bosnie-Herzégovine le 30 mars 1993, et cette

 11   décision concerne la création des présidences de Guerre. Est-ce que vous

 12   vous souvenez de cela ?

 13   R.  Oui.

 14   Q.  Pouvez-vous nous dire brièvement quels étaient les domaines de

 15   responsabilité des présidences de Guerre. Il s'agissait, n'est-ce pas, de

 16   coopérer aussi avec les unités militaires et les forces de la police; est-

 17   ce exact ?

 18   R.  Oui, c'est exact.

 19   L'INTERPRÈTE : Le reste de la réponse n'était pas audible pour

 20   l'interprète.

 21   M. PANTELIC : [interprétation]

 22   Q.  D'après les informations que vous avez, sur le territoire de la

 23   municipalité de Sanski Most, comment décririez-vous le début de l'année

 24   1992 après que la déclaration de l'indépendance de Bosnie-Herzégovine a été

 25   votée, que diriez-vous, que vous aviez des liens de coopération étroits

 26   avec le HDZ, enfin qu'il y en avait entre le SDA et le HDZ ?

 27   R.  Oui.

 28   Q.  Est-ce que cela concernait aussi un certain degré de coordination de

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  1   vos activités de défense concernant les unités armées du SDA et du HDZ qui

  2   se trouvaient sur le terrain ? Là, je pense à la ligue patriotique qui

  3   était une des premières unités du SDA, et du HVO qui était une des

  4   premières unités des forces croates ?

  5   R.  Il n'y avait pas vraiment de coordination. S'il y avait eu une

  6   véritable coordination, les choses ne se seraient pas passées ainsi.

  7   M. PANTELIC : [interprétation] Excusez-moi, je voudrais citer une pièce à

  8   conviction qui figure sur la liste du bureau du Procureur; 65 ter 2422.

  9   M. DI FAZIO : [interprétation] C'est la pièce P60.13.

 10   M. PANTELIC : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur.

 11   Q.  Monsieur Karabeg, hier vous avez parlé de ce document, et au mois de

 12   décembre 1991, vous étiez le président du comité exécutif de la

 13   municipalité de Sanski Most ?

 14   R.  Oui, c'était depuis le 1er janvier 1991.

 15   Q.  Sur la gauche de l'écran, on peut lire qu'une réunion extraordinaire du

 16   comité exécutif s'est tenue le 28 décembre 1991. On voit un certain nombre

 17   de points de l'ordre du jour et un certain nombre de mesures pour

 18   l'assemblée qui ont été proposées par la branche du SDA. Est-ce que vous

 19   vous souvenez de cette réunion, vous étiez à l'époque le président du

 20   comité exécutif ?

 21   R.  J'ai du mal à lire cela. Est-ce que l'on peut agrandir ce qui se trouve

 22   sur l'écran ?

 23   Q.  Je vais rafraîchir votre mémoire. A l'époque, cette branche voulait

 24   demander au MUP de revoir le travail du poste de sécurité publique et

 25   voulait aussi que l'on envoie une requête au MUP de Bosnie-Herzégovine au

 26   sujet de quelque personnel et des quotas. Est-ce que vous vous souvenez de

 27   cela ?

 28   R.  Oui.

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  1   Q.  Maintenant, je vais vous demander d'examiner le cinquième point sur

  2   cette même page. Voyez-vous ici on peut lire que le SDA, entre autres, a

  3   proposé qu'on envoie une requête au MUP demandant qu'une unité spécialisée

  4   soit envoyée à Sanski Most. Est-ce que vous vous souvenez de cette requête

  5   formulée par le SDA ?

  6   R.  Non, je ne sais pas qui a écrit cela.

  7   Q.  Je vais rafraîchir votre mémoire. Ici, on voit le texte du SDA, à

  8   savoir qu'on convoque, à cause des tensions multiethniques, une unité de

  9   Sarajevo. C'est probablement pour cela qu'on a fait cela.

 10   R.  Vous savez, à cette époque-là il n'y avait pas du tout de tensions. Il

 11   existait à l'époque une coopération parfaite entre les trois parties. Moi

 12   et deux autres représentants, les vice-présidents et les présidents de

 13   l'assemblée.

 14   L'INTERPRÈTE : L'interprète n'a pas entendu les noms.

 15   M. O'SULLIVAN : [interprétation] Les interprètes n'ont pas entendu les

 16   noms. Est-ce que l'on peut demander au témoin de les répéter.

 17   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Monsieur le Témoin, pourriez-vous

 18   répéter la dernière réponse pour les interprètes.

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] Il n'y avait pas de tensions à l'époque. Entre

 20   nous, nous avions une coopération parfaite entre le SDA, entre le HDZ et le

 21   SDS; moi, j'ai été le président du comité exécutif, Nedeljka Rasula était

 22   le président de l'assemblée de la municipalité de Sanski Most, et Ante

 23   Dunjic était le vice-président de l'assemblée de Sanski Most, et nous

 24   trois, on coopérait parfaitement bien.

 25   M. PANTELIC : [interprétation]

 26   Q.  Dites-nous à quel moment le SDA a-t-il créé la cellule de Crise de

 27   Sanski Most ?

 28   R.  Jamais. Nous avions une cellule de Crise au niveau de la municipalité

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  1   de Sanski Most, donc c'était un organe de l'assemblée.

  2   Q.  Et cela a été créé quand ?

  3   R.  Suite aux élections, on a créé cet organe. Le président de la cellule

  4   de Crise, le président de l'assemblée, le chef de la police, le chef de la

  5   protection civile, et cetera. Donc, cela dépend des fonctions.

  6   La Défense territoriale, la protection civile…

  7   Q.  Est-ce que le SDA et le HDZ ont eu la cellule de Crise à Sanski Most ?

  8   R.  Non, je viens de dire qu'il s'agissait d'un organe qui représentait la

  9   municipalité de Sanski Most et dont les membres étaient les personnes qui

 10   portaient certaines fonctions. Moi, en tant que président du comité

 11   exécutif de l'assemblée, Nedeljko Rasula était le président de l'assemblée,

 12   le leader de la Défense nationale, de la Défense populaire et de la police

 13   à l'époque.

 14   Q.  Dites-moi si vous connaissez la personne dont le nom est Suad Sabic ?

 15   Connaissez-vous cette personne ? Connaissez-vous Suad Sabic ?

 16   R.  C'est pour la troisième fois que je le répète, oui, je le connais.

 17   Q.  Quelle était sa fonction dans la municipalité de Sanski Most ?

 18   R.  Je pense que c'était le procureur municipal à l'époque.

 19   M. PANTELIC : [interprétation] Pouvons-nous, s'il vous plaît, passer

 20   à la page 24 de son document. Le document que nous avons, c'est la

 21   traduction en anglais, page 34 [comme interprété], numéro ERN 0110-4351. En

 22   B/C/S, c'est la page ERN 0037-9448. Oui, c'est l'autre partie en B/C/S.

 23   Voilà, c'est bien. Pourriez-vous zoomer un peu. Très bien.

 24   Q.  Est-ce que vous voyez là qu'il est dit que Suad Sabic était le

 25   commandant de la cellule de Crise ? Est-ce que vous êtes au courant de cela

 26   ?

 27   R.  Non.

 28   Q.  Est-ce que vous êtes au courant du fait que le SDA avait trois postes

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  1   de commandement : il y en avait un qui se trouvait au niveau de la caserne

  2   des pompiers, l'autre était à l'école élémentaire Vuk Karadzic, et le

  3   troisième était à Pobrijezje. Est-ce que vous étiez au courant de cela ?

  4   R.  C'est vous qui le dites. Moi, je n'étais pas au courant de cela.

  5   Q.  Connaissiez-vous M. Ivan Filipovic ?

  6   R.  Oui. 

  7   Q.  Quel était son groupe ethnique ?

  8   R.  C'était un Croate.

  9   Q.  Est-ce qu'il avait un poste à Sanski Most au niveau du HDZ ?

 10   R.  Je ne sais pas s'il avait une fonction. Toujours est-il que c'était lui

 11   qui était le vice-président du comité exécutif. C'était mon adjoint. Je

 12   vais faire un commentaire, si vous me le permettez. Il n'y avait pas de

 13   cellule de Crise.

 14   M. PANTELIC : [interprétation] Je voudrais vous montrer une autre page. En

 15   B/C/S, c'est 0037-9449. En anglais, c'est 0110-4351. Mais c'est deux pages

 16   en B/C/S, alors qu'en anglais il n'y a qu'une page. Voilà. C'est bien.

 17   Q.  Monsieur, est-ce que vous savez qu'il y avait deux détachements, deux

 18   compagnies à Sana des unités musulmanes ?

 19   R.  Je vais vous dire, il est possible qu'il y ait quelque chose à Vrpolje,

 20   c'est tout à fait possible.

 21   Q.  Merci. Pourriez-vous à présent examiner la page 2 ici, à droite. Est-ce

 22   que vous pouvez voir ce qui est écrit ici ? Il y avait quatre pelotons,

 23   huit compagnies et sept détachements comptant au total 1 800 soldats.

 24   Etiez-vous au courant de cela, à savoir que c'est comme cela que les forces

 25   musulmanes étaient organisées à Sanski Most ?

 26   R.  Laissez-moi regarder cela. Est-ce bien ce qui est écrit tout en bas où

 27   on peut lire 1 860 ?

 28   Q.  Oui, c'est vrai, mais je vais essayer de vous aider. Les noms sont

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  1   Caplje, Vrpolje, Hrustovo, Stara Rijeka, Majdan, Cirkici, Vakuf, Fitovce

  2   [phon], et cetera, et cetera. Donc, on peut voir qu'il y avait à peu près

  3   20 hameaux, et le nombre total c'est 1 860. Est-ce que vous avez jamais

  4   parlé des soldats qui étaient courageux et des officiers de la Ligue

  5   patriotique, de la façon dont tout cela était organisé ?

  6   R.  Bien, je peux vous dire que j'aurais préféré que les choses aient été

  7   comme cela --

  8   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] De quel document s'agit-il ? Pouvez-

  9   vous m'aider ?

 10   M. PANTELIC : [interprétation] C'est un journal qui a été confisqué dans la

 11   cellule de Crise serbe, mais Me Di Fazio peut nous aider.

 12   M. DI FAZIO : [interprétation] C'est le journal de Nedeljko Rasula, qui

 13   avait fonction au niveau du SDS de Sanski Most. Je ne peux pas vous dire

 14   exactement quand cela a été saisi, pas la date exacte. Mais en tout cas,

 15   c'est ce que nous savons au sujet de ce document.

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] Je voudrais apporter une correction. Ce

 17   n'était pas Andjelko, mais c'était Nedeljko Rasula.

 18   M. PANTELIC : [interprétation] Est-ce que maintenant vous êtes suffisamment

 19   renseigné, Monsieur le Juge ?

 20   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Oui, mais apparemment l'authenticité

 21   de ce document n'a pas été contestée de la part de la Défense.

 22   M. PANTELIC : [interprétation] Nous sommes en train de vérifier tout cela,

 23   toutes les circonstances de la saisie de ces documents, mais je pense qu'on

 24   a parlé exactement du même document dans l'affaire Brdjanin.

 25   M. DI FAZIO : [interprétation] Effectivement. On en a beaucoup parlé. C'est

 26   un point de controverse, et il y a eu des témoins qui ont parlé de

 27   l'authenticité de ces documents. Mais nous allons en parler au cours de

 28   notre présentation des moyens de preuve.

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  1   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] J'attends avec impatience d'entendre

  2   davantage là-dessus.

  3   M. PANTELIC : [interprétation]

  4   Q.  Dites-moi, Monsieur Karabeg, après que vous avez été placé en

  5   détention, est-ce que vous avez fourni une déclaration dans le bureau de

  6   l'AID, c'est la police secrète de la Fédération musulmano-croate. Vous avez

  7   fait cela à Travnik. Est-ce que vous vous souvenez de cela ?

  8   R.  Oui.

  9   Q.  Dans cette déclaration, vous avez décrit les événements d'une certaine

 10   façon. Cependant, ce service était le centre des services de Sécurité de

 11   Banja Luka avec le siège à Travnik; est-ce exact ?

 12   R.  Oui.

 13   Q.  Pourriez-vous m'expliquer pourquoi les Musulmans ont créé un centre

 14   parallèle aux services de Sécurité surnommé les services de Sécurité de

 15   Banja Luka avec le siège à Travnik ?

 16   R.  Vous ne voulez pas comprendre. Nous avions à l'époque les organes tout

 17   à fait légitimes de l'Etat de Bosnie-Herzégovine. Le résultat du référendum

 18   a été tel que cet Etat a gagné son indépendance, et c'est tout à fait

 19   normal qu'on ait des organes appartenant à cet Etat. Nous avions le centre

 20   de sécurité publique de Banja Luka à Travnik de façon temporaire. Pourquoi

 21   ? Parce que ce même centre ne pouvait pas, à l'époque, fonctionner à Banja

 22   Luka. Sinon, on l'aurait eu là-bas.

 23   Q.  Est-ce que vous savez, Monsieur Karabeg, qu'en 1992 et jusqu'en 1995,

 24   et jusqu'au jour d'aujourd'hui, dans le centre de services de Sécurité de

 25   Banja Luka, il y avait des policiers de carrière musulmans et croates qui

 26   travaillaient dans le centre de sécurité publique de Banja Luka ? Est-ce

 27   que vous êtes au courant de cela ?

 28   R.  Oui, oui. Oui.

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  1   Q.  Dites-moi comment il est possible de voir que les policiers de métier

  2   se trouvant aux fonctions élevées sont restés à travailler au CSB à Banja

  3   Luka alors qu'un autre CSB Banja Luka parallèle a été formé ayant le siège

  4   à Travnik ? Comment cela est-il possible ? Pourquoi tous les policiers de

  5   métier ne seraient pas partis de Banja Luka à Travnik ?

  6   R.  Ne me posez pas cette question. Une minorité a peut-être dû rester là-

  7   bas parce qu'on a menacé leurs familles. Vous violez, vous massacrez, vous

  8   tuez, et vous me posez la question pourquoi. Je ne suis pas le seul qui

  9   soit parti de Sanski Most à Manjaca. J'ai été arrêté, j'ai été capturé,

 10   malmené, battu, et on m'a mené à Manjaca par la suite. Je n'ai pas été le

 11   seul qui soit parti à Manjaca. Il ne s'agissait pas d'une minorité. Il

 12   s'agissait d'un grand nombre, non pas de la population serbe, mais des

 13   Musulmans et des Croates.

 14   Q.  Dites-moi s'il y avait des victimes serbes sur le territoire de la

 15   municipalité de Sanski Most ? Je parle des villages serbes. Est-ce qu'il y

 16   avait des Serbes qui ont été tués, pour autant que vous sachiez ?

 17   R.  Non.

 18   Q.  Y avait-il des villages serbes détruits sur le territoire de la

 19   municipalité de Sanski Most ?

 20   R.  Non. Nous parlons de l'année 1992.

 21   Q.  Je ne vous ai pas bien compris. Donc, il y avait --

 22   R.  Nous parlons de l'année 1992, ou nous parlons de la période allant de

 23   1992 à 1995 ? Précisez cette période, s'il vous plaît.

 24   Q.  Nous parlons de la période entre 1992 et 1995.

 25   R.  Je ne dis pas que lorsqu'il y a eu la libération de Sanski Most --

 26   Sanski Most a été libérée et, bien sûr, il y avait des activités de combat.

 27   Q.  Et il y avait des civils serbes victimes de ces activités de combat ?

 28   R.  Oui, je viens de vous le dire, parce qu'il y a eu la libération de

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  1   Sanski Most, à partir de 1992 jusqu'à la libération de Sanski Most,

  2   jusqu'au 10 octobre 1995. Posez-moi des questions portant sur cette

  3   période. Sanski Most a été libéré le 10 octobre 1995 et, normalement, il y

  4   avait des victimes.

  5   Q.  Pour en finir avec mon contre-interrogatoire, je vais vous poser la

  6   question suivante. Je vais d'abord vous présenter certains faits. Je vous

  7   dis, Monsieur Karabeg, que vous avez été membre du SDA ayant une fonction

  8   élevée à Sanski Most.

  9   R.  Je n'ai jamais nié cela. Oui, je l'étais. Il faut que j'ajoute que je

 10   suis parmi les membres appartenant au cercle restreint des fondateurs du

 11   parti.

 12   Q.  Vous, ensemble avec vos collègues du HDZ et de l'assemblée municipale

 13   de Sanski Most, au cours de l'année 1991, et jusqu'au moment de votre

 14   arrestation, vous avez formé vos formations armées, n'est-ce pas ?

 15   R.  C'est vous qui le dites. C'est vous qui le dites.

 16   Q.  Je vous pose cette question.

 17   R.  C'est vous qui le dites. Et sur la base de ce que vous m'avez montré,

 18   sur la base de ces documents où cet homme a écrit : Amenez Karabeg Mirzet

 19   pour qu'il ne marche plus sur cette planète.

 20   On sait ce que cela veut dire. Cela veut dire, amenez-le-moi mort.

 21   Q.  Répondez-moi par un oui ou par un non, s'il vous plaît, pour en finir

 22   avec cette question.

 23   R.  Non.

 24   Q.  Je vous dis que les membres de la Ligue patriotique, formation armée du

 25   SDA, et membres du HVO, formation armée croate à Sanski Most, avaient été

 26   militairement organisés vers la fin de 1991 et dans la première moitié

 27   1992, oui ou non ?

 28   R.  Non.

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  1   Q.  Je vous dis que les formations militaires croato-musulmanes à Sanski

  2   Most procédaient à des attaques militaires, à des attaques armées contre

  3   les unités régulières de l'armée de la Republika Srpska, et lors de ces

  4   attaques, les civils serbes, ainsi que les propriétés serbes ont été

  5   détruites. Etes-vous d'accord pour dire cela ?

  6   R.  Non, je ne suis pas d'accord avec vous à ce sujet. Monsieur le

  7   Président, Messieurs les Juges, ne lui permettez pas de me maltraiter.

  8   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Maître Pantelic, je ne sais pas où vous

  9   voulez en venir en posant ces questions, mais il faut que je vous rappelle

 10   que le mode de défense tu quoque n'est pas un mode de défense légitime dans

 11   cette affaire. Il est vrai peut-être que les deux parties auraient commis

 12   des crimes, mais ce n'est pas le point qui est contestable dans cette

 13   affaire.

 14   M. PANTELIC : [interprétation] Monsieur le Président, je suis tout à fait

 15   d'accord avec vous, à savoir que le principe de tu quoque n'est pas le

 16   principe qui est applicable, sauf dans des situations limitées. Mais les

 17   questions que j'ai posées, je les ai posées uniquement pour établir, parce

 18   que nous avons des moyens de preuve qui corroborent cela, à savoir que

 19   toutes les trois parties à Sanski Most, vers la fin de 1992 et au début de

 20   1991 -- en fait, au début de l'année 1992, ont été organisées sur le plan

 21   politique, sur le plan militaire et sur le plan de sécurité.

 22   Nous voulons montrer que ce témoin ne nous a pas dit la vérité pour

 23   ce qui est des formations militaires des Musulmans et des Croates, des

 24   forces croates et des forces musulmanes à Sanski Most, et toutes les autres

 25   actions qui ont été menées pendant cette période-là, ce qui a représenté la

 26   raison qui a amené jusqu'à certaines réactions militaires ou d'unités

 27   militaires sur ce territoire. C'est l'essentiel de mes questions.

 28   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Je pense que ça nous ramène à ce mode

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  1   de défense de tu quoque. Si vous dites que les forces serbes ont commis des

  2   crimes, cela a été commis en tant que représailles pour les attaques

  3   lancées par l'autre partie. Il n'est pas important ici de savoir si cela

  4   s'est réellement passé ou pas.

  5   M. PANTELIC : [interprétation] Je suis d'accord avec vous, Monsieur le

  6   Juge. La théorie de la Défense se serait basée sur le principe de

  7   représailles. Mais nos arguments vont dans l'autre sens, opposé. Non

  8   seulement dans cette municipalité, mais dans d'autres municipalités

  9   couvertes par l'acte d'accusation, nous allons montrer qu'il y avait des

 10   forces croates et musulmanes régulières qui préparaient des attaques contre

 11   la communauté serbe et qu'il y avait des occasions où des opérations ont

 12   été menées, des opérations qui devaient être des opérations de prévention,

 13   ce qui était conformément aux dispositions des lois militaires. C'est ce

 14   que nous allons montrer.

 15   Mon intention, Monsieur le Juge, n'est pas du tout d'établir une

 16   sorte d'équilibre entre les victimes et des actions qui ont été menées.

 17   J'essaie de poser des questions au témoin tout simplement qui concernent

 18   ses informations, ses connaissances personnelles pour ce qui est de ces

 19   événements.

 20   Parce que voilà ce que le témoin a déposé que personne n'a été armé à

 21   Sanski Most, seulement les Serbes, que les Serbes ont commencé à semer la

 22   terreur, que les Musulmans ont été pacifiques, et ensemble avec les

 23   Croates, ils ne faisaient que se défendre. C'est pour cela que les

 24   questions que j'ai posées, je les ai posées pour contester la crédibilité

 25   de ce témoin concernant ce sujet. Parce que d'après sa déposition, je peux

 26   dire que -- en fait, sa déposition n'est pas du tout objective pour ce qui

 27   est des faits qui se sont passés dans la municipalité de Sanski Most.

 28   Mais en tout cas, j'en ai fini avec mon contre-interrogatoire,

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  1   Monsieur le Président.

  2   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Des questions supplémentaires,

  3   Monsieur Di Fazio ?

  4   M. DI FAZIO : [interprétation] J'ai quelques questions

  5   supplémentaires que je voudrais poser à ce témoin concernant certains noms.

  6   Nouvel interrogatoire par M. Di Fazio : 

  7   Q.  [interprétation] D'abord, en répondant aux questions de M.

  8   Pantelic, vous avez parlé du président du comité exécutif. Je ne suis pas

  9   certain d'avoir vu cela correctement consigné au compte rendu. Nedeljka

 10   Rasa, c'est ce qu'on peut voir dans le compte rendu. Pouvez-vous répéter le

 11   nom et le prénom de cette personne.

 12   R.  Nedeljko Rasula.

 13   Q.  Pouvez-vous dire maintenant à la Chambre qui était cette personne,

 14   quelle était sa position à Sanski Most ?

 15   R.  Nedeljko Rasula était président du SDS, et d'après sa fonction, il a

 16   été élu président de la municipalité de Sanski Most. Lorsque j'ai pris mes

 17   fonctions le 1er janvier 1991, lui aussi, il a pris ses fonctions en tant

 18   que président de la municipalité, donc le 1er janvier 1991.

 19   Q.  Merci de cette clarification. Il y a un autre sujet à propos duquel Me

 20   Pantelic vous a posé des questions. Il vous a demandé s'il y avait des

 21   Croates ou des Musulmans qui étaient des policiers d'active à Sanski Most

 22   entre 1992 et 1995. Vous avez dit que c'était le cas. Je veux simplement

 23   que vous disiez à la Chambre ce que vous avez fait et où vous avez été

 24   pendant cette période-là.

 25   Ecoutez-moi attentivement, après quoi, vous allez nous dire si vous

 26   êtes d'accord ou pas avec ce que je vais dire. Vous avez dit que vous avez

 27   été arrêté le 25 mai, que vous avez été transféré par la suite à Betonirka,

 28   dans les garages, le 9 mai -- le 9 juin, n'est-ce pas ?

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  1   R.  Oui.

  2   Q.  Pendant cette période-là, avez-vous reçu des informations concernant le

  3   nombre de policiers musulmans ou croates qui ont continué à travailler à

  4   Sanski Most pendant que vous étiez en prison ? Avez-vous reçu de telles

  5   informations ?

  6   R.  Non. Mais permettez-moi --

  7   Q.  Non, écoutez mes questions.

  8   R.  Non.

  9   Q.  Merci. De Betonirka, vous avez été transféré au poste de police pour y

 10   être une brève période de temps, après quoi, vous avez été transféré à

 11   Manjaca, et vous avez été définitivement échangé le 31 octobre 1992.

 12   Pendant cette période-là, est-ce qui que ce soit vous avait donné des

 13   informations eu égard au nombre de policiers musulmans ou croates qui ont

 14   continué à travailler à Sanski Most, est-ce qu'on vous a donné ces chiffres

 15   ou ces informations ?

 16   R.  Non.

 17   Q.  Après cela, vous avez été échangé, me semble-t-il, en Croatie ?

 18   R.  Non, j'ai été échangé à Travnik.

 19   Q.  Merci. Je m'excuse. Aujourd'hui, vous avez également dit que Sanski

 20   Most a été libérée le 10 octobre 1995.

 21   Entre la date de votre échange et le 10 octobre 1995, êtes-vous

 22   retourné à Sanski Most ?

 23   R.  Pas du tout.

 24   Q.  Donc vous n'êtes pas retourné à Sanski Most.

 25   R.  [aucune interprétation]

 26   Q.  Comment est-il possible que vous disposiez des informations concernant

 27   le nombre de policiers musulmans ou de policiers croates qui ont continué à

 28   travailler à Sanski Most, puisque vous n'y étiez pas ?

Page 895

  1   R.  Je n'obtenais pas de telles informations. Mais la question qui m'a été

  2   posée, c'était la question concernant le moment présent et à l'époque où

  3   cela s'est passé. Il s'agit de la période entre 1992 et 1995, et il s'agit

  4   du moment présent. Aujourd'hui, je dis qu'il y en a qui travaille dans la

  5   police, oui. Mais à l'époque, il n'était pas possible pour qui que ce soit

  6   de rester à travailler à Sanski Most dans aucun organe, et en particulier

  7   dans les organes de la police. Mais il me pose des questions comme cela,

  8   concernant ces périodes de temps.

  9   Je m'attendais à ce que vous nous disiez de se concentrer sur une

 10   période de temps précise, parce qu'il pose des questions soit sur la

 11   période de 1992, soit sur la période de 1992 à 1995. Tout le temps,

 12   lorsqu'il me demande s'il y avait des meurtres, s'il y avait des victimes,

 13   s'il y avait d'autres choses, il parle de la période de 1992 à 1995. Non,

 14   en 1992, personne n'avait de fusil, personne n'a pu faire quoi que ce soit,

 15   à l'exception faite de Vrpolje où il y avait ces échanges. Et ensuite, il

 16   me pose des questions concernant 1995. Bien sûr, Sanski Most a été libérée.

 17   Q.  Bien. Monsieur, je vous remercie de cette réponse. Je pense que tout le

 18   monde a compris cela. Je n'ai plus de questions pour vous.

 19   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Merci.

 20   Est-ce que les Juges ont des questions pour le témoin ?

 21   M. PANTELIC : [interprétation] Monsieur le Président, d'après les

 22   instructions de mon client, j'aimerais m'adresser à ce témoin et exprimer

 23   les excuses personnelles de l'accusé pour tout ce que vous avez vécu et

 24   pour tout ce qu'il a appris sur ce que vous avez vécu à l'époque.

 25   M. HANNIS : [interprétation] Monsieur le Président, excusez-moi, mais il

 26   faut que je dise que ce n'est pas la façon appropriée de procéder. Cela

 27   pourrait être fait au moment où la peine est prononcée. Mais à ce stade, il

 28   n'est pas approprié de dire des choses similaires.

Page 896

  1   M. PANTELIC : [interprétation] Puis-je m'adresser à la Chambre pour ce qui

  2   est de ce que M. Hannis vient de dire ? Monsieur le Président, mon devoir

  3   est de suivre les instructions de mon client, toutes ses instructions. Il

  4   s'agit ici d'un procès au pénal, et c'est le moment parfaitement approprié

  5   de l'audience, après la fin du témoignage du témoin, après avoir entendu

  6   tout ce qu'il a vécu, la réaction humaine de la personne qui, d'après

  7   l'acte d'accusation, a le statut d'accusé et non pas de condamné, je pense

  8   que c'est approprié.

  9   J'aimerais parler d'autres affaires, des situations devant ce

 10   Tribunal, où cela a été permis. Il s'agit tout à fait d'un aspect humain,

 11   de la réaction de l'accusé. Cela n'a rien à faire avec le jugement

 12   définitif. Il s'agit tout simplement d'une réaction humaine de la personne

 13   qui est assise ici en tant qu'accusé. Voilà, c'est ce que j'ai voulu dire.

 14   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Merci, Maître Pantelic.

 15   Monsieur Hannis, nous avons fait note de votre objection. La Chambre se

 16   penchera sur cette question et, s'il est nécessaire, la Chambre s'adressera

 17   de façon formelle aux parties au moment approprié.

 18   M. HANNIS : [interprétation] Merci.

 19   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Monsieur, nous vous remercions de votre

 20   aide, d'être venu devant le Tribunal international pour déposer. Vous

 21   pouvez maintenant quitter le prétoire. Nous vous souhaitons bon retour chez

 22   vous.

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.

 24   [Le témoin se retire]

 25   M. LE JUGE HALL : [interprétation] L'Accusation est-elle prête pour citer à

 26   la barre le témoin suivant ?

 27   Mme PIDWELL : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Le témoin

 28   suivant est le Dr Enis Sabanovic, témoin conformément à l'article 92 ter.

Page 897

  1   Il n'y a pas de mesures de protection pour ce témoin. Je vais lui poser des

  2   questions pendant une demi-heure ou 40 minutes. Nous avons un certain

  3   nombre de séquences vidéo, et cela pourrait prendre cinq ou dix minutes

  4   vers la fin de sa déposition. Et à ce stade, j'aimerais vous demander que

  5   M. Di Fazio quitte le prétoire. Il ne sera plus dans le prétoire cet après-

  6   midi.

  7   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Madame Pidwell, vous avez la parole.

  8   Mme PIDWELL : [interprétation] L'Accusation invoque à la barre le Témoin

  9   ST-73, Dr Sabanovic.

 10   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

 12   vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

 13   LE TÉMOIN : ENIS SABANOVIC [Assermenté]

 14   [Le témoin répond par l'interprète]

 15   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Bonjour, Monsieur. Merci d'être venu ici

 16   pour aider le Tribunal international dans son travail. Quel est votre nom ?

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Je m'appelle Enis Sabanovic.

 18   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Quelle est la date de votre naissance ?

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] Je suis né en 1940.

 20   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Quelle est votre profession ?

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Je suis médecin.

 22    M. LE JUGE HALL : [interprétation] Quelle est votre appartenance ethnique

 23   ?

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] Je suis Musulman, Bosnien.

 25   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Madame Pidwell, vous avez la parole.

 26   Mme PIDWELL : [interprétation] Merci.

 27   Interrogatoire principal par Mme Pidwell : 

 28   Q.  [interprétation] Monsieur, pouvez-vous nous dire votre date de

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  1   naissance complète.

  2   R.  Le 24 juin 1940.

  3   Q.  Merci. Monsieur, vous êtes né dans la municipalité de Sanski Most;

  4   c'est vrai ?

  5   R.  Oui.

  6   Q.  Et vous avez été médecin là-bas jusqu'à votre arrestation en 1992,

  7   n'est-ce pas ?

  8   R.  Oui.

  9   Q.  Avant votre arrestation, vous avez été chef du département de médecine

 10   interne à la maison de santé à Sanski Most, n'est-ce pas ?

 11   R.  Oui.

 12   Q.  Vous êtes toujours médecin à Sanski Most au jour d'aujourd'hui ?

 13   R.  Oui. Je suis médecin, et je travaille à présent.

 14   Q.  A quel groupe ethnique appartient votre épouse ?

 15   R.  Elle est Serbe.

 16   Q.  Avant votre arrestation en 1992, vous avez été membre du comité

 17   exécutif du SDA à Sanski Most; est-ce vrai ?

 18   R.  Oui, c'est vrai.

 19   Q.  Monsieur, vous souvenez-vous d'avoir déposé devant ce Tribunal dans

 20   l'affaire Brdjanin, et ce, pendant trois jours, le 3, le 4 et le 5 juin

 21   2002 ?

 22   R.  Oui.

 23   Q.  Et pendant les trois jours précédents, avez-vous eu l'occasion

 24   d'écouter les enregistrements audio de votre déposition dans cette affaire

 25   ?

 26   R.  Oui.

 27   Q.  Si on vous posait des questions concernant les mêmes sujets et si on

 28   vous posait les mêmes questions aujourd'hui, est-ce que vos réponses

Page 900

  1   seraient les mêmes qu'à l'époque ?

  2   R.  Oui.

  3   Mme PIDWELL : [interprétation] Monsieur le Président, j'aimerais qu'on

  4   verse au dossier la déposition de ce témoin dans l'affaire Brdjanin, le

  5   compte rendu de sa déposition qui porte le numéro 10013 65 ter.

  6   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Le document est versé au dossier.

  7   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Sous la cote P61.

  8   Mme PIDWELL : [interprétation] Nous avons également une note de séance de

  9   récolement du 5 octobre, 65 ter 10013A, qui devra être versée sous pli

 10   scellé.

 11   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] En tant que pièce portant la cote P62.

 12   Mme PIDWELL : [interprétation]

 13   Q.  Monsieur, nous avons des documents dont vous avez parlé lors de votre

 14   déposition dans cette autre affaire et qui doivent être versés au dossier

 15   de façon formelle.

 16   Mme PIDWELL : [interprétation] Nous avons trois documents, Monsieur le

 17   Président. 65 ter 00365, et je demande le versement au dossier de ce

 18   document.

 19   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] De quoi il s'agit, Madame Pidwell ?

 20   Mme PIDWELL : [interprétation] Je m'excuse. Ce sont des documents dont il

 21   est question pour ce qui est de la collection de documents 92 ter et pour

 22   laquelle nous avons déjà demandé le versement au dossier. J'aimerais que

 23   cela soit versé au dossier de façon formelle.

 24   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] J'ai lu le témoignage de ce témoin

 25   dans l'affaire Brdjanin, et je me souviens d'un certain nombre de documents

 26   que vous avez mentionnés. Je ne sais pas ce que vous voulez maintenant, que

 27   ces documents soient versés au dossier par le biais de ce témoin. Pourquoi

 28   vous demandez cela ? Il faut voir quels sont les documents exactement que

Page 901

  1   vous voulez qu'on verse au dossier.

  2   Mme PIDWELL : [interprétation] Oui, c'est vrai. Il faudrait peut-être

  3   mettre ceci au clair. Le 2 octobre, la Chambre a rendu une décision

  4   indiquant que les déclarations préalables des témoins, accompagnées des

  5   documents, peuvent être admises conformément à l'article 92 ter. Le

  6   Procureur considère ce document-là comme un jeu de documents qui font

  7   partie du jeu de documents 92 ter. Ce sont les documents qui sont énumérés

  8   dans une liste avec le compte rendu, et ce sont ces documents dont je

  9   demande le versement maintenant.

 10   Bien évidemment, il y a d'autres documents auxquels a fait référence

 11   le témoin lors de ses dépositions préalables, mais le Procureur ne souhaite

 12   pas demander le versement de tous ces documents parce qu'ils ne sont pas

 13   pertinents pour la présente affaire.

 14   [La Chambre de première instance se concerte]

 15   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Alors, les numéros 65 ter, s'il vous

 16   plaît.

 17   Mme PIDWELL : [interprétation] Bien. Numéro 365, c'est un ordre du Corps de

 18   Krajina du 27 juillet. Ensuite, c'est 1275 de la liste 65 ter. Et enfin,

 19   3424 de la liste 65 ter. C'est l'un des documents qui ne figurait pas sur

 20   la liste 65 ter initiale, mais qui est couvert par votre décision de

 21   vendredi dernier. C'est pour cette raison-ci que ce document porte un

 22   nouveau numéro 65 ter.

 23   [La Chambre de première instance et la Greffière se concertent]

 24   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Ces trois documents seront versés au

 25   dossier en tant que P62.1, P62.2 et P62.3. Merci.

 26   M. O'SULLIVAN : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les

 27   Juges, nous ne sommes pas obligés de nous occuper de cette question en

 28   présence du témoin. On peut l'entendre d'abord. Mais de toute manière, très

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  1   rapidement, il faudra exactement voir ce que signifie votre ordonnance du 2

  2   octobre en ce qui concerne la procédure, quels sont les documents qui

  3   peuvent être versés conformément à l'article 92 ter et 92 bis, et quels

  4   sont les documents qui ne peuvent pas être couverts par cet article. Parce

  5   que, hier, le Juge Harhoff a dit à M. Di Fazio qu'il ne fallait pas avoir

  6   des numéros séparés pour ces documents, mais des sous-numéros qui sont

  7   attribués sur la base du numéro du compte rendu du témoin.

  8   De notre côté, nous pensons qu'on ne peut pas demander le versement

  9   des documents figurant sur la liste 65 ter sans une requête aux fins de

 10   ceci.

 11   Alors de notre côté, on ne comprend pas tout à fait la signification

 12   de vos lignes directrices.

 13   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Très bien. Nous allons finir d'abord

 14   avec le témoin, et puis après, on va régler ces questions administratives.

 15   M. O'SULLIVAN : [interprétation] Oui.

 16   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Merci.

 17   Mme PIDWELL : [interprétation]

 18   Q.  Monsieur, en avril 1992, vous étiez chef de la clinique médicale de

 19   Sanski Most, et vous avez cessé de travailler à ce moment-là. Pouvez-vous

 20   nous dire pourquoi ?

 21   R.  Je vais essayer d'être bref. Vous savez, quand tout cela a commencé à

 22   Bijeljina et à Prijedor, malgré ces événements, nous n'avons jamais pu

 23   accepter, comprendre que ça allait nous atteindre aussi et qu'il y aurait

 24   toutes ces atrocités commises entre les Serbes, Croates et Musulmans. Un

 25   jour, j'étais au travail et le président du SDS, du Parti démocratique

 26   serbe, est venu me dire qu'il fallait que je cesse mes fonctions et que je

 27   n'avais plus le droit de venir travailler. Il m'a également dit que

 28   j'allais être remplacé par un médecin serbe.

Page 903

  1   Q.  Quelqu'un d'autre est-il venu avec le président du SDS au moment où il

  2   est venu vous annoncer ceci ?

  3   R.  Un policier. Cela m'a été dit en soirée, vers 7 heures et demie, 8

  4   heures. Un collègue aussi, un spécialiste de médecine interne, devait

  5   venir, parce que nous devions examiner ensemble un patient pour décider

  6   s'il fallait l'envoyer à Banja Luka pour le soigner ou pas. Et le président

  7   du SDS est venu, et quand nous avons fini avec le patient, il a dit que le

  8   policier m'attendait et qu'ils allaient m'accompagner jusqu'à chez moi. Je

  9   lui ai répondu qu'il n'y avait aucune raison pour ceci parce que j'avais

 10   une voiture.

 11   Alors, le policier est parti avec moi. L'un était dans la voiture,

 12   l'autre dans la clinique. Ils m'ont accompagné jusqu'à chez moi. Ensuite,

 13   l'un des deux est entré chez moi, et l'autre est resté devant. Ils m'ont

 14   demandé tous mes documents de nature professionnelle et privée. Et tout

 15   ceci était brûlé sous mes yeux, devant ma maison.

 16   J'ai été arrêté. Deux attendaient là-bas et deux sont venus plus

 17   tard.

 18   Q.  Vous dites qu'il y en avait "quatre". Vous voulez dire quatre policiers

 19   ?

 20   R.  Oui, quatre policiers.

 21   Q.  Pouvez-vous nous décrire leur apparence, portaient-ils des uniformes,

 22   et si oui, de quel type ?

 23   R.  Je pense qu'ils avaient des uniformes bariolés. Il s'agissait de

 24   personnes jeunes. Ils m'ont fait monter à bord d'un véhicule de terrain. Je

 25   me suis trouvé sous les pieds. C'est ainsi que je suis arrivé au SUP de

 26   Sanski Most une dizaine de minutes plus tard.

 27   Ils me donnaient des coups de pied alors que j'étais par terre dans

 28   ce véhicule.

Page 904

  1   Q.  Vous avez dit qu'ils portaient des "uniformes bariolés". Vous voulez

  2   dire des uniformes de camouflage ?

  3   R.  Oui.

  4   Q.  De quelle couleur ?

  5   R.  Comme ceux que la police porte actuellement, bleu.

  6   Q.  Votre épouse, a-t-elle été arrêtée à ce moment-là ?

  7   R.  Non. Elle n'a jamais été arrêtée durant la guerre.

  8   Q.  Etait-elle présente au moment de votre arrestation, au moment où on

  9   vous a conduit de chez vous et on a brûlé vos documents ?

 10   R.  Oui. Elle était chez nous dans la maison avec les enfants. Mais à cette

 11   époque-là, ils n'arrêtaient pas les Serbes.

 12   Q.  Vous nous avez dit qu'on vous avait conduit au bâtiment du centre de la

 13   sécurité publique dans un véhicule tout-terrain. Y avait-il quelque chose

 14   sur ce véhicule, un insigne ou quelque chose d'autre ?

 15   R. Je ne sais pas, c'est difficile à dire. Oui, c'était un véhicule qui

 16   avait une immatriculation de police.

 17   Q.  Bien. Vous nous avez dit qu'on vous avait conduit au bâtiment de la SJB

 18   de Sanski Most. Y avait-il à Sanski Most plusieurs bâtiments de la SJB ou

 19   un seul ?

 20   R.  Non, non, il n'y avait qu'un seul bâtiment à Sanski Most. Il y avait,

 21   évidemment, une antenne de la police dans la communauté de Palanka. Mais

 22   là-bas, il n'y avait que deux à trois policiers, et ceci, avant la guerre.

 23   Q.  Bien. Lors de votre déposition au préalable, vous avez déclaré avoir

 24   passé deux jours en détention dans le bâtiment de la SJB. Pendant cette

 25   période, vous a-t-on interrogé ou auditionné ?

 26   R.  En arrivant au bâtiment, personne ne m'a rien demandé, ne m'a rien dit.

 27   On m'a attaché, on m'a fait entrer dans les toilettes qui mesuraient deux

 28   mètres sur un mètre et demi, ou sur deux mètres. Je suis resté là-bas deux

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  1   jours entiers sans que personne ne vienne me voir. Tout ce que je pouvais

  2   faire, c'était de me cogner la tête contre le mur. Mais je ne l'ai pas

  3   fait. Donc il n'y avait rien d'autre que je peux faire entre-temps.

  4   Q.  Avez-vous vu des gardiens ou des policiers dans ce bâtiment durant

  5   cette période ?

  6   R.  Je ne sortais que peu. J'évitais qu'on me voie. J'avais peur.

  7   Q.  Et quand vous avez réussi enfin à sortir des toilettes du bâtiment de

  8   la SJB, avez-vous vu des policiers ou des gardiens ?

  9   R.  Oui. On m'a fait sortir et on m'a conduit à Betonirka, dans des garages

 10   qui se situaient à environ 100, 150 mètres du poste de la police, sur une

 11   petite colline. C'est à ce moment-là qu'on a commencé à me battre, à me

 12   donner des coups sur la tête, à me frapper avec des objets divers, tout ce

 13   qui leur tombait sur les mains. A ce moment-là, mon œil gauche était tout

 14   enflé. C'est resté ainsi pendant plus de deux mois. Malheureusement, j'ai

 15   dû subir une opération de l'œil l'année dernière à Zagreb par deux médecins

 16   de Ljubljana, suite à une cataracte traumatique qui m'avait été

 17   diagnostiquée en Allemagne.

 18   Q.  Merci. Alors, après le bâtiment de la SJB et Betonirka, vous avez pu

 19   voir, lors de transfert d'un bâtiment à l'autre, des gardiens et des

 20   policiers. Comment étaient-ils ?

 21   R.  Vous savez, c'est très difficile de répondre à ce genre de question.

 22   Dans l'état où je me trouvais, il m'était très difficile de faire attention

 23   aux uniformes. Ce que je peux vous dire, c'est qu'en général c'étaient des

 24   uniformes de camouflage. Mais je ne faisais vraiment pas attention. Je

 25   n'avais pas la possibilité de parler à qui que ce soit ni de les regarder.

 26   J'avais subi une torture horrible.

 27   Q.  Quand vous dites encore les uniformes multicouleurs ou bariolés, que

 28   voulez-vous dire, des uniformes de camouflage bleu ou autre chose ?

Page 906

  1   R.  Oui. Oui, c'est ça, des uniformes de camouflage bleu.

  2   Q.  On vous a également conduit à la salle Hasan Kikic, salle de sport. A

  3   quelle distance de la SJB de Sanski Most se trouvait cette salle de sport ?

  4   R.  A 300, 400 mètres de distance, s'il vous plaît. D'abord, on m'avait

  5   gardé pendant trois jours à Betonirka, dans un garage là-bas. Il y avait

  6   déjà dix à 15 personnes sur place au moment de mon arrivée. Au bout de

  7   trois jours, le nombre de personnes enfermées là-bas a augmenté de telle

  8   manière que nous nous sommes retrouvés une cinquantaine dans cette pièce.

  9   La pièce était tellement encombrée que nous ne pouvions y rester que debout

 10   les uns contre les autres. Alors, on nous a battus, on nous a passé à tabac

 11   à plusieurs reprises. Ensuite, quand on a été conduits dans la salle de

 12   sport Hasan Kikic, cela n'a pas cessé. Hasan Kikic, c'était à 300, 400

 13   mètres de distance.

 14   Q.  Bien. Pourriez-vous nous dire comment étaient les gardiens dans la

 15   salle de sport de Hasan Kikic ?

 16   R.  Ces gardiens étaient plutôt jeunes. C'étaient des policiers qui

 17   portaient des uniformes bariolés, bien sûr armés, qui faisaient, la nuit,

 18   tout ce qu'ils voulaient. Ils nous battaient, ils nous faisaient sortir du

 19   garage, tout ça.

 20   Q.  Ensuite, on vous a transférés à Manjaca, à côté de Banja Luka. Lors de

 21   votre déposition préalable, je fais référence au compte rendu T6489, lignes

 22   7 à 11, vous avez déclaré que :

 23   "…devant le bâtiment du SUP, ils faisaient monter de plus en plus de

 24   personnes à bord des camions. Toutes ces personnes étaient attachées. Ils

 25   étaient attachés deux par deux, et tout ça, c'était terrible."

 26   Pourriez-vous nous dire ce que vous vouliez nous dire par ceci. Qui étaient

 27   ces personnes qui étaient attachées deux par deux ? D'où elles venaient ?

 28   R.  Il y avait là, Madame, des policiers qui devaient escorter les camions

Page 907

  1   jusqu'au camp de concentration de Manjaca. Ils portaient des uniformes

  2   bariolés. Les personnes qu'ils faisaient monter à bord de ces camions

  3   étaient des jeunes hommes du village de Hrustovo et du village de Vrpolje,

  4   qui se trouvent à une trentaine de kilomètres de distance de Sanski Most.

  5   Donc, il y avait dix à 12 jeunes hommes qui avaient les deux mains

  6   attachées, et ensuite on prenait deux de ces détenus et on les attachait

  7   l'un à l'autre. Pour eux, il était très difficile de monter à bord de ces

  8   camions, parce qu'il fallait sauter pour monter, et comme ils étaient

  9   attachés, évidemment qu'ils tombaient, mais les gardiens n'y prêtaient

 10   aucune attention. Ça ne les intéressait pas.

 11   Q.  Bien. Dites-moi, s'il vous plaît, si vous avez pu voir si ces hommes

 12   étaient sortis du bâtiment de la SJB ou sont-ils venus d'un autre endroit ?

 13   R.  Je vous ai dit que ces jeunes hommes venaient des villages de Hrustovo

 14   et de Vrpolje. Il y avait encore quelques personnes qui avaient été

 15   emmenées là-bas d'une autre salle de sport de la ville, qui n'étaient pas

 16   avec nous dans la salle de sport Hasan Kikic et qui ont également dû monter

 17   à bord de ce camion.

 18   Q.  Si j'ai bien compris, le bâtiment de la SJB était un point de

 19   rencontre, de rassemblement pour toutes ces personnes venues de plusieurs

 20   côtés ?

 21   R.  Vous savez, Hitler était à l'origine des camps de concentration, mais

 22   ces gens-ci, ils étaient bien plus grands experts que Hitler en la matière.

 23   Mais vous savez, beaucoup de temps est passé, des personnes occupant des

 24   positions différentes, ayant des professions différentes ont tous été

 25   impliquées dans cette affaire.

 26   Q.  Dites-nous la distance entre Manjaca et Sanski Most.

 27   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Madame Pidwell, nous avons tous lu le

 28   compte rendu de la déposition du témoin. Nous ne voyons aucune raison pour

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  1   lui poser de nouveau toutes ces questions, sauf s'il y a quelques points

  2   qui sont très importants pour vous et que vous souhaitez souligner.

  3   Autrement, ce n'est pas la peine de reposer toutes ces questions. Vous

  4   savez que ce témoin témoigne conformément à l'article 92 ter.

  5   Mme PIDWELL : [interprétation] Oui, bien sûr. J'essaie tout simplement de

  6   souligner quelques aspects de sa déposition qui sont pertinents pour la

  7   présente affaire.

  8   Q.  A la page T6489, vous avez déclaré qu'à Manjaca vous avez retrouvé la

  9   police. Pourriez-vous nous décrire les uniformes des gardiens du camp de

 10   Manjaca ?

 11   R.  Messieurs les Juges, il m'est très difficile de vous donner une réponse

 12   très précise. Il y en avait de toutes sortes. Là-bas, c'était la police de

 13   Banja Luka, alors que c'étaient les policiers de Sanski Most qui nous ont

 14   conduits. Il y avait des policiers qui attendaient pour nous à bord des

 15   camions. Parmi eux, il y en avait qui portaient des uniformes vert olive de

 16   l'ex-armée yougoslave. Il y avait également des policiers qui portaient des

 17   uniformes bariolés.

 18   Ils sont tous, je pense, devenus d'un coup des policiers militaires,

 19   parce qu'il y avait la guerre.

 20   Q.  Lors de votre déposition préalable, vous avez dit que Stojan Zupljanin

 21   s'était rendu à Manjaca, page T6578, lignes 1 à 20 du compte rendu. Savez-

 22   vous s'il s'y était rendu une seule fois ou plusieurs fois ?

 23   R.  Je sais pour une fois, c'était fin juillet, et j'ai entendu dire qu'il

 24   y est allé encore une fois, mais je ne l'ai pas vu. Je l'ai seulement

 25   entendu dire. C'est des policiers qui me l'ont dit. C'était au moment où la

 26   situation s'était déjà un peu stabilisée. La situation était différente,

 27   dans une certaine mesure, de la situation qui régnait en juin, où on

 28   mourait, où toutes ces horreurs se passaient.

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  1   Donc, il y est venu, mais les personnes qui faisaient partie des cercles

  2   dirigeants de cette soi-disant République serbe de Bosanska Krajina ou

  3   Srpska Krajina, ils mettaient en place une stratégie de destruction, ils

  4   créaient un petit Etat qui devait rentrer dans le cadre d'une Grande-

  5   Serbie. Vous savez, ces policiers-là qui m'ont battu, je ne demande pas à

  6   les condamner pour ceci, parce que les responsables sont ceux qui ont donné

  7   les ordres, qui ont créé, qui ont conçu cette stratégie de destruction d'un

  8   peuple, c'était quelque chose d'extraordinaire.

  9   Ces idées-là, à mon avis, sont des idées fascistes.

 10   Q.  Avez-vous jamais vu Stojan Zupljanin à Manjaca, de vos yeux ?

 11   R.  Oui. Pas souvent, parce que je soignais des patients. Il y avait un

 12   homme qui était gravement malade qui se trouvait dans une étable et celui-

 13   ce se trouvait dans une autre. On ne m'a pas laissé entrer parce qu'il

 14   avait déjà commencé son discours, mais j'ai pu entendre les

 15   applaudissements des détenus qui se trouvaient dans l'étable.

 16   On m'a expliqué qu'il avait déclaré que tous ceux qui n'avaient rien

 17   fait allaient être libérés, et que c'est seulement ceux qui ont commis des

 18   actes illégaux qui allaient être jugés devant les tribunaux militaires ou

 19   qu'ils allaient être sanctionnés, expulsés vers un pays tiers. Ceux qui,

 20   d'après eux, ne seraient pas coupables de tels actes seraient relâchés.

 21   Mais moi, j'étais le quatrième sur la liste de 400 personnes qui devaient

 22   être éliminées.

 23   Mme PIDWELL : [interprétation] Peut-être que le moment est venu pour la

 24   pause.

 25   [Le témoin quitte la barre]

 26   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Oui.

 27   --- L'audience est suspendue à 15 heures 43.

 28   --- L'audience est reprise à 16 heures 06.

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  1   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Monsieur le Président, avec votre

  2   permission, je voudrais faire une correction au niveau de la page 21, ligne

  3   19 du compte rendu d'audience d'aujourd'hui. La pièce 65 ter 3424, qui a

  4   été versée par le bureau du Procureur, a déjà été versée au dossier en tant

  5   que pièce P60.12. Et 65 ter 365 et 1275 vont recevoir respectivement les

  6   cotes P61.1 et 61.2. Merci.

  7   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Je vous remercie.

  8   [Le témoin vient à la barre]

  9   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Madame Pidwell, je pense qu'il y a un

 10   malentendu par rapport à l'incident qui a eu lieu à Manjaca, dans l'étable,

 11   avec les discours et les applaudissements. Vous avez posé une question au

 12   sujet de la visite de M. Zupljanin, alors que d'après ce que j'ai compris,

 13   le témoin a parlé de la visite de M. Brdjanin. J'ai vérifié pendant la

 14   pause.

 15   Mme PIDWELL : [interprétation] Je vais vérifier cela avec le témoin.

 16   Q.  Monsieur, avant --

 17   R.  Tous ceux qui venaient là-haut employaient les mêmes modèles de

 18   comportement, les mêmes tactiques. Les détenus devaient applaudir parce

 19   qu'on leur disait qu'ils allaient rentrer chez eux, et ceux qui allaient

 20   être chassés ou traduits devant le tribunal militaire, mais toujours est-il

 21   qu'ils étaient tous contents de quitter les camps, de partir. C'est pour

 22   cela qu'ils applaudissaient. C'était toujours le même comportement.

 23   C'était pareil pour Zupljanin et Brdjanin. De toute façon, les

 24   discours n'étaient pas très longs, mais les gens applaudissaient parce

 25   qu'ils étaient contents de partir.

 26   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Je vous remercie.

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.

 28   Mme PIDWELL : [interprétation]

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  1   Q.  Quand M. Zupljanin est venu à Manjaca ce jour-là, vous avez dit que

  2   vous avez entendu les détenus applaudir après son discours dans les

  3   étables. Est-ce que vous pouvez nous expliquer où est-ce que vous l'avez vu

  4   ?

  5   R.  Je l'ai vu en sortant de l'étable. J'étais en train de revenir du

  6   dispensaire et je l'ai vu. Je l'ai vu au moment où il sortait d'une étable

  7   pour passer dans l'autre. J'étais une dizaine de mètres de là.

  8   Q.  Et comment saviez-vous que c'était bien Stojan Zupljanin ?

  9   R.  Bien, j'ai appris auparavant que Zupljanin allait venir, qu'il

 10   allait venir justement ce jour-là. C'est la police qui nous a dit cela.

 11   Vous savez, c'était une période qui était meilleure pour moi, pour ainsi

 12   dire. La police, et les commandants du camp et le directeur du camp se

 13   comportaient autrement avec moi, parce que je soignais aussi bien les

 14   membres de la police que les membres de la direction du camp, et même les

 15   paysans de Manjaca qui venaient me voir. Et alors, ils ont commencé à me

 16   traiter autrement.

 17   C'est au mois de juin que la situation a été dure, quand les

 18   documents sont arrivés de Sanski Most, et c'est là que la situation était

 19   vraiment difficile. Mais après, c'était différent. Parce que ces gens, même

 20   s'ils étaient Chetnik, ils ont bien compris que je soignais aussi bien M.

 21   Popovic, qui était le commandant du camp, que je l'ai envoyé à l'hôpital de

 22   Banja Luka parce qu'il souffrait d'une angine de poitrine. Et quand il

 23   fallait soigner le chef du camp, ils voyaient que je soignais tout le

 24   monde.

 25   Q.  Quand vous avez vu Stojan Zupljanin ce jour-là, est-ce qu'il

 26   était tout seul ou accompagné de qui que ce soit d'autre ? Est-ce que vous

 27   connaissiez une quelconque personne qui était avec lui ?

 28   R.  Non. Je ne connaissais pas ces personnes. Je n'ai pas posé de

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  1   questions. Avant qu'il n'arrive, on a dit qu'il allait venir, et c'était

  2   Zupljanin qui est venu. Cela étant dit, je ne sais pas qui était avec lui,

  3   qui l'escortait.

  4   Q.  Et avez-vous parlé aux autres détenus au sujet de la visite de M.

  5   Zupljanin après qu'il est parti ?

  6   R.  Bien sûr. Nous avons tous discuté entre nous. Les gens étaient plutôt

  7   optimistes parce qu'ils pensaient qu'ils allaient rentrer chez eux et que

  8   tout cela allait se terminer rapidement - on était déjà fin juillet, début

  9   août - alors qu'on est restés jusqu'à la mi-novembre, non loin de là.

 10   C'est pour cela qu'ils ont applaudi, parce qu'ils allaient rentrer, c'est

 11   ce qu'ils pensaient. C'est ce qu'il disait, lui. Ils le disaient justement

 12   pour cela.

 13   Q.  Etait-ce la seule fois où vous avez vu M. Zupljanin à Manjaca ?

 14   R.  Oui.

 15   Q.  Etes-vous en mesure de vous rappeler si l'autre visite qu'il a

 16   effectuée à Manjaca, si elle a eu lieu avant celle-ci ou après celle-ci ?

 17   Là, je parle de la fois où vous l'avez vu.

 18   R.  Quand je l'ai vu pour la première fois, je pense que c'était sa

 19   première visite sans doute. Il se peut qu'il soit venu directement dans le

 20   bureau de la direction sans passer par les étables. Mais de toute façon,

 21   c'était pour moi la première fois où je l'ai vu. S'il est venu encore une

 22   fois, de toute façon, c'était une visite beaucoup plus brève où n'il y a

 23   pas eu de discussions, où il n'y a pas eu d'échanges.

 24   M. KRGOVIC : [interprétation] Le témoin a dit la première fois que je l'ai

 25   vu, c'était la première et la dernière fois que je l'ai vu.

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est un lapsus que j'ai fait ici.

 27   Mme PIDWELL : [interprétation]

 28   Q.  Est-ce que vous savez si la deuxième visite a eu lieu quelques jours

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  1   après la première, quelques semaines ou quelques mois après la --

  2   M. KRGOVIC : [interprétation] C'est une question qui guide clairement le

  3   témoin.

  4   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Vous pouvez la reformuler, votre

  5   question. Mais je veux vous rappeler que vous avez déjà utilisé 30 minutes

  6   de votre introduction, et vous avez encore quelques vidéos à montrer au

  7   témoin.

  8   Mme PIDWELL : [interprétation] Merci. Nous avons demandé à bénéficier de 45

  9   minutes pour l'interrogatoire principal de ce témoin, et nous allons

 10   terminer notre interrogatoire dans les 45 minutes prévues.

 11   Q.  Est-ce que vous savez combien de temps s'est écoulé entre les deux

 12   visites de M. Zupljanin ?

 13   R.  Je pense que c'était deux ou trois semaines, à peu près. La deuxième

 14   visite était plus brève.

 15   Q.  Quand vous dites que c'était une visite qui "a duré moins longtemps,"

 16   est-ce que vous savez quelle était la durée de cette visite ?

 17   R.  Ce que nous avons vu, les contacts qu'il a pu avoir avec les détenus,

 18   ça n'a pas dépassé une demi-heure. Parce qu'il a eu des réunions avec le

 19   commandant du camp, avec le directeur du camp, et cetera.

 20   Q.  Savez-vous si Mico Stanisic a jamais visité Manjaca, d'après ce que

 21   vous savez ?

 22   R. J'étais au courant de beaucoup de choses. Cela étant dit, je ne suis pas

 23   sûr si lui, s'il est venu.

 24   Q.  Est-ce que vous savez si le général Talic a jamais visité Manjaca ?

 25   R.  Oui.

 26   Q.  Est-ce que vous vous souvenez de la date de cette visite ?

 27   R.  Je pense -- de toute façon, ces visites ont toutes eu lieu au mois de

 28   juillet, au mois d'août. Fin juin peut-être. Tout cela s'est déroulé en

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  1   l'espace de deux ou trois mois, toutes ces visites. Et puis, on ne prêtait

  2   pas beaucoup d'attention à tout cela, et surtout moi personnellement. Je ne

  3   faisais pas attention à cela, donc c'est sûr que je ne me souviens pas de

  4   tout. J'ai dû faire quelques erreurs. Vous savez, vous ne pouvez pas suivre

  5   tout ce qui se passe dans un endroit et être au courant de tout.

  6    Q.  Est-ce que vous savez s'il y a eu une équipe des médias, des

  7   journalistes étrangers, qui est venue à Manjaca en 1992 ?

  8   R.  Il y en a eu plusieurs. Il y a même eu des prêtres serbes, cinq ou six

  9   garçons, qui sont venus d'Australie. Il y avait des journalistes du CNN,

 10   des journalistes serbes qui sont venus de Serbie, et chacun avait son point

 11   de vue. Pour la plupart, ils étaient quand même d'accord avec les idées, la

 12   stratégie de ceux qui avaient commencé tout cela.

 13   Mme PIDWELL : [interprétation] Maintenant, je voudrais montrer la portion

 14   d'une vidéo au témoin. Elle n'est pas plus longue que deux minutes. Il

 15   s'agit de la pièce 65 ter 2301. La qualité est vraiment mauvaise. Nous

 16   avons donné la transcription aux interprètes, et je vais demander que l'on

 17   traduise cela.

 18   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Et en attendant la vidéo, il s'agit

 19   de quoi exactement ? Où cette vidéo a été prise ?

 20   Mme PIDWELL : [interprétation] Il s'agit d'un rapport du CNN. C'est la

 21   visite d'un camp de Manjaca qui a eu lieu au mois d'août 1992. Le

 22   journaliste est Christiane Amanpour.

 23   [Diffusion de la cassette vidéo]

 24   L'INTERPRÈTE : Les interprètent de la cabine française n'arrivent pas

 25   à trouver exactement l'endroit dans le texte. Désolés.

 26   "Cependant, même si Karadzic était d'accord avec notre visite au

 27   camp, on a permis aux journalistes à peu près une visite d'une demi-heure

 28   pour évaluer la situation. Les soldats nous ont guidés et ils nous ont

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  1   permis de faire quelques images seulement et de poser très peu de questions

  2   aux prisonniers. Le directeur du camp dit qu'ils respectent la convention

  3   de Genève. Cependant, les prisonniers avec lesquels on a discuté affirment

  4   qu'ils sont des civils. Ceux qu'on a vus vivant dans les étables destinés

  5   au bétail, où ils passent jour et nuit, sont les uns à côté des autres,

  6   donc très peu d'espace, comme des bêtes. Ils ne peuvent quitter ces lieux

  7   que pour très peu de temps pour recevoir une petite portion de soupe et de

  8   pain."

  9   [Fin de la diffusion de cassette vidéo]

 10   L'INTERPRÈTE : Les interprètent de la cabine française aimeraient signaler

 11   qu'ils n'ont pas pu trouver l'endroit où la vidéo a commencé, donc il

 12   manque une portion.

 13   Mme PIDWELL : [interprétation]

 14   Q.  Vous avez vu cette vidéo de la CNN. Est-ce que cela décrit à juste

 15   titre la situation à Manjaca quand vous y étiez ?

 16   R.  Plus ou moins. Vous avez vu de quoi avait l'air ces gens. Ils

 17   attendaient la nuit pour voir ce qui allait se passer, quel allait être

 18   leur sort pendant la nuit. Parce que ce qu'on faisait la nuit, c'était de

 19   les passer à tabac, de les faire sortir, de les maltraiter, et c'est pour

 20   cela qu'ils ont dit que les conditions étaient bonnes. Parce que je me

 21   souviens qu'il y en avait un qui a dit une fois que la situation était

 22   mauvaise et qu'il a eu des problèmes. Je me souviens très bien du sort qui

 23   lui a été réservé par la suite.

 24   Mme PIDWELL : [interprétation] Nous souhaitons verser cette vidéo en tant

 25   que pièce à conviction.

 26   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Cette pièce est versée au dossier et va

 27   recevoir une cote.

 28   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] La cote P63.

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  1   Mme PIDWELL : [interprétation] En fait, c'est une petite portion de cette

  2   vidéo que nous allons verser au dossier.

  3   Et puis pour terminer, je voudrais montrer un autre enregistrement vidéo.

  4   Il a moins de cinq minutes. C'est la vue aérienne de Sanski Most et de

  5   Manjaca. C'est une photo à vol d'oiseau qui a été prise par les membres du

  6   bureau du Procureur en 2001. Donc c'est une prise aérienne de la zone de

  7   Manjaca.

  8   [Diffusion de la cassette vidéo]

  9   Mme PIDWELL : [interprétation]

 10   Q.  Monsieur, est-ce que vous êtes en mesure d'identifier ces bâtiments ?

 11   R.  Non, je n'en suis pas vraiment sûr, parce que ce ne sont pas les

 12   étables, les pavillons comme on disait. Ce ne sont pas les étables où nous

 13   étions, donc je ne sais pas ce que c'est. C'est une prise aérienne. De

 14   toute façon, je ne suis pas sorti des lieux. Je n'étais qu'à l'intérieur

 15   pendant tout le temps que j'ai été à Manjaca. Je ne suis jamais sorti du

 16   bâtiment. Je ne sais même pas de quoi le bâtiment avait l'air de

 17   l'extérieur. Je ne connaissais que l'intérieur de ce bâtiment.

 18   Mme PIDWELL : [interprétation] Nous allons peut-être montrer encore une

 19   trentaine de secondes de la vidéo. Si vous reconnaissez quoi que ce soit,

 20   vous pouvez nous le dire, s'il vous plaît, Monsieur.

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, bien sûr, volontiers.

 22   [Diffusion de la cassette vidéo]

 23   Mme PIDWELL : [interprétation]

 24   Q.  Est-ce que là vous avez reconnu quoi que ce soit ?

 25   R.  Non. A vrai dire, non. Je vois des champs, une clôture, des petites

 26   maisons, mais je ne reconnais absolument rien ici.

 27   Q.  Très bien, Monsieur. Je vous remercie.

 28   Mme PIDWELL : [interprétation] Nous pouvons peut-être marquer ce document

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  1   aux fins d'identification et nous allons essayer de le verser par le biais

  2   d'un autre témoin.

  3   Je n'ai pas d'autres questions. Monsieur, je vais vous demander de

  4   rester ici puisque la Défense va vous poser ses questions.

  5   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Cette pièce va être marquée aux fins

  6   d'identification.

  7   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] C'est la pièce P64, marquée aux fins

  8   d'identification, Monsieur le Président.

  9   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Contre-interrogatoire ?

 10   M. CVIJETIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 11   Contre-interrogatoire par M. Cvijetic : 

 12   Q.  [interprétation] Monsieur Sabanovic, bonjour.

 13   R.  Bonjour.

 14   Q.  Mais bon, plutôt bonsoir. Je suis avocat, je m'appelle Slobodan

 15   Cvijetic et je suis co-conseil dans l'équipe de Défense de M. Mico

 16   Stanisic. Je vais vous poser des questions concernant votre déposition.

 17   M. CVIJETIC : [interprétation] Avant de poser la première question,

 18   j'aimerais qu'on montre au témoin la pièce à conviction de la Défense 1D00-

 19   4522.

 20   Q.  Est-ce que le document est affiché sur votre écran ?

 21   R.  Oui, je le vois.

 22   Q.  Je vais vous dire quels paragraphes il faut lire dans ce document. Il

 23   s'agit des conclusions de la cellule de Crise de la municipalité serbe de

 24   Sanski Most. Vous voyez qu'il y a donc des conclusions énumérées par

 25   l'ordre ?

 26   R.  Je le vois.

 27   Q.  Par exemple, au point 1, la cellule de Crise de la municipalité serbe

 28   de Sanski Most introduit le couvre-feu sur le territoire de la municipalité

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  1   serbe, sur le territoire de la ville, et ainsi de suite. Vous pouvez

  2   maintenant lire le reste du document.

  3   Je ne veux pas que vous regardiez tout le document. Plutôt, regardez le

  4   point numéro 8. L'avez-vous lu ?

  5   R.  Oui.

  6   Q.  Est-ce que cela concerne la nomination du directeur par intérim de la

  7   clinique médicale, donc au poste qui était le vôtre, avant votre

  8   licenciement ?

  9   R.  Oui.

 10   Q.  Donc, on peut en conclure que cela s'est passé à la suite de la

 11   décision de la cellule de Crise ?

 12   R.  Oui. 

 13   Q.  S'il vous plaît, ne parlez pas au même moment que moi, parce que nous

 14   parlons la même langue et les interprètes doivent interpréter tout ce que

 15   nous disons. Attendez un peu que ma question soit consignée au compte rendu

 16   avant de répondre.

 17   Donc on peut se mettre d'accord sur le fait que vous avez été licencié par

 18   la décision de la cellule de Crise, n'est-ce pas ? N'est-ce pas, nous

 19   sommes d'accord sur ce point ?

 20   R.  Oui.

 21   Q.  Monsieur Sabanovic --

 22   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Maître Cvijetic, en fait, au point 8,

 23   ce qu'on peut voir, c'est seulement que MM. Lukic, Vinko et Boro ont été en

 24   charge de la préparation de la nomination du nouveau directeur par intérim,

 25   n'est-ce pas ? Donc pouvons-nous supposer que pour ce qui est de ce point

 26   8, il s'agit de la personne qui a succédé à notre témoin, mais dans cette

 27   décision, il n'a pas été dit que c'est notre témoin qui était la personne

 28   qui a été licenciée par cette décision.

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  1   M. CVIJETIC : [interprétation] On va tirer ce point au clair.

  2   Q.  Monsieur Sabanovic, est-ce qu'en avril, parce que cette décision est

  3   datée du 24 avril, est-ce que c'est en avril à cette date-là que le nouveau

  4   directeur est arrivé à ce poste ?

  5   R.  Il m'est difficile de le dire. Je sais qu'il y avait Ljilja Kasagic,

  6   elle était directrice du centre médical. Elle a été également remplacée par

  7   un médecin qui s'appelait Dilas. Cette décision me concernait parce que le

  8   président du SDS était avec le policier, c'est ce que j'ai déjà dit, en me

  9   disant que cela allait se passer ainsi, et il m'a fait savoir que Lukic --

 10   Q.  Et qui d'autre ?

 11   R.  Je ne les connais pas. Lukic, je le connais bien. Il s'agissait des

 12   personnes qui travaillaient avec moi dans mon équipe.

 13   M. CVIJETIC : [interprétation] Je pense que le témoin a identifié le

 14   document suffisamment, donc je pense qu'on peut le verser au dossier en

 15   tant que pièce à conviction de la Défense.

 16   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Oui, l'élément sera versé au dossier.

 17   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] La pièce sera versée au dossier sous la

 18   cote 1D11.

 19   M. CVIJETIC : [interprétation] Avant de poser la question suivante,

 20   j'aimerais qu'on montre au témoin le document suivant de la Défense, 1D00-

 21   4486.

 22   Q.  Monsieur Sabanovic, pouvez-vous regarder le document. A gauche se

 23   trouve la version en B/C/S. Avez-vous lu la première page ?

 24   R.  Je ne l'ai pas lue toute entière.

 25   M. CVIJETIC : [interprétation] J'aimerais qu'on affiche la page numéro 3,

 26   après quoi je vais poser des questions au témoin. D'abord, il faut afficher

 27   la page numéro 3 sur l'écran. C'est la dernière page. Il faut que cette

 28   page soit affichée sur l'écran. C'est la page suivante.

Page 922

  1   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est 0086 ?

  2   M. CVIJETIC : [interprétation] Non. Ne faites rien. C'est la bonne page.

  3   Maintenant, je vais vous poser la question.

  4   Q.  Vous avez vu qu'ici il s'agit, pour ainsi dire, du rapport de combat

  5   régulier d'un ordre militaire du général Talic. Et vous, dans votre

  6   déclaration, vous avez parlé de l'arrivée de la 6e Brigade de la Krajina,

  7   n'est-ce pas ? C'est l'ordre par lequel cette unité est arrivée sur le

  8   territoire de Sanski Most. Et dans votre déclaration ainsi que votre

  9   déposition, vous avez parlé en détails de l'arrivée de cette unité, n'est-

 10   ce pas ? Vous devez répondre à ma question.

 11   R.  Vous venez de me dire de ne pas répondre.

 12   Q.  Vous pouvez répondre maintenant.

 13   R.  Oui, je connais tout cela. J'ai vu la 6e Brigade de la Krajina ainsi

 14   que les chars qui étaient arrivés sur le territoire, je souligne, sur le

 15   territoire de la municipalité de Sanski Most.

 16   Q.  A la dernière page, la page 3, vous avez le point 3, et en-dessous, le

 17   général Talic énumère les raisons pour lesquelles cette unité était

 18   arrivée. Il dit qu'il faut protéger la population et éviter que des

 19   conflits interethniques n'éclatent.

 20   Monsieur Sabanovic, est-ce qu'à ce moment-là les conflits

 21   interethniques ont commencé ?

 22   R.  Les conflits interethniques ont commencé à ce moment-là. Il y avait des

 23   conflits, peut-être des conflits verbaux au niveau politique. Mais je vous

 24   l'ai déjà dit, je suis parti pour Prijedor et j'ai rencontré la brigade.

 25   Q.  Je m'excuse, répondez brièvement à cette question : est-ce qu'il y

 26   avait des conflits sporadiques et est-ce qu'il y avait des tensions entre

 27   les groupes ethniques ? C'est ce que vous avez dit dans votre déclaration.

 28   On va revenir là-dessus un peu plus tard.

Page 923

  1   R.  Pour vous dire, cela n'est pas arrivé en une journée. Probablement que

  2   les conflits ont commencé à se produire, mais je n'ai pas pu remarquer tout

  3   cela, parce que je me déplaçais librement.

  4   Q.  Je vais vous citer une partie de votre déclaration. Vous avez dit :

  5   "Déjà en juillet et en août 1991, j'ai commencé à ressentir les

  6   tensions s'augmentant, ou plus précisément la 6e Brigade de la Krajina

  7   était arrivée sur le territoire de notre municipalité..."

  8   Bien. Ma question concerne la chose suivante.

  9   Comment la population a accueilli cette unité de la JNA ?

 10   R.  Mal. On savait qu'à Sanski Most, il n'y avait jamais eu de membres de

 11   l'armée depuis la fin de la Deuxième Guerre mondiale. Et on savait que

 12   cette 6e Brigade de la Krajina ne comptait pas, parmi ses rangs, de

 13   Musulmans. Toutes les autres armées avaient des membres appartenant à tous

 14   les trois groupes ethniques, ce qui n'était pas le cas de cette brigade. Il

 15   n'y avait que des Serbes, et la plupart d'entre eux n'étaient pas de Sanski

 16   Most. Entre autres, on a vu tout de suite que la 6e Brigade de la Krajina

 17   n'est pas arrivée pour apaiser les tensions, au contraire.

 18   Q.  Pourquoi il n'y avait que des Serbes dans cette brigade, à votre avis ?

 19   R.  On sait qui a commencé la guerre et comment la guerre a commencé.

 20   Q.  Monsieur Sabanovic, vous avez été membre du Parti d'action

 21   démocratique, n'est-ce pas ?

 22   R.  Oui.

 23   Q.  Est-ce que votre parti, déjà en 1991, et le HDZ, en tant que parti

 24   politique du peuple croate, ont proclamé que les recrues croates et

 25   musulmanes ne répondraient pas à l'appel à la mobilisation pour aller au

 26   service dans la JNA, service obligatoire; est-ce vrai ?

 27   R.  Pour ce qui est de la JNA.

 28   Q.  Vous devez répondre à ma question. Est-ce qu'ils avaient des

Page 924

  1   proclamations dans ce sens là ?

  2   R.  Je ne sais pas.

  3   Q.  Bien. Est-ce que vous-même, en tant que médecin, vous avez aidé les

  4   recrues militaires à éviter cet appel à la mobilisation et à ne pas se

  5   présenter à la mobilisation ?

  6   R.  Tous ceux qui étaient handicapés physiques ou mentaux et qui ont donné

  7   dans leur histoire médicale des informations selon lesquelles ils n'étaient

  8   pas capables de participer à la guerre entre deux Etats voisins, non pas en

  9   Bosnie-Herzégovine, mais plutôt entre la Croatie et la Serbie, oui. Je

 10   faisais cela et j'avais le droit de le faire. Il y avait des Serbes, des

 11   Croates et des Musulmans parmi ces personnes.

 12   Q.  Si j'ai bien compris, vous avez dit que vous délivriez des certificats

 13   à ceux qui remplissaient les conditions pour les obtenir, donc ceux qui

 14   souffraient d'une maladie. Qui pouvait les exempter du service militaire ?

 15   R.  S'il s'agissait des personnes qui avaient servi dans leur propre pays,

 16   peut-être qu'il n'y en avait pas.

 17   Q. Vous n'avez pas répondu à ma question.

 18   R.  [aucune interprétation]

 19   Q.  Vous devez répondre à mes questions, et c'est moi qui dois vous poser

 20   des questions. Est-ce que des personnes à qui vous avez délivré des

 21   certificats médicaux souffraient des maladies qui pouvaient les exempter du

 22   service militaire ?

 23   R.  Certainement.

 24   Q.  Bien. Vous avez dit dans votre déclaration que :

 25   "La JNA, vers le milieu de 1991, a commencé la mobilisation" --

 26   Mme PIDWELL : [interprétation] Pouvez-vous nous donner la page de la

 27   déclaration et les lignes.

 28   M. CVIJETIC : [interprétation] Troisième paragraphe, deuxième page en

Page 925

  1   B/C/S.

  2   Mme PIDWELL : [interprétation] Pouvez-vous nous donner la référence en

  3   anglais également.

  4   M. CVIJETIC : [interprétation] Nous devons demander à notre commis à

  5   l'affaire d'ouvrir la page correspondante dans la version en anglais. Nous

  6   allons essayer de la contrôler. La troisième page en anglais, le deuxième

  7   paragraphe.

  8   Q.  Monsieur Sabanovic, écoutez-moi bien:

  9   "La JNA a commencé la mobilisation vers le milieu de 1991. En tant

 10   que chef de la clinique, je pouvais délivrer aux recrues militaires des

 11   certificats médicaux pour qu'ils évitent d'être mobilisés pour des raisons

 12   médicales. La plupart de ces certificats que je délivrais étaient faux."

 13   Monsieur Sabanovic, est-ce que c'est votre déclaration ?

 14   R.  Non, non. Chaque fois que je demande aux patients certaines

 15   informations, je leur pose les questions les plus importantes pour ce qui

 16   est de l'histoire de leur maladie. J'ai pu également ne pas écouter ce

 17   qu'ils disaient, parce que les gens qui devaient être envoyés à Jasenovac

 18   entre la Croatie et la Serbie en Croatie ont inventé cela.

 19   Q.  Monsieur Sabanovic, vous avez été clair dans cette partie de la

 20   déclaration.

 21   R.  Ce que je viens de dire est également très clair.

 22   Q.  Permettez-moi de continuer à lire. Vous dites :

 23   "J'ai délivré à peu près 2 000 de tels certificats."

 24   R.  C'est vrai.

 25   Q.  Monsieur Sabanovic, ici vous dites :

 26   "Il est vrai que j'ai délivré des certificats pour des raisons

 27   justifiées."

 28   Attendez un peu, s'il vous plaît. Il semble que les certificats, pour

Page 926

  1   des raisons justifiées, aient été des exceptions et que la plupart du

  2   temps, vous délivriez des certificats qui étaient faux.

  3   R.  C'est d'après vous. Mais à mon avis, il ne s'agissait que du fait que

  4   lorsqu'une personne a peur ou souffre d'une maladie, elle a peur et

  5   n'exprime pas cette peur à moi-même ou à vous-même, et c'est pour ça que

  6   c'est compliqué. C'est pour cela que ces certificats médicaux ont été

  7   délivrés de façon objective d'après les informations figurant dans

  8   l'histoire de maladie du patient sur la base d'un examen physique à la

  9   clinique, l'examen objectif fait par le médecin. Et il semble maintenant

 10   que cela soit faux, parce que certaines personnes considèrent ces

 11   certificats comme étant faux, mais ces certificats ne sont pas faux.

 12   Q.  Monsieur Sabanovic, vous avez dit clairement dans votre déclaration que

 13   les certificats étaient faux. Je cite ce que vous avez dit dans votre

 14   déclaration. Monsieur Sabanovic, est-ce que les autorités militaires vous

 15   ont mis en garde ?

 16   R.  Les officiers du tribunal militaire sont venus pour voir les officiers

 17   de Banja Luka et j'ai continué à délivrer des certificats.

 18   Q.  Vous avez dit dans votre déclaration :

 19   "Malgré les instructions de ces personnes, j'ai continué à délivrer

 20   des certificats."

 21   R.  Je ne dirais pas "malgré," bien qu'ils m'aient salué poliment. Ils sont

 22   partis et j'ai dit que j'avais le droit de délivrer de tels certificats

 23   médicaux.

 24   Q.  Monsieur Sabanovic, lorsque vous avez délivré ces quelques milliers de

 25   certificats, parce que vous avez dit que vous aviez continué à les

 26   délivrer, éviter la mobilisation représentait une infraction pénale grave

 27   passible d'une peine d'emprisonnement assez sévère.

 28   Permettez-moi de finir ma question. Est-ce que par vos activités, dans ce

Page 927

  1   sens là, vous avez aidé à ce qu'un grand nombre de personnes commettent des

  2   infractions pénales?

  3   R. Non, il ne s'agissait pas d'infraction pénale. C'étaient les personnes

  4   qui estimaient qu'elles n'étaient pas aptes à faire le service militaire.

  5   Il ne s'agissait pas d'infraction pénale.

  6   Q.  Est-ce que vous avez essuyé des souffrances parce que vous avez délivré

  7   ces certificats ?

  8   R. Ce ne sont pas des certificats médicaux faux, parce qu'il s'agissait de

  9   personnes qui n'étaient pas aptes à servir dans les rangs de l'armée.

 10   Q.  Dans un tel grand nombre ?

 11   R.  À Sanski Most, il y avait un grand nombre d'habitants.

 12   Q.  Monsieur Sabanovic, pour ce qui est de cette municipalité, il ne

 13   pouvait être que quelques dizaines de jeunes hommes qui n'étaient pas aptes

 14   à porter des armes.

 15   R.  J'ai fait une mission respectable à Bjelovar et je connais tout cela.

 16   Q.  Je vous demande si vous avez fait des certificats faux.

 17   R.  Non, il ne s'agit pas de certificats faux. Je disais toujours que cela

 18   était une erreur pour ce qui est de cette déclaration.

 19   Q.  Donc c'est la faute du bureau du Procureur, n'est-ce pas, au moment où

 20   vous avez fait votre déclaration ?

 21   R.  Je ne sais pas, mais à plusieurs reprises, je vous ai dit que --

 22   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Je m'excuse, mais il faut que

 23   j'intervienne parce que les interprètes ont des difficultés pour vous

 24   interpréter. S'il vous plaît, ménagez une pause entre les questions et les

 25   réponses pour que les interprètes puissent suivre votre cadence.

 26   M. CVIJETIC : [interprétation] Je m'excuse. Puis-je continuer ?

 27   Q.  Monsieur Sabanovic, vous avez été membre du SDA, du Parti de l'Action

 28   démocratique. Est-ce que de ce fait vous avez appliqué la politique du SDA

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  1   et du HDZ, qui consistait à, entre autres, détruire la JNA en tant

  2   qu'institution d'une importance au niveau fédéral et dont la tâche était de

  3   préserver l'ancienne Yougoslavie ?

  4   R.  C'est très dangereux ce que vous venez de dire. Je ne sais pas quelle

  5   est la force qui vous mue pour dire cela, que moi, en tant que médecin, je

  6   m'occupe des opinions du HDZ ou du SDA. C'était votre tactique depuis le

  7   début, et c'est pour cela qu'on est arrivé dans une telle situation, à

  8   savoir on peut maintenant savoir qui étaient les victimes de cette guerre.

  9   Mais on ne peut pas même appeler cela la guerre où je vis aujourd'hui --

 10   Q.  Répondez par un oui ou par un non, Monsieur Sabanovic. Est-ce que vous

 11   avez participé à l'application de la politique du SDA ?

 12   R.  Non, pas du tout. Je n'avais rien à voir avec la politique.

 13   M. CVIJETIC : [interprétation] Est-ce qu'on peut afficher au témoin 1D00-

 14   3848. Je peux répéter les numéros s'il le faut.

 15   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Les interprètes demandent que vous

 16   répétiez la question, et encore une fois, le conseil de la Défense et le

 17   témoin se sont chevauchés, vos questions et vos réponses se sont

 18   chevauchées. Il faut que vous sachiez que cela doit être interprété.

 19   M. CVIJETIC : [interprétation] Est-ce qu'on peut afficher ce document,

 20   1D00-3848.

 21   Q.  Monsieur Sabanovic, je suppose que vous ne pouvez pas voir le document

 22   qui est à gauche, la copie est mauvaise.

 23   R.  Qu'est-ce que vous souhaitez que je fasse ?

 24   Q.  Rien pour le moment. Je vais vous dire de quelle décision il s'agit,

 25   après quoi, on va commenter cela.

 26   Il s'agit d'une petite municipalité, municipalité de Citluk. Vous serez

 27   d'accord avec moi pour dire que la municipalité de Citluk est une petite

 28   municipalité sur le territoire de la Bosnie-Herzégovine ?

Page 930

  1   R.  Je n'y suis jamais allé, mais je suppose que c'est une petite

  2   municipalité.

  3   Q.  Et là-bas, ils ont pris la décision pour ce qui est du gel, pour ce qui

  4   est de l'envoi des recrues à la mobilisation le 19 juin 1991. Admettons que

  5   dans une telle petite municipalité, en juin ou juillet 1991, on cesse

  6   d'envoyer des recrues dans la JNA, il y avait une sorte de "moratorium"

  7   pour ce qui est de cet envoi, et cette municipalité est contrôlée par le

  8   HDZ.

  9   Je dois répéter ma question maintenant, la question que je dois

 10   répéter pour les interprètes. En délivrant des certificats médicaux, avez-

 11   vous adhéré à cette politique ?

 12   R.  Je vois cela pour la première fois aujourd'hui et je n'ai ni vu, ni

 13   entendu, ni encore moins adhéré à une telle politique.

 14   Q.  Bien. Monsieur Sabanovic, dans votre déclaration faite au bureau du

 15   Procureur, vous avez parlé de votre arrestation. Entre autres, vous avez

 16   dit que quand vous avez été arrêté, on vous a poussé à bord d'un véhicule

 17   militaire. Aujourd'hui, en répondant aux questions du Procureur, vous avez

 18   dit qu'il s'agissait d'un véhicule de la police. Où est la vérité ?

 19   R.  C'était la police. C'est ça la vérité. Les policiers militaires étaient

 20   là-bas. C'est ça qui est vrai. Mais retenir quel était le véhicule après

 21   tant d'années qui se sont écoulées, j'aurais dû écrire ou noter tout cela.

 22   Je n'ai plus de commentaires, et je n'arrive plus à écouter de tels

 23   mensonges.

 24   Q.  Vous devez être patient. Il faut que cela soit tiré au clair. La police

 25   militaire vous a arrêté; c'est ça la vérité ?

 26   R.  Oui.

 27   Q.  Je vais vous citer une partie de votre déclaration où vous avez dit, je

 28   cite :

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  1   "Dans le garage, je suis resté trois jours. La police militaire serbe

  2   nous a offert de la nourriture. La plupart des membres de la police

  3   militaire étaient de Sanski Most."

  4   Est-ce vrai ?

  5   R.  Il y en avait, les uns et les autres. La police militaire était de Sana

  6   et d'un autre endroit.

  7   Q.  Soyez patient. Il faut que vous attendiez la fin de ma question. Dans

  8   le paragraphe suivant, il est écrit : Les gardes militaires venaient

  9   parfois au garage, m'ont m'emmené à l'extérieur du garage et ont commencé à

 10   me battre, vers 2 heures du matin.

 11   R.  Oui, c'est vrai.

 12   Q.  Ensuite, vous parlez du départ, je pense, dans une salle de sports --

 13   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Oui, Madame Pidwell.

 14   Mme PIDWELL : [interprétation] Je n'arrive pas à trouver la partie de la

 15   déclaration en anglais. Pouvez-vous nous donner le numéro de la page et de

 16   la ligne en question ?

 17   Mme SAVIC : [interprétation] Il s'agit d'une déclaration de février 2001.

 18   Une déclaration d'une femme.

 19   M. CVIJETIC : [interprétation]

 20   Q.  Monsieur Sabanovic, vous êtes resté dans une salle de sports pendant

 21   une certaine période de temps, n'est-ce pas ?

 22   R.  Oui.

 23   Q.  Qui assurait la sécurité de cette salle de sports ?

 24   R.  La police, qui d'autre ?

 25   Q.  Quelle police ?

 26   R.  Vous demandez que je sois professionnel pour savoir de quelle police il

 27   s'agissait. Il s'agissait de la police militaire, parce qu'il s'agissait de

 28   Sana où tous les Serbes, non pas tous les Serbes, mais presque tous les

Page 932

  1   Serbes avaient une arme et venaient jusqu'à la salle de sports. Même les

  2   civils venaient à la salle de sports pour regarder les gens, pour les

  3   battre. C'était la police militaire.

  4   Q.  Pouvez-vous attendre que les interprètes finissent la traduction. Votre

  5   réponse définitive est que c'était la police militaire ?

  6   R.  Oui, c'était la police militaire, la police de l'armée. Je ne sais pas

  7   s'il s'agissait des soldats réguliers ou d'autres soldats. Je ne pouvais

  8   pas le savoir. Je ne m'intéressais pas à le savoir.

  9   M. CVIJETIC : [interprétation] Est-ce qu'on peut maintenant afficher la

 10   pièce qui figure sur la liste 65 ter et qui porte le numéro 611.Je

 11   demanderais qu'on affiche la page suivante.

 12   Q.  C'est ce qui figure de votre côté gauche, Monsieur le Témoin.

 13   M. CVIJETIC : [interprétation] C'est la page d'après. Voilà, c'est celle-

 14   ci. Merci.

 15   Q.  Monsieur Sabanovic, comme vous pouvez le voir, il s'agit d'un ordre de

 16   l'état-major de la protection civile municipale relative à l'hébergement de

 17   la population qui s'était retirée de certaines régions et de l'hébergement

 18   dans la salle de sports. Au numéro II, nous pouvons lire que la

 19   sécurisation de la colonne sera effectuée par la police militaire.

 20   Est-ce que cela confirme ce que vous avez dit au sujet de la police

 21   militaire ?

 22    R.  Vous me traitez comme un stratège militaire ici.

 23   Q.  Est-ce bien la réponse à la question que je vous ai posée ?

 24   R.  Oui.

 25   M. CVIJETIC : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges,

 26   j'ai oublié de vous demander le versement du document précédent, 1D00-3848,

 27   et de celui que je viens de présenter au témoin.

 28   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Maître Cvijetic, je crois que le

Page 933

  1   document précédent que vous avez présenté au témoin, à savoir 1D00-3848,

  2   qui est le moratoire déclaré par la municipalité de Citluk sur cette

  3   question, compte tenu du fait que le témoin n'avait aucune connaissance

  4   portant sur ce fait et qu'il ne pouvait émettre aucun commentaire, aucune

  5   observation à ce sujet-là, il ne serait pas propice de le verser au

  6   dossier.

  7   M. CVIJETIC : [interprétation] Oui, vous avez pris cette décision et je

  8   l'accepte. Je ne demande plus le versement de ce document. Mais je crois

  9   qu'il y a eu lieu de demander le versement de ce document qui porte sur les

 10   personnes qui ont sécurisé la salle de sports dont le témoin a parlé.

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] Ecoutez, c'est autre chose. Vous parlez de la

 12   salle de sports où la population avait été emmenée, alors qu'il y a aussi

 13   une autre salle.

 14   M. CVIJETIC : [interprétation] Monsieur Sabanovic, je n'ai pas beaucoup de

 15   temps. Laissez-moi vous poser des questions.

 16   M. LE JUGE HALL : [interprétation] On vient de nous informer que ce

 17   document est déjà versé au dossier.

 18   Quel est le numéro ? Vous pouvez nous le rappeler ?

 19   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] C'est le document P60.8.

 20   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Merci.

 21   M. CVIJETIC : [interprétation] Toutes mes excuses. Cela m'a échappé. Je

 22   vais poursuivre maintenant avec mes questions.

 23   Q.  Monsieur Sabanovic, vous nous avez parlé de votre départ pour Manjaca.

 24   Vous avez, entre autres choses, dit que le lendemain, le 3 ou le 4 juin, la

 25   police militaire est arrivée et a donné l'ordre que tout le monde doit

 26   quitter la salle de sports. Cela est-il exact ?

 27   R.  Je ne vous comprends pas. Je n'ai jamais déclaré une telle chose, et

 28   une telle chose, d'ailleurs, n'a jamais pu venir de moi.

Page 934

  1   Q.  Je lis là votre déclaration que vous avez faite aux représentants du

  2   bureau du Procureur, et vous l'avez signée.

  3   R.  Non, non, non. Cela n'est pas possible.

  4   Q.  Vous venez de dire que vous n'avez pas déclaré cela. Très bien, je ne

  5   vous impose rien.

  6   Monsieur Sabanovic --

  7   R.  [aucune interprétation]

  8   Q.  Encore quelques instants et nous allons parler de Manjaca en détail.

  9   Tout d'abord, dites-nous, qui est-ce qui vous a accueilli à Manjaca ?

 10   R.  La police, la police militaire.

 11   Q.  Je vais vous donner lecture d'un passage de votre déclaration :

 12   "Nous avons été accueillis par un lieutenant de la JNA et par des soldats."

 13   Cela est-il exact ?

 14   R.  Oui. Mais vous savez, pour moi, les policiers et les soldats, c'est

 15   toute la même chose.

 16   Q.  Répondez à mes questions. Dites-moi seulement si vous êtes d'accord

 17   avec ce qui figure dans votre déclaration, à savoir qu'un lieutenant de la

 18   JNA vous a accueilli ?

 19   R.  Non. Mais, attendez. Il y avait là-bas l'armée et la police, et il y

 20   avait aussi un homme. Je n'ai pas osé me tourner pour le regarder. Je l'ai

 21   entendu prononcer mon nom, et il était fils d'un --

 22   Q.  Monsieur Sabanovic, vous avez répondu à ma question. Je dois vous

 23   interrompre pour vous poser la question suivante pour qu'on puisse avancer

 24   --

 25   R.  Ecoutez, j'ai l'impression que vous savez tout ça mieux que moi alors

 26   que vous n'y avez jamais été. Un mensonge sur l'autre.

 27   Q.  Bien. Dans votre déclaration, vous avez dit que des représentants des

 28   organisations internationales humanitaires, des journalistes, et cetera,

Page 935

  1   sont venus sur place; cela est-il exact ?

  2   R.  Oui, oui.

  3   M. CVIJETIC : [interprétation] J'aimerais maintenant qu'on présente le

  4   document de la liste 65 ter numéro 503.

  5   Q.  Monsieur Sabanovic, comme vous pouvez le voir dans ce document, cette

  6   visite a été autorisée par le commandement du 1er Corps de Krajina.

  7   R.  [aucune interprétation]

  8   Q.  Savez-vous qui était le commandant de ce corps ?

  9   R.  Du 1er Corps de Krajina ? C'était le général Talic.

 10   Q.  Vous nous avez dit aujourd'hui que le général Talic était venu là-bas

 11   rendre visite. Savez-vous comment s'appelait le commandant de ce camp ?

 12   R.  C'était le lieutenant-colonel Popovic, Bogdan Popovic.

 13   Q.  Vous venez de répondre à ma question que j'allais vous poser

 14   maintenant, à savoir quel était son grade.

 15   R.  Oui.

 16   Q.  Est-il vrai qu'il était une personne de confiance du général Talic ?

 17   R.  Oui.

 18   Q.  D'où tenez-vous cette information ?

 19   R.  D'après les conversations que j'ai pu entendre, j'ai eu des contacts

 20   quotidiens, je parlais à Popovic quotidiennement, et il se vantait d'être

 21   très respecté par le général Talic et qu'il pouvait faire tout ce qu'il

 22   souhaitait en ce qui concerne son travail.

 23   M. CVIJETIC : [interprétation] Bien. Toutes mes excuses. Parlant de

 24   l'autorisation pour la visite de la commission internationale, j'aimerais

 25   demander que le document relatif à ceci soit versé au dossier.

 26   M. LE JUGE HALL : [aucune interprétation]

 27   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Ce sera 1D12.

 28   M. CVIJETIC : [interprétation] Très bien.

Page 936

  1   Q.  Dans votre déclaration, vous affirmez que c'est sur la base de vos

  2   conversations avec les policiers militaires que vous avez compris que

  3   Popovic jouissait d'une confiance très grande de la part du général Talic ?

  4   R.  Oui, dans mes discussions avec les policiers et avec le lieutenant-

  5   colonel Popovic en personne.

  6   Q.  Dans la déclaration, vous avez dit que les policiers militaires dans le

  7   camp travaillaient en plusieurs relèves.

  8   R.  Je n'étais pas leur chef. Je ne pouvais pas contrôler de quelle manière

  9   ils travaillaient et de quelle manière ils se relevaient. Ils n'étaient pas

 10   des employés de centres de santé de Sanski Most pour que je puisse avoir

 11   accès aux informations portant sur la manière dont ils organisaient leur

 12   travail.

 13   Q.  Je ne fais que citer votre déclaration.

 14   R.  C'est un mensonge que vous citez. Vous ne citez rien, vous êtes en

 15   train de me dire des mensonges.

 16   Q.  Essayez de ne pas m'interrompre, s'il vous plaît, Monsieur Sabanovic.

 17   Par ailleurs, je répète, dans votre déclaration, il est dit que les

 18   policiers militaires qui travaillent dans le camp se relevaient. Quelle

 19   était la situation concernant l'adduction d'eau dans le camp ?

 20   R.  Il y avait un robinet dans l'étable pour le bétail. Plus tard, on

 21   allait vers un lac chercher de l'eau avec des seaux.

 22   Q.  L'armée a-t-elle pris des mesures quelconques afin de rétablir le

 23   système d'adduction d'eau ?

 24   R.  On en avait parlé, mais jamais rien n'a été fait.

 25   M. CVIJETIC : [interprétation] J'aimerais qu'on présente au témoin le

 26   document 1D00-4511, un document de la Défense.

 27   Q.  Monsieur Sabanovic, nous revenons sur le commandement du 1er Corps de

 28   Krajina. Comme vous pouvez le voir, il y est dit qu'il faudrait prendre les

Page 937

  1   mesures afin de réparer le système d'adduction d'eau dans le camp à cause

  2   de l'état sanitaire insatisfaisant. Vous en avez certainement entendu

  3   parler.

  4   R.  J'en ai entendu parler de la part des policiers ou du commandant, parce

  5   que j'avais des contacts quotidiens avec eux, mais ils n'ont jamais rien

  6   fait. Je sais seulement que l'armée a fait venir des citernes avec de

  7   l'eau.

  8    Q.  Le plan existait, mais rien n'a jamais été fait ?

  9   R.  [aucune interprétation]

 10   M. CVIJETIC : [interprétation] Je demanderais maintenant le versement de ce

 11   document au dossier.

 12   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Je crois que le témoin a déclaré qu'il

 13   ne savait rien du tout sur ceci. Pourriez-vous m'expliquer la situation ?

 14   M. CVIJETIC : [interprétation] Bien au contraire, le témoin a déclaré qu'il

 15   savait que des travaux de réparation devaient être effectués, mais que cela

 16   ne s'est jamais fait.

 17   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Bien. Merci. Le document sera versé. Un

 18   numéro, s'il vous plaît.

 19   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Ce sera 1D13.

 20   M. CVIJETIC : [interprétation] J'aimerais qu'on affiche maintenant 1D00-

 21   4507.

 22   Q.  Voilà, Monsieur Sabanovic, une seconde. Le document précédent portait

 23   la date du 27 juillet. Et là, on voit un document du 5 août 1992, où le

 24   commandement envoie un appel urgent portant sur ces travaux de réparation

 25   qui auraient dû être faits entre-temps, mais qui n'ont pas été faits. Après

 26   cette deuxième lettre, cette demande urgente, quelque chose a-t-il été fait

 27   au sujet du système d'adduction d'eau ?

 28   R.  Mais rien n'a été fait ni après la première demande ni après la

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  1   deuxième demande. Nous avons continué à faire venir de l'eau depuis le lac,

  2   on la transportait dans des seaux, et pour ce qui concernait les douches,

  3   il y avait des citernes. Pendant les deux ou trois mois que j'y étais, rien

  4   ne s'est fait.

  5   M. CVIJETIC : [interprétation] Je demande le versement de ce document

  6   puisqu'il est lié au document précédent que nous avons vu.

  7   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Le document est versé. Un numéro, s'il

  8   vous plaît.

  9   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] C'est la pièce 1D14, Monsieur le

 10   Président.

 11   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Maître Cvijetic, pourriez-vous, s'il

 12   vous plaît, demander au témoin si l'eau qui était transportée, qu'on

 13   faisait venir en citerne, était de l'eau potable ou pas ?

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, non, elle n'était pas potable du tout. On

 15   l'utilisait pour nous laver, c'est tout.

 16   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Parce qu'elle était contaminée ou

 17   qu'elle était impropre à l'utilisation ?

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] Je n'en sais rien. Mais la seule chose que je

 19   sache, c'est que l'on n'était pas censé en boire. Elle servait pour la

 20   douche. Une citerne pouvait couvrir la douche de 500 personnes environ. On

 21   nous arrosait, tout simplement. C'était ça, notre douche.

 22   M. CVIJETIC : [interprétation] 

 23   Q.  Monsieur Sabanovic, à votre époque, pendant que vous y étiez, faisait-

 24   on sortir les détenus du camp pour effectuer des travaux en dehors du camp

 25   ?

 26   R.  Oui.

 27   M. CVIJETIC : [interprétation] J'aimerais qu'on affiche les documents de la

 28   Défense, 1D00-4503, et --

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  1   Q.  Monsieur Sabanovic, nous revenons maintenant de nouveau au commandement

  2   du 1er Corps de Krajina. On voit ici que le commandement s'adresse au camp

  3   et demande par la présente l'envoi de 20 prisonniers pour une période de

  4   dix jours de travail. Sont-ils partis pour y travailler véritablement ?

  5   R.  Oui. Pendant l'été, ils allaient couper du bois, travailler sur les

  6   champs, participer aux travaux de construction sur l'église, et cetera,

  7   toutes sortes de travaux.

  8   Q.  Merci, Monsieur Sabanovic.

  9   M. CVIJETIC : [interprétation] Messieurs les Juges --

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] Il y en a un qui s'est fait tuer, un

 11   catholique, pendant qu'il coupait le bois.

 12   M. CVIJETIC : [interprétation] Bien. Merci. Je demande le versement de ce

 13   document, puisque les commentaires du témoin confirment la teneur du

 14   document.

 15   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Le document est versé. Un numéro, s'il

 16   vous plaît.

 17   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Ce sera 1D15.

 18   M. CVIJETIC : [interprétation] J'aimerais qu'on affiche maintenant 1D00-

 19   4505.

 20   Q.  Monsieur Sabanovic, ce n'est pas la peine d'élaborer. Ce qui nous

 21   intéresse, c'est de constater qu'il s'agit du même type de document, selon

 22   le nombre de prisonniers envoyés est plus important.

 23   M. CVIJETIC : [interprétation] J'aimerais demander le versement de ce

 24   document, parce qu'il porte sur la même question.

 25   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est vous au commandement qui avez compté les

 26   prisonniers qui devaient aller travailler en dehors du camp, mais vos

 27   calculs sont faux.

 28   M. CVIJETIC : [interprétation]

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  1   Q.  Monsieur Sabanovic --

  2   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Excusez-moi, mais d'abord ceci. Le

  3   document est versé. Un numéro, s'il vous plaît.

  4   M. CVIJETIC : [interprétation] Toutes mes excuses. Je suis allé un peu trop

  5   vite.

  6   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Ce sera 1D16.

  7   M. CVIJETIC : [interprétation]

  8   Q.   Monsieur Sabanovic, qui est-ce qui était à la tête de la police

  9   militaire et du dispositif de sécurité dans le camp de

 10   Manjaca ?

 11   R.  C'était le commandant du camp et le directeur du camp, qui était

 12   policier.

 13   Q.  Monsieur Sabanovic, des personnes appartenant à la sécurité

 14   militaire venaient-elles au camp afin d'interroger les détenus?

 15   R.  Oui, il y avait des inspecteurs qui venaient interroger les détenus.

 16   M. CVIJETIC : [interprétation] J'aimerais présenter au témoin le document

 17   suivant de notre liste 65 ter, document 655.

 18   Q.  Monsieur Sabanovic, veuillez examiner ce document. Il s'agit d'un

 19   document du commandement du 1er Corps de Krajina, du département des

 20   Affaires de l'information et de Renseignement. Ils indiquent ici qu'après

 21   avoir interrogé les détenus, ils ont fait le tri des détenus, décidant

 22   qu'après leur audition, il n'y avait plus lieu d'en garder un certain

 23   nombre. Parmi ces personnes-là, il n'y a pas votre nom, mais il y a les

 24   noms de plusieurs personnes, habitants de Sanski Most. On voit ici la

 25   signature de Bogajevic.

 26   Est-ce que cela confirme ce que vous nous avez dit auparavant, c'est-

 27   à-dire qu'ils avaient fait le tri et ont relâché un certain nombre de

 28   personnes de Sanski Most ?

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  1   R.  C'est qui ce Bogajevic, c'est celui qui était dans un club de football,

  2   puis après à Manjaca.

  3   Q.  Veuillez répondre à la question que je vous ai posée, à savoir est-ce

  4   que ce document confirme ce que vous avez déclaré, que des interrogatoires

  5   ont été menés par des membres du service des Renseignements qui s'étaient

  6   rendus à Manjaca ?

  7   R.  Oui.

  8   M. CVIJETIC : [interprétation] Je demande le versement de ce document.

  9   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Très bien.

 10   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Ce sera 1D17.

 11   M. CVIJETIC : [interprétation]

 12   Q.  Monsieur Sabanovic, ma dernière question est la suivante : quand est-ce

 13   que vous avez entendu dire pour la première fois qu'une personne dénommée

 14   Mico Stanisic existait, tout simplement ?

 15   R.  Durant cette période-là. Pendant la période d'après-guerre, et pas

 16   pendant la guerre.

 17   Q.  Donc vous n'avez pas entendu parler de lui pendant la guerre, mais

 18   seulement après la guerre ?

 19   R.  Oui, c'est exact.

 20   M. CVIJETIC : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges,

 21   je n'ai plus de questions. Merci.

 22   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Merci. Serait-il mieux de faire la pause

 23   maintenant, entre les deux contre-interrogatoires, au lieu de vous

 24   interrompre au milieu de votre interrogatoire ?

 25   M. KRGOVIC : [interprétation] On peut demander au témoin ce qu'il préfère.

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Je peux parler toute la nuit, si vous le

 27   souhaitez.

 28   M. KRGOVIC : [interprétation] Dans ce cas-là, peut-être qu'il serait bien

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  1   qu'on fasse la pause maintenant.

  2   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Très bien, la pause.

  3   [Le témoin quitte la barre]

  4   --- L'audience est suspendue à 17 heures 25.

  5   --- L'audience est reprise à 17 heures 50.

  6   M. HANNIS : [interprétation] Je me demande si on peut poser une question de

  7   calendrier. On pourrait en parler à votre convenance.

  8   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] On pourrait le faire vers la fin de

  9   la session de travail d'aujourd'hui, quand on aura terminé l'interrogatoire

 10   du témoin.

 11   [Le témoin vient à la barre]

 12   M. LE JUGE HALL : [interprétation] D'accord. Vous pouvez commencer votre

 13   contre-interrogatoire, Maître.

 14   M. KRGOVIC : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Messieurs les

 15   Juges.

 16   Contre-interrogatoire par M. Krgovic : 

 17   Q.  [interprétation] Je m'appelle Dragan Krgovic et je suis là pour

 18   représenter les intérêts de M. Stojan Zupljanin. Je vais vous poser

 19   quelques questions qui sont relatives à votre déposition d'aujourd'hui pour

 20   la plupart d'entre elles. Je vais essayer de vous poser mes questions de

 21   sorte que vous puissiez répondre par un oui ou par un non. Et si jamais

 22   vous éprouvez le besoin de fournir d'autres explications, vous pouvez, bien

 23   sûr, le faire. Je vais vous donner suffisamment de temps pour cela. Et

 24   puis, il y aura aussi peut-être les questions additionnelles.

 25   Pour qu'il n'y ait pas de chevauchement, je vous demanderais

 26   d'observer un petit temps de pause entre les questions et vos réponses,

 27   puisque nous parlons la même langue. Et vous savez, tout cela doit être

 28   interprété, et parfois, tout ne se trouve pas consigné au compte rendu

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  1   d'audience. Ensuite, on est obligé d'apporter des corrections. Donc je vous

  2   demande de respecter un petit temps de pause. Evidemment, il en va de même

  3   pour moi.

  4   Monsieur Sabanovic, par rapport à votre séjour à Manjaca et tout ce que

  5   vous avez vécu là-bas, vous nous avez fourni plusieurs déclarations à ce

  6   sujet et vous avez aussi déposé dans l'affaire Brdjanin, n'est-ce pas ?

  7   R.  Oui.

  8   Q.  Quand on parle de ces déclarations, je parle des déclarations que vous

  9   avez données à des organes d'enquête en Allemagne et aussi une déclaration

 10   que vous avez fournie au Procureur. Il y en a deux. Il y en a une que vous

 11   avez fournie en Allemagne en 1999, le 26 mai. Ensuite, vous avez aussi

 12   fourni une déclaration aux enquêteurs du Tribunal le 1er et le 2 décembre;

 13   ainsi que le 14 et le 17 février 1991. Est-ce que c'est bien cela ?

 14   R.  Oui.

 15   Q.  Et puisque beaucoup de temps est passé entre-temps et puisque vous avez

 16   dit aujourd'hui, à juste titre, que vous ne pouvez pas vous rappeler de

 17   tous les détails, malgré tous les efforts que vous fournissez, cela demeure

 18   la vérité, n'est-ce pas, vous ne vous souvenez pas de tout ce que vous avez

 19   vécu ?

 20   R.  Oui.

 21   Mme PIDWELL : [interprétation] Peut-être qu'il y a une erreur au niveau du

 22   compte rendu d'audience. Ligne 24, c'est écrit la déclaration de 1991.

 23   Pouvez-vous corriger cela, s'il vous plaît. 

 24     M. KRGOVIC : [interprétation] J'ai parlé de 2001. Peut-être que les

 25   interprètes ne l'ont pas très bien entendu, mais j'ai parlé de la

 26   déclaration que vous avez fournie au bureau du Procureur en 2001. Donc

 27   c'est quelque chose qui va être corrigé, j'espère, au niveau du compte

 28   rendu d'audience suite à l'intervention du Procureur.

Page 945

  1   Q.  Vous conviendrez que vous avez donné cette déclaration immédiatement

  2   après ces événements, d'après votre meilleur souvenir. Et à l'époque, vos

  3   souvenirs étaient plus frais par rapport aux événements qui se sont

  4   produits à l'époque, n'est-ce pas ?

  5   R.  Oui. A l'époque, déjà un certain temps s'était écoulé entre les

  6   événements et la déclaration que j'ai fournie. Maintenant, on en est encore

  7   plus loin.

  8   Q.  Mais à l'époque, vous vous rappeliez mieux que maintenant, pratiquement

  9   dix années plus tard, n'est-ce pas ?

 10   R.  Oui.

 11   Q.  Monsieur Sabanovic, je vais vous montrer la déclaration que vous avez

 12   fournie en B/C/S et je vais vous montrer l'exemplaire papier de cette

 13   déclaration.

 14   Monsieur Sabanovic, veuillez, s'il vous plaît, examiner cette déclaration

 15   en bosnien, croate et serbe, en B/C/S, comme on l'appelle ici. Est-ce bien

 16   votre signature que l'on voit ici ?

 17   R.  Non, non, ce n'est pas ma signature. Là, c'est bien ma signature, mais

 18   là, un petit peu plus bas, ce n'est pas ma signature.

 19   Q.  Oui. On a deux signatures là. On a votre signature et la signature de

 20   la personne qui vous a interrogé.

 21   R.  Oui. Dans ce cas-là, oui.

 22   Q.  Pourriez-vous répéter cela à haute voix. Donc d'un côté, votre

 23   signature, et de l'autre côté, la signature d'une autre personne ?

 24   R.  Oui, oui, c'est bien cela.

 25   Q.  Je vais vous poser la question maintenant. Donc, Monsieur, dans cette

 26   déclaration préalable et aussi dans la déposition que vous avez faite dans

 27   l'affaire Brdjanin, vous avez évoqué plusieurs personnes qui sont venues

 28   visiter le camp de Manjaca ou la prison militaire de Manjaca. Et dans cette

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  1   déclaration préalable - et je vais vous demander d'examiner la page 16 en

  2   B/C/S.

  3   M. KRGOVIC : [interprétation] C'est la même dans la version en anglais.

  4   Q.  Avez-vous trouvé la page 16 ? Le numéro de la page est en bas, quand

  5   même.

  6   R.  Oui. Et que dois-je faire ensuite ?

  7   Q.  Veuillez examiner le cinquième paragraphe en partant du haut de la

  8   page. Prenez vos lunettes, s'il vous plaît. Cela commence comme cela :

  9   "Slobodan Zupljanin est venu dans le camp au mois d'août 1992. Il était

 10   avec ses gardes du corps et il était vêtu de vêtements civils."

 11   Mme PIDWELL : [interprétation] Dans le transcript, on peut lire "Slobodan,"

 12   et c'est une erreur manifeste, n'est-ce pas ?

 13   M. KRGOVIC : [interprétation] Oui, oui, Monsieur le Président, c'est une

 14   erreur. C'est Stojan.

 15   Q.  Et à la fin, on peut lire :

 16   "C'est la seule fois pour laquelle je suis sûr que Zupljanin est venu

 17   dans le camp."

 18   On peut lire là, n'est-ce pas ?

 19   R.  Oui.

 20   Q.  C'est la dernière phrase dans ce paragraphe, je pense.

 21   R.  Oui, je la vois. Je sais.

 22   Q.  Est-ce que vous vous souvenez avoir dit cela à l'époque au bureau

 23   du Procureur ?

 24   R.  Je ne sais pas. Sans doute que oui. Je ne suis pas sûr. Sans

 25   doute que oui. J'ai entendu dire qu'il était venu une deuxième fois, mais

 26   je n'étais pas présent.

 27   Q.  Après avoir fait cette déclaration au préalable, vous avez déposé

 28   dans l'affaire Brdjanin ?

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  1   R.  Oui.

  2   Q.  Et votre déposition a duré trois jours. Et là, le Procureur vous

  3   a aussi posé la question, à savoir qui est venu à Manjaca, entre autres -

  4   cela se trouve à la page 6 577 du compte rendu d'audience du 4 juin 2002 -

  5   et vous avez répondu en décrivant une scène de visite de Stojan Zupljanin

  6   dans le camp de Manjaca. Je peux vous donner lecture de cela. Je ne sais

  7   pas si le Procureur l'a déjà fait, mais on peut lire ici que vous n'avez vu

  8   qu'une seule fois Stojan Zupljanin et qu'il n'est venu qu'une seule fois.

  9   Est-ce que vous vous souvenez de votre déposition dans l'affaire Brdjanin ?

 10   R.  Je me souviens, mais c'est un détail. Je n'ai aucune raison

 11   d'être intéressé à cela. Qu'est-ce que vous voulez que je vous dise là ?

 12   Q.  Au bout de 17 ans par rapport aux événements, vous avez évoqué la

 13   possibilité que Stojan Zupljanin est venu une deuxième fois à Manjaca.

 14   R.  J'ai dit que les autres détenus me l'ont dit.

 15   Q.  Je vais vous citer ce que vous avez dit aujourd'hui à la page 35 du

 16   compte rendu d'audience. Puisque vous ne vous êtes pas vraiment préparé

 17   pour la déposition, peut-être que vous avez fait quelques erreurs. C'est au

 18   niveau du compte rendu d'audience, page 35, ligne 4 de votre déposition

 19   d'aujourd'hui. Est-il possible qu'en 2000 votre mémoire était plus fraîche,

 20   et que c'est là que vous avez raconté les événements qui sont les plus près

 21   de la vérité et qu'aujourd'hui vous avez une erreur ? Est-ce possible ?

 22   R.  C'était quelque chose que j'ai entendu dire. Les autres détenus ont dit

 23   cela.

 24   Q.  Ils ont dit quoi ? Ils ont parlé de Stojan Zupljanin ?

 25   R.  Oui.

 26   Q.  Vous souvenez-vous si pendant que vous étiez à Manjaca, Zarko Tole

 27   était avec vous ?

 28   R.  C'est un commandant ou colonel Croate.

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  1   Q.  Il était aide-cuisinier à Manjaca ?

  2   R.  Oui.

  3   Q.  Et à l'époque, le président ou vice-président de Sanski Most était

  4   aussi avec vous à Manjaca, M. Adil Draganovic, n'est-ce pas ?

  5   R.  Oui, pendant un certain temps, il était là, effectivement.

  6   Q.  Est-ce que M. Draganovic vous a dit peut-être qu'il a parlé avec

  7   Zupljanin ?

  8   R.  Je n'en suis pas sûr, parce que si c'était lui, je vous le dirais

  9   immédiatement. Nous sommes originaires du même village.

 10   Q.  Est-ce que vous savez que Stojan Zupljanin et Adil Draganovic sont

 11   allés ensemble dans la même école secondaire ?

 12   R.  Non, je ne le sais pas.

 13   Q.  Est-ce que vous savez que Stojan Zupljanin était bon ami avec Zarko

 14   Tole du HVO ?

 15   R.  Oui.

 16   Q.  Et qu'il a visité Manjaca justement pour visiter ces deux personnes et

 17   que c'est avec ces deux personnes-là qu'il a parlé ?

 18   R.  C'est possible. Ce que je sais, c'est qu'il n'a pas parlé avec moi.

 19   Q.  Savez-vous que Adil Draganovic a déposé dans l'affaire Brdjanin ?

 20   R.  Non.

 21   Q.  Est-ce que vous savez que dans sa déposition, il a dit - c'est aux

 22   pages 54 et 55 du compte rendu d'audience - qu'il a vu Stojan Zupljanin une

 23   fois et qu'il a parlé avec lui; c'était à Manjaca ?

 24   R.  Qui a dit cela ?

 25   Q.  Adil Draganovic.

 26   Monsieur Sabanovic, dans l'affaire Brdjanin, vous avez parlé de quelqu'un

 27   que vous avez appelé TN.

 28   R.  La police ?

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  1   Q.  3N. C'étaient Zupljanin, Kupresanin et Brdjanin ?

  2   R.  Oui.

  3   Q.  Et vous les avez appelés comme cela parce que leurs noms se terminent

  4   par un N ?

  5   Mme PIDWELL : [interprétation] Je pense qu'il convient de faire une

  6   correction au niveau du compte rendu d'audience, ligne 8. C'était trois N

  7   donc, et pas "TN".

  8   M. KRGOVIC : [interprétation]

  9   Q.  Oui, parce que c'est ce qui correspond aux dernières lettres de leurs

 10   noms de famille ?

 11   R.  Oui.

 12   Q.  Vous avez dit dans votre déposition que c'étaient des hommes politiques

 13   et qui avaient fait des discours.

 14   R.  Oui, c'étaient des hommes politiques. Peut-être qu'ils étaient chargés

 15   de sécurité. Je ne savais pas ce qu'ils faisaient exactement. De toute

 16   façon, je n'étais pas là pour cela.

 17   Q.  A l'époque où vous avez fait votre déposition dans l'affaire Brdjanin,

 18   vous avez dit que c'étaient des hommes politiques. C'est comme cela que

 19   vous les avez décrits. Est-ce que vous vous souvenez de cela ?

 20   R.  Mais c'est du pareil au même sans doute. Ce sont eux qui ont organisé

 21   tout ça. Mais ils devaient être des hommes politiques et ils devaient aussi

 22   s'occuper de la sécurité, c'est sûr.

 23   Q.  A l'époque où vous avez déposé, est-ce que vous saviez - et là, je

 24   parle de l'affaire Brdjanin - est-ce que vous saviez quelle était la

 25   fonction de Stojan Zupljanin ?

 26   R.  Il était le président de la République serbe de la Krajina.

 27   Q.  Vous ne saviez pas que c'était un policier ?

 28   R.  Je sais qu'il était le président de la République serbe de la Krajina.

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  1   Q.  Et vous pensiez que c'était un homme politique comme les deux autres ?

  2   R.  Oui, pareil.

  3   Q.  Vous avez évoqué deux visites des politiques et vous avez mentionné les

  4   trois personnes, Brdjanin, Zupljanin et Kupresanin. Vous avez dit qu'il n'y

  5   avait pas de différence entre les trois ?

  6   R.  Pour moi, c'était la même chose. Et de toute façon, je ne faisais pas

  7   vraiment attention à cela. Je ne pouvais pas en tirer aucun avantage, et de

  8   toute façon, cela ne m'a pas porté préjudice non plus.

  9   Q.  Après ces événements et après cette déposition, est-ce que vous avez eu

 10   la possibilité de parler avec M. Draganovic au sujet de ces visites ?

 11   R.  Non.

 12   Q.  Quand vous êtes arrivé à La Haye, c'est là où pour la première fois on

 13   vous a demandé si Stojan Zupljanin était là-bas une fois ou deux fois,

 14   n'est-ce pas ?

 15    R.  Oui.

 16   Q.  Et on vous a dit qu'il était à Manjaca à deux reprises, et vous avez

 17   accepté cela ?

 18   R.  Oui.

 19   Q.  Qui vous a dit cela, le Procureur ou --

 20   R.  Je ne sais pas. Quelqu'un m'a dit cela. Vous me posez de telles

 21   questions.

 22   Q.  Lorsque vous avez eu la séance de récolement, est-ce qu'on vous a

 23   demandé de signer les informations que vous avez fournies ?

 24   R.  Je pense que oui.

 25   Q.  Je parle de la période des quelques derniers jours.

 26   R.  Je ne sais pas. [inaudible]

 27   M. KRGOVIC : [interprétation] Est-ce qu'on peut maintenant afficher sur

 28   l'écran et montrer au témoin la pièce P62.

Page 952

  1   Q.  Le texte en anglais et la teneur de votre entretien avec le Procureur,

  2   est-ce qu'on vous a montré cela, ce texte, après l'entretien ? Est-ce qu'on

  3   vous a demandé de signer ce document ?

  4   R.  Je ne sais pas qu'on m'ait demandé de signer. Je ne me souviens pas

  5   d'avoir signé quoi que ce soit.

  6   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Maître Krgovic, je ne suis pas

  7   certain de savoir quel est le sens de vos questions. Soit vous attachez une

  8   importance au fait que votre client s'est rendu à Manjaca une fois ou peut-

  9   être deux fois, et si cela est le cas, j'aimerais que vous aidiez la

 10   Chambre en expliquant pourquoi c'est important. Ou bien, vous testez la

 11   crédibilité de ce témoin, ce qui est un procédé tout à fait légitime, mais

 12   je pense que le témoin a répondu au mieux qu'il le pouvait, qu'il avait vu

 13   M. Stojan Zupljanin à Manjaca une fois ou deux fois.

 14   Pouvez-vous nous expliquer ce point ?

 15   M. KRGOVIC : [interprétation] Je vais expliquer cela en deux points. Je ne

 16   veux pas contester la crédibilité de ce témoin. J'aimerais tout simplement

 17   dire que lorsqu'il a déposé dans l'affaire Brdjanin, il se souvenait de ces

 18   choses mieux, et puisqu'il n'a pas été préparé à témoigner sur cet

 19   événement, il est possible qu'il aurait commis des erreurs. C'est ce qu'il

 20   a dit d'ailleurs.

 21   J'avance qu'en confondant ces trois hommes politiques, il a dit que

 22   mon client s'est rendu là-bas deux fois, parce qu'il a dit pour les autres

 23   hommes politiques qu'ils se sont rendus là-bas à deux reprises. Il a dit

 24   cela dans sa déposition antérieure, à l'exception faite de mon client. Pour

 25   mon client, il a dit qu'il s'est rendu une seule fois là-bas. Maintenant,

 26   il dit qu'il s'est rendu lui aussi deux fois. Je veux donc prouver qu'il a

 27   commis une erreur.

 28   Pour ce qui est du deuxième point, pour ce qui est des notes de séances de

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  1   récolement, voilà pourquoi je lui ai montré --

  2   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Mais pourquoi cela est important,

  3   savoir que votre client s'est rendu une fois ou deux fois là-bas ?

  4   M. KRGOVIC : [aucune interprétation]

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] Rien n'est important.

  6   M. KRGOVIC : [interprétation] Il n'y a rien d'important pour ce qui est de

  7   ce fait. Je n'aimerais pas qu'on accorde une importance particulière à cet

  8   événement, parce que la fin de la visite de mon client à Manjaca a été la

  9   visite privée à ces deux personnes que j'ai mentionnées tout à l'heure,

 10   Adil Draganovic et Zarko Tole. Il s'est rendu là-bas pour rendre visite à

 11   ces deux personnes.

 12   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Maintenant, je suis confus. Si j'ai

 13   bien compris ce que vous venez de dire, votre client s'est adressé à des

 14   détenus, et les détenus, les gens qui étaient dans le camp, l'ont applaudi.

 15   M. KRGOVIC : [interprétation] Adil Draganovic viendra devant le Tribunal

 16   pour en déposer.

 17   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Donc est-ce que vous dites que votre

 18   client ne s'est jamais rendu à Manjaca à titre officiel ?

 19   M. KRGOVIC : [interprétation] Exactement.

 20   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Merci. Cela m'éclaire, maintenant.

 21   Mme PIDWELL : [interprétation] Il faut que je dise que dans la

 22   transcription de la déposition de Slobodan Brdjanin, j'ai pas trouvé dans

 23   le compte rendu l'endroit où le témoin a dit que ces trois hommes

 24   politiques étaient venus deux fois. Il a mentionné ces hommes politiques,

 25   mais je ne peux pas trouver la partie du compte rendu où il a déposé là-

 26   dessus. Est-ce que mon éminent collègue pourrait m'aider là-dessus ?

 27   M. KRGOVIC : [interprétation] Pour ce qui est de Talic, deux fois, 6688,

 28   numéro de page, et au contre-interrogatoire de M. Ackerman, pour ce qui est

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  1   de Kupresanin. Mais je ne vois pas ici le numéro de la page. A plusieurs

  2   endroits dans le compte rendu, pour ce qui est de Brdjanin, Talic et

  3   Kupresanin, il a été dit qu'ils se sont rendus là-bas à deux reprises.

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] Cela n'est pas important, pas du tout, s'ils

  5   s'y sont rendus deux fois ou cinq fois. L'important est ce qui s'est passé

  6   là-bas. Mais savoir qu'il se soit rendu là-bas deux fois ou cinq fois, pour

  7   moi, ce n'est pas important du tout.

  8   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Pourquoi vous ne posez pas une

  9   question directe au témoin pour résoudre ce problème. Posez cette question

 10   au témoin pour savoir s'il est certain d'avoir vu M. Zupljanin en train

 11   d'entrer dans une des étables, et pendant qu'il y était, il a prononcé un

 12   discours aux détenus qui applaudissaient par la suite. Je pense que c'est

 13   le point essentiel pour tout cela.

 14   M. KRGOVIC : [interprétation]

 15   Q.  Monsieur Sabanovic, vous avez dit au début de votre témoignage dans

 16   cette affaire, que vous avez vu M. Stojan Zupljanin à l'extérieur des

 17   baraques. Il n'est pas entré dans les baraques ?

 18   R.  Il n'a pas pu me voir parce que je n'y étais pas. Et dans les étables

 19   où j'étais, je ne pouvais pas le voir. Je l'ai vu au moment où il est passé

 20   d'une étable à l'autre.

 21   Q.  Vous l'avez vu à l'extérieur de ces étables ?

 22   R.  Oui.

 23   Q.  Est-ce qu'il a parlé à qui que ce soit au moment où vous l'avez vu à

 24   l'extérieur des étables ?

 25   R.  Je ne sais pas. Ce n'était pas ma tache. Et d'ailleurs, je n'osais le

 26   faire.

 27   Q.  Et c'est la seule fois où vous l'avez vu à Manjaca ?

 28   R.  Oui. Pour ce qui est du reste, j'ai entendu dire qu'il était encore une

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  1   fois à Manjaca, mais là, je ne l'ai pas vu.

  2   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Monsieur le Témoin, avez-vous vu M.

  3   Stojan Zupljanin entrer dans l'une de ces étables ?

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] Je l'ai vu sortant de l'une des étables en se

  5   rendant vers l'autre étable.

  6   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] L'avez-vous vu au moment où il

  7   entrait dans cette deuxième étable ?

  8   LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai cessé de regarder tout cela. Il y avait

  9   les membres de la police. Ce n'était pas une foire. Je n'osais pas les

 10   regarder.

 11   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Vous déposez que vous avez vu M.

 12   Zupljanin sortant de l'une de ces étables, n'est-ce pas ?

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai dit que je l'ai vu sortant d'une étable,

 14   à l'extérieur de l'étable. Je n'ai pas vu qu'il était entré dans une autre

 15   étable. Je n'ai pas dit cela. D'ailleurs, j'aurais risqué ma vie si j'avais

 16   suivi le déplacement de qui que ce soit. Pour moi, tout le monde qui est

 17   venu avait le même objectif. C'était leur tache, et ils s'acquittaient de

 18   cette tache de la même façon, tous ceux qui sont venus là-bas.

 19   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Monsieur le Témoin, si vous avez

 20   suivi ce qui a été dit ici, vous allez comprendre qu'il y a un problème, à

 21   savoir si M. Zupljanin s'est rendu à Manjaca en tant que personne ayant un

 22   titre officiel, en tant que chef de la police de Banja Luka. S'il vous

 23   plaît, Monsieur le Témoin, écoutez-moi bien.

 24   Il s'est peut-être rendu au camp de Manjaca en tant que personne privée

 25   parce qu'il a voulu rencontrer des personnes qu'il connaissait là-bas. Il

 26   est également possible qu'il s'est rendu à ce camp en tant que personne qui

 27   avait un titre officiel, et c'est ce qui est pertinent pour la Chambre.

 28   Nous voulons savoir si, pendant sa visite au camp, il s'est adressé à

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  1   certains des détenus. C'est ce dont il s'agit ici et non pas de savoir s'il

  2   s'est rendu à Manjaca à une reprise ou à deux reprises. Il est important de

  3   savoir si, quand il est arrivé au camp de Manjaca, de savoir s'il s'est

  4   adressé aux détenus en prononçant un discours.

  5   Vous avez dit que vous n'étiez pas dans ce bâtiment, mais vous avez dit que

  6   vous l'avez vu sortant de ces lieux, et vous également déposé que pendant

  7   qu'il était là-bas, vous avez entendu des applaudissements des détenus.

  8   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

  9   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Est-ce que c'est votre déposition

 10   aujourd'hui, à savoir que vous avez entendu que les détenus applaudissaient

 11   pendant qu'il était à l'intérieur de l'étable, après quoi vous l'avez vu

 12   sortir de cet étable ?

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Les applaudissements étaient avant sa sortie

 14   de l'étable, et pas après. Je n'étais pas directeur ou commandant du camp

 15   pour pouvoir vous dire s'il est venu au camp à titre officiel ou à titre

 16   privé.

 17   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Non, Monsieur le Témoin, nous ne nous

 18   attendons pas à ce que vous ayez votre avis personnel pour ce qui est du

 19   fait de savoir s'il était venu en un titre ou en un autre. Ce qui nous

 20   intéresse ici, c'est d'entendre ce que vous avez pu observer, remarquer, ce

 21   que vous avez pu voir et entendre. C'est la question qu'on vous pose, après

 22   quoi nous allons tirer des conclusions de votre réponse.

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai déjà dit encore une fois, et je suis

 24   étonné de voir que vous posez la même question la dixième fois. Je l'ai vu

 25   sortir, je l'ai vu à ce moment là. Je ne l'ai pas vu entrer dans l'autre

 26   étable, et je ne l'ai pas vu au moment où il y avait des applaudissements.

 27   Parce qu'il y était, là-dedans. Donc là vraiment, jusqu'ici je n'ai jamais

 28   vu cela, qu'on me pose des questions de cette façon humiliante. C'est la

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  1   vérité. C'est une honte lorsque vous posez de telles questions.

  2   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Bien. Merci. Je pense qu'on a résolu

  3   le problème.

  4   M. KRGOVIC : [interprétation]

  5   Q.  Monsieur Sabanovic, il y a une question concernant un autre sujet.

  6   Regardez la déclaration, s'il vous plaît. Il s'agit de la page 10, en bas

  7   de la page, le dernier paragraphe. Dans ce paragraphe, qui continue à la

  8   page suivante, vous décrivez qu'un juriste est arrivé pour vous voir, et il

  9   a dit qu'il travaillait en tant qu'enquêteur de la JNA.

 10   R.  Il était enquêteur.

 11   Q.  Il vous a dit qu'à Sanski Most un acte d'accusation était dressé à

 12   votre encontre ?

 13   R.  Non.

 14   Q.  C'est ce qui figure ici.

 15   R.  Je n'ai pas besoin de lire tout cela. Il s'agissait d'un inspecteur en

 16   fait. Avec lui, j'ai passé quelques heures en écrivant, mais ce que j'ai

 17   écrit, ce n'est pas important.

 18   Q.  A la troisième page, il vous a dit que le troisième chef d'accusation

 19   de l'acte d'accusation était de faire des choses contre le peuple Serbe

 20   parce que :

 21   "J'ai délivré des certificats" --

 22   R.  C'est un mensonge. Je ne peux plus écouter cela. Ce n'est pas vrai.

 23   Q.  C'est ce qui figure dans votre déclaration, qu'il vous a dit cela.

 24   R.  C'est quelqu'un qui a dactylographié mes notes que j'ai écrites sur un

 25   morceau de papier en utilisant un crayon.

 26   Q.  C'est votre déclaration où vous parlez de cet événement.

 27   R.  Je n'ai jamais dit cela, et personne d'autre ne m'a dit cela non plus.

 28   J'entends cela pour la première fois ici.

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  1   Q.  C'est votre déclaration que j'ai obtenue du Procureur.

  2   R.  Je ne sais pas qui vous a donné cette déclaration. Je n'ai pas dit cela

  3   et je n'ai pas entendu dire cela non plus.

  4   Q.  Donc tout ce qui figure dans cette déclaration n'est pas vrai, ou peut-

  5   être seulement cette partie ?

  6   R.  Cette partie n'est pas vraie. Je n'ai pas lu tout cela d'ailleurs, que

  7   j'ai dit que j'ai fait des torts au peuple serbe.

  8   Mon épouse est serbe, et deux de mes enfants ont des prénoms Ernest,

  9   Oliver, et le troisième a le prénom Alan. Ce sont des prénoms plutôt

 10   populaires. Et regardez ce que vous utilisez comme moyen pour me poser des

 11   questions.

 12   Q.  Est-ce que le juge d'instruction vous a posé des questions pour ce qui

 13   est des certificats médicaux ?

 14   R.  Il ne s'agit pas du juge d'instruction. Il s'agit d'un inspecteur, d'un

 15   enquêteur.

 16   Q.  Donc, l'enquêteur, est-ce qu'il vous a posé des questions de

 17   certificats médicaux ?

 18   R.  Non. Il n'y était pas. Il m'a dit de m'asseoir et d'écrire tout ce que

 19   je savais là-dessus. Il m'a posé des questions concernant Faik Biscevic, un

 20   homme qui est décédé récemment. Il était à Manjaca également, et deux fils

 21   de cet homme se sont fait tuer. Il m'a demandé de noter tout cela. J'ai

 22   écrit tout cela en utilisant un crayon. Il n'était pas présent.

 23   Q.  Donc cette partie de votre déclaration n'est pas exacte ?

 24   R.  Non, ce n'est pas ma déclaration. Cette partie n'est pas exacte. Je

 25   n'ai jamais entendu dire cela. Vous êtes un peuple très désagréable.

 26   Mme PIDWELL : [interprétation] Peut-être pourrions-nous tirer ce point au

 27   clair pour savoir exactement de quelle partie de la déclaration il est

 28   question maintenant ici.

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  1   M. KRGOVIC : [interprétation] La page 11, le premier paragraphe de la

  2   déclaration en B/C/S. En anglais, la page 10, le dernier paragraphe.

  3   Q.  La déclaration qui est sous vos yeux n'est pas ce que vous avez dit au

  4   Procureur ?

  5   R.  Cela n'a pas été recopié. Ce que j'ai noté, je lui ai remis à cet

  6   enquêteur à 2 heures du matin à peu près. Je lui ai remis ces notes. Il m'a

  7   pas posé de questions à propos de qui que ce soit, de Faik Biscevic, par

  8   exemple. Nulle part cela n'a été noté, et je n'ai jamais parlé de cela à

  9   qui que ce soit.

 10   Q.  Vous n'avez pas parlé de cet entretien non plus au Procureur ?

 11   R.  Je ne sais pas si j'en ai parlé. Peut-être que j'en ai parlé si on m'a

 12   posé des questions là-dessus. Sinon, pourquoi aurais-je parlé de cela au

 13   Procureur ?

 14   Mme PIDWELL : [interprétation] Je pense que le témoin n'a pas compris mon

 15   éminent collègue, parce que la déclaration à propos de laquelle mon éminent

 16   collègue pose des questions au témoin, si j'ai bien compris, est la

 17   déclaration qui a été faite au bureau du Procureur par le témoin. Je pense

 18   que le témoin est peut-être dans l'erreur, parce qu'il pense qu'il s'agit

 19   de la déclaration faite aux autres autorités qui lui ont posé des

 20   questions. Peut-être que mon collègue pourrait tirer cela au clair.

 21   M. KRGOVIC : [interprétation]

 22   Q.  Ce que je viens de lire dans cette déclaration, c'est la déclaration

 23   que vous avez faite au bureau du Procureur où vous avez décrit l'événement

 24   et votre rencontre avec cet enquêteur, la description que vous avez fournie

 25   dans cette déclaration.

 26   R.  Ce que vous venez de dire à moi, je ne crois pas que qui que ce soit

 27   aurait pu rédiger cela d'une telle façon aussi joliment. Je ne sais pas

 28   d'où il aurait pu puiser la force pour écrire cela.

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  1   Q.  Donc ce n'est pas ce que vous avez dit au Procureur ?

  2   R.  Non, rien de tout cela. Je ne veux plus parler de cela. Vous êtes plus

  3   jeune que moi, et c'est ça qui m'étonne d'ailleurs, parce que je ne sais

  4   pas ce qui se passe maintenant.

  5   Q.  Merci.

  6   M. KRGOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, je n'ai plus de

  7   questions pour ce témoin.

  8   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Des questions supplémentaires ?

  9   Mme PIDWELL : [interprétation] Merci.

 10   Nouvel interrogatoire par Mme Pidwell : 

 11   Q.  [interprétation] Je veux seulement tirer au clair quelques éléments qui

 12   découlent du contre-interrogatoire. Le passage de la déclaration dont le

 13   confrère a parlé avec vous, page 10, dernier paragraphe de la version

 14   anglaise de votre déclaration en date du 1er et 2 décembre 2000 [comme

 15   interprété].

 16   Mme PIDWELL : [interprétation] J'aimerais qu'on m'aide seulement pour

 17   retrouver le passage correspondant en B/C/S pour qu'on puisse l'afficher à

 18   l'écran.

 19   M. KRGOVIC : [interprétation] C'est la fin du dernier paragraphe, page 10

 20   et premier paragraphe, page 11.

 21   Mme PIDWELL : [interprétation] C'est en anglais aussi comme ça, pages 10 et

 22   11.

 23   Q.  Monsieur, je vais maintenant donner lecture du passage qui nous

 24   intéresse, page 10, dernier paragraphe :

 25   "Le lendemain, l'enquêteur m'a dit que je serais traduit devant un tribunal

 26   militaire et liquidé à la fin de la guerre. C'était ainsi le premier jour

 27   où j'ai dû examiner tous les prisonniers arrivant au camp. Les policiers

 28   militaires sont revenus et m'ont dit qu'il fallait que je note toutes les

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  1   blessures observées sur les nouveaux arrivés. Parmi ces personnes arrivées

  2   ce jour-là, il y avait environ 15 à 20 personnes de Sanski Most."

  3   Alors, on va s'arrêter maintenant et je vais vous demander de nous dire si

  4   vous êtes d'accord avec ce passage de votre déclaration.

  5   R.  Oui. On m'a dit un millier de fois que j'allais être liquidé, mais pas

  6   de la manière décrite ici dans cette déclaration. Cela ne m'est pas arrivé

  7   qu'une seule fois. On m'a menacé souvent. Je n'oublierai jamais le jour où

  8   un policier, vers 1 heure du matin, après l'arrivée des gens de Kotor

  9   Varos, m'a dit que j'allais être égorgé le lendemain. Heureusement, il a

 10   été muté à Gradacac, ce type. C'est ce qu'on m'a dit.

 11   Q.  Vous souvenez-vous d'avoir parlé à l'enquêteur auquel vous faites

 12   référence dans ce paragraphe-ci de votre déclaration ?

 13   R.  Oui, j'ai parlé à un enquêteur mais pas de grand-chose. Il m'a posé des

 14   questions au sujet d'un détenu dans le camp, ce Biscevic, mais il ne s'est

 15   passé rien de particulier. Je suis resté là-bas à écrire sur un papier ce

 16   que j'en savais. C'est tout, alors que lui, il est sorti de la pièce.

 17   Q.  Bien. Maintenant, avec l'autorisation de la Chambre, j'essaierai de

 18   résumer la suite de ce paragraphe, les paroles d'une personne qui est

 19   arrivée à Manjaca, qui avait été policier à Sanski Most auparavant, qui

 20   vous a auditionné et qui est mort par la suite. Vous souvenez-vous de cette

 21   personne et de cet événement ?

 22   R.  Policier, donc quelqu'un qui n'était pas malade. Je sais qu'il y avait

 23   dans le groupe arrivé en juillet, il y avait parmi eux 19 à 21 morts qui se

 24   trouvaient sur le camion. Parmi eux, il y avait Josip Mlinar. Lui, il était

 25   mort, donc je ne peux pas savoir si c'est vrai, du moment où il était déjà

 26   mort. Je n'ai parlé à personne. Je ne sais pas.

 27   Q.  Bien. Le passage suivant, c'est à la page 11, en haut de la page. On y

 28   parle de vous signant un certificat de décès.

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  1   R.  Non, ce n'est pas ma déclaration. Ah oui.

  2   Q.  Monsieur, vous souvenez-vous d'avoir été interrogé par des

  3   représentants du bureau du Procureur le 1er et le 2 décembre 2001; ainsi que

  4   le 14, 17, 19 février 2001 ?

  5   R.  Oui, c'est tout à fait possible qu'on m'en a parlé si j'étais libre.

  6   Q.  Vous souvenez-vous d'avoir eu l'occasion de relire la déclaration dans

  7   la langue que vous compreniez et qu'ensuite vous avez signé cette

  8   déclaration en présence des témoins ?

  9   R.  Ceci n'est pas ma déclaration. Peut-être qu'il y a des passages dans

 10   cette déclaration qui sont à moi. Mais ça, en entier, n'est pas ma

 11   déclaration. Je n'ai jamais dit avoir fait du tort au peuple serbe, d'avoir

 12   délivré de faux certificats. Je ne suis pas une mauvaise personne. Je ne

 13   trouve aucune logique dans tout ceci. L'enquêteur à l'époque était tout à

 14   fait correct. Il m'a donné un bout de papier et un crayon et il m'a demandé

 15   d'écrire. Après avoir écrit ce que j'avais écrit, je lui ai rendu ce

 16   papier, et c'est tout.

 17   M. PANTELIC : [interprétation] Excusez-moi pour l'interruption. J'aimerais

 18   qu'il soit consigné au compte rendu que le document portant le numéro ERN

 19   0200-4435 a été rejeté intégralement par le témoin. Merci.

 20   Mme PIDWELL : [interprétation] Je ne suis pas sûre que votre interprétation

 21   de ce qui s'est passé correspond tout à fait à la réalité.

 22   M. LE JUGE HALL : [interprétation] A quel moment le témoin a-t-il rejeté

 23   cette déclaration, Maître Pantelic ?

 24   M. PANTELIC : [interprétation] Il vient de le dire, et je voudrais que cela

 25   soit consigné. Il a dit que la déclaration faite le 1er et 2 décembre 2000;

 26   et le 14, le 17 février 2001 n'est pas sa déclaration. C'est ce qu'il vient

 27   de dire, très simplement. Il vient de le déclarer.

 28   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Vous voulez dire qu'il vient de le

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  1   déclarer maintenant, que ce n'est pas quelque chose qu'il avait déclaré

  2   auparavant ?

  3   M. PANTELIC : [interprétation] Oui, maintenant.

  4   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Madame Pidwell, il se fait tard, et le

  5   témoin est très probablement fatigué, comme nous le sommes tous. Quand on

  6   est fatigué, on a du mal à se concentrer. Vous êtes en train de poser des

  7   questions supplémentaires sur cette déclaration alors que cette déclaration

  8   est déjà versée au dossier. Je ne vois pas d'utilité à lui poser des

  9   questions supplémentaires s'il ne s'agit pas d'établir la cohérence entre

 10   plusieurs déclarations au préalable. De quelle manière ce que vous faites

 11   peut être utile à la Chambre ?

 12   Mme PIDWELL : [interprétation] En fait, cette déclaration n'est pas versée

 13   au dossier. Ce qui est versé au dossier, c'est la déclaration faite pour

 14   les besoins de l'affaire Brdjanin. Alors vous n'avez pas donc la

 15   possibilité d'utiliser cette déclaration en tant que pièce à conviction, et

 16   j'ai bien peur que ce que vient de déclarer Me Pantelic ne crée une

 17   perception tout à fait distordue de ce le témoin a déclaré.

 18   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Bien. Dites-moi de quelle manière cela

 19   peut nous être utile.

 20   Mme PIDWELL : [interprétation] Parce que le témoin, à mon avis, a dit qu'il

 21   rejetait ce qui figure à la page 11, alors que Me Pantelic interprète ceci

 22   comme le rejet de la totalité de la déclaration.

 23   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Bon. Vous avez déjà posé la question. Il

 24   y a une réponse à ceci.

 25   Mme PIDWELL : [interprétation] Oui, mais je m'y m'arrêtais parce que cette

 26   déclaration est pièce dans l'affaire Brdjanin, donc je m'arrêterai là.

 27   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Je vous remercie.

 28   Mme PIDWELL : [interprétation]

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  1   Q.  J'ai encore quelques questions qui découlent du contre-interrogatoire,

  2   au sujet de la salle de sports Hasan Kikic et des personnes que vous avez

  3   décrites comme des policiers militaires.

  4   R.  Ce que je sais, c'est qu'on les appelle la police militaire.  Mais je

  5   ne suis pas militaire. Je ne m'intéresse pas du tout aux questions

  6   militaires. Ce que je voulais dire par ceci, c'était qu'à chaque fois où

  7   l'un d'eux entrait dans cette pièce, on disait que c'était un policier

  8   militaire. Mais je ne m'y intéressais du tout. Je ne peux pas le savoir.

  9   En ce qui concerne les uniformes, portaient-ils cet uniforme-ci ou un

 10   autre, je n'en sais rien. Est-ce que c'était l'uniforme des forces de la

 11   République serbe de Krajina déjà ou pas, je n'en sais rien. Vous savez,

 12   pour moi, c'étaient tous des militaires, ceux qui portaient des uniformes

 13   et ceux qui n'en portaient pas.

 14   M. LE JUGE DELVOIE : Monsieur le Témoin, personne ne vous demande

 15   maintenant de dire de quel type d'uniforme il s'agissait, si c'était de ce

 16   type-là, ou un autre type, ou la couleur, quelle est-elle. On vous a

 17   demandé de dire si l'uniforme était bleu, pas bleu, ou, pour ainsi dire,

 18   que vous ne vous souvenez pas du tout de quelle couleur étaient ces

 19   uniformes. C'est tout à fait acceptable.

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne peux rien vous dire. Je n'ai pas osé

 21   regarder. Vous savez, il y en avait qui arrivait saouls, après le mariage,

 22   je ne sais pas quoi, une fête. Et vous savez que je ne supporte pas la

 23   manière dont vous me traitez. Je hais les mensonges.

 24   Mme PIDWELL : [interprétation] Je n'ai plus de questions. Merci.

 25   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Monsieur le Témoin, merci d'avoir été

 26   ici. Merci pour votre assistance. Nous vous souhaitons maintenant un bon

 27   voyage et un bon retour chez vous.

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] Ça fait rien. Ce n'est pas difficile pour moi.

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  1   Je ne suis pas du tout fatigué. Je suis désolé. Merci. Mais vous savez,

  2   écoutez-moi bien, il ne faut pas oublier ce que c'était à l'époque. Vous

  3   savez, ni maintenant ni avant, personne ne m'a jamais insulté. Mais il y a

  4   des choses que je ne peux tout simplement pas entendre. Je ne supporte plus

  5   d'écouter certaines choses. Mais, vous savez, je vous souhaite bonne

  6   continuation et beaucoup de succès. Mais, vous savez, je suis perdant en

  7   arrivant ici. Chaque jour que je passais ici, je perds de l'argent. Chaque

  8   jour que je ne travaille pas représente une perte matérielle pour moi; 300

  9   euros, demain, chaque jour. Mais je ne regrette rien. Je suis content

 10   d'avoir été ici et d'avoir dit ce que j'ai dit et je vous en remercie.

 11   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Merci. Vous pouvez disposer.

 12   [Le témoin se retire]

 13   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Monsieur Hannis, il vous reste six

 14   minutes. Cela suffit-il pour votre question administrative ?

 15   M. HANNIS : [interprétation] Oui. Ça concerne l'ordre de déposition et la

 16   date de déposition pour Hanson, le témoin expert que suggère de faire venir

 17   ici le Procureur. Il y a la transcription de la déposition qu'elle a faite

 18   devant la cour d'Etat en Bosnie en janvier cette année. Il y a un compte

 19   rendu. Alors, je me demandais s'il fallait communiquer ceci. Je sais qu'il

 20   y a eu des problèmes concernant sa déposition. Nous avons pensé peut-être à

 21   entamer avec l'interrogatoire principal, faire ensuite le témoin qui doit

 22   témoigner par la visioconférence, et ensuite reprendre avec le contre-

 23   interrogatoire. Et nous pensons, nous, de faire la visioconférence mardi,

 24   comme nous avons prévu de le faire lundi, et ensuite Mme Hanson.

 25   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Est-ce que la Défense est d'accord ?

 26   M. O'SULLIVAN : [interprétation] Oui.

 27   M. PANTELIC : [interprétation] Oui.

 28   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Bien. Alors, la Défense est d'accord, le

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  1   greffe confirme que techniquement cela est faisable, ce qui veut dire que

  2   nous allons faire ainsi.

  3   M. HANNIS : [interprétation] Merci beaucoup.

  4   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Mais avant de lever l'audience,

  5   j'aimerais savoir s'il y a d'autres questions que vous aimeriez soulever

  6   maintenant ? Non.

  7   Alors, merci. Nous reprendrons demain à 14 heures et quart dans la

  8   salle I. On m'a dit qu'il y aurait peut-être des changements concernant

  9   jeudi, mais nous serons certainement en mesure demain de vous informer de

 10   l'heure exacte où nous allons retourner à nos travaux jeudi et,

 11   certainement, vendredi.

 12   --- L'audience est levée à 18 heures 55 et reprendra le mercredi 7 octobre

 13   2009, à 14 heures 15. 

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