Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le mercredi 21 octobre 2009

  2   [Audience publique]

  3   [Les accusés sont introduits dans le prétoire]

  4   --- L'audience est ouverte à 9 heures 08.

  5   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Bonjour, Messieurs les Juges. Bonjour à

  6   tous et à toutes dans le prétoire. Il s'agit de l'affaire IT-08-91-T, le

  7   Procureur contre Mico Stanisic et Stojan Zupljanin.

  8   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Bonjour à tous et à toutes. Est-ce qu'on

  9   peut avoir les présentations, je vous prie.

 10   Mme KORNER : [interprétation] Messieurs les Juges, bonjour. Joanna Korner,

 11   Alex Demirdjian et Crispian Smith pour l'Accusation.

 12   M. CVIJETIC : [interprétation] Bonjour, Messieurs les Juges. Je suis le co-

 13   conseil de la Défense de M. Mico Stanisic, et j'ai Eugene O'Sullivan comme

 14   conseiller.

 15   M. PANTELIC : [interprétation] Messieurs les Juges, bonjour. Pour la

 16   Défense de Zupljanin, Igor Pantelic, Dragan Krgovic, et j'ai l'honneur

 17   particulier de vous présenter Mme Michelle Butler qui est notre conseiller

 18   pour cette affaire, conseiller juridique pour l'affaire. Je crois que c'est

 19   une arme juridique de la Défense contre l'Accusation. Merci beaucoup.

 20   Mme KORNER : [interprétation] Monsieur le Juge, peut-être pourrions-nous

 21   nous pencher une fois de plus sur la décision de la Chambre prise hier,

 22   avant que M. Gasi ne revienne. Nous avons demandé une décision écrite, et

 23   je crois que M. O'Sullivan avait l'intention de s'adresser aux Juges de la

 24   Chambre à ce sujet. Mais d'après nous, et d'après la façon dont on a

 25   compris ce que le Juge Harhoff a dit hier, nous avons cru comprendre ce qui

 26   suit :

 27   "La Chambre peut décider si on la considère comme un expert ou pas. Mais

 28   nous voulons dire qu'elle a toutes les qualifications d'un expert. Pour ce

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  1   qui est de son rapport en application de l'article 92 bis, pour ce qui est

  2   du rapport d'expert, la Défense peut contester ceci. Mais en fin de compte,

  3   si les Juges de la Chambre estiment qu'il n'y a rien de véritablement

  4   valable, prenons ça comme exemple, alors les Juges de la Chambre peuvent

  5   dire qu'ils n'accepteront pas ce rapport ou ne l'accepteront pas dans son

  6   intégralité."

  7   Mais ce qui reste peu clair, c'est le fait de savoir si vous acceptez

  8   le rapport en application de l'article 94. Cela pourrait être considéré

  9   comme une pièce à conviction. Une fois que vous aurez entendu le

 10   témoignage, vous allez prendre la décision pour ce qui est du poids à

 11   accorder aux différentes parties du rapport. Parce que le Juge Harhoff a

 12   dit que vous alliez décider du fait de savoir si cela serait versé au

 13   dossier ou pas. Lorsque Mme Hanson sera citée à comparaître aux côtés

 14   d'autres experts, est-ce que son rapport sera versé au dossier comme pièce

 15   à conviction et ensuite nous pourrions nous occuper des parties pertinentes

 16   et la Défense s'occuperait d'autres parties, ou alors est-ce que vous allez

 17   décider ou statuer sur le poids à accorder au rapport entier ou à certaines

 18   parties de ce rapport. C'est la question que je voudrais vous poser ce

 19   matin.

 20   [La Chambre de première instance et le Juriste se concertent]

 21   M. LE JUGE HALL : [interprétation] La façon pratique de se pencher sur la

 22   décision rendue hier est ce qui suit : si nous considérons cette dame comme

 23   expert, de ce fait, ce rapport pourrait être versé au dossier. Tout le

 24   reste, c'est de savoir quel est le poids à accorder à celui-ci. Nous, en

 25   notre qualité de Chambre, nous sommes censés nous pencher sur la façon

 26   d'interpréter ledit rapport, et notamment après la phase du contre-

 27   interrogatoire. Donc son rapport sera au dossier, mais tout le reste par la

 28   suite consistera à faire déterminer le poids à lui accorder.

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  1   Mme KORNER : [interprétation] Oui, certainement, Monsieur le Juge, ceci est

  2   d'une grande aide. Mais avant que de nous pencher sur les conséquences

  3   pratiques de ceci, je pense que M. O'Sullivan voudrait dire quelque chose à

  4   ce sujet.

  5   M. O'SULLIVAN : [interprétation] Oui, merci, Messieurs les Juges. Alors

  6   pour les besoins du compte rendu d'audience, hier à la conclusion de nos

  7   débats sur ce sujet, le Juge Harhoff a dit qu'au cas où les parties le

  8   requéraient, il y aurait une décision écrite de rendue. Et hier, les

  9   parties se sont adressées de façon informelle à la Chambre par courrier

 10   électronique pour réclamer une décision écrite. Et cette requête, je la

 11   présente maintenant à des fins de compte rendu d'audience, l'Accusation et

 12   la Défense ont demandé une décision écrite. Et notre intention est de

 13   demander une certification de votre décision en application de l'article

 14   73, et ceci doit être remis dans un délai de sept jours suite à la décision

 15   rendue par écrit.

 16   Donc ceci étant le cas, nous demanderions une requête pour ce qui est de

 17   patienter avec le témoignage de ce témoin, en attendant qu'il y ait

 18   décision concernant notre requête à des fins de certification. Le témoin

 19   donc ne devrait pas être entendu, parce que nous avons l'intention de

 20   contester en matière d'appel votre décision, et nous demanderions une

 21   certification d'appel pour que la question puisse être adressée à la

 22   Chambre d'appel. Nous estimons qu'il ne conviendrait pas d'entendre le

 23   témoin en attendant la décision écrite rendue.

 24   Mme KORNER : [interprétation] Messieurs les Juges, puis-je vous aider du

 25   point de vue du timing ?

 26   [La Chambre de première instance se concerte]

 27   Mme KORNER : [interprétation] Monsieur le Président, ce que je voulais dire

 28   c'est, en tout état de cause, les difficultés que nous pressentons pour ce

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  1   qui est de citer à comparaître Mme Hanson cette semaine-ci. Nous allons

  2   avoir un autre témoin qui va comparaître et je crois que les estimations

  3   pour ce qui est du contre-interrogatoire se chiffrent à plusieurs heures.

  4   Et il y a plusieurs heures d'interrogatoire principal. Donc, si j'ai bien

  5   compris, jeudi, nous n'allons pas travailler après le déjeuner. Donc nous

  6   avons un témoin que nous ne pourrons pas déplacer vers lundi, puis deux

  7   autres témoins qui ne peuvent pas être décalés, il s'agit de témoins

  8   importants, pour ce qui est des témoins qui ont été cités à comparaître par

  9   injonction. Et je pense que nous ne pourrions pas, en tout état de cause,

 10   faire venir Mme Hanson. Donc j'ai estimé préférable de vous le dire.

 11   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Donc, en substance, vous êtes

 12   d'accord avec la proposition faite par la Défense pour que soient données

 13   sept journées entières pour répondre à la décision rendue par écrit par nos

 14   soins, chose qui ne manquera pas de se faire très bientôt ?

 15   Mme KORNER : [interprétation] Oui. Je crois que ce serait la chose la plus

 16   pratique à faire.

 17   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Est-ce que vous requérez également

 18   les deux semaines supplémentaires pour ce qui est de répondre à la requête

 19   présentée par la Défense ?

 20   Mme KORNER : [interprétation] Non, nous allons répondre très rapidement à

 21   cela, Monsieur le Président. Nous avons demandé juste suffisamment de temps

 22   pour ce qui est de la requête relative aux écoutes, et si nous avons une

 23   certification d'appel nous allons répondre très rapidement. Je crois que

 24   les conséquences pratiques de cette demande d'accélérer ont fait que nous

 25   avons prévu un nombre suffisant de témoins, et lorsque nous avons constaté

 26   que le Juge Delvoie avait travaillé sur le "timing" de nos témoins, nous

 27   les avons entassés entre maintenant et Noël, bien entendu, compte tenu de

 28   tout ce qui accourt en parallèle. Je ne pense pas que nous ayons l'occasion

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  1   d'entendre Mme Hanson avant la pause de Noël, à moins que quelque chose

  2   n'aille mal.

  3   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Alors faites entrer le témoin.

  4   [Le témoin vient à la barre]

  5   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Bonjour, Monsieur Gasi, je vous rappelle

  6   que vous êtes encore sous serment.

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président.

  8   LE TÉMOIN : ISAK GASI [Reprise]

  9   [Le témoin répond par l'interprète]

 10   Interrogatoire principal par M. Demirdjian : [Suite]

 11   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur Gasi.

 12   R.  [aucune interprétation]

 13   Q.  Je voudrais vous faire voir un document.

 14   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Qu'on montre la pièce 320 en application

 15   du 65 ter.

 16   Q.  Monsieur Gasi, il s'agit ici d'un document qu'on vous a montré dans

 17   l'affaire Krajisnik. Il s'agit d'un résumé rédigé par la présidence de

 18   Guerre de la municipalité de Brcko. Il est question du début des conflits,

 19   du plasticage d'un pont, et cetera. Alors, vous n'avez pas vu ce document à

 20   l'époque concernée ? Quand je dis "l'époque concernée" je parle de 1992.

 21   R.  Non.

 22   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Je voudrais demander à l'huissière de nous

 23   montrer la toute dernière page de ce document, celle qui est numérotée, et

 24   j'aimerais qu'on nous montre le bloc où il y a la signature sur ce

 25   document. J'imagine que ça devrait être la page d'avant. Voilà.

 26   Q.  Monsieur Gasi, vous reconnaissez cette signature ?

 27   R.  Oui. Ristanic Djordje.

 28   Q.  Est-ce que vous pouvez rappeler aux Juges de la Chambre qui était

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  1   Djordje Ristanic en 1992 ?

  2   R.  Il était président de la présidence de Guerre de la municipalité de

  3   Brcko, mais c'est quelqu'un que je connais en personne, soit dit en

  4   passant.

  5   Q.  Et seriez-vous en mesure de nous dire si la signature est en caractères

  6   cyrilliques ou latins ?

  7   R.  En caractères cyrilliques.

  8   Q.  Et comment avez-vous connu M. Ristanic ?

  9   R.  On a fait l'école primaire en entier ensemble à Brcko. Plus tard,

 10   lorsque je suis allé à l'école secondaire pour être électricien, Djordje,

 11   lui, a fait des études en orientation technique. C'est quelqu'un que je

 12   connais fort bien et nous avons du reste grandi ensemble.

 13   Q.  Je voudrais que vous vous tourniez vers la page 3 en version B/C/S, et

 14   en anglais il s'agit de la page 2, je me réfère au milieu de la page. Il

 15   est fait référence à des membres des Bérets verts, "Zelene Beretke", comme

 16   on le dit ici. Est-ce que vous pouvez retrouver ce passage sur la page ? Je

 17   crois que c'est le troisième paragraphe en version cyrillique.

 18   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Pouvez-vous descendre un peu, je vous

 19   prie. Non, excusez-moi. Remontez. Ça c'est la page 2. J'ai demandé à ce

 20   qu'on montre la page 3. Je m'excuse. Merci.

 21   Q.  Est-ce que vous voyez ce troisième paragraphe ?

 22   R.  Oui, je le vois.

 23   Q.  Et on parle :

 24   "Des membres des Bérets verts qui placent des barricades dans les secteurs

 25   frontaliers avec les parties serbes de la ville, et en coupant les routes

 26   principales en direction de Loncari, Bosanski Samac et Modrica."

 27   En 1992, est-ce que vous avez eu l'occasion de rouler à bord d'un véhicule

 28   dans Brcko pendant les mois d'avril et mai ?

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  1   R.  Oui, j'ai eu l'occasion de me déplacer sur le territoire entier de la

  2   municipalité de Brcko.

  3   Q.  Et que pouvez-vous nous dire au sujet de ce paragraphe, là il est

  4   question des barrages dressés par les Bérets verts ?

  5   R.  Je n'ai pas vu les barrages dressés par les Bérets verts à l'époque à

  6   Brcko. Pendant le mois entier d'avril et cette partie du mois de mai où

  7   j'étais soit chez moi, soit par la suite au niveau de l'entreprise de

  8   distribution d'électricité à Brcko, je ne les ai pas vus.

  9   Q.  Pour que les Juges de la Chambre comprennent tout ceci, à l'époque où

 10   vous avez travaillé pour le compte de l'entreprise de distribution

 11   d'électricité à Brcko, est-ce que vous pouvez nous dire par où vous êtes

 12   passé ?

 13   R.  Une fois, je suis allé à proximité de cet endroit qui est mentionné ici

 14   dans le rapport, sur la route principale allant de l'hôpital de Brcko vers

 15   Mujkici et Gluhakovac, qui sont des communautés locales. On ne le mentionne

 16   pas ici. Mais c'est la route dans cette direction-là. A l'époque ça pouvait

 17   être, disons, le 11 ou le 12, peut-être même le 13 mai. Mais je n'ai vu

 18   aucun barrage. Il y a eu des maisons endommagées dans cette partie de la

 19   ville et des vitres brisées, des véhicules endommagés sur le bas côté de

 20   cette route principale, mais avoir vu des barrages, non, je n'en ai pas vu.

 21   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] J'aimerais que nous passions à la page 4

 22   de la version B/C/S. Le 4 est en haut de la page. Et en version anglaise il

 23   s'agit de la page 3, paragraphe 3.

 24   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Monsieur Demirdjian, pendant que nous

 25   attendons de voir ceci sur nos écrans, pourriez-vous vérifier avec le

 26   témoin ou lui demander de nous dire si dans son témoignage il affirme qu'il

 27   n'a vu aucune espèce de barrage routier, je crois que votre question était

 28   celle de savoir s'il avait vu des barrages routiers posés par les Bérets

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  1   verts. La question qui reste en suspens c'est celle de savoir s'il y a eu

  2   d'autres barrages routiers qui auraient pu être mis en place par la cellule

  3   de Crise des Serbes ou d'autres barrages routiers encore.

  4   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  5   Q.  Témoin, vous avez entendu la question du Juge Harhoff. Avez-vous le

  6   souvenir d'avoir vu des barrages routiers dans les alentours de Brcko ?

  7   R.  Avant que la guerre ne commence et pendant toute la durée du mois

  8   d'avril, il y avait ces postes de contrôle organisés par la police civile

  9   et par la police militaire de la Garnison de Brcko. Cela ça s'est passé

 10   avant la guerre, pendant tout le mois d'avril. Pendant la guerre - enfin la

 11   guerre qui à partir du 1er mai jusqu'au 13 mai - lorsque je suis allé en

 12   ville, j'ai pu constater qu'il y avait des postes de contrôle mais ils

 13   n'étaient plus de la composition mixte. C'était pour la plupart des cas des

 14   postes de contrôle où il y avait des hommes en uniforme de camouflage qui

 15   appartenaient à la Garnison de Brcko. Il y avait aussi des membres de la

 16   Défense territoriale. C'était probablement des Serbes.

 17   Il y avait aussi d'autres personnes qui faisaient partie du poste de

 18   police de Brcko. Ils étaient présents partout en ville, et où qu'on aille

 19   on tombait sur trois, quatre, cinq personnes qui vérifiaient les papiers

 20   d'identité, qui vous arrêtaient pour demander où est-ce que vous allez, qui

 21   est-ce qui vous a donné l'autorisation d'aller, qu'elle est la raison de

 22   votre déplacement vers cette partie de la ville, et cetera.

 23   Q.  Page 8, ligne 8. Si je ne m'abuse, nous lisons que les hommes qui

 24   tenaient ces postes de contrôle n'appartenaient qu'à un seul groupe

 25   ethnique.

 26   Monsieur le Témoin, pourriez-vous préciser, vous venez de nous dire que

 27   vous avez vu des hommes en uniforme de camouflage, membres de la Défense

 28   territoriale, ou de la police. Est-ce que vous vouliez dire que les postes

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  1   de contrôle étaient tenus par des hommes appartenant à plusieurs groupes

  2   ethniques ou à un seul groupe ethnique ? Peut-être quelque chose s'est-il

  3   perdu dans l'interprétation.

  4   R.  Avant la guerre, au mois d'avril 1992, ceux qui tenaient les postes de

  5   contrôle étaient d'appartenance ethnique mixte, je parle des membres de la

  6   police civile qui se trouvaient là. Quand je dis "mixte", je parle du point

  7   de vue de la composition ethnique. S'il se trouvait là des membres du SUP

  8   de Brcko, ils étaient Croates, Serbes et Musulmans et ils travaillaient aux

  9   côtés des membres de la police militaire venant de la caserne. Au mois de

 10   mai, je n'ai plus vu la même chose au poste de contrôle de Brcko. Ceux qui

 11   les tenaient étaient membres d'un seul groupe ethnique et c'est ce que je

 12   voulais dire lorsque j'ai dit qu'il n'y avait plus de mixité.

 13   Q.  Monsieur Gasi, puis-je vous renvoyer à la page 4, paragraphe 2, depuis

 14   le bas de la page, avant-dernier paragraphe qui correspond à la page 3,

 15   troisième paragraphe.

 16   Est-ce que vous avez eu des discussions avec :

 17   "Dragan Veselic, nommé à la présidence de Guerre et qui était chef du

 18   poste de sécurité publique à peu près au moment où la guerre a commencé,

 19   c'est-à-dire où le poste de sécurité publique a été repris…"

 20   Est-ce que vous voyez ce paragraphe dans le texte ?

 21   R.  Oui.

 22   Q.  Est-ce que vous connaissiez Dragan Veselic ?

 23   R.  Oui.

 24   Q.  Depuis quand le connaissez-vous ?

 25   R.  Je le connaissais déjà quelques années avant la guerre, je crois que

 26   nous avons eu des conversations avec d'autres personnes qui le

 27   connaissaient aussi et je crois même me souvenir que nous avons pris le

 28   café une ou deux fois ensemble dans les cafés de Brcko.

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  1   Q.  Quelle était sa profession avant la guerre ?

  2   R.  Il était professeur de mathématiques et de physique au lycée de Brcko,

  3   le lycée Vaso Pelagic.

  4   Q.  Savez-vous s'il avait bénéficié d'une quelconque formation ou métier de

  5   policier avant la guerre ?

  6   R.  Je ne sais pas, mais je ne crois pas que Veselic était un policier

  7   formé à ce métier.

  8   Q.  Savez-vous si à peu près au moment des élections, ou plutôt après les

  9   élections de 1990, il aurait appartenu à un quelconque parti politique ?

 10   R.  Je crois qu'il était adhérant du SDS, Parti démocratique serbe de

 11   Brcko.

 12   Q.  Si vous poursuivez la lecture de ce paragraphe, vous constaterez qu'on

 13   y lit :

 14   "…après la nomination de Dragan Veselic, on a commencé à recruter de

 15   nouveaux membres au poste de police, et que parmi ces nouveaux membres se

 16   trouvaient des Serbes qui y avaient travaillé par le passé."

 17   Et un peu plus loin, nous lisons :

 18   "Le problème était le même qu'au sein de l'armée. La plupart de ces hommes

 19   n'étaient pas entraînés au métier de policiers, mais il n'y avait pas

 20   d'autres possibilités."

 21   Pouvez-vous commenter ce passage ?

 22   R.  Je ne sais pas pour quelle raison on a recruté au poste de police de

 23   Brcko dans ces conditions. A cette époque-là, ce qui a été fait était de

 24   rappeler les gens qui y travaillaient avant la guerre, je parle de

 25   l'appartenance ethnique en ce moment, on les a rappelés pour qu'ils

 26   continuent à y travailler. Est-ce qu'on leur avait enlevé leur travail

 27   avant ou non, je ne sais pas. Je ne pense pas que quoi que ce soit ait

 28   changé entre la période précédant sa nomination et la période ultérieure à

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  1   sa nomination en tant que chef du SUP. Pour autant que je m'en souvienne et

  2   d'après ce que j'ai pu voir en ville, je n'ai pas vu le moindre changement

  3   avant ou pendant la durée de la guerre.

  4   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Je demanderais que l'on affiche le haut de

  5   la page 5 de la version B/C/S, le haut de la page 5, s'il vous plaît. En

  6   anglais c'est toujours page 3, deuxième et troisième paragraphes avant le

  7   bas de la page. La page qui m'intéresse en anglais comporte le numéro 5 en

  8   haut de la page. La page en B/C/S dont je demande l'affichage est celle qui

  9   suit la page affichée en ce moment, la suivante. Est-ce qu'on voit le

 10   numéro 5 en haut de la page en anglais ? Pourrait-on faire défiler le texte

 11   pour voir le haut de la page ? Voilà, merci.

 12   Q.  Monsieur Gasi, voyez-vous ici un passage où il est question du fait que

 13   la majeure partie des forces serbes était originaire de Semberija, de

 14   Bijeljina en particulier ?

 15   R.  Oui, le je vois.

 16   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Je demanderais que l'on fasse défiler le

 17   texte anglais pour qu'on voie le passage en question.

 18   Q.  Ce paragraphe se poursuite et on peut y lire :

 19   "Ces hommes étaient principalement organisés en deux formations, la Garde

 20   serbe, commandé par Blagojevic et une autre formation."

 21   Est-ce que vous avez eu la possibilité de rencontrer M. Savic en 1992

 22   à Brcko ?

 23   R.  Oui. J'ai eu l'occasion de le rencontrer.

 24   Q.  Pourriez-vous rapidement décrire à l'intention des Juges de la Chambre

 25   dans quelle condition vous avez rencontré M. Mauzer ?

 26   R.  Un jour, alors que j'étais à la société de distribution électrique, cet

 27   homme est arrivé avec deux autres membres de son unité. Ils sont entrés

 28   dans l'entreprise, ils ont discuté avec notre directeur après quoi ils ont

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  1   regroupé tous ceux qui, à cette époque-là, travaillaient à la société de

  2   distribution électrique, et ils nous ont fait nous aligner en deux rangs.

  3   Après quoi nous avons subi une espèce de discours politique de la part de

  4   M. Mauzer. Voilà à quoi se résume ma rencontre avec lui.

  5   Q.  S'est-il adressé à vous ?

  6   R.  Quand nous avons été alignés comme si nous étions à l'armée, les uns

  7   derrière les autres, en rangs, il est passé de l'un à l'autre en demandant

  8   à chacun quel était son nom. Il y avait là six ou sept représentants de la

  9   communauté ethnique serbe et tout le reste était composé de Musulmans. Il y

 10   avait aussi deux Croates. Donc, comme je l'ai dit, ils passaient d'un homme

 11   à l'autre, d'une personne à l'autre en demandant à chacun quel était son

 12   nom. Il est arrivé à ma hauteur, il m'a demandé comment je m'appelais. J'ai

 13   dit que je m'appelais Isak, après quoi il est passé à la personne suivante.

 14   Il ne m'a pas du tout maltraité ni verbalement ni physiquement à ce moment-

 15   là.

 16   Q.  A-t-il dit quelque chose d'autre au groupe tout entier ? Vous nous avez

 17   expliqué qu'il a fait déplacer les Croates et les Musulmans d'un autre côté

 18   de la pièce ?

 19   R.  Un peu plus tard, après qu'il soit passé d'une personne à l'autre, il y

 20   avait parmi nous un collègue qui était serbe et qui est resté à nos côtés

 21   et il a dit que cet homme devait se séparer de nous. Les Serbes devaient

 22   être d'un côté de la pièce et les Musulmans de l'autre. Or, le collègue

 23   serbe était resté à nos côtés. Donc il s'est avancé vers ce collègue serbe

 24   et il lui a demandé quel était son nom. Le collègue a répondu. Après quoi

 25   il a dit, Qu'est-ce que vous faites avec les balija, ici ? Et l'autre lui a

 26   répondu, Eh bien, ce sont mes collègues, ils travaillent avec moi. Alors,

 27   Mauzer lui a une nouvelle fois demandé comment il s'appelait. Mon collègue

 28   a répondu et Mauzer lui a dit, Mais enfin, ton frère s'est fait tuer et ce

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  1   sont ces hommes de la société de distribution électrique qui l'ont tué. Mon

  2   collègue a répondu, Non, ce ne sont pas eux, je reste avec eux. Et voilà le

  3   genre de discussion qui a provoqué les mauvais traitements imposés aux non-

  4   Serbes.

  5   Après quoi il a changé de discours parce qu'il s'est rappelé qui

  6   était le frère de cet électricien, alors il est allé voir le directeur et

  7   s'est adressé plus directement aux membres de la communauté ethnique serbe.

  8   Nous n'avons pas pu entendre ce qui s'est dit et il nous a dit à nous

  9   autres que nous pouvions partir, qu'il n'avait plus besoin de nous. Et

 10   voilà comment tout cela s'est terminé.

 11   M. PANTELIC : [interprétation] Excusez-moi d'interrompre, mais page

 12   12, ligne 18 du compte rendu, il y a une phrase qui commence : 

 13   "Et puis il était question de mauvais traitements infligés aux non-

 14   Serbes."

 15   Je pense que nous avons entendu autre chose que ce qui est écrit au

 16   compte rendu. Pourrait-on demander une précision au témoin.

 17   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] La ligne 13, n'est-ce pas, c'est là qu'il

 18   est question de mauvais traitements.

 19   Q.  Monsieur le Témoin, je ne sais pas si vous voyez cette phrase à

 20   l'écran, en anglais. Elle se lit comme suit :

 21   "…discussion qui a abouti aux mauvais traitements infligés à nous autres

 22   qui n'étions pas Serbes."

 23   Pourriez-vous préciser à notre intention car le conseil de la Défense

 24   semble indiquer que vous avez dit autre chose ?

 25   R.  Des mauvais traitements verbaux, Monsieur Pantelic, cela signifiait

 26   qu'un homme marchait derrière vous, armé d'un Skorpion et qu'il vous

 27   poussait le revolver dans les reins et vous disait à voix très, très haute,

 28   Comment tu t'appelles ? Et ensuite, il ajoutait d'autres mots. Est-ce que

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  1   vous appelez ça des mauvais traitements verbaux ou des mauvais traitements

  2   physiques, je ne sais pas. En tout cas, c'est ce qui se passait. Et puis,

  3   cet homme qui le suivait à l'époque, il portait un fusil mitrailleur et il

  4   a retourné le canon de ce fusil mitrailleur dans la direction du groupe

  5   dont je faisais partie et il a commencé à s'amuser avec les balles du fusil

  6   mitrailleur. Il libérait le magasin et sortait des balles, puis les

  7   remettait devant nous. Voilà le genre de mauvais traitements que nous avons

  8   subis, mais je ne dirais pas que quelqu'un aurait été frappé par Mauzer

  9   avec la crosse de son arme ou que Dusko aurait agi de la même façon. Non,

 10   ils n'ont pas fait cela, mais en tout cas, c'est très désagréable

 11   d'entendre quelqu'un qui est dans votre dos et qui a une arme plantée dans

 12   vos reins, vous appeler "balija" et vous dire d'avancer. Voilà le genre de

 13   mauvais traitements dont je parle. En tout cas, je me sentais très mal à ce

 14   moment-là.

 15     Q.  Monsieur Gasi, pourriez-vous regarder le paragraphe suivant qui

 16   commence par les mots :

 17   "Les premiers qui sont arrivés à Brcko faisaient partie d'un groupe

 18   d'instructeurs du capitaine Dragan."

 19   Vous voyez ce passage ?

 20   R.  Oui.

 21   Q.  Au milieu du paragraphe, on voit une phrase qui se lit comme suit :

 22   "Lorsque la guerre a commencé et pendant les combats, un certain nombre de

 23   membres de ce peloton conjoint d'intervention de la police a admis ces

 24   hommes dans ses rangs, mais l'unité spéciale s'est développée pour

 25   atteindre environ 70 hommes."

 26   Que savez-vous de ce peloton d'intervention de la police ?

 27   R.  Je sais qu'un de mes voisins était membre de la police spéciale en

 28   avril. Son nom était Ranko Cesic et il habitait le même bâtiment que moi.

Page 1789

  1   Il y avait aussi Miso qui faisait partie de cette unité. Je sais que deux

  2   frères qui vivaient dans ce même bâtiment étaient également membres de

  3   cette unité. L'un des frères, qui était mon voisin, se prénommait Predrag,

  4   si je ne me trompe, et il m'a dit lui-même qu'il avait participé à la

  5   libération de Bosanski Samac. Ranko Cesic et Miso Cajevic, que j'ai vus

  6   tous les deux à Banja Luka portaient un uniforme de policier, un uniforme

  7   de couleur bleu clair et ont plus tard été transférés dans cette unité à

  8   partir de leur unité d'origine.

  9   Q.  Ce paragraphe affirme qu'un certain nombre de membres de ces unités

 10   paramilitaires ont rejoint le peloton d'intervention de la police. Que

 11   pourriez-vous nous dire au sujet des rapports existant entre la police et

 12   ces groupes paramilitaires de Brcko aux mois d'avril et mai 1992 ?

 13   R.  Dans la ville en temps que telle, après la destruction du pont sur la

 14   Save, donc durant le mois d'avril, si vous vous promeniez en ville, il y

 15   avait encore pas mal de gens qui se baladaient en ville en avril, et on

 16   voyait des membres de ces unités qui venaient très souvent au SUP de Brcko.

 17   Ils garaient leurs voitures devant le poste de police de Brcko et tout cela

 18   avait pour but de créer ce peloton de police conjoint pour mettre en place

 19   des patrouilles communes et ériger des barrages routiers communs aux

 20   sorties de la ville de Brcko dans les deux directions. C'est ce que j'ai vu

 21   et remarqué à Brcko à l'époque.

 22   Q.  J'aimerais vous soumettre un dernier extrait de ce document qui se

 23   trouve en page 8 de la version B/C/S du texte.

 24   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Le paragraphe du haut. Quand je dis page

 25   8, encore une fois, cela signifie qu'on voit le numéro 8 en haut de cette

 26   page du document. Cela correspond à la page 5 de la version anglaise. Les

 27   paragraphes qui m'intéressent sont les quatrième, cinquième et sixième

 28   paragraphes.

Page 1790

  1   Q.  Vous voyez ce passage, Monsieur Gasi ?

  2   R.  Oui.

  3   Q.  Vous voyez que ce passage commence par les mots : 

  4   "Le résultat des pillages c'est que Brcko est désormais une ville

  5   dévastée."

  6   Est-ce que vous voyez cette première phrase du paragraphe ?

  7   R.  Oui.

  8   Q.  Ensuite, dans ce paragraphe sont abordés les problèmes de vol, de

  9   confiscation de voitures, de pillage de la part de diverses unités

 10   désorganisées. Et la dernière phrase du paragraphe se lit comme suit :

 11   "Des membres de la population locale ont rejoint ces équipes, et la police

 12   a été incapable d'empêcher cela, donc certains membres de la population

 13   locale se sont sans doute joints aux policiers."

 14   Pourriez-vous nous dire quoi que ce soit au sujet des pillages dans la

 15   ville de Brcko ?

 16   R.  Un jour, entre le 1er et le 10 mai, j'étais dans mon appartement,

 17   j'habite dans une rue qui est tout à fait proche de la caserne. Un véhicule

 18   est arrivé équipé de haut-parleurs qui invitaient la population qui se

 19   sentait menacée par les combats à sortir de ses appartements, car elle

 20   pouvait être transportée vers la caserne de la JNA de Brcko. Donc il y a

 21   des gens qui sont sortis, moi, j'ai regardé tout cela depuis les fenêtres

 22   de mon appartement.

 23   Un de mes voisins m'a dit, Ne bouge pas d'ici, ne sors pas de ton

 24   appartement. Et à ce moment-là, un camion militaire est arrivé, ils ont

 25   embarqué tous les gens qui étaient sortis de leurs domiciles et les ont

 26   emmenés. Je suppose qu'ils les ont emmenés à la caserne. Une heure plus

 27   tard, quelques autres camions sont arrivés et ont commencé à emporter des

 28   objets hors des appartements d'où ces personnes étaient sorties. Quelques

Page 1791

  1   jours plus tard encore, ces personnes qui avaient été emmenées à la caserne

  2   sont revenues, elles sont donc rentrées dans leurs domiciles, et c'est ce

  3   que j'ai pu constater à l'époque.

  4   Q.  Les gens qui ont été emmenés, pourriez-vous nous dire si vous savez

  5   quelle était leur appartenance ethnique ?

  6   R.  Les personnes qui résidaient dans ce quartier résidentiel, en face de

  7   chez moi, étaient des Musulmans. La rue s'appelait la rue Blagoje avant la

  8   guerre. Je ne sais pas quel est son nom aujourd'hui, parce que les noms des

  9   rues changent tout le temps.

 10   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Monsieur le Président, je demanderais le

 11   versement au dossier de ce document.

 12   M. CVIJETIC : [interprétation] Monsieur le Président, le témoin n'a pas

 13   reconnu ce document. Il n'est pas l'auteur de ce document. Il ne sait rien

 14   de ce document qu'il n'a jamais vu avant. La seule chose qu'il a reconnue

 15   c'est la signature de l'auteur du document, et rien d'autre. Le Procureur a

 16   fait usage de son droit de lui soumettre divers passages du document qui

 17   traitent des événements de l'époque, mais nous ne pensons pas que ce

 18   document puisse être admis au dossier par le biais de ce témoin. Il y aura

 19   d'autres personnes, d'autres membres de la présidence de Guerre qui seront

 20   entendus en qualité de témoins et qui seront plus compétents pour parler de

 21   ce document. Nous pourrons peut-être même entendre l'auteur du document en

 22   personne. Je vous remercie.

 23   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] J'ajouterais simplement que nous ne savons

 24   pas si l'auteur du document sera cité à la barre, car nous n'avons pas

 25   l'intention de le citer à la barre. J'aimerais simplement souligner que ce

 26   document, du point de vue de sa pertinence, je crois pouvoir dire que le

 27   témoin a confirmé la pertinence de ce document. Il a authentifié la

 28   signature de l'auteur, donc la fiabilité de ce document. Il n'a pas vu ce

Page 1792

  1   document à l'époque, mais il connaît tous les faits qui sont évoqués dans

  2   ce document concernant l'époque en question. Je dirais que ceci relève du

  3   droit discrétionnaire de la Chambre, en vertu de l'article 89(c) du

  4   Règlement.

  5   [La Chambre de première instance se concerte]

  6   M. LE JUGE HALL : [interprétation] L'objection de Me Cvijetic est prise en

  7   note, mais de l'avis des Juges de la Chambre, ce document est admissible,

  8   il est donc admis au dossier et enregistré.

  9   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agira de la pièce 129, Monsieur le

 10   Président.

 11   M. DEMIRDJIAN : [interprétation]

 12   Q.  Monsieur Gasi, vous avez dit dans votre déposition dans l'affaire

 13   Krajisnik, page 429 [comme interprété] du compte rendu de l'affaire

 14   Krajisnik, que vous avez assisté à des meurtres les 6 et 7 mai sur le

 15   marché de la ville; vous rappelez-vous cela ?

 16   R.  Oui, je m'en souviens. Ce n'était pas sur le marché, mais à côté du

 17   marché, dans une rue qui longe le marché.

 18   Q.  Page 424 du compte rendu de l'affaire Krajisnik, vous avez déclaré

 19   avoir vu un policier revêtu d'un uniforme de couleur bleu en train de tirer

 20   sur trois civils, il leur tirait dans la tête. Vous rappelez-vous avoir dit

 21   cela ?

 22   R.  Oui, je m'en souviens.

 23   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Je demanderais que l'on soumette au témoin

 24   le document 65 ter numéro 2163. Je remarquerais à l'intention des Juges de

 25   la Chambre que ce document fait partie des trois documents constituant la

 26   liasse de documents qui relève, dans le cadre de l'audition de ce témoin,

 27   de l'article 92 ter du Règlement.

 28   Q.  Voyez-vous l'image que vous avez à l'écran devant vous, Monsieur Gasi ?

Page 1793

  1   R.  Oui, je la vois.

  2   Q.  Reconnaissez-vous le secteur ?

  3   R.  Oui, oui.

  4   Q.  Quel est le quartier de la ville que l'on voit sur cette image ?

  5   R.  C'est le centre même de la ville.

  6   Q.  Est-ce bien à cet endroit que vous vous trouviez le 6 ou le 7 mai,

  7   lorsque vous avez assisté à ces tirs d'arme à feu ?

  8   R.  Oui, je me trouvais là.

  9   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Je demanderais l'aide de Mme l'Huissière

 10   pour que le témoin puisse placer des annotations sur l'écran.

 11   Q.  Monsieur Gasi, pouvez-vous indiquer aux Juges de la Chambre, à l'aide

 12   du stylet que vous avez à la main, dans quel immeuble vous vous trouviez

 13   lorsque vous avez assisté aux tirs ? Pourriez-vous placer le chiffre 1 à

 14   côté de l'annotation que vous venez d'apposer sur l'écran ?

 15   R.  [Le témoin s'exécute]

 16   Q.  Pourriez-vous indiquer à quel endroit précis vous avez vu le policier

 17   en train de tirer sur les trois civils ?

 18   R.  [Le témoin s'exécute]

 19   Q.  Pouvez-vous inscrire le numéro 2 à côté de cette annotation ?

 20   R.  [Le témoin s'exécute]

 21   Q.  Pouvez-vous nous dire quelle est la distance approximative qui sépare

 22   ce bâtiment de l'endroit où vous vous trouviez lorsque vous avez vu les

 23   tirs ?

 24   R.  30 à 40 mètres, peut-être.

 25   Q.  De cette distance, avez-vous eu la possibilité d'identifier le policier

 26   ?

 27   R.  Non, il était de dos et ensuite il est parti dans une autre rue et je

 28   ne l'ai plus vu.

Page 1794

  1   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Je demanderais l'enregistrement de cet

  2   écran et son versement au dossier.

  3   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Le document est admis et enregistré.

  4   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] En tant que pièce P130, Monsieur le

  5   Président, Messieurs les Juges.

  6   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Je demanderais maintenant que l'on

  7   soumette au témoin la photographie suivante, document 65 ter numéro 2167.

  8   Q.  Vous voyez la photographie, Monsieur Gasi ?

  9   R.  Oui.

 10   Q.  Pouvez-vous nous dire ce que représente cette photo ? Qu'est-ce qu'on

 11   voit sur cette image ?

 12   R.  On peut voir la rue avec ce bâtiment qui se trouve sur le côté gauche

 13   où on voit la façade qui est endommagée. C'est là que tout a eu lieu, je

 14   crois.

 15   Q.  Bien. Est-ce que vous pourriez, s'il vous plaît, apposer une annotation

 16   à l'endroit où vous avez vu les trois civils tués.

 17   R.  [Le témoin s'exécute]

 18   Q.  Pourriez-vous, s'il vous plaît, apposer le chiffre 1.

 19   R.  [Le témoin s'exécute]

 20   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Je voudrais demander maintenant que cette

 21   image soit enregistrée pour le dossier.

 22   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Elle est admise et elle reçoit une cote.

 23   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Devient la pièce P131.

 24   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Je souhaiterais que l'on montre maintenant

 25   au témoin la photographie suivante, à savoir 2164 de la liste 65 ter.

 26   Q.  Voyez-vous la photographie, Monsieur Gasi ?

 27   R.  Oui, je la vois.

 28   Q.  Est-ce que c'est la même rue que celle que nous avons vue précédemment

Page 1795

  1   ?

  2   R.  Oui.

  3   Q.  Le policier que vous avez vu ce jour-là, est-ce qu'il portait un

  4   uniforme analogue à celui que nous voyons avec cette chemise bleue sur la

  5   droite ?

  6   R.  Oui, c'est le même uniforme. C'est le même type d'uniforme.

  7   Q.  Ça ce n'est pas l'homme que vous avez vu, toutefois, juste pour être

  8   bien sûr ?

  9   R.  Non, non, je ne crois pas que ce soit cet homme-là, mais je me rappelle

 10   qu'il avait un brassard sur le bras -- ou il avait un bras bandé comme

 11   celui-ci sur cette image.

 12   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Je demande le versement de ce document.

 13   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Il est admis et il reçoit une cote.

 14   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Ce sera le P132, Monsieur le Président.

 15   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Je voudrais qu'on montre au témoin, s'il

 16   vous plaît, le 2165 de la liste 65 ter.

 17   Q.  Monsieur le Témoin, est-ce que ceci est bien la même rue que celle dont

 18   nous venons de parler ?

 19   R.  Oui.

 20   Q.  Là encore, c'est toujours le même uniforme que celui que portait le

 21   policier que vous avez vu le 7 mai ?

 22   R.  Oui.

 23   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] En fait, nous avons une troisième

 24   photographie dans cette série, peut-être qu'on pourrait en faire un seul

 25   document avec les intercalaires 1, 2 et 3. Pourrait-on voir la photographie

 26   suivante qui est la 2166 de la liste 65 ter, s'il vous plaît.

 27   Q.  Là encore, c'est bien la même rue, Monsieur Gasi ?

 28   R.  Oui.

Page 1796

  1   Q.  Alors, lorsque vous étiez à Brcko pendant le mois de mai, cet uniforme,

  2   c'était un uniforme que vous voyiez régulièrement ?

  3   R.  C'est un uniforme de policier, un uniforme d'avant-guerre comme ceux --

  4   L'INTERPRÈTE : Correction de l'interprète : les policiers portaient ces

  5   uniformes-là avant la guerre et, je crois, pendant la guerre aussi.

  6   M. DEMIRDJIAN : [interprétation]

  7   Q.  Et ces trois photos que nous venons de vous montrer, est-ce que vous

  8   sauriez qui les a prises, ces photos ?

  9   R.  Oui.

 10   Q.  Pouvez-vous nous dire qui était cette personne ?

 11   R.  C'était Bojan Stojanovic, qui était un reporter-photo de Belgrade.

 12   Q.  Et comment savez-vous que c'est lui qui a pris précisément ces

 13   photographies ?

 14   R.  En juillet 1992, alors que j'étais à Belgrade, Rade Bosic l'a emmené

 15   voir cet ami et il est venu avec un dossier qui était plein de

 16   photographies qu'il avait prises pendant la guerre à Brcko.

 17   Q.  Et il vous a montré ces photos ?

 18   R.  Oui. Et il en a montré d'autres aussi.

 19   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Je voudrais demander que cette dernière

 20   photographie soit admise au dossier.

 21   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Oui. Ces photographies sont donc

 22   admisses au dossier et reçoivent une cote dans les numéros qui se suivent,

 23   et non pas comme un groupe, pour certaines raisons administratives.

 24   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Très bien, Monsieur le Président.

 25   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agit de la pièce P133 et P134,

 26   Monsieur le Président.

 27   M. DEMIRDJIAN : [interprétation]

 28   Q.  Monsieur Gasi, vous avez dit aux membres de la Chambre que dans

Page 1797

  1   l'affaire Krajisnik, pendant le mois de mai, on vous avait demandé de

  2   travailler pour Elektro Brcko; est-ce exact ?

  3   R.  Oui.

  4   Q.  Et vous avez dû rester dans le bâtiment, l'immeuble de l'Elektro Brcko,

  5   et prendre vos repas et dormir, vous y restiez 24 heures sur 24 ?

  6   R.  C'est exact.

  7   Q.  Une fois vous avez dit aux membres de la Chambre, et ceci se trouve à

  8   la page 435 et 436 du compte rendu du procès Krajisnik, que vous avez dû

  9   travailler sur un poteau de transformateur ?

 10   R.  Pour être précis, nous parlons de pylônes à haute tension.

 11   Q.  Et est-il exact que vous avez dû monter en haut de ce pylône ?

 12   R.  Oui, c'est exact. Nous sommes montés.

 13   Q.  Approximativement quelle hauteur, ce pylône ?

 14   R.  Quelque 20 mètres environ.

 15   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Je voudrais demander à l'huissière de

 16   présenter à l'écran le 2170 de la liste 65 ter.

 17   Q.  Monsieur Gasi, est-ce que vous reconnaissez cette photographie ?

 18   R.  Oui.

 19   Q.  Pouvez-vous nous dire ce qu'elle représente ?

 20   R.  Je sais exactement où se trouve cet endroit. Tout près de cet endroit,

 21   nous avons dû nous occuper de ces pylônes à haute tension.

 22   Q.  Et à partir de ce pylône à haute tension dans lequel vous étiez monté,

 23   est-ce que vous avez pu voir cette fosse, cette tombe ?

 24   R.  Non, pas celle-ci. J'en ai vu une autre.

 25   Q.  Et cette tombe ou cette fosse elle-même, où se trouvait-elle par

 26   rapport au pylône que vous avez dû escalader ?

 27   R.  En gros, ça se trouvait entre 150 à 200 mètres du pylône sur lequel je

 28   me trouvais. Je veux dire cette fosse-ci que nous regardons maintenant.

Page 1798

  1   Q.  Et la fosse que vous pouviez voir depuis le pylône, comment se

  2   présente-t-elle par rapport à l'image que vous avez sous les yeux ?

  3   R.  Celle-ci aurait été derrière mon dos si j'avais été sur le pylône. J'y

  4   tournais le dos. Et l'autre que j'ai mentionnée serait devant moi. Je

  5   ferais face à l'autre. Quant à celle-ci, elle serait dans mon dos, à moins

  6   que j'aie perdu le sens de l'orientation à cause du temps qui s'est écoulé.

  7   Et oui, je pense effectivement que celle-ci est celle que j'aurais eue

  8   derrière moi tandis que l'autre était devant.

  9   Q.  Et dans le coin droit en haut de la photo, on voit un peu un camion

 10   partiellement. Vous voyez cela ?

 11   R.  Oui.

 12   Q.  Est-ce que vous reconnaissez ce camion ?

 13   R.  Oui, je le reconnais. Ce camion prenait la grand-route qui passait près

 14   de l'Elektrodistribucija où nous nous trouvions.

 15   Q.  Est-il exact que dans l'affaire Krajisnik vous avez déclaré que vous

 16   aviez vu ce camion faire la navette lorsque vous travaillez à l'Elektro

 17   Brcko ?

 18   R.  Oui, c'est exact. Probablement, il passait dans un sens le matin et

 19   revenait plus tard, mais il y a eu certains jours où il allait dans les

 20   deux sens deux fois par jour.

 21   Q.  Et parfois, est-ce que vous avez reconnu le conducteur ?

 22   R.  Oui, je crois. Je crois que j'ai vu un homme que je connaissais d'avant

 23   la guerre. Je crois l'avoir vu deux fois. Il travaillait au poste de police

 24   de Brcko.

 25   Q.  Pourriez-vous dire aux Juges de la Chambre quel était son nom ?

 26   R.  Mika Marinkovic.

 27   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Je voudrais demander le versement de cette

 28   photo au dossier, s'il vous plaît.

Page 1799

  1   [La Chambre de première instance se concerte]

  2   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Oui, cette photo est donc admise au

  3   dossier et reçoit une cote.

  4   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Ce sera donc la pièce P135, Monsieur le

  5   Président. 

  6   M. DEMIRDJIAN : [interprétation]

  7   Q.  Monsieur Gasi, vous nous avez mentionné que dans l'affaire Krajisnik en

  8   page 440, vous aviez travaillé à l'Elektro Brcko entre le 10 et le 27 mai

  9   1992, et vous dites également que vous avez été arrêté le 27 mai sur votre

 10   lieu de travail. Vous vous rappelez cela ?

 11   R.  Oui.

 12   Q.  Pourriez-vous dire aux Juges qui vous a arrêté ce jour-là ?

 13   R.  Il y avait deux policiers. L'un était un policier de carrière. Il

 14   appartenait à la police avant la guerre à Brcko. Quant à l'autre, c'était

 15   un policier de réserve avant la guerre, probablement que pendant la guerre

 16   il a été activé au sein de la police.

 17   Q.  Et quels étaient leurs noms ?

 18   R.  Celui qui était de carrière était Dragan Pantelic et l'autre était

 19   Stevo Knezevic.

 20   Q.  Et lorsque vous avez été arrêté, est-ce qu'on vous a donné des raisons

 21   pour lesquelles vous étiez arrêté ?

 22   R.  Non, ils ne m'ont donné aucun motif, mais quand ils sont arrivés à la

 23   grille d'entrée, là où se trouvent les bureaux où l'électricien de service

 24   doit se trouver, il n'y avait que le directeur de la compagnie. Ristic

 25   était là aussi. Ils se sont d'abord approché de lui, lui ont parlé et ont

 26   demandé si j'étais là, et ils ont confirmé que je me trouvais dans

 27   l'entrepôt à une vingtaine de mètres de ce bureau. Je suis allé là, et le

 28   directeur m'a dit, La police est ici et c'est pour toi qu'elle est venue.

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  1   Ensuite, avant qu'ils ne m'emmènent dans ce véhicule, le directeur leur a

  2   demandé, Où est-ce que vous l'emmenez et pourquoi ? Et je crois que Stevo,

  3   et probablement Dragan a dit, Si quelqu'un demande après lui, dites-leur

  4   simplement que la police serbe l'a emmené. Et c'était tout. Ils m'ont fait

  5   monter dans le véhicule et m'ont emmené au poste de police de Brcko.

  6   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Est-ce que l'on pourrait montrer

  7   maintenant au témoin le 2161 de la liste 65 ter.

  8   Q.  Monsieur Gasi, est-ce que vous voyez la photo sur votre écran ?

  9   R.  Oui.

 10   Q.  Est-ce que vous reconnaissez cet immeuble, oui ?

 11   R.  Bien, c'est le poste de police de Brcko.

 12   Q.  Et est-ce que c'est là que MM. Pantelic et Knezevic vous ont amené le

 13   21 [comme interprété] mai ?

 14   R.  Oui, c'est exact.

 15   Q.  On vous a fait entrer à l'intérieur du poste de police, on vous a amené

 16   là ?

 17   R.  Oui. Comme vous voyez, ceci était l'entrée principale et nous sommes

 18   entrés à l'endroit où il y a, sur la droite, une table de réception. Ils

 19   m'ont fait entrer dans une pièce. Ils l'appelaient la pièce numéro 13. En

 20   fait, ils m'ont précipité dedans, ils m'ont poussé dedans. C'est sur le

 21   côté droit par rapport à ce qu'on voit ici.

 22   Q.  Lorsque vous êtes entré au poste de police et vous avez vu la

 23   réception, est-ce que vous avez vu un policier ?

 24   R.  Oui. Ils étaient peut-être six ou sept policiers portant des uniformes

 25   de police habituels au bureau de réception, et dans cette partie plus large

 26   de l'entrée, j'ai vu également des gens qui étaient en civil et des membres

 27   de la police régulière.

 28   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Monsieur le Président, est-ce que je

Page 1801

  1   pourrais demander que ce document soit versé au dossier.

  2   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Il est admis et il reçoit une cote.

  3   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] C'est le P136.

  4   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Et si le témoin pourrait maintenant voir

  5   le 2162 de la liste 65 ter.

  6   Q.  Voyez-vous cette image sur votre écran ?

  7   R.  Oui.

  8   Q.  Qu'est-ce qu'on voit là ?

  9   R.  C'est une photographie de cette pièce numéro 13, comme il l'appelait,

 10   où je me trouvais.

 11   Q.  Et c'était comme ça qu'elle se présentait en 1992 ? Ça avait cette

 12   apparence-là ?

 13   R.  Je crois que oui. Oui.

 14   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Je voudrais demander le versement au

 15   dossier.

 16   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Oui, elle est admise et reçoit une cote.

 17   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] C'est la P137.

 18   M. DEMIRDJIAN : [interprétation]

 19   Q.  Et pendant combien de temps est-ce que vous avez été détenu dans cette

 20   pièce, Monsieur Gasi ?

 21   R.  Pas plus de -- en fait, moins d'une heure.

 22   Q.  Serait-il juste de dire qu'au bout d'une heure, on vous a emmené à un

 23   autre centre de détention ?

 24   R.  Oui.

 25   Q.  Est-il juste de dire que c'était le camp de Luka ?

 26   R.  Oui.

 27   Q.  Dans l'affaire Krajisnik, vous avez parlé de votre détention au camp de

 28   Luka. Ceci est à la page 443 du compte rendu. 

Page 1802

  1   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Et pourrait-on montrer, s'il vous plaît,

  2   au témoin la photographie suivante, qui est la 2156 de la liste 65 ter.

  3   Q.  Reconnaissez-vous cette image ?

  4   R.  Oui.

  5   Q.  Avant que nous revenions au camp de Luka, pourriez-vous rapidement nous

  6   dire, si vous le savez, quelle est la distance entre le poste de police et

  7   le camp de Luka, approximativement, si vous le savez ?

  8   R.  Entre 300 et 400 mètres.

  9   Q.  Lorsque vous êtes arrivé au camp de Luka, vous nous avez dit dans

 10   l'affaire Krajisnik, à la page 445 du compte rendu, qu'un homme nommé Pudic

 11   vous avait frappé. Pourriez-vous nous décrire ce qui s'est passé, cet

 12   incident ?

 13   R.  Il m'attendait devant le premier des bureaux qui était là, où

 14   commencent les hangars. Il s'y trouvait d'avance et lorsque je suis sorti

 15   du véhicule, il a immédiatement commencé à crier et à poser des questions

 16   concernant les barricades des Musulmans. Il a mentionné des noms de

 17   familles tels que Islamovic et Jaskovic, et je n'avais jamais entendu

 18   parler de ces gens avant et j'ai répondu, De quoi est-ce que vous parlez là

 19   ? Il a pris son pistolet et il a commencé à me pousser et m'a frappé sur la

 20   nuque en m'entraînant dans un couloir où se trouvait le bureau.

 21   Q.  Avec l'aide de l'huissière, serait-il possible d'apposer des mentions

 22   sur cette image, si vous pouvez nous montrer où M. Pudic se trouvait au

 23   moment où vous êtes entré au camp de Luka.

 24   R.  [Le témoin s'exécute]

 25   Q.  Pourriez-vous, s'il vous plaît, apposer le chiffre 1.

 26   R.  [Le témoin s'exécute]

 27   Q.  Deuxièmement, pourriez-vous nous indiquer dans quel bureau il vous a

 28   poussé ?

Page 1803

  1   R.  C'était exactement ici, au même endroit dans ce bâtiment.

  2   Q.  Pouvez-vous nous dire quel était le prénom de M. Pudic ?

  3   R.  Je crois que c'était Branko.

  4   Q.  Est-ce que vous connaissiez déjà M. Pudic avant la guerre ?

  5   R.  Je ne le connaissais pas personnellement. Je le connaissais seulement

  6   de vue, mais je savais qu'il était policier à Brcko. Il vivait également

  7   dans le même quartier de la ville que mes beaux-parents, donc je le voyais,

  8   je savais qu'il était policier et c'est tout.

  9   Q.  Vous rappelez-vous ce qu'il portait ce jour-là ?

 10   R.  Un uniforme de police régulier, comme tout policier normal.

 11   Q.  Combien de temps avez-vous passé dans ce bureau avec M. Pudic ?

 12   R.  Entre le moment où je suis entré dans la pièce, toute la conversation a

 13   duré environ 30 ou 40 minutes, c'est tout.

 14   Q.  Et que s'est-il passé après ces 30 ou 40 minutes ?

 15   R.  Lorsque je suis entré dans le bureau, il y avait quatre autres hommes.

 16   Il y en avait un qui était sur la droite avec une grosse barbe. Il portait

 17   une cocarde, et il y en avait un qui portait un uniforme de la JNA, et un

 18   qui portait également une lance à incendie. L'un d'entre eux portait un

 19   uniforme de camouflage, et au centre de ce bureau, il y avait une table à

 20   laquelle deux personnes étaient assises, se faisant face. Je connaissais

 21   l'un des deux. Quant à l'autre, je ne l'avais jamais vu.

 22   Celui qui était à droite de la table portait un vieil uniforme de

 23   réserviste de la JNA avec le grade de sous-lieutenant. Et lorsqu'ils m'ont

 24   poussé à l'intérieur, j'ai dit bonjour. Et l'homme à barbe a sauté sur ses

 25   pieds et a dit, qu'est-ce que c'est que ce bonjour ? Ne sais-tu pas comment

 26   les frères serbes se saluent ? Et j'ai dit [mot en B/C/S] et il a répondu,

 27   tu vois, il sait. Et ils disaient, était-ce l'un de ceux qui, au Kosovo,

 28   était engagé dans des activités de contre-révolution. Et dans ce bureau il

Page 1804

  1   y avait un autre de mes amis, un Serbe de Brcko qui était capitaine

  2   d'active dans la JNA et qui a dit, arrête ça, je connais cet homme, c'est

  3   un bon sportif. Il a commencé à parler de mes succès en sport.

  4   La situation a changé quelque peu et le sous-lieutenant dont j'ai parlé a

  5   dit à Pudic, allez, emmène-le au hangar et on va voir ce qu'on va en faire.

  6   Q.  Où avez-vous été emmené ensuite dans le hangar ?

  7   R.  Oui, oui.

  8   Q.  Pourriez-vous indiquer par une marque sur cette image à quel endroit ça

  9   se trouvait ?

 10   R.  [Le témoin s'exécute]

 11   Q.  Pourriez-vous, s'il vous plaît, mettre le chiffre 2 à cet endroit-là.

 12   R.  [Le témoin s'exécute]

 13   Q.  C'est l'endroit où vous avez donc été détenu ce jour-là ?

 14   R.  Pudic m'a fait entrer là et sur la droite de l'endroit où nous sommes

 15   entrés dans le hangar, il y avait une chaise et tout le hangar était vide.

 16   Il a dit, tu vois cette chaise ? Assieds-toi dessus et ne bouge pas, ne

 17   regarde pas alentour. Je vais revenir et on va voir à ce moment-là ce qui

 18   va se passer. Et après environ 20 minutes, Pudic est revenu et il m'a dit,

 19   maintenant va dans l'autre partie du hangar qui est séparée de ce numéro 2

 20   ou plus exactement, qui est relié à la grande barrière. Je regardais à

 21   gauche et à droite, et il y avait là des gens qui gisaient sur le sol en

 22   ciment. Et il m'a dit, trouve-toi une place. Et c'est comme ça que j'y suis

 23   entré.

 24   Q.  Vous nous avez dit dans l'affaire Krajisnik, à la page 460, que ce

 25   jour-là --

 26   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Conseil, à un moment donné, il serait

 27   peut-être bon de suspendre l'audience.

 28   L'INTERPRÈTE : Microphone pour le Juge Président, s'il vous plait.

Page 1805

  1   M. LE JUGE HALL : [interprétation] A quel moment pensez-vous en avoir fini

  2   avec cette photographie ? Il semble que vous avez l'intention de continuer.

  3   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Nous pouvons continuer avec cette

  4   photographie et je pourrais poser les questions suivantes après la

  5   suspension de séance.

  6   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Ceci est admis et reçoit une cote.

  7   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Ce sera donc la pièce P138.

  8   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Je suspends l'audience pour 20 minutes.

  9   [Le témoin quitte la barre]

 10   --- L'audience est suspendue à 10 heures 27.

 11   --- L'audience est reprise à 10 heures 59.   

 12   M. LE JUGE HALL : [interprétation] En attendant que le témoin n'entre

 13   dans le prétoire, il y a une petite question en matière de procédure qu'il

 14   convient d'évoquer. Nous avons été informés du fait que le compte rendu est

 15   peu clair en quelque sorte pour ce qui est de la décision adoptée par la

 16   Chambre concernant le témoin Hanson. Comme nous l'avons déjà indiqué, la

 17   décision écrite sera disponible, de notre avis, demain. Et ensuite, les

 18   choses iront dans l'ordre habituel. Bien qu'il nous semble avoir accepté de

 19   façon implicite la demande faite par la Défense pour ce qui est du report

 20   de son témoignage, comme je l'ai dit, lorsque nous aurons rendu notre

 21   décision demain, on entendra les parties au procès et les choses suivront

 22   leur cours. Il est clair que cette dame ne viendra pas témoigner cette

 23   semaine-ci du fait de tout ce qui a été dit.

 24   [Le témoin vient à la barre]

 25   M. DEMIRDJIAN : [interprétation]

 26   Q.  Monsieur Gasi, avant la pause, nous nous sommes entretenus au sujet de

 27   la période où vous avez été emmené au camp de Luka. Et vous nous avez dit

 28   que M. Branko Pudic vous a frappé. Est-ce que dans le courant de cette

Page 1806

  1   journée-là vous auriez eu des contacts avec un certain Ivan ?

  2   R.  Oui.

  3   Q.  A la page 468, dans le témoignage dans l'affaire Krajisnik, vous avez

  4   dit qu'il portait les insignes des hommes d'Arkan ?

  5   R.  Oui.

  6   Q.  Pouvez-vous brièvement décrire l'incident en question à l'intention des

  7   Juges de la Chambre ?

  8   R.  Ivan est venu dans ce hangar en compagnie de deux hommes puis il s'est

  9   campé devant, en plein milieu du hangar. Et il a demandé à voix haute, Où

 10   est le Siptar qui est arrivé aujourd'hui ? Je n'ai pas levé la main tout de

 11   suite. En face de moi il y avait des gens du Kosovo d'origine albanaise qui

 12   étaient là. Je n'ai pas levé la main.

 13   Il a dit, Je vais répéter : où est le Siptar, le sportif qui est

 14   arrivé aujourd'hui ? Alors je me suis levé, et il m'a dit, Rapproche-toi de

 15   moi. Je me suis approché à 2 ou 3 mètres, puis il m'a dit, Plus près. Et il

 16   m'a demandé, A quel groupe ethnique appartiens-tu ? Je suis Yougoslave, ai-

 17   je répondu. A ce moment-là, il m'a pris le bras droit derrière le dos et il

 18   m'a dit, Nique ta mère, quel Yougoslave ? Et il m'a frappé. Lorsqu'il m'a

 19   frappé la deuxième fois je suis tombé à terre. Ensuite il a commencé à me

 20   donner des coups de pied, et j'ai été relevé par l'un des deux qui était en

 21   sa compagnie, il m'a pris par mon pull il m'a levé. Ivan a sorti son

 22   pistolet il me l'a mis dans la bouche. Il voulait probablement tirer mais

 23   il n'y avait pas de balle dans le canon, et il a dit, Tu en as de la

 24   chance, la prochaine fois j'aurai une balle pour toi.

 25   Il m'a relâché et je suis retombé, je ne pouvais plus bouger pendant

 26   un certain temps. Voilà.

 27   Q.  Quel est l'instrument qu'il a utilisé pour vous frapper ?

 28   R.  C'est une clé métallique. Les sapeurs-pompiers s'en servent pour serrer

Page 1807

  1   et desserrer les joints de tuyaux d'arrosage lorsqu'il y a incendie.

  2   Q.  Après cet incident, Monsieur Gasi, est-ce que vous avez été battu

  3   ultérieurement pendant que vous étiez au camp de Luka ? Parce que vous avez

  4   dit que vous êtes resté du 27 mai au 7 juin.

  5   R.  Ils ne m'ont pas battu. On m'a fait sortir une fois, un dénommé Kosta

  6   m'a convié dans son bureau pour un entretien. On m'a attaché à une chaise

  7   et Goran a commencé à faire une espèce de "show" avec son couteau, il a

  8   jeté son couteau vers moi à gauche et à droite, et il a dit, Je ne vais pas

  9   t'estropier au pistolet, je vais t'estropier au couteau. Il a dit qu'il

 10   allait me couper les jambes, puis il a dit la tête. Ensuite ce dénommé

 11   Goran a dit qu'il n'allait rien faire le soir même. On m'a fait sortir.

 12   Q.  Vous avez mentionné un dénommé Kosta, qui c'est ce Kosta ?

 13   R.  C'est un Serbe du cru de Brcko. Avant la guerre, je crois qu'il était

 14   peintre. Pendant la guerre, il portait cet uniforme de la police et il

 15   était le jour d'après là-bas lorsqu'on m'a accueilli. Je l'ai vu ce

 16   lendemain, tout de suite. Il s'était présenté lui-même comme étant le

 17   commandant adjoint de ce camp, cette prison d'instruction. Il portait un

 18   uniforme de la police. Il s'appelait Konstantin Simeunovic. Nous, à Brcko

 19   on l'appelait Kole, c'était son surnom.

 20   Q.  La deuxième personne que vous avez mentionnée était Goran, comment

 21   s'appelait-il ?

 22   R.  Goran Jelisic. Lui, il avait pour surnom Adolf, c'est ainsi qu'il se

 23   présentait quand il venait au hangar. Il est venu deux fois avant

 24   l'incident déjà raconté, il portait un uniforme de camouflage les deux

 25   fois. Et cette fois, à la tombée de la nuit, je pense qu'il portait une

 26   chemise bleue. Et je ne sais plus si c'était des manches courtes ou manches

 27   longues, mais c'était un uniforme de police et il y avait une petite étoile

 28   dessus, donc c'était un inspecteur de la police. C'est tout ce dont je puis

Page 1808

  1   me souvenir à présent.

  2   Q.  Monsieur Gasi, vous nous avez parlé de Goran Jelisic --

  3   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Et je précise à l'attention des Juges de

  4   la Chambre que Goran Jelisic était l'un des accusés qui a été déclaré

  5   coupable et condamné à une peine de prison il y a quelques années par ce

  6   Tribunal-ci.

  7   Q.  Dites-nous ce qu'il a fait avec son couteau ce Goran Jelisic ? Ce n'est

  8   pas tout à fait clair.

  9   R.  Lorsque Kosta m'a fait entrer, il a dit, C'est bien celui qui fait le

 10   malin, parce que Kosta m'avait posé des questions au sujet de noms

 11   d'extrémistes musulmans. J'avais très mal au ventre, j'avais une diarrhée

 12   terrible, et il m'a dit qu'il allait me donner plein de comprimés si je lui

 13   donnais plein de noms d'extrémistes musulmans. Je lui ai dit, Je te

 14   donnerai une dizaine de noms. Il m'a dit, Comment ? Je lui ai dit, c'est

 15   facile, et je lui ai mis la liste du conseil exécutif du SDA dans la ville,

 16   c'était des gens qui avaient fui Brcko. Il a dit, mais chapeau bas, puis il

 17   m'a donné ces comprimés.

 18   Il s'est passé un jour ou deux par la suite, et puis il est venu en début

 19   de soirée pour interroger. Et une fois emmené, il a dit, C'est celui qui

 20   joue au malin ? Et l'autre a dit, Oui, et puis on m'a mis des menottes, il

 21   m'a mis à la chaise. Il m'a dit qu'il n'allait pas m'estropier avec un

 22   pistolet mais qu'il allait me découper au couteau, et qu'il allait me

 23   couper les pieds et les mains. Ensuite, il a dit à Kosta de m'emmener

 24   dehors et il m'a entaillé un peu sur le côté gauche à deux ou trois

 25   reprises. Mais ensuite il m'a fait sortir et il a dit qu'ils m'achèveraient

 26   plus tard.

 27   Q.  Lorsque Kosta vous a interrogé au sujet de ces noms, est-ce qu'il était

 28   tout seul ou est-ce qu'il y avait quelqu'un d'autre lorsque vous vous êtes

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  1   entretenus, au moment où il a promis qu'il allait vous donner des comprimés

  2   ?

  3   R.  Il y avait un homme, ça s'est passé lorsqu'on a dit que, par exemple,

  4   on nous laissait sortir pour les toilettes. Il y avait là une salle de

  5   bain. Il y avait là aussi leurs bureaux, dans l'autre aile du bâtiment.

  6   Kosta m'a vu sortir lorsque j'avais eu des problèmes d'estomac, et c'est

  7   ainsi que le dialogue a commencé.

  8   Probablement, y avait-il des gens dans ces bureaux à côté qui étaient

  9   là, assis, à entendre.

 10   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Monsieur Gasi, nous vous demanderions de

 11   ralentir quelque peu, s'il vous plaît. Merci.

 12   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Oui, c'est pour que les interprètes

 13   puissent vous suivre.

 14   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Merci.

 15   M. DEMIRDJIAN : [interprétation]

 16   Q.  Monsieur Gasi, est-ce qu'à un moment donné vous avez été interrogé au

 17   camp de Luka ?

 18   R.  Oui, le deuxième jour, pour être tout à fait précis.

 19   Q.  Pouvez-vous dire aux Juges de la Chambre qui est-ce qui vous avait

 20   interrogé ?

 21   R.  Petar Kaurinovic m'a posé des questions, et à côté de lui il y avait

 22   Zoran Kontic et il y avait Pero Zaric. Je connais les trois. Petar

 23   Kaurinovic travaillait avant la guerre dans la police de Brcko. Il était

 24   inspecteur en matière de criminalité. Zoran Kontic était un technicien en

 25   médecine légiste. C'est lui qui prenait les photos de constat des lieux. Et

 26   Pero Zaric était un sportif que je connaissais, mais qui ne faisait pas

 27   partie des rangs de la police avant la guerre.

 28   Q.  Et que portait Petar Kaurinovic ce jour, lorsqu'il vous interrogeait ?

Page 1810

  1   R.  Il était en civil. Pero Zaric et Zoran Kontic portaient des uniformes

  2   de camouflage.

  3   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Est-ce qu'on peut montrer sur nos écrans

  4   le document 2123 en application du 65 ter.

  5   Q.  Je me propose de vous montrer, Monsieur, une liste de noms de personnes

  6   qui étaient employées au poste de police à Brcko. La date est celle de

  7   septembre 1992.

  8   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Messieurs les Juges, c'est le seul

  9   document de la SJB de Brcko que nous avons en notre possession.

 10   Q.  En page numéro 1, on voit qu'il s'agit d'un document daté du 7 octobre

 11   1992. Alors est-il exact de dire que vous n'avez pas vu ce document avant

 12   que de venir ici il y a quelques jours ?

 13   R.  Ça, vous me l'avez montré pour la première fois dans votre bureau.

 14   Q.  Est-ce qu'on peut se pencher sur le tout premier nom de la liste.

 15   R.  Cosic, Zarko. Oui, je le connais aussi. On est allé à l'école ensemble,

 16   école primaire aussi et une partie de l'école secondaire.

 17   Q.  Alors, sur la liste, on dit qu'il est chef. Et au début de votre

 18   témoignage, vous avez dit que Dragan Veselic, à un moment donné, a été

 19   chef. Alors qu'est-il advenu de Dragan Veselic en question ?

 20   R.  Plus tard, lorsque j'ai été libéré de Luka, entre juin et août, j'étais

 21   à Belgrade avec ma femme et je rencontrais beaucoup de Musulmans de Bosnie

 22   et des Serbes de là-bas, à Belgrade. Il y avait un endroit où on se

 23   réunissait, nous qui étions originaires de Brcko, et j'ai appris que

 24   Veselic avait eu un accident de la circulation routière en Vojvodine, non

 25   loin de Novi Sad. C'est ce que j'ai appris de la bouche des Serbes de Brcko

 26   et des Musulmans de Brcko aussi.

 27   Q.  Et l'individu au numéro 7, est-ce que vous pouvez nous donner son nom ?

 28   R.  Kaurinovic, Petar, surnommé Pero.

Page 1811

  1   Q.  Est-ce que c'est le Petar Kaurinovic qui vous a interrogé au camp de

  2   Luka ?

  3   R.  Oui, oui.

  4   Q.  Et dans cette première partie de la page, est-ce que vous reconnaissez

  5   d'autres noms ?

  6   R.  Oui, la plupart de ces gens, je les connais. Le numéro 4, Gavrilovic

  7   Peter; Dragica Tesic. Vasiljevic Stojan, c'est un voisin; Stevic Peter

  8   aussi, je l'ai connu avant la guerre; Ivic [phon] Cvetko, je le connais;

  9   Knezevic Ljubisa aussi. Stevo Knezevic, c'est celui qui m'a arrêté. C'est

 10   le cousin de Milan Kosimikic, que je connais aussi d'ailleurs, et bon

 11   nombre. Sojka Pajic aussi. Elle travaille encore au SUP de Brcko. Elle

 12   travaille à la délivrance des cartes d'identité. Kisic Branko aussi je le

 13   connais.

 14   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Est-ce qu'on peut nous montrer la page 5,

 15   s'il vous plaît. Est-ce que vous pouvez faire défiler un peu. Voilà. Merci.

 16   Q.  Est-ce que vous voyez le numéro 217 ?

 17   R.  Oui, Pudic Branko.

 18   Q.  Vous l'avez mentionné, ce Pudic Branko, qui était un policier que vous

 19   aviez vu le premier jour lorsque vous êtes revenu, n'est-ce pas ?

 20   R.  Oui, oui, je crois bien. C'est cela.

 21   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Est-ce que vous pouvez descendre encore un

 22   peu le texte, encore un peu.

 23   Q.  Alors est-ce que vous voyez le 252 ?

 24   R.  Oui, Simonovic Konstantin, surnommé Kole, oui.

 25   Q.  Est-ce que c'est l'homme qui s'est présenté comme étant le commandant

 26   du camp de Luka ?

 27   R.  Oui, je crois bien que oui.

 28   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Montrez-nous la page d'après, s'il vous

Page 1812

  1   plaît, la page 6.

  2   Q.  Est-ce que vous voyez, Monsieur, le 297 ?

  3   R.  Oui, Zivkovic Dragan, on l'appelait Travolta. Lui aussi était policier

  4   d'active à Brcko avant la guerre.

  5   Q.  L'avez-vous vu pendant le mois 1992 ?

  6   R.  Oui, une fois avant que d'être arrêté, je l'ai vu, il est arrivé dans

  7   nos bureaux à l'Elektro Brcko. Il était en compagnie de Miso Cajevic. Tous

  8   deux portaient des uniformes de camouflage. Ils s'étaient chargés de

  9   s'entretenir à titre d'information avec chaque employé individuellement. Et

 10   ça a eu lieu avant que je ne sois arrêté et emmené. Donc c'était deux ou

 11   trois jours avant que je ne sois amené à Luka, et j'ai vu ce Dragan

 12   Zivkovic et ce Miso Cajevic dans nos bureaux, à Elektrodistribucija.

 13   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Pouvons-nous descendre un peu.

 14   Q.  Maintenant, je vous prie de nous dire si vous voyez le 312 ?

 15   R.  Oui, Marinkovic Milomir. Je pense que c'est Mika. Je crois bien que

 16   c'est lui.

 17   Q.  Pour vous rafraîchir la mémoire, qui était Mika Marinkovic ?

 18   R.  Avant la guerre, il travaillait au SUP de Brcko à la délivrance des

 19   permis de conduire. Il était secrétaire. Et pendant la guerre, je l'ai vu

 20   dans le véhicule de cette compagnie Bimeks qui passait à côté de

 21   l'entreprise Elektrodistribucija.

 22   Q.  Quand vous dites le véhicule de Bimeks, qu'est-ce que vous entendiez

 23   par "véhicule" ?

 24   R.  Eh bien, Bimeks, c'était une camionnette. Bimeks, c'est une usine de

 25   transformation de produits dérivés de la viande. Et ils se servaient de

 26   cette petite camionnette pour le transport de produits et de viande.

 27   C'était peint en blanc. Je ne sais pas pendant la guerre ce à quoi ça leur

 28   a servi, peut-être pour transporter des cadavres.

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  1   Q.  Et c'est cette camionnette que vous avez vue passer là-bas lorsque vous

  2   travailliez à Elektro Brcko ?

  3   R.  Oui.

  4   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Messieurs les Juges, je comprends bien que

  5   ceci n'est pas un document que le témoin peut authentifier, mais il a quand

  6   même été en mesure d'identifier un certain nombre de policiers sur la

  7   liste. Donc on peut s'en servir à l'occasion de l'audition des autres

  8   témoins et à ce moment-ci, je voudrais que ce soit versé au dossier, à

  9   moins qu'il n'y ait une objection de la part des conseils de la Défense.

 10   [La Chambre de première instance se concerte]

 11   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Monsieur Cvijetic, avant que nous

 12   n'entendions vos objections, nous allons demander aux représentants du

 13   bureau du Procureur de nous dire à quelle fin on propose ce document pour

 14   versement au dossier. Gardez aussi à l'esprit le fait qu'il convient de se

 15   souvenir de l'approche convenue au sujet du dernier document hier après-

 16   midi. Le témoin nous a parlé du document pour indiquer que c'était le

 17   système qui prévalait, mais il n'est pas l'auteur de ce document. Donc nous

 18   avons une confusion qui s'installe.

 19   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] En ce moment, je crois que c'est un type

 20   de document pour lequel nous insisterions, s'agissant du versement au

 21   dossier. Ça démontre quels ont été les membres de la police à l'époque des

 22   crimes --

 23   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Oui. Mais le témoin a témoigné de leur

 24   présence et il a identifié un certain nombre de policiers. Mais en quoi

 25   cela nous aide-t-il à comprendre le témoignage de ce témoin ?

 26   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Eh bien, par exemple, M. Kaurinovic, qui

 27   est au numéro 7, portait des vêtements civils, et on sait qu'il était

 28   membre de la police. Ce document le confirme. Donc nous demanderions que ce

Page 1815

  1   document soit versé au dossier à des fins d'identification, parce qu'il

  2   démontre que certains des acteurs ici étaient membres de la police, et donc

  3   cela établit le lien entre les auteurs de crimes.

  4   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Alors il confirme que ces personnes

  5   étaient des officiers de la police.

  6   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Exactement.

  7   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Entendons M. Cvijetic.

  8   M. CVIJETIC : [interprétation] Je ne vais pas être long, Monsieur le

  9   Président. Je crois que le Procureur a dit lui-même quelles sont les

 10   raisons pour lesquelles ce document ne saurait être versé au dossier de

 11   première main comme élément de preuve. Pour le fait de lui donner une cote

 12   à des fins d'identification, oui, je n'ai rien contre. Peut-être pourrions-

 13   nous entendre d'autres témoins qui pourraient identifier le document et

 14   parler des autres membres du MUP et de ceux qui ont été mentionnés. Mais

 15   c'est le cas d'autres témoins, pas le cas de ce témoin-ci.

 16   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Merci. Donc vous nous avez simplifié la

 17   vie à tous et à toutes. Donc nous allons lui accorder une cote à des fins

 18   d'identification.

 19   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agira de la pièce P139 et il porte

 20   cette cote à des fins d'identification, Monsieur le Juge.

 21   M. DEMIRDJIAN : [interprétation]

 22   Q.  Monsieur Gasi, je me propose maintenant de passer à une période

 23   ultérieure. Il s'agit du 7 juin, date à laquelle vous avez été relâché. Et

 24   dans l'affaire Krajisnik, page 490 du compte rendu, vous nous avez indiqué

 25   qu'il est arrivé là-bas un capitaine de la JNA répondant au nom de Rade

 26   Bosic. Et vous avez parlé de l'échange que vous avez eu avec lui.

 27   Puis vous nous avez raconté que vous avez été emmené au bureau de

 28   Kosta, où vous avez eu un entretien avec le dénommé Bosic. Alors ce M.

Page 1816

  1   Kosta Simonovic avait-il un bureau permanent au camp où il se rendait à

  2   titre régulier ?

  3   R.  Oui, il avait un bureau. Ce bâtiment dans lequel il se trouvait, je

  4   dirais que son bureau se trouvait vers la moitié du bâtiment. Quand vous

  5   prenez le bâtiment en considération, il y avait quatre entrées, et c'est au

  6   milieu que Kosta avait un bureau. C'est là que je suis allé lorsque Rade

  7   est venu pour me demander. J'y étais en compagnie de Kosta et de Goran

  8   Jelisic cette nuit-là. C'était ce même bureau.

  9   Q.  Je ne vais pas maintenant vous interroger au sujet des détails de

 10   l'échange que vous avez eu avec lui. On peut le voir dans le compte rendu

 11   de l'affaire Krajisnik. Toutefois, lorsque vous avez quitté le bureau,

 12   auriez-vous remarqué quelque chose à côté de la porte de ce bureau ?

 13   R.  Pas seulement cette fois-là, mais lorsque je m'étais plaint d'avoir mal

 14   au ventre, en sortant de son bureau, il y avait une feuille de papier A4 où

 15   Kosta avait écrit à sa main et signé que personne n'avait le droit d'entrer

 16   au hangar sans sa présence et son autorisation, personne n'avait le droit

 17   de malmener ou de tuer les détenus en présence des autres détenus ou sans

 18   sa présence.

 19   C'était à peu près la teneur du texte sur ce papier. Il n'y avait pas

 20   de cachet. On avait signé commandant adjoint du centre d'investigation, et

 21   en dessous il y avait Simonovic -- Simonovic Kole.

 22   Q.  C'était sur la porte de son bureau ?

 23   R.  Oui.

 24   Q.  Vous nous avez mentionné le dénommé Goran Jelisic. Pouvez-vous à peu

 25   près nous dire combien de fois vous l'avez vu au camp de Luka ?

 26    R.  Deux fois au hangar et la troisième fois dans le bureau.

 27   Q.  Serait-il exact de dire que vous n'avez pas vu Goran Jelisic en train

 28   de tuer quelqu'un au camp de Luka ?

Page 1817

  1   R.  Moi, pendant que j'étais là, il n'a tué personne. Enfin, pas du moins

  2   que j'ai eu à le voir.

  3   Q.  Dans le témoignage en page 459 dans l'affaire Krajisnik, vous nous

  4   dites que d'autres prisonniers vous ont dit qu'ils avaient vu Goran Jelisic

  5   en train de tuer des prisonniers ?

  6   R.  Oui, c'est le cas. J'ai eu l'occasion de l'entendre dire de la bouche

  7   de deux hommes qui travaillaient avant la guerre avec moi à

  8   l'Elektrodistribucija, Delic Smail et Stranjac Osman. Et son père au

  9   dernier avait dit qu'il l'avait vu, lorsqu'ils ont posé des corps de gens

 10   devant le couvercle qu'il y avait au sol, et il a dit aussi qu'il leur

 11   avait tiré dans la nuque. Dans l'incident, il aurait tué trois ou quatre

 12   hommes. Donc ces trois hommes m'ont relaté la même chose. Entre autres,

 13   Stranjac Osman et Stranjac Ahved [phon] m'ont dit qu'ils avaient participé

 14   au chargement de cadavres un jour en début mai 1992. Osman a dit qu'il a

 15   compté 80 personnes qu'ils ont chargées à bord d'un camion militaire.

 16   Enfin, c'est ce qu'il nous dit, qu'ils étaient 80, ces corps.

 17    M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Monsieur Demirdjian.

 18   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Oui, Monsieur le Juge.

 19   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Je me rends compte que vous avez cité

 20   M. Gasi en qualité de témoin relevant de l'article 92 ter du Règlement et

 21   vous avez indiqué que vous alliez consacrer une heure à l'interroger au

 22   sujet de ses dépositions antérieures. Vous avez déjà passé une heure, en

 23   fait, près d'une heure et demie désormais à interroger le témoin sur ces

 24   sujets, et il me semble que vous l'avez interrogé au principal pratiquement

 25   comme s'il s'agissait d'un témoin témoignant de vive voix, ce qui n'est pas

 26   tout à fait acceptable étant donné que vous aviez annoncé que vous le

 27   citiez en tant que témoin relevant de l'article 92 ter du Règlement.

 28   Donc je pense que puisque vous-même avez déterminé que M. Gasi serait

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  1   témoin relevant de l'article 92 ter, vous avez obligation de terminer très

  2   rapidement vos questions introductrices à ce témoin.

  3   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Oui, Monsieur le Juge, je vais encore

  4   aborder deux sujets qui n'ont pas encore été évoqués dans l'affaire

  5   Krajisnik et nous en terminerons dans les dix à 15 minutes.

  6   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Veuillez le faire brièvement et très

  7   rapidement.

  8   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Oui.

  9   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Et je vous demande d'en terminer

 10   rapidement, très brièvement, mais pour l'avenir je pense que vous devriez

 11   respecté la disposition importante du Règlement qui a été expliquée dans

 12   les lignes directrices en matière de procédure, à savoir que s'agissant de

 13   témoins cités en vertu de l'article 92 ter du Règlement, la durée normale

 14   des questions introductrices posées au témoin ne doit pas dépasser 20 à 30

 15   minutes avant que le conseil de la Défense ne prenne la parole pour le

 16   contre-interrogatoire.

 17   Donc faites le point et décidez dans quelles conditions vous

 18   souhaitez présenter vos éléments de preuve. Je vous remercie.

 19   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Oui, Monsieur le Juge, je le ferai. Tous

 20   mes remerciements.

 21   Q.  Monsieur Gasi, durant votre déposition dans l'affaire Krajisnik, vous

 22   avez dit qu'à un certain moment, un homme répondant au nom de Vojkan

 23   Djurkovic s'est rendu au camp de Luka. Vous rappelez-vous cela ?

 24   R.  Oui. M. Vojkan Djurkovic est venu dans le hangar.

 25   Q.  Vous avez également dit à plusieurs reprises dans votre déposition dans

 26   l'affaire Krajisnik que cet homme s'était adressé aux prisonniers.

 27   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] J'aimerais montrer au témoin une séquence

 28   vidéo. Il s'agit du document 65 ter numéro, 20138 [comme interprété]. C'est

Page 1819

  1   un extrait d'une émission de la BBC dont le titre est "Fissure du blindage"

  2   et cette émission date de 1994. J'en demande la diffusion. Oui, il faut que

  3   je signale que cette vidéo peut être diffusée grâce au système électronique

  4   Sanction.

  5   Apparemment, Monsieur le Président, Messieurs les Juges, il y a un problème

  6   technique, mais j'en étais arrivé aux derniers instants de mon

  7   interrogatoire.

  8   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Pouvez-vous passer à un autre sujet,

  9   Monsieur Demirdjian.

 10   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Oui, pour le moment c'est possible.

 11   Q.  Monsieur Gasi, vous avez également dans l'affaire Krajisnik témoigné au

 12   sujet de ce moment où on vous a emmené au poste de police pour faire le

 13   ménage dans ce poste. Vous vous en souvenez ?

 14  R.  Oui, cela devait être au début du mois de juin, peut-être le 1er juin, à

 15   moins que cela ne se soit passé le 30 mai. Je ne sais plus exactement. Des

 16   membres du poste de police sont arrivés, ont demandé des volontaires et ont

 17   emmené avec eux une quinzaine de personnes.

 18   Q.  Je ne vous demande pas d'entrer dans les détails. Je vous demande

 19   simplement de confirmer que vous avez bien assisté alors que l'on vous

 20   avait emmené dans ce poste de police et que vous vous y trouviez au meurtre

 21   de deux prisonniers dans les locaux de la police, et ce, de la main d'un

 22   policier portant un uniforme bleu; c'est bien cela ?

 23   R.  Oui, c'est exact.

 24   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Je crois que maintenant la vidéo peut être

 25   diffusée. J'en demanderais la diffusion.

 26   [Diffusion de la cassette vidéo]

 27   L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

 28   "Le correspondant de la BBC : Mon guide était Vojkan Djurkovic, un citoyen

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  1   bien connu de Bijeljina. C'était l'un des 60 combattants qui s'étaient

  2   emparés de la ville des Serbes au début de la guerre. Vojkan était très

  3   fier de ses lunettes de soleil italiennes de grand prix. Des hommes comme

  4   lui se portent très bien ces jours-ci dans la République serbe de Bosnie."

  5   [Fin de la diffusion de la cassette vidéo]

  6   M. DEMIRDJIAN : [interprétation]

  7   Q.  Monsieur Gasi, est-ce que vous reconnaissez l'homme que l'on voit sur

  8   les images de cette vidéo, l'homme qui a des lunettes de soleil ?

  9   R.  En mai 1992, il avait une apparence un peu différente. Il portait un

 10   uniforme, un uniforme de camouflage et il arborait l'insigne de grade de

 11   commandant. Et au lieu de brodequins aux pieds, il avait des Adidas, des

 12   chaussures de sport. Mais oui, c'est bien Vojkan Djurkovic.

 13   Q.  C'est l'homme que vous avez décrit comme étant venu au camp de Luka,

 14   n'est-ce pas ?

 15   R.  Oui.

 16   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Suite de la diffusion.

 17   [Diffusion de la cassette vidéo]

 18   L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

 19   "Vojkan Djurkovic : Il faut remercie l'Etat serbe de leur avoir donné la

 20   possibilité d'aller là où ils voulaient aller ou plus précisément il faut

 21   remercier l'Etat serbe qui a respecté dans la plus grande mesure du

 22   possible le droit humain à la liberté de circulation pour la population

 23   civile."

 24   [Fin de la diffusion de la cassette vidéo]

 25   M. DEMIRDJIAN : [interprétation]

 26   Q.  Vous avez entendu ce qu'a dit M. Djurkovic dans cette vidéo. Est-ce que

 27   c'est le genre de discours qu'il avait l'habitude de faire au camp de Luka

 28   ?

Page 1821

  1   R.  Quand il venait au camp de Luka, en général, il avançait jusqu'au

  2   milieu du hangar. C'était assez intéressant à voir. Donc certains

  3   prisonniers le reconnaissaient et il leur disait de se rapprocher de façon

  4   à pouvoir parler plus aisément. Et un jour, je me suis rapproché de lui

  5   aussi. Nous avons donc fait cercle autour de lui, et à ce moment-là, il a

  6   commencé un discours.

  7   Il y avait deux frères de Brezovo Polje dont je n'ai pas le souvenir des

  8   noms, et il s'est adressé directement à eux, et il leur a dit, Vous vous

  9   rappelez à l'ouverture du camp de Luka comment les choses se passaient ici.

 10   J'ai tout fait pour sauver des gens et j'y suis parvenu. C'était la folie

 11   ici. Donc vous devriez en parler. Et puis il a un peu changé de ton en

 12   disant que les choses s'étaient normalisées ici, que les conditions

 13   s'étaient améliorées, que tout irait bien. Et j'ai entendu des gens parler

 14   de moi comme d'un criminel de guerre, a-t-il dit.

 15   Chaque fois qu'il venait, et je l'ai vu deux ou trois fois, il

 16   prononçait de tels discours. Et quand il ressortait une demi-heure ou 40

 17   minutes plus tard, quatre, cinq ou six hommes portant un uniforme de

 18   camouflage faisaient irruption avec des pelles et se mettaient à frapper

 19   tout ce qui leur tombait sous la pelle dans le hangar. Et une fois qu'ils

 20   avaient fait cela, ils s'en allaient puis revenaient avec du café, comme

 21   ils disaient, du café qui nous était destiné à nous les Turcs, les balija,

 22   car ils voulaient que nous buvions quelque chose.

 23   Donc les mêmes hommes qui nous frappaient à coups de pied, à coups de

 24   pelle, voulaient que les gens qu'ils avaient frappés quelques minutes avant

 25   boivent du café et partagent une cigarette avec eux. Voilà le genre de

 26   choses qui se passaient au camp de Luka.

 27   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Suite de la diffusion, je vous prie.

 28   [Diffusion de la cassette vidéo]

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  1   L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

  2   "Même interlocuteur que précédemment : Pourquoi est-ce que je devrais

  3   m'attendre à obtenir le prix Nobel ? Parce que comparé à la partie d'en

  4   face, j'ai sauvé des milliers de personnes et je ne suis pas rentré dans

  5   les options politiques qui étaient les leurs. Je n'ai pas perdu. C'étaient

  6   simplement des touristes qui se baladaient de Bijeljina à Tuzla ou à Berlin

  7   ou ailleurs. Ils n'ont qu'à revenir."

  8   [Fin de la diffusion de la cassette vidéo]

  9   M. DEMIRDJIAN : [interprétation]

 10   Q.  Dans cette dernière séquence, il affirme qu'il devrait recevoir le prix

 11   Nobel de la paix et que les gens étaient libres de revenir d'où ils étaient

 12   partis. Que pouvez-vous nous dire à ce sujet ?

 13   R.  C'était typique de cet homme. Il était comme ça déjà en 1992. Qui peut

 14   dire des choses comme celles-ci alors qu'il est en présence des événements

 15   horribles qui ont marqué la guerre en Bosnie. Moi, je vois les choses d'une

 16   façon tout à fait différente et je ne parviens tout simplement pas à

 17   comprendre ce genre de discours. C'est de la folie.

 18   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Je vais conclure mon interrogatoire avec

 19   une dernière séquence vidéo, Monsieur le Président, Messieurs les Juges.

 20   Donc, quatrième séquence. J'en demande la diffusion.

 21   [Diffusion de la cassette vidéo]

 22   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Est-ce qu'on peut faire arrêt sur image,

 23   ici ?

 24   Q.  Est-ce que vous reconnaissez cet homme ?

 25   R.  Oui.

 26   Q.  Qui est-ce ?

 27   R.  Mauzer. 

 28   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Suite de la diffusion.

Page 1823

  1   [Diffusion de la cassette vidéo]

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, je sais qui c'est. Zarko Cosic. Il est

  3   beaucoup plus gros ici. C'est pourquoi je n'ai pas réussi à le reconnaître

  4   tout de suite.

  5   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Suite de la diffusion.

  6   [Diffusion de la cassette vidéo]

  7   M. DEMIRDJIAN : [interprétation]

  8   Q.  Ici, nous voyons Zarko Cosic, nouveau chef du poste de police de Brcko

  9   qui dit qu'il est très difficile d'expulser les Musulmans. Pouvez-vous

 10   commenter ? Est-ce que la situation à Brcko était aussi difficile que cela

 11   ?

 12   R.  Je ne sais pas pourquoi moi, ils m'ont expulsé de Brcko, pourquoi ils

 13   m'ont enfermé à Luka. Moi, je ne représentais pas le moindre problème pour

 14   eux. Il n'y avait - en tout cas pour ce qui me concerne, pour ce qui est de

 15   mon frère et mon père et mes sœurs - il n'y avait aucune raison de nous

 16   expulser. Je ne vois vraiment pas.

 17   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les

 18   Juges, je demande le versement au dossier de cette vidéo.

 19   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Admise et enregistrée.

 20   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agira de la pièce P139.

 21   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] S'agissant de l'article de presse qui a

 22   été soumis au témoin hier --

 23   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] La pièce 139, n'était-ce pas la liste

 24   des policiers qui a été versée au dossier et enregistrée aux fins

 25   d'identification ?

 26   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Merci, Monsieur le Juge. Donc la vidéo

 27   constituera la pièce P140.

 28   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les

Page 1824

  1   Juges, pour conclure, je rappelle que l'article de presse que nous avons

  2   soumis au témoin hier et que les Juges de la Chambre ont décidé de ne pas

  3   admettre au dossier -- je demande d'ailleurs l'affichage du document 65 ter

  4   numéro 267. Je crois comprendre que ce témoin n'avait pas capacité à

  5   permettre le versement au dossier de ce document. Mais je demanderais tout

  6   de même l'enregistrement aux fins d'identification de cet article de

  7   presse, pour le moment, avec possibilité qu'un autre témoin en parle et

  8   l'authentifie. 

  9   Je me souviens que vous avez dit, Monsieur le Président, hier, que nous ne

 10   disposions pas de la source ou de l'auteur de cet article, et je vous

 11   présente mes excuses aujourd'hui, mais la semaine dernière, nous nous

 12   sommes rendu compte que la traduction dont nous disposions et l'original de

 13   l'article que nous avions ne provenaient pas de la même source. Entre-

 14   temps, à la fin de la semaine, nous avons réussi à situer l'original. Et ce

 15   document a été communiqué à la Défense aujourd'hui, il indique que

 16   l'article provient du quotidien "Oslobodjenje". Donc pour le moment, j'en

 17   demanderais l'enregistrement aux fins d'identification et nous en parlerons

 18   avec un autre témoin.

 19   M. LE JUGE HALL : [interprétation] C'est un point sur lequel une décision a

 20   déjà été rendue par la Chambre. Nous n'allons pas revenir sur ce point. Si

 21   un autre témoin peut authentifier cet article, nous verrons.

 22   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Pour le compte rendu d'audience, je

 23   pensais qu'il serait bon de savoir que ce témoin avait abordé ce sujet.

 24   C'est simplement afin que ces questions soient consignées au compte rendu

 25   d'audience en prévision des mémoires de fin de procès ou d'autres arguments

 26   qui peuvent être présentés avant la fin du procès.

 27   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Je n'ai aucun doute que l'Accusation,

 28   dans son réquisitoire, ne manquera pas de rappeler ce fait aux Juges de la

Page 1825

  1   Chambre.

  2   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

  3   Plus de questions pour ce témoin.

  4   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Contre-interrogatoire.

  5   Contre-interrogatoire par M. Cvijetic : 

  6   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur Gasi.

  7   R.  Bonjour, Maître Cvijetic.

  8   Q.  Je suis co-conseil dans l'équipe de défenseurs de M. Stanisic et je

  9   m'apprête à vous poser quelques questions. Ce qui m'intéresse d'abord c'est

 10   que nous discutions un instant de votre appartenance au parti SDA. Vous

 11   étiez bien membre du parti SDA, n'est-ce pas ?

 12   R.  Exact.

 13   Q.  Il est écrit ici que vous en avez été membre du 26 mai 1990 au mois de

 14   novembre 1992; c'est bien cela ?

 15   R.  Exact.

 16   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Nous aimerions des références de pages.

 17   M. CVIJETIC : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges,

 18   j'interroge le témoin au sujet de son appartenance au SDA. Il en a déjà

 19   parlé dans ses dépositions antérieures et ceci est un fait qui n'est pas

 20   contesté. Je ne crois pas qu'il soit indispensable de citer une page.

 21   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Mais je croyais que vous évoquiez la

 22   déposition de ce témoin dans l'affaire Krajisnik, puisque vous dites :

 23   "Nous lisons ici".

 24   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Maître Cvijetic, je ne sais pas si vous

 25   avez entendu l'interruption des interprètes, mais en tout cas, je vous

 26   demanderais à tous les deux de ménager une brève pause entre la fin des

 27   questions et le début des réponses.

 28   M. CVIJETIC : [interprétation]

Page 1826

  1   Q.  Monsieur Gasi, il est tout à fait manifeste que cette question n'est

  2   pas contestée, n'est-ce pas ? Je n'ai pas nécessité de vous rappeler ce que

  3   vous avez déjà dit dans d'autres dépositions, dans d'autres affaires ?

  4   R.  Comme vous voulez.

  5   Q.  Comment avez-vous ressenti l'action de ce parti et quelle opinion

  6   aviez-vous de son programme politique ?

  7   R.  Au début, j'ai eu le sentiment que ce parti représenterait toutes les

  8   personnes qui étaient favorables à une coexistence, donc à une vie commune

  9   entre tous les habitants de Brcko.

 10   Q.  Donc, je paraphrase. Vous pensiez que c'était un parti qui allait

 11   garantir les droits de toutes les populations, de tous les groupes

 12   ethniques ?

 13   R.  Oui.

 14   Q.  Le programme politique de ce parti est-il resté le même par la suite,

 15   tel qu'il était au début ?

 16   R.  Il est resté le même qu'au début jusqu'au moment où je suis entré au

 17   conseil exécutif et où j'ai vu que les gens abordaient ce parti avec une

 18   conception légèrement religieuse. Cela ne me convenait pas personnellement.

 19   Je parle du niveau local du parti, bien sûr, car je suis un homme qui,

 20   pendant tout mon passé, était communiste. Et donc à partir de ce moment-là,

 21   j'ai rejeté ce parti, mais pas plus. Enfin, je dis ce que je pense pour ce

 22   qui est du parti au niveau local.

 23   Q.  Bien sûr, aucune nécessité de répéter. Donc, au départ, vous pensiez

 24   que c'était un parti apte à garantir les droits de toutes les populations,

 25   de tous les groupes ethniques. Et vous conviendrez avec moi que si tel

 26   était le cas, dans ce programme devrait être évoqué le droit de chaque

 27   groupe ethnique de se prononcer sur son destin, n'est-ce pas ?

 28   R.  Oui, je crois. Vous avez raison.

Page 1827

  1   Q.  Par exemple, le peuple serbe n'avait pas le droit dans ce cas d'imposer

  2   au peuple musulman son lieu de résidence ou de dire qu'il devait accepter

  3   de résider dans un pays différent, dans un pays distinct, n'est-ce pas ?

  4   R.  Vous avez raison.

  5   Q.  Mais vous conviendrez dans ces conditions que les Musulmans ou les

  6   Croates n'avaient pas non plus le droit d'imposer ce genre de choses aux

  7   Serbes ?

  8   R.  Je ne sais pas ce que vous voulez dire par le mot "imposer", je ne sais

  9   pas si vous parlez de contraintes physiques ou autres, mais je vous

 10   répondrais par l'affirmative. Cela dit, si vous pensez à une contrainte

 11   physique, dans ce cas-là, je vous réponds non.

 12   Q.  Non, non. Ce n'est pas ce que je pensais.

 13   M. CVIJETIC : [interprétation] On appelle mon attention sur le fait

 14   que l'heure de la pause est arrivée, si je ne me trompe. C'est bien cela,

 15   Monsieur le Président ? Non, j'ai mal compris en fait, mon confrère

 16   m'indiquait la nécessité de ralentir un peu.

 17   Q.  Donc nous sommes bien d'accord, n'est-ce pas, les Serbes n'avaient pas

 18   le droit d'imposer ce genre de choses aux Croates et aux Musulmans, et les

 19   Musulmans n'avaient pas le droit d'imposer cela aux Serbes pas plus que les

 20   Croates n'avaient le droit d'imposer cela aux Serbes puisqu'il s'agit,

 21   n'est-ce pas, d'une question très importante, d'une question vitale, à

 22   savoir dans quel Etat les gens voulaient vivre. Vous êtes d'accord avec moi

 23   là-dessus ?

 24   R.  Je suis d'accord. Personne n'a le droit d'imposer quoi que ce soit à

 25   quelqu'un d'autre si ce quelqu'un d'autre ne le veut pas.

 26   Q.  Monsieur Gasi, veuillez simplement attendre quelques secondes à la fin

 27   de mes questions parce que vous voyez moi aussi on ne cesse de me critiquer

 28   là-dessus. Nous parlons la même langue --

Page 1828

  1   R.  Oui, c'est un peu difficile.

  2   Q.  Mais, en tout cas, je présente mes excuses aux interprètes. Allons plus

  3   doucement, nous y arriverons. Interprétons cette décision de l'assemblée de

  4   Bosnie-Herzégovine rendue les 15 et 16 octobre 1991, qui se prononce sur la

  5   souveraineté de la Bosnie-Herzégovine, donc favorable à l'indépendance,

  6   mais sans que les représentants du Parti démocratique serbe aient voté. Je

  7   ne vais pas vous interroger sur l'aspect constitutionnel de cette décision

  8   car vous n'êtes pas expert en droit constitutionnel, mais je vous demande

  9   si cette décision représentait bien une forme d'imposition, l'imposition

 10   dont je viens de parler, qui portait précisément sur cette question très

 11   importante et même vitale.

 12   R.  Maître, si vous liez la population serbe uniquement à un parti

 13   politique, à savoir le SDS, vous commettez une erreur grave. Je dirais que

 14   la majorité de la population serbe a voté pour le SDS, mais il y a

 15   également pas mal de membres de la population serbe qui étaient adhérents

 16   du SDP ou d'autres partis, tels que le parti d'Ante Markovic, et Bogic

 17   Bogicevic lui-même était un Serbe membre de la présidence de la RSFY à

 18   l'époque. Maintenant si un parti politique - comme vous l'avez dit vous-

 19   même, je ne suis pas un expert en droit constitutionnel - donc si un parti

 20   politique est représenté au parlement et que le parlement en question

 21   adopte une décision, c'est une majorité parlementaire qui a adopté une

 22   décision. Voilà ce que je pense.

 23   Q.  C'est précisément de cela que je parle. Ce n'est pas la majorité du

 24   parlement qui a adopté la décision car la majorité requise par la

 25   constitution n'a pas été obtenue. En effet, des décisions portant sur des

 26   intérêts vitaux de la population ne pouvaient pas être adoptées par la

 27   majorité simple, mais par consensus et par accord mutuel uniquement. Vous

 28   savez que la Chambre des populations aujourd'hui au parlement de Bosnie-

Page 1829

  1   Herzégovine adopte ces décisions par consensus avec égalité entre les trois

  2   groupes ethniques.

  3    Monsieur Gasi, si vous vous sentez incompétent pour répondre à cette

  4   question, dites-le-moi et je passerai à autre chose.

  5   R.  Maître Cvijetic, j'ai mon opinion. Vous êtes sans doute plus éduqué que

  6   moi sur le plan juridique, mais j'ai peut-être une autre opinion que vous

  7   quant à la légitimité des députés, du fait que des députés serbes ont

  8   quitté le parlement et n'ont pas participé au référendum sur

  9   l'indépendance. Sur le plan personnel, je n'ai jamais souhaité imposer mon

 10   opinion à qui que ce soit, et je n'avais rien contre ne serait-ce qu'un

 11   seul Serbe de Bosnie-Herzégovine. Je suis toujours dans la même situation

 12   aujourd'hui. Je n'ai pas changé d'avis.

 13   Q.  Très bien. Je vais essayer de vous parler comme je parlerais à

 14   n'importe quel homme. Si trois peuples ne parviennent pas à un consensus

 15   sur le fait de savoir dans quel genre d'Etat ils souhaitent vivre, quelle

 16   est l'autre solution éventuelle ?

 17   R.  En ce qui me concerne, et comme le diraient pas mal d'autres gens que

 18   moi, si un mariage ne fonctionne pas, il ne fonctionne pas. Il faut le

 19   dissoudre. Qu'est-ce que la Bosnie était avant la guerre ? Un journaliste a

 20   déclaré que la Bosnie ressemblait à une peau de léopard. Il y avait

 21   tellement de populations différentes qui vivaient dans des états d'esprit

 22   différents, et tout d'un coup la coupe a été pleine. C'est ce qui s'est

 23   passé à Brcko également.

 24   Q.  Mais si dans la situation que vous venez d'évoquer, en présence d'un

 25   divorce entre les trois populations ne peut-il y avoir divorce pacifique ?

 26   Est-ce que la guerre était la seule possibilité ? Est-ce que les gens ne

 27   pouvaient pas décider de poursuivre chacun leur chemin ? Est-ce que ça

 28   n'aurait pas été un moindre mal par rapport à la guerre ?

Page 1830

  1   R.  J'ai vécu 33 ans dans l'ex-Yougoslavie, mais même si je n'étais pas

  2   croyant, j'aurais toujours prié pour la préservation de ce pays.

  3   Q.  Vous étiez sportif. Jusqu'où êtes-vous allé en sport ?

  4   R.  En 1990, je représentais la Yougoslavie au championnat du monde de

  5   Copenhague.

  6   Q.  Mais vous dites qu'en ce qui vous concerne, vous pensez que cela aurait

  7   été une bonne chose que la Yougoslavie soit préservée ?

  8   R.  Oui, cela aurait été une chose excellente.

  9   Q.  Donc qui avait-il de répréhensible aux efforts déployés par la

 10   population serbe pour préserver la Yougoslavie, pour que les Serbes

 11   puissent rester dans un pays qui s'appelait la Yougoslavie ?

 12   R.  Ce qui s'est passé à Brcko a été mauvais, et ce qui m'est arrivé

 13   personnellement a été mauvais.

 14   Q.  Non, vous l'avez déjà dit, ça.

 15   R.  Pourriez-vous répéter votre question. Je ne suis pas sûr de l'avoir

 16   parfaitement compris.

 17   Q.  Très bien. Je vais simplifier. Je ne vous demande pas une nouvelle fois

 18   quel est votre avis sur la Yougoslavie. Mais qu'est-ce qu'il y avait

 19   éventuellement de répréhensible quant aux efforts déployés par la

 20   population serbe qui a déclaré au référendum qu'elle souhaitait demeurer

 21   dans le giron de la Yougoslavie et qu'elle souhaitait que la Bosnie-

 22   Herzégovine demeure dans le giron de la Yougoslavie ?

 23   R.  Je ne vois rien de mauvais au sujet d'un vote démocratique auquel

 24   participe une population.

 25   Q.  Monsieur Gasi, je suis d'accord avec vous quant au fait de dire que

 26   cette carte que Ristanic a dessiné, qui concernait la division de Brcko,

 27   n'était pas une bonne chose ?

 28   R.  Il n'était pas le seul à le faire. C'est tout le SDS qui était

Page 1831

  1   concerné.

  2   Q.  La façon dont ils ont abordé la question était manifestement

  3   inacceptable. Cela ne sert à rien, et il n'est pas une bonne chose de

  4   construire des murs de Berlin. Mais nous voyons que les accords de Dayton

  5   ont eu un résultat assez similaire, il y a y compris une entité officielle

  6   qui s'appelle Herceg-Bosna où les Croates représentent la majorité de la

  7   population, n'est-ce pas ?

  8   R.  Je sais bien tout cela. Je lis les journaux et je consulte quelquefois

  9   internet. Je peux vous dire que les accords de Dayton avaient à mon avis

 10   pour objectif principal de mettre un terme à la guerre, aux assassinats et

 11   aux destructions.

 12   Q.  Très bien. Mais voilà ce qui a été réalisé. La paix a été rétablie sur

 13   la base de la réalisation d'une division des populations selon des critères

 14   ethniques principalement. Je suis bien d'accord avec vous quant au fait que

 15   ceci dans l'absolu n'aurait pas dû arriver parce que la Bosnie n'aurait

 16   jamais dû être divisée de cette façon.

 17   R.  Mais, Maître Cvijetic, selon l'éducation que j'ai reçue, les choses

 18   sont tout à fait claires. Personne n'a le droit de diviser un pays sur des

 19   bases idéologiques. Mais si j'ai commencé à me sentir mal en Bosnie-

 20   Herzégovine, ce n'est pas simplement parce que j'étais le seul à ressentir

 21   ce sentiment; c'est parce que j'écoutais ce que disaient des dirigeants. Le

 22   reste de la population les écoutait aussi.

 23   Q.  Bien. Monsieur Gasi, nous n'allons pas nous aventurer dans les

 24   questions politiques et de partis. On ne serait pas autorisé de toute façon

 25   à aller au-delà de ce que vous avez déclaré lors de l'interrogatoire

 26   principal. Mais revenons aux événements à Brcko après les incidents à

 27   Bijeljina. Est-ce que certaines forces du peuple musulman du parti SDS

 28   commençaient à se réunir avec l'intention d'aller à Bijeljina ?

Page 1832

  1   R.  Je ne sais rien de cette question.

  2   Q.  N'avez-vous pas mentionné le fait que M. Ramic était intervenu en ce

  3   sens ?

  4   R.  Je n'ai jamais dit cela.

  5   Q.  Avez-vous remarqué qu'une colonne de réfugiés de Bosanski Brod est

  6   passée par Brcko après le crime à Sijekovac où les forces croates avaient

  7   commis un crime à l'encontre des Serbes, est-ce que vous avez été témoin de

  8   cela ?

  9   R.  Non, Maître Cvijetic.

 10   Q.  Nous avons mentionné la carte établie par Ristanic. Je me rappelle que

 11   vous avez marqué sur la carte comme étant ses marques, quel était le nom de

 12   cette partie de Brcko ?

 13   R.  J'ai expliqué cela hier. Ce sont les communautés locales de la partie

 14   orientale de la ville de Brcko. La partie sud-est par rapport à la limite

 15   serbe jusqu'à Bijeljina, Brcica, et le centre-ville.

 16   Q.  Est-ce que la majorité de cette population n'est pas appelée Srpska

 17   Varos ?

 18   R.  Oui. Il y a toujours eu une église orthodoxe à cet endroit-là. Elle s'y

 19   trouve encore.

 20   Q.  Bien. Alors cette ligne qu'il avait mise inclut cette partie de la

 21   ville, n'est-ce pas ?

 22   R.  Oui.

 23   Q.  Monsieur Gasi, quand vous avez quitté Brcko et quand vous avez été en

 24   mesure d'aller à l'étranger, vous avez fait une déclaration au Comité

 25   Helsinski; vous vous rappelez sans doute ?

 26   R.  Oui, en 1993.

 27   Q.  C'est au Danemark, n'est-ce pas ?

 28   R.  Oui.

Page 1833

  1   Q.  Dans cette déclaration, vous avez déclaré notamment que les pires

  2   crimes à Brcko avaient été commis par des formations paramilitaires; vous

  3   vous rappelez ?

  4   R.  Oui.

  5   Q.  En outre, vous avez dit que les groupes paramilitaires les plus

  6   importants étaient les gens d'Arkan et qu'ils étaient dirigés et conduits

  7   par quelqu'un de Bijeljina ?

  8   L'INTERPRÈTE : L'interprète n'a pas entendu le nom.

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne suis pas au courant de cela. J'ai essayé

 10   de corriger ma déclaration sur ce point mais je n'ai jamais eu la

 11   possibilité de le faire.

 12   M. CVIJETIC : [interprétation]

 13   Q.  Bien. Nous allons y jeter un coup d'œil rapidement. Je suppose que vous

 14   ne savez pas qui est Zdravko Ljubinkovic ?

 15   R.  Non, je ne le sais pas qui c'est.

 16   Q.  Vous auriez dit que les deux groupes étaient unis, les gardes serbes, à

 17   la fois les gardes Mauzer et les gens d'Arkan dirigés par Mirkovic [phon]

 18   ont été unis, n'est-ce pas ?

 19   R.  Je pense qu'ils ont été unis plus tard pendant la guerre.

 20   Q.  Mais est-ce que vous le saviez à l'époque ou est-ce que vous aviez dit

 21   cela ?

 22   R.  Je viens de dire, j'ai fait cette déclaration au Comité d'Helsinki mais

 23   quand j'ai vu le document c'était deux ou trois mois plus tard, et en

 24   anglais. Je n'ai jamais pu corriger ma déclaration.

 25   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Conseil, je vais vous demander de

 26   ralentir, s'il vous plaît, vous chevauchez avec les questions et les

 27   réponses. Il est d'ailleurs midi cinq, et nous allons suspendre l'audience.

 28   M. CVIJETIC : [interprétation] Oui.

Page 1834

  1   [Le témoin quitte la barre]

  2   --- L'audience est suspendue à 12 heures 04.

  3   --- L'audience est reprise à 12 heures 29.

  4   [Le témoin vient à la barre]

  5   M. CVIJETIC : [interprétation]

  6   Q.  Je crois que nous avons suspendu la séance au moment où nous étions en

  7   train de parler de la carte tracée par Ristanic. Vous avez dit dans votre

  8   déclaration antérieure que vous aviez vu de chez vous que 300 à 400

  9   personnes avaient été tuées dans le centre-ville et qu'on les avait

 10   emmenées en groupe de 30 ou 40 et qu'on avait ensuite lavé le sang. Vous

 11   rappelez-vous cette partie ? Cette question vous avait été posée lors de

 12   déposition antérieure.

 13   R.  Je me rappelle que le conseil de la Défense a effectivement cité la

 14   déclaration que j'ai faite au Comité Helsinski et j'ai dit déjà que je

 15   n'avais jamais dit cela. Qui dans son bon sens pourrait dire que 300 à 400

 16   personnes auraient été tuées en une demi-heure.

 17   Q.  Alors vous dites que ceci est faux ?

 18   R.  Oui.

 19   Q.  Une photographie vous a été montrée, je crois que c'est une

 20   photographie avec un Skorpion, et nous allons en avoir besoin. Dans votre

 21   déclaration, vous avez identifié la personne comme étant Jovan Pudic. C'est

 22   ça qui est dans la déclaration. Vous vous rappelez de cela ?

 23   R.  Il y avait un exemplaire d'un journal anglais, je crois que c'était le

 24   "Guardian". L'article était photocopié. Quand nous parlions de cette

 25   photographie avec quelqu'un du Comité d'Helsinski, je lui ai dit que

 26   j'étais avec l'auteur de la photographie qui m'avait montré d'autres

 27   photographies où on pouvait voir Pudic, mais ça n'était pas cette

 28   photographie-là. Comment ceci est entré dans l'article, ça, je ne le sais

Page 1835

  1   pas, parce que je n'ai pas dit les choses comme ça.

  2   Q.  Donc vous n'avez pas identifié cette personne comme étant Jovan Pudic ?

  3   R.  Non, je ne l'ai pas fait.

  4   M. CVIJETIC : [interprétation] Monsieur le Président, je souhaiterais que

  5   la photographie 65 ter, je crois que c'était la 2164, soit présentée à

  6   nouveau à l'écran.

  7   Q.  Oui, c'est bien cette photo. Vous pouvez la voir ?

  8   R.  Oui.

  9   Q.  La personne qui porte un Skorpion avec un silencieux, dites-moi, vous

 10   nous avez dit que c'était le policier que vous aviez vu précédemment? Je

 11   crois que c'est ça que vous avez dit sur cette photographie.

 12   R.  Quel policier ?

 13   Q.  Le Procureur vous a demandé si c'était bien un policier et si vous

 14   pouviez faire une comparaison avec celui que vous aviez vu sur place ?

 15   R.  Mais j'ai répondu que ce n'était pas le même homme.

 16   Q.  Je vous demandais si c'était un policier, et vous avez répondu : Oui,

 17   il portait un uniforme de police. Et à la question : Dites-moi quel type

 18   d'uniforme vous voyez ?

 19   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Vous êtes prié de ralentir. Les

 20   interprètes ne peuvent pas vous suivre.

 21   M. CVIJETIC : [interprétation]

 22   Q.  Monsieur Gasi, veuillez attendre un moment après ma question. Dites-

 23   moi, regardez cette personne et dites-moi ce qu'elle porte, quels effets

 24   d'uniforme de police qui étaient utilisés avant la guerre, et vous en

 25   souvenez très bien. Attendez un instant. Bon, dites-nous.

 26   R.  Eh bien, nous avons là une chemise bleue à manches courtes, puis des

 27   brodequins. Le pantalon, c'est un pantalon d'uniforme de police d'un bleu

 28   foncé, un bleu très foncé.

Page 1836

  1   Q.  D'après ce que je me rappelle avant la guerre, les pantalons étaient de

  2   couleur plus claire et on portait des chaussures plutôt que des brodequins

  3   ?

  4   R.  Oui, mais les policiers portaient aussi des brodequins, Maître

  5   Cvijetic.

  6   Q.  Est-ce qu'il manque quelque chose sur la chemise ?

  7   R.  Qu'est-ce que vous voulez dire ? Qu'est-ce qui pourrait manquer ? C'est

  8   une chemise de la police à manches courtes.

  9   Q.  Est-ce qu'ils ne portaient pas quelque chose sur l'épaule ?

 10   R.  Oui, ils portaient des insignes de grade, mais on ne peut pas le voir

 11   sur cette image-ci.

 12   Q.  On ne peut pas le voir, parce qu'il n'y en a pas, parce que sans ça, on

 13   les aurait vus sur ces épaules.

 14   R.  Ça dépend de la façon dont vous voyez les choses. Je crois que c'est

 15   une chemise de police.

 16   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Maître Cvijetic et Monsieur Gasi, on

 17   vous a rappelé à plusieurs reprises aujourd'hui la nécessité de ralentir

 18   afin que les interprètes puissent interpréter ce que vous dites. Ces

 19   échanges continus, ce "bavardage", pour employer le mot que vous avez

 20   employé, Maître Cvijetic, est peut-être utile pour vous, mais il n'est pas

 21   utile pour les interprètes, et en fin de compte, il ne nous aide pas non

 22   plus pour le compte rendu. Veuillez exercer une certaine discipline

 23   personnelle, s'il vous plaît.

 24   M. CVIJETIC : [interprétation] Je crois que nous sommes arrivés à un stade

 25   où vous pourriez probablement me sanctionner et ça pourrait peut-être même

 26   être efficace. Bien sûr, je plaisante.

 27   Q.  Monsieur Gasi, parlant d'uniformes, vous avez dit aujourd'hui que Ranko

 28   Cesic portait aussi un uniforme de police et que Goran Jelisic en porte un

Page 1837

  1   aussi ainsi que la personne que vous avez identifiée comme étant Jovan

  2   Pudic, à savoir que c'était bien un policier. Vous avez dit que -- vous

  3   pouvez m'aider avec le nom de famille, s'il vous plaît, vous avez dit que

  4   vous le connaissiez, Konstantin Simeunovic, sous le nom de Kole. C'est ça

  5   son nom ?

  6   R.  Oui, Kosta Simeunovic, Konstantin. 

  7   Q.  Il portait aussi un uniforme de police ?

  8   R.  Oui.

  9   Q.  Il faut que je revienne à la liste sur laquelle figurent les policiers,

 10   donnez-moi un instant pour retrouver cette pièce présentée par l'Accusation

 11   et qui a été montrée au témoin. Vous avez reconnu Branko Pudic sur cette

 12   liste. Ces noms vous ont été montrés et vous avez reconnu le nom de Branko

 13   Pudic. Donnez-moi un instant pour m'y retrouver.

 14   M. CVIJETIC : [interprétation] Ca a été montré comme pièce 65 ter. Voyons

 15   le numéro de la page. Oui, c'était le 2138 de la liste 65 ter. Allons

 16   immédiatement à la page 5, s'il vous plaît, donc la page 5 en B/C/S aussi.

 17   Oui, c'est bien le numéro 5.

 18   Q.  Voyez la partie qu'on est en train d'agrandir pour vous. A 212, vous

 19   voyez Pero Pudic, n'est-ce pas ?

 20    R.  Oui.

 21   Q.  A 217, Branko Pudic ?

 22   R.  Oui.

 23   Q.  Ensuite au 222, Pudic Boro ?

 24   R.  Oui.

 25   Q.  Dans votre déclaration, Jovan Pudic ?

 26   R.  Quelle déclaration ?

 27   Q.  Comité de Helsinki.

 28   R.  Permettez-moi de vous dire ceci : jusqu'à ce jour, bon, je suis sûr de

Page 1838

  1   ce qu'était le nom de Pudic, celui qui m'a frappé. A chaque fois, y compris

  2   dans cette déclaration que j'ai fournie au Comité de Helsinki, c'était le

  3   seul Pudic que j'ai vu. Et je ne sais pas comment ce nom de Jovan est entré

  4   dans ce rapport. Je n'ai jamais dit le nom complet, parce que je ne le

  5   savais pas. Et je connaissais Pudic parce que je l'avais connu avant la

  6   guerre et c'est le Pudic que j'ai à l'esprit, Branko Pudic.

  7   M. CVIJETIC : [interprétation] Sur la même liste, nous pouvons voir --

  8   Regardons le numéro 252, s'il vous plaît.

  9   Q.  On lit Simonovic, Konstantin. Pensez-vous qu'il y ait une possibilité

 10   qu'il ne s'agisse pas de la personne appelée Konstatin Simeunovic ?

 11   R.  C'est mon erreur. Je pense que je me suis trompé. Il est très probable

 12   que son nom soit Simonovic, excusez-moi. Mais je connais Kosta très bien,

 13   et ça, c'est Kosta, Konstantin Simeunovic. C'est la personne en question.

 14   Q.  Là encore, vous dites Simeunovic ?

 15   R.  C'est la façon dont je le dis. Je pourrais dire Simonovic, c'est exact.

 16   Q.  Mais vous êtes en train de vous corriger lorsque je vous ai montré le

 17   nom ?

 18   R.  Vous avez absolument raison. C'est la même personne. C'est le même

 19   Kosta, le même Kole que je connais.

 20   Q.  Je ne peux pas être d'accord avec vous. Ça ne peut pas être la même

 21   personne. Il n'y a aucune autre façon de l'identifier. Peut-être qu'une

 22   photo pourrait nous aider ?

 23   R.  Eh bien, si vous avez une photo, je pourrai identifier la personne.

 24   Q.  Très bien. Monsieur Gasi, excusez-moi, je viens de vous appeler M.

 25   Pudic. Dans vos dépositions précédentes, vous avez dit que Cesic portait un

 26   uniforme militaire. Vous avez également mis un uniforme militaire sur Goran

 27   Jelisic, Ronja Baranja [phon]. Moi, il faut que je vous confronte avec vos

 28   déclarations antérieures fournies dans d'autres affaires dans lesquelles

Page 1839

  1   vous avez déposé. L'affaire Krajisnik en février 2004, vous décriviez le

  2   moment où il est arrivé dans le hangar. Et je parle là de Goran Jelisic,

  3   bien sûr. Et vous dites ceci :

  4   "Il est venu au hangar. Il portait un uniforme de camouflage de la JNA. Je

  5   n'ai pas vu d'insignes de grades. Il ne portait pas de casquette."

  6   Donc, je vous pose encore la question : quel type d'uniforme de

  7   camouflage portait-il à l'époque ? Pour autant que je connaisse les

  8   uniformes, je crois que c'était un uniforme de camouflage de la JNA.

  9   R.  Et c'est ce que j'affirme encore aujourd'hui.

 10   Q.  Est-ce que vous n'avez pas dit qu'il était arrivé dans un uniforme bleu

 11   de police avec une chemise bleue et qu'il portait des insignes avec une

 12   étoile qui montrait qu'il était inspecteur ?

 13   R.  Oui, mais ça, c'était une autre fois lorsque Kosta m'a emmené au bureau

 14   et où nous avons eu une brève discussion. C'est à ce moment-là qu'il

 15   portait un uniforme bleu de police avec cette unique étoile qui montrait

 16   qu'il était inspecteur de la police et qu'il était gradé. C'est à ce

 17   moment-là qu'il portait cet uniforme.

 18   Q.  Vous avez expliqué qu'une étoile, à l'époque, correspondait au rang de

 19   sergent sur son uniforme de camouflage militaire ?

 20   R.  J'ai dû faire une erreur. Je ne peux pas me rappeler, mais je sais que

 21   Goran aimait beaucoup change d'uniforme. Il changeait souvent.

 22   Q.  Que voulez-vous dire ?

 23   R.  Pour autant que j'ai pu entendre ce que disaient les Serbes dans le

 24   hangar ainsi que les gardes, les uniformes les plus beaux étaient perçus

 25   comme avantageant celui qui le portait.

 26   Q.  Et sur ces uniformes qu'il portait, est-ce qu'il ajoutait des insignes

 27   de grades ?

 28   R.  Je vous dis que c'est possible, tout comme le commandant Duskanovic le

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  1   faisait. Une possibilité pour cette personne qu'il ait pu atteindre ce

  2   grade de commandant de chef de bataillon avant la guerre.

  3   Q.  Est-ce que Goran Jelisic aurait pu être membre de la police de toute

  4   façon ?

  5   R.  Je pense que si.

  6   Q.  Basé sur quoi ?

  7   R.  Eh bien, il portait des uniformes, mais je l'ai vu porter cet uniforme.

  8   Q.  Vous nous avez dit qu'il portait à la fois l'uniforme de police et

  9   l'uniforme militaire en même temps. Pouvait-il être à la fois policier et

 10   membre de l'armée ?

 11   R.  Maître Cvijetic, je suis sûr que vous ne savez que trop qui distribuait

 12   des uniformes à l'époque au peuple serbe en Bosnie-Herzégovine, qui portait

 13   ce type d'uniforme et quel était le rôle de M. Jelisic lorsqu'il portait

 14   l'autre type d'uniforme, mais je peux supposer très facilement qu'il était

 15   membre de l'armée alors qu'en fait, il était en même temps membre de la

 16   police. Je me base sur l'hypothèse qui est liée à l'uniforme.

 17   Q.  Uniquement sur la base de l'uniforme ?

 18   R.  Oui.

 19   Q.  Est-ce qu'il y a une possibilité que des membres des formations

 20   paramilitaires aient porté également ces uniformes et qu'ils les aient

 21   changés quand ils le voulaient ?

 22   R.  Je suis sûr qu'ils le faisaient. Je suis sûr que vous avez raison. Je

 23   serais d'accord avec vous sur ce point.

 24   Q.  Très bien. Alors je vais citer maintenant votre déclaration, ou plutôt,

 25   votre déposition dans une autre affaire, ou plutôt, c'est toujours la même

 26   affaire, l'affaire Krajisnik, page 456 en commençant à la ligne 4 : 

 27   "Ranko Cesic pouvait venir en portant un uniforme de la JNA," et cetera.

 28   Ici vous avez Ranko Cesic dans un uniforme de l'armée. Aujourd'hui vous

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  1   dites qu'il portait un uniforme de la police.

  2   R.  Oui, je l'ai dit déjà et je le répète aujourd'hui.

  3   Q.  Pourquoi est-ce que vous modifiez votre déposition, Monsieur Gasi ?

  4   R.  Je ne modifie pas ma déposition, Maître Cvijetic. Lorsque les gens me

  5   posent des questions, je leur dis ce que j'ai vu.

  6   Q.  Monsieur Gasic, vous avez dit dans l'affaire Milosevic, n'est-ce pas,

  7   vous avez déposé ?

  8   R.  Oui.

  9   Q.  M. Milosevic était accusé d'avoir eu la responsabilité d'une

 10   participation d'unités de la JNA aux événements à Brcko et vous vous

 11   rappellerez qu'à l'époque le Procureur et Milosevic lui-même vous ont posé

 12   un grand nombre de questions concernant le rôle de la JNA à Brcko ?

 13   R.  Tout à fait d'accord.

 14   Q.  Etait-ce intéressant à l'époque de prouver que les membres de

 15   formations paramilitaires, en fait, appartenaient à la JNA. Et vous verrez

 16   à la page 75, lignes 24 et 25 dans cette affaire, qu'il est dit que Ranko

 17   Cesic était membre de la JNA. A quoi d'autre aurait-il appartenu ? Il

 18   portait un uniforme de camouflage de la JNA ?

 19   R.  Et qu'est-ce qui est en litige ici ?

 20   Q.  Maintenant, vous êtes en train de me dire, ou plutôt, vous nous avez

 21   dit à l'époque à quoi d'autre pouvait-il appartenir ? Aujourd'hui, plus tôt

 22   dans la matinée, vous avez dit qu'il portait un uniforme de police.

 23   R.  C'est ce que m'a demandé le Procureur. Je lui ai dit cela. Je l'avais

 24   vu aussi porter un uniforme de la police.

 25   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Excusez-moi, Maître Cvijetic, serait-il

 26   possible de nous donner le numéro exact de la page dans l'affaire

 27   Milosevic, parce que vous avez dit page 75, mais nous avons un numéro de

 28   séquence qui, vous savez, c'est dans les 26 000 pages, donc pourriez-vous

Page 1842

  1   nous donner le numéro de la page, s'il vous plaît.

  2   M. CVIJETIC : [interprétation] Pour Milosevic, j'ai un texte imprimé du

  3   compte rendu en anglais, donc nous pouvons en fait vérifier le numéro de la

  4   page que je cite, page 75, et la date est le 1er octobre 2009. Enfin, non,

  5   c'est le moment où ça a été imprimé. Page 75, lignes 24 et 25.

  6   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Il n'avait pas de numéro qui se suivait.

  7   Le numéro de la page où commence sa déposition est 26 430.

  8   M. CVIJETIC : [interprétation] Excusez-moi, vous avez absolument raison, 26

  9   449 est ce qui a été imprimé. Je vous présente mes excuses.

 10   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Je vous remercie.

 11   M. CVIJETIC : [interprétation] Vous avez raison, je gardais en fait les

 12   marques sur les pages. Effectivement, nous sommes bien sur cette même page.

 13   Q.  Vous avez dit, et c'était d'une manière ou d'une autre, mais ça ne peut

 14   pas être les deux, qu'il était membre de la JNA, et pas pour une seconde

 15   dans la déposition antérieure vous n'avez dit qu'il portait un uniforme de

 16   la police. Attendez un instant. Dans l'affaire Milosevic, dans l'affaire

 17   Krajisnik, dans l'affaire Tadic, trois affaires en tout, dans ces trois

 18   affaires vous avez dit que Cesic portait un uniforme militaire, et pour la

 19   première fois aujourd'hui vous mentionnez le fait qu'il portait un uniforme

 20   de la police. Et aujourd'hui, les personnes dont on fait le procès sont des

 21   chefs de la police.

 22   Est-ce que ça ne vous paraît pas étrange, Monsieur Gasi ?

 23   R.  Ecoutez, Maître Cvijetic, vous savez très bien qui habillait les gens

 24   en uniforme dans l'ancienne Yougoslavie. Je vous dis ce que j'ai vu à

 25   l'époque. Je ne suis pas en train d'habiller quelqu'un dans un uniforme. Je

 26   dis simplement qu'il portait deux types d'uniforme différents. A qui ou à

 27   quoi appartenait Ranko Cesic, je pense que je le sais, avant que la guerre

 28   n'éclate à Brcko, M. Cesic portait un uniforme de camouflage et il était

Page 1843

  1   membre des unités spéciales de la JNA. Je ne sais pas si son rôle a changé

  2   au cours de la guerre. En tout état de cause, il apparaissait en uniforme

  3   de police lorsqu'il est venu voir. C'est tout ce que je sais, je ne suis

  4   pas en train de faire porter quoi que ce soit à qui que ce soit, et je n'ai

  5   jamais dit que j'avais mis un uniforme de la JNA sur qui que ce soit, mais

  6   c'était l'uniforme qu'il portait. Je suppose que c'était un uniforme de la

  7   JNA. C'est tout ce que je peux vous dire.

  8   Q.  Malheureusement, Monsieur Gasi, je dois vous confronter à vos propres

  9   dépositions. Krajisnik, 4 février 2004, page 406. Encore une fois, Cesic,

 10   soldat portant un uniforme militaire, il n'est pas question d'uniforme de

 11   la police, lignes 17 à 29. Je dois vous dire que je ne sais pas ce que je

 12   dois choisir dans quelle affaire, mais il faut que je vous dise qu'en fait

 13   nous n'avons pu retrouver où que ce soit le fait que vous dites que ces

 14   personnes portaient des uniformes de police. C'est uniquement aujourd'hui

 15   que vous l'avez dit pour la première fois.

 16   R.  J'ai essayé de répondre aux questions. J'ai essayé de dire ce que je

 17   crois savoir, et donc ça dépend de vous. Je n'ai pas eu la moindre

 18   intention de vêtir qui que ce soit dans tel ou tel uniforme de façon à

 19   indiquer quelle était la nature de cela dans l'une quelconque de ces

 20   affaires. C'est mon opinion, et si je me suis trompé, je vous prie de

 21   m'excuser. Si j'ai fait endosser un uniforme à quelqu'un qu'il n'a jamais

 22   porté, je suis sûr que je n'ai pas fait d'erreur, parce que moi je vous ai

 23   dit ce que j'ai vu.

 24   Q.  Toutefois, nous avons toujours quand même l'impression que vous êtes en

 25   train d'adapter votre déposition à l'accusé.

 26   R.  Monsieur Cvijetic --

 27   Q.  Veuillez me permettre de finir. Si c'était intéressant de mettre sur

 28   eux des uniformes militaires dans l'affaire Milosevic, ensuite vous avez

Page 1844

  1   mis des uniformes militaires sur eux, et si les accusés sont des personnes

  2   chargées de la police, à ce moment-là vous leur faites porter des uniformes

  3   de la police. Voilà à quoi ça se ramène, résume. Revenons maintenant au cas

  4   de Dusko Talic.

  5   M. CVIJETIC : [interprétation] Je vais vous donner l'indication de la

  6   page de compte rendu, il s'agit du 15 mai 1996, le numéro de la page est le

  7   739, lignes 11 à 23.

  8   Q.  Ici, vous dites que Goran Jelisic avait mis une étoile sur un uniforme

  9   de camouflage militaire et qu'il aimait être vêtu de façon élégante, qu'il

 10   aimait porter un uniforme spécial et que c'était le grade qu'il portait,

 11   c'était le grade de caporal. Aujourd'hui, vous dites que cette étoile était

 12   une étoile qui apparaissait sur les uniformes d'inspecteur de la police.

 13   Est-ce que vous savez que l'étoile n'existe pas dans la police et que ça ne

 14   représente pas ce qu'ils font dans la police ?

 15   R.  Enfin je n'ai pas bien compris. Je ne suis pas un expert en la matière.

 16   Je vous dis ce que j'ai pensé à l'époque. Mais avant la guerre, il y avait

 17   des étoiles pour les inspecteurs de la police. Si vous avez des

 18   connaissances autres, je veux bien admettre que je ne le sais pas. Je ne

 19   suis pas un expert en la matière. Je ne suis pas un expert de grande

 20   envergure ou de grand calibre pour vous dire quelles étaient les positions

 21   des uns ou des autres.

 22   Q.  Je vais essayer de vous aider. Dans la police il y a des titres

 23   d'inspecteur de la police, il n'y a pas de grade à l'époque. Alors comment

 24   expliquer cette façon de se comporter de votre part aujourd'hui ?

 25   R.  Ecoutez, il n'y a rien à expliquer. Je vous dis ce que j'ai vu. Je ne

 26   vois aucune raison de voir quoi que ce soit de contestable. Je ne suis pas

 27   là pour faire mettre des uniformes aux gens. Je vous dis ce que j'ai vu, et

 28   je vous dis aussi quel type d'uniforme il y a eu.

Page 1845

  1   Q.  Affaire Krajisnik, 4 février 2004, page 456, lignes 1 à 5. Ranko Cesic

  2   est venu dans un uniforme vert olive de la JNA. C'est ce que vous avez dit,

  3   et pour être tout à fait sincère, je peux bien vous le montrer, vous ne

  4   m'avez pas convaincu de l'authenticité de vos propos d'aujourd'hui.

  5   R.  Je regrette si vous n'avez pas entendu de ma part ce que vous vouliez

  6   entendre. Je vous dis que ce que j'ai vu.

  7   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Je crois que le témoin a répondu à ces

  8   questions et il a dit de façon répétitive que Jelisic et Cesic aimaient

  9   changer d'uniforme. Je ne sais pas ce que le conseil cherche à savoir.

 10   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Monsieur Cvijetic, j'aimerais que

 11   vous apportiez des éclaircissements au sujet des photos que vous nous avez

 12   déjà montrées, le P133 et P134 sont des photos qui sont au dossier.

 13   N'était-ce pas des photos de M. Jelisic ? Apparemment il porte ici à ce

 14   moment-là une chemise bleue, ce qui laisse entendre qu'il s'agissait

 15   d'uniforme de la police. Ou alors fais-je là une erreur ?

 16   M. CVIJETIC : [interprétation] Monsieur le Juge, je ne sais pas du tout qui

 17   est sur cette photo, et je n'ai la moindre intention d'identifier

 18   l'individu en question. Dans l'affaire Jelisic, on a déterminé qu'il n'a

 19   jamais été dans les rangs de la police, si ce n'est pas autre chose, et on

 20   peut l'affirmer avec certitude. Pour ce qui est de la photo, ne me posez

 21   pas de question.

 22   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Puisqu'on est en train de parler de

 23   cette photo, j'aimerais qu'on nous la remonte sur nos écrans, si possible,

 24   et je pense qu'il s'agit du P132 ou du P133. 133, oui. Non, la précédente.

 25   C'est cela. Est-ce qu'on peut zoomer du côté droit pour ce qui est de cet

 26   homme qui porte une chemise bleue. Un instant. Zoomez davantage, s'il vous

 27   plaît. Oui, c'est bon.

 28   Alors est-ce que le témoin peut nous dire ce qu'il voit sur la ceinture

Page 1846

  1   portée par cet homme ? Eventuellement on peut zoomer.

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est une matraque que les policiers

  3   portaient avant la guerre. Je crois qu'ils portent la même de nos jours.

  4   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci.

  5   M. CVIJETIC : [interprétation]

  6   Q.  Puisqu'on en est déjà à cette photo, cette façon cow-boy de porter

  7   l'uniforme se trouve-t-elle être appropriée pour un membre de la police ?

  8   R.  Là, vous avez raison, avant la guerre ce n'était pas le cas.

  9   Q.  J'ai donc bien raison. Merci. Monsieur Gasi, dans le port de Luka

 10   lorsque le lieutenant est arrivé, il a dit à Kole de vous emmener. Il

 11   s'agissait d'un lieutenant de la JNA, me semble-t-il ?

 12   R.  Je n'ai pas très compris. On m'a emmené où ?

 13   Q.  Celui qui vous a libéré de Luka ?

 14   R.  C'était un capitaine, Rade Bosic.

 15   Q.  Bien. C'est lui qui a donné l'ordre de vous emmener ?

 16   R.  Enfin il n'a pas donné l'ordre, il est venu me chercher. Il est venu au

 17   hangar et il m'a dit : Tu viens avec moi, on va faire un long voyage.

 18   Q.  Bon. Mais y avait-il un lieutenant quelconque de la JNA ? Je pense que

 19   vous avez mentionné ce lieutenant lorsque Jelesic venait, ou qui portait du

 20   moins l'uniforme de la JNA ?

 21   R.  Non, ce n'était pas un lieutenant. C'était un commandant de la JNA, en

 22   compagnie de deux policiers.

 23   Q.  Et qu'est-ce qu'il a donné comme ordre ?

 24   R.  Il a demandé : Où sont ces tireurs embusqués musulmans ? Et Kosta a

 25   montré deux hommes qui étaient à gauche et à droite de moi. Et ce

 26   commandant est venu avec ces deux autres policiers et il a commencé à

 27   interroger ces deux hommes.

 28   Q.  Bon. Dans votre déclaration aujourd'hui, on nous a montré un

Page 1847

  1   enregistrement vidéo où l'on mentionne Djurkovic Vojislav, comme vous

  2   l'avez dit, était commandant, et il portait des baskets ?

  3   R.  Oui, des Adidas.

  4   Q.  Dans votre déclaration, vous affirmez que les autres détenus du camp

  5   vous ont dit qu'il s'était montré bon à leur égard; est-ce bien exact ?

  6   R.  Oui. 

  7   Q.  Ma dernière question pour vous est celle-ci, Monsieur Gasi, quand Kole

  8   vous a fait sortir et qu'il a dit que vous alliez rentrer chez vous, il a

  9   dit tu rameras encore pour la Yougoslavie, n'est-ce pas ?

 10   R.  Oui.

 11   Q.  Vous féliciteriez-vous d'avoir pu aller encore en compétition d'aviron

 12   pour la Yougoslavie ?

 13   R.  Oui.

 14   M. CVIJETIC : [interprétation] Je me félicite de votre réponse et les

 15   larmes que je vois dans vos yeux confirment la véracité de vos propos.

 16   Merci.

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous remercie aussi.

 18   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Si le témoin veut que nous attendions

 19   un peu avant de continuer, qu'il nous le dise.

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, c'est bon, continuons.

 21   M. KRGOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, nous n'avons pas de

 22   questions à poser en contre-interrogatoire pour ce témoin. Merci.

 23   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Question complémentaire.

 24   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Juste quelques sujets, Monsieur le

 25   Président.

 26   Nouvel interrogatoire par M. Demirdjian : 

 27   Q.  [interprétation] En page 4 825 de ce compte rendu d'aujourd'hui, M.

 28   Cvijetic vous a posé une question relative à votre affiliation au SDA. Je

Page 1848

  1   crois qu'il y a une petite erreur au compte rendu, parce que là-bas on dit

  2   du 26 mai 1990 à novembre 1990 [comme interprété]. Est-ce que c'est bien

  3   exact ou est-ce que c'est une erreur ?

  4   R.  Ça peut être une erreur, en novembre 1992. Je n'ai pas prêté attention,

  5   et c'est moi qui m'en excuse. Mon départ du SDA et de ce conseil exécutif

  6   s'est fait avant les premières élections en Bosnie-Herzégovine. Je ne

  7   voulais pas participer et être présent sur les listes électorales.

  8   Maintenant de là à vous dire si c'était au mois de novembre, je ne sais

  9   pas, je dirais que c'était avant les élections en Bosnie-Herzégovine.

 10   Q.  Du temps de votre détention au camp de Luka, est-ce qu'à ce moment-là

 11   vous étiez membre du SDA ?

 12   R.  Membre non, j'étais peut-être sympathisant.

 13   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Je voudrais qu'on nous montre une fois de

 14   plus le P129 sur nos écrans, s'il vous plaît.

 15   Q.  Il s'agit de la page 5 519 du compte rendu d'aujourd'hui. M.

 16   Cvijetic vous pose des questions sur une carte établie par M. Ristanic, à

 17   savoir par le SDS, et il vous a posé des questions au sujet d'un site

 18   appelé Srpska Varos. Alors j'aimerais qu'on se penche sur la première page

 19   de ce document P129. Au premier paragraphe, il est question de pourcentage

 20   dans cette municipalité de Brcko. Dans la dernière phrase, si vous la

 21   voyez, il est dit qu'il y avait 41 346 personnes d'enregistrées dans la

 22   ville, dont 20 % étaient des Serbes; 6,9 étaient des Croates; 55,8 %

 23   étaient des Musulmans.

 24   Est-ce que cela correspond au souvenir qui est le vôtre de la

 25   composition ethnique de Brcko à l'époque ?

 26   R.  Je crois bien que cela est exact.

 27   Q.  Dernier sujet que je voudrais aborder avec vous, la question des

 28   uniformes portés par M. Cesic et M. Jelesic.

Page 1849

  1   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Nous avons toujours besoin du même

  2   document, page 3 version anglaise, je vais essayer de trouver l'équivalent

  3   en B/C/S. Version B/C/S, ce sera la page 4. Vers le bas de cette page-là,

  4   qui porte un 4 sur sa partie supérieure, et là je vais donner aussi son

  5   numéro ERN.

  6   Q.  En attendant que ce document ne soit montré sur nos écrans, Monsieur

  7   Gasi, vous souvenez-vous d'avoir dit aujourd'hui que certaines personnes

  8   faisaient partie de ce peloton d'intervention de la police, et que M. Cesic

  9   faisait partie dudit peloton d'intervention de la police. Vous en souvenez-

 10   vous ?

 11   R.  Oui.

 12   Q.  Au dernier passage de ce document en version B/C/S, page 3, avant-

 13   dernier paragraphe, vers le milieu de celui-ci, il est dit que dans le

 14   secteur il y avait un certain nombre de membres de troupes paramilitaires

 15   et lorsque la guerre a commencé, il y a eu un certain nombre de ces unités

 16   qui ont vu leurs rangs rejoints par les membres de ce peloton

 17   d'intervention de la police. N'est-ce pas ce que vous avez dit ?

 18   R.  Oui.

 19   Q.  Et ma dernière question s'agissant de ces photos sera celle-ci, je vous

 20   ai demandé si le policier sur ces photos était celui que vous aviez vu le 7

 21   mai. Vous nous avez dit que ce n'était pas le même homme. Alors est-ce que

 22   vous avez été en mesure de reconnaître l'homme sur cette photo lorsque vous

 23   avez vu les photos ?

 24   R.  Non. Je n'ai jamais dit que j'avais reconnu l'homme sur cette photo.

 25   Q.  Merci.

 26   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Je n'ai pas d'autres questions, Messieurs

 27   les Juges.

 28   Toutes mes excuses, Monsieur le Président, j'ai tout de même une dernière

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  1   question encore.

  2   Q.  Monsieur Gasi, le conseil de la Défense vous a dit aujourd'hui qu'à

  3   plusieurs reprises dans les affaires Tadic, Milosevic et Krajisnik vous

  4   aviez déclaré que Cesic et Jelisic portaient un uniforme de camouflage.

  5   Vous rappelez-vous avoir fait une déclaration en 1995 devant M. Buckley et

  6   Mme Castro, représentants du bureau du Procureur de ce Tribunal ?

  7   R.  Oui.

  8   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Je demande l'affichage de la page 9 de

  9   cette déclaration du témoin dans sa version anglaise, grâce au système

 10   Sanction.

 11   Q.  Vous voyez la page à l'écran devant vous, Monsieur ?

 12   R.  Oui.

 13   Q.  A la troisième page, il est question de Goran Jelisic. N'est-il pas

 14   écrit à ce niveau de votre déclaration préalable que Goran Jelisic "aimait

 15   beaucoup changer d'uniforme" ?

 16   R.  En effet.

 17   Q.  Ceci correspond-il à vos souvenirs ?

 18   R.  Oui, c'est ce que j'ai dit dans ma déclaration préalable, oui.

 19   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Merci beaucoup. Pas d'autres questions,

 20   Monsieur le Président.

 21   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Monsieur Gasi, nous vous remercions

 22   d'être venu témoigner une nouvelle fois devant ce Tribunal. Vous pouvez

 23   maintenant vous retirer, et les Juges de cette Chambre vous souhaitent un

 24   bon voyage de retour chez vous.

 25   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci à vous.

 26   [Le témoin se retire]

 27   M. DI FAZIO : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges,

 28   l'Accusation est prête à faire entrer dans le prétoire son témoin suivant,

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  1   M. Ignjic. Je demande d'ailleurs que l'on fasse entrer le témoin.

  2   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

  3   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Témoin. Je

  4   vous prie de prononcer votre déclaration solennelle.

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai

  6   la vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

  7   LE TÉMOIN : CVJETKO IGNJIC [Assermenté]

  8   [Le témoin répond par l'interprète]

  9   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Bonjour, Monsieur. Pourriez-vous, je

 10   vous prie, décliner vos nom et prénom ?

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] Cvjetko Ignjic.

 12   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Quelle est votre profession, Monsieur ?

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Technicien mécanique.

 14   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Pouvez-vous nous dire à quelle date et à

 15   quel endroit vous êtes né, je vous prie.

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] Le 25 décembre 1948, à Covic Polje, dans la

 17   municipalité d'Orasje.

 18   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Quelle est votre appartenance ethnique ?

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] Serbe.

 20   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Avez-vous déjà témoigné devant ce

 21   Tribunal ?

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] Non.

 23   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Très bien.

 24   Maintenant, Di Fazio, à vous.

 25   M. DI FAZIO : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

 26   Interrogatoire principal par M. Di Fazio : 

 27   Q.  [interprétation] Outre les quelques renseignements personnels que vous

 28   venez de fournir aux Juges de la Chambre, je vous demande de confirmer

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  1   l'exactitude des détails suivants que je vous soumets : vous êtes né dans

  2   la municipalité d'Orasje, mais vous avez passé la majeure partie de votre

  3   vie dans la municipalité de Brcko, voire dans la ville de Brcko, n'est-ce

  4   pas ? Et je vous demanderais de ne pas simplement hocher de la tête, mais

  5   de prononcer une réponse. Oui ou non ?

  6   R.  Oui, dans la ville de Brcko.

  7   Q.  Je vous remercie. En 1972, vous êtes entré dans la police, après quoi

  8   votre carrière s'est déroulée en tant que technicien de scènes de crimes au

  9   sein de la police, n'est-ce pas ?

 10   R.  Oui.

 11   Q.  Vous avez continué à travailler pour la police jusqu'en 1993, moment où

 12   vous avez pris votre retraite, mais avez tout de même continué à effectuer

 13   un travail de policier dans le cadre de vos obligations de guerre, n'est-ce

 14   pas ?

 15   R.  En effet.

 16   Q.  Dans le cadre de vos devoirs en tant que technicien de scènes de

 17   crimes, est-ce que vous étiez tenu d'examiner une scène de crime pour

 18   rassembler et enregistrer tout indice ou élément de preuve que vous auriez

 19   été susceptible d'y trouver, tel que des photographies, des empreintes

 20   digitales et autres éléments comparables ?

 21   R.  En effet.

 22   Q.  Et je crois que durant votre carrière, vous avez procédé à l'examen de

 23   5 000 scènes de crimes à peu près, 1 000 d'entre elles étant des scènes de

 24   crime d'assassinat, n'est-ce pas ?

 25   R.  Oui.

 26   Q.  Je vous remercie. J'aimerais maintenant appeler votre attention sur les

 27   événements qui se sont déroulés à Brcko à la fin du mois d'avril, en tout

 28   cas au mois d'avril et mai 1992. A cette époque-là, étiez-vous marié ?

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  1   R.  Oui.

  2   Q.  Et au mois d'avril, avez-vous emmené votre épouse quelque part en

  3   particulier ?

  4   R.  Un peu avant le mois de mai, je l'ai emmenée à Bijeljina.

  5   Q.  Pourriez-vous expliquer pour quelle raison vous avez fait cela ?

  6   R.  La guerre était dans l'air. On sentait une tension. J'avais peur.

  7   Q.  Même si l'on pouvait s'attendre à ce que la guerre éclate et même s'il

  8   y avait la tension dans l'air, est-ce que les hostilités avaient déjà

  9   effectivement éclaté dans la ville ou la municipalité de Brcko ?

 10   R.  La guerre a éclaté très précisément le 1er mai, dans l'après-midi.

 11   Q.  D'après vous, quel est l'événement particulier qui symbolise ou, en

 12   tout cas, incarne le début de la guerre ?

 13   R.  A mon avis, il s'agit des tirs d'armes à feu qui visaient la partie est

 14   de la ville de Brcko, entre Grtica [phon] et Begovaca.

 15   Q.  De quels tirs d'armes à feu parlez-vous ?

 16   R.  Eh bien, on a entendu des détonations.

 17   Q.  Ce quartier dont vous parlez, vous ai-je bien compris, fait partie

 18   intégrante de la ville de Brcko en tant que telle, n'est-ce pas ?

 19   R.  Oui.

 20   Q.  Je vous remercie. J'aimerais maintenant rapidement vous soumettre un

 21   document.

 22   M. DI FAZIO : [interprétation] Je demande l'affichage du document 65 ter

 23   numéro 92. J'indique à Mme l'huissière que le passage qui m'intéresse dans

 24   la version en B/C/S que j'ai l'intention de soumettre au témoin se trouve

 25   en troisième page de ce document. C'est le passage surmonté par le titre

 26   "Brcko". Et il serait utile que l'on affiche également la version anglaise

 27   de ce même passage.

 28   Q.  Alors, Monsieur, ce document est le document qui, d'après les calculs

Page 1855

  1   effectués par vous, est préliminaire à l'éclatement de la guerre à Brcko.

  2   Il porte la date du 21 avril 1992. Apparemment, il est adressé au ministre

  3   de l'Intérieur. Il est signé par l'homme dont on voit le nom dans la

  4   version B/C/S du texte, à savoir Predrag Jesuric.

  5   R.  Jesuric.

  6   Q.  Jesuric, effectivement. Connaissiez-vous cet homme avant la guerre ?

  7   R.  Non.

  8   Q.  Aviez-vous entendu dire qu'il était le chef du poste de sécurité

  9   publique de Bijeljina ?

 10   R.  Non.

 11   Q.  J'espère que dans le document affiché à l'écran vous parviendrez à lire

 12   le passage qui concerne Brcko.

 13   R.  Je ne suis pas au courant de ce qui est écrit ici.

 14   Q.  En effet, je comprends tout à fait. Je sais que vous n'êtes pas

 15   l'auteur de ce document, mais je voulais simplement vérifier auprès de vous

 16   un certain nombre de choses écrites dans ce document grâce à des questions

 17   que je vais vous poser. L'auteur de ce document, ce Predrag Jesuric, parle

 18   ici de Brcko et il déclare qu'il se procure des renseignements au sujet de

 19   la municipalité serbe de Brcko par des collègues de la JNA avec lesquels le

 20   poste de sécurité publique de Bijeljina était en contact. Ensuite, il

 21   déclare qu'il n'y a pas de combat dans le secteur.

 22   Pour autant que vous le sachiez, et je fais appel à votre expérience

 23   en tant que membre des forces de police, étiez-vous au courant du fait que

 24   la JNA transmettait des renseignements ou des informations au chef du poste

 25   de sécurité publique ? Est-ce que dans cette période que vous avez passée

 26   dans les rangs de la police, ceci vous serait venu à l'esprit ? Est-ce que

 27   vous le saviez ?

 28   R.  Je ne connais pas les rapports qui existaient entre la police et

Page 1856

  1   l'armée ni le type de communication établi entre ces deux instances.

  2   Q.  Le document poursuit en faisant référence dans les quelques dernières

  3   phrases du texte à :

  4   "Des réunions qui se faisaient en présence des chefs des postes de

  5   sécurité publique, et notamment dans les municipalités nouvellement créées

  6   par les Serbes. Et il est fait état en particulier d'une telle réunion dans

  7   le poste de police de Bijeljina."

  8   En avril 1992, est-ce que vous aviez connaissance d'une quelconque

  9   municipalité serbe créée à Zvornik et à Brcko ?

 10   R.  Non.

 11   Q.  En avril 1992, vous rappelez-vous qui était le chef du poste de police

 12   de la ville de Brcko et quelle était son appartenance ethnique ? Si vous ne

 13   vous rappelez pas son nom, essayez au moins de vous rappeler l'appartenance

 14   ethnique de cet homme ?

 15   R.  Il est certain qu'il s'agissait d'un Croate, d'un catholique. Je pense

 16   que son prénom était Mijo, mais je n'en suis pas sûr. Le HDZ l'avait

 17   délégué par application des critères proportionnels applicables aux partis

 18   politiques et il a été nommé chef du SUP.

 19   Q.  Je vais maintenant vous demander quelques événements complémentaires au

 20   sujet des événements survenus début mai à Brcko. Est-ce qu'à ce moment-là

 21   il y avait un autre chef de police à Brcko; et si oui, quel était son nom ?

 22   R.  Je ne m'en souviens pas.

 23   Q.  Je vous remercie.

 24   M. DI FAZIO : [interprétation] Monsieur le Président, je demande le

 25   versement au dossier de ce document ou, en tout cas, son enregistrement aux

 26   fins d'identification.

 27   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Et vous demandez le versement de ce

 28   document dans quel but ?

Page 1857

  1   M. DI FAZIO : [interprétation] Ce document en tant que tel est pertinent eu

  2   égard à tout ce qui concerne l'entreprise criminelle commune, et notamment

  3   les communications qui pouvaient exister entre l'armée et la police. Il est

  4   également pertinent pour démontrer la création d'une municipalité serbe à

  5   Brcko. Et il permet également d'établir le genre de jeu qui se jouait dans

  6   la municipalité de Brcko dans la période immédiatement antérieure à

  7   l'éclatement de la guerre en 1992, c'est-à-dire en mai 1992.

  8   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Mais en quoi est-ce que ceci a un

  9   rapport avec le témoin qui est ici ?

 10   M. DI FAZIO : [interprétation] Eh bien, c'est la raison pour laquelle j'ai

 11   dit, au cas où la Chambre ne serait pas prête à admettre le versement de ce

 12   document au dossier, que j'en demandais, pour le moins, l'enregistrement

 13   aux fins d'identification.

 14   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Monsieur Di Fazio, quelle est

 15   exactement la nature de ce document ?

 16   M. DI FAZIO : [interprétation] Il ne porte pas l'en-tête indiquant qu'il

 17   s'agirait d'une décision. Manifestement, c'est une lettre ou en tout cas

 18   une forme de communication écrite adressée au ministre de l'Intérieur ou à

 19   son adjoint par un chef de police, le chef du poste de police régional en

 20   l'espèce.

 21   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] De Bijeljina.

 22   M. DI FAZIO : [interprétation] Qui était effectivement basé à Bijeljina.

 23   Mais le texte est adressé au ministre ou à son adjoint.

 24   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Me Cvijetic est debout, oui.

 25   M. CVIJETIC : [interprétation] Monsieur le Président, vous avez anticipé

 26   sur mon objection, qui est fondamentale. D'après la lecture de ce document,

 27   nous ne pouvons même pas identifier ce document. Le témoin, pour sa part,

 28   ne sait rien au sujet de ce document. Et vous voyez quelle est la qualité

Page 1858

  1   physique de ce document par vous-même. Donc il serait plus acceptable que

  2   la demande de versement au dossier de ce document se fasse lorsque seront

  3   interrogés en qualité de témoins des membres de la police qui auront

  4   quelques renseignements au sujet de ce document. Le témoin qui est ici a

  5   déclaré tout à fait clairement qu'il ne savait rien de ce document.

  6   M. DI FAZIO : [interprétation] Permettez-moi, Monsieur le Président, un

  7   simple commentaire. C'est certainement un document qui mérite d'être

  8   enregistré aux fins d'identification, si les Juges de la Chambre sont

  9   opposés à l'admission complète de ce document en tant qu'élément de preuve.

 10   Il serait tout de même bon qu'il en soit fait référence au compte rendu

 11   d'audience. La seule façon de suivre le parcours de ce document consiste à

 12   l'enregistrer aux fins d'identification. Et si plus tard au cours du procès

 13   il peut être admis en tant qu'élément de preuve, cela pourra se faire grâce

 14   à d'autres témoins.

 15   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Monsieur Di Fazio, je ne suis pas sûr de

 16   comprendre ce que vous voulez dire par il devrait être enregistré aux fins

 17   d'identification. J'ai entendu ce que vous avez dit, mais j'avoue que je ne

 18   suis pas tout à fait votre raisonnement.

 19   M. DI FAZIO : [interprétation] Mon collègue de la Défense vient de faire

 20   objection, y compris à son enregistrement aux fins d'identification. Je dis

 21   que si les Juges ne sont pas entièrement d'accord avec moi quant à

 22   l'opportunité d'une admission complète de ce document en tant qu'élément de

 23   preuve, pour le moins ce document devrait être enregistré aux fins

 24   d'identification de façon à ce que plus tard, lorsque de nouveaux éléments

 25   de preuve relatifs à ce document seront fournis, ou quant à sa provenance

 26   en particulier et à l'identité de son auteur, à ce moment-là, le document

 27   déjà enregistré aux fins d'identification pourra être admis complètement en

 28   tant qu'élément de preuve.

Page 1859

  1   [La Chambre de première instance se concerte]

  2   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Donc nous acceptons son enregistrement

  3   aux fins d'identification.

  4   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] En tant que pièce P141, enregistrée aux

  5   fins d'identification, Monsieur le Président, Messieurs les Juges.

  6   M. DI FAZIO : [interprétation] Je vous remercie.

  7   Q.  Précédemment dans votre déposition, vous nous avez dit que vous étiez

  8   allé à Bijeljina et que vous aviez emmené votre femme là, et je pense que

  9   c'était pour la mettre en sécurité. Qu'est-ce que vous avez fait lorsque

 10   vous êtes revenu à Brcko ?

 11   R.  Je suis allé chez moi, à la maison.

 12   Q.  Est-ce que vous êtes allé au poste de police ou est-ce que vous êtes

 13   allé vous présenter pour le travail au moment où vous êtes revenu de

 14   Bijeljina ?

 15   R.  Non. Je crois que c'était un week-end. C'était le 1er mai, donc il y

 16   avait deux jours de congé. Je pense que je suis allé chez moi sans aller

 17   d'abord au poste de police.

 18   Q.  Est-ce que par la suite vous êtes allé au poste de police; et dans

 19   l'affirmative, comment est-ce que ça a eu lieu ?

 20   R.  Quand la nouvelle a été publiée sur Radio Brcko, ça a été appelé Serbe,

 21   la radio de Brcko à ce moment-là, nous appelant tous à nous présenter au

 22   poste, j'y suis allé. C'était le 1er mai dans le début de la soirée ou en

 23   fin d'après-midi.

 24   Q.  Est-ce que c'était essentiellement un appel à mobilisation, une sorte

 25   de mobilisation ?

 26   R.  Oui.

 27   Q.  Et est-ce qu'il s'agissait du poste de police central de Brcko

 28   proprement dit ?

Page 1860

  1   R.  Oui.

  2   Q.  Est-ce que vous avez vu des policiers qui étaient présents ?

  3   R.  Oui.

  4   Q.  Quelle était l'origine ethnique ?

  5   R.  C'était des Serbes.

  6   Q.  Avez-vous vu d'autres personnes, indépendamment des policiers, qui se

  7   trouvaient à l'intérieur du poste de police ou autour du poste de police ?

  8   R.  Oui, il y avait des soldats.

  9   Q.  Pouvez-vous, s'il vous plaît, les décrire ou décrire les uniformes

 10   qu'ils portaient et leur origine ethnique, s'il vous plaît ?

 11   R.  Pour moi, ils étaient, pour la plupart du temps, inconnus. Certains

 12   portaient des uniformes de camouflage, d'autres portaient des uniformes

 13   plus anciens.

 14   Q.  Et leur origine ethnique, s'il vous plaît ? D'où venaient-ils ?

 15   R.  Je ne sais pas vraiment. Pour moi, c'étaient essentiellement des

 16   inconnus.

 17   Q.  Etaient-ce des Croates ?

 18   R.  Non. Je pense que c'étaient des Serbes, mais je ne sais pas vraiment.

 19   Je suppose que c'étaient des Serbes.

 20   Q.  Est-ce qu'ils étaient armés ?

 21    R.  Oui.

 22   Q.  Et cette fois-là, lorsque vous êtes retourné au poste de police, est-ce

 23   que vous avez appris pourquoi ils étaient là, ce qu'ils venaient faire au

 24   poste de police ?

 25   R.  J'ai appris que la veille au soir ils avaient libéré le SUP, que le

 26   chef avait été remplacé et qu'il y avait maintenant un nouveau chef qui

 27   s'était installé. Et le poste de police était devenu le SUP serbe ou le

 28   poste de police serbe, l'un ou l'autre.

Page 1861

  1   Q.  Merci. Pourriez-vous nous décrire quelle était l'atmosphère au poste de

  2   police à cette occasion. Est-ce que c'était une atmosphère relativement

  3   calme, une situation où les choses étaient en ordre, ou est-ce que c'était

  4   différent ? Tâchez de faire de votre mieux et de donner aux membres de la

  5   Chambre une idée de ce qu'était l'atmosphère lorsque vous êtes retourné là-

  6   bas et que vous avez appris tout cela ?

  7   R.  C'était assez gênant. Tous les bureaux avaient été forcés. Il y avait

  8   des objets qui avaient été volés ici et là. On entendait des coups de feu

  9   en ville. C'était le chaos. C'était vraiment une atmosphère de guerre.

 10   Q.  Est-ce que cette description du chaos correspond également au poste de

 11   police ?

 12   R.  Oui.

 13   Q.  Est-ce que vous êtes resté sur place ?

 14   R.  Non, je suis rentré chez moi dans la soirée.

 15   Q.  Est-ce que vous êtes retourné au poste de police pendant les quelques

 16   journées qui ont suivi ou non ?

 17   R.  Non, je suis retourné chez moi. Après quatre ou cinq jours, ils sont

 18   venus me chercher pour me présenter au département de la police judiciaire,

 19   police pénale, en disant que le poste de police serbe avait été créé,

 20   appelé donc à la police judiciaire serbe, et que je devais me présenter

 21   pour travailler. Et c'est ce que j'ai fait.

 22   Q.  Est-ce que vous aviez pris des congés ou est-ce que vous aviez eu la

 23   permission de retourner chez vous pour quelques jours ?

 24  R.  Non. Le 1er mai, lorsque je suis rentré chez moi dans la soirée, dans le

 25   quartier où se trouve ma maison, mes voisins et moi-même étions de service

 26   dans l'une des maisons, mais dans ce quartier, il n'y avait pas de combats.

 27   Q.  Et il s'agit de quel quartier dans Brcko ?

 28   R.  C'est le quartier de Es. C'est le nom.

Page 1862

  1   Q.  Y avait-il des combats qui se déroulaient en ville, à Brcko proprement

  2   dite ?

  3   R.  Dans les premiers jours, il y a eu des combats autour de Izvori [phon].

  4   C'est un quartier de la ville dont la population est essentiellement

  5   musulmane. Et puis, au centre-ville proprement dit, dans la partie est de

  6   la ville, il n'y avait pas de combats.

  7   Q.  Je vous remercie.

  8   M. DI FAZIO : [interprétation] Je souhaiterais qu'on montre maintenant au

  9   témoin la pièce 947 de la liste 65 ter, s'il vous plaît, à la fois

 10   l'anglais et le B/C/S.

 11   Q.  En attendant que cela ne paraisse à l'écran, je pense que vous pouvez

 12   déjà voir le texte en B/C/S. Il s'agit du deuxième paragraphe, c'est celui-

 13   là qui m'intéresse. Vous voyez d'abord sur ce document qu'il est daté du 6

 14   mai 1992. C'est un document qui est un rapport quotidien du ministère de

 15   l'Intérieur qui est signé pour le ministre de l'Intérieur et qui est de

 16   Mico Stanisic. Et il y est question de : "Combats très violents en cours à

 17   Brcko. D'après les rapports les plus récents, les unités territoriales

 18   serbes lançaient une offensive."

 19   R.  Oui. C'est plus ou moins comme ça, bien qu'il y ait eu des combats tout

 20   au long du mois de mai. Il y a eu des combats autour de Brcko, en pratique,

 21   pendant toute la guerre.

 22   Q.  Je vous remercie. Donc il y avait de violents combats à l'époque, le 6

 23   mai, d'après ce que vous vous rappelez, ou est-ce que c'était juste des

 24   poches de résistance autour de la ville ? Pouvez-vous vous en souvenir ?

 25   R.  Je crois qu'au cours des deux premiers mois, il y a eu de violents

 26   combats quotidiens.

 27   M. DI FAZIO : [interprétation] Monsieur le Président, je voudrais demander

 28   une possibilité de verser ce document au dossier ou qu'il ait une cote

Page 1863

  1   provisoire aux fins d'identification, précisément sur la même base que pour

  2   le document précédent, et je voudrais ajouter que ce document-ci ainsi que

  3   le précédent visent, soit l'un soit l'autre vise en particulier l'un des

  4   accusés, M. Stanisic, puisque le document a été signé pour son compte ou

  5   émane de lui. Et dans ce cas précis, le document a été signé pour M.

  6   Stanisic. Tandis que le document précédent lui était adressé, était adressé

  7   au ministère.

  8   Mais je voudrais qu'il soit bien clair quelles sont les implications

  9   ou les conséquences, c'est-à-dire soit d'admettre le document ou faire au

 10   moins qu'il reçoive une cote provisoire aux fins d'identification, jusqu'à

 11   ce qu'il y ait des éléments de preuve par la suite en l'espèce.

 12   [La Chambre de première instance se concerte]

 13   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Maître Cvijetic.

 14   M. CVIJETIC : [interprétation] Monsieur le Président, j'élève  une

 15   objection identique à la précédente. Mon confrère de l'Accusation a lui-

 16   même énoncé le motif pour lequel nous ne pouvons pas accepter l'admission

 17   de ce document comme élément de preuve. Quant à le marquer avec une cote

 18   provisoire aux fins d'identification, nous sommes entre vos mains.

 19   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Le document est marqué aux fins

 20   d'identification.

 21   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Monsieur Di Fazio, est-ce que vous

 22   pourriez -- [hors micro] Je ne suis pas sûr à savoir à qui ceci --

 23   L'INTERPRÈTE : Microphone, s'il vous plaît.

 24   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Pourriez-vous, s'il vous plaît, nous

 25   éclairer sur un point. A qui est-ce que ce document est adressé ? Je vois

 26   qu'il est signé par Mico Stanisic au nom du MUP à Sarajevo, mais quel est

 27   le destinataire ?

 28   M. DI FAZIO : [interprétation] Il semblerait qu'il s'agisse tout au moins

Page 1864

  1   d'un document du ministère de l'Intérieur. C'est un rapport quotidien, et

  2   dans le coin en haut à gauche du document, il est question du ministère, et

  3   je dois dire que c'est un document qui fait partie des archives du

  4   ministère de l'Intérieur pour le moins.

  5   Maintenant, je ne peux pas vous dire tel qu'il se présente, ce document,

  6   s'il était entendu qu'il pourrait aller plus loin que le ministère de

  7   l'Intérieur, c'est-à-dire adressé à d'autres organes gouvernementaux ou

  8   d'autres représentants gouvernementaux. A ce stade, il n'y a aucun élément

  9   de preuve à ce sujet. Mais le document tel qu'il se présente consiste

 10   essentiellement en un rapport quotidien qui vient du ministère de

 11   l'Intérieur. Il ne peut pas faire la lumière à ce stade dans la présente

 12   affaire.

 13   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Très bien, Monsieur Di Fazio.

 14   Ceci explique tout au moins la raison pour laquelle la Chambre n'est pas en

 15   mesure d'admettre le document comme élément de preuve. Donc le maximum que

 16   nous puissions faire c'est de lui attribuer une cote MFI.

 17   M. DI FAZIO : [interprétation] Oui. Je me pose la question, je

 18   voudrais savoir ce qui a été juste confirmé par mon collègue, M.

 19   Demirdjian. Il y aura des éléments de preuve en l'espèce montrant que ces

 20   documents ont été plus tard envoyés au gouvernement.

 21   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Le document est admis comme pièce P142

 22   marqué aux fins d'identification, Monsieur le Président.

 23   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Maître Cvijetic, vous avez quelque chose

 24   à dire avant que nous ne levions la séance ?

 25   M. CVIJETIC : [interprétation] Je pense que nous pouvons éclaircir les

 26   choses concernant un malentendu. La signature de ce document n'est pas la

 27   signature de Mico Stanisic. Le Procureur lui-même a dit qu'il avait été

 28   signé au nom de Mico Stanisic, ce qui veut dire que le document a été signé

Page 1865

  1   par quelqu'un d'autre. C'est tout ce que je voulais préciser, rien d'autre.

  2   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Bon. Il n'y a pas de contestation à ce

  3   sujet. Bien. Alors nous reviendrons dans cette salle dans 60 minutes.

  4   [Le témoin quitte la barre]

  5   --- L'audience est levée pour le déjeuner à 13 heures 46.

  6   --- L'audience est reprise à 14 heures 50.

  7    [Le témoin vient à la barre]

  8   M. PANTELIC : [interprétation] Pour le compte rendu d'audience, Monsieur le

  9   Président, avant le début des questions au témoin, pour le compte rendu

 10   d'audience, je vous indique que je suis revenu. Je vous remercie.

 11   M. LE JUGE HARHOFF : [hors micro]

 12   M. PANTELIC : [interprétation] Je me suis occupé de réorganiser les

 13   différents éléments du mécanisme. Je vous remercie.

 14   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Je rappelle au témoin qu'il est toujours

 15   tenu par sa déclaration solennelle.

 16   Monsieur Di Fazio, à vous.

 17   M. DI FAZIO : [interprétation] Oui, je vous remercie, Monsieur le

 18   Président. Je demande que l'on soumette au témoin le document enregistré

 19   aux fins d'identification ce matin qui est, en fait, une pièce à

 20   conviction, la pièce P139. Cette pièce a été enregistrée pendant

 21   l'interrogatoire principal du témoin. P139, enregistrée aux fins

 22   d'identification, une liste des personnes travaillant pour la police.

 23   J'aimerais que l'on affiche également la version anglaise. Ah, elle arrive.

 24   Très bien. Merci. Nous allons entre-temps commencer sur la base du document

 25   en B/C/S.

 26   Q.  Ce document porte la date du 7 octobre 1992. Il se présente comme une

 27   liste des personnes salariées par le poste de sécurité publique de Brcko.

 28   Ce document concerne le versement des salaires de ses employés pour le mois

Page 1866

  1   de septembre 1992.

  2   En haut de la page, nous voyons, face au numéro 1, le nom de Zarko Cosic,

  3   dont il est indiqué qu'il est le chef du poste de police, et vous pouvez me

  4   croire sur parole, c'est lui également qui a signé et estampillé ce

  5   document. Qui était Zarko Cosic ? 

  6   R.  Il était chef du SUP de Brcko.

  7   Q.  Savez-vous à quel moment il a été nommé à son poste et comment il en

  8   est arrivé à être nommé chef de la police ?

  9    R.  M. Veselic, l'ancien chef du poste de police, est décédé, je ne sais

 10   pas exactement à quel moment, je ne me rappelle pas la date exacte, et je

 11   crois que c'est Zarko Cosic qui lui a succédé.

 12   Q.  Très bien. Je ne crois pas que ce point soit contesté. Vous avez parlé

 13   d'un homme dénommé Dragan Veselic, qui était mort suite à un accident

 14   d'automobile en Serbie, et c'est donc ce M. Cosic qui lui a succédé; c'est

 15   bien cela ?

 16   R.  Oui.

 17   Q.  Je vous remercie. Je vous prierais maintenant de jeter les yeux sur la

 18   liste des noms que nous voyons ici en page 1 en prêtant une attention au

 19   numéro 13, bien sûr, au regard duquel se trouve, semble-t-il, votre nom.

 20   Tous ces noms sont-ils bien les noms de policiers ?

 21   R.  Zarko Gajic, oui; Petar Gavrilovic, oui; Mico Sinikic [phon], non --

 22   Q.  Je me permets de vous interrompre, car vous n'avez pas besoin de lire

 23   ces noms à haute voix. Vous pouvez en prendre connaissance silencieusement

 24   en passant en revue toute cette liste, et faites-nous savoir quand vous

 25   aurez besoin qu'on vous affiche la page suivante. Mais sur cette première

 26   page du document, tous ces noms sont-ils bien des noms d'officiers de

 27   police ?

 28   R.  Non.

Page 1867

  1   Q.  Qui n'est pas officier de police sur cette liste ?

  2   R.  Le nom en regard du numéro 2, en regard du numéro 5, en regard du

  3   numéro 6, en regard du numéro 11, du numéro 12 --

  4   Q.  Très bien. Avant de poursuivre, je vous demande s'il y avait des

  5   salariés qui travaillaient au nom du SUP ?

  6   R.  Ces personnes ont été admises au sein du SUP dans le but de compléter

  7   les effectifs, car il n'y avait pas de Croates ou de Musulmans dans ces

  8   effectifs.

  9   Q.  Je vous remercie de votre réponse. Donc Trifka Zimonjic, le nom que

 10   l'on trouve au regard du numéro 35, c'était la femme de ménage. Elle

 11   n'accomplissait aucune tâche de police, n'est-ce pas ? Elle se contentait

 12   de faire le ménage au poste de police; c'est bien cela ?

 13   R.  Oui.

 14   Q.  Et bien sûr, le numéro que l'on trouve au regard du numéro 13, à savoir

 15   Cvjetko Ignjic, vous concerne vous, c'est bien votre nom qui figure là, il

 16   est décrit comme étant technicien légiste ?    

 17   R.  Oui.

 18   M. DI FAZIO : [interprétation] J'aimerais maintenant que l'on soumette la

 19   deuxième page de ce document au témoin.

 20   Q.  Monsieur, je vous prierais encore une fois de prendre connaissance de

 21   la teneur de cette deuxième page, et je vous demande si en dehors des

 22   personnes dont les noms figurent ici dans le but de compléter les

 23   effectifs, tous les autres noms sont bien ceux d'officiers de police qui

 24   travaillaient au poste de police de Brcko en 1992 ?

 25   R.  Oui.

 26   Q.  Pour en terminer, je vais vous interroger au sujet de certains noms en

 27   particulier. Je demande que l'on fasse défiler la page jusqu'au nom qui se

 28   trouve en regard du numéro 100. Je pense d'ailleurs que c'est peut-être en

Page 1868

  1   page suivante que figure son nom.

  2   Q.  Petar Djokic, qui était-ce ?

  3   R.  Avant la guerre, il avait été diplômé de l'école de police et il

  4   s'était lancé dans la politique avant la guerre. Il faisait partie du

  5   comité municipal. Et ensuite, je ne sais pas quand exactement, mais en tout

  6   cas il a exercé un commandement, mais il était policier de profession.

  7   Q.  Je vous remercie.

  8   M. DI FAZIO : [interprétation] Je demande le versement au dossier des trois

  9   pages de ce document, Monsieur le Président.

 10   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Oui.

 11   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] La pièce P139 est admise en tant

 12   qu'élément de preuve, Monsieur le Président, Messieurs les Juges.

 13   M. DI FAZIO : [interprétation] Je vous remercie. J'en ai terminé de ce

 14   document pour le moment. J'aimerais maintenant --

 15   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Monsieur Di Fazio, avant que nous ne

 16   laissions ce document de côté, je me demandais si cela pourrait avoir le

 17   moindre intérêt de demander au témoin s'il peut nous donner l'appartenance

 18   ethnique des personnes dont les noms figurent sur cette liste, car si je me

 19   souviens bien, à un moment ultérieur en septembre, je pense.

 20   M. DI FAZIO : [interprétation] Oui, je peux le faire. Je vais le faire.

 21   Q.  Encore une fois, nous avons toujours ce document sous les yeux et j'ai

 22   appelé votre attention jusqu'à présent, au cours des quelques dernières

 23   minutes, sur tous les noms dont vous avez pris connaissance, en tout cas

 24   dans les deux premières pages de ce document. Eh bien, quelle était

 25   l'appartenance ethnique des personnes dont les noms figuraient sur ces deux

 26   pages ?

 27   R.  Je crois que la majorité de ces personnes étaient Serbes.

 28   Q.  Voyez-vous le nom d'un seul Croate ou d'un seul Musulman quelque part

Page 1869

  1   dans ces deux pages ?

  2   R.  Non, pour le moment, non.

  3   M. DI FAZIO : [interprétation] Monsieur le Président, souhaitez-vous que

  4   j'entre davantage dans les détails encore ?

  5   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Non, je vous remercie.

  6   M. DI FAZIO : [interprétation]

  7   Q.  Monsieur, vous avez dit que vous aviez emmené votre femme à Bijeljina,

  8   que vous étiez revenu, que vous aviez pris quelques jours de congé, et puis

  9   que vous étiez retourné au travail. A ce moment-là, vous avez décrit la

 10   scène à laquelle vous avez assisté lorsque vous êtes rentré. Avez-vous eu

 11   connaissance de meurtre ou d'assassinat commis dans la ville de Brcko au

 12   moment où vous êtes revenu au poste de police ?

 13   R.  Oui, c'étaient deux collègues qui travaillaient déjà avec moi avant la

 14   guerre. C'est d'eux que j'ai appris à peu près tout ce qui s'était passé.

 15   Q.  D'après eux, que s'était-il passé à Brcko ?

 16   R.  Eh bien, ils m'ont dit qu'il y avait pas mal de gens qui avaient été

 17   tués, Dragisa m'a dit que jusqu'à ce moment-là une quarantaine de cadavres

 18   avaient été retrouvés.

 19   Q.  L'homme dont vous venez de citer le prénom, Dragisa, est-ce bien

 20   Dragisa Tesic ?

 21   R.  Oui, Dragisa Tesic, inspecteur de la police qui travaillait à nos

 22   côtés.

 23   Q.  Je vous remercie. Avez-vous été informé de l'appartenance ethnique des

 24   personnes tuées ?

 25   R.  On racontait que la majorité des personnes abattues étaient des

 26   Musulmans qui étaient restés dans la ville. La majorité, je veux dire. Je

 27   ne saurai pas vous dire exactement s'il s'agissait de 100 % des cadavres,

 28   mais en tout cas il s'agissait bien de la majorité d'entre eux.

Page 1870

  1   Q.  Je ne crois pas qu'il soit contesté qu'au mois de mai 1992, vous avez

  2   accompli un travail déterminé dans une fosse commune. Je voudrais vous

  3   demander comment il se fait que vous ayez eu à accomplir ce travail ?

  4   R.  Quand on m'a appelé le 5 ou 6 mai, je ne me souviens pas quand c'était

  5   exactement, quand on a m'a appelé donc au SUP, je ne sais plus qui m'a dit

  6   cela, je ne sais pas si c'est Dragisa ou le chef, mais en tout cas il m'a

  7   été dit que je devais aller procéder à l'identification des cadavres qu'il

  8   fallait enterrer. Je devais remplacer Dragisa qui avait été appelé

  9   ailleurs, parce qu'avant mon retour, c'est Dragisa qui faisait ce travail.

 10   Q.  Très bien. Donc vous avez été chargé de procéder à ce travail

 11   d'identification, et cette consigne vous a été donnée par un policier,

 12   qu'il s'agisse de Dragisa ou de Veselic; c'est bien ça ? Vous ai-je bien

 13   compris ?

 14   R.  Oui.

 15   Q.  Vous a-t-on dit où vous deviez vous rendre pour trouver cette fosse ?

 16   R.  Oui, c'est Dragisa qui me l'a indiqué, je crois, je n'en suis pas tout

 17   à fait sûr, car cela fait longtemps. Il m'est difficile de me rappeler tout

 18   cela.

 19   Q.  Merci. Vous êtes-vous rendu sur place finalement et avez-vous examiné

 20   les lieux ?

 21   R.  Oui, oui.

 22   Q.  Quand vous êtes arrivé sur place, quelle est la première chose que vous

 23   avez vue ? Je vous parle de la première fois où vous êtes allé à cet

 24   endroit.

 25   R.  C'était la route qui menait à Bijeljina, puis il y avait un chemin qui

 26   menait à droite vers une ferme. Et du côté droit de ce chemin, j'ai vu une

 27   fosse de 5 ou 6 mètres de large et 10 à 15 mètres de long, je ne sais pas

 28   exactement quelles étaient les dimensions. Cette fosse était d'une

Page 1871

  1   profondeur de 3 mètres environ, et à l'intérieur de la fosse, j'ai vu un

  2   certain nombre de cadavres.

  3   Q.  Je vous remercie. Y avait-il une ferme non loin de ce lieu?

  4   R.  Oui.

  5   Q.  Vous n'auriez pas le nom de cette ferme par hasard ?

  6   R.  C'était la ferme de Bimeks. Bimeks, c'était une entreprise qui, avant

  7   la guerre, produisait des produits carnés.

  8   Q.  Avez-vous reçu une aide quelconque de la police dans ce travail

  9   d'identification ou vous êtes-vous chargé de ce travail seul?

 10   R.  Les ouvriers de la municipalité qui assuraient le transport m'ont

 11   apporté leur aide.

 12   Q.  Mais vous avez été le seul policier qui a travaillé sur ce site ?

 13   R.  Oui, le seul technicien de la police criminelle.

 14   Q.  Pourriez-vous dire aux Juges de la Chambre comment ces cadavres sont

 15   arrivés à cet endroit ?

 16   R.  L'entreprise communale avait un véhicule; c'était, en fait, un petit

 17   camion frigorifique qui appartenait à l'entreprise communale. Dans la

 18   matinée, si quelqu'un annonçait qu'il y avait quelque part un cadavre, les

 19   ouvriers communaux, avec ce camion, allaient ramasser le cadavre pour le

 20   transporter jusqu'à cet endroit situé non loin de la ferme, où les cadavres

 21   étaient déposés.

 22   Q.  Y avait-il des engins lourds, des engins de terrassement, non loin de

 23   là pendant le temps que vous y avez passé ?

 24   R.  J'ai le souvenir d'une pelleteuse de couleur jaune, mais je ne me

 25   souviens plus exactement où se trouvait cette pelleteuse. C'est un engin

 26   qui permet de creuser la terre.

 27   Q.  Je vous remercie. Pourriez-vous dire aux Juges de la Chambre comment il

 28   se fait que ce soit vous qui étiez allé jusqu'à cette fosse commune. Etait-

Page 1872

  1   ce quelque chose que vous faisiez tous les jours ou bien vous a-t-on

  2   demandé un jour en particulier d'y aller ? Est-ce que vous le faisiez dans

  3   le cadre d'un travail d'une certaine durée ? Comment il se fait que vous y

  4   êtes allé ?

  5   R.  Les ouvriers communaux ont fait savoir au responsable de permanence ce

  6   qu'il en était. Le responsable de permanence m'a informé. Je me suis donc

  7   assis à bord de ma voiture et j'y suis allé, car je passais mes journées et

  8   mes nuits dans le bâtiment du SUP. Je n'allais jamais chez moi. Je dormais

  9   au poste de police aussi.

 10   Q.  Mais pour autant que vous le sachiez, la consigne qui vous a été donnée

 11   de vous rendre jusqu'à cette fosse commune émanait du responsable de

 12   permanence du poste de police; c'est bien cela ?

 13   R.  Oui.

 14   Q.  Je vous remercie. Vous rappelez-vous à quelle fréquence vous vous êtes

 15   rendu sur ce site pendant le mois de mai ?

 16   R.  Les dates sont enregistrées là-bas. Mais d'après ce dont je suis

 17   capable de me souvenir, je crois pouvoir dire que j'y suis allé plus

 18   souvent pendant le mois de mai que par la suite. Au fil du temps, mes

 19   voyages se sont raréfiés.

 20   Q.  Merci. Et qu'est-il du mois de juin et du début du mois de juillet,

 21   est-ce que pendant ces périodes vous êtes également allé jusqu'à ce site ?

 22   R.  Début juillet, je crois pouvoir dire que le début du mois de juillet a

 23   marqué la fin de l'utilisation de cette fosse et que d'autres procédures

 24   ont commencé à ce moment-là, les gens ont commencé à procéder aux

 25   inhumations selon les rites religieux qui les concernaient les uns et les

 26   autres dans ces cimetières normaux. Je crois que c'est à ce moment-là que

 27   les modes d'enterrement se sont normalisés.

 28   Q.  Je vous remercie. Et finalement, pour que tout soit précisé au sujet de

Page 1873

  1   ces voyages, vous nous avez déjà parlé du mois de mai, vous avez précisé la

  2   situation qui présidait au début du mois de juillet. Mais durant le mois de

  3   juin, est-ce que vous avez accompli le même genre de travail sur ce site ?

  4   R.  Je ne crois pas avoir très bien compris. Au mois de juin et de juillet,

  5   je suis allé sur le site et c'est au début juillet, si je ne me trompe, que

  6   les enterrements ont commencé à se faire de façon plus normale selon les

  7   rites normaux. S'il y avait eu crime, des enquêtes ont commencé à se faire.

  8   Je crois d'ailleurs que déjà au mois de juillet il y a eu une affaire assez

  9   sordide et que c'est le tribunal de Brcko qui a été chargé de

 10   l'instruction. C'est à partir de ce moment-là que les enterrements se sont

 11   faits de façon plus normale.

 12   Q.  Merci. J'aimerais maintenant vous montrer deux photographies.

 13   M. DI FAZIO : [interprétation] La première c'est la pièce P135 dont

 14   je demande l'affichage.

 15   Q.  Vous reconnaissez cet endroit ?

 16   R.  Oui, c'est le site où se trouvait cette fosse.

 17   Q.  Je vous remercie.

 18   M. DI FAZIO : [interprétation] Je demande maintenant que l'on montre au

 19   témoin le document 65 ter 2692 et qu'on l'affiche à l'écran également.

 20   Vous voulez m'accorder un instant, s'il vous plaît, Monsieur le Président,

 21   Monsieur le Juge.

 22   Ce n'est pas la photographie que je souhaitais que l'on présente, enfin ce

 23   n'est pas celle dont je voulais faire une pièce à conviction. Excusez-moi,

 24   c'est mon erreur. Donc il faudrait que ce soit 2693, le numéro 2693. Voilà.

 25   Q.  Alors vous reconnaissez cette photographie ?

 26   R.  Je n'ai pas de photographie sur mon écran.

 27   Q.  Attendez un instant, vous allez la voir.

 28   R.  C'est la même photographie ou peut-être un angle plus large.

Page 1874

  1   M. DI FAZIO : [interprétation] Est-ce que l'huissière pourrait essayer

  2   d'obtenir une image plus grande de l'homme qui se trouve à la droite de la

  3   photographie. Vous pouvez le voir là, ce qui semble être une veste marron.

  4   Bien. Merci.

  5   Q.  Est-ce que vous reconnaissez cette personne, Monsieur le Témoin ?

  6   R.  Oui. C'est Aco Stevanovic.

  7   Q.  Et qui est Aco Stevanovic ?

  8   R.  C'est lui qui conduisait le camion. C'était un vieux travailleur de

  9   Brcko. A l'époque, il avait peut-être déjà 60 ans. Il travaillait pour les

 10   services publics, il réparait les camions et il les conduisait.

 11   Q.  Merci. Vous nous avez dit que la police vous avait fourni des

 12   renseignements quant à l'endroit d'où ces cadavres provenaient. Est-ce que

 13   vous avez jamais eu des renseignements des conducteurs de camions, par

 14   exemple, par M. Stevanovic quand il prenait ces corps ?

 15   R.  Je n'ai jamais posé de questions à ce sujet.

 16   Q.  Je vous remercie. Peut-être qu'on n'avait pas posé de questions, mais

 17   peut-être qu'ils auraient pu vous donner volontairement des renseignements

 18   spontanément. Est-ce qu'il ne vous a jamais donné spontanément des

 19   renseignements quant à l'endroit où il trouvait ces cadavres pendant tout

 20   le mois de juin, juillet et début août quand il les enterrait dans une

 21   fosse ? Est-ce que vous n'avez jamais posé la question ?

 22   R.  Il se peut que je l'aie fait, mais je ne me rappelle pas de détail

 23   maintenant. Je ne sais pas, c'était il y a longtemps. Ils ont probablement

 24   dit quelque chose à ce sujet.

 25   Q.  Est-ce que ça vous rafraîchirait la mémoire, puisque vous ne pouvez pas

 26   vous rappeler les détails maintenant, de voir une déclaration que vous avez

 27   faite au bureau du Procureur le 29 octobre 2002, pour vous rafraîchir la

 28   mémoire ? Est-ce que ça pourrait vous aider ?

Page 1875

  1   R.  Peut-être.

  2   M. DI FAZIO : [interprétation] Je souhaiterais que l'on montre au témoin -

  3   donnez-moi une seconde, s'il vous plaît - que l'on présente au témoin à

  4   l'écran le numéro 10025, 10025 de la liste 65 ter.

  5   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Monsieur Di Fazio, est-ce que vous

  6   souhaitez que la photo précédente devienne une pièce à conviction ?

  7   M. DI FAZIO : [interprétation] Je vais revenir à cette photo et je

  8   demanderais effectivement que celle-ci devienne une pièce à conviction.

  9   Mais dans l'intervalle, si nous pouvions d'abord régler cette question de

 10   mémoire. Merci. Regardons la page 3. Oui, la troisième page de l'anglais et

 11   je crois que je ne sais pas où c'est en B/C/S - je vais faire de mon mieux

 12   - le paragraphe qui m'intéresse se trouve à peu près à mi-page dans

 13   l'anglais.

 14   Q.  Peut-être que si je donne lecture de l'anglais du paragraphe ça

 15   va vous aider. Excusez-moi.

 16   R.  "Les cadavres étaient pris en charge dans les villes, dans les

 17   environs, et je n'ai jamais demandé où ils les chargeaient ces cadavres."

 18   L'INTERPRÈTE : L'interprète demande que le témoin veuille bien lire

 19   lentement.

 20   M. DI FAZIO : [interprétation]

 21   Q.  Je vais vous aider. Vous avez dit que :

 22   "Vous n'aviez jamais vraiment posé la question à Stevanovic de savoir à

 23   quel endroit il prenait ces cadavres. Et au début de la guerre, la plupart

 24   des corps étaient chargés au camp de détention de Luka et puis au centre-

 25   ville près du SUP et l'hôtel Posavina."

 26   Maintenant, ayant vu cette phrase dans votre déclaration que vous avez

 27   faite au bureau du Procureur en 2002, est-ce que ceci vous aide ou vous

 28   rafraîchit la mémoire quant aux renseignements que vous aviez reçus, en

Page 1876

  1   tout cas en ce qui concerne l'endroit où on prenait les cadavres en

  2   question ?

  3   R.  Je vous dirais qu'il y avait un endroit dans le service chargé des

  4   crimes où j'ai passé un certain temps à l'époque et on discutait beaucoup

  5   de ces meurtres. Par conséquent, j'ai pu entendre beaucoup de choses de

  6   ceux qui travaillaient avec moi.

  7   Q.  Je comprends bien cela et je suis sûr que tout le monde le comprend.

  8   Mais je vous demande ceci : ayant vu ce que vous avez dit au bureau du

  9   Procureur en 2002, à savoir que la plupart des corps étaient pris au camp

 10   de détention de Luka, au centre-ville proche du SUP et à l'hôtel Posavina,

 11   est-ce que ceci vous aide maintenant à vous rappeler des renseignements que

 12   vous auriez reçus quant à l'endroit d'où provenaient ces cadavres ?

 13   R.  Je crois que je l'ai entendu dire par mes collègues de travail. Je les

 14   ai entendu dire beaucoup de choses.

 15   Q.  J'en suis sûr. Je suis sûr que vous l'avez fait, mais certaines choses

 16   que vous avez entendues, est-ce qu'il s'agissait de l'endroit où les corps

 17   avaient été pris au centre-ville ou à Luka, auprès du poste du SJB et à cet

 18   endroit qu'on appelle l'hôtel Posavina; c'est bien cela ?

 19   R.  Oui.

 20   Q.  Bon, je vous remercie de ces éclaircissements.

 21   M. DI FAZIO : [interprétation] Pourrait-on revenir, s'il vous plaît, à la

 22   dernière photographie dont j'ai demandé qu'on en fasse une pièce à

 23   conviction. C'est la photographie qui comporte cet homme, M. Stevanovic.

 24   Voilà, merci. Et pourrait-on, s'il vous plaît, faire défiler de telle sorte

 25   que je puisse voir un agrandissement des cadavres, s'il vous plaît, un gros

 26   plan sur les corps dans la partie inférieure de la photographie, en

 27   d'autres termes.

 28   Q.  Il semble que ces personnes portent des vêtements civils. Pourriez-vous

Page 1877

  1   dire aux Juges si les gens que vous avez vus enterrés en mai, juin, et dans

  2   une moindre proportion au début de juillet, portaient des vêtements civils

  3   ?

  4   R.  Pour un très grand pourcentage, c'était le cas.

  5   Q.  Et il était difficile de dire le sexe de ces personnes. Mais au cours

  6   de cette période dont je viens de parler, ces corps dans la fosse commune,

  7   est-ce qu'il y avait également des femmes en plus des hommes ?

  8   R.  Oui.

  9   M. DI FAZIO : [interprétation] Je vous remercie. Je voudrais demander que

 10   cette pièce soit admise au dossier

 11   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Cette photo est admise et reçoit une

 12   cote.

 13   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Cote P143, Monsieur le Président.

 14   M. DI FAZIO : [interprétation] Merci.

 15   Q.  Maintenant, vous nous avez dit que vous étiez le seul policier qui

 16   travaillait là mis à part d'autres travailleurs de l'assistance de la

 17   ville, des gens tels que M. Stevanovic -- je retire ma question.

 18   Je vous demande ceci : est-ce que vous avez procédé à l'identifications des

 19   corps ?

 20   R.  Voilà comment nous procédions : lorsqu'on nous amenait les corps, deux

 21   travailleurs les déchargeaient du camion, nous n'avions pas de matériel de

 22   protection comme des gants. Je leur demandais de fouiller les corps, les

 23   poches pour voir s'il n'y avait pas de documents. Si on trouvait des

 24   documents, nous les utilisions pour voir qu'elle était l'identité de ces

 25   cadavres. Certains de ces cadavres étaient ceux de personnes que j'avais

 26   connues par le passé et j'ai été en mesure de les identifier même sans les

 27   documents.

 28   Q.  Bien. Outre la documentation trouvée sur le cadavre lui-même, ou parce

Page 1878

  1   que vous connaissiez les visages des gens, il n'y avait aucune autre façon

  2   d'identifier qui était enseveli dans la tombe ?

  3   R.  Non. 

  4   Q.  Est-ce que vous avez gardé des archives quant aux identifications que

  5   vous avez faites ?

  6   R.  Oui.

  7   Q.  Est-ce que vous avez conservé les documents ou objets qui vous ont

  8   permis d'identifier les personnes ? Je veux dire les documents tels que

  9   permis de conduire ou cartes d'identité, et ainsi de suite ?

 10   R.  Les documents ont été conservés pendant un certain temps dans le

 11   bâtiment du SUP, mais à un moment donné, ils commençaient à sentir très

 12   mauvais, parce que certains étaient couverts de sang et j'ai demandé au

 13   chef ce que je devais en faire. Il a simplement dit que ces documents

 14   devaient être détruits, brûlés.

 15   Q.  Le chef c'était qui précisément ? Qui était-ce ? Est-ce que c'était

 16   Veselic ou quelqu'un d'autre ?

 17   R.  C'est cela, Veselic.

 18   Q.  Bien. Et avant qu'il ne meure dans cet accident de voiture, à

 19   l'évidence je suppose que -- c'est tout à fait évident, je ne pose pas de

 20   questions sur cet aspect-ci.

 21    Vous nous avez dit que vous aviez conservé des éléments d'identification.

 22   Est-ce que vous avez jamais utilisé ces archives pour produire une sorte de

 23   textes permanents des identifications du nombre de corps qui étaient allés

 24   dans telle ou telle fosse sur laquelle vous avez travaillé ?

 25   R.  Non.

 26   Q.  Donc vous avez fait un seul rapport ?

 27   R.  Oui. Il y avait une liste que j'ai remise.

 28   Q.  Oui, à qui ?

Page 1879

  1   R.  A l'un des supérieurs, je pense que c'était le chef. Mais après tant de

  2   temps il est difficile pour moi de vous dire qui est la personne. Quelqu'un

  3   m'a donné l'ordre de remettre une liste et un peu plus tard, je l'ai revu

  4   cette liste. Lorsque j'ai fait ma première déclaration, on me l'a montrée.

  5   M. DI FAZIO : [interprétation] Je vous remercie. Pourrait-on maintenant

  6   montrer au témoin le document 10131 de la liste 65 ter, à la fois pour le

  7   B/C/S et l'anglais, s'il vous plaît. Je voudrais demander l'indulgence des

  8   Juges et l'aide de l'huissière.

  9   Q. Pour le témoin, regardez le document tel qu'il apparaît à l'écran.

 10   M. DI FAZIO : [interprétation] Est-ce qu'on pourrait avoir la page

 11   suivante, s'il vous plaît. Est-ce qu'on pourrait aller tout en haut du

 12   document. Vous voyez ce qu'il y a en haut, donc. Remontez encore un peu.

 13   Q.  En attendant qu'il apparaisse -- ah, le voici. Nous pouvons voir que

 14   pour le texte anglais, c'est une autre date qui apparaît. Et pour gagner du

 15   temps, il n'y a pas de contestation à ce sujet, je ne crois pas en tous les

 16   cas, ce document contient des listes de noms et des dates. Donc ayant vu la

 17   première et deuxième pages, tout au moins, est-ce que ceci contient

 18   certains renseignements que vous auriez acquis et que vous avez produits

 19   concernant les identités lorsque vous travailliez à la fosse commune ?

 20   R.  Il s'agit du 6 mai ?

 21   Q.  Je parle de l'ensemble du document maintenant. Je voudrais vous poser

 22   la question suivante : est-ce que c'est le document que je vous ai montré

 23   il y a quelques jours ici à La Haye ?

 24   R.  Oui, approximativement. Je ne me rappelle pas tout avec beaucoup de

 25   précision, mais c'était analogue à celui-ci.

 26   Q.  Est-ce que c'est les renseignements que vous avez obtenus lorsque vous

 27   effectuiez vos identifications contenues dans ce document ?

 28   R.  Oui.

Page 1880

  1   Q.  Merci. Tous les noms des personnes que vous avez identifiées, tous les

  2   noms que vous avez fournis, est-ce que c'étaient des Musulmans ou des

  3   Croates ?

  4   R.  Je me rappelle, le 6 mai, il y avait Franjo Vugrincic, qui était un

  5   Croate.

  6   Q.  Et il était une des personnes qui étaient enterrées dans la tombe à

  7   laquelle vous avez travaillé ?

  8   R.  Oui, le 6 mai.

  9   Q.  Merci.

 10   R.  Je connaissais aussi Safet Sahrimanovic. Il était fréquemment en

 11   prison. J'en connaissais certains, d'autres pas.

 12   M. DI FAZIO : [interprétation] Je voudrais qu'on regarde les éléments 114,

 13   puis le numéro 123. En anglais, le chiffre 123 figure sept pages plus loin,

 14   je crois, et c'est à la date du 24 mai 1992. Pour le B/C/S, c'est à la date

 15   du 24 mai 1992, mais je ne suis pas sûr du nombre de pages qu'il y a là.

 16   Q.  Le numéro 123 c'est un homme appelé Zeljko Malencic, fils de Marjan, et

 17   quelqu'un a écrit, comme vous pouvez le voir dans la version en B/C/S,

 18   juste pour feuilleter ce document - si nous le faisons défiler vers

 19   l'extrême gauche - ZNG ou Corps de la Garde nationale croate.

 20   Est-ce que vous pensez que c'était la personne qui a été identifiée comme

 21   étant un membre du ZNG ou du Corps de la Garde nationale croate ?

 22   R.  Je pense qu'ici, dans ce cas, il a été emmené en uniforme depuis le

 23   Conseil de la Défense croate avec certains autres insignes croates. Il

 24   était en uniforme et avait son identité sur lui.

 25   Q.  Je vous remercie. Et vous-même, c'est quelque chose qui vous a aidé de

 26   façon à conclure que cet homme était --

 27   R.  Oui, oui.

 28   Q.  -- un Croate ?

Page 1881

  1   R.  Je me rappelle ce cas particulier. Je pense qu'il était de Rijeka.

  2   Q.  Si nous revenons en arrière, nous avons là 114, quelque chose qui

  3   apparaît à la date du 19 mai --

  4   R.  [aucune interprétation]

  5   L'INTERPRÈTE : Le témoin lit quelque chose pour lui-même

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est ça que j'ai pu voir.

  7   M. DI FAZIO : [interprétation]

  8   Q.  Bien. Donc nous pouvons voir que vous avez dû être en mesure de faire

  9   une note en observant ce gars qui est mort, qui allait être enterré dans

 10   une tombe et qui était habillé dans un uniforme de camouflage et qui avait

 11   une bande autour de la tête. A l'évidence, ceci doit ressortir des

 12   observations que vous avez faites, n'est-ce pas ?

 13   R.  Oui.

 14   Q.  Donc, par conséquent, si la grande majorité de ces -- si vous aviez été

 15   en mesure de procéder à des observations comme celles-ci, vous auriez été

 16   en mesure de noter si le reste des personnes qui sont allées dans cette

 17   tombe étaient des personnes compétentes, d'une manière ou d'une autre,

 18   étaient des combattants, parce que pour le reste -- parce que la liste --

 19   autre que ces deux-là --

 20   R.  Je n'ai jamais écrit cela, sauf pour ces deux…

 21   Q.  Je vous remercie. Est-ce que vous avez jamais reçu des instructions

 22   visant à établir une différence entre les civils et les combattants ?

 23    R.  Personne ne m'a donné d'instructions particulières.

 24   Q.  Est-ce que vous avez eu la possibilité d'observer les blessures de

 25   personnes qui allaient être ensevelies dans cette fosse ?

 26   R.  Oui. Un grand nombre de personnes étaient couvertes de sang, parce

 27   qu'elles portaient des blessures causées par des balles dans la poitrine ou

 28   dans la tête. Je n'ai pas enregistré chacune de ces blessures, mais un fort

Page 1882

  1   pourcentage de ces cadavres en portait.

  2   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Monsieur Di Fazio, je regarde

  3   maintenant les documents et il s'y trouve une note qui est datée du 18 mai

  4   1992. Il s'agit de cinq personnes, quatre d'entre elles étant apparemment

  5   des femmes âgées. Et on dit ici qu'il y a une note devant laquelle toutes

  6   les femmes mortes qui ont été emmenées depuis la morgue sont décédées de

  7   cause naturelle. Et la question que je vous pose c'est : c'est la note de

  8   qui, ceci exactement ? Est-ce que c'est une note du témoin ou d'un médecin

  9   ou --

 10   M. DI FAZIO : [interprétation] Je ne sais pas. Et vous pensez que la

 11   meilleure façon serait de demander au témoin.

 12   Q.  Vous avez entendu la question posée par le Juge. Pouvez-vous nous

 13   donner une idée de cette note particulière le 18 mai ?

 14   M. DI FAZIO : [interprétation] Mais peut-être que le B/C/S, on pourrait

 15   remonter d'une journée ?

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne m'en souviens pas. Pourrait-on me

 17   montrer encore une fois la note, s'il vous plaît.

 18   M. DI FAZIO : [interprétation]

 19   Q.  La voici. Vous pouvez voir, au bas de la version en B/C/S, 18 mai, 109

 20   à 113, quatre femmes et un homme, tous d'un certain âge, emmenés depuis la

 21   morgue, décédés de cause naturelle. Est-ce que vous savez qui a établi

 22   cette note ?

 23   R.  Je suppose que c'est moi qui l'ai dactylographiée, parce que ceci

 24   semble être la même machine à écrire dans tout le document. Je ne peux pas

 25   m'en souvenir, mais je pense que j'étais à l'hôpital et que ces corps ont

 26   été emmenés depuis l'hôpital jusqu'à la morgue, ensuite de la morgue

 27   jusqu'à cet endroit. Je suppose que les femmes étaient musulmanes, bien que

 28   toutes aient été emmenées à la morgue et sont décédées de cause naturelle,

Page 1883

  1   comme c'était commun, comme c'est dit ici. Je ne me rappelle pas des cas

  2   spécifiques.

  3   Q.  Je vous remercie. Je peux vous aider en appelant votre attention sur

  4   l'autre partie du document, mais il se peut que ce ne soit pas nécessaire.

  5   Je peux vous dire que ce document - si les Juges souhaitent le voir, il

  6   s'agit du 136, 137, point 136 et point 137 - à un moment donné dans ce

  7   document, on voit des listes dont il est indiqué qu'il s'agit de suicides.

  8   Est-ce que vous savez comment cette note a été établie et pourquoi les

  9   personnes qui s'étaient suicidées seraient allées dans cette fosse ou dans

 10   cette tombe ?

 11   M. PANTELIC : [interprétation] Je crois que je dois élever une objection,

 12   Monsieur le Président. Vraiment, ça, c'est demander une hypothèse. Le

 13   témoin n'est ni un psychiatre ni --

 14   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Je vais clarifier les choses. Je

 15   pense que la question c'est que si c'est du tout pertinent, le point c'est

 16   que nous souhaiterions que le témoin -- on voudrait savoir de qui le témoin

 17   aurait reçu des renseignements qu'il aurait ensuite intégrés dans la liste.

 18   M. DI FAZIO : [interprétation] Oui, c'est vrai. C'est précisément juste. Et

 19   certainement, je ne l'invite pas à faire des hypothèses.

 20   Q.  Donc veuillez, s'il vous plaît, ne pas faire d'hypothèse. Mais ces

 21   entrées sont bien mentionnées comme étant des -- savez-vous d'où viennent

 22   ces renseignements ? Deuxièmement, savez-vous si c'étaient, en fait, des

 23   suicides et pourquoi ils ont tous été mis dans cette tombe ?

 24   R.  Parce que le cimetière militaire musulman mezar ne pouvait pas être

 25   approché, puisqu'il se trouvait à proximité de certaines activités de

 26   combat et que le secteur était miné.

 27   Q.  Je vous remercie.

 28   M. DI FAZIO : [interprétation] Maintenant je voudrais demander le versement

Page 1884

  1   de ce document comme élément de preuve.

  2   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Il est admis et marqué.

  3   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] C'est la pièce P144, Monsieur le

  4   Président.

  5   M. DI FAZIO : [interprétation] Peut-on montrer maintenant au témoin un

  6   autre document en application de cette liste 65 ter, il s'agira du numéro

  7   258.

  8   Q.  Monsieur le Témoin, vous n'avez pas besoin de lire ce document à voix

  9   haute. Je vous demande de vous pencher sur la première page, et vous allez

 10   constater qu'il s'agit d'un document daté du 22 octobre 1992. Momcilo

 11   Mandic envoie ce document à différentes instances gouvernementales ainsi

 12   qu'à l'adresse de différents individus et de personnalités. On dit que l'on

 13   voit une information concernant les prisons et les camps de rassemblement

 14   sur le territoire de la Republika Srpska.

 15   M. DI FAZIO : [interprétation] Alors, si vous passez à la page suivante de

 16   ce document.

 17   Q.  Vous pouvez voir une fois de plus la date du 22 octobre du ministère de

 18   la Justice et de l'administration. Il s'agit d'un rapport portant sur la

 19   situation dans les prisons et les camps de rassemblement, prisonniers de

 20   guerre, et cela se rapporte à différentes municipalités. Au numéro 1,

 21   Vlasenica; au numéro 2, Zvornik.

 22   M. DI FAZIO : [interprétation] Je vous renvoie à la page suivante en

 23   version anglaise. Il me semble qu'il s'agit de la page suivante en version

 24   B/C/S aussi. Nous devons arriver à Brcko au numéro 3. J'aimerais qu'on

 25   rende cela lisible pour le témoin.

 26   Q.  Alors, dites-nous ce qu'on dit au sujet de Brcko ?

 27   M. DI FAZIO : [interprétation] Messieurs les Juges, je voudrais demander de

 28   passer à la page suivante de la version anglaise, parce qu'on n'a pas fini.

Page 1885

  1   C'est bon. Est-ce que je peux continuer ? Merci.

  2   Q.  Alors, dans cette première page, on voit que : 

  3   "Dans la ville de Brcko il n'y a pas de prison pour ce qui est de

  4   l'installation provisoire des soldats emprisonnés ou capturés de l'ennemi."

  5   L'auteur de ce rapport dit qu'il a fait le tour de la ville pour

  6   vérifier les informations émanant de la Croix-Rouge internationale,

  7   informations qui, de par leur contenu, ont fait savoir qu'il y aurait eu

  8   liquidation d'un grand nombre de citoyens du groupe ethnique musulman.

  9   Ensuite il est fait état d'une réunion avec les personnalités les plus

 10   importantes à Brcko, puis confirmation faite de l'existence de cinq fosses

 11   communes où l'on aurait enterré 226 personnes au total.

 12   Exception faite de cette fosse commune, y en a-t-il eu encore quatre

 13   ou cinq ?

 14   R.  Je n'en ai pas connaissance.

 15   Q.  Bien. Merci. Est-ce que vous seriez à même de dire aux Juges de la

 16   Chambre comment s'est poursuivi la tâche que vous avez supervisée en juin

 17   et juillet. Est-ce qu'il n'y avait qu'une seule fosse où l'on a placé la

 18   totalité des corps ou y a-t-il eu plusieurs fosses de creusées sur le même

 19   site au fur et à mesure que le temps a avancé ?

 20   R.  Il n'y a eu qu'une seule fosse commune. Par la suite, on a enterré les

 21   gens au cimetière. A la fin du mois de mai, juin, ça s'est fait. A partir

 22   de juillet, on a enterré les personnes dans les cimetières.

 23   Q.  Je le comprends et je vous suis. Mais ma question était celle-ci : au

 24   mois de mai et juin, pendant que vous avez vaqué à l'identification des

 25   corps avant qu'ils ne soient placés dans la fosse commune, il fallait bien

 26   les ensevelir, dans le cas contraire, il y aurait putréfaction et des

 27   mauvaises odeurs se feraient présentes ?

 28   R.  Ça sentait déjà pas mal, ça sentait mauvais déjà de façon considérable.

Page 1886

  1   Q.  Ça, je le comprends. Mais au fur et à mesure de la conduite de cette

  2   procédure, avez-vous creusé d'autres fosses au même endroit, là où vous

  3   êtes intervenu ?

  4   R.  Non, pour autant que je le sache moi-même.

  5   Q.  Bien.

  6   R.  Ici, le nombre de corps -- Enfin, comment voulez-vous que je fasse une

  7   liste au niveau de cinq fosses communes, alors qu'il n'y a que les

  8   personnes sur la liste où j'ai été présent moi-même. Alors ça, je ne pense

  9   pas que ce soit exact ça, cinq fosses communes. Non, ce n'est pas exact,

 10   cela.

 11   Q.  Dans la suite de son rapport, l'auteur nous dit que c'est des gens tués

 12   à l'occasion d'activités de combat dans Brcko, puisqu'il y avait danger de

 13   voir des épidémies survenir. Et ces personnes ont été ensevelies

 14   conformément aux rites religieux qui sont les leurs. Il a été également

 15   procédé à l'identification de ces individus à plusieurs reprises.

 16   Alors, saviez-vous si quiconque à Brcko au sein du ministère de

 17   l'Intérieur aurait procédé à des identifications mis à part vous-même ?

 18   R.  Non.

 19   Q.  Vous n'avez pas à vous pencher sur la chose, mais l'auteur de ce

 20   rapport est un individu qui s'appelle Slobodan Avlijas ?

 21   R.  Slobodan comment ?

 22   Q.  Slobodan Avlijas.

 23   R.  Je n'ai jamais entendu parler d'un nom de famille de ce genre.

 24   Q.  Merci.

 25   M. DI FAZIO : [interprétation] Monsieur le Juge, je voudrais proposer pour

 26   le versement au dossier ce document, et si vous n'êtes pas d'accord,

 27   j'aimerais qu'on lui accorde une cote à des fins d'identification et nous

 28   aurons d'autres témoignages à ce sujet.

Page 1887

  1   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Ce sera marqué à des fins

  2   d'identification.

  3   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] La pièce P145 portera donc cette cote à

  4   des fins d'identification.

  5   M. DI FAZIO : [interprétation] Peut-on maintenant montrer au témoin le

  6   10132 en application du 65 ter. Il s'agit de notes manuscrites.

  7   Q.  Monsieur le Témoin, le document que je vous ai montré auparavant, il

  8   s'agissait de la liste des personnes identifiées par cette période courant

  9   du 1er mai au 10 juin -- excusez-moi, je vais reformuler ma question. Je

 10   vous ai acheminé dans une direction erronée. Alors, du 5 mai au 10 juillet,

 11   d'après mes calculs, il s'agissait de quelque 216 personnes.

 12   Ces notes ne se rapportent peut-être pas à votre liste.

 13   Mais ma question est la suivante : est-ce que vous reconnaissez cette

 14   écriture ?

 15   R.  C'est mon écriture à moi.

 16   Q.  C'est la vôtre ?

 17   R.  Il me semble que oui.

 18   Q.  Mais il n'y a personne de plus qualifié ou plus à même que vous pour

 19   nous le dire. Est-ce que c'est votre écriture ?

 20   R.  Je pense que oui.

 21   Q.  Fort bien. Dans ce cas-là, pourriez-vous nous dire comment se fait-il

 22   que vous avez rédigé cette note; pourquoi; pour quelle raison ?

 23   R.  Je ne m'en souviens pas. Attendez. Enterrés, tant; identifiés, tant;

 24   mort naturelle, 8; femmes, 9. Enterrés selon le mezar, c'est-à-dire les

 25   rites religieux. Il se peut qu'au côté de cette liste, lorsque je l'ai

 26   remise à un chef, peu importe à qui, que j'aie fait le calcul et que cela

 27   accompagnait la liste. Mais je n'arrive pas à m'en souvenir.

 28   Q.  Fort bien. Merci beaucoup.

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  1   M. DI FAZIO : [interprétation] Je voudrais que ce document soit à part

  2   entière versé au dossier, et je tiens à préciser qu'il y aura d'autres

  3   témoignages concernant ce document-ci dans une phase ultérieure du procès.

  4   [La Chambre de première instance se concerte]

  5   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Monsieur Di Fazio, avant que de

  6   donner la parole à M. Pantelic, est-ce que vous pouvez tirer au clair avec

  7   ce témoin quelle est la signification de la deuxième partie inscrite ici où

  8   l'on dit : 

  9   "Les personnes tuées ont été enterrées et probablement ont-elles été

 10   enterrées conformément aux rites religieux."

 11   Je ne suis pas sûr d'avoir bien compris la chronologie des événements. Est-

 12   ce que le témoin aurait participé à l'ouverture des fosses communes pour

 13   identifier les corps, pour les réenterrer ailleurs ensuite ?

 14   M. DI FAZIO : [interprétation] Je vais le faire. Je ne pense pas que cela a

 15   été le scénario mais je vais demander au témoin de nous fournir ce type

 16   d'information.

 17   Q.  D'abord, la fosse commune où vous avez travaillé en mai et juin et

 18   début juillet 1992, il y a eu des gens de tués qu'on a emmenés directement

 19   dans cette fosse. Pour autant que vous le sachiez, ils n'auraient pas été

 20   d'abord enterrés dans une autre fosse pour être exhumés et ramenés là ?

 21   R.  [aucune interprétation]

 22   M. CVIJETIC : [interprétation] Juste une objection, Monsieur le Juge. Il y

 23   a une différence entre la version en B/C/S et en anglais. Ici on dit

 24   "tués", or on dit ici "cadavres qu'on a descendus dans la fosse." Or le

 25   Procureur lui se sert de ce qui est dans sa version. Alors s'il s'agit d'un

 26   document à lui, je tiens à préciser que l'auteur lui n'a pas utilisé le

 27   terme de "tués" et que le témoin nous dise --

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] Ecoutez, "descendus dans la fosse" ce n'est

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  1   pas un terme que j'aurais utilisé. Je ne pense pas avoir moi utilisé ce

  2   terme de "porinuli" [phon], à savoir de "descendus", ce n'est pas clair.

  3   M. CVIJETIC : [interprétation] Mais attendez, peu importe ce qu'il en est,

  4   ce mot ne signifie pas "tué".

  5   LE TÉMOIN : [aucune interprétation]

  6   M. CVIJETIC : [interprétation] Excusez-moi. Laissez-moi faire d'abord mon

  7   objection.

  8   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Ecoutez, tranchons la poire en deux.

  9   Laissons d'abord le témoin nous donner lecture du dernier paragraphe et

 10   ensuite nous entendrons les interprètes nous le traduire. Nous allons avoir

 11   l'interprétation directe.

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] A compter du 10 juillet 1992, on a descendu et

 13   enterré à mezarje de façon marquée conforme aux rites religieux.

 14   M. PANTELIC : [interprétation] Si je puis vous être d'une assistance

 15   quelconque, Messieurs les Juges, ce mot de "porinuli" [phon] en B/C/S

 16   signifie - et peut-être que certains Juges le savent - lorsqu'on met à

 17   l'eau un bateau on utilise le même terme. C'est donc descendre dans l'eau

 18   ou ailleurs. Quand il s'agit de chantier naval on utilise ce terme pour

 19   dire qu'un bateau a été immergé, mis dans l'eau.

 20   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Monsieur Ignjic, c'est bien le mot que

 21   vous n'auriez pas utilisé ?

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] Je pense que non. Je n'aurais pas utilisé ce

 23   mot. Je ne pense pas l'utiliser à quelque moment que ce soit.

 24   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Nous n'allons pas aller plus en

 25   avant.

 26   M. DI FAZIO : [interprétation] Non, Monsieur le Juge, je suis reconnaissant

 27   à Me Pantelic pour son assistance.

 28   Q.  Mais revenons à ma question. La question que j'ai posée n'avait rien à

Page 1890

  1   voir avec ce document-ci. C'était pour répondre à une question qui a été

  2   posée par M. le Juge Harhoff. Et je voudrais dire ceci : les gens qui, en

  3   mai et juin ainsi qu'en juillet, ont été enterrés dans une fosse commune et

  4   que vous avez parfois identifiés, étaient-ce des gens qui ont d'abord été

  5   tués ou qui sont morts ailleurs et qui auraient été amenés directement sur

  6   ce site, ou alors auraient-ils été exhumés ailleurs pour être amenés là

  7   afin d'être réensevelis ?  

  8   R.  Ils ont été amenés directement.

  9   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Monsieur Ignjic, ce que je ne

 10   comprends pas tout à fait encore, c'est ce qui suit. Vous avez eu à voir

 11   des corps dans cette fosse commune, fosse commune vers laquelle on a

 12   acheminé les corps directement, et alors vous avez essayé d'identifier

 13   l'identité de ces cadavres. Alors, dans la mesure où cela a été possible,

 14   qu'est-il advenu des corps ? Est-ce que ces corps sont restés un certain

 15   temps dans la fosse commune pour être transférés vers des cimetières ou que

 16   s'est-il passé au juste ?

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Bien voilà. Le camion, en amenant des gens

 18   d'une partie de la ville, des gens qui auraient été tués ailleurs, avant

 19   que de les descendre dans la fosse qui a été creusée, dans cette tombe,

 20   nous avons essayé d'abord de procéder à une identification.

 21   L'identification, une fois effectuée, on les descendait dans la fosse et,

 22   par la suite, d'après ce que j'en sais, cette fosse a été fermée, c'est-à-

 23   dire ensevelie après la date du, je ne sais trop quel, je crois que c'est

 24   du 10 juillet. Et je ne sais plus ce qui s'est passé, mais c'était à peu

 25   près vers cette date en juillet. Je ne sais pas ce qu'il est advenu après

 26   de ces corps.

 27   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Excusez-moi de prendre du temps sur

 28   ce point-là, mais si je vous ai bien compris, les corps restaient donc dans

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  1   cette fosse commune et, par la suite, quelqu'un d'autre les acheminait vers

  2   le cimetière pour que ces corps soient réensevelis de façon adéquate, ou

  3   est-ce que vous voulez nous dire que vous ne savez pas ce qui s'est passé ?

  4   Mais quoi qu'il en soit, qu'est-ce qui vous a amené à rajouter ce deuxième

  5   paragraphe dans votre carnet de notes qui dit que les personnes qui ont été

  6   descendues là auraient été ensevelies conformément au mezarje, c'est-à-dire

  7   au rite religieux approprié.

  8   LE TÉMOIN : [interprétation] Entre le 1er mai et le 10 juillet, tout ce

  9   qu'on a trouvé comme personnes mortes dans la ville et qui n'appartenaient

 10   pas au groupe ethnique serbe, c'est des gens qu'on a ensevelis dans une

 11   fosse commune. C'est à peu près jusqu'à cette date.

 12   Après le 10 juillet, il y a eu une autorité de mise en place. En ville,

 13   lorsqu'il y a des morts, il y a un juge d'instruction et le représentant du

 14   ministère public qui sortent. Il y a constat des lieux. Il y a des

 15   pathologues qui se chargeaient de l'autopsie. Et une fois le dossier

 16   traité, on enterrait ces gens-là au mezarje, c'est-à-dire au cimetière

 17   religieux, comme il se doit, d'après les rites. Ce n'est donc qu'après

 18   cette date. Entre le 1er mai et le 10 juillet, on a tout placé dans une

 19   fosse commune. Ça n'a pas été enterré dans les cimetières ou au mezarje

 20   conformément au rite religieux. Donc ce n'est qu'après le 10 juillet qu'on

 21   a commencé à procéder de la sorte.

 22   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Je vous remercie. Maintenant tout

 23   ceci nous amène à la question suivante : qui est-ce qui a organisé les

 24   enterrements dans cette fosse commune jusqu'au 10 juillet et qui est-ce qui

 25   a organisé les enterrements au cimetière après le 10 juillet ? Quelle

 26   autorité a organisé tout ceci, le savez-vous ?

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] Ecoutez, je vous dirais l'autorité, mais je ne

 28   sais pas vous dire exactement qui.

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  1   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Mais est-ce que vous pourriez être un

  2   peu plus précis ? Etait-ce l'autorité municipale, était-ce la police,

  3   était-ce l'armée ? Qui est-ce qui s'en chargeait ?

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne le sais pas exactement.

  5   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Merci.

  6   M. DI FAZIO : [interprétation]

  7   Q.  Juste une question de suivi pour enchaîner sur la question de M. le

  8   Juge. Avez-vous été présent à une exhumation et réensevelissement

  9   quelconque ?

 10   R.  Avant la guerre, bien des fois.

 11   Q.  Oui. Bien. Mais je parle de ces gens dans les fosses dont nous parlons

 12   aujourd'hui ?

 13   R.  Non.

 14   Q.  Est-ce que vous avez su que cela s'était produit ?

 15   R.  Non.

 16   Q.  Voilà ce que je vais demander : votre carnet de notes indique que les

 17   gens qui ont été enterrés à ces cimetières conformément aux rites

 18   religieux, mais vous n'avez pas assisté à des exhumations ni à des

 19   réensevelissements ?

 20   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Monsieur Di Fazio, je crois qu'ici il

 21   y a malentendu. Si j'ai bien compris le témoin, le deuxième paragraphe se

 22   rapporte à d'autres cadavres, et non pas aux cadavres qui se trouvaient

 23   dans la fosse commune. Ce sont les corps qui ont été trouvés, c'est-à-dire

 24   ramassés après le 10 juillet. Et ces corps-là ont été enterrés de façon

 25   appropriée. C'est ce que je crois que cela nous dit.

 26   M. DI FAZIO : [interprétation] Alors, j'ai mal compris probablement.

 27   Q.  Vous avez entendu M. le Juge, est-ce que c'est M. le Juge qui l'a bien

 28   compris et moi pas, n'est-ce pas ?

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  1   R.  Oui, c'est lui qui l'a bien compris.

  2   M. DI FAZIO : [interprétation] Je suis reconnaissant à M. le Juge.

  3   Penchons-nous, ou plutôt, procédons à une modification de l'ordre de

  4   présentation des documents pour mettre à profit les cinq minutes qui me

  5   restent, parce que j'en aurai encore 20 demain matin ou 15 éventuellement.

  6   Alors j'aimerais qu'on montre le numéro 33 de la liste 65 ter.

  7   Oui, avant que de le faire, est-ce qu'on a donné une cote à ce carnet de

  8   notes ?

  9   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Bien, ça va être le cas.

 10   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agira de la pièce P146.

 11   M. PANTELIC : [interprétation] Monsieur le Président, pour les besoins du

 12   compte rendu, je ne fais pas objection pour ce qui est du versement au

 13   dossier de ce carnet de notes, là où le témoin n'a pas été à 100 % sûr pour

 14   ce qui est de nous dire si c'était son écriture ou pas. Ce que je voudrais

 15   suggérer, c'est que ce témoin, s'il pourrait nous écrire le même texte que

 16   celui qui est sur le document et la Défense pourra envoyer cela à un expert

 17   en graphologie pour que nous soyons à 100 % sûr et savoir si c'est bien son

 18   écriture ou pas.

 19   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Monsieur Pantelic, laissez-moi vous

 20   demander : est-ce que vous êtes en train de contester les informations

 21   contenues dans ce carnet de notes, parce que la seule chose qui importe

 22   ici, c'est qu'il y a eu 216 personnes au total : 103 ont été identifiées,

 23   huit sont mortes de cause naturelle, neuf corps étaient du sexe féminin.

 24   Donc, c'est la partie principale du carnet de notes que la Chambre devra

 25   prendre en considération par la suite.

 26   Mais si vous voulez contester les chiffres en question, alors, nous pouvons

 27   procéder conformément à ce que vous avez proposé. Mais si vous ne contestez

 28   pas la teneur, je ne vois pas à quoi cela nous servirait que de demander

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  1   les services d'un expert en graphologie, parce qu'il importera peu de

  2   savoir si c'est bien son écriture ou pas. C'est donc tout à fait superflu.

  3   M. PANTELIC : [interprétation] Si de votre opinion cela n'est pas

  4   pertinent, je ne peux rien dire, mais accepter. Il s'agit d'un principe.

  5   Excusez-moi de vous interrompre. Il s'agit d'informations pertinentes qui

  6   sont contenues dans ce carnet de notes.

  7   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Alors, si vous êtes d'accord pour

  8   dire que c'est pertinent et si vous ne contestez pas la teneur des

  9   informations et si vous êtes donc d'accord avec les chiffres, je ne vois

 10   pas en quoi consisterait l'utilité de procéder à des analyses

 11   graphologiques pour déterminer si c'est l'écriture de ce témoin ou pas. Ce

 12   qui est important, c'est les chiffres qui sont contenus dans le carnet de

 13   notes, et si vous n'avez rien contre les chiffres en question, je propose

 14   de renoncer à des enquêtes concernant qui est-ce qui a écrit ceci.

 15   M. DI FAZIO : [interprétation] Peut-être pourrais-je assister M. Pantelic,

 16   et je crois que je peux être utile. Nous avons déjà entendu des doutes

 17   formulés de la part du témoin pour ce qui est de l'expression utilisée dans

 18   ce texte. Il y aura d'autres éléments de preuve ou d'autres témoignages

 19   dans ce procès, et M. Pantelic aura alors l'opportunité de revérifier la

 20   question. Et M. Pantelic a eu l'opportunité de le faire, car il a toujours

 21   l'opportunité de revenir sur le sujet une fois que nous aurons entendu tous

 22   les témoignages ultérieurement fournis sur ce carnet de notes.

 23   M. PANTELIC : [interprétation] Oui, je suis d'accord avec, mais je ne pense

 24   pas que nous ayons le temps de remettre ceci en question.

 25   M. DI FAZIO : [interprétation] Oui. Je suis toujours content de bénéficier

 26   de votre assistance.

 27   Alors, il est déjà et quart. Peut-être vaudrait-il mieux ne pas continuer.

 28   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Oui. Nous n'allons pas nous embarquer

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  1   sur un nouveau sujet; alors, nous allons lever l'audience jusqu'à demain

  2   matin.

  3   Monsieur le Témoin, vous êtes un témoin sous serment, et je tiens à vous

  4   prévenir que vous ne devez pas vous entretenir avec les conseils de la

  5   Défense, pas plus qu'avec les représentants de l'Accusation, et avec

  6   quiconque d'autre, non plus, pour ce qui est du témoignage que vous êtes en

  7   train de présenter ou d'effectuer devant ce Tribunal. Avez-vous bien

  8   compris ce que je vous ai dit ?

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous ai parfaitement bien compris.

 10   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Vous allez revenir ici demain matin à 9

 11   heures. On procédera à la continuation de l'interrogatoire principal par

 12   les soins de M. Di Fazio. Je vous souhaite une bonne soirée.

 13   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Monsieur Di Fazio, est-ce que

 14   vous pouvez tirer au clair juste un autre point. Le Procureur a présenté

 15   une requête à la date du 14 octobre, où il est demandé un changement de

 16   modalités de témoignage de trois témoins : ST-52, ST-79, et ST-4. Dans

 17   votre requête, ce qui n'est pas clair, c'est le fait de savoir si le

 18   témoignage du dernier de ces trois témoins, ST-4, qui était à l'origine

 19   listé comme étant un témoin en application du 92 bis, est-ce que vous

 20   voulez qu'il soit transféré vers un témoignage 92 ter ou vers un témoignage

 21   viva voce ? Et là, je vais vous demander aimablement de nous apporter des

 22   éclaircissements.

 23   M. DI FAZIO : [interprétation] Ce sera Mme Korner ou moi-même qui vous

 24   apporteront ces éclaircissements demain matin.

 25   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Je crois comprendre que demain, nous

 26   poursuivrons nos travaux dans la salle d'audience numéro I. Merci.

 27   --- L'audience est levée à 16 heures 16 et reprendra le jeudi 22 octobre

 28   2009, à 9 heures 00.