Communiqué de presse |
CHAMBRE D'APPEL
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(Destiné exclusivement à l'usage des médias. Document non officiel) |
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La Haye, 21 juillet 2010
AC/MOW/1358f
Arrêt rendu dans l’affaire Haradinaj, Balaj et Brahimaj
Ramush Haradinaj | Idriz Balaj | Lahi Brahimaj
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Aujourd’hui, la Chambre d’appel a annulé en partie l’acquittement de Ramush Haradinaj, ancien commandant de l’Armée de libération du Kosovo (UÇK) dans la zone de Dukagjin, au Kosovo, celui d’Idriz Balaj, ancien membre de l’UÇK et commandant d’une unité spéciale connue sous le nom des « Aigles noirs », et celui de Lahi Brahimaj, commandant adjoint du groupe d’opérations de l’UÇK de Dukagjin. La Chambre d’appel a ordonné que les accusés soient de nouveau partiellement jugés pour certains chefs d’accusation.
D’après l’acte d‘accusation, l’UÇK a persécuté et enlevé des civils soupçonnés de collaborer avec les forces serbes dans la zone de Dukagjin en 1998. Il y est allégué que Ramush Haradinaj, Idriz Balaj et Lahi Brahimaj étaient responsables de crimes perpétrés dans le cadre d’une entreprise criminelle commune dont le but commun était de permettre à l’UÇK d’exercer un contrôle total sur la zone de Dukagjin en expulsant en toute illégalité ces civils et en leur infligeant des mauvais traitements. Le 3 avril 2008, la Chambre de première instance a conclu que les éléments de preuve présentés ne suffisaient pas à établir l’existence d’une entreprise criminelle commune visant à commettre des crimes contre l’humanité et des violations des lois ou coutumes de la guerre. La Chambre de première instance n’a pas tenu les trois accusés responsables pour avoir participé à une telle entreprise. Ramush Haradinaj et Idriz Balaj ont également été acquittés de tous les chefs d’accusation retenus dans l’acte d’accusation à titre subsidiaire. Lahi Brahimaj a été reconnu coupable d’un chef de torture constitutif d’une violation des lois ou coutumes de la guerre et d’un chef de torture et de traitements cruels constitutifs d’une violation des lois ou coutumes de la guerre. Il a été condamné à une peine de six ans d’emprisonnement.
L’Accusation et Lahi Brahimaj ont tous deux interjeté appel du jugement.
Dans son premier moyen d’appel, l’Accusation avançait que la Chambre de première instance avait commis une erreur en ne faisant pas droit à ses requêtes aux fins de bénéficier de temps supplémentaire pour prendre toutes les mesures raisonnables lui permettant d’obtenir le témoignage de deux témoins clés et en ordonnant la clôture de la présentation des moyens à charge avant que de telles mesures raisonnables n’aient été prises. La Chambre d’appel, à la majorité des juges, le Juge Robinson étant en désaccord, a accueilli ce moyen d’appel et ordonné un nouveau procès partiel. La Chambre d’appel a conclu que, prise séparément et en dehors du contexte du procès, chacune des décisions de la Chambre de première instance relative à la déposition des témoins concernés pouvait être considérée comme relevant du pouvoir discrétionnaire de celle-ci, mais que, prises ensemble — compte tenu notamment des intimidations graves de témoins qui ont marqué le procès — ces décisions montraient clairement que la Chambre de première instance avait commis une erreur grave en ne prenant pas les mesures nécessaires pour obtenir la déposition de certains témoins.
Pour ce qui est du deuxième moyen d’appel de l’Accusation, la Chambre d’appel a rejeté l’affirmation de celle-ci selon laquelle la Chambre de première instance a commis une erreur en acquittant Idriz Balaj du fait d’avoir aidé et encouragé le meurtre de trois femmes.
S’agissant du troisième moyen d’appel soulevé par l’Accusation, la Chambre d’appel n’était pas convaincue que la Chambre de première instance avait commis une erreur en déclarant Idriz Balaj non coupable du viol, des traitements cruels et des tortures dont a été victime une femme, après avoir conclu qu’Idriz Balaj était l’homme connu sous le nom de « Toger ». La Chambre d’appel a également infirmé la conclusion de la Chambre de première instance selon laquelle le traitement dont a fait l’objet un témoin protégé n’était pas constitutif de traitements cruels, confirmant toutefois l’acquittement d’Idriz Balaj de ce chef d’accusation.
La Chambre d’appel a rejeté les moyens d’appel 1 et 2 soulevés par Lahi Brahimaj, dans lesquels il faisait valoir que la Chambre de première instance avait commis de nombreuses erreurs dans les conclusions qu’elle a tirée concernant sa responsabilité dans les tortures infligées au témoin 6.
La Chambre d’appel a également rejeté les moyens d’appel 3 à 8 soulevés par Lahi Brahimaj, dans lesquels il formulait de nombreux griefs concernant les conclusions de la Chambre de première instance selon lesquelles il était responsable des tortures et des traitements cruels infligés au témoin 3.
Concernant le moyen d’appel 9, la Chambre d’appel a conclu que l’Accusation n’avait pas présenté les éléments essentiels de l’un des motifs sous-tendant la déclaration de culpabilité pour torture et que la Chambre de première instance a donc commis une erreur parce que Lahi Brahimaj n’avait pas été informé de ce motif sous-tendant la déclaration de culpabilité prononcée contre lui pour torture. Cependant, la Chambre de première instance s’étant appuyée sur plus d’un motif pour déclarer Lahi Brahimaj coupable des tortures infligées au témoin 3, la Chambre d’appel a maintenu la déclaration de culpabilité prononcée à son encontre pour ce chef.
La Chambre d’appel a rejeté les moyens d’appel 10 à 19 soulevés par Lahi Brahimaj, dans lesquels il avançait que la Chambre de première instance avait commis de nombreuses erreurs en décidant, lors de la fixation de la peine, de le condamner à six ans d’emprisonnement.
La Chambre d’appel a ordonné la mise en détention de Ramush Haradinaj, Idriz Balaj et Lahi Brahimaj au quartier pénitentiaire des Nations Unies à La Haye, où ils resteront jusqu’à nouvel ordre.
L’acte d’accusation initial établi contre Ramush Haradinaj, Idriz Balaj, et Lahi Brahimaj a été confirmé le 4 mars 2005. Ramush Haradinaj, ancien Premier Ministre du Kosovo dans le cadre des institutions d’auto-administration démocratiques provisoires prévues par la résolution 1244 (1990) du Conseil de sécurité, avait démissionné de ses fonctions et s’était livré au Tribunal lorsque l’acte d’accusation établi à son encontre lui avait été signifié. Lahi Brahimaj s’était également livré de son gré au Tribunal lorsque l’acte d’accusation lui avait été signifié. Lors de la confirmation de l’acte d’accusation, Idriz Balaj purgeait une peine de treize ans d’emprisonnement au Kosovo, ayant été condamné par un tribunal local. Les trois accusés ont été transférés à La Haye le 9 mars 2005. Le procès s’est ouvert le 5 mars 2007 et les réquisitoire et plaidoiries ont été entendus du 21 au 23 janvier 2008.
Depuis sa création il y a 17 ans, le Tribunal a mis en accusation 161 personnes pour des violations graves du droit humanitaire perpétrées sur le territoire de l’ex-Yougoslavie entre 1991 et 2001. Les procédures à l’encontre de 126 d’entre elles sont closes.
Des procédures sont actuellement en cours concernant 37 personnes, 21 d’entre elles sont actuellement jugées en première instance et 14 devant la Chambre d’appel. Deux accusés, Ratko Mladić et Goran Hadžić, sont toujours fugitifs et recherchés pour être transférés et jugés à La Haye.
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Le texte intégral du résumé de l’arrêt est consultable en anglais à partir du lien suivant:
http://www.icty.org/x/cases/haradinaj/acjug/en/100721_summary.pdf
Fiche informative relative à cette affaire :
http://www.icty.org/x/cases/haradinaj/cis/fr/cis_haradinaj_fr.pdf
Le jugement rendu par la Chambre de première instance est consultable à partir du lien suivant:
http://www.icty.org/x/cases/haradinaj/tjug/fr/080403.pdf
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Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie
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