Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le jeudi 28 octobre 2010

  2   [Audience publique]

  3   [Les accusés sont introduits dans le prétoire]

  4   --- L'audience est ouverte à 14 heures 24.

  5   M. LE GREFFIER : [interprétation] Bonjour, Messieurs les Juges. Bonjour à

  6   toutes les personnes présentes dans le prétoire.

  7   Ceci est l'affaire IT-08-91-T, le Procureur contre Mico Stanisic et Stojan

  8   Zupljanin.

  9   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Merci, Monsieur le Greffier.

 10   Bonjour à tous, et bienvenue dans ce prétoires après le week-end prolongé

 11   qui vient de se terminer il y a quelques jours.

 12   Monsieur Hannis, vous m'avez donné l'impression d'être sur le point de vous

 13   lever. On nous a informés que le témoin avait quant à lui quelque chose à

 14   nous dire, et nous avions l'intention de lui en donner la possibilité.

 15   Mais souhaitiez-vous dire quelque chose ?

 16   M. HANNIS : [interprétation] Je souhaitais me lever de façon anticipée.

 17   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Eh bien, allez-y.

 18   M. HANNIS : [interprétation] Oui, je souhaitais simplement faire les

 19   présentations, donc moi-même, M. Hannis, et Crispian Smith pour

 20   l'Accusation.

 21   M. ZECEVIC : [interprétation] Bonjour, Messieurs les Juges.

 22   Slobodan Zecevic, Slobodan Cvijetic, Eugene O'Sullivan, et Tatjana Savic,

 23   ainsi que Melody Whittaker pour la Défense de M. Stanisic.

 24   M. KRGOVIC : [interprétation] Bonjour, Messieurs les Juges.

 25   Dragan Krgovic, Igor Pantelic, Aleksandar Aleksic pour la Défense de M.

 26   Zupljanin.

 27   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Merci.

 28   Alors, comme je l'ai déjà indiqué, on nous a informés que le témoin

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  1   souhaitait prendre la parole pour s'adresser à nous. Donc je suggère

  2   qu'avant de procéder avec la suite de ce qui est prévu au calendrier

  3   d'aujourd'hui, nous donnions au témoin la possibilité de s'exprimer.

  4   [Le témoin vient à la barre]

  5   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Bonjour, Monsieur. Je vous souhaite la

  6   bienvenue. Et, je vous prie, de vous asseoir.

  7   LE TÉMOIN : DOBRISLAV PLANOJEVIC [Reprise]

  8   [Le témoin répond par l'interprète]

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.

 10   [La Chambre de première instance se concerte]

 11   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Monsieur le Témoin, si j'ai bien

 12   compris, avant que votre interrogatoire principal ne reprenne son cours,

 13   vous souhaiteriez vous adresser aux Juges de la Chambre; est-ce bien le cas

 14   ?

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour.

 16   Je souhaiterais d'abord saluer toutes les personnes présentes, et en

 17   effet passer à ce que je voulais dire.

 18   Un article a été publié sur le site internet de l'agence Sense du

 19   Tribunal, pendant ma déposition. Il s'agit d'un article tendancieux qui

 20   fait état d'un certain nombre, je suis en regret de le dire, mais d'un

 21   certain nombre de mensonges. Je souhaitais m'adresser à vous, pour vous

 22   demander s'il est possible de m'accorder une forme de protection ou une

 23   autre, par rapport à ce type de publication, et d'y mettre un terme. Je ne

 24   sais pas comment cela fonctionne, est-ce qu'il y un représentant de cette

 25   agence qui est présent pendant l'audience, est-ce que cette agence dispose

 26   d'un service de porte-parole ou passe par ce dernier ?

 27   [La Chambre de première instance se concerte]

 28   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Merci, Monsieur le Témoin, de porter

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  1   ceci à notre attention. Nous avons pu consulter cet article publié par

  2   l'agence Sense, et nous avons également été surpris de constater quel en

  3   était le contenu.

  4   Cependant, nous estimons qu'il serait inadéquat pour la présente Chambre de

  5   s'adresser directement au journaliste concerné chaque fois que de tels

  6   propos sont consignés. La démarche habituelle en la matière consiste à

  7   passer par le service du Greffe, au sein duquel se trouve un service de

  8   presse, une section chargée de l'information qui a en charge les relations

  9   avec les organes de presse également.

 10   Donc je suppose que ce département chargé de l'information a déjà

 11   entrepris les mesures nécessaires afin de clarifier la situation et de nous

 12   expliquer pourquoi ces informations erronées ont pu être publiées par

 13   l'agence Sense. Nous allons vérifier toutefois. Je vous remercie.  

 14   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Je remercie le Juge Harhoff d'avoir

 15   répondu aux préoccupations qui sont celles du témoin.

 16   S'il n'y a rien d'autre que vous ne souhaitiez nous dire, Monsieur le

 17   Témoin, je vous rappelle que vous êtes toujours sous serment, et j'invite

 18   M. Hannis à poursuivre.

 19   M. HANNIS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Je voudrais

 20   juste indiquer que j'ignorais l'existence de cet article, pour ma part. Le

 21   témoin pourra peut-être souhaiter s'adresser à la Section des Victimes et

 22   des Témoins pour voir s'il y a une façon de s'adresser directement aux

 23   journalistes de l'agence Sense. J'ignore si c'est possible, mais peut-être

 24   pourrait-on essayer.

 25   Interrogatoire principal par M. Hannis : [Suite]

 26   Q.  [interprétation] Alors Monsieur Planojevic, j'ai encore peu de

 27   questions à vous poser, après Me Zecevic prendra le relais.

 28   Je voudrais établir le nombre de fois précis et également l'enchaînement

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  1   chronologique des occasions auxquelles des représentants officiels se sont

  2   entretenus avec vous au sujet des événements de 1992.

  3   Nous avons déjà évoqué votre entretien avec les représentants du bureau du

  4   Procureur au mois de juin 199 -- au mois de juin 2004, excusez-moi.

  5   Est-ce que vous vous souvenez avoir fourni une déclaration ou avoir déposé

  6   au mois de novembre 2004, c'était le 23 novembre 2004, en relation avec une

  7   enquête à laquelle on procédait au sein des services du procureur de

  8   Bijeljina, à propos du décès des membres de trois familles musulmanes au

  9   mois de septembre 1992 ?

 10   Est-ce que vous vous souvenez de cela ?

 11   M. ZECEVIC : [interprétation] Excusez-moi, mais pourrions-nous

 12   connaître la date à laquelle ce document est censé avoir été communiqué ?

 13   M. HANNIS : [interprétation] C'est une partie du document et de la

 14   pièce P1543, qui est un document émanant du procureur régional. C'est en

 15   page 47 que se trouve la déclaration du témoin en version anglaise dans le

 16   système e-court. Je crois c'est en page 41 dans la version en B/C/S. Je me

 17   contente de demander au témoin de nous confirmer la date.

 18   M. ZECEVIC : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur Hannis, mais y a-t-il

 19   eu le moindre accord entre les parties consistant à  dire que nous serions

 20   informés de votre intention d'utiliser un document ne figurant pas sur

 21   votre liste au préalable ?

 22   Parce que je ne suis pas au courant que ce document ait effectivement

 23   figuré sur votre liste. Peut-être que je me trompe. Mais dans l'état

 24   actuel, c'est ce que je souhaite signaler.

 25   M. HANNIS : [interprétation] Excusez-moi…

 26   [Le conseil de l'Accusation se concerte] 

 27   M. ZECEVIC : [interprétation] Excusez-moi, c'est à l'intercalaire 21. Je

 28   retire ma remarque, excusez-moi.

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  1   M. HANNIS : [interprétation]

  2   Q.  Monsieur Planojevic, est-ce que vous vous rappelez avoir donné

  3   cette déposition ?

  4   R.  Ce n'était pas aux représentants du procureur que j'ai fourni cette

  5   déposition, mais à des agents de police.

  6   Q.  Oui, c'était la police qui à cette époque recueillait les déclarations

  7   au nom du bureau du procureur public.

  8   Est-ce que vous vous rappelez avoir rencontré des représentants des

  9   services du Procureur au mois de février 2009, notamment Mme Joanna Korner

 10   ainsi qu'un autre employé du bureau du Procureur ?

 11   R.  C'était à Nedzarici, près de Sarajevo, n'est-ce pas ?

 12   Q.  Je crois que c'était près de Sarajevo, oui.

 13   R.  Oui, je m'en souviens.

 14   Q.  Ensuite au mois de mai de cette année, le 12 mai, à Bijeljina, vous

 15   rappelez-vous avoir rencontré M. Paul Grady et Belinda Pidwell, qui étaient

 16   accompagnés d'un interprète travaillant pour les services du Procureur de

 17   ce Tribunal ?

 18   R.  Oui.

 19   Q.  Alors je voudrais obtenir de vous quelques éléments de contexte qui

 20   concernent Mico Stanisic, après la guerre.

 21   Aviez-vous des contacts avec Mico Stanisic après l'année 2004, après que

 22   vous avez eu votre premier entretien avec les représentants du bureau du

 23   Procureur ?

 24   R.  Une fois j'ai été en contact avec lui, mais est-ce que c'était avant ou

 25   bien était-ce après à Belgrade, je n'en suis pas sûr. Je crois que c'était

 26   après, oui.

 27   Q.  Alors, lorsque vous vous êtes entretenu avec Mme Korner et M. Yarmah en

 28   2009, les avez-vous informés du contact que vous aviez eu avec M. Stanisic

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  1   concernant la possibilité de déposer pour lui à propos des événements

  2   d'avant la guerre, je crois que vous nous avez dit que ça s'était passé

  3   deux ou trois mois avant, donc peut-être à la fin de l'année 2008 ?

  4   R.  C'est sûrement plus tôt que ce contact a dû avoir eu lieu. Mais je ne

  5   m'en souviens pas exactement parce que beaucoup de temps s'est écoulé, et

  6   en tout cas, je leur ai dit à l'époque.

  7   Q.  Etait-ce un entretien en tête-à-tête ou par téléphone ?

  8   R.  C'était en tête-à-tête.

  9   Q.  Et lors de cette réunion, vous a-t-il dit qu'il avait lu la

 10   transcription de votre entretien de 2004 ?

 11   R.  Excusez-moi, mais je n'en suis pas sûr. Nous n'avons pas parlé si

 12   longtemps que cela, mais je ne suis plus sûr du déroulement de cette

 13   conversation. J'ai parlé des circonstances de la guerre.

 14   Q.  Dans la brève déclaration recueillie par Mme Korner et M. Yarmah auprès

 15   de vous à la date du 24 février 2009 il est indiqué, c'est ce que vous

 16   dites dans le paragraphe 6, je cite :

 17   "Mico Stanisic m'a dit avoir lu la déclaration que j'avais fournie à Banja

 18   Luka en 2004."

 19   Est-ce que ceci ravive vos souvenirs, ou bien est-ce que vous êtes en

 20   désaccord avec ce que je viens de lire ?

 21   R.  C'est ce que je leur ai dit, mais Mico a dit qu'il savait ce que

 22   j'avais dit dans cette déclaration. En tout cas, je n'ai pas caché cela à

 23   Mme Korner et à M. Yarmah.

 24   Q.  Très bien. Merci. Alors, à l'audience précédente, nous avons parlé de

 25   Goran Abazovic et Zoran Jasarevic, qui étaient employés comme gardes du

 26   corps.

 27   R.  Abazovic.

 28   Q.  Oui, Abazovic qui, en 1992, était employé comme garde du corps

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  1   personnel du ministre.

  2   En 1992, est-ce que vous vous rappelez quelle était la tenue que portaient

  3   ces hommes ? Est-ce qu'ils étaient en tenue civile, ou en uniforme; si vous

  4   vous en souvenez ?

  5   R.  Abazovic était en uniforme, et Jasarevic je crois qu'il était en civil.

  6   Mais je les ai vus, en tout et pour tout, deux ou trois fois. Je n'en suis

  7   pas sûr.

  8   Q.  L'uniforme d'Abazovic, de quelle couleur était-il, pouvez-vous nous

  9   dire de quel type d'uniforme il s'agissait ? S'agissait-il d'un uniforme de

 10   camouflage; si oui, de quelle couleur ?

 11   R.  Pour autant que je m'en souvienne, c'était un uniforme de camouflage.

 12   Q.  Et est-ce que c'était un uniforme de camouflage de couleur vert olive,

 13   de couleur bleu, ou autre ?

 14   R.  Eh bien, c'était de couleur verte, brun-vert.

 15   Q.  L'unité Malovic, nous avons des témoins ici qui nous ont dit que les

 16   membres de cette unité portaient un uniforme de camouflage particulier.

 17   Est-ce que vous vous rappelez cet uniforme précis ?

 18   R.  Ils avaient différents types d'uniformes de camouflage. Je ne sais pas

 19   lequel vous intéresse.

 20   Q.  Est-ce que vous vous rappelez si l'uniforme que portaient ces hommes

 21   les distinguait des autres uniformes de camouflage de couleur bleue ou

 22   verte portés par la plupart des autres soldats à l'époque ?

 23   R.  Ils avaient aussi bien des uniformes de camouflage bleu que vert. Mais

 24   quand ils sont arrivés à Vrace, c'est probablement ce qui vous intéresse,

 25   ils étaient en uniforme noir. En tout cas, ça n'a pas duré très longtemps,

 26   parce qu'ils ont sans doute compris rapidement qu'il était impossible de

 27   combattre dans ces uniformes-là. En tout cas, après la fin du premier mois,

 28   je ne les ai plus jamais revus portant ces uniformes-là.

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  1   Q.  Les avez-vous vus porter d'autres types d'uniformes après ? Enfin, les

  2   avez-vous vus tout simplement, pour commencer ?

  3   R.  Je vous ai dit qu'ils tenaient la ligne passant derrière l'école où

  4   nous habitions, en fait, pendant un mois et demi ou deux mois, et souvent

  5   ils faisaient leur apparition à l'heure du déjeuner. Ils étaient avec nous

  6   au déjeuner. C'est à ces occasions-là que je les ai vus.

  7   Q.  Merci. Quand vous avez été transféré de Vrace à Pale, c'était je crois

  8   au mois de juin 1992, au début du mois juin. N'est-ce pas ce que vous nous

  9   avez dit ?

 10   R.  Oui.

 11   Q.  Où étiez-vous employé à Pale ? Où se trouvait votre bureau ? Dans quel

 12   bâtiment ? Dans quel hôtel, éventuellement ?

 13   R.  C'était sur le mont Kalovita Brda. Il y avait une maison de scouts

 14   avant la guerre à cet endroit.

 15   Q.  Combien de temps êtes-vous resté dans ce bâtiment ?

 16   R.  Jusqu'au moment où j'ai donné ma démission. Mais après ma démission,

 17   j'ai continué à y venir de façon officieuse.

 18   Q.  Et savez-vous où se trouvait aux mois de juin et juillet 1992 le bureau

 19   de Mico Stanisic, et où se trouvait son bureau pendant le restant de

 20   l'année 1992 aussi ?

 21   R.  Comme je l'ai déjà déclaré, je me rappelle avoir été présent une fois à

 22   l'hôtel Kosuta. Et je crois que c'est là-bas que se trouvait son bureau

 23   lors d'un des contacts que j'ai eus, peut-être aussi au sein de l'hôtel

 24   Bistrica où était aussi le gouvernement. Mais en tout cas, à ce moment-là,

 25   moi j'ai eu l'occasion d'aller à l'hôtel Kosuta.

 26   Q.  Vous avez parlé de M. Djeric quand vous avez évoqué le gouvernement.

 27   Est-ce que vous savez où son bureau se trouvait aux mois de juin et juillet

 28   1992 ?

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  1   R.  A l'hôtel Bistrica.

  2   Q.  Merci. Je crois que vous nous avez également indiqué avoir commencé à

  3   travailler pour les services de la Sécurité nationale au mois de septembre

  4   1992; est-ce bien le cas ?

  5   R.  Oui.

  6   Q.  Où se trouvait votre bureau lorsque vous avez commencé à accomplir ces

  7   fonctions pour les services de la Sécurité nationale, et jusqu'à la fin de

  8   l'année 1992 ?

  9   R.  Eh bien, dans le même bâtiment. Jusqu'au mois d'octobre ou novembre, au

 10   moment auquel le siège du service a été transféré. Une partie du service

 11   est partie un peu plus tôt pour trouver de nouveaux locaux, et nous autres,

 12   nous avons été transférés je crois au mois de novembre.

 13   Q.  Lorsque vous dites que vos bureaux se trouvaient dans le même bâtiment,

 14   vous pensez à Kalovita Brda ?

 15   R.  Oui.

 16   Q.  Et qu'en est-il de Bijeljina, lorsque vous y êtes arrivé, où se

 17   trouvaient vos locaux ? Dans le bâtiment du SJB ou dans le bâtiment du CSB

 18   ? Dans les deux ? Dans quel bâtiment vos locaux étaient-ils situés ?

 19   R.  Nous avons été affectés dans les bureaux du centre. Le ministère aussi

 20   avait ses bureaux dans le même bâtiment.

 21   Q.  Et le ministre se trouvait-il lui aussi à Bijeljina en 1992; et si oui,

 22   où se trouvait son bureau ?

 23   R.  Croyez-moi, je n'ai jamais vu le ministre à Bijeljina, qu'il s'agisse

 24   de cette période-là ou de la période postérieure. Je pense qu'une autre

 25   personne se chargeait de tout dans cette ville, une personne ou deux. Ceci

 26   peut vous paraître bizarre, mais c'est la vérité.

 27   Q.  Une ou deux personnes que vous venez d'évoquer, de qui s'agit-il ?

 28   R.  Cedo Kljajic exerçait ces fonctions au moment où nous sommes arrivés,

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  1   mais il n'est resté que très peu à ce poste puis il est parti quelque part.

  2   Et Dragan Kijac se trouvait à la tête du secteur de la Sûreté d'Etat. Et

  3   puis, M. Kovac, qui était le chef de la police, s'occupait de toutes ces

  4   missions.

  5   Q.  Merci, Monsieur Planojevic. Je n'ai plus de questions à vous poser.

  6   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Procédons au contre-interrogatoire.

  7   A vous, Maître Zecevic.

  8   M. ZECEVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président, Monsieur les

  9   Juges.

 10   Contre-interrogatoire par M. Zecevic : 

 11   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur Planojevic.

 12   R.  Bonjour.

 13   Q.  Vendredi, nous avons eu des problèmes à cause de la rapidité de votre

 14   débit et à cause du fait que vous n'aviez pas ménagé des pauses entre les

 15   questions et les réponses, donc je vous demande de bien vouloir vous

 16   exprimer plus lentement pour que les interprètes puissent nous suivre.

 17   Monsieur, vendredi dernier, vous avez pu revoir le procès-verbal de la

 18   déposition faite par vous, le 8 et le 9 juin 2004. Vous l'aviez devant

 19   vous.

 20   L'avez-vous gardée sur vous ou l'avez-vous rendue au bureau du Procureur ?

 21   R.  Je l'ai laissée dans ma chambre. Mais je l'avais avec moi ici à La

 22   Haye.

 23   Q.  Je tiens à vous rappeler quelques éléments de cette déposition, vous en

 24   avez déjà discuté avec mon estimé confrère vendredi dernier, aussi bien

 25   qu'aujourd'hui au début de l'audience.

 26   Vous avez fourni cette déposition aux enquêteurs, parmi lesquels se

 27   trouvait un avocat, le 8 juin 2004 à Banja Luka, n'est-ce pas ?

 28   R.  Oui, tout à fait.

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  1   Q.  Vous avez été entendu à titre de suspect lors de cet entretien, n'est-

  2   ce pas ?

  3   R.  Oui, et ceci est indiqué dans la déposition.

  4   Q.  Trois jours à la veille de cette déposition, donc dans les alentours du

  5   5 juin, vous exerciez les fonctions de l'inspecteur principal de l'agence

  6   d'information, comme elle est appelée à ce moment-là, il s'agissait de la

  7   Sûreté de l'Etat, et puis ce service a été démantelé. Au moment où vous

  8   avez déposé, vous aviez le statut d'un employé du ministère non affecté,

  9   n'est-ce pas ?

 10   R.  Oui.

 11   Q.  Monsieur Planojevic, ayez la gentillesse de ménager une petite pause

 12   suite à ma question. Ceci permet aux interprètes d'interpréter d'abord la

 13   question que j'ai posée pour passer ensuite à votre réponse. Gardez-le à

 14   l'esprit, s'il vous plaît.

 15   Donc à ce moment-là vous étiez un employé non affecté et puis vous avez été

 16   convoqué pour participer à un entretien avec les services du Procureur. Les

 17   services du Procureur vous ont fait savoir que vous étiez entendu à titre

 18   de suspect, et puis ils vous ont fait lecture de la définition du terme

 19   "suspect".

 20   Vous en souvenez-vous ?

 21   R.  Oui.

 22   Q.  Alors, on vous a fait savoir - et ceci figure à la page 1 du procès-

 23   verbal de la déposition - que le suspect était toute personne au sujet de

 24   laquelle les services du Procureur avaient des éléments d'information

 25   suggérant que cette personne avait pu commettre des crimes qui relèvent des

 26   compétences du TPIY.

 27   Vous souvenez-vous d'avoir entendu cette définition ?

 28   R.  Oui.

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  1   Q.  Les enquêteurs du bureau du Procureur vous ont fait savoir quels

  2   étaient les droits qui étaient les vôtres --

  3   M. HANNIS : [interprétation] Je suis désolé de vous interrompre. Mais, moi,

  4   je viens de lire la traduction anglaise de ce qui a été lu au témoin, à la

  5   page 1 figure la définition d'un suspect et elle est la suivante :

  6   "C'est une personne au sujet de laquelle l'Accusation dispose des éléments

  7   d'information suggérant que cette personne a pu avoir commis un crime."

  8   Je ne vois pas ce potentiel dans le compte rendu d'audience.

  9   M. ZECEVIC : [interprétation] Je suis bien d'accord avec vous. Je vois que

 10   ceci a été omis. Donc j'ai dit qu'il s'agissait d'une personne qui avait pu

 11   commettre des crimes relevant des compétences du TPIY.

 12   M. HANNIS : [interprétation] Je signale aux interprètes qu'il s'agit du

 13   document 9106 de la liste 65 ter, et par ailleurs j'ai une version imprimée

 14   en B/C/S pour le témoin, si cela peut vous être utile.

 15   M. ZECEVIC : [interprétation] Eh bien, veuillez afficher le document 9106

 16   de la liste 65 ter à l'écran, s'il vous plaît. Et si vous voulez bien

 17   remettre la copie imprimée du document au témoin, je vous serai

 18   reconnaissant.

 19   M. HANNIS : [interprétation] Je tiens à signaler à mon estimé confrère que

 20   la pagination en anglais n'est pas conforme à celle qui existe en B/C/S.

 21   Comme cela, par ailleurs, est souvent le cas.

 22   M. ZECEVIC : [interprétation] Oui. Cela est souvent le cas, et je me

 23   débrouillerai comme je peux.

 24   Peut-on afficher la page 2 du document dans les deux versions.

 25   Je reprends donc ma question initiale.

 26   Q.  Les enquêteurs de l'Accusation vous ont fait savoir quels étaient les

 27   droits dont vous bénéficiez, entre autres, vous pouviez avoir un avocat qui

 28   assisterait à la déposition que vous faisiez, n'est-ce pas ?

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  1   R.  Oui.

  2   Q.  Monsieur Planojevic, vous êtes un policier professionnel depuis 1973,

  3   n'est-ce pas ?

  4   R.  Oui.

  5   Q.  Au cours de votre carrière professionnelle au sein de la police longue

  6   d'une trentaine d'années, vous avez suivi toutes les formations disponibles

  7   sur le territoire de l'ex-Yougoslavie, y compris un programme organisé à

  8   Skoplje, un programme universitaire ?

  9   R.  Oui.

 10   Q.  Je ne souhaite pas créer un malentendu entre nous, mais vous serez bien

 11   d'accord avec moi pour dire que vous faites partie de l'approche classique

 12   à la police, ce que nous appelons en nous exprimant d'une manière plus ou

 13   moins colloquiale, "la vieille école" de police; êtes-vous d'accord avec

 14   moi ? Ceci n'est pas une critique sur votre compte.

 15   R.  Oui, c'était plutôt un compliment chez nous, entre nous, tout au moins,

 16   quand on disait de quelqu'un qu'il avait suivi une formation de policier

 17   classique.

 18   Q.  Je suis tout à fait d'accord avec vous. Je me suis servi de cette

 19   expression dans un contexte positif moi aussi.

 20   Alors, dites-moi, s'il vous plaît, cette connotation entraînée par

 21   l'expression "vieille école de police" regardait d'un œil soupçonneux toute

 22   personne qui souhaitait avoir un avocat à ses côtés au moment de donner la

 23   déposition, n'est-ce pas ?

 24   R.  Oui.

 25   Q.  D'après la manière dont on présentait les choses dans les écoles de

 26   l'ex-Yougoslavie, si quelqu'un était innocent, il n'avait pas besoin d'un

 27   avocat, n'est-ce pas ?

 28   R.  Oui, tout à fait. Lorsque nous convoquions des personnes pour organiser

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  1   un entretien nous n'avions pas l'habitude d'inviter des avocats à y

  2   assister. Ceci tout simplement ne faisait pas partie des pratiques

  3   courantes, jusqu'à la fin de la guerre.

  4   Q.  Je suis d'accord avec vous. Le code pénal ne prévoyait pas la

  5   possibilité de bénéficier de l'aide, de l'assistance juridique dans la

  6   phase préalable au procès, n'est-ce pas ?

  7   R.  Oui.

  8   Q.  Donc, d'après cette doctrine classique dont vous étiez adepte, du

  9   moment où quelqu'un souhaite bénéficier de l'assistance d'un avocat, ceci

 10   suggère que cette personne pourrait être coupable, n'est-ce pas ?

 11   R.  Oui, parfaitement.

 12   Q.  Monsieur, vous serez bien d'accord avec moi pour dire que ceci, entre

 13   autres, faisait partie des raisons pour lesquelles vous n'avez pas souhaité

 14   avoir un avocat à vos côtés au moment où un entretien a été organisé avec

 15   vous en 2004 ?

 16   R.  Oui. Et si vous me le permettez, je souhaite préciser la deuxième

 17   raison pour laquelle je ne l'ai pas souhaité. Vous allez peut-être y passer

 18   un peu plus tard.

 19   Q.  Eh bien, pour que nous procédions d'une façon plus efficace, permettez-

 20   moi de poser les questions, et si jamais je n'élabore pas tous les aspects

 21   qui vous intéressent vous, vous pourriez y revenir à la fin de mon

 22   interrogatoire. Cela vous va ?

 23   R.  Oui, très bien.

 24   Q.  Alors cet entretien qui a eu lieu en 2004, les 8 et 9 juin, il a été

 25   enregistré, n'est-ce pas ?

 26   R.  Oui.

 27   Q.  Les enquêteurs du TPIY vous ont fait savoir qu'une fois l'entretien

 28   terminé, une bande audio vous sera remise, n'est-ce pas ?

Page 16496

  1   R.  Oui.

  2   Q.  Par ailleurs, ils vous ont signalé, et ceci figure à la page 3 de votre

  3   déposition, paragraphe 1, ils vous ont donc fait savoir que si votre statut

  4   venait à changer, si vous ne deviez plus être un suspect mais plutôt un

  5   accusé, on rédigera un sténogramme de votre déposition, n'est-ce pas ?

  6   R.  Oui.

  7   Q.  Nous voyons que ce sténogramme a effectivement été élaboré. A quel

  8   moment l'avez-vous appris ?

  9   R.  Avant l'entretien qui s'est déroulé à Bijeljina. Je ne sais pas à

 10   quelle date cela s'est produit, en tout cas, c'était lors de mon dernier

 11   entretien avec le bureau du Procureur. Dans la soirée vers 8 heures du

 12   soir, c'est l'interprète qui a apporté le sténogramme chez moi.

 13   Q.  J'imagine que vous pensez à la réunion qui a été organisée avec les

 14   représentants du bureau du Procureur au mois de mai de l'année courante,

 15   n'est-ce pas ?

 16   R.  Oui.

 17   Q.  Alors ce document vous a été apporté vers 8 heures du soir, et puis

 18   demain matin, vous deviez vous présenter à la réunion. A quel moment précis

 19   ?

 20   R.  Je n'en suis pas certain, mais je pense que l'heure est indiquée

 21   quelque part, c'était dans la matinée, 8 heures, 9 heures, 10 heures du

 22   matin, je n'en suis pas sûr.

 23   Q.  Et on s'attendait à ce que vous passiez la nuit à examiner ce

 24   sténogramme. Vous aviez de 8 heures du soir jusqu'à 9 ou 10 heures du matin

 25   pour relire un sténogramme qui compte une centaine de pages, 150 pages,

 26   n'est-ce pas ?

 27   R.  Oui, tout à fait.

 28   Q.  Dites-moi, s'il vous plaît, la première occasion de lire en profondeur

Page 16497

  1   le sténogramme de votre déposition, des 8 et 9 juin, vous a été fournie

  2   lorsque vous êtes arrivé à La Haye pour y déposer, n'est-ce pas ?

  3   R.  C'est alors que j'ai commencé à peser chaque mot, et à me demander ce

  4   qui était exact et ce qui ne l'était pas. 

  5   Q.  Eh bien, j'ai parlé de lire ou d'étudier en profondeur, c'est

  6   exactement cela que j'avais à l'esprit.

  7   Alors si j'ai bien compris votre déclaration du vendredi dernier, vous avez

  8   immédiatement informé les représentants du bureau du Procureur lors de

  9   cette réunion du 19, dans la matinée, du fait que vous souhaitiez apporter

 10   un certain nombre de modifications, que vous souhaitiez intervenir dans le

 11   sténogramme de la déposition. Et puis, si j'ai bien compris, le Procureur

 12   en a été fâché, si j'ai bien compris ce que vous avez dit vendredi dernier.

 13   R.  Oui.

 14   Q.  Très bien. Alors revenons à l'entretien qui a eu lieu en 2004.

 15   Vendredi dernier, le Procureur vous l'a signalé. En 2004, les enquêteurs du

 16   TPIY, en présence d'un avocat, représentant du bureau du Procureur, vous

 17   ont fait savoir que vous n'étiez pas la cible de l'enquête diligentée,

 18   n'est-ce pas ?

 19   R.  Eh bien, peut-être que la chose n'a pas été formulée exactement dans

 20   ces termes, mais c'était bien le sens général.

 21   Q.  Eh bien, lisons ce qui figure à la page 3, dernière phrase. Il est

 22   indiqué, et je cite :

 23   Nicola Sebire, c'est l'enquêteur du TPIY indique :

 24   "Au cours de cet entretien, votre statut est celui d'un suspect. Avant

 25   d'entamer l'entretien, je tiens à vous informer que vous ne constituez pas

 26   la cible de notre enquête. Le comprenez-vous ?"

 27   Et vous avez répondu, je le comprends, n'est-ce pas ?

 28   R.  C'est exact.

Page 16498

  1   Q.  Et pourtant, vendredi lorsque vous répondiez aux questions posées par

  2   M. Hannis, même si en 2004 vous aviez dit que vous compreniez ce qu'on vous

  3   disait, là, maintenant vous avez déclaré ne pas avoir compris pleinement ce

  4   que cela signifie de dire que vous n'êtes pas la cible d'une enquête, mais

  5   pourtant vous avez le statut d'un suspect. Vous en souvenez-vous ?

  6   R.  Oui.

  7   Q.  Alors au moment où on vous a appris que vous étiez un suspect, on vous

  8   a fait lecture de la définition du suspect. Et dans cette définition, il

  9   est dit qu'il s'agit d'une personne au sujet de laquelle l'Accusation

 10   dispose des éléments fiables suggérant que cette personne a pu commettre

 11   des crimes relevant de la compétence du TPIY. Donc si on transpose cette

 12   définition au sein de notre système juridique, que vous connaissez

 13   nettement mieux, ceci veut dire qu'il y a des bases pour vous soupçonner,

 14   n'est-ce pas ?

 15   R.  Oui, tout à fait.

 16   Q.  Et c'est de cette façon-là que vous avez interprété le statut qui vous

 17   était accordé, n'est-ce pas ?

 18   R.  Oui.

 19   Q.  Et même lorsqu'on vous a fait savoir que vous ne constituiez pas la

 20   cible de l'enquête, vous avez réfléchi comme il suit : puisque vous avez le

 21   statut du suspect, il pouvait s'agir d'une forme de responsabilité pénale

 22   impliquant le statut de co-auteur ou d'implication dans les crimes commis,

 23   n'est-ce pas ?

 24   R.  Oui, absolument.

 25   Q.  Monsieur Planojevic, je suis sûr que vous ne vous sentiez pas très à

 26   l'aise lorsque vous vous êtes retrouvé dans une situation pareille ?

 27   R.  Pas du tout.

 28   Q.  Vous avez été un policier professionnel pendant plus de 30 ans, avez-

Page 16499

  1   vous déjà été dans une situation pareille, avez-vous déjà été entendu à

  2   titre de suspect ?

  3   R.  Non.

  4   Q.  Ce qui m'intéresse tout particulièrement est un commentaire que vous

  5   avez formulé vendredi. Dans le compte rendu d'audience, page 16 442, vous

  6   avez dit, entre autres, que lorsque quelqu'un vous envoyait un message il

  7   fallait que vous montriez un esprit de coopération, sinon vous risquiez de

  8   perdre votre emploi. C'est une déclaration que vous avez faite en abordant

  9   les entretiens que vous avez eus avec le bureau du Procureur. Alors, cette

 10   personne qui vous a envoyé ce message disant que vous deviez coopérer, ou

 11   sinon vous risquiez de perdre votre emploi, alors je ne m'intéresse pas à

 12   savoir de qui il s'agissait, mais ce qui m'intéresse c'est de savoir si ce

 13   message vous a été transmis par les avocats du bureau du Procureur, ou par

 14   un autre biais ?

 15   R.  Il pouvait s'agir d'un avocat -- Trivun il était bien avocat, lui ?

 16   Q.  Monsieur, lors de votre entretien vous étiez cinq au total. Il y avait

 17   deux enquêteurs du bureau du Procureur, un avocat du bureau du Procureur,

 18   Julian Nicholls, vous étiez présent, et un interprète se trouvait sur place

 19   lui aussi, et c'était au mois de juin, n'est-ce pas ?

 20   R.  Oui.

 21   Q.  Donc si j'ai bien compris le sens de vos propos, le message suivant

 22   lequel vous deviez coopérer ou risquer de perdre votre emploi ne vous a pas

 23   été transféré par les membres du bureau du Procureur, qu'il s'agisse des

 24   enquêteurs ou de M. Nicholls, substitut du Procureur ?

 25   R.  Non.

 26   Q.  Cet avertissement, pour ainsi dire, vous a été communiqué par une autre

 27   personne alors ?

 28   R.  Oui.

Page 16500

  1   Q.  A quel moment avez-vous reçu cet avertissement ? De combien de jours a-

  2   t-il précédé l'entretien qui s'est déroulé les 8 et 9 juin ?

  3   R.  Eh bien, disons, cinq ou six jours à la veille de l'entretien.

  4   Q.  Et c'est en fait au moment où on vous a appris que vous deviez être

  5   entendu par le bureau du Procureur ?

  6   R.  Juste après.

  7   Q.  Monsieur Planojevic, dites-moi, s'il vous plaît, aviez-vous des raisons

  8   pour croire que si vous ne faisiez pas preuve de coopération dans vos

  9   entretiens avec le bureau du Procureur vous pouviez effectivement perdre

 10   votre travail ?

 11   R.  Mais c'est une pensée que j'ai toujours gardée à l'esprit pendant tous

 12   ces événements.

 13   Q.  Le fait est que vous avez été mis à la retraite quelque six mois plus

 14   tard en 2004, n'est-ce pas ?

 15   R.  Oui.

 16   Q.  Merci. Passons maintenant à un autre sujet.

 17   Monsieur, ceci figure dans votre déposition et vous l'avez réitéré vendredi

 18   dernier - enfin, quand je parle de votre déposition, je pense à cette

 19   déclaration que vous avez faite le 8 - vous avez donc déclaré avoir été

 20   membre du Parti communiste, l'Alliance du Parti communiste avant 1990,

 21   n'est-ce pas ?

 22   R.  Oui.

 23   Q.  Vous en avez également parlé vendredi dernier, le fait est que suite

 24   aux élections et à la victoire remportées par les partis nationaux, vous

 25   avez mis en état d'arrestation le ministre Alispahic [phon], n'est-ce pas ?

 26   R.  Ce n'est pas moi qui l'avais mis en état d'arrestation, mais j'ai

 27   participé à cette affaire.

 28   Q.  Et c'est précisément la façon dont j'ai formulé ma question. Vous

Page 16501

  1   faisiez partie des personnes qui travaillaient sur ce dossier. Une enquête

  2   avait été diligentée contre Alija Delimustafic, entre autres, et il a été

  3   mis en détention pendant trois jours, si mes souvenirs sont bons ?

  4   R.  Oui, il s'agit d'un dossier qui nous avait été confié. C'est moi qui

  5   signait les ordres, et tout se déroulait en fonction de ces ordres.

  6   Q.  Donc je ne ferais pas une erreur en disant que les représentants des

  7   partis nationaux ne voyaient pas en vous un homme de confiance ?

  8   R.  Oui, c'est généralement vrai.

  9   Q.  Vous avez décrit un incident, une mission vous a été confiée à Marin

 10   Dvor. Or, cette mission relevait d'un poste de grade inférieur par rapport

 11   à ce que vous aviez occupé et par rapport à celui que vous devriez occuper

 12   au vu de vos compétences, n'est-ce pas ?

 13   R.  Oui.

 14   Q.  Et c'est alors que vous avez essayé d'entrer en contact avec M.

 15   Zepinic, c'est lui qui était à la personne la plus haut placée au sein du

 16   MUP parmi les personnes d'appartenance ethnique serbe, et il était en

 17   charge notamment des employés serbes du MUP, mais il ne vous a jamais

 18   rappelé, n'est-ce pas ?

 19   R.  Exactement.

 20   Q.  Puis vous avez essayé de contacter -- ou plutôt, vous êtes allé en

 21   personne voir M. Momo Mandic. Lui était, pour ainsi dire, l'homme numéro

 22   deux parmi les Serbes qui étaient employés au MUP de la République

 23   socialiste de Bosnie-Herzégovine, et vous l'avez trouvé dans son bureau

 24   avec un Bruno Stojic, le représentant du HDZ et avec le représentant du

 25   SDA, M. Selimovic, les deux étaient des fonctionnaires, les deux très hauts

 26   gradés dans le cadre des partis nationaux, n'est-ce pas ?

 27   R.  Oui.

 28   M. ZECEVIC : [interprétation] Un instant, s'il vous plaît. On me signale

Page 16502

  1   une erreur dans le compte rendu d'audience. Page 21, ligne 12, on voit le

  2   MUP serbe de Bosnie-Herzégovine, alors que j'ai parlé du MUP de la

  3   République socialiste de Bosnie-Herzégovine.

  4   Q.  Lorsque vous êtes allé le voir pour vous plaindre de ceci, M. Mandic et

  5   les deux autres personnes présentes ont fait des blagues sur ce sujet,

  6   n'est-ce pas ?

  7   R.  Oui, justement c'était comme ça.

  8   Q.  Monsieur Planojevic, vous n'êtes pas le seul policier de carrière qui,

  9   à la suite de la victoire des partis nationalistes, nationaux, ait reçu un

 10   traitement qui n'était pas tout à fait adéquat ?

 11   R.  Oui, nous étions plusieurs.

 12   Q.  Monsieur, en 2006 vous étiez membre de la commission parlementaire de

 13   l'assemblée de Bosnie-Herzégovine chargée d'enquêter sur les crimes commis

 14   à l'encontre de la population de Sarajevo au cours des activités de combat

 15   pendant la guerre. C'est ce que vous m'avez dit au cours de l'entretien,

 16   mais je crois que ce n'est pas une question qui vous a été posée par M.

 17   Hannis, n'est-ce pas ?

 18   R.  Oui, c'est exact.

 19   Q.  Si j'ai bien compris, votre belle-mère est également, en 1992, disparue

 20   à Sarajevo. Elle a été portée disparue cette année-là, n'est-ce pas ?

 21   R.  Oui, elle est disparue. A ce jour, elle n'est pas revenue.

 22   Q.  Si je ne m'abuse, lors de votre déposition à la fin du mois de juillet,

 23   pendant tous les mois d'août et septembre, vous avez essayé de savoir ce

 24   qui lui était arrivé par le biais de certains contacts personnels. Donc,

 25   vous avez essayé de voir ce qui lui était arrivé à Sarajevo, mais vous

 26   n'avez jamais réussi à trouver ce qui lui était arrivé ?

 27   R.  Oui, j'ai tenté de savoir quel a été son sort à plusieurs reprises.

 28   Q.  Et si j'ai bien compris, même à ce jour, vous ne savez toujours pas ce

Page 16503

  1   qui lui est arrivé, vous n'avez jamais pu retrouver quelque trace que ce

  2   soit concernant sa disparition ?

  3   R.  Je peux seulement me livrer à des conjectures, mais je n'ai aucune

  4   preuve concrète. Les informations que je détiens ne sont pas suffisantes

  5   pour me forger une opinion définitive.

  6   Q.  S'agissant des cas de civils portés disparus dans la ville de Sarajevo

  7   en 1992 et plus tard, il y a eu plusieurs cas de ce type, n'est-ce pas ?

  8   R.  Oui, justement, il y a un très grand nombre de personnes qui sont

  9   portées disparues. Dans mon quartier, il y a cinq familles dont les membres

 10   de leurs familles sont portés disparus et dont on a aucune trace à ce jour.

 11   Je peux les énumérer si vous le souhaitez.

 12   Q.  Je n'ai absolument rien contre ceci. Je ne crois pas que c'est

 13   nécessairement pertinent. Vous pourriez peut-être, brièvement, rapidement

 14   nous donner quelques noms si vous le souhaitez.

 15   R.  Il s'agit de Milan Saratlija, Mara Saratlija, le couple Mijanovic et ma

 16   belle-mère. Toutes ces personnes ont été emmenées au cours d'une même

 17   journée et elles sont disparues.

 18   Q.  Nous parlons de la mi-1992, n'est-ce pas ?

 19   R.  Oui. En fait, vous pourriez même dire que c'était à la fin du mois de

 20   juillet. On peut même être plus précis.

 21   Q.  Très bien, merci. Monsieur, revenons maintenant à la fin de 1991. Je

 22   crois que c'est une période qui est pertinente dans cette affaire, et

 23   j'aimerais savoir la chose suivante --

 24   M. ZECEVIC : [interprétation] Je souhaite que l'on apporte une correction

 25   au compte rendu d'audience. J'ai mentionné l'année 1991, alors que je vois

 26   qu'il est consigné que l'on parle de l'année 1992. Alors, il faudrait

 27   corriger pour l'année 1991.

 28   Q.  Donc, Monsieur, dites-nous, s'il vous plaît, vous avez été nommé à un

Page 16504

  1   poste à Marin Dvor. Quel était ce poste ?

  2   R.  Je crois que j'ai été transféré le 1er juin. La décision a été prise

  3   quelques jours auparavant, je crois.

  4   Q.  Très bien. Alors, si j'ai bien compris, à partir du mois de juin 1991

  5   jusqu'à la mi-septembre 1991, il n'y a pas réellement eu de problèmes

  6   particuliers s'agissant de votre travail ?

  7   R.  Non.

  8   Q.  Par contre, je vois d'après certaines déclarations que vous avez faites

  9   que le 18 septembre - vous vous souvenez bien de cette date puisque vous

 10   emmeniez votre famille au bord de la mer - vous aviez remarqué qu'en date

 11   du 18 septembre la situation avait radicalement changé ?

 12   R.  Oui, c'est exact.

 13   Q.  Lorsque vous êtes revenu après les vacances, on vous a dit qu'on avait

 14   procédé à la mobilisation de la composition des réservistes de la police et

 15   que plus de 95 % des armes de la police étaient tombées ou étaient allées

 16   entre les mains des Musulmans, donc des membres du peuple musulman, n'est-

 17   ce pas ?

 18   R.  Oui, c'est exact.

 19   Q.  Et vous avez transmis vos inquiétudes et vos préoccupations, en tant

 20   que membre de la police du peuple serbe, à votre chef Rusdo Kuhinja. Donc,

 21   c'était votre chef au poste de sécurité publique de Marin Dvor, n'est-ce

 22   pas ?

 23   R.  Oui, c'est exact.

 24   Q.  Et si j'ai bien compris, il essayait de vous convaincre que ce n'était

 25   pas vrai ce fait que 95 % de la police mobilisée avait été mobilisée, et

 26   qu'il s'agissait d'armes qui avaient été également transmises ou données au

 27   peuple musulman, n'est-ce pas ? Il vous a dit que ce n'était pas vrai. Il a

 28   essayé de vous convaincre du contraire ?

Page 16505

  1   R.  Oui, c'est exact.

  2   Q.  Pour confirmer ceci, vous avez, avec votre collègue musulman également,

  3   Muhamed Agic, vous avez essayé de vous rendre sur place pour rendre visite

  4   à ces postes de police de réserve, n'est-ce pas ?

  5   R.  Oui.

  6   Q.  Lorsque vous avez inspecté ces postes de police, si je vous ai bien

  7   compris, vous avez vu quatre postes de police de réserve qui étaient

  8   composés presque à 100 % de la population musulmane. Ces derniers avaient

  9   été mobilisés; ça faisait partie de la réserve, ou des réservistes.

 10   R.  Oui, mais je dois corriger ce que vous avez dit. Petite correction, je

 11   suis allé dans deux postes de police, et Agic est allé inspecter deux

 12   autres postes de police.

 13   Q.  Mais c'est un fait, n'est-ce pas, de dire qu'il y avait quatre postes

 14   de police qui étaient mobilisés qui comptaient des employés qui étaient

 15   presque à 100 % Musulmans ?

 16   R.  Oui, à peu près.

 17   M. ZECEVIC : [interprétation] Intervention, s'il vous plaît. Page 24 du

 18   compte rendu d'audience, ligne 10, il est indiqué que j'ai dit que votre

 19   chef Rusdo Kuhinja a essayé de vous convaincre du contraire, à savoir que

 20   95 % des membres de la police de réserve a été mobilisé qui étaient

 21   Musulmans, et que ces derniers étaient armés. Donc c'est ce que j'ai dit,

 22   n'est-ce pas, car au compte rendu d'audience, on voit vraiment autre chose.

 23   Alors c'est la raison pour laquelle je souhaitais intervenir, pour le

 24   compte rendu d'audience.

 25   Q.  Bien. Maintenant, vous déteniez certaines informations selon lesquelles

 26   un certain Skrijelj, s'agissant duquel vous aviez obtenu des renseignements

 27   comme étant la personne qui a procédé à la contrebande d'armes ?

 28   R.  J'aimerais vous préciser un point.

Page 16506

  1   Vous savez, la municipalité Centre, la municipalité appelée Centre --

  2   Q.  Ralentissez votre débit, je vous prie.

  3   R.  Donc la municipalité Centre comptait deux postes de police, et il y

  4   avait un poste de sécurité publique. Donc dans le cadre d'un poste de

  5   sécurité publique, on peut retrouver plusieurs postes de police. S'agissant

  6   de Bjelave, donc c'est un deuxième poste de police qui faisait partie du

  7   centre de sécurité publique Centre, la composition était principalement

  8   musulmane, s'agissant des policiers, bien sûr. C'était également le

  9   quartier, si vous voulez. Une personne dénommée Skrijelj, dont le nom de

 10   famille est Skrijelj, avait fait l'objet d'une enquête par les membres du

 11   SUP de la ville, car on l'avait soupçonné de s'être adonné à la

 12   contrebande, donc quelques mois avant que les armes ne soient effectivement

 13   distribuées, et avant que l'on ait procédé à la contrebande d'armes.

 14   Donc ce Skrijelj était entré dans le poste de police de Bjelave, et il a

 15   distribué ces armes aux personnes selon lesquelles il pensait qu'il fallait

 16   distribuer ces armes. Donc moi, je n'avais pas d'information concernant les

 17   armes et à qui ces armes avaient été distribuées. Mais par la suite, j'ai

 18   obtenu des listes pour le poste de Marin Dvor.

 19   Voilà, je voulais simplement préciser ce point afin qu'il n'y ait pas

 20   de confusion.

 21   Q.  Pourriez-vous nous dire, s'il vous plaît, s'agissant de ces

 22   irrégularités, pour les appeler ainsi, vous avez informé le ministère de

 23   l'Intérieur, et ce, le ministre, son adjoint Zepinic ainsi que Momo Mandic

 24   probablement, en tant qu'adjoint du ministre de la police, tout comme le

 25   chef de Centre, M. Sabovic, n'est-ce pas ?

 26   R.  Oui. Mais je voudrais vous apporter une autre petite précision. Ce qui

 27   était particulièrement inquiétant ici, c'est que s'agissant de la liste des

 28   personnes à qui on avait remis une arme de service, j'avais trouvé, enfin à

Page 16507

  1   Marin Dvor, j'avais trouvé 32 personnes contre lesquelles des plaintes

  2   avaient été formulées au pénal, contre ces personnes, pour avoir commis des

  3   crimes qui étaient incompatibles avec le travail d'un policier.

  4   Q.  Très bien. Alors pour accélérer les débats, vous n'aviez jamais reçu

  5   d'information venant du MUP de la République socialiste fédérative de

  6   Bosnie-Herzégovine concernant votre lettre, n'est-ce pas ?

  7   R.  Non, je n'ai reçu aucune réponse.

  8   Q.  Et par la suite, après un certain temps, une délégation est venue du

  9   secrétariat fédéral de l'Intérieur, ils étaient accompagnés de

 10   représentants supérieurs du MUP de République socialiste de Bosnie-

 11   Herzégovine, et vous les avez également informés de la situation, n'est-ce

 12   pas ?

 13   R.  Oui.

 14   Q.  Dites-moi, je vous prie, Monsieur, la chose suivante : savez-vous si le

 15   centre de sécurité publique de Hadzici, c'est l'une des municipalités qui

 16   fait partie de Sarajevo, n'est-ce pas ?

 17   R.  Oui, cela fait partie, elle fait partie des municipalités de Sarajevo.

 18      Q.  Et ce poste de sécurité publique était chargé de la sécurité

 19   physique des installations à Rakovica du MUP qui, en fait, étaient des

 20   dépôts d'armes. Etiez-vous au courant de cela ?

 21   R.  Chaque poste s'occupait des installations sur leur territoire, pour ce

 22   qui est des installations importantes comme les dépôts.

 23   Q.  Est-ce que vous savez si sur le territoire du SJB, le SJB de Hadzici,

 24   en fait, est-ce que vous savez si l'on distribuait des armes aux membres du

 25   peuple musulman à la fin de 1991, début 1992, pour ce qui est de la

 26   population musulmane qui n'avait pas l'autorité, -- à qui on ne devait pas

 27   remettre des armes ?

 28   R.  Je crois que j'ai décrit une réunion qui a eu lieu à Ilidza, à l'hôtel

Page 16508

  1   Bosnia ou Serbia. Je crois avoir expliqué que Glavas, Tiho - je crois que

  2   c'était le chef de Hadzici - il avait parlé des problèmes qui étaient

  3   similaires aux problèmes de Marin Dvor où j'étais, s'agissant de l'armement

  4   et de la distribution des armes.

  5   Q.  Fort bien. Dites-moi, s'il vous plaît, --

  6   R.  Excusez-moi, je voudrais simplement préciser un point. Je crois que

  7   j'ai omis de mentionner un nom. Je crois qu'il était également là. Je ne

  8   crois pas l'avoir mentionné un peu plus tôt lorsque vous avez entamé votre

  9   question, je me suis souvenu de son nom.

 10   Q.  Outre ces manifestations, outre ce qui est arrivé, le fait de

 11   distribuer les armes et de transférer dans le cadre des réservistes de la

 12   police les personnes pour lesquelles on n'avait pas procédé à une

 13   vérification relative à la sécurité de ces personnes, il y avait également

 14   des problèmes avec le personnel du MUP de la République socialiste de

 15   Bosnie-Herzégovine, n'est-ce pas ?

 16   R.  Oui.

 17   Q.  Et donc, certaines personnes qui, d'après leurs compétences et d'après

 18   leur mode de vie, n'étaient pas censées se retrouver dans la police, ces

 19   derniers avaient été nommés aux poste importants, aux postes de

 20   commandement dans la police, n'est-ce pas ?

 21   R.  Oui.

 22   Q.  Et c'était particulièrement flagrant chez les membres du peuple

 23   musulman, n'est-ce pas, d'après vos connaissances ?

 24   R.  Oui, car dans mon entourage je pouvais le voir également.

 25   M. ZECEVIC : [interprétation] Monsieur le Président, je ne sais pas si vous

 26   souhaitez prendre votre pause, enfin la première pause maintenant.

 27   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Il nous reste encore quatre minutes.

 28   M. ZECEVIC : [interprétation] Merci beaucoup.

Page 16509

  1   Q.  Dites-moi, je vous prie, et j'aborde maintenant mon dernier sujet avant

  2   la pause.

  3   Il me semble que vous avez déjà déclaré dans une autre déclaration - car

  4   vous avez déjà déposé dans l'affaire Lalovic et consorts devant les

  5   tribunaux de Bosnie-Herzégovine - il me semble que vous aviez mentionné que

  6   vous aviez appris qu'un à certain moment donné vous vous êtes trouvé sur

  7   une liste pour être liquidé et éliminé.

  8   Pourriez-vous nous dire brièvement de quoi il s'agissait, de quelle liste

  9   s'agissait-il, comment avez-vous eu vent de ceci ? Expliquez-le-nous

 10   brièvement, je vous prie.

 11   R.  A cause de tous les événements qui se sont déroulés, et je les ai

 12   énumérés brièvement, mais il y en a eu énormément, je me suis trouvé sur la

 13   sellette car on m'a dit, fais attention. Et un soir, une amie m'a dit - au

 14   cours du mois d'octobre - je me souviens bien que c'était le mois

 15   d'octobre, car une amie m'a appelé au téléphone pour me demander de me voir

 16   d'urgence. J'avais un petit enfant et j'avais des invités, donc je lui ai

 17   demandé s'il était possible de prendre un autre rendez-vous plus tard. Mais

 18   comme elle insistait, je lui ai demandé de venir devant chez moi, devant

 19   mon appartement.

 20   Et elle m'a dit : Fais attention, tu fais l'objet d'une cible. Au début je

 21   n'ai pas du tout compris ce qu'elle me disait exactement, dans quel sens

 22   elle pensait à ceci, ce qu'elle voulait dire exactement par là, mais elle a

 23   sorti de sa poche un bout de papier, et j'ai vu sept noms parmi lesquels

 24   j'ai reconnu le mien.

 25   C'était une liste qui avait été rédigée à la main et au stylo bleu. Et elle

 26   m'a dit que ceci, cette liste a été lue au poste de sécurité publique, il

 27   ne s'agissait que d'une transcription donc on a transcrit, on a simplement

 28   recopié les noms sur un bout de papier. Donc il s'agissait de personnes qui

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  1   étaient censées être liquidées. Jusqu'alors, je n'avais absolument rien

  2   compris de sérieux. Je pensais que toutes les personnes pensaient comme

  3   moi, qu'on ne pouvait pas prendre la vie d'un homme. Mais c'est là que j'ai

  4   compris pour la première fois que j'étais en péril, et qu'il fallait

  5   protéger ma famille, ma femme, et un bébé de huit mois, mon bébé de huit

  6   mois à l'époque. Je les ai placés à bord d'un avion en deux jours et je les

  7   ai envoyés à Hambourg.

  8   Voilà brièvement c'est ce qui est arrivé. Je ne veux pas vous ennuyer plus

  9   longtemps. 

 10   Q.  Alors, deux petites précisions. Lorsque vous parlez du mois d'octobre,

 11   vous parlez du mois d'octobre 1991, n'est-ce pas ?

 12   R.  Ma famille est partie sur Hambourg le 11 octobre 1991.

 13   Q.  Donc cette information, vous l'auriez reçue vers le 8 ou le 9 octobre,

 14   si je vous ai bien compris ?

 15   R.  Voilà, vous avez tout à fait raison. Vingt jours après la mobilisation

 16   et 20 jours après tous les événements qui se sont déroulés alors que moi

 17   j'essayais d'instaurer l'ordre pour que l'on se comporte conformément à la

 18   loi.

 19   Q.  Cette personne qui vous a amené cette liste sur laquelle votre nom se

 20   trouvait, s'agissant des personnes qui étaient censées être éliminées, il

 21   s'agissait d'une élimination dans le cas où certains événements allaient se

 22   dérouler, donc on avait dit une élimination aurait lieu si certains

 23   événements allaient survenir ?

 24   R.  Oui. Voilà c'étaient les premières personnes qu'il fallait éliminer.

 25   Q.  Et outre vous-même sur cette liste, vous nous avez dit qu'il y avait

 26   d'autres noms, vous avez dit qu'en tout il y avait sept noms. Est-ce que

 27   vous savez si les six autres personnes étaient également des Serbes, comme

 28   vous ?

Page 16511

  1   R.  Ils étaient tous Serbes, et c'était tous des membres de la police.

  2   Q.  Dernière question avant la pause. Le chef du poste Stari Grad

  3   s'appelait Ismet Dahic, n'est-ce pas ?

  4   R.  Je ne suis pas tout à fait certain si à l'époque c'était Ismet ou

  5   Bezdrob, c'est possible. Mais je ne suis pas tout à fait certain de ce que

  6   j'avance.

  7   Q.  Mais dans tous les cas, qu'il s'agisse d'Ismet Dahic ou d'Enes Bezdrob,

  8   c'étaient des Musulmans dans tous les cas ?

  9   R.  Oui, c'est exact.

 10   Q.  L'un d'eux était sans doute chef du poste de Stari Grad à ce moment-là,

 11   n'est-ce pas ?

 12   R.  Oui.

 13   Q.  Merci bien.

 14   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Nous allons reprendre nos travaux dans

 15   20 minutes.

 16   [Le témoin quitte la barre]

 17   --- L'audience est suspendue à 15 heures 44.

 18   --- L'audience est reprise à 16 heures 08.

 19   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Juste un bref point avant que le

 20   témoin ne revienne. Nous voyons que les parties ont annoncé des écritures

 21   concernant les faits faisant l'objet d'un accord, mais je croyais que la

 22   Chambre avait indiqué clairement vendredi que cela n'était pas nécessaire.

 23   Nous avons déjà ces faits faisant l'objet d'un accord, et cela suffit. Nous

 24   avons les communications qui portent vos signatures, donc ça ne pose aucun

 25   problème. La seule chose, c'est que nous attendons toujours le résultat ou

 26   le suivi des discussions du week-end. Mais c'est une autre question.

 27   M. ZECEVIC : [interprétation] Je comprends, Monsieur le Juge, mais peut-

 28   être que nous-mêmes, aussi bien que nos confrères de l'Accusation, vous

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  1   auront mal compris. Parce que dans la compréhension qui était la mienne,

  2   les faits qui avaient déjà fait l'objet d'un accord, nous étions censés

  3   envoyer un e-mail avec une signature en tant que communication, alors que

  4   les faits ayant fait l'objet d'un accord au cours des trois ou quatre

  5   dernières journées, devaient, quant à eux, faire l'objet d'une requête

  6   écrite. Alors, peut-être que je me trompe, mais c'est ainsi que j'ai

  7   compris la chose.

  8   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Eh bien, à partir du moment où nous

  9   sommes informés du cours des choses, tout cela est entre les mains des

 10   parties, je veux dire le fait de parvenir ou non à un accord concernant les

 11   faits. Donc, si nous recevons une note nous informant des faits sur

 12   lesquels un accord est intervenu, cela nous suffit.

 13   [Le témoin vient à la barre]

 14   M. ZECEVIC : [interprétation] Je comprends. Je vais en parler avec nos

 15   confrères de l'Accusation. Bien entendu, nous ferons exactement ce qui est

 16   nécessaire pour que les Juges de la Chambre soient informés. Cela va de

 17   soi.

 18   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci.

 19   M. ZECEVIC : [interprétation] Puis-je poursuivre ?

 20   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Juste un instant. Nous avons noté que

 21   l'article signalé par le témoin a entre-temps été retiré du site internet

 22   de l'agence Sense. Allez-y, Maître.

 23   M. ZECEVIC : [interprétation] Merci.

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous remercie.

 25   M. ZECEVIC : [interprétation]

 26   Q.  Monsieur Planojevic, nous avons établi que vous avez travaillé pendant

 27   plus de 30 ans en tant que professionnel au sein des services de la police.

 28   Alors, les postes de contrôle auxquels il était procédé à la vérification

Page 16513

  1   de l'identité des personnes ainsi qu'à la fouille des véhicules du point de

  2   vue de la sécurité, ces postes de contrôle existaient et les activités y

  3   étaient conduites au titre d'activités tactiques pour la police.

  4   C'étaient des activités sur le terrain qui avaient un caractère tactique,

  5   n'est-ce pas ?

  6   R.  Oui.

  7   Q.  Et ces mesures de nature tactique qui étaient prises sur le terrain, le

  8   fait de mettre en place des postes de contrôle sous-entendait

  9   habituellement que les emplacements choisis se trouvent à l'entrée des

 10   villes importantes, à des carrefours importants où se croisaient des voies

 11   de circulation régionales, n'est-ce pas ?

 12   R.  Oui.

 13   Q.  Et ces activités de nature tactique, le fait de disposer ces postes de

 14   contrôle notamment, cela a concerné l'ensemble du territoire de l'ex-

 15   Yougoslavie avant l'année 1990, n'est-ce pas ?

 16   R.  Oui, c'était une activité qui était présente déjà au moment où moi j'ai

 17   commencé à travailler dans la police.

 18   M. ZECEVIC : [interprétation] Je vois qu'au compte rendu d'audience, en

 19   page 32, ligne 20, est indiqué l'année 1994. Mais l'année au sujet de

 20   laquelle j'ai interrogé le témoin était l'année 1990.

 21   Q.  Alors, si l'on garde à l'esprit les événements survenus en 1990 et 1991

 22   notamment, on a pu constater une recrudescence, ou plutôt une

 23   intensification particulièrement significative de ces activités tactiques

 24   et de la mise en place de postes de contrôle à travers l'ensemble de l'ex-

 25   Yougoslavie, n'est-ce pas ?

 26   R.  Oui.

 27   Q.  Egalement en Bosnie-Herzégovine; est-ce exact ?

 28   R.  Oui.

Page 16514

  1   Q.  Vous êtes certainement au courant de cette opération conjointe qui a eu

  2   lieu en 1991 entre le ministère de l'Intérieur de la République socialiste

  3   de Bosnie-Herzégovine et le SUP fédéral, opération baptisée Punkt 1991. Ou

  4   peut-être la JNA; je n'en suis pas tout à fait sûr.

  5   Est-ce que, en tout cas, vous connaissez cette opération ?

  6   R.  Il y a eu l'une et l'autre en accord avec le ministre. En fait, c'est

  7   ainsi que là où j'étais représentant du SUP fédéral, ils sont arrivés avec

  8   les représentants du ministère de la Bosnie-Herzégovine.

  9   Et c'est dans ce cas que nous avons décidé, alors que d'autre part il y

 10   avait un accord entre Kukanjak et le ministre Delimustafic consistant à

 11   organiser des patrouilles conjointes. Je crois que c'est comme ça que ça

 12   s'est passé.

 13   Q.  Outre ces postes de contrôle qui ont été mis en place suite à l'accord

 14   passé entre le ministère de l'Intérieur de la République socialiste de

 15   Bosnie-Herzégovine et le SUP fédéral, il y avait aussi des postes de

 16   contrôle conjoints où des hommes de la police militaire et des hommes de la

 17   police intervenaient suite à l'accord passé entre le général Kukanjac, et

 18   le commandant de la 2e Région militaire, d'une part, et le ministre de

 19   l'intérieur de la Bosnie-Herzégovine Alija Delimustafic, d'autre part.

 20   N'est-ce pas, c'est ce que vous nous dites ?

 21   R.  Oui.

 22   Q.  Merci. Alors, le contrôle et l'établissement de l'identité des

 23   personnes fait partie des tâches routinières de la police sur le terrain,

 24   le fait de contrôler les documents d'identité, les papiers des personnes ?

 25   R.  Oui, c'est une mesure qui est omniprésente et qu'il convient de mettre

 26   en place correctement en tant que première étape.

 27   Q.  Dans cette période de temps s'étendant de 1989, disons à 1992, on a

 28   constaté beaucoup d'activités de trafic d'armes, cela a posé des problèmes,

Page 16515

  1   et dans ce cadre, une des mesures typiques qui a été prise à ces postes de

  2   contrôle consistait également à procéder à une fouille de véhicules à

  3   moteur, notamment des coffres de ces véhicules, ainsi que des bagages qui

  4   pouvaient être à bord de ces véhicules, n'est-ce pas ?

  5   R.  Oui.

  6   Q.  Merci. Vendredi, vous avez répondu, avec mon estimé confrère, M.

  7   Hannis, à des questions concernant les événements de la soirée du 4 avril.

  8   Je voudrais simplement revenir brièvement sur la succession de ces

  9   événements.

 10   Il est un fait, n'est-ce pas, que dans la soirée de ce 4 avril, votre

 11   collègue Risticovic [phon] du SUP municipal, a été la victime d'une attaque

 12   au SJB ?

 13   R.  Juste une correction. Il s'agit du SUP de la ville, et il s'agit donc

 14   d'une unité qui couvrait l'ensemble de la ville. Lui, il était un agent du

 15   SUP municipal. Et c'est à l'entrée même de ce SUP municipal qu'il a été

 16   tabassé jusqu'à perdre conscience.

 17   Q.  Et cela s'est produit dans la soirée du 4 avril, n'est-ce pas ?

 18   R.  Oui.

 19   Q.  Il a donc été pris à partie, tabassé par des membres des Bérets verts,

 20   n'est-ce pas ?

 21   R.  Oui, c'est ce qu'il m'a raconté lorsque je suis allé lui rendre visite

 22   à l'hôpital où il a séjourné longtemps. C'était un hôpital de guerre, de

 23   fortune, en fait.

 24   Q.  Est-ce que ces hommes des Bérets verts lui ont placé le canon d'un

 25   pistolet dans la bouche et qu'ils ont fait semblant de tirer; est-ce qu'ils

 26   ont tiré à vide ?

 27   R.  Lui, il estimait que le coup n'était pas parti, non pas que le pistolet

 28   n'était pas chargé, mais que le coup n'était pas parti, et que c'est pour

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  1   cette raison qu'il était resté en vie. Et je pense qu'au jour d'aujourd'hui

  2   il ne s'en est toujours pas remis. Il vit ici au Pays-Bas.

  3   Q.  Il est également exact de dire, n'est-ce pas, que cet autre collègue à

  4   vous, Lazar Bojanic, a lui aussi été tabassé ce même soir ?

  5   R.  Oui. et si vous avez besoin d'explications supplémentaires, je peux

  6   vous les donner.

  7   Q.  Eh bien, juste une chose, il était également policier et il était en

  8   service au moment où il a été tabassé, n'est-ce pas ?

  9   R.  Il était chef de permanence au poste de police Novo Sarajevo. C'est là

 10   qu'il était en service.

 11   Q.  Et à cette même date dans cette même succession d'événements, il a lui

 12   aussi vu M. Ismet Dahic en compagnie de Puskar, qui était à la tête des

 13   Bérets verts, n'est-ce pas ?

 14   R.  C'était à une distance de 150 ou 200 mètres du poste de police Novo

 15   Sarajevo. Il est allé au service des urgences qui était à proximité, et

 16   donc il a pu voir qu'à proximité de ce poste de police où les hommes

 17   avaient été attaqués, alors que lui-même avait été frappé d'un coup de

 18   crosse, il a pu le voir et il a demandé à cet individu de lui permettre

 19   d'aller juste au service des urgences, ce sur quoi il lui a répondu d'y

 20   aller avec un geste.

 21   Q.  Et à cette occasion lorsque Lazar Bojanic a été lui aussi battu,

 22   tabassé, un autre policier appartenant au groupe ethnique serbe et se

 23   trouvant au poste de police de Novo Sarajevo a été assassiné, n'est-ce pas

 24   ? Il s'appelait Pero, et je ne connais pas son nom de famille.

 25   R.  C'est Pero Petrovic qui a été tué. Il n'était pas employé à ce poste de

 26   police-là. Il était venu pour signaler un crime ou certains actes qui

 27   avaient été commis, et il se trouvait là par hasard. Il a été touché par,

 28   ou plutôt, on l'a frappé avec la crosse d'un fusil, et ensuite il a reçu

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  1   une balle à l'arrière de la tête.

  2   Q.  Et tout ça s'est passé à l'intérieur du poste de police de Novo

  3   Sarajevo, n'est-ce pas ?

  4   R.  Dans le bureau du chef de permanence.

  5   Q.  Nous avons évoqué Ismet Dahic, c'était un professionnel, et c'était le

  6   chef du SJB du poste de police de Stari Grad de la vieille ville de

  7   Sarajevo; est-ce exact ?

  8   R.  Il avait arrêté ses études à l'école secondaire, et nos carrières ont

  9   évolué pratiquement en parallèle. Nous avions toujours travaillé pour la

 10   police.

 11   Je ne peux pas vous dire avec une certitude absolue s'il était bien

 12   le chef sur place. Lorsque j'ai reçu ce document je ne me rappelle pas s'il

 13   était encore à ce poste.

 14   Q.  Il était près du poste de police de Novo Sarajevo au moment où il était

 15   accompagné par Sarif Puskar, le chef des Bérets verts, et il se trouvait là

 16   dans une zone qui n'était pas couverte par son propre poste de sécurité

 17   publique.

 18   R.  Oui. Il y a un autre poste de police entre ces deux-là.

 19   Q.  Et un certain Slobodan Vreco, lui aussi, a vu débarquer à son poste de

 20   police un groupe d'hommes en capuchons en plein milieu de son SJB dans le

 21   cours de la nuit du 4 avril, n'est-ce pas ?

 22   R.  Eh bien, si je me rappelle bien, Slobodan Vreco se trouvait devant le

 23   poste de police de Novo Sarajevo lorsque ces hommes ont  investi les lieux.

 24   Il ne se trouvait pas à l'intérieur, et il n'a pas été victime de

 25   l'attaque, il y a échappé. En fait, il a pris la fuite avant que cette

 26   attaque ne survienne.

 27   Q.  Et à votre poste de police, vous étiez de permanence, et vous nous avez

 28   déjà dit qu'un individu a été amené, et qu'on vous a alors informé que cet

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  1   homme était armé et qu'il avait reçu l'ordre de monter la garde devant

  2   l'assemblée municipale, entre autres. Vous avez dit avoir conclu que

  3   quelque chose était en train de se passer, et qu'après cela vous être entré

  4   chez vous.

  5   R.  Oui.

  6   Q.  Et tout ce que nous avons évoqué à l'instant, ces différents incidents,

  7   vous en avez appris la survenue par téléphone, tous ces incidents qui se

  8   sont produits dans cette même soirée, n'est-ce pas ?

  9   R.  Oui, j'ai appris une partie des événements le soir même, et une autre

 10   partie des événements lors de mes contacts avec les témoins, ou plutôt les

 11   participants mêmes à ces événements.

 12   Q.  Ce que vous en avez conclu, et la raison pour laquelle vous avez quitté

 13   le SJB de Marin Dvor où vous étiez employé, en fait la raison principale

 14   c'était qu'une sorte d'attaque synchronisée était en train d'être livrée et

 15   était dirigée contre la plupart des postes de sécurité publique de la ville

 16   de Sarajevo au sens large, n'est-ce pas ?

 17   R.  Oui, à une précision près, si vous voulez bien. La police serbe à Stari

 18   Grad s'était retirée un mois avant la guerre, donc vous aviez là un poste

 19   de police où un seul policier serbe était resté, un certain Tosic, si je me

 20   rappelle bien. Tous les autres policiers étaient partis suite aux pressions

 21   subies. Donc, un mois avant la guerre, il n'y avait que quatre d'entre eux

 22   qui étaient encore présents.

 23   Et dans la zone de Stari Grad, la composition ethnique était telle

 24   qu'il y avait à peu près 70 % de Musulmans. Marin Dvor et Bjelave étaient

 25   des postes de police où il n'y avait plus de Serbes. Ceux qui s'y étaient

 26   trouvés avaient déjà pris la fuite. Et ce soir-là, j'ai dit que -- cet

 27   assistant du commandant -- je les ai emmenés au poste pour assurer leur

 28   sécurité. Enfin, moi en tout cas j'avais des rapports plutôt professionnels

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  1   avec eux.

  2   Mais au centre il y avait environ 400 hommes, 400 Bérets verts qui

  3   ont investi les lieux. Il y avait aussi le foyer de la police qui se

  4   trouvait sur le territoire du centre-ville et qui, lui aussi, a été

  5   investi. Il a été investi par un criminel endurci. Je me propose en fait

  6   d'énumérer les différents postes de police. La police routière chargée de

  7   la circulation se trouvait elle aussi près de Novo Sarajevo. J'ai déjà

  8   décrit ce qu'il en était à Novo Sarajevo, donc ce n'est pas la peine de

  9   revenir là-dessus.

 10   Et Novi Grad, lorsque j'ai appelé Novi Grad ce soir-là, j'ai appris

 11   qu'il y avait deux Serbes au sein de la permanence. Voilà où on en était ce

 12   soir-là. Et il n'y avait plus qu'Ilidza. Alors, si je me rappelle bien, il

 13   y avait 65 à 70 % de Serbes à Ilidza, et ce poste coexistait avec Edin

 14   Bilic [phon], un Bosnien, qui était le chef. Ce poste était toujours en

 15   place, et pendant encore une vingtaine de jours il a continué à apparaître

 16   à la télévision, jusqu'à la mi-avril, je pense. Oui, c'est de cette façon

 17   que je savais qu'il était toujours là, qu'ils étaient toujours, eux, en

 18   place. Il s'appelait je crois Edin Mlijevic [phon].

 19   Ces différents postes de police ont été investis et pris pendant la

 20   nuit. Ce n'est pas comme si nous étions partis parce que nous avions

 21   souhaité partir; nos vies étaient en jeu.

 22   Q.  Très bien. Et vous avez également parlé de coup de téléphone de

 23   menaces, que vous aviez reçues par téléphone. Vous en avez parlé. Mais

 24   vous-même, tout comme les autres policiers serbes, vous aviez peur pour

 25   votre propre sécurité et celle de vos familles, n'est-ce pas ?

 26   R.  Oui, à ceci près que la plupart s'étaient déjà réfugiés hors de

 27   Sarajevo, je vous l'ai dit.

 28   Q.  Monsieur Planojevic, ces différents événements du 4 avril, pour ainsi

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  1   dire, ils représentaient un point de non-retour, n'est-ce pas ?

  2   R.  Cela était évident, il aurait fallu être aveugle pour ne pas s'en

  3   rendre compte.

  4   Q.  Et le lendemain, conjointement avec un groupe de collègues, vous vous

  5   êtes rendus à Vraca. Et vendredi dernier, en répondant à M. Hannis, vous

  6   avez indiqué qu'un accord avait été passé selon lequel Vraca devait

  7   accueillir le siège du SUP de la Republika Srpska, et que, pour cette

  8   raison, on s'attendait à ce qu'il n'y ait pas de conflit.

  9   Est-ce que vous vous rappelez avoir déclaré cela ?

 10   R.  Oui.

 11   Q.  Mais après que vous êtes parti dans l'après-midi du 5, il y a quand

 12   même eu un conflit, un conflit a éclaté, ou des affrontements, n'est-ce pas

 13   ?

 14   R.  Oui.

 15   Q.  J'espère que vous êtes au courant que cet accord passé concernant la

 16   scission du MUP du ministère de l'Intérieur de la Bosnie-Herzégovine

 17   faisait partie intégrante du plan Cutileiro ?

 18   R.  Oui. Je l'ai évoqué vendredi.

 19   Q.  Très bien. Vendredi, vous avez indiqué qu'après votre départ de Vraca

 20   le 5 dans l'après-midi, vous vous êtes rendu dans la rue Pionirska, puis à

 21   Rogatica, pour ensuite revenir travailler au MUP lundi. Vous avez dit que

 22   c'était lundi, 19 avril. Mais pendant le récolement, j'ai vérifié les

 23   dates, et ce lundi-là en 1992, c'était un lundi 20 avril.

 24   Alors, vous vous souvenez qu'il s'agissait d'un lundi, n'est-ce pas ?

 25   R.  Oui, absolument, c'était lundi. Mais je pensais que c'était le 19.

 26   Q.  Très bien. Vous avez été nommé assistant du ministre et vous vous êtes

 27   installé à l'école de Vraca; est-ce exact ?

 28   R.  Oui.

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  1   Q.  Et à ce moment-là, votre supérieur hiérarchique direct était le sous-

  2   secrétaire de la sécurité publique, M. Cedo Kljajic, puisque votre

  3   administration à la tête de laquelle vous vous trouviez existait dans le

  4   cadre de la sécurité publique, n'est-ce pas ?

  5   R.  Oui. Lui, il était à la tête de la police judiciaire. Il était chef de

  6   la police et des services de police judiciaire.

  7   Q.  Vous conviendrez que le MUP de la Republika Srpska, au mois d'avril,

  8   était en train de naître et d'être constitué quasiment à partir de rien ?

  9   R.  Oui. Nous parlions d'une mise en place, mais bon.

 10   Q.  Le fait est que lorsque vous êtes venu travailler vous n'aviez même pas

 11   de machines à écrire. En tout cas, vous n'en aviez pas suffisamment, n'est-

 12   ce pas ?

 13   R.  Eh bien, nous étions plusieurs à utiliser la même. C'était

 14   l'école du ministère de l'Intérieur.

 15   Q.  Monsieur le Témoin, si j'ai bien compris, vous avez été confronté à un

 16   grave problème en raison de l'effectif insuffisant du MUP de la Republika

 17   Srpska à ce moment-là.

 18   R.  Eh bien, beaucoup d'hommes étaient rentrés chez eux pour s'occuper de

 19   leurs familles; nous avons, pour ainsi dire, été décimés du point de vue de

 20   notre effectif.

 21   Q.  Mais donc c'est une situation plutôt chaotique, et si j'ai bien

 22   compris, la plupart des hommes commençaient par mettre à l'abri leurs

 23   familles, en lieux sûrs, et le sort de leurs familles était en fait leur

 24   préoccupation principale, qui dans leur esprit, était une priorité plus

 25   importante que leur propre travail, n'est-ce pas ?

 26   R.  Oui.

 27   Q.  Et à cette époque, lorsque vous êtes arrivé à ce poste, et ensuite

 28   pendant le temps que vous avez passé à Vraca, pendant peut-être un mois et

Page 16522

  1   demi, vous n'étiez absolument pas en communication avec qui que ce soit au

  2   sein des CSB, n'est-ce pas ?

  3   R.  Non, parce que ces liens, ces moyens de communication n'avaient pas

  4   encore été mis en place. On ne pouvait pas communiquer.

  5   Excusez-moi, mais quand vous parlez de quelque chose d'officiel, vous avez

  6   quelque chose qui peut exister sur le papier, mais en pratique, les

  7   infrastructures nécessaires, elles, n'existaient pas encore.

  8   Q.  Monsieur, ne savez-vous pas que la Loi portant sur le ministère de

  9   l'Intérieur de 1992, une loi de la Republika Srpska, prévoit un centre des

 10   services de sécurité à Ugljevik plutôt qu'à Bijeljina; le saviez-vous ?

 11   R.  Oui. Mais les conditions n'étaient pas réunies, je préfère ne pas me

 12   lancer dans de longues explications. Mais en tout cas, dans la loi, c'était

 13   la ville d'Ugljevik qui était prévue comme siège. Alors qu'à Ugljevik, nous

 14   n'avions pas un seul agent de police, sans parler d'un poste qui

 15   fonctionnerait à temps plein.

 16   M. ZECEVIC : [interprétation] Page 14, ligne 25, la loi prévoyait la ville

 17   d'Ugljevik, et c'était une erreur de l'indiquer. Et la loi a dû être

 18   modifiée par la suite, pour remplacer la ville d'Ugljevik par celle de

 19   Bijeljina, n'est-ce pas ?

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 21   M. ZECEVIC : [interprétation]

 22   Q.  Monsieur, si j'ai bien compris votre déposition de vendredi dernier, le

 23   20 avril, vous êtes arrivé à Vraca, et vous y êtes resté jusqu'au 8 mai. A

 24   ce moment-là, vous êtes parti pour Belgrade, puisque votre femme venait de

 25   donner naissance à un enfant, n'est-ce pas ?

 26   R.  Oui. Mais entre-temps, je m'y étais rendu également pour y passer trois

 27   jours pendant les Pâques.

 28   Q.  Et puis vous êtes de nouveau revenu à Vraca, vers le 27, et puis entre

Page 16523

  1   le 5 et le 7 juin 1992, vous avez été transféré à Pale, dans le bâtiment de

  2   Kalovita Brda, n'est-ce pas ?

  3   R.  C'est exact. Sauf que les dates peuvent ne pas être tout à fait

  4   précises, il peut y avoir deux jours peut-être de différence.

  5   Q.  Au cours du mois de juin, vous alliez faire des inspections dans les

  6   municipalités qui relevaient de Sarajevo, Vogosca, Ilijas, Ilidza, n'est-ce

  7   pas ?

  8   R.  Oui.

  9   Q.  Puis, le 9 juillet, vous êtes parti pour Belgrade pour assister à un

 10   premier collège qui s'est réuni le 11, et vous êtes revenu vers le 19

 11   juillet, n'est-ce pas ?

 12   R.  Permettez-moi de vous corriger. J'y suis allé le 9 juin et j'y ai passé

 13   une semaine. Et c'est alors que le mois de juillet, s'est ensuivi. J'ai

 14   bien retenu cette date à cause de l'enterrement et des combats qui étaient

 15   en cours. Donc dès que les combats ont été terminés, le 8, je suis parti

 16   pour Belgrade pour y passer sept jours ou huit, je ne me souviens plus.

 17   Q.  Le fait est que vers le 9 juillet, vous êtes parti pour Belgrade, et

 18   vous êtes revenu vers le 19. Puis le 21 ou le 22 juillet, vous avez été

 19   démis de vos fonctions, n'est-ce pas ?

 20   R.  Oui.

 21   Q.  Monsieur, au cours du mois de juillet, les problèmes ont continué à

 22   s'accumuler, ces problèmes concernaient l'absence de moyens matériels

 23   suffisants, l'absence d'effectifs suffisants au sein du MUP de la Republika

 24   Srpska, ces problèmes étaient très prononcés; ai-je raison de l'affirmer ?

 25   R.  Oui, cela valait pour toute la guerre, mais tout particulièrement pour

 26   cette période donnée.

 27   Q.  Je souhaite vous présenter un document.

 28   M. ZECEVIC : [interprétation] Il porte la cote P1419.

Page 16524

  1   Q.  J'aimerais entendre vos observations à ce sujet.

  2   Pendant que nous attendons l'affichage du document, je m'aperçois que --

  3   si, si, tout a été consigné au compte rendu d'audience. Je présente mes

  4   excuses. Une correction a été faite entre-temps.

  5   Monsieur, le document que nous avons sous les yeux est une liste

  6   répertoriant les employés du MUP au sein de son siège. La liste concerne le

  7   mois de juillet 1992. Il est indiqué qu'il s'agit du MUP, du siège du MUP,

  8   collège.

  9   Vous le voyez dans l'en-tête ?

 10   R.  Oui.

 11   Q.  Je vous présente ce document parce qu'à un moment donné, au cours

 12   de votre déposition d'aujourd'hui, vous vous êtes livré à des observations

 13   concernant deux individus, à savoir Zoran Jasarevic, numéro 11; il est

 14   indiqué qu'il s'agit du chauffeur du ministre. Et vous avez également

 15   évoqué le numéro 14, Goran Abazovic, accompagnateur.

 16   S'agit-il là des personnes qui accompagnaient sans cesse M. Stanisic

 17   au cours de l'année 1992 ? L'un étant son chauffeur, et l'autre son garde

 18   du corps.

 19   R.  Oui. 

 20   Q.  Vendredi dernier un document vous a été présenté, Monsieur, et il porte

 21   la cote 1D46.

 22   M. ZECEVIC : [interprétation] J'aimerais que l'on affiche le document à

 23   l'écran, s'il vous plaît.

 24   Q.  Vous vous rappelez sans doute ce document, il porte la date du 15 mai

 25   1992.

 26   Vous en souvenez-vous ?

 27   R.  Oui.

 28   Q.  D'après la déposition que vous avez faite vendredi dernier, le 15 mai

Page 16525

  1   vous ne vous trouviez pas à Vraca, plutôt, vous étiez à Belgrade. En

  2   revanche, vous pouvez affirmer avec assez de certitude que Cedo Kljajic

  3   vous avait fait connaître ce document.

  4   Vous en souvenez-vous ?

  5   R.  Je me souviens du contenu du document, mais je ne suis pas sûr si je

  6   l'ai vraiment examiné ou non.

  7   Q.  Tout au début de mon interrogatoire, nous avons évoqué la mise sur pied

  8   des forces de réserve au sein du MUP de la République socialiste de Bosnie-

  9   Herzégovine au mois de septembre 1991. Donc il a été question de la mise en

 10   place de la police de réserve et de son armement. Alors, cette mobilisation

 11   des agents de police de réserve et leur armement, tout ceci a été fait en

 12   conformité avec les projets concernant la défense de la République

 13   socialiste de Bosnie-Herzégovine, n'est-ce pas ?

 14   R.  Oui, chaque poste de police avait son projet à cet égard, et tout était

 15   prévu par ces plans particuliers à chaque poste de police. Donc il y avait

 16   un plan général au niveau de la république, mais aussi des plans

 17   particuliers qui étaient censés être mis en œuvre par les postes de police.

 18   Parce que ces plans intégraient toutes les lois en vigueur qui devaient

 19   être appliquées en cas d'état de guerre.

 20   Q.  Conformément à la législation en vigueur à l'époque, et je pense

 21   notamment à la Loi portant sur la défense nationale et l'autoprotection

 22   sociale, une loi qui existait à la fois au niveau de la république et au

 23   niveau fédéral, chaque organe, chaque institution, chaque entreprise était

 24   tenue d'élaborer un plan prévoyant l'organisation en temps de guerre,

 25   n'est-ce pas ?

 26   R.  Oui, absolument.

 27   Q.  Comme vous l'avez déjà indiqué, maintenant je ne fais que résumer votre

 28   déposition.

Page 16526

  1   Un tel plan d'organisation de guerre existait au niveau du ministère

  2   républicain de la République socialiste de Bosnie-Herzégovine, il existait

  3   également au niveau de tous les centres de sécurité, et, finalement, il

  4   existait également au niveau de chaque poste de police qui se trouvait sur

  5   le territoire couvert par le MUP de Bosnie-Herzégovine ?

  6   R.  Oui.

  7   Q.  Revenons maintenant à ce document du 15 mai.

  8   Monsieur Planojevic, vous en avez déjà parlé, et je le répète, le fait est

  9   qu'à aucun moment vous n'avez donné aucun ordre en tant que membre de

 10   l'état-major du MUP, n'est-ce pas ?

 11   R.  Non, je ne l'ai jamais fait.

 12   Q.  En fait, c'est moi qui n'ai pas bien formulé ma question.

 13   Par conséquent, elle n'est pas très claire. Donc le fait est que vous

 14   n'avez jamais donné d'ordre, quel qu'il soit, en qualité du membre d'état-

 15   major; est-ce exact ?

 16   R.  Oui.

 17   Q.  M. Hannis vous a montré la page 2 de ce document, paragraphe 9, on lit

 18   qu'en tant qu'assistant du ministre, vous faites partie de l'état-major

 19   conformément à cet ordre.

 20   Le voyez-vous ?

 21   R.  Oui.

 22   Q.  Dites-moi, s'il vous plaît, n'est-il pas vrai que vous n'avez jamais

 23   reçu d'ordre quel qu'il soit de la part d'un soi-disant état-major qui

 24   existerait au sein du MUP de la Republika Srpska. C'est la vérité, n'est-ce

 25   pas ?

 26   R.  Oui, c'est la vérité.

 27   Q.  D'après vos connaissances, vos collègues, y compris les sous-

 28   secrétaires au sein du ministère et autres, donc vos collègues ont-ils reçu

Page 16527

  1   des ordres émanant de la part du ministère de l'Intérieur de la Republika

  2   Srpska ?

  3   R.  D'après mes connaissances, ces personnes n'ont jamais reçu de tels

  4   ordres.

  5   M. ZECEVIC : [interprétation] Je pense que cela n'a pas été consigné au

  6   compte rendu d'audience. J'ai pensé à l'état-major du MUP de la Republika

  7   Srpska.

  8   Q.  Un autre point sur lequel j'aimerais vous interroger, vous n'avez

  9   jamais vu ou entendu parler d'une quelconque réunion de l'état-major du MUP

 10   de la Republika Srpska, n'est-ce pas ?

 11   R.  Je n'en ai jamais entendu parler, et je n'ai jamais assisté à de telles

 12   réunions, si toutefois elles ont été organisées.

 13   Q.  Monsieur, compte tenu du fait que vous avez exercé les fonctions de

 14   l'assistant du ministre et que vous auriez été un membre de cet état-major,

 15   il serait logique de s'attendre à ce que vous ayez pris connaissance de

 16   tout document émanant de cet état-major, n'est-ce pas ?

 17   R.  J'imagine que oui.

 18   Q.  Monsieur, la Loi portant sur la défense populaire et l'autoprotection

 19   sociale ainsi que la Loi portant sur l'intérieur de la Republika Srpska,

 20   ou, non, plutôt, je pense à la Loi fédérale portant sur la défense

 21   populaire et l'autoprotection sociale, cette loi a été reprise par

 22   l'assemblée nationale de la Republika Srpska; le savez-vous ?

 23   R.  Oui, et cela vaut pour la plupart des lois.

 24   Q.  La Loi portant sur les affaires intérieures de la Republika Srpska est

 25   une loi qui diffère d'une façon tout à fait insignifiante par rapport à la

 26   Loi portant sur les affaires intérieures qui avait été en vigueur pendant

 27   la République socialiste de Bosnie-Herzégovine ?

 28   R.  D'après mes souvenirs, les modifications apportées n'ont pas été

Page 16528

  1   nombreuses.

  2   Q.  Compte tenu de ce fait, vous conviendrez avec moi que le MUP de la

  3   Republika Srpska était lui aussi tenu d'élaborer un plan de guerre ?

  4   R.  Oui.

  5   Q.  Et pourtant, à cause des faits qui se sont déroulés et la rapidité avec

  6   laquelle ils sont survenus, un tel plan n'a pas été élaboré au cours de

  7   l'année 1992, n'est-ce pas ?

  8   R.  Non, il ne l'a pas été, mais il doit sans doute exister d'autres

  9   raisons à ceci. Et permettez-moi d'ajouter quelque chose.

 10   Nous habitions dans un Etat où tous les plans se ressemblaient, ils étaient

 11   quasiment identiques. Ils étaient tous élaborés en envisageant la

 12   possibilité d'une attaque qui viendrait soit de l'est, soit de l'ouest. Il

 13   aurait fallu être un génie pour pouvoir inventer quelque chose de nouveau

 14   par rapport à ces plans. Or, vous savez combien de temps il faut pour

 15   élaborer une nouvelle loi et l'adopter; nous n'avions pas d'effectifs ou de

 16   ressources suffisantes pour le faire. Et par ailleurs, nous manquions de

 17   conditions préalables.

 18   Donc, il s'agit d'un concept tout à fait différent. Tout le système

 19   fonctionnait d'une façon bien particulière.

 20   Q.  Monsieur, vous en avez déjà parlé, nous allons l'aborder dans quelques

 21   instants, je pense aux rencontres que vous avez eues avec M. Mico Stanisic

 22   au cours de l'année 1992. Mais avant d'y passer, je souhaite vous poser

 23   quelques questions de nature générale.

 24   M. Mico Stanisic, en sa qualité de ministre, insistait pour que la police

 25   accomplisse les missions qui sont les siennes conformément à la loi, à

 26   savoir préserver l'ordre et la paix publique plutôt que de s'impliquer dans

 27   des actions de guerre. C'était la position générale adoptée par le

 28   ministre, n'est-ce pas ?

Page 16529

  1   R.  Oui, oui.

  2   Q.  De façon similaire, en votre qualité d'assistant du ministre chargé de

  3   la prévention de la criminalité, vous aviez carte blanche pour agir comme

  4   vous l'entendiez de la part de M. Mico Stanisic, n'est-ce pas ?

  5   R.  Oui.

  6   Q.  Quand je dis qu'il vous a donné "carte blanche", je veux dire que vous

  7   pouviez entreprendre toutes les activités prévues par la loi et qui

  8   cadraient avec vos compétences, n'est-ce pas ?

  9   R.  Oui.

 10   Q.  Dans ce sens, je crois que vous avez cité un exemple, à un moment

 11   donné, le ministre s'est adressé à vous et au commandant de la police

 12   spéciale, M. Karisik, et il vous a habilités à vous servir des membres de

 13   cette unité spéciale chaque fois que vous en aviez besoin; est-ce exact ?

 14   R.  Oui.

 15   Q.  Monsieur Planojevic, le rôle joué par le ministère et les différentes

 16   administrations y afférents avaient avant tout un caractère instructif,

 17   n'est-ce pas ?

 18   R.  Oui, et notre tâche consistait aussi à coordonner les activités.

 19   Q.  Veuillez nous fournir une explication très succincte de ce rôle

 20   instructif assumé par le ministère. Qu'est-ce que cela veut dire ?

 21   R.  Eh bien, par le rôle instructif, il faut entendre que les politiques

 22   générales dans le fonctionnement d'une administration sont définies de

 23   façon à fournir des orientations, à dresser des documents instructifs. Ce

 24   n'est que dans les cas de figure où les dossiers étaient particulièrement

 25   complexes que les inspecteurs devaient être impliqués dans des activités

 26   opérationnelles. Mais là encore, ils ne devaient intervenir qu'à titre

 27   d'instructions, il ne s'agit pas pour eux d'exécuter quoi que ce soit.

 28   Q.  Pour réaliser cet objectif, en tant que chef de l'administration

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  1   chargée de la prévention de la criminalité, vous preniez des inspecteurs

  2   qui relevaient de votre administration et vous les envoyiez aux postes de

  3   police et aux centres de sécurité au cours de l'année 1992 pour qu'ils y

  4   fournissent des instructions. Vous vous rendiez dans les centres et les

  5   postes qui étaient accessibles à l'époque, n'est-ce pas ?

  6   R.  Oui.

  7   Q.  Il pouvait arriver qu'un certain nombre d'inspecteurs envoyés en

  8   mission sur le terrain ne reviennent jamais au sein du ministère. Plutôt,

  9   ils profitaient de ce voyage d'affaire pour s'enfuir, pour partir à

 10   l'étranger, pour émigrer; n'est-il pas vrai ?

 11   R.  Oui.

 12   Q.  Ceci nous fournit une idée très précise de la situation qui prévalait

 13   au cours de l'année 1992 pour ce qui est de la discipline des employés.

 14   R.  Eh bien, cela vous en dit davantage de l'état dans lequel se trouvait

 15   la société tout entière. Tout le monde n'avait pas le même courage. Tout le

 16   monde ne vivait pas dans les mêmes conditions. Chacun pensait surtout à

 17   assurer la sécurité de sa famille. Moi, j'ai eu la chance de pouvoir le

 18   faire, mais ce n'était pas le cas de tout le monde, et je ne porterai pas

 19   de jugement sur de telles personnes. Les temps étaient comme ça, les

 20   conditions étaient ce qu'elles étaient. C'est inimaginable pour vous, et je

 21   suis content de savoir que vous ne vous trouverez jamais dans une situation

 22   pareille.

 23   Q.  Mais c'est bien la raison pour laquelle je vous pose cette question.

 24   Comprendre le contexte, c'est essentiel pour nous dans le cadre du présent

 25   procès. Il est important de saisir le contexte général et la situation

 26   générale tel qu'elle prévalait.

 27   Alors, je crois vous avoir entendu dire que les choses dépendaient

 28   également du courage qu'avaient différentes personnes, mais ceci n'a pas

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  1   été consigné au compte rendu d'audience.

  2   Veuillez tout simplement confirmer que vous en avez parlé.

  3   R.  Oui, oui. Je n'avais pas compris que c'est une question que vous

  4   me posiez.

  5   Q.  Toutes mes excuses. Monsieur.

  6   Concentrons-nous maintenant sur le contenu de votre déposition du vendredi

  7   dernier, je pense notamment aux rencontres que vous avez eues avec M. Mico

  8   Stanisic au cours de l'année 1992.

  9   Si j'ai bien saisi le sens de vos propos, vous avez évoqué cinq réunions au

 10   total. Je vais vous les énumérer : la première rencontre a eu lieu au début

 11   du mois de mai dans l'école qui se trouvait à Vraca; la deuxième rencontre

 12   évoquée par vous a eu lieu au début du mois de juillet dans l'hôtel de

 13   Kosuta; troisième réunion s'est déroulée à la fin du mois de juin, c'était

 14   une rencontre fortuite devant l'hôtel Bistrica; quatrième réunion a eu lieu

 15   vers le 20 juillet, c'est alors que vous avez eu une dispute avec le

 16   ministre, et vous avez donné votre démission; et la cinquième rencontre a

 17   eu lieu au mois d'octobre 1992, il s'agissait là encore d'une rencontre

 18   fortuite en plein milieu d'une forêt, au moment où les lignes de défense

 19   qui se trouvaient à Vraca sont tombées.

 20   Ma description, mon résumé, est-il exact, ai-je bien énuméré toutes vos

 21   rencontres avec le ministre au cours de l'année 1992 ?

 22   R.  Oui.

 23   Q.  Au moment de votre première rencontre qui a donc eu lieu au début du

 24   mois de mai à Vraca, vous avez rencontré Mico Stanisic en présence du sous-

 25   secrétaire chargé de la sécurité publique, M. Cedo Kljajic, n'est-ce pas ?

 26   R.  Oui.

 27   Q.  Il a été discuté, entre autres, du fait que Momo Mandic, d'après vous

 28   et d'après l'opinion de Cedo Kljajic, ne devrait pas être l'adjoint du

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  1   ministère de l'Intérieur; est-ce que c'est exact ?

  2   R.  Oui, c'est exact.

  3   Q.  Est-ce parce que vous aviez reçu ou eu quelques indices, et il est un

  4   fait qu'il fréquentait un certain Srkbo et un certain Vuletic qui, pour

  5   ainsi dire, étaient quelque peu douteux ?

  6   R.  Oui, c'est exact.

  7   Q.  Outre ces indices que vous aviez à leur sujet, vous n'aviez pas de

  8   preuve vous permettant de poursuivre M. Mandic ou ces autres personnes dans

  9   le cadre d'un procès au pénal correspondant, n'est-ce pas ?

 10   R.  Oui, vous avez tout à fait raison, c'était ainsi.

 11   Q.  Vous avez donné votre proposition au ministre, vous lui avez exprimé

 12   votre opinion. Par contre, vous aviez compris même à l'époque, que Mico

 13   Stanisic n'avait pas l'autorité nécessaire pour démettre Momo Mandic de ses

 14   fonctions, et ce, en tant qu'adjoint du ministre, n'est-ce pas ?

 15   R.  Oui, justement j'ai expliqué au Procureur la procédure, j'ai expliqué

 16   quelle était la procédure pour l'adjoint du ministre ainsi que pour la

 17   nomination du ministre. La procédure était la même. Q.  Lorsque vous dites

 18   que "la procédure est la même pour ce qui est de la nomination d'un

 19   ministre ou de son adjoint", vous pensez principalement au fait que cette

 20   nomination est faite à la suite des décisions prises par les instances

 21   supérieures et par les personnes qui sont placées à un niveau supérieur et

 22   qui en décident ?

 23   R.  Oui, justement c'est prescrit par la loi.

 24   Q.  D'accord, merci. Dites-moi, je vous prie, s'agissant de la réunion qui

 25   a suivi, elle a eu lieu au début du mois de juillet à l'hôtel Kosuta,

 26   n'est-ce pas ?

 27   R.  Oui, et ce, à ma demande.

 28   Q.  Vous avez demandé au ministre, à cette occasion, et vous lui avez

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  1   mentionné le fait que le retrait du détachement spécial dans son ensemble

  2   de Vraca pourrait causer certains problèmes bien précis. Je ne veux pas

  3   entrer là-dedans, puisque vous en avez déjà parlé dans le cadre de votre

  4   témoignage.

  5   R.  Oui, c'est exact.

  6   Q.  Si je vous ai bien compris, vous avez profité de cette occasion pour

  7   transmettre vos informations concernant un certain Batko Vlahovic, vous en

  8   avez parlé au ministre, n'est-ce pas ?

  9   R.  Je ne me souviens pas si c'était lors de cette rencontre-là ou bien si

 10   c'était lors d'une fois où on s'est rencontrés tout à fait par hasard. Il

 11   aurait fallu qu'il s'agisse d'une rencontre devant l'hôtel Bistrica. Parce

 12   qu'à l'époque en fait je ne détenais pas ces informations que j'ai eues ou

 13   obtenues par la suite, et que j'ai transmises lors de mes échanges. Je

 14   crois que vous devriez comprendre en fait, je ne vais pas être toujours

 15   très précis.

 16   Q.  Oui, je suis tout à fait d'accord avec vous. Un très grand nombre

 17   d'années se sont écoulées depuis, je n'insiste pas sur des dates précise

 18   non plus. Mais j'essaie simplement de placer les événements dans leur

 19   contexte.

 20   Si j'ai bien compris, au cours de votre séjour à Belgrade, vous avez appris

 21   de l'une de vos connaissances, donc alors que vous étiez à Belgrade, je

 22   répète, que ce certain Batko venait également à Belgrade, et qu'il se

 23   vantait à Belgrade qu'il était en train de se livrer à des activités

 24   criminelles à Sarajevo. Donc c'était votre première information le

 25   concernant, c'était ça votre première impression, c'était à ce moment-là

 26   que vous l'avez appris.

 27   R.  Oui, mais je dois quand même ajouter quelque chose. Lorsque je suis

 28   rentré, effectivement il y a certaines choses qui me reviennent maintenant

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  1   à l'esprit. Je suis allé voir à Grbavica une famille croate, puisque je

  2   savais que les non-Serbes avaient plus d'informations ou entendaient

  3   certaines choses plus que les Serbes. Je crois que leur nom de famille est

  4   Mihic, ces gens chez qui j'étais allé, et ils m'avaient dit que eux, ils

  5   m'avaient dit que l'on mentionnait ce certain Batica. Donc ce sont ces deux

  6   indices qui m'ont permis de faire mon enquête, comme je l'ai déjà

  7   mentionné.

  8   Q.  Et à la suite de votre retour, outre l'entretien ou l'échange que vous

  9   avez eu avec vos connaissances, vos amis croates de Grbavica, vous avez

 10   demandé à l'un de vos collègues inspecteurs de vérifier ces informations,

 11   et ce dernier vous a dit qu'il existait effectivement certains indices ou,

 12   tout du moins, qu'il y a des rumeurs selon lesquelles ce Batko était en

 13   train de s'adonner à des activités criminelles ?

 14   R.  Oui.

 15   Q.  Vous en aviez informé le ministre, le ministre vous a répondu qu'il

 16   informerait l'état-major principal de la Republika Srpska, et vous a confié

 17   pour mission de vérifier, de vous assurer, voir si l'armée allait prendre

 18   des mesures nécessaires contre ce Batko, n'est-ce pas ?

 19   R.  Oui.

 20   Q.  Alors, c'est ce que vous avez fait, n'est-ce pas, puisque, après un

 21   certain temps, il a été arrêté par la police militaire et il a été mis en

 22   détention dans une prison militaire dans la caserne de Lukavica sur le

 23   territoire de Sarajevo, n'est-ce pas ?

 24   R.  Quelqu'un l'avait informé auparavant que la police avait entrepris

 25   certaines enquêtes ou avaient diligenté des enquêtes, et pendant 20 jours

 26   environ il n'était même plus présent sur le territoire. Lorsqu'il s'est

 27   présenté, on l'a mis en arrestation. Donc je le sais avec certitude

 28   puisqu'on disait qu'il avait été arrêté par la police militaire qui se

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  1   trouvait à Lukavica.

  2   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Nous prendrons notre pause lorsque cela

  3   vous conviendra, Maître Zecevic.

  4   M. ZECEVIC : [interprétation] Une dernière question, Monsieur le Président,

  5   avant la pause.

  6   Q.  Donc, Monsieur, vous aviez obtenu certaines informations selon

  7   lesquelles ce dernier avait été relâché de prison par les organes

  8   militaires, mais vous n'avez pas d'information plus précise là-dessus ?

  9   R.  Il est tout à fait possible qu'il ait été arrêté à l'époque où j'avais

 10   déjà donné ma démission, donc je ne sais pas. Je n'allais plus souvent là-

 11   bas, et il est tout à fait possible qu'entre-temps dans l'attente qu'il ne

 12   revienne sur le territoire, qu'entre-temps, moi, j'avais déjà démissionné

 13   de mon poste. Donc c'est tout à fait possible que cela se soit passé

 14   pendant cette période.

 15   Q.  Merci, Monsieur.

 16   M. ZECEVIC : [interprétation] Monsieur le Président, si vous le souhaitez,

 17   nous pourrions prendre notre pause maintenant, et par la suite j'aimerais

 18   que l'on passe à la réunion.

 19   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Alors, très bien. Nous allons reprendre

 20   nos travaux dans 20 minutes.

 21   [Le témoin quitte la barre]

 22   --- L'audience est suspendue à 17 heures 21.

 23   --- L'audience est reprise à 17 heures 46.

 24   [La Chambre de première instance se concerte]

 25   [Le témoin vient à la barre]

 26   M. ZECEVIC : [interprétation] Puis-je poursuivre ?

 27   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Oui, s'il vous plaît. Maître Zecevic,

 28   vous pouvez poursuivre.

Page 16536

  1   M. ZECEVIC : [interprétation]

  2   Q.  Monsieur Planojevic, je voulais maintenant aborder la troisième réunion

  3   que vous aviez eue avec M. Mico Stanisic. Et vous nous avez dit qu'en fait

  4   cette rencontre a été organisée complètement par hasard puisque vous l'avez

  5   rencontré devant l'hôtel Bistrica, par hasard ?

  6   R.  Oui, c'est exact.

  7   Q.  Lors de votre déposition vendredi dernier, on vous a posé un certain

  8   nombre de questions et vous vous êtes rappelé de cette réunion. Puisque, en

  9   fait, ce qui caractérise cette réunion c'est que M. Stanisic était

 10   accompagné d'un berger allemand, et c'était un peu inhabituel, vous avez

 11   fait une blague concernant ce berger allemand, n'est-ce pas ? C'est une

 12   question qui vous a été posée par mon éminent confrère.

 13   R.  Oui.

 14   Q.  Et, en fait, puisque vous faisiez déjà des blagues sur le sujet, il

 15   s'agissait d'un berger allemand qui appartenait à Josip Broz, Tito, lors de

 16   la Deuxième Guerre mondiale et qui supposément s'appelait Rex; est-ce que

 17   c'est exact ?

 18   R.  Oui.

 19   Q.  Dites-moi, Monsieur Planojevic, est-il exact de dire que pendant un

 20   certain temps, une période assez longue d'ailleurs, on a fait souvent des

 21   blagues s'agissant de M. Stanisic, parce qu'on disait qu'en 1973 c'était

 22   l'une des premières personnes, l'un des premiers jeunes hommes qui avait

 23   l'honneur de porter le relais lors d'une fête organisée en l'honneur de

 24   l'anniversaire de naissance de Tito. Donc c'est lui qui apportait le relais

 25   depuis Sarajevo.

 26   Vous souvenez-vous de cela ?

 27   R.  Oui.

 28   Q.  Je ne sais vraiment pas comment dire relais en anglais, mais c'était la

Page 16537

  1   tradition dans l'ex-Yougoslavie de remettre aux mains du président Tito,

  2   sur un stade bondé de personnes, ce relais, n'est-ce pas, et en fait,

  3   l'anniversaire de M. Tito était considéré comme étant la journée nationale

  4   de la jeunesse.

  5   R.  Oui, c'est exact.

  6   Q.  Et, en fait, les jeunes personnes que l'on choisissait pour remettre le

  7   relais au président étaient des jeunes hommes exemplaires, n'est-ce pas ?

  8   R.  Oui.

  9   Q.  Et, en fait, la fraternité et l'unité étaient l'un des piliers de la

 10   politique de l'ex-Yougoslavie, n'est-ce pas ?

 11   R.  Oui.

 12   Q.  Votre réponse n'a pas été consignée au compte rendu d'audience.

 13   R.  Non, j'ai dit, oui.

 14   Q.  Excusez-moi.

 15   Nous pouvons donc conclure sur la base de ces faits que M. Mico

 16   Stanisic ni à l'époque ni plus tard n'a eu de réserve ou n'a jamais

 17   ressenti une animosité envers un membre d'un groupe ethnique différent que

 18   le sien dans l'ex-Yougoslavie.

 19   R.  Oui, vous avez tout à fait raison.

 20   Q.  Et ce n'était pas le cas non plus en 1992 lorsque vous êtes devenu

 21   adjoint du ministre. Vous connaissiez M. Stanisic depuis 1973, vous vous

 22   êtes rencontrés à l'école.

 23   R.  Oui, nous nous connaissons depuis très longtemps, et cela n'a jamais

 24   été le cas, il n'a jamais démontré ni avec son corps ni avec son esprit

 25   qu'il avait une quelque animosité que ce soit envers des membres d'un autre

 26   groupe ethnique.

 27   Q.  Je suis tout à fait certain que s'il y avait eu quelques éléments que

 28   ce soit d'animosité, il n'aurait certainement pas eu l'honneur de porter le

Page 16538

  1   relais pour Josip Broz, Tito.

  2   Plus tôt, vous avez parlé de certaines choses avec le Procureur, et vous

  3   nous avez déjà commenté la conversation que vous avez eue avec eux, donc je

  4   ne vais plus vous poser de question à ce sujet.

  5   Mais j'aimerais maintenant passer à la réunion suivante, la réunion

  6   suivante a eu lieu, soit le 19 ou le 20 juillet, date à laquelle vous êtes

  7   rentré de Belgrade, et c'est à ce moment-là que vous avez eu une dispute

  8   avec le ministre Stanisic, n'est-ce pas ?

  9   R.  Oui.

 10   Q.  Alors, dites-moi, si j'ai bien compris votre déposition de vendredi

 11   dernier, vous aviez reçu une information selon laquelle il vous cherchait.

 12   Lorsque vous êtes retourné on vous a dit que le ministre Stanisic voulait

 13   vous voir. Vous l'avez cherché et vous l'avez trouvé assis dans une pièce à

 14   l'hôtel avec Momo Mandic. Ils étaient en train d'avoir une conversation

 15   informelle avec quelqu'un ?

 16   R.  Oui, les collègues m'ont dit que ça fait déjà deux ou trois jours qu'il

 17   me cherchait et qu'il voulait que je le voie dès que je reviens. Puisque je

 18   suis arrivé tard dans la soirée, je ne suis pas allé le voir tout de suite,

 19   mais le lendemain matin.

 20   Et lorsque je suis arrivé à l'hôtel Bistrica, je crois qu'il avait même en

 21   fait une chambre à Bistrica; c'est là qu'il séjournait, je crois que

 22   c'était un petit appartement qu'il avait, l'appartement 305. Et c'est

 23   lorsque j'ai demandé où il était qu'on m'a dit qu'il n'était pas dans sa

 24   chambre, mais qu'il était assis dans le salon de l'hôtel, et c'est là que

 25   nous sommes entrés en contact.

 26   Q.  Vous l'avez ensuite rencontré au mois d'octobre 1992, vous nous avez

 27   dit que vous l'aviez rencontré dans une forêt lorsque la ligne de Praca est

 28   tombée, et qu'à ce moment-là il vous a dit qu'il était allé voir sa

Page 16539

  1   famille. En 1992.

  2   R.  Oui, c'était peut-être même en septembre. Je ne sais plus, septembre ou

  3   octobre.

  4   Q.  Vous avez également dit à mon éminent confrère, je ne me souviens plus

  5   si c'était lors du début de l'après-midi aujourd'hui, ou bien était-ce la

  6   dernière fois, donc lorsque vous avez rencontré Mico Stanisic dans la forêt

  7   en septembre ou en octobre, il était accompagné de son chauffeur et de son

  8   garde du corps, Goran Abazovic, n'est-ce pas ?

  9   R.  Oui, c'est exact.

 10   Q.  Monsieur, outre les réunions que vous avez eues avec le ministre, lors

 11   de l'interrogatoire principal vous avez également évoqué deux rencontres

 12   avec le premier ministre Branko Djeric, n'est-ce pas ?

 13   R.  Oui.

 14   Q.  Dites-moi également, toujours s'agissant de ces réunions avec le

 15   premier ministre, M. Djeric, il ne s'agissait pas de réunions officielles,

 16   n'est-ce pas ?

 17   R.  Oui. L'une de ces réunions était une réunion officielle, lorsque j'ai

 18   emmené un document écrit, mais les autres non, effectivement, elles

 19   n'étaient pas officielles.

 20   Q.  La première fois que vous l'avez rencontré, vous étiez accompagné du

 21   professeur.

 22   R.  Vaso Dragovic.

 23   Q.  Merci. Vous êtes donc allé prendre un café avec le Pr Vaso Dragovic, et

 24   c'est après cela que le Pr Andrev Dragovic [comme interprété] a appelé le

 25   premier ministre Djeric pour qu'il vienne prendre un café avec vous, et

 26   vous le connaissiez puisque vous étiez originaires du même endroit. Et vous

 27   le connaissiez déjà avant le moment en 1992 lorsque vous l'avez rencontré ?

 28   R.  Oui, c'est exact.

Page 16540

  1   Q.  La deuxième fois que vous l'avez vu, c'était quatre ou cinq jours,

  2   d'après ce que vous nous avez dit, après la réunion à Kosuta qui a eu lieu

  3   avec le ministre Stanisic. Vous souvenez-vous de cela ?

  4   R.  Oui, je me souviens de cela, c'est effectivement ce que j'ai dit.

  5   Q.  Dites-moi, s'il vous plaît, lors de cette deuxième rencontre, il a été

  6   question de Batko Vlahovic, n'est-ce pas ?

  7   R.  Oui.

  8   Q.  Puisque vous avez eu un échange avec le ministre quatre ou cinq jours

  9   auparavant et que le ministre vous a dit qu'il allait informer du problème

 10   l'état-major principal de l'armée, vous n'aviez pas réellement de raison

 11   pour mettre en doute si M. Stanisic allait réellement s'entretenir avec

 12   l'armée concernant l'arrestation de ce criminel, Batko Vlahovic, n'est-ce

 13   pas ?

 14   R.  Oui, c'est exact. Je peux préciser plus tard si vous le souhaitez, mais

 15   vous pouvez continuer votre contre-interrogatoire.

 16   Q.  Donc, votre entretien avec le premier ministre Djeric n'est pas à

 17   comprendre comme une demande de votre part adressée à Djeric parce que vous

 18   auriez eu un doute quant à l'intention réelle de Mico Stanisic d'intervenir

 19   auprès des organes du pouvoir, n'est-ce pas ?

 20   R.  Oui, tout à fait. Mais en raison de la gravité de la situation, je me

 21   suis retrouvé dans le cadre de cette conversation informelle alors que

 22   j'avais déjà énoncé un certain nombre de difficultés et de problèmes. Mais

 23   j'ai dit, en passant, que selon moi, on était là en présence d'un problème

 24   grave, et j'ai simplement dit, j'ai demandé qu'on ne fasse pas traîner les

 25   choses, qu'on trouve une solution.

 26   Parce que vous savez comment certains fonctionnent. Ils ont une

 27   personnalité qui fait qu'ils n'aiment pas discuter dans des situations où

 28   ils ne sont pas en position d'autorité. Je ne citerai personne. Mais en

Page 16541

  1   tout cas, j'étais dans une situation dans laquelle il fallait faire très

  2   attention à chaque mot que je choisissais. Il n'y avait absolument aucun

  3   doute quant à l'intention réelle et à l'autorité dont jouissait le premier

  4   ministre. Alors, je ne sais pas s'il a uniquement appelé le président ou

  5   s'il a également contacté l'état-major général. Cela, je l'ignore. Mais en

  6   tout cas, je n'ai pas eu l'impression qu'il aurait eu quoi que ce soit

  7   contre l'option qui consistait à le faire réellement.

  8   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Vous êtes hors micro, Maître.

  9   M. ZECEVIC : [interprétation] Je vous remercie.

 10   Q.  Si je vous ai bien compris, Monsieur le Témoin, vous avez mentionné le

 11   cas de ce Batko Vlahovic auprès du premier ministre Djeric, et ceci, avant

 12   tout parce que vous considériez qu'il s'agissait là d'un problème assez

 13   grave; deuxièmement, en deuxième lieu, parce que vous estimiez que

 14   l'autorité du premier ministre était indubitablement plus importante que

 15   celle des autres ministres au sein tant de l'armée que de la police ?

 16   R.  Oui, c'est exact. L'armée et la police n'avaient pas des relations très

 17   amicales, même en temps de paix. Il y avait même une forme de rivalité.

 18   Q.  Merci. Alors, vous nous dites que le premier ministre s'est ensuite

 19   entretenu avec quelqu'un dont vous ignorez l'identité mais qu'en tout état

 20   de cause, après un certain temps, on a assisté à l'arrestation de ce Batko

 21   Vlahovic.

 22   Nous avons déjà éclairci ce point; est-ce exact ?

 23   R.  Oui.

 24   Q.  Vous entreteniez des rapports amicaux avec M. Djeric, n'est-ce pas,

 25   vous le connaissiez même avant qu'il ne devienne premier ministre. Vous

 26   êtes originaires de la même région, n'est-ce pas ?

 27   R.  Oui. Et nous entretenons toujours des bons rapports, comme nous l'avons

 28   toujours fait.

Page 16542

  1   Q.  Lors de ces deux entrevues avec M. Djeric que vous avez eues au mois de

  2   mai et de juin 1992, le premier ministre s'est-il plaint auprès de vous du

  3   ministre Stanisic, de quelque façon que ce soit ?

  4   R.  Non, mais il estimait qu'il avait un problème avec Momo. Et à un

  5   moment, ou peut-être plus tard, il m'a dit qu'il était temps de procéder à

  6   des changements.

  7   Q.  Quand vous parlez de "Momo", vous avez à l'esprit Momo Mandic, qui

  8   était à l'époque ministre de la Justice, n'est-ce pas ?

  9   R.  Oui.

 10   Q.  Et M. Djeric ne s'est pas confié à vous, n'est-ce pas, il ne vous a pas

 11   indiqué qu'il rencontrait un problème en raison du fait que le ministre ne

 12   l'informait pas de la situation sécuritaire sur le territoire de la

 13   Republika Srpska. Est-ce qu'il vous en a parlé ?

 14   R.  Non, pas à ce moment-là. Je n'ai pas non plus passé tant de temps que

 15   cela avec le ministre ou avec le président. Nous n'avons eu le temps

 16   d'aborder que deux ou trois questions en cette demi-heure passée ensemble.

 17   Q.  Vous étiez assistant du ministre chargé de la police. Puisque vous

 18   étiez ami avec M. Djeric et que vous l'êtes aujourd'hui encore, je suis sûr

 19   que si jamais il avait rencontré des problèmes dans ses rapports avec la

 20   police, il vous en aurait parlé. Ou bien, avez-vous une raison de douter de

 21   cela ?

 22   R.  Eh bien, je suppose qu'il m'en aurait parlé, oui.

 23   Q.  Très bien. Je souhaiterais vous présenter le document 1D98. Il s'agit

 24   d'un ordre émanant de M. Djeric en date du 25 mai 1992 et qui est adressé

 25   au ministère de l'Intérieur, à remettre au sous-secrétaire Cedo Kljajic,

 26   chargé de la sécurité publique.

 27   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Vous êtes hors micro, Maître.

 28   M. ZECEVIC : [interprétation] Il s'agit du document 1D98.

Page 16543

  1   Excusez-moi.

  2   Il s'agit du document qui porte la cote 1D98, qui porte le numéro ERN

  3   1D00-0496.

  4   Nous avons la bonne page en anglais, mais il nous faudrait également

  5   la version serbe.

  6   Peut-on agrandir le texte.

  7   Q.  Ce document donc est daté du 25 mai 1992, et je serais tenté de dire

  8   que c'est M. Trbojevic qui l'a signé, c'est-à-dire l'assistant -- ou

  9   plutôt, non, le vice-premier ministre, n'est-ce pas ?

 10   R.  Eh bien, ce serait sa signature, en tout cas d'après ce qui est écrit

 11   ici.

 12   Q.  Et vous voyez que M. Trbojevic a signé en tant que vice-premier

 13   ministre, et ce, au nom du premier ministre Djeric. Et vous voyez aussi

 14   qu'on informe ici le ministère de l'Intérieur des conclusions adoptées par

 15   le gouvernement le 25 mai, conclusions d'après lesquelles le gouvernement

 16   donne obligation au ministre de collecter de façon urgente des informations

 17   concernant la sécurité des biens et des personnes sur le territoire de la

 18   Republika Srpska, en Bosnie-Herzégovine, et de fournir ces informations de

 19   façon urgente au gouvernement. Entre parenthèses : Tout particulièrement

 20   concernant les faits relatifs aux véhicules de la zone du TAS, à Vogosca,

 21   et le carburant à Ilidza ainsi qu'ailleurs.

 22   Est-ce que vous voyez cela ?

 23   R.  Oui.

 24   Q.  Ce sont des sujets que vous avez abordés, n'est-ce pas, dans votre

 25   conversation avez M. Djeric ?

 26   R.  Oui.

 27   M. ZECEVIC : [interprétation] Je voudrais qu'on présente au témoin le

 28   document 1D62, maintenant, qui porte le numéro 138 dans la liste 65 ter.

Page 16544

  1   Q.  Monsieur le Témoin, j'ignore si vous connaissez déjà ce document. Il

  2   porte la date du 26 mai. C'est donc le lendemain de la date du document

  3   précédent. Nous y voyons que le gouvernement demande de façon urgente au

  4   ministère de lui fournir des informations. C'est donc un document, comme je

  5   viens de dire, du 26 mai, du lendemain. Et il y est dit, je cite :

  6   "Puisqu'il est indispensable que le gouvernement de la Republika Srpska

  7   reçoive de façon urgente des informations, il est indispensable que vous

  8   fournissiez des informations concernant la sécurité des personnes et des

  9   biens sur le territoire de la Republika Srpska en Bosnie-Herzégovine."

 10   Ensuite, ce qui nous intéresse se poursuit en page 2. Dans le reste de la

 11   page 1, nous voyons un certain nombre d'instructions qui sont fournies

 12   quant à la façon de procéder.

 13   M. ZECEVIC : [interprétation] Je voudrais qu'on ait la page 2, s'il vous

 14   plaît.

 15   Q.  Vous voyez au chiffre romain V, je cite : Décrire les cas d'infraction

 16   au pénal particulièrement graves. Une obligation spéciale incombe au SJB de

 17   Vogosca par rapport au vol d'automobiles de l'usine TAS, et une

 18   responsabilité particulière incombe également au SJB d'Ilidza concernant

 19   les vols de carburant.

 20   M. ZECEVIC : [interprétation] Je voudrais qu'on passe à la page 3.

 21   Q.  Je cite : Le délai pour la remise de ces informations court jusqu'au 31

 22   mai 1992.

 23   M. ZECEVIC : [interprétation] Je voudrais qu'on passe à la page suivante en

 24   anglais, parce qu'en serbe c'est la bonne, mais pas en anglais. Merci.

 25   Q.  Alors, vous voyez que ceci est signé au nom de M. Mico Stanisic. Je

 26   crois qu'il est indiqué : "Pour le ministre de l'Intérieur."

 27   Mais concernant la signature, est-ce que vous savez à qui appartient

 28   cette signature ?

Page 16545

  1   R.  Non, je ne pourrais pas vous le dire.

  2   Q.  Celle de Cedo Kljajic, peut-être ?

  3   R.  C'est possible, mais je n'en suis pas sûr.

  4   Q.  Merci beaucoup.

  5   Donc, dès le lendemain de la date à laquelle le gouvernement envoie

  6   cette demande urgente, nous voyons que le ministère, à son tour, s'adresse

  7   à ces différents SJB locaux sur la base de ce document de la veille afin de

  8   leur demander les informations nécessaires qui, ensuite, étaient censées

  9   être regroupées au sein d'un rapport à fournir au gouvernement, n'est-ce

 10   pas ?

 11   R.  Oui.

 12   Q.  Entre autres instances, votre administration, ou plutôt vous-même, à la

 13   tête de cette administration, vous avez dépêché deux inspecteurs, Drago

 14   Borovcanin et Milomir Orasanin, afin qu'ils procèdent à une tournée

 15   d'inspection des postes de sécurité publique de Vogosca et d'Ilijas. Vous

 16   l'avez fait précisément les 27 et 28 mai. Je suppose que cette action

 17   s'inscrivait dans le cadre de cette exigence et de cet ordre émanant du

 18   gouvernement d'une part, et de l'ordre du ministre d'autre part, n'est-ce

 19   pas ?

 20   R.  Pour autant que je m'en souvienne, je suis arrivé de Belgrade, en fait,

 21   peut-être justement à la date du 27, cela avait déjà été préparé. J'ai été

 22   averti par quelqu'un, informé. Il ne s'agissait pas vraiment d'une tournée

 23   d'inspection, il s'agissait plutôt de procéder à une estimation sur le

 24   terrain, de se rendre compte de la situation, de voir ce qui se passait,

 25   parce qu'il n'y avait personne sur place. La section de la police

 26   judiciaire se résumait à une seule personne, qui s'appelait Stanko, à

 27   Vogosca, et c'était tout.

 28   Q.  Je vais vous présenter maintenant la pièce P989, numéro 397 de la liste

Page 16546

  1   65 ter. Intercalaire 89.

  2   Il s'agit d'un rapport que mon confrère, M. Hannis, vous a également

  3   présenté. A la page de garde, nous voyons qu'il s'agit, je cite :

  4   "Rapport d'activités des SJB de Vogosca et d'Ilijas."

  5   Cela est daté du 30 mai.

  6   M. ZECEVIC : [interprétation] Je souhaiterais qu'on passe à la page

  7   suivante.

  8   Alors, le document porte la cote P989 et le numéro 397 dans la liste 65

  9   ter. Il nous faudrait la page 2, s'il vous plaît. Pourrions-nous avoir la

 10   bonne page en anglais aussi. Merci.

 11   Q.  Alors, vous voyez ce qui est dit ici, je cite :

 12   Les 27 et 28 mai 1992, les inspecteurs Drago Borovcanin et Milomir Orasanin

 13   du ministère de l'Intérieur ont séjourné aux SJB de Vogosca et d'Ilijas. A

 14   cette occasion, ils ont procédé à un constat relatif à l'activité desdits

 15   SJB.

 16   Alors, c'est exactement ce que vous nous avez dit, c'est-à-dire qu'ils

 17   étaient venus constater sur place quelle était l'activité de ces deux SJB,

 18   n'est-ce pas ?

 19   R.  Oui, c'est exact. Mais Mico m'a appelé le lendemain. Je voudrais juste

 20   dire cela pour qu'on ne me le reproche pas ensuite. Il m'a appelé le

 21   lendemain pour me demander des instructions quant à la façon de procéder.

 22   Donc, Cedo Kljajic les avait dépêchés avant que je ne revienne, avant mon

 23   retour.

 24   Q.  Cedo Kljajic, en sa qualité de sous-secrétaire à la sécurité publique,

 25   avait compétence pour dépêcher vos propres inspecteurs sur le terrain,

 26   n'est-ce pas ?

 27   R.  Oui. Lui était le seul à pouvoir le faire, après le ministre lui-même.

 28   Il était le seul avoir autorité pour procéder ainsi, tant du côté de la

Page 16547

  1   police que de la brigade criminelle ou de la police judiciaire. Je voulais

  2   simplement dire cette correction, qu'ils ont été envoyés par Cedo.

  3   Q.  Je voudrais que nous commentions juste le dernier paragraphe de ce

  4   document. Essayons de nous appuyer sur ce que vous avez dit, à savoir qu'à

  5   Vogosca, il n'y avait qu'un seul homme au sein de la section de police

  6   judiciaire. Il y a ici une proposition de vos inspecteurs consistant à dire

  7   que l'agent employé jusqu'à ce jour pour s'acquitter de ces tâches, à

  8   savoir Lazarevic Zivko, soit nommé à tel et tel poste. Donc, ce Lazarevic

  9   Zivko, c'est celui que vous évoquiez comme étant le seul sur le terrain,

 10   n'est-ce pas ?

 11   R.  Oui.

 12   Q.  Et il est proposé que compte tenu de l'expérience dont il bénéficie et

 13   de sa connaissance tant du terrain que des personnes concernées, ce Zivko

 14   Lazarevic soit nommé chef de cette section, et que Branislav Vlaco qui,

 15   jusqu'à ce moment, était inspecteur au sein de l'ex-CSB de Sarajevo, que

 16   lui soit affecté aux différentes tâches et missions qui sont propres à un

 17   inspecteur chargé de lutter contre la criminalité, donc au sein de cette

 18   administration chargée de la lutte contre la criminalité au sein du poste

 19   de police de Vogosca, n'est-ce pas ? C'était la proposition ?

 20   R.  Oui.

 21   Q.  Très bien. Nous allons revenir un peu plus tard à cette question de

 22   Branislav Vlaco, mais je souhaite d'abord vous présenter un autre document.

 23   Pour conclure, le 25 mai, nous l'avons vu, il existe un premier document

 24   émanant du gouvernement où on demande au ministère de remettre un certain

 25   nombre d'éléments d'information en toute urgence.

 26   Le 26 mai, le ministère donne un ordre au centre des services de

 27   Sécurité de communiquer les éléments d'information demandés. Simultanément,

 28   les membres du ministère sont envoyés sur le terrain pour procéder à des

Page 16548

  1   tournées d'inspection dans les postes de sécurité publique, dans les postes

  2   de police, les 27 et 28 mai, n'est-ce pas ?

  3   R.  Oui, c'est ce qu'on peut déduire en consultant toute cette

  4   documentation que nous avons vue tout à l'heure.

  5   Q.  Ce rapport a été remis le 30 mai et, nous l'avons vu, la date limite

  6   pour remettre un rapport, suivant la décision adoptée par le ministère,

  7   était le 31 mai. Etes-vous d'accord pour le dire ?

  8   R.  Oui.

  9   Q.  Je vais vous présenter maintenant le document qui porte la cote 1D106.

 10   C'est le document 1398 de la liste 65 ter.

 11   Il s'agit d'un rapport du 12 juillet 1992. C'est un rapport que les

 12   agents opérationnels du centre de Sécurité de Bircani [phon] à Sarajevo

 13   envoient à leur supérieur hiérarchique, le chef de ce CSB, Zoran Cvijetic.

 14   Le voyez-vous ?

 15   R.  Oui. Le document est censé être envoyé au chef et au ministre.

 16   Q.  Le ministère, c'est ce qui est indiqué ici, et non pas le ministre.

 17   R.  Oui, oui. Vous avez raison.

 18   Q.  Ce document vous a déjà été présenté. Nous y lisons que le 13 juillet,

 19   les agents opérationnels du CSB Sarajevo ont été envoyés par le chef dudit

 20   CSB vers le poste de police de Vogosca en vue de se faire une idée de la

 21   situation quant à la criminalité sur le territoire couvert par ce poste de

 22   police.

 23   Et à la page 1, nous lisons :

 24   "Il a été constaté que le service de criminalité n'existe pas au poste de

 25   police de Vogosca. Ce qui représente une source de préoccupation tout

 26   particulière, ce sont les cas de vols de nouveaux véhicules, qui ont

 27   disparu des terrains de l'usine TAS. Environ 2 300 voitures ont été

 28   volées."

Page 16549

  1   Vous vous souvenez qu'il en a été question de ce vol de voitures qui se

  2   trouvaient dans l'usine Tas ?

  3   R.  Oui, oui.

  4   Q.  Alors, pour replacer tout ceci dans le contexte adéquat, je vous

  5   rappelle que d'après votre déposition, le 2 juin, vous êtes allé

  6   personnellement pour assister à une réunion qui concernait les

  7   municipalités de Vogosca, Ilidza et Ilijas. Lors de cette réunion, vous

  8   avez discuté avec une personne qui était chargée de la sécurité des

  9   terrains appartenant à l'usine. Il s'agissait du commandant d'une unité

 10   militaire.

 11   R.  Oui. Mais avant cette rencontre, c'était le commandant de la brigade

 12   qui avait été en contact avec lui.

 13   Q.  Oui, mais si j'ai bien compris, vous avez eu des discussions avec le

 14   commandant de la brigade, et au cours de la conversation, vous avez insisté

 15   pour qu'on relève le niveau de sécurité dans le cercle de cette usine, puis

 16   le commandant de l'unité qui était chargée de la sécurité est venu lui dire

 17   que justement, ce jour-là, quelqu'un avait emmené 2 300 voitures de l'usine

 18   ce jour-là et qu'il ne pouvait rien faire pour le prévenir.

 19   R.  Oui. Il s'agissait de Skipina. Et ceci s'est passé au cours de la

 20   réunion elle-même.

 21   Q.  Oui, c'est la raison pour laquelle je l'ai évoqué. C'est plutôt curieux

 22   que les choses se soient déroulées ainsi.

 23   M. ZECEVIC : [interprétation] Passons à la page 2 du même document.

 24   Q.  Mais un commentaire avant d'y passer. Il est clair que vos hommes s'y

 25   trouvaient le 27 et le 28 mai. Vous y êtes allé vous-même le 2 juin. Mais

 26   malgré toutes les propositions qui ont été faites, malgré toutes les

 27   suggestions avancées pour améliorer la situation, il est clair que même au

 28   début du mois de juillet il n'y a pas eu de modification significative au

Page 16550

  1   sein du poste de police de Vogosca; ai-je raison de l'affirmer ?

  2   R.  Exact.

  3   Q.  Nous en verrons les raisons en consultant le document affiché à

  4   l'écran.

  5   En lisant cette page, nous voyons que les agents opérationnels du centre

  6   des services de sécurité expliquent à quel type de problèmes ils ont dû

  7   faire face à leur arrivée; ils ont expliqué que le chef était parti en

  8   Serbie; qu'on ne pouvait pas leur allouer un bureau parce que, soi-disant,

  9   le garde du corps du chef qui gardait les clés sur lui était lui aussi

 10   parti pour la Serbie. Bref, et pour m'exprimer ainsi, on a tout fait pour

 11   les empêcher de travailler au sein du poste de police de Vogosca.

 12   C'est ce qu'on peut déduire en lisant ce document ?

 13   R.  Je vous demande pardon. Mais est-ce que la bonne page du document est

 14   affichée à l'écran ? Il nous faut la page 2, n'est-ce pas ?

 15   Q.  Oui, oui.

 16   R.  Je n'ai pas pu suivre le texte original.

 17   Q.  Il est indiqué, le lendemain, suite à notre arrivée au poste de police

 18   de Vogosca, nous avons appris que le chef était parti depuis Vogosca en

 19   Serbie et qu'il devait revenir dans deux ou trois jours. Par la suite, nous

 20   nous sommes adressés au commandant du poste de police pour que celui-ci

 21   ouvre deux bureaux à clé, deux bureaux qui faisaient partie des locaux du

 22   service chargé de la lutte contre la criminalité, mais on nous a répondu

 23   que c'était Radenko qui avait les clés sur lui, et que celui-ci était parti

 24   en voyage ensemble avec le chef.

 25   R.  Oui, oui, c'est ça.

 26   Q.  A la fin de la page, avant-dernière phrase, nous pouvons voir ce qui

 27   suit : Il a été convenu qu'un service criminel devait être mis sur pied.

 28   Vlaco Brano devrait être le chef du service, et le service devrait

Page 16551

  1   comprendre également l'agent qui a travaillé jusqu'à présent dans ce

  2   service et dans le CSB de Sarajevo. Donc il s'agit toujours du même Brano

  3   Vlaso qui avait été proposé comme candidat potentiel par vos hommes, n'est-

  4   ce pas ?

  5   R.  Oui.

  6   M. ZECEVIC : [interprétation] Penchons-nous maintenant sur la dernière page

  7   du document.

  8   Q.  Nous pouvons déduire pour quelle raison une telle situation

  9   prévalait au poste de police de Vogosca.

 10   Le 9 juin, ils ont réussi à rencontrer le chef lors d'une réunion qui

 11   a été organisée. Des critiques très sévères ont été adressées sur le compte

 12   du ministère du centre des services de sécurité et des autorités

 13   municipales. Et puis, je lis les deux dernières phrases : Mis à part tout

 14   ceci, l'opinion générale qui prévalait lors de la réunion était que les

 15   politiques qui concernent le personnel du SJB Vogosca ne peuvent être

 16   élaborées que par le chef du SJB et ses collègues; personne, qu'il s'agisse

 17   du MUP ou de la municipalité, ne saurait nommer des hommes au sein de son

 18   service à lui.

 19   Et puis il a été indiqué aux personnes nouvellement arrivées que leur

 20   présence n'était pas voulue, qu'elle était superflue, et qu'ils n'auraient

 21   pas dû venir pour commencer.

 22   Alors, dites-moi, s'il vous plaît, c'est un comportement plutôt

 23   incompréhensible de leur part ? Mais ils témoignent avec précision de la

 24   situation qui prévalait à l'époque, n'est-ce pas ?

 25   R.  Je peux vous citer un grand nombre d'exemples de ce type. Si la

 26   situation avait toujours été telle, vous pouvez vous imaginer à quel point

 27   il était difficile d'engager des activités de combat. D'abord, vous n'aviez

 28   pas suffisamment d'effectifs, et en plus, il y avait tous ceux qui

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  1   arboraient des fusils et qui se croyaient courageux.

  2   Q.  Et le pire dans tout ceci c'est que compte tenu des activités de combat

  3   et la situation particulière dans laquelle cette municipalité -- vous ne

  4   pouviez rien entreprendre objectivement parlant ?

  5   R.  C'est exact. Et c'est précisément pour cette raison qu'on constate dans

  6   un des documents que nous avons vus, que quel que soit le crime en question

  7   il est essentiel de repérer tous les indices pour pouvoir engager des

  8   poursuites. Il est clair que même dans les circonstances les plus idéales

  9   il est impossible d'engager des poursuites si on ne dispose pas de la

 10   documentation complète. Vous pouvez vous imaginer comment cela fonctionne

 11   lors des activités de combat. C'est la raison pour laquelle nous avons

 12   insisté pour qu'on procède à la collecte de tous les indices qui

 13   permettraient d'engager des poursuites lorsque la situation le permettra.

 14   Q.  Nous allons nous concentrer sur ce document un peu plus tard.

 15   Mais dans ce document-ci, nous voyons que le chef du poste de la sécurité

 16   publique dit ouvertement aux inspecteurs, qui proviennent du centre de

 17   sécurité qui lui est supérieur, que leur présence n'est pas souhaitée, et

 18   ils les informent que le centre des services de sécurité et le MUP ne

 19   peuvent pas engager des activités au sein de son poste de police à lui.

 20   Alors, je vous ai demandé de confirmer que ceci illustrait bien la

 21   situation qui prévalait à l'époque, donc ces exemples d'insubordination de

 22   la part des chefs de postes de police étaient-ils fréquents à l'époque ?

 23   R.  Oui, absolument.

 24   Q.  Alors, si des activités de combat sont en cours sur le territoire de

 25   cette municipalité, il s'ensuit bien évidemment qu'on y retrouve un grand

 26   nombre d'individus armés, qu'il s'agisse des membres de la Défense

 27   territoriale, des paramilitaires, ou des membres de la VRS; ai-je raison de

 28   l'affirmer ?

Page 16553

  1   R.  Oui, tout à fait. Et tout le monde s'efforçait tout simplement de

  2   maintenir les lignes en place, de les préserver.

  3   Q.  Et au fond, Monsieur Planojevic, si au sein du MUP vous avez souhaité

  4   vous servir de vos compétences, d'exercer votre autorité, vous auriez fait

  5   l'objet de critique, on vous dirait que vous êtes en train de mettre en

  6   danger les capacités de combat de l'armée sur un territoire donné ?

  7   R.  Tout à fait. On n'avait pas le droit de dire quoi que ce soit, à qui

  8   que ce soit, notamment dans cette région-ci. Comme il n'y avait pas

  9   suffisamment d'effectifs pour le combat, alors on se servait du premier

 10   arrivé. Et on le faisait partout à un niveau local, et c'est sans doute la

 11   raison pour laquelle on tolérait des choses qui n'auraient pas dû être

 12   tolérées.

 13   Q.  Nous avons évoqué le nom de Brano Vlaco, en répondant aux questions

 14   posées par mon estimé confrère, M. Hannis, vous avez signalé qu'il existait

 15   deux personnes qui portaient le même prénom et le même nom de famille; vous

 16   en souvenez-vous ?

 17   R.  Oui.

 18   Q.  Il s'agissait d'une part d'un inspecteur chargé de la criminalité

 19   économique au sein du SUP de la ville de Sarajevo avant la guerre, n'est-ce

 20   pas ?

 21   R.  Oui.

 22   Q.  Si mes souvenirs sont bons, vous avez déclaré qu'il s'agissait

 23   d'un homme moustachu, n'est-ce pas ?

 24   R.  Oui, il porte une moustache même au jour d'aujourd'hui.

 25   Q.  Alors ce Brano Vlaco, est parti à Vogosca, et c'est précisément la

 26   personne qui est évoquée dans nos deux documents. On le propose comme

 27   candidat au poste d'agent chargé de la lutte contre la criminalité, n'est-

 28   ce pas ?

Page 16554

  1   R.  Oui, et par ailleurs, il habitait à Vogosca, c'était son lieu de

  2   domicile.

  3   Q.  Oui, mais ce qui est important pour moi c'est d'élucider le point

  4   suivant : donc les deux documents que nous avons étudiés, le document

  5   1D106, à savoir le rapport du CSB du 12 juillet ainsi que la pièce P989, le

  6   rapport émanant de votre inspecteur du 30 mai, donc dans ces deux rapports,

  7   on avance les noms d'un certain nombre de candidats au poste d'agent, et on

  8   suggère le nom de Brano Vlaco, qui est censé devenir inspecteur au sein de

  9   l'administration chargée de la lutte contre la criminalité.

 10   Alors lorsque le nom de Brano Vlaco est évoqué, on pense bien à cette

 11   personne moustachue qui avait été inspecteur chargé de la lutte contre la

 12   criminalité économique avant la guerre.

 13   R.  Oui, il s'agit absolument de cette personne-là. Il n'y a pas d'erreur

 14   possible à cet égard.

 15   Q.  Et donc ce Brano Vlaco précis, après un moment donné, et compte tenu de

 16   la situation générale, telle qu'elle prévalait à Vogosca, a plié ses

 17   bagages et il est parti pour Bijeljina. Le saviez-vous ?

 18   R.  Je ne sais pas, je ne suis pas tout à fait certain. Je crois que

 19   pendant un certain temps il a travaillé au SDK dans la municipalité de

 20   Vogosca, pendant que le service du salaire fonctionnait, pendant un certain

 21   temps. Par la suite, il est parti.

 22   Q.  Donc il a quitté dans tous les cas le poste de sécurité publique de

 23   Vogosca. Il a travaillé pendant un certain temps au sein du SDK, et par la

 24   suite, après un certain temps, un laps de temps assez court, il est parti à

 25   Bijeljina, n'est-ce pas ?

 26   R.  Oui, c'est exact.

 27   Q.  Et cet homme vit maintenant à Bijeljina. Il est directeur d'une banque

 28   à Bijeljina, n'est-ce pas ?

Page 16555

  1   R.  Il est le directeur de la banque Raiffeisen.

  2   Q.  D'accord, donc la banque Raiffeisen, très bien.

  3   Brano Vlaco que vous connaissez également, l'autre Brano Vlaco, était

  4   membre de l'unité spéciale du MUP de la République socialiste de Bosnie-

  5   Herzégovine, avant la guerre, n'est-ce pas ?

  6   R.  Oui.

  7   Q.  Vous l'avez vu en date du 8 juin 1992 à Kalovita Brda, n'est-ce pas ?

  8   R.  Oui, c'est exact.

  9   Q.  Vous ne l'avez pas vu pendant la période entre le 1er avril et le 8

 10   juin, n'est-ce pas ?

 11   R.  Je ne me souviens pas l'avoir vu pendant cette période.

 12   Q.  Lorsque le 8 juillet vous l'avez rencontré - vous vous souvenez de

 13   cette date du 8 juin, à cause d'une offensive des forces musulmanes très

 14   violente - il vous a dit que quelqu'un lui avait donné rendez-vous pour un

 15   travail au MUP de la Republika Srpska. Donc il s'agissait d'un entretien

 16   d'emploi ?

 17   R.  Oui.

 18   Q.  Et environ 20 à 30 minutes plus tard, un appel est arrivé à Kalovita

 19   Brda pour dire que les Musulmans avaient lancé une attaque contre Vogosca.

 20   Il a sauté dans sa voiture, et il est parti pour Vogosca; est-ce que c'est

 21   exact ?

 22   R.  Oui, c'est exactement comme cela que ça s'est passé.

 23   Q.  Très bien. Et vous savez que ce jour-là, s'agissant de cette réunion à

 24   laquelle il était venu, en fait, il n'y a jamais eu de réunion ?

 25   R.  Non, effectivement il est retourné. Le ministre ne s'est jamais

 26   présenté ce jour-là, et moi, j'ai passé la journée à Kalovita Brda, je ne

 27   l'ai pas du tout vu cette journée-là, il n'est pas venu.

 28   Q.  Et après cette date du 8 juin, ce deuxième Brano Vlaco dont nous avons

Page 16556

  1   parlé à l'instant, vous ne l'avez pas vu ou tout du moins en 1992 ?

  2   R.  Oui, après la guerre, il m'est arrivé de le voir, ou non, plutôt avant

  3   cela.

  4   Q.  Et vous ne savez pas quel était le sort qui lui était réservé après ce

  5   8 juin ?

  6   R.  Non, je crois que le Procureur m'a dit que, en fait m'a demandé si vers

  7   la fin de 1992 il était devenu chef de Vogosca, un commandant à Vogosca.

  8   M. ZECEVIC : [interprétation] Je demande que l'on montre au témoin la pièce

  9   65 ter 1D339, la pièce en fait c'est le document 1D339, c'est la pièce 65

 10   ter 1435.

 11   Q.  Monsieur Planojevic, vous m'avez dit que le Procureur vous a posé une

 12   question, et toujours s'agissant de Brano Vlaco et de sa nomination en

 13   novembre au poste de commandant au sein du SJB de Vogosca.

 14   J'aimerais savoir si l'Accusation dans le cadre de cet entretien que vous

 15   avez eu avec eux, vous a présenté ce document du 21 juillet 1992 ?

 16   R.  Non, il ne m'a pas montré ce document.

 17   Q.  Je ne sais pas si vous êtes en mesure de voir ce document, c'est un

 18   document du ministère de la Justice, il porte le numéro 01-131/92 Sarajevo,

 19   21 juillet 1992, et se lit comme suit : "Décision."

 20   Je ne sais pas si vous voyez cela.

 21   R.  Oui, j'arrive à lire "Décision", le nom et le prénom.

 22   Q.  On peut lire : "Décision."

 23   Brano Vlaco de Vogosca sera nommé au poste de chef de l'unité de détention,

 24   de la prison de l'installation correctionnelle Butmir, Ilidza, située à

 25   Vogosca.

 26   Dans le bloc signature, on voit la signature du ministre de la Justice, M.

 27   Avlijas.

 28   J'imagine que vous n'aviez pas vu ce document auparavant, et on voyait

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  1   aussi :

  2   "Cette décision entrera en vigueur le jour de son adoption, et cela

  3   s'appliquera à partir du 14 juillet 1992."

  4   Au nom du ministre de la Justice, M. Avlijas.

  5   R.  Oui. Je vois ce document pour la première fois.

  6   Q.  Est-ce que vous savez si ce Brano Vlaco a été nommé à ce poste en

  7   juillet, le directeur de prison, par le ministère de la Justice de la RS ?

  8   R.  Je vois ceci dans ce document effectivement, mais je ne le savais pas

  9   avant cela.

 10   Q.  Eh bien, il me reste encore environ 15 minutes, et j'aimerais

 11   maintenant que l'on revienne à un sujet dont nous avons parlé il y a

 12   environ une heure ou une heure et demie. Nous avons parlé du rôle

 13   instructif du ministère. Vous nous avez dit qu'il y avait des instructions,

 14   des propositions concernant le travail, des suggestions, qu'il y avait

 15   également un service de contrôle au sein du ministère. Pourriez-vous me

 16   dire, s'il vous plaît, Monsieur, si jamais le ministère de l'Intérieur de

 17   la Republika Srpska, s'il a donc jamais donné quelque instruction que ce

 18   soit dont vous aviez eu vent, que vous auriez vue ou dont vous auriez

 19   entendu parler en tant qu'adjoint du ministre, concernant la discrimination

 20   dans le cadre du travail de la police à l'encontre des membres de la

 21   population non-serbe ?

 22   R.  Non, je n'ai pas vu ce document et je n'en avais pas entendu parler non

 23   plus. Mais effectivement, si j'en avais entendu parler ou si j'avais eu ces

 24   informations, j'aurais certainement réagi.

 25   Q.  Est-ce que vous savez s'il existait une position adoptée sans qu'il n'y

 26   ait pour autant d'instruction officielle ou d'ordre écrit selon lequel il

 27   fallait procéder à la discrimination à l'encontre de la population non-

 28   serbe au MUP de la RS pendant que vous y étiez ?

Page 16558

  1   R.  Vous pensez au ministère et vous parlez des contacts que j'avais moi

  2   avec mes pairs ?

  3   Q.  Oui, justement.

  4   R.  Ma réponse est non, alors.

  5   Q.  Non, en fait, je vous demande de me parler des contacts que vous auriez

  6   pu avoir étant donné que vous étiez adjoint du ministre et plus tard, vous

  7   avez travaillé dans le service de la Sûreté de l'Etat.

  8   R.  Il n'y avait jamais eu d'ordres ou d'actes à cet effet, et n'y a jamais

  9   eu de tels comportements non plus.

 10   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Maître Zecevic.

 11   M. ZECEVIC : [interprétation] Oui, Monsieur le Juge.

 12   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Nous ne sommes pas étonnés,

 13   j'imagine, tous, de voir qu'il n'y a pas eu d'instructions écrites

 14   provenant des hauts dirigeants du ministère concernant une attitude

 15   discriminatoire à l'encontre des non-Serbes. Donc, votre prochaine question

 16   posée au témoin lorsque vous lui demandez de confirmer si de telles

 17   attitudes discriminatoires lui étaient connues, est de savoir s'il avait

 18   peut-être vu certaines attitudes qui favorisaient ce type de

 19   discrimination. Ensuite, M. Planojevic vous a répondu pour vous dire qu'il

 20   n'y avait jamais eu de tels comportements au niveau exécutif.

 21   Alors, ceci me mène à me poser la question et à poser la question au

 22   témoin si, Monsieur Planojevic, vous saviez s'il existait un tel

 23   comportement à des niveaux inférieurs du MUP ?

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] Il m'est bien difficile de vous répondre. Je

 25   n'avais pas autant de contacts. En fait, j'avais des contacts plutôt

 26   indirects.

 27   Je n'avais pas le temps d'établir des contacts avec beaucoup de

 28   personnes, à l'exception de mes collaborateurs les plus proches.

Page 16559

  1   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Je vous remercie.

  2   [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]

  3   M. ZECEVIC : [interprétation]

  4   Q.  C'est un fait, n'est-ce pas, que dans le cadre de votre travail au sein

  5   du ministère de l'Intérieur de la Republika Srpska en votre qualité

  6   d'adjoint du ministre, toutes les instructions provenant des ministères

  7   allant vers les centres régionaux des centres de sécurité publique se

  8   trouvant sur le territoire de la Republika Srpska et, par conséquent, aux

  9   postes de sécurité publique régionaux, on insistait, et ce, à plusieurs

 10   reprises, pour respecter la loi, et on insistait pour que les membres de la

 11   police travaillent conformément à la loi et conformément aux règlements ?

 12   R.  Oui, c'est exact.

 13   Q.  Il existait un grand nombre d'ordres de ce type, n'est-ce pas ?

 14   R.  Oui. Eu égard aux circonstances, oui.

 15   [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]

 16   M. ZECEVIC : [interprétation]

 17   Q.  Je voulais justement vous demander de nous donner la raison pour

 18   laquelle ce type de répétition d'ordres et d'obligations qui, de toute

 19   façon, sont des règlements qui sont conformes à la loi.

 20   N'est-il pas exact de dire qu'étant donné la situation objective,

 21   étant donné que la guerre faisait rage, le ministère de l'Intérieur, afin

 22   de pouvoir communiquer le tout vers les centres de sécurité publique aux

 23   niveaux les plus bas, faisait distribuer ce type d'ordres de façon

 24   permanente à ses membres, qui avaient toujours une teneur presque identique

 25   ?

 26   R.  Oui, mais il faut penser à la souplesse. Vous savez, des fois, il

 27   faisait peser le pour et le contre, à savoir s'il était prudent de perdre

 28   l'ensemble d'un quartier, ou bien est-ce qu'il fallait laisser passer les

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  1   choses. Vous avez déjà, de toute façon, expliqué les conditions dans

  2   lesquelles les choses se déroulaient.

  3   Q.  Oui, mais justement, l'une de vos instructions était, à vous aussi, de

  4   faire en sorte que tous les cas soient documentés. Et nous allons en

  5   parler. Nous allons voir ensemble ce document-là également un peu plus

  6   tard.

  7   Pour l'instant, dites-nous, ces inspecteurs qui avaient été envoyés par

  8   Cedo Kljajic - nous avons vu que c'était vers la fin du mois de mai 1992 -

  9   et qui avaient été envoyés à Vogosca et à Ilijas, ces inspecteurs du

 10   ministère de l'Intérieur avaient été également envoyés ailleurs, à d'autres

 11   endroits partout dans la Republika Srpska lorsqu'il leur était possible

 12   d'arriver de se frayer le chemin jusqu'aux postes de sécurité publique et

 13   centres de sécurité publique, n'est-ce pas ?

 14   R.  Oui.

 15   Q.  Je souhaite maintenant vous présenter quelques documents.

 16   M. ZECEVIC : [interprétation] Je demanderais que l'on montre au témoin

 17   d'abord le document 1D00-0513.

 18   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Monsieur Zecevic, vous avez parlé de

 19   quelques documents, au pluriel. Il ne reste que deux minutes avant la fin

 20   de la session. Est-il possible de terminer la présentation de ces documents

 21   avant l'heure de la levée de la séance ?

 22   M. ZECEVIC : [interprétation] Non, Monsieur le Président. Mais je peux

 23   peut-être montrer au témoin un dernier document, et j'en aurai terminé sous

 24   peu.

 25   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Je vous remercie.

 26   M. ZECEVIC : [interprétation] Très bien.

 27   Q.  Alors, dans le document en question nous pouvons voir que Danilo

 28   Vukovic était un inspecteur de la police judiciaire du MUP de la Republika

Page 16561

  1   Srpska ?

  2   R.  Oui.

  3   Q.  Il travaillait dans votre administration, n'est-ce pas ?

  4   R.  Oui.

  5   Q.  C'est un document du 24 juin 1992, par lequel on habilite M. Danilo

  6   Vukovic à s'engager dans certaines activités sur le territoire du CSB de

  7   Bijeljina, et au SJB de Bijeljina, et d'établir la coordination et la

  8   direction du service judiciaire dans cette région. Est-ce que vous voyez

  9   cela ?

 10   R.  Oui.

 11   Q.  Nous apercevons également la signature, et je crois que c'est la

 12   signature de M. Njegus; est-ce exact, ou bien est-ce M. Cedo Kljajic ?

 13   R.  Je crois que c'est la signature de M. Kljajic. Peut-être Radomir aussi,

 14   je ne sais pas; je ne suis pas tout à fait certain.

 15   Q.  Mais, dans tous les cas, vous savez que Danilo Vukovic avait eu cette

 16   autorité, avait été habilité à aller rendre visite au CJB de la Republika

 17   Srpska.

 18   R.  Oui.

 19   Q.  Et à Bijeljina, n'est-ce pas ?

 20   R.  Oui.

 21   M. ZECEVIC : [aucune interprétation]

 22   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Très bien. Le document sera versé au

 23   dossier, à moins qu'il n'y ait d'opposition.

 24   M. HANNIS : [interprétation] Pas d'objection.

 25   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Très bien. Le document sera versé au

 26   dossier.

 27   M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agira de la pièce 1D391.

 28   M. ZECEVIC : [interprétation]

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  1   Q.  Je vous remercie, Monsieur Planojevic. Nous allons continuer

  2   demain.

  3   M. ZECEVIC : [interprétation] Je crois maintenant le moment est venu pour

  4   que vous puissiez lever la séance, Monsieur le Président.

  5   M. LE JUGE HALL : [aucune interprétation]

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] Excusez-moi, j'ai une question.

  7   M. LE JUGE HALL : [aucune interprétation]

  8   LE TÉMOIN : [interprétation] Voilà, je voulais planifier ma journée de

  9   demain, et donc je voulais simplement vous demander si nous allons pouvoir

 10   terminer mon audition demain. Qu'est-ce que vous en pensez ?

 11   M. ZECEVIC : [interprétation] Monsieur le Président, Monsieur les Juges, je

 12   crois que je serai en mesure de terminer en une session, ou peut-être plus

 13   d'une session, peut-être que ça va durer un peu plus d'une session.

 14   M. LE JUGE HALL : [interprétation] D'après ce que m'a dit le Juriste de la

 15   Chambre, on a essayé de calculer combien de temps il vous restait, donc je

 16   suis heureux en fait que vous me disiez cela puisque nous avions peur que

 17   nous n'allions pas pouvoir vous voir terminer, donc j'imagine que cela sera

 18   possible, n'est-ce pas ?

 19   Maître Krgovic, est-ce que vous avez des questions ? Vous avez une heure et

 20   demie. Est-ce que cela est encore votre position ? Avez-vous toujours

 21   besoin d'une heure et demie ?

 22   M. KRGOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, je crois que nous

 23   n'aurons pas de questions à poser à ce témoin.

 24   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Très bien.

 25   Monsieur Planojevic, alors ceci répond à votre question, il semblerait que

 26   vous allez pouvoir terminer votre déposition demain.

 27   Je crois que nous serons dans une autre salle d'audience demain matin, la

 28   salle d'audience numéro II. Alors, nous nous retrouverons demain matin à 9

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  1   heures.

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.

  3   [Le témoin quitte la barre]

  4   ---L'audience est levée à 19 heures 02 et reprendra le vendredi 29 octobre

  5   2010, à 9 heures 00.

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