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Le Procureur c/ Dusko Tadic - Affaire n° IT-94-1-A |
"Décision relative à la requête de Milan Vujin aux fins d'examen de la décision du greffier en application de l'article 14 D) de la directive sur la commission d'office de Conseil de la défense"
11 septembre 2001
Juge Claude Jorda
Radiation de la liste tenue par le Greffier d'un conseil commis d'office pour outrage au Tribunal - Articles 44, 45 B) et 77 du Règlement - Article 14 D) de la Directive relative à la commission d'office de Conseil de la Défense - Compétence administrative du Greffier - Articles 17 et 33 du Statut - Caractère autonome des attributions du Greffier - Pouvoir discrétionnaire. |
Rappel de la procédure
Le 31 janvier 2000, la Chambre d'appel, statuant en premier ressort, a rendu l'Arrêt relatif aux allégations d'outrage formulées à l'encontre de Milan Vujin1, aux termes duquel elle a considéré que le Conseil de la Défense avait «présenté, à l'appui de la demande déposée en vertu de l'article 115 du Règlement, une version des faits qu'il savait fausse.»
Le 27 février 2001, la Chambre d'appel, statuant en appel, a rendu un arrêt confirmatif relatif aux allégations d'outrage2.
Le 8 juin 2001, le Greffier a décidé, en vertu de ses pouvoirs, de rayer le nom de M. Milan Vujin de la liste des conseils, mentionnée à l'article 45 B) du Règlement de procédure et de preuve (ci-après le «Règlement»).
Le 28 juin 2001, Milan Vujin a déposé une requête aux fins de révision de la décision du Greffier auprès du Président du Tribunal, le Juge Claude Jorda. Il a fait valoir que «le Greffier ne peut pas se fonder sur l'article 14 D) de la Directive relative à la commission d'office de Conseil de la Défense, pour le rayer de la liste des conseils car cette disposition est postérieure au comportement qualifié d'outrage au Tribunal donc, non applicable en l'espèce, et que le Règlement et la Directive applicables au moment des faits, ne fournissent aucune base permettant au Greffier de rayer son nom de la liste des conseils prévue à l'article 45 B) du Règlement à la suite d'une condamnation pour outrage au Tribunal prévu à l'article 77 du Règlement».
La décision
Le Président du Tribunal a rejeté la requête et confirmé la décision du Greffier de procéder à la radiation de Milan Vujin de la liste des conseils, tenue en application de l'article 45 B) du Règlement3.
Les motifs
En application de l'article 45 B) du Règlement, le Greffier tient une liste de conseils remplissant les conditions prévues par le Règlement, et, lors d'une inscription, vérifie si ces conditions sont conformes, et ce en vertu de son pouvoir discrétionnaire. Il possède un pouvoir autonome reconnu explicitement par la Chambre d'appel dans son arrêt. Ce pouvoir se distingue du pouvoir répressif de la même Chambre et lui permet de prendre les mesures appropriées à adopter dans le cas d'espèce. Le Greffier a considéré que «les faits établis contre M. Milan Vujin constituent une menace permanente pour l'administration de la justice par le Tribunal», et justifie sa radiation de la liste des conseils. En conséquence, la décision du Greffier est «de nature purement administrative» et «ne viole pas le principe nullum crimen nulla pna sine lege consacrée en matière pénale».
Les avocats
comparaissant devant le Tribunal doivent respecter certaines obligations en
application de l'article 44 C) du Règlement4, notamment
le respect du Code de déontologie. La Chambre d'appel, statuant en
premier ressort, a reconnu que «les faits qualifiés d'outrage
au Tribunal par le conseil Milan Vujin, constituaient des manquements graves
et des fautes professionnelles relevant de toutes les catégories prévues
par les articles 13 et 20 du Code de déontologie», et, statuant
en appel, a souligné qu'en cas de condamnation pour outrage, le conseil
peut s'attendre à être suspendu ou radié de la liste.
Etant donné que l'article 45 du Règlement précise que
le Greffier tient une liste de conseils remplissant les conditions visées
à l'article 44 C) du Règlement et que ces conditions ne sont
plus respectées, M. Vujin devait s'attendre à faire l'objet
d'une radiation de la liste des conseils prévue à l'article
45 B) du Règlement.
_______________________________________
1. Le Procureur c/ Dusko Tadic («Prijedor»),
Affaire n° IT-94-1-A-R77, Chambre d'appel, Arrêt relatif aux allégations
d'outrage formulées à l'encontre du précédent conseil,
Milan Vujin, 31 janvier 2000 (résumé dans le Supplément
judiciaire n° 12).
2. Le Procureur c/ Dusko Tadic
(«Prijedor»), Affaire n° IT-94-1-A-AR77, Chambre d'appel, Arrêt
confirmatif relatif aux allégations d'outrage formulées à
l'encontre du précédent conseil, Milan Vujin, 27 février
2001 (résumé dans le Supplément
judiciaire n° 23).
3. «Le Greffier tient une liste de conseils remplissant
les conditions visées à l'article 44, qui ont justifié
d'une expérience raisonnable en droit pénal et/ou international
et qui ont fait savoir qu'ils accepteraient d'être commis d'office par
le Tribunal pour représenter toute personne n'ayant pas les moyens de
rémunérer un conseil et détenue sous l'autorité
du Tribunal.»
4. «Dans l'accomplissement de leurs devoirs, les conseils
de la défense sont soumis aux dispositions pertinentes du Statut, du
Règlement sur la détention préventive et de toutes autres
dispositions réglementaires adoptées par le Tribunal, de l'Accord
de siège, du Code de déontologie pour les avocats comparaissant
devant le Tribunal international et aux règles déontologiques
qui régissent leur profession ainsi que le cas échéant,
de la Directive relative à la commission d'office de conseil de la défense.»
Le Procureur c/ Dusko Tadic - Affaire n° IT-94-1-R |
"Ordonnance du Président portant affectation de juges à la Chambre d'appel"
29 octobre 2001
Juge Claude Jorda
Demande en révision - Article 119 du Règlement - Notion de jugement définitif. Un jugement définitif, au sens de l'article 119 du Règlement, consiste en une décision qui met fin à la procédure. |
Rappel de la procédure
Le 18 juin 2001, l'accusé a déposé devant le Président du Tribunal une demande en révision de l'affaire dans son intégralité, fondée sur l'Arrêt relatif aux allégations d'outrage formulées à l'encontre du précédent conseil, Milan Vujin du 31 janvier 20001.
Le 5 octobre 2001, les Conseils de l'accusé ont déposé une autre demande en révision des déclarations de culpabilité de Dusko Tadic énoncées par la Chambre de première instance et la Chambre d'appel.
Le 15 octobre
2001, l'Accusation a déposé une requête relative à
la demande en révision.
La décision
Le Président a ordonné que la Chambre d'appel soit composée des juges Claude Jorda, Mehmet Güney, Asoka de Zoysa Gunawardana, Fausto Pocar et Liu Daqun.
Les motifs
Le Président a rappelé que «selon l'article 119 du Règlement2, seul un jugement définitif peut faire l'objet d'une révision». Il a estimé qu'au sens du texte susmentionné, «un jugement définitif consiste en une décision qui met fin à la procédure.»3 Le Président a constaté «qu'en l'espèce, le jugement définitif est l'Arrêt du 15 juillet» 19994.
_______________________________________
1. Le Procureur c/ Dusko Tadic («Prijedor»),
Affaire n° IT-94-1-A-R77, Chambre d'appel, Arrêt relatif aux allégations
d'outrage formulées à l'encontre du précédent conseil,
Milan Vujin, 31 janvier 2000 (résumé dans le Supplément
judiciaire n° 12).
2. «S'il est découvert un fait nouveau qui n'était
pas connu de la partie intéressée lors de la procédure
devant une chambre de première instance ou la Chambre d'appel ou dont
la découverte n'avait pu intervenir malgré toutes les diligences
effectuées, la défense ou, dans l'année suivant le prononcé
du jugement définitif, le Procureur peut soumettre à la même
Chambre une requête en révision du jugement. Si, à la date
de la demande en révision, un ou plusieurs juges de la chambre initiale
n'est plus en fonction au Tribunal, le Président nomme un ou plusieurs
juges en remplacement.»
3. Le Procureur c/ Jean-Bosco Barayagwiza, Affaire n°
ICTR-97-19-AR72, Chambre d'appel, Arrêt, 31 mars 2000, aux termes duquel
la Chambre d'appel a souligné qu'un jugement définitif «consiste
en une décision qui met fin à la procédure : ce n'est qu'une
telle décision qui est susceptible de révision.» (Par. 49)
4. Le Procureur c/ Dusko Tadic («Prijedor»),
Affaire no IT-94-1-A, Chambre d'appel, Arrêt, 15 juillet 1999 (résumé
dans le Supplément
judiciaire n° 6).