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Le président Milošević et quatre autres hauts responsables de RFY mis en accusation pour meurtre, persécutions et expulsions au Kosovo

Communiqué de presse
GREFFE
(Destiné exclusivement à l'usage des médias. Document non officiel)
 

La Haye, 27 mai 1999
JL/PIU/403-F
 


Le président Milošević et quatre autres hauts responsables de RFY mis
en accusation pour meurtre, persécutions et expulsions au Kosovo

Aujourd’hui, mardi 27 mai 1999, le Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie (TPIY) a rendu public l’acte d’accusation et les mandats d’arrêt des accusés suivants:

- Slobodan Milošević, Président de la République fédérale de Yougoslavie (RFY),
- Milan Milutinović, Président de Serbie,
- Nikola Sainović, le Vice-Premier Ministre de RFY,
- Dragoljub Ojdanić, chef d’état-major de l’Armée yougoslave,
- Vlajko Stojiljkovic, Ministre de l’intérieur de Serbie.

Le 22 mai 1999, le Procureur Louise Arbour avait déposé un acte d'accusation contre les cinq accusés, confirmé par le Juge Hunt le lundi 24 mai 1999. Le Juge Hunt avait autorisé le Procureur à ne pas rendre public l’acte d'accusation et les mandats d’arrêt. Ceux-ci ont été transmis aujourd’hui à midi, ainsi que des ordonnances consécutives à l’acte d’accusation, au Ministère fédéral de la justice de RFY ainsi qu’à tous les États membres des Nations Unies et à la Confédération helvétique.

Les États membres des Nations Unies ont également reçu l’ordre de mener des enquêtes pour savoir si les accusés (ou certains d’entre eux) disposent d’avoirs sur leur territoire et si tel est le cas, de les bloquer jusqu’à ce que les accusés soient mis en détention.

Louise Arbour, dans sa requête auprès du Juge Hunt, précisait que « pour la première fois dans l’histoire du Tribunal, un chef d’État en fonction est mis en accusation  au cours d’un conflit armé, pour la commission d’infractions graves au droit international humanitaire. »

D’après l’acte d'accusation, entre le 1er janvier et la fin du mois de mai 1999, des forces armées placées sous le contrôle des cinq accusés ont persécuté la population civile des Albanais du Kosovo pour des raisons politiques, raciales et religieuses. À la date de confirmation de l’acte d'accusation, plus de 740 000 Kosovars de souche albanaise, soit environ un tiers de la totalité de la population albanaise du Kosovo, avaient été expulsés de la province. Des milliers d’autres auraient été déplacés à l’intérieur de la province. Un nombre indéterminé de Kosovars de souche albanaise ont été tués au cours des opérations menées par les forces de la RFY et de la Serbie. Les cinq accusés doivent en particulier répondre du meurtre de plus de 340 personnes dont les noms figurent en annexe de l’acte d'accusation.

Chacun des accusés est mis en cause pour trois chefs d’accusation de crimes contre l’humanité et un chef de violations des lois ou coutumes de la guerre.

Contexte de l’acte d’accusation

L’acte d'accusation établi contre les accusés a été déposé le 22 mai 1999. Il y est allégué que, entre le 1er janvier et la fin du mois de mai 1999, les forces armées de la République fédérale de Yougoslavie et les forces de police de la Serbie, ainsi que certaines unités de la police de la République fédérale de Yougoslavie et des unités paramilitaires proches de celles-ci auraient lancé de concert, durant cette période, une série d’offensives systématiques et à grande échelle dans la Province autonome du Kosovo, au sud de la  République de Serbie, en RFY, contre un nombre important de villes et villages peuplés en majorité de Kosovars de souche albanaise.

Il est allégué que des centaines de milliers de civils albanais du Kosovo ont été chassés de la Province par la force. Après leur départ, les biens qu’ils avaient laissés derrière eux étaient pillés et les habitations détruites. Dans certains cas, les habitants étaient forcés de partir en raison du bombardement de leurs villages.

Les habitants survivants ont été contraints de se diriger vers les frontières séparant la province des pays avoisinants. Nombre d’entre eux ont été tués sur la route qui conduisait aux postes frontières, ou soumis à des mauvais traitements et les biens qu’ils avaient apportés avec eux leur ont été volés, ainsi que leurs papiers d’identité. L’acte d'accusation fait également état de massacres, survenus dans des villages tels que Račak, Bela Crkva, Velika Kruša, Mali Kruša, Đjakovica, Crkolez et Izbica. 

Ces faits allégués font l’objet des quatre chefs reprochés aux accusés dans l’acte d’accusation, à savoir:
 

Assassinat, un crime contre l’humanité, punissable en vertu de l’article 5(a) du Statut et meurtre, une violation des lois ou coutumes de la guerre, sanctionnée par l’article 3 du Statut (et constituant une violation de l’article 3 des Conventions de Genève de 1949);

  1. Persécutions pour des raisons politiques, raciales ou religieuses, un crime contre l’humanité sanctionné par l’article 5(h) du Statut du Tribunal; et
  2. Expulsion, un crime contre l’humanité, punissable aux termes de l’article 5(d) du Statut du Tribunal.

Chacun des accusés est mis en cause aux termes de leur responsabilité pénale individuelle, en application de l’article 7(1) du Statut. En raison de la haute autorité que leur conférait leurs fonctions, les accusés Milošević, Milutinović, Ojdanić et Stojiljković sont également, ou alternativement, mis en cause sur le fondement de leur responsabilité pénale en tant que supérieurs hiérarchiques aux termes de l’article 7(3) du Statut. Chacun des accusés est présumé pénalement responsable au titre de sa responsabilité juridique et de sa relation de facto avec les forces militaires et les forces de police mentionnées plus haut.

Contexte des ordonnances relatives à l’acte d’accusation

Après avoir confirmé tous les chefs d’accusation, le Juge Hunt a également fait droit à des requêtes déposées par le Procureur, ordonnant en conséquence ce qui suit:

  1. Que des copies conformes des mandats d’arrêt soient transmises:
    1. au Ministre fédérale de la justice de RFY, M. Zoran Knežević, l’autorité la mieux à même d’exécuter ces mandats d’arrêt;
    2. à tous les États membres de l’ONU et à la Confédération helvétique, en application de l’article 55 D) du Règlement de procédure et de preuve;
    3. au Procureur, afin qu’elle puisse s’en servir pour solliciter l’assistance de l’Organisation Internationale de Police Criminelle (INTERPOL).
  2. Que personne ne divulgue l’acte d’accusation, les écritures relatives à son examen et à sa confirmation, les mandats d’arrêt et la requête du Procureur avant aujourd’hui, le jeudi 27 mai 1999, à 12h00, sauf ordre contraire. Ces mesures, prises en application de l’article 53 du Règlement de procédure et de preuve, avaient pour but de garantir la sécurité des personnes au sein de la RFY ou près de celles-ci, tels que le personnel du Bureau du Procureur du TPIY ou d’autres institutions des Nations Unies et des États, ainsi que celui d’organisations humanitaires de la communauté internationale. Le Procureur avait toutefois été autorisé à informer auparavant le Secrétaire général des Nations Unies et les États dont les employés ou les agents risquaient de faire l’objet de représailles ou de manoeuvres d’intimidation.
  3. Que les pièces jointes à l’appui de l’acte d’accusation et communiquées par le Procureur en application de l’article 47 B) du Règlement de procédure et de preuve ne soient pas divulguées avant l’arrestation de tous les accusés, afin de protéger les témoins ayant communiqué ces pièces.
  4. Enfin, comme le prévoient les articles 19(2) du Statut du Tribunal et l’article 54 de son Règlement de procédure et de preuve, que tous les États membres des Nations Unies mènent une enquête afin de savoir si les accusés (ou certains d’entre eux) disposent d’avoirs sur leur territoire et si tel est le cas, qu’ils prennent des mesures conservatoires en vue de bloquer ces avoirs jusqu’à ce que les accusés soient mis en détention. Cette mesure a été prise, sans préjudice des droits de tiers, en raison du fait que la RFY a persisté à ne pas coopérer avec le Tribunal aux fins d’empêcher qu’un accusé qui est encore en liberté n’utilise ses avoirs pour se soustraire à une arrestation.

 


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