Communiqué de presse | GREFFE |
(Destiné exclusivement à l'usage des médias. Document non officiel)
CC/PIO/246
plaideront coupable ou non coupable le mercredi 8 octobre 1997
Le Procureur n’a pas participé à des négociations sur l’arrestation et sur le procès
Le Procureur requiert lq jonction des instances
Le Procureur demande aux autorités de la RFY et de Republika Srpska de procéder à de nouvelles arrestations
Le lundi 6 octobre 1997, dix anciens membres d’organes politiques et militaires de l’ancienne communauté croate de Herceg-Bosna se sont livrés au Tribunal pénal pour l’ex‑Yougoslavie (TPIY).
Ils ont été mis en accusation le 10 novembre 1995, sur la base d’une enquête menée par le Bureau du Procureur du TPIY concernant des « persécutions pour des raisons politiques, raciales et religieuses de la population des Musulmans de Bosnie » de la région de la vallée de la Lašva (Bosnie centrale), perpétrées en 1993.
Lors de la prochaine étape de la procédure, celle de la comparution initiale, chacun des accusés devra plaider coupable ou non coupable de chacun des chefs d’accusation retenus contre lui.
Les dix accusés, qui font l’objet de deux actes d’accusation distincts (« Kordić et consorts » et « Kupreškić et consorts ») comparaîtront en deux groupes : d’autres informations concernant leur comparution seront communiquées sous peu.
Pour l’heure, le Bureau du Procureur souhaite faire la déclaration suivante :
« Le Procureur se félicite de la reddition volontaire de dix accusés mis en cause par le Tribunal.
Bien que le Bureau du Procureur n’ait pas pris part aux négociations ou aux entretiens ayant conduit à leur arrestation aujourd’hui, nous souhaitons exprimer notre reconnaissance à tous les acteurs de cette réalisation majeure.
Le Procureur a pris connaissance de divers commentaires et déclarations parus dans les médias ces derniers jours, qui pourraient laisser à penser que son Bureau pourrait être en mesure de débuter le procès de chacun des accusés dans un délai de trois à cinq mois.
Il convient de clarifier la position du Procureur sur ce point. Celui-ci a effectivement déclaré que les conseils des six accusés visés par l’acte d’accusation « Kupreškić » seraient prêts pour le procès dans un délai de trois à six mois. Dans cette déclaration, le Procureur a souligné qu’il appartenait aux juges de ce Tribunal de fixer les dates du procès et qu’il fallait tenir compte du calendrier des audiences concernant d’autres affaires en attente de procès.
Le Procureur a également fait part de sa position aux conseils des accusés placés aujourd’hui sous la garde du Tribunal (Dario Kordić, Mario Čerkez, Ivan Šantić et Pero Skopljak)et il n’a nullement indiqué si son bureau serait prêt pour leur procès au cours de cette même période.
Le Procureur souhaite souligner que la reddition de dix accusés au Tribunal ne signifie pas qu’il y aura dix procès. Ces accusés font l’objet de deux actes d’accusation distincts. Le Procureur a dressé deux actes d’accusation distincts afin que les accusés fassent, dans la mesure du possible, l’objet de procès conjoints. L’un concerne six accusés et l’autre quatre. Ces derniers sont également mis en cause dans l’acte d’accusation concernant Zlatko Aleksovski, qui est actuellement sous la garde du Tribunal et dont le procès va débuter.
Suite à la reddition volontaire de ces accusés, le Procureur entend prendre toutes les mesures en son pouvoir pour que ces affaires soient jugées dans les plus brefs délais.
Le Procureur fait également remarquer que le Gouvernement des États‑Unis d’Amérique a donné l’assurance de son soutien complet au Tribunal et s’est engagé à faire tout son possible pour apporter davantage de ressources au TPIY, afin de lui permettre de mener des procès rapides. Il est évident que le Tribunal aura, dans son ensemble, besoin de ressources supplémentaires pour que les procès qui seront menés dans le cadre de ces affaires débutent dans les plus brefs délais.
Le Procureur exhorte les autorités des Serbes de Bosnie et de la RFY à jouer un rôle similaire à celui des autorités croates, qui ont contribué à rendre possible la reddition de ces dix accusés, afin que les accusés mis en cause sur leur territoire comparaissent devant le Tribunal. Le Procureur demande notamment aux autorités de la RFY de déférer les trois officiers de la JNA qui résident actuellement sur leur territoire et sont mis en accusation avec Slavko Dokmanović, actuellement placé sous la garde du Tribunal à La Haye. Le Procureur exhorte également les autorités serbes de Bosnie à livrer des accusés, dont Radovan Karadžić et Ratko Mladić ».
L’acte d’accusation « Kordić et consorts »
Les accusés qui se sont livrés volontairement au Tribunal sont : Dario Kordić (né le 14 décembre 1960), l’ancien Vice-Président de la communauté croate de Herceg-Bosna (HZ-HB). En tant que tel, il supervisait les attaques lancées contre les civils musulmans de Bosnie du secteur de la rivière Lašva ; Mario Čerkez (né le 27 mars 1959), l’ancien commandant de la brigade de Vitez Brigade du Conseil de défense croate (le "HVO"), les forces armées de la HZ-HB; Ivan Šantić (né en 1942), le maire de Vitez au moment des attaques et Pero Skopljak (né le 4 juin 1943), qui était le chef de la police de Vitez avant de devenir un haut responsable du cabinet de Dario Kordić.
Selon l’acte d’accusation, les crimes dont les accusés doivent répondre ont été commis « sur une échelle si grande et une base si large, et appliquées de façon si systématique » qu’ils ont « effectivement détruit ou éliminé la quasi totalité de la population civile musulmane des régions de la vallée de la Lašva ».
Les crimes allégués dans l’acte d’accusation
Dans l’acte d’accusation, les crimes allégués sont, entre autres, les suivants :
- L’attaque et le pilonnage de villes, de villages et d’habitations non défendues, ayant causé la mort de plus de 100 civils de Bosnie dans la vallée de la Lašva et dans la ville de Zenica, et fait un grand nombre de blessés parmi les civils
- La détention de Musulmans de Bosnie, qui ont été soumis à des interrogatoires cruels et à des sévices physiques ou psychologiques, ou ont été utilisés pour effectuer des travaux forcés (creusement de tranchées) ou comme boucliers humains,
- Les attaques, les bombardements et la destruction d’entreprises, de biens mobiliers, de biens privés et de bétail dans le but de tuer, de terroriser ou de démoraliser les résidents musulmans de Bosnie. Des centaines de civils ont été tués ou blessés en de nombreux lieux tels qu’Ahmići et Vitez.
Chaque accusé est mis en cause sur le fondement de sa responsabilité individuelle. Il est allégué que les accusés ont planifié, incité à commettre, ordonné ou de tout autre manière aidé et encouragé la préparation ou l’exécution des crimes cités dans l’acte d’accusation.
Chacun des accusés est également tenu pénalement responsable des actes de ses subordonnés : il est allégué que les accusés savaient ou avaient des raisons de savoir que des subordonnés s’apprêtaient à commettre ces actes ou l’avaient fait et n’ont pas pris les mesures nécessaires et raisonnables pour empêcher que lesdits actes ne soient commis ou pour en punir les auteurs.
Les chefs d’accusation :
« Par leurs actes ou omissions », les accusés sont mis en cause pour :
- Dario Kordić : crimes contre l’humanité, infractions graves aux conventions de Genève de 1949, violations des lois ou coutumes de la guerre.
- Mario Čerkez : infractions graves aux conventions de Genève de 1949, violations des lois ou coutumes de la guerre.
- Ivan Šantić et Pero Skopljak : une infraction grave aux conventions de Genève de 1949, une violation des lois ou coutumes de la guerre.
L’acte d’accusation « Kupreškić et consorts » :
Les accusés qui se sont livrés au Tribunal sont : Zoran Kupreškić (né le 23 septembre 1958), qui était un soldat du HVO à Ahmići, Mirjan Kupreškić, soldat du HVO à Ahmići, frère de Zoran; Vladimir Šantić (né le 1er avril 1958), qui était un soldat du HVO à Vitez; Drago Josipović (né le 14 février 1955), soldat du HVO à Santići; Marinko Katava (né le 18 novembre 1952), soldat du HVO à Vitez; Dragan Papić (né le 15 juillet 1967), soldat du HVO à Ahmići.
Les crimes reprochés dans l’acte d’accusation
Les accusés sont mis en cause pour leur participation directe présumée à l’attaque systématique lancée au printemps 1993 sur Ahmići, Vitez et huit autres villages de la vallée de la Lašva essentiellement habités par des Musulmans, et au meurtre de civils.
D’après l’acte d’accusation, aux premières heures de la matinée, les forces du HVO, dont faisaient partie les accusés, ont lancé une série d’attaques sur des villes et des villages dans tout la vallée de la rivière Lašva.
Les forces du HVO ont commencé par bombarder les villages à l’aide d’une série d’armes lourdes, comprenant mortiers, fusées et défenses antiaériennes. Des groupes de soldats du HVO sont ensuite allés de maison en maison, tuant et blessant des civils musulmans et, enfin, brûlant les maisons, les granges et le bétail. Après l’attaque des villages, de nombreux civils ont été arrêtés, puis forcés à creuser des tranchées sur les lignes de front.
Les attaques les plus violentes ont été dirigées contre le village d’Ahmići, essentiellement peuplé de Musulmans.
« Le HVO a d’abord pilonné Ahmići à distance, et des groupes de soldats ont ensuite été de maison en maison pour s’en prendre aux civils et à leurs biens à l’aide d’obus traçants inflammables et d’explosifs (…) Toutes les maisons d’Ahmići qui appartenaient à des Musulmans ont été incendiées et beaucoup de civils musulmans non armés ont été délibérément et systématiquement abattus. »
« 103 civils musulmans au moins ont été tués à Ahmići même et dans les environs (…) 33 étaient des femmes et des enfants. Les 176 maisons d’Ahmići appartenant à des Musulmans, ainsi que [deux] mosquée[s], ont été détruite[s]. »
Avant l’attaque lancée le 16 avril, le village comptait 356 Musulmans pour une population totale de 466 personnes. Après l’attaque, il n’y avait plus de Musulmans dans le village. »
Les chefs d’accusation
Les accusés sont mis en cause pour un total de 18 chefs d’infractions graves aux conventions de Genève et de violations des lois ou coutumes de la guerre, à savoir homicide intentionnel, punissable en vertu de l’article 2 a) du Statut; meurtre, punissable en vertu de l’article 3; destruction illégale et arbitraire de biens, sanctionné par l’article
2 d); le fait de causer de grandes souffrances ou de porter des atteintes graves à l’intégrité physique ou à la santé, punissable en vertu de l’article 2 c); une attaque délibérée contre la population civile et la destruction arbitraire d’un village, sanctionnée par l’article 3; un traitement cruel, sanctionnée par l’article 3; le fait de participer à la détention illégale de civils, punissable en vertu de l’article 2 g); et atteinte à la dignité de la personne d’autrui, sanctionnée par l’article 3 du Statut.
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Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie
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