«Décision
relative aux requêtes déposées par Nikola Sainovic
et Dragoljub Ojdanic aux fins de mise en liberté provisoire»
Rappel de la procédure · Les 5 et 10 juin, respectivement, Nikola Sainovic et Dragoljub Ojdanic3 ont saisi la Chambre de première instance de deux requêtes aux fins de mise en liberté provisoire aux termes de l'article 65 du Règlement de procédure et de preuve. · Le Bureau du Procureur a déposé sa réponse le 19 juin 2002, s'opposant aux Requêtes, et a par ailleurs déposé, le 21 juin, un rectificatif demandant un sursis à exécution afin de pouvoir interjeter appel, au cas où la Chambre de première instance consentirait à la mise en liberté provisoire des deux accusés. · Le 24 juin 2002, lors de l'audience relative aux Requêtes, des arguments oraux ont été avancés par les deux parties, ainsi que par des représentants du Gouvernement de la République Fédérale de Yougoslavie (ci après «RFY»).
Le 26 juin
2002 la Chambre de première instance a fait droit aux Requêtes,
sous réserve des conditions énoncées dans les ordonnances
de mise en liberté provisoire, et a sursis à l'exécution
de la Décision dans l'attente d'un acte d'appel de l'Accusation. Les motifs La Chambre de première instance a fait référence aux critères tels qu'établis par la jurisprudence du Tribunal, selon lesquels l'examen afin de statuer sur la mise en liberté provisoire doit être conduit «au cas par cas» et ne peut conduire à l'accès à une telle demande que dans la mesure où l'accusé parvient à la convaincre qu'il «comparaîtra au procès et, s'il est libéré, ne mettra en danger aucune victime, aucun témoin ou toute autre personne».4 La Chambre de première instance, afin d'examiner la probabilité que les accusés comparaîtront au procès, a tout d'abord accordé «un poids appréciable» au fait qu'ils se soient livrés au Tribunal, en tant que signe d'une volonté de coopération avec le Tribunal. Elle a considéré, en l'espèce, que le fait que les accusés auraient pu se livrer plus tôt était certes à prendre en compte, mais a tout de même estimé que «c'est la reddition proprement dite qui importe».5 La Chambre de première instance a ensuite pris en compte la loi sur la coopération entre la RFY et le Tribunal, laquelle met en place une procédure pour l'arrestation de personnes accusées.6 Tout en notant que cette procédure «n'existait pas auparavant» et qu'il reste à savoir comment elle «fonctionnera dans la pratique», la Chambre de première instance a considéré cette loi comme un pas vers la coopération, et a déduit de l'attitude du Gouvernement de la RFY que le «niveau de coopération proposé» était satisfaisant. Réitérant que les garanties ne constituent pas une condition de l'octroi de la liberté provisoire,7 mais offrent simplement aux juges une «assurance additionnelle», la Chambre de première instance a néanmoins tenu compte des garanties données par le Gouvernement de la RFY et la République de Serbie à l'égard de chaque accusé, aux termes desquelles ils entendent s'assurer, notamment, que les accusés se présenteront régulièrement à un commissariat de police, que leurs comparutions audit commissariat seront consignées, que des rapports mensuels sur le respect des conditions seront transmis au Tribunal, que les accusés feront l'objet d'une arrestation immédiate en cas de tentative d'évasion ou de violation d'une quelconque condition de leur mise en liberté provisoire. La Chambre de première instance a rejeté l'argument de l'Accusation selon lequel le fait que les accusés risquent de longues peines de prison en cas de condamnation pourrait empêcher leur comparution. La Chambre a simplement refusé qu'une telle éventualité conduise à une présomption d'un risque de fuite. Suivant l'arrêt de la Cour européenne des Droits de l'Homme dans l'affaire Ilijkov,8 elle a ainsi d'avantage attaché d'importance à la volonté des accusés de comparaître au procès. En ce qui
concerne l'argument de l'Accusation selon lequel l'introduction des Requêtes
de liberté provisoire était prématurée parce
que l'Accusation n'avait pas eu la possibilité d'interroger l'accusé
aux termes de l'article 63 du Règlement de procédure et
de preuve (Interrogatoire de l'accusé), la Chambre de première
instance a affirmé que le fait que la procédure de l'article
63 ait été menée ou non «n'a aucune incidence
sur le règlement de cette question» et que, en tout état
de cause, des dispositions pourraient être prises pour interroger
l'accusé au cours de sa liberté provisoire. ________________________________________ |